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N° 2904

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 mai 2020.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

relative à relocalisation de la fabrication des médicaments
et des principes actifs pharmaceutiques en Europe,

(Renvoyée à la commission des affaires européennes)

présentée par Mesdames et Messieurs

Fabrice BRUN, Damien ABAD, Emmanuelle ANTHOINE, Julien AUBERT, Thibault BAZIN, Valérie BAZINMALGRAS, JeanYves BONY, JeanClaude BOUCHET, Ian BOUCARD, Pascale BOYER, Guy BRICOUT, Jacques CATTIN, Gérard CHERPION, Paul CHRISTOPHE, Olivier DAMAISIN, Stéphane DEMILLY, Vincent DESCOEUR, Julien DIVE, JeanPierre DOOR, PierreHenri DUMONT, JeanJacques FERRARA, Fabien DI FILIPPO, Nicolas FORISSIER, Agnès FIRMIN LE BODO, Claude de GANAY, Philippe GOSSELIN, Meyer HABIB, Patrick HETZEL, Philippe HUPPÉ, Sandrine JOSSO, Mansour KAMARDINE, Jacques KRABAL, Sonia KRIMI, Brigitte KUSTER, JeanChristophe LAGARDE, Fabien LAINÉ, Marc LE FUR, Constance LE GRIP, MarieFrance LORHO, Véronique LOUWAGIE, Lise MAGNIER, JeanLouis MASSON, Jean François MBAYE, Emmanuelle MÉNARD, Frédérique MEUNIER, Pierre MORELÀLHUISSIER, Christophe NAEGELEN, Jérôme NURY, Matthieu ORPHELIN, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Didier QUENTIN, JeanLuc REITZER, Martial SADDIER, Hervé SAULIGNAC, JeanMarie SERMIER, Éric STRAUMANN, Guy TEISSIER, JeanLouis THIÉRIOT, Agnès THILL, Isabelle VALENTIN, Pierre VATIN, Francis VERCAMER, Arnaud VIALA, Michel VIALAY, JeanPierre VIGIER,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Il y aura un avant et un après covid‑19 !

Nombreux sont les enseignements à tirer de cette crise sanitaire, à commencer par notre approvisionnement, notamment dans les secteurs vitaux comme la santé ou l’alimentation.

Il nous faut renforcer nos solidarités, retrouver une indépendance nationale et européenne, en particulier dans le domaine des principes actifs thérapeutiques et des médicaments. 

En la matière, le niveau européen est le plus pertinent. L’Europe est en effet l’échelle adaptée pour réfléchir sur une chaîne de valeur pharmaceutique, si nous voulons mettre fin à l’ultra dépendance vis à vis de la Chine et plus globalement de l’Asie.

Il est aujourd’hui indispensable d’envisager au plus vite la relocalisation d’une industrie pharmaceutique sur le continent européen, afin de garantir notre approvisionnement collectif en médicaments et principes actifs pharmaceutiques essentiels à notre sécurité sanitaire.

La pénurie de médicaments, déjà palpable avant la crise du covid‑19, inquiète patients, hôpitaux, médecins et pharmaciens. Elle n’est pas acceptable, car elle est préjudiciable pour les patients et les professionnels de santé.

En septembre 2018, le Sénat avait attiré l’attention du Gouvernement en rendant publiques les conclusions du rapport « Pénuries de médicaments et de vaccins : replacer léthique de santé publique au cœur de la chaîne du médicament ».

L’épidémie du covid‑19 a cruellement mis en évidence notre dépendance extérieure en matière produits sanitaires, avec les pénuries de produits anesthésiants, de médicaments de grande consommation comme le Doliprane ou de principes actifs spécifiques comme la Chloroquine.

80 % des principes actifs pharmaceutiques sont fabriquées en Chine et en Inde.

La crise du covid‑19 nous a cruellement fait prendre conscience du degré incroyable de dépendance de notre pays et du continent à l’égard d’approvisionnements venant de Chine en particulier, dans le domaine de l’industrie de santé, où l’on pourrait penser qu’un impératif sanitaire devrait prévaloir. 

Ce 6 mai 2020 le Haut Représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères, Josep Borrell a d’ailleurs souligné qu’il n’était « pas normal que lEurope ne produise pas le moindre gramme de paracétamol et que la Chine concentre 80 % de la production mondiale d’antibiotiques ».

C’est pourquoi, il est indispensable de relocaliser sur le continent européen une industrie pharmaceutique capable d’approvisionner les européens en médicaments et principes actifs pharmaceutiques essentiels à notre sécurité sanitaire.

Cette politique de relocalisation est d’autant plus pertinente qu’elle n’irait pas à l’encontre du développement des acteurs du secteur. En effet, depuis quelques années, un retour a été amorcé par certains industriels européens.

Cette relocalisation à l’échelle européenne passe par plusieurs mesures, déjà envisagée par le Sénat dans son rapport sur la pénurie de médicaments et de vaccins du 27 septembre 2018, et plus récemment par le parlement européen dans une proposition de résolution du 16 avril 2020 telles que : 

– 1) l’élargissement des compétences de l’Agence européenne des médicaments (EMA) pour lui permettre d’encadrer les essais cliniques de phase I et de phase II et d’apporter ainsi une réponse à la pénurie de médicaments indispensables dans les unités de soins intensifs, imputable à l’augmentation de la demande ;

– 2) l’adoption sous l’égide de l’agence européenne du médicament (EMA), d’une définition de la notion de médicament essentiel ainsi qu’une liste de médicaments et principes pharmaceutiques actifs stratégiques pour la sécurité sanitaire européenne ;

– 3) au niveau européen d’une définition de la rupture d’approvisionnement ainsi qu’une grille standard d’évaluation du risque associé à une situation de tension ou de rupture ;

– 4) la mise en œuvre d’un pacte fiscal pour l’implantation en Europe de sites de production de médicaments et de principes pharmaceutiques actifs essentiels pour la sécurité sanitaire européenne ;

À ce titre plusieurs pistes complémentaires peuvent être privilégiées :

– la mise en place d’exonérations fiscales ciblées au bénéfice d’entreprises s’engageant sur des investissements pour l’implantation en France ou en Europe de sites de production de médicaments ou de principes pharmaceutiques actifs essentiels pour la sécurité sanitaire européenne ;

– le renforcement de la taxation à l’entrée de l’Union Européenne des médicaments et principes actifs fabriqués en dehors de l’Union.

– 5) la signature entre l’Union Européenne, les entreprises pharmaceutiques et l’industrie chimique un accord‑cadre tripartite visant à accompagner l’augmentation des capacités de production de médicaments et de principes pharmaceutiques actifs essentiels en France et prévoyant des contreparties aux aides financières qui seront accordées.

Tels sont Mesdames, Messieurs, les objectifs de la présente proposition de résolution européenne.

 


proposition de résolution europÉenne

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88‑4 de la Constitution,

Vu l’article 151‑5 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu le rapport de la mission d’information du Sénat sur la pénurie de médicaments et de vaccins du 27 septembre 2018,

Vu l’article 168 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE),

Vu la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain,

Vu le règlement (CE) n° 726/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments,

Vu la décision nº 1313/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relative au mécanisme de protection civile de l’Union,

Vu la proposition de résolution du Parlement européen sur une action coordonnée au niveau de l’Union européenne pour lutter contre la pandémie de covid‑19 et ses conséquences du 16 avril 2020,

Considérant que la crise sanitaire du covid‑19 a mis en évidence la dépendance sanitaire de l’Europe vis à vis de l’Asie en matière de médicaments et de principes actifs essentiels,

Considérant que les industriels de l’industrie pharmaceutique ont pris conscience de la nécessité de relocaliser leur production sur le continent européen et ont déjà commencé à réinvestir sur le continent,

Considérant qu’il est indispensable de relocaliser sur le continent européen une industrie pharmaceutique capable d’approvisionner les européens en médicaments et principes actifs pharmaceutiques essentiels à notre sécurité sanitaire,

1) Affirme qu’il est essentiel d’élargir les compétences de l’Agence européenne des médicaments (EMA) pour lui permettre d’encadrer les essais cliniques de phase I et de phase II et d’apporter ainsi une réponse à la pénurie de médicaments indispensables dans les unités de soins intensifs, imputable à l’augmentation de la demande.

2) Considère qu’il convient d’adopter, sous l’égide de l’agence européenne du médicament (EMA), une définition de la notion de médicament essentiel ainsi qu’une liste de médicaments et principes pharmaceutiques actifs stratégiques pour la sécurité sanitaire européenne.

3) Appelle à établir au niveau européen une définition de la rupture d’approvisionnement ainsi qu’une grille standard d’évaluation du risque associé à une situation de tension ou de rupture.

4) Suggère la mise en œuvre d’un pacte fiscal pour l’implantation en Europe de sites de production de médicaments ou de principes pharmaceutiques actifs essentiels pour la sécurité sanitaire européenne.

Ce pacte fiscal serait fondé sur :

– la mise en place d’exonérations fiscales ciblées au bénéfice d’entreprises s’engageant sur des investissements pour l’implantation en France ou en Europe de sites de production de médicaments ou de principes pharmaceutiques actifs essentiels pour la sécurité sanitaire européenne ;

– le renforcement de la taxation à l’entrée de l’Union Européenne des médicaments et principes pharmaceutiques actifs fabriqués en dehors de l’Union.

5) Propose la signature entre l’Union européenne, les entreprises pharmaceutiques et l’industrie chimique un accord‑cadre tripartite visant à accompagner l’augmentation des capacités de production de médicaments et de principes pharmaceutiques actifs essentiels en France ou en Europe et prévoyant des contreparties aux aides financières qui seront accordées.