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N° 1939

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 30 novembre 2023.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête sur la création et  la mise en œuvre du Pass culture,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Sarah LEGRAIN, Mme Mathilde PANOT, Mme Nadège ABOMANGOLI, M. Laurent ALEXANDRE, M. Gabriel AMARD, Mme Ségolène AMIOT, Mme Farida AMRANI, M. Rodrigo ARENAS, Mme Clémentine AUTAIN, M. Ugo BERNALICIS, M. Christophe BEX, M. Carlos Martens BILONGO, M. Manuel BOMPARD, M. Idir BOUMERTIT, M. Louis BOYARD, M. Aymeric CARON, M. Sylvain CARRIÈRE, M. Florian CHAUCHE, Mme Sophia CHIKIROU, M. Hadrien CLOUET, M. Éric COQUEREL, M. Alexis CORBIÈRE, Mme Alma DUFOUR, Mme Karen ERODI, Mme Martine ETIENNE, M. Emmanuel FERNANDES, Mme Sylvie FERRER, Mme Caroline FIAT, M. Perceval GAILLARD, Mme Raquel GARRIDO, Mme Clémence GUETTÉ, M. David GUIRAUD, Mme Mathilde HIGNET, Mme Rachel KEKE, M. Andy KERBRAT, M. Bastien LACHAUD, M. Maxime LAISNEY, M. Arnaud LE GALL, M. Antoine LÉAUMENT, Mme Élise LEBOUCHER, Mme Charlotte LEDUC, M. Jérôme LEGAVRE, M. Jean-François COULOMME, Mme Catherine COUTURIER, M. Hendrik DAVI, M. Sébastien DELOGU, Mme Murielle LEPVRAUD, Mme Élisa MARTIN, Mme Pascale MARTIN, M. William MARTINET, M. Frédéric MATHIEU, M. Damien MAUDET, Mme Marianne MAXIMI, Mme Manon MEUNIER, M. Jean-Philippe NILOR, Mme Danièle OBONO, Mme Nathalie OZIOL, M. René PILATO, M. François PIQUEMAL, M. Thomas PORTES, M. Loïc PRUD’HOMME, M. Adrien QUATENNENS, M. Jean-Hugues RATENON, M. Sébastien ROME, M. François RUFFIN, M. Aurélien SAINTOUL, M. Michel SALA, Mme Danielle SIMONNET, Mme Ersilia SOUDAIS, Mme Anne STAMBACH-TERRENOIR, Mme Andrée TAURINYA, M. Matthias TAVEL, Mme Aurélie TROUVÉ, M. Paul VANNIER, M. Léo WALTER, M. Aurélien TACHÉ, M. Jean-Claude RAUX, Mme Claudia ROUAUX,

députées et députés.

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Promesse centrale de la politique culturelle de M. Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2017, imaginé à l’automne 2017 et mis en place en 2019, le Pass Culture comptait 2,6 millions de jeunes bénéficiaires depuis son lancement en décembre 2022.

Le Pass Culture représente aujourd’hui un budget annuel de 273 millions d’euros, intégralement assumés par l’État.

Dans un rapport rendu public le mardi 18 juillet 2023, la Cour des Comptes a relevé d’importants dysfonctionnements dans la mise en place de ce chantier culturel voulu par Emmanuel Macron, notamment concernant le « recours extensif à des consultants extérieurs ».

Expérimenté dès le mois de mars 2018, ce qui est considéré comme un « chantier culturel prioritaire » selon les mots de l’Élysée, a été conçu comme un « startup d’État » nous apprend le rapport, qui nous révèle d’importants dysfonctionnements lors des deux premières années. « Il peut être tiré un bilan sévère de la phase de préfiguration du dispositif », pointe la Cour.

En effet, nous apprenons que le Pass Culture a été victime d’un mal récurrent au sein du Gouvernement depuis 2017 : les cabinets de conseils privés ! Ainsi, le rapport explique que « son pilotage a été emblématique des dérives du recours extensif à des consultants extérieurs pour des missions de nature administrative et politique ».

En mai 2018, un énarque, inspecteur des finances, ancien président du Centre National du Cinéma (CNC) et de l’image animée et créateur en 2015 de sa société de conseil, est désigné par le ministère de la Culture pour piloter le projet du Pass Culture.

Cette même société va travailler sur le projet du gouvernement, dans le cadre de missions de sous‑traitance, pour un montant total de 1,042 millions d’euros entre 2018 et 2019. Des missions qui interrogent, selon le rapport de la Cour des Comptes, « sur l’opportunité du recours à un consultant extérieur, en disponibilité de son administration d’origine, pour lui confier des missions de nature administrative du même ordre que celles qu’il aurait remplies dans le cadre d’un détachement ou d’une mise à disposition ».

 Ainsi, cet énarque s’est vu confier une mission de service public qui consistait à piloter et surveiller la mise en œuvre d’un dispositif gouvernemental, puis a été rémunéré par le prestataire de services et en même temps a été le principal bénéficiaire des marchés passés pour sa mise en œuvre.

En novembre 2019, il finit par démissionner, ayant échoué à sa principale mission à savoir trouver des fonds privés. Il est désormais directeur des affaires publiques de TikTok en France.

Après son départ, le Pass Culture voit le jour. La société est alors détenue par l’État et la Caisse des dépôts et consignations. La mise en œuvre du Pass à travers une SAS « a généré des contraintes complémentaires qui mettent la société en situation d’injonction contradictoire, selon que l’on considère d’un côté l’objectif initial d’élargir les sources de financement non public, de l’autre celui de porter une mission d’intérêt général en quasirégie », relève l’audit.

Enfin, il est à noter que la Cour des Comptes pointe dans son rapport des difficultés au cours de l’enquête, notamment sur la reconstitution de la liste et des fonctions précises des consultants affectés sur les missions propres au Pass Culture. À l’occasion de son audit, la Cour a constaté « l’absence d’archives pertinentes, voire la suppression d’une partie de celles du cabinet à compter de l’automne 2018 » et « la disparition de tout contenu des boîtes mail pour les années 2018 et 2019 ». Cela interroge particulièrement.

Tous ces éléments justifient que la représentation nationale mène une commission d’enquête sur la création et la mise en œuvre du Pass Culture, le rôle de l’ancien président du CNC dans la mise en œuvre du Pass Culture et des activités de sa société de conseil et de ses consultants pour le Pass Culture.

 


proposition de rÉsolution

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, est créée une commission d’enquête de trente membres sur la création de la SAS Pass Culture et les rôles et activités de la société de conseil de l’ancien président du CNC et de ses membres dans la mise en œuvre du Pass Culture.