Description : LOGO

N° 5215

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 avril 2022.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

visant à parfaire et consolider le statut du conjoint collaborateur,

 

présentée par Mesdames et Messieurs

M. Stéphane VIRY, Édith AUDIBERT, Sylvie BOUCHET BELLECOURT, Bernard BOULEY, Xavier BRETON, Dino CINIERI, Pierre CORDIER, MarieChristine DALLOZ, Julien DIVE, Annie GENEVARD, Victor HABERTDASSAULT, Yves HEMEDINGER, Michel HERBILLON, Patrick HETZEL, Mansour KAMARDINE, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Vincent ROLLAND, JeanMarie SERMIER, Robert THERRY, Laurence TRASTOURISNART, Pierre VATIN,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Selon l’URSAFF, est considéré comme conjoint collaborateur, le conjoint (marié, pacsé ou concubin) d’un chef d’une entreprise commerciale, artisanale ou libérale, qui exerce une activité professionnelle régulière dans l’entreprise sans percevoir de rémunération et sans avoir la qualité d’associé.

En tant que collaborateur d’un artisan ou d’un commerçant, il verse des cotisations en matière de retraite et d’invalidité‑décès et bénéficie en contrepartie de droits propres. Il s’acquitte également d’une cotisation « indemnité journalière » et peut être indemnisé en cas d’arrêt de travail.

Initialement entré dans la pratique par l’obligation d’assistance qui doit exister entre les époux, le législateur a prévu pour la première fois un statut de conjoint collaborateur dans la loi du 10 juillet 1982 relative aux conjoints d’artisans et de commerçants travaillant dans l’entreprise familiale. Cette loi de bon sens prévoyait en son article 1er que : « Le conjoint du chef d’une entreprise artisanale ou commerciale peut y exercer son activité professionnelle, notamment en qualité de conjoint collaborateur […], conjoint salarié, conjoint associé ».

La réforme de 2008 impose pour la première fois aux conjoints de chefs d’entreprises, exerçants à leurs côtés, d’opter pour l’une de ces trois solutions, sécurisant un peu plus un statut précaire en l’état.

Législativement, et malgré la loi n° 20211754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022, seulement cinq dispositions sont réservées aux conjoints collaborateurs. C’est peu. Trop peu.

Le témoignage de ces femmes et de ces hommes qui ont fait le choix de devenir conjoint collaborateur de leur conjoint(e) est sans appel : « Il s’agit véritablement d’une situation inconfortable, car on réalise le travail d’un dirigeant d’entreprise mais on est très loin d’être considéré comme tel »([1]).

Le statut de conjoint collaborateur permet finalement au chef d’entreprise de s’appuyer sur de la main d’œuvre « gratuite ». Et la situation est plus que difficile en cas de disparition dudit conjoint ou de divorce d’avec celui‑ci

Bien sûr, certains avantages sont attachés au statut : statut d’électeur et éligibilité aux élections professionnelles (Article L713‑4 du code de commerce), exclusion des effectifs de l’entreprise, obtention de la qualité d’ayant droit du chef d’entreprise, respect de la part des employés comme étant le prolongement de l’autorité du chef d’entreprise, accès à la formation professionnelle limitée.

Il bénéficie également d’avantages sociaux : assurance vieillesse, allocation maternité, assiette de cotisation, assurance maladie.

Mais est‑ce que ces avantages compensent réellement le statut précaire de conjoint collaborateur ?

Un plan initié lors de l’étude du PLFSS pour 2022 devait permettre un bond en avant pour le statut des conjoints collaborateurs. Il n’en est rien. Ce plan a bien sûr permis des innovations comme celui de l’accès aux trois statuts (conjoint collaborateur, conjoint associé, conjoint salarié) pour les concubins.

Il a également permis d’introduire un nouvel alinéa 11 à l’article L121‑4 du code du Commerce, en vigueur, qui dispose : « Une personne ne peut conserver le statut de conjoint collaborateur pendant une durée supérieure à cinq ans, en tenant compte de l’ensemble des périodes et des entreprises au titre desquelles elle a opté pour ce statut. » avant de poursuivre dans son alinéa 12 : « Audelà de cette durée, le conjoint continuant à exercer une activité professionnelle de manière régulière dans l’entreprise opte pour le statut de conjoint salarié ou de conjoint associé. A défaut, il est réputé avoir opté pour le statut de conjoint salarié. »

C’est une première marche en avant pour les conjoints collaborateurs. Mais n’est‑il pas désormais temps de limiter davantage dans le temps le bénéfice de ce statut (un ou deux ans maximum), voire de supprimer en l’état ce statut hybride et hors du temps et très préjudiciable pour le conjoint collaborateur (99 % de femmes).

C’est en tout état de cause le travail qui devra être réalisé dans les prochaines années par les pouvoirs publics, pour sécuriser une partie non négligeable de la population.

Tel est, en l’espèce, l’objet de cette proposition de résolution législative.


proposition de rÉsolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant que le statut de conjoint collaborateur est un statut qui n’ouvre pas droit à une rémunération et que certains droits de ces personnes sont limités ;

Considérant les différentes réformes qui ont vu le jour depuis 2005 pour tenter d’améliorer et de réformer le statut du conjoint collaborateur ;

Plaide pour une réforme profonde du statut ;

Invite le Gouvernement à remettre tous les deux ans un rapport au Parlement évaluant l’évolution de l’activité de conjoint collaborateur et éclairant le Parlement sur l’opportunité ou non de maintenir ce statut et à définir une nouvelle stratégie pour améliorer les relations statutaires entre les chefs d’entreprise et leur conjoint ;

Invite le Gouvernement à lancer un grand plan de réforme du statut de conjoint collaborateur prévu aux articles L. 121‑4 et suivants du code du commerce.


([1]) Propos recueillis dans le cadre d’un mémoire de Master 1, par Monsieur Quentin COLOMBIER, étudiant à l’Université de Lorraine – année universitaire 2017-2018.