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N° 772

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX‑SEPTIEME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 janvier 2025.

PROJET DE LOI

d’urgence pour Mayotte,

(Procédure accélérée)

 (Renvoyé à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. François BAYROU,

Premier ministre,

par M. Manuel VALLS,
ministre d’État, ministre des outre‑mer

 

 

 

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le 14 décembre 2024, Mayotte a connu un aléa naturel d’une ampleur inédite : le cyclone Chido a dévasté l’archipel de Mayotte. Les conséquences de cette catastrophe sont de nature à gravement compromettre le fonctionnement des institutions et présentent un danger grave et imminent pour l’ordre public, la sécurité des populations, l’approvisionnement en biens de première nécessité ou la santé publique.

Par décret n° 2024‑1184 du 18 décembre 2024, le Premier ministre a en conséquence déclaré l’état de calamité naturelle exceptionnelle à Mayotte. Ce décret institue un état de calamité naturelle sur l’ensemble du territoire de Mayotte, qui permet de présumer la condition de force majeure ou d’urgence pour l’application des dispositions légales et réglementaires nationales mises en œuvre par les autorités publiques pour rétablir le fonctionnement normal des institutions, l’ordre public, la sécurité des populations et l’approvisionnement en biens de première nécessité ainsi que pour mettre fin aux atteintes à la santé publique. Ce dispositif doit permettre une gestion plus rapide et efficace de la crise et faciliter la mise en place de mesures d’urgence.

La théorie des circonstances exceptionnelles permet elle aussi de prendre par décret de nombreuses mesures, y compris de nature législative, pour face à la situation. Le Gouvernement ne renonce pas en faire usage.

Néanmoins l’ampleur de la catastrophe et le risque d’inscription dans le temps de la gestion de ses conséquences conduisent le Gouvernement à présenter ce projet de loi afin de faciliter l’action des acteurs publics et privés permettant de rétablir les conditions de vie des habitants, en répondant d’abord à l’urgence mais en préparant également la reconstruction de Mayotte, territoire sur lequel pèsent déjà des difficultés incomparables, en raison en particulier d’une situation migratoire d’une extrême gravité, à laquelle des solutions devront enfin être apportées dans le cadre plus large de la refondation de ce territoire.

Le chapitre Ier comporte deux mesures visant à permettre l’intervention d’un établissement public dédié à la reconstruction de Mayotte et à faciliter la reconstruction des écoles.

L’article 1er vise à permettre l’intervention d’un opérateur coordonnateur de la reconstruction de Mayotte en associant à sa gouvernance et à son à son organisation, aux côtés de l’État, les collectivités territoriales concernées, ainsi que, le cas échéant, d’autres personnes juridiques.

Cette organisation doit permettre de prendre en compte les intérêts légitimes des principales parties prenantes intéressées à la reconstruction tout en respectant les objectifs que le Gouvernement s’est assignés de rétablir très rapidement les conditions de logement, de déplacement et de développement des habitants du territoire.

L’article 2 vise à permettre la reconstruction du bâti scolaire appartenant aux collectivités locales par l’État, en lieu et place de celles‑ci lorsqu’il apparait que ces biens ont été très fortement endommagés.

Le chapitre II comporte des mesures visant à faciliter l’hébergement d’urgence, et à adapter les règles ordinaires de la construction des bâtiments, équipements et infrastructures, notamment de communication, aux circonstances locales.

L’article 3 facilite l’implantation en urgence de constructions temporaires destinées à l’hébergement d’urgence des habitants de Mayotte, sinistrés par le cyclone. Il dispense de toutes formalités au titre du code de l’urbanisme ces travaux, constructions et aménagements, dès lors que leur durée d’implantation est limitée à deux ans. Pour tout bâtiment ou aménagement à visée plus pérenne, à l’issue de cette durée, il conviendra de les régulariser par une autorisation d’urbanisme, ou de les retirer.

L’article 4 habilite le Gouvernement à prendre toute mesure de nature législative permettant de déroger à certaines règles de construction à Mayotte afin d’accélérer la reconstruction et de tenir compte des caractéristiques et contraintes particulières du territoire mahorais. La rapidité d’action nécessaire pour reloger les populations sinistrées, et la volonté de réaliser des constructions qualitatives avec des ressources limitées, justifie de prévoir des adaptations aux règles de construction de droit commun, tout en s’assurant que les logements ainsi construits offriront des garanties de durabilité et de la reconstruction rapide des infrastructures de télécommunications. Cette reconstruction suppose en parallèle une action vigoureuse de lutte contre l’habitat indigne et illégal.

Ne sont ainsi pas visées les règles relatives à la sécurité : les logements devront, en particulier, répondre aux exigences prévues par les réglementations relatives à la prévention des risques naturels (risques cyclonique, sismique et inondation) et d’incendie, afin de garantir la sécurité de leurs occupants et leur résilience face aux aléas. L’habilitation permettra en revanche au gouvernement d’adapter les exigences relevant d’autres réglementations, par exemple en matière d’accessibilité des bâtiments, de stationnement des véhicules ou de disponibilité d’infrastructures de recharge des véhicules électriques, de stationnements de vélos, ou encore d’obligation de recours aux énergies renouvelables. La liste précise des réglementations qui seront adaptées sera établie après échanges techniques avec les acteurs de la construction et les acteurs locaux. L’habilitation demandée sera présentée dans les trois mois suivant le vote de la loi.

Le chapitre III adapte les procédures d’urbanisme et d’aménagement aux enjeux de la reconstruction à Mayotte. Ces dispositions sont largement inspirées de l’ordonnance n° 2023‑871 du 13 septembre 2023 visant à faciliter le financement de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023.

L’article 5 définit le champ d’application du chapitre III. Il pose ainsi le principe de la reconstruction ou de la réfection, à l’identique ou avec des adaptations ou améliorations, pour les constructions, les aménagements ou les installations dégradés ou détruits lors du passage du cyclone Chido.

L’article 6 permet aux projets de reconstruction ou de réfection, à l’identique ou avec des adaptations ou améliorations, d’être autorisés même s’ils ne respectent pas les règles actuellement prévues par les documents d’urbanisme locaux ou les normes en vigueur. Cet article précise également les adaptations et améliorations qui peuvent être apportées aux projets, en particulier aux constructions, introduisant de la souplesse par rapport à la notion de reconstruction « à l’identique », notamment pour s’adapter au mieux aux enjeux d’amélioration de la performance énergétique, d’accessibilité ou de sécurité.

L’article 7 prévoit d’accélérer l’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme pour la reconstruction, en divisant par deux, voire trois, la durée totale nécessaire. À cette fin, il réduit sensiblement les délais d’instruction de droit commun, ainsi que les majorations et prolongations requises pour le recueil des avis, accords ou autorisations prévus par le code de l’urbanisme ou les législations connexes, pour lesquelles il prévoit en outre un principe de « silence vaut acceptation ». La durée totale d’instruction ne devrait donc ainsi pas dépasser un mois et demi, contre plusieurs mois dans le droit commun, notamment lorsque des consultations sont requises.

L’article 8 offre la possibilité à l’autorité compétente en matière d’urbanisme de recourir, si elle le souhaite et si la couverture du réseau de communications électroniques le permet, à la procédure de participation par voie électronique prévue à l’article L. 123‑19 du code de l’environnement. En écartant l’obligation de réaliser une enquête publique, cette mesure offre ainsi la possibilité d’informer et de concerter par voie dématérialisée le public de manière plus large et rapide. Cette mesure reprend les dispositions de l’article 7 de l’ordonnance n° 2023‑870 du 13 septembre 2023 précitée.

L’article 9 permet d’anticiper les travaux préalables à la reconstruction. Pour ces reconstructions, cet article permettra ainsi au maître d’ouvrage de démarrer les opérations et travaux préliminaires de reconstruction ou de réhabilitation dès le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme auprès de l’autorité compétente, sans attendre sa décision. Il s’agit de permettre au constructeur ou à l’aménageur de lancer au plus vite, notamment, les éventuelles opérations de démolition et les travaux de préparation du chantier (terrassements, fondations, etc.). Cette disposition reprend les dispositions de l’article 3 de l’ordonnance n° 2023‑870 du 13 septembre 2023 précitée.

Le chapitre IV vise à garantir la maîtrise foncière pour la reconstruction.

L’article 10 vise à permettre à la reconstruction de s’opérer en levant certains obstacles liés aux spécificités mahoraises en termes de propriété foncière. Il y est souvent difficile d’identifier formellement les propriétaires des terrains, et cette difficulté sera démultipliée dans le contexte des ravages du cyclone Chido ayant causé de larges destructions qui entraîneront le déplacement de l’habitat et des sinistrés. En conséquence, l’intervention sur les terrains endommagés ou à reconstruire sera fortement complexifiée, car les procédures ordinaires requièrent l’identification préalable du propriétaire. L’article 10 prévoit donc une habilitation à légiférer par ordonnance pour garantir que les opérations structurantes et indispensables de reconstruction de l’île ne seront pas mises en danger par les incertitudes juridiques qui affectent de nombreuses parcelles, tout en s’assurant que les dispositions adoptées soient garantes des droits fondamentaux des personnes et concertées. L’ordonnance sera préparée en concertation étroite avec les acteurs locaux, collectivités territoriales comme acteurs de l’aménagement et de la construction, après évaluation précise des besoins d’intervention nécessaires.

Le chapitre V prévoit des adaptations et dérogations temporaires en matière de commande publique.

L’article 11 a pour objet de déroger aux règles normales de passation des marchés publics en autorisant les maîtres d’ouvrages à recourir à une procédure négociée sans publication préalable d’un avis d’appel à la concurrence mais avec mise en concurrence pour l’attribution des marchés nécessaires à la reconstruction ou à la réfection des équipements publics et des bâtiments endommagés dès lors que leur montant est inférieur à 2 millions d’euros hors taxes. Cette mesure est également applicable aux lots dont le montant est inférieur à 1 million d’euros hors taxes, à la condition que le montant cumulé de ces lots n’excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots d’un marché alloti. 

L’article 12 permet aux maîtres d’ouvrage, pour l’attribution des marchés nécessaires à la reconstruction ou à la réfection des équipements publics et des bâtiments, quel que soit leur montant estimé, de s’affranchir du principe d’allotissement posé à l’article L. 2113‑10 du code de la commande publique sans avoir à démontrer qu’ils se trouvent dans l’une des exceptions prévues à l’article L. 2113‑11 du même code.

L’article 13 crée un nouveau cas de recours au marché de conception‑réalisation mentionné à l’article L. 2171‑2 du code de la commande publique afin d’autoriser les maîtres d’ouvrages soumis aux dispositions du même code relatives à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée, de confier à un opérateur économique, quel que soit le montant estimé des travaux, une mission globale portant à la fois sur l’établissement des études et l’exécution des travaux nécessaires à la reconstruction ou à la réfection des équipements publics et des bâtiments mentionnés à l’article 1er.

L’article 14 fixe à vingt‑quatre mois la durée des dérogations du présent chapitre.

Le chapitre VI vise à faciliter les dons à destination de Mayotte.

L’article 15, sur le modèle des dispositions votées pour la subvention nationale pour la reconstruction de Notre‑Dame, autoriser les collectivités territoriales et leurs groupements à verser des subventions à toute association s’engageant à utiliser ces fonds pour financer la réparation des dommages directement causés à Mayotte par le cyclone Chido de décembre 2024, ainsi qu’à l’établissement public mentionné à l’article 1er.

L’article 16, sur le modèle des dispositions adoptées pour la reconstruction de Notre‑Dame, aménage les règles de défiscalisation des dons à destination de la reconstruction de Mayotte.

Le chapitre VII prévoit des mesures en faveur de la population à Mayotte.

L’article 17 permet jusqu’au 31 mars 2025 de suspendre l’application du recouvrement fiscal forcé pour les redevables mahorais.

Sur le même modèle, l’article 18 prévoit la suspension du recouvrement des cotisations sociales jusqu’au 31 mars 2025 pour Les employeurs et les travailleurs indépendants relevant de l’article L. 613‑7 du code de la sécurité sociale ainsi que les travailleurs indépendants relevant des secteurs agricole et maritime qui exercent leur activité dans le département de Mayotte.

L’article 19 autorise le CPSTI à verser des aides d’urgence aux indépendants à Mayotte.

L’article 20 prolonge jusqu’au 31 mars 2025 les droits pour les demandes d’emploi et bénéficiaires de l’ASS et de l’ATI à Mayotte.

L’article 21 prolonge, pour la même durée, les droits à prestations versées par la caisse de sécurité sociale de Mayotte.

L’article 22 permet d’augmenter les niveaux de prise en charge de l’activité partielle et suppression du reste à charge de l’employeur, selon un taux fixé par décret, jusqu’au 31 mars 2025.

 

 

 


projet de loi

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre d’État, ministre des outre‑mer,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi d’urgence pour Mayotte, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre d’État, ministre des outre‑mer, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.

Fait le 8 janvier 2025.

Signé : François BAYROU

 

Par le Premier ministre :

Le ministre d’État, ministre des outremer,
Signé : Manuel Valls

 


1

Chapitre Ier

Coordination de la reconstruction de Mayotte
et reconstruction des écoles

Article 1er

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi ayant pour objet de confier à l’établissement public foncier et d’aménagement de Mayotte la mission de coordonner les travaux de reconstruction de Mayotte, en lien avec les ministères et leurs opérateurs et de veiller à la livraison de l’ensemble des ouvrages et à la réalisation de l’ensemble des opérations d’aménagement conduites par des acteurs publics et privés nécessaires à la reconstruction.

L’ordonnance définit les règles relatives :

– à l’organisation et l’administration de l’établissement de façon à y associer les collectivités territoriales de Mayotte et les représentants des acteurs économiques mahorais ;

– aux conditions dans lesquelles l’établissement peut assurer la maîtrise d’ouvrage ou la maîtrise d’ouvrage déléguée de certains ouvrages ou opérations d’aménagement, coordonner l’action de différents maîtres d’ouvrages et se substituer à un maître d’ouvrage en cas de défaillance grave de celui‑ci.

Un projet de loi de ratification est déposé au Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

Article 2

À Mayotte, jusqu’au 31 décembre 2027, par dérogation à l’article L. 2121‑30 du code général des collectivités territoriales et aux articles L. 212‑1, L. 212‑4 et L. 212‑5 du code de l’éducation, l’État ou un de ses établissements publics désigné par le ministre chargé de l’éducation nationale, peut assurer la construction, la reconstruction, la rénovation, la réhabilitation, l’extension, les grosses réparations et l’équipement des écoles publiques des communes désignées, après avis de celles‑ci, par arrêté du ministre chargé de l’éducation nationale au regard des dégâts causés aux écoles par le cyclone Chido.

Le service de l’État ou l’établissement public chargé de la mission définie au premier alinéa consulte la commune sur l’implantation et sur le nombre des classes.

Dans la mesure nécessaire à la mission définie au premier alinéa, les biens affectés aux écoles sont, de plein droit, mis à la disposition de l’État ou de l’établissement public, qui assume alors l’ensemble des droits et obligations du propriétaire. Il exerce en tant que de besoin les attributions du maître d’ouvrage définies par l’article L. 2421‑1 du code de la commande publique.

Toutefois, la collectivité conserve les droits et obligations résultant de contrats déjà conclus dans le champ défini au premier alinéa, sauf accord avec l’État ou l’établissement public pour substituer celui‑ci à la collectivité. La collectivité propriétaire conserve en outre la charge des emprunts qu’elle avait contractés au titre des biens mis à disposition.

Au plus tard à la date mentionnée au premier alinéa, l’État ou l’établissement public remet les biens à leurs propriétaires ou, pour les biens nouvellement construits, aux collectivités territoriales compétentes. Cette remise met fin à la mise à disposition prévue au troisième alinéa et, le cas échéant, emporte transfert de la propriété des biens nouveaux et de l’ensemble des droits et obligations qui s’y attachent. Toutefois, l’État ou l’établissement public conserve les droits et obligations résultant des contrats qu’il a déjà conclus, sauf accord avec la collectivité pour lui substituer celle‑ci.

Par dérogation au précédent alinéa, si les opérations ne sont pas achevées au 31 décembre 2027, la commune et l’État ou l’établissement public peuvent, par convention, prolonger la mission définie par le présent article.

Chapitre II

Adapter les règles d’urbanisme et de construction
face à l’urgence à Mayotte

Article 3

Les constructions à usage d’hébergement d’urgence édifiées à Mayotte pour une durée n’excédant pas deux ans, postérieurement au 14 décembre 2024 et jusqu’à l’expiration d’un délai de deux ans suivant la publication de la présente loi, ainsi que les travaux et aménagements liés à ces constructions, sont dispensés de toute formalité au titre du code de l’urbanisme.

Article 4

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre, par voie d’ordonnance, toute mesure relative aux constructions relevant du domaine de la loi visant à mieux tenir compte des caractéristiques et des contraintes propres au territoire mahorais afin de faciliter et d’accélérer la reconstruction.

Dans la mesure nécessaire à l’atteinte de cet objectif, cette ordonnance peut, notamment, modifier les adaptations applicables à Mayotte en ce qui concerne les règles techniques auxquelles sont soumis les constructions et les travaux qui y sont assimilés ainsi que les aménagements, et prévoir de nouvelles adaptations de ces règles, à l’exclusion de celles relatives aux exigences de sécurité des constructions.

L’ordonnance peut prévoir qu’elle s’applique aux constructions édifiées à Mayotte postérieurement au 14 décembre 2024 ainsi qu’aux travaux et aménagements mentionnés à l’alinéa précédent qui y sont réalisés après la même date.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

Chapitre III

Adapter les procédures d’urbanisme et d’aménagement aux enjeux de la reconstruction à Mayotte

Article 5

Les dispositions du présent chapitre s’appliquent à la reconstruction ou la réfection, à l’identique ou avec des adaptations ou améliorations, des constructions, aménagements et installations dégradés ou détruits à Mayotte au cours du passage du cyclone survenu dans la nuit du 13 au14 décembre 2024.

Elles sont applicables pendant une durée de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi.

Article 6

I. – Par dérogation à l’article L. 11115 du code de l’urbanisme, la reconstruction ou la réfection, à l’identique ou avec les adaptations ou améliorations prévues au présent article, des constructions, aménagements et installations dégradés ou détruits mentionnés à l’article 5 est autorisée, sous réserve qu’ils aient été régulièrement édifiés, nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire, y compris lorsqu’un plan local d’urbanisme, tout document en tenant lieu ou la carte communale en dispose autrement.

II. – S’agissant des constructions, les travaux nécessaires à leur reconstruction peuvent comporter des adaptations de la construction initiale, dans la limite d’une diminution ou d’une augmentation de 5 % de son gabarit initial.

Lorsqu’elle est justifiée par un objectif d’intérêt général, cette diminution ou cette augmentation peut dépasser 5 % du gabarit initial, à proportion des modifications de la construction nécessaires à la réalisation du ou des objectifs invoqués pour la justifier.

Ces adaptations et améliorations ne peuvent avoir pour effet de modifier la destination ou la sous‑destination initiale de la construction.

III. – Ce droit à reconstruction ou à réfection, que celle‑ci comporte ou non des modifications de la construction initiale, s’exerce dans les limites des règles applicables en matière de risques naturels, technologiques ou miniers auxquelles la reconstruction ou la réfection ne peut contrevenir et, le cas échéant, sous réserve des prescriptions de sécurité ou de salubrité publique dont l’autorité compétente peut assortir le permis.

Article 7

I. – La demande d’autorisation d’urbanisme précise que le projet est soumis à un régime dérogatoire.

Le cas échéant, les adaptations et améliorations qu’il est envisagé d’apporter à la construction initiale font l’objet d’une motivation spécifique dans la demande d’autorisation d’urbanisme.

II. – L’autorité compétente en matière d’autorisation d’urbanisme procède, dans les meilleurs délais et pendant toute la durée de l’instruction, à l’affichage en mairie ou à la publication par voie électronique, sur le site internet de la commune, d’un avis de dépôt de demande de permis ou de déclaration préalable précisant les caractéristiques essentielles du projet. Le récépissé de dépôt de la demande est affiché sans délai sur le terrain, de manière visible de l’extérieur, par les soins du demandeur.

III. – Le délai d’instruction de la demande de permis de construire, d’aménager ou de démolir est limité à un mois. Celui de la déclaration préalable est limité à quinze jours.

IV. – Lorsque la décision relève de l’État, le maire transmet sans délai le dossier au représentant de l’État dans le département et en conserve un exemplaire.

V. – L’autorité compétente dispose d’un délai de cinq jours à compter de la réception du dossier pour notifier, le cas échéant, au demandeur que son dossier est incomplet, en lui indiquant les pièces et informations manquantes.

VI. – Lorsque la délivrance de l’autorisation d’urbanisme est subordonnée au recueil préalable de l’avis, de l’accord ou de l’autorisation d’un organisme ou d’une autorité administrative, l’autorité compétente lui transmet un exemplaire du dossier, dans les cinq jours suivant sa réception.

VII. – Les majorations ou prolongations du délai d’instruction de la demande d’urbanisme découlant de l’application de règles de délivrance prévues par d’autres législations que celle de l’urbanisme sont limitées à quinze jours à compter de la réception du dossier par l’organisme ou l’autorité administrative concernés.

Le cas échéant, la majoration ou la prolongation du délai d’instruction est notifiée sans délai au demandeur.

VIII. – Lorsque la réalisation des travaux est subordonnée à l’accomplissement préalable d’une procédure de participation du public selon les modalités prévues à l’article L. 123‑19 du code de l’environnement, la majoration du délai d’instruction est limitée à quarante‑cinq jours.

Les avis, accords ou autorisations requis sont adressés à l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme dans un délai de quinze jours à compter de la réception du dossier. Nonobstant toute disposition contraire, le silence gardé passé ce délai vaut, selon le cas, avis favorable ou acceptation tacite.

Lorsque ces avis, accords ou autorisations sont émis par un organisme collégial, celui‑ci statue dans les plus brefs délais et par tout moyen assurant l’identification des participants et le respect de la confidentialité des débats vis‑à‑vis des tiers, nonobstant toute disposition particulière le régissant.

Article 8

Lorsque la réalisation des travaux mentionnés à l’article 5 requiert l’accomplissement préalable d’une procédure de participation du public, l’autorité compétente peut recourir à la procédure de participation par voie électronique prévue à l’article L. 123‑19 du code de l’environnement et exempter le projet d’enquête publique.

Article 9

Les opérations et travaux de démolition, de terrassement, de fondation peuvent être engagés dès le dépôt, selon le cas, de la demande d’autorisation d’urbanisme ou de la déclaration préalable.

Chapitre IV

Garantir la maitrise foncière et la disponibilité de matériaux
pour la reconstruction

Article 10

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi, relative à l’occupation temporaire ou l’expropriation définitive d’emprises foncières à Mayotte, dans l’objectif d’y faciliter la réalisation, dans les meilleurs délais, des ouvrages publics, des opérations d’aménagement, d’équipement, de démolition, de construction et de relogement, et des travaux nécessaires à l’extraction des matériaux de construction indispensables à la réalisation de ces opérations.

Dans la mesure strictement nécessaire à l’atteinte de cet objectif, cette ordonnance peut prévoir, de façon temporaire :

1° Des adaptations ou dérogations aux règles relatives à l’expropriation pour cause d’utilité publique, notamment en matière d’identification et d’indemnisation préalable des propriétaires des emprises devant faire l’objet d’une expropriation ;

2° Une occupation provisoire et réversible, moyennant indemnisation, d’emprises appartenant à des propriétaires privés, nécessaires à la réalisation des ouvrages, opérations et travaux mentionnés au premier alinéa.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

Chapitre V

Adaptations et dérogations temporaires
en matière de commande publique

Article 11

I. – Peuvent être négociés sans publicité mais avec mise en concurrence préalable les marchés de travaux soumis au code de la commande publique nécessaires à la reconstruction ou à la réfection des équipements publics et des bâtiments affectés par la calamité naturelle exceptionnelle survenue à Mayotte les 13 et 14 décembre 2024 et répondant à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 2 000 000 d’euros hors taxes.

Ces dispositions sont également applicables aux lots dont le montant est inférieur à 1 000 000 d’euros hors taxes, à la condition que le montant cumulé de ces lots n’excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

II. – Peuvent être négociés sans publicité ni mise en concurrence préalable les marchés de travaux, fournitures et de services soumis au code de la commande publique nécessaires pour remédier aux conséquences de la calamité naturelle mentionnée au I et répondant à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes.

Ces dispositions sont également applicables aux lots dont le montant est inférieur à 80 000 euros hors taxes pour les marchés de services et de fournitures et à 100 000 euros hors taxes pour les marchés de travaux, à la condition que le montant cumulé de ces lots n’excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

Article 12

Par dérogation aux dispositions des articles L. 211310 et L. 211311 du code de la commande publique, les marchés publics nécessaires pour remédier aux conséquences de la calamité naturelle mentionnée au I de l’article 11 de la présente loi peuvent faire l’objet d’un marché unique.

Article 13

Les acheteurs peuvent confier à un opérateur économique une mission globale portant sur la conception, la construction ou l’aménagement des équipements publics et des bâtiments mentionnés au I de l’article 11 de la présente loi, y compris si les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article L. 2171‑2 du code de la commande publique ne sont pas remplies.

Les dispositions du second alinéa de l’article L. 2431‑1 du même code ne sont pas applicables aux contrats ainsi conclus.

Article 14

Les dispositions des articles 11 à 13 s’appliquent aux marchés pour lesquels une consultation est engagée ou un avis de publicité est envoyé à la publication à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi et pendant un délai de vingtquatre mois à compter de cette date.

Chapitre VI

Faciliter les dons à destination de Mayotte

Article 15

Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, entre le 14 décembre 2024 et le 14 mars 2025, verser des subventions à toute association s’engageant à utiliser ces fonds pour financer les secours d’urgence au profit des victimes du cyclone Chido.

Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent également octroyer des financements à l’établissement public mentionné à l’article 1er

Article 16

Le taux de la réduction d’impôt prévue au 1 de l’article 200 du code général des impôts est porté à 75 % pour les dons et versements, y compris l’abandon exprès de revenus ou produits, effectués entre le 14 décembre 2024 et le 17 mai 2025 au profit des associations et fondations reconnues d’utilité publique qui, dans le cadre de leur action dans le département de Mayotte à la suite du passage du cyclone Chido, fournissent gratuitement des repas ou des soins aux personnes en difficulté ou contribuent à favoriser leur logement, y compris par la reconstruction des locaux d’habitation rendus inhabitables.

Ces versements sont retenus dans la limite de 1 000 euros par an. Il n’en est pas tenu compte pour l’application de la limite de 20 % du revenu imposable mentionnée au 1 de l’article 200 du code général des impôts.

Chapitre VII

Mesures en faveur de la population à Mayotte

Article 17

Pour les créances dont sont redevables les personnes physiques et personnes morales fiscalement domiciliées ou dont le siège social est établi dans le département de Mayotte et dont le recouvrement incombe aux comptables publics de la direction générale des finances publiques, les délais en cours à la date du 14 décembre 2024 prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité ou déchéance d’un droit ou d’une action sont suspendus jusqu’au 31 mars 2025. Cette suspension peut être prolongée, pour tout ou partie des redevables, jusqu’au 31 décembre 2025, par décret pris en considération de leur situation économique et financière et, pour les entreprises, de leur appartenance à une même catégorie en fonction de leur taille ou de leur activité.

Article 18

Les employeurs et les travailleurs indépendants mentionnés au II de l’article 28‑1 de l’ordonnance n° 96‑1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité et décès, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse centrale de sécurité sociale de Mayotte ainsi que les travailleurs indépendants relevant des secteurs agricole et maritime bénéficient de droit d’une suspension des obligations de paiement des cotisations et contributions restant dues à la date du 14 décembre 2024 ainsi que de celles dues à compter de cette même date aux organismes de recouvrement des cotisations sociales au titre de l’activité exercée sur le territoire de ce département, jusqu’au 31 mars 2025. Cette échéance peut être reportée, pour tout ou partie de ces redevables, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2025, par décret pris en considération de la situation économique et financière des redevables appartenant à une même catégorie, en fonction de leur taille ou de leur activité.

Pendant la période prévue au premier alinéa, il est sursis aux poursuites pour le règlement des cotisations et contributions sociales patronales dues par ces employeurs et ces travailleurs indépendants. Le sursis suspend le calcul des pénalités et majorations de retard ainsi que les délais s’appliquant pour la réalisation des actes en matière de recouvrement, de contrôle et de contentieux.

Les obligations déclaratives doivent être souscrites aux échéances en vigueur. Toutefois, jusqu’au 31 décembre 2025, les pénalités ne sont pas applicables en cas de retard de déclaration.

Les employeurs et travailleurs indépendants qui respectent les obligations prévues au présent article sont considérés à jour de leurs obligations de paiement des cotisations et contributions sociales pour les périodes concernées par la suspension.

Article 19

I. – L’ordonnance n° 96‑1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité et décès, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte est ainsi modifiée :

1° Après le 8° du II de l’article 22, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 9° De mettre en œuvre, pour les travailleurs indépendants mentionnés au II de l’article 28‑1 de la présente ordonnance, les décisions prises par l’instance compétente du conseil mentionné à l’article L. 612‑1 du code de la sécurité sociale en matière d’action sanitaire et sociale. » ;

2° Le chapitre VI du titre II est complété par un article 28‑13‑1 ainsi rédigé :

« Art. 28‑13‑1. – Les travailleurs indépendants mentionnés au II de l’article 28‑1 de la présente ordonnance sont éligibles à l’action sanitaire et sociale prévue au 2° de l’article L. 612‑1 du code de la sécurité sociale. Les demandes sont déposées auprès de la caisse de sécurité sociale de Mayotte et mises en paiement par cette caisse. Les décisions d’attribution sont prises par l’instance régionale de la protection sociale des travailleurs indépendants désignée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. »

II. – Par dérogation aux dispositions du 2° du I et jusqu’au 31 décembre 2025, les décisions d’attribution prises par l’instance compétente du conseil mentionné à l’article L. 612‑1 du code de la sécurité sociale en matière d’action sanitaire et sociale peuvent être prises sans demande préalable et être traitées et mises en paiement par un organisme désigné par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.

III. – Le présent article est applicable à compter du 14 décembre 2024.

Article 20

Les demandeurs d’emploi résidant à Mayotte, qui épuisent leurs droits à l’une des allocations mentionnées aux articles L. 5422‑1, L. 5423‑1, L. 5424‑1 et L. 5424‑25 du code du travail à compter du 1er décembre 2024, bénéficient à titre exceptionnel d’une prolongation de la durée pendant laquelle cette allocation leur est versée jusqu’au 31 mars 2025. Cette période peut être prolongée par décret en fonction de l’évolution de la situation sociale et des conditions matérielles locales, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2025.

Ces dispositions s’appliquent que l’allocataire remplisse ou non, à la date à laquelle il arrive au terme de sa durée d’indemnisation, les conditions de l’ouverture d’une nouvelle période d’indemnisation.

Pour les travailleurs privés d’emploi à compter du 1er décembre 2024, la période de référence, au cours de laquelle est recherchée la durée d’affiliation à l’assurance chômage requise pour l’ouverture d’une nouvelle période d’indemnisation à l’issue de la période de prolongation mentionnée au premier alinéa, est prolongée du nombre de jours compris entre le 1er décembre 2024 et le terme de cette période de prolongation. Est également prolongé, selon les mêmes modalités, le délai de douze mois courant à compter de la fin d’un contrat de travail et avant l’expiration duquel doit intervenir l’inscription comme demandeur d’emploi ou, le cas échéant, le dépôt de la demande d’allocation auprès de l’opérateur mentionné à l’article L. 5312‑1 du code du travail ou, le cas échéant, d’un des employeurs mentionnés à l’article L. 5424‑1 du même code, pour permettre de prendre en considération la fin de ce contrat de travail pour l’ouverture des droits à indemnisation du chômage.

Article 21

Le bénéfice des droits et prestations sociales versés par la caisse de sécurité sociale de Mayotte est maintenu jusqu’au 31 mars 2025 lorsqu’il vient à expiration à compter du 14 décembre 2024, même en l’absence de demande de renouvellement, de souscription des déclarations requises ou de production des pièces justificatives nécessaires par son bénéficiaire. Cette période peut être prolongée par décret, pour tout ou partie des droits ou prestations dus, en fonction de l’évolution de la situation sociale et des conditions matérielles locales, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2025.

Le bénéfice de ces droits et prestations sociales, ainsi que les remboursements et prises en charge des frais de santé, peut être accordé même en l’absence de demande ou de production par leur potentiel bénéficiaire des pièces nécessaires pour apprécier son éligibilité lorsqu’il est dans l’impossibilité de les fournir ou que la caisse est dans l’incapacité de les traiter. Cette disposition est également applicable au titre de la période antérieure au 14 décembre 2024 lorsque l’examen d’une demande était en cours à cette date et que les pièces fournies à l’appui de cette demande étaient incomplètes.

Article 22

Par dérogation aux dispositions de l’article L. 5122‑1 du code du travail, les taux horaires de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle peuvent être majorés pour les établissements situés à Mayotte. Ces taux sont fixés par décret.

Les dispositions du présent article s’appliquent aux demandes d’indemnisation adressées à l’Agence de services et de paiement au titre du placement en position d’activité partielle de salariés à compter du 14 décembre 2024 et jusqu’au 31 mars 2025. Cette période peut être prolongée par décret en fonction de l’évolution de la situation sociale et des conditions matérielles locales, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2025.