N° 1503
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 juin 2025.
PROPOSITION DE LOI
relative à la protection des entreprises stratégiques d’intérêt national,
(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Charles FOURNIER, Mme Cyrielle CHATELAIN, Mme Christine ARRIGHI, Mme Lisa BELLUCO, M. Karim BEN CHEIKH, M. Steevy GUSTAVE, M. Tristan LAHAIS, Mme Marie POCHON, Mme Sandra REGOL, Mme Sabrina SEBAIHI,
députés et députées.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Gandrange, Florange, Whirlpool, Arjowiggins, MBF Aluminium, Valdunes, etc. autant de noms devenus les symboles d’une casse sociale et industrielle ininterrompue depuis des décennies en France. La liste est longue et ne cesse de s’allonger malgré les promesses de réindustrialisation. Depuis le mois de septembre 2023, les plans de suppressions d’emplois s’enchaînent dans les entreprises ; 300 000 emplois sont ainsi menacés partout en France pour un total de 362 plans sociaux en ce mois de mai, selon les chiffres de la Confédération générale du travail (CGT). Le nombre de personnes ayant perdu leur emploi dans le cadre d’un plan de sauvegarde pour l’emploi a explosé de 131,1 % en 2024 avec 23 800 ruptures de contrat rien que pour le troisième trimestre ; des chiffres inquiétants auxquels s’ajoutent les impacts plus insidieux des suppressions d’emplois par ruptures conventionnelles et licenciements à bas bruit Ces chiffres témoignent d’une véritable année noire pour les emplois en France en 2024, qui se poursuit cette année encore avec l’accélération des fermetures de sites et l’accumulation de menaces pour la pérennité de notre industrie et la nécessaire bifurcation écologique de notre économie. Les annonces de délocalisations d’unités de production dans des pays employant une main‑d’œuvre à bas coût se multiplient, chez le fabricant franco‑italien de composants électroniques et de semi‑conducteurs StMicroelectronics, des usines emblématiques ferment, comme les sites Michelin à Cholet et Vannes, des activités industrielles stratégiques sont menacées ; hier Vencorex pour la chimie ou encore Doliprane, passé sous pavillon étranger, et aujourd’hui chez ArcelorMittal pour l’acier.
De l’acier à la chimie, l’industrie européenne fait face à une demande déprimée sur des marchés inondés de produits à bas prix, à fort impact négatif environnemental et social, en provenance d’Asie notamment. Pénalisées par un coût de l’énergie qui a explosé en Europe avec l’agression de l’Ukraine par la Russie et récemment par la hausse des tarifs douaniers américains sur l’acier, les entreprises de secteurs industriels stratégiques multiplient les délocalisations et démantèlements, faisant craindre de nouvelles vagues de désindustrialisation en France et en Europe. La sidérurgie est ainsi entrée dans une crise majeure ; un tiers du marché européen est servi par des aciers importés, en particulier de Chine, qui a exporté dans l’Union européenne 100 à 120 millions de tonnes d’acier en 2024. Face à cette crise, les groupes sidérurgistes européens se restructurent ; en Allemagne Thyssenkrupp a annoncé au mois de novembre dernier son intention de supprimer 11 000 emplois d’ici à 2030, soit 40 % de ses effectifs. En France, ArcelorMittal annonçait en novembre 2024 son intention de fermer deux usines à Reims et à Denain, entraînant la suppression de 135 emplois. Treize ans après la fermeture des derniers hauts fourneaux de Moselle, ArcelorMittal vient d’annoncer au mois d’avril la suppression de 636 postes dans plusieurs sites du nord et de l’est de la France. Alors que l’acier constitue la matière de base de bien des produits industriels et se retrouve partout dans les objets du quotidien, dans nos voitures, nos appareils ménagers, nos bâtiments ou encore nos éoliennes, les entreprises dominantes du secteur tirent la sonnette d’alarme et préviennent que tous les sites européens d’acier sont à risque de fermeture en 2025. Demain, la France et l’Europe pourraient alors ne plus disposer de capacités de production d’acier, ouvrant la porte à une dépendance structurelle aux importations extérieures, tout en aggravant les vulnérabilités de nombre de secteurs industriels qui en aval en dépendent, comme l’automobile, la sécurité et la défense, les infrastructures énergétiques, ou les transports.
Les menaces de nouvelles vagues de désindustrialisation ravivent les souvenirs difficiles laissés par les fermetures successives de fleurons industriels dans les territoires : perte d’emplois directs, mais aussi indirects, par effet domino, dans les services publics locaux, chez les prestataires de services, les sous‑traitants… c’est tout l’écosystème économique local qui est impacté, appauvri, dégradé. Les plans de licenciement affectent les emplois, mais vident aussi les régions de leur attractivité, de leurs commerces de proximité, alimentent un processus de désertification et un sentiment d’abandon chez les travailleurs et les territoires, moteurs de notre tissu industriel. L’autre pendant de cette désindustrialisation, c’est la possibilité bien réelle d’une perte de souveraineté industrielle et énergétique de la France, entraînée par la fuite des capitaux vers l’étranger, la disparition de l’outil de production et des savoir‑faire.
Cette lente agonie est le résultat de décisions imposées par des multinationales, en position dominante sur des pans entiers de nos secteurs industriels stratégiques, qui, guidées par la recherche de profits pour leurs actionnaires, choisissent sciemment de délocaliser et démanteler leurs sites français pour s’établir dans des pays tiers à faible coût de main‑d’œuvre, après avoir bénéficié d’aides publiques avantageuses et de soutien financier public massif, pourtant voués à créer de la valeur ajoutée et des emplois en France. À titre d’exemple, en 2023, STMicroelectronics a ainsi reçu 487 millions d’euros d’aides publiques, dont 68 % de subventions à l’investissements et à l’innovation, 25 % au titre du crédit impôt recherche, et 7 % sous forme d’allègements de cotisations sociales. De 2013 à 2023, ArcelorMittal a bénéficié quant à elle de 392 millions d’euros d’aides publiques, tout en ayant distribué ces dernières années environ 400 millions d’euros de dividendes par an,réalisé plus d’un milliard de bénéfices en 2024, et achevé un plan de rachat de 85 millions d’actions. Alors que l’activité sidérurgique est largement soutenue financièrement par la France et par l’Union européenne, y compris avec la publication d’un « Plan acier » à la mi‑mars 2025, qui bien qu’insuffisamment dissuasif pour prévenir les fuites de carbone, prévoit entre autres de protéger le marché européen contre les importations d’acier chinois surcapacitaire et massivement subventionné ; le géant du secteur ArcelorMittal continue d’organiser sa propre concurrence, conduisant à la dégradation et la fermeture de sites en France. L’entreprise développe des capacités substantielles de production d’acier au Brésil et en Inde, où elle entrevoit un doublement de ses capacités d’ici la fin de la décennie, construit des hauts‑fourneaux à Hazira, dans l’État du Gujarat, tout en freinant ses investissements dans la décarbonation et dans les infrastructures ici en France, qui conduisent alors à les déprécier, en témoignent l’incendie du haut‑fourneau 4 ou les toitures non étanches au‑dessus des convertisseurs sur le site de Dunkerque.
Face à ces plans sociaux à répétition et à ces désinvestissements dans l’outil productif, l’État ne joue pas son rôle de garant pour maintenir le tissu industriel et les emplois. Face à la décision du géant ArcelorMittal, le ministre de l’industrie prévient qu’il sera « exigeant » tout en se contentant de négocier les contours du plan social, de « discuter de son périmètre (et) d’éventuelles marges de manœuvre pour réduire son ampleur, avec des mesures de reclassement et des possibilités de formation qui seront données aux salariés ». Ces plans sociaux à répétition illustrent les carences des pouvoirs publics à la fois dans la gestion des montants des aides publiques versées chaque année à ces grandes entreprises mais aussi dans l’adaptation aux stratégies économiques déployées pour maximiser leurs profits au détriment du maintien de l’emploi. Sur ArcelorMittal, le gouvernement renvoie à l’exécutif européen le soin d’organiser la protection de nos capacités industrielles. Lors de son allocution présidentielle le 14 mai 2025, le Président de la République a confirmé qu’il misait sur les clauses de sauvegarde appliquées par l’Union européenne, consistant à taxer les importations d’acier au‑delà d’un certain quota, pour mettre en place une politique industrielle qui protège. Néanmoins, ces mesures de sauvegarde pour faire face à la hausse des importations d’acier dans l’UE sont déjà appliquées depuis 2019, et n’ont de toute évidence pas suffisamment contribué à enrayer les suppressions d’emplois et les délocalisations, puisque les activités sidérurgiques européennes se retrouvent aujourd’hui plus que jamais menacées de disparition. Plusieurs fois par le passé déjà, les tentatives d’intervention de l’État se sont soldées par des échecs ; en 2009 le Président de la République n’a pas empêché la fermeture de l’aciérie Gandrange en Moselle, et son successeur en 2013 n’a pas pu remédier à la fermeture des deux derniers hauts‑fourneaux de Lorraine.
Pourtant, la disparition dans nos territoires d’activités industrielles stratégiques n’est pas une fatalité ; de nouveaux mécanismes peuvent être créés pour assurer leur maintien en France en cas de menace grave pour leur existence. Face aux logiques financières des entreprises, aux logiques impérialistes, identitaires et belliqueuses de la Chine, la Russie ou les États‑Unis, il est encore temps et urgent de réagir pour que la France bâtisse une souveraineté positive ; à savoir, qu’elle récupère la maîtrise démocratique de ses dépendances et de ses indépendances, puisse décider de manière libre et éclairée des secteurs stratégiques sur lesquels elle souhaite conserver la mainmise, et ceux pour lesquels elle consent à bâtir des coopérations justes, efficaces socialement et écologiquement. À l’instar du Parlement britannique qui a récemment légiféré pour prendre le contrôle du site de Scunthorpe et de ses hauts‑fourneaux dans le nord du pays, propriété de British Steel sous pavillon chinois et menacés de fermeture, la France peut, et doit, elle aussi garantir la mise sous gestion publique exceptionnelle et temporaire des entreprises ou établissements dont la disparition nuirait aux intérêts de la Nation. D’autres pays l’ont fait ; sur l’acier, le Kazakhstan a nationalisé fin 2023 la filiale locale d’ArcelorMittal par le biais d’un fonds public, en Italie le gouvernement a mis sous tutelle l’aciérie de Tarente dont ArcelorMittal est l’actionnaire principal en substituant à la direction un commissaire de son choix. Et d’autres pays continuent de le faire pour bien d’autres entreprises de secteurs industriels stratégiques, comme l’Allemagne, qui, en réponse à la crise énergétique a nationalisé le géant du gaz Uniper en 2022, ou la Pologne qui depuis 2015 reprend en main ses entreprises stratégiques dans les secteurs bancaire, énergétique et industriel acquises par le biais d’entreprises publiques.
Dans ce contexte, la France accuse un retard certain en n’ayant pas amorcé de changement de paradigme, pour à la fois garantir la maîtrise de ses industries stratégiques et assurer leur durabilité en adéquation avec les limites planétaires. Il n’existe aujourd’hui aucun mécanisme facilitant la reprise d’entreprises par ses salariés ou permettant de contraindre une entreprise à maintenir son activité et les emplois associés sur le territoire français ; seul le décret Montebourg de 2014 a jeté les bases de la protection du patrimoine industriel français, en régulant les prises de participation étrangères dans des entreprises stratégiques. Hors rachats par des puissances étrangères, le droit français reste silencieux pour plusieurs autres situations pouvant mettre en péril la continuité de notre politique industrielle ou de défense nationale : procédure collective de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou liquidation judiciaire, arrêt substantiel d’activité ou menace imminente d’arrêt substantiel d’activité, transfert ou menace imminente de transfert d’actifs essentiels au fonctionnement de l’entreprise, entraînant de fait des suppressions d’emplois.
Cette proposition de loi s’appuie sur la situation d’ArcelorMittal mais entre en résonance avec un ensemble de cessations substantielles d’activité, plans de sauvegarde de l’emploi et fermetures de sites, qui se sont multipliées ces dernières années, en ayant vocation à protéger les activités économiques et industrielles stratégiques qui seraient menacées de cette même façon à l’avenir. La proposition s’inspire ainsi d’un ensemble de mécanismes d’intervention publique existant au Royaume‑Uni, avec la prise en main par le gouvernement britannique des deux derniers hauts‑fourneaux de British Steel sur le site de Scunthorpe, afin de créer les conditions en France d’un interventionnisme similaire ; à savoir une procédure de gestion publique exceptionnelle permettant à l’État de continuer l’activité d’une entreprise jugée d’intérêt national, sans en acquérir la propriété, en préservant ses emplois et sa production, par l’apport d’un soutien financier adéquat, tout en cherchant une solution pérenne de reprise. Cette procédure de gestion publique exceptionnelle initie un changement majeur dans la réponse donnée par la puissance publique aux décisions unilatérales de multinationales sur son sol ; en permettant l’administration temporaire par l’État d’activités en cas de menace pour la vulnérabilité externe de l’économie de la nation ou le maintien d’activités économiques et industrielles essentielles aux intérêts de celle‑ci, et ce afin d’assurer la préservation de savoir‑faire, d’infrastructures ou de technologies non substituables à court terme.
L’article 1er de cette proposition de loi vise ainsi à définir les entreprises considérées comme stratégiques au sens de la présente loi, pouvant bénéficier de la procédure de mise sous gestion publique exceptionnelle.
L’article 2 prévoit la mise en place d’une procédure de mise sous gestion publique exceptionnelle, à savoir une administration temporaire par l’État, pour les entreprises et établissements stratégiques, en cas d’ouverture d’une procédure collective de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou liquidation judiciaire, d’arrêt substantiel d’activité ou menace imminente d’arrêt substantiel d’activité ou de suppressions d’emplois, de transfert ou menace imminente de transfert d’actifs essentiels à leur fonctionnement, et de projet d’investissement étranger, afin d’assurer la préservation de savoir‑faire, d’infrastructures ou technologies non substituables à court terme, la réduction de la vulnérabilité externe de l’économie de la nation ou le maintien d’activités économiques et industrielles essentielles aux intérêts de la nation.
Il est notamment prévu les cas dans lesquels la gestion publique exceptionnelle prend fin, soit ; au terme de la conclusion d’un accord entre l’administrateur public spécial et la personne morale contrôlant l’entreprise ou l’établissement, d’une cession volontaire approuvée par l’administrateur public spécial, de l’établissement d’un plan de cession ou continuation ordonné par le tribunal de commerce, ou par l’adoption d’une loi de nationalisation.
L’article 3 porte sur la nomination et les pouvoirs de l’administrateur public spécial, désigné par le Premier ministre pour chaque procédure de gestion publique exceptionnelle engagée et placé sous la tutelle du ministère de l’économie. L’administrateur public spécial organise des consultations avec les institutions représentatives du personnel, représentants des organisations syndicales représentatives du personnel et les collectivités territoriales, et rend compte au Parlement de l’évolution de la situation.
L’article 4 vise la création d’un fonds souverain de sauvegarde industrielle chargé de financer les entreprises et établissements stratégiques placés sous gestion publique exceptionnelle.
L’article 5 vise à gager les coûts de la proposition de loi.
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proposition de loi
Article 1er
I. – Sont considérées comme stratégiques, au sens de la présente loi, les entreprises et établissements :
1° Exerçant une des activités mentionnées à l’article L. 151‑3 du code monétaire et financier ;
2° Relevant de secteurs essentiels à la souveraineté industrielle, énergétique, numérique, alimentaire, sanitaire ou à la défense nationale ;
3° Employant un nombre significatif de salariés dans des zones à faible densité industrielle ou en reconversion économique ;
4° Ou disposant de savoir‑faire, infrastructures ou technologies jugés non substituables à court terme.
II. – Un décret en Conseil d’État fixe la liste des secteurs visés au 2° du I et le seuil en nombre de salariés et les zones visées au 3° du I, sur avis du haut‑commissariat au plan et du comité interministériel de restructuration industrielle.
I. – En cas d’ouverture d’une procédure collective de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire prévus par le livre VI du code de commerce, d’arrêt substantiel d’activité ou de menace imminente d’arrêt substantiel d’activité, de transfert ou de menace imminente de transfert d’actifs essentiels au fonctionnement de l’établissement ou de l’entreprise, de projet d’investissement étranger soumis à la procédure d’autorisation au sens du I de l’article L. 151‑3 du code monétaire et financier, le Premier ministre, par décret pris en conseil d’État après avis conforme du comité interministériel de restructuration industrielle, peut décider de placer sous gestion publique exceptionnelle, pour une durée maximale de vingt‑quatre mois renouvelable une fois, les entreprises et établissements stratégiques mentionnés à l’article 1 de la présente loi.
II. – La procédure de gestion publique exceptionnelle définie au premier alinéa n’emporte pas transfert de propriété et n’est pas une nationalisation. Elle a pour objet l’administration temporaire par l’État dans le but d’assurer la préservation de savoir‑faire, infrastructures ou technologies non substituables à court terme, la réduction de la vulnérabilité externe de l’économie de la nation ou le maintien d’activités économiques et industrielles essentielles aux intérêts de la nation au sens de l’article 410‑1 du code pénal.
III. – La procédure de gestion publique exceptionnelle définie au premier alinéa prend fin dans les cas suivants :
1° Conclusion d’un accord entre l’administrateur public spécial et la personne morale contrôlant l’entreprise ou l’établissement satisfaisant les objectifs visés par le II ci‑dessus ;
2° Cession volontaire de tout ou partie de l’entreprise ou de l’établissement ou de la personne morale la contrôlant, approuvée par l’administrateur public spécial ;
3° Plan de cession ou de continuation ordonné par le tribunal de commerce dans le cadre de la procédure collective, approuvé par l’administrateur public spécial ;
4° Adoption d’une loi de nationalisation.
IV. – Les personnes morales contrôlant les entreprises et établissements ayant fait l’objet d’une procédure de gestion publique exceptionnelle définie au premier alinéa du présent article peuvent percevoir une indemnisation dont le montant est défini par décret en Conseil d’État.
I. – Pour chaque procédure de gestion publique exceptionnelle décidée sur la base du premier alinéa de l’article 2 de la présente loi, le Premier ministre nomme un administrateur public spécial, placé sous la tutelle du ministre chargé de l’économie.
II. – L’administrateur public spécial dispose des pouvoirs suivants :
1° Ordonner à la personne morale contrôlant l’entreprise ou l’établissement de prendre de toute mesure décidée par l’administrateur qui est nécessaire à l’approvisionnement en matières premières, au maintien des contrats et des relations commerciales en cours, au maintien de l’activité industrielle et de l’emploi et à la réalisation des objectifs visés au II de l’article 2 ;
2° En cas de défaillance de la personne morale, se substituer à son représentant légal pour prendre directement toute mesure visée au 1° au nom et pour le compte de la personne morale, ou procéder directement aux achats de biens et services nécessaires à la continuité de l’exploitation pour le compte de la personne morale ;
3° Négocier avec les créanciers, fournisseurs et potentiels repreneurs pour préparer et mettre en œuvre les opérations visées au 1° et 2° ci‑dessus et au III de l’article 2.
L’administrateur rend compte au Parlement tous les six mois de l’évolution de la situation.
II. – L’administrateur public spécial désigné organise, pendant toute la durée de la procédure, des consultations avec les institutions représentatives du personnel, les représentants des organisations syndicales représentatives du personnel et les collectivités territoriales concernées.
Article 4
I. – Un fonds souverain de sauvegarde industrielle, alimenté par l’État, BPIfrance, la Banque des territoires et la Caisse des dépôts et consignations, est chargé de financer les entreprises mentionnées à l’article 1er placées sous gestion publique exceptionnelle.
II. – Ce fonds peut accorder des prêts‑relais, entrer temporairement au capital et financer des plans de transition industrielle.
III. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de création de ce fonds.
Article 5
La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.