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N° 3532

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 novembre 2020.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

invitant le Gouvernement à agir en faveur d’une plus forte coopération internationale pour la mise en œuvre du concept décloisonné
et transdisciplinaire d’une seule santé,

 

 

présentée par Mesdames et Messieurs

Loïc DOMBREVAL, Yolaine de COURSON, Valérie THOMAS, Lionel CAUSSE, Annie CHAPELIER, Guillaume CHICHE, Fabienne COLBOC, Yves DANIEL, Typhanie DEGOIS, Yannick HAURY, AnneChristine LANG, Sandrine LE FEUR, JeanMichel MIS, Claire O’PETIT, Sophie PANONACLE, AnneLaurence PETEL, Bénédicte PÉTELLE, Valérie PETIT, Michèle PEYRON, Nathalie SARLES, Sylvain TEMPLIER, Huguette TIEGNA, JeanLouis TOURAINE, Élisabeth TOUTUTPICARD, Nicole TRISSE, Frédérique TUFFNELL, Laurence VANCEUNEBROCK, Hélène ZANNIER, Souad ZITOUNI, JeanMarc ZULESI,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Affronter les menaces d’aujourd’hui et résoudre les problèmes de demain ne peuvent être accomplis avec les approches d’hier ».

C’est une des conclusions d’un colloque sur le concept « One Health » traduit en « une seule santé » qui s’est tenu à New York en 2004, il y a 16 ans.

« One Health » qui est à la fois un concept, une stratégie et un objectif, accroît incontestablement sa présence dans la communication d’organisations internationales de santé publique comme l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Mais le concept « une seule santé» est rarement, voire jamais, intégré dans les prises de décision sanitaires des gouvernements.

Pourtant la déclaration suivante est porteuse d’espoirs :

« Nous nous engageons à intégrer l’approche “une seule santé” dans toutes les politiques et tous les processus décisionnels pertinents à tous les niveaux, afin d’aborder la santé et la durabilité environnementale de manière intégrée. »

C’est en effet en ces termes que soixante de dirigeants et chefs d’État, dont le Président de la République, Emmanuel Macron, se sont engagés à l’occasion du sommet sur la biodiversité que s’est tenu virtuellement le 30 septembre dernier.

Cet engagement « virtuel » doit rapidement produire des effets concrets.

Ce concept « une seule santé », avec l’approche interdisciplinaire qu’il promeut, peut nous aider à mieux appréhender, anticiper et gérer l’irruption de nouvelles pandémies.

Comme il peut inspirer nos prises de décisions dans les domaines sanitaires, économiques, alimentaires et politiques, il est intéressant de se remémorer les quelques principes fondamentaux qui ont été livrés lors de la conférence organisée par la Société pour la Conservation de la vie sauvage, en 2004 à New York déjà évoquée.

Le premier de ces principes réside évidement dans la reconnaissance même des liens entre santé humaine, santé animale et environnement.

Un autre principe essentiel tient à la nécessité d’approches à la fois globales et prospectives des maladies infectieuses émergentes tenant compte des interconnexions complexes entre espèces.

Il s’agit aussi d’augmenter les investissements dans les infrastructures de santé et les réseaux internationaux de surveillance des maladies infectieuses, avec pour corollaire de partager rapidement et clairement les informations.

Mais au‑delà, aujourd’hui, le principe, peut‑être le plus important des principes posés, est sans doute lié à la sensibilisation des décideurs politiques à l’interconnexion du vivant.

Les solutions sanitaires classiques ont un impact négatif sur l’économie sans pour autant faire preuve d’une grande efficacité pour traiter et surtout prévenir la menace de nouvelles pandémies.

Par ailleurs, ces pandémies sont par définition planétaires. La solution est obligatoirement globale.

Considérant cet enjeu, il est urgent de le programmer à l’agenda politique.

Le 1er octobre 2020, le colloque digital « Une seule planète, une seule santé » a été relayé depuis l’Assemblée nationale auprès de 400 participants professionnels, organismes de recherche, médecins, écologues, vétérinaires, représentants de l’État, agences et organisations internationales en santé.

À son terme, l’ensemble des participants au colloque ont souhaité voir progresser l’approche « Une seule santé » et sa prise en compte par les institutions internationales en santé.

Les ministres des affaires étrangères, de la transition écologique et de l’agriculture ont souhaité à cette occasion diffuser un message de soutien à cette initiative.

Aujourd’hui, du point de vue de la gouvernance internationale, les trois grandes organisations références, l’OMS, la FAO et l’OIE, ont, certes, signé une déclaration tripartite sur les approches intégrées de la santé, mais la dimension liée à la santé environnementale, peine à s’y exprimer suffisamment.

C’est pourquoi des chercheurs du Cirad, ainsi que l’Académie vétérinaire de France ont proposé que le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) rejoigne la démarche globale « One Health » de l’OMS, la FAO, l’OIE.

À l’image de toute problématique d’échelle mondiale, comme le changement climatique par exemple, l’organisation de la prévention et de la gestion des risques doit être multilatérale et aligner les objectifs des États en la matière.

S’agissant de la nouvelle étape indispensable qui est celle d’un portage politique de l’approche « une seule santé », il semble évident que la France, par son histoire sanitaire et par ses réseaux d’excellence a un rôle privilégié à jouer, un rôle de catalyseur, un rôle de chef de filât.

Que le France accepte de prendre à son compte ce rôle de chef de filât pour impulser une structuration internationale de politique intégrée du concept « d’une seule santé » c’est tout l’objet de la présente proposition de résolution.


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant que le constat de la nécessité absolue d’appréhender, simultanément, santé humaine, diversité génétique des animaux, techniques d’élevage, commercialisation des volailles, migrations des oiseaux sauvages et écologie des virus, remonte à 2003, lors de l’expansion mondiale de l’épizootie d’influenza aviaire hautement pathogène qui a depuis touché soixante‑trois pays ;

Considérant toutefois que la prise de conscience mondiale de l’importance de gérer ces types de crises nouvelles à un niveau réellement global, n’a pas été suivie d’assez d’effets pour nous permettre d’anticiper et de prévenir la pandémie du SARS‑CoV‑2, et de nous doter d’un dispositif commun de gestion de crise, tant sur le plan sanitaire, qu’économique et environnemental ;

Considérant que si les différents acteurs de santé humaine et animale ont bien été amenés à se coordonner et à penser ensemble les moyens de lutte ; un renforcement de la coordination entre l’Organisation mondiale de la santé, l’Organisation mondiale de la santé animale et l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture, le Programme des Nations unies pour l’environnement et les instances environnementales, avec la tenue de réunions tripartites annuelles et l’adoption de normes conjointes et la mise en place des réseaux communs d’expertise, une accélération de cette coopération s’agissant de la recherche, de l’anticipation et de la gestion des crises est indispensable ;

Considérant que la crise sanitaire du covid‑19 a mis en évidence les limites de l’approche conventionnelle et cloisonnée des maladies infectieuses interactions entre les santés humaine, animale et environnementale ;

Considérant que la France est en mesure de jouer un rôle privilégié du fait de l’implantation mondiale d’un réseau sanitaire d’excellence envié, à commencer par le réseau des Instituts Pasteur, fort de vingt‑quatre établissements, répartis sur les cinq continents qui constitue une structure unique au monde dans le domaine de la santé humaine, assurant une mission de veille microbiologique à l’échelle internationale ;

Considérant que l’Institut de recherche pour le développement est présent dans une cinquantaine de pays, que le Centre international de recherche agronomique pour le développement dispose, quant à lui, d’un réseau mondial de partenaires et de douze directions régionales, à partir desquelles il mène des activités de coopération avec plus de quatre‑vingt‑dix pays dans les domaines des sciences du vivant, des sciences sociales et des sciences de l’ingénieur appliquées à l’agriculture et à l’alimentation ;

Considérant que la forte présence de la France sur la scène internationale, à travers sa participation aux instruments multilatéraux et, sa capacité de négociation lors des rencontres internationales et de l’animation des conventions internationales, qui la prédestine à porter, au niveau international, un plaidoyer pour le concept « d’une seule santé » ;

Invite le Gouvernement à agir en faveur d’une plus forte coopération internationale qui, au‑delà d’un réseau de vigilance, d’une mutualisation de moyens, d’un partage de connaissances et des retours d’expériences, au‑delà de la mobilisation des grandes organisations internationales concernées, sous l’égide du Secrétariat général des Nations unies, permettra de faire émerger une politique commune et intégrée de mise en œuvre du concept transdisciplinaire d’une seule santé, décloisonnant santé humaine, santé animale et santé environnementale.