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N° 1167

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 juillet 2018.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création dune commission denquête sur le vin naturel,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme MarieFrance LORHO,

députée.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France, avec 558 000 acteurs de la vigne et du vin et 10 % de la surface mondiale de vigne de cuve est un pays de vin, comme l’atteste sa population qui à 85 % en achète pour sa consommation pendant l’année ([1]). Viticulteurs ([2]) et vinificateurs ([3]) ont ainsi une place particulière dans notre société. Ceux‑ci œuvrent jour après jour pour produire un breuvage de qualité qui contribue au rayonnement de la France. En 1907 déjà nos vignerons ([4]) se soulevaient contre le mélange des vins français avec une production étrangère ou avec de l’eau, qui entraînait une surproduction. Le 9 juin 1907, 600 à 800 000 personnes manifestaient à Montpellier pour préserver un vin de qualité. Le 29 juin et le 15 juillet 1907, des lois furent votées pour proscrire les fraudes, limiter le sucrage et la circulation des vins. Cet épisode nous montre qu’il existe bel et bien une volonté historique française de défendre les vins naturels, produits via des méthodes saines et respectueuses des vignes et de la terre. Si la situation actuelle n’a pas le caractère dramatique des manifestations de 1907, il convient aujourd’hui encore d’écouter les revendications des producteurs de vins, et plus particulièrement de vins naturels. En‑effet, il n’existe aujourd’hui pas de législation qui les définisse. Les définitions sont multiples, ce qui ne permet pas de protéger les quelques 500 vignerons français considérés comme producteurs naturels. C’est dans la volonté de protéger et encourager ces acteurs qui travaillent dans le respect de l’environnement et œuvrent pour la richesse de notre terroir, que nous proposons la création une commission d’enquête pour la définition précise de ce qu’est un vin naturel. Définition s’avérant nécessaire pour mettre de l’ordre dans la multitude de celles déjà existantes (I) et pour protéger et encourager des pratiques participant à la richesse de nos terroirs (II).

I.  Définition du vin naturel

Il existe en effet aujourd’hui de multiples définitions de ce qu’est un vin naturel. Parmi celles‑ci nous en avons retenu deux :

Celle de lassociation des vins naturels qui considère qu’un vin est dit naturel lorsqu’il respecte le cahier des charges suivant :

– Une culture bio ou biodynamique à la vigne,

– Des vendanges manuelles,

– Utilisation des levures indigènes pour la fermentation (levures présentes naturellement sur la baie des raisins),

– Aucune utilisation de techniques « brutales » pour le vin (osmose inverse, flash pasteurisation…),

– Aucun intrant œnologique lors de la vinification à part pas ou peu de soufre (sulfite) ajouté.

Le sulfite ne doit être utilisé :

– Pour les rouges et effervescent que de : 0mg/l à 30mg/l maximum,

– Pour les blancs que de : 0mg/l à 40mg/l maximum.

Celle de lassociation morethanorganic dont le cahier des charges est le suivant :

– 10 mg/l de soufre pour le rouge,

– 25 mg/l de soufre pour le blanc.

Le vin doit être produit :

– En petites quantités,

– Par des producteurs indépendants,

– Sur des vignobles à  faible rendement,

– À partir de raisins biologiques vendangés à la main,

– Sans sucre ajouté et sans levures étrangères au terroir,

– Sans correction d’acidité,

– Sans micro‑oxygénation ou osmose inverse.

Il convient ainsi de déterminer législativement les critères qui semblent les plus adéquates à définir un vin naturel, alors qu’il existe encore un flou à ce sujet.

II.  Pourquoi définir le vin naturel ?

– Tout d’abord parce que celui‑ci se distingue des autres vins. Ainsi, la concentration en soufre dans les différents types de vin est de :

– Vin conventionnels rouge normes E.U : 160 mg/litre de soufre,

– Vin rouge issu de l’Agriculture Biologique : 100 mg/litre de soufre,

– Vin rouge Demeter (biodynamique) : 70 mg/litre de soufre,

– Vin rouge naturel ([5]) : 30 mg/litre de soufre.

En dehors du soufre, les produits autorisés dans le vin naturel sont bien différents :

Outre la question des produits, la particularité des vins naturels se fait aussi sur les pratiques utilisées. Si la différence avec les méthodes de production des vins classiques est évidente au vu des définitions proposées ci‑dessus, il convient de préciser que le vin naturel se démarque également du vin bio. En effet, le vin naturel étend son ambition « naturel » à l’ensemble du processus de production : lors de la plantation, du travail du sol, des soins apportés à la vigne, des vendanges, de la vinification, de l’élevage et de la mise en bouteille.

Définir le vin naturel, c’est reconnaître sa particularité, œuvrer pour retrouver l’expression naturelle du terroir et préserver le caractère vivant du vin, où les arômes ne sont pas masqués par d’autres composants. C’est promouvoir des vins au plus près de la qualité de goût des raisins, c’est s’abstraire des règles de rendement et de rentabilité pour chercher la typicité du terroir et l’originalité des arômes. C’est se laisser la possibilité d’être surpris par des goûts atypiques ainsi que par le savoir‑faire de nos vignerons. Enfin, définir le vin naturel c’est le rendre moins flou auprès du consommateur, c’est agir avant que la grande consommation ne s’empare de ses codes à des fins commerciales.


proposition de rÉsolution

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, il est créé une commission d’enquête de trente membres visant à définir législativement ce qu’est un vin naturel.


([1]) Vin et société, chiffres disponibles sur : http://www.vinetsociete.fr/se-mobiliser-pour-le-vin/chiffres-clefs-de-la-filiere-vin

([2]) Le viticulteur est celui qui s’occupe exclusivement de la vigne

([3]) Le vinificateur est celui qui une fois les raisins récupérés, s’occupe de la fabrication du vin

([4]) Le vigneron s’occupe lui de l’ensemble du processus

([5]) Selon la définition de l’Association des vins naturels