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N° 3951

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 mars 2021.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

visant à commémorer le bicentenaire de la mort de Napoléon,

 

 

présentée par Mesdames et Messieurs

Julien AUBERT, Thibault BAZIN, Philippe BENASSAYA, AnneLaure BLIN, Sandrine BOËLLE, Ian BOUCARD, JeanLuc BOURGEAUX, Bernard BROCHAND, Fabrice BRUN, Jacques CATTIN, Julien DIVE, JeanJacques GAULTIER, Annie GENEVARD, Yves HEMEDINGER, Michel HERBILLON, Marc LE FUR, Constance LE GRIP, Emmanuel MAQUET, Jérôme NURY, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Didier QUENTIN, Julien RAVIER, Robin REDA, Nathalie SERRE, Guy TEISSIER, Robert THERRY, Laurence TRASTOURISNART, Pierre VATIN, Stéphane VIRY,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 15 août 1969, Georges Pompidou, élu président de la République depuis deux mois à peine, se rendait à Ajaccio pour célébrer avec éclat le bicentenaire de la naissance de Napoléon, lançant une série de commémorations dans tout le pays. La France de 1969, celle de Pompidou succédant à Charles de Gaulle, n’avait aucun problème avec l’héritage napoléonien car elle se reconnaissait dans cette ambition, celle d’une France puissante en Europe, ayant un message à lancer au monde et prétendant tutoyer l’Histoire.

L’époque a changé. Le 5 mai 2021 marquera le bicentenaire de sa mort à Sainte‑Hélène. À moins de deux mois de l’échéance, le président de la République et le gouvernement n’ont toujours rien dévoilé de leurs intentions concernant l’organisation d’une cérémonie de commémoration.

Les oppositions à cette célébration, afin de plaire notamment aux mouvements indigénistes et décoloniaux, sont nombreuses. Du vainqueur d’Austerlitz, on ne veut retenir dans les articles qui lui sont consacrés que l’esclavage et la question diversitaire, qui sont pourtant très loin de résumer son action.

Nous le voyons chaque jour, la France est en crise économique, sociale et surtout morale, doutant d’elle‑même. Elle s’affaiblit face au diktat de la pensée « correct » qui lui impose de se convertir à la repentance et d’expier tout ce qui a pu la rattacher à la grandeur et à la gloire, et dont Napoléon est l’odieux symbole aux yeux des tenants de la culture de l’annulation. Déjà en 2004 et 2005, les anniversaires du Sacre comme de la bataille d’Austerlitz avaient fait l’objet d’un service minimum, alors que cinq bâtiments de la Marine Nationale furent envoyés pour célébrer le Bicentenaire de Trafalgar.

La « mauvaise conscience » pourra‑t‑elle longtemps dissimuler le talent d’un visionnaire ayant su construire et s’inscrire dans la durée ?

En effet, pour avoir de « bonnes » raisons de célébrer sa mémoire, il suffit de regarder autour de soi et de voir combien la France d’aujourd’hui porte encore les traces de son œuvre : le code civil, le code pénal, le corps préfectoral, le Conseil d’État, la Cour des comptes, la Légion d’honneur, l’université, le baccalauréat, l’École spéciale militaire de Saint‑Cyr, la Banque de France... Parmi les dirigeants que la France a connus, quels sont ceux qui parviennent ne serait‑ce qu’à approcher un tel bilan en l’équivalent de deux septennats ?

Il n’est évidemment pas question de faire de Napoléon un saint, qualité qu’il n’a jamais revendiquée. Il n’a jamais prétendu faire de la morale une politique et a même commis des fautes, la plus lourde d’entre elles ayant été de n’avoir jamais su mettre un terme à sa fuite en avant, à sa soif de victoires et de conquêtes, alors que la France des 130 départements allait de Lübeck à Rome et soumettait l’Europe entière à sa volonté.

Toutefois, le problème qui se pose aujourd’hui est que Napoléon n’est pas critiqué en France aujourd’hui pour de bonnes raisons, et en fonction d’une analyse historique intellectuellement rigoureuse. Il est attaqué sur la base d’amalgames et d’anachronismes.

Il a rétabli l’esclavage dans les colonies françaises ? L’esclavage était présent dans toutes les colonies, et subsistera aux États‑Unis encore cinquante ans après Waterloo. Son code civil n’a pas donné aux femmes leur pleine autonomie ? Le statut de la femme était alors inférieur à celui de l’homme partout dans le monde ! La IIIe République, célébrée par Emmanuel Macron le 4 septembre 2020, n’a‑t‑elle pas pendant les 70 ans de son existence jamais donné aux femmes le droit de vote, sans que personne ne le lui reproche aujourd’hui ?

Il est également une autre raison pour laquelle il serait une erreur de faire tomber Napoléon dans les oubliettes de l’Histoire. Il incarne en effet la puissance de l’intégration à la française. Lui qui, à un an près, serait né génois, élevé dans la langue corse, il a subi les moqueries de ses condisciples de l’École militaire de Brienne qui le considéraient comme un étranger. Toutefois, malgré ces brimades de jeunesse, le caractère de Napoléon l’a conduit à toujours faire le choix de la France jusqu’à la symboliser à lui tout seul. Napoléon a ainsi démontré par son histoire personnelle que l’appartenance à la nation française était beaucoup moins une affaire de filiation ou de déterminisme, qu’une question de choix, de volonté et de persévérance.

La vraie motivation de ceux qui expriment les plus violentes critiques contre Napoléon est inavouée. Leur but ultime est d’éradiquer définitivement l’identité française, de déconstruire la Nation et de lui substituer une mosaïque de communautés. Ce qui leur est insupportable est que le « petit caporal » incarne une France forte, rayonnante, ambitieuse, convaincue d’avoir un rôle de premier plan à jouer en Europe et au‑delà. Ignorer le bicentenaire de la mort de Napoléon reviendrait à capituler. Dans son discours de réception à l’Académie française en 1841, Victor Hugo avait dit : « Au commencement de ce siècle, la France était pour les nations un magnifique spectacle. Un homme la remplissait alors et la faisait si grande qu’elle remplissait l’Europe ».

Pour toutes ces raisons il est essentiel que la France célèbre la mémoire de Napoléon à l’occasion de ce bicentenaire.

 

 


proposition de rÉsolution

Article unique

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant que le 5 mai 2021 marquera le bicentenaire de la mort de Napoléon Ier ;

Considérant que Napoléon Ier nous a légué un grand nombre d’institutions sur lesquelles nous nous appuyons encore aujourd’hui ;

Considérant que Napoléon Ier incarne à la fois un symbole de la grandeur de la France ainsi qu’un modèle d’intégration à la culture de notre pays ;

Considérant que des célébrations ont été organisées par le passé relatives à la mémoire de Napoléon ou de son œuvre ;

Invite le Gouvernement à prévoir l’organisation d’une cérémonie officielle visant à commémorer le bicentenaire de la mort de Napoléon Ier pour cette année 2021.