– 1 –
N° 1780
_____
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 septembre 2025.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
visant à réunir le Parlement en Haute Cour, en vue d’engager la procédure de destitution à l’encontre du Président de la République,
prévue à l’article 68 de la Constitution et à la loi organique n° 2014-1392 du 24 novembre 2014 portant application de l’article 68 de la Constitution,
présentée par
Mme Mathilde PANOT, Mme Nadège ABOMANGOLI, M. Laurent ALEXANDRE, M. Gabriel AMARD, Mme Ségolène AMIOT, Mme Farida AMRANI, Mme Christine ARRIGHI, M. Rodrigo ARENAS, M. Raphaël ARNAULT, Mme Clémentine AUTAIN, Mme Lisa BELLUCO, Mme Anaïs BELOUASSA-CHERIFI, M. Édouard BÉNARD, M. Ugo BERNALICIS, M. Christophe BEX, M. Carlos Martens BILONGO, M. Benoît BITEAU, M. Manuel BOMPARD, M. Arnaud BONNET, M. Idir BOUMERTIT, M. Louis BOYARD, M. Pierre-Yves CADALEN, M. Aymeric CARON, M. Sylvain CARRIÈRE, M. Jean-Victor CASTOR, Mme Gabrielle CATHALA, M. Bérenger CERNON, Mme Sophia CHIKIROU, M. Hadrien CLOUET, M. Éric COQUEREL, M. Alexis CORBIÈRE, M. Jean-François COULOMME, M. Hendrik DAVI, M. Sébastien DELOGU, M. Aly DIOUARA, Mme Alma DUFOUR, M. Emmanuel DUPLESSY, Mme Karen ERODI, Mme Elsa FAUCILLON, Mme Mathilde FELD, M. Emmanuel FERNANDES, Mme Sylvie FERRER, M. Charles FOURNIER, M. Perceval GAILLARD, Mme Marie-Charlotte GARIN, Mme Clémence GUETTÉ, M. David GUIRAUD, Mme Zahia HAMDANE, Mme Mathilde HIGNET, Mme Émeline K/BIDI, M. Andy KERBRAT, M. Bastien LACHAUD, M. Abdelkader LAHMAR, M. Maxime LAISNEY, Mme Karine LEBON, M. Arnaud LE GALL, M. Antoine LÉAUMENT, Mme Élise LEBOUCHER, M. Aurélien LE COQ, M. Jean-Paul LECOQ, M. Jérôme LEGAVRE, Mme Sarah LEGRAIN, Mme Claire LEJEUNE, Mme Murielle LEPVRAUD, M. Benjamin LUCAS-LUNDY, M. Frédéric MAILLOT, Mme Élisa MARTIN, M. Damien MAUDET, Mme Marianne MAXIMI, Mme Marie MESMEUR, Mme Manon MEUNIER, M. Jean-Philippe NILOR, Mme Sandrine NOSBÉ, Mme Danièle OBONO, Mme Julie OZENNE, Mme Nathalie OZIOL, M. René PILATO, M. François PIQUEMAL, Mme Marie POCHON, M. Thomas PORTES, M. Loïc PRUD’HOMME, M. Jean-Hugues RATENON, M. Jean-Claude RAUX, Mme Mereana REID ARBELOT, Mme Sandra REGOL, M. Davy RIMANE, M. François RUFFIN, Mme Sandrine ROUSSEAU, Mme Sabrina SEBAIHI, Mme Danielle SIMONNET, M. Arnaud SAINT-MARTIN, M. Aurélien SAINTOUL, Mme Eva SAS, Mme Ersilia SOUDAIS, Mme Anne STAMBACH-TERRENOIR, M. Aurélien TACHÉ, Mme Sophie TAILLÉ-POLIAN, Mme Andrée TAURINYA, M. Matthias TAVEL, M. Boris TAVERNIER, M. Nicolas THIERRY, M. Emmanuel TJIBAOU, Mme Aurélie TROUVÉ, M. Paul VANNIER,
députées et députés.
– 1 –
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les huit années de présidence d’Emmanuel Macron ont plongé notre pays dans une crise sociale, économique, écologique et institutionnelle sans précédent. Tous les indicateurs sont au rouge et l’impopularité du chef de l’État a atteint un niveau inédit sous la Vᵉ République. La France traverse une crise de régime.
Une des expressions les plus insupportables de la catastrophe engendrée par la politique macroniste est l’explosion de la pauvreté. 15,4 % de la population hexagonale vit désormais sous le seuil de pauvreté, soit près de 11,8 millions de personnes dans l’ensemble du pays. Depuis 2017, ce sont 1,2 million de nos concitoyens qui ont nouvellement basculé dans la pauvreté.
La dégradation sociale et économique est partout visible. Le chômage remonte, avec une prévision de 8,3 % fin 2026 selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) et 110 000 destructions nettes d’emploi pour la seule année 2025. Les salaires réels sont en baisse continue depuis 2017, selon l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES), et la désindustrialisation atteint un point critique. Pour la première fois depuis 1945, la part de l’industrie est passée sous les 10 % du PIB, tandis que le déficit commercial s’élève désormais à 81 milliards d’euros sur 12 mois.
Le Président de la République a profondément fracturé le pays. La présence au gouvernement de ministres relayant les thèses de l’extrême droite a participé à la stigmatisation, à la discrimination et à la violence à l’égard de nombre de nos compatriotes, en particulier de confession musulmane. Au lieu de défendre l’égalité républicaine, il a dressé les Français les uns contre les autres et affaibli la cohésion nationale.
Sur le plan écologique, la France s’éloigne toujours plus de l’indispensable bifurcation. Le Haut conseil pour le climat alerte en 2025 sur le ralentissement de la baisse des émissions de gaz à effet de serre dans notre pays. Les vagues de chaleur, multipliées par six depuis 2015, et les catastrophes climatiques extrêmes se succèdent, sans qu’aucune stratégie sérieuse d’adaptation n’ait été mise en œuvre.
À cela s’ajoute le chaos budgétaire. Emmanuel Macron a aggravé la dette publique de 1 000 milliards d’euros depuis 2017, pour atteindre 114 % du produit intérieur brut. Cette situation est la conséquence directe des cadeaux fiscaux massifs consentis aux plus riches et aux multinationales – 75 milliards d’euros par an de pertes de recettes – qui ont permis aux 500 plus grandes fortunes françaises de doubler leur patrimoine en huit ans.
Mais l’échec de la présidence Macron ne se limite pas à ces résultats désastreux. Le chef de l’État a également engagé un tournant autoritaire, foulant aux pieds les principes démocratiques et le suffrage universel. La répression violente du mouvement des gilets jaunes et l’imposition par le 49 alinéa 3 d’une réforme des retraites rejetée par la majorité de la population ont été les signes avant‑coureurs de la pire des forfaitures en République : mépriser le résultat des urnes et exercer un droit de veto sur l’expression du suffrage universel.
Après avoir provoqué la dissolution de l’Assemblée, Emmanuel Macron a refusé de nommer un Premier ministre issu de la coalition du Nouveau Front Populaire, arrivée en tête avec 193 sièges, devançant la coalition présidentielle de 27 sièges et l’extrême droite de 51 sièges. Il a ainsi exercé un véritable droit de veto sur le choix du peuple et renoué avec une pratique monarchique qu’on n’avait plus connue depuis Mac Mahon en 1877, lorsque ce dernier avait nommé un Premier ministre monarchiste contre la majorité républicaine.
Cette attitude viole à plusieurs titres la Constitution.
D’une part, l’article 3 qui dispose que « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum » et qu’ « aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice ». Or, en refusant de tenir compte du vote populaire exprimé lors des législatives – qui ont connu le taux de participation le plus élevé depuis 1997, avec 66,7 % au second tour – Emmanuel Macron s’est attribué un pouvoir qui ne lui revient pas et a méprisé la souveraineté populaire.
D’autre part, l’article 8 qui prévoit que « le Président de la République nomme le Premier ministre ». Plusieurs juristes considèrent que cette disposition oblige le Président à nommer un Premier ministre issu de la majorité parlementaire. Il ne s’agit pas pour lui d’exercer un droit de censure préalable sur un gouvernement, mais d’accomplir une nomination conforme au résultat des urnes. En refusant de le faire et en choisissant à plusieurs reprises des Premiers ministres issus de forces politiques minoritaires, Emmanuel Macron a agi en autocrate, défendant ses propres intérêts au détriment de la volonté du peuple et sabotant le fonctionnement des institutions.
Ce coup de force s’est prolongé dans le temps : maintien d’un gouvernement démissionnaire pendant 67 jours, gouvernance par décrets afin de contourner le Parlement, nomination d’un Premier ministre, Michel Barnier, rapidement censuré, puis désignation de François Bayrou, minoritaire lui aussi, pour imposer un budget d’austérité rejeté par la majorité du pays. Ces manœuvres constituent un piétinement manifeste de l’article 5 de la Constitution, qui impose au Président de « veiller, par son arbitrage, au fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi qu’à la continuité de l’État ».
Aujourd’hui, l’isolement du chef de l’État et son mépris des règles démocratiques constituent une menace directe pour la République. Son maintien au pouvoir immobilise le pays, accentue la crise sociale et fait obstacle à toute solution politique stable. La chute du gouvernement Bayrou ne peut être considérée comme un simple épisode. Elle doit être l’occasion de rompre avec un Président qui refuse obstinément de respecter le suffrage universel.
Le peuple, lui, a déjà tranché. Les mobilisations citoyennes qui débutent le 10 septembre portent au premier plan la revendication du départ d’Emmanuel Macron. Cette exigence est largement majoritaire dans l’opinion puisque 67 % des Français souhaitent sa démission, selon un sondage. Même des personnalités de droite comme Jean‑François Copé, Valérie Pécresse ou David Lisnard appellent aujourd’hui à son départ pour permettre la tenue d’une élection présidentielle anticipée.
Loin de provoquer le chaos, la destitution ou la démission du Président ouvrirait une issue démocratique claire. Conformément à la Constitution et à la pratique de l’année précédente, une loi spéciale pourrait reconduire temporairement les crédits budgétaires, le temps d’élire un nouveau chef d’État puis de renouveler l’Assemblée nationale. L’état des finances publiques est critique, mais le pays dispose de fondations solides qui le protègent de la banqueroute, contrairement à ce qu’affirment les discours alarmistes proférés par la macronie finissante. Ainsi, le peuple aura l’occasion de tourner la page d’une présidence autoritaire, de retrouver sa souveraineté et d’engager enfin les transformations nécessaires pour viser l’harmonie des êtres humains entre eux et avec la nature.
L’article 68 de la Constitution prévoit qu’en cas de « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat », le Président de la République peut être destitué. Emmanuel Macron se trouve de façon manifeste et évidente dans ce cas. Il est du devoir du Parlement de se réunir en Haute Cour pour prononcer sa destitution. Tel est l’objet de la présente proposition de résolution.
– 1 –
proposition de RÉSOLUTION
Article unique
En application de l’article 68 de la Constitution et de la loi organique n° 2014‑1392 du 24 novembre 2014 portant application de l’article 68 de la Constitution, le Parlement est réuni en Haute Cour aux fins de prononcer la destitution du Président de la République, en raison du manquement manifestement incompatible avec l’exercice de ses fonctions que constitue son incapacité à assurer la stabilité des institutions, à respecter la souveraineté populaire et à garantir le fonctionnement régulier des pouvoirs publics.