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N° 3651

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 décembre 2020.

PROJET  DE  LOI

ratifiant l’ordonnance  2020232 du 11 mars 2020 relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d’accompagnement social ou médicosocial à l’égard des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. Jean CASTEX,

Premier ministre,

par M. Éric DUPONDMORETTI,
garde des sceaux, ministre de la justice

 

 

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le IV de l’article 9 de la loi n° 2019‑222 du 23 mars 2019 de programmation 2018‑2022 et de réforme pour la justice dispose :

« Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi visant à modifier, dans un objectif d’harmonisation et de simplification, les dispositions fixant les conditions dans lesquelles est prise une décision portant sur la personne d’un majeur qui fait l’objet d’une mesure de protection juridique et, selon les cas, intervenant en matière de santé ou concernant sa prise en charge ou son accompagnement social ou médico‑social.

« Un projet de loi de ratification est déposé au Parlement, au plus tard le premier jour du sixième mois suivant la publication de l’ordonnance. »

L’ordonnance n° 2020‑232 du 11 mars 2020 a été prise en application du IV de l’article 9 de la loi du 23 mars 2019 précitée.

Cette ordonnance a été élaborée afin de répondre aux critiques formulées tant par la doctrine que par les praticiens sur la difficile articulation des dispositions relatives à la protection juridique des majeurs figurant dans le code civil et les dispositions du code de la santé publique issues de la loi n° 2002‑303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

L’ordonnance précitée permet ainsi de coordonner l’ensemble des dispositions du code de la santé publique qui font référence aux personnes protégées avec les règles du code civil. Elle détermine la portée pratique de chacun des actes envisagés par le code de la santé publique. L’objectif est de préciser le rôle de la personne chargée de la protection et le cas échéant du juge des tutelles, et de renforcer la protection de la personne protégée ainsi que le respect de son autonomie dans la sphère personnelle s’agissant plus particulièrement des décisions en lien avec un acte médical.

Conformément à l’habilitation, l’ordonnance modifie également les dispositions du code de l’action sociale et des familles afin de tenir compte des évolutions récentes relatives à la protection juridique des majeurs.

Prolongeant les avancées issues de la loi n° 2007‑308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, la loi du 23 mars 2019 précitée a considérablement renforcé les droits fondamentaux des majeurs protégés. L’article 459 du code civil, tel que modifié par le 5° du I de l’article 9 de la loi du 23 mars 2019 précitée, permet au majeur protégé de prendre seul les décisions relatives à sa personne. Le juge peut désigner une personne pour l’assister ou le représenter pour les situations dans lesquelles le majeur protégé sera dans l’impossibilité de consentir ou d’exprimer sa volonté. En cas de désaccord entre le majeur et la personne chargée de sa protection, le juge désignera qui, du majeur ou de la personne chargée de la protection, prendra la décision.

L’ordonnance met en conformité les dispositions spécifiques du code de la santé publique, d’une part, et du code de l’action sociale et des familles, d’autre part, avec les mécanismes de décisions applicables à la protection juridique des majeurs.

En matière de santé, le code de la santé publique comporte des formulations anciennes ne visant que la tutelle. Ni l’assistance en matière médicale, ni le mandat de protection future, ni l’habilitation familiale ne sont mentionnées par les dispositions du code de la santé publique. C’est pourquoi il était nécessaire de procéder à l’harmonisation des dispositions fixant les conditions dans lesquelles est prise une décision portant sur la personne d’un majeur qui fait l’objet d’une mesure de protection juridique en matière de santé.

Le chapitre Ier de l’ordonnance procède aux nombreuses harmonisations terminologiques du code de la santé publique rendues nécessaires par cette évolution de la place du majeur protégé dans la prise de décisions concernant sa santé. Les articles du code de la santé publique relatifs au droit à l’information médicale, au consentement aux soins, aux directives anticipées, à la création du dossier médical partagé et à l’organisation de l’accès à ce dossier sont mieux structurés. Ainsi sont distinguées, d’une part, les règles applicables aux mineurs, qui sont systématiquement représentés par une personne, investie de l’exercice de l’autorité parentale, c’est‑à‑dire par les parents, les délégataires de l’autorité parentale ou le tuteur et, d’autre part, les règles applicables aux majeurs protégés.

Les informations nécessaires à la prise de décision doivent être adressées, en première intention, à la personne protégée. Il est fait une distinction entre la personne chargée de la représentation du majeur protégé et celle chargée de l’assister, dans le cadre d’une mesure de protection étendue à la personne, par opposition aux mesures de protection qui concernent uniquement les biens de la personne. Les professionnels de santé devront ainsi veiller à adapter l’information délivrée au majeur à ses facultés de compréhension et de consentement, de façon à ce qu’il puisse consentir de façon personnelle s’il est en état de le faire. Ce n’est que subsidiairement que les personnes chargées de la protection peuvent être amenées à consentir à sa place, en tenant compte de son avis.

Les articles exposant les principes applicables à la prise de décision en matière de santé détaillent les différentes formes de protection à la personne avec représentation que les professionnels de santé pourraient rencontrer : le mandat de protection future, l’habilitation familiale avec représentation et la tutelle à la personne. Outre l’introduction de ces articles généraux consacrés au processus d’information et de prise de décision en matière médicale, la réforme remplace le terme « tuteur », obsolète au regard de la diversification des formes de protection de la personne, par une formule plus générale : « la personne chargée de la mesure de protection juridique avec représentation à la personne ».

Dans certaines situations ou circonstances, telles que l’exercice d’actions judiciaires patrimoniales dans l’intérêt du majeur protégé ou le traitement de ce dernier par des soins sans consentement, il est apparu nécessaire de ne pas réserver aux seules personnes chargées d’une mission de protection à la personne le pouvoir de les représenter. Ainsi, lorsque le majeur sera protégé par une mesure de protection aux biens d’une part, et à la personne d’autre part, lesquelles peuvent être confiées à deux personnes distinctes, la personne chargée de la protection des biens doit pouvoir intervenir pour faire valoir les droits patrimoniaux du majeur protégé liés à des soins médicaux. De même, il doit pouvoir intervenir dans certaines circonstances en matière de soins sans consentement. Ces deux protecteurs distincts seront désignés par les termes de « personne chargée de la mesure de protection juridique », sans la précision de la « représentation à la personne ».

Le chapitre II de l’ordonnance contient les modifications apportées au code de l’action sociale et des familles. De la même façon que dans le code de la santé publique, la situation de la représentation des mineurs et des majeurs protégés est distinguée. La terminologie applicable à la protection juridique des majeurs dans ce code est rénovée de façon à tenir compte de la diversification des formes de protection juridique avec représentation de la personne. La formule évoquant « la personne chargée de la mesure de protection juridique avec représentation à la personne » sera désormais également utilisée dans le code de l’action sociale et des familles de façon à harmoniser les termes utilisés dans ces deux codes, s’agissant de situations semblables. Cela permet d’atteindre l’objectif d’harmonisation poursuivi par l’habilitation donnée au Gouvernement.

Le présent projet de loi a ainsi pour objet de ratifier l’ordonnance précitée.

Conformément au IV de l’article 9 de la loi du 23 mars 2019 précitée, le présent projet de loi de ratification devait être déposé devant le Parlement au plus tard le premier jour du sixième mois suivant de la publication de l’ordonnance, soit avant le 1er septembre 2020, l’ordonnance ayant été publiée le 12 mars 2020. Toutefois l’article 14 de la loi n° 2020‑290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid‑19 prévoit que les délais fixés pour le dépôt de projets de loi de ratification d’ordonnances publiées avant la date de publication de la loi sont prolongés de quatre mois, lorsqu’ils n’ont pas expiré à cette date. Le présent projet de loi doit donc être déposé avant le 1er janvier 2021.

 

 

 


projet de loi

Le Premier ministre,

Sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la justice,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2020‑232 du 11 mars 2020 relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d’accompagnement social ou médico‑social à l’égard des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État sera présenté à l’Assemblée nationale par le garde des sceaux, ministre de la justice, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

 

Article unique

L’ordonnance n° 2020‑232 du 11 mars 2020 relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d’accompagnement social ou médico‑social à l’égard des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique est ratifiée.

 

 

Fait à Paris, le 9 décembre 2020.

Signé : Jean CASTEX

Par le Premier ministre :

Le garde des sceaux, ministre de la justice,

Signé : Éric DUPOND‑MORETTI