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N° 1206

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er avril 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à instaurer un rapport annuel sur l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme par la France,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Marietta KARAMANLI, M. Joël AVIRAGNET, M. Fabrice BARUSSEAU, M. Mickaël BOULOUX, M. Elie CALIFER, Mme Colette CAPDEVIELLE, M. Pierrick COURBON, M. Alain DAVID, M. Arthur DELAPORTE, Mme Fanny DOMBRE COSTE, M. Inaki ECHANIZ, M. Olivier FAURE, M. Denis FÉGNÉ, Mme Pascale GOT, M. Guillaume GOUFFIER VALENTE, M. Emmanuel GRÉGOIRE, M. Stéphane HABLOT, Mme Ayda HADIZADEH, Mme Céline HERVIEU, Mme Chantal JOURDAN, M. Emmanuel MAUREL, M. Laurent MAZAURY, Mme Estelle MERCIER, M. Paul MOLAC, M. Jacques OBERTI, Mme Sophie PANTEL, M. Marc PENA, Mme Anna PIC, Mme Léa BALAGE EL MARIKY, Mme Christine PIRÈS BEAUNE, M. Dominique POTIER, Mme Valérie ROSSI, Mme Claudia ROUAUX, Mme Sandrine RUNEL, M. Charles SITZENSTUHL, M. Pouria AMIRSHAHI, Mme Céline THIÉBAULT-MARTINEZ, Mme Mélanie THOMIN,

députées et députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La principale avancée de la Convention européenne des droits de l’homme, signée par la France dès 1950, tient au mécanisme de contrôle de son application par les États parties que constitue la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) ([1]) ([2]).

L’article 34 de la Convention prévoit que la Cour peut être saisie d’une requête par toute personne physique, toute organisation non gouvernementale ou tout groupe de particuliers qui se prétend victime d’une violation par l’une des Hautes Parties contractantes des droits reconnus dans la Convention ou ses Protocoles.

La France a reconnu en 1981 le droit de recours individuel au terme duquel la Cour peut connaître des recours individuels dirigés pour violation des droits protégés par la Convention. Robert Badinter a été un acteur privilégié de cette reconnaissance.

En 2021 le Garde des Sceaux a rappelé, à l’occasion du quarantième anniversaire de l’entrée en vigueur du protocole n° 11 de la Convention, qui ouvre ce recours individuel devant la Cour à 820 millions d’Européens l’importance d’un tel mécanisme de sauvegarde des droits ([3]).

Si des critiques ont pu faites à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme arguant qu’elles mettraient en cause une part de notre souveraineté nationale, il convient, ici, de reconnaître que le recours exercé connaît un succès dans tous les Etats européens ayant reconnu cette compétence à la CEDH.

Au 31 décembre 2024 un peu plus de 60 000 requêtes, 60 350 exactement, étaient en attente de jugement. En 2024, 32 arrêts ont été rendus concernant la France dont 17 constataient une non-violation.

Au fil des ans, celle-ci a dû en garantir le respect et le faire évoluer. Le processus d’exécution reste en effet confronté à d’importants défis, notamment la capacité limitée des États membres à exécuter rapidement les arrêts de la Cour ainsi que le nombre croissant d’affaires particulièrement complexes, parmi lesquelles des affaires interétatiques et des arrêts liés à des situations de conflit.

Par ailleurs, il est essentiel que les citoyens européens puissent comprendre cet élément essentiel du système européen de protection des droits humains, de la démocratie et de l'État de droit et qu’ils puissent lui accorder leur confiance.

Le Conseil de l’Europe a pris un certain nombre d’initiatives afin d’assurer le suivi de l’exécution des décisions de la Cour dans l’ensemble des États membres représentés au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE).

Depuis plusieurs années il engage les parlements nationaux à prendre connaissance de l’application de la convention telle qu’interprétée par la CEDH et à s’en saisir avec pour objectif d’assurer la pleine appropriation des décisions de justice et limiter aussi les recours individuels à la même CEDH dans des affaires nées de la non-conformité des droits nationaux à la convention européenne des droits de l’homme.

L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a ainsi rappelé par plusieurs résolutions et recommandations ([4]) relatives à la mise en œuvre des arrêts de la Cour, l’importance pour les parlements nationaux de s’engager dans le processus de mise en œuvre des « principes fondamentaux du contrôle parlementaire des normes internationales relatives aux droits de l’homme » qu’elle a prônés.

Le contrôle du respect des obligations internationales en matière de droits humains nécessite que les représentants démocratiquement élus soient en mesure d’encourager et de faciliter de manière effective la mise en œuvre complète et rapide des arrêts de la Cour ([5]).

D’ores et déjà d’autres pays voisins assurent un tel suivi. Il en est ainsi de la Belgique ([6]) ou de l’Allemagne. Cette préoccupation, améliorer l’effectivité de la convention européenne des droits de l’homme, peut trouver un appui déterminant dans un dialogue entre le Gouvernement et le Parlement.

C’est la raison de cette proposition dont l’objectif est que l’exécution des décisions de la CEDH donne lieu à une discussion au Parlement chaque année.

 


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proposition de loi

Article unique

Le Gouvernement présente, chaque année, au Parlement, en vue de sa discussion, un rapport sur l’exécution par la France des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme la concernant.

 

 


([1])  Article 46 de la convention européenne des droits de l’homme , « Force obligatoire et exécution des arrêts », 1. Les Hautes Parties contractantes s’engagent à se conformer aux arrêts définitifs de la Cour dans les litiges auxquels elles sont parties. 2. L’arrêt définitif de la Cour est transmis au Comité des Ministres qui en surveille l’exécution… https://www.cncdh.fr/sites/default/files/2022-02/cedh_0_1.pdf 

([2])  Tous les États membres du Conseil de l’Europe soient en l’état 46 États ont ratifié la convention.

([3]) https ://www.courdecassation.fr/files/files/Colloques/CEDH %2040 %20ans %20recours/discours %20CEDH %20GS.pdf

([4])  https://pace.coe.int/fr/files/31772/html

([5])  En 2011 une proposition de loi (n° 3345) à l’initiative M. JeanClaude Mignon et cosignée par M. René Rouquet avait été déposée tendant à présenter au Parlement un rapport annuel sur l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme par la France https ://www.assembleenationale.fr/13/propositions/pion3345.asp

([6])  Rapport annuel 2020 CEDH.pdf