N° 319
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 octobre 2024.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
visant à étendre la reconnaissance de maladies professionnelles pour les sapeurs-pompiers,
présentée par
Mme Alexandra MARTIN, Mme Josiane CORNELOUP, M. Éric PAUGET, Mme Émilie BONNIVARD, M. Nicolas RAY, M. Hubert BRIGAND, M. Julien DIVE, M. Michel HERBILLON, M. Jean-Pierre VIGIER, Mme Virginie DUBY-MULLER, M. François-Xavier CECCOLI, M. Laurent MAZAURY, M. Philippe FAIT, Mme Sandrine JOSSO, M. Christophe MARION, M. Romain DAUBIÉ, M. Yannick FAVENNEC-BÉCOT, Mme Julie DELPECH, M. Anthony BROSSE, Mme Aurore BERGÉ, M. David TAUPIAC, M. Stéphane VIRY, M. Vincent THIÉBAUT, M. Christophe NAEGELEN,
députées et députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les sapeurs‑pompiers jouent un rôle central et incontournable dans la sécurité de nos citoyens et de notre territoire. Au cœur des interventions d’urgence, ils sont en première ligne face aux catastrophes naturelles, incendies, accidents de la route, et diverses situations de sauvetage.
En plus d’être un maillon territorial indispensable, leur action et réactivité sont déterminantes pour la protection des personnes, des biens, et de l’environnement, faisant d’eux des acteurs essentiels de la sécurité publique.
Parmi leurs missions opérationnelles, certaines les exposent à des risques connus dont les conséquences destructrices sont évitables : fumées toxiques, particules, amiante, retardateurs de flammes, perturbateurs endocriniens et reprotoxiques, polychlorobiphényles (PCB), hydrocarbure aromatique polycyclique (HAP).
Ces expositions répétées augmentent le risque de développer des maladies graves comme le cancer. Par ailleurs, les études épidémiologiques confirment que les sapeurs‑pompiers présentent une incidence plus élevée de certains cancers, notamment ceux des poumons, de la peau et du système digestif, directement liés à ces expositions.
Alors que le Canada a voté un dispositif de protection avancé des professionnels du secours et de l’assistance (le Bill C‑224), et qu’il reconnait entre 9 (au Québéc) et 19 (en Ontario) cancers imputables à la profession de sapeur‑pompier, notre pays reste à la traine sur la reconnaissance des risques encourus par ces personnels.
En effet, aujourd’hui, seuls deux cancers sont présumés imputables à l’activité de sapeur‑pompier : le carcinome du nasopharynx (tableau 43 Bis de l’annexe II « Tableaux des maladies professionnelles prévus à l’article R. 461‑3 » du code de la Sécurité sociale) et le carcinome hépato‑cellulaire (tableau 45 du même code).
Les sapeurs‑pompiers victimes d’un autre type de cancer doivent donc apporter la preuve du lien entre le développement de cette maladie et l’exercice de ses fonctions, ce qui se révèle extrêmement difficile en l’absence de fiches d’exposition à des facteurs de risques.
En 2022, le centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a, après analyse de nombreuses études internationales, aggravé sa précédente cotation de 2007 en classant l’exposition professionnelle en tant que pompier « cancérogène pour l’homme (groupe 1) » avec des indications suffisantes pour le mésothéliome et le cancer de la vessie. Il mentionnait également dans ses travaux des indications limitées pour les cancers du côlon, de la prostate et du testicule ainsi que pour les mélanomes et le lymphome non hodgkinien. Plusieurs de ces syndromes seraient consécutifs à l’exposition répétée aux toxiques contenus dans les fumées d’incendie.
Dans ce contexte, il est indispensable de faire évoluer la reconnaissance des maladies professionnelles auxquelles sont exposés les sapeurs‑pompiers. Il est essentiel d’élargir le champ des pathologies reconnues, notamment pour couvrir l’ensemble des cancers liés à l’exposition prolongée aux produits toxiques, comme le préconise le CIRC.
Cette proposition de résolution vise donc à faire évoluer les dispositifs existants pour une meilleure prise en charge des risques, et pour rendre justice à ces hommes et femmes qui consacrent leur vie à la protection des autres.
Leur engagement pour la société mérite une reconnaissance à la hauteur des sacrifices consentis. C’est à travers une évolution des textes que nous pourrons renforcer la solidarité nationale à leur égard, tout en assurant leur sécurité et leur santé, conditions indispensables à l’exercice serein de leurs missions.
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proposition de RÉSOLUTION
Article unique
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 34‑1 de la Constitution,
Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,
Considérant que les sapeurs‑pompiers, dans l’exercice de leurs missions, sont exposés à des risques spécifiques, notamment aux substances toxiques, agents chimiques et situations dangereuses susceptibles de porter atteinte à leur santé à long terme ;
Considérant que, malgré des avancées en matière de reconnaissance des maladies professionnelles liées aux conditions de travail des sapeurs‑pompiers, plusieurs pathologies graves ne sont toujours pas officiellement reconnues, en particulier certains types de cancers dont l’incidence est accrue dans cette profession ;
Considérant les recommandations de nombreuses études scientifiques mettant en lumière les liens entre l’exposition à des fumées toxiques, produits chimiques cancérigènes, et le développement de maladies graves chez les sapeurs‑pompiers ;
Invite le Gouvernement à engager sans délai une révision des tableaux de maladies professionnelles afin d’y intégrer les recommandations du Centre international de recherche sur le cancer. Ces cancers doivent être reconnus pour les sapeurs‑pompiers en raison de leur exposition continue à des agents toxiques dans l’exercice de leur fonction ;
Invite le Gouvernement à créer un registre national des expositions des sapeurs‑pompiers, traçant de manière systématique leur participation à des interventions à risques (incendies, accidents chimiques, etc.) ;
Invite le Gouvernement à renforcer les examens médicaux réguliers et les bilans de santé spécifiques pour détecter précocement des signes de maladies graves, avec un suivi régulier et adapté aux risques professionnels des sapeurs‑pompiers.