N° 1819

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 septembre 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à instaurer des sanctions sociales à l’encontre des trafiquants de stupéfiants et des récidivistes de crimes et de délits aggravés,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Alexandra MARTIN, Mme Justine GRUET, Mme Josiane CORNELOUP, M. Nicolas RAY, M. Thibault BAZIN, Mme Constance DE PÉLICHY, Mme Christelle PETEX, Mme Sylvie BONNET, M. Sébastien MARTIN, M. Laurent MAZAURY, M. Alexandre PORTIER, Mme Valérie BAZIN-MALGRAS, Mme Sylvie DEZARNAUD, M. Vincent ROLLAND, M. Jean-Yves BONY, Mme Virginie DUBY-MULLER, M. Julien DIVE, M. Vincent JEANBRUN, M. Pierre CORDIER, M. Fabien DI FILIPPO, M. Eric LIÉGEON, M. Éric PAUGET, M. Christophe BLANCHET, M. Michel HERBILLON, M. David TAUPIAC, M. Thomas LAM, M. Philippe JUVIN,

députées et députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La protection de la cohésion nationale, de la sécurité publique et du respect de l’État de droit exige une réponse forte et cohérente en réponse aux actes de délinquance qualifiée.

Le trafic de stupéfiants, même commis pour la première fois, constitue une infraction d’une particulière gravité. Il détruit des vies, alimente les réseaux criminels et met à mal l’autorité républicaine. Mais plus largement, la récidive, en matière de délits aggravés et de crimes, témoigne d’un mépris répété des règles collectives et d’un refus manifeste d’insertion sociale.

La loi n° 2025‑532 du 13 juin 2025 relative à la lutte contre le narcotrafic a constitué une avancée importante. Toutefois, les textes actuels ne prévoient pas la possibilité de retirer les aides sociales aux personnes qui s’adonnent à des activités de trafic de stupéfiants, même lorsque suffisamment d’éléments convergents pour attester la matérialité des faits. Or, il apparaît inacceptable qu’un individu qui perçoit des revenus du trafic de stupéfiants puisse continuer à bénéficier d’avantages sociaux financés par la solidarité nationale.

Dans ce contexte, la mairie de Cannes a fait adopter une mesure de retrait des allocations, déjà expérimentée dans la région grenobloise. Dès 2024, le maire de Cannes a saisi les autorités judiciaires afin de mettre en place un dispositif permettant, en lien avec la caisse des allocations familiales (CAF) des Alpes‑Maritimes, de supprimer les aides sociales versées aux trafiquants de drogue. Ce dispositif repose sur une coopération inédite entre les Parquets, les services de police et de gendarmerie, et les organismes sociaux. Il est désormais appliqué à l’échelle du département des Alpes‑Maritimes.

Cette expérimentation visant à supprimer les aides sociales aux personnes tirant des revenus du trafic de drogue a démontré la faisabilité juridique et l’efficacité de telles mesures. Son extension à l’échelle nationale s’impose aujourd’hui.

Cette action de protection des intérêts de la société et des contribuables ne doit pas s’arrêter à la question des narcotrafics.

En effet, le cas de récidive d’autres délits aggravés et a fortiori de crimes traduit une forme de mépris persistant des lois et des institutions. Il est donc justifié de prévoir une sanction sociale adaptée et dissuasive.

La présente proposition de loi, résultant des constats et attentes du terrain, transmises notamment par la ville de Cannes, vise ainsi à établir une règle de cohérence et de légitime fermeté étendue à un champ plus large de délinquance aves les dispositions suivantes :

‑ exclure des prestations sociales les personnes mettant en évidence leur implication dans un trafic de stupéfiants (article 1) ;

‑ exclure également les personnes ayant fait l’objet d’une condamnation pour récidive de délits aggravés ou de crimes ; (article 1)

‑ donner la possibilité aux maires de saisir directement le juge aux fins de procéder à la résiliation du bail d’un logement social. (article 2)

L’objectif de cette proposition de loi est de restaurer l’équilibre entre les devoirs des citoyens et les droits issus de la solidarité nationale.

 


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proposition de loi

Article 1er

Avant le dernier alinéa de l’article L. 114‑16 du code de la sécurité sociale, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Lorsqu’une personne fait l’objet d’éléments concordants recueillis par les autorités judiciaires ou policières laissant présumer qu’elle tire des revenus du trafic de stupéfiants ou d’activités assimilées, ces revenus sont réputés constituer une ressource prise en compte pour le calcul des droits aux prestations sociales. À ce titre, les organismes de protection sociale procèdent à la suppression des prestations en cours, indépendamment d’une décision judiciaire définitive et réclament le trop‑perçu, le cas échéant.

« Lorsqu’une personne a été condamnée à titre définitif pour un crime ou qu’elle se trouve en situation de récidive légale au sens des articles 132‑8 et suivants du code pénal pour un délit aggravé, les prestations versées au titre du présent code et du code de l’action sociale et des familles dont elle bénéficie sont suspendues, à titre automatique, à réception de la décision de justice. Cette suspension est proportionnée à la gravité des faits et à la durée de la peine prononcée. 

« Elle ne s’applique pas aux prestations destinées à la subsistance des enfants mineurs, notamment les allocations familiales, sauf décision contraire spécialement motivée. »

Article 2

L’article L. 442‑4‑3 du code de la construction et de l’habitation est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque le titulaire du bail d’un logement social a été condamné à titre définitif pour un crime ou un délit aggravé en situation de récidive, ou fait l’objet d’éléments concordants et circonstanciés établissant sa participation à un trafic de stupéfiants, le maire de la commune où est situé le logement social peut saisir directement le juge compétent aux fins de résiliation du bail, sans que l’accord préalable du bailleur ou l’intervention du représentant de l’État ne soit requis.

« La décision de résiliation du bail est prononcée par le juge au regard de la gravité des faits. Il ordonne alors l’expulsion sauf si des circonstances exceptionnelles liées à la présence de parents ou personnes vulnérables occupant le logement justifient de différer ou d’aménager la mesure. »