N° 1781
_____
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 septembre 2025.
PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE
tendant à abroger la loi constitutionnelle n°2000 964 du 2 octobre 2000 relative à la durée du mandat du Président de la République et à instaurer un septennat non renouvelable,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Emmanuel MANDON,
député.
– 1 –
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La loi constitutionnelle n° 2000‑964 du 2 octobre 2000 relative à la durée du mandat du Président de la République a abrogé la règle du septennat, institué en 1873, alors que l’incertitude régnait encore sur la pérennité du régime républicain, et qui s’était, depuis, inscrit dans notre tradition institutionnelle.
Le général de Gaulle a souhaité donner au septennat un fondement plus durable que le compromis politique qui avait présidé à son institution. Dès le discours qu’il prononça à Bayeux, le 16 juin 1946, il a présenté le Président de la République comme « un arbitre au‑dessus des contingences politiques ». Par la suite, mettant en œuvre cette conception à la faveur de la fondation de la Ve République, la Constitution du 4 octobre 1958 a conféré au Président un rôle renforcé dont son article 5 exprime les traits principaux : assurant par son arbitrage le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État, il est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des traités. Autant de prérogatives qui, dès l’origine de la nouvelle République, imprimaient à la figure institutionnelle du chef de l’État un caractère marqué de permanence et d’autonomie par rapport au quotidien de la vie politique. Le Président de la République, pour le général de Gaulle, est « l’homme de la nation, mis en place par elle‑même pour répondre de son destin. » Il paraissait donc normal et logique que la durée de son mandat fût plus longue que celle du mandat de l’Assemblée nationale.
En 2000, le quinquennat a été substitué au septennat. On se souvient des considérations conjoncturelles qui ont directement inspiré cette réforme : il fallait éviter la « cohabitation », cette expérience de gouvernement qui semblait satisfaire l’opinion mais déplaisait à la classe politique française, peu habituée par sa perception du fait majoritaire à la culture du compromis. Bien entendu, d’autres justifications furent avancées : donner par l’accélération du rythme qui, disait‑on, lui serait imposé un nouveau souffle, une vitalité renouvelée, à notre vie publique, ou encore renforcer la légitimité démocratique des gouvernants.
L’abstention très massive qui a marqué, le 24 septembre 2000, le référendum proposant la réforme au suffrage populaire (69,8 % des inscrits, à quoi il faut ajouter 4,9 % de bulletins blancs ou nuls), a montré que le corps électoral n’était pas sensible aux avantages prétendus du quinquennat présidentiel.
Peut‑on estimer, au bout d’un quart de siècle, que la pratique a infirmé les réserves marquées des électeurs à l’égard de la réforme ? Il semble bien que non.
Même si elle n’était pas, et ne pouvait pas être, inscrite dans les textes, l’inversion du calendrier électoral, faisant passer les élections législatives générales après l’élection présidentielle, s’est révélée une condition nécessaire, mais pas suffisante, pour la bonne marche de la réforme. Elle a assuré aux Présidents de la République successifs, à plusieurs reprises, la majorité stable dont ils pouvaient penser avoir besoin pour conduire leur action. La dissolution du 9 juin 2024 a fait disparaître, pour une période qu’il serait hasardeux de prétendre prévoir, cette concomitance.
Par ailleurs, l’institution du quinquennat semble avoir perturbé, à la longue, l’équilibre voulu par les constituants entre la responsabilité propre du Président de la République et les fonctions du Premier ministre. La formule selon laquelle le Premier ministre « détermine et conduit la politique de la nation » n’a pas résisté, jusqu’à une période récente, soit aux manifestations condescendantes, soit à la concentration du pouvoir effectif à la Présidence de la République, sans profit déterminant pour l’action de l’exécutif – d’autant plus qu’une instabilité nouvelle est apparue à l’hôtel de Matignon à un moment où la situation du pays la rendait moins désirable que jamais. Il en est résulté une fragilisation dommageable des institutions, notamment de l’équilibre fondamental au sein du pouvoir exécutif.
L’expérience des derniers mois renforce encore, s’il en était besoin, la nécessité de promouvoir un rétablissement de cet équilibre en conformité avec les intentions fondamentales du général de Gaulle et des auteurs de la Constitution. La fixation à une durée de sept ans, non renouvelable, du mandat présidentiel assurerait au président de la République la stabilité dont il a besoin pour remplir les éminentes fonctions dont on a rappelé plus haut l’esprit. Elle établirait cependant une disjonction nécessaire entre l’exercice de ces hautes responsabilités, au service de l’intérêt de la nation et de la continuité de l’État, et la conduite des affaires politiques sous la responsabilité du Premier ministre, dans le cadre fixé par la Constitution et sous un contrôle du peuple rendu possible par le renouvellement à échéances plus rapprochées de l’Assemblée nationale. Par ailleurs, le Président de la République conserve le droit de dissolution de l’Assemblée.
Telles sont les raisons pour lesquelles il vous est proposé d’adopter la présente proposition de loi constitutionnelle.
– 1 –
PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE
Article unique
L’article 6 de la Constitution est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept ». ;
2° À la fin du deuxième alinéa, les mots : « de deux mandats consécutifs » sont remplacés par les mots : « d’un seul mandat »