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N° 236

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 septembre 2017.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création dune commission denquête sur le démantèlement dAlstom et les moyens mis en œuvre par lÉtat pour protéger
nos fleurons industriels,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Olivier MARLEIX, Ian BOUCARD, Guillaume LARRIVÉ, Damien ABAD, Julien DIVE, Annie GENEVARD, Patrick HETZEL, Thibault BAZIN, Virginie DUBYMULLER, PierreHenri DUMONT, Jacques CATTIN, Isabelle VALENTIN, Valérie BAZINMALGRAS, Jérôme NURY, Éric STRAUMANN, Fabrice BRUN, Guy TEISSIER, Bernard PERRUT, Vincent ROLLAND, Éric CIOTTI, Stéphane VIRY, Patrice VERCHÈRE, Michel VIALAY, Claude GOASGUEN, Aurélien PRADIÉ, JeanPierre VIGIER, Constance LE GRIP, Sébastien HUYGHE, Michel HERBILLON, Martial SADDIER, JeanLuc REITZER, Alain RAMADIER, Raphaël SCHELLENBERGER, Bérengère POLETTI, Laurent FURST, Sébastien LECLERC, JeanCarles GRELIER, Valérie LACROUTE, Laurence TRASTOURISNART, Bernard BROCHAND,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 26 septembre, les conseils d’administration d’Alstom et de Siemens ont approuvé le principe de la fusion entre les deux entreprises, donnant la possibilité à Siemens de devenir actionnaire majoritaire du nouvel ensemble dans 4 ans.

Ce nouvel épisode marque l’ultime étape du démantèlement d’Alstom accepté par l’État français en juin 2014 lors du rachat de la branche énergie d’Alstom par le conglomérat américain Général Electric.

Avec 18 000 salariés en France en 2014 et 96 000 dans le monde, Alstom a été un des plus beaux fleurons industriels français. Fondé en 1879, il a été champion mondial dans deux secteurs stratégiques : la construction de centrales clés en main et le transport ferroviaire (leader mondial d’équipements et de services ferroviaires, premier constructeur de trains grande vitesse).

En 2014 et 2015, lors du rachat de la branche énergie d’Alstom par General Electric, l’État, par la voix des ministres de l’économie successifs, mettait en avant de prétendues contreparties obtenues.

Le sacrifice de la branche énergie devait notamment se traduire par une consolidation des intérêts nationaux dans la branche transports. Le ministre de l’économie avait ainsi affirmé lors d’une visite sur le site en 2015 : « l’État sera au côté d’Alstom Transport ».

Pourtant, côté transports, dès le 7 septembre 2016, la direction d’Alstom annonçait l’arrêt de ses activités ferroviaires sur le site de Belfort, « transférées » à Reichshoffen en Alsace d’ici à 2018.

L’État avait annoncé renforcer sa position d’actionnaire dans le cadre d’un accord portant sur 20 % des droits de vote, grâce à des actions prêtées par Bouygues pouvant être rachetées en 2017. Cette possibilité n’a pas été activée à ce jour.

Désormais, on sait que d’ici quatre ans, Siemens sera en mesure d’être actionnaire majoritaire du nouvel ensemble.

S’agissant du rachat de la branche énergie, trois co‑entreprises avaient été créées, détenues à 50 % par Alstom et Général Electric. Trois années plus tard, l’entité agissant dans le secteur nucléaire est détenue à 80 % par General Electric.

Ce nouvel épisode relance donc ces lourdes questions sur la capacité de l’État à défendre tant nos champions industriels que nos intérêts stratégiques.

D’abord, la capacité de l’État à protéger une entreprise stratégique visée par une procédure judiciaire étrangère dont nous n’avons pas les moyens d’apprécier la légitimité.

Le rachat d’Alstom par General Electric était en effet intervenu après une enquête du Department of Justice américain qui avait fragilisé l’entreprise avec une amende record de 772 millions de dollars et qui a pu être l’occasion d’une mise en relation avec General Electric. À ce titre, le ministre de l’économie avait déclaré devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, le 11 mars 2015 : « À titre personnel, jétais persuadé du lien de cause à effet entre cette enquête et la décision de Kron (alors président directeur général dAlstom) de vendre, mais nous navons aucune preuve ».

Ensuite, la faiblesse des outils juridiques permettant à l’État de protéger un secteur stratégique de son économie, concourant à sa sécurité nationale. Un décret avait dû être improvisé par le gouvernement pour s’inviter au tour de table des négociations entre les deux entreprises.

Enfin, l’extrême indigence des moyens de contrôle, juridiques et humains, mis en place par l’État pour s’assurer du respect des engagements pris par les acquéreurs lors d’opération de ce type.

Plus largement, ce rachat avait montré les difficultés du gouvernement à définir les secteurs stratégiques de notre économie et à défendre les entreprises françaises concourant à la sécurité nationale, y compris lorsqu’il en est actionnaire. Le départ de hauts‑fonctionnaires du ministère de l’économie vers des grands investisseurs étrangers ou de grandes banques d’affaires étrangères ouvre aussi un questionnement sur leur rôle dans ce type d’opérations.

Dans ces conditions, la présente résolution propose la création d’une commission d’enquête sur les raisons et les conditions du démantèlement d’Alstom ; il faudra également s’interroger sur les moyens d’action de l’État pour favoriser le maintien en France de notre patrimoine industriel stratégique.

proposition de rÉsolution

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement, il est créé une commission d’enquête de trente membres chargée d’examiner les raisons et conditions du démantèlement rapide d’Alstom et les moyens mis en œuvre par l’État pour protéger nos fleurons industriels dans un contexte commercial mondialisé.