N° 1919

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer la prévention des risques liés à la surexposition aux écrans,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Philippe FAIT,

député.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La surexposition aux écrans constitue aujourd’hui un enjeu majeur de santé publique, touchant toutes les générations mais affectant particulièrement les enfants et les adolescents dont le développement cognitif, social et psychologique est fragilisé par un usage excessif et non régulé des outils numériques.

En 2023, 34  % des internautes français de 15 à 74 ans ont déclaré ressentir au moins un effet néfaste lié à l’usage des écrans dans leur vie quotidienne, en dehors des temps d’étude ou de travail. Ce taux grimpe à 57  % chez les moins de 20 ans et à 49  % chez les 20‑34 ans, contre seulement 23  % chez les 50‑64 ans et 16  % chez les 65‑74 ans. Les effets les plus fréquemment cités sont la réduction du temps de sommeil (25  %), la négligence d’autres activités de loisirs (10  %) et les sensations d’obsession vis‑à‑vis des écrans (9  %).

La santé physique des jeunes est directement menacée par cette surexposition. La fatigue visuelle, les troubles du sommeil, la sédentarité accrue, le surpoids et l’obésité sont largement documentés.

L’Organisation mondiale de la santé rappelle que la sédentarité est l’un des principaux facteurs de risque de maladies chroniques telles que le diabète de type 2, les maladies cardiovasculaires et l’obésité. L’usage excessif des écrans perturbe le rythme circadien, entraîne des difficultés d’endormissement et une fatigue chronique qui impacte la réussite scolaire et le bien‑être quotidien.

En 2023, 37  % des 15‑19 ans ont déclaré limiter leur temps de sommeil au moins une fois par semaine pour rester sur les écrans, et ce chiffre atteint 42  % chez les 20‑24 ans.

La santé mentale des jeunes est également gravement affectée. L’anxiété, l’isolement social, la baisse de l’estime de soi et l’exposition accrue aux risques d’addiction sont largement documentés. Parmi les 15‑19 ans, 11  % ont déclaré se sentir déprimés après l’usage des écrans, et 15  % ont négligé leurs loisirs pour rester devant les écrans.

L’addiction aux jeux vidéo et aux réseaux sociaux progresse fortement : 64  % des enfants de 10 à 14 ans jouent régulièrement à des jeux vidéo, dont 20  % y consacrent plus de 2 heures par jour, et 87  % des 11‑12 ans sont inscrits sur des réseaux sociaux censés être interdits avant 13 ans.

L’Organisation mondiale de la santé alerte que 11  % des adolescents européens présentent des signes d’usage excessif des réseaux sociaux et 12  % sont à risque de dépendance aux jeux vidéo, des comportements associés à l’anxiété, à la dépression et à l’isolement social.

Le développement cognitif et social des enfants est également fragilisé par la surexposition aux écrans. L’Institut des Hautes Études de l’Éducation et de la Formation rappelle que ce phénomène interfère avec les capacités relationnelles et d’apprentissage. Dès le plus jeune âge, l’usage excessif des écrans altère les interactions sociales et familiales, réduit les activités physiques et nuit à la construction des repères fondamentaux.

Les enfants exposés plus de trois heures par jour présentent un risque significativement accru de retard dans l’acquisition du langage, de baisse de concentration et de résultats scolaires insuffisants.

Il est crucial d’informer de manière claire et répétée sur ces risques. Un message visible dès l’allumage de l’appareil pourra rappeler que l’usage excessif des écrans nuit au sommeil et à la santé mentale, favorise la sédentarité et le surpoids, réduit la concentration et impacte le développement social et cognitif.

Il pourra également avertir que trop d’écrans perturbent les interactions sociales et le développement relationnel et que limiter le temps d’écran favorise un équilibre sain entre activité physique et numérique. Ces messages sont essentiels pour sensibiliser les parents et les jeunes, prévenir les conséquences sanitaires graves, développer de bonnes habitudes dès le plus jeune âge et rendre l’information accessible à tous.

Les associations spécialisées, telles qu’e‑Enfance, alertent sur le fait que les recommandations existantes pour limiter le temps d’écran et accompagner les enfants dans leur usage numérique sont insuffisamment visibles et connues du grand public.

Il est donc nécessaire d’instaurer une obligation légale pour les fabricants et distributeurs d’appareils numériques, y compris smartphones, tablettes, ordinateurs, téléviseurs connectés, consoles de jeux et casques de réalité virtuelle, de faire apparaître dès l’écran d’accueil et lors de la configuration initiale un message de prévention sur les dangers liés à la surexposition aux écrans.

Inspiré des campagnes de santé publique pour le tabac et l’alcool, ce dispositif permettra de sensibiliser de manière constante et d’inciter à un usage raisonné des technologies, afin de concilier l’usage incontournable des outils numériques avec la protection de la santé publique et le bien‑être des nouvelles générations.

 


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proposition de loi

Article unique

Les fabricants et distributeurs d’appareils numériques commercialisés en France, notamment les smartphones, tablettes, ordinateurs, téléviseurs connectés, consoles de jeux et casques de réalité virtuelle, sont tenus de faire apparaître, lors de l’allumage initial et de la configuration de l’appareil, un message sanitaire de prévention informant sur les risques liés à la surexposition aux écrans.

Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article, notamment la formulation précise du message de prévention, sa durée d’affichage, ainsi que les sanctions applicables en cas de non-respect de cette obligation.