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N° 2914

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 mai 2020.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

déclarant la nécessité du rachat de la dette publique par la Banque centrale européenne et de sa transformation en dette perpétuelle,

 

 

 

présentée par Mesdames et Messieurs

JeanLuc MÉLENCHON, Clémentine AUTAIN, Ugo BERNALICIS, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Caroline FIAT, Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, Danièle OBONO, Mathilde PANOT, Loïc PRUDHOMME, Adrien QUATENNENS, JeanHugues RATENON, Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, François RUFFIN, Bénédicte TAURINE,

député.e.s.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le soutien de l’État à l’économie, rendu nécessaire pour faire face à l’épidémie de covid‑19, engendre une inévitable augmentation de la dette publique sur le court terme. Le Gouvernement estime ainsi que le déficit public se creusera plus que ses prévisions initiales, à environ 9 % du produit intérieur brut, tandis que la dette publique atteindrait 115 % du produit intérieur brut. Il est probable qu’elle augmente encore dans un futur proche, même s’il est utile de rappeler que la comparaison de la dette au produit intérieur brut annuel n’a pas de sens économique.

Dès lors, que faire de cette dette publique ? Le débat est ancien mais va se poser avec une acuité particulière dans les semaines et les mois à venir. Sous la houlette du gouvernement allemand et avec l’aval des présidents Sarkozy et Hollande, la Commission européenne a mené notre continent vers l’austérité et la destruction de l’État et des services publics.

Pourtant en 2020, certains, comme le gouverneur de la Banque de France, proposent toujours une politique austéritaire en coupant dans les futures dépenses. Mais l’investissement des États dans le financement des infrastructures collectives et des services publics, notamment dans la santé, apparaît plus nécessaire que jamais. Les services privés et le marché sont incapables d’y parvenir. C’est d’ailleurs même inefficace comme l’ont montré les conséquences désastreuses de la cure d’austérité imposée à la Grèce, incapable de sortir d’une saignée finalement plus forte que le mal initial.

Quelles autres solutions s’offrent à nous ? La guerre ? Personne n’en veut. L’inflation ? Personne ne sait plus la déclencher même en lâchant des milliers de milliards d’euros sur les marchés comme l’a fait la Banque centrale européenne (BCE) pendant deux ans pour un montant équivalent à une année de production de la France. Les eurobonds ? Ils sont une illusion qui ne règle pas le problème : il faudra toujours les rembourser. Le défaut de paiement ? Ce serait un désastre et le chaos.

La solution que nous proposons est pragmatique. D’abord la transformation de la dette actuelle des États par la banque centrale européenne en dette perpétuelle à taux nul. Aujourd’hui, 18 % de la dette publique française est stockée à la banque centrale. Sa transformation en dette perpétuelle permettrait d’effacer pour notre pays le cout de la crise sanitaire. Cela peut se faire immédiatement. La Banque centrale européenne pourra ensuite augmenter sa politique de rachat des dettes publiques sur le marché secondaire pour les geler petit à petit. Cette opération ne nécessite pas de changer les traités européens.

Pour la suite, il faut que la Banque centrale européenne puisse directement acheter de la dette aux États, plutôt que de la racheter aux banques privées comme elle l’a fait jusqu’ici. Ainsi, les États pourraient financer les investissements nécessaires pour l’avenir dans les services publics et la planification écologique. Car rendonsnous à l’évidence, cette dette ne sera jamais réglée et rien ne sert de la payer ! Mener à bien cette politique de salut public impliquerait bien entendu de remettre en cause les dogmes économiques de l’Union européenne, les traités qui la régissent et les statuts et le mandat de la Banque centrale européenne, qui lui assurent une indépendance problématique et des objectifs contraires à l’intérêt général.

Monétiser la dette par la banque centrale est la solution la plus raisonnable, la seule sérieusement envisageable. Elle est plus pertinente que jamais. Sinon quoi ? Vaton pendant les cent prochaines années n’avoir d’autre projet de société que de payer une dette contractée pour payer les dégâts de l’ère productiviste à l’heure où il faut investir pour sortir de cette façon de produire et d’échanger.

Ainsi, l’État libéré pourra investir dans les services publics et mieux rémunérer ceux qui les font vivre, planifier la bifurcation écologique, soutenir l’économie et éradiquer la pauvreté.

 


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu le projet de loi de finances rectificative pour 2020, n° 2820, déposé le mercredi 15 avril 2020,

Vu le Traité de fonctionnement de l’Union européenne,

Considérant l’impact budgétaire des mesures prises pour faire face à l’épidémie de covid‑19 ;

Considérant la nécessité de soulager les États de la charge de la dette afin de faciliter leur retour dans le financement des infrastructures collectives et les services publics et de la bifurcation écologique ;

1. Invite le Gouvernement à exiger de l’Union européenne que la Banque centrale européenne rachète les dettes publiques et les transforme en dettes perpétuelles à taux nul.

2. Invite le Gouvernement à œuvrer au niveau de l’Union européenne pour que la Banque centrale européenne émette de la dette publique des États à taux nul ou à des taux négatifs pour les maturités à long terme.

3. Invite le Gouvernement à œuvrer au niveau de l’Union européenne à la remise en cause du mandat et des statuts de la Banque centrale européenne.