N° 3234
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUINZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 juillet 2020.
PROJET DE LOI
de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030
et portant diverses dispositions relatives à la recherche
et à l’enseignement supérieur,
(Procédure accélérée)
(Renvoyé à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉ
au nom de M. Jean CASTEX,
Premier ministre,
par Mme Frédérique VIDAL,
ministre de l’enseignement supérieur,
de la recherche et de l’innovation
– 1 –
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La science et la recherche publique ont contribué à la construction de notre pacte républicain et à l’affirmation de notre pays lors de chaque crise majeure, notamment au lendemain de la seconde guerre mondiale ou plus récemment face à l’épidémie de covid‑19.
Nous devons à plusieurs générations de scientifiques de premier plan depuis plus de deux siècles le rayonnement de notre recherche publique comme privée ainsi qu’une large part du développement économique et social dont nous bénéficions aujourd’hui. Nos grands scientifiques sont autant de figures indissociables de l’histoire de notre République et de la construction de la France telle que nous la connaissons aujourd’hui.
La recherche scientifique et technologique, parce qu’elle produit les connaissances nécessaires au progrès économique et social et qu’elle garantit la capacité de notre économie à croitre sur le fondement de savoirs nouveaux est un pilier de notre souveraineté nationale. Elle irrigue l’ensemble de notre société de l’éducation au travail en passant par l’amélioration constante de notre système de santé. Elle participe au bon fonctionnement de notre démocratie, à la prospérité de notre économie et à la construction de notre destin en tant que Nation.
À l’heure où la compétition internationale s’intensifie entre grandes puissances scientifiques, notre pays est aujourd’hui confronté à des défis majeurs.
La crise sanitaire liée à l’épidémie de covid‑19 n’est que l’une des facettes des enjeux que notre pays devra affronter dans les prochaines décennies, que l’on songe aux défis climatiques, énergétiques ou numériques que nous devrons relever. Chacun de ces enjeux relève de défis scientifiques majeurs qu’il est de notre responsabilité de relever afin de garantir l’avenir de notre pays et de préserver nos concitoyens des risques auxquels nous serons confrontés tout au long des prochaines décennies.
La nécessité de financer la recherche publique et de soutenir la recherche privée se présente ainsi comme une préoccupation majeure pour l’ensemble des économies.
Les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) consacrent une part croissante de leurs ressources à l’investissement dans la recherche (2,37 % du produit intérieur brut en moyenne en 2017, contre 2,34 % l’année précédente).
La France se singularise néanmoins dans ce paysage : avec un effort de recherche à 2,19 % en 2017, loin de l’objectif fixé par la stratégie de Lisbonne d’investir au moins 3 % du PIB dans la recherche à horizon 2020, la France décroche, alors que plusieurs de nos voisins ont déjà atteint voire dépassé cet objectif de 3 %.
Ce déficit chronique d’investissement fragilise l’ensemble de notre système de recherche et a des répercussions immédiates sur les chercheurs et les enseignants‑chercheurs en France : la rémunération en début de carrière des scientifiques, recrutés à partir de 1,4 SMIC à l’âge moyen de 33 ou 34 ans, est inférieure de 37 % à la moyenne des pays de l’OCDE. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que les carrières scientifiques attirent de moins en moins les étudiants de sorte qu’en un peu moins de 20 ans, le nombre d’admissions en cycle doctoral est passé de près de 20 000 à 17 000 aujourd’hui. Autre signe alarmant : entre 2010 et 2015, les crédits de l’Agence nationale de la recherche (ANR) ont diminué de 38 % et le taux de succès aux appels à projets a diminué de 21,3 % à 11,5 %, au point que toutes les équipes de recherche ont parfois des difficultés à financer leurs travaux malgré l’accroissement des budgets d’intervention de l’ANR engagé par le Gouvernement depuis 2017. En outre, les moyens alloués à la recherche ne sont pas attribués de façon optimale et les outils de financement ne sont pas adaptés aux attentes de toutes les disciplines, plus particulièrement dans le champ des sciences humaines et sociales.
La complexité de l’organisation de la recherche en France ne facilite pas non plus la vie des chercheurs : ils passent souvent un temps considérable à accomplir des tâches administratives comme des dossiers de demande de financement, plutôt qu’à produire de la connaissance.
Il n’est donc pas étonnant qu’au fil des années, la communauté de la recherche ait perdu confiance dans la capacité de l’État et de l’ensemble de nos concitoyens à lui donner la place qu’elle mérite. Ce constat est d’autant plus paradoxal que la qualité de la recherche française n’est pas en cause : la France demeure une grande puissance scientifique, capable de faire avancer l’ensemble du front des connaissances et de faire émerger des ruptures conceptuelles et des innovations qui transformeront le monde de demain.
À l’heure où la société française est traversée par des courants d’irrationalité et de doutes sur les progrès et les connaissances, le Gouvernement fait le choix d’inverser résolument la tendance, de réarmer notre système public de recherche afin de lui donner les moyens de relever les défis scientifiques d’aujourd’hui et de demain et d’inciter nos étudiants à faire le choix de l’entrée dans la carrière scientifique.
Il faut affirmer la double ambition que l’Europe soit une puissance de premier rang mondial en matière de recherche, et que la France joue un rôle leader dans l’Europe de la recherche. Il faut rappeler que les grands défis de nos sociétés ne pourront trouver de solution sans un réinvestissement dans la connaissance et la science, qui sont le socle de l’unité et de la cohésion nationale, au service de nos concitoyens. Il faut investir pour que la France continue d’être un pays où naissent et où se déploient les nouvelles découvertes scientifiques et technologiques, où la connaissance et la compréhension progressent, afin que notre pays ne soit pas condamné à suivre les voies ouvertes par d’autres. Si nos savants n’ont pas les moyens de regarder vers l’avenir et d’entraîner la société avec eux, c’est l’énergie et la confiance collective qui sont mises à mal, ralentissant ainsi le mouvement de l’ensemble de notre société.
Pour la quatrième fois depuis le début de la Ve République, le législateur est conduit à se prononcer sur l’ambition de notre pays pour son système de recherche publique et le soutien à sa recherche privée. C’est pourquoi le présent projet de loi traduit un choix politique majeur : celui d’investir dans l’avenir, bien sûr, mais aussi et surtout de replacer la science et la rationalité scientifique au cœur du pacte social et du développement économique du pays.
Ce projet de loi porte ainsi sur l’ensemble des registres essentiels pour porter cette ambition dans le cadre d’une démarche globale.
Il prévoit, avant toutes choses, un réinvestissement massif dans la recherche publique, dont l’effet de levier doit permettre d’aller vers l’objectif d’un effort national de recherche atteignant 3 % du PIB. À cette fin, le présent projet de loi vient consolider les outils actuels de financement et de pilotage de la recherche avec un effort budgétaire supplémentaire de 25 milliards d’euros pendant les dix prochaines années, ce qui est sans précédent depuis plusieurs décennies
Il engage une politique inédite en faveur de l’attractivité des métiers de la recherche, structurée autour d’une revalorisation de tous ses métiers, d’une plus grande mobilité et de perspectives de carrière élargies. Il met un accent particulier sur l’émergence d’une nouvelle génération de jeunes scientifiques qui a vocation à porter le nouvel essor de la recherche publique française et son rayonnement dans l’ensemble de la société et dans le monde.
Il renforce les outils visant à la diffusion de la recherche tant dans l’économie que dans la société dans son ensemble. Enfin, il engage une démarche générale de simplification, touchant tant les établissements que les laboratoires et les personnels de la recherche.
Le titre Ier définit la programmation budgétaire permettant d’atteindre les objectifs de croissance de l’effort national de recherche.
L’article 1er approuve le rapport annexé qui présente les principales orientations fixées pour les évolutions de la recherche française dans la période 2021‑2030.
L’article 2 détermine la trajectoire de crédits de paiement des programmes concernés sur la période 2021‑2030, et précise les crédits qui seront alloués aux financements de projets de recherche attribués par l’Agence nationale de la recherche. Le gouvernement prévoit que la présente programmation fera l’objet d’actualisations, dont l’une, mise en œuvre avant la fin de l’année 2023, aura notamment pour objet de consolider la trajectoire financière jusqu’en 2030.
Ces actualisations permettront de vérifier la bonne adéquation entre les objectifs fixés dans la présente loi, les réalisations et les moyens consacrés.
En particulier, l’ensemble des moyens ainsi programmés doit permettre une revalorisation significative de tous les métiers scientifiques, qu’il s’agisse des enseignants‑chercheurs, des chercheurs, des ingénieurs, des administratifs, des bibliothécaires ou des techniciens. Cette revalorisation a vocation à porter de façon prioritaire sur les débuts de carrières des enseignants‑chercheurs et des chercheurs et les attributions indemnitaires, où apparaissent les différentiels les plus nets, tant avec les salaires de chercheurs observés dans d’autres grands pays scientifiques qu’avec les autres métiers publics ou privés auxquels peuvent aspirer les jeunes docteurs.
Cet objectif de renforcement de l’attractivité des métiers scientifiques, notamment en début de carrière, justifie la création de nouveaux dispositifs de recrutement et de progression de carrières qui font l’objet du titre II.
L’article 3 crée une nouvelle voie de recrutement qui vise à offrir aux jeunes scientifiques après appel à candidature sur projet ouvert et transparent des entrées dans la carrière avec un contrat doté d’un environnement financier et permettant d’accéder, à l’issue d’une période maximale de six ans, à une titularisation dans un corps de professeurs des universités et assimilés ou de directeurs de recherche. En complément de la voie classique du concours pour entrer dans les corps de chercheurs et d’enseignants‑chercheurs, les établissements pourront demander à bénéficier de ces dispositifs pour des domaines de recherche et d’enseignement particuliers qu’ils justifient correspondant à leur stratégie scientifique ou d’attractivité internationale. Le dispositif procède en deux temps : d’abord un recrutement dans un cadre contractuel à l’issue d’une procédure de sélection puis, si la personne donne toute satisfaction sur le plan scientifique, une titularisation dans un corps statutaire de professeur ou de directeur de recherche.
En amont des recrutements comme chercheur ou enseignant‑chercheur, les étapes préalables seront sécurisées avec la création à l’article 4 d’un contrat doctoral adapté à la durée des thèses pour les doctorants recrutés dans le secteur privé, qui vient compléter les dispositifs existants pour le secteur public, et à l’article 5 de contrats postdoctoraux privés comme publics destinés à mieux accompagner les docteurs dans leur période de transition professionnelle vers les postes pérennes de la recherche publique ou privée.
Pour les personnels contractuels recrutés spécifiquement pour l’accomplissement d’un projet de recherche, cette sécurisation de leur situation professionnelle prendra la forme d’un contrat à durée indéterminée de mission scientifique prévu à l’article 6, qui permettra d’allonger les contrats actuels, souvent très courts, pour les faire coïncider avec la durée des projets pour lesquels ils sont recrutés et qui ont vocation à s’inscrire dans le temps parfois long de la recherche.
L’article 7 facilite et favorise l’accueil par les établissements des doctorants et chercheurs étrangers boursiers, dans le cadre d’un séjour de recherche. Le séjour de recherche fait l’objet d’une convention entre l’établissement d’accueil et le doctorant ou chercheur étranger qui définit les modalités de prise en charge et d’accueil, ainsi que la durée du séjour de recherche. L’établissement peut notamment contribuer aux frais de séjour des intéressés. La mesure permet la délivrance d’un titre de séjour adapté à la situation des bénéficiaires de la convention de séjour de recherche.
De nombreux chercheurs et enseignants‑chercheurs sont actuellement pénalisés dans leur carrière lorsqu’ils sont en situation de mobilité : en l’état du droit, lorsqu’ils sont retenus pour bénéficier d’une nomination dans un autre corps à la suite de la réussite à un concours ou à un examen professionnel ou au titre d’une promotion au choix, ils doivent soit mettre fin à leur détachement ou à leur mise à disposition, soit renoncer à cette nomination. Pour favoriser la mobilité au sein de l’enseignement supérieur et de la recherche, l’article 8 permet de bénéficier d’une nomination dans un autre corps en cours d’une période de mobilité.
L’article 9 ouvre la possibilité de maintenir en fonction au‑delà de la limite d’âge les responsables d’un projet lauréat de certains appels à projets de recherche de premier plan, nationaux ou européens, pour qu’ils puissent achever les travaux engagés sur ces projets avec leurs équipes.
En vue de capitaliser sur les forces de la recherche française, le titre III consolide les dispositifs de financement et d’organisation de la recherche.
L’article 10 permet que l’ensemble des établissements de recherche et d’enseignement supérieur, y compris les infrastructures de recherche nationales, bénéficie d’une évaluation de façon harmonisée sur la totalité de leurs missions, selon des procédures qui font intervenir un Haut conseil à l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) à l’indépendance réaffirmée. De plus, il assouplit la condition (instituée par la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE), aujourd’hui inapplicable, qui prévoit la présence dans le collège du HCERES d’une personne ayant participé à la création d’une entreprise.
Dans le système français d’enseignement supérieur et de recherche, les unités de recherche sont très souvent des unités « mixtes » communes à plusieurs établissements, universités, écoles ou organismes nationaux, ce qui induit des complexités dans leur administration et leur fonctionnement quotidien. L’article 11 pose les bases législatives qui permettent de clarifier et d’unifier la place de ces unités dans l’ensemble des établissements publics d’enseignement supérieur et de recherche et des établissements contribuant au service public de l’enseignement supérieur ou de la recherche, et permettront de simplifier leur fonctionnement. L’article prévoit que, lorsqu’une unité de recherche relève de plusieurs établissements, le directeur de l’unité est placé sous l’autorité conjointe des dirigeants de ces établissements.
L’article 12 permettra aux financements attribués via les appels à projets de l’Agence nationale de la recherche de mieux contribuer au développement scientifique national. Il précise que l’Agence doit allouer une certaine part de financements non ciblés, ce qui est indispensable pour soutenir la créativité, l’émergence de nouvelles idées, et la prise de risque scientifique. Il institue un abondement financier appelé « préciput » qui revient aux parties prenantes du projet pour soutenir les unités de recherche et renforcer la mise en œuvre des orientations de politique scientifique portées par les laboratoires et les établissements.
Le titre IV renforce les outils visant à la diffusion de la recherche dans l’économie et dans la société dans son ensemble, pour être le vecteur de la transformation de notre pays face aux défis de demain.
Dans le prolongement de la loi Pacte, l’article 13 amplifie l’ouverture du monde académique vers les entreprises en élargissant les possibilités ouvertes aux agents publics de créer une entreprise ou de participer à la vie d’une entreprise existante pour valoriser des travaux de recherche.
La recherche et l’enseignement supérieur se nourrissent des échanges et de la confrontation des idées, et l’innovation passe souvent par les rencontres et les travaux en commun entre les acteurs du monde académique et ceux du monde des entreprises. L’article 14 a pour but d’ouvrir largement les possibilités de cumul d’activités à temps partiel entre les organismes publics de recherche, les établissements d’enseignement supérieur, les fondations reconnues d’utilité publique exerçant des missions de recherche, d’enseignement supérieur ou d’innovation technologique, et les entreprises.
Pour valoriser les personnels qui s’impliquent dans des missions de recherche partenariale, l’article 15 permet aux organismes de recherche, à l’instar des établissements d’enseignement supérieur, de créer des dispositifs d’intéressement, qui ne doivent cependant en aucun cas se substituer aux dispositifs indemnitaires existants – qui seront significativement revalorisés dans le cadre de la programmation budgétaire inscrite dans la loi.
Alors qu’une exception au droit d’auteur est ouverte à des fins de courte citation pour les textes, qui permet de citer tous les textes de toutes les époques et de tous les auteurs, cette exception n’est pas effective pour les images. Or, dans notre société de l’image, un usage de citation des images dans un but pédagogique ou scientifique est nécessaire pour faire face au déferlement d’images. Cet usage doit être mis en œuvre dans le respect des droits moraux et patrimoniaux attachés à ces images. L’article 16 habilite le Gouvernement pour instituer, par voie d’ordonnance, une licence collective étendue permettant l’utilisation d’images à des fins exclusives d’illustration de publications, ou de travaux, diffusés en ligne sans restriction d’accès, dans le cadre d’une activité de recherche et d’enseignement supérieur publics, à l’exclusion de toute activité à but lucratif.
Les objectifs de la recherche française ne pourront être atteints qu’en simplifiant concrètement le fonctionnement des établissements et des laboratoires ; tel est l’objet du titre V, qui comporte également des dispositions diverses.
L’article 17 porte ainsi diverses mesures de simplification qui concernent les établissements.
Le 1° du I procède à l’abrogation de dispositions inappliquées sur la transformation d’un établissement public à caractère administratif en établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel.
Les 2°, 3° et 4° du I simplifient les conditions de délégation de signature dans les universités et renforcent les obligations de rapport sur l’égalité entre les femmes et les hommes.
Le 5°du I vise à simplifier l’organisation des unités de recherche constituées conjointement par les universités et les organismes de recherche, en faisant l’économie de la consultation de la commission de la recherche du conseil académique des universités pour ce qui concerne les conventions passées avec les organismes de recherche. L’adoption de ces conventions se fera donc conformément à la procédure applicable à l’ensemble des conventions conclues par les universités : signature par le président (article L. 712‑2 du code de l’éducation) après son approbation par le conseil d’administration (article L. 712‑3 du même code).
Le 6° du I permet d’éviter l’organisation d’élections partielles très peu de temps avant l’échéance des mandats, car l’organisation de ces élections est lourde et chronophage pour les universités et suscite peu de candidatures ainsi qu’une très faible mobilisation des électeurs.
Le 7° du I procède à l’abrogation de dispositions devenues caduques sur le régime financier des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel.
Le 8° du I a pour objet de simplifier le régime des fondations partenariales. Il est proposé de supprimer l’obligation de constituer une caution bancaire lorsque le membre fondateur est une personne publique, et d’autoriser l’acquisition d’immeubles de rapport. De plus, compte tenu de la capacité de la fondation à bénéficier des dons et legs, la création d’un collège propre aux donateurs souligne le particularisme des fondations partenariales par rapport aux fondations d’entreprise et permettre à ces donateurs d’être représentés au conseil d’administration est un facteur d’attractivité.
Les modifications introduites par les 9°, 10° et 11° du I aux articles L. 781‑1, L. 781‑2 et L. 781‑3 du code de l’éducation concernant l’université des Antilles ont pour objet de maintenir la cohérence avec les dispositions des articles L. 712‑2, L. 712‑3 et L. 712‑6‑1 du même code qui concernent le président, le conseil d’administration et le conseil académique des universités.
Le 1° du II simplifie les conditions de représentation de l’État dans les fondations de coopération scientifique.
Le 2° du II permettra d’accélérer la mise en place de conventions de valorisation entre un établissement public à caractère scientifique et technologique et une entité de droit privé en considérant qu’à l’issue de deux mois le silence gardé par l’autorité de tutelle vaut approbation.
L’article 18 a pour objet de permettre à l’Institut de France et aux académies de passer des conventions de mandat avec des prestataires privés afin de sécuriser la gestion de certaines prestations en encaissement et en décaissement. Il aligne aussi le régime d’acceptation des dons et legs par l’Institut de France et les cinq académies qu’il regroupe (Académie française, Académie des beaux‑arts, Académie des sciences, Académie des inscriptions et belles‑lettres et Académie des sciences morales et politiques) sur celui des Académies de médecine et de pharmacie, ces dernières pouvant accepter librement les dons et legs qui leur sont consentis alors que l’acceptation des dons et legs par l’Institut de France et ses académies doit être autorisée par décret en Conseil d’État.
L’article 19 a pour objet de redonner de la liberté aux scientifiques en supprimant les contraintes administratives du régime de l’autorisation préalable de cumul d’activité accessoire. Il substitue à ce régime une information préalable de l’établissement d’affectation pour les activités menées au sein du monde académique. Les personnels enseignants‑chercheurs et chercheurs de l’enseignement supérieur et de la recherche ont en effet vocation à intervenir de façon fréquente et récurrente dans de nombreux organismes d’enseignement supérieur et de recherche distincts de leur établissement d’emploi. Il s’agit d’une mesure de simplification reposant sur la confiance et la responsabilisation des personnels de la recherche.
L’article 20 porte plusieurs mesures de simplification en matière de formation.
Il permet la réalisation de stages pendant les périodes de césure, et facilite le recours aux stages pendant le doctorat ou dans le cadre d’une formation à distance.
Conformément aux orientations retenues dans le cadre de la professionnalisation du premier cycle, l’article clarifie les conditions dans lesquelles une sélection peut être opérée à l’entrée de la licence professionnelle ; il assure également la coordination des dispositions relatives à l’admission en première année dans l’enseignement supérieur et celles concernant l’aménagement de modalités d’accès particulières à des fins de diversification des publics.
Enfin il prolonge de trois ans l’expérimentation qui permet aux bacheliers professionnels d’être admis en section de techniciens supérieurs après avis du conseil de classe de l’établissement d’origine.
L’article 21 ratifie l’ordonnance du 12 décembre 2018 qui permet aux établissements d’enseignement supérieur et de recherche d’expérimenter de nouvelles formes de rapprochement, de regroupement et d’organisation. Sa mise en œuvre au cours de l’année 2019, qui a conduit à la création de 9 établissements expérimentaux, a permis de constater que la rédaction retenue pour certains articles pouvait faire l’objet d’une lecture plus restrictive que celle qui était souhaitée. Ainsi, la rédaction des articles 11 et 16 de l’ordonnance est modifiée pour clarifier le champ des dérogations permises par l’ordonnance, notamment pour la création de communautés d’universités et d’établissements (COMUE) expérimentales non issues de COMUE existantes. De plus, la modification de l’article 6 de l’ordonnance prend en compte l’évolution de la procédure disciplinaire applicable aux enseignants‑chercheurs et usagers des établissements introduite par l’article 33 de la loi n° 2019‑828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.
L’article 22 habilite le Gouvernement, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, à intervenir par ordonnance sur divers champs de la recherche et de l’enseignement supérieur.
Le 1° vise à définir un cadre permettant une dévolution des droits de propriété intellectuelle sur les inventions et logiciels générés par les personnes (stagiaires, doctorants étrangers, professeurs ou directeurs émérites etc.) qui exercent au sein et avec les moyens des laboratoires de recherche sans bénéficier d’un contrat de travail ou du statut d’agent public.
Les 2° et 3° permettront de réformer les procédures applicables à certaines recherches sur les organismes génétiquement modifiés et à la sécurisation des avis relatifs aux biotechnologies, dont les procédures ont par ailleurs vocation à être renforcées pour garantir leur caractère incontestable.
Le 4° permettra des modifications législatives du code rural et de la pêche maritime, du code de la consommation et du code de l’environnement auxquelles la mise en place d’un suivi des cultures de variétés rendues tolérantes aux herbicides est subordonnée ; au regard des risques identifiés par plusieurs études, l’instauration d’un tel suivi a été jugé nécessaire par le Conseil d’État, dans le cadre d’une mise en œuvre proportionnée du principe de précaution (décision du 7 février 2020).
Le 5° permet au Gouvernement de mettre en cohérence les dispositions des codes de l’éducation et de la recherche et de toiletter les dispositions obsolètes ou sans objet, notamment celles relatives à la carte des formations supérieures.
Le 6° ouvrira l’application et l’adaptation éventuelle des dispositions du présent projet de loi en Nouvelle‑Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.
Par ailleurs, le II de l’article 21 habilite le Gouvernement pour modifier, par ordonnance, les dispositions applicables aux établissements d’enseignement supérieur privés, auxquels s’appliquent des régimes juridiques variés et résultant de textes souvent anciens. L’ordonnance doit ainsi permettre de clarifier les notions de cours et d’établissements d’enseignement supérieur privés, d’harmoniser les régimes juridiques d’ouverture de ces établissements, en particulier pour mieux lutter contre les fraudes et les atteintes à l’ordre public, de prévoir les conditions par lesquelles l’État peut apporter sa garantie aux diplômes qu’ils délivrent, y compris à distance, et de clarifier les règles relatives à l’accueil des boursiers de l’enseignement supérieur.
L’article 23 permet la dissolution de l’établissement public de l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France (IAVFF), aussi appelé « Agreenium », dont la forme juridique n’est pas adaptée au besoin, au demeurant réel, de coordination entre les opérateurs d’enseignement supérieur et de recherche agricoles en matière de formation, de recherche et d’actions internationales dans les domaines de l’agronomie, et qui aura vocation à être remplacée par une convention de coordination territoriale.
Alors qu’un besoin de renforcement de la coordination de l’ensemble des acteurs de la recherche en santé sur un territoire se fait sentir, l’article 24 crée un comité territorial de la recherche en santé auprès de chaque centre hospitalier et universitaire, qui doit permettre d’animer et développer la recherche en santé sur l’ensemble d’un territoire avec les universités, les établissements de santé, les professionnels de santé libéraux, les établissements publics à caractère scientifique et technologique et les autres organismes de recherche ainsi que les collectivités territoriales. L’article prévoit que le centre hospitalier et universitaire et l’université partenaire coordonnent conjointement la mise en œuvre de la politique de recherche en santé, notamment dans le cadre des politiques de sites mises en place avec les organismes de recherche.
L’article 25 permet d’appliquer rétroactivement aux chargés de recherche et aux maîtres de conférences recrutés au cours des dernières années les modifications des règles de classement au sein de ces corps qui seront prises par décret, afin d’éviter un phénomène « d’enjambement de carrières » par rapport aux agents nouvellement recrutés qui bénéficieront des règles modifiées plus favorables.
– 1 –
projet de loi
Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation,
Vu l’article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.
Fait à Paris, le 22 juillet 2020.
Signé : Jean CASTEX
Par le Premier ministre :
La ministre de l’enseignement supérieur, |
TITRE Ier
ORIENTATIONS STRATÉGIQUES DE LA RECHERCHE
ET PROGRAMMATION BUDGÉTAIRE
Article 1er
Est approuvé le rapport annexé à la présente loi, qui fixe les orientations relatives à la politique de recherche et les moyens qui lui sont consacrés au cours de la période 2021‑2030 en prenant en compte l’objectif de porter les dépenses intérieures de recherche et développement des administrations et des entreprises à 3 % du produit intérieur brut au cours de la décennie suivante. Il précise les orientations en matière de transformation et de gestion des ressources humaines du secteur de la recherche publique, et les traduit en besoins financiers et ressources budgétaires jusqu’en 2030.
Article 2
I. – Les crédits budgétaires des programmes « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » (P172), « Recherche spatiale » (P193) et « Formations supérieures et recherche universitaire » (P150 hors contribution du titre 2 au compte d’affectation spéciale « pensions » et P193 retraité du remboursement de la dette française à l’Agence spatiale européenne) évolueront comme suit entre 2021 et 2030, à périmètre constant, en écart par rapport aux montants inscrits en loi de finances initiale 2020 :
millions d’euros courants |
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En crédits de paiement |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
2029 |
2030 |
Programme 172 |
+224 |
+559 |
+785 |
+1109 |
+1455 |
+1816 |
+2193 |
+2499 |
+2805 |
+3110 |
Programme 193 |
–32 |
+44 |
+76 |
+107 |
+138 |
+169 |
+201 |
+232 |
+263 |
+294 |
Incidence des mesures de la présente loi sur le programme 150 |
+165 |
+302 |
+445 |
+589 |
+713 |
+820 |
+911 |
+1175 |
+1438 |
+1701 |
II. – Les financements de projets de recherche attribués par l’Agence nationale de la recherche bénéficieront d’un niveau d’engagement évoluant comme suit, en écart par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale 2020 :
millions d’euros courants |
||||||||||
|
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
2029 |
2030 |
Autorisations d’engagement de l’Agence nationale de la recherche |
+149 |
+293 |
+435 |
+577 |
+717 |
+859 |
+1000 |
+1000 |
+1000 |
+1000 |
TITRE II
AMÉLIORER L’ATTRACTIVITÉ DES MÉTIERS SCIENTIFIQUES
Article 3
I. – Il est inséré, après l’article L. 422‑2 du code de la recherche, un article ainsi rédigé :
« Art. L. 422‑3. – I. – Afin de répondre à un besoin spécifique lié à sa stratégie scientifique ou à son attractivité internationale, dans des domaines de recherche pour lesquels il justifie de cette nécessité, un établissement peut être autorisé, par arrêté du ministre chargé de la recherche, à recruter en qualité d’agent contractuel de droit public des personnes titulaires d’un doctorat ou d’un diplôme équivalent en vue de leur titularisation dans un corps de directeurs de recherche.
« Ces recrutements sont ouverts chaque année et pour chaque corps, sur proposition des établissements, par l’arrêté mentionné à l’alinéa précédent, dans la limite de 25 % des recrutements autorisés dans le corps concerné. Ils ne peuvent représenter plus de la moitié des recrutements de l’établissement pour l’année en cause.
« Le recrutement est réalisé, après appel public à candidatures, à l’issue d’une sélection par une commission constituée de personnes de rang égal à celui de l’emploi à pourvoir et comportant au moins un tiers d’universitaires ou de chercheurs extérieurs à l’établissement dans lequel le recrutement est ouvert, dont au moins un étranger.
« Le contrat a pour objet de permettre à la personne recrutée d’acquérir une qualification en rapport avec les missions du corps dans lequel elle a vocation à être titularisée, définies à l’article L. 411‑1. Il est conclu par l’établissement public de recherche au sein duquel l’intéressé a vocation à être titularisé ou par un établissement public d’enseignement supérieur partenaire de celui‑ci. Dans le respect des dispositions de l’article L. 411‑3, il stipule les engagements des parties sur les objectifs à atteindre par l’intéressé et les moyens qui lui seront apportés par son employeur pour exercer ses fonctions.
« II. – La durée du contrat ne peut être inférieure à trois ans et ne peut être supérieure à six ans.
« Le contrat peut être prolongé dans la limite de la durée des congés pour maternité ou adoption et des congés de paternité et d’accueil de l’enfant, de maladie et d’accident du travail.
« Le contrat peut être renouvelé, dans la limite d’un an, sans dépasser la durée maximale de six ans mentionnée ci‑dessus, lorsque l’intéressé n’a pas pu atteindre les objectifs auxquels il avait initialement souscrit.
« III. – Au terme de son contrat, une commission apprécie la valeur scientifique de l’intéressé et son aptitude à exercer les missions mentionnées à l’article L. 411‑1, afin de vérifier qu’il remplit les conditions pour être titularisé dans un corps de directeur de recherche. L’intéressé est ensuite titularisé.
« Cette commission de titularisation est constituée de personnes de rang égal à celui de l’emploi à pourvoir et comporte au moins un tiers d’universitaires ou de chercheurs extérieurs à l’établissement, dont au moins un étranger.
« Elle examine, pour chaque candidat, un rapport sur l’activité et les travaux accomplis.
« La titularisation est subordonnée à un engagement de servir.
« IV. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article, notamment les conditions d’équivalence de diplôme exigées pour le recrutement en qualité d’agent contractuel, les modalités de la procédure de sélection, les conditions du renouvellement du contrat, les modalités d’appréciation, avant la titularisation, de la valeur scientifique et de l’aptitude à exercer les missions mentionnées à l’article L. 411‑1, les modalités de nomination de la commission de titularisation et les conditions de l’engagement de servir. »
II. – Il est inséré, après l’article L. 952‑6‑1 du code de l’éducation, un article ainsi rédigé :
« Art. L. 952‑6‑2. – I. – Afin de répondre à un besoin spécifique lié à sa stratégie scientifique ou à son attractivité internationale, dans des domaines de recherche pour lesquels il justifie de cette nécessité, un établissement peut être autorisé, par arrêté du ministre chargé de la recherche, à recruter en qualité d’agent contractuel de droit public des personnes titulaires d’un doctorat ou d’un diplôme équivalent en vue de leur titularisation dans un corps de professeur relevant du présent titre.
« Ces recrutements sont ouverts chaque année, sur proposition des établissements, par l’arrêté mentionné à l’alinéa précédent, dans la limite de 25 % des recrutements autorisés dans le corps concerné. Ils ne peuvent représenter plus de la moitié des recrutements de l’établissement pour l’année concernée.
« Le recrutement est réalisé, après appel public à candidatures, à l’issue d’une sélection par une commission constituée de personnes de rang égal à celui de l’emploi à pourvoir et comportant au moins un tiers d’universitaires ou de chercheurs extérieurs à l’établissement dans lequel le recrutement est ouvert, dont au moins un étranger.
« Le contrat a pour objet de permettre à la personne recrutée d’acquérir une qualification en rapport avec les missions du corps dans lequel elle a vocation à être titularisée, définies à l’article L. 952‑3. Il est conclu par l’établissement public d’enseignement supérieur au sein duquel l’intéressé a vocation à être titularisé, ou par un établissement public de recherche partenaire de celui‑ci. Dans le respect des dispositions de l’article L. 952‑2, il stipule les engagements des parties sur les objectifs à atteindre par l’intéressé et les moyens qui lui seront apportés par son employeur pour exercer ses fonctions.
« II. – La durée du contrat ne peut être inférieure à trois ans et ne peut être supérieure à six ans.
« Le contrat peut être prolongé dans la limite de la durée des congés pour maternité ou adoption et des congés de paternité et d’accueil de l’enfant, de maladie et d’accident du travail.
« Ce contrat peut être renouvelé, dans la limite d’un an, sans dépasser la durée maximale de six ans mentionnée ci‑dessus, lorsque l’intéressé n’a pas pu atteindre les objectifs auxquels il avait initialement souscrit.
« III. – Au terme de son contrat, une commission apprécie la valeur scientifique de l’intéressé et son aptitude à exercer les missions mentionnées à l’article L. 952‑3, afin de vérifier qu’il remplit les conditions pour être titularisé dans un corps de professeur. L’intéressé est ensuite titularisé.
« Cette commission de titularisation est constituée de personnes de rang égal à celui de l’emploi à pourvoir et comporte au moins un tiers d’universitaires ou de chercheurs extérieurs à l’établissement, dont au moins un étranger.
« Elle examine, pour chaque candidat, un rapport sur l’activité et les travaux accomplis.
« La titularisation est subordonnée à un engagement de servir.
« IV. – Un décret en Conseil d’Etat fixe les modalités d’application du présent article, notamment les conditions d’équivalence de diplôme exigées pour le recrutement en qualité d’agent contractuel, les modalités de la procédure de sélection, les conditions du renouvellement du contrat, les modalités d’appréciation, avant la titularisation, de la valeur scientifique et de l’aptitude à exercer les missions mentionnées à l’article L. 952‑3, les modalités de nomination de la commission de titularisation et les conditions de l’engagement de servir. »
III. – Il est inséré, après l’article L. 952‑21 du même code, un article ainsi rédigé :
« Art. L. 952‑21‑1. – L’article L. 952‑6‑2 est applicable aux membres du personnel enseignant et hospitalier sous réserve des adaptations prévues par décret en Conseil d’État. »
I. – L’article L. 1242‑3 du code du travail est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Lorsque l’employeur confie des activités de recherche au salarié et participe à sa formation à la recherche et par la recherche dans les conditions fixées à l’article L. 412‑3 du code de la recherche. »
II. – Le chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la recherche est complété par un article ainsi rédigé :
« Art. L. 412‑3. – I. – Par dérogation à l’article L. 1221‑2 du code du travail, un contrat de travail de droit privé à durée déterminée, dénommé “contrat doctoral”, peut être conclu lorsque l’employeur :
« a) Confie des activités de recherche à un salarié inscrit dans un établissement d’enseignement supérieur français en vue d’obtenir la délivrance d’un diplôme de doctorat tel que prévu à l’article L. 612‑7 du code de l’éducation ;
« b) Et participe, en application des dispositions de l’article L. 412‑1 du code de la recherche, à la formation du salarié doctorant à la recherche et par la recherche.
« Les conditions particulières d’exécution du contrat ainsi que les modalités selon lesquelles l’employeur participe à la formation du salarié doctorant à la recherche et par la recherche sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« II. – Le contrat de travail prévu au I comporte un terme précis fixé dès sa conclusion en référence à une durée de contrat ou une date de fin de contrat, dans la limite d’une durée initiale de trois ans.
« Le contrat est renouvelable deux fois, pour une durée maximale d’un an à chaque renouvellement et dans la limite totale de cinq ans.
« Les conditions de renouvellement sont stipulées dans le contrat ou font l’objet d’un avenant soumis au salarié doctorant avant le terme initialement prévu.
« III. – Outre les cas de rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée prévus à l’article L. 1243‑1 du code du travail, l’employeur peut rompre de manière anticipée le contrat de travail prévu au I lorsque l’inscription du salarié en vue d’obtenir la délivrance d’un diplôme de doctorat n’est pas renouvelée. Dans ce cas, les dommages et intérêts prévus au premier alinéa de l’article L. 1243‑4 de ce code, ainsi que l’indemnité de fin de contrat prévue à son article L. 1243‑8, ne sont pas dus au salarié doctorant.
« A défaut pour le salarié d’être inscrit dans un nouvel établissement d’enseignement supérieur français en vue d’obtenir la délivrance d’un diplôme de doctorat dans un délai fixé par décret, le maintien du salarié dans l’entreprise est subordonné à la conclusion d’un contrat de travail dans les conditions du droit commun.
« IV. – Outre les cas mentionnés à l’article L. 1248‑2 du code du travail, est puni d’une amende :
« 1° De 3 750 €, le fait de méconnaître les dispositions du II relatives à la durée du contrat de travail à durée déterminée. La récidive est punie d’une amende de 7 500 € et d’un emprisonnement de six mois ;
« 2° De 3 750 €, le fait de conclure un contrat de travail à durée déterminée ne comportant pas un terme fixé dès sa conclusion en référence à une durée de contrat ou une date de fin de contrat, en méconnaissance des dispositions du II. La récidive est punie d’une amende de 7 500 € et d’un emprisonnement de six mois ;
« 3° De 3 750 €, le fait de renouveler le contrat de travail à durée déterminée en méconnaissance des dispositions du II. La récidive est punie d’une amende de 7 500 € et d’un emprisonnement de six mois. »
Article 5
I. – L’article L. 1242‑3 du code du travail est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Lorsque l’employeur confie au salarié, dans les conditions fixées à l’article L. 431‑5 du code de la recherche, des activités de recherche en vue de la réalisation d’un objet défini et qu’il s’engage à fournir au salarié une expérience professionnelle complémentaire au diplôme de doctorat prévu à l’article L. 612‑7 du code de l’éducation. »
II. – Au chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la recherche, il est ajouté un article L. 412‑4 ainsi rédigé :
« Art. L. 412‑4. – Les établissements publics d’enseignement supérieur, les établissements publics à caractère scientifique et technologique, les autres établissements publics à caractère administratif dont les statuts prévoient une mission de recherche peuvent recruter des chercheurs, titulaires du diplôme de doctorat tel que prévu à l’article L. 612‑7 du code de l’éducation, par un contrat de droit public dénommé « contrat post‑doctoral ».
« Le contrat post‑doctoral a pour objet l’exercice par le chercheur d’une activité de recherche dans le cadre d’un projet retenu au titre d’un appel à projets international ou national, ou défini par l’établissement. L’activité proposée doit fournir au chercheur une expérience professionnelle complémentaire au doctorat lui permettant d’approfondir sa pratique de la recherche, de faciliter sa transition professionnelle vers des postes permanents en recherche publique ou privée, et de prendre, le cas échéant, des responsabilités scientifiques au sein de l’établissement.
« Le contrat post‑doctoral doit être conclu au plus tard trois ans après l’obtention du diplôme de doctorat, pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois. Il précise les engagements de l’établissement concernant l’accompagnement du bénéficiaire du contrat, notamment en matière de formation et de périodes d’insertion professionnelle en France comme à l’étranger.
« Les modalités de recrutement, les conditions de l’exercice des fonctions et les mesures d’accompagnement des bénéficiaires de ces contrats sont fixées par décret en Conseil d’État. »
III. – Le chapitre Ier du titre III du livre IV du même code est complété par un article ainsi rédigé :
« Art. L. 431‑5. – I. – Par dérogation à l’article L. 1221‑2 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée peut être conclu dans les établissements publics de recherche à caractère industriel et commercial et les fondations reconnues d’utilité publique ayant pour activité principale la recherche publique au sens de l’article L. 112‑1, pour recruter un chercheur, titulaire du diplôme de doctorat prévu à l’article L. 612‑7 du code de l’éducation, en vue de la réalisation d’un objet défini.
« Le contrat doit être conclu au plus tard trois ans après la date d’obtention du diplôme de doctorat par le salarié.
« Un décret fixe la liste des établissements et fondations concernés.
« II. – Le contrat prévu au I est conclu pour réaliser des activités de recherche dans le cadre d’un projet retenu au titre d’un appel à projets international ou national, ou défini par l’établissement.
« L’activité de recherche proposée doit fournir au salarié une expérience professionnelle complémentaire au doctorat.
« Les mesures d’accompagnement du salarié, notamment en matière de formation aux emplois et de périodes d’insertion professionnelle en France comme à l’étranger, sont fixées par décret en Conseil d’État.
« III. – La durée totale du contrat ne peut excéder quatre ans, compte tenu, le cas échéant, du ou des renouvellements intervenus dans les conditions prévues au IV.
« IV. – Le contrat prévu au I peut ne pas comporter de terme précis. Il est alors conclu pour une durée minimale et a pour terme la réalisation de l’objet pour lequel il a été conclu.
« Lorsque le contrat de travail prévu au I comporte un terme fixé dès sa conclusion en référence à une durée de contrat ou une date de fin de contrat, il est renouvelable deux fois pour une durée maximale d’un an chacune. La durée du ou, le cas échéant, des deux renouvellements, ajoutée à celle du contrat initial, ne peut excéder la durée maximale fixée au III.
« Les conditions de renouvellement sont stipulées dans le contrat ou font l’objet d’un avenant soumis au salarié avant le terme initialement prévu.
« V. – Outre les mentions figurant à l’article L. 1242‑12 du code du travail, le contrat de travail prévu au I comporte également :
« 1° La mention « contrat à objet défini de recherche » ;
« 2° Une clause descriptive du projet et la mention de sa durée prévisible ;
« 3° La définition des tâches pour lesquelles le contrat est conclu ;
« 4° L’événement ou le résultat objectif déterminant la fin de la relation contractuelle, lorsque le contrat n’a pas de terme précis ;
« 5° Le délai de prévenance de l’arrivée au terme du contrat et, le cas échéant, de la proposition de poursuite de la relation de travail en contrat à durée indéterminée ;
« 6° Les mesures d’accompagnement, notamment en matière de formation aux emplois et de périodes d’insertion professionnelle en France comme à l’étranger.
« VI. – Par dérogation au 1° de l’article L. 1243‑10 du code du travail, les dispositions relatives à l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243‑8 du même code sont applicables lorsque le contrat prévu au I du présent article arrive à l’échéance du terme et que les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée.
« VII. – Outre les cas mentionnés à l’article L. 1248‑2 du code du travail, est puni d’une amende :
« 1° De 3 750 euros, le fait de méconnaître les dispositions du III, relatives à la durée du contrat de travail à durée déterminée. La récidive est punie d’une amende de 7 500 € et d’un emprisonnement de six mois ;
« 2° De 3 750 euros, le fait de renouveler le contrat de travail à durée déterminée en méconnaissance du IV. La récidive est punie d’une amende de 7 500 € et d’un emprisonnement de six mois. »
Article 6
Le chapitre Ier du titre III du livre IV du code de la recherche est complété par un article ainsi rédigé :
Art. L. 431‑6. – Dans les établissements publics de recherche, dans les établissements publics d’enseignement supérieur et dans les établissements publics dont les statuts prévoient une mission de recherche mentionnés à l’article L. 112‑6, un agent peut être recruté, pour mener à bien un projet ou une opération de recherche identifiée, par un contrat de droit public dont l’échéance est la réalisation du projet ou de l’opération.
« Ce contrat est conclu pour une durée indéterminée après un appel public à candidatures et selon une procédure de recrutement permettant de garantir l’égal accès à ces emplois.
« Par dérogation aux dispositions de la loi n° 84‑16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, le contrat prend fin avec la réalisation de l’objet pour lequel il a été conclu, après un délai de prévenance fixé par décret en Conseil d’État. Il peut être également rompu lorsque le projet ou l’opération pour lequel ce contrat a été conclu ne peut pas se réaliser.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article, notamment la nature des projets ou opérations de recherche pouvant bénéficier d’un tel contrat, les modalités de recrutement et de rupture du contrat ainsi que les modalités de mise en œuvre d’une indemnité de rupture lorsque le projet ou l’opération pour lequel le contrat a été conclu ne peut pas se réaliser. »
Article 7
I. – Le titre III du livre IV du code de la recherche est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Doctorants et chercheurs étrangers accueillis
dans le cadre d’un séjour de recherche
« Art. L. 434‑1. – I. – Les établissements publics d’enseignement supérieur, les établissements publics à caractère scientifique et technologique, les autres établissements publics dont les statuts prévoient une mission de recherche mentionnés à l’article L. 112‑6, les établissements publics à caractère industriel et commercial et les fondations reconnues d’utilité publique ayant pour activité principale la recherche publique au sens de l’article L. 112‑1 peuvent accueillir dans le cadre d’un séjour de recherche :
« 1° Des étudiants de nationalité étrangère inscrits dans un établissement d’enseignement supérieur soit en France, soit à l’étranger, dans le cadre de la préparation du doctorat ;
« 2° Des chercheurs de nationalité étrangère, titulaires d’un diplôme de doctorat.
« Le séjour de recherche a pour objet de participer à une formation à la recherche et par la recherche, de concourir à une activité de recherche ou de développement technologique, au sein d’un établissement d’accueil. Cette activité peut être complétée par une activité d’enseignement.
« II. – Pour pouvoir bénéficier d’un séjour de recherche, les doctorants et chercheurs étrangers doivent bénéficier d’une bourse ou de tout autre financement dédié à cette activité, accordé selon des critères scientifiques, après sélection par un gouvernement étranger ou une institution étrangère ou par le ministère chargé des affaires étrangères.
« Le séjour de recherche fait l’objet d’une convention entre le ou les établissements d’accueil et le doctorant ou chercheur étranger qui précise les modalités de prise en charge et d’accueil. La convention de séjour de recherche définit les règles applicables en matière de propriété intellectuelle.
« Pour les doctorants mentionnés au 1° du I, la convention est conclue pour une durée maximale de trois ans. Elle peut être renouvelée deux fois pour une année, dans la limite de la durée du financement dont bénéficie l’étudiant étranger accueilli au titre du séjour de recherche.
« Pour les chercheurs mentionnés au 2° du I, la convention est conclue pour une durée maximale d’un an.
« III. – L’établissement d’accueil peut décider de verser un complément de financement afin de contribuer aux frais du séjour du doctorant ou du chercheur étranger, dans la limite de 50 % du plafond annuel mentionné à l’article L. 241‑3 du code de la sécurité sociale. Le financement dédié à cette activité et le complément éventuel versé par l’établissement d’accueil n’ont pas le caractère d’un salaire au sens de l’article L. 3221‑3 du code du travail.
« La convention de séjour de recherche mentionnée au II définit, le cas échéant, les modalités de versement du complément de financement.
« L’établissement d’accueil vérifie que le doctorant ou le chercheur étranger bénéficie d’une couverture de droit commun ou d’une couverture équivalente en matière de maladie, d’accident et respecte les règles applicables en matière de responsabilité civile. »
II. – Au 2° de l’article L. 412‑8 du code de la sécurité sociale, il est ajouté un g ainsi rédigé :
« g) Les doctorants et chercheurs étrangers mentionnés à l’article L. 434‑1 du code de la recherche pour les accidents survenus au cours de leurs activités de recherche ou d’enseignement ; ».
III. – Le code de l’entrée et du séjour et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° Après le 5° du II de l’article L. 313‑7, il est inséré un 6° ainsi rédigé :
« 6° À l’étranger qui, à l’exception des cas mentionnés au 4° de l’article L. 313‑20, a signé la convention de séjour de recherche définie à l’article L. 434‑1 du code de la recherche, afin de se former à la recherche et par la recherche. » ;
2° Au 4° de l’article L. 313‑20, après la première phrase, il est inséré la phrase suivante : « Cette convention d’accueil peut être conclue par l’étranger qui a signé la convention de séjour de recherche prévue à l’article L. 434‑1 du code de la recherche et qui bénéficie d’un financement au moins équivalent à la rémunération minimale, hors prise en compte des charges sociales afférentes, fixée par arrêté des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la recherche portant rémunération des doctorants. »
Article 8
I. – Le chapitre Ier du titre II du livre IV du code de la recherche est complété par un article ainsi rédigé :
« Art. L. 421‑5. – Les personnels de recherche mentionnés à l’article L. 411‑1, détachés ou mis à disposition auprès d’administrations, d’organismes ou d’établissements exerçant une ou plusieurs des missions définies à l’article L. 411‑1, peuvent bénéficier d’une nomination dans un autre corps à la suite de la réussite à un concours ou examen professionnel ou au titre d’une promotion au choix, sans qu’il soit mis fin à leur mise à disposition ou à leur détachement, lorsque cette nomination n’est pas conditionnée à l’accomplissement d’une période de formation ou de stage préalable. »
II. – Le chapitre Ier du titre V du livre IX du code de l’éducation est complété par un article L. 951‑2‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 951‑2‑1. – Les enseignants‑chercheurs relevant du présent titre et les membres des corps d’ingénieurs et de personnels techniques de recherche et de formation qui exercent leurs fonctions dans des établissements publics, détachés ou mis à disposition auprès d’administrations, d’organismes ou d’établissements exerçant une ou plusieurs des missions définies à l’article L. 123‑3, peuvent bénéficier d’une nomination dans un autre corps à la suite de la réussite à un concours ou examen professionnel ou au titre d’une promotion au choix, sans qu’il soit mis fin à leur mise à disposition ou à leur détachement lorsque cette nomination n’est pas conditionnée à l’accomplissement d’une période de formation ou de stage préalable. »
Article 9
L’article L. 952‑10 du code de l’éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’ils sont, à la date à laquelle ils atteignent la limite d’âge qui leur est applicable, responsables d’un projet lauréat d’un appel à projets inscrit sur une liste fixée par décret, les professeurs de l’enseignement supérieur, les directeurs de recherche et les personnels titulaires de l’enseignement supérieur assimilés aux professeurs d’université pour les élections à l’instance nationale mentionnée à l’article L. 952‑6 peuvent être autorisés à rester en fonction au‑delà de cette date jusqu’à l’achèvement du projet de recherche et de développement technologique pour lequel ils ont été lauréats et pour une durée de cinq ans au plus. »
TITRE III
CONSOLIDER LES DISPOSITIFS DE FINANCEMENT ET D’ORGANISATION DE LA RECHERCHE
Article 10
I. – Le code de la recherche est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 112‑5, il est inséré un nouvel article L. 112‑6 ainsi rédigé :
« Art. L. 112‑6. – Un décret pris sur le rapport du ministre chargé de la recherche fixe la liste des établissements publics dont les statuts prévoient une mission de recherche. » ;
2° Au titre Ier du livre Ier, l’intitulé du chapitre IV est remplacé par l’intitulé suivant : « Évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur » ;
3° L’article L. 114‑2 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 114‑2. – Les organismes publics de recherche et les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel font l’objet de procédures d’évaluation périodique, qui portent sur l’ensemble des missions mentionnées respectivement à l’article L. 112‑1 du présent code et à l’article L. 123‑3 du code de l’éducation.
« Ces évaluations sont rendues publiques dans les conditions prévues à l’article L. 114‑1‑1. » ;
4° À l’article L. 114‑3, les mots : « procédures d’appréciation » sont remplacés par les mots : « procédures d’évaluation » ;
5° À l’article L. 114‑3‑1 :
a) Au 1°, les mots : « définis à l’article L. 718‑3 du code de l’éducation » sont supprimés ;
b) Au 6°, les mots : « a posteriori » sont remplacés par les mots : « les grandes infrastructures de recherche nationales, » ;
c) Après le onzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il peut aussi évaluer, à la demande des autorités compétentes, les activités de recherche des établissements publics dont les statuts prévoient une mission de recherche mentionnés à l’article L. 112‑6. » ;
6° Le dernier alinéa de l’article L. 114‑3‑2 est supprimé ;
7° Au II de l’article L. 114‑3‑3 :
a) Au 1°, les mots : « dont au moins l’un d’entre eux a été autorisé à participer à la création d’une entreprise en application des articles L. 531‑1, L. 531‑2, L. 531‑4, L. 531‑5, L. 531‑12, L. 531‑14, L. 531‑15 et L. 531‑16, » sont supprimés ;
b) Après le 5°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Parmi les membres ayant la qualité de chercheur, d’ingénieur ou d’enseignant‑chercheur nommés au titre du 1° ou du 2° figure au moins un membre ayant bénéficié de l’une des autorisations prévues au chapitre Ier du titre III du livre V du code de la recherche. » ;
8° Au dernier alinéa de l’article L. 311‑2, les mots : « réalisée par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, en particulier des résultats obtenus en application des dispositions de l’article L. 114‑3‑2 du code de la recherche, » sont supprimés.
II. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1°L’article L. 242‑1 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 242‑1. – L’évaluation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel est assurée conformément aux dispositions des articles L. 114‑1 et suivants du code de la recherche. » ;
2° Au dernier alinéa de l’article L. 711‑1, les mots : « réalisée par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, en particulier des résultats obtenus en application des dispositions de l’article L. 114‑3‑2 du code de la recherche, » sont supprimés.
III. – Le 7° du I du présent article est applicable au premier renouvellement du collège du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur suivant la date de publication de la présente loi.
Article 11
I. – Le titre Ier du livre III du code de la recherche est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre III
« Les unités de recherche
« Art. L. 313‑1. – Les établissements publics de recherche, les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel et les autres établissements publics d’enseignement supérieur, ainsi que les associations et fondations reconnues d’utilité publique ayant pour activité principale la recherche publique au sens de l’article L. 112‑1, peuvent comporter des unités de recherche administrant les dotations globales de fonctionnement et d’équipement qui leur sont allouées par les organes directeurs de l’établissement. Ces unités peuvent relever aussi d’autres établissements contribuant au service public de l’enseignement supérieur ou au service public de la recherche.
Une unité de recherche peut être créée conjointement par plusieurs établissements ou organismes mentionnés à l’alinéa précédent. Dans ce cas, son directeur est placé sous l’autorité conjointe de leurs dirigeants. »
II. – Le deuxième alinéa de l’article L. 321‑3 du même code est supprimé.
Article 12
Le code de la recherche est ainsi modifié :
1° À l’article L. 329‑1, les mots : « L’ensemble des biens, droits et obligations du groupement d’intérêt public “Agence nationale de la recherche” lui sont dévolus suivant des conditions précisées par décret » sont supprimés ;
2° À l’article L. 329‑2, les mots : «, au moins tous les quatre ans, » sont supprimés ;
3° À l’article L. 329‑4, le mot : « thématiques » est remplacé par le mot : « ciblés » ;
4° L’article L. 329‑5 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 329‑5. – Pour tout projet de recherche financé par l’Agence nationale de la recherche dans le cadre d’une procédure d’appel à projets, un montant dénommé « préciput » est attribué aux établissements participant au service public de la recherche qui sont parties prenantes au projet de recherche.
« Dans le cas d’un projet mené en commun par plusieurs établissements participant au service public de la recherche, ce préciput est réparti entre ces établissements par accord entre eux ou, à défaut, dans des conditions précisées par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la recherche. »
« Les dispositions du présent article sont applicables aux associations ou fondations reconnues d’utilité publique ayant pour activité principale la recherche publique au sens de l’article L. 112‑1 dans lesquelles le porteur du projet exerce ses fonctions ou qui sont parties prenantes au projet de recherche. »
5° À l’article L. 329‑6 :
a) Les mots : « Lorsque, », « n’a pas retenu un projet, elle » et « qui en fait la demande » sont supprimés ;
b) Les mots : « du refus et le nom des évaluateurs » sont remplacés par les mots : « de sa décision et la composition du comité de sélection. »
TITRE IV
DIFFUSER LA RECHERCHE DANS L’ÉCONOMIE
ET LA SOCIÉTÉ
Article 13
Le code de la recherche est ainsi modifié :
1° À l’article L. 531‑1 :
a) L’alinéa suivant est inséré après le premier alinéa :
« Pour les fonctionnaires civils de l’État des services publics et entreprises publiques mentionnés à l’alinéa précédent et les fonctionnaires civils de l’État exerçant leurs fonctions dans les établissements publics relevant du décret mentionné à l’article L. 112‑6, l’objet de l’entreprise créée peut être la valorisation de travaux de recherche et d’enseignement non nécessairement réalisés par les intéressés dans l’exercice de leurs fonctions. »
b) Les mots : « Le contrat mentionné au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « Le contrat mentionné au premier ou au deuxième alinéa ».
2° Après la section 1 du chapitre Ier du titre III du livre V, il est inséré une section 1 bis ainsi rédigée :
« Section 1 bis
« Participation des personnels de la recherche en qualité d’associé
ou de dirigeant à une entreprise existante
« Art. L. 531‑6. – Les fonctionnaires civils de l’État des services publics et entreprises publiques définis à l’article L. 112‑2 et les fonctionnaires civils de l’État exerçant leurs fonctions dans les établissements publics dont la liste est fixée par le décret mentionné à l’article L. 112‑6 peuvent être autorisés à participer à titre personnel, en qualité d’associé ou de dirigeant, à une entreprise dont l’objet est d’assurer, en exécution d’un contrat conclu avec une personne publique, une entreprise publique ou une personne morale mandatée par ces dernières, la valorisation de travaux de recherche et d’enseignement.
« Le fonctionnaire ne peut pas représenter la personne publique ou l’entreprise publique dans une négociation avec l’entreprise.
« Les dispositions des articles L. 531‑4 et L. 531‑5 s’appliquent. » ;
3° À l’article L. 531‑8 :
a) L’alinéa suivant est inséré après le premier alinéa :
« Pour les fonctionnaires civils de l’État des services publics et entreprises publiques mentionnés au premier alinéa de l’article L. 531‑1 et les fonctionnaires civils de l’État exerçant leurs fonctions dans les établissements publics relevant du décret mentionné à l’article L. 112‑6, le concours scientifique peut être apporté pour la valorisation de travaux de recherche non nécessairement réalisés par les intéressés dans l’exercice de leurs fonctions ».
b) Les mots : « Le contrat mentionné au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « Le contrat mentionné au premier ou au deuxième alinéa ».
4° À l’article L. 531‑14 :
a) Au premier alinéa, après la référence : « L. 531‑1, » est insérée la référence : « L. 531‑6, » ;
b) Au sixième alinéa, après les mots : « Dans les cas prévus aux articles » est insérée la référence : « L. 531‑6, » ;
5° À l’article L. 531‑15 :
a) Au I après la référence : « L. 531‑1 » est insérée la référence : « , L. 531‑6 » ;
b) Au II après la référence : « L. 531‑1, » est insérée la référence : « L. 531‑6, » ;
6° À l’article L. 531‑17, les mots : « aux sections 1 et 2 » sont remplacés par les mots : « aux sections 1, 1 bis et 2 ».
Article 14
I. – Le code de la recherche est ainsi modifié :
1° À l’article L. 421‑3 :
a) Au sixième alinéa, après les mots : « les institutions », sont insérés les mots : « et les entreprises » ;
b) Au septième alinéa :
‑ la référence : « f) » est supprimée ;
‑ après les mots : « du code pénal, et » sont insérés les mots : « , le cas échéant, » ;
‑ les mots : « , une activité dans une entreprise exerçant une ou plusieurs des missions définies à l’article L. 411‑1 » sont remplacés par les mots : « et dans le cadre de leurs missions définies à l’article L. 411‑1, une activité auprès de tout employeur de droit privé ou public » ;
2° À l’article L. 422‑1, les mots : « à temps complet comme chercheurs et ingénieurs, dans les établissements publics à caractère industriel ou commercial et les organismes privés » sont remplacés par les mots : « à temps complet ou à temps incomplet dans des fonctions de chercheur ou d’ingénieur, au sein des établissements publics à caractère industriel et commercial et des organismes privés » ;
3° Il est inséré, au chapitre II du titre II du livre IV du code de la recherche, un article ainsi rédigé :
« Art. L. 422‑4. – Afin de favoriser l’accueil des personnels des établissements publics de recherche ou des établissements publics dont les statuts prévoient une mission de recherche mentionnés à l’article L. 112‑6 du code de la recherche, dans le cadre de mises à disposition à temps complet ou incomplet, par des établissements publics à caractère industriel et commercial, par des entreprises ou par des fondations reconnues d’utilité publique ayant pour activité principale la recherche publique au sens de l’article L. 112‑1, ceux‑ci peuvent verser à ces personnels un complément de rémunération qui est soumis aux mêmes charges sociales que les rémunérations versées à leurs salariés. »
II. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Après le quatrième alinéa de l’article L. 952‑2‑1, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Ils peuvent notamment prévoir la possibilité de mettre à disposition à temps complet ou incomplet des enseignants‑chercheurs relevant du présent titre auprès de tout employeur de droit privé ou public exerçant une ou plusieurs des missions définies à l’article L. 123‑3. Ces mises à disposition donnent lieu à un remboursement dont les modalités sont fixées par une convention conclue entre l’établissement d’origine et l’employeur d’accueil.
« Afin de favoriser l’accueil de ces enseignants‑chercheurs, dans le cadre d’une mise à disposition telle que prévue à l’alinéa précédent, les établissements publics à caractère industriel et commercial, les entreprises ou les fondations peuvent verser un complément de rémunération qui est soumis aux mêmes charges sociales que les rémunérations versées à leurs salariés. » ;
2° À l’article L. 952‑14‑1 :
a) Entre les mots : « du code pénal, et » et les mots : « par dérogation » sont insérés les mots : « , le cas échéant, » ;
b) Après les mots : « les enseignants‑chercheurs » sont insérés les mots : « relevant du présent titre » ;
c) Les mots : « une activité dans une entreprise exerçant une ou plusieurs des missions définies à l’article L. 952‑3 » sont remplacés par les mots : « dans les domaines définis à l’article L .952‑3, une activité auprès de tout employeur de droit privé ou public. » ;
3° Il est inséré, après l’article L. 952‑14‑1, un article ainsi rédigé :
« Art. L. 952‑14‑2. – Les services accomplis à temps complet ou à temps incomplet dans des fonctions de chercheur ou d’ingénieur, au sein des établissements publics à caractère industriel et commercial et des organismes privés, par des enseignants‑chercheurs relevant du présent titre sont pris en compte, pour l’appréciation des conditions d’ouverture des droits à pension au regard du code des pensions civiles et militaires de retraite, à concurrence de cinq ans. »
4° À l’article L. 953‑5, les mots : « 25 et 26 de la loi n° 82‑610 du 15 juillet 1982 d’orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France » sont remplacés par les mots : « L. 411‑3 et L. 421‑3 du code de la recherche ».
Article 15
I. – Après l’article L. 421‑3 du code de la recherche, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 421‑4. – Les chefs d’établissement des établissements publics à caractère scientifique et technologique sont responsables de l’attribution des primes aux personnels qui sont affectés dans l’établissement, conformément aux textes applicables et selon les principes de répartition définis par le conseil d’administration.
« Le conseil d’administration peut créer des dispositifs d’intéressement permettant d’améliorer la rémunération des personnels. Un dispositif d’intéressement ne peut se substituer aux régimes indemnitaires institués en application d’un texte législatif ou réglementaire. »
II. – À l’article L. 954‑2 du code de l’éducation :
1° Le premier alinéa est remplacé par un alinéa ainsi rédigé :
« Le président est responsable de l’attribution des primes aux personnels qui sont affectés dans l’établissement, conformément aux textes applicables et selon les principes de répartition définis par le conseil d’administration. » ;
2° Le deuxième alinéa est complété par la phrase suivante : « Un dispositif d’intéressement ne peut se substituer aux régimes indemnitaires institués en application d’un texte législatif ou réglementaire. »
Article 16
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toute mesure de nature législative visant à modifier les dispositions du code de la propriété intellectuelle aux fins de permettre l’octroi de licences collectives ayant un effet étendu, au sens de l’article 12 de la directive 2019/790 du Parlement européen et du Conseil sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE, en vue d’autoriser l’utilisation d’œuvres relevant des arts visuels, à des fins exclusives d’illustration de publications, ou de travaux, diffusés en ligne sans restriction d’accès, dans le cadre d’une activité de recherche et d’enseignement supérieur publics, à l’exclusion de toute activité à but lucratif. Cette autorisation assure des conditions de sécurité juridique pour les utilisateurs, sans préjudice des droits patrimoniaux et moraux attachés à ces œuvres.
II. – L’ordonnance prévue au I est prise dans un délai de douze mois suivant la publication de la présente loi.
III. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de l’ordonnance prévue au I.
TITRE V
MESURES DE SIMPLIFICATION ET AUTRES MESURES
Article 17
I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° À l’article L. 711‑5, les deux dernières phrases sont supprimées ;
2° Il est rétabli un article L. 711‑11 ainsi rédigé :
« Art. L. 711‑11. – Dans le cas où le président, le directeur ou la personne qui, quel que soit son titre, exerce la fonction de chef d’établissement d’un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel cesse ses fonctions, pour quelque cause que ce soit, et jusqu’à la désignation de son successeur, les titulaires d’une délégation donnée par le chef d’établissement restent compétents pour agir dans le cadre de cette délégation. Ces dispositions sont applicables en l’absence de règles particulières prévues par les textes législatifs ou réglementaires régissant l’établissement. » ;
3° À l’article L. 712‑2 :
a) Le 10° est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il présente chaque année au conseil d’administration un rapport d’exécution du plan d’action pluriannuel en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. » ;
b) L’avant‑dernier alinéa est supprimé ;
c) Le dernier alinéa est remplacé par un alinéa ainsi rédigé :
« Le président peut déléguer sa signature à des agents placés sous son autorité. Il peut déléguer une partie de ses pouvoirs aux agents placés sous son autorité désignés pour exercer des fonctions de responsabilité administrative, scientifique ou pédagogique au sein de l’établissement, d’une composante ou d’une unité de recherche. Ces derniers peuvent déléguer leur signature à des agents placés sous leur autorité. » ;
4° Au 9° du IV de l’article L. 712‑3 :
a) Après les mots : « conseil académique », sont insérés les mots : « et le plan d’action pluriannuel en matière d’égalité entre les femmes et les hommes » mentionné à l’article 6 septies de la loi n° 83‑634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
b) Après les mots : « ce schéma », sont insérés les mots : « et de ce plan d’action ».
5° Au II de l’article L. 712‑6‑1, la deuxième phrase est remplacée par la phrase suivante : « Elle est consultée sur les règles de fonctionnement des laboratoires. » ;
6° Au deuxième alinéa de l’article L. 719‑1, après les mots : « selon des modalités fixées par décret » sont insérés les mots : « , sauf si la vacance intervient moins de six mois avant le terme du mandat. »
7° À l’article L. 719‑4, le dernier alinéa est supprimé ;
8° À l’article L. 719‑13 :
a) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’article 19‑7 de la loi n° 87‑571 du 23 juillet 1987 précitée, les sommes que chaque membre fondateur, personne publique, s’engage à verser ne sont pas garanties par une caution bancaire. » ;
b) Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’article 19‑3 de la loi n° 87‑571 du 23 juillet 1987 précitée, la fondation peut acquérir ou posséder d’autres immeubles que ceux nécessaires au but qu’elle se propose. » ;
c) Le sixième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les statuts de la fondation peuvent prévoir la possibilité de créer un quatrième collège représentant les donateurs. »
9° Le neuvième alinéa de l’article L. 781‑1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En cas de vacance d’un siège, un nouveau membre est désigné pour la durée du mandat restant à courir selon des modalités fixées par décret, sauf si la vacance intervient moins de huit mois avant le terme du mandat. » ;
10° À l’article L. 781‑2 :
a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il présente chaque année au conseil d’administration un rapport d’exécution du plan d’action pluriannuel en matière d’égalité entre les femmes et les hommes exposant la situation de chaque pôle universitaire régional. » ;
b) Au douzième alinéa, après les mots : « conseil académique », sont insérés les mots : « et le plan d’action pluriannuel en matière d’égalité entre les femmes et les hommes mentionné à l’article 6 septies de la loi n° 83‑634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires » et, après les mots : « ce schéma », sont insérés les mots : « et de ce plan d’action » ;
11° Au dernier alinéa de l’article L. 781‑3, après les mots : « pour les affaires intéressant le pôle », sont insérées les dispositions suivantes : « , à des membres élus des conseils mentionnés au I de l’article L 781‑1, ainsi qu’à des agents placés sous son autorité. Il peut déléguer une partie de ses pouvoirs au vice‑président du pôle pour les affaires intéressants les pôles et aux agents placés sous son autorité désignés pour exercer des fonctions de responsabilité administrative, scientifique ou pédagogique au sein de l’établissement, d’une composante ou d’une unité de recherche. Ces derniers peuvent déléguer leur signature à des agents placés sous leur autorité. »
II. – Le code de la recherche est ainsi modifié :
1° À l’article L. 344‑14, après les mots : « chancelier des universités, » sont insérés les mots : « ou son représentant, ».
2° L’article L. 533‑3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette convention est approuvée par l’autorité de tutelle dans un délai de deux mois à compter de la date de réception de la demande d’approbation. Le silence gardé par l’autorité de tutelle pendant deux mois vaut décision d’approbation. »
Article 18
I. – La loi de programme n° 2006‑450 du 18 avril 2006 pour la recherche est ainsi modifiée :
1° Après l’article 37, il est inséré deux articles ainsi rédigés :
« Art. 37‑1. – I. – L’Institut de France, l’Académie française, l’Académie des inscriptions et belles‑lettres, l’Académie des sciences, l’Académie des beaux‑arts et l’Académie des sciences morales et politiques peuvent, après avis conforme du receveur des fondations et par convention écrite, confier à un organisme public ou privé l’encaissement de recettes ou le paiement de dépenses.
« II. – Peuvent être payées par convention de mandat :
« 1° Les dépenses de personnel ;
« 2° Les dépenses de fonctionnement ;
« 3° Les dépenses d’investissement.
« III. – Peuvent être recouvrées par convention de mandat :
« 1° Les recettes propres ;
« 2° Les recettes tirées des prestations fournies ;
« 3° Les redevances.
« IV. – La convention emporte mandat donné à l’organisme d’assurer l’encaissement de recettes ou le paiement de dépenses au nom et pour le compte de l’Institut de France ou de l’académie mandant. Elle prévoit une reddition au moins annuelle des comptes et des pièces correspondantes. Elle peut aussi prévoir le paiement par l’organisme mandataire du remboursement des recettes encaissées à tort et le recouvrement et l’apurement des éventuels indus résultant des paiements.
« V. – Les conditions d’application du présent article sont définies par décret.
« Art. 37‑2. – Les titres de perception ou de recette de l’Institut de France, de l’Académie française, de l’Académie des inscriptions et belles‑lettres, de l’Académie des sciences, de l’Académie des beaux‑arts et de l’Académie des sciences morales et politiques sont des titres exécutoires au sens de l’article L. 252 A du livre des procédures fiscales. »
2° Le second alinéa de l’article 38 est remplacé par les dispositions suivantes :
« L’Institut et les académies peuvent recevoir des dons et legs. Un décret en Conseil d’État fixe le montant au‑delà duquel les dons et legs avec charges sont autorisés par décret en Conseil d’État. »
II. – Au I de l’article 123 de la loi n° 2015‑1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, après les mots : « ainsi que des autorités publiques indépendantes, » sont insérés, les mots : « de l’Institut de France, de l’Académie française, de l’Académie des inscriptions et belles‑lettres, de l’Académie des sciences, de l’Académie des beaux‑arts et de l’Académie des sciences morales et politiques, ».
III. – À l’article L. 135 ZE du livre des procédures fiscales, les mots : « et des autorités publiques indépendantes, » sont remplacés par les mots : « des autorités publiques indépendantes, de l’Institut de France, de l’Académie française, de l’Académie des inscriptions et belles‑lettres, de l’Académie des sciences, de l’Académie des beaux‑arts et de l’Académie des sciences morales et politiques, ».
IV. – Les conventions de mandat de l’Institut de France, l’Académie française, l’Académie des inscriptions et belles‑lettres, l’Académie des sciences, l’Académie des beaux‑arts et l’Académie des sciences morales et politiques en cours à la date de publication de la présente loi sont rendues conformes aux dispositions de l’article 37‑1 de la loi n° 2006‑450 du 18 avril 2006 de programme pour la recherche, dans sa rédaction résultant du 1° du I du présent article, au plus tard lors de leur renouvellement
Article 19
I. – Au chapitre Ier du titre V du livre IX du code de l’éducation, il est ajouté un article L. 951‑5 ainsi rédigé :
« Art. L. 951‑5. – Par dérogation au IV de l’article 25 septies de la loi n° 83‑634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, l’exercice d’une activité accessoire par les personnels de l’enseignement supérieur relevant du présent titre fait l’objet d’une déclaration à l’autorité dont ils relèvent lorsque cette activité correspond aux missions mentionnées à l’article L. 123‑3 et qu’elle est exercée auprès d’un établissement d’enseignement supérieur, d’un établissement public de recherche, d’un établissement public dont les statuts prévoient une mission de recherche ou d’une fondation reconnue d’utilité publique exerçant une ou plusieurs des missions définies à l’article L. 123‑3. Les conditions d’application de la présente dérogation sont fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – Après le deuxième alinéa de l’article L. 411‑3 du code de la recherche, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au IV de l’article 25 septies de la loi n° 83‑634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, l’exercice d’une activité accessoire par ces personnels fait l’objet d’une déclaration à l’autorité dont ils relèvent lorsque cette activité correspond aux missions mentionnées à l’article L. 411‑1 et qu’elle est exercée auprès d’un établissement d’enseignement supérieur, d’un établissement public de recherche, d’un établissement public dont les statuts prévoient une mission de recherche ou d’une fondation reconnue d’utilité publique ayant pour activité principale la recherche publique au sens de l’article L. 112‑1. Les conditions d’application de la présente dérogation sont fixées par décret en Conseil d’État. »
Article 20
I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Il est inséré un article L. 124‑1‑1 ainsi rédigé :
« Art L. 124‑1‑1. – Par dérogation au troisième alinéa de l’article L. 124‑1 et à l’article L. 124‑3, les périodes de césure prévues à l’article L. 611‑12 peuvent se dérouler sous forme de stage dans des conditions fixées par décret. » ;
2° À l’article L. 124‑3, après les mots : « en établissement » sont insérés les mots : « ou selon les modalités d’enseignement à distance proposées par l’établissement » ;
3° Le VI de l’article L. 612‑3 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après les mots : « aux diplômes d’études universitaires scientifiques et techniques », sont insérés les mots : «, aux formations préparant à la licence professionnelle » ;
b) Au début du second alinéa sont insérés les mots : « Sous réserve de l’application des dispositions des articles L. 621‑3 et L. 650‑1, ».
II. – À l’article 40 de la loi n° 2017‑86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, les mots : « pour une durée de trois ans » sont remplacés par les mots : « pour une durée de six ans ».
Article 21
I. – L’ordonnance n° 2018‑1131 du 12 décembre 2018 relative à l’expérimentation de nouvelles formes de rapprochement, de regroupement ou de fusion des établissements d’enseignement supérieur et de recherche est ratifiée.
II. – L’ordonnance du 12 décembre 2018 mentionnée au I est ainsi modifiée :
1° Au troisième alinéa de l’article 6, les mots : « compétente en premier ressort » sont supprimés ;
2° À l’article 11 :
a) Au premier alinéa, les mots : « , les établissement‑composantes qu’il regroupe » sont remplacés par les mots : « ainsi qu’à la cohérence de sa stratégie avec celles des établissements‑composantes qu’il regroupe, les statuts de ces derniers », les mots : « du livre » sont remplacés par les mots : « des livres VI et » et les mots : « et prendre en compte les dérogations liées à la mise en œuvre des articles 7 et 8 » sont insérés après les mots : « qui leur sont applicables » ;
b) Le troisième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
« Lorsqu’ils relèvent d’un décret en Conseil d’État, les statuts des établissements‑composantes sont modifiés par décret. Dans les autres cas, ils sont modifiés conformément aux dispositions qui leur sont applicables. » ;
3° À l’article 16 :
a) Les mots : « dans le respect des dispositions des trois premiers alinéas de l’article L. 718‑8 du code de l’éducation » sont remplacés par les mots : « selon les modalités définies par le dernier alinéa de l’article L. 718‑8 du code de l’éducation » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Des établissements et organismes mentionnés à l’article L. 718‑2 du même code peuvent, dans le respect des trois premiers alinéas de l’article L. 718‑8 de ce code, se regrouper au sein d’une communauté d’universités et établissements expérimentale bénéficiant des dérogations prévues au premier alinéa du présent article. » ;
4° L’article 21 est complété par les mots : « , dans sa rédaction résultant de la loi n° du de programmation de la recherche pour les années 2031 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à l’enseignement supérieur et à la recherche ».
Article 22
I. – Dans les conditions définies à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi visant à :
1° Organiser la dévolution des droits de propriété intellectuelle sur les actifs obtenus par des auteurs de logiciels ou inventeurs accueillis au sein d’une entité réalisant de la recherche et qui ne sont ni des salariés ni des agents publics ;
2° Simplifier, dans le respect de la directive n° 2009/41/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 mai 2009, la procédure applicable aux utilisations confinées de risque nul ou négligeable d’organismes génétiquement modifiés ;
3° Redéfinir les modalités selon lesquelles les avis et recommandations relatifs aux biotechnologies sont élaborés, en séparant l’évaluation des risques et des bénéfices des considérations éthiques et de conduite du débat public, en vue de consolider l’indépendance et la qualité de l’expertise scientifique mobilisée, et d’améliorer les conditions du débat public ;
4° Modifier le code de l’environnement, le code rural et de la pêche maritime et le code de la consommation afin de prévoir les modalités de traçabilité de l’utilisation des semences des variétés rendues tolérantes aux herbicides et des produits issus ;
5° Assurer la cohérence des codes de l’éducation et de la recherche avec des lois non codifiées et avec les dispositions de la présente loi, abroger les dispositions obsolètes ou devenues sans objet de ces codes et supprimer les dispositions relatives à la carte des formations supérieures ;
6° Étendre l’application des dispositions de la présente loi en Nouvelle‑Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, le cas échéant avec les adaptations nécessaires.
II. – Dans les conditions définies à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi ayant pour objet de modifier le code de l’éducation afin de :
1° Clarifier les notions de cours et d’établissements d’enseignement supérieur privés, harmoniser les conditions d’ouverture de ces établissements dans le sens d’un renforcement du contrôle des conditions exigées des personnels de direction et d’enseignement et de lutte contre les fraudes et les atteintes à l’ordre public et définir les conditions dans lesquelles ces établissements peuvent délivrer un enseignement à distance ;
2° Supprimer le régime de reconnaissance par l’État des établissements d’enseignement supérieur technique privés et prévoir les conditions dans lesquelles l’État peut apporter sa garantie à un diplôme délivré par un établissement d’enseignement supérieur privé ou par un organisme d’enseignement à distance dispensant des formations relevant de l’enseignement supérieur, notamment par la délivrance d’un grade universitaire ;
3° Redéfinir les modalités d’habilitation des cours et établissements d’enseignement supérieur privés à recevoir des boursiers de l’enseignement supérieur, afin de subordonner cette habilitation à la qualité de la formation dispensée, périodiquement évaluée.
III. – Les ordonnances prévues au I et celle prévue au II sont prises respectivement dans un délai de douze mois et de dix‑huit mois à compter de la publication de la présente loi.
IV. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de chaque ordonnance.
Article 23
I. – L’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France est dissous et mis en liquidation à compter du 1er janvier 2021. La personnalité morale de l’établissement subsiste pour les besoins de sa liquidation et jusqu’à la clôture de celle‑ci.
Un arrêté des ministres chargés de l’agriculture, de l’enseignement supérieur et du budget détermine les conditions et les modalités de la liquidation.
II. – Les articles L. 812‑7 à L. 812‑9 du code rural et de la pêche maritime sont abrogés à compter du 1er janvier 2021.
Article 24
L’article L. 6142‑13 du code de la santé publique est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 6142‑13. – Un comité territorial de la recherche en santé est créé auprès de chaque centre hospitalier et universitaire.
« Ce comité est chargé de l’animation et de la coordination territoriale de la recherche en santé entre le centre hospitalier et universitaire, les universités, les établissements de santé, les professionnels de santé libéraux, les établissements publics à caractère scientifique et technologique et les autres organismes de recherche ayant passé une convention d’association avec le centre hospitalier et universitaire dans les conditions prévues à l’article L. 6142‑5, ainsi que les collectivités territoriales.
« Il coordonne, sous la responsabilité conjointe du centre hospitalier et universitaire et de l’université ayant conclu la convention mentionnée à l’article L. 6142‑3, la mise en œuvre de la politique de recherche en santé, notamment dans le cadre des politiques de sites mises en place avec les organismes de recherche.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article, notamment la composition du comité territorial de la recherche en santé. »
Article 25
Les modifications apportées, postérieurement à la date de publication de la présente loi, aux règles de classement des chargés de recherche et des maîtres de conférence régis respectivement par les dispositions du livre IV du code de la recherche et du titre V du livre IX du code de l’éducation peuvent ouvrir aux agents titularisés dans ces corps avant l’entrée en vigueur de ces modifications et classés dans le premier grade de leur corps le bénéfice d’un reclassement rétroactif selon des modalités fixées par décret. La durée des services accomplis entre la date de leur recrutement et le premier jour du mois suivant celui de l’entrée en vigueur de ces modifications est prise en compte pour ce reclassement dans la limite d’un an. Toutefois, l’ancienneté de service des intéressés dans leur corps continue à être décomptée à partir de la date à laquelle ils y ont accédé.
– 1 –
RAPPORT ANNEXÉ
Lancée le 1er février 2019 par le Premier ministre avec l’ambition de donner à la recherche « du temps, de la visibilité et des moyens », l’élaboration de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR) a étroitement associé les acteurs de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (ESRI).
Constitués à l’initiative du Premier ministre et de la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, trois groupes de travail se sont ainsi consacrés au financement de la recherche, à l’attractivité des emplois et des carrières scientifiques et enfin à la recherche partenariale et à l’innovation. Ces groupes ont conduit en 2019 une large concertation faite d’auditions et de contributions écrites, appuyée sur une plateforme en ligne permettant aux acteurs de la recherche d’apporter leur point de vue. Plus de 900 contributions ont ainsi été recueillies et analysées en vue de préparer le présent projet de loi de programmation pluriannuelle.
Ces travaux ont conduit à établir un diagnostic sans appel : celui d’un besoin critique de réinvestissement dans la recherche française. Cela afin de donner à notre pays les moyens de tenir son rang parmi les grandes puissances de la recherche et d’affronter les défis scientifiques et technologiques de demain, particulièrement dans un contexte marqué par la pandémie mondiale de covid‑19.
Fort de ce constat, le Président de la République a fixé un cap, qui porterait enfin l’effort de recherche de la Nation à 3 % de notre PIB, ce qui nécessite en premier lieu un réinvestissement de l’État en faveur de la recherche publique.
Cet investissement permettra d’engager un choc d’attractivité des carrières scientifiques, fondé sur une revalorisation de l’ensemble des métiers de la recherche qui sera particulièrement attentive aux jeunes scientifiques dont le rôle est essentiel pour porter le nouvel essor de la recherche publique française et son rayonnement dans l’ensemble de la société. Il s’accompagnera d’une consolidation des outils actuels de financement et d’organisation de la recherche, d’un renforcement des dispositifs de diffusion des travaux des chercheurs tant dans l’économie que dans la société dans son ensemble, et du lancement d’une dynamique forte de simplification touchant les établissements, les laboratoires et les personnels de la recherche.
1 Une ambition : réinvestir dans la connaissance
Venue à la modernité dans le creuset de l’humanisme et des Lumières, la France a fait du développement et du partage des connaissances un élément central de son identité. La réflexion philosophique et scientifique a nourri une vision singulière de la citoyenneté, qui a participé au rayonnement de notre pays. La France a ainsi incarné, depuis la Révolution française, l’idée d’une émancipation aussi bien politique qu’intellectuelle fondée en raison. Culturellement et scientifiquement, elle a assumé un rôle prééminent.
Ce rayonnement est aujourd’hui remis en cause par la situation objective de notre système public de recherche et d’innovation. Cet affaiblissement de notre capacité collective à répondre aux défis scientifiques contemporains prend place dans un contexte où la science est plus que jamais interpellée pour rendre notre monde intelligible. A tous les niveaux, local, régional, national, européen, global, il nous faut trouver des réponses spécifiques. Nous devons, dans une accélération croissante, apporter des solutions de long terme à des défis inédits dans l’histoire de l’humanité.
La crise sanitaire déclenchée par l’épidémie de covid 19 nous a fait toucher du doigt cette urgence et cette nécessité de ne jamais rompre le fil de la recherche, d’entretenir en continu la production de connaissance afin de nous donner les moyens de répondre rapidement aux enjeux majeurs de nos sociétés tant en matière sanitaire que climatique, énergétique ou numérique.
Ce besoin de science, ressenti avec tant d’acuité partout dans le monde à l’occasion de cette pandémie, est tout aussi impérieux pour faire face aux autres maladies, communes ou rares, émergentes ou réémergentes, pour répondre aux enjeux sanitaires du vieillissement et de la dépendance, et pour relever les autres défis du siècle en mobilisant l’ensemble des facettes de la recherche scientifique.
La notion de santé globale illustre cette démarche en étudiant les problématiques de santé à travers l’ensemble du spectre disciplinaire et met également à jour les liens existants entre la santé humaine, animale et environnementale, nous rappelant à quel point les énigmes qui se posent à l’humanité aujourd’hui sont entrelacées.
La crise climatique et écologique nous oblige à faire face à l’épuisement des ressources, à la mise en danger de la biodiversité, aux évolutions des milieux naturels et humains tout en répondant aux besoins d’une population mondiale qui continue à augmenter. Gérer la complexité de ces multiples évolutions vers plus de résilience n’est possible qu’avec les apports de la science.
Le développement des technologies de l’information et de la communication nous a donné de formidables outils de calcul, de communication, d’analyse des données. Nous découvrons encore les possibilités de ceux que nous utilisons, alors même que l’innovation publique et privée ouvre sans cesse de nouvelles perspectives dans ces domaines. Dans le même temps, ces technologies ont ouvert la voie à une manipulation sans précédent de l’information. Elles ont servi de vecteur à une mise en cause du discours scientifique, y compris dans nos démocraties et aux plus hauts niveaux de responsabilité.
Ces changements globaux sont à la fois la source et la conséquence de transformations de nos modes de vie, qui influent à leur tour sur la santé des personnes, sur l’environnement et les conditions de notre vie collective. Ici aussi, les défis à affronter sont considérables : il nous faut penser et maîtriser le mieux possible les évolutions de notre société, rester à l’écoute de ses attentes et trouver les chemins qui permettront de renforcer sa cohésion. Il nous faut également continuer à être des pionniers de la connaissance afin de pouvoir librement faire nos choix de société pour l’avenir plutôt que de devoir marcher dans les pas des nations qui nous auraient pris de vitesse. La recherche est l’éclaireur de notre liberté et de notre souveraineté.
Ces défis sont vertigineux et engagent l’avenir de la France et de l’Europe sur les prochaines décennies. C’est par la recherche que nous acquerrons les connaissances nécessaires à des décisions collectives pertinentes et à des innovations susceptibles de changer durablement nos manières de produire, de consommer, de nous déplacer, de vivre ensemble. C’est par la recherche que nous pourrons penser, comprendre et surmonter les défis de notre siècle, en France, en Europe et dans le monde. Telle est l’ambition de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche.
1.a.Etat des lieux
1.a.i. Un risque de décrochage de la France en termes d’investissement
Les grands espoirs que nous plaçons en la recherche et notre volonté de porter une loi ambitieuse s’inscrivent dans un contexte où l’effort de recherche global – public et privé – mesuré par le ratio entre les dépenses intérieures de R&D (DIRD) et le produit intérieur brut (PIB) avoisine 2,2 % en France, et régresse légèrement depuis plusieurs années : 2,28 % en 2014, 2,23 % en 2015, 2,22 % en 2016, 2,19 % estimé en 2017. Cette trajectoire éloigne la France de « l’objectif de Lisbonne », fixé à 3 %.
En valeur relative, la DIRD française est supérieure à la moyenne de l’UE28 mais inférieure à la moyenne de l’OCDE (2,37 %).
|
DIRD en % du PIB en 2017 |
Etats‑Unis |
2,79 |
Chine |
2,15 |
Japon |
3,21 |
Allemagne |
3,04 |
Corée du Sud |
4,55 |
France |
2,19 |
Pays‑Bas |
1,99 |
Italie |
1,35 |
Royaume‑Uni |
1,66 |
UE 28 |
1,97 |
OCDE |
2,37 |
Source : Statistiques de l’OCDE de la science et technologie et de la R‑D : Principaux indicateurs de la science et de la technologie (https ://data.oecd.org/fr/rd/depenses‑interieures‑brutes‑de‑r‑d.htm) |
L’écart entre la France et les pays les plus ambitieux en matière de R&D s’accroît : en Allemagne, l’objectif de 3 % est désormais atteint et le Gouvernement a fixé une nouvelle cible à 3,5 %. Au Japon, le niveau actuel est à 3,2 % et la cible à 4,0 % ; en Corée du Sud la DIRD représente 4,5 % du PIB et la cible est à 5,0 %.
Entre 2014 et 2017, alors que le ratio DIRD sur PIB est passé en France de 2,28 à 2,19 %, il est passé pour la moyenne UE 28 de 1,94 % à 1,97 % et pour la moyenne OCDE de 2,35 % à 2,37 %. La tendance baissière observée en France s’inscrit donc à rebours de la tendance générale qui voit un investissement croissant dans la R&D. L’écart par rapport à certains de nos voisins est très important : en 2016, la France a investi en R&D 42,6 Md€ de moins que l’Allemagne.
Le retrait par rapport aux pays les plus avancés concerne à la fois la recherche publique et la recherche privée. En 2016, la DIRD représente 2,22 % du PIB, dont 0,78 % pour les dépenses de R&D des administrations (DIRDA) et 1,44 % pour les dépenses de R&D des entreprises (DIRDE).
Entre 2000 et 2016, la DIRDA de la France a été marquée par une faible croissance, de l’ordre de 1,5 % en volume par an. Cette évolution contraste avec celle de nombreux pays où la DIRDA a augmenté beaucoup plus vite, comme en Allemagne (+ 3,0 % par an) ou aux États‑Unis (+ 2,8 % par an). Dans l’OCDE et l’UE28, les dépenses de R&D publique ont crû en moyenne de 2,5 % et 2,3 % respectivement.
Entre 2000 et 2016, la Corée du Sud, l’Espagne, la Chine, l’Allemagne, les États‑Unis et l’UE‑28 ont augmenté la part de la DIRDA dans le PIB plus que la France.
Source : Données OCDE (PIST‑2018‑1) et MESRI pour la France (hors DIRDA de défense).
L’analyse en valeurs montre des écarts encore plus marqués. Entre 2000 et 2016, la Chine, la Corée du Sud, l’Espagne, l’Allemagne, les Etats‑Unis, l’UE‑28 et le Royaume‑Uni ont augmenté leur DIRDA significativement plus que la France.
Les difficultés économiques que nous traversons à la suite de la crise sanitaire rendent d’autant plus important un réinvestissement massif dans la recherche pour éviter qu’elles ne se traduisent par une forte baisse des budgets de R&D qui obérerait durablement notre avenir.
Source : Données OCDE (PIST‑2018‑1) et MESRI pour la France (hors DIRDA de Défense).
Ce constat d’ensemble se fait particulièrement sentir dans le domaine des rémunérations des personnels scientifiques.
Selon les informations citées par le rapport du groupe de travail consacré à l’attractivité des carrières scientifiques, le salaire annuel brut d’entrée moyen des chercheurs en France représentait en 2013, en parité de pouvoir d’achat, 63% du salaire d’entrée moyen des chercheurs dans les pays de l’OCDE ; le salaire maximum des chercheurs en France représentait 84 % du salaire maximum moyen des pays de l’OCDE. Ce constat a été confirmé par une étude menée par les conseillers scientifiques des ambassades de France dans huit pays clés de la recherche : Allemagne, Australie, États‑Unis, Grande‑Bretagne, Japon, Pays‑Bas, Singapour, Suisse. La situation s’est nettement dégradée depuis 35 ans : en 1985, le salaire brut d’un maître de conférences en début de grille représentait 2,25 SMIC, et il n’est plus que de 1,53 SMIC en 2018, primes comprises (1,4 SMIC hors prime de fin d’année).
Cette faiblesse des rémunérations contribue à une perte d’attractivité des carrières scientifiques en France. A titre d’exemple, le nombre de candidats aux concours chercheurs du CNRS est passé de 8 150 candidats en moyenne au début des années 2010 à moins de 5 800 candidats en 2018, et la part des lauréats étrangers est passée de 32% à 25%.
1.a.ii. Une perte de rationalité dans nos sociétés
Le besoin de revaloriser les carrières scientifiques et de réinvestir dans la connaissance est d’autant plus criant que l’on assiste, depuis plusieurs années, à une remise en cause dans les démocraties occidentales de la parole scientifique et des apports de la science. En 2019, dans un sondage portant sur plus de 140 pays, l’Europe de l’Ouest était la zone du monde dans laquelle les bienfaits de la science pour l’économie et leur pays paraissaient les plus douteux, la France occupant la première place sur ce podium du « pessimisme scientifique » au niveau mondial.
Cette perte du crédit de la parole scientifique se fait d’autant plus ressentir que les réseaux sociaux, en particulier, amplifient fortement l’audience de discours contestataires ou complotistes et de fausses informations, notamment sur des sujets comme la vaccination ou le changement climatique. Un article paru dans Nature Communications à l’été 2019 mettait ainsi en évidence la place disproportionnée occupée par quelques grandes voix climato‑sceptiques dans les médias anglo‑saxons, sans rapport avec les résultats scientifiques de ces pays et la reconnaissance de ces travaux par leurs pairs.
Si des actions vouées à contenir les effets de ces fausses informations peuvent être conduites, à l’instar des lois organique et ordinaire du 22 décembre 2018 relatives à la lutte contre la manipulation de l’information, qui visent à endiguer ce phénomène en période électorale, une politique active en faveur de la parole scientifique doit en parallèle être menée pour lui redonner le crédit qu’elle mérite. Dans un monde où la complexité est bien souvent devenue telle que les problèmes que la science résout sont souvent rendus peu accessibles au grand public, la loi de programmation de la recherche repose sur la conviction que les éléments fondamentaux du raisonnement et de la culture scientifique et technique sont, eux, compréhensibles et transmissibles : la rationalité est l’un des éléments constitutifs de l’unité et de la cohésion nationales.
C’est le cas, d’une part, de la méthode scientifique et de la démarche expérimentale, fondées sur un sens de l’observation, de la preuve, de l’argumentation, dont nous avons collectivement besoin pour construire des repères communs et avancer de concert ; c’est le cas, d’autre part, de la controverse scientifique, dont l’esprit est précisément aux antipodes de formes d’anathèmes sur certains sujets qui émergent parfois dans le débat public. Ces éléments constitutifs de la liberté de la recherche sont au cœur de la loi de programmation, qui entend replacer la science au centre du débat et de la réflexion publique.
Pour y parvenir, il convient d’encourager et de reconnaitre pleinement, au même titre que d’autres formes d’engagement des enseignants‑chercheurs, chercheurs et de l’ensemble des personnels, les activités de diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle, de formation ou encore d’expertise qui renforceront le dialogue avec les scientifiques et la place de la science dans la société.
1.a.iii. Un potentiel d’innovation et de transfert à accroître
Au cours des dix ou vingt dernières années, la recherche française a nettement renforcé son impact économique. Les laboratoires publics français, reconnus dans de nombreux domaines pour leur excellence scientifique, se distinguent également par le nombre de brevets qu’ils déposent. Les mentalités ont évolué et l’intérêt des chercheurs du public pour l’innovation sociale et pour les relations avec les entreprises s’est considérablement accru dans beaucoup de communautés scientifiques. Les équipes d’appui au transfert technologique et aux relations de recherche partenariale avec les entreprises se sont professionnalisées. Une dynamique entrepreneuriale très claire s’est développée et le nombre de création d’entreprises issues des établissements et des laboratoires de l’ESRI a fortement progressé ; « l’écosystème » qui accompagne cet élan est bien présent, comme le montre par exemple l’essor du capital‑risque en France ces dernières années.
Alors que la course internationale à l’innovation ne cesse de s’intensifier et que plusieurs pays progressent plus vite que nous, il est indispensable de poursuivre ces efforts. Les relations entre les laboratoires publics et les entreprises sont encore insuffisantes, qu’il s’agisse de recrutement des docteurs dans les entreprises, de transfert des connaissances et des savoir‑faire, de mobilités public‑privé ou encore de recherche partenariale, notamment avec les PME et les entreprises de taille intermédiaire (ETI). Il est nécessaire aussi de simplifier les dispositifs d’innovation, insuffisamment efficaces : après une période qui a parfois vu une multiplication des outils, il faut désormais mieux intégrer et articuler les dispositifs existants, en s’appuyant sur ceux qui ont le mieux fait leurs preuves, en donnant toute leur place dans ce chantier aux établissements de l’ESRI.
Il faut aussi continuer à amplifier nos efforts pour aider les acteurs à « transformer l’essai » et leur permettre de porter avec ambition des projets d’ampleur. Mieux « transformer l’essai », au niveau des équipes, signifie qu’il est nécessaire de continuer à favoriser la prise de risques et la culture du transfert et de l’impact : déposer un brevet est une chose qui peut représenter une prouesse scientifique et technologique, le transférer et accompagner le passage de l’invention à une réelle innovation en est une autre. Cette ambition exige également que les activités d’innovation soient pleinement reconnues et récompensées dans les évaluations et les carrières des personnels de la recherche et des personnels hospitalo‑universitaires. Elle implique, enfin, de mobiliser et d’accompagner les établissements de l’ESRI pour qu’ils se dotent de politiques d’établissements affirmées en matière d’innovation et bien appuyées sur leurs atouts.
A cet égard, il convient de se déprendre de l’illusion selon laquelle la valorisation de l’actif immatériel de la recherche pourrait constituer une source significative de revenus pour les établissements publics. Il est bien entendu nécessaire, lorsqu’une innovation issue de la sphère publique contribue à créer de la richesse, de veiller à ce qu’un juste retour financier aille aux acteurs qui ont financé la recherche dont l’innovation est issue. Pour autant, ce retour ne peut constituer qu’une ressource complémentaire. Il convient donc également d’assumer, comme y ont invité nombre de rapports récents, que l’objectif principal de la politique de valorisation est de contribuer à la création de richesses et d’emplois sur le territoire national et dans l’espace européen.
1.b. Des forces de la recherche française sur lesquelles capitaliser
Cet état des lieux et les retards qu’il souligne ne doivent cependant pas masquer les forces, nombreuses, de la recherche française, dont la qualité ne fait aucun doute. La France est et demeure à l’évidence une grande puissance scientifique, capable de faire avancer l’ensemble du front des connaissances et de faire émerger des ruptures conceptuelles et des innovations qui transformeront le monde de demain.
Les atouts de la France sont nombreux. Elle peut tout d’abord compter sur la qualité de ses formations dans l’enseignement supérieur, très riches et diversifiées, et plus spécifiquement de ses formations à la recherche et par la recherche, appuyées sur un réseau dense de laboratoires et d’écoles doctorales aujourd’hui structurées et organisées autour de pratiques harmonisées. Si le doctorat reste encore insuffisamment reconnu dans notre pays, la qualité et le niveau de nos docteurs sont remarquables et plébiscités à l’étranger.
A titre d’exemple, la recherche en sciences du vivant et santé représente plus du tiers de la production scientifique mondiale et l’innovation en santé est un des moteurs de l’économie mondiale. En France, cette recherche repose à la fois sur une recherche libre, dirigée par les chercheurs eux‑mêmes, ainsi que sur une recherche davantage programmée par l’Etat qui a démontré son efficacité dans certains domaines comme le cancer, les maladies infectieuses, les maladies rares grâce aux plans successifs portés au plus haut niveau. Elle comprend par ailleurs un volet clinique indispensable, au contact des patients et des professionnels de santé, le plus souvent dans un contexte hospitalo‑universitaire notamment et qui est essentiel pour développer, valider et intégrer les innovations dans la pratique clinique au bénéfice des patients qu’elles soient diagnostiques, thérapeutiques, technologiques ou encore organisationnelles.
Les femmes et les hommes qui font vivre notre système de recherche sont notre principal atout. La France attire toujours des scientifiques brillants en leur offrant relativement tôt des postes stables, là où certains de nos voisins comme l’Allemagne ou l’Italie recrutent des titulaires bien plus tard. Alors que la concurrence internationale ne cesse de s’accroître, le CNRS compte ainsi près de 700 chercheurs permanents allemands ou italiens dans son effectif. La liberté académique que nous offrons à nos scientifiques est un facteur essentiel de leur créativité, à condition de leur donner aussi les moyens de fonctionnement et le temps nécessaire à l’expression de celle‑ci, ce que la loi de programmation ambitionne précisément de faire.
Le système de recherche français s’appuie aussi sur une richesse insuffisamment soulignée et pourtant essentielle : ses personnels ingénieurs et techniciens et administratifs, notamment dans les laboratoires. En particulier, la compétence des ingénieurs et techniciens en fait des piliers et des mémoires du savoir‑faire scientifique et technologique de notre recherche : ils constituent des éléments clés de nos forces scientifiques. Leur rôle est particulièrement important dans le développement et le fonctionnement des grands instruments et infrastructures de recherche.
Ces grandes infrastructures de recherche constituent aussi un atout essentiel de notre pays, en particulier en physique et en sciences de la Terre et de l’Univers où la France est historiquement très investie, souvent avec ses partenaires européens (CERN, observatoires, spatial…). Elles permettent de lever des verrous de connaissance et sont génératrices d’innovations technologiques. Le renforcement des moyens alloués à la recherche doit permettre de développer ces infrastructures et d’en créer aussi dans les autres champs de la connaissance où ces instruments sont également déterminants (sciences du vivant, santé, alimentation, biodiversité, données, …) et sont souvent moins présents en France que dans les pays voisins.
L’organisation duale de notre système de recherche est originale, avec les organismes de recherche et les universités et écoles qui partagent des laboratoires mixtes, mais aussi avec d’autres établissements qui participent à la recherche. Historiquement, les organismes comme le CNRS ont été l’instrument d’une reconstruction volontariste de notre système de recherche après la deuxième Guerre mondiale. Depuis quelques années, les universités autonomes montent en puissance et s’organisent en ensembles omnidisciplinaires. Ce qui peut apparaître comme une complexité est en réalité aujourd’hui un atout qui permet de combiner des politiques nationales de recherche portées par les organismes avec des stratégies de site, articulées avec la formation et les écosystèmes territoriaux, portées par les universités avec leurs partenaires, dont les organismes et les centres hospitalo‑universitaires. Notre système offre ainsi des carrières diversifiées, consacrées à la recherche ou partagées entre formation et recherche, avec des métiers de chercheur ou d’ingénieur, ou encore partagées avec des activités de soins dans le champ de la santé. Avec ses particularités, il a aujourd’hui trouvé un équilibre qui fonctionne.
Enfin, sur le plan international, notre pays dispose d’un réseau d’implantations scientifiques à l’étranger, reconnues à l’échelle mondiale comme des références de premier plan dans leurs domaines : Instituts français et unités mixtes de recherche à l’étranger, notamment pour les sciences humaines et sociales, Institut de recherche pour le développement (IRD) et Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) pour les sciences du développement durable dans les pays du sud, réseau international des Instituts Pasteur, réseau international de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale notamment au travers de l’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS) pour la recherche en santé face aux fléaux sanitaires, etc. Le réseau diplomatique au service de la recherche et des partenariats scientifiques internationaux, singularité française, est un des leviers essentiels de son influence, comme le rappelle chaque année le classement Softpower 30. Dédié à la coopération scientifique et universitaire, ce réseau est un point d’appui pour promouvoir la science française à l’étranger, pour accompagner les chercheurs et les institutions scientifiques dans la prospection et la finalisation des partenariats internationaux de haut niveau, et pour financer des mobilités de chercheurs étrangers vers la France et de chercheurs français à l’étranger.
1.c. Des ambitions pour la science française
Pour capitaliser sur ses forces et permettre à son système de recherche d’exprimer tout son potentiel, la France doit réinvestir dans la connaissance et le savoir. C’est à ce prix qu’elle sera au rendez‑vous des grands défis scientifiques et qu’elle pourra répondre aux nombreuses attentes de la société. Les grandes découvertes sont impossibles à anticiper et la recherche doit s’attacher à repousser les limites dans tous les domaines de la science, sans a priori. Au demeurant, certains de ces défis sont globaux et leur traitement ne peut se limiter à l’échelle du territoire national ou européen, mais lient dans une communauté de destin les pays du Nord et du Sud dont les modes de collaboration scientifique doivent évoluer.
Sans prétention à l’exhaustivité, on peut cependant citer, à titre d’illustrations, quelques grands défis scientifiques ou sociétaux très importants auxquels la recherche française aura l’ambition d’apporter des contributions fortes dans les prochaines années, certains à l’impact sociétal immédiat, d’autres plus fondamentaux mais pas moins tranformants à moyen ou long terme pour nos sociétés.
1.c.i Résoudre les grandes questions ouvertes de la science
La recherche avance souvent en répondant à des énigmes restées sans réponse. Un exemple en est le grand théorème de Fermat qui a suscité de nombreuses tentatives de démonstration avant d’être établi de manière définitive plus de trois siècles après avoir été énoncé. Il n’est pas rare que la résolution de ces grandes questions se traduise ensuite par des innovations importantes et inattendues. Par essence, établir une liste de ces grandes questions est un exercice difficile, mais il est intéressant d’en donner quelques exemples issus de domaines très différents.
La complexité algorithmique : qu’est‑ce qui est accessible au calcul ?
Un exemple de question théorique avec des applications importantes se cache derrière la question absconse « Est‑ce que P = NP ? ». Il s’agit d’une des grandes conjectures mathématiques et informatiques. De manière imagée, la question est la suivante : est‑ce que les problèmes pour lesquels on peut vérifier rapidement qu’une solution est correcte (les problèmes NP, « faciles à vérifier ») sont aussi des problèmes dont on peut calculer rapidement une solution (les problèmes P, « faciles à résoudre ») ?
Cette conjecture a de nombreuses implications en cryptographie, en économie, etc. Si P = NP, alors on pourra trouver des solutions économiques à de nombreux problèmes difficiles d’optimisation ; sinon, ils resteront largement inaccessibles, même avec des supercalculateurs.
Progresser sur le chemin des origines de la vie et de celles de l’espèce humaine
Identifier les premières molécules qui ont réussi, sur Terre, à s’auto‑organiser puis à se répliquer est une question qui fascine la communauté scientifique internationale depuis les expériences fondatrices des années 50. Comment une « soupe primordiale » constituée de molécules relativement simples s’est progressivement complexifiée ? Comment s’est déterminée l’asymétrie homogène (la chiralité) qui caractérise la plupart des molécules constitutives des organismes vivants actuels ?
La recherche sur l’origine de l’espèce humaine est une autre question ouverte d’intérêt majeur. La rareté des fossiles fait qu’une grande partie de notre histoire demeure mystérieuse, de la séparation entre l’homme et les grands singes il y a environ 7 millions d’années à l’origine de notre espèce, Homo sapiens, vieille de quelques centaines de milliers d’années. La France possède aujourd’hui les plus grands laboratoires de paléogénétique, capables de faire parler l’ADN ancien et de reconstituer notre évolution.
D’autres « Terres » dans l’univers ?
La découverte d’exoplanètes par centaines a permis de démontrer la probabilité « d’autres terres » dont les conditions pourraient être favorables à l’émergence de la vie, voire à l’existence de formes de vie extraterrestre. L’astronomie, la physique, la chimie, la géologie et la biologie peuvent contribuer, en avançant ensemble, à produire les réponses expliquant comment les étoiles primordiales et les supernovae ont ensemencé l’univers en atomes, puis en molécules de plus en plus complexes qui se combinent lors de la formation des systèmes planétaires.
1.c.ii Répondre aux enjeux de santé des populations
Au‑delà des grandes interrogations qui traversent l’histoire des sciences, la recherche a aussi vocation à répondre aux questions qui se posent à nos sociétés contemporaines et à éclairer nos politiques publiques. Un des défis scientifiques majeurs de notre époque est celui de notre santé et de notre adaptation aux modifications environnementales, au réchauffement climatique, à la raréfaction des ressources et à certaines pollutions. Nous devons mieux caractériser notre exposition aux composantes de l’environnement (l’exposome) tout au long de la vie, ainsi que ses interactions potentielles sur le génome et l’épigénome des individus. Il s’agit de mieux comprendre les impacts du changement climatique et de nos modes de vie sur les maladies infectieuses émergentes ou ré‑émergentes et sur les maladies chroniques, pour anticiper ces changements, et si possible les prévenir afin de ne pas les subir. Nous devons ainsi mieux prendre en compte le risque épidémique dans un monde globalisé. Il s’agit également de reconsidérer les relations entre alimentation et santé dans une perspective de transition vers des systèmes alimentaires sains et durables.
L’allongement de la durée de vie de la population et la transition démographique nécessitent quant à eux une meilleure compréhension fondamentale des mécanismes du vieillissement. Ces connaissances nouvelles doivent ouvrir la voie à une médecine prédictive, personnalisée et participative. Investir dans le « bien vieillir », la prévention de la perte d’autonomie et l’adaptation de l’environnement au handicap, c’est non seulement renforcer la solidarité et la cohésion sociale, mais c’est aussi se donner les moyens d’une « silver economy » à la française, où l’innovation est accessible à tous et adaptée aux besoins de nos concitoyens.
La modélisation et l’analyse des données de santé, combinées aux données relatives à l’alimentation, à l’environnement et au mode de vie, doivent nous aider à comprendre et prédire l’évolution des causes de morbidité et de mortalité à dix ou vingt ans. Parmi celles‑ci, les maladies cardiovasculaires et neurovasculaires, les maladies mentales, l’antibiorésistance ou encore le risque infectieux de manière générale seront les grands sujets de demain au côté des cancers qui demeureront une cause majeure de morbi‑mortalité.
Pour plusieurs de ces sujets, un programme de recherche pourra être mis en place pour comprendre tant les mécanismes que les moyens de les prendre en charge. Un pilotage sera institué via un comité opérationnel de la recherche en santé, présidé par les ministères chargés de la santé et de l’ESRI, pour mieux coordonner l’ensemble des acteurs de ce secteur très particulier. Ce pilotage est étroitement lié à une rénovation des modalités de programmation et de gestion des différents appels à projets en recherche biomédicale. Une attention spécifique sera apportée à l’étude du risque épidémiologique, notamment au moyen de l’exploitation scientifique des données de santé par l’intelligence artificielle.
Au cœur de nos sociétés, les maladies psychiatriques représentent presque 20 % des dépenses de santé, mais la recherche sur ces pathologies reste le parent pauvre des neurosciences. Il est temps d’étudier les maladies psychiatriques en mobilisant les éclairages des sciences humaines et sociales, mais aussi toutes les approches modernes des neurosciences et notamment les techniques de la génétique, de l’imagerie, de la pharmacologie et les études sur les comportements.
1.c.iii. Bâtir une société plus inclusive
Les sciences et la recherche éclairent aussi les évolutions et les questions qui concernent notre pacte social, fondateur de notre démocratie et garant de notre vivre ensemble.
Penser les inégalités et les différences pour refaire société
Les pays d’Europe et en particulier la France ont choisi de s’engager résolument dans la construction d’un Etat social après la deuxième Guerre mondiale. Cependant, si les finalités sont partagées, ni les moyens ni les résultats ne sont aujourd’hui totalement consensuels. Des contestations s’élèvent. Un risque populiste apparaît. Les inégalités sociales, ethniques, entre les sexes ou les genres, restent prégnantes et s’accroissent ici ou là. Malgré un enrichissement continu des sociétés dans leur ensemble, une part importante de la population se sent marginalisée. Il y a beaucoup à faire pour être collectivement fidèles à la promesse au cœur de notre pacte social.
Dans un contexte où les inégalités sociales sont au cœur des débats politiques, les recherches sur ces questions sont primordiales. La notion d’inclusion elle‑même, d’abord utilisée dans les secteurs de la santé, du handicap et de l’école, invite à aborder ensemble des phénomènes très variés. Ceci ouvre des perspectives de recherche sur l’articulation des différences sociales et culturelles, mais aussi de comportements, de préférences et de compétences. Penser en termes d’inclusion conduit à mesurer les inégalités mais aussi à penser les différences en termes de dispositifs, de processus d’autonomisation et de politiques : des mécanismes de participation peuvent être conçus et expérimentés dans la cité, à l’école, dans le monde du travail, etc.
De nombreuses inégalités se nouent dès l’âge scolaire. L’échec des politiques publiques face au problème persistant des inégalités dans l’éducation appelle une mobilisation de la recherche, en articulation avec les acteurs sociaux, afin de repenser une ou des éducations plus égales, plus justes, contribuant plus efficacement à l’épanouissement des hommes et des femmes et au bon fonctionnement de la société. La recherche française dans ce domaine peut faire appel à de nombreuses disciplines fortes en sciences du langage, en économie, histoire et sociologie de l’éducation, en sciences cognitives et en neurosciences. L’intégration des résultats des différentes disciplines permettra une analyse systématique de l’évaluation et de la réforme de politiques publiques. Les travaux explorant des formes d’éducation plurielle et alternative à l’école et hors de l’école ou portant sur le rôle de l’éducation dans certains contextes socio‑professionnels, auront des conséquences concrètes. Les débouchés seront matériels et technologiques, mais aussi visibles en termes d’innovations sociales et pédagogiques y compris hors les murs de l’école, dans les lieux publics et les institutions culturelles.
Enfin, cet objectif d’inclusion a pour vocation première de donner une place aux différences au sein d’un espace public et dans le cadre de pratiques communes qui reconnaissent la diversité et rendent possibles des formes nouvelles de partage de l’universel. A cet égard, l’essor des études sur les aires culturelles sous toutes leurs formes, comme les renouvellements des questionnements de la philosophie, de l’histoire ou de la sociologie, pour ne citer qu’elles, constituent des dynamiques remarquables.
S’ouvrir à une compréhension nouvelle des comportements pour mieux accueillir et accompagner chacun
La recherche en sciences du comportement connaît aujourd’hui un essor considérable. Les compétences de la psychologie expérimentale, de la psychologie sociale et cognitive, de la linguistique et la psycholinguistique, des sciences cognitives, des neurosciences les plus intégratives, de l’économie, de la sociologie et de la science politique, de la philosophie et de l’éthique, de l’histoire, de l’informatique, des mathématiques et des sciences du numérique sont aujourd’hui convoquées.
Les mutations actuelles de la science économique sont un exemple frappant de ces évolutions. Des notions traditionnelles comme celles de « préférences » et de « rationalité » font l’objet de nouvelles définitions qui englobent leur dimension individuelle aussi bien que collective. Par exemple, l’articulation des préférences et aspirations individuelles entre générations à l’intérieur de la famille, tout autant que l’émergence des préférences sociales vis‑à‑vis des générations futures, deviennent des sujets d’étude majeurs. Non moins important est le réexamen de la notion de rationalité, dans son acception strictement individuelle, mais également en termes d’organisation collective des activités de marché et de différentes voies possibles de l’évolution de nos échanges économiques.
Plus généralement, les analyses des politiques publiques et de la prise de décision, les questions de santé publique, les défis du changement climatique, de la sauvegarde de la biodiversité, de la raréfaction des ressources, les nouvelles préoccupations pour la sécurité humaine, imposent le développement de recherches sur les comportements collectifs, dans leurs mutations comme dans leurs effets. C’est un enjeu considérable, alors que les comportements et les modalités de leurs changements sont transformés par le développement exponentiel du numérique et l’apparition constamment renouvelée des objets connectés, l’émergence des nouveaux usages et des nouveaux modes d’interaction sociale qu’ils suscitent, le déploiement de capteurs comportementaux et physiologiques qui renseignent l’individu en temps réel sur son état et ses performances, etc.
1.c.iv. Bâtir un monde habitable respectueux du vivant
Protéger et valoriser la biodiversité, accompagner la transition de l’agriculture
Au‑delà d’un impératif d’étude de nos sociétés et des « rapports des êtres humains entre eux », il faut aussi renouveler nos savoirs sur « l’être humain dans son environnement ». Il est nécessaire que nous puissions mieux appréhender notre environnement et soutenir une recherche systématique sur la diversité des organismes vivants dans tous les milieux, des plus communs aux plus extrêmes. Il s’agit d’abord de comprendre la richesse et l’équilibre des écosystèmes pour les préserver. Mais c’est aussi une opportunité pour identifier des processus biologiques utilisables et améliorables. L’enjeu est de faire évoluer nos sociétés vers une économie plus vertueuse, utilisant des biotechnologies ou des approches systémiques innovantes pour une agriculture sans pesticides, la remédiation des milieux pollués, des alternatives aux plastiques, des ressources renouvelables, etc.
La question de nos rapports à l’environnement et à la biodiversité se pose d’une manière spécifique dans les champs de l’alimentation et de l’agriculture. La pression climatique sur les productions agricoles et sur l’environnement prend deux formes majeures : tendances climatiques de long‑terme (augmentation de la température) et événements extrêmes plus fréquents et intenses (sécheresses, tempêtes, crues, etc.). Toutes les espèces sont ainsi confrontées à une accélération des changements de leur environnement. La sécurité alimentaire et la santé des populations, l’intégrité de la biosphère (interactions entre le vivant et la planète) dépendent de la compréhension et de la préservation des dynamiques d’évolution du vivant.
Pour adapter les agricultures à ces situations, il est nécessaire de sélectionner des végétaux et des animaux qui puissent résister à ces aléas, mais aussi d’intégrer davantage de diversité dans les systèmes de production agricoles. Renforcer la compréhension fine des processus biologiques et écologiques à l’œuvre au sein des écosystèmes agricoles est indispensable pour concevoir et mettre en œuvre des dispositifs et des outils répondant aux principes de l’agro‑écologie. Il faut par ailleurs développer des technologies nouvelles d’aide à la décision, comme la télédétection, les capteurs et tous les outils d’intégration et d’analyse de l’information, afin d’aller vers une agriculture toujours plus précise et de faciliter le travail quotidien des éleveurs et des cultivateurs.
Une augmentation de la production d’aliments, tout en réduisant les gaspillages, sera nécessaire à l’échelle mondiale pour nourrir dix milliards de personnes en 2050. Pour y parvenir tout en atténuant leur empreinte environnementale, les systèmes alimentaires devront équilibrer leur bilan carbone, réduire leur utilisation d’intrants fossiles et leurs émissions de gaz à effet de serre, augmenter leur capacité de séquestration du carbone atmosphérique dans les sols et renforcer l’autonomie protéique des territoires.
La réduction des pollutions chimiques liées à l’agriculture passe enfin par des alternatives à l’usage des pesticides, des anti‑infectieux, des plastiques et par l’évolution des procédés mis en œuvre tout au long de la chaîne alimentaire depuis la production jusqu’à la consommation. Il s’agit d’une transformation profonde des systèmes agricoles et alimentaires qui doit être accompagnée par une très forte mobilisation pluri‑ et inter‑disciplinaire.
Affronter le changement climatique, décarboner les activités humaines, gérer les ressources marines et favoriser l’accès de tous à une eau potable
Limiter l’impact des sociétés humaines sur le réchauffement climatique, lutter contre ce réchauffement climatique, atténuer ses effets et s’y adapter requièrent une excellente compréhension de la « machine climatique », mais aussi une évaluation précise des différents impacts climatiques et des incertitudes associées. Les principaux verrous relèvent d’une part de l’observation et l’acquisition de données et d’autre part de la modélisation, à différentes échelles d’espace et de temps, qui mobilise des volumes gigantesques de données hétérogènes. Le passage des modèles aux petites échelles plus adaptées à l’étude des impacts du changement climatique sur les territoires est un véritable défi. Pour développer des solutions réellement opérationnelles permettant d’instaurer les transitions nécessaires (notamment écologiques, sociales, énergétiques, agro‑écologiques, etc.), pour produire et stocker efficacement des énergies totalement décarbonées, et créer des réseaux de distribution intelligents, il sera nécessaire de mobiliser des programmes de recherche transdisciplinaires, allant des sciences du climat à l’écologie et aux sciences sociales et politiques, en passant par les sciences de l’ingénieur.
L’océan est un régulateur des changements et de la variabilité du système climatique dont dépendent l’économie, la nutrition, la santé et le bien‑être, l’approvisionnement en eau et l’énergie sur l’ensemble du globe. L’observation et la compréhension de l’océan, qui constitue le plus vaste écosystème de notre planète, est donc un enjeu majeur. La France, deuxième Etat par sa zone économique marine exclusive (11 millions de km2), est fortement concernée par la connaissance, l’utilisation durable et la conservation des océans. Les sciences océaniques sont au cœur de l’engagement français dans les négociations internationales sur le climat, dans le prolongement de la COP21 à Paris.
En 2050, 5,7 milliards d’êtres humains pourraient vivre dans des régions où l’eau manque, au moins un mois par an (ONU, 2018). Or l’eau douce ne représente que 2,5% de l’eau sur notre planète et 70% de cette eau est stockée dans des glaciers menacés par le changement climatique. Cette menace exige de mettre au point de nouvelles façons de désaliniser l’eau de mer, moins consommatrices d’énergie, de recycler l’eau pour la consommation humaine (ou pour l’irrigation des cultures, qui représente 70% de l’utilisation de cette eau douce). La France peut et doit être au premier plan dans la recherche de solutions.
1.c.v. Construire un monde où la technique est au service de l’homme
La dernière décennie a vu une « mise en données » du monde. Les données sont désormais au centre d’une majorité de processus de décision. Cette révolution dans la place des données et de leur analyse par intelligence artificielle a été permise par des travaux de recherche à la fois sur la gestion des masses de données, sur la modélisation aléatoire pour tenir compte des incertitudes, et sur les algorithmes de traitement, d’analyse et de visualisation. Les algorithmes les plus performants aujourd’hui manquent cependant de fondements théoriques, sont difficiles à interpréter et vulnérables aux attaques. Leur exploitation dans des processus de décision parfois critiques pose des questions de pertinence, de confiance, d’explicabilité, d’interprétabilité, de stabilité, de robustesse qui sont autant de défis scientifiques majeurs. Ces déploiements de l’intelligence artificielle cristallisent aussi des questions interdisciplinaires autour de l’appropriation des méthodes et outils numériques, de la responsabilité relative aux décisions prises à l’aide d’algorithmes ou à partir de données, de la reproductibilité des expériences, de l’analyse critique de leurs biais éventuels, de l’interprétation scientifique et des questions éthiques associées.
La numérisation appelle à construire les conditions de la sûreté numérique et donc à accentuer les recherches sur la sécurisation des calculs, des échanges et des données. Ces recherches exigeantes, en particulier en cryptologie et sécurité, combinent des approches formelles traditionnelles et les apports de l’intelligence artificielle pour explorer les grands volumes de données de sécurité afin de repérer les schémas suspects et d’orchestrer les contremesures.
La puissance de calcul des ordinateurs classiques, qui a crû de manière exponentielle depuis les années 1960, plafonne aujourd’hui. La « seconde révolution quantique » peut conduire dans les années à venir à des ordinateurs d’un type nouveau, à la puissance inégalée. Cette recherche pluridisciplinaire associe notamment la recherche en physique, en informatique, en mathématiques et en sciences de l’ingénieur. L’ordinateur quantique suscite des efforts de recherche considérables aussi bien dans le milieu académique qu’au sein de grands groupes industriels, avec l’objectif de développer des technologies innovantes en complète rupture avec les progrès attendus des technologies classiques.
Si elle advient, cette technologie quantique sera une rupture au moins aussi importante que ne l’a été l’ordinateur classique, permettant la résolution de problèmes d’optimisation complexes avec des applications à la recherche de nouveaux matériaux, de nouveaux médicaments, etc. Comme cette nouvelle puissance de calcul permettra de casser les codes cryptographiques qui sécurisent aujourd’hui toutes nos communications sensibles, il est nécessaire de travailler dès maintenant à la cryptographie du futur qui résistera à l’ordinateur quantique, et plus largement au développement de nouveaux algorithmes « quantiques ».
La rencontre de la médecine, des mathématiques et de l’informatique prépare une révolution dans le pronostic, le diagnostic et la mise au point de nouveaux traitements médicaux. En combinant intelligence artificielle, modélisation et assimilation de données (cliniques, biologiques, génomique, imagerie…), nous sommes à l’aube de pouvoir construire des jumeaux numériques d’êtres vivants. Ceux‑ci permettront par exemple de personnaliser un traitement contre le cancer ou de tester divers scénarios chirurgicaux. Le jumeau numérique d’un animal de laboratoire permettra aussi de réaliser certains essais par simulation numérique, limitant ainsi le recours à l’expérimentation animale. Ces nouvelles approches vont également renouveler notre manière d’appréhender notre connaissance du vivant et nous aider à mieux interragir avec notre environnement.
2. Une loi pour les femmes et les hommes qui font la recherche
Le domaine de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation a connu, depuis les années 2000 de nombreuses réformes de structures, avec notamment la naissance et la montée en puissance, parfois irrégulière, des agences de financement, et avec la mise en œuvre, parfois désordonnée, de regroupements d’établissements. Les personnels de la recherche ont eu souvent, et à juste titre, le sentiment d’une complexité croissante de l’environnement dans lequel ils exercent leurs métiers, et d’un alourdissement des tâches administratives qui empiètent sur le temps qu’ils consacrent à leurs missions principales : la recherche, la formation, l’innovation.
La loi de programmation pluriannuelle de la recherche prend en compte ces constats. Cette loi n’engage pas de changements de structures. Tout en consolidant l’organisation existante, elle met l’accent d’abord et avant tout sur les personnels de la recherche, avec le souci de revaloriser leurs rémunérations et de rendre leurs métiers plus attractifs, et l’objectif de leur redonner du temps pour leurs missions essentielles. Elle porte une attention particulière aux jeunes scientifiques, ainsi qu’à la simplification du fonctionnement et de la vie des unités de recherche.
2.a. Revaloriser les rémunérations des scientifiques et mieux reconnaître la diversité de leurs compétences
Le constat de la faiblesse des rémunérations dans l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation tient à la configuration particulière de ses corps de fonctionnaires, dont la rémunération, comme pour tous les corps de la fonction publique, est principalement déterminée par trois composantes, la valeur du point d’indice, fixée transversalement à l’échelle de la fonction publique, les grilles qui déterminent la progression des carrières, et les régimes indemnitaires (primes). C’est sur ce dernier point que les corps de l’ESRI se distinguent : en effet, là où les différents corps de la fonction publique ont globalement fait l’objet d’un travail de réalignement des grilles dans le cadre du « protocole Parcours, carrières et rémunérations » (PPCR), les régimes indemnitaires de l’ESRI sont restés parmi les plus bas et les moins bien distribués de toute la fonction publique. Sur la progression de carrière, le principe du déroulement d’une carrière complète sur deux grades prévus dans le "Protocole Parcours Carrières et Rémunérations" (PPCR) doit être respecté au sein des établissements de l’ESRI.
Au sein même de l’ESRI, des différences peu justifiables existent entre les universités et les organismes de recherche, entre les corps scientifiques (professeurs des universités et maîtres de conférences par rapport aux directeurs et chargés de recherche) et entre les corps techniques (ingénieurs, techniciens et administratifs ; ingénieurs et personnels techniques de recherche et de formation) pour des personnels qui travaillent ensemble dans les mêmes laboratoires. Pour faciliter les mobilités entre universités et organismes, l’objectif sera donc de faire converger les montants moyens de primes entre les différents types de personnels afin de remédier à ces disparités historiques mais peu justifiées aujourd’hui. A cette fin, dès l’année 2021, 92 M€ supplémentaires y seront consacrés ainsi que des montants analogues les années suivantes dans le cadre de la programmation pluriannuelle de la recherche...
Ces revalorisations toucheront ainsi tous les personnels et interviendront de façon différenciée. D’une part, l’ensemble des métiers ont vocation à être revalorisés dans ce cadre, mais le gain sera plus élevé pour les enseignants‑chercheurs et les chercheurs dont le niveau de rémunération est aujourd’hui loin des standards internationaux que pour les personnels ingénieurs, techniciens administratifs et bibliothécaires, dont la situation actuelle est proportionnellement moins défavorable. D’autre part, cette revalorisation a vocation à être plus particulièrement ciblée sur les débuts de carrières, sur lesquels on observe un déficit d’attractivité plus marqué (cf. infra). Cette revalorisation permettra notamment une majoration plus marquée pour les chargés de recherche et les maitres de conférences.
Par ailleurs, la convergence indemnitaire ainsi engagée permettra de procéder à une refonte des régimes indemnitaires existants, afin de les réorganiser autour d’un régime avec trois composantes :
– une composante de base revalorisée ;
– une composante correspondant à une mission renforcée, au choix, sur laquelle l’agent s’engage pour une durée pluriannuelle (par exemple : innovation, direction d’études etc.), en vue de mieux reconnaître l’engagement professionnel ;
– une composante individuelle, constituée des primes existantes (prime d’encadrement doctoral et de recherche), à laquelle pourront s’ajouter des dispositifs comparables comme la prime de reconnaissance de l’investissement pédagogique.
Un travail sera également engagé sur les rémunérations des personnels des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) de recherche pour définir de façon adaptée à chaque établissement une trajectoire de revalorisation de ces rémunérations, ainsi que les orientations qui y seront liées. Par ailleurs, pour les personnels d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche qui relèvent d’autres ministères, une revalorisation sera également mise en place dans les mêmes conditions que pour les agents relevant du MESRI.
Enfin, l’attractivité des carrières et des statuts hospitalo‑universitaires doit être renforcée en s’appuyant sur trois axes principaux :
– l’amélioration des débuts de carrière des personnels hospitalo‑universitaires (HU) notamment par le biais de chaires de professeur junior (tenure‑track) en complément des autres voies d’entrée dans la carrière par concours,
– la refonte des statuts hospitalo‑universitaires pour prendre en compte les besoins de souplesse et d’accompagnement des projets de carrière avec des valences (soins, enseignement et recherche) dont les places respectives peuvent évoluer au cours de la carrière,
– le développement de la recherche dans la formation et l’émergence de nouveaux profils.
2.b. Donner de la sécurité, des perspectives et de l’autonomie aux jeunes scientifiques pour favoriser la prise de risque
Si le constat de la baisse d’attractivité de la France en matière scientifique est global, plusieurs indicateurs montrent que cette perte d’intérêt affecte particulièrement les jeunes chercheurs.
Ainsi, l’âge de recrutement des jeunes chercheurs sur des emplois stables n’a cessé de reculer, atteignant aujourd’hui 33 à 34 ans pour les chargés de recherche et les maîtres de conférences, et induisant nécessairement une période longue et souvent difficile entre le doctorat et l’entrée dans un emploi stable, zone de turbulence accentuée par le caractère peu formalisé des contrats de recherche autour de cette période.
Dans le même temps, l’attractivité du doctorat a régressé dans notre pays depuis 2009, les nouvelles entrées en doctorat passant de près de 20 000 à moins de 17 000.
En nombre de thèses de doctorat par millions d’habitants, la France se situe loin des niveaux atteints par d’autres pays.
En particulier, si la part des doctorants étrangers inscrits en France, avec 42 % du total des doctorants, reste largement au‑dessus de la moyenne des pays de l’OCDE (environ 25 %) et au niveau des pays les plus attractifs comme la Grande‑Bretagne et les Etats‑Unis, ce pourcentage cache de fait une baisse du nombre de doctorants internationaux depuis 2012, de l’ordre de – 8 % par an, tandis que, à l’inverse, le nombre de doctorants inscrits à l’étranger augmente au niveau mondial sur la même période. C’est un sujet de préoccupation important, souligné par le récent rapport de la Cour des Comptes sur la mobilité internationale des étudiants (septembre 2019) : il est indispensable de développer une politique ambitieuse d’attractivité à destination des doctorants étrangers.
Ces constats appellent une série de mesures visant à réinvestir sur les jeunes, en leur offrant plus de stabilité professionnelle et de visibilité sur leurs parcours, ainsi que des conditions propices à la prise de risque scientifique.
A ce titre, la loi de programmation pluriannuelle de la recherche permettra en premier lieu d’améliorer et de sécuriser la situation des doctorants, en accroissant de 20 % le nombre de contrats doctoraux financés par le MESRI avec l’objectif, à moyen terme, de financer tous les doctorants en formation initiale – sans réduire bien sûr, par ailleurs, la possibilité de réaliser un doctorat en complément d’une expérience professionnelle, notamment en tant qu’enseignant. Le nombre de conventions CIFRE sera également augmenté (cf. infra). De plus, la rémunération des nouveaux contrats doctoraux sera progressivement relavorisée de 30 % entre 2021 et 2023.
En contrepartie, les régulations mises en place dans les écoles doctorales permettront de mettre fin aux configurations parfois rencontrées dans lesquelles les doctorants sont placés dans de mauvaises conditions d’encadrement. Il s’agit plus particulièrement de limiter le nombre de doctorants suivis par leur directeur de thèse afin de leur garantir la qualité de leurs travaux et de leur offrir un meilleur accompagnement vers leur insertion professionnelle après la thèse. Ainsi, les contrats doctoraux supplémentaires seront attribués aux établissements et écoles doctorales au regard de la qualité de la formation doctorale et de la qualité de l’insertion professionnelle des docteurs et de son suivi. Un contrat doctoral de droit privé similaire à celui du secteur public permettra par ailleurs d’offrir les mêmes garanties à tous les types de thèse et ainsi de renforcer la mobilité et les thèses en entreprise
Dans le prolongement de l’inscription du doctorat au répertoire national des compétences professionnelles, ces actions seront accompagnées d’une amplification de la politique de reconnaissance du doctorat, notamment en vue d’accroître la présence des docteurs dans toutes les sphères d’activités, publiques et privées. En particulier, la réforme en cours de la haute fonction publique permettra d’y renforcer la place des personnes titulaires d’un doctorat, en poursuivant à cette fin le développement des concours spécifiques.
La sécurisation des débuts de carrière portera également sur les contrats post‑doctoraux, qui représentent aujourd’hui à l’échelle internationale une étape standard de l’entrée dans les carrières scientifiques. En particulier, la configuration des organismes de recherche ayant le statut d’EPIC les contraint, pour leurs recrutements post‑doctoraux, à recourir à des contrats à durée déterminée d’une durée maximale de 18 mois, trop courte par rapport à la durée réelle du projet de recherche. La formalisation d’un contrat de projet post‑doctoral de droit privé sécurisera ces situations. Quel que soit leur statut juridique (droit privé ou droit public), les contrats post‑doctoraux renforceront l’accompagnement du post‑doctorant dans sa transition professionnelle vers des postes pérennes au sein des métiers de la recherche publique ou privée.
Enfin, la rémunération des jeunes chercheurs recrutés comme chargés de recherche ou comme maîtres de conférences sera également améliorée : les règles et les modalités de reclassement dans les grilles indiciaires de ces corps seront adaptées, avec l’objectif qu’aucun chargé de recherche ou maître de conférences ne perçoive une rémunération inférieure au double du salaire minimum de croissance (SMIC). De plus, tous les nouveaux recrutés comme chargés de recherche et maîtres de conférences se verront allouer une dotation de démarrage pour lancer leurs travaux.
2.c. Redonner des perspectives d’emploi scientifique pérenne, notamment pour les personnels de soutien et de support
Entre 2012 et 2018, les effectifs sous plafond des établissements d’enseignement supérieur et de recherche ont baissé, notamment dans les organismes de recherche, comme le montre le tableau ci‑dessous :
|
2012 |
2018 |
Variation |
EPST (établissements publics à caractère scientifique et technologique) |
47 564 |
43 733 |
‑8,1 % |
EPIC sous tutelle du MESRI |
22 349 |
22 163 |
‑0,8 % |
Universités et écoles sous tutelle du MESRI |
150 090 |
150 657 |
+0,4 % |
Total |
220 003 |
216 553 |
‑3 450 |
Cette baisse des effectifs a essentiellement porté sur les personnels de soutien technique à la recherche : les ingénieurs et techniciens participant aux recherches au sein même des équipes des laboratoires, notamment dans toutes les sciences expérimentales. Cette diminution a été très durement ressentie et a fortement contribué à la dégradation des conditions dans lesquelles les chercheurs exercent leur métier. Une réponse vigoureuse est nécessaire sur ce sujet.
En rupture avec la tendance baissière de ces dernières années, le Gouvernement propose une perspective ambitieuse pour l’évolution des emplois de la recherche publique au cours de la période 2021‑2030. La construction de cette perspective s’accompagne d’une grande attention aux déterminants essentiels que sont le maintien du niveau des recrutements dans les corps de fonctionnaires de l’ESRI, la diversité des modes de recrutements et l’équilibre entre les différentes formes d’emplois, le déroulement des carrières et les promotions des personnels titulaires, et l’équilibre entre femmes et hommes.
S’agissant des ingénieurs, techniciens et administratifs des EPST et EPSCP, le flux de recrutements sera supérieur au nombre de départs, afin de permettre un renforcement des fonctions de soutien et de support au sein des laboratoires de recherche, et notamment du soutien sur les fonctions scientifiques et techniques. Cette trajectoire prévoit aussi un effort de repyramidage pour les ingénieurs et techniciens des EPSCP, via les recrutements. Cet effort est absolument indispensable car les universités ont une proportion d’agents de catégorie C souvent supérieure à 40 % voire 50 % parmi les ingénieurs et techniciens, agents sur lesquels pèse fréquemment une surqualification particulièrement forte, conduisant à mal reconnaître et mal rémunérer des personnels souvent très diplômés par rapport au niveau théorique de leur recrutement.
Enfin, pour les EPIC de recherche, la trajectoire prévoit au moins un maintien de l’effectif au niveau actuel.
Au global, de nombreuses mesures de la LPPR sont porteuses de créations d’emplois scientifiques : c’est le cas des mesures prises en faveur des doctorants (augmentation du nombre des contrats doctoraux et des conventions CIFRE), et de l’augmentation du budget d’intervention de l’Agence nationale de la recherche (ANR) puisque une part importante des financements attribués pour les projets de recherche a vocation à être utilisée pour recruter des personnels (doctorants, post‑doctorants, ingénieurs, etc.). C’est le cas aussi des nouvelles voies de recrutements sur les « chaires de professeurs juniors », qui viendront s’ajouter aux autres flux de recrutements déjà existants. Au total, il est ainsi prévu que les effectifs sous plafonds des établissements publics sous tutelle du MESRI (EPSCP, EPST et EPIC) évolueront dans les prochaines années selon la trajectoire suivante :
Incidence de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche sur les effectifs sous plafond de l’Etat et des opérateurs des trois programmes budgétaires P150, P172 et P193 (en équivalents temps plein travaillés, et en écart à 2020)
|
|||||||||
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
2029 |
2030 |
+700 |
+1350 |
+2000 |
+2650 |
+3150 |
+3600 |
+4000 |
+4400 |
+4800 |
+5200 |
Outre cette évolution prévue pour les effectifs sous plafond, l’accroissement prévisionnel entre 2020 et 2030 des effectifs contractuels hors plafond des établissements de l’ESRI s’élève à 15 000 environ.
En complément de ces évolutions quantitatives, le MESRI portera une attention particulière au déroulement des carrières des fonctionnaires des corps de l’enseignement supérieur et de la recherche.
En particulier, les flux annuels de recrutements de chargés de recherche en directeurs de recherche, les flux de recrutements de maîtres de conférences en professeurs, et les flux de promotions annuels dans les corps de chercheurs et d’enseignants‑chercheurs seront augmentés afin que les nouvelles voies de recrutement ouvert par le présent projet de loi ne pénalisent pas le déroulement de carrière des maîtres de conférences et de chargés de recherche. Une attention analogue sera portée aux carrières des ingénieurs, techniciens et administratifs.
Afin d’assurer que les évolutions prévues dans ces trajectoires d’emplois de la LPPR seront mises en œuvre par les établissements, un pilotage sera conduit dans le cadre du dialogue de gestion annuel. Il sera ainsi demandé à chaque établissement de construire un plan pluriannuel de recrutement s’inscrivant dans les perspectives fixées dans le cadre de la LPPR. Les moyens supplémentaires liés à la trajectoire d’emplois définie par le Gouvernement feront l’objet d’attributions aux établissements dans le cadre du dialogue de gestion annuel, sur la base des éléments présentés par chacun d’eux et des comptes‑rendus annuels qu’ils produiront sur les départs et les recrutements. Ces éléments seront vérifiés lors des examens des budgets initiaux et rectificatifs.
De façon transversale, une attention particulière sera portée à l’appropriation de ces orientations et de chacun de ces nouveaux dispositifs afin de s’assurer qu’ils contribuent à la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes. Les débuts de carrière, et notamment la période de 30 à 40 ans pendant laquelle se jouent les entrées en carrière scientifique, étant particulièrement critiques en termes de décrochage des carrières féminines par rapport aux carrières masculines, il convient de veiller tout particulièrement à ce que les nouvelles voies de recrutement leur bénéficient, avec une clause de réexamen régulière, dans le cadre du dialogue stratégique et de gestion entre l’établissement et le MESRI, pour vérifier l’atteinte par les établissements d’objectifs en matière d’égalité.
2.d. Faire de la recherche française une terre d’accueil pour la diversité des talents
2.d.i Ouvrir de nouvelles voies de recrutement en complément des recrutements statutaires
En complément des voies de recrutements existantes et en plus des postes ouverts pour les chargés de recherche et les maîtres de conférences, une voie d’accès spécifique sera créée pour des postes participant à la stratégie scientifique et d’attractivité des établissements. Cette nouvelle voie de « pré‑titularisation conditionnelle » correspond au principal mode de recrutement sur le marché de l’emploi scientifique mondial, connu sous le nom de « tenure track», qui peut se traduire par « parcours de titularisation ». Elle vise à offrir à des jeunes scientifiques, sélectionnés après un appel à candidatures largement ouvert, une entrée en carrière avec un contrat doté d’un environnement financier attribué par l’ANR, et permettant d’accéder, à l’issue d’une période maximale de six ans, à une titularisation dans le corps des professeurs des universités ou des directeurs de recherche. Ces recrutements viendront conforter, le plus souvent possible, des orientations scientifiques partagées entre établissements d’enseignement supérieur et organismes dans le cadre des politiques de site. Au terme de la période de programmation, 300 chaires de professeur ou de directeur de recherche junior environ seront ouvertes chaque année en complément des recrutements de chargés de recherche et de maîtres de conférences. Ce dispositif sera également accessible aux personnels hospitalo‑universitaires.
Un dispositif analogue permettant de doter d’un environnement financier certains chercheurs nouvellement recrutés après une large publicité internationale sur des postes qui revêtent un caractère stratégique sera également mis en place pour les EPIC de recherche.
En complément, pour les personnels recrutés spécifiquement pour l’accomplissement d’un projet de recherche, un contrat à durée indéterminée de mission scientifique sera créé qui permettra d’allonger les contrats actuels, souvent très courts, pour les faire coïncider avec des projets de recherche qui ont vocation à s’inscrire dans la durée tout en réduisant la précarité des personnels concernés.
Enfin, les initiatives des établissements visant à favoriser l’accueil en France de chercheurs qui souhaitent revenir dans notre pays après une carrière de premier plan à l’international seront soutenues. Les cofinancements de l’Etat et des collectivités territoriales ou d’autres acteurs seront recherchés afin de proposer à ces scientifiques de renom un cadre stable (CDI) accompagné d’un environnement attractif, dans le cadre des politiques de site.
Ces mêmes dispositifs pourront être mobilisés pour attirer sur notre sol les scientifiques étrangers les plus éminents, dont il importe de repenser l’accueil sous toutes ses facettes.
2.d.ii. Développer et sécuriser les dispositifs d’accueil des chercheurs internationaux
La capacité de la France à attirer les plus grands talents scientifiques du monde participe naturellement de son rayonnement scientifique et international. Cette attractivité est un des moyens les plus efficaces de participer activement au partage des savoirs à l’échelle mondiale, si nécessaire face aux enjeux globaux qui s’imposent à nous et aux tentations de fermeture et d’obscurantisme.
La concurrence internationale pour attirer des talents scientifiques rend nécessaire la prise en compte de l’ensemble des dimensions du séjour pour les faire venir (accompagnement à prévoir avant le départ, à l’arrivée et pendant le séjour) et, le cas échéant, les retenir.
Ainsi, les bourses du gouvernement français délivrées par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, dont un quart du budget est consacré aux doctorants et jeunes chercheurs (plus de 15 M€ annuels), ont vu leur budget stabilisé afin de maintenir leur contribution à l’attractivité scientifique.
Des progrès ont été accomplis ces dernières années pour améliorer l’attractivité de nos laboratoires auprès des étudiants et chercheurs étrangers, notamment par la mise en place de titres de séjour pluriannuel et le développement de guichets spécifiques qui accélèrent la délivrance des cartes de séjour et améliorent l’environnement de l’accueil. En particulier, afin d’améliorer encore davantage les conditions de délivrance des titres de séjour relevant des dispositifs d’attractivité de la France (notamment le passeport talent chercheur), une circulaire a été adressée aux préfectures fin 2019 portant des consignes très claires tant en termes de simplification de l’instruction de ces demandes que de conditions d’accueil à mettre en place.
Toutefois, des marges d’amélioration subsistent encore quant aux conditions actuelles d’accueil des chercheurs internationaux dans notre pays.
En premier lieu, depuis plusieurs années, des établissements français de l’ESRI, tous statuts confondus (EPSCP, EPST, EPIC, FRUP), rencontrent des difficultés pour accueillir des doctorants bénéficiaires d’une bourse attribuée sur critère scientifique, que les bourses soient financées par des institutions ou gouvernements étrangers ou par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE). La LPPR vient donc consolider le cadre juridique de ces accueils pour sécuriser ces échanges internationaux indispensables au dynamisme de notre recherche.
Par ailleurs, pour simplifier encore les démarches pratiques, un projet spécifique de dématérialisation porté par le ministère de l’intérieur doit se concrétiser début 2021. Il offrira aux chercheurs la possibilité de faire leur démarche en ligne sans passer par le guichet des préfectures.
2.e. Simplifier la vie des laboratoires pour redonner du temps aux scientifiques
La concertation conduite par le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI) pour la préparation du projet de loi de programmation a fait apparaître à quel point les chercheurs et enseignants‑chercheurs voient leurs missions de recherche, de formation et de transfert bridées, du fait de tâches administratives envahissantes, de contraintes multiples et de procédures tatillonnes sur des sujets pourtant indispensables à la vie des laboratoires (accueil de chercheurs étrangers, de stagiaires, achats, remboursement des frais de missions etc.). Alléger les charges administratives qui pèsent sur les laboratoires est l’un des objectifs centraux de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche, ce qui implique notamment de clarifier le cadre juridique des unités de recherche, et d’engager dans la durée un chantier d’amélioration continue du fonctionnement et de la vie des laboratoires.
2.e.i. Clarifier le cadre juridique des unités mixtes de recherche
Simplifier le fonctionnement des unités de recherche constitue un défi majeur du système d’enseignement supérieur et de recherche français, pointé à de multiples occasions par divers rapports. Les unités mixtes de recherche (UMR) représentent plus de la moitié des unités de recherche de l’ESRI, et celles‑ci peuvent relever de nombreuses configurations différentes. Ce paysage complexe est décrit dans le tableau suivant, extrait du rapport d’information n°1213 déposé par la commission des finances de l’Assemblée nationale en juillet 2018, en conclusion des travaux de la Mission d’évaluation et de contrôle (MEC) sur l’évaluation du financement public de la recherche dans les universités.
Unités de recherche et types d’établissements auxquelles elles sont rattachées |
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Etablissements d’enseignement supérieur sous tutelle MESRI |
Etablissements d’enseignement supérieur (autres tutelles) |
CNRS |
Autres organismes nationaux |
Autres établissements |
Associations |
Etablissements d’enseignement supérieur sous tutelle MESRI |
879 |
93 |
964 |
482 |
48 |
2 |
Etablissements d’enseignement supérieur (autres tutelles) |
93 |
65 |
97 |
78 |
6 |
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CNRS |
964 |
97 |
95 |
271 |
55 |
1 |
Autres organismes nationaux |
482 |
78 |
271 |
544 |
22 |
|
Autres établissements |
48 |
6 |
55 |
22 |
15 |
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Associations |
2 |
|
1 |
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1 |
Une même unité peut être comptée plusieurs fois si elle est mixte entre trois types d’établissements ou plus. |
Les dispositions de l’article 10 du projet de loi de programmation posent les bases législatives qui permettront de clarifier et d’unifier la place des unités de recherche dans l’ensemble des établissements publics d’enseignement supérieur et de recherche auxquels elles sont rattachées. Cet article pose les principes d’une déconcentration de la gestion au niveau de l’unité et consolide l’autorité fonctionnelle des dirigeants des établissements publics sur le responsable de l’unité. Ce nouveau cadre juridique permettra d’apporter une réponse concrète à plusieurs des difficultés qui se posent dans la vie quotidienne des laboratoires ; il sera décliné pour toutes les formes d’organisations de la recherche entre les établissements, qu’il s’agisse par exemple des UMR ou des « équipes‑projets de recherche ».
2.e.ii. Donner du temps aux enseignants‑chercheurs pour leurs travaux de recherche
Outre la clarification des règles applicables aux laboratoires, il convient d’être attentif au quotidien de ceux qui les font vivre et de reconnaître d’emblée la spécificité des missions d’enseignant‑chercheur. Les charges pédagogiques et administratives sont souvent très lourdes dans les universités et elles peuvent accaparer le temps des enseignants‑chercheurs, en particulier dans les sciences humaines et sociales. Il est donc essentiel que ces derniers puissent bénéficier plus régulièrement de temps réservés pour se consacrer pleinement à leurs recherches.
Ainsi, à compter de l’année universitaire 2021‑2022, les possibilités d’accueil en délégation au CNRS des enseignants‑chercheurs du domaine des sciences de l’homme et de la société augmenteront de 50 %, passant ainsi à 300. Il s’agit d’une première pierre d’une démarche globale visant à donner du temps aux enseignants‑chercheurs : le nombre de congés pour recherche ou conversion thématique (CRCT) en sciences humaines et sociales, ainsi que les capacités d’accueil de l’Institut universitaire de France seront également augmentées. Ces mesures permettront concrètement d’accroître la disponibilité des enseignants‑chercheurs pour réaliser leurs recherches ; elles viendront compléter l’ensemble des démarches engagées depuis deux ans pour reconnaître l’engagement pédagogique des enseignants‑chercheurs.
2.e.iii. Harmoniser les pratiques entre les agences de financement
Alors que les agences de financement (ANR, mais aussi Ademe, etc.) ont pris une place croissante dans le financement de la recherche et de l’innovation, leurs pratiques sont insuffisamment harmonisées, ce qui engendre de réelles surcharges pour les scientifiques, les laboratoires et les établissements. Une harmonisation est indispensable, pour rapprocher le mieux possible les formats des dossiers, les modalités de leur traitement, les règles de suivi des projets, voire les calendriers des différents guichets de financement. Un portail unique présentant l’ensemble des appels à projets sera mis en place, à l’instar de ce qui existe dans d’autres pays, et il sera progressivement enrichi de nouveaux outils et services à l’attention des porteurs de projets et des bénéficiaires.
En particulier, dans le domaine de la santé, ce travail sera accompagné d’un rapprochement des modalités de gestion scientifique et financière des projets de recherche financés dans le cadre des agences et programmes nationaux, notamment pour faciliter l’accompagnement de projets alliant recherche translationnelle et recherche clinique.
Le pilotage de ce rapprochement sera réalisé conjointement par le MESRI et le MSS.
2.e.iv. Lever en continu les sujets de complexité de la vie des laboratoires et des scientifiques
Certains des sujets de complexité de la vie des enseignants‑chercheurs et des chercheurs ont une dimension législative et la loi de programmation s’applique à les lever, qu’il s’agisse des conditions de fonctionnement et de gestion des UMR ou de l’accueil dans les laboratoires des doctorants et chercheurs étrangers. Mais beaucoup de ces sujets ne sont pas législatifs : la mise en œuvre des orientations de cette loi doit permettre de poser les jalons d’un chantier d’amélioration continue de la vie des laboratoires et des scientifiques, en cherchant à lever une à une les difficultés les plus couramment identifiées.
Dans cette optique, un premier groupe de travail « usagers » constitué avec des responsables de laboratoires a permis d’identifier une première liste de sujets de complexité ou de difficultés, qui donneront chacun lieu à une démarche d’allègement et d’amélioration. Un chantier expérimental d’harmonisation des règles de gestion a également été mené fin 2019 et début 2020 avec une grande université et les quatre EPST partenaires, avec l’accompagnement du MESRI. Ces travaux seront poursuivis dans la durée, car la simplification de la vie des laboratoires est une ardente obligation pour les établissements de l’ESRI et pour le MESRI. Ces travaux feront l’objet d’un suivi régulier, avec un groupe « usagers » : un baromètre de la simplification de la vie des laboratoires sera mis en place et les résultats seront publiés.
En complément de ces travaux sur le fonctionnement et les règles de gestion des unités de recherche, la démarche de travail sur les outils de systèmes d’information et de partage des données sera poursuivie, en y impliquant étroitement les établissements.
3. Des évolutions indispensables pour notre recherche et notre pays
3.a. Accroitre significativement les moyens pour la recherche et l’innovation
3.a.i Accroître de 1 Md€ les financements compétitifs de l’Agence nationale de la recherche (ANR) pour être au niveau des standards internationaux
A travers la LPPR, l’Etat entend insuffler une dynamique nouvelle à la recherche française. Pour ce faire, en complément des financements « de base » des laboratoires, dont les montants seront augmentés de 10 % d’ici à 2022, le financement par appels à projets est un outil majeur et l’Agence nationale de la recherche (ANR) sera l’opérateur principal sur lequel s’appuyer efficacement pour développer ces financements.
Parce qu’il permet une allocation des moyens selon des critères transparents et rationnels, le financement par appels à projets est un vecteur puissant d’un réinvestissement dans la recherche et l’innovation. Toutefois, ce modèle de financement n’est véritablement efficace que s’il se situe à un niveau suffisant, permettant de financer effectivement les projets de qualité et de soutenir les établissements qui créent les conditions de leur émergence.
Ceci n’est clairement pas le cas aujourd’hui en France. Les comparaisons internationales montrent que les moyens actuels de l’ANR sont très insuffisants. En 2018, l’ANR a consacré 518 M€ aux appels à projets de recherche, soit un peu plus de 0,022 % du PIB. Le standard pour les agences équivalentes est proche de trois à quatre fois ce chiffre : 0,08 % du PIB pour la DFG en Allemagne et le FNS en Suisse, 0,07 % du PIB pour la NWO aux Pays‑Bas. Même en montants absolus, le niveau d’engagement de l’ANR en France est actuellement inférieur à celui de la Suisse ou des Pays‑Bas.
Cette insuffisance de financement conduit à une faiblesse des taux de succès aux appels à projets (AAP) qui fragilise la confiance dans ce mode de financement. Vers 2014, lorsque le taux de succès aux appels à projets de l’ANR a été au plus bas (11 %), l’écart perçu entre le temps de préparation d’un projet et l’espoir d’un financement était devenu dissuasif ; de nombreux projets jugés excellents n’étaient pas financés, avec des conséquences sévères sur la mobilisation des communautés scientifiques et l’émergence chez les chercheurs d’un sentiment d’injustice : avec des taux aussi faibles, il n’est pas possible de discriminer de façon sérieuse entre les projets excellents, et la sélection finale est inévitablement peu fondée. Ce taux de succès trop bas conduit également à privilégier des projets consensuels, au détriment de projets plus risqués, potentiellement disruptifs. Malgré une remontée du taux de succès, le niveau actuel à 16 % (2018) ne suffit pas à pleinement rétablir la confiance, ni surtout à financer tous les projets excellents.
La hausse du taux de succès est indispensable pour soutenir la recherche et l’innovation de qualité, en particulier les projets les plus risqués et originaux. Le taux de succès « cible » se situe à 30 %, ce qui nécessite une augmentation substantielle des moyens de l’ANR.
Cette augmentation des moyens de l’ANR doit également se traduire par une meilleure prise en compte de la diversité des besoins des disciplines et des projets de recherche. Il est impératif que ses modes d’intervention permettent de financer effectivement les bons projets, qu’ils s’inscrivent dans des démarches connues ou qu’ils soient disruptifs, dans tous les domaines scientifiques et de façon adaptée aux besoins de chacun, ce qui peut impliquer notamment une variabilité dans les montants alloués aux projets afin de mieux prendre en compte les projets peu coûteux comme ceux qui nécessitent des financements élevés. Par ailleurs, la durée des projets de l’ANR doit effectivement permettre de se concentrer sur le projet de recherche pendant plusieurs années, afin d’éviter de multiplier les dépôts de projets.
Aujourd’hui, le niveau moyen de financement d’un projet multi‑équipes sélectionné par l’ANR est proche de 350 k€ sur 3 ans. Ce niveau est insuffisant pour bien soutenir les projets les plus ambitieux et impose aux chercheurs de multiplier les dossiers de demandes, au détriment du temps consacré à la recherche. Un accroissement de la durée des financements, et donc de leurs montants moyens, tout en conservant des formes d’appels à projets adaptées à chaque domaine de recherche, permettra de se rapprocher des standards internationaux et de mieux couvrir les besoins des laboratoires sur la durée.
Dans cette optique, l’Agence continuera à consacrer une part substantielle de ses moyens au soutien de projets de recherche non ciblés, en veillant à adapter ses formes d’intervention aux besoins de tous les domaines de recherche, et à les articuler avec les programmes européens pour favoriser la participation des équipes françaises à ces derniers. Elle poursuivra son soutien spécifique à des projets proposés par des jeunes chercheurs, ainsi qu’à des actions de recherche technologique et partenariale. Elle sera un outil central pour contribuer à l’ouverture de la science vers la société, et pour contribuer à accroître l’apport de la recherche à l’ensemble des politiques publiques portées par l’Etat et les collectivités territoriales. Dans cette optique, l’élaboration de la programmation annuelle des appels à projets de l’ANR fera l’objet d’un travail interministériel renforcé, animé par le MESRI et articulé avec les travaux auxquels participent les alliances de recherche.
3.a.ii. Mobiliser indirectement les financements de l’ANR pour soutenir les laboratoires et les établissements
Le préciput, part du financement qui revient non pas au porteur du projet mais aux établissements qui y participent, représente un complément de financement important pour ces établissements, permettant notamment de couvrir les coûts indirects induits par le projet.
Ce mécanisme est utilisé à l’échelle mondiale comme levier de financement des laboratoires et des établissements : aux États‑Unis, les taux de préciput sont fixés au plan fédéral et peuvent atteindre des niveaux très élevés, jusqu’à 90 % dans les universités les plus prestigieuses. En Allemagne, ce taux est de 22 % pour la DFG qui finance les projets au coût complet. En France il est d’environ 19 %, mais il n’est calculé que sur le coût marginal des projets, ce qui correspond au mode de financement par l’ANR (sauf cas particulier) ; ce faible niveau de préciput ne permet pas de couvrir l’ensemble des coûts indirects, avec la conséquence paradoxale que ce sont les établissements les plus performants qui sont pénalisés par ce déficit de financement car ce sont eux qui gèrent le plus de projets lauréats.
Un niveau de préciput sensiblement plus important est nécessaire pour induire un processus vertueux. Il permettra de couvrir réellement les coûts d’environnement tout en donnant aux laboratoires et aux établissements une capacité supplémentaire pour mettre en œuvre leur politique scientifique, et financer des actions dans le cadre de leurs priorités : soutien à l’écosystème local, politique d’attractivité et d’émergence, financement d’équipements scientifiques, ou encore de personnels de soutien, etc. Un taux de préciput cible fixé à 40 % répond à ces enjeux et permettra ainsi d’associer le financement sur projet et le financement de base des laboratoires.
3.a.iii. Investir pour porter les équipements et infrastructures de recherche au meilleur niveau international
L’utilisation d’équipements et d’infrastructures de qualité, régulièrement renouvelés, conformes aux standards internationaux, est devenue dans tous les domaines scientifiques une condition impérative de compétitivité et de rayonnement au niveau international. Ces équipements et infrastructures sont à la base de grandes découvertes scientifiques, et constituent un élément essentiel de l’efficacité et de l’attractivité de la recherche d’un pays. Outre les équipements et infrastructures de pointe indispensables pour l’exploration de la matière dans les domaines de la physique, la chimie, les sciences de la terre et les sciences de la vie, les besoins de plateformes liés à l’essor du numérique, au calcul, à l’utilisation des grandes masses de données et à l’ouverture des données de la recherche concernent tous les domaines scientifiques.
Il est donc indispensable d’investir pour porter et maintenir les équipements et infrastructures de recherche au meilleur niveau international. Les moyens mis en place seront dédiés d’une part au financement des équipements mi‑lourds des laboratoires de recherche, d’autre part aux investissements pour les jouvences, les renouvellements et les projets nouveaux concernant les infrastructures de recherche nationales.
3.a.iv. Accélérer l’effort de recherche grâce aux programmes prioritaires de recherche
Créés dans le cadre des programmes d’investissement d’avenir (PIA3), les programmes prioritaires de recherche (PPR) ont permis à l’Etat de mettre en œuvre un ensemble d’actions de recherche et d’innovation concrétisant des priorités stratégiques, grâce à un pilotage et des outils adaptés à chaque PPR, dont la coordination opérationnelle est confiée à un ou plusieurs organismes de recherche. Il s’agit donc d’un véritable outil stratégique permettant de traduire des priorités nationales en programmation opérationnelle et marquant la volonté de réunir toutes les forces vives de la recherche autour d’un grand objectif, à l’instar des premiers PPR engagés :
– Make our planet great again (MOPGA), avec une coordination par le CNRS ;
– Intelligence artificielle, avec une coordination par Inria ;
– Cultiver et protéger autrement, avec une coordination par l’Inra devenu l’INRAE ;
– Sport de très haute performance, avec une coordination par le CNRS ;
– Antibiorésistance, avec une coordination par l’Inserm ;
– Maladies rares, avec une coordination par l’Inserm.
Ce cadre a permis de mettre en place pour chaque PPR un copilotage effectif d’objets prioritaires de recherche par le MESRI et le ou les autres ministères concernés. En lien avec les stratégies de transition portées par l’Etat et les priorités définies au sein du Pacte productif, ces actions seront amplifiées dans les prochaines années et un cadre de travail interministériel sera mis en place pour préparer leur programmation.
3.b. Amplifier l’apport de la recherche à toute la société
La loi de programmation pluriannuelle de la recherche porte une ambition majeure : rendre possible l’avènement d’une recherche placée au service de la société française et européenne, d’une science ouverte vers les citoyens et capable d’irriguer l’ensemble des activités de la nation.
Les apports de la recherche sont multiples : des nouveaux savoirs indispensables pour former au meilleur niveau les jeunes générations ; des démarches et des connaissances pour comprendre les transformations du monde et pour relever les défis auxquels sont confrontées nos sociétés et notre planète ; des expertises et des innovations sociales utiles pour les politiques publiques de l’Etat et des collectivités territoriales ; des compétences et des savoir‑faire pour affronter les questions nouvelles et imaginer des solutions innovantes dans l’ensemble de nos activités, publiques et privées ; des innovations technologiques qui sont une part essentielle de la compétitivité de nos entreprises et qui feront les champions industriels de demain. La recherche a aussi une contribution unique au rayonnement européen et international de la France, à son attractivité, et à nos échanges culturels, intellectuels, scientifiques et économiques avec les pays voisins et dans le monde entier.
Tous ces apports, venant de tous les domaines et toutes les communautés scientifiques, doivent être et seront amplifiés sur la période 2021‑2030, et c’est ici que l’investissement majeur réalisé par l’Etat en faveur de la recherche prend tout son sens.
3.b.i Renforcer la place de la science dans la société
Au‑delà de la réponse aux grands défis auxquels nous faisons face, rénover la place de la science dans la société est également un impératif pour l’avenir de notre démocratie. La science est un des socles de notre modèle républicain et cette fonction lui confère les plus grandes responsabilités : elle suppose de porter la plus grande attention à l’exemplarité et l’impartialité de la communauté scientifique, ainsi qu’aux questions ‘dintégrité scientifique et de déontologie, sur lesquelles se noue le pacte de confiance entre la recherche et la société. Elle implique aussi une évolution de la posture des scientifiques dans leur relation avec les citoyens : ils ne peuvent plus se contenter d’affirmer une parole scientifique qui serait reçue comme une vérité « descendante » par des citoyens passifs, ils doivent s’engager dans un véritable dialogue où s’expriment non seulement les savoirs scientifiques mais aussi les analyses de leurs limites, les doutes ou les questions qu’ils soulèvent. Pour les scientifiques, ce nouveau mode de relation, plus riche et plus interactif, exige de se mettre davantage à l’écoute des attentes et des questions de la société ; pour les citoyens, il suppose d’avoir accès à une information de qualité qui leur permet de comprendre les avancées scientifiques et technologiques, de discuter de leurs enjeux et d’y participer.
Le partage de la culture scientifique, technique et industrielle est donc un enjeu plus fort que jamais. De nombreux publics s’intéressent aujourd’hui à la science grâce aux multiples actions de l’État, des régions, des établissements de recherche et d’enseignement supérieur, des associations ou des médias, mais aussi d’autres lieux de diffusion et de médiation des savoirs comme les musées des sciences notamment. Dans la perspective de réinvestissement dans la recherche portée par la LPPR, des initiatives nouvelles et ambitieuses seront mises en place, avec ces acteurs, en réaffirmant l’importance de l’action de médiation humaine portée notamment par les lieux de diffusion et de médiations des savoirs et par une indispensable diversité d’acteurs associatifs qu’il faudra soutenir. Les trois actions suivantes seront lancées dans les premières années de la LPPR :
– créer un centre « Science et médias », à l’instar de ceux qu’ont installés plusieurs autres pays comme l’Allemagne, l’Australie, le Japon, la Nouvelle‑Zélande ou le Royaume‑Uni, pour développer les relations et permettre la mise en contact rapide entre journalistes et chercheurs, favoriser l’accès des citoyens à une information scientifique fiable, et accroître l’apport d’éclairages scientifiques dans les débats publics sur les grands sujets actuels ;
– développer des opérations de proximité du type « un chercheur par classe » permettant de sensibiliser les jeunes scolaires aux enjeux et aux apports de la science, via des partenariats mobilisateurs entre les établissements de l’ESRI et l’éducation nationale ou encore l’enseignement agricole, avec une attention particulière aux écoles, collèges et lycées des zones rurales et périurbaines ;
– consacrer 1 % du budget d’intervention de l’ANR au partage de la culture scientifique, via des appels à projets dédiés mais aussi en finançant un volet « culture scientifique » dans le cadre des projets de recherche « volontaires ».
A moyen terme, d’autres actions seront également mises en place :
– développer les projets de « sciences participatives » auxquels contribuent des citoyens, parfois de façon massive, et les projets de recherche ou de diffusion de la culture scientifique menés en coopération entre associations et établissements de l’ESRI ;
– créer un concours « Mes recherches en 4 minutes » – sur le modèle de « Ma thèse en 180 secondes » – pour développer les présentations « grand public » des travaux de recherche ;
– développer des recherches sur les relations entre science et société, et notamment sur les phénomènes de défiance vis‑à‑vis de la science ;
– mettre en place une consultation citoyenne périodique sur les orientations prioritaires de la politique de recherche nationale ;
– développer les formations des chercheurs au dialogue avec des non‑spécialistes ou des spécialistes d’autres sciences, à la « controverse scientifique », et à l’apport d’expertise auprès de décideurs politiques, en vue notamment de développer ces expertises ;
– développer les relations de l’ESRI avec les lieux de diffusion et de médiation des savoirs, les associations et musées de sciences, les écoles d’art et le monde de l’art et de la culture ;
– conforter le rôle d’Universcience (l’établissement public du Palais de la découverte et de la Cité des sciences et de l’industrie) comme opérateur de diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle, en étroite relation avec le monde de la recherche et de la culture, notamment grâce au développement des outils de médiation numérique.
De nombreuses autres mesures mentionnées dans ce rapport annexé contribueront aussi à l’ouverture de la communauté scientifique vers l’ensemble des acteurs de la société, notamment les entreprises et les collectivités publiques. On peut citer notamment les dispositions visant à accroître les financements et la qualité de la formation doctorale et à favoriser l’insertion professionnelle des docteurs, ou celles qui pousseront chaque grand pôle universitaire à intensifier ses relations avec les acteurs économiques de son territoire et à mettre en valeur ses compétences et expertises. De nouveau, il faut souligner que ces mesures concernent toutes les communautés scientifiques, des sciences de l’homme et de la société jusqu’aux sciences exactes.
Sur un autre plan, la politique de science ouverte, qui promeut la diffusion libre des publications et, autant que possible, des données de la recherche, est un des leviers de cette refondation de la place des chercheurs dans la société. Elle saisit toutes les opportunités offertes par le numérique pour libérer le potentiel scientifique, économique, politique et culturel de la recherche et elle permet l’accès de tous – citoyens, étudiants, associations, entreprises, etc. – aux savoirs issus de la recherche. Le plan national de science ouverte porté par le MESRI avec les établissements de l’ESRI, appuyé sur le fonds national de la science ouverte lancé en 2019, a donné une impulsion dont les premiers effets sont déjà bien visibles ; il sera poursuivi, amplifié, et complété par une politique de soutien à l’édition car la vitalité de l’édition scientifique est une des conditions de la vitalité de la recherche.
3.b.ii. Densifier les relations de la recherche publique avec les entreprises
Comme tous les pays qui choisissent de renforcer leur investissement dans la recherche publique, la France en attend, en retour, un accroissement de la contribution de la science à la compétitivité des entreprises – petites, moyennes et grandes – et à la création de valeur et d’emplois. Si des progrès sensibles ont été réalisés au cours des dix dernières années, notamment en matière de création de structures innovantes, renforcer l’impact de la recherche et de l’enseignement supérieur publics sur l’innovation, au service de la société et des entreprises, reste une priorité majeure du Gouvernement. Il faut répondre à trois urgences :
– augmenter très significativement l’ampleur et la profondeur des interactions entre la recherche publique et les entreprises ;
– simplifier, fluidifier et accélérer le transfert des savoir‑faire et des technologies vers les entreprises afin de révéler tout le potentiel de recherche partenariale et d’innovation de l’ESRI ;
– et favoriser la création de nouveaux leaders industriels fondée sur les découvertes et technologies de rupture issues de la recherche, comme d’autres pays l’ont fait, mieux que nous, depuis deux ou trois décennies.
Dans cette optique, la présence de docteurs dans la sphère privée est décisive pour poser les fondements d’une culture d’innovation plus ambitieuse dans nos entreprises et de relations accrues entre le monde économique et la recherche publique. L’augmentation du recrutement de docteurs au sein des entreprises sera favorisée par la création d’un « contrat doctoral » dans le code du travail – en complément des mesures non législatives prises pour améliorer « l’employabilité » des docteurs formés dans les laboratoires publics.
Par ailleurs, les dispositions de la « loi Allègre » de 1999 sont élargies pour ouvrir le champ des situations où les personnels de la recherche publique peuvent être autorisés à apporter leur concours à une entreprise valorisant des travaux de la recherche publique. Plusieurs autres dispositions facilitent les mobilités public‑public et public‑privé des personnels de la recherche, et ouvrent largement les possibilités de cumul d’activités à temps partiel, par exemple entre un laboratoire public et une entreprise.
Outre ces mesures législatives, une part des moyens nouveaux apportés par la LPPR durant la période 2021‑2030 seront dédiés à l’innovation. Ceci inclut en premier lieu toutes les actions de mobilisation focalisées sur un objectif ambitieux : créer 500 start‑up de haute technologie par an à partir de 2030, à comparer à environ 170 aujourd’hui. L’entrepreneuriat étudiant et la création de start‑up, notamment les start‑up de haute technologie, seront des priorités de chaque établissement de l’ESRI. L’accroissement des moyens dévolus à la maturation et à l’accompagnement des projets permettra d’accompagner cette dynamique.
Un effort résolu est aussi entrepris, avec les organismes et les universités et écoles, pour augmenter l’efficacité et l’agilité du transfert des connaissances et des technologies de la recherche publique vers les entreprises. Dans ce registre, une action emblématique sera la labellisation de 15 « pôles universitaires d’innovation » (PUI) : ce label consacrera la mise en place, à l’échelle d’un grand site universitaire, sans création de nouvelle structure, d’une organisation à même de rendre plus lisible l’offre de transfert de connaissances et de technologies, et de fluidifier les relations et les partenariats public‑privé, notamment en réduisant les délais de contractualisation et de transfert. Ces PUI permettront ainsi aux sites universitaires de se doter d’une stratégie consolidée en vue d’organiser de manière opérationnelle les échanges avec le monde économique de leur territoire, en associant étroitement les acteurs du site engagés dans les activités de transfert et de recherche partenariale : universités, organismes, société d’accélération du transfert technologique, incubateur, institut de recherche technologique, etc. Une autre mesure emblématique sera la création, au sein de l’Institut universitaire de France (IUF), d’une voie « Innovation » qui permettra de « donner du temps » à des enseignants‑chercheurs qui sont engagés dans un projet d’innovation ou de création d’entreprise, ou qui développent des recherches en partenariat avec une ou plusieurs entreprises, ou bien encore dans des nouvelles formes de recherche participatives à intérêt sociétal.
Dans le même temps, les entreprises – et les laboratoires – seront incitées à investir dans des activités de recherche partenariale, via un renforcement des dispositifs qui ont fait la preuve de leur pertinence et de leur efficacité. Le nombre des conventions CIFRE, qui soutiennent les travaux d’un doctorant accueilli dans une entreprise ou une collectivité territoriale, en lien avec un laboratoire public, sera augmenté de 50 % d’ici à 2027. Le nombre des chaires industrielles financées par l’ANR pour soutenir l’investissement en R&D du secteur privé en lien avec le secteur académique, sera également doublé. Il en sera de même pour le programme « Labcom » financé par l’ANR, qui permet de soutenir la création de laboratoires communs entre un laboratoire public et une PME ou une ETI. Le dispositif des instituts Carnot, qui distingue des laboratoires publics pour le haut niveau et le professionnalisme de leurs travaux de recherche contractuelle avec des entreprises, fera l’objet d’un effort similaire : le montant des crédits dédiés au financement incitatif qui leur est attribué sera plus que doublé au cours de la période de la LPPR. Une réflexion sera aussi engagée en vue de renforcer de façon sélective, en lien avec les régions, les plateformes technologiques publiques et de développer leurs liens avec les PME et les ETI.
D’autres actions visent à encourager les rencontres et le dialogue entre les laboratoires et les entreprises, pour développer la connaissance mutuelle, les collaborations et les projets et programmes partagés. Un nouveau dispositif de « convention industrielle de mobilité en entreprise des chercheurs » sera lancé : jouant en quelque sorte pour les chercheurs le rôle que jouent les conventions CIFRE pour les doctorants, les CIMEC favoriseront la mobilité des chercheurs et enseignants‑chercheurs désireux de travailler à temps partiel en entreprise dans le cadre d’un partenariat avec un laboratoire public. Sur un autre plan, un représentant de haut niveau du monde académique, missionné conjointement par le MESRI et le ministère de l’économie et des finances (MEF), siège désormais au sein du bureau de chaque comité stratégique de filière du Conseil national de l’industrie, afin de contribuer à développer les relations et coopérations entre chaque filière industrielle et les laboratoires académiques.
Ces actions destinées à développer l’innovation et accroître l’impact économique de la recherche publique devront aussi s’inscrire dans une perspective européenne, voire internationale. La participation des acteurs français, publics et privés, au programme‑cadre de recherche et d’innovation Horizon Europe mis en place par la Commission européenne pour la période 2021‑2027, qui inclura plusieurs nouveaux instruments dédiés à l’innovation sociétale et à la croissance des entreprises innovantes, constitue à cet égard un enjeu majeur et un rendez‑vous à ne pas manquer (voir infra).
Toutes ces actions soutenues dans le cadre de la LPPR permettront donc de renforcer les capacités d’innovation et la compétitivité des entreprises françaises en augmentant leurs interactions avec la recherche publique. Elles amélioreront l’efficacité des dispositifs de transfert, de recherche partenariale, de mobilité des chercheurs et de soutien à la création de start‑ups issues de la recherche publique. Leur mise en œuvre sera articulée avec celle des autres programmes et actions mis en place par le gouvernement, notamment avec les stratégies de transition (écologique, énergétique, numérique, etc.), le Pacte Productif 2025, les grands défis d’innovation de rupture et les autres actions soutenues dans le cadre des programmes d’investissement d’avenir (PIA) et les actions d’investissement dans le domaine de l’innovation portées par BpiFrance. La synergie entre toutes ces actions, dans le cadre d’un pilotage interministériel renforcé, doit permettre de mieux appuyer nos stratégies de politique industrielle sur les atouts de notre recherche, de choisir les domaines sur lesquels nous pouvons investir avec ambition pour bâtir à partir de nos forces de recherche scientifiques et technologiques de vrais succès industriels, et de se doter d’outils permettant de financer des projets à forte intensité technologique susceptibles d’apporter des innovations de rupture.
3.b.iii. Mieux reconnaître les activités d’innovation dans les carrières des personnels
Pour que les personnels de la recherche soient également incités à s’investir davantage dans des activités d’innovation ou dans les relations avec la société, il est indispensable que leur évaluation prenne en compte ces activités et permette de les reconnaître dans leurs carrières.
Plus largement, l’évaluation doit reconnaître l’ensemble des missions de l’ESRI : l’implication dans les recherches fondamentales et l’avancement des connaissances bien sûr, mais aussi dans l’enseignement et la formation ; dans l’interdisciplinarité et les recherches liées aux défis sociétaux ; dans les projets européens ou les partenariats internationaux stratégiques ; dans les projets d’innovation, le développement de technologies et leur transfert, la création de start‑up ou les coopérations avec les entreprises ; dans le dialogue avec la société et la diffusion de l’information et de la culture scientifique et technique, l’expertise en appui aux politiques publiques ; dans des fonctions collectives ou managériales.
Les derniers contrats quinquennaux signés par le MESRI avec des organismes incluent un engagement de reconnaissance de toutes ces activités dans le cadre de l’évaluation des personnels : cet engagement s’appuie sur un dispositif qui verra chaque candidat à une promotion présenter son « profil » et mettre en avant ses principales contributions au titre des diverses missions de l’ESRI afin que son évaluation en tienne bien compte. Cette politique sera poursuivie et amplifiée.
3.c. Accroître notre engagement dans l’Europe de la recherche et de l’innovation
L’Europe est l’espace où s’inscrit l’avenir de la recherche française. Le partage des connaissances et la promesse de progrès et d’émancipation pour tous portée par la science participent du projet européen. Les actions bilatérales ou multilatérales entre les États, les collectivités et les institutions publiques ou privées et, surtout, les programmes de recherche et d’innovation mis en place par la Commission européenne ont en effet considérablement accru les coopérations entre les acteurs du continent dans ces domaines depuis 30 ans. De plus, il est évident que, sur de nombreux sujets, c’est uniquement à l’échelle de l’Europe que nous pouvons espérer rivaliser avec les géants de la recherche que sont les Etats‑Unis et la Chine.
La LPPR ne saurait donc revitaliser durablement la recherche française sans lui donner un élan pour accroître son ouverture et son engagement européens. En particulier, notre participation aux programmes que la Commission européenne s’apprête à lancer pour les années 2021‑2027 constitue un enjeu stratégique pour la recherche française au cours de cette période. Dans les domaines de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, ces programmes portent des initiatives nouvelles de grande ampleur dont plusieurs, comme les Universités européennes ou le Conseil européen de l’innovation, ont été lancées à l’initiative ou avec un soutien fort de la France.
Le programme‑cadre de recherche et d’innovation (PCRI) représente une part croissante du financement des équipes de R&D françaises publiques et privées, soit en moyenne près d’un milliard d’euros par an depuis le lancement du programme Horizon 2020 en 2014, ce qui positionne la France au rang de troisième bénéficiaire de ce programme derrière le Royaume‑Uni et l’Allemagne. Cependant, le taux de participation de la France (i.e. la part des financements obtenus) est de 11 % en moyenne depuis le début d’Horizon 2020, bien en‑deçà de son potentiel estimé au regard de sa part de la R&D européenne (17 %), de son pourcentage de brevets déposés à l’Office européen des brevets parmi les brevets européens (16 %), ou encore de la part de la contribution française au budget européen (16 %). Or, la France présente un taux de succès de 16 %, le plus élevé des pays de l’Union européenne, mais ce bon taux de succès ne permet pas de compenser la faiblesse relative des dépôts de projets (la France représente seulement 8,5 % des dépôts). Il y a donc un enjeu majeur, pour le prochain programme Horizon Europe, à renforcer les candidatures tout en maintenant un bon taux de succès.
Un plan d’action national d’amélioration de la participation française aux programmes européens de recherche et d’innovation a ainsi été élaboré en 2017‑2018, et mis en œuvre depuis 2019 avec un pilotage confié au MESRI. Il se compose d’un ensemble très complet de mesures réparties sur trois grands axes :
– inciter davantage les acteurs français à participer au PCRI et à coordonner des projets ;
– mieux les accompagner pendant toutes les étapes de préparation, de dépôt et de – réalisation des projets,
et renforcer les capacités d’influence française sur le PCRI et sa mise en œuvre.
La mise en œuvre de ce plan d’action est une des premières priorités du MESRI, en lien avec le MEF et les autres ministères concernés ; elle implique aussi le renforcement de la collaboration État‑Régions sur les enjeux des politiques européennes de R&D. Elle doit permettre d’entraîner tous les établissements du dispositif national de l’ESRI, mais la mobilisation et l’accompagnement des entreprises privées est aussi un enjeu essentiel.
En complément de cet engagement dans les programmes de la Commission européenne, d’autres dynamiques sont à renforcer et plusieurs dispositions prévues dans la LPPR vont avoir des effets positifs importants sur l’intégration des équipes françaises dans l’espace européen de la recherche avec pour objectif de rapprocher le taux de participation française de sa part de R&D européenne (17%).
Le renforcement des financements et l’alignement des taux de succès de l’ANR avec les autres agences européennes vont faciliter la mise en œuvre d’appels communs ou concertés sur des priorités partagées. Ils vont aussi augmenter les capacités d’investissements dans différentes grandes infrastructures de recherche communes à l’échelle européenne, qui bénéficieront également de l’augmentation des recrutements de personnels ingénieurs de haut niveau pour les développer et les opérer.
Les moyens financiers supplémentaires obtenus par les établissements (universités, organismes…) au travers de l’augmentation du préciput de l’ANR leur donneront des marges de manœuvre pour soutenir des partenariats bilatéraux avec leurs homologues européens : projets partagés, laboratoires communs, universités européennes, etc. Ces efforts pourront aussi être soutenus par le MESRI dans le cadre du dialogue contractuel avec les établissements.
Enfin, le dispositif de chaires de professeurs juniors est particulièrement bien adapté pour favoriser la mobilité européenne et accueillir des collègues provenant de nos voisins européens. Il est particulièrement lisible à l’échelle européenne car il correspond à une pratique internationale standard.
Globalement, l’ensemble de ces dispositions permettra donc de donner aux acteurs de vraies possibilités nouvelles pour construire des partenariats et des réseaux à l’échelle européenne.
4. Des ressources pour mettre en œuvre ces ambitions
4.a Un accroissement sans précédent des ressources de la recherche publique
Les trajectoires budgétaires inscrites à l’article 2 de la LPPR traduisent une augmentation sans précédent des moyens consacrés par l’Etat au dispositif public de recherche et d’innovation.
Le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » est le principal bénéficiaire de l’effort budgétaire inscrit dans l’article 2 de la loi de programmation : la forte hausse de ses moyens apparaît sur le graphique suivant.
Cette augmentation des crédits du programme 172 bénéficiera non seulement aux organismes nationaux, dont les subventions pour charges de service public sont intégrées dans ce programme, mais aussi aux universités et aux écoles puisque la hausse des crédits de ce programme inclut notamment le fort accroissement du budget d’intervention de l’ANR et l’augmentation des financements en faveur de l’innovation, qui concernent l’ensemble des établissements de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
La programmation budgétaire inscrite à l’article 2 de la LPPR inclut la totalité des crédits inscrits aux programmes 172 et 193 mais elle ne concerne, pour le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », que les incidences budgétaires des mesures de la présente loi sur ce programme. Il s’agit des crédits qui financeront, dans les établissements d’enseignement supérieur sous tutelle du MESRI :
– les revalorisations indemnitaires destinées aux personnels des établissements d’enseignement supérieurs financés par le programme 150 ;
– les divers dispositifs relatifs à la valorisation ou au recrutement d’enseignants‑chercheurs (revalorisation de la rémunération des maîtres de conférence nouvellement recrutés, revalorisation du montant et accroissement du nombre des contrats doctoraux, environnement des « chaires de professeur junior », etc.) ;
– l’attribution de moyens aux établissements d’enseignement supérieur dans le cadre du dialogue contractuel et du dialogue stratégique et de gestion (voir la section 4.c).
Ceci signifie notamment que les mesures budgétaires inscrites à l’article 2 de la LPPR n’incluent pas les moyens des universités dont les évolutions sont affectées par la démographie étudiante : ces moyens ne sont pas programmés dans le cadre de la LPPR, et leur évolution sera examinée chaque année dans le cadre du projet de loi de finances.
Pour le programme 193 « Recherche spatiale », la programmation budgétaire inscrite à l’article 2, en écart à la loi de finances 2020, montre l’évolution des crédits du programme retraités du montant du remboursement de la dette française auprès de l’Agence spatiale européenne. Ces crédits sont en hausse régulière, comme le montre le graphique suivant :