Description : LOGO

N° 674

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 février 2018.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

invitant le Gouvernement à dénoncer le protocole n° 11 de la Convention européenne des droits de lHomme dans les cas liés au terrorisme,

présentée par Mesdames et Messieurs

Julien AUBERT, Emmanuel MAQUET, Jacques CATTIN, Véronique LOUWAGIE, Claude de GANAY, PierreHenri DUMONT, Éric STRAUMANN, Thibault BAZIN, Julien DIVE, Patrice VERCHÈRE, Fabrice BRUN, Patrick HETZEL, Charles de la VERPILLIÈRE, Guillaume PELTIER, Rémi DELATTE, JeanLuc REITZER, Éric DIARD, Ian BOUCARD, Olivier DASSAULT, Éric PAUGET, JeanJacques GAULTIER, Fabien DI FILIPPO, Virginie DUBYMULLER, Bérengère POLETTI, Laurent FURST, Sébastien LECLERC, Didier QUENTIN, Éric CIOTTI,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les « dividendes de la paix » dont nous jouissons depuis plusieurs décennies nous ont aveuglés sur la réalité guerrière des actes terroristes proférés sur notre sol.  Depuis mars 2012, notre pays a été endeuillé par une série d’attentats qui comptent 250 morts et plusieurs centaines de blessés. La réalité est ainsi : la France est en guerre et la France doit gagner cette guerre.

Si l’État islamique connaît actuellement une déroute en Irak et en Syrie, nous ne devons pas pour autant baisser la garde. Des milliers de djihadistes reprennent dès à présent le chemin de l’Europe. Certains en appellent à notre clémence. Beaucoup cherchent surtout à utiliser les failles de notre système sécuritaire, notamment aux frontières de l’Union européenne et de l’espace Schengen. D’autres encore n’hésitent pas à retourner nos valeurs et notre droit à leur profit.

Dans ce nouveau contexte sécuritaire, la Cour européenne des droits de l’Homme s’est montrée tout à fait indifférente à la protection des intérêts des nations européennes et de leur sécurité.  Déjà, dans deux arrêts du 4 décembre 2014, la même Cour avait condamné la France, suite à l’arrestation de pirates somaliens à l’issue de la prise d’otage de deux navires français dans le Golfe d’Aden en avril et septembre 2008.

Or, le 1er février 2018, celle‑ci a de nouveau condamné la France pour avoir expulsé vers son pays d’origine un ressortissant de nationalité algérienne, coupable d’association de malfaiteurs terroristes, considérant que notre pays a violé l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme, qui interdit la torture, au prétexte que l’Algérie se rendrait coupable de « cas de torture et dautres mauvais traitements dans des lieux de détention, en particulier dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ». Par cet arrêt, la Cour impose à l’Etat français d’accorder l’asile à un ressortissant algérien qui n’en remplit nullement les conditions.

Pour ces mêmes motifs, la Cour avait, par une décision du 6 septembre 2011, interdit à la France d’expulser, déjà vers l’Algérie, Djamel Beghal, considéré comme l’émir des frères Kouachi et d’Amedy Coulibaly. Djamel Beghal avait pu alors préparer et apporter son « expertise » en matière de terrorisme aux auteurs des attentats de Paris de janvier 2015 dans les mois qui précédèrent leur horrible forfait.

Cette incapacité à prendre en compte le nouveau contexte sécuritaire dans lequel nous vivons peut s’avérer un véritable danger mortel pour la France ainsi que l’ensemble des sociétés démocratiques en Europe. Elle est, a minima, la preuve que la Cour européenne des droits de l’Homme nous empêche de mener la politique pénale et migratoire que nous souhaitons.

Dans la guerre à laquelle nous avons été contraints, nous défendons des valeurs et un art de vivre. Si rien n’est fait, c’est notre civilisation qui risque d’être sérieusement atteinte. Lorsque nos ennemis retournent contre nous ces valeurs et cet art de vivre il devient nécessaire riposter. Entre la sécurité de nos concitoyens et ceux qui veulent notre mort, il n’y a pas de place à l’hésitation.

Il est temps de redonner à la France les moyens de gagner la guerre contre le terrorisme islamiste en excluant du droit de recours individuel devant la Cour européenne des droits de l’Homme les affaires liées au terrorisme. Tel est l’objet de la présente proposition de résolution.


proposition de RÉSOLUTION

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 3 de la Constitution ;

Vu l’article 34‑1 de la Constitution ;

Vu l’article 53‑1 de la Constitution ;

Vu l’article 55 de la Constitution ;

Vu l’article 58 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ci‑après dénommée Convention européenne des droits de l’Homme ;

Vu l’article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

Vu le protocole n° 11 à la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales ;

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale ;

Considérant que le recours par la France, le 24 novembre 2015, à l’article 15 de la Convention de Convention européenne des droits de l’Homme, qui autorise les États contractants à déroger aux droits garantis par ladite Convention en situation d’urgence, ne constitue pas une garantie suffisante pour la protection de la Nation et la sécurité de nos concitoyens, en ce que la Cour européenne des droits de l’Homme conserve toute sa compétence et sa marge d’interprétation ;

Considérant que l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’Homme du 1er février 2018 qui condamne la France, constitue la preuve par les faits que ladite Cour ne tient pas compte des circonstances et du contexte terroriste que fait peser la menace islamiste sur la France et l’Europe ;

Considérant que, dans la même affaire, l’individu ressortissant algérien a été débouté du droit d’asile dans le respect de l’article 53‑1 de la Constitution en ce qu’il n’était pas persécuté dans son pays d’origine ;

Considérant que la France est une Nation souveraine, libre d’accepter ou de refuser les individus de nationalité étrangère qui demandent à résider sur son territoire, et qu’il n’est pas acceptable que la Cour européenne des droits de l’Homme s’ingère dans cette décision souveraine, en prétextant du respect des droits d’un ressortissant non‑européen reconnu coupable de faits de terrorisme au mépris de la sécurité des citoyens français ;

Considérant que l’article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et qui interdit leur expulsion ne s’applique pas pour l’individu pour lequel il y a des « raisons sérieuses de [le] considérer comme un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou qui, ayant été l’objet d’une condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement grave, constitue une menace pour la communauté dudit pays » ;

Considérant que la dénonciation du protocole n° 11 à la Convention européenne des droits de l’Homme qui autorise le droit de recours individuel devant la Cour européenne des droits de l’Homme ne remet pas en cause la participation de la France au sein du Conseil de l’Europe, en ce que cette dite organisation internationale a préexisté à ladite Convention et que la France n’a ratifié le protocole n° 2, repris dans le protocole n° 11, que le 2 octobre 1981 ;

Considérant également que la dénonciation du droit de recours individuel devant la Cour européenne des droits de l’Homme ne remet nullement en cause l’engagement de la France au sein de l’Union européenne, cette dernière n’étant pas partie à la Convention européenne des droits de l’Homme et que de nombreux États parties à ladite Convention ne sont pas membres de l’Union européenne ;

Considérant que les arrêts Nicolo du Conseil d’Etat du 20 octobre 1989 et Jacques Vabre de la Cour de cassation du 24 mai 1975 n’ont pas vocation à donner à la Cour européenne des droits de l’Homme une autorité interprétative sur le contrôle de conventionnalité que les autorités judiciaire et administrative exercent ;

Propose au Gouvernement de recourir à l’article 58 de la Convention européenne des droits de l’Homme afin de dénoncer le protocole n° 11 de ladite Convention ;

Invite le Gouvernement à entamer un nouveau processus de négociation concernant le protocole n° 11 de la Convention européenne des droits de l’Homme, de manière à permettre la protection réelle et efficace de la Nation et la sécurité de nos concitoyens dans les cas liés au terrorisme, en excluant la compétence de la Cour européenne des droits de l’Homme pour ces recours individuels.