N° 1296

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 avril 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à sanctionner les absences injustifiées à un rendez-vous médical,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Corentin LE FUR,

député.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le non‑respect des rendez‑vous médicaux n’est pas sans conséquence sur le bon fonctionnement de notre système de santé. 

Selon l’ordre des médecins et l’Académie de médecine, chaque semaine, 6 à 10 % des patients ne se présentent pas aux rendez‑vous médicaux qu’ils ont pris. Sur l’année, il est ainsi estimé que 27 millions de consultations ne sont pas honorées en France. 

Ce phénomène, parce qu’il représente une perte de temps considérable pour les praticiens et restreint l’accès aux soins pour d’autres patients, doit être traité. Il le doit d’autant plus que cet absentéisme a des conséquences sur l’ensemble de notre système de santé dans la mesure où il contribue à accentuer le phénomène de saturation de certains services d’urgences. Ces absences sont également très préjudiciables dans les territoires, hélas nombreux, où nous manquons cruellement de médecins. 

C’est pour limiter ce phénomène que l’article 52 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 prévoyait l’instauration d’une pénalité, dite « taxe lapin », afin de sanctionner les absences injustifiées aux rendez‑vous médicaux. 

Bien que pertinente, cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 28 février dernier. Les sages de la rue de Montpensier ont notamment considéré que le législateur n’avait que trop vaguement défini les contours de cette mesure. 

Tout en soulignant que « le législateur a entendu dissuader les comportements de patients qui n’honorent pas leurs rendezvous médicaux et améliorer ainsi la possibilité pour les professionnels de santé de prendre en charge l’ensemble des patients en temps utile » le Conseil constitutionnel considère les dispositions instituant la « taxe lapin » contraires au onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, et ce motif qu’il n’avait pas lui même défini « la nature de la pénalité susceptible de s’appliquer » ni encadré « son montant ainsi que les conditions de sa mise en œuvre »

Face à l’impérieuse nécessité de lutter contre ce phénomène préjudiciable, la présente proposition de loi vise à combler les insuffisances relevées par le Conseil constitutionnel en instituant un cadre légal clair et précis. Elle prévoit d’instituer : 

1. Une pénalité d’un montant de 5 euros en cas de non‑présentation à un rendez‑vous médical ;

2. Une possibilité pour le patient d’annuler son rendezvous jusqu’à 24 heures à l’avance, afin d’éviter l’application de la pénalité ;

3. Une exonération possible en cas de motif impérieux, dont l’appréciation sera laissée à la discrétion des professionnels de santé ;

4. Une liberté laissée aux professionnels d’appliquer ou non cette pénalité, afin de garantir la souplesse et l’adaptation de la mesure aux réalités du terrain.

En apportant une réponse concrète et juridiquement sécurisée à l’absentéisme médical, l’article unique de cette proposition de loi s’inscrit dans une démarche de responsabilisation des patients. Parce qu’honorer un rendez‑vous médical est aussi une question de respect et de savoir‑vivre.

 


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proposition de loi

Article unique

Après l’article L. 1111‑3‑4 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1111‑3‑4‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1111341. – I. – Par dérogation à l’article L. 1111‑3‑4, l’établissement de santé, le service de santé, le centre de santé ou le professionnel de santé exerçant à titre libéral peut exiger du patient le paiement d’une pénalité lorsque le patient ne se présente pas à une consultation ou lorsqu’il annule celle‑ci moins de 24 heures avant la date prévue. 

« Le montant de la pénalité mentionnée à l’alinéa précédent est égal à 5 euros. 

« Cette pénalité ne peut être réclamée lorsque le patient justifie d’un motif impérieux d’ordre personnel, familial ou professionnel ou d’un motif de santé l’empêchant de se présenter à la consultation.

« La recevabilité des motifs impérieux qui permettent aux patients d’être exonérés de ladite pénalité est laissée à la discrétion de l’établissement de santé, du service de santé, du centre de santé ou du professionnel de santé exerçant à titre libéral. 

« Pour pouvoir réclamer cette pénalité, l’établissement de santé, le service de santé, le centre de santé ou le professionnel de santé a préalablement :

« 1° Informé le patient lors de la prise de rendez‑vous que, en cas d’absence ou d’annulation tardive, une pénalité peut lui être appliquée, sauf s’il justifie d’un des motifs mentionnés au deuxième alinéa ou s’il a annulé le rendez‑vous dans le délai mentionné au premier alinéa ;

« 2° Rappelé au patient la date et l’horaire de la consultation au moins une fois avant la date de celle‑ci.

« L’établissement de santé, le service de santé, le centre de santé ou le professionnel de santé peut subordonner la prise de rendez‑vous à une préautorisation bancaire permettant le paiement de la pénalité.

« Les outils et les services numériques utilisés par l’établissement de santé, le service de santé, le centre de santé ou le professionnel de santé pour mettre en œuvre le présent article respectent les référentiels mentionnés à l’article L. 1470‑5. »