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N° 2276

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er octobre 2019.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création dune commission denquête relative
au développement de marchés parallèles pour la prise de rendezvous en préfecture,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

 

présentée par Mesdames et Messieurs

Alexis CORBIÈRE, Ugo BERNALICIS, Clémentine AUTAIN, Éric COQUEREL, Caroline FIAT, Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, JeanLuc MÉLENCHON, Danièle OBONO, Mathilde PANOT, Loïc PRUDHOMME, Adrien QUATENNENS, JeanHugues RATENON, Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, François RUFFIN, Bénédicte TAURINE

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En France, les habitants d’un certain nombre de départements se trouvent confrontés à des difficultés liées à la prise de rendez‑vous en ligne en préfecture ou sous‑préfecture. Assurés jusqu’il y a quelques années à l’accueil physique, les rendez‑vous destinés aux démarches administratives – renouvellement de carte d’identité, titre de séjour etc… – ont été dématérialisés dans le cadre des politiques publiques dites de simplification de l’action administrative.

À l’instar de la moitié des départements du territoire, les services de la préfecture de la Seine‑Saint‑Denis ont mis en place une procédure qui nécessite de s’inscrire sur la plateforme internet de l’institution pour réserver un créneau de rendez‑vous. Il apparait néanmoins que ce nouveau dispositif a révélé des dysfonctionnements et des conséquences imprévues.

En effet, le nombre trop souvent restreint de créneaux horaires proposés conduit à la saturation précipitée des places. Selon les associations et les remontées d’information des usagers, les délais pour obtenir un rendez‑vous en ligne peuvent ainsi varier de deux à six mois en fonction des particularismes locaux. Dans le département de Seine‑Saint‑Denis, ces délais sont parmi les plus élevés et accentuent les inégalités territoriales. D’après le réseau éducation sans frontière (RESF), l’attente peut s’étaler jusqu’à huit mois pour l’obtention d’un rendez‑vous.

Le nombre insuffisant de créneaux proposés comme les délais d’attente trop long ont conduit au développement d’un marché parallèle pour la prise de rendez‑vous. Les lacunes de l’offre face à l’afflux de demande alimentent et encouragent ces pratiques souterraines qui interrogent l’efficacité de ce dispositif dématérialisé et mettent à mal l’image du service public. 

En effet, face aux difficultés d’accès, certains habitants se trouvent contraints de se tourner vers ce marché parallèle, qui semble se développer de façon exponentielle et qu’utilisent des profiteurs mal intentionnés. D’importantes mannes financières sont ainsi générées, les rendez‑vous étant vendus de cent à deux cents euros, selon les témoignages et enquêtes des associations. Les premières victimes sont les usagers, et parmi elles les personnes étrangères et demandeurs d’asile dont la situation économique est déjà fragile pour une grande partie d’entre eux. Pour l’ensemble des usagers, cette situation est synonyme de graves complications quotidiennes, tant dans l’accès aux prestations sociales, à la santé, et à l’emploi.

Les associations et organismes d’aide à l’accès aux droits dénoncent cette situation depuis qu’elle existe, soit près de dix ans. Le ministère de l’Intérieur est conscient de cette problématique et en a reconnu la portée. Dans une réponse à une question écrite d’un parlementaire, datant du 2 juillet 2019, il qualifie ce phénomène de « tentatives de détournement de la procédure par des acteurs privés peu scrupuleux qui préemptent, via des robots, des rendezvous ».

Dans cette réponse, le ministère indique qu’un nouveau système d’information de l’accès à la nationalité française est en cours de développement. Celui‑ci ne semble pas prendre la mesure de l’importance du marché parallèle qui, lui, concerne l’intégralité des rendez‑vous sans distinction de la démarche administrative ciblée (renouvellement de carte d’identité, titre de séjour, etc.…). Les dispositifs pour remédier à ces problématiques sont insuffisants faute de moyens à la hauteur des enjeux et ils semblent inefficaces pour répondre à la forte demande des citoyens.

Cette commission d’enquête parlementaire permettra de déterminer l’ensemble des causes à l’origine du marché parallèle des rendez‑vous en ligne ainsi que de proposer les mesures adéquates pour y remédier.

 


proposition de rÉsolution

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, il est créé une commission d’enquête de trente membres, chargée de :

1. Établir l’ensemble des causes à l’origine des marchés parallèles pour la prise de rendez‑vous en ligne sur les plateformes internet des préfectures ;

2. Évaluer les besoins humains, techniques, financiers et matériels pour assurer des rendez‑vous dans un délai raisonnable et exempts de toute possibilité de marchandisation ;

3. Développer une approche globale sur la prévention des risques de marchandisation des rendez‑vous en préfecture ainsi que sur la mise en place de sanctions adéquates pour les personnes, physiques ou morales, participant des marchés parallèles.