Description : Description : LOGO

N° 4265

_____

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 juin 2021.

PROJET  DE  LOI

autorisant l’approbation de la Mesure 1 (2005) annexe VI
au Protocole au Traité sur l’Antarctique relatif à la protection
de l’environnement, responsabilité découlant de situations critiques pour l’environnement

 

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. Jean CASTEX,

Premier ministre,

par M. Jean‑Yves LE DRIAN,
ministre de l’Europe et des affaires étrangères

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le statut de l’Antarctique a été arrêté par le Traité sur l’Antarctique, signé à Washington le 1er décembre 1959. Ce texte s’applique aux terres et zones maritimes au sud du 60e parallèle. Il y proscrit toute activité non pacifique.

Le Protocole au Traité sur l’Antarctique relatif à la protection de l’environnement (dit « Protocole de Madrid ») a été signé le 4 octobre 1991. Il complète le Traité et désigne l’Antarctique comme « réserve naturelle, consacrée à la paix et à la science ». Ce protocole est entré en vigueur le 14 janvier 1998. Il était initialement assorti de quatre annexes, adoptées en même temps que lui :

– l’annexe I relative à l’évaluation d’impact sur l’environnement ;

– l’annexe II relative à la conservation de la faune et de la flore en Antarctique ;

– l’annexe III relative à l’évaluation et la gestion des déchets ;

– l’annexe IV relative à la prévention de la pollution marine.

Deux autres annexes ont été adoptées ultérieurement, respectivement le 18 octobre 1991 puis le 14 juin 2005 :

– l’annexe V relative à la protection et la gestion des zones ;

– l’annexe VI relative à la responsabilité découlant de situations critiques pour l’environnement.

Les annexes I à IV ont été ratifiées par la France en même temps que le Protocole de Madrid, en 1992. L’annexe V l’a été en 2005. Il reste donc à ratifier l’annexe VI pour que la France remplisse pleinement ses engagements internationaux vis‑à‑vis du système du Traité sur l’Antarctique.

En application de l’article 15 du Protocole de Madrid, l’annexe VI impose aux opérateurs ayant une activité en Antarctique de prendre les mesures nécessaires pour prévenir la survenance d’un dommage à l’environnement dans le cadre de leurs opérations et d’adopter des plans d’urgence pour anticiper ces situations. Si un tel dommage survient néanmoins, les opérateurs sont tenus de mettre en place un dispositif adapté pour mettre fin à l’atteinte à l’environnement. En cas d’inaction de leur part, ils doivent prendre en charge les frais engagés par les Etats pour lutter contre le préjudice.

L’article 1er de l’annexe VI vise ainsi toutes les activités prévues par le Traité sur l’Antarctique susceptibles de causer une « situation critique pour l’environnement », qu’elles soient conduites par des opérateurs privés ou étatiques.

L’annexe VI s’articule ensuite autour de cinq dispositifs qui visent à prévenir la survenance d’une situation critique pour l’environnement, à y faire face si elle survient, à définir les responsabilités des acteurs impliqués dans la gestion d’un incident ainsi qu’à leur ouvrir des voies de recours judiciaires :

a) L’article 3 impose à tout opérateur ayant une activité en Antarctique de réduire le risque d’atteinte à l’environnement que crée cette activité, en prenant les mesures techniques adaptées et « raisonnables », c’est‑à‑dire proportionnées au risque réel. La vérification du respect de cette exigence est assurée par « la Partie de l’opérateur », qui s’entend comme l’Etat qui autorise l’activité en Antarctique et/ou sur le territoire duquel ledit opérateur organise en amont cette activité (article 2.d) ;

b) L’article 4 dispose que les Parties doivent exiger des opérateurs qui préparent une activité à partir de leur territoire et/ou qu’elles autorisent à avoir une telle activité en Antarctique qu’ils établissent des plans d’urgence « pour faire face aux incidents susceptibles d’avoir des effets négatifs sur l’environnement en Antarctique ». Les Parties sont également tenues de définir des procédures nationales ou internationales permettant de notifier rapidement la survenance d’un incident et d’organiser une coopération – avec le ou les opérateurs concernés, d’autres opérateurs ou d’autres Parties – pour y faire face ;

c) L’article 5 oblige les opérateurs à mener des actions « rapides et efficaces » en cas d’incident lié à leurs activités et prévoit également la procédure à suivre en cas d’inaction des opérateurs. Cet article prévoit ainsi une chaîne d’intervention qui offre la plus grande garantie possible qu’un acteur – l’opérateur, sa Partie et/ou une autre Partie – interviendra pour mettre fin à la menace à l’environnement antarctique ;

d) L’article 6 définit la responsabilité des opérateurs et des Parties. Si un opérateur n’est pas intervenu pour mettre fin à un dommage environnemental causé par son activité, il doit payer à la Partie qui est intervenue à sa place les coûts qu’elle a engagés – sans préjudice d’éventuelles poursuites engagées par cette Partie. Dans le cas où toutes les Parties resteraient inactives alors que l’opérateur à l’origine du dommage n’a rien fait pour y mettre un terme :

– si cet opérateur est étatique, il doit payer au Fonds du Secrétariat du Traité sur l’Antarctique prévu à l’article 12 le coût des mesures qui auraient dû être prises ;

– si cet opérateur est non‑étatique, il doit payer une somme qui reflète, dans la mesure du possible, les coûts des actions qui auraient dû être prises soit au Fonds du Secrétariat du Traité sur l’Antarctique, soit à sa Partie, soit à la Partie qui a utilisé la voie de recours en indemnisation prévu par l’article 7.

La Partie est responsable pour les activités de ses navires et aéronefs dans un cadre non‑commercial mais le principe de l’immunité souveraine est rappelé ;

e) L’article 7 prévoit des recours en indemnisation et des actions judiciaires pour assurer l’effectivité de la responsabilité des opérateurs. Une procédure administrative spécifique est applicable aux opérateurs étatiques qui seraient restés inactifs face à une situation critique pour l’environnement liée à leurs activités et alors qu’aucune Partie ne serait intervenue pour y mettre fin. La responsabilité de la Partie de l’opérateur étatique ne peut être établie que par la Réunion consultative du Traité sur l’Antarctique (RCTA), selon que de besoin sur le fondement d’une enquête. Une fois cette responsabilité établie, la RCTA fixe, par une décision, le montant correspondant au coût des mesures qui auraient dû être prises pour lutter contre le sinistre. Il appartient ensuite à l’opérateur étatique de verser cette somme au Fonds du Secrétariat du Traité sur l’Antarctique.

Les articles 8 à 10 prévoient des limites et des exonérations de responsabilité pour les opérateurs qui interviennent en Antarctique. Ainsi, un opérateur ne peut se voir imputer la responsabilité d’un dommage à l’environnement s’il a agi pour sauver des vies humaines ou assurer leur sécurité, ou si le dommage résulte d’une catastrophe naturelle imprévisible, d’un événement terroriste ou d’un acte de belligérance. De même, la responsabilité d’une Partie ne peut être engagée à la place de celle d’un de ses opérateurs non‑étatiques qui serait resté inactif face à un dommage qu’il a causé, si cette Partie avait préalablement adopté les mesures internes nécessaires à l’application de l’annexe VI. L’article 9 prévoit des plafonds forfaitaires de responsabilité pour les dommages causés par un navire de moins de 2 000 tonneaux ou pour les dommages qui ne font pas intervenir de navire. Pour les dommages causés par des navires d’un tonnage supérieur à 2 000 tonneaux, les plafonds de responsabilité sont fixés par tranches de tonnage, de manière dégressive, chaque tranche s’appliquant au nombre de tonneaux au‑dessus de la limite de la tranche précédente. Toutefois, ces plafonds de responsabilité ne s’appliquent pas s’il est prouvé que le dommage a été causé de manière délibérée par l’opérateur, dans l’intention de causer une telle situation ou de façon téméraire avec la conscience que le sinistre était probable.

Les articles 11 et 12 fixent, enfin, les aspects financiers du dispositif prévu. Les Parties doivent ainsi « exige[r] » de leurs opérateurs qu’ils s’assurent pour faire face aux frais qu’ils seraient tenus d’engager pour mettre fin à un sinistre qu’ils auraient causé. Les Parties « peu[ven]t exiger » que leurs opérateurs souscrivent une assurance ou une autre garantie financière pour faire face aux sommes qu’ils seraient obligés de verser aux Parties ou au Fonds du Secrétariat du Traité sur l’Antarctique en cas d’inaction de leur part face à un dommage à l’environnement qu’ils auraient causé. L’obligation d’assurance imposée et celle laissée à l’appréciation des Etats Parties par l’annexe VI visent à la fois les opérateurs étatiques et non‑étatiques. Toutefois, l’annexe laisse la possibilité aux Parties d’assurer elles‑mêmes leurs opérateurs étatiques.

Telles sont les principales observations qu’appelle l’annexe VI au Protocole au Traité sur l’Antarctique relatif à la protection de l’environnement, responsabilité découlant de situations critiques pour l’environnement, adoptée à Stockholm le 14 juin 2005.

 

 

 


projet de loi

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre de l’Europe et des affaires étrangères,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant 1’approbation de la Mesure 1 (2005) annexe VI au Protocole au Traité sur l’Antarctique relatif à la protection de l’environnement, responsabilité découlant de situations critiques pour l’environnement, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

 

Article unique

Est autorisée l’approbation de la Mesure 1 (2005) annexe VI au Protocole au Traité sur l’Antarctique relatif à la protection de l’environnement, responsabilité découlant de situations critiques pour l’environnement (ensemble une annexe), adoptée à Stockholm le 14 juin 2005 et dont le texte est annexé à la présente loi.

 

 

 

Fait à Paris, le 16 juin 2021.

Signé : Jean CASTEX,

Par le Premier ministre :
Le ministre de l’Europe
et des affaires étrangères
 

Signé : Jean‑Yves LE DRIAN