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N° 2490

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 décembre 2020.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

pour une juste réforme des retraites,

 

présentée par

M. Nicolas DUPONTAIGNAN,

député.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le système de retraites par répartition, instauré au lendemain de la Seconde Guerre mondiale par le général de Gaulle, constitue une « masse de granit » qui rassemble nos concitoyens, sert l’unité du pays et assure la solidarité entre les générations.

En faisant cotiser les actifs actuels pour financer les pensions des retraités, notre système par répartition a permis de faire reculer la pauvreté chez nos aînés, même si de trop nombreux retraités vivent encore avec des pensions très modestes au regard de leur vie de travail.

Les Françaises et les Français ont confiance dans un système clair, qui leur assure des pensions pérennes dont chacun connait le montant au regard de ses cotisations. Ils ont d’ailleurs compris qu’il fallait sauver notre système par répartition en acceptant des sacrifices nécessaires à l’équilibre financier et démographique, notamment par l’allongement de la durée de cotisation et le décalage de l’âge de départ à la retraite.

Pendant la campagne présidentielle, M. Emmanuel Macron s’était engagé à ne pas demander d’efforts supplémentaires. Au contraire, il avait pris l’engagement de ne toucher ni au montant des pensions, ni à l’âge de départ, ni à la durée de cotisation. Au contraire, il souhaitait corriger certaines injustices, qu’il s’agisse de privilèges coûteux, des pensions bien trop basses de certains travailleurs comme les retraités agricoles ou encore les inégalités subies par les femmes.

Debout la France partageait ces objectifs précis, à savoir conserver l’intégrité de notre système de retraite par répartition tout en corrigeant les injustices persistantes que les Françaises et les Françaises ne supportent plus.

Hélas, force est de constater que la réforme annoncée par le Gouvernement indique un projet contraire à toutes les promesses présidentielles. Pire encore, il s’agit d’une véritable mise à sac du système des retraites par répartition actuel sans en corriger les défauts !

La meilleure preuve de la soutenabilité de notre régime des retraites a été apportée par le Conseil d’orientation des retraites (COR). Malgré les discours irresponsables visant à effrayer les Français pour extorquer leur soutien à la réforme Gouvernementale, la soutenabilité de long terme de notre système de retraites est assurée grâce aux efforts consentis par les Français lors des réformes passées. Le COR prévoit ainsi que, même dans les hypothèses de croissance les plus défavorables (1%/an), la part des retraites par rapport au PIB restera constante à 14 % du PIB d’ici 2070.

Pour justifier ses renoncements, le Gouvernement manipule le déficit minime que le COR établi entre 7,9 et 17 milliards d’euros à partir de 2025, un chiffre à mettre en rapport avec le versement des retraites de 324,5 milliards d’euros en 2018 par exemple. Ce déficit minime existe mais il est tout à fait possible de le résorber par la fin des privilèges injustifiés – 5 milliards d’euros par an selon la Cour des Comptes –, une lutte sans merci contre la fraude sociale de l’immigration irrégulière – 10 à 15 milliards d’euros par an selon le Sénat – et une relocalisation volontariste des emplois industriels sur le sol français – la fin des travailleurs détachés dégagerait à elle‑seule plus d’un milliard d’euros de cotisations annuelles.

Hélas, le Gouvernement ne cherche nullement à combattre le déficit minime par les mesures de bon sens que nous venons d’évoquer mais manipule et dramatise ce chiffre pour mettre à terre notre système de retraite par répartition. Qui peut croire qu’il faille appauvrir 95 % des retraités pour régler la question des régimes spéciaux qui concerne les 5 % restant ?

En effet, le Gouvernement va instaurer un régime par point qui va réduire mécaniquement et massivement les pensions de retraites. Dans le régime actuel, les pensions sont calculées sur les 25 meilleures années dans le privé. Ce système permet d’écarter les difficultés de la vie, les périodes de précarité et de chômage pour mieux valoriser la carrière réelle de tout à chacun. Pour les fonctionnaires, ce sont les six derniers mois qui sont retenus car les évolutions de salaires sont bien plus lentes et les primes ne sont pas prises en compte.

Or en choisissant de calculer les pensions sur l’intégralité des 43 ans de carrière le Gouvernement va recalculer les pensions à la baisse en intégrant les mauvaises années ! Il choisit donc l’effondrement automatique des revenus des retraités. Notre système ne sera absolument pas sauvé mais au contraire mis à terre de telle sorte que les actifs seront obligés de recourir à des fonds privés pour compenser la perte de revenus et obtenir une pension décente. Le Gouvernement cherche tout simplement à forcer nos concitoyens à passer à une retraite par capitalisation pour l’intérêt bien compris des fonds financiers privés !

Le système gouvernemental « à points » est d’autant plus lourd de menaces pour les pensions des Français qu’il prévoit un dispositif d’équilibrage financier automatique… Autrement dit, le Gouvernement pourra baisser comme il le souhaite la valeur du point et ce faisant, baisser d’autant la valeur des pensions !

En Suède, un système similaire à conduit, après la crise de 2008, à une baisse importante des pensions des retraités. En France même, la diminution de la valeur du point dans le régime des médecins décidée en 2011 a conduit à une baisse de 10 % des pensions déjà liquidées. Alors que les retraités ont déjà été durement touchés par la désindexation des pensions par rapport à l’inflation, le passage à un tel système les soumettrait à l’arbitraire budgétaire des Gouvernements. Les retraites seront utilisées comme une variable d’ajustement financier !

Pire encore, la réforme du Président Emmanuel Macron ne corrige aucun défaut majeur que nos compatriotes ne supportent plus. La réforme des privilèges des régimes spéciaux est renvoyée aux calendes grecques, les carrières des femmes ne sont pas valorisées comme il se doit et les règles de pénibilité ne sont pas clairement établies. Pire, le Gouvernement crée de nouvelles injustices en voulant piller les réserves financières accumulées avec précaution par les professions libérales comme les avocats, les médecins et bien d’autres qui verront au surplus leur cotisation doubler pour une pension moindre… une véritable triple peine pour tous les libéraux !

Enfin, cette réforme va rompre le contrat que tout retraité et tout actif français avait passé avec l’État et la nation. En modifiant les règles du jeu au milieu d’une carrière parfois bien avancée, le Gouvernement va créer une injustice pour laquelle personne n’a jamais voté !

Les signataires invitent donc l’Assemblée nationale à dénoncer l’intention du Gouvernement de mettre en œuvre une réforme qui plongerait les Français dans l’insécurité quant au montant de leurs futures pensions, briserait le contrat moral entre l’État et les citoyens et ouvrirait la voie au passage à un système par capitalisation injuste et dangereux.

 


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant que le système des retraites constitue un élément central de la solidarité nationale et intergénérationnelle et contribue puissamment à la solidité du lien national ;

Considérant l’inquiétude des Français quant aux incertitudes produites par la réforme envisagée, notamment s’agissant du montant de leurs pensions ;

Considérant l’absence de garantie fournie par les régimes de retraites dits « par points » quant au maintien du niveau réel des pensions ;

Considérant la stabilité prévisible du poids des pensions dans le PIB à l’horizon 2070, rendant la réforme proposée inutile sur le plan strictement budgétaire ;

Invite le Gouvernement :

  1. à maintenir le système de retraites par répartition hérité du Conseil national de la Résistance et abandonner les projets de réforme visant à instaurer un système « par points » ;
  2. à maintenir l’âge légal à 62 ans et la durée de cotisation à 43 ans, paramètres dont l’augmentation passée a déjà demandé d’importants sacrifices aux Français et qui assurent aujourd’hui la soutenabilité de long terme du système ;
  3. à résorber le déficit annoncé du régime des retraites par de véritables réformes courageuses : la fin des abus et des privilèges de certains régimes spéciaux, la lutte contre la fraude sociale de l’immigration, la fin des travailleurs détachés et la relocalisation des activités industrielles.
  4. à unifier enfin les régimes spéciaux avec le régime général sur la base d’une vraie reconnaissance mutuelle de la pénibilité. Il est tout à fait normal que les carrières dans des métiers difficiles soient objectivement compensées. En revanche, ces avantages ne doivent plus être réservés à quelques entreprises particulières. Inversement, certains métiers ordinaires d’entreprises particulières ne peuvent plus bénéficier d’avantages que les Français ne comprennent plus.
  5. à renoncer immédiatement à piller les réserves financières et les cotisations modérées que les professions libérales ont pu établir grâce à leur bonne gestion et leurs efforts.
  6. à s’engager quant au maintien d’une indexation des pensions a minima sur l’inflation et au rétablissement de la demi‑part fiscale des veuves et veufs.
  7. à garantir une pension supérieure au seuil de pauvreté à tous ceux qui ont travaillé dur, pension financée par la fin des abus de l’immigration dans les dépenses de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, qui voient des personnes n’ayant jamais cotisé en France bénéficier d’une pension qui pèse sur l’équilibre financier du système ;
  8. à valoriser une politique familiale volontariste qui permette aux Françaises et aux Français d’avoir les enfants qu’ils souhaitent et de garantir le renouvellement des générations.
  9. à élargir les garanties actuelles offertes aux femmes pour compenser les injustices subies pendant leur carrière pour que personne n’ait à choisir entre vies familiale et professionnelle.
  10. à reconnaitre le travail des conjoints et épouses d’artisans, agriculteurs et toute profession qui crée de la richesse sans avoir été reconnu à sa juste valeur.
  11. à s’engager quant à l’application de toute réforme systémique aux nouveaux arrivants sur le marché du travail seulement, afin de garantir les droits acquis et de respecter le contrat implicite entre l’État et les citoyens.