N° 2276

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 décembre 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à la reconnaissance et au soutien aux familles des agents de la sécurité nationale et de la défense,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Olivier FAYSSAT, M. Alexandre ALLEGRET-PILOT, M. Matthieu BLOCH, Mme Christelle D’INTORNI, M. Maxime MICHELET, M. Marc CHAVENT,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les agents engagés dans les missions de sécurité nationale et de défense policiers, gendarmes, douaniers, personnels pénitentiaires, sapeurs‑pompiers professionnels ou militaires exercent leurs fonctions au péril de leur vie. Ils incarnent la présence quotidienne de la République face à la violence et à la menace, croissante dans notre société. Leur engagement expose également leurs familles, qui en assument les angoisses, les contraintes et parfois les conséquences les plus dramatiques.

Or, lorsque le pire survient, l’État ne garantit pas toujours à ces familles un niveau de protection et de reconnaissance à la hauteur du sacrifice consenti. Les pensions de réversion demeurent hétérogènes, parfois insuffisantes, et juridiquement dispersées entre plusieurs régimes. Quant au statut des familles confrontées au décès brutal d’un agent, il demeure lacunaire, notamment en matière de logement de fonction ou d’accompagnement social.

La présente proposition de loi poursuit une ambition simple : rendre à la Nation la cohérence et la dignité qui s’imposent lorsqu’elle s’adresse aux familles endeuillées de celles et ceux qui la protègent.

L’article 1er renforce les droits à pension des conjoints survivants lorsque le décès survient en raison du service ou du fait de la qualité d’agent public. Si le code des pensions civiles et militaires de retraite permet déjà, dans certains cas, de majorer le montant global versé à l’ensemble des ayants cause, ces dispositifs restent partiels, peu lisibles et limités à des catégories précises d’agents ou de circonstances. Ils ne couvrent pas, notamment, les situations dans lesquelles un agent est victime d’une agression ciblée du fait de sa qualité professionnelle, y compris en dehors du service.

La réforme proposée répond à trois objectifs :

– unifier et clarifier les situations donnant lieu à majoration ;

– étendre la protection aux décès causés par une agression liée à la qualité d’agent public, que l’auteur ait agi en service ou hors service ;

– garantir une pension de réversion portée à 100 % de la pension que l’agent aurait lui‑même perçue, en alignant ainsi le soutien aux familles sur les exigences de justice et de reconnaissance républicaine.

Cette mesure traduit la volonté de la représentation nationale de faire prévaloir la solidarité due aux familles frappées par un décès dont la cause est directement imputable à la mission exercée par l’agent pour la Nation.

La seconde finalité de cette proposition vise à accompagner matériellement les familles confrontées à la perte du logement de fonction. Pour de nombreux agents de sécurité ou de défense, le logement de fonction est une obligation liée aux nécessités de service. À la douleur du deuil peut donc s’ajouter, pour leurs proches, la perspective immédiate d’une perte de domicile. Par conséquent l’article 2 renforce leur protection en prévoyant :

– une majoration forfaitaire de la pension de réversion, fixée par décret, destinée à compenser la perte du logement ;

– le maintien dans le logement de fonction pendant une durée d’un an, afin de permettre au conjoint survivant et aux enfants de faire face à la situation avec dignité et stabilité.

La proposition de loi supprime toute référence à une exclusion en cas de mobilisation générale, afin d’éviter une rupture d’égalité, une contradiction avec les garanties existantes et un risque d’inconstitutionnalité. Les droits des conjoints survivants doivent être garantis en toutes circonstances : la solidarité nationale ne saurait être suspendue précisément lorsque la Nation traverse les épreuves les plus graves.

 


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proposition de loi

Article 1er

Le II de l’article L. 50 du code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Le taux de la pension de réversion mentionné au premier alinéa de l’article L. 38, le montant de la rente d’invalidité mentionnée au 1° du même article, et le montant de la majoration mentionnée au 2° dudit article sont portés, respectivement, à 100 % de la pension dont le fonctionnaire civil ou le militaire aurait pu bénéficier, à la totalité de la rente d’invalidité dont le fonctionnaire civil ou le militaire bénéficiait ou aurait pu bénéficier, et à la totalité de la majoration prévue à l’article L. 18 qu’aurait pu obtenir le fonctionnaire civil ou le militaire, si le décès intervient dans les conditions suivantes : «

2° Il est ajouté un 10° ainsi rédigé :

« 10° Lorsqu’un fonctionnaire civil ou un militaire mentionné aux 1° à 9°, actif ou retraité, décède des suites de violences commises du fait de ses fonctions ou de ses anciennes fonctions, en service ou en dehors du service, lorsque la qualité ou l’ancienne qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur. »

Article 2

I. – Le chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code des pensions civiles et militaires de retraite est complété par un article L. 46‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 461. – Le conjoint survivant qui occupait un logement de fonction, attribué au titre des fonctions du fonctionnaire civil décédé, bénéficie d’une majoration forfaitaire destinée à compenser la perte de ce logement.

« Le montant et la durée de cette majoration sont fixés par décret en Conseil d’État. »

II. – Le conjoint survivant du fonctionnaire civil mentionné à l’article L. 4 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou du militaire décédé mentionné aux articles L. 6 et L. 7 du même code qui occupait un logement de fonction attribué au titre des fonctions de ce fonctionnaire civil ou de ce militaire peut, dans des conditions prévues par décret, être maintenu dans ce logement pour une durée d’un an à compter du décès.

Article 3

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.