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N° 3655

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 décembre 2020.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

invitant le Gouvernement à présenter au Parlement, avant le 30 juin 2021, un plan quinquennal de désendettement public,

 

 

présentée par Mesdames et Messieurs

Dino CINIERI, Emmanuelle ANTHOINE, Édith AUDIBERT, AnneLaure BLIN, JeanClaude BOUCHET, Bernard BROCHAND, Jacques CATTIN, Pierre CORDIER, Josiane CORNELOUP, Annie GENEVARD, Michel HERBILLON, Véronique LOUWAGIE, Emmanuel MAQUET, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Guillaume PELTIER, Bérengère POLETTI, Nathalie PORTE, Didier QUENTIN, Bernard REYNÈS, JeanMarie SERMIER, Robert THERRY, Isabelle VALENTIN, Arnaud VIALA, Stéphane VIRY,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Il n’y a pas d’argent magique » répondait le Président de la République à l’interpellation d’une blouse blanche, lors d’une visite du CHU de Rouen en avril 2018.

De « l’argent magique », le Président en a pourtant trouvé, beaucoup, depuis le début de l’épidémie de la covid‑19 qui bouleverse la France et son économie. Comme l’écrit François Lenglet, dans Quoi qu’il en coûte ([1]), « les milliards débloqués se succèdent dans les annonces de l’Élysée, celles de Matignon et celles de Bercy, le ministère des finances, rebaptisé ministère de la dépense. Quelque 460 milliards d’euros ont été décaissés ou promis en quelques semaines, au printemps 2020. Soit plus d’une année de dépenses de l’État ».

Quatre lois de finances rectificatives ont été adoptées, depuis mars 2020, auxquelles il faut ajouter le plan de relance de 100 milliards d’euros, contenu dans le projet de loi de finances pour 2021.

Force est de constater que la crise de la covid‑19 a plongé nos finances publiques dans le coma : un déficit public de 248 milliards d’euros en 2020, une dette s’envolant à 120 % du PIB et un niveau de dépenses publiques – 65 % du PIB ! – jamais vu dans l’Histoire.

Selon un rapport de la Cour des comptes de juin 2020 ([2]) : « La dette publique augmenterait de près de 270 milliards d’euros en 2020 et dépasserait 120 points de PIB. En montant, elle représenterait l’équivalent de presque 40 000 euros par Français ».

Conclusion : « La dette publique (est) une bombe à retardement pour les Français » pour reprendre le titre de l’étude que l’association Contribuables Associés vient de publier ([3]). Et d’aucuns de fantasmer sur l’annulation de la dette ([4])

Conscient de cette situation, le Gouvernement vient d’installer la « Commission sur l’avenir des finances publiques », présidée par Jean Arthuis, qui a pour mission de faire des propositions au Gouvernement, d’ici fin février 2021, pour établir une trajectoire de finances publiques (État, Sécurité sociale et collectivités locales) post‑crise covid « sur le moyen terme ».

En 2005 déjà, le ministre des finances Thierry Breton, avait chargé Michel Pébereau de créer une commission dans le but de :

« – mettre en évidence les conditions dans lesquelles la dette publique actuelle s’est constituée ;

« – définir les orientations et les mesures nécessaires pour assurer le redressement de nos finances publiques et réduire leurs charges pour le futur ;

« – proposer toutes mesures de nature à dégager des marges de manœuvre nouvelles en appui des réformes que doit mettre en œuvre notre pays, y compris les mesures relatives à la gestion de la dette elle‑même ».

Remis le 14 décembre 2005 au ministre des finances, le rapport Pébereau sur la dette publique a été suivi, cinq ans plus tard, du rapport du groupe de travail, présidé par Michel Camdessus, qui concluait la deuxième session de la conférence sur les déficits publics organisée le 20 mai 2010 à l’initiative du Président de la République.

Michel Pébereau avait publié dans L’Année des professions financières 2013, ouvrage de référence, un article expliquant comment ce rapport datant de 2005 était toujours d’actualité face à la nécessité de la résorption du déficit public français à travers la réduction des dépenses publiques.

Autant dire, qu’en cette fin d’année 2020, cette conclusion n’a pas pris une ride ! Il s’agit là, plus que jamais, d’une ardente obligation… !

Commissions et rapports se succèdent depuis 20 ans et la dette augmente inexorablement ! Il est désormais plus que temps d’agir.

Comme le déclarait Jean Arthuis ([5]) : « Il s’agit de ne pas terminer comme la Grèce, que chacun prenne conscience que nous sommes aujourd’hui en danger de perte de souveraineté. Le contexte est tel qu’il nous faut prendre les moyens d’être entendus par l’opinion publique. Il faut nous interroger sur la gouvernance de nos finances publiques car il y a deux types d’États : ceux qui ont mis de l’ordre dans leurs finances et ceux qui les ont laissées dériver ».

Quelques décennies plus tôt, Pierre Mendes‑France martelait que « les comptes en désordre sont la marque des peuples qui s’abandonnent ». Et Jacques Rueff de poursuivre : « Il n’y a pas de déficits sans pleurs ».

Il est donc primordial qu’à l’issue des travaux de la « Commission sur l’avenir des finances publiques » le Gouvernement présente au Parlement un plan quinquennal de désendettement public et ce, avant le 30 juin 2021.

Tel est, Madame, Monsieur, le sens de la proposition de résolution suivante que nous vous demandons de bien vouloir adopter.


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 de son Règlement,

Considérant  que pour faire face aux conséquences économiques et sociales de la crise de la covid‑19, quelque 460 milliards d’euros ont été décaissés ou promis en quelques semaines, au printemps 2020, soit plus d’une année de dépenses de l’État ;

Considérant que le déficit public atteindra 248 milliards d’euros en 2020 ;

Considérant que la dette publique s’envolera à 120 % du PIB en 2020 ;

Considérant que le niveau de dépenses publiques  passera à 56 % à 65 % du PIB en 2020, soit un niveau jamais vu dans l’Histoire ;

Considérant que la dette publique, qui pèse sur les générations futures, est une bombe à retardement pour les Français ;

Considérant que la situation des finances publiques ne peut plus se satisfaire de commissions et de rapports restés sans suite ;

Considérant que le désendettement public est une ardente obligation ;

Invite le Gouvernement à présenter au Parlement, avant le 30 juin 2021, un plan quinquennal de désendettement public.


([1]) Albin Michel, octobre 2020.

([2]) « La situation et les perspectives des finances publiques », Cour des comptes  (30.06.2020), p. 11.

([3]) Étude # 38 – Octobre 2020 – https://agir.touscontribuables.org

([4]) Cf. Le Point 2493 / 4 juin 2020, p. 32.

([5]) Le Point – 4 décembre 2020.