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N° 1866

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 septembre 2025.

PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE

visant à lutter contre le financement occulte des campagnes électorales,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Emmanuel DUPLESSY, Mme Cyrielle CHATELAIN, M. Pouria AMIRSHAHI, Mme Christine ARRIGHI, Mme Clémentine AUTAIN, Mme Léa BALAGE EL MARIKY, Mme Lisa BELLUCO, M. Karim BEN CHEIKH, M. Benoît BITEAU, M. Arnaud BONNET, M. Nicolas BONNET, M. Alexis CORBIÈRE, M. Hendrik DAVI, M. Charles FOURNIER, Mme Marie-Charlotte GARIN, M. Damien GIRARD, M. Steevy GUSTAVE, Mme Catherine HERVIEU, M. Jérémie IORDANOFF, Mme Julie LAERNOES, M. Tristan LAHAIS, M. Benjamin LUCAS-LUNDY, Mme Julie OZENNE, M. Sébastien PEYTAVIE, Mme Marie POCHON, M. Jean-Claude RAUX, Mme Sandra REGOL, M. Jean-Louis ROUMÉGAS, Mme Sandrine ROUSSEAU, M. François RUFFIN, Mme Eva SAS, Mme Sabrina SEBAIHI, Mme Danielle SIMONNET, Mme Sophie TAILLÉ-POLIAN, M. Boris TAVERNIER, M. Nicolas THIERRY, Mme Dominique VOYNET, Mme Ayda HADIZADEH, Mme Karine LEBON, Mme Mereana REID ARBELOT, Mme Constance DE PÉLICHY, Mme Christine PIRÈS BEAUNE,

députés et députées.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Plusieurs affaires judiciaires récentes ont mis en lumière les failles persistantes de notre législation en matière de financement électoral. Le procès en cours relatif aux soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy fait figure d’exemple. Dans cette affaire, l’ancien chef de l’État et son entourage sont prévenus d’avoir bénéficié de financements occultes en violation flagrante des règles de probité et de transparence électorale. Le débat judiciaire a montré combien les dispositifs actuels de contrôle pouvaient être contournés, que ce soit par des flux financiers opaques, des contributions en espèces, ou encore par des lacunes dans l’encadrement des activités de campagne.

Mais Nicolas Sarkozy n’est pas le seul à être inquiété par de telles pratiques. L’enquête visant le milliardaire ultra‑conservateur Pierre‑Édouard Stérin, soupçonné d’avoir contourné la législation en recourant à des intermédiaires pour financer des formations politiques, a montré les limites du système actuel tout comme l’ont fait les multiples affaires qui concernent des membres du Rassemblement national, mêlant soupçons de financement étranger et sociétés écrans.

Ces dérives portent atteinte à l’intégrité de notre démocratie. Le financement des campagnes électorales doit obéir à des règles strictes qui garantissent la transparence vis‑à‑vis des citoyens. Lorsque ces règles sont contournées, c’est la confiance publique dans nos institutions qui s’effrite.

Une réforme d’ensemble du financement de la vie politique, accompagnée d’un renforcement substantiel des moyens et des pouvoirs de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), apparaît nécessaire. Elle devrait viser à accroître l’égalité entre candidates et candidats, ainsi qu’entre partis politiques, en permettant au plus grand nombre de citoyennes et de citoyens de contribuer au financement des formations qu’ils soutiennent, sans que seuls les plus aisés bénéficient des dispositifs existants. Une telle réforme, qui impliquerait notamment une révision du plafond des dons et des mécanismes fiscaux incitatifs, a été proposée par l’économiste Julia Cagé et mériterait d’être discutée.

Ces évolutions structurelles relèvent toutefois d’un chantier global qui dépasse le cadre de la présente proposition de loi organique, laquelle a vocation à compléter la proposition de loi ordinaire visant à lutter contre le financement occulte des campagnes électorales.

Celle‑ci poursuit deux objectifs précis, déclinés dans ses deux chapitres : prévenir le financement opaque des campagnes électorales et renforcer le contrôle de leur financement à moyens constants. Divisée en cinq articles, elle tend à améliorer la traçabilité des financements, à réduire le recours aux paiements en espèces, à étendre les pouvoirs d’investigation de la CNCCFP, à reconnaître aux associations anticorruption un rôle effectif de contre‑pouvoir et à expertiser la faisabilité d’un contrôle en temps réel des comptes de campagne par la Commission.

En application du II de l’article 3 de la loi organique n° 62‑1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel, ces dispositions seront également applicables à l’élection présidentielle, à l’exception de l’interdiction du remboursement des dépenses réglées en espèces, qui sera inscrite à l’article 52‑11‑1 du code électoral non applicable à cette élection.

L’article unique de la présente proposition de loi organique vise donc à étendre cette interdiction aux campagnes présidentielles.

À travers cette disposition, la proposition de loi vise à remédier aux lacunes révélées par les affaires récentes en consolidant la probité et la transparence du financement électoral. Elle constitue une première réponse aux attentes croissantes des citoyens en matière d’intégrité publique et de moralisation de la vie politique.

Cette proposition de loi a été travaillée en lien avec Transparency International France. Elle complète la proposition de loi ordinaire visant à lutter contre le financement occulte des campagnes électorales.

 


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proposition de loi ORGANIQUE

Article unique

Le deuxième alinéa du V de l’article 3 de la loi n° 62‑1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel est complété par les mots : « et ne peut porter sur des dépenses réglées en espèces ».