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N° 4412

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 juillet 2021.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

portant sur la nécessité de reconnaître le Gouvernement d’unité nationale de Birmanie,

présentée par Mesdames et Messieurs

Michel HERBILLON, Éric WOERTH, Damien ABAD, Annie GENEVARD, Philippe BENASSAYA, JeanMarie SERMIER, Nathalie PORTE, Émilie BONNIVARD, Bernard BOULEY, Bernard BROCHAND, Didier QUENTIN, JeanClaude BOUCHET, Julien RAVIER, JeanJacques FERRARA, Michèle TABAROT, Michel VIALAY, Frédéric REISS, Philippe MEYER, Thibault BAZIN, JeanJacques GAULTIER, Gérard MENUEL, Isabelle VALENTIN, Véronique LOUWAGIE, Édith AUDIBERT, Maxime MINOT, Pierre VATIN, Guy TEISSIER, Fabrice BRUN, Bérengère POLETTI, Sandra BOËLLE, JeanLuc BOURGEAUX, FrançoisMichel LAMBERT, Marguerite DEPREZAUDEBERT, Frédérique DUMAS, Emmanuelle ANTHOINE, Brigitte KUSTER, Éric CIOTTI, Alain DAVID, JeanPaul LECOQ, Laurence TRASTOURISNART, Nathalie SERRE, Stéphane VIRY,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 1er février 2021, les forces armées birmanes ont dirigé un coup d’État contre leur gouvernement démocratiquement élu. Ce gouvernement était issu des élections du 8 novembre 2020 qui ont été très largement remportées par la Ligue nationale pour la démocratie (NLD National League for Democracy) de l’opposante historique à la junte militaire, Aung San Suu Kyi. L’élection a renforcé la majorité absolue du NLD au sein du Parlement puisque qu’il a obtenu plus de 80 % des sièges à la Chambre basse du Parlement. Le parti de l’Union, de la solidarité et du développement de l’union (PUSD) contrôlé par l’armée n’obtenant que quelque dizaine de sièges.

Après avoir tenté de contester, sans succès, les résultats du scrutin devant la Commission électorale, les forces armées birmanes procèdent à l’arrestation du Président de la République U Win Myint, de la Conseillère pour l’Etat, Aung San Suu Kyi et de centaines de personnes (élus, fonctionnaires mais aussi journalistes, chanteurs à succès, ou influenceurs sur les réseaux sociaux…). Différentes associations évoquent plus de 3000 personnes arrêtées dont un nombre considérable sont encore aujourd’hui portée disparues.

Le vice‑président le général Myint Swe issu du PSUD est désigné président par interim tandis que le chef de l’armée Min Aung Hlaing concentre les pouvoirs législatif, administratif et judiciaire après avoir proclamé pour un an l’état d’urgence, annulé le résultat des élections du 8 novembre, bloqué internet, suspendu les chaines d’informations, bloqué l’accès à l’aéroport international et déployé des camions militaires devant les ambassades américaines et australiennes…

Dès le 6 février, passée la stupeur, le peuple birman comme il l’a déjà fait courageusement à plusieurs reprises dans son histoire, entame un mouvement de désobéissance civile, appelle à des mouvements de grèves et descend massivement dans les rues afin de défendre le processus de transition démocratique déjà obtenu de haute lutte au début des années 2010.

Après des appels aux Birmans afin qu’ils « rentrent chez eux et mettent fin aux mobilisations » la Junte au pouvoir s’enfonce peu à peu dans une répression de plus en plus violente y compris les tirs à balles réelles sur les manifestants pacifiques.

Les chiffres de différentes ONG évoquent plus de 800 morts lors de cette répression dont 75 enfants selon une communication du Comité des droits de l’enfant à l’ONU publié en juillet.

Les réactions de la communauté internationale sont immédiates : « condamnation ferme du coup d’Etat en Birmanie et appel à la libération tous ceux qui sont illégalement détenus »  dès le 2 février de l’Union européenne, réunion du Conseil de sécurité de l’ONU avec adoption le 4 février d’une déclaration exprimant « sa profonde préoccupation et demandant la libération de tous les détenus », puis appel du Secrétaire général de l’ONU à « cesser immédiatement la répression », condamnation ferme du Président Biden et mise en œuvre des premières sanctions économiques visant les dirigeants de la Junte..

Soutien du peuple birman, les Parlementaires français ne peuvent pas être absents de ce processus de pression diplomatique et international. En aucun cas, la Junte au pouvoir ne doit pouvoir s’installer dans la durée et continuer sa violente répression. 

Le 16 avril 2021, la création d’un Gouvernement d’unité nationale composé des principales ethnies par le Comité représentant le Parlement de l’Union issu des élections de novembre 2020 est annoncé. Sa composition, les objectifs qu’il affiche sont une réelle source d’espoir. Il est donc urgent de soutenir cette initiative qui prône la paix, la réconciliation nationale et qui s’inscrit dans la logique démocratique que la France soutient en Birmanie depuis 2010.

C’est l’objet de la présente proposition de résolution présentée en termes identiques à la fois par le Sénat et l’Assemblée nationale.

 

 


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant le résultat des élections démocratiques en Birmanie en novembre 2020 qui ont vu la large victoire du parti d’Aung San Suu Kyi, la Ligue nationale pour la démocratie ;

Considérant le coup d’État militaire du 1er février 2021 par lequel l’armée a pris le pouvoir par la force en Birmanie et proclamé l’état d’urgence ;

Considérant la détention arbitraire par l’armée birmane de nombreuses personnalités politiques, défenseurs des droits de l’homme, journalistes, membres de la société civile, universitaires, enseignants, personnels médicaux, chefs religieux et ressortissants étrangers ;

Considérant la création, le 16 avril 2021, d’un Gouvernement d’unité nationale composé des principales ethnies par le Comité représentant le Parlement de l’Union issu des élections générales de novembre 2020 ;

Considérant les déclarations de l’Union européenne du 2 février et du 30 avril 2021 ainsi que les mesures de sanctions prises par l’Union européenne les 22 mars et 19 avril derniers à l’encontre des responsables du coup d’État en Birmanie et des intérêts économiques des forces armées birmanes ;

Considérant le sommet de l’ Association des nations de l’Asie du Sud‑Est du 24 avril 2021 qui s’est conclu par un consensus en cinq points sur la nécessité immédiate de mettre fin aux violences, l’ouverture d’un dialogue constructif entre toutes les parties concernées, la désignation d’un envoyé spécial de la présidence de l’ Association des nations de l’Asie du Sud‑Est pour faciliter la médiation du processus de dialogue réunissant l’ensemble des parties en Birmanie, l’aide humanitaire de l’Association des nations de l’Asie du Sud‑Est et la visite en Birmanie de l’envoyé spécial, lequel n’est pour l’heure pas autorisé par les autorités militaires à entrer sur le territoire birman ;

Considérant la position exprimée le 5 mai 2021 par les ministres des Affaires étrangères et du développement du G7 condamnant avec la plus grande fermeté le coup d’État militaire en Birmanie et réaffirmant leur solidarité avec toutes les personnes qui défendent une démocratie inclusive et agissent en ce sens, notamment les membres du Comité représentant le Parlement de l’Union et d’autres dirigeants favorables à la démocratie, ainsi que les membres du Gouvernement d’unité nationale, du mouvement de désobéissance civile ;

Considérant la poursuite de la répression de l’armée birmane à travers le pays, le nombre élevé de victimes civiles et de personnes emprisonnées ainsi que de personnes déplacées, au mépris de toutes les conventions internationales ;

Invite le Gouvernement à travailler avec ses partenaires européens à obtenir de la communauté internationale une condamnation générale et la plus vigoureuse du coup d’État du 1er février 2021, de la prise du pouvoir qui s’en est suivie ainsi que des violences commises par les forces de sécurité contre la population civile ;

Invite le Gouvernement à appeler avec la plus grande fermeté au respect des résultats des élections générales du 8 novembre 2020, à la fin de l’état d’urgence et à la libération immédiate et sans condition des prisonniers politiques arrêtés depuis le coup d’État, dont le Président de la République et la Conseillère de l’État, et à entreprendre toutes les démarches en ce sens ;

Invite le Gouvernement à procéder à une reconnaissance du Gouvernement d’unité nationale de Birmanie qui permette d’enclencher un processus de retour à l’ordre constitutionnel, et à apporter son soutien au Gouvernement d’unité nationale dans ses actions pour le rétablissement de la paix et de la démocratie en Birmanie, dans le respect de toute la mosaïque des populations locales, et en relation avec les partenaires européens et les organisations de la communauté internationale, telles que les organisations régionales compétentes et l’Organisation des Nations unies.