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N° 784
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 janvier 2025.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
tendant à la création d’une commission d’enquête sur l’impréparation de Mayotte face aux risques naturels majeurs et les conséquences du délaissement de ce département par l’État,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
Mme Mathilde PANOT, Mme Aurélie TROUVÉ, Mme Mathilde HIGNET, Mme Nadège ABOMANGOLI, M. Aurélien TACHÉ, M. Laurent ALEXANDRE, M. Gabriel AMARD, Mme Ségolène AMIOT, Mme Farida AMRANI, M. Rodrigo ARENAS, M. Raphaël ARNAULT, Mme Anaïs BELOUASSA-CHERIFI, M. Ugo BERNALICIS, M. Christophe BEX, M. Carlos Martens BILONGO, M. Manuel BOMPARD, M. Idir BOUMERTIT, M. Louis BOYARD, M. Pierre-Yves CADALEN, M. Aymeric CARON, M. Sylvain CARRIÈRE, Mme Gabrielle CATHALA, M. Bérenger CERNON, Mme Sophia CHIKIROU, M. Hadrien CLOUET, M. Éric COQUEREL, M. Jean-François COULOMME, M. Sébastien DELOGU, M. Aly DIOUARA, Mme Alma DUFOUR, Mme Karen ERODI, Mme Mathilde FELD, M. Emmanuel FERNANDES, Mme Sylvie FERRER, M. Perceval GAILLARD, Mme Clémence GUETTÉ, M. David GUIRAUD, Mme Zahia HAMDANE, M. Andy KERBRAT, M. Bastien LACHAUD, M. Abdelkader LAHMAR, M. Maxime LAISNEY, M. Arnaud LE GALL, M. Antoine LÉAUMENT, Mme Élise LEBOUCHER, M. Aurélien LE COQ, M. Jérôme LEGAVRE, Mme Sarah LEGRAIN, Mme Claire LEJEUNE, Mme Murielle LEPVRAUD, Mme Élisa MARTIN, M. Damien MAUDET, Mme Marianne MAXIMI, Mme Marie MESMEUR, Mme Manon MEUNIER, M. Jean-Philippe NILOR, Mme Sandrine NOSBÉ, Mme Danièle OBONO, Mme Nathalie OZIOL, M. René PILATO, M. François PIQUEMAL, M. Thomas PORTES, M. Loïc PRUD’HOMME, M. Jean-Hugues RATENON, M. Arnaud SAINT-MARTIN, M. Aurélien SAINTOUL, Mme Ersilia SOUDAIS, Mme Anne STAMBACH-TERRENOIR, Mme Andrée TAURINYA, M. Matthias TAVEL, M. Paul VANNIER,
députées et députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le cyclone Chido a dévasté l’archipel de Mayotte le 14 décembre 2024, et à l’heure où nous écrivons ces lignes une nouvelle pré‑alerte cyclonique a été déclenchée face à l’approche d’une nouvelle tempête tropicale. Mayotte n’avait pas connu un cyclone d’une telle intensité depuis plus de 90 ans bien qu’elle soit fortement exposée aux risques naturels majeurs.
Les météorologues de Météo‑France avaient début novembre alerté sur le risque d’augmentation des cyclones sur la saison 2024‑2025 du fait de ces températures d’eau plus élevées et concluaient leur bulletin prévisionnel ainsi : « Rappelons que pour un endroit donné, il suffit d’un seul cyclone pour connaître un impact pouvant être catastrophique ».
Le cyclone Chido a probablement été favorisé par des eaux de surface proches de 30 degrés, température anormalement élevée qui fournit plus d’énergie aux tempêtes, favorisée elle‑même par le réchauffement climatique. Les études scientifiques les plus récentes s’accordent en effet sur l’augmentation du risque cyclonique dans un climat plus chaud. Les cyclones ne devraient pas être plus nombreux mais lorsqu’un cyclone se formera, la probabilité pour qu’il soit plus venteux et plus pluvieux sera augmentée.
Le bilan humain du cyclone Chido est tragique. 39 morts ont été recensés officiellement au 8 janvier et les autorités de Mayotte estiment également qu’il pourrait y avoir en outre « une quarantaine de personnes disparues, sans dépouilles mortuaires ». Mais le nombre de personnes décédées officiellement recensé n’est pas en adéquation avec la réalité des 100.000 personnes qui vivent dans un habitat précaire », selon les points de situation quotidiens de la préfecture. Et 5 600 blessés sont également à déplorer à cette heure.
Les dégâts matériels sont également considérables : à côté des toits endommagés, des poteaux électriques à terre, des arbres déracinés, des routes bloquées, l’habitat précaire (cases en toits de tôle, bidonvilles) a été complètement détruit alors qu’il concerne au moins un tiers de la population de l’archipel.
La quasi‑totalité des surfaces forestières qui couvraient 20 % du territoire a été dévastée, selon l’ONF qui indique que retrouver des écosystèmes fonctionnels pourrait prendre 10 à 20 ans.
De nombreuses exploitations agricoles ont aussi été ravagées et « Deux ou trois ans minimum seront nécessaires pour retrouver le niveau d’autosuffisance de Mayotte avant le cyclone Chido » estime M. Joël Huat, chercheur au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad).
Même si les données permettent difficilement d’établir un bilan économique précis, les entreprises mahoraises ont été durement touchées et devront être soutenues : « On est très inquiet pour l’économie. Les commerces de quartier n’ont pas d’électricité, ils n’ont pas d’eau, ils ne peuvent pas rouvrir. C’est vraiment la disparition totale des très petites entreprises (TPE) qui risque d’arriver à la fin de cette crise », redoutait M. Bourahima Ali Ousseni, le président de la confédération des petites et moyennes entreprises de Mayotte, le 27 décembre.
Ce risque augmenté se combine à la vulnérabilité et l’impréparation de Mayotte : Mayotte est un territoire qui compte un grand nombre d’habitats précaires, insuffisamment préparé aux risques, avec des inégalités dans l’accès aux alertes météorologiques et aux abris, ou encore des pénuries d’eau à répétition. De nombreuses voix s’élèvent pour créer dans les plus brefs délais une commission d’enquête pour faire la lumière sur la gestion de la crise, le contexte l’entourant et les réponses à apporter pour que Mayotte se relève et ne subisse plus.
L’État détient une lourde part de responsabilité face à l’ampleur des dégâts humains et matériels, à la détresse de la population marquée dans sa chair. À Mayotte, 101e département de France, la République fait défaut et la départementalisation n’a en rien permis l’égalité réelle. Colonisée par la France en 1841, Mayotte a été arrachée au reste de l’archipel des Comores en 1975 à la suite du vote contre l’indépendance des Mahorais, se distinguant des îles voisines comoriennes. Une telle scission était alors contraire au droit international et à l’Organisation des Nations Unies qui déclare intangible des frontières issues de la colonisation. Mayotte est ainsi restée française mais la région en a été déstabilisée et les conséquences s’en font toujours ressentir, même si les gouvernements préfèrent rejeter la faute sur « l’étranger » comorien opposé au Mahorais alors qu’ils formaient peu d’années avant un peuple commun.
L’État français a gardé Mayotte mais l’a délaissé, créant une économie post‑coloniale totalement dépendante de l’Hexagone, et le cyclone Chido a facilement terrassé un paysage socio‑économique vacillant dans ce département entièrement à part de la République.
Département le plus pauvre de France et meurtri par des inégalités structurelles et structurantes, les droits des personnes n’y sont pas respectés et les services publics sont défaillants. Toutes ces conditions de vie ont un impact sur la résilience de la collectivité face à un cyclone comme Chido.
Plus du trois quart des plus de 320 000 habitants vivent sous le seuil de pauvreté nationale, en 2018 la moitié de la population vivait avec moins de 260 euros par mois, soit un niveau de vie médian six fois plus faible qu’en France hexagonale. L’économie est au plus bas et le taux de chômage atteint les 37 % de la population en 2023.
Les droits fondamentaux n’y sont « pas effectifs » pour reprendre les termes utilisés par le Défenseur des droits en 2020 qui déplorait le « manque d’infrastructures de soins et d’éducation », rien n’a changé depuis. Tandis que le Président de la République n’hésite pas à mépriser les Mahorais en affirmant lors de son déplacement à Mayotte le 20 décembre 2024 que « Si ce n’était pas la France, vous seriez 10.000 fois plus dans la merde. Il n’y a pas un endroit dans l’océan Indien où on aide autant les gens », les services des ministères constatent que « les dépenses de l’État sont proportionnellement plus faibles à Mayotte que dans les autres départements et régions d’outre‑mer (DROM) ». L’État abandonne les Mahorais, « plus de 15 000 enfants » n’ont pas accès à une scolarité classique du fait des écoles saturées selon la Défenseure des droits. Le département le plus jeune de France délaisse ces jeunes. Le rapport d’information sur l’évaluation de la loi n° 2019‑791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance de juin 2023 dont le député de la France insoumise Jérôme Legavre était rapporteur révélait un « manque de salles de classe particulièrement prononcé dans la zone urbaine de Mamoudzou – où entre 60 et 80 % des écoles fonctionnent avec des horaires décalés – et, à plus forte raison, dans l’est de l’île de Grande‑Terre, où les écoles aux locaux « insalubres » ». Les heures de cours de chaque groupe d’élèves y sont concentrées sur une demi‑journée, au lieu d’une journée complète. Il met également en avant que le nombre d’élèves par classe à l’école maternelle est nettement supérieur à la moyenne nationale.
La santé, tout comme l’éducation, est au rabais. Mayotte ne compte que 260 médecins pour plus de 320 000 habitants (donc 81 médecins pour 100 000 personnes, contre 353 en moyenne en France hexagonale) et le nombre de lits d’hospitalisation disponibles représente à peine 40 % de la moyenne nationale. La population renonce souvent aux soins et les étrangers qui y vivent ont moins accès à la santé qu’en hexagone puisque par exemple l’Aide médicale d’État ne s’y applique pas.
Le cyclone a également révélé l’ampleur de la crise du logement à Mayotte. Au moins 4 habitations sur 10 étaient déjà des constructions précaires et 6 logements sur 10 dépourvus du confort sanitaire de base, comme l’eau courante. Les coupures d’eau durant plusieurs jours rythment le quotidien des Mahorais depuis longtemps maintenant, sans que rien ne bouge.
Malgré cet enfer quotidien subi de longue date par les Mahorais, malgré une vie chère qui les asphyxie financièrement (les produits alimentaires coûtent 30 % de plus que dans l’hexagone), ils ne bénéficient pas des mêmes droits sociaux que leurs concitoyens hexagonaux. Le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) horaire brut est de 8,98 euros contre 11,88 euros dans le reste de la France, le Revenu de solidarité active (RSA) est de 317,86 euros par mois pour une personne célibataire contre 635,70 euros dans les autres départements. Selon une étude de l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires) datant de 2022, les transferts financiers publics bénéficiant à Mayotte ne s’élèvent qu’à 5 000 par habitant contre plus de 20 000 euros par habitant de dépenses des administrations publiques pour la France entière, soit 4 fois plus. Comment peut‑on encore justifier de tels écarts, imposés à la population la plus pauvre de France ?
Face à une catastrophe naturelle d’une telle ampleur et à la fragilité de la population liées à ces inégalités, d’importants dégâts étaient inévitables. Néanmoins, ceux‑ci auraient pu être amoindris si une véritable politique de prévention des risques avait été mise en œuvre.
Comme l’a montré la commission d’enquête sur la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d’Outre‑mer, créée à la suite de l’adoption d’une proposition de résolution Jean‑Philippe Nilor lors de la niche parlementaire du groupe de La France insoumise en 2023 puis confisquée par une alliance entre les macronistes et la droite, les Outre‑mer sont particulièrement exposées à ces risques naturels (sécheresse, séismes, tempêtes, volcans…) qui sont amplifiés par le changement climatique. Mayotte est particulièrement concernée par des phénomènes de ruissellement, des essaims sismiques, une sécheresse sans précédent ces dernières années et un volcan sous‑marin qui se forme depuis 2019 sous l’île.
La Guyane et Mayotte sont les départements les plus faiblement couverts par un Plan de prévention des risques naturels. Selon Olivier Brahic, directeur général de l’Agence régionale de santé, à Mayotte il y a une faiblesse de la culture du risque cyclonique par rapport à La Réunion et aux Antilles. Il soulignait déjà l’inquiétante impréparation des populations en cas de cyclone : « le bilan victimaire pourrait être plus lourd [que pour Irma] du fait de l’importance des bangas et bidonvilles où les tôles qui s’envolent pourraient causer de très gros dégâts ».
La politique répressive envers la population a accentué les risques. Une partie des étrangers n’ont soit pas compris l’alerte, puisqu’elle n’a été faite qu’en Français, soit eu peur d’aller se mettre à l’abri face au risque d’expulsion.
L’obsession des derniers gouvernements pour cette politique répressive et sécuritaire de chasse aux sorcières, faisant de l’immigré l’éternel bouc émissaire, avec comme seuls mots d’ordre « détruire et expulser », est aussi responsable du chaos actuel. Main dans la main avec l’extrême droite et la droite, les gouvernements macronistes ont mené des opérations sécuritaires d’expulsion massive de personnes étrangères et de destruction des bidonvilles sans relogement dans le non‑respect des droits humains. Il est en effet plus facile d’accuser les migrations plutôt que de mener des politiques sociales de développement des services publics. Pourtant, ni les expulsions, ni les dérogations au droit du sol pour le restreindre ne font diminuer les flux migratoires à Mayotte. Il n’y a pas d’études sur le lien entre le durcissement de la législation et les arrivées, et les personnes voulant rejoindre Mayotte sont surtout portées par une grande détresse et des conditions de vie terribles les obligeant à quitter leur pays dans l’espoir d’une vie meilleure (le PIB des Comores était en 2017, 8,5 fois inférieur à celui de Mayotte). Du fait de la politique sécuritaire, ces personnes extrêmement précaires persistent dans l’irrégularité et la précarité. Combattre la misère par la violence ne fonctionne pas. Le nouveau gouvernement persiste malgré tout dans cette course à l’échalote avec l’extrême droite qui propose la suppression pure et simple du droit du sol à Mayotte.
Ces opérations anti‑migrants ne résolvent pas non plus le problème de l’habitat insalubre puisqu’elles ne permettent pas un relogement satisfaisant et, selon le chercheur Cyrille Hanappe « Le délogement sans relogement est une politique assumée ». En 2023, la préfecture a procédé à la destruction de 738 cases en tôle, mais elle n’a proposé un nouvel hébergement qu’à 121 familles. La dernière opération d’ampleur terminée le 11 décembre dernier de démolition du bidonville de Mavadzani, présentée comme la plus importante opération de décasage jamais réalisée à Mayotte en est aussi l’exemple : 466 cases ont été démolies, mais seulement 22 % des personnes concernés ont accepté les propositions de relogements. « La plupart des familles, en situation régulière, refusent ces propositions car le nouveau logement, disponible pour trois mois maximum la plupart du temps, se trouve trop loin de l’école. Cela les oblige à déscolariser les enfants, c’est inconcevable pour eux » selon Daniel Gros, représentant de la Ligue des droits de l’homme (LDH) à Mayotte. « Un tiers du quartier est parti depuis septembre, avec tout le matériel pour reconstruire une case dans un quartier voisin ». Dans une tribune à Libération du 16 décembre, un collectif de chercheurs spécialistes de Mayotte constate « les conséquences d’une gestion répressive de l’habitat précaire et de l’application d’une politique de logement social qui exclut systématiquement l’accès à un logement digne et durable des populations les plus pauvres et vulnérables ». L’habitat de fortune est donc resté la norme et le cyclone n’en a fait qu’une bouchée.
En réaction au cyclone Chido, le Gouvernement a annoncé le 30 décembre le plan « Mayotte Debout » comprenant des mesures de différentes nature (plans électricité, eau, logement, écoles, économie…), une loi d’urgence spéciale pour Mayotte pour janvier et une loi de refondation de Mayotte élaborée dans les trois mois.
Ce plan se caractérise par son insuffisance, ses impasses et son mépris pour le territoire et la population de Mayotte.
– La Zone franche globale est un dispositif critiqué par l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale des affaires sociales dans un rapport de 2020 : « Les exonérations sociales et fiscales zonées n’ont pas démontré leur efficacité en matière de création d’entreprises et d’emplois. »
– L’aide de 1 000 euros avant le 15 janvier pour les 1 350 exploitations agricoles affiliées à la MSA à Mayotte est qualifiée d’« indécente » par la Confédération paysanne et le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef). Le Modef réclame une aide de 7 000 euros par exploitant.
– Le manque de moyens pour les collectivités locales. Selon le Conseil économique, social et environnemental de Mayotte, il est nécessaire d’inscrire dans le projet de loi d’urgence pour Mayotte un fond d’urgence pour abonder les budgets de fonctionnement des collectivités locales et notamment des communes et des intercommunalités.
– La rentrée scolaire annoncée à partir des 13 et 20 janvier est une « opération de communication » selon les syndicats qui ont appelé à la grève reconductible à partir du lundi 13.
– L’interdiction et le blocage de la reconstruction des bidonvilles ne correspondent à aucune réalité. De fait, ils sont déjà reconstruits. Et en l’absence de volonté et de moyens pour des solutions de relogement salubres et pérennes, empêcher la reconstruction des bidonvilles ne résoudra rien et ne constitue rien d’autre que de la persécution. C’est le cas par exemple avec l’arrêté pris le 4 janvier restreignant la vente de tôles bac acier aux professionnels et aux particuliers, sur présentation d’un justificatif d’identité et de domicile condamnant des milliers d’habitants de Mayotte à l’impossibilité d’avoir simplement un toit sur la tête.
Quant au projet de loi d’urgence spéciale pour Mayotte, il est révélateur de l’impasse dans laquelle s’enferre le Gouvernement : au motif de l’urgence, il propose d’offrir un blanc‑seing au gouvernement pour légiférer par ordonnances et de manière dérogatoire afin de réaliser vite et à bas prix la reconstruction de Mayotte, sans jamais assurer de reconstruire mieux dans un objectif d’égalité réelle afin de sortir le département le plus pauvre de France de sa misère et de combler le manque d’investissement dans le temps. Au contraire, les dérogations au droit de l’urbanisme, de la propriété privée et de la commande publique laissent craindre une reconstruction au rabais, nuisible pour les Mahorais et leur environnement et susceptible de s’effondrer au prochain cyclone.
En juillet 2021, la commission d’enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences présidée par Mathilde Panot avait recommander de développer un plan de reboisement et végétalisation de Mayotte pour permettre une meilleure infiltration de l’eau dans les sols et les nappes phréatiques, d’instaurer un bouclier des prix sur l’eau en bouteille jusqu’à l’arrêt des tours d’eau, d’annuler les factures exorbitantes des habitants à Mayotte et d’enquêter sur les pratiques de facturation abusive de l’eau à Mayotte.
Le 6 octobre 2023, M. Jean‑Hugues Ratenon a déposé, avec l’ensemble des députés insoumis, une proposition de résolution visant à assurer l’égalité effective entre tous les citoyens par une grande loi de développement pour les Outre‑mer mettant en avant la nécessité d’un grand plan pluriannuel d’urgence sociale, porté par une stratégie de développement durable et des moyens à la hauteur des enjeux. Sa mise en œuvre aurait permis d’assurer l’égalité des citoyens dans l’accès aux droits humains, aux biens communs et aux services publics ; la lutte contre la vie chère et le développement de l’économie locale écologique en créant des emplois dans des secteurs stratégiques ; la valorisation des compétences des Ultramarins et la mise en place d’un plan de scolarisation et d’emploi local ; le développement de la coopération régionale avec les pays voisins, l’augmentation du nombre d’établissements d’éducation prioritaire et la construction des établissements scolaires et enfin l’accueil digne des migrants et le renforcement des coopérations régionales en matière d’immigration.
Enfin, lors de l’examen du projet de loi de finances 2025, les députés de la France insoumise ont déposé plusieurs dizaines d’amendements en faveur d’investissements importants pour Mayotte durant la discussion du projet de loi de finance 2025. Durant ces discussions, le socle commun s’est illustré par son absentéisme. Nous avons fait adopter la création d’un fond d’investissement de 200 millions d’euros destiné à la construction d’infrastructures de réseaux de transports collectif de bonne qualité dans les Outre‑mer, un plan d’investissement d’1,5 milliard d’euros dans la production et le renouvellement des canalisations, un plan d’investissement de 200 millions d’euros dans le logement dans les Outre‑mer alors que le gouvernement souhaitait baisser les crédits de 10,9 % contre toutes les indications du bleu budgétaire.
Face aux conséquences catastrophiques de cette inaction, à la fois dans la politique de prévention des risques naturels majeurs à Mayotte mais aussi les défaillances de l’État ne permettant pas l’instauration d’une égalité réelle avec les autres territoires de la République Française, le groupe de la France insoumise - Nouveau Front Populaire propose la création de cette commission d’enquête afin de mettre un terme à cette situation. Cette commission d’enquête sera ainsi chargée d’étudier et d’évaluer la situation de crise à Mayotte faisant suite au cyclone Chido du 14 décembre 2024 et les réponses apportées par l’État, l’impréparation face aux risques naturels majeurs, les conséquences du délaissement du territoire par l’État, et de proposer des solutions afin de faire de Mayotte un département français à part entière en saisissant l’opportunité de la reconstruction.
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proposition de rÉsolution
Article unique
En application des articles 137 à 144‑2 du Règlement de l’Assemblée nationale, il est créé une commission d’enquête, composée de trente membres, chargée de :
1° L’étude et l’évaluation de la situation de crise à Mayotte faisant suite au cyclone Chido du 14 décembre 2024 ;
2° L’examen des réponses apportées par l’État, l’impréparation face aux risques naturels majeurs, les conséquences du délaissement du territoire par l’État ;
3° La proposition de solutions afin de faire de Mayotte un département français à part entière, garantissant une égalité réelle entre tous les territoires de la République française, en se saisissant de l’opportunité de la reconstruction.