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N° 2014

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 juin 2019.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

invitant le Gouvernement à prévenir et à corriger les surexécutions
et les sousexécutions des lois de finances,

présentée par Mesdames et Messieurs
 

Perrine GOULET, Bénédicte PEYROL, Saïd AHAMADA, Éric ALAUZET, François ANDRÉ, Émilie CARIOU, AnneLaure CATTELOT, JeanRené CAZENEUVE, Philippe CHASSAING, Francis CHOUAT, Olivier DAMAISIN, Dominique DAVID, Benjamin DIRX, Stella DUPONT, Sophie ERRANTE, Olivier GAILLARD, Joël GIRAUD, Romain GRAU, Olivia GREGOIRE, Nadia HAI, Alexandre HOLROYD, Christophe JERRETIE, François JOLIVET, Daniel LABARONNE, Michel LAUZZANA, Fabrice LE VIGOUREUX, MarieAnge MAGNE, Cendra MOTIN, Catherine OSSON, Xavier PALUSZKIEWICZ, Hervé PELLOIS, Valérie PETIT, Benoit POTTERIE, Xavier ROSEREN, Laurent SAINTMARTIN, Jacques SAVATIER, Olivier SERVA, Benoit SIMIAN, MarieChristine VERDIERJOUCLAS, JeanFrançois ELIAOU,  

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le consentement à l’impôt et l’autorisation des dépenses sont au fondement même des missions de la représentation nationale. Les articles 13 et 14 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen rappellent ces principes ; le quatrième alinéa de l’article 34 et l’article 47 de la Constitution en déterminent les modalités contemporaines.

Dans le cadre du « printemps de l’évaluation », l’examen du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’État fait l’objet d’une ambition renforcée de la part de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

Les rapporteurs spéciaux accordent une attention plus soutenue au contrôle de l’application de la loi de finances et s’intéressent de manière approfondie à une ou des politiques publiques ciblées.

L’une des conditions du respect du budget tient au taux d’exécution des autorisations d’engagement et des crédits de paiement votés, présenté dans les rapports annuels de performances, annexés au projet de loi de règlement.

Ce ratio peut et doit naturellement donner lieu à un commentaire politique : ainsi, une sous‑exécution est susceptible d’être alternativement vue comme le signe d’une ambition pour laquelle le Gouvernement avait su solliciter d’importants moyens, ou bien comme la preuve d’une prévision insuffisamment précise et donc trop demandeuse ; il est également possible d’y lire soit la manifestation d’économies en cours d’exercice, obtenues grâce à une gestion rigoureuse, soit à l’inverse l’indice de l’abandon de certains projets pendant l’année.

Les mêmes appréciations se rencontrent s’agissant, dans l’autre sens, des sur‑exécutions.

Au‑delà d’un certain degré toutefois, qui peut être déterminé à 3 %, le débat politique change de nature.

Un décalage de cette ampleur, voire supérieur, au‑dessus ou en dessous du plafond accordé en loi de finances traduit indéniablement une absence d’anticipation : les administrations relevant du Gouvernement ne doivent ni trop dépenser, ni générer trop de marges.

Ces deux exigences se justifient par les comptes qui doivent être rendus à nos concitoyens et à leurs représentants : une consommation trop dispendieuse des deniers publics génère une dette qui obère notre présent et ternit celui des générations à venir ; la demande de moyens trop importants en janvier pour pouvoir être mobilisés en décembre se fait au détriment d’autres politiques publiques.

En 2018, la mission Culture affiche une exécution de la loi de finances initiale à hauteur de 95,9 % en autorisations d’engagement ; le programme Sport de la mission Sport, jeunesse et vie associative n’a utilisé que 94,4 % des crédits de paiement qui lui étaient ouverts. Pour sa part, la mission Outre‑mer a obtenu en loi de finances rectificative une ouverture dont elle a consommé seulement 86 % en autorisations d’engagement et 42 % en crédits de paiement.

La différence cumulée de ces trois cas est de près d’un milliard d’euros.

Ces exemples de dépassement du plafond inscrit en loi de finances ou, inversement, d’incapacité à mobiliser les sommes de cette enveloppe, ne devraient se présenter que dans des cas exceptionnels, notamment à l’occasion de crises, et devraient faire l’objet d’une information plus détaillée de la part des responsables de programme.

L’Assemblée nationale est consciente que la préparation du projet de loi de finances donne lieu à d’importantes négociations avec, en février, de premières réunions techniques entre la direction du budget et les directions financières des autres ministères, en mars, les conférences de performance et l’envoi des lettres de cadrage, en mai et juin, les conférences de budgétisation, puis en juillet et août, les lettres plafonds et les conférences de répartition.

Ces réunions sont importantes, mais elles présentent deux limites : d’une part, elles prennent insuffisamment en compte la situation budgétaire des premiers mois de l’année n et, d’autre part, elles n’impliquent pas le Parlement.

Ainsi, lorsque des sur‑exécutions ou sous‑exécutions dépassent, dans le projet de loi de règlement de l’année n  1, le taux de 3 %, il conviendrait que les missions concernées fassent l’objet de la production, en complément du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour l’année n + 1, d’un document détaillant les grandes lignes de l’exécution sur les huit premiers mois de l’année n, à l’image de la « justification au premier euro » des projets et rapports annuels de performances.

Ces informations, qui éclaireraient le débat parlementaire relatif au projet de loi de finances pour l’année budgétaire dans le cadre d’un meilleur chaînage d’un exercice à l’autre, auraient vocation à être remises, au plus tard, à la date mentionnée au premier alinéa de l’article 39 de la loi organique n° 2001‑692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, à savoir le premier mardi d’octobre.

Un tel mécanisme pourrait être sanctuarisé par son inscription au 5° de l’article 51 de la loi organique précitée.


proposition de RÉSOLUTION

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu les articles 46, 54, 57 et 58 de la loi organique n° 2001‑692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu les rapport annuels de performances des missions Culture, Outre‑mer et Sport, jeunesse et vie associative du budget général de l’État, annexés au projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes pour 2018, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 15 mai 2019 sous le n° 1947,

Vu les notes d’analyse de l’exécution budgétaire de la Cour des comptes sur ces mêmes missions pour 2018,

Vu les travaux de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques les 3, 4 et 6 juin 2019,

Considérant que le consentement à l’impôt et l’autorisation des dépenses sont au fondement même des missions de la représentation nationale ;

Considérant que le respect de la loi de finances s’apprécie au regard du taux d’exécution des autorisations d’engagement et des crédits de paiement ;

Considérant qu’une consommation trop dispendieuse des deniers publics génère une dette qui obère notre présent et ternit celui des générations à venir et que la demande de moyens trop importants en janvier pour pouvoir être mobilisés en décembre se fait au détriment d’autres politiques publiques ;

Considérant que la mission Culture, la mission Outre‑mer et le programme Sport de la mission Sport, jeunesse et vie associative affichent des sous‑exécutions dépassant les 3 % du plafond accordé en loi de finances ou les ouvertures intervenues en loi de finances rectificative ;

Invite le Gouvernement :

– à envisager le dépôt au Parlement d’une « justification au premier euro », inspirée de la rubrique du même intitulé figurant dans les projets et rapports annuels de performances, portant sur les huit premiers mois de l’année budgétaire en cours, pour les unités de vote de la loi de finances ou leurs programmes qui font apparaître, dans le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’État pour l’exercice précédent, des sur‑exécutions ou sous‑exécutions dépassant de 3 % les plafonds votés en loi de finances initiale ou les ouvertures intervenues en loi de finances rectificative ;

– le cas échéant, à remettre ce document au plus tard à la date mentionnée au premier alinéa de l’article 39 de la loi organique n° 2001‑692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.