N° 1632
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 juin 2025.
PROPOSITION DE LOI
visant à rendre obligatoire le port d’une arme par les policiers municipaux pour les communes de plus de 5 000 habitants,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
Mme Hanane MANSOURI, M. Jonathan GERY, M. Kévin MAUVIEUX, Mme Julie LECHANTEUX, M. Bartolomé LENOIR, Mme Sophie RICOURT VAGINAY, M. Sébastien CHENU, M. Alexandre ALLEGRET-PILOT, M. Emmanuel FOUQUART, M. Éric MICHOUX, Mme Stéphanie GALZY, M. Olivier FAYSSAT, M. Bernard CHAIX, Mme Géraldine GRANGIER, Mme Laure LAVALETTE, M. Maxime MICHELET, Mme Brigitte BARÈGES, M. Bruno BILDE, M. Matthieu BLOCH, M. Marc CHAVENT, M. Serge MULLER,
députées et députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En 2023, la France comptait environ 28 000 policiers municipaux, dont plus de 77 % étaient armés, répartis dans plus de 3 000 communes. Cette proportion, en hausse continue, traduit une prise de conscience croissante des enjeux sécuritaires auxquels nos collectivités sont confrontées. En une décennie, la part des policiers municipaux équipés d’une arme de poing est passée de 38 % à 58 %, confirmant cette dynamique d’armement progressif.
Pourtant, certaines grandes villes, comme Paris ou Grenoble ont fait le choix de ne pas armer leurs agents municipaux. Ces décisions, bien que légitimes à l’époque où elles ont été prises, apparaissent aujourd’hui en décalage avec la dégradation du contexte sécuritaire : montée de la délinquance violente, agressions contre les représentants de l’autorité, tensions sociales récurrentes. Depuis les attentats terroristes de 2015, la France est confrontée à une pression croissante sur l’ordre public, la tranquillité locale et la sécurité des personnes.
Le cadre juridique actuel, défini à l’article L. 511‑5 du code de la sécurité intérieure, prévoit que le port d’arme des policiers municipaux est facultatif et soumis à une autorisation nominative du représentant de l’État, sur demande motivée du maire, et dans le cadre d’une convention de coordination avec les forces de sécurité de l’État (articles L. 512‑4 et L. 512‑6 du code de la sécurité intérieure). Ce dispositif, conçu pour garantir une coordination entre forces locales et nationales, montre aujourd’hui ses limites : inégalement appliqué, il crée une hétérogénéité préoccupante des conditions d’intervention selon les territoires.
Dans de nombreuses situations récentes, l’absence d’armement a mis en lumière la vulnérabilité des policiers municipaux, notamment lors d’agressions extrêmes, d’émeutes urbaines ou de violences de rue, comme en témoignent les événements consécutifs au décès de Nahel Merzouk en 2023, l’incendie de la synagogue de La Grande‑Motte en 2024, ou encore les débordements à Paris lors des célébrations sportives de juin 2025. Cette fragilité opérationnelle pèse non seulement sur la sécurité des agents, mais aussi sur leur capacité d’intervention et leur attractivité professionnelle.
La présente proposition de loi vise à rendre obligatoire l’armement des policiers municipaux dans les communes de plus de 5 000 habitants, sous réserve d’une formation préalable adaptée et d’un encadrement juridique strict (conformément aux articles L. 511‑5‑1 et L. 511‑6 du code de la sécurité intérieure, relatifs à la formation et à la doctrine d’emploi des agents armés).
Le seuil de 5 000 habitants recoupe les communes disposant déjà d’une police municipale, avec des enjeux de sécurité locaux significatifs, et se montre juridiquement cohérent avec d’autres seuils retenus dans la législation (urbanisme, équipements publics, fiscalité locale) qui reconnaissent une montée en charge des responsabilités à partir de cette taille critique. Ce seuil permet donc de protéger les communes rurales, tout en répondant aux besoins concrets des collectivités urbaines déjà exposées à une délinquance plus structurée. Il s’agit d’une mesure de sécurité publique et d’égalité républicaine, visant à harmoniser les pratiques, à renforcer la capacité de réaction des polices municipales, et à rétablir l’autorité de proximité dans les territoires.
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proposition de loi
Article 1er
Le chapitre Ier du titre Ier du livre V du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa de l’article L. 511‑1, sont ajoutés les mots : « Dans les communes non mentionnées à l’article L. 511‑5‑1‑1, » ;
2° La section 4 est complétée par les articles L. 511‑5‑1‑1 et L. 511‑5‑1‑2 ainsi rédigés :
« Art. L. 511‑5‑1‑1. – I. – Les agents de police municipale exerçant dans les communes de plus de 5 000 habitants sont dotés d’une arme, sous réserve de la conclusion d’une convention de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l’État, prévue par la section 2 du chapitre II du présent titre.
« Un décret en Conseil d’État détermine les catégories et les types d’armes susceptibles d’être portés par les agents mentionnés au premier alinéa du présent I et les conditions de leur utilisation, ainsi que leurs conditions d’acquisition et de conservation par la commune. Il précise aussi les modalités de l’examen médical et psychologique préalable obligatoire des agents ainsi que les modalités de leur formation.
« II. – À titre exceptionnel, en cas de circonstances locales particulières incompatibles avec l’ armement des agents, le maire peut solliciter une dérogation motivée auprès du représentant de l’État dans le département.
« Art. L. 511‑5‑1‑2. – Les agents de police municipale autorisés à porter une arme selon les modalités définies à l’article L. 511‑5‑1‑1 peuvent faire usage de leurs armes dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 435‑1 et dans les cas prévus au 1° du même article L. 435‑1. »
Article 2
Les dépenses liées à l’acquisition des armes et à la formation des agents liées à l’armement obligatoire des policiers municipaux sont prises en charge par l’État, selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État.
Article 3
I. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur le tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
II. – La charge pour les collectivités est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.