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N° 4707

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 décembre 2021.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

renforçant la lutte contre les violences faites aux travailleurs sociaux,

 

présentée par

M. Stéphane VIRY,

député.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les travailleurs sociaux ont été définis pour la première fois en 1959, par les Nations Unies, comme : « une activité visant à aider à l’adaptation réciproque des individus et de leur milieu social, cet objectif est atteint par l’utilisation de techniques et de méthodes destinées à permettre aux individus, aux groupes, aux collectivités de faire face à leurs besoins, de résoudre les problèmes que pose leur adaptation à une société en évolution, grâce à une action coopérative, d’améliorer les conditions économiques et sociales ».

Puis, 40 ans plus tard, la Fédération internationale des travailleurs sociaux a modifié la définition donnée par les Nations unies, en caractérisant leur travail comme consistant à chercher « à promouvoir le changement social, la résolution des problèmes liés aux relations humaines, la capacité et la libération des personnes afin d’améliorer le bienêtre général. Grâce à l’utilisation des théories du comportement et des systèmes sociaux, le travail social intervient au point de rencontre entre les personnes et leur environnement. Les principes des droits humains et de la justice sociale sont fondamentaux pour le travail social ».

Dans le sens courant, le travail social est défini comme « l’ensemble d’activités sociales conduites par des personnes qualifiées, dans le cadre d’une mission autorisée et/ou prévue par la loi, au sein de structures publiques ou privées, en direction de personnes ou de groupes en difficultés, afin de contribuer à la résolution de leurs problèmes ».

Autrement dit, ces professionnels œuvrent dans le domaine de l’action sociale et de la santé sociale, plus largement. Ils aident les personnes dans le besoin, en les conseillant ou en trouvant des solutions à leurs problèmes sociaux, dans les actes de la vie quotidienne ou encore en facilitant leur insertion.

Les travailleurs sociaux exercent dans diverses institutions : dans des centres sociaux, dans les services de l’État ou les collectivités territoriales, dans des services d’accueil de la petite enfance, dans des établissements pour personnes handicapées et pour personnes âgées, pour des associations…

Leur place est capitale dans notre société. On comptait 1 200 000 travailleurs sociaux en France en 2020. Pourtant, malgré l’importance de cette place, leur situation se dégrade depuis plusieurs années, sans que personne ne réponde à leurs appels à l’aide.

En effet, cette profession est en crise depuis de longues années et la réalité est accablante.

Aujourd’hui, tout travailleur social parti en congé maternité ou encore à la retraite n’est pas remplacé. Il revient alors aux travailleurs sociaux déjà en poste de combler ce manque, en augmentant leur charge de travail. Pourtant, la rémunération ne suit pas, et ne correspond pas à l’investissement de ces professionnels.

Avec ce constat, s’accompagne une « file active » d’accompagnement doublée, même plus pendant la crise sanitaire, ne permettant pas un suivi de qualité. Cela augmente les délais de rendez‑vous et la qualité des accompagnements, au détriment de certaines missions pourtant essentielles.

Par ailleurs, alors que la qualité des suivis n’est déjà plus aussi effective qu’auparavant, des manques de place dans les institutions médico‑sociales ne permettent plus de mettre à l’abri certains publics que ces professionnels accompagnent.

Mais surtout, depuis quelques années, ces professionnels font de plus en plus face à des situations de violences, qu’elles soient institutionnelles, physique ou verbales. Déjà en 2001, le Conseil supérieur du travail social (CSTS) adoptait le rapport « Violence et champ social », relevant une augmentation du sentiment d’insécurité dans l’exercice de la pratique professionnelle des travailleurs sociaux.

Le constat est accablant : plusieurs travailleurs sociaux ont trouvé la mort dans l’exercice de leur fonction. Déjà en 2010, une assistante sociale, directrice d’un Clic en Ariège, a été tuée devant ses locaux. Deux ans plus tard, à Caen, un ancien détenu à tenté de tuer une éducatrice. En 2015, lors d’une visite médiatisée par le père d’un enfant, un éducateur spécialisé du Service Social de Protection de l’Enfance de Nantes a été tué d’un coup de couteau. Ou bien encore, en 2019, une éducatrice spécialisée à été tuée de plusieurs coups de couteau dans un foyer éducatif de Poitiers. Et cette année, deux meurtres sont à déplorer : celui de Cyril PIERREVAL, chef de service dans un Centre d’Accueil pour Demandeurs d’Asile (CADA) en février et celui d’Audrey ADAM, tuée par balle dans l’exercice de ses fonctions, au mois de mai.

En 2018, un article du « Lien Social » témoignait sur la réalité de ces professions : « Les affections psychiques sont très présentes dans trois secteurs d’activités, en lien direct avec du public : le médicosocial, le transport de personnes et le commerce de détail. 20 % des accidents du travail sont concentrés dans le secteur médicosocial alors que celuici n’emploie que 10 % de la masse salariale. Les cas de stress posttraumatique sont les plus présents dans le milieu sanitaire et le burnout touche en priorité le secteur social ».

Ainsi, les travailleurs sociaux font partie des professions avec le plus haut niveau de risques psychosociaux et une augmentation des burnout ces dernières années. Ce constat était pourtant déjà d’actualité en 2005, lorsque la Direction générale de la santé et la Direction générale de l’action sociale avaient signé un document reconnaissant un « réel malaise » des travailleurs sociaux « du fait de l’importance grandissante de situations qu’ils ont à traiter, dans lesquelles la dimension psychosociale des problèmes ou le trouble psychique de l’usager sont présents, de façon plus ou moins manifeste ». Ces « professionnels cibles » ne supportent plus ces conditions de travail.

L’objet de cette proposition de résolution est de renforcer la lutte contre les violences subies par les travailleurs sociaux en France dans la pratique de leur profession et de sécuriser son exercice.

 

 

 


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant laugmentation des violences physiques faites aux travailleurs sociaux dans lexercice de leurs fonctions ;

Considérant que la profession de travailleur social rencontre un haut niveau de risques psychosociaux ;

Considérant le manque de moyens humains ;

Plaide pour un renforcement de la lutte contre les violences subies par les travailleurs sociaux ;

Plaide pour la création dun numéro national de soutien aux travailleurs sociaux ayant été victimes de situation de violence ;

Plaide pour la création dun module quant à la gestion des situations de crise et de violence ;

Plaide pour créer un observatoire des violences pour les professions du social afin de quantifier le nombre de passage à lacte ;

Plaide pour une augmentation des moyens humains dans les institutions afin de procéder au remplacement des postes vacants ;

Invite le Gouvernement à réfléchir à des mesures de soutien envers les travailleurs sociaux victimes de violences subies dans lexercice de leurs fonctions ;

Invite le Gouvernement à mettre en place un numéro national de soutien pour ces professionnels.