N° 1316

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 avril 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à conditionner l’obtention du permis de conduire à une formation aux premiers secours ainsi qu’à rendre la trousse de secours obligatoire dans chaque véhicule,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Christelle D’INTORNI, M. Alexandre ALLEGRET-PILOT, M. Bernard CHAIX, M. Éric MICHOUX, Mme Sandrine DOGOR-SUCH, Mme Michèle MARTINEZ,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La sécurité routière demeure un enjeu de sécurité publique majeur en France. Les conséquences des accidents de la route restent dramatiques, tant sur le plan humain qu’économique. Selon les données de l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR), en 2024, près de 3 190 personnes sont décédées sur les routes de France Métropolitaine et plus de 233 000 blessés ont été recensés.

Ces accidents engendrent des coûts sociaux et économiques qui se chiffrent à plusieurs dizaines de milliards d’euros par an, affectant directement notre système de santé et la compétitivité économique du pays.

Face à cette situation, il apparaît essentiel de renforcer la prévention et la capacité d’intervention immédiate en cas d’accident, la survie des victimes dépendant en grande partie du délai d’intervention, notamment durant la « golden hour », première heure cruciale après l’accident.

Une intervention rapide par des témoins formés permet de limiter la morbidité et la mortalité en assurant une prise en charge immédiate avant l’arrivée des moyens de secours professionnels.

Au‑delà de la diminution du nombre de décès et de la sévérité des blessures, une intervention prompte et efficace contribue à réduire les coûts de santé et les indemnisations liés aux accidents.

Assurer la formation aux premiers secours de l’ensemble des conducteurs constituerait ainsi une mesure prophylactique d’intérêt social et économique. Une telle mesure renforcerait la culture préventive et inciterait les conducteurs à adopter une attitude responsable, tout en contribuant à réduire l’impact des comportements à risque, qui jouent un rôle prépondérant dans près de 90 % des accidents mortels et sont majoritairement imputables à des facteurs humains.

Il s’agirait ainsi d’un investissement éducatif sur le long terme, en phase avec la volonté de promouvoir une conduite « citoyenne » où chaque usager de la route est considéré comme un acteur de la sécurité routière. Un dispositif qui s’inscrit dans le cadre des récentes orientations du Code de la route et des débats sur la modernisation de la sécurité routière en complément des mesures déjà imposées telles que l’obligation de détention d’un gilet de haute visibilité et d’un triangle de présignalisation.

Dans plusieurs pays européens, tels que l’Allemagne, l’Autriche ou encore la Belgique, la formation aux gestes de premiers secours est déjà un préalable obligatoire à l’obtention du permis de conduire. Ces pays exigent, par exemple, une vingtaine d’heures de formation afin d’assurer que chaque conducteur soit capable d’agir et réagir efficacement en cas d’urgence. La France, quant à elle, ne rend pas une telle formation systématique, malgré l’existence de formations reconnues comme le PSC1 (premiers secours citoyen), en application de l’arrêté du 24 juillet 2007.

De surcroît, même lorsqu’un individu dispose des compétences nécessaires pour intervenir, l’absence de matériel adapté – comme une trousse de premiers secours – rend ces compétences inopérantes.

Si l’article R. 416‑19 du code de la route dispose que tout conducteur doit être équipé d’un triangle de présignalisation et d’un gilet de haute visibilité dans son véhicule, celui‑ci ne prévoit pas d’obligation concernant une trousse de secours composée des éléments essentiels tels que des gants, compresses stériles, pansements, désinfectant, ciseaux et une couverture de survie. Seule exception étant l’article R4224‑14 du code du travail qui prévoit que certains véhicules professionnels doivent être équipés d’une trousse de premiers secours, mesure qui ne s’applique pas aux véhicules destinés aux particuliers.

Encore une fois, la France apparaît en retard en comparaison de ses voisins européens, l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Bulgarie, la Croatie, la Grèce, Malte, la République Tchèque ou encore la Slovénie qui sont autant de pays où la loi impose la présence d’une trousse de secours dans tout véhicule. Le coût moyen d’une trousse de secours, constituée des essentiels, est d’environ 20 euros, un investissement minime au regard des bénéfices potentiels en termes de vies sauvées et de réduction des séquelles.

En conclusion, considérant les données statistiques ainsi que les exemples européens, il apparaît urgent et nécessaire de prendre des mesures concrètes pour renforcer la sécurité routière en France. Ainsi, la présente proposition de loi s’inscrit ainsi dans une logique de prévention globale et vise à responsabiliser l’ensemble des usagers de la route par la mise en œuvre d’une double mesure :

1. conditionner l’obtention du permis de conduire à l’obtention d’une formation aux premiers secours ;

2. rendre obligatoire la détention d’une trousse de premiers secours dans les véhicules personnels.

Cette réforme du code de la route renforcerait la réactivité des interventions sur les lieux d’accidents, réduirait la mortalité et la morbidité, et contribuerait à diminuer les coûts socio‑économiques liés à l’accidentalité routière, tout en affirmant une politique de sécurité routière fondée sur la prévention, la solidarité et la responsabilité citoyenne.

Ainsi, l’article 1er vise à réformer l’article L. 221‑4‑1. pour conditionner l’obtention du permis de conduire à la délivrance préalable d’un certificat de formation aux gestes de premiers secours.

L’article 2 de cette proposition de loi vise quant à lui à modifier l’article L. 416‑2 du code de la route pour y ajouter l’équipement d’une trousse de secours à tout véhicule particulier, laquelle serait constituée des indispensables suivants : gants, compresses stériles, pansements, désinfectant, ciseaux et une couverture de survie. Tel est l’objet de la présente proposition de loi.

 


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proposition de loi

Article 1er

Après l’article L. 221‑4 du code de la route, il est inséré un article L. 221‑4‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 22141. – La délivrance du permis de conduire est subordonnée à la présentation d’un certificat de formation aux gestes de premiers secours, délivré par un organisme agréé. Les modalités de cette formation et les conditions de délivrance du certificat sont déterminées par décret en Conseil d’État. »

Article 2

Le chapitre 6 du titre 1er du livre 4 du code de la route est complété par un article L. 416‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 4161. – Tout véhicule à moteur circulant sur la voie publique doit être équipé d’une trousse de premiers secours. Un décret en Conseil d’État précise la composition minimale de cette trousse ainsi que les modalités de contrôle de sa présence. »

Article 3

Les infractions aux obligations prévues aux articles L. 221‑4‑1 et L. 416 du code de la route sont punies des peines prévues pour les contraventions de première classe.