—  1  —

N° 174

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 27 septembre 2017.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI, après engagement de la procédure accélérée, mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels et portant diverses applications relatives à l’énergie et à l’environnement (n° 155)

PAR M. Jean-Charles COLAS-ROY

Député

——

 

 Voir les numéros : 155, 172.

 

 


—  1  —

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION

travaux en commission

I. AUDITION de m. Nicolas Hulot, ministre dÉtat, ministre en charge de la transition écologique et solidaire et discussion générale

II. examen des aRTICLES

Avant l’article premier

Chapitre Ier Arrêt de la recherche et de lexploitation des hydrocarbures dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique

Article 1er Arrêt progressif de lexploration et de lexploitation des hydrocarbures

Après l’article 1er

Article 1er bis [nouveau] Fixation au 1er janvier 2040 de léchéance des concessions accordées en application du « droit de suite »

Article 2 Dispositions relatives à lentrée en vigueur de larticle 1er

Après l’article 2

Article 3 Suppression de la Commission nationale dorientation, de suivi et dévaluation des techniques dexploration et dexploitation des hydrocarbures liquides et gazeux

Après l’article 3

Article 3 bis [nouveau] Rapport du Gouvernement sur laccompagnement des territoires impactés

Article 3 ter [nouveau] Rapport du Gouvernement sur lorigine des pétroles bruts dont sont issus les carburants consommés en France

Après l’article 3

Article 3 quater [nouveau] Publication en ligne des demandes de titre dexploration et dexploitation dhydrocarbures et des titres délivrés

Chapitre II Dispositions relatives aux stockages et aux consommateurs de gaz

Article 4 Réforme du stockage souterrain de gaz naturel

Chapitre III Dispositions relatives aux relations entre fournisseurs et gestionnaires de réseaux

Article 5 (articles L. 134-1, L. 134-2, L. 341-4-3 et L. 452-3-1 [nouveaux] du code de lénergie) Sécurisation du dispositif du contrat unique

Article 5 bis [nouveau] (articles L. 341-2, L. 342-3, L. 342-7 et L. 342-7-1 [nouveau] du code de lénergie) Modalités relatives au raccordement des parcs éoliens en mer et aux réseaux intérieurs de distribution

Article 5 ter [nouveau] (article L. 224-3 du code de la consommation) Information donnée au consommateur final sur le type de gaz fourni

Chapitre IV Dispositions relatives aux contrôles des biocarburants

Article 6 (articles L. 661-4 et L. 661-10 à L.661-20 [nouveaux] du code de lénergie) Performance environnementale des biocarburants et contrôle du non-respect des règles de durabilité : transposition de la directive (UE) 2015/1513 du 9 septembre 2015

Article 6 bis [nouveau] (articles L. 651-2 et L. 651-3 [nouveaux] du code de lénergie) Nouvelles garanties pour la distribution de carburants

Chapitre V Dispositions relatives à la réduction des émissions de certains polluants atmosphériques

Article 7 (article L. 222-9 du code de lenvironnement) Réduction des émissions de polluants atmosphériques : transposition de la directive 2016/2284 du 14 décembre 2016

Article 7 bis [nouveau] (article L. 222-5 du code de lenvironnement) Plans daction dans le périmètre des PPA

Après l’article 7

Chapitre VI Dispositions relatives à lapplication outre-mer

Article 8 Dispositions relatives à lapplication outre-mer des articles 1er et 2

liste des personnes auditionnées

Contributions écrites reçues

annexes


—  1  —

   INTRODUCTION

Les travaux menés par le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ont montré qu’atteindre l’objectif de limitation à 2°C de l’augmentation de la température depuis l’ère préindustrielle nécessitait de limiter l’exploitation d’une part importante des réserves d’énergies fossiles présentes dans le sous-sol. Le GIEC estime que la quantité globale de CO2 – un des principaux gaz dont l’émission est responsable du réchauffement climatique – émise depuis 1870 qui permettrait de limiter la hausse des températures à 2°C depuis la période préindustrielle représente 2 900 milliards de tonnes de CO2. Les émissions de CO2 qui ont eu lieu jusqu’à ce jour représentant à 2 100 milliards de tonnes, il serait nécessaire de limiter à 800 milliards les émissions futures.

Le secteur de l’énergie étant, au niveau mondial, l’un des principaux émetteurs de CO2, l’exploitation de la totalité de ces ressources des réserves fossiles disponibles est de nature à faire dépasser la quantité maximale de CO2 émissible et d’empêcher d’atteindre l’objectif de limitation de la hausse de température à 2°C.

Par ailleurs, l’Accord de Paris, adopté le 12 décembre 2015 à l’issue de la COP21, prévoit de contenir l’augmentation de la température mondiale en deçà de 2°C, voire de tendre vers un objectif de 1,5°C.

Dans ce contexte, il est impératif pour la France de modifier les règles actuellement applicables aux activités d’extraction d’hydrocarbures.

Pour répondre à ces défis, la France a déjà pris une série de mesures, avec par exemple la fixation d’objectifs et d’axes d’actions dans la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ([1]) et dans ses documents de planification stratégique et opérationnelle, avec, notamment, la stratégie nationale bas-carbone adoptée en novembre 2015 ([2]) et la programmation pluriannuelle de l’énergie adoptée en octobre 2016 ([3]).

Le plan Climat présenté le 6 juillet 2017 par M. Nicolas Hulot, ministre en charge de la transition écologique et solidaire prévoit d’accélérer la mise en œuvre de l’Accord de Paris. Dans cette perspective, son neuvième axe prévoit que « le Gouvernement amorcera la sortie progressive de la production dhydrocarbures sur le territoire français à lhorizon 2040, en nattribuant plus de nouveaux permis dexploration dhydrocarbures et en ne renouvelant pas les concessions dexploitation existantes » car « pour avoir une chance de limiter le dérèglement climatique à moins de 1,5°C/2°C, la majorité des réserves connues dhydrocarbures doivent rester dans le sol ». ([4])

L’objectif de cette mesure est non seulement de marquer la contribution de la France à la lutte dans le réchauffement climatique mais également d’envoyer un signal fort aux autres pays pour les inciter à s’engager dans cette démarche.

Étant donné que le délai moyen entre le lancement d’un nouveau projet d’exploration d’hydrocarbures et la mise en exploitation des substances éventuellement trouvées est compris entre 10 et 20 ans et que la durée d’exploitation d’un gisement est comprise entre 30 et 40 ans, si nouveaux projets de recherche étaient engagés aujourd’hui, la phase d’exploitation des ressources éventuellement trouvées débuterait dans les années 2020-2030 et se poursuivrait encore dans les années 2050-2060, soit à une date située bien au-delà de la période à partir de laquelle les émissions de gaz à effet de serre devront avoir été réduites de manière significative.

C’est pourquoi il est indispensable d’agir dès maintenant car il n’apparaît pas pertinent de continuer à autoriser la mise en œuvre de nouveaux projets après 2018. De ce fait, le présent projet de loi vise à programmer l’arrêt progressif de l’exploitation comme de l’exploration des hydrocarbures. Cette mesure fait l’objet des articles 1 à 3 et de l’article 8 du projet de loi.

Cette loi s’inscrit dans un processus de longue durée, qui a notamment été marqué par l’adoption en 2011 de la loi interdisant l’exploitation d’hydrocarbures non conventionnels avec l’emploi de la technique de la fracturation hydraulique ([5]). Cette loi, adoptée à l’initiative du Parlement, a permis de répondre à d’importantes craintes que le développement de cette technique très polluante pour l’environnement avait suscitées dans l’opinion publique.

Les risques pour l’environnement liés à l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels sont en effet connus de longue date. Les hydrocarbures conventionnels sont ceux qui sont exploités par les techniques conventionnelles (exploitation par forage de puits des roches réservoirs les plus perméables, au sein desquelles les hydrocarbures sont concentrés). Les hydrocarbures non conventionnels sont les hydrocarbures dont l’exploitation est plus complexe à mettre en œuvre et requiert la mise en œuvre de technologies spécifiques, dites « non conventionnelles ». Les pétroles de réservoirs compacts ([6]), les pétroles visqueux, les sables bitumeux, les schistes bitumeux, les gaz de houille (aussi appelés « gaz de couche », les gaz de schiste et les hydrates de méthane sont considérés comme des hydrocarbures non conventionnels ([7]).

Ce projet de loi comporte également deux articles concernant la réglementation relative à l’énergie, dont l’examen « au fond » a été délégué à la commission des affaires économiques :

– l’article 4 concerne la réglementation applicable aux stockages souterrains de gaz naturel et autorise le Gouvernement à mettre en place par ordonnance des mesures concernant la sécurité d’approvisionnement en gaz naturel des consommateurs français, notamment par la mise en œuvre d’une régulation pour les infrastructures de stockages souterrains ;

– l’article 5 concerne quant à lui la Commission de régulation de l’énergie, dont il précise les compétences en matière de rémunération des prestations de gestion de clientèle effectuées par les fournisseurs d’énergie pour le compte des gestionnaires de réseaux de distribution.

Enfin, l’article 6 procède à la transposition de la directive du 9 septembre 2015 relative aux biocarburants ([8]) et l’article 7 à la transposition de la directive du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques ([9]).

*

***

Réunie le 26 septembre 2017, votre commission a débattu de 158 amendements. Elle a adopté 76 amendements et sous-amendements.

En en ce qui concerne les dispositions relatives à l’arrêt progressif des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures, la commission a adopté des amendements :

– incluant le charbon dans la liste des substances dont l’exploration et d’exploitation doivent être interdites ;

– explicitant le fait que l’exploitation du gaz de mine – qui est la seule exploitation d’hydrocarbures qui restera autorisée à l’avenir –  ne concerne que le grisou et pas le gaz de couche, qui est un hydrocarbure non conventionnel ;

– créant un article additionnel qui prévoit que les concessions qui seraient délivrées postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi aux titulaires d’un permis exclusif de recherches en cours de validité en application du « droit de suite » défini par l’article L.132-6 du code minier ne pourraient aller au-delà de 2040 ;

– modifiant la loi du 13 juillet 2011 pour élargir le champ de l’interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels au-delà des opérations pour lesquelles il est nécessaire de recourir à la fracturation hydraulique.

En ce qui concerne les biocarburants, votre commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels ou de précision visant, notamment, à expliciter le nouveau dispositif de contrôle du respect des obligations incombant aux opérateurs des filières de biocarburants. Elle a également étendu cette surveillance aux filières des bioliquides.

Elle a également souhaité mieux encadrer la future distribution du biodiesel B10 afin de garantir que la fourniture de carburants compatibles avec tous types de véhicules restera assurée.

L’article 7 relatif à la pollution atmosphérique n’a fait l’objet que de modifications rédactionnelles. Il a toutefois été complété par l’adoption d’un amendement créant un article 7 bis, qui impose l’élaboration, dans les zones couvertes par un plan de protection de l’atmosphère, d’un plan d’action des pouvoirs publics pour favoriser le recours aux énergies les moins émettrices de particules polluantes.

 

 


—  1  —

travaux en commission

Lors de ses réunions du mardi 26 septembre après-midi et soir, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre en charge de la transition écologique et solidaire, avant de passer à l’examen, sur le rapport de M. Jean‑Charles Colas-Roy, du projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels et portant diverses applications relatives à l’énergie et à l’environnement.

I.   AUDITION de m. Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre en charge de la transition écologique et solidaire et discussion générale

Mme la présidente Barbara Pompili. Mes chers collègues, nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui M. Nicolas Hulot, ministre d’État chargé de la transition écologique et solidaire.

Cette audition est particulièrement importante pour notre commission, car elle se fait sur un projet de loi emblématique de la nouvelle législature ; il s’agit de témoigner de l’ambition forte de la France de s’engager dans la limitation du réchauffement climatique en dessous de 1,5 à 2 °C. Ce projet s’attache à poser des principes qui contribueront à « désinhiber » – selon les termes mêmes du ministre – les autres pays.

C’est également une réunion emblématique pour la commission du développement durable, qui se voit confier l’examen de ce projet de loi en vertu d’une décision du président de l’Assemblée nationale. Notre commission se voit ainsi confirmer toute la place qu’elle doit occuper dans l’accompagnement législatif de la transition énergétique.

Néanmoins, comme vous le savez tous désormais, deux articles de ce projet de loi ont fait l’objet, à la demande du président de notre assemblée, d’une « délégation au fond » à la commission des affaires économiques. Sur les articles 4 et 5, l’examen de la commission du développement durable s’en tiendra aux amendements adoptés par la commission des affaires économiques – et je remercie Mme Célia de Lavergne, rapporteure pour avis de la commission, d’être présente parmi nous aujourd’hui pour l’examen de ces deux articles.

Nous passons à présent à l’examen du projet de loi. Monsieur le ministre, vous avez la parole.

M. le ministre. Le danger supplémentaire, dans le changement climatique qui nous guette, tient à la combinaison de deux dynamiques, en tout cas à l’échelle européenne et mondiale : l’irréversible et le fatalisme. Le fatalisme, car l’impératif climatique est une injonction si lourde, dans ce qu’elle nous impose en termes de changement de modèle et de remise en cause de fondamentaux, d’enjeux et d’intérêts considérables, qu’elle en vient parfois à nous plonger un état de sidération. On peut le comprendre, mais les événements récents que j’ai évoqués nous imposent un devoir de responsabilité et même d’humanité et de solidarité. Le futur, au sens propre du terme, autrement dit les conditions d’existence de nos enfants, se joue maintenant.

La grande vertu de l’accord de Paris est d’avoir sacralisé le constat scientifique sur le changement climatique et ses éventuelles conséquences. C’est important car, tant que le doute subsistait, il permettait aux excès de perdurer. L’ensemble de la communauté internationale a validé un texte qui marque avant tout le démarrage d’un nouveau processus : on passe de la définition d’une feuille de route à sa mise en œuvre. La signature au bas d’un document ne vaut pas, comme certains feignent de le croire, réalisation de promesse : le plus dur reste à faire mais peut-être aussi le plus passionnant : savoir que nous avons en mains les cartes de notre destin, c’est tout de même plus enthousiasmant que de s’apercevoir un matin qu’elles nous ont échappé. « Je déplore que le sort de l’humanité soit dans d’aussi mauvaises mains que les siennes », disait ce philosophe ; je pense pour ma part que c’est plutôt une bonne nouvelle, si tant est que nous sachions en faire quelque chose d’utile et de prodigieux… Ce n’est pas tant le génie humain qui fait défaut – nous avons tout ce qu’il faut pour réussir ensemble un saut qualitatif – que parfois l’intelligence et la volonté collectives. La volonté collective s’est affirmée à Paris ; l’intelligence collective, il reste à la mettre en œuvre, à prendre chacun sa part sans attendre que l’autre parte en premier. C’est un peu le sens de ce projet de loi.

Lorsque j’étais un activiste, j’étais souvent très sévère sur ce que la France ne faisait pas, je manquais d’objectivité pour mettre en avant ce qu’elle faisait, mais quand on se balade dans le monde, on peut aussi être assez fier de ce qu’a fait notre pays. La France a joué un rôle important dans la mobilisation sur le climat ; mes interlocuteurs étrangers le reconnaissent et me le disent. Il faut à présent être cohérent. J’ai cité hier cette phrase de Bossuet dans une autre commission : « Nous sommes d’étranges créatures qui nous affligeons des effets mais continuons d’en adorer les causes. » Nous nous sommes affligé des effets, essayons à présent de regarder la cause. Elle est parfaitement identifiée : la science nous dit que, pour nous donner une chance d’atteindre nos objectifs climatiques, il faut laisser 80 % des réserves d’énergie fossile sous nos pieds. La France a affirmé sa foi dans ce processus et il faut donc maintenant acter que les énergies fossiles, qui ont été un allié de nos sociétés pendant 150 ans, qui ont entraîné des changements prodigieux, sont devenues le problème. Il faut entrer en « cellule de dégrisement » pour nous affranchir de ces énergies ; or ce n’est pas simple car le charbon, le pétrole, le gaz sont présents partout dans nos sociétés.

Je me rends compte de l’ampleur de la tâche ; mais je pressens aussi que c’est un moment merveilleux dans la mesure où l’occasion nous est donnée de redessiner un modèle. Nos territoires couvrent tous les champs de la transition énergétique, dans nos collectivités, nos TPE, nos PME, nos grandes entreprises. Les acteurs ont besoin qu’on leur dise où on veut aller et comment on veut y aller. Si nous parvenons à nous fixer collectivement cet horizon, au-delà de nos divergences, c’est un défi passionnant que nous nous lançons. En y répondant, nous aurons pris notre part. S’il existe des décalages, on peut être tenté de se dire, notamment au prétexte qu’on assiste à un recul d’une partie des États-Unis : à quoi bon prendre des décisions nationales puisqu’il s’agit d’un enjeu universel ? La meilleure réponse est : au contraire ! Ne rien faire n’est pas dans notre intérêt, ni même dans notre intérêt économique à court terme.

L’irréversible, c’est que la science nous dit que, si nous n’atteignons pas notre objectif de limiter l’élévation de température au cours de ce siècle à 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, les phénomènes vont nous échapper. On voit bien d’ailleurs, à l’aune de ce qui s’est passé il y a quinze jours, avec des vents à 350 kilomètres-heure, qu’ils commencent à nous échapper. J’étais dans la cellule de crise : nous avons été incapables de communiquer avec Saint-Martin pendant plus de vingt-quatre heures. C’est tout simplement une leçon d’humilité. On dit qu’il faut sauver la nature, mais la nature sait se défendre ; nous sommes capables de faire de grandes choses mais nous devons aussi respecter les lois de la nature.

Cette loi n’est pas, à mes yeux, le tout d’un programme. Je la vois comme un axe central, un field guide qui nous projette jusqu’en 2040, voire 2050 puisqu’elle nous met en situation de réaliser l’engagement français de neutralité carbone à cette échéance. Il faudra au fil du temps y arrimer d’autres axes et d’autres organes ; en attendant, elle nous donne la prévisibilité dont nous avons tant besoin. Elle nous met dans cet esprit de cohérence que j’évoquais tout à l’heure.

On ne manquera pas de m’objecter que, si vous adoptez cette loi, nous serons le premier grand pays à bannir toute nouvelle exploration d’hydrocarbures sur le territoire national. Cela représente certes une faible partie de notre consommation, mais commençons par ce que l’on peut faire chez nous. C’est plus qu’un signal : cela sonne la fin d’un modèle et rend possible l’émergence d’un nouveau. C’est ce qui nous offrira, je l’espère, un avantage compétitif économique dans cette transition énergétique qui, qu’on le veuille ou non, est bel et bien partie ; certains s’y sont déjà engagés, et de manière bien plus silencieuse que nous. Qui aurait pensé, lorsque nous avons commencé à préparer la COP21, que des pays comme l’Inde et la Chine aient de telles ambitions ? Nous constatons parfois avec tristesse, par exemple sur le solaire, qu’une bonne part des subventions que nous y consacrons ont tendance à profiter à la Chine. Faisons en sorte que la France prenne sa responsabilité.

Ce projet de loi a une double vocation : d’une part, interdire définitivement tout nouveau permis d’exploration sur les hydrocarbures conventionnels et non conventionnels – personne ne comprendrait que l’on continue à chercher des ressources pour ne pas les exploiter –, et d’autre part, arrêter autant que faire se peut toute production sur notre territoire à l’horizon de 2040. C’est une marche importante. Certes, le texte respectera les droits acquis, sans quoi les contentieux seraient excessivement lourds et la France n’a pas besoin de telles pénalités, mais il a le mérite de clarifier les contentieux existants – je n’imaginais pas, en arrivant au ministère, qu’ils étaient si nombreux. Nous respecterons les droits acquis mais nous pourrons passer à autre chose, nous tourner vers le futur.

Cette loi va accélérer notre transition énergétique. Pour reprendre les mots de la directrice de l’Organisation mondiale de la santé, la lutte contre le changement climatique est un agenda de santé publique. C’est donc nécessairement une priorité, et les Chinois l’ont compris avant nous. Je ne dresserai pas la liste morbide des victimes liées à l’utilisation des énergies fossiles, mais leur nombre est trois fois plus élevé que celui des victimes du tabac à l’échelle du monde. Je rappelais hier dans une autre commission que, selon certaines institutions internationales, les externalités négatives subies par la communauté internationale du fait de l’utilisation des énergies fossiles pèsent près de 5 000 milliards de dollars, alors que, dans le même temps, la même communauté internationale accorde 500 milliards de dollars en exonérations ou subventions à ces énergies. Si nous pouvons affecter les montants dus aujourd’hui à ces externalités à l’éducation, à la formation, à la santé, les bénéfices sont potentiellement immenses, et ce serait bien plus cohérent.

Enfin, se libérer des énergies fossiles, au-delà du fait que cela soulagera grandement notre balance commerciale nationale – entre 50 et 60 milliards d’euros –, c’est aussi, pour le monde, se libérer d’un certain nombre de sources de conflits. Je ne vous apprends rien : il suffit de regarder la source des tensions et des conflits depuis la Seconde Guerre mondiale, pour constater que le pétrole, le gaz, le charbon n’en sont jamais très éloignés. Paradoxalement, se réunir sur l’objectif climatique, c’est avancer vers la paix plutôt que de s’en éloigner. Si nous faisons les choses en grand, nous permettrons de faire tomber les coûts : je rêve d’un monde où des pays africains, par exemple, pourront répondre à leurs besoins d’énergie à partir d’une énergie redevenue abondante dans laquelle se combineraient le vent, le soleil, la biomasse, le mouvement des vagues, le gradient thermique des océans, la géothermie.

Ce projet de loi comprend plusieurs articles, dont les articles 4 à 7 qui peuvent paraître étonnants dans ce texte mais qui sont de fait complémentaires et nécessaires dans la mesure où ils permettent de mieux faire fonctionner un système énergétique en pleine mutation. Il se fixe trois objectifs majeurs : la lutte contre le changement climatique, la sécurité de l’approvisionnement énergétique et la protection des consommateurs. J’attends de nos échanges ici et en séance publique qu’ils enrichissent le texte et permettent d’identifier des points de faiblesse ou des angles morts. J’espère que la France pourra s’enorgueillir d’avoir pris sa responsabilité, dans ce moment où nous devons rassurer le monde sur notre détermination. (Applaudissements.)

M. Jean-Charles Colas-Roy, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Je suis très honoré d’avoir été nommé rapporteur sur ce texte emblématique et je remercie la commission et la présidente pour la confiance qui m’a été accordée. Je tiens à souligner l’excellent travail des administratrices de l’Assemblée nationale, qui nous ont assistés soir et week-end, dans des délais extrêmement contraints, pour étudier ce texte. Je tiens enfin à saluer chaleureusement ma collègue de la commission des affaires économiques, Célia de Lavergne, ici présente, rapporteure pour avis sur l’ensemble du texte, avec qui j’ai travaillé conjointement.

En effet, l’examen de ce projet de loi s’est fait de manière partagée : les articles 4 et 5 portant sur des dispositions relatives à l’approvisionnement énergétique ont été délégués au fond à la commission des affaires économiques.

C’est bien cette volonté de travail en commun et le partage de nos compétences qui ont animé nos travaux. Nous avons procédé à de nombreuses auditions communes, recevant un grand nombre d’acteurs de la filière : les entreprises et les industriels du secteur, les syndicats professionnels, les associations de protection de l’environnement, ainsi que les deux ministères compétents, le ministère de l’économie et celui de la transition écologique et solidaire. Malgré les délais très resserrés, je me réjouis d’avoir pu auditionner, avec Célia de Lavergne, plus d’une vingtaine d’acteurs et reçu de nombreuses contributions écrites. Cela m’a permis d’entendre les différents points de vue sur le texte. Je remercie enfin nos collègues des deux commissions qui ont participé à ces auditions et ont enrichi nos réflexions et de nos travaux – je salue à ce propos les commissaires des affaires économiques présents dans la salle. Ces échanges, été riches, m’ont permis d’identifier des points d’amélioration que je souhaite porter à votre connaissance et dont nous discuterons en examinant les amendements.

Permettez-moi tout d’abord de revenir sur le contexte dans lequel s’inscrit le projet de loi. Les dangers liés au changement climatique sont connus depuis de longues années et leurs effets se manifestent d’une façon de plus en plus prégnante. Avec le passage de l’ouragan Irma qui a ravagé les Caraïbes, l’actualité est là pour nous le rappeler. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est formel : cette évolution dramatique est une conséquence directe du réchauffement de la planète, qui est accéléré par l’augmentation de nos émissions de dioxyde de carbone.

Le secteur des énergies fossiles est particulièrement responsable de ces émissions. Le GIEC nous a indiqué en audition que l’on est capable de comptabiliser les émissions de CO2 produites par l’homme depuis les années 1870 : pour contenir le réchauffement climatique à deux degrés, l’ensemble des émissions cumulées ne devrait pas dépasser 2 900 milliards de tonnes de CO2 ; or l’humanité en a déjà émis 2 100 milliards de tonnes depuis 1870. Il nous reste donc un « crédit » de 800 milliards de tonnes à émettre à partir d’aujourd’hui, pour l’ensemble des générations à venir. L’extraction et l’utilisation des énergies fossiles sont fortement émettrices de dioxyde de carbone. Il faut agir immédiatement, tant que c’est encore possible. Nous devons dès à présent laisser 80 % des énergies fossiles dans le sous-sol, comme le prévoit l’Accord de Paris.

La France n’est pas restée sans réaction et n’a pas attendu la COP21 pour agir. La loi de transition énergétique a instauré dès 2015 des objectifs ambitieux et concrets, tels que la diminution de 30 % de la part des énergies fossiles dans notre « mix » énergétique à l’horizon 2030. S’agissant des hydrocarbures, la loi Jacob de 2011 a interdit la technique de la fracturation hydraulique, réalisant ainsi une avancée majeure en ce qui concerne l’exploitation des sols. Enfin, je veux citer l’excellent travail réalisé dans le cadre du rapport Tuot et de la proposition de loi Chanteguet lors de la précédente législature.

C’est dans cette continuité que s’inscrit ce projet de loi qui met fin à la recherche et à l’exploitation des hydrocarbures, conventionnels et non conventionnels, et porte diverses dispositions relatives à l’environnement.

Avec ce texte, nous décidons de mettre fin à la recherche et à la production d’énergies fossiles sur notre territoire à l’horizon 2040. La France envoie au monde un signal fort : nous devenons le premier pays à interdire l’exploitation d’hydrocarbures sur son territoire. Cette première étape, portant sur la production, s’inscrit dans une grande série de dispositifs qui interviendront dans les mois à venir, afin d’œuvrer à la diminution de notre consommation et à la production d’énergies nouvelles.

Je vais revenir rapidement sur les points essentiels du texte.

Les articles 1er, 2, 3 et 8 prévoient l’arrêt de la production d’hydrocarbures, avec d’une part l’interdiction d’accorder de nouveaux permis de recherches et de nouvelles concessions et, d’autre part, l’interdiction de prolonger les permis de recherches existants et les concessions au-delà de 2040.

Ce dispositif d’arrêt sera mis en œuvre de manière progressive, afin de donner aux acteurs de la filière une visibilité qui favorisera une transition douce pour les entreprises concernées. Les concessions actuellement valides ne sont pas abrogées et les détenteurs d’un permis exclusif de recherches pourront, en application du droit de suite, obtenir une première concession. Tout cela n’est pas remis en cause.

Par ailleurs, le texte prévoit une exception pour le gaz de mine, le grisou qui pourra continuer à être exploité sans limite. Cela répond à un impératif de sécurité car la remontée de ce gaz en surface est potentiellement dangereuse. Je crois qu’il y a un consensus total sur ce sujet.

Outre l’arrêt de la production des hydrocarbures, programmé à l’horizon 2040, le projet de loi abroge les dispositions de la loi du 13 juillet 2011 qui avaient laissé la porte ouverte à l’emploi de la technique de la fracturation hydraulique dans un contexte expérimental, même si ces dispositions n’avaient jamais été mises en œuvre.

Ensuite, le texte comporte une série d’articles portant diverses dispositions relatives à l’environnement et à l’énergie : l’article 4 concerne la réglementation applicable au stockage souterrain de gaz naturel, tandis que l’article 5 précise les compétences de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Du fait de leur objet, l’examen de ces articles a été délégué au fond à la commission des affaires économiques, qui les a examinés hier après-midi.

Les articles 6 et 7 sont relatifs à la transposition de directives européennes en matière environnementale. L’article 6 complète la transposition de la directive du 9 septembre 2015 relative aux biocarburants et au contrôle de leur durabilité ; l’article 7 transpose la directive du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques.

Outre une série d’amendements rédactionnels, je proposerai à la commission d’adopter plusieurs amendements de fond, portant en particulier sur les modalités d’interdiction progressive des hydrocarbures.

Je pense en particulier qu’il est important de préciser que la notion de « gaz de mine » ne recouvre que le « grisou » et ne concerne pas le gaz dit « de couche ». Il faudrait aussi améliorer la transparence et l’accès aux données publiques sur les concessions d’hydrocarbures, de même que l’encadrement du droit de suite, avec l’objectif qu’une première concession accordée de droit, après un permis de recherches, ne puisse pas excéder l’échéance de 2040. Nous en discuterons tout à l’heure.

L’urgence climatique est incontestablement là. Nous devons agir maintenant, afin de ne plus reporter les problèmes sur les générations futures. Nous défendons aujourd’hui un projet de loi ambitieux et responsable : ambitieux par sa portée symbolique, par son effet d’exemple et d’entraînement sur la scène internationale ; responsable parce qu’il laisse le temps aux entreprises du secteur et aux territoires de s’adapter à la transformation des filières.

Je voudrais conclure en rappelant les propos tenus par le Président de la République devant l’Assemblée générale des Nations unies, la semaine dernière : « Notre planète est en train de se venger de la folie des hommes et la nature ne négociera pas ». Les enjeux climatiques nous obligent. C’est notre devoir d’agir, d’agir maintenant (Applaudissements).

Mme Célia de Lavergne, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Je tiens avant tout à souligner la qualité de la collaboration entre la commission des affaires économiques et celle du développement durable sur ce projet de loi. J’en remercie les présidents des commissions et le rapporteur de la commission du développement durable.

La commission des affaires économiques s’est saisie pour avis du projet de loi et elle a eu à se prononcer au fond sur les articles 4 et 5. Lors de l’examen du texte, hier après-midi, seize amendements ont été adoptés : un après l’article 3, six sur l’article 4, cinq sur l’article 5 et quatre après l’article 5.

Je vais revenir plus particulièrement sur les articles 4 et 5, sur lesquels nous sommes saisis au fond.

L’article 4 autorise le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour prendre des dispositions concernant la sécurité d’approvisionnement en gaz naturel. Il s’agit de mettre en place une régulation pour les infrastructures de stockage souterrain de gaz.

Le stockage est indispensable à notre sécurité d’approvisionnement, comme le rapporte l’étude d’impact : durant la période hivernale, cela représente plus de 60 % de la demande française en gaz. Or le système actuel ne fonctionne pas et j’attire votre attention sur l’urgence d’adopter une telle réforme : l’hiver 2017-2018 a nécessité un arrêté transitoire, encore juridiquement instable, pour faire face à la demande. Les ordonnances devront être publiées au printemps afin d’assurer l’hiver 2018-2019, avec la constitution de réserves dès le mois d’avril prochain.

L’article 4 cadre l’habilitation donnée au Gouvernement pour prendre par ordonnance les dispositions nécessaires à la mise en place d’un nouveau système de stockage, régulé et similaire à celui qui a été créé en Italie, où il fonctionne correctement.

La commission des affaires économiques a adopté plusieurs amendements, dont un est relatif au délestage et vise à mieux protéger les particuliers en cas de coupure nécessaire de gaz ; un autre amendement contribue à préserver l’équilibre économique des opérateurs de stockage.

L’article 5 sécurise le dispositif du contrat unique. Les consommateurs d’électricité et de gaz naturel peuvent conclure avec leur fournisseur un contrat unique incluant la fourniture du service et l’accès au réseau de distribution. À l’origine, les contrats conclus entre les gestionnaires de réseaux de distribution (GRD) et les fournisseurs ne prévoyaient pas que les GRD rémunèrent le fournisseur pour ses prestations de gestion de clientèle : le fournisseur était rémunéré directement par le consommateur via la part « fourniture » de la facture. Il résulte de décisions de la cour d’appel de Paris et du Conseil d’État que les GRD doivent rémunérer spécifiquement les fournisseurs pour les prestations de gestion des clients en contrat unique réalisées pour leur compte.

L’article 5 confie à la Commission de régulation de l’énergie (CRE) la définition des montants et des niveaux de rémunération du fournisseur. Cela permettra d’assurer une concurrence non biaisée entre fournisseurs et d’encadrer leur rémunération, dans l’intérêt du consommateur d’énergie.

Un des amendements adoptés hier par la commission des affaires économiques vise à valider les conventions passées. Cela stabilisera leur cadre et empêchera certains fournisseurs de bénéficier d’un effet d’aubaine qui pourrait conduire à une augmentation significative de la facture pour les consommateurs.

Après l’article 5, notre commission a notamment adopté un amendement visant à résoudre un problème apparu lors des auditions. Depuis quelques années, un nouveau schéma de distribution de l’électricité s’est développé dans les immeubles de bureaux. Un compteur unique est installé pour tout l’immeuble et un réseau intérieur, n’appartenant pas au réseau public de distribution d’électricité, achemine l’électricité à tous les bureaux. Afin de légaliser les situations existantes et de permettre le développement de ce schéma de distribution de l’électricité dans les immeubles de bureaux, notre amendement définit la notion de réseaux intérieurs.

Nous avons également adopté un amendement déposé par le Gouvernement, et que le ministre vous présentera tout à l’heure, sur le raccordement des éoliennes en mer.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous en venons aux orateurs des groupes.

M. Matthieu Orphelin. Je voudrais saluer à mon tour l’excellent travail du rapporteur de notre commission, de la rapporteure pour avis et de l’ensemble des collègues de La République en Marche. Notre groupe a fait le choix de travailler de manière collégiale au sein du groupe, y compris avec nos collègues des autres commissions. Merci à toutes et à tous pour leur implication.

Ce texte, présenté par le ministre de la transition écologique et solidaire, nous apparaît comme plus que symbolique : c’est un vrai point de départ vers un nouveau modèle écologique, une vraie transformation ; c’est aussi un bon point d’équilibre, autour de la date de 2040, entre ceux qui voudraient que rien ne change, que l’on continue à exploiter les énergies fossiles sans entendre les alertes des scientifiques nous appelant à laisser 80 % des ressources fossiles dans les sols, et ceux qui s’imaginent pouvoir arrêter du jour au lendemain une dépendance de plusieurs siècles, sans prendre en compte la nécessité d’accompagner les acteurs dans cette transition.

Le texte a du sens, car il s’inscrit dans une trajectoire et une politique plus globales. Celles-ci se sont concrétisées dès le début du mandat actuel par un plan Climat ambitieux, qui comporte des mesures relatives à l’offre, mais aussi à la demande, afin de réduire notre consommation d’énergie et de développer les énergies renouvelables. Sans détailler l’ensemble de ces mesures, je veux simplement rappeler que le projet de loi s’inscrit dans cette globalité.

Ce texte s’inscrit enfin dans le respect de l’engagement souscrit par Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle, et repris pendant la campagne législative, d’arrêter la délivrance de nouveaux permis d’exploration. Nous concrétisons cet engagement dès le début de la législature, grâce au projet de loi.

Le groupe de la République en Marche souscrit aux objectifs fixés par le ministre, notamment avec les articles 1er à 3 qui permettront l’arrêt progressif de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels sur le territoire français. Rappelons que l’exploitation du gaz de schiste est prohibée depuis la loi du 13 juillet 2011 interdisant la technique de la fracturation, que le projet de loi vient compléter et enrichir.

Les amendements que nous allons défendre répondent à deux objectifs.

Le premier est d’assurer la généralisation effective de la fin de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures en France. Nous souhaitons avoir un échange avec le Gouvernement sur le meilleur moyen de réaffirmer l’interdiction de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels : c’est évidemment l’esprit de la loi, mais nous voudrions le faire apparaître de manière plus explicite tout en évitant les risques d’inconstitutionnalité. Afin de couvrir toutes les techniques, existantes ou futures, nous proposons une formulation qui permettrait d’être vraiment exhaustif et de lever toutes les ambiguïtés.

Comme le rapporteur, nous défendons l’idée qu’il ne peut y avoir d’exception pour le gaz de couche, mais seulement pour le gaz de mine dont exploitation doit être maintenue pour des raisons de sécurité.

Nous mettrons aussi en débat une avancée supplémentaire en proposant un encadrement intelligent du droit de suite, après la délivrance d’un permis exclusif de recherches (PER). Dans la version actuelle du texte, la durée d’une première concession n’est pas limitée : dans le cadre de PER aujourd’hui actifs, puis qui seraient prolongés, de premières concessions pourraient aller jusqu’en 2060, voire davantage. Nous défendrons un amendement limitant la durée des concessions délivrées dans le cadre du droit de suite afin qu’elles ne puissent excéder l’échéance de 2040.

Notre deuxième objectif est de mieux accompagner l’ensemble des acteurs dans la transition écologique. C’est la condition de la réussite. Nous devons notamment nous assurer que les entreprises concernées et les acteurs locaux se saisissent pleinement des questions de reconversion professionnelle des salariés. Nous avons ainsi déposé un amendement sur l’accompagnement des territoires.

Mme la présidente Barbara Pompili. Veuillez conclure, cher collègue.

M. Matthieu Orphelin. Nous poursuivrons la discussion durant l’examen de nos amendements. Les membres du groupe La République en Marche sont ravis de pouvoir travailler sur ce texte, qui constitue une première étape (Applaudissements).

Mme la présidente Barbara Pompili. Je n’ai pas été assez vigilante sur votre temps de parole, monsieur Orphelin… Je souhaite à notre collègue Julien Aubert, orateur du groupe Les Républicains, la bienvenue dans cette commission.

M. Julien Aubert. Merci, madame la présidente… J’espère que l’opposition aura le même temps de parole afin de respecter les équilibres politiques.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je veillerai à être équitable.

M. Julien Aubert. Monsieur le ministre d’État, la consommation totale de cannabis en France s’élève à 277 tonnes, pour une production nationale de 20 tonnes. Si vous arriviez à éradiquer cette dernière, vous ne feriez pas avancer d’un pouce la santé publique, compte tenu des importations. Si je commence par cet exemple, c’est qu’il y a dans ce projet de loi une confusion évidente entre la notion de consommation et celle d’importation. Il est ici question de 1 % de la consommation nette de produits pétroliers dans un pays représentant lui-même 1 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre…

Vous nous direz qu’il s’agit d’une extinction progressive et donc d’un symbole : nous le faisons pour le principe, pour le signal donné. Reste que l’on peut mourir pour des idées, mais qu’il vaut mieux le faire de mort lente, disait Brassens…

Nous considérons que ce texte est d’abord un non-sens environnemental : il ne provoquera aucune réduction de la consommation d’hydrocarbures dans ce pays et il n’y aura aucun impact en matière de CO2, du fait d’un mécanisme de substitution. Vous avez évoqué les ouragans ; l’argument est extrêmement pertinent sur le plan de la protection de la planète, mais il faut avoir conscience que ce texte n’aura strictement aucun rapport avec les ouragans qui frappent malheureusement certains territoires français comme Saint-Martin…

C’est aussi un non-sens commercial. Par définition, nous allons augmenter les importations de pétrole par substitution avec la production nationale et notre balance commerciale va s’en ressentir – modérément, certes, mais négativement.

C’est donc un non-sens économique : outre les 5 000 personnes travaillant directement dans cette filière, c’est surtout un très mauvais signal envoyé aux entreprises étrangères qui hésitent pour investir entre différents pays. Le seul pays au monde à annoncer qu’il ne parie pas sur l’avenir du secteur parapétrolier, c’est nous… Et cela concerne 1 000 entreprises et entre 60 000 et 65 000 emplois.

C’est également un non-sens industriel, parce que cela ne saurait constituer une politique industrielle. Vous fermez les centrales à charbon – point sur laquelle nous n’avons aucun désaccord, puisque nous l’avions nous-mêmes proposé sous la précédente législature –, mais sans donner sans aucune visibilité sur l’avenir filière nucléaire, et vous envoyez dans le même temps un signal négatif pour les investissements pétroliers… Tout cela montre que vous n’avez pas de solution ni de vision en matière industrielle, ni même, et c’est plus criminel, en matière de recherche.

Comme vous avez cité les engagements du Président de la République, je ne résiste pas à la tentation de vous rappeler les propos qu’il a tenus en juin 2016 lors d’une visite à Nancy : « Il y a une stratégie de souveraineté qui consiste à développer nos ressources. Il faut concilier l’économie, l’environnement et l’acceptabilité pour les populations. Notre priorité est de savoir ce que nous avons sous les pieds et de continuer la recherche. Il ne s’agit pas de rouvrir le sujet du gaz de schiste – interdit, rappelons-le, depuis que la loi Jacob a interdit la technique utilisée – mais il est nécessaire que nos chercheurs continuent à travailler ». On voit bien que les engagements du Président de la République ont pu varier : il fut un temps où il avait une vision différente de notre trajectoire pour les hydrocarbures et leur production dans ce pays…

Nous voulons vous alerter, en espérant infléchir la nature de ce texte : c’est en effet un symbole, mais un symbole parfaitement contre-productif en matière environnementale, économique, industrielle, commerciale, mais aussi budgétaire – car cela représente au passage 55 millions d’euros de recettes.

M. Bruno Duvergé. Au nom du groupe Modem et apparentés, je voudrais saluer la venue d’un texte législatif attendu, qui permet tout à la fois de tourner la page du passé et de tracer un chemin ambitieux pour l’avenir énergétique de notre pays.

Il tourne la page du passé, c’est d’abord en ce qu’il met un terme à dix années d’atermoiements et de dissensions plus ou moins feutrées sur la question des oléagineux schisteux, de leurs méthodes d’exploration et de leur exploitation. Nous sortons en effet de dix ans d’un feuilleton législatif enchaînant l’examen de différents textes, d’origines diverses, certes adoptés mais lacunaires. Votre projet de loi, monsieur le ministre d’État, clôt définitivement ce moment de confusion en proposant une sortie par le haut et ambitieuse pour notre pays, conforme à notre Charte de l’environnement et aux grandes décisions prises lors de la signature de l’Accord de Paris, à l’issue de la COP21. Ce texte permet à notre pays de se fixer des objectifs vertueux en matière de lutte contre la pollution par les hydrocarbures, tout en incitant les autres pays à nous suivre dans ce domaine.

À l’attention de ceux qui ont vu un frein à l’ambition du projet de loi dans l’avis rendu par le Conseil d’État, je rappelle ce que ce dernier y reconnaît que l’arrêt de la production nationale d’hydrocarbures trouve sa justification dans la poursuite de l’objectif plus global de limitation du réchauffement climatique, et estime qu’un intérêt général s’attache de ce fait à l’objectif poursuivi par le projet de loi.

Il s’agit d’inventer non seulement un nouveau modèle environnemental, mais aussi un nouveau modèle productif, avec de nouvelles méthodes industrielles et agricoles, employant de nouvelles ressources énergétiques. Les membres du groupe Modem et apparentés sont très attachés à ce que soit tenu à nos concitoyens un discours de clarté et de vérité proposant des mesures aussi pragmatiques que stratégiques.

C’est la raison pour laquelle nous vous soumettrons trois amendements, sur des sujets précis évoqués par le texte.

Le premier invite à se pencher urgemment sur l’impact qu’aura l’arrêt de la recherche sur les hydrocarbures classiques, domaine d’excellence dans notre pays. Nous souhaiterions qu’un rapport soit remis, après la promulgation de la loi, sur la promotion des énergies renouvelables, notamment la géothermie et les énergies à base d’hydrogène, dans la perspective de faciliter la réorientation de nos ingénieurs et de nos chercheurs vers ces secteurs.

Nous vous proposerons également un amendement concernant le manque à gagner fiscal pour les collectivités locales. Les redevances communales et départementales des mines, que le Gouvernement envisage d’augmenter, représentaient 14,2 millions d’euros en 2016. Il serait intéressant d’avoir une analyse sur ce sujet, ainsi que sur les autres formes d’indemnisation possibles.

Enfin, nous souhaiterions une réflexion sur la mise en place des contrats de transition écologique, tels qu’ils sont définis à l’axe 8 du plan Climat, au bénéfice des entreprises directement affectées par le projet de loi.

Le groupe Modem et apparentés n’émet pas de réserves sur ce texte, mais souhaite néanmoins obtenir certaines précisions dans la mesure où il marque un véritable changement de paradigme.

Au-delà, nous souhaiterions que notre pays soit pionnier sur des sujets qui en découlent naturellement, à commencer par la valorisation des circuits courts en matière énergétique. L’enjeu est de réaliser une vraie révolution industrielle et agricole en essayant de trouver des solutions qui valoriseront les productions d’énergie locales – produire par exemple de l’hydrogène avec les éoliennes de nos campagnes pour alimenter des tracteurs agricoles à pile à combustible ; il faudra aussi aider les populations à accepter leur nouvel environnement transformé par un nouveau « mix » énergétique. Les unités de méthanisation et les éoliennes seront mieux acceptées si les citoyens comprennent qu’ils en utilisent localement l’énergie.

M. Bertrand Pancher. Monsieur le ministre d’État, les membres du groupe Les Constructifs sont un peu gênés par ce projet de loi, mais nous espérons que vous allez lever un certain nombre de nos doutes, partagés du reste par bon nombre d’interlocuteurs que nous avons rencontrés.

Nous ne sommes pas opposés aux symboles, bien au contraire : il est important que la France donne le ton, qu’elle tire en avant l’Europe à travers sa politique et que l’Europe, à son tour, tire en avant le monde ; mais nous en avons soupé des symboles ces dernières années, notamment lors de la loi de transition énergétique, dont les objectifs apparaissent plus prophétiques que réels et tenables. Nous pensons qu’il est important de mettre en avant l’obligation de sortir d’une consommation énergétique qui produit toujours plus de gaz à effet de serre et nous ne sommes pas contre la fixation d’objectifs comme se propose votre projet de loi ; reste que nous nous posons tout de même certaines questions.

La première, et vous allez sans doute nous éclairer sur ce sujet, a trait à une des premières décisions du Gouvernement, qui autorisait l’extraction et la recherche d’hydrocarbures en Guyane. C’était un sujet de préoccupation pour les grandes organisations environnementales, notamment la fondation que vous avez présidée. Certains esprits mal placés pourraient penser que ce choix de ne plus autoriser la production d’hydrocarbures dans le territoire hexagonal, à très long terme, n’était qu’un gage donné en contrepartie de cette autorisation dans un domaine très sensible, en sanctionnant au passage des petites entreprises françaises qui font leur travail tout à fait proprement… Mais vous allez sûrement lever nos doutes sur ce sujet.

Deuxième observation, on attend depuis dix ans une grande réforme du code minier afin de régler toutes les questions, au-delà de l’extraction des seules matières fossiles. Pourriez-vous nous dire pourquoi une telle loi ne nous est pas présentée pour le moment ? Vous avez retenu un certain nombre d’éléments dans le présent texte, mais quand cette réforme absolument indispensable sera-t-elle adoptée ? Que ce soit par la concertation ou par le regard porté par l’administration, un contrôle général est indispensable sur l’ensemble de ces activités.

On a entendu un certain nombre de couacs et d’incompréhensions lors de la préparation de ce projet de loi, notamment dans la concertation avec les industriels et les collectivités locales. Le Gouvernement a d’ailleurs dû revoir sa copie, le Conseil d’État n’ayant pas jugé l’étude d’impact à la hauteur. Il ne faut pas confondre urgence et précipitation. Les incompréhensions ont été progressivement réglées, mais vous pourriez peut-être nous donner quelques indications sur les conditions de mise en place des travaux.

Reste la question de fond : la date de 2040. À supposer que l’on atteigne nos objectifs, très ambitieux, de réduction des émissions de gaz à effet de serre en 2050, il y aura toujours 20 % d’émissions. Dans un pays ne produisant que 1 % de sa consommation d’hydrocarbures, la critique est facile : on va continuer à importer, ce qui va nous coûter cher, avec un bilan environnemental pas terrible, et l’on va casser la dynamique de certaines entreprises. Elles sont certes petites, et crient donc moins que les grandes ; reste que le sujet prête à controverse. Je ne vous cache pas que nous aurions préféré, et nous avons déposé des amendements en ce sens, que l’on rende notre position plus cohérente avec une interdiction à l’horizon de 2050, ce qui correspond aux grands objectifs nationaux et européens.

Mme la présidente Barbara Pompili. Pour le groupe Nouvelle Gauche, je donne la parole à Delphine Batho, à qui je souhaite également la bienvenue dans cette commission.

Mme Delphine Batho. Merci de m’accueillir. Compte tenu de la tonalité de certaines interventions, je voudrais rappeler que si la France ne produit qu’1 % de sa consommation d’énergies fossiles, elle est le deuxième exportateur mondial en ce qui concerne les industries extractives d’énergies fossiles. Que notre nation décide pour elle-même d’arrêter l’exploitation et la recherche d’hydrocarbures, ce n’est pas rien.

Il est faux de dire que ce texte est symbolique ou cosmétique. Si c’était vrai, pourquoi les compagnies pétrolières engageraient-elles depuis des années une guérilla juridique contre les décisions de l’État quand un certain nombre de permis sont refusés ? Si c’était vrai, pourquoi aurait-on déféré devant le Conseil constitutionnel la loi interdisant la fracturation hydraulique ? Pourquoi y avait-il des pressions pour que les ministres signent des permis ? Pourquoi y a-t-il aujourd’hui un stock de décisions non rendues par l’administration sur toute une série de demandes de prolongation de permis ou de concessions ? Pourquoi avons-nous tous reçu une lettre de l’Union française des industries pétrolières (UFIP) décrivant la catastrophe mondiale que représenterait l’adoption de ce projet de loi ? Ce texte n’a pas seulement la vocation, importante, d’assurer la traduction de l’Accord de Paris ; il aura aussi un effet concret, conséquent et immédiat sur le stock de décisions en souffrance.

La précédente majorité entendait effectivement régler la question par une réforme du code minier, pensant qu’apporter des garanties sur le respect des procédures environnementales suffirait à régler le problème. Je veux saluer dans ce texte quelque chose de beaucoup plus clair : il annonce clairement que la France s’engage dans la sortie des énergies fossiles. C’est même une clarification par rapport au terme de « transition énergétique », qui décrit certes un état de transition, mais pas ce à quoi nous voulons aller : nous voulons arriver à la sortie des énergies fossiles. En écoutant M. Aubert, avec qui nous avons depuis des années des débats sur la politique énergétique, je pensais à sa propre cohérence : à chaque fois que nous parlons de réduire la part du nucléaire, il nous rappelle sans cesse que la priorité doit être donnée à la réduction et à la sortie des énergies fossiles…

S’il faut un groupe constructif dans ce débat, ce sera celui de la Nouvelle Gauche. Nous avons déposé un certain nombre d’amendements que nous jugeons importants. Nous proposons en particulier d’inscrire l’Accord de Paris et la neutralité carbone dans le code de l’énergie. Nous avons aussi déposé des amendements de cohérence : la logique du texte est de diminuer en même temps la consommation nationale d’hydrocarbures, sinon cela n’a pas de sens, et de ne pas promouvoir les industries extractives à l’exportation. D’autres amendements viseront à interdire les hydrocarbures non conventionnels, à faire en sorte que l’échéance de 2040 s’applique aussi à la délivrance des premières concessions et à assurer la transparence de l’ensemble des permis et des demandes en cours de traitement. S’agissant des contrats de transition, je voudrais insister sur la nécessité, dont nous avons débattu hier au sein de la commission des affaires économiques, que le Gouvernement présente de manière détaillée ce dispositif, dont l’impact économique et social n’est pas mineur pour les territoires et les salariés concernés. Il faut l’anticiper et le traiter pour répondre aux conséquences de ces mutations grâce à des stratégies industrielles offensives, qui permettront de créer des emplois et d’apporter des réponses aux inquiétudes – plusieurs de nos collègues y reviendront tout à l’heure.

M. Loïc Prud’homme. Monsieur le ministre d’État, vous avez voulu faire de ce projet de loi l’un des axes forts de votre Plan climat et surtout un exemple pour le reste du monde de ce modèle qu’il faut abandonner. Devant ces annonces, les écologistes, défenseurs de la règle verte et de la transition énergétique se sont évidemment emballés un court instant. Vous avez évoqué la nécessaire cohérence de votre action ; nous partageons votre souhait. Pour autant, hasard malheureux du calendrier, ce texte arrive en même temps que la mise en application du CETA, accord de libre-échange qui permettra au Canada d’inonder l’Union européenne du pétrole issu des sables bitumineux de l’Alberta. Ce pétrole, extrait dans des conditions environnementales catastrophiques, le rend infiniment plus polluant que le pétrole conventionnel. Comment justifiez-vous ce grand écart ? Un pas en avant, puis un pas en arrière, cela reste du surplace. Or, comme vous l’avez souligné, nous n’avons plus le temps pour cela.

Ce projet de loi est à l’image du sous-sol français auquel il s’intéresse : plein de trous. Au-delà de l’incohérence, ce sont toutes les mesures qui n’y figurent pas qui nous interpellent. Pourquoi, par exemple, ne pas avoir remis en cause le droit de suite qui permet à une entreprise bénéficiant d’un permis de recherche d’exploiter automatiquement le sous-sol au mépris des conséquences environnementales et sociales ? Ce fameux droit de suite empêche d’envisager la fin des permis miniers en France avant 2047.

Cette loi ne changera concrètement rien pour les Bretons, les Basques, les Lorrains ou les Guyanais qui se battent actuellement pour que les multinationales ne puissent pas transformer un simple permis de recherche en autorisation à ravager leur territoire, leur environnement et leur santé.

Pouvez-vous nous rassurer en nous faisant la promesse ferme d’abandonner les projets miniers des multinationales, notamment en Guyane où se prépare le plus grand projet d’extraction d’or jamais porté en France ?

Vous avez parlé de signal fort à propos de ce projet de loi. Mais à qui est envoyé ce signal ? En tout cas, pas aux multinationales pour qui le droit du commerce et la liberté d’entreprendre font toujours office de seules lois. L’arsenal juridique est ici si fort et contraignant qu’elles n’ont aucun mal à l’imposer aux citoyennes et citoyens qui ne peuvent opposer qu’un anecdotique droit de l’environnement qui leur garantit pourtant le droit à vivre dans un environnement sain. Aucune politique environnementale ne peut s’envisager sans remettre en cause cette dissymétrie entre un droit du commerce qui s’impose partout à tout le monde, sous peine de sanctions, et un droit environnemental mentionné sans cesse pour avis ou pour information.

Nous attendons un renversement des normes, nous attendons que le droit à vivre dans un environnement sain fixe un cadre en dehors duquel aucune dérogation n’est permise au nom du droit à poursuivre un quelconque business. Tout cela au nom du bon sens qui nous dicte de laisser les hydrocarbures de toutes sortes sous terre si nous voulons avoir la moindre chance de limiter le changement climatique à deux degrés avant qu’il ne soit définitivement trop tard. C’est cette logique qui a guidé notre travail ; c’est le sens des dix-huit amendements que nous avons déposés.

M. Hubert Wulfranc. Dès la précédente législature, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine avait adhéré à la perspective de réduction de 30 % de la consommation primaire d’énergies fossiles d’ici à 2030. Il y a là une continuité dans notre ligne de conduite qui, sur le principe, nous fait adhérer au cadre d’objectifs qui a été rappelé et présenté.

Nous serons plus pragmatiques sur le fait de juger qu’il s’agirait là d’un texte délimitant l’axe principal de votre ministère. Sur ce point : nous ne partageons pas ce point de vue. La production française de pétrole et de gaz couvre approximativement 1 % de la consommation française. L’incidence sur la consommation finale d’énergies fossiles est donc marginale et nous pensons que ce n’est pas le bon levier pour appréhender et apprécier l’objectif visé. Les plans de transition énergétique, et en particulier tout ce qui a trait à la rénovation thermique de l’habitat ou encore à la promotion des transports durables, seront jugés à cette aune. C’est dans ces domaines qu’il faut appuyer sur la pédale, si je puis dire.

Il en va de même en matière diplomatique, compte tenu des enjeux. Nous ne pensons pas qu’ils nous autorisent à pérorer demain outre mesure à l’international. En matière écologique, comme vient de le rappeler notre collègue du groupe La France insoumise, Loïc Prud’homme, ce texte n’interdit pas aux multinationales du secteur de continuer d’exploiter les plateformes offshore dans des conditions de sécurité insuffisantes, et il n’interdit pas à la France d’importer le pétrole de sables bitumineux et du gaz de schiste. Le CETA, cet accord de libre-échange dénoncé tout à l’heure, libéralise les exportations de pétrole en direction de notre pays, et de pétroles hautement polluants.

J’ai bien entendu le rapporteur et le porte-parole de la France insoumise souligner qu’un certain nombre d’amendements porteront tout à la fois sur la définition des hydrocarbures non conventionnels et sur le fameux droit de suite. Nous jugerons en l’état de ces amendements ; pour notre part, nous présenterons deux amendements relatifs à la définition des hydrocarbures non conventionnels. Enfin au cours de la discussion, mon collègue de Guyane, Gabriel Serville, interviendra sur la question spécifique du territoire guyanais.

M. le ministre d’État. Je ne répondrai pas maintenant à toutes vos questions, l’examen des amendements me donnera la possibilité de préciser notre position.

Comme je l’ai dit en introduction, ce texte n’est pas le tout d’un dispositif. Si, en 2040, nous devions augmenter nos importations pour compenser les 1 % dont nous allons nous priver, ce n’est évidemment pas ainsi qu’on réglerait la question du changement climatique puisque cela voudrait dire que notre objectif se limiterait à réduire seulement de 1 % notre consommation d’énergies fossiles. Aujourd’hui, nous agissons sur le périmètre sur lequel nous pouvons le faire. J’aimerais bien pouvoir accélérer la fin des permis et la prospection en dehors du territoire français, mais pour le moment mes prérogatives s’arrêtent à notre périmètre… M. Pancher a parlé des objectifs prophétiques de la loi relative à la transition énergétique. Pour ma part, la seule perspective prophétique que je vois c’est que si on ne trouve pas une solution, en 2040 ce sera chaud, à tous points de vue ! Si personne ne parvient à trouver des solutions pour apaiser les changements climatiques, vous aurez du mal à contenir aux frontières de l’Europe des centaines de milliers de personnes qui auront toute légitimité pour venir chercher abri chez nous. Mais je ne veux pas forcer le trait…

Oui, ce projet de loi est un axe sur lequel il va falloir greffer d’autres articulations. Mais si, dans le même temps, nous ne réalisons pas nos objectifs de réduction de la consommation d’énergie et de réduction de la consommation de nos énergies fossiles, et qu’à l’inverse nous augmentons constamment notre production, cela ne rime à rien. Il ne s’agit donc pas d’accroître nos importations de 1 %, puisque la réduction de 1 % de notre consommation n’est que le début de l’effort qui doit aller bien au-delà. Cela dit, si, dans le même temps, nous ne développons pas massivement nos énergies renouvelables, cela ne rime à rien non plus.

Vous pointez du doigt, à juste titre, certaines conséquences sociales ou économiques qui peuvent affecter un secteur dont je rappelle que 75 % de ses activités sont tournées à l’extérieur. Or on leur donne, me semble-t-il, une certaine prévisibilité pour se diversifier ou se préparer à ce changement. Plutôt que de pointer les effets immédiatement « négatifs » qui doivent être pris en compte parce qu’ils sont réels – mais ils sont presque insignifiants par rapport aux conséquences négatives des changements climatiques qui vont nous arriver sur la figure – je vous invite à en considérer l’aspect positif : celui d’un monde qui est en train de germer, celui de cette transition, transformation, révolution énergétique qui va créer des emplois et en déplacer. L’efficacité énergétique va nous donner des avantages compétitifs dans beaucoup de domaines. Je pense que cette injonction est aussi un instrument de sortie de crise parce que nos entreprises – vous le savez car je vous sais enracinés dans les territoires – couvrent tous les champs. Si nous échouons sur un des piliers, effectivement tout cela ne servira à rien. Madame Batho, vous avez raison, cette interdiction chez nous est un symbole, mais c’est bien plus qu’un symbole.

L’hypothèse de réformer le code minier en même temps que de vous soumettre le présent texte nous a traversé l’esprit. Mais, et vous êtes suffisamment expérimentés pour savoir à quelle masse on s’attaque, la sagesse nous a plutôt convaincus d’attendre 2018 pour le faire. J’ai considéré qu’il était urgent de vous présenter ce premier projet de loi, mais ce n’est pas au détriment de la réforme du code minier : c’est l’un avant l’autre.

On a essayé, avec ce projet de loi, de trouver un bon équilibre pour limiter autant que faire se peut les risques d’inconstitutionnalité. Certains d’entre vous ont déploré qu’il ne remette pas en cause le droit de suite. Oui, cela m’ennuie aussi, mais nous essayons justement de protéger le présent texte et les lois antérieures, sinon cela affaiblit votre propre fonction. Vous avez parlé de la Guyane maritime. À supposer que des gisements y soient découverts, j’espère que cela ne nous amènera pas au-delà de 2040, mais je ne peux pas le garantir. Une remise en cause de ce projet entraînerait un contentieux qui nous aurait probablement exposés à des frais considérables – et il en est de ce domaine comme de beaucoup d’autres. Je découvre dans mon ministère des choses qui, si je m’y oppose, aboutiront à une écotaxe multipliée par je ne sais combien… Je le répète, ce projet de loi a au moins le mérite de clarifier un certain nombre de situations, mais j’hérite de droits acquis dont certains comportent des droits de suite. Cela dit, la discussion est encore ouverte sur ce point.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous en venons aux questions. Je rappelle qu’elles ne doivent pas dépasser une minute.

M. Christophe Arend. Monsieur le ministre d’État, en Lorraine se pose la question de l’exploitation du gaz de houille. La Française de l’énergie entend capter le méthane contenu dans les bennes de charbon non exploité et le commercialiser localement. Ce gaz pourrait aussi alimenter une centrale thermique fonctionnant actuellement avec du charbon importé en y pérennisant l’emploi. L’extraction à un prix compétitif permettrait de revitaliser l’ancien bassin houiller lourdement touché par la fin de l’exploitation minière. Actuellement, l’entreprise a engagé 50 millions d’euros avec une participation non négligeable de la région Grand Est. Le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) affirme que ce gaz pourrait être extrait sans recourir à la fracturation hydraulique. Les opposants à ce projet estiment que l’exploration et l’exploitation sont invasives et délétères pour l’environnement. L’APEL57, l’Association pour la préservation de l’environnement local 57, considère que malgré dix années de recherche aucun résultat probant n’a été atteint. Quelle est la position du Gouvernement sur l’avenir de l’exploitation du gaz de houille en Moselle-est ?

M. Fabrice Brun. Monsieur le ministre d’État, en tant qu’ardent combattant contre le gaz de schiste, je vois dans ce projet de loi l’opportunité de tordre définitivement le cou aux hydrocarbures non conventionnels dans notre pays. Les amendements que j’ai déposés sur ce texte visent à obtenir le maximum de garanties en ce sens.

Ma question porte sur l’article L. 111-8 qui crée une exception pour la prolongation de permis exclusifs de recherche en cours de validité. Combien de permis visant à explorer ou exploiter des hydrocarbures non conventionnels sont encore valides juridiquement à ce jour dans notre pays ? En d’autres termes, les droits acquis et donc les droits de suite dont vous héritez concernent-ils les hydrocarbures non conventionnels ?

M. Bruno Millienne. Monsieur le ministre d’État, nous nous réjouissons de vous voir aujourd’hui en pleine forme.

Je partage les propos de mon collègue du groupe du Mouvement Démocrate et apparentés, Bruno Duvergé, et je voudrais anticiper quelque peu la suite des événements. J’ai noté que vous n’aviez pas fait le choix d’introduire dans le projet de loi un volet sur l’exploitation du charbon, actuellement deuxième ressource énergétique de l’humanité derrière le pétrole, ainsi que sur les autres énergies fossiles. Quelle est votre feuille de route sur ce sujet, notamment dans votre plan climat à venir ?

La question de l’hydrogène comme énergie alternative est également absente de ce texte. Il semble aujourd’hui que le transport de l’hydrogène par gazoduc soit possible et qu’il soit à ce jour le moyen le plus adapté. La possibilité d’utiliser le gaz naturel pour transporter l’hydrogène a déjà été expérimentée. Certes, le tout hydrogène est évidemment encore loin, mais quel est votre avis sur cette solution transitoire ?

M. Serge Letchimy. Monsieur le ministre d’État, je partage bien sûr votre vision qui se situe dans la foulée de l’Accord de Paris. Dans cette salle, je suis certainement le seul, avec mon collègue de la Guyane qui a vécu un autre type de catastrophe, à avoir connu un changement terrible en ce qui concerne les cyclones et les ouragans. Nous sommes passés en effet de vents atteignant au maximum 230 kilomètres-heure à des vents allant jusqu’à 360 kilomètres-heure. À cette vitesse, c’est une véritable bombe, capable de faire exploser des maisons en béton. Il ne faut pas négliger le fait que le changement climatique pourrait avoir des conséquences à la fois sur la récurrence et surtout la puissance de ces ouragans. À ce titre, et je le dis très clairement, je considère que le « piège pétrole » dans lequel nous vivons depuis des décennies nous a enfermés dans une logique mortifère qu’il faut absolument réviser.

Je salue votre vision des choses. Certains peuvent croire que c’est une utopie. Mais une utopie refondatrice, pour reprendre la formule d’Aimé Césaire…

Sachant que nos territoires d’outre-mer sont très exposés, qu’ils représentent 80 % de la biodiversité et un espace maritime immense, avez-vous prévu dans vos futurs plans un programme spécifique pour l’outre-mer, à la fois pour reconstituer la résilience vis-à-vis du changement climatique, maîtriser la consommation d’énergie et accélérer le processus de mutation énergétique ?

Mme Bérangère Abba. Les mesures d’accompagnement à la réduction de la consommation d’hydrocarbures ont de réelles conséquences sur la mobilité et la précarité énergétique en milieu rural, où les transports en commun sont peu développés. La question de la précarité énergétique appelle des évolutions au niveau de l’habitat. Au-delà des contrats de transition énergétique, peut-on compter sur un soutien des expérimentations dans le domaine de l’auto-éco-rénovation et les communes peuvent-elles espérer un soutien à l’ingénierie en ce qui concerne le manque de données que l’on peut avoir en milieu rural ?

M. Gabriel Serville. Madame la présidente, mon intervention durera plus d’une minute, dans la mesure où j’attends ce moment depuis le mois de juillet dernier.

Monsieur le ministre d’État, les perspectives d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures en Guyane avaient soulevé de réels espoirs au sein de la population locale. Vous comprendrez donc à quel point l’annonce de l’interdiction d’ici à 2040 des hydrocarbures a pu s’apparenter à un coup de massue pour les décideurs économiques et politiques de la Guyane.

Sans remettre en question la nécessité d’interroger nos pratiques de consommation, en vue de mieux asseoir la transition énergétique, permettez-moi de vous dire mon étonnement face au peu de considération manifestée à l’égard des élus de la Guyane. Vous venez de nous dire qu’il ne faut pas qu’un projet parte de Paris sans concertation. La démarche est d’autant plus regrettable que la région Guyane puis la collectivité territoriale de Guyane (CTG) qui l’a remplacée disposait depuis la loi d’orientation pour l’outre-mer (LOOM) de la compétence normative en matière minière, en vertu des lois organiques qui régissent son statut. À ce sujet, le conseil d’État considère que : « Sans être inexacte, l’analyse de l’applicabilité du projet de loi outre-mer demeure incomplète et insuffisamment précise. »

Monsieur le ministre d’État, votre décision de refermer les perspectives guyanaises au moment même où les pays voisins, Suriname, Brésil et Guyana, se lancent dans de grandes entreprises d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures offshore est de nature à susciter une profonde méfiance, voire de la défiance entre la Guyane et notre Gouvernement. L’inquiétude qui émane de la base est d’autant plus remarquable que notre région ne tire aucun bénéfice de la taxe carbone alors qu’elle fait partie du poumon vert de la planète. Je ne suis pas en train de devenir un climatosceptique, mais j’attends vos éclairages sur ces questions.

Mme la présidente Barbara Pompili. J’ai fait une exception pour nos collègues d’outre-mer en les laissant parler un peu plus, mais je n’en ferai pas pour les autres !

M. Gabriel Serville. Je vous remercie, madame la présidente !

M. David Lorion. Madame la présidente, c’est un autre élu d’outre-mer qui va intervenir maintenant. (Sourires.) Je précise que Mme Nathalie Bassire, députée de La Réunion s’associe à ma question.

Monsieur le ministre d’État, vous le savez, depuis 2008, des campagnes de recherche en prospection sismique pour localiser les meilleurs prospects potentiels sont menées au large de Juan de Nova, une île située dans le canal du Mozambique et qui fait partie des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). Les sociétés South Atlantic Petroleum et Marex Petroleum disposent d’un permis d’exploitation valable jusqu’au 31 décembre 2018. Vous connaissez peut-être mieux que personne l’intérêt pour la France de ces îles, leur biodiversité et leur beauté. Ces joyaux environnementaux sont aussi très fortement contestés par les grands pays alentour, Madagascar, Comores, Île Maurice. Pour éviter de perdre totalement la propriété de ces îles et empêcher de les polluer par une exploitation de gaz ou de pétrole, je demande que soit inscrit dans le projet de loi le nombre des autorisations de prospection ou d’interdire toute délivrance de permis pour l’exploitation des ressources des hydrocarbures dès le 31 décembre 2017, ce qui aura pour conséquence d’avoir comme point de repère le 1er janvier 2018 pour que les permis ne soient pas délivrés. À défaut, je demande, comme vous l’avez fait pour la Méditerranée en 2016, étendue à la façade atlantique de la métropole en 2017, une extension du moratoire aux façades des îles des TAAF qui constituent, comme vous le savez, des réserves de biodiversité d’un grand intérêt pour la France.

Mme Yolaine de Courson. Le développement de la biomasse peut constituer une source de revenus complémentaires pour les éleveurs et les agriculteurs, que ce soit pour la méthanisation, les biocarburants puisque certaines cultures sont mobilisées pour la fabrication de l’éthanol, le biodiesel, ou encore le bois qui reste globalement sous-valorisé en France malgré un fort potentiel.

Au-delà de ces compléments de revenus, ces biomasses sont également source d’énergie renouvelable et elles représentent une création de richesse et d’emplois dans les territoires ruraux. Aujourd’hui les acteurs sont confrontés à une triple difficulté : une crise agricole qui freine la capacité d’investissement, une difficulté de montage des projets et un problème de rentabilité. Alors qu’une sortie du diesel est planifiée, qu’en Côte-d’Or comme dans nombre de départements et dans les zones intermédiaires en général, le colza représente une source de revenus importante pour les agriculteurs, quelles dispositions pourraient être prises pour encourager une meilleure rentabilité de ces méthodes, et quelles mesures spécifiques sont prévues pour le développement de ces filières – je pense notamment à la filière bois ? Plus généralement quelle place est prévue pour les biomasses dans le futur mix énergétique ?

M. Jean-Marie Sermier. Monsieur le ministre d’État, vous n’avez pas dissipé nos doutes sur l’objectif réel de votre texte. Vous avez évoqué de grands enjeux, de grandes orientations environnementales, le respect des accords internationaux, les grandes catastrophes climatiques, les grandes migrations potentielles, mais nous sommes déçus de constater que votre texte de loi ne changera finalement rien, sinon le symbole, ce qui aurait largement pu, vous l’avez vous-même admis, attendre 2018. Pourquoi avez-vous choisi de légiférer sur ce texte plutôt que sur quelque chose d’encourageant comme l’hydrogène ? Le carburant hydrogène est devenu, vous le savez, une solution alternative crédible pour nos véhicules, alors que la législation française ne permet pas de le valoriser comme nous le souhaiterions. Pourquoi ce texte ?

M. Paul-André Colombani. C’est encore un député d’outre-mer qui prend la parole mais cette fois-ci de Corse (Sourires).

Au début de l’année 2017, à Ajaccio, se sont tenues les assises de la biodiversité. Une motion a été transmise demandant l’arrêt de la prospection pétrolière en Méditerranée. Au cours de cet appel d’Ajaccio, auquel a participé votre prédécesseur, Mme Royal, le président du conseil exécutif de la Corse a demandé l’arrêt de l’exploitation des hydrocarbures en Méditerranée. Quelles mesures de coopération internationale comptez-vous mettre en œuvre en Méditerranée dans le sillage de ce projet de loi, afin de lui donner toute son effectivité ?

M. Jean-Luc Fugit. Monsieur le ministre d’État, je me réjouis de ce projet de loi, premier signal fort envoyé, un signal cohérent avec les objectifs du Plan climat que vous avez annoncé en juillet dernier. Quelle est votre vision sur « l’accompagnement » des communes, souvent de petite taille, touchées par l’arrêt progressif de l’exploitation des hydrocarbures ? Il y aura un manque à gagner fiscal pour ces communes. Quelles pistes envisagez-vous pour répondre à leur inquiétude ?

Quelle sera l’étape majeure suivante du Plan climat, et surtout comment comptez-vous associer les autres ministères à son déploiement ?

M. Vincent Descoeur. Monsieur le ministre d’État, la fin de l’octroi des nouveaux permis de recherche et l’interruption de l’exploitation à l’horizon 2040 auront immanquablement des incidences économiques, et par voie de conséquence un coût pour l’État. Pouvez-vous nous indiquer si une première évaluation chiffrée a été réalisée ?

M. le ministre d’État. Pourquoi ce texte ? Dois-je refaire mon discours d’introduction ? S’il ne vous a pas convaincu en quelques minutes, monsieur Sermier, il ne le fera pas en quelques secondes. Mais la discussion ne s’arrête pas là. Oui, j’ai dit que c’était un symbole, mais je n’ai pas dit que ce n’était que cela. J’ai expliqué qu’il s’inscrivait dans une stratégie plus large, déjà mise en œuvre par la loi relative à la transition énergétique, loi ambitieuse que j’évaluerai dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie. Du reste, nombre de questions qui me sont posées ici trouveront leur réponse dans cette clarification que la programmation pluriannuelle de l’énergie va nous permettre de faire.

La loi relative à la transition énergétique a fixé des objectifs que vous avez qualifiés de prophétiques. Ce qui m’importe maintenant, c’est de voir la réalisation de ces objectifs et les modalités pour y parvenir avec cette philosophie qu’il vaut peut-être mieux être un tout petit peu plus souple dans le temps mais au moins se fixer des objectifs atteignables. Mais, comme je l’ai dit tout à l’heure, lorsque l’on fixe des objectifs qui peuvent paraître ambitieux, cela crée une forme de pression et une synergie qui nous semblait inatteignable. Ne dit-on pas que c’est parce que nous ne savions pas que les choses étaient impossibles que nous avons pu les réaliser ?

Cela fait assez mal, monsieur Serville, d’entendre que parmi les objectifs ou les préoccupations qui sont les nôtres nous ferions peu de cas de la situation de la Guyane… J’ai d’autant de mal à l’entendre compte tenu des événements récents que vient de subir cette région du monde. Je sais bien que ces préoccupations n’ont peut-être pas les mêmes échelles de temps, mais on sait bien que les aléas climatiques vont frapper ces régions du monde. Les préoccupations ne se confrontent donc pas, elles ne s’opposent pas : elles s’additionnent.

Il ne vous a pas échappé que j’ai signé la prolongation du permis d’exploration en Guyane maritime et dans le même temps, ce que n’avaient pas fait les gouvernements précédents, le transfert de compétences dans ces domaines à la Guyane. L’enjeu climatique n’épargne aucun territoire, même s’il en expose davantage certains dans un premier temps. Mais à terme, personne ne sera épargné – les événements récents en Floride nous le rappellent.

Vous évoquez, monsieur Lorion, un permis d’exploration autour de Juan de Nova, dans les terres australes françaises de l’océan Indien. Il se termine à la fin 2018, et la société titulaire est en droit de demander une prolongation. Mais cette prolongation ne lui sera pas donnée parce que la société n’a pas tenu un certain nombre d’engagements. Nous traiterons cela dans le respect du droit, en toute équité, mais a priori, nous ne devrions pas avoir à payer d’indemnités.

Toutes ces préoccupations seront traitées dans le cadre des assises de l’outre-mer, et nous y travaillerons avec Mme Girardin et l’ensemble du Gouvernement.

Ce que nous a dit M. Prud’homme à propos du CETA ne me réjouit pas plus que lui. Effectivement, j’ai fait partie de ceux qui avaient demandé que l’on regarde si, dans le détail, il était bien cohérent, non seulement avec nos engagements climatiques, mais aussi avec les efforts que font l’Europe et la France en matière de normes sanitaires et environnementales. Une Commission d’experts indépendants a identifié un certain nombre de risques ; le Gouvernement, dont je suis solidaire, a pris sa décision. Nous allons mettre ce traité sous surveillance, regarder si nous pouvons œuvrer à une directive européenne permettant d’acter la différenciation en fonction des types de carburants qui arriveraient. Mais si nous parlons de cohérence, nous devrons être beaucoup plus vigilants à l’avenir.

Le gaz de houille est concerné par la loi, et ne fera l’objet d’aucune exception. Il faut bien le distinguer du gaz de mine ; pour être franc, je faisais la confusion il y a encore très peu. L’exploration et l’exploitation du gaz de houille entreront bien dans le champ de la loi.

Nous allons évidemment proposer de supprimer également les permis portant sur le charbon. Tout ceci s’inscrit dans le dispositif prévoyant la fin des centrales à charbon annoncé au moment du plan climat. Il m’a été demandé combien de permis étaient en cours pour exploiter des hydrocarbures non conventionnels ; la réponse est : aucun. Tous les permis qui avaient été délivrés ont été abrogés après la loi du 13 juillet 2011.

Un certain nombre de vos questions, liées à notre politique et notre stratégie énergétiques, seront clarifiées dans la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), notamment à propos de la biomasse. Il est évident que la biomasse prendra une part importante dans notre stratégie énergétique, que cela soit sous la forme de biocarburant, de bois ou de biométhanisation. Au passage, nous sommes en train de mettre en place un dispositif qui permettra de baisser considérablement le coût de raccordement des agriculteurs pour la méthanisation ou les énergies renouvelables.

Madame Batho, l’objet des contrats de transition écologique et solidaire est effectivement d’accompagner des entreprises et des territoires, mais aussi les citoyens qui seront concernés.

Des amendements ont été déposés pour rétablir dans le texte une définition des hydrocarbures non conventionnels. Nous l’en avions retirée par précaution constitutionnelle, mais il y aurait peut-être un moyen de préciser les choses, et il en va de même pour la fameuse date de 2040.

La commission passe à l’examen des articles du projet de loi.

 

 


—  1  —

II.   examen des aRTICLES

Avant l’article premier

La commission examine l’amendement CD170 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Nous proposons de compléter le projet de loi avec un chapitre liminaire intitulé : « Mise en œuvre de l’Accord de Paris sur le climat et neutralité carbone ». Les amendements suivants détailleront les dispositions contenues dans ce chapitre. À ce jour, le titre liminaire du livre premier du code de l’énergie ne mentionne ni l’accord de Paris, ni la neutralité carbone, objectif central du plan climat présenté par le Gouvernement.

D’autre part, l’avis du Conseil d’État a réécrit le texte, mais en laissant subsister dans un petit paragraphe la mention d’un risque juridique sur les concessions. Pour renforcer la date de 2040 comme échéance à toutes les concessions, inscrire dans le corps de la loi la référence à l’Accord de Paris et aux objectifs de la nation liés à cet engagement international – et non dans le seul exposé des motifs – sera de nature à conforter la solidité juridique du texte, puisque cela permet d’y inscrire un motif d’intérêt général suffisant et proportionné, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

M. le ministre d’État. Nous en avons discuté hier en commission des affaires économiques, le Gouvernement a bien compris la portée de la demande. Je pense préférable et plus fort symboliquement de modifier le titre actuel du chapitre premier en le complétant avec la formule suivante : « en application de l’Accord de Paris et de l’objectif de neutralité carbone en 2050. » De ce fait, je m’en remets aujourd’hui à la sagesse de l’Assemblée.

M. le rapporteur. Cet amendement soulève une problématique de définition du concept de neutralité carbone, et la nécessité d’améliorer la précision des stratégies à mettre en œuvre pour atteindre la neutralité carbone. C’est pour cela que je vous propose de retirer votre amendement et de le retravailler en vue de la séance publique.

Mme Delphine Batho. J’accueille positivement cette bienveillance du Gouvernement et du rapporteur, mais je ne lâcherai pas cette idée d’ici à la séance publique. Le titre du chapitre est important – pas seulement symboliquement – ainsi que les dispositions qui y figureront. À ce stade, je suis d’accord pour retirer cet amendement.

L’amendement est retiré.

La commission en vient à l’amendement CD72 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Cet amendement inscrit dans le code de l’énergie la référence explicite à l’Accord de Paris sur le climat et définit la neutralité carbone.

J’ai consulté un certain nombre de climatologues sur la définition de la neutralité carbone, et j’en tire la conclusion qu’il est très important que la France en donne une définition : la neutralité carbone figure implicitement dans l’article 4 de l’Accord de Paris ; il me paraît important de préciser que, par neutralité carbone, nous entendons toutes les émissions de gaz à effet de serre en équivalent carbone. Je me suis essayée à la rédaction d’une définition qui complète les objectifs mentionnés actuellement dans l’article L. 100‑4 du code de l’énergie, sans s’y substituer.

Cet amendement a donc deux objets : l’Accord de Paris d’une part, et la neutralité carbone de l’autre.

M. le ministre d’État. Je m’associe évidemment à ce souhait de précision, et je partage votre ambition sur la neutralité carbone. La preuve en est que l’engagement a bien été décliné dans le discours de politique générale du Premier ministre. Mais à ce stade, il ne semble pas opportun d’ouvrir un grand débat sur la formulation de ces objectifs, vu le temps que cela avait pris lors du débat parlementaire sur la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Je vous invite à retirer votre amendement.

M. le rapporteur. Cet amendement concerne davantage la mise en œuvre de la stratégie bas carbone ; le texte sur les hydrocarbures n’est pas forcément le bon véhicule pour traiter de ce sujet. La question mériterait d’être traitée d’une façon à la fois plus large et plus précise. Je vous propose de retirer cet amendement.

Mme Delphine Batho. Dans le cadre du plan climat, le Gouvernement a annoncé qu’il allait réviser la stratégie bas carbone et la PPE. Mais les objectifs qui avaient été inscrits dans le code de l’énergie par la loi pour la transition énergétique, sans être remplacés, ont été complétés. Si l’on se fixe pour objectif la sortie des énergies fossiles, il serait cohérent de ne pas renvoyer ce progrès à des documents de nature réglementaire, mais que le législateur le grave dans le marbre du code de l’énergie.

Ce débat pourrait se prolonger en séance publique, je présenterai peut-être deux amendements distincts, l’un sur l’Accord de Paris et l’autre sur la neutralité carbone. Au regard des discussions que j’ai menées avec les climatologues, la définition et le terme même de neutralité carbone sont en débat. La neutralité ne suffit pas, nous ne devons pas nous contenter d’une logique de stabilisation de l’effet de serre, mais nous devons le réduire. La neutralité carbone prête à de nombreuses interprétations ; il serait important que la France, à un titre ou un autre, propose une définition pour couper court à tout risque d’interprétation biaisée...

Mme la présidente Barbara Pompili. Cela me semble certainement une piste de réflexion intéressante.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement CD71 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Il s’agit d’être cohérent avec l’objectif de mettre fin à la recherche et l’exploitation d’hydrocarbures en 2040. Actuellement, parmi les objectifs de la nation, il existe un objectif de réduction d’énergie primaire d’origine fossile pour 2030, mais pas pour 2040. Comme je l’ai dit hier en commission des affaires économiques, je suis prête à discuter du niveau de réduction – fixé à 100 % dans l’amendement – mais si nous nous inscrivons dans une logique d’arrêt de la production nationale, il me semble cohérent de réduire autant que possible les importations, et donc la consommation.

M. le ministre d’État. Nous souscrivons pleinement à cet objectif de réduction rapide de la consommation d’énergies fossiles, sans quoi cette loi n’aurait pas de portée. Mais la loi pour la transition énergétique et la croissance verte a fixé un objectif précis à l’horizon de 2030, tandis que le Plan climat a une autre ambition majeure : la neutralité carbone à l’horizon 2050. Plutôt que de fixer un nouvel objectif de consommation à l’horizon 2040, le Gouvernement préfère lancer des actions concrètes pour accompagner cette transition et réduire autant que faire se peut le recours aux énergies fossiles : électrification des usages, primes pour le remplacement d’équipements anciens, efficacité énergétique.

Par ailleurs, d’ici à la fin de 2018, les révisions de la stratégie nationale bas carbone – qui permettra peut-être de définir plus précisément la notion de neutralité carbone – et de la programmation pluriannuelle de l’énergie apporteront des éléments au-delà de l’échéance de 2030, par exemple sur le chemin vers la neutralité carbone. Cela éclairera le Gouvernement et le Parlement sur d’éventuelles révisions de nos objectifs, en particulier après 2030. Nous vous invitons donc à retirer cet amendement.

M. le rapporteur. Je souscris à l’approche volontariste de réduction des consommations, mais il serait illusoire de croire qu’il ne restera pas d’utilisations résiduelles d’énergies fossiles d’ici à 2040. Cela me semble une perspective intenable, ne serait-ce que pour des raisons liées à la défense nationale. Même dans un monde sans voitures, les questions de l’approvisionnement des armées pour le carburant ou pour d’autres utilisations continueraient de se poser. Avis défavorable.

Mme Mathilde Panot. Je profite de cette discussion pour défendre l’amendement CD60, qui porte aussi sur la consommation. Nous n’y avons pas inscrit un objectif de réduction de 100 % afin de prendre en compte les utilisations résiduelles, mais une réduction de 90 %. Dans une loi qui ne prend pas en compte la baisse de la consommation.

Mme Delphine Batho. Le rejet de ces amendements signifie qu’au cours de cette législature, un autre rendez-vous législatif sera nécessaire pour modifier la rédaction actuelle du code de l’énergie, afin que la stratégie du bas carbone et la PPE soient cohérentes avec les objectifs de ce projet de loi.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD60 de Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. Il vient d’être défendu.

M. le ministre d’État. Même avis que pour l’amendement précédent, pour les mêmes raisons.

M. le rapporteur. Avis défavorable, pour les mêmes raisons.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD74 de Mme Delphine Batho.

M. Hervé Saulignac. Cet amendement a pour objet de sécuriser les vingt-deux ans qui nous séparent de l’échéance de 2040, qui doit sembler très éloignée pour certains. Ces années suscitent des préoccupations fortes, et cet amendement tend à inscrire dans la loi que recherche et exploitation s’exercent en absolue conformité avec les principes généraux du droit de l’environnement inscrits dans la charte constitutionnelle de l’environnement et le code de l’environnement.

M. le ministre d’État. Toutes les activités doivent s’exercer dans le respect des principes constitutionnels, en particulier dans le respect de la charte de l’environnement, sans qu’il soit nécessaire de le mentionner. A contrario, le spécifier pourrait laisser penser que ce respect est facultatif lorsqu’il n’est pas explicitement mentionné. Par ailleurs, cette proposition dépasse le cadre du présent projet de loi consacré aux hydrocarbures et anticipe la réforme du code minier que nous avons évoquée. Je vous invite à retirer cet amendement.

M. le rapporteur. La rédaction de cet amendement pose une série de problèmes juridiques qui me poussent à demander son retrait. Par exemple, une grande partie de l’article L. 110-1-1 du code de l’environnement porte sur les industries qui utilisent des matières premières et sur les consommateurs, et l’article L 110-1-2 concerne la consommation plutôt que l’extraction.

Enfin, votre amendement fait référence à la charte de l’environnement, qui a valeur constitutionnelle. Or le code minier prévoit que les activités minières s’exercent dans le cadre des règles qu’il fixe et la loi doit elle-même respecter la Constitution. Je vous propose de retirer cet amendement.

Mme Delphine Batho. Un avis du Conseil d’État de 2010 conseillait au gouvernement de l’époque, à propos du gaz de schiste, de procéder de manière urgente à la réforme du code minier, car il n’est pas conforme à la charte de l’environnement. Le code minier actuel n’est donc pas conforme à la charte de l’environnement.

Nous reconnaissons bien volontiers les remarques du rapporteur, et nous allons retirer cet amendement pour le retravailler en vue de la séance publique, mais il y a quand même un sens à prévoir qu’en attendant la réforme du code minier, tout ce qui se fait doit l’être dans le respect de la charte de l’environnement, notamment pour les concessions en cours et l’ensemble des activités minières. On peut penser qu’il est tautologique de spécifier qu’une loi doit respecter la Constitution ; mais le code minier, pour ne prendre que cet exemple, ne respecte pas le principe de participation des citoyens aux décisions ayant un impact sur l’environnement.

L’amendement est retiré.

La commission examine ensuite l’amendement CD73 de Mme Delphine Batho.

M. Christophe Bouillon. Le présent projet de loi tend à modifier certaines dispositions de la partie législative du code minier, or cette partie législative procède actuellement d’une ordonnance non ratifiée. Il semble préférable de ratifier cette ordonnance du 20 janvier 2011 portant codification de la partie législative, afin que l’ensemble de cette partie ait une valeur juridique identique.

M. le ministre d’État. Vous avez raison, cet amendement ratifiant l’ordonnance de 2011 permettrait de mettre un terme à l’ambiguïté qui subsiste sur le statut des articles du code minier, eux-mêmes issus de la recodification portée par l’ordonnance de 2011 dont le caractère légal peut parfois encore être questionné, une ordonnance non ratifiée n’ayant qu’un caractère réglementaire.

Toutefois, cette ordonnance de 2011 requiert un important travail de toilettage compte tenu des évolutions intervenues entre-temps, la ratifier brutalement risquerait de remettre en cause les dispositions adoptées ultérieurement. Ce travail a vocation à être fait dans le cadre de la réforme du code minier que le Gouvernement souhaite mener. Nous vous proposons de retirer cet amendement.

M. le rapporteur. Depuis l’ordonnance de janvier 2011, non ratifiée, le code minier a été plusieurs fois modifié par la loi. Il serait préférable d’attendre la réforme du code minier annoncée par le ministre pour toiletter et ratifier cette ordonnance. C’est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement.

M. Christophe Bouillon. Je ne suis pas totalement convaincu. Nous retirons l’amendement pour l’instant, mais nous le déposerons à nouveau pour la séance publique, et nous sommes prêts à discuter avec vos services de la nature des modifications que vous indiquez, et du calendrier de la réforme du code minier. La démonstration est faite que nous avons beaucoup tardé sur cette question, et il faut trouver le bon véhicule législatif et le moment opportun pour régler définitivement cette question.

L’amendement est retiré.

Chapitre Ier
Arrêt de la recherche et de lexploitation des hydrocarbures dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique

La commission en vient à l’amendement CD48 de Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. Cet amendement vise à compléter l’intitulé du chapitre premier avec les mots : « dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique » ; pour renforcer juridiquement le texte. L’article premier de la Charte de l’environnement, qui fait partie du bloc de constitutionnalité, prévoit : « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé. »

Nous pourrions souligner le motif d’intérêt général qui anime ce texte. Je remercie le ministre de sa réponse sincère sur le CETA et je comprends sa volonté d’améliorer les choses de manière graduelle, nous ne pouvons pas tout faire en même temps, mais cela fonctionne dans un contexte constant. Or ce contexte n’existe pas lorsque l’on élabore des textes tels que la loi Travail. Je rappelle que le CETA prévoit des tribunaux d’arbitrage devant lesquels les entreprises transnationales peuvent attaquer les États. Cela va augmenter le nombre des contentieux et entraver la souveraineté des États à décider les politiques nationales.

M. le ministre d’État. Cet amendement est cohérent avec ce que j’ai dit par ailleurs, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. le rapporteur. Avis favorable.

M. Matthieu Orphelin. Voter cet amendement serait une bonne idée.

Mme Delphine Batho. Je rappelle qu’un engagement a été pris précédemment concernant le titre de ce chapitre, afin de faire mention de l’Accord de Paris. L’idée est la même, nous pouvons adopter cet amendement et nous compléterons en séance si Mme Panot est d’accord.

M. Bruno Millienne. Je ne m’inscris pas en faux avec ce qui vient d’être dit, mais la lutte contre le changement climatique n’est pas l’unique priorité du texte.

La commission adopte l’amendement.

Article 1er
Arrêt progressif de lexploration et de lexploitation des hydrocarbures

I.   amélioration de la rédaction de la liste des substances de mine

Le 1° de larticle 1er modifie la rédaction de l’article L. 111-1 du code minier qui définit la liste des substances qui relèvent du régime légal des mines et dont l’exploration et l’exploitation sont donc régies par le code minier.

A.   État du droit

Le 1° de l’article L. 111-1 prévoyait qu’étaient assujettis au régime légal des mines les gîtes connus pour contenir « de la houille, du lignite, ou dautres combustibles fossiles, la tourbe exceptée, des bitumes, des hydrocarbures liquides ou gazeux, du graphite, du diamant ». Contrairement aux idées reçues, un puits de pétrole est considéré comme une mine, au même titre qu’une mine de charbon.

En effet, ce n’est pas le fait qu’une substance soit solide ou même qu’elle se trouve sous terre qui définit sa nature juridique mais son inclusion dans l’article L. 111-1 du code minier. Sont par exemple considérés comme substances de mine, non seulement le charbon et le fer mais aussi le pétrole, le gaz, le sel ou encore le gaz carbonique.

B.   Modifications apportées par le projet de loi

Le 1° de larticle 1er modifie la rédaction de cette énumération et substitue aux termes « de la houille, du lignite, ou dautres combustibles fossiles, la tourbe exceptée, des bitumes, des hydrocarbures liquides ou gazeux » les termes « des hydrocarbures et des combustibles fossiles, la tourbe exceptée, quils soient sous forme solide, liquide ou gazeuse », ce qui fait suite aux remarques du Conseil dÉtat qui, dans son avis du 1er septembre 2017 a indiqué que « la lisibilité […] de ces dispositions anciennes » est « très amoindrie » et qu’elle « est susceptible dintroduire des ambiguïtés sur la portée matérielle que le projet de loi confère au principe de la mise à larrêt de la recherche et de lexploitation des hydrocarbures » ([10]). La rédaction proposée permet ainsi de compléter la définition donnée par l’article L. 111-1 du code minier.

II.   insertion dans le code minier du principe d’arrêt progressif de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures

A.   État du droit

L’exploration et l’exploitation des hydrocarbures sont, comme celles des autres substances de mine, régies par les titres II et III du livre Ier du code minier.

Avant d’exploiter une concession de mine, il convient tout d’abord de procéder à des opérations dexploration. Celles-ci sont régies par le titre II et le titre IV du code minier. La personne qui souhaite procéder à ces opérations doit en général demander d’abord une autorisation dexploration. En effet, l’article L. 121-1 du code minier prévoit que les travaux de recherches pour découvrir les mines ne peuvent être entrepris que par le propriétaire de la surface ou sur autorisation de l’administration. En général, c’est la détention d’un permis exclusif de recherches accordé par l’administration qui sert de cadre aux opérations. Il peut aussi s’agir, dans certains cas, d’une « autorisation de prospection préalable », dispositif qui, contrairement au permis exclusif de recherches, ne confère aucune exclusivité ([11]) s’applique uniquement à la recherche sur le plateau continental et dans la zone économique exclusive. ([12])

Le permis exclusif de recherches est accordé par arrêté du ministre chargé des mines ([13]) pour une durée initiale maximale de cinq ans ([14]) renouvelable deux fois ([15]). Chacune de ces prolongations est de droit, soit pour une durée au moins égale à trois ans, soit pour la durée de validité précédente si cette dernière est inférieure à trois ans, lorsque le titulaire a satisfait à ses obligations et souscrit à certains engagements financiers ([16]).

Le titulaire d’un permis exclusif de recherches d’hydrocarbures détient le monopole des recherches dans le périmètre défini et dispose librement des produits extraits ([17]). De plus, il est le seul à avoir de droit dobtenir une autorisation dexploitation des substances concernées par le permis de recherche ([18]). Comme le souligne Marianne Moliner-Dubost, ce « privilège […] permet à linventeur damortir les dépenses engagées lors de la phase dexploration » ([19]).

Une fois l’autorisation d’exploration obtenue, il peut être nécessaire d’obtenir une autorisation de travaux pour pouvoir entamer les opérations d’exploration. L’article L. 162-3 du code minier prévoit que cette autorisation, qui est accordée par le préfet, est nécessaire pour les travaux de recherches qui présentent des dangers et des inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l’article L. 161-1 du code minier ([20]). Dans les autres cas, les travaux de recherche ne doivent faire l’objet que d’une déclaration ([21]). Ainsi, l’ouverture de travaux de forage de puits est soumise à autorisation sauf s’il s’agit d’un puits de contrôle ne présentant aucun risque nouveau pour la santé et la sécurité des populations voisines et pour l’environnement, dont l’ouverture est soumise à déclaration. ([22])

Une fois les opérations d’exploration achevées, l’explorateur peut demander une autorisation (appelée « concession ») pour exploiter les substances découvertes. La concession est accordée par décret en Conseil dÉtat ([23]) pour une durée maximale de cinquante ans ([24]). La concession peut faire l’objet de prolongations successives, chacune d’une durée inférieure ou égale à vingt-cinq ans ([25]), prolongations qui sont elles aussi accordées par décret en Conseil d’État ([26]).

Comme pour les travaux d’exploration, les travaux dexploitation peuvent nécessiter l’obtention d’une autorisation de travaux lorsqu’ils présentent des dangers et des inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l’article L. 161-1 du code minier. Dans les autres cas, une simple déclaration suffit ([27]). Ces autorisations et déclarations sont accordées par le préfet.

L’exploitation des hydrocarbures en France aujourd’hui

Aujourd’hui, la France dispose dune soixantaine de gisements pétroliers et gaziers en exploitation. Cependant, leur production ne couvre désormais plus qu1 % de la consommation nationale.

Ces gisements, dont la plupart ont été découverts entre 1960 et 1970, sont principalement situés, pour les gisements terrestres, dans le fossé rhénan, dans le bassin parisien (gisements pétroliers) et dans le bassin aquitain (avec notamment le bassin d’Adour-Arzacq-Comminges qui comprend des gisements de gaz et de pétrole et le bassin pétrolier de Parentis).

En mer, des gisements ont été exploités en mer dIroise (15 puits) et en Méditerranée (11 puits). Le bassin pétrolier de Parentis comprend, outre une partie terrestre, une partie maritime mais cette dernière n’a été reconnue que par des forages. Enfin, on trouve de tels gisements dans les départements et les collectivités doutre-mer, en Nouvelle-Calédonie et dans les terres australes et antarctiques françaises (TAAF). Ces zones, qui appartiennent en grande partie au domaine de l’« offshore profond », sont pratiquement inexplorées.

B.   Les modifications apportées par le projet de loi

Le 2° de l’article 1er insère une nouvelle section dans le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code minier qui est consacré à la définition des gîtes contenant des substances de mine. Cette section comporte six articles, les articles L. 111-4 à L. 111-9, qui définissent les conditions dans lesquelles il sera procédé à l’arrêt de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures. En cela, cette section se présente comme une dérogation aux dispositions générales du code minier qui régit l’ensemble des règles concernant la recherche et l’exploitation des substances de mine. Ce caractère dérogatoire est explicitement mentionné dans le nouvel article L. 111-4.

L’article L. 111-6 créé par l’article 1er dispose qu’ « il est mis progressivement fin à la recherche et à lexploitation des hydrocarbures, à lexception du gaz de mine défini à larticle L. 111-5, afin de parvenir à une cessation définitive de ces activités, dans les conditions et selon les modalités fixées par la présente section ».

L’interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures se traduit, aux termes du nouvel article L. 111-8, par linterdiction faite à lautorité administrative de délivrer des autorisations de recherche ou d’exploitation ou des prolongations de permis exclusifs de recherches ou de concessions de mines.

a.   Champ géographique de l’interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures

L’interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures concerne non seulement l’ « onshore » mais aussi l’ « offshore ». En effet, l’article L. 111-7 indique que l’interdiction définie par l’article L.111-6 s’applique à la recherche et à l’exploitation sur :

– le territoire terrestre ;

– le domaine public maritime ([28]) ;

– la zone économique exclusive ([29]) ;

– le plateau continental ([30]).

L’exploration comme l’exploitation sont interdites, quelles aient lieu en surface ou en profondeur.

En ce qui concerne l’exploration et l’exploitation offshore, cette mesure traduit  et complète  au plan législatif des mesures qui avaient déjà commencé à être mises en œuvre par voie réglementaire. Ainsi, la France avait déjà établi en 2016 un moratoire sur la recherche d’hydrocarbures en Méditerranée, moratoire qui avait été étendu à la façade atlantique de la métropole au début de l’année 2017 ([31]).

b.   Mise en œuvre progressive du principe l’interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures

L’article L. 111-6 créé par la loi indique que l’interdiction est mise en œuvre « progressivement ». Cette entrée en vigueur progressive est précisée à l’article L. 111-8, avec l’énumération d’une série de dérogations

En ce qui concerne les autorisations dexploration, si l’article L. 111‑8 prévoit qu’ « il nest plus délivré par lautorité compétente de permis exclusif de recherches ou dautorisation de prospections préalables en vue de la recherche, y compris à des fins expérimentales, portant sur une ou des substances mentionnées à larticle L. 111-6 », cet article crée toutefois une exception pour la prolongation des permis exclusifs de recherche en cours de validité. Son dernier alinéa dispose en effet que « la prolongation dun permis exclusif de recherches ne demeure autorisée que lorsquelle répond aux conditions posées aux articles L. 142-1 ou L. 142-2 » du code minier. L’article L. 142-1 définit les conditions dans lesquelles le permis est prolongé de droit ([32]) tandis que le second alinéa de l’article L. 142-2 que l’administration peut accorder des prolongations « exceptionnelles » qui permettent de tenir compte du fait que des événements ont pu perturber le déroulement du programme de travaux, indépendamment de la volonté du titulaire du permis ([33]).

Au 1er juillet 2017, on recense 31 permis exclusifs de recherches d’hydrocarbures conventionnels en cours de validité dont 19 font l’objet d’une demande de prolongation en cours d’instruction ([34])

Il faut y ajouter les permis de recherche en cours d’instruction qui pourraient être délivrés avant la promulgation de la loi. Au 1er juillet 2017, 43 demandes d’octroi de permis de recherche étaient recensées ([35]).

En ce qui concerne les autorisations dexploitation, si l’article L. 111-8 prévoit l’arrêt de la délivrance de concessions en vue de l’exploitation des hydrocarbures, la promulgation de la loi ne conduira pas, là non plus, à un arrêt immédiat de leur exploitation.

En premier lieu, celle-ci pourra continuer dans le cadre des concessions qui ont déjà été accordées. Cependant, la prolongation de ces concessions ne pourra aller au-delà de 2040, comme le prévoit le quatrième alinéa de l’article L. 111-8.

L’étude d’impact du projet de loi justifie le choix de cette date en indiquant qu’ «  interdire les prolongations de concession dont léchéance excéderait 2040 sur le territoire français permet datteindre larrêt presque complet de lactivité de production dhydrocarbures en France à cet horizon » car « cette date correspond à léchéance de la quasi-totalité des concessions actuellement en cours de validité ».

Au 1er juillet 2017, on recensait 63 concessions d’hydrocarbures en cours de validité Ces concessions sont situées dans le bassin parisien, dans le bassin aquitain et en Alsace ([36]). Selon les informations communiquées par le ministère de la transition écologique et solidaire à votre rapporteur, seules sept d’entre elles ont une date d’expiration postérieure à 2040.([37])

De plus, il sera encore possible doctroyer des concessions pour les périmètres actuellement couverts par des permis exclusifs de recherches. En effet, le troisième alinéa de l’article L. 111-8 prévoit que des concessions pourront continuer à être délivrées « dans le cas prévu à larticle L. 132-6 », c’est-à-dire dans les cas où le titulaire d’un permis exclusif de recherches a fait la demande de concession avant l’expiration du permis (dispositif dit du « droit de suite »). Cette mesure est potentiellement applicable aux 31 permis exclusifs de recherches dhydrocarbures conventionnels en cours de validité ([38]) ainsi qu’à ceux qui pourraient être délivrés avant la promulgation de la loi.

L’activité d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures qui sera ainsi maintenue en vertu des dérogations prévues à l’article L. 111-8, après la promulgation de la loi, restera régie par les dispositions générales du code miner, comme le prévoit le nouvel article L.111-9 qui précise que « les titres miniers et autorisations régulièrement délivrés antérieurement à lentrée en vigueur de la loi »   continuent, jusqu’à leur échéance, à être régis par les dispositions du code minier qui leur sont applicables ([39]).

c.   Création d’une dérogation perpétuelle pour le gaz de mine

Si le projet de loi prévoit un arrêt de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures, l’article L. 111-6 prévoit une exception perpétuelle à ce principe pour le gaz de mine, communément appelé « grisou ».

Le gaz de mine – qui, jusqu’à présent, ne faisait l’objet d’aucune définition – est défini par le nouvel article L. 111-5 comme « le gaz dont la récupération seffectue sans intervention autre que celles rendues nécessaires pour maintenir en dépression les vides miniers contenant ce gaz, afin de laspirer ».

L’instauration de cette exception répond tout d’abord à un impératif de sécurité. En effet, à l’arrêt de l’exploitation d’une mine de charbon, le grisou, gaz qui est principalement constitué de méthane, « migre » naturellement des veines de charbon à une pression supérieure à 1 bar. Après l’arrêt de l’exploitation minière, il continue à remonter à travers le réseau des vides laissés par les travaux miniers, s’ils ne sont pas ennoyés ([40]). Comme le rappelle l’étude d’impact du projet de loi « la remontée en surface du gaz est un phénomène susceptible de présenter des dangers, principalement pour les personnes, mais également pour les biens ou lenvironnement, avec un risque dexplosion bien connu dans lactivité minière » ([41]).

Par ailleurs, l’instauration de cette exception présente également un intérêt économique en permettant de continuer à exploiter ce gaz, même si ce type d’exploitation est rare aujourd’hui ([42]).

Enfin, ainsi que le précise l’étude d’impact, l’arrêt de l’exploitation du gaz de mine représenterait une charge pour l’État : « le maintien des activités industrielles de récupération du gaz de mine permet à lÉtat de ne pas prendre en charge financièrement la surveillance de remontée de gaz dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, dans les zones où le gaz de mine est exploré ou exploité, dont il a la responsabilité au titre de laprès-mine [ce qui] permettra déviter, tant quune exploration ou une exploitation se poursuivra, le coût du transfert de cette surveillance à lÉtat, qui a été évalué à environ 4 M€ sur 10 ans ».([43])

Il faut distinguer le gaz de mine du gaz de couche. Le gaz de mine (ou grisou) est issu de mines de charbon qui ont été exploitées par le passé tandis que le gaz de couche est produit à partir de couches de charbon n'ayant pas donné lieu à une exploitation minière classique, en raison de leur profondeur ou de leur mauvaise qualité.

L’exploitation du gaz de mine en France aujourd’hui

La fin de lexploitation charbonnière dans le bassin houiller du Nord-Pas-de-Calais a rendu nécessaire la mise en place de dispositifs permettant de piéger le gaz de mine. Les débuts de captage du gaz de mine datent de 1978.

Pour exploiter le gaz de mine, les cavités (c’est-à-dire les anciens tunnels des mines) sont rendues complètement hermétiques et certains anciens puits de descenderie sont transformés en nouveaux puits d’exploitation dans lesquels une dépression est créée à l’aide d’une pompe. Cette dépression permet d’aspirer le gaz vers le lieu de moindre pression et de le faire remonter ensuite par les puits, favorisant ainsi la désorption du gaz contenu dans la roche.

En ce qui concerne la valorisation directe du gaz, deux techniques étaient employées historiquement :

– Pour les grands réservoirs, le gaz était comprimé à haute pression (60 bars) et injecté par dilution dans le réseau de transport de gaz ;

– Pour les plus petits réservoirs, le gaz était vendu directement à un client industriel local.

Aujourd’hui, une seule société « La Française de l’Énergie » (qui a repris les activités de Gazonor, ancienne filiale de Charbonnages de France), exploite le gaz de mine. Elle opère dans deux concessions situées dans l’ancien bassin minier du Nord-Pas-de-Calais (concessions « Désirée » et « Poissonnière »). Sur les 20 dernières années, les installations exploitées ces concessions « Désirée » et « Poissonnière » ont capté près de 95 millions de Nm3, soit l’équivalent de 610 GWh, ce qui correspond à l’énergie consommée par une ville de 60 000 habitants, selon les informations fournies par le ministère de la transition écologique et solidaire. ([44])

Toutefois, la qualité du gaz de mines s’étant progressivement dégradée en raison de la chute du pourcentage de méthane qui y était contenu, la valorisation directe du gaz est devenue problématique car celui-ci ne respecte plus les spécifications fixées par le gestionnaire du réseau de transport de gaz naturel pour son injection sur ce réseau.

Dans ce contexte, une activité de valorisation électrique du gaz - qui reste pertinente à des niveaux de méthane plus faibles - pourrait être développée. Cette activité a non seulement un intérêt économique mais un intérêt écologique car elle permet remplacer les émissions de méthane par des émissions de CO2, dont le pouvoir de réchauffement par effet de serre est 25 fois moins important ([45]).

III.   LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

La commission a adopté, sur proposition de votre rapporteur, des amendements visant à inclure le charbon dans la liste des substances dont lexploration et lexploitation doivent être interdites à compter de 2040. Le charbon est en effet l’un des combustibles fossiles les plus émetteurs de gaz à effet de serre et il émet même davantage de gaz à effet de serre que les hydrocarbures liquides et gazeux. Si, à ce jour, la France ne produit plus de charbon, il semble toutefois indispensable, pour des raisons de cohérence, d’inscrire dans la loi le principe selon lequel la recherche et l’exploitation du charbon ne seront plus possibles à l’avenir, au cas où des projets d’exploration ou d’exploitation de charbon viendraient à réapparaître.

La commission a également adopté, sur proposition conjointe du rapporteur, des commissaires membres des groupes La République en Marche et la France insoumise un amendement visant à indiquer clairement que lexploitation du gaz de mine, qui est la seule exploitation d’hydrocarbures qui restera autorisée à l’avenir, ne concernera que lexploitation du grisou et non celle du gaz de couche, qui est un hydrocarbure non conventionnel.

Enfin, la commission a précisé la rédaction de larticle L. 111-6 du code minier pour inscrire de manière plus explicite que l’arrêt définitif de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures vaut quelle que soit la technique employée, qu’il s’agisse de techniques conventionnelles comme de techniques non conventionnelles.

*

*     *

La commission est saisie de l’amendement CD173 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit du premier d’une série d’amendements visant à inclure le charbon dans la liste des substances dont l’exploration et l’exploitation doivent être interdites.

Le charbon est l’un des combustibles fossiles les plus émetteurs de gaz à effet de serre. Il émet même davantage de gaz à effet de serre que les hydrocarbures liquides et gazeux.

Dans la pratique, la France ne produit plus de charbon depuis plusieurs années. Malgré tout, dans un souci de cohérence, il semble important d’établir clairement que la recherche et l’exploitation du charbon ne seront plus possibles après l’adoption de la loi, au cas où de tels projets viendraient à réapparaître.

Nous utilisons bien ici le terme de charbon, et non d’hydrocarbures solides, notion qui peut prêter à confusion.

M. le ministre d’État. Avis favorable.

M. Julien Aubert. Sans revenir sur le fait que nous allions vers une disparition des centrales à charbon, je trouve que sur la méthode, la proposition du rapporteur est assez détonante. Le champ du texte est brutalement élargi à la faveur d’un amendement. Quel est l’impact exact ? Est-ce tout à fait neutre ? Comment cette disposition se coordonne-t-elle avec la disparition des centrales ? Il nous est dit qu’il s’agit du premier amendement d’une longue série ; j’aimerais savoir si à terme, parmi les substances dont l’exploitation est interdite, nous trouverons l’uranium ou d’autres.

M. Matthieu Orphelin. Nous sommes favorables à cet amendement pour des motifs de cohérence. La question du charbon est importante au niveau européen.

M. le rapporteur. J’ai parlé d’une longue série d’amendements parce que le charbon reviendra par la suite dans d’autres alinéas. Quant à l’étude d’impact, elle est des plus simples, dans la mesure où la France ne produit plus de charbon.

La commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD87 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Hier, lors des débats en commission des affaires économiques, j’avais fait remarquer que la définition donnée à l’alinéa 7 excluait les hydrocarbures solides. S’il n’y a pas aujourd’hui d’extraction de charbon sur le territoire, pour l’avenir, il vaut mieux le mentionner par précaution. Le ministre avait indiqué qu’il était préférable d’écrire charbon plutôt qu’hydrocarbures solides ; je retire donc cet amendement au bénéfice de l’amendement CD173 du rapporteur que nous venons d’adopter.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement CD10 de M. Brun.

M. Fabrice Brun. Cet amendement a pour objet de préciser, en cohérence avec le libellé du présent projet de loi, que les mesures dérogatoires figurant dans les futurs articles L. 111-4 à L. 111-9 du code minier s’appliqueront aux hydrocarbures non conventionnels.

M. le ministre d’État. L’objet du projet de loi est d’arrêter la recherche et l’exploitation des hydrocarbures à l’horizon 2040, quelle que soit la manière dont ils sont désignés. Pour nous, les choses sont très claires, nous sommes donc défavorables à cet amendement.

M. le rapporteur. Avis défavorable pour les mêmes raisons. Il ne faut pas réduire le champ de cette loi aux seuls hydrocarbures non conventionnels.

L’amendement est rejeté.

La commission en vient à l’amendement CD174 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement complète l’amendement CD173 pour interdire l’exploration et l’exploitation du charbon.

M. le ministre d’État. Il ne faut pas tout confondre ; comme l’a dit le rapporteur, la France ne produit plus de charbon depuis plusieurs années. Cet amendement n’a rien à voir avec d’autres décisions concernant les centrales à charbon. Avis favorable.

L’amendement est adopté.

La commission adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD142 du rapporteur.

Elle en vient à l’examen, en discussion commune, des amendements identiques CD17 de M. Brun et CD32 de M. Wulfranc, ainsi que des amendements identiques CD139 du rapporteur, CD49 de M. Prud’homme et CD88 rectifié de M. Orphelin.

M. Fabrice Brun. La définition du gaz, telle qu’elle figure dans le projet de loi, peut être interprétée comme n’excluant pas le gaz de couche. C’est pourquoi, dans un souci de précision, le présent amendement vise à définir la différence entre le gaz de mine, dit « grisou » – enfermé dans les anciennes mines de charbon et dont le captage est nécessaire pour des raisons de sécurité – et le gaz de couche, qui se trouve dans des veines non préalablement exploitées.

M. Hubert Wulfranc. Cet amendement à pour objet d’insérer les mots « situé dans les veines de charbon préalablement exploitées, » à l’alinéa 8, après la deuxième occurrence du mot « gaz », et de compléter cet alinéa par les mots : « à l’exclusion de toutes actions telles que stimulation, dépression, cavitation ou fracturation du gisement. »

M. le ministre d’État. Nous soutenons l’idée générale de ces deux amendements, mais nous préférons l’amendement présenté par le rapporteur. Nous demandons donc le retrait de ces deux amendements.

M. le rapporteur. Je propose également de retirer ces amendements au profit des amendements CD139 et CD140 que j’ai déposés. Ils poursuivent le même objet et leur rédaction me semble plus satisfaisante. L’amendement CD139 tend à préciser clairement que la notion de gaz de mine défini par l’article L. 111-5 ne recouvre que le grisou et ne concerne pas le gaz de couche, comme nous l’avons évoqué lors de nos débats liminaires.

M. Loïc Prud’homme. Il faut effectivement préciser la notion de gaz de couche pour éviter que les exploitants n’utilisent ces brèches juridiques pour exploiter des mines laissées à l’abandon. C’est une précision importante.

M. Matthieu Orphelin. Il est très important d’opérer une distinction très nette entre le gaz de mine et le gaz de couche pour qu’il n’y ait plus d’ambiguïtés.

M. le ministre d’État. Avis favorable à ces trois amendements.

La commission rejette les amendements identiques CD17 et CD32, puis elle adopte les amendements identiques CD139, CD49 et CD88 rectifié.

La commission examine l’amendement CD140 du rapporteur.

M. le rapporteur. Dans la continuité de l’amendement CD139, l’amendement CD140 vise à clairement définir la notion de gaz de mine qui ne désigne que le grisou et non le gaz de couche.

M. le ministre d’État. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle aborde en discussion commune les amendements CD11 de M. Fabrice Brun, CD75 de Mme Delphine Batho, CD89 de M. Matthieu Orphelin et CD35 de M. Hubert Wulfranc.

M. Fabrice Brun. L’amendement CD11 vise à définir le concept d’hydrocarbures non conventionnels. Il introduit une terminologie explicite permettant d’identifier les gaz et huiles de schiste, plus connus sous le vocable d’hydrocarbures non conventionnels. Il leur donne ainsi une véritable définition car il n’existe pas aujourd’hui de distinction entre les différents types d’hydrocarbures.

M. Hervé Saulignac. L’amendement CD75 fait écho à celui de notre collègue Fabrice Brun. L’enjeu ne réside pas dans la technique utilisée mais bien dans le renoncement définitif à l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, quelle que soit la technique utilisée. Notre objectif est de préciser ce que l’on entend par hydrocarbures non conventionnels.

Nous avons surtout la volonté de nous prémunir contre tout détournement possible – sachant que par le passé, des permis délivrés pour l’exploitation d’hydrocarbures conventionnels ont été utilisés de manière abusive pour rechercher des hydrocarbures non conventionnels. Si l’avant-projet de loi visait explicitement la fin de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels, les dispositions relatives à l’interdiction des hydrocarbures non conventionnels ont finalement disparu du projet du Gouvernement. Il s’agit pour nous d’être beaucoup plus précis.

M. Matthieu Orphelin. Nous avons bien pris note de l’avis du Conseil d’État qui a conduit le Gouvernement à modifier la rédaction du projet de loi sur ce point et à supprimer cette définition et l’interdiction qui allait avec. Mais il nous a semblé utile d’en débattre avec le Gouvernement et, grâce à l’amendement CD89, de nous prémunir de la possible apparition d’une nouvelle technique d’extraction de ces gaz non conventionnels.

M. Hubert Wulfranc. Même argumentation pour l’amendement CD35.

M. le ministre d’État. Le Conseil d’État a estimé que la définition des hydrocarbures non conventionnels n’était pas consensuelle sur les plans technique et scientifique. Par ailleurs, la modification apportée au projet de loi lors de son examen par le Conseil d’État a conduit, en effet, à ne plus distinguer les hydrocarbures des bitumes, en faisant disparaître ce terme de l’article L. 111-1 du code minier ; or il existe des usages non énergétiques de bitumes. En les interdisant, on s’écarterait de l’objectif de la loi tout en affectant des secteurs économiques sans avoir préalablement mesuré l’impact d’une telle mesure. On peut citer à cet égard l’exploitation d’une mine de calcaire bitumineux dans l’Ain dont le matériau extrait sert à la production d’huiles essentielles destinées à la cosmétologie et à l’industrie pharmaceutique et vétérinaire. J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement CD11.

Eu égard aux amendements CD75 et CD89, les remarques sont les mêmes quant aux préconisations du Conseil d’État. J’ajouterai qu’a fortiori, toutes les concessions existantes exploitent, au moment où nous parlons, des gisements classiques – où l’on peut extraire les hydrocarbures piégés dans la roche sans recourir à la fracturation hydraulique. Ce sont uniquement ces gisements classiques qui sont recherchés dans le cadre des permis d’exploration existants. Le Conseil d’État a estimé que le dispositif actuel ne permettait pas l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures qui ne seraient pas dans ces gisements classiques.

J’ai personnellement beaucoup hésité dans la détermination de la position du Gouvernement, entre, d’un côté, le risque d’inconstitutionnalité, et de l’autre, un enchaînement d’hypothèses assez improbables qui permettraient effectivement – sans faire de mauvais jeu de mots – de trouver une faille. Il faudrait pour cela que dans l’exploitation d’un gisement conventionnel, par un hasard heureux, on trouve un gisement non conventionnel et que, dans le même temps, on ait trouvé à l’étranger une technique alternative – la recherche en la matière étant interdite chez nous. Sachant que la probabilité d’un tel enchaînement d’événements est extrêmement faible, doit-on prendre un risque d’ordre constitutionnel ? Pour cette raison, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements, même si nous en comprenons toute la pertinence.

M. le rapporteur. Je demanderai le retrait de ces quatre amendements au profit de mon amendement CD137 qui se concentre plus sur les techniques que sur les types d’hydrocarbures. Dans son rapport du 22 janvier 2013 sur les hydrocarbures de roche-mère, l’IFP‑Énergies nouvelles (IFPEN) écrit que « physiquement et chimiquement, rien ne différencie un hydrocarbure non conventionnel d’un hydrocarbure conventionnel. Il s’agit toujours de pétrole ou de gaz. Le classement d’un hydrocarbure dans l’une ou l’autre des catégories tient aux conditions d’accumulation de cet hydrocarbure dans le sous-sol et aux types de technologies à mettre en œuvre pour l’en extraire. » Ainsi, l’amendement CD137 que je défendrai tout à l’heure à l’article 3 s’attachera plus à définir les technologies non conventionnelles qu’à parler des hydrocarbures.

M. Julien Aubert. Le rapporteur pointe ici la contradiction, ou à tout le moins la confusion de ce débat. Si l’on considère que désormais, le débat ne doit plus porter sur la technique d’extraction des hydrocarbures non conventionnels au motif qu’elle est préjudiciable à l’environnement – position largement partagée sur nos bancs –, cela ne doit pas empêcher la recherche de techniques alternatives non nuisibles à l’environnement. Et si l’on passe à une logique d’interdiction totale de tout hydrocarbure, à quoi bon faire la différence entre des types d’hydrocarbures qui, comme vient de le dire le rapporteur, n’ont en réalité qu’une définition avant tout « politique » et en aucun cas géologique ? Pourquoi dès lors prendre la peine d’essayer de définir et de déterminer des catégories qui, de toute manière, sont frappées de la même interdiction et du même bannissement ? Tout en contestant l’idée de cette globalisation, j’attire votre attention sur le fait que nous pourrions gagner beaucoup de temps en simplifiant le débat.

Mme Delphine Batho. Tout d’abord, peu importe que l’on parle d’hydrocarbures ou de techniques d’extraction : ce qui compte, c’est que nous soyons d’accord sur le sens de ce que nous voulons introduire dans la loi. Plusieurs groupes s’accordent en effet pour faire figurer dans le texte l’interdiction des hydrocarbures non conventionnels qui était d’ailleurs dans le projet initial du Gouvernement.

Je veux rappeler aussi que ces dispositions avaient été votées par l’Assemblée nationale dans la proposition de loi portant adaptation du code minier au droit de l’environnement, déposée et rapportée par Jean-Paul Chanteguet, l’ancien président de votre commission auquel je veux rendre hommage pour la constance de son engagement sur ces questions. Par conséquent, l’argument selon lequel il n’y aurait pas de définition technique ou scientifique des hydrocarbures non conventionnels avait déjà été débattu et traité par l’Assemblée nationale.

Pour ma part, je ne souscris pas à l’avis du Conseil d’État dans la mesure où une de ses phrases pose problème : selon lui, « l’interdiction des hydrocarbures non conventionnels est étrangère à l’objectif poursuivi par le projet de loi ». Je ne peux suivre un tel raisonnement ; je considère au contraire que les hydrocarbures non conventionnels ont un bilan environnemental encore plus désastreux que les hydrocarbures conventionnels et qu’à ce titre, le législateur est fondé à garantir que des concessions existantes ne seront pas, par le biais d’un de ces courts-circuits de l’histoire, utilisées à d’autres fins. À ce stade, nous maintenons l’amendement CD75 en attendant que soit débattu l’amendement du rapporteur. Nous soutiendrons la solution que propose ce dernier, sous réserve de l’adoption de notre sous-amendement.

M. Matthieu Orphelin. Dans l’attente de l’amendement du rapporteur, nous retirons notre amendement CD89.

M. Fabrice Brun. À l’instar de Mme Batho, je voudrais souligner que cette disposition figurait dans le projet de loi initial et que l’analyse du Conseil d’État n’est en effet pas acceptable : les habitants de ma circonscription ont connu à un moment donné ce problème du fait de l’existence de trois permis différents. Les populations ont subi un tel traumatisme que tant que subsistera le moindre doute, la moindre faille, monsieur le ministre, elles ne comprendront pas que nous n’inscrivions pas définitivement dans le droit l’interdiction de la recherche, de l’exploration et de l’exploitation du gaz de schiste.

M. Hubert Wulfranc. Tout cela rappelle effectivement le sketch de la chauve-souris de Bigard, qui arrive à se faire ouvrir la porte et à monter jusqu’au cinquième étage... Je maintiens mon amendement car une faculté dérogatoire reste présente dans le texte.

Mme la présidente Barbara Pompili. J’en profite pour m’associer à Mme Batho et rendre hommage à mon prédécesseur qui a effectivement fait un grand travail sur ce sujet.

L’amendement CD89 est retiré.

Puis la commission rejette successivement les amendements CD11, CD75 et CD35.

Elle étudie en discussion commune les amendements CD76 et CD77 de Mme Delphine Batho, l’amendement CD50 de Mme Mathilde Panot avec le sous-amendement CD172 du rapporteur.

Mme Delphine Batho. Je retire l’amendement CD76 au profit de l’amendement CD77 dont la rédaction est moins ferme ; mais nous maintenons qu’il faut viser à l’alinéa 9 l’horizon 2040 pour être en cohérence avec l’exposé des motifs du projet de loi et les dispositions qui suivent.

M. le rapporteur. Je propose à Mme Batho de retirer l’amendement CD77 au profit de l’amendement CD156 à l’article 1er qui aura pour objet d’encadrer le droit de suite et de limiter à 2040 les premières concessions données à l’issue d’un permis de recherche.

Mme Mathilde Panot. L’amendement CD50 a lui aussi pour objet de fixer dans la loi une date précise, celle du 1er janvier 2040, pour la cessation des activités de concession en général.

Par ailleurs, sachant que la distinction entre les hydrocarbures conventionnels et non conventionnels n’existe pas en droit français et qu’une fois qu’un hydrocarbure non conventionnel est exploité, il est considéré comme conventionnel, nous proposons de viser les hydrocarbures, « quelle que soit la technique employée » pour les exploiter. Cela clarifiera les dispositions de la loi du 13 juillet 2011.

M. le rapporteur. Mon sous-amendement CD172 a pour objet de supprimer la troisième partie de l’amendement CD50, qui ajoute à l’alinéa 9 la date du 1er janvier 2040. Sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, je serais favorable à l’amendement de Mme Panot.

M. le ministre d’État. Le Gouvernement souhaite le retrait de l’amendement CD77 mais est favorable à l’amendement CD50, sous réserve de l’adoption du sous-amendement CD172. Les précisions rédactionnelles apportées par ce dernier amendement sont utiles. Par contre, son dernier alinéa introduirait une restriction aux droits acquis des entreprises en limitant l’exploitation des concessions existantes au 1er janvier 2040.

Mme Mathilde Panot. Politiquement, il est très important pour nous de faire figurer dans la loi cette date du 1er janvier 2040 mais comme nous la faisons figurer à d’autres endroits du texte, nous acceptons le sous-amendement du rapporteur.

Mme Delphine Batho. Je suis favorable à l’amendement CD50 mais nous aurions fait une bonne synthèse en adoptant également l’amendement CD77. On peut viser l’horizon 2040 à l’alinéa 9 sans perturber les quelques concessions qui s’achèveront entre 2041 et 2044.

M. Jean-Baptiste Djebbari. Nous souhaitons que la date butoir du 1er janvier 2040 soit effective. Sans aller à l’encontre de la jurisprudence constante du Conseil d’État sur les droits acquis, et pour être réellement efficaces, nous soutiendrons plutôt l’amendement CD156 du rapporteur sur l’encadrement du droit de suite qui vise les quelques cas posant problème.

M. le rapporteur. Je suis prêt à suivre la proposition de Mme Batho et à accepter l’amendement CD77.

M. Matthieu Orphelin. En quoi l’amendement CD77 est-il différent de l’amendement CD156 dont nous discuterons tout à l’heure ?

Mme Delphine Batho. L’amendement CD77 s’insère dans un alinéa de portée générale : il n’aura pas de conséquences juridiques « dures » mais permet d’affirmer plus clairement l’intention du législateur. Il nous semble que lorsqu’on exprime dans la loi la volonté de diminuer progressivement puis d’arrêter définitivement l’exploitation d’hydrocarbures, il faut préciser à quel horizon temporel.

M. Matthieu Orphelin. Dans ces conditions, nous ne voterons pas pour cet amendement.

L’amendement CD76 est retiré.

La commission rejette l’amendement CD77.

Puis elle adopte le sous-amendement CD172 et l’amendement CD50 ainsi sous-amendé.

La commission est saisie de l’amendement CD42 de Mme Valérie Beauvais.

Mme Valérie Beauvais. La recherche d’hydrocarbures dans le sous-sol du pays a constitué et constitue encore une source majeure de connaissance géologique de ce sous-sol, notamment à grande profondeur. Il importe donc de ne pas renoncer à l’acquisition et à la conservation de ce capital de données, crucial pour la vitalité des domaines des géosciences qui constituent un fleuron et un pôle d’excellence de la recherche scientifique. Il est également fondamental de ne pas oublier que la collecte et l’interprétation de ces informations contribuent de façon déterminante aux perspectives de développement de l’ensemble des filières du sous-sol – hydrogéologie, géothermie et stockage de CO2. C’est pourquoi il convient de permettre, dans les conditions strictes d’encadrement assurées par le code minier, la poursuite des activités de recherche, tant en métropole que dans les régions et départements d’outre-mer.

M. le ministre d’État. Avis défavorable.

M. le rapporteur. Même avis. Autoriser la recherche d’hydrocarbures sans autoriser leur exploitation inciterait les acteurs économiques à entreprendre des travaux d’exploration sans espoir de pouvoir rentabiliser leurs investissements.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de coordination CD175 du rapporteur.

Puis elle examine en discussion commune l’amendement CD12 de M. Fabrice Brun et l’amendement CD51 de M. Loïc Prud’homme.

M. Fabrice Brun. Je voudrais tout d’abord rendre hommage à la loi Jacob qui, promulguée en juillet 2011, interdit la fracturation hydraulique. Je rappelle que c’est à ce jour le seul texte qui protège les populations des gaz de schiste. Certes, un travail législatif a été réalisé depuis, mais aucun texte n’a abouti. Il faut aujourd’hui saisir l’opportunité de ce projet de loi pour aller beaucoup plus loin. L’amendement CD12 a pour objet de préciser que toute exploration ou exploitation des hydrocarbures non conventionnels est interdite, quelle que soit la méthode utilisée, afin d’éviter tout recours à une autre méthode que la fracturation hydraulique d’ici à 2040, date d’arrêt des dernières concessions projetées.

M. Loïc Prud’homme. L’amendement CD51 a pour objet de protéger les aquifères et les nappes phréatiques souterraines. Le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a recensé 450 aquifères d’eau potable à ressource exploitable. Il nous semble vraiment impératif de protéger cette ressource en eau. Les atteintes aux sources d’eau potable constituent selon nous une entrave au droit constitutionnel, consacré à l’article 1er de la Charte de l’environnement, qu’a chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé.

M. le ministre d’État. Je partage la volonté de précision et d’exigence de M. Brun mais nous nous conformons à l’avis du Conseil d’État et demandons le retrait de l’amendement CD12.

L’amendement CD51 procède lui aussi d’inquiétudes légitimes : nous partageons pleinement les préoccupations exprimées quant à la nécessité de protéger les nappes aquifères mais le Gouvernement tient à préciser que le projet de loi porte uniquement sur l’octroi et la prolongation de titres miniers, et non sur les autorisations de travaux qui, elles, relèvent d’arrêtés préfectoraux. Tous les travaux miniers sont subordonnés à une autorisation préalable – qui suppose une étude de danger et une étude d’impact – et soumis à des contrôles en vue d’assurer, notamment, la protection des nappes. Votre objectif est louable mais il est satisfait, raison pour laquelle le Gouvernement vous invite à retirer votre amendement.

M. le rapporteur. Je proposerai à M. Brun de retirer l’amendement CD12 au profit de l’amendement CD137 que je défendrai tout à l’heure après l’article 3, et qui s’attache à décrire précisément les techniques non conventionnelles et s’insère dans la loi de 2011 et non dans le code minier comme le propose l’amendement CD12.

Quant à l’amendement CD51, il me semble constituer une trop forte remise en cause de droits acquis. Par ailleurs, l’État contrôle effectivement, avant d’accorder des autorisations de travaux miniers d’exploration et d’exploitation, les risques de pollution des nappes phréatiques. Avis défavorable.

M. Fabrice Brun. Tant qu’il subsistera la moindre faille, je maintiendrai ce type d’amendements.

M. Loïc Prud’homme. Il s’agit d’éviter les pollutions dues à l’exploitation consécutive aux permis de recherche déjà accordés. Je maintiens donc l’amendement, qui renforce la législation existante.

La commission rejette successivement l’amendement CD12 et l’amendement CD51.

Elle examine ensuite l’amendement CD43 de Mme Valérie Beauvais.

Mme Valérie Beauvais. Proscrire la recherche d’hydrocarbures aura une incidence sur tous les métiers liés à la connaissance du sous-sol. Recherche, développement et innovation seront mis à mal.

M. le ministre d’État. Avis défavorable. La cohérence commande d’associer l’arrêt de la recherche et la cessation progressive de l’utilisation des hydrocarbures.

M. le rapporteur. Il ne serait pas cohérent d’autoriser la recherche sans autoriser l’exploitation. Avis, pour cette raison, défavorable.

M. Julien Aubert. C’est un amendement d’appel, qui pose la question de la recherche géologique. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous rassurer sur l’avenir de cette activité scientifique en l’absence programmée d’entreprises de forage en France ? L’industrie s’inquiète.

M. le ministre d’État. Le projet de loi n’a pas pour conséquence d’oblitérer toute possibilité de recherche relative au sous-sol ; comme je l’ai indiqué tout à l’heure, lors de la séance des questions au Gouvernement, nous aurons besoin d’autres substances dans le cadre de la transition énergétique. Les deux nécessités ne sont pas incompatibles.

M. Bertrand Pancher. Imaginer que des entreprises s’engageront dans des activités de recherche sans la perspective d’obtenir l’autorisation d’en exploiter le produit est illusoire. D’ailleurs, lorsque nous avons envisagé de cartographier nos réserves, cela est apparu impossible à réaliser car il ne s’est trouvé aucune entreprise disposée à le faire sans être assurée que le coût de ces travaux serait amorti par une exploitation. C’est aussi la raison pour laquelle les entreprises souhaitent que les permis soient reconductibles pour des périodes les plus longues possibles. Il faut déconnecter ces affaires de recherche du sujet qui nous occupe aujourd’hui.

Mme Valérie Beauvais. Qui financera les recherches futures, monsieur le ministre ? Les deniers publics se raréfiant, ce sont aujourd’hui les sociétés de forage qui financent la recherche géologique. Que se passera-t-il demain ? Faudra-t-il renoncer à savoir ce qui se passe dans notre sous-sol ?

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD144 de M. Jean-Charles Colas-Roy, rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD5 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Pour tenir compte de l’évolution possible des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures, il semble inopportun de bloquer toute possibilité de recherche expérimentale de gisements d’hydrocarbures, d’autant que le texte ne précise pas quelles sont « les fins expérimentales » visées : s’agit-il d’une recherche sur les techniques d’extraction, sur le type de gisement ou sur la réalisation d’une cartographie ? Il convient de supprimer une mention qui fragilise le projet de loi.

M. Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. L’arrêt des activités d’exploitation est cohérent avec l’objectif du texte – la cessation progressive de l’utilisation des hydrocarbures pour lutter contre le changement climatique. Avis défavorable.

M. Jean-Charles Colas-Roy, rapporteur. Même avis. Autoriser la recherche, même expérimentale, d’hydrocarbures, sans autoriser l’exploitation serait incohérent.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD6 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. J’imaginais, à raison, qu’un sort funeste attendait mon amendement précédent. Aussi, puisqu’il s’agit, ainsi que l’a rappelé monsieur le ministre, de lutter efficacement contre les dérèglements climatiques, ma présente proposition consiste-t-elle à préciser que ne sont plus délivrés de permis exclusifs de recherches ou d’autorisations de prospections préalables en vue de la recherche, y compris à des fins expérimentales, « sauf impact neutre sur l’environnement avéré, ».

M. le ministre d’État. Avis défavorable.

M. le rapporteur. Avis également défavorable, d’autant que la notion d’« impact neutre sur l’environnement avéré » est juridiquement floue.

Mme Delphine Batho. Et même inexistante.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD7 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Pour éviter que la suppression brutale des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures ne mette en difficulté certaines entreprises pétrolières, il convient de fixer à 2030 la date à partir de laquelle les permis exclusifs ne seront plus délivrés.

M. le ministre d’État. Avec l’objectif de lutter contre le changement climatique en maintenant le réchauffement en dessous de 1,5 degré, l’axe 9 du Plan Climat, qui consiste à laisser les hydrocarbures dans le sous-sol, vise une sortie progressive de la production d’hydrocarbures sur le territoire français à l’horizon 2040 et prévoit pour cela que de nouveaux permis d’exploration d’hydrocarbures ne seront plus attribués et que les concessions d’exploitation existantes ne seront pas renouvelées. Proposer de délivrer des permis exclusifs jusqu’en 2030 viderait la loi de son sens. Avis défavorable.

M. le rapporteur. Couplé à l’application du droit de suite, l’amendement permettrait l’exploitation des hydrocarbures bien au-delà de 2040 pour un très grand nombre de concessions et viderait donc la loi de sa substance. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle se penche sur l’amendement CD52 de Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. L’amendement vise, conformément aux recommandations du rapport Tuot, à mieux encadrer le droit de suite prévu à l’article L. 132-6 du code minier. Considérant qu’une concession, la concession Vermilion, est déjà consentie jusqu’en 2054, comment, le Gouvernement obtiendra-t-il la cessation de l’exploitation des hydrocarbures en 2040 ?

M. le ministre d’État. Le droit de suite garantit au titulaire d’un permis exclusif de recherches qu’il pourra exploiter le gisement qu’il aura découvert, sous couvert de remplir l’ensemble des conditions requises. L’administration veille au respect de ces conditions et peut prescrire des exigences particulières le cas échéant. L’amendement remettrait en cause cette garantie qui n’est pas absolue, et fragiliserait le texte. La question de la modification du droit de suite pour les nouveaux permis de recherche se posera probablement dans le cadre de la réforme du code minier mais, comme l’a souligné le rapport Tuot, il ne peut y avoir d’application rétroactive pour les titres en cours de validité. J’en suis désolé, mais c’est ainsi. Avis, pour cette raison, défavorable.

M. le rapporteur. L’amendement vise à supprimer le droit de suite, ce qui va trop loin car cela porterait atteinte aux situations légalement acquises ; le Conseil d’État avait souligné le risque d’inconstitutionnalité que présenterait une telle mesure. J’y suis, pour cette raison, défavorable et vous proposerai plutôt, par l’amendement CD156 qui viendra en discussion tout à l’heure, d’encadrer ce droit. J’ajoute que l’amendement que vous proposez ne réglerait pas le cas du permis Vermilion, qui court jusqu’en 2054 : en l’espèce, la concession étant en cours de validité, la question du droit de suite ne se pose pas.

Mme Mathilde Panot. La date butoir de 2040 n’est pas applicable en raison des concessions existantes et ne pourra pas être appliquée en l’état de la législation ; cela pose problème. Pour ce qui est du risque d’inconstitutionnalité, notre avis est que l’on peut arguer de la Charte de l’environnement pour dire qu’il est légitime d’entraver la liberté d’entreprendre de manière à préserver le droit à un environnement équilibré et sain.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD8 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. L’amendement propose de proroger jusqu’en 2030 la possibilité de délivrer des concessions en vue de la recherche, ce qui laissera aux entreprises le temps de s’adapter, faute de quoi la suppression brutale de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures mettra en difficulté 1 500 emplois directs et 4 000 emplois indirects.

M. le ministre d’État. L’amendement n’est pas acceptable dans ce contexte. Le projet de loi assure une prévisibilité et une progressivité suffisantes. Je ne dis pas que les choses seront toujours simples pour les entreprises concernées, mais elles ont des activités diversifiées. Avis défavorable à un amendement qui affaiblirait la portée de loi.

M. le rapporteur. Avis également défavorable. Il serait inconcevable de décaler à 2030 l’application de la loi quand on se fixe pour objectif d’arrêter l’exploitation des hydrocarbures en 2040.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD36 de M. Julien Aubert.

M. Gérard Menuel. L’amendement porte sur la mise en valeur des réserves nouvelles dans une concession existante. Il faut prendre en compte les découvertes de réserves nouvelles dans le cadre des travaux sur des concessions existantes et permettre au détenteur du titre d’exploitation de demander une nouvelle concession sur ce périmètre. Dans le cas contraire, l’atteinte aux droits acquis d’un titulaire de concession sur le périmètre de celle-ci serait manifeste, et source d’une fragilité juridique de la loi qui pourrait avoir de redoutables conséquences financières.

M. le ministre d’État. Une concession d’exploration d’hydrocarbures permettant l’exploitation dans les limites géographiques définies par le titre, votre objectif principal, que je comprends, me semble déjà satisfait et je vous invite à retirer l’amendement.

Le périmètre d’une concession est circonscrit à la dimension du gisement. Si un autre gisement, plus profond, est découvert dans ce même périmètre, il peut être exploité dans le cadre du titre délivré ; si l’on découvre que le gisement est plus étendu que prévu lors de la demande originelle, le titulaire du titre peut faire une demande d’extension de concession pour cette zone. Une fois la loi entrée en vigueur, si l’exploitation d’un nouveau gisement situé dans la zone de périmètre du titre d’exploration est envisageable, il ne sera plus possible d’octroyer une extension de la concession au cas où le gisement s’étendrait au-delà.

M. le rapporteur. Mon appréciation de la supposée fragilité juridique du texte diffère de celle de M. Menuel. L’amendement est satisfait par la législation existante puisque tout détenteur d’une concession a le droit d’exploiter et de mettre en valeur les substances situées à l’intérieur de la concession pour lesquelles il a obtenu ce titre. Je suggère donc le retrait de l’amendement, faute de quoi j’y serais défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CD16 de M. Fabrice Brun et CD31 de M. Hubert Wulfranc, ainsi que l’amendement CD78 de Mme Delphine Batho.

M. Fabrice Brun. L’amendement CD16 concerne le droit de suite prévu à l’article L. 132-6 du code minier, et qui est un droit quasi automatique des détenteurs de permis de recherche à une concession. Il s’agit ici d’éviter l’ouverture de recours qui pourraient s’avérer coûteux pour l’État et de donner à ce dernier une marge de manœuvre pour refuser d’octroyer des concessions au vu des risques environnementaux, et donc d’encadrer ce droit de suite.

M. Hubert Wulfranc. Dans sa rédaction actuelle, le texte ne prévoit aucune définition ni aucune mesure d’interdiction immédiate de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels. L’amendement CD31 s’attache à remédier à cette lacune en interdisant au titulaire d’un permis exclusif de recherches d’obtenir une concession à l’intérieur du périmètre de ce permis lorsqu’elle concerne des hydrocarbures non conventionnels.

M. Hervé Saulignac. En l’état actuel, le projet de loi laisse ouverte la possibilité, pour le titulaire d’un permis exclusif de recherche, d’obtenir une première concession dont l’échéance pourrait aller bien au-delà de 2040. Un certain nombre de permis de recherche actuellement en cours sont ainsi directement concernés, du fait de l’application de l’article L. 132-6 du code minier relatif au droit de suite. Aussi l’amendement CD78 vise-t-il à appliquer à l’octroi d’une première concession la même échéance que celle retenue par le Gouvernement pour l’arrêt de l’exploitation des hydrocarbures, à savoir 2040.

M. le ministre d’État. Je comprends votre inquiétude, mais je ne pense pas que l’adoption des amendements identiques CD16 et CD31 rassureraient totalement nos concitoyens quant au risque que soient trouvés et exploités des hydrocarbures non conventionnels. Certes, pour être sincère, vos amendements sonnent le glas pour ces hydrocarbures ; et n’était la réserve juridique évoquée précédemment, je préférerais moi aussi fermer à double tour toute possibilité d’exploitation et d’exploration... Reste que le Gouvernement s’en tient pour le moment aux préconisations du Conseil d’État et émet donc un avis défavorable à ces deux amendements.

Quant à l’amendement CD78, je partage l’objectif de ses auteurs, mais, en l’état et à moins qu’on ne me démontre le contraire, si l’on remet en cause les droits acquis concernés, l’ensemble du texte s’en trouvera fragilisé et je crains que le remède ne soit pire que le mal – sans parler des demandes d’indemnisation. Avis défavorable.

M. le rapporteur. Je vous suggère de retirer les deux amendements identiques concernant la définition des hydrocarbures non conventionnels au profit de mon amendement CD137, que nous examinerons plus tard, qui propose plutôt de définir les techniques non conventionnelles.

En ce qui concerne l’amendement CD78, je propose également son retrait, mais au profit, cette fois, de mon amendement CD156 après l’article 1er, qui, au lieu de supprimer le droit de suite, l’encadre. Il aurait en outre été préférable que l’amendement intègre l’alinéa 13 plutôt qu’il ne le suive.

Mme Delphine Batho. Il y a le fond et il y a la forme. Sur la forme, j’ai dû suggérer à des oreilles attentives que si, pour rassurer le Gouvernement, il fallait que les dispositions que nous proposons figurent dans un article additionnel plutôt qu’au sein de l’article 1er, cela pouvait se concevoir.

Par contre, il y a une grande différence entre l’amendement CD78 et l’amendement CD156 du rapporteur, lequel amendement n’a pas d’objet puisqu’il ne concernerait que les titres délivrés à partir de la promulgation de la loi et que, si j’ai bien compris le texte, plus aucun titre ne sera délivré après cette promulgation… À ce stade – le découvrant, c’est ainsi que je le comprends – l’amendement du rapporteur ne concerne pas les permis actuels. Ces derniers, certes, sont assortis d’un droit de suite, mais le titre de concession n’est pas délivré. Ensuite, je rappelle que selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel les titres miniers ne sont pas des droits de propriété : ils sont une autorisation délivrée par l’administration, ce qui est bien différent. Nous maintenons donc l’amendement CD78 et attendons d’en venir aux amendements CD90 de M. Orphelin et CD156 du rapporteur pour revenir sur le fond.

M. Matthieu Orphelin. Nous ne voterons pas l’amendement CD78 et attendons également l’examen des amendements CD90 et CD156 pour discuter du fond.

M. le rapporteur. Nous en débattrons en effet tout à l’heure mais je maintiens que la rédaction de mon amendement permet de fixer à 2040 l’échéance des concessions qui pourraient être accordées en application du droit de suite aux titulaires des 31 permis exclusifs de recherches en cours de validité.

Mme Delphine Batho. C’est bien le problème : nous ne sommes pas d’accord.

La commission rejette les amendements identiques CD16 et CD31, puis l’amendement CD78.

Puis elle en vient aux amendements identiques CD9 de M. Jean-Marie Sermier, CD22 de M. Bertrand Pancher et CD37 de M. Julien Aubert.

M. Jean-Marie Sermier. Le ministre d’État l’a souligné tout à l’heure : le texte donne dans le symbole ; aussi l’amendement CD9 est-il lui aussi symbolique.

Je rappelle que nous couvrons, par les extractions, 1 % seulement de nos besoins, proportion que le texte vise à supprimer d’ici à 2040 – étant entendu qu’il n’y a pas de lien entre l’extraction et la consommation. Nous voulons donc symboliquement signifier qu’il ne faut pas embêter nos entreprises et qu’il convient d’élaborer des dispositions qui permettront de réduire les émissions de dioxyde de carbone – objectif avec lequel chacun est d’accord et sur lequel il n’est pas question de revenir. Ne nous donnons pas bonne conscience en fixant à 2040 la fin de la recherche et de l’exploitation des gisements d’hydrocarbures et repoussons l’échéance à 2050 afin qu’on prenne le temps de travailler sérieusement à la rédaction d’un texte efficace.

M. Bertrand Pancher. Lorsque les députés de notre groupe ont discuté du texte, ce matin, trois points de blocage ont été relevés. Vous avez levé les deux premiers, monsieur le ministre d’État.

Nous avions observé, en effet, qu’on interdisait l’exploration d’hydrocarbures sur le territoire métropolitain tout en l’autorisant au large de la Guyane, cela malgré des risques beaucoup plus importants ; vous avez expliqué qu’il était impossible de faire autrement, compte tenu des pénalités que nous devrions payer, et nous le comprenons.

Ensuite, à la question de savoir pourquoi nous ne procédions pas plus rapidement à la réforme du code minier, vous avez répondu que nous l’entamerions en 2018, ce dont nous avons pris acte.

Reste un troisième blocage, qui n’est pas lié au fait que nous n’aurions pas la volonté de faire le maximum pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, car nous aussi nous sommes rivés à l’objectif de leur diminution de 80 % d’ici à 2050. Cet objectif est énorme au point qu’il faut changer de modèle de société. Ce sera compliqué, mais nous ferons tous en sorte de vous aider. Cependant, mes collègues de groupe ont estimé qu’en 2050, dans le meilleur des cas, nous émettrons encore 20 % de gaz à effet de serre, ce qui signifie que nous continuerons à consommer des énergies fossiles – vouloir les supprimer totalement d’ici à 2050 revient à se prendre pour Zorro, personne n’y croit ! Nous allons devoir importer ces énergies fossiles, ce qui nous coûtera cher. Pourquoi donc fixer à 2040 la date de cessation de l’extraction de l’énergie fossile ? Soyons cohérents avec nos objectifs européens et reportons-la à 2050.

L’amendement CD22 ne vise pas du tout à « enquiquiner » le Gouvernement, mais à prendre en compte les contraintes de nos entreprises. Nous en débattrons à nouveau en séance, monsieur le ministre d’État, mais je ne vois pas pourquoi le symbole auquel vous tenez devrait être l’année 2040. Encore une fois, nous préférerions l’année 2050, plus conforme aux objectifs fixés par l’Union européenne.

M. Gérard Menuel. L’échéance de 2040 porte manifestement atteinte aux droits acquis des détenteurs de concessions. Je ne reviens pas sur les interventions de Jean-Marie Sermier et de Bertrand Pancher, mais je rappellerai néanmoins que ce texte présente des risques de fragilité juridique. Moi aussi, je pense qu’annoncer la neutralité carbone pour 2050 serait préférable.

M. le ministre d’État. J’ai bien entendu vos arguments, et vous ne serez pas étonnés que je ne les fasse pas miens. Le recours au mot « symbole » paraît réduire la portée du texte, alors qu’un symbole peut au contraire avoir une force d’entraînement bien plus importante qu’on ne l’imagine.

Nous avons déjà tellement perdu de temps : cette loi aurait dû être votée il y a dix ans – et je ne reviendrai pas sur la raison pour laquelle nous en sommes là aujourd’hui. On peut bien repousser l’échéance de dix ans encore, mais je crains qu’à un moment ou à un autre nous ne perdions la main sur tout.

En outre, on sous-estime la capacité de nos entreprises à s’adapter. Nos grandes entreprises nationales commencent en effet d’ores et déjà de se diversifier sur le plan énergétique. Aussi je ne pense pas que nous leur imposons là un handicap.

Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.

M. le rapporteur. Avis défavorable également. En effet, une grande partie des concessions en cours de validité arrivera à échéance avant 2040 et les autres aux alentours de 2040. Le choix de cette année-là est donc logique et équilibré car il laisse le temps aux entreprises et aux territoires de réaliser la transition.

La commission rejette ces amendements.

Puis elle examine l’amendement CD53 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme. L’encadrement du droit de suite doit s’accompagner de la remise en cause des autorisations de prolongation des titres d’exploration. Ainsi, nous proposons de supprimer la mention de l’article L. 142-1 du code minier qui autorise la prolongation des titres exclusifs de recherche à concurrence de quinze ans, disposition qui permet à certains projets de dépasser l’échéance de 2040.

Certains conseillers du ministère de la transition écologique et solidaire nous ont rappelé que le droit de suite tel que le prévoyait le code minier, c’était la loi des cow-boys. Comme il ne vous aura pas échappé que nous faisons partie d’une tribu d’Indiens insoumis (Sourires), nous proposons donc, par la suppression de l’alinéa 15, j’y insiste, d’encadrer ledit droit de suite.

M. le ministre d’État. Pardon de me répéter, mais le Conseil d’État souligne qu’en ne supprimant pas la prolongation régie par la disposition de l’article L. 142-1 du code minier, le texte préserve les situations légalement acquises par les titulaires d’un permis de recherche. Le même Conseil d’État estime que la prolongation prévue à l’article L. 142-2 relève d’un droit légalement acquis du titulaire. Donc le projet de loi ne peut pas remettre en cause ces droits acquis, à moins de fragiliser l’ensemble du dispositif ou de susciter ces fameuses demandes d’indemnisation. Avis défavorable.

M. le rapporteur. Avis défavorable car l’adoption de cet amendement provoquerait un effet pervers : elle conduirait les titulaires d’un permis de recherche à faire des demandes de concessions même si les recherches n’ont pas forcément abouti, et elle conduirait à une augmentation du dépôt des demandes de concessions en application du droit de suite. Or tous les permis exclusifs de recherches n’aboutissent pas à l’octroi de concessions automatiques.

Mme Delphine Batho. Je voterai cet amendement, mais pour d’autres raisons que celles invoquées par M. Prud’homme, car supprimer l’alinéa 15 ne supprime pas du tout le droit de suite tel que prévu par les articles L. 142-1 et L. 142-2 du code minier.

C’est que je ne comprends pas l’intérêt de l’alinéa 15. J’ai eu beau le relire quinze fois, je me demande en quoi il est nécessaire de préciser que d’autres dispositions du code minier restent en vigueur. Ce que je dis ne change rien (Sourires) mais, objectivement, cet alinéa est inutile.

M. Loïc Prud’homme. Il est bien précisé que nous entendons supprimer la mention de l’article L. 142-1 du code minier.

Mme Delphine Batho. Ce n’est pas parce que vous en supprimez la mention que vous en supprimez l’existence.

M. Loïc Prud’homme. Nous avons bien compris que ce n’était pas l’article en lui-même que nous supprimerions, mais seulement sa mention.

En outre, l’effet pervers que croit déceler le rapporteur ne serait, si l’on suivait sa logique, que reporté de quinze ans.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CD133 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CD91 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Il s’agit, si je puis dire, d’un amendement de précaution, visant à se protéger de l’utilisation de techniques d’extraction non encore découvertes et qui pourraient avoir un impact négatif sur l’environnement.

M. le ministre d’État. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

M. le rapporteur. Cet amendement semble trop restrictif car il fige dans le temps l’emploi d’une technique. C’est pourquoi j’en demande moi aussi le retrait.

M. Matthieu Orphelin. Nous allons donc le retravailler en vue de la séance publique.

L’amendement est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD138 du rapporteur et CD18 de M. Fabrice Brun.

M. le rapporteur. L’amendement CD138 vise à évaluer les risques sur l’environnement présentés par l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures. S’il convient de planifier leur arrêt progressif, il est nécessaire de renforcer les conditions dans lesquelles les activités d’exploration et d’exploitation qui seront maintenues après la promulgation de la loi seront réalisées.

C’est pourquoi je propose d’assujettir la délivrance d’un titre minier d’exploration ou d’exploitation d’hydrocarbures ou l’octroi d’une extension ou d’une prolongation d’un tel titre, à l’engagement du demandeur de respecter un cahier des charges qui tienne compte des spécificités locales, notamment en matière de protection de l’environnement, d’usages du sol ou du sous-sol ou encore de sécurité et de salubrité publiques.

M. Fabrice Brun. L’objet de l’amendement CD18 est de faire figurer dans le présent projet une disposition portant adaptation du code minier au droit de l’environnement, adoptée le 25 janvier 2017 en première lecture par l’Assemblée. Il concerne le cahier des charges qui accompagne un titre minier d’exploration ou d’exploitation, cahier qui doit, aux termes de l’amendement, « si la protection de l’environnement, de la sécurité et de la santé publique ou d’autres usages existants ou planifiés du sol ou du sous-sol le justifient, interdire le recours à certaines techniques d’exploration ou d’exploitation sur tout ou partie du périmètre du titre. Il doit également, pour les mêmes motifs, limiter les formations géologiques auxquelles le titre s’applique » – je pense à des réseaux d’aquifères karstiques, particulièrement vulnérables du fait de l’interconnexion des eaux, y compris dans les grandes profondeurs, comme c’est le cas en Ardèche.

M. le ministre d’État. Une fois n’est pas coutume, le Gouvernement n’est pas tout à fait d’accord avec le rapporteur. Le principe d’un cahier des charges peut être particulièrement utile lorsque l’exploration est susceptible de concerner une zone sensible en matière environnementale, mais ce n’est pas toujours le cas. Je souhaiterais donc une rédaction de l’amendement CD138 un peu plus souple. Il constitue une bonne base et je vous propose, monsieur le rapporteur, de le retirer afin que nous y travaillions d’ici à l’examen du texte en séance.

En ce qui concerne l’amendement CD18, le Gouvernement n’est pas opposé au principe de l’extension de la possibilité du recours au cahier des charges, mais considère que ce sujet dépasse celui des seuls hydrocarbures et, une fois encore, relève plutôt de la réforme du code minier que je souhaite défendre en 2018. Dans cette perspective, monsieur Brun, je vous invite à retirer également votre amendement.

M. le rapporteur. Si nous retirons chacun notre amendement, M. Brun et moi-même, nous pourrions travailler ensemble à une meilleure rédaction, notamment sur la question du cahier des charges, avant l’examen du projet de loi en séance.

M. Fabrice Brun. Je suis, bien sûr, d’accord pour améliorer la rédaction de mon amendement, mais je le maintiens néanmoins.

Mme Delphine Batho. Nous souhaiterions être associés à la réécriture du dispositif envisagé ici. Le texte interdit la délivrance de nouveaux permis, aussi faudrait-il modifier la rédaction du premier des trois alinéas proposés, car on vise en fait les prolongations de permis, les délivrances de concessions ou les renouvellements de concessions.

Ces dispositions sont directement inspirées, comme l’a dit M. Brun, de la proposition de loi Chanteguet portant adaptation du code minier au droit de l’environnement, et, s’agissant ici des hydrocarbures, on peut comprendre qu’il s’agit de graver dans le marbre la circulaire dite « Batho » qui visait à interdire les forages horizontaux ou tout au moins à se montrer précautionneux en la matière. Si une nouvelle rédaction doit être proposée, ce qui me paraîtrait une bonne chose, nous sommes prêts, j’y insiste, à y contribuer.

L’amendement CD138 est retiré.

La commission rejette l’amendement CD18.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CD146 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CD150 du rapporteur.

M. le ministre d’État. Le Gouvernement est évidemment favorable à cet amendement de cohérence juridique, qui permet de rappeler que les dispositions du code de l’environnement relatives à la participation du public aux décisions ayant une incidence sur l’environnement s’appliquent aussi dans le cadre des procédures minières.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD55 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme. Nous proposons de compléter l’article 1er par les trois alinéas suivants :

« Art. L. 111-10. – Le titulaire d’un permis d’exploration qui a donné lieu à la découverte d’un gisement d’hydrocarbures doit demander à l’autorité compétente l’autorisation d’exploiter celui-ci.

« Art. L. 111-11 – L’autorité compétente, au regard des conclusions d’une évaluation environnementale dont la réalisation est obligatoire, en application de l’article L. 122-6 du code de l’environnement, se réserve le droit de la lui refuser, notamment aux motifs que cette exploitation contreviendrait à des motifs d’intérêt général comme le droit à un environnement équilibré et respectueux de la santé inscrit à l’article 1er de la Charte de l’environnement et garanti par l’article L. 161‑1 du code l’environnement, ou serait contraire aux engagements de la France en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique ;

« Art. L. 111-12 – Les autorisations refusées au titre de l’article L. 111-11 ne peuvent pas faire l’objet d’une contestation, notamment aux motifs de l’égalité devant les charges publiques. »

Nous entendons ainsi conférer aux autorités compétentes la possibilité de refuser la délivrance d’une concession pour des motifs d’intérêt général tels que le fait de porter atteinte à l’environnement ou de contrarier les objectifs de lutte contre le changement climatique. Ces conclusions s’appuieraient sur l’obligation de réaliser une étude environnementale dont les modalités sont précisées par ailleurs.

M. le ministre d’État. Le Gouvernement considère que le premier alinéa que vous proposez est de fait satisfait par l’obligation d’obtenir une concession minière pour exploiter un gisement. Pour ce qui est du second alinéa, qui vise à limiter le droit de suite, les exigences liées à la santé ou à l’environnement sont déjà prises en compte par le code minier. Si la prise en considération du changement climatique n’était en revanche pas prévue, en faire un motif de refus de concession dans le cadre du droit de suite serait une atteinte aux droits acquis des entreprises et, là encore, pourrait fragiliser l’ensemble du projet de loi. Avis défavorable.

M. le rapporteur. Avis défavorable, en particulier sur le dernier alinéa que vous proposez, qui porte atteinte au principe du droit au recours, principe fondamental du droit administratif français, consacré depuis plus de cinquante ans par la jurisprudence.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CD25 de M. Bruno Duvergé.

M. Bruno Duvergé. Cet amendement concerne la reconversion des salariés, étant donné qu’il faudra distinguer le personnel d’exploitation, dont la reconversion s’étalera sur vingt-deux ans, du personnel d’exploration, pour lequel les échéances sont beaucoup plus proches.

Nous proposons la conclusion de contrats de transition écologique, tels que définis par l’axe 8 du Plan climat, de façon à associer les différentes parties prenantes – représentants du personnel, collectivités territoriales, entreprises et État – à la poursuite d’un objectif commun de reclassement optimal des salariés, en utilisant et en faisant évoluer les outils existants.

M. le ministre d’État. Je considère que ces éléments, pour conserver leur souplesse, ne doivent pas figurer dans la loi. Ces contrats, d’ailleurs, sont d’ores et déjà prévus dans le cadre du Plan Climat. Les inclure dans la loi créerait une obligation mal définie pour l’État.

Dans leur principe, les contrats de transition énergétique et solidaire visent les territoires et l’ensemble de leurs acteurs, pas simplement les entreprises. La définition proposée ici des entreprises concernées est imprécise, et n’est pas limitée aux titulaires de permis. Cela ouvrirait la porte à des recours contentieux dont l’issue serait pour le moins incertaine pour les finances publiques.

Le Gouvernement souhaite donc le retrait de cet amendement.

M. le rapporteur. J’y suis, pour ma part, favorable.

Mme Delphine Batho. Sur le même sujet, nous avons déposé l’amendement CD81. Nous soutenons cette idée, car nous pensons qu’il faut progresser sur la question des contrats de transition et de l’accompagnement des territoires et des personnes touchées par la cessation progressive de recherche et d’exploitation. Nous en avons débattu hier en commission des affaires économiques, et nous y reviendrons tout à l’heure, à propos du rapport qui sera demandé au Gouvernement.

Sur la forme, madame la présidente, beaucoup de nos articles ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, au motif que nous demandions la mise à disposition, sur le site internet du ministère, du registre des permis miniers afin que règne un minimum de transparence ! Or, un amendement similaire de notre collègue Matthieu Orphelin n’a pas connu le même sort, ce qui permettra peut-être l’adoption d’une disposition ; je ne veux pas croire que la commission des finances puisse faire preuve de favoritisme…

Mme la présidente Barbara Pompili. La différence de traitement tient au fait que votre amendement exigeait la création d’un registre spécifique, tandis que celui de M. Orphelin mentionne une simple mise en ligne ; telle est l’explication qui m’a été donnée.

M. Matthieu Orphelin. Nous sommes tout à fait favorables à l’idée d’accompagner les entreprises et les salariés dans cette transition ; c’est primordial.

En revanche, la référence directe aux contrats de transition écologique nous pose problème ; nous préférons demander la publication d’un rapport réalisé dès la première année d’application, afin de nous assurer que l’ensemble des acteurs a bien pris à bras-le-corps la question de la reconversion économique et professionnelle.

À ce stade, nous ne sommes donc pas favorables à cet amendement, mais nous reviendrons sur le sujet ultérieurement.

Mme Célia de Lavergne, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires économiques. La commission des affaires économiques a eu un débat sur cette question, au terme duquel elle a rédigé un amendement prévoyant la prise en compte des territoires ainsi que des entreprises, et précisant que les contrats de transition écologique ne constituaient qu’un outil parmi d’autres, car la formulation de l’amendement CD25 nous semblait trop restrictive.

La commission rejette l’amendement.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CD79 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Il s’agit d’un amendement de cohérence, qui m’a été inspiré par l’étude d’impact du projet de loi, où il est écrit que la loi « incitera les investisseurs nationaux et étrangers de la filière hydrocarbures à réaliser leurs investissements à court et moyen termes vers d’autres pays ».

Cela nous choque, car l’esprit de la transition énergétique n’est pas de dire aux industriels qu’on souhaite les voir se livrer à l’exploration et l’exploitation d’hydrocarbures à l’étranger pour les importer ensuite dans notre pays. Si la France promeut et s’applique à elle-même l’idée de laisser dans le sous-sol 80 % des réserves connues, elle doit défendre la même position au niveau international.

Nous avons trop connu par le passé cette forme d’ambiguïté et de contradiction entre les engagements de notre pays pour la protection du climat et la promotion des entreprises françaises et de leur savoir-faire à l’étranger, y compris pour l’exploitation des sables bitumineux.

C’est une discussion que nous avons eue en commission des affaires économiques, et je sais que le rapporteur et le Gouvernement sont défavorables à notre amendement, tout en partageant l’idée qui le sous-tend. Nous en présenterons en séance une version modifiée, car on nous a fait observer que son périmètre concerne toute forme d’aides directes ou indirectes, ce qui est trop large.

M. le ministre d’État. Je partage votre souci de cohérence, mais si l’on vous suivait à la lettre, le choc provoqué chez certains par le projet de loi lui-même serait encore plus fort. Nous devons conserver l’esprit de votre préoccupation, tout en parant à ce risque.

J’espère que la réduction progressive d’activité que nous nous imposons sera assortie d’une décroissance équivalente sur le plan international. En l’état, le Gouvernement considère que votre proposition est trop radicale et souhaite le retrait de l’amendement.

M. le rapporteur. Même si je ne me suis pas exprimé hier sur ce sujet, vous aurez deviné que mon avis est défavorable.

La quasi-totalité du chiffre d’affaires de la filière parapétrolière et paragazière française est réalisée à l’export. Imposer aussi brutalement le retrait du soutien de l’État à cette filière d’excellence pourrait avoir des conséquences considérables pour l’ensemble de la filière, ainsi que pour l’emploi. Une étude d’impact, pour le moins, serait nécessaire.

Mme Delphine Batho. Nous avons un réel désaccord sur ce point, monsieur le rapporteur. Il n’est pas possible, alors qu’il y aura des conséquences économiques et sociales – même si l’on peut considérer qu’elles seront mineures – de dire que nous cessons l’activité chez nous tout en soutenant l’industrie des hydrocarbures dans les autres pays du monde.

Ce serait incohérent : pouvons-nous être les champions du climat et de l’accord de Paris, et en même temps recommander nos entreprises pour l’exploitation de chantiers situés à l’étranger ? Si nous voulons être crédibles, nous ne pouvons persévérer dans ces pratiques, qui perdurent malheureusement depuis un certain nombre d’années.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD57 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme. Dans la mesure où nous avons conscience du caractère philanthropique des entreprises concernées (Sourires) et de leur attachement au bien commun, il nous est apparu nécessaire de leur faire respecter l’échéance de la cessation d’activité annoncée par le Gouvernement…

À cette fin, il nous a semblé nécessaire d’introduire des dispositions relatives au contrôle et aux amendes auxquelles celles-ci s’exposeraient en cas de refus de se conformer aux dispositions réglementaires.

M. le ministre d’État. Vous avez raison, monsieur Prud’homme, mais nous considérons que les dispositions du code minier permettent déjà à l’autorité compétente de contrôler et de sanctionner le non-arrêt d’activités minières illégales, sans qu’il soit nécessaire d’intégrer ces dispositions dans notre texte.

Nous considérons donc que votre amendement est satisfait dans ses objectifs ; c’est la raison pour laquelle nous vous invitons à le retirer.

M. le rapporteur. Il existe déjà un régime de sanctions administratives prévu par le chapitre III du titre VII du livre Ier du code minier. C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement CD56 de Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. Cet amendement vise à mettre un terme au lien quasi-automatique entre droit d’exploration et droit d’exploitation. Aussi, à l’instar de ce qui existe dans le droit classique de la construction, souhaitons-nous la réalisation d’une étude d’impact environnementale avant l’attribution éventuelle du titre d’exploitation.

M. le ministre d’État. À ma connaissance, la seule attribution d’une concession ne crée pas directement un nouvel impact environnemental ; c’est au moment de la demande de réalisation de travaux miniers que l’étude d’impact est exigée. Pour ces raisons, nous demandons le retrait de cet amendement.

M. le rapporteur. Je considère que cette question de l’étude d’impact environnementale excède celle des hydrocarbures et se pose aussi pour les autres substances faisant l’objet d’extraction. C’est pourquoi une telle mesure gagnerait à être discutée dans le cadre de la réforme du code minier.

Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi j’en demanderais le rejet.

Mme Mathilde Panot. Je le maintiens, car je perçois une contradiction dans les propos du ministre, qui a considéré tout à l’heure que les études venaient parfois trop tard, au moment du démarrage des travaux. L’État détient un rôle de régulateur, et ne peut donc pas se priver de toute possibilité d’agir.

La commission rejette l’amendement.

Elle aborde ensuite l’amendement CD24 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. De sérieux problèmes d’instruction des dossiers sont souvent constatés à l’occasion des demandes de prolongation de permis d’exploitation. Les services de l’État contractent des retards considérables dans leur traitement.

Cet amendement vise à ce que, lorsqu’une demande de prolongation de permis exclusif de recherche a été déposée il y a plusieurs années, la durée soit calculée à compter de la date de l’octroi et non plus de la date d’expiration de la précédente période de validité. Cela donnerait aux titulaires de permis le temps d’effectuer leurs programmes de travaux.

M. le ministre d’État. Cet amendement présente l’inconvénient de prolonger certains permis, le cas échéant, bien au-delà de quinze ans, en fonction de la durée de l’instruction des demandes de prolongation successives.

Cette demande nous paraît d’autant moins justifiée qu’en réalité les entreprises ont la possibilité de poursuivre les travaux pendant la période de validité du titre, et, en cas de difficultés particulières, peuvent bénéficier d’autorisations de prolongation exceptionnelle de l’activité.

Pour ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.

M. le rapporteur. La disposition proposée conduirait à une considérable prolongation des travaux d’exploration ; c’est pourquoi mon avis est défavorable.

M. Bertrand Pancher. Dans ces conditions, monsieur le ministre, il serait souhaitable, à l’occasion du débat en séance publique, de demander aux services compétents de nous expliquer pourquoi autant de retards sont constatés dans l’instruction des dossiers. Cela constitue une énigme, même si je devine quelque peu la réponse.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CD151 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à renforcer le contrôle des capacités techniques et financières dont la personne qui demande la prolongation d’une concession doit disposer, et à s’assurer du fait qu’elles sont mises à jour. En effet, si un opérateur ne dispose pas des capacités techniques et financières suffisantes, il est fort à craindre qu’il ne puisse exercer son activité dans des conditions de sécurité optimales et avec un impact environnemental réduit.

M. le ministre d’État. L’article L. 132-1 du code minier prévoit déjà que nul ne peut obtenir de concession de mine s’il ne dispose pas des capacités techniques et financières nécessaires.

L’administration y veille de façon rigoureuse lors de l’instruction des demandes. Par ailleurs, le respect des capacités techniques et financières est exigé au moment de l’octroi du titre, mais aussi tout au long de la durée de celui-ci. Chaque année, son détenteur doit fournir à l’administration un rapport annuel récapitulatif du programme des travaux et des réalisations à venir.

Par surcroît, des inspections annuelles des sites sont effectuées par la police des mines, et il est possible de faire entrer une société tierce sur le titre minier ou de céder le titre dans le cadre d’une mutation.

L’habilitation relève d’une autorisation instruite au même titre que la demande d’octroi, qui garantit les capacités techniques et financières de la nouvelle société. Dans le cadre d’un changement d’actionnaire, le titulaire du titre doit également faire une déclaration à l’administration.

Mme Delphine Batho. Dans le même registre, j’avoue ne pas avoir compris la teneur de l’arrêté de prolongation du permis d’exploration dit « Guyane maritime », qui prévoit que l’autorisation attribuée n’implique pas une approbation des conditions financières de l’opération. Un éclaircissement serait bienvenu, même s’il n’est pas immédiat.

M. le rapporteur. À la lumière des explications détaillées du ministre d’État, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 1er modifié.

Après l’article 1er

La commission examine l’amendement CD19 de M. Fabrice Brun.

M. Fabrice Brun. À mon tour, je souhaite faire part de ma surprise, car mon amendement préconisant la mise à disposition sur internet du registre des permis miniers a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. J’aimerais que l’on m’explique dans le détail quel coût peut résulter d’une telle mesure !

L’objet du présent amendement est d’exiger du demandeur d’un titre minier l’actualisation de ses capacités techniques et financières au moment de la demande de concession.

Mme la présidente Barbara Pompili. Le président de la commission des finances est susceptible de vous apporter toutes les réponses à vos questions ; nous n’hésiterons pas à les relayer.

M. le ministre d’État. À moins que vous ne me le demandiez, je donnerai les mêmes explications que précédemment ; je demande le retrait de cet amendement.

M. le rapporteur. Avis défavorable également.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD13 de M. Fabrice Brun.

M. Fabrice Brun. Par cet amendement, il est proposé, sans remettre en cause le droit à une contrepartie pour le prospecteur, de s’en tenir à un droit exclusif de demander, et non à un titre d’exploitation minier, qui apparaît comme le droit quasi automatique d’obtenir une concession. Il s’agit de redonner à l’État un réel droit de regard.

M. le ministre d’État. Le droit de suite n’est pas toujours automatique ; il s’agit de la garantie, offerte au titulaire d’un permis exclusif de recherche, de pouvoir exploiter le gisement qu’il aurait découvert, sous réserve de remplir l’ensemble des conditions requises. Or quelques exemples montrent que ce n’est pas toujours le cas ; l’administration veille au respect de ces conditions et, le cas échéant, peut prescrire des conditions particulières.

La mesure proposée reviendrait à remettre en cause cette garantie, donc le droit acquis des entreprises, ce qui fragiliserait l’ensemble du projet de loi.

Pour ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable.

M. le rapporteur. Cet amendement propose de passer d’un régime de droit de suite à un régime de possibilité de suite. Il me semble qu’il s’agit là d’une restriction trop forte du droit de suite, qui met en péril l’ensemble de l’équilibre du texte.

Mon avis est donc défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient aux amendements CD85 et CD86 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Des clarifications devraient être apportées dans le domaine de ce que l’on appelle le droit de suite, car les interprétations des juristes divergent.

Il faut rappeler que, dans certains cas, la délivrance de la concession n’est pas automatique. La rédaction que nous proposons substitue à l’expression « a droit », les mots « peut prétendre ». Ce qui préserve la notion d’exclusivité au profit de celui qui procède à l’exploration, seul habilité à conduire une éventuelle exploitation.

Puisque j’anticipe ce que sera la réponse du rapporteur et du Gouvernement sur cette remise en cause radicale du droit de suite par notre amendement CD85, je souhaiterais que l’administration nous fournisse des exemples de situations passées dans lesquelles un permis de recherche n’a pas automatiquement donné lieu à une concession.

Mon amendement suivant, CD86, est de repli. Il prévoit que la délivrance d’une concession initiale est soumise à évaluation environnementale, ce qui n’est pas aujourd’hui le cas.

Je conclurai par la question suivante. Sur la base de ce qui s’est déjà produit dans l’histoire, à l’occasion de situations de non-automaticité entre la délivrance d’un permis de recherche et celle d’une concession, est-il possible, sans remise en cause des droits acquis, de donner quelque garantie à l’État afin qu’il soit bien souverain lors du passage d’un permis exclusif de recherche à une concession ?

M. le ministre d’État. Même si ces amendements sont défendus avec des arguments complémentaires et nouveaux, à ce stade la position du Gouvernement ne varie pas et demeure défavorable.

M. le rapporteur. Sur l’amendement CD85, mon avis est défavorable pour les mêmes raisons que sur l’amendement CD13.

S’agissant de l’amendement CD86, qui prévoit la création d’une évaluation environnementale, il me semble qu’une telle mesure gagnerait à être discutée dans le cadre de la réforme du code minier. Je souhaite donc son retrait, à défaut de quoi je me verrais contraint de préconiser son rejet.

Mme Delphine Batho. Je les maintiens tous deux, et nous en rediscuterons en séance. Cela dit, je me demande si l’amendement que vous avez présenté ne satisfait pas en partie ma demande.

La commission rejette successivement les amendements CD85 et CD 86.

Elle examine ensuite l’amendement CD80 de Mme Delphine Batho.

M. Hervé Saulignac. Nous considérons que si une interdiction des hydrocarbures conventionnels existe, une sanction doit être prise à l’encontre de ceux qui pratiqueraient leur exploitation. Il semble que, par le passé, quelques libertés aient été prises, qui n’ont fait l’objet d’aucune sanction.

L’objet de cet amendement est donc de sanctionner les détenteurs d’un titre minier qui, au mépris de la loi, exploreraient ou exploiteraient un gisement d’hydrocarbures non conventionnel, en leur retirant ce titre minier.

M. le ministre d’État. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement, qui est caduc compte tenu de la non-adoption d’un précédent amendement.

M. le rapporteur. En effet.

Mme Delphine Batho. Vous avez raison, cet amendement n’a plus lieu d’être. Mais il s’inscrit bien dans le débat à venir sur les hydrocarbures non conventionnels. La question est de savoir si, dans le cas improbable, évoqué par le ministre d’État, du détournement d’une concession ou d’un permis, le code minier tel qu’il est permet à l’État de retirer ce titre.

Nous aurons l’occasion de préciser ce point au cours de la discussion en séance publique.

L’amendement est retiré.

La commission en vient à l’amendement CD14 de M. Fabrice Brun.

M. Fabrice Brun. L’objet du présent amendement est de demander au Gouvernement la remise au Parlement d’un rapport comportant notamment la liste des recours en cours d’examen contre des refus implicites opposés par l’administration à des demandes de permis de recherche, de prolongation ou de mutation de permis de recherche.

M. le ministre d’État. Cette proposition ne nous paraît pas aller dans le sens de la protection des intérêts juridiques et patrimoniaux de l’État ; par ailleurs, elle ne relève pas du domaine de la loi. Mon avis est donc défavorable.

M. le rapporteur. Même avis.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement CD92 de M. Matthieu Orphelin.

M. Jean-Marc Zulesi. Le présent amendement vise à suivre les recommandations de l’étude d’impact et à demander au Gouvernement de se fixer comme objectif d’augmenter le taux de la redevance progressive minière afin d’atteindre un objectif de recette de 23 millions d’euros en 2020.

M. le ministre d’État. Nous partageons cet objectif. Le Gouvernement souhaite augmenter le produit de la redevance progressive des mines ainsi que celle des redevances départementales et communales des mines. Nous considérons toutefois que cette question relève d’une loi de finances, et ne peut donc pas être traitée ici.

Je demande donc le retrait de l’amendement.

M. le rapporteur. Cet amendement risque en outre d’être frappé d’inconstitutionnalité. En effet, dans sa décision du 21 décembre 1966, le Conseil constitutionnel a considéré qu’une injonction adressée par le Parlement au Gouvernement était inconstitutionnelle.

Je souhaite également le retrait de l’amendement.

L’amendement est retiré.

Article 1er bis [nouveau]
Fixation au 1er janvier 2040 de léchéance des concessions accordées en application du « droit de suite »

Lobjectif visé par la loi est, comme l’indique l’exposé des motifs, de prévoir « la sortie progressive de la production dhydrocarbures […] à lhorizon 2040 ».

Cette date est cohérente avec lobjectif de réduction de la consommation énergétique primaire des énergies fossiles de 30 % en 2030 par rapport à l’année de référence 2012, objectif assigné à la politique énergétique nationale aux termes de l’article L. 100-4 du code de l’énergie. En effet, cette réduction de la consommation va de pair avec l’arrêt de la production nationale – qui ne représente que 1 % de la consommation – en évitant une augmentation de l’importation d’hydrocarbures, comme le rappelle l’exposé des motifs du projet de loi.

L’article 1er du projet de loi prévoit que les concessions en cours de validité ne pourront pas faire lobjet dune prolongation pour une durée allant au-delà de 2040 mais n’indique pas de date butoir pour les concessions qui seraient délivrées, postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi, aux titulaires d’un permis exclusif de recherches en cours de validité en application du « droit de suite » défini par l’article L.132-6 du code minier. Or, un certain nombre de permis de recherche actuellement en cours permettrait, au nom du droit de suite, l’autorisation de concessions pour des périodes allant au-delà de 2040.

La commission a souhaité aligner le régime de ces futures concessions sur celles en cours en ramenant au 1er janvier 2040 la date de leur échéance.

*

*     *

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD90 de M. Matthieu Orphelin et CD156 du rapporteur, lequel fait l’objet des sous-amendements CD177 de Mme Mathilde Panot et CD178 de M. Loïc Prud’homme.

M. Jean-Baptiste Djebbari. L’objectif de l’amendement CD90 est de préciser que les concessions accordées à la suite d’un permis exclusif de recherches, dans le cadre de l’article L. 132‑6 du code minier, relatif au droit de suite, ne peuvent excéder l’échéance de 2040.

Ce dispositif encadre le droit de suite de façon proportionnée. Nous l’avons fait figurer dans un article additionnel afin de limiter les effets d’une éventuelle censure constitutionnelle.

M. le rapporteur. L’amendement CD156 vise à préciser que les concessions accordées postérieurement à la promulgation de la loi au titulaire d’un permis exclusif de recherches en application de l’article L. 132-6 du code minier, qui régit le dispositif dit du « droit de suite », ne peuvent excéder l’échéance de 2040. Il s’agit d’encadrer le droit de suite.

Mme Mathilde Panot. Le sous-amendement CD177 tend à supprimer les mots « à compter de la promulgation de la présente loi » dans l’amendement du rapporteur.

En l’absence d’information sur le nombre de concessions délivrées antérieurement à la promulgation de la présente loi, dont la durée octroyée dépasserait le 1er janvier 2040, il est nécessaire de supprimer cette mention.

M. Loïc Prud’homme. Notre sous-amendement vise, quant à lui, à préciser l’échéance prévue. La seule mention de « l’année 2040 » n’est pas suffisante pour assurer une pleine et entière sécurité juridique, tant pour les titulaires d’une concession que pour l’État. Nous proposons en conséquence de préciser que l’échéance ne peut excéder « le 1er janvier 2040 ».

M. le ministre d’État. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement CD90 : les droits acquis ne peuvent pas être mis en cause sans que l’ensemble du texte soit fragilisé.

J’en viens à l’amendement CD156. Je l’ai dit, nous ne sommes pas totalement rassurés en matière de conformité à la Constitution, et nous ne voudrions pas avoir à payer des indemnités, mais je suis convaincu que nous trouverons une formulation qui permettra d’afficher l’échéance de 2040 en minimisant les risques. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la commission. Il fait de même s’agissant des sous-amendements.

M. le rapporteur. Je demande le retrait de l’amendement CD90, car la rédaction que j’ai proposée me semble plus satisfaisante.

Je suis défavorable au sous-amendement CD177 : il introduit une rétroactivité qui remet en cause les droits acquis. Je suis en revanche favorable au sous-amendement CD178. La précision qu’il apporte est utile.

M. Loïc Prud’homme. Je suis ravi qu’un consensus se dégage autour de notre sous-amendement.

Mme Delphine Batho. S’il doit être adopté, il faut conserver sa cohérence au texte : soit nous retenons « l’année 2040 » dans tout le projet de loi, soit nous écrivons partout « 1er janvier 2040 ». Il faudra régler cette question en séance.

Monsieur le rapporteur, sur le fond, votre amendement CD156 est identique à mon amendement CD78. Il s’en différencie non par sa portée juridique, mais par le fait qu’il crée un article additionnel. L’essentiel pour nous est que les concessions éventuellement accordées à la suite des permis de recherche en cours ne puissent excéder l’échéance de 2040. Il me semble que nous pouvons considérer que ce délai assure une prévisibilité garantissant qu’il n’est porté atteinte à aucun droit constitutionnel.

M. Matthieu Orphelin. Nous retirons notre amendement. Nous voterons l’amendement du rapporteur et le sous-amendement CD178.

L’amendement CD90 est retiré.

La commission rejette le sous-amendement CD177.

Elle adopte le sous-amendement CD178.

Puis elle adopte l’amendement CD156 sous-amendé.

Article 2
Dispositions relatives à lentrée en vigueur de larticle 1er

I.   Les dispositions du projet de loi

L’article 2 prévoit aussi que ces dispositions s’appliquent aux demandes en cours d’instruction « sous réserve de décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée enjoignant à ladministration de procéder à la délivrance ou à la prolongation de lun de ces titres ».

Les décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée sont les décisions juridictionnelles devenues définitives, qui recouvrent les décisions qui ne peuvent pas ou ne peuvent plus faire lobjet de recours ordinaires (appel ou opposition) mais uniquement de recours qualifiés dextraordinaires tels que les pourvois en cassation, les recours en révision ou encore la tierce opposition. Il s’agit donc des décisions rendues en première instance qui ne peuvent plus faire l’objet d’un appel en raison de l’écoulement des délais, des décisions rendues en appel, que les délais pour exercer un pourvoi soient écoulés ou non, ainsi que des décisions rendues en premier et dernier ressort par une juridiction.

II.   LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

La commission a précisé que le dispositif darrêt progressif de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures prévu à l’article 1er s’applique quelle que soit la technique utilisée.

*

*     *

L’amendement CD58 de Mme Mathilde Panot est retiré.

La commission est saisie de l’amendement CD93 de M. Matthieu Orphelin.

Mme Véronique Riotton. Il s’agit d’un amendement de précision, qui vise à interdire explicitement dans la loi l’utilisation de toutes les techniques, quelles qu’elles soient.

M. le ministre d’État. Avis favorable.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD147 du rapporteur.

Puis elle en vient aux amendements identiques CD23 de M. Bertrand Pancher et CD40 de M. Julien Aubert.

M. Bertrand Pancher. Aux termes de l’article 2, les interdictions de l’article 1er s’appliquent à toute nouvelle demande, y compris celles en cours d’instruction. Notre amendement vise à supprimer l’effet rétroactif de l’article 2 afin que ne soient pas concernées par ces interdictions les demandes d’octroi de permis de recherche ou de prolongation d’un permis précédemment octroyé et qui se trouvent dans une situation de blocage des instructions de demandes, de refus implicites d’attribution ou de renouvellement de titre. Cette situation est due à des carences d’instruction, volontaires ou non, dont les demandeurs ne sont pas responsables et n’ont donc pas à subir les préjudices.

M. Gérard Menuel. L’avis rendu sur ce projet de loi par le Conseil d’État le 1er septembre dernier a suscité de nombreuses décisions implicites de rejet. La haute juridiction insiste sur la nécessité pour le Gouvernement d’« apurer, dans les meilleurs délais, le stock anormalement élevé de demandes d’octroi de permis de recherches ou de prolongation d’un permis précédemment octroyé encore en souffrance à ce jour. Il ne peut que l’inciter […] à atténuer au cas par cas les effets de l’intervention de la loi nouvelle, consistant soit en des mesures transitoires plus substantielles, soit en des possibilités de dérogation pendant la durée qui serait jugée nécessaire ».

L’amendement CD40 a donc pour objet, conformément à l’avis du Conseil d’État qui recommande d’introduire des mesures transitoires plus substantielles, d’assurer la sécurité juridique de l’article 2 en créant un réel dispositif transitoire.

Il est en effet important que l’adoption de ce projet de loi ne pénalise pas les demandeurs de titres miniers dont l’instruction reste pendante ou retardée en raison de la situation qui a prévalu ces dernières années du fait de l’État.

L’inscription dans l’article 2 de la date butoir du 1er septembre, date à laquelle le Conseil d’État a remis son avis sur le texte, caractérisant le début du processus législatif, et non celle de l’entrée en vigueur de la loi, a pour objet d’éviter tout « effet d’aubaine » des industriels qui seraient tentés de déposer une demande avant l’entrée en vigueur de la loi – seules les demandes plus anciennes et déposées avant même que le projet de loi ne soit étudié seraient ainsi concernées.

M. le ministre d’État. Avis défavorable. Le projet de loi tel qu’il est rédigé par le Gouvernement prévoit des modalités équilibrées d’arrêt de l’exploration et de la production des hydrocarbures en France. Le Conseil d’État a confirmé qu’elles préservaient de façon adéquate les droits acquis des entreprises. Nous ne pouvons pas accepter un amendement qui reviendrait à priver notre réforme de ses effets.

M. le rapporteur. Même avis. Le projet de loi est construit sur un équilibre qu’il ne convient pas de modifier dans ses grandes lignes.

La commission rejette les amendements.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CD148 et CD149 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Après l’article 2

La commission est saisie de l’amendement CD54 de Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. Pour supprimer définitivement le droit de suite, nous proposons de supprimer les mentions qui le concernent dans le code minier.

M. le ministre d’État. Défavorable. Au titre de la garantie des droits des opérateurs, ces articles ne peuvent être supprimés sans fragiliser l’ensemble du projet de loi.

M. le rapporteur. Même avis.

La commission rejette l’amendement.

Article 3
Suppression de la Commission nationale dorientation, de suivi et dévaluation des techniques dexploration et dexploitation des hydrocarbures liquides et gazeux

I.   LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI

L’objectif du gouvernement étant d’interdire « toute expérimentation concernant les hydrocarbures non conventionnels », l’article 3 abroge les articles 2 et 4 de la loi du 13 juillet 2011 ([46]).

La loi du 13 juillet 2011, adoptée dans un contexte où la délivrance de permis d’exploration d’hydrocarbures non conventionnels avait vivement ému l’opinion publique, du fait des importants risques pour l’environnement que comportait la technique de la fracturation hydraulique ([47]), dispose dans son article 1er que « lexploration et lexploitation des mines dhydrocarbures liquides ou gazeux par des forages suivis de fracturation hydraulique de la roche sont interdites sur le territoire national », disposition qui reste en vigueur.

Larticle 2 de la loi prévoyait la création d’une Commission nationale d’orientation, de suivi et d’évaluation des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux qui devait notamment avoir « pour objet dévaluer les risques environnementaux liés aux techniques de fracturation hydraulique ou aux techniques alternatives » et devait émettre un avis public sur les conditions de mise en œuvre d’expérimentations dans de domaine. Or, si le fonctionnement et la composition de cette commission avaient été définis par un décret du 21 mars 2012 ([48]), la commission ne s’est jamais réunie.

Par ailleurs, l’article 3 de la loi abroge larticle 4 de la loi du 13 juillet 2011 qui prévoyait la remise annuelle par le Gouvernement au Parlement d’un rapport sur :

– l’évolution des techniques d’exploration et d’exploitation et la connaissance du sous-sol français, européen et international en matière d’hydrocarbures liquides ou gazeux ;

– les conditions de mise en œuvre d’expérimentations réalisées aux seules fins de recherche scientifique sous contrôle public, sur les travaux de la Commission nationale d’orientation, de suivi et d’évaluation ;

– la conformité du cadre législatif et réglementaire à la Charte de l’environnement de 2004 dans le domaine minier ;

– les adaptations législatives ou réglementaires envisagées au regard des éléments communiqués dans ce rapport.

II.   LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Sur proposition de votre rapporteur, la commission a complété la loi du 13 juillet 2011 précitée pour étendre le champ de linterdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, au-delà des techniques de fracturation hydraulique déjà mentionnées dans la loi, aux techniques de stimulation de la roche ou d’emploi de toute autre méthode permettant de modifier la perméabilité de la roche ou du réservoir de manière irréversible.

Cette modification vise à éviter que lapparition de nouvelles techniques ne permette de réaliser des activités d’exploration ou d’exploitation d’hydrocarbures non conventionnels dans le cadre des permis exclusifs de recherches actuellement valides, des concessions qui ont déjà été accordées ou de concessions qui pourraient être accordées en application du « droit de suite ».

Comme le rappelle le rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques du 27 novembre 2013, des méthodes de stimulation de la roche par des procédés physiques autres que la fracturation hydraulique comme la fracturation par arc électrique, la fracturation par effet thermique ou la fracturation pneumatique sont susceptibles d’être développées. Par ailleurs, la stimulation de la roche pourrait aussi être réalisée grâce à l’emploi de gaz liquéfiés ou gélifiés (hélium, CO2, azote, propane) et non d’eau ([49]). Certaines de ces techniques sont d’ailleurs déjà utilisées aux États-Unis ([50]).

Votre rapporteur a choisi de proposer une interdiction portant sur des techniques plutôt que sur des substances car, comme le rappelle l’IFPEN dans son rapport du 22 janvier 2013 sur les hydrocarbures de roche-mère, « physiquement et chimiquement, rien ne différencie un hydrocarbure non conventionnel dun hydrocarbure conventionnel : il sagit toujours de pétrole [...] ou de gaz [...]. Le classement dun hydrocarbure dans lune ou lautre catégorie tient aux conditions daccumulation de cet hydrocarbure dans le sous-sol et aux types de technologies à mettre en œuvre pour len extraire. » ([51])

*

*     *

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD137 du rapporteur, qui fait l’objet du sous-amendement CD181 de Mme Delphine Batho, et CD15 de M. Fabrice Brun.

M. le rapporteur. Comme le rappelle l’IFPEN dans son rapport du 22 janvier 2013 sur les hydrocarbures de roche-mère, il est très difficile de faire la différence entre hydrocarbures conventionnels et hydrocarbures non conventionnels. Plutôt que de parler des hydrocarbures, il est donc préférable de se fonder sur la définition des techniques non conventionnelles d’exploration et d’exploitation afin de les interdire, comme je le propose dans mon amendement.

Le dispositif proposé vise à compléter la loi du 13 juillet 2011 pour permettre à l’interdiction des hydrocarbures non conventionnels de s’appliquer dès la date de promulgation de la loi. En effet, l’article 1er de la loi, qui définit les conditions dans lesquelles l’arrêt de la recherche et de l’exploitation de l’ensemble des hydrocarbures sera mis en œuvre, n’abroge pas les permis et concessions en cours de validité alors que certains sont susceptibles de concerner des hydrocarbures non conventionnels comme le gaz de couche.

De plus, cet article permet de prolonger les concessions existantes jusqu’en 2040 et d’accorder des concessions pour les permis de recherche en cours de validité à la date de promulgation de la loi.

Enfin, l’article 2 prévoit que les mesures d’arrêt progressif prévues par l’article 1er ne s’appliqueront pas aux titres ou prolongations de titres que l’administration est obligée de délivrer en application d’une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée.

Ces raisons imposent de sécuriser le dispositif d’interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, dont les risques pour l’environnement sont aujourd’hui bien connus et suscitent de nombreuses craintes dans l’opinion publique.

Mme Delphine Batho. Monsieur le rapporteur, alors que nous demandons l’inscription dans le code minier de l’interdiction définitive des hydrocarbures non conventionnels, vous nous proposez d’inscrire dans la loi de 2011 l’interdiction des « techniques non conventionnelles ». Vos arguments comportent une contradiction que l’on peut aussi lire dans l’exposé sommaire de votre amendement : quelques lignes après nous avoir expliqué que les hydrocarbures non conventionnels n’existent pas, vous les citez vous-même en évoquant les « gaz de couche » pour lesquels vous ne souhaitez pas que les autorisations de recherche et d’exploitation en cours soient remises en cause !

Pour nous, seul le résultat compte. Nous voulons interdire l’exploitation et l’exploration de ces hydrocarbures et le recours, par un détournement de concession, à toute technique similaire ou comparable à la fracturation hydraulique, même au cas où elle ne serait pas qualifiée ainsi juridiquement.

En conséquence, nous voterons votre amendement à la condition que l’interdiction de l’exploration et de l’exploitation « par fracturation hydraulique » ne disparaisse pas du titre de la loi du 13 juillet 2011. Cette loi est une conquête obtenue grâce aux luttes citoyennes qui se sont déroulées dans les territoires concernés par la recherche et l’exploitation des gaz de schiste. Elle constitue une référence mondiale. Le Gouvernement de la province du Québec, où je me trouvais la semaine dernière, a autorisé la fracturation hydraulique dans les lacs et les rivières, et j’ai entendu parler là-bas de la loi française de 2011 dont le titre est connu.

Votre amendement modifiant le titre de cette loi part d’une bonne intention : il vise à élargir le champ du texte et non à remettre en cause l’interdiction de la fracturation hydraulique. J’estime toutefois qu’il ne faut pas supprimer les mots « fracturation hydraulique » du titre de cette loi, qui peut en revanche être complété. C’est le sens de notre sous-amendement.

M. Fabrice Brun. J’adhère aux arguments de Mme Delphine Batho, et il semble que je ne sois pas le seul.

L’objet de mon amendement est de fournir une définition claire et précise de la fracturation hydraulique, car elle ne figure pas dans la loi du 13 juillet 2011. Il s’agit d’une demande forte, exprimée par les collectifs sur le terrain et la population des zones concernées par des permis relatifs aux gaz et aux huiles de schiste, comme l’Ardèche, la Drôme, le Gard, le Vaucluse, la Haute-Savoie, et tant d’autres beaux départements français.

M. le ministre d’État. Je confirme que tous les permis d’exploration et d’exploration en cours sont relatifs à des gisements classiques – les hydrocarbures sont piégés dans une roche dont ils peuvent être extraits sans recourir à la fracturation hydraulique. L’encadrement juridique actuel ne permet pas l’exploration et l’exploitation hors de ces gisements classique. Si des techniques présentant des inconvénients ou des dangers pour l’environnement apparaissaient, l’État disposerait, dans le cadre de la police des mines, des outils nécessaires pour en proscrire immédiatement l’utilisation.

Monsieur le rapporteur, ces arguments ne m’empêchent pas d’être sensible à votre préoccupation de nous prémunir contre le développement d’autres techniques qui pourraient poser un problème environnemental, en particulier les méthodes ayant pour objet de conférer à la roche une certaine perméabilité.

À ce stade, je propose que vous retiriez votre amendement afin que nous puissions le travailler d’ici à l’examen du texte en séance publique, en tenant également compte des dernières remarques de Mme Batho. Je formule la même demande auprès de M. Brun.

M. le rapporteur. Je maintiens mon amendement, et je demande à M. Brun de retirer le sien. Je suis favorable au sous-amendement : Mme Batho m’a convaincu.

La commission adopte le sous-amendement CD181.

Puis elle adopte l’amendement CD137 sous-amendé.

En conséquence l’amendement CD15 tombe.

La commission adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

La commission est saisie de l’amendement CD59 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme. Notre amendement est ainsi rédigé :

« En cohérence avec les engagements de la France relatifs à la lutte contre le réchauffement climatique :

– les infrastructures pétrolières, parapétrolières, gazières et paragazières doivent décroître ;

– ces mêmes infrastructures ne peuvent développer davantage leurs activités d’exploration et d’extraction des hydrocarbures sur un territoire relevant de la souveraineté ou de la juridiction de la République française ;

– à compter du 1er janvier 2020, il ne peut plus être procédé à des investissements dans le développement de leurs activités d’exploration, d’exploitation, de recherche et développement liées aux hydrocarbures ainsi que dans l’extension des infrastructures qui leur sont attachées. »

En résumé, pour accompagner les dispositions prévues par le projet de loi visant, à terme, à l’arrêt de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures en France, nous proposons d’encadrer la décroissance de ces secteurs en limitant leur potentiel d’investissement dans leurs activités et dans leurs infrastructures.

M. le ministre d’État. Avis défavorable. Le Gouvernement considère, d’une part, que cet amendement va plus loin que le texte sur certains points en interdisant des investissements en faveur des activités d’exploration et d’exploitation à partir de 2020, et, d’autre part, qu’en évoquant « les infrastructures pétrolières, parapétrolières, gazières et paragazières », il crée un champ imprécis, potentiellement trop restrictif, concernant des investissements qui restent malgré tout nécessaires. Ainsi, certains investissements en matière de stockage, de transport et de distribution de gaz, voire de carburant, seront encore consentis dans les années à venir, y compris dans la perspective du développement du biogaz ou des biocarburants. Le principe d’un arrêt des investissements dans ces domaines nous semble excessif ; il pourrait même empêcher des recherches en matière d’efficacité énergétique.

M. le rapporteur. Défavorable également. Il serait dommage de limiter la possibilité d’investir en faveur des capacités d’infrastructures et d’innovations en lien, par exemple, avec le biogaz.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CD82 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Cet amendement traite du risque d’importation en France d’hydrocarbures issus, par exemple, des sables bitumineux. La question a été posée à l’occasion de la mise en place de l’accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada (CETA). Même si le risque en question existe bien, ces importations ne sont pas soumises à des droits de douane : le CETA n’aurait donc pas de conséquence en la matière. Sur ce sujet, il existe un projet de directive européenne relative à la qualité des carburants, qui n’a pas été suffisamment loin.

J’ai présenté puis retiré hier, devant la commission des affaires économiques, un amendement semblable qui a donné lieu à un débat intéressant au terme duquel je me suis engagée à retravailler sur le sujet d’ici à la séance publique. Je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

La commission étudie l’amendement CD131 du rapporteur, qui fait l’objet du sous-amendement CD180 de Mme Delphine Batho.

M. le rapporteur. Un grand nombre de sites devant fermer et être dépollués d’ici à 2040, l’amendement demande au Gouvernement de présenter un rapport au Parlement sur les modalités d’encadrement et d’accompagnement de la fin des activités d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux. Ce rapport fera notamment état de la manière dont la dépollution et la remise en état de sites miniers d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures doivent être assurées.

Mme Delphine Batho. Le sous-amendement précise le contenu du rapport demandé par le rapporteur, notamment en matière d’accompagnement des salariés et des territoires concernés par les effets du projet de loi. M. Bouillon prendra la parole à ce sujet pour soutenir mon amendement CD81.

M. le ministre d’État. Monsieur le rapporteur, la dépollution et la remise en état des sites miniers constituent déjà des obligations qui s’imposent aux exploitants sous le contrôle de l’administration. Les bouchages de puits et les remises en état se déroulent tout au long de la vie du gisement jusqu’à épuisement des réserves. Les déclarations d’arrêt des travaux doivent être déposées par l’explorateur ou l’exploitant au terme de la validité du titre minier. À défaut, l’autorité administrative reste habilitée, au-delà de ce délai, à prescrire les mesures nécessaires, aux frais de ce dernier. Les procédures qui encadrent ces travaux, déjà prévues par le code minier, ne sont pas modifiées par le projet de loi. La rédaction d’un rapport n’est en conséquence pas nécessaire et je vous suggère de retirer votre amendement.

Madame Batho, vous demandez au Gouvernement de rédiger un rapport concernant l’impact du projet de loi sur les territoires concernés. Si ce travail est évidemment nécessaire et utile, il ne peut être effectué dans un délai de trois mois. Il faut prendre un peu de temps pour travailler sur un rapport qui conditionnera par son sérieux toute la transition énergétique.

Par ailleurs, je ne suis pas favorable à l’inscription dans le projet de loi de ce que doivent contenir les contrats de transition car ces outils, encore en cours de définition, ont vocation à rester souples et à s’adapter à des situations très différentes selon les territoires, les salariés et les filières concernés.

Je suis en conséquence défavorable au sous-amendement.

M. le rapporteur. Monsieur le ministre d’État, les précisions que vous venez d’apporter m’ont convaincu. Je retire mon amendement.

L’amendement CD131 est retiré.

En conséquence, le sous-amendement CD180 n’a plus d’objet.

La commission est saisie de l’amendement CD26 de M. Bruno Duvergé.

M. Bruno Duvergé. L’exploitation des concessions fait l’objet de la redevance communale et départementale des mines, qui a rapporté 14,2 millions d’euros en 2016. Les principaux bénéficiaires se trouvent dans le bassin parisien et le bassin aquitain : une dizaine de départements et quelques dizaines de communes dans lesquels se situe l’essentiel de l’activité.

L’arrêt de l’exploitation des hydrocarbures sur le sol national entraînera un manque à gagner pour ces départements et communes. Il conviendrait de réfléchir à d’éventuels dispositifs d’indemnisation afin de compenser ce manque à gagner. Nous demandons donc au Gouvernement de présenter au Parlement, dans un délai de douze mois après la promulgation de la loi, un rapport analysant ces différents dispositifs.

M. le ministre d’État. Les modalités de l’arrêt de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures prévues par le projet de loi respectent l’ensemble des droits acquis des opérateurs dans l’ancien code minier.

Les cas potentiels d’indemnisation devraient donc être extrêmement rares, voire inexistants. Le Gouvernement ne prévoit donc pas de mettre en place des dispositifs d’indemnisation prédéfinis. Si, à l’avenir, de tels cas se présentaient, il appartiendrait aux tribunaux de se prononcer sur la nécessité d’une indemnisation, et d’en fixer le montant.

Monsieur le député, l’établissement d’un rapport sur les dispositifs d’indemnisation ne me semble donc pas utile, et je vous propose de retirer votre amendement.

M. le rapporteur. Monsieur Duvergé, je vous propose de retirer votre amendement. Nous pourrons travailler ensemble sur la rédaction d’un rapport global, abordant de nombreux points relatifs à la transition écologique et à l’arrêt des concessions à l’horizon 2040.

L’amendement est retiré.

La commission étudie l’amendement CD28 de M. Bruno Duvergé.

M. Bruno Duvergé. De nombreux salariés seront touchés par l’arrêt progressif de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels. Cette échéance, fixée en 2040, pourrait conduire nos chercheurs, physiciens, géophysiciens, ingénieurs, à se tourner vers l’étranger.

Afin de garder nos chercheurs sur le sol français en réorientant leurs compétences et leur savoir-faire, il est proposé de réfléchir à la façon dont d’autres énergies renouvelables, telles que la géothermie ou l’hydrogène, pourraient être développées. Une simplification de notre droit français, notamment concernant la géothermie, pourrait être envisagée.

Nous demandons donc que, dans les six mois à compter de la promulgation de la loi, le Gouvernement présente un rapport au Parlement analysant les différentes alternatives destinées à promouvoir le développement d’énergies renouvelables dans le cadre de l’arrêt de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures.

M. le ministre d’État. Je partage votre analyse et votre espérance. Comme je l’ai exprimé à plusieurs reprises depuis que je suis au Gouvernement, la maîtrise des consommations et le développement des énergies renouvelables ont toujours fait partie de mes priorités.

En matière d’énergies renouvelables, nos objectifs pour les dix prochaines années seront fixés dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie, dont la révision a été engagée avant l’été avec l’ensemble des parties prenantes. La substitution des énergies fossiles fera évidemment l’objet d’une attention particulière.

Je rejoins les attentes que vous avez exprimées sur certaines filières comme la géothermie et la filière hydrogène. J’en profite pour dire que l’hydrogène pourrait nous être utile dans cette période de transition – qu’il s’agisse du stockage ou de certaines formes de mobilité. Nos acteurs économiques couvrent l’ensemble de la filière. Simplement, il faudra bien savoir où placer nos investissements. En effet, je ne suis pas sûr que l’hydrogène soit la réponse immédiate à nos besoins de mobilité individuelle, alors qu’il devrait être plus adapté au transport routier ou aux flottes d’entreprise.

Quoi qu’il en soit, monsieur le député, je pense que votre objectif pourra être atteint dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie. Il est donc inutile de le préciser dans la loi, et je vous invite à retirer votre amendement.

M. le rapporteur. Même argumentaire que pour l’amendement précédent. Monsieur Duvergé, je vous propose de retirer votre amendement, et de travailler avec nous à la rédaction d’un amendement reprenant les différents éléments des rapports successifs que vous nous proposez.

L’amendement CD28 est retiré.

La commission examine l’amendement CD81 de Mme Delphine Batho.

M. Christophe Bouillon. Si nous nous permettons d’insister sur cet amendement, ce n’est pas en raison d’un quelconque « fétichisme du rapport parlementaire », mais parce que nous souhaitons, monsieur le ministre d’État, que vous réussissiez.

Vous avez annoncé le lancement des contrats de transition écologique et solidaire, pas seulement parce que c’est une exigence morale ou sociale, mais parce que c’est la condition même de la réussite de la mise en œuvre des mutations à engager sur les territoires concernés.

Selon l’étude d’impact, même si les hydrocarbures produits en France fournissent 1 % de notre consommation, cela représente sur le territoire national un nombre d’emplois non négligeable : 1 500 emplois directs, et près de 4 000 emplois indirects. C’est aussi une ressource pour l’ensemble des collectivités.

On ne peut donc pas, en la matière, avancer à l’aveugle. Vous nous dites vouloir réfléchir sur ce que seront ces contrats de transition écologique et solidaire. C’est louable. Mais, de notre côté, nous considérons qu’il est important d’informer dans un délai raisonnable – qui ne soit pas forcément les trois mois que nous proposons – la représentation nationale de l’état de vos réflexions sur le déploiement de ce dispositif : les moyens budgétaires qui y seront consacrés ; les administrations qui seront mobilisées, etc. Il faut assurer un véritable pilotage sur les territoires.

Nous voudrions pouvoir apprécier très vite l’avancement de ce dossier, mesurer l’attention que l’on doit porter à ces territoires, mais aussi votre volonté de ne pas laisser remettre à plus tard la mise en commun des moyens de l’État, des collectivités territoriales et des industriels. Il faut consacrer aux territoires concernés les efforts prévus – investissements d’avenir ou autres. Il faut mettre en corrélation les engagements de l’État dans d’autres schémas, dans d’autres politiques publiques. On ne peut pas faire sur ces territoires ce que l’on pourrait faire sur d’autres territoires.

Il y aura un débat la semaine prochaine, et l’on imagine d’où peuvent venir les résistances, d’où peuvent venir les inquiétudes, d’ailleurs légitimes. En raison du nombre de salariés directement ou indirectement concernés, du nombre de collectivités qui peuvent être impactées, il ne faut pas avancer en aveugle. Il faut tout mettre sur la table.

Voilà pourquoi je pense qu’un rapport de cette nature, qui devrait être remis très vite, témoignerait auprès de la représentation nationale de votre volonté de réussir.

M. le ministre d’État. Monsieur le rapporteur, vous rappelez certaines exigences, et vous insistez sur le fait que ces contrats conditionneront la réussite des mutations industrielles liées à la transition écologique. J’en suis évidemment convaincu.

Je suis aussi convaincu qu’avec des échéances trop courtes, on risque de bâcler le travail. D’ailleurs, on a un peu trop tendance, depuis quelque temps – et ce n’est pas à vous que je m’adresse – à agir un peu trop rapidement. Et comme il s’agit là d’un dispositif clé, il faut s’assurer d’un minimum de temps.

J’ai notamment chargé le secrétaire d’État Sébastien Lecornu de travailler dans les territoires. En effet, comme vous le mentionnez vous-même, les situations et les préconisations seront très différentes d’un territoire à l’autre. Mais il faut appréhender l’ensemble de ces territoires, d’où la difficulté de l’exercice. De ce point de vue, je suis d’accord avec vous.

Personnellement, je ne pense pas que le rapport que vous préconisez soit nécessaire. Je pense plutôt qu’il faut annoncer le plus tôt possible les contrats. Quoi qu’il en soit, il faut engager, avec la représentation nationale, un échange très précis au fur et à mesure de leur avancement. Pour autant, nous ne souhaitons pas le faire figurer dans le projet de loi.

M. le rapporteur. La diffusion d’informations sur le site du ministère est peut-être plus intéressante que leur inscription formelle dans un rapport qui sera rendu dans un an. Je souhaite donc le retrait de l’amendement.

Mme Delphine Batho. Pardonnez-moi, monsieur le rapporteur, mais nous parlons du pouvoir de contrôle de l’action du Gouvernement par le Parlement, ce qui va bien au-delà d’une simple mise en ligne d’informations sur Internet. Nous demandons que le Parlement soit associé aux réflexions du Gouvernement sur la mise en place des contrats de transition écologique, c’est-à-dire qu’il soit informé du processus qui conduira à cette mise en place.

Très franchement, je pense qu’il faudrait nous présenter une feuille de route dès la semaine prochaine. Au cours du débat que nous allons avoir en séance, un certain nombre de collègues, directement concernés dans les territoires, vont poser des questions sur ce qui va se passer. Et certains d’entre eux, qui sont opposés au projet de loi, s’attacheront à démontrer qu’il n’y a pas d’alternatives aux industries actuelles, aux recherches actuelles, à l’exploitation actuelle des énergies fossiles.

Nous souhaitons donc cette feuille de route, et nous avons choisi un moyen classique : quand on veut qu’une question soit évoquée devant le Parlement, on demande un rapport au Gouvernement !

D’autres collègues proposent un rapport équivalent au Gouvernement. Je vise l’amendement CD171 du groupe La République en marche, qui diffère du mien par le délai, et par la précision des informations demandées.

J’accepterai de corriger mon sous-amendement CD179 que j’ai déposé sur l’amendement CD171 en en supprimant le I, qui fixait un délai de trois mois ; en effet, ce n’est pas l’objet du débat. En revanche, je proposerai de conserver le II qui porte sur les informations fournies à la représentation nationale sur la nature de ce dispositif, et qui me paraît tout à fait acceptable.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous en sommes encore à l’amendement CD81…

La commission rejette l’amendement CD81.

Article 3 bis [nouveau]
Rapport du Gouvernement sur laccompagnement des territoires impactés

Afin d’anticiper l’arrêt de l’exploitation d’hydrocarbures à l’horizon 2040, la commission a souhaité que soit remis un rapport au Parlement, dans l’année qui suit la promulgation de la loi, sur l’accompagnement des territoires impactés par l’interdiction d’exploration et d’exploitation instaurée par l’article 1er.

*

*     *

La commission examine ensuite les deux amendements identiques CD171 de la commission des affaires économiques et CD96 de M. Matthieu Orphelin, qui font l’objet du sous-amendement CD179 de Mme Delphine Batho.

Mme Célia de Lavergne, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. L’amendement CD171, adopté hier en commission des affaires économiques, a déjà fait l’objet d’un riche débat sur la manière dont nos territoires et nos entreprises peuvent anticiper les impacts de ce projet de loi, et être accompagnés par le Gouvernement pour préparer leur avenir et leurs transformations.

Comme cela avait été proposé par le rapporteur de votre commission, il a été convenu hier en commission des affaires économiques que nous puissions retravailler cet amendement afin qu’il soit enrichi en vue de la discussion dans l’hémicycle, notamment pour identifier et présenter l’ensemble des informations demandées au Gouvernement dans ce rapport en matière de contrats de transition écologique et solidaire, comme le suggérait Mme Batho, mais aussi de leviers économiques et fiscaux, de formation professionnelle, de reconversion – voire, comme je l’ai entendu aujourd’hui, en matière de dépollution.

Ces actions ont pour but d’éviter les déserts industriels et d’inscrire les territoires concernés dans des secteurs d’avenir, industriels ou non, en lien ou non avec les techniques utilisées – je pense notamment à la géothermie.

Par ailleurs, la commission des affaires économiques a considéré que pour travailler correctement sur l’ensemble de ces sujets, il était plus raisonnable de se donner un délai d’un an qu’un délai de trois mois.

Ce rapport nous permettra de jouer notre rôle dans le contrôle de l’action du Gouvernement. C’est pourquoi il nous a semblé important de vous le proposer aujourd’hui.

M. Matthieu Orphelin. Pour avoir assisté à de telles mises en commun, je sais qu’il faut tenir compte d’un certain temps d’acculturation qui, de toute façon, prend des mois. Cela ne peut pas se régler en trois mois.

Je propose donc que l’on conserve cette durée d’un an, et que l’on se prononce pour cette rédaction assez succincte, quitte à l’étoffer d’ici à la séance publique, à partir de nos échanges et des propositions faites par M. Duvergé et Mme Batho.

Mme Delphine Batho. Comme je l’ai dit tout à l’heure, je souhaite modifier mon sous-amendement CD 179. Cela étant, je continue de penser que nous ne sommes pas dans une situation qui nous permette d’attendre un an pour présenter le détail du dispositif des contrats de transition.

En outre, je vois bien ce qui va se passer : au fur et à mesure de l’avancement des discussions et des débats en séance publique, on votera pour un rapport que je qualifierais de « voiture-balai ». Et on dira que le Gouvernement est chargé de nous faire un rapport sur tel ou tel point…

À ce stade, je suis favorable à l’adoption de l’amendement sous-amendé. Mais nous ne sommes pas ici pour nous payer de mots, et nous avons l’expérience de ces rapports demandés au Gouvernement et qui sont de véritables fourre-tout. En général, d’ailleurs, ils ne sont jamais remis au Parlement...

Faut-il créer une mission parlementaire permanente, commune à la commission des affaires économiques et à la commission du développement durable et qui, dans le cadre des rapports d’application de la loi, pourrait échanger avec le Gouvernement sur la construction des dispositifs ? Certains collègues pourraient en outre nous faire partager leur expérience en matière de transition.

Quoi qu’il en soit, je vous propose de réfléchir d’ici la séance sur la façon dont le Parlement va travailler avec le Gouvernement sur la mise en place des contrats de transition.

M. Matthieu Orphelin. Je voudrais lever toute ambiguïté : ce n’est pas pour botter en touche que j’ai proposé ce rapport, mais pour renforcer notre pouvoir de contrôle de l’action du Gouvernement.

Mme la présidente Barbara Pompili. Je rappelle que les commissions peuvent – et doivent – lancer des missions d’information sur l’application des lois, dès six mois après la promulgation de celles-ci.

M. le ministre d’État. Le Gouvernement est favorable aux deux amendements identiques, CD171 et CD96. En revanche, il est défavorable au sous-amendement CD179. Je propose donc à Mme Batho de le retirer.

M. le rapporteur. Madame Batho, je note que vous dénoncez les sempiternelles demandes de rapport, et que vous en demandez vous-même…

Mais soyons pragmatiques et constructifs – comme vous l’avez été. Je suggère que l’on adopte les amendements identiques CD171 et CD96, et que l’on engage une discussion pour proposer, en séance publique, un rapport englobant les différentes thématiques dont nous avons parlé jusqu’à présent.

Je suis donc favorable aux deux amendements identiques, mais défavorable au sous-amendement CD179. J’en demande donc le retrait.

Mme Delphine Batho. J’ose espérer que nous ne sommes pas dans une situation où tous nos amendements sont refusés, même lorsque tout le monde est d’accord sur le fond, au seul motif qu’ils sont proposés par un groupe d’opposition… Et je dis cela alors que nous avons déjà discuté d’un certain nombre d’amendements !

Nous avons déposé, c’est vrai, un amendement demandant un rapport. Nous l’avons fait parce que c’est l’outil qu’utilisent traditionnellement les parlementaires pour interpeller le Gouvernement sur une question qui leur paraît importante, et pour amener celui-ci à leur répondre.

Nous pensons que nous pouvons tous voter cette demande de rapport. Plus il sera complet et précis, mieux ce sera. C’est le sens de mon sous-amendement. Mais, en réalité, le mieux serait que la semaine prochaine, lors du débat en séance, le Gouvernement puisse déjà donner des indications, non pas sur la nature exacte du dispositif du contrat de transition, mais sur la façon dont il va conduire le processus conduisant à sa mise en place.

La commission rejette le sous-amendement CD179, tel que rectifié par son auteur.

Puis elle adopte les amendements identiques CD171 et CD96.

Article 3 ter [nouveau]
Rapport du Gouvernement sur lorigine des pétroles bruts dont sont issus les carburants consommés en France

La commission a adopté un amendement présenté par les commissaires du groupe La République en marche demandant au Gouvernement de remettre au Parlement, avant le 31 décembre 2018, un rapport sur l’origine des pétroles bruts dont sont issus les carburants mis à la consommation en France.

Ce rapport doit :

– évaluer l’impact environnemental lié à l’extraction et au raffinage de ces pétroles bruts ;

–  analyser les méthodes qui permettraient de les différencier en fonction de ces impacts et de leur origine ou du type de ressource ;

– étudier la faisabilité d’une différenciation des produits finis en fonction de l’origine des pétroles bruts dont ils sont issus.

*

*     *

La commission examine ensuite l’amendement CD97 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Le rapport dont il est question dans mon amendement permettrait de lancer la réflexion sur la discrimination des hydrocarbures en fonction de leur bilan environnemental. En effet, certains pétroles bruts ont des impacts environnementaux supérieurs à d’autres. Comme il a été dit tout à l’heure, une première réflexion avait été engagée au niveau européen pour les différencier, mais elle n’a pas abouti.

Nous proposons donc que le Gouvernement présente un rapport sur l’origine des pétroles bruts dont sont issus les carburants mis à la consommation en France. Ce rapport évaluera l’impact environnemental aux phases d’extraction et de raffinage de ces pétroles bruts – et notamment des pétroles bruts non conventionnels.

Ce rapport analysera également les méthodes permettant de différencier les différents pétroles bruts.

S’il parvient à des recommandations portant sur les méthodes de différenciation des bilans environnementaux des différents hydrocarbures, ce rapport pourrait constituer un très bel outil pour la France. Notre pays pourrait porter au niveau européen un texte visant à interdire, à terme, les hydrocarbures les plus polluants.

M. le ministre d’État. Je pourrais presque faire un copier-coller des propos de M. Orphelin, qui me conviennent naturellement. J’ajouterai que c’est le minimum que l’on puisse faire, compte tenu d’événements récents. Avis favorable, donc.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

Après l’article 3

Elle examine ensuite l’amendement CD94 de M. Matthieu Orphelin, qui fait l’objet des sous-amendements CD154, CD153 et CD155 de Mme Delphine Batho.

M. Matthieu Orphelin. C’est sans doute la prudence de ma rédaction qui a permis à mon amendement CD94 d’échapper au couperet de l’article 40…

Cet amendement propose que dans un délai d’un mois après promulgation de la loi, le Gouvernement mette en ligne, sur le site du ministère chargé des activités minières, l’ensemble des permis et concessions de mines d’hydrocarbures, actualisé chaque semestre. Les conditions de mise en œuvre de ce document seront fixées par décret en Conseil d’État.

Mme Delphine Batho. Madame la présidente, j’aimerais savoir dès maintenant si le rapporteur allait demander à M. Orphelin de retirer son amendement au bénéfice de son propre amendement CD157, qui va venir en discussion.

Si tel était le cas, je reporterais mes sous-amendements sur l’amendement du rapporteur, qui me paraît plus complet que l’amendement de M. Orphelin, dans la mesure où il intègre les demandes en cours d’instruction, et pas uniquement les titres délivrés.

Je dis cela pour faire gagner du temps. Si M. Orphelin n’y voit pas d’obstacle…

Mme la présidente Barbara Pompili. J’apprécie votre souci de gagner du temps, d’autant que nous avons encore beaucoup d’amendements à examiner.

M. le rapporteur. Madame Batho, c’est bien ce qui va se passer.

M. Matthieu Orphelin. Dans ces conditions, je retire mon amendement.

L’amendement CD94 est retiré.

Par conséquent, les sous-amendements n’ont plus d’objet.

Article 3 quater [nouveau]
Publication en ligne des demandes de titre dexploration et dexploitation dhydrocarbures et des titres délivrés

Dans un objectif de transparence et d’information du public, la commission a souhaité que l’ensemble des informations relatives à la délivrance des titres miniers d’exploration et d’exploitation d’hydrocarbures soit mis en ligne.

Ainsi, l’ensemble des demandes de titres d’exploration et d’exploitation d’hydrocarbures liquides et gazeux, l’ensemble des titres d’exploration et d’exploitation d’hydrocarbures liquides et gazeux délivrés ainsi que les caractéristiques principales de ces demandes et titres seront mis à la disposition du public par voie électronique dans un standard ouvert librement réutilisable et exploitable.

Ce nouvel article précise que la mise en ligne doit être réalisée dans un délai d’un mois à compter de la promulgation de la loi et que les informations doivent être actualisées tous les semestres.

*

*     *

La commission est saisie de l’amendement CD157 du rapporteur et du sous-amendement CD182 de Mme Delphine Batho.

M. le rapporteur. Toujours dans le même esprit, nous proposons que, dans un délai d’un mois à compter de la promulgation de la présente loi, on puisse avoir les informations sur l’ensemble des demandes de titres – ce qui n’était pas le cas dans le précédent amendement que nous avons examiné – et l’ensemble des titres d’exploration et d’exploitation d’hydrocarbures liquides et gazeux délivrés, ainsi que sur les caractéristiques principales de ces demandes et titres, et que tout cela soit mis à la disposition du public par voie électronique. Ces informations seraient actualisées tous les semestres.

Madame Batho, sur le sous-amendement que vous venez de déposer, j’observe que mon amendement intègre la plupart des éléments que vous proposiez.

Mme Delphine Batho. L’important pour moi est que l’on prenne en compte les demandes en cours d’instruction. La seule question qui se pose encore est de savoir s’il faut ajouter la formule suivante : « dans un standard ouvert, librement utilisable et exploitable ».

M. le rapporteur. J’y suis favorable.

Mme la présidente Barbara Pompili. Merci beaucoup pour ce travail très constructif.

M. le ministre d’État. Je suis favorable à l’amendement, ainsi qu’à l’ajout demandé par Mme Batho.

Mme Delphine Batho. Je tiens à saluer la position du Gouvernement. En fait, ces informations ont été mises en ligne pendant un certain temps, puis elles ne l’ont plus été. Elles sont de nouveau en ligne depuis peu, à votre initiative, mais de façon encore incomplète. Or je considère que c’est un élément important de transparence.

La commission adopte le sous-amendement CD182 et l’amendement CD157 ainsi sous-amendé.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous abordons maintenant les articles 4 et du projet de loi, qui ont fait l’objet d’une délégation au fond à la commission des affaires économiques. Conformément à la procédure traditionnellement suivie en la matière, sur ces articles, ainsi que sur les articles additionnels s’y rapportant, je me limiterai à appeler les amendements, puis les articles, afin que nous procédions formellement au vote. Je rappelle qu’il n’y aura pas de débat, puisque celui-ci a eu lieu hier en commission des affaires économiques.

Chapitre II
Dispositions relatives aux stockages et aux consommateurs de gaz

Article 4
Réforme du stockage souterrain de gaz naturel

Cet article a été délégué à la commission des Affaires économiques, saisie pour avis (voir l’avis n° 172).

*

*     *

La Commission adopte successivement les six amendements CD158 à CD163 de la commission des Affaires économiques.

Puis elle adopte larticle 4 ainsi modifié.

Chapitre III
Dispositions relatives aux relations entre fournisseurs et gestionnaires de réseaux

Article 5
(articles L. 134-1, L. 134-2, L. 341-4-3 et L. 452-3-1 [nouveaux] du code de lénergie)
Sécurisation du dispositif du contrat unique

Cet article a été délégué à la commission des Affaires économiques, saisie pour avis (voir lavis n° 172).

*

*     *

La Commission adopte successivement cinq amendements CD164 à CD168 de la commission des Affaires économiques.

Puis elle adopte larticle 5 ainsi modifié.

Article 5 bis [nouveau]
(articles L. 341-2, L. 342-3, L. 342-7 et L. 342-7-1 [nouveau] du code de lénergie)
Modalités relatives au raccordement des parcs éoliens en mer et aux réseaux intérieurs de distribution

Cet article est issu de deux amendements adoptés par la commission des Affaires économiques, saisie pour avis (voir lavis n° 172).

*

*     *

La Commission adopte lamendement CD176 rect. du Gouvernement et lamendement CD 170 de la commission des Affaires économiques. Larticle 5 bis est ainsi rédigé.

Article 5 ter [nouveau]
(article L. 224-3 du code de la consommation)
Information donnée au consommateur final sur le type de gaz fourni

Cet article est issu dun amendement adopté par la commission des Affaires économiques, saisie pour avis (voir lavis n° 172).

*

*     *

La Commission adopte lamendement CD 169 de la commission des Affaires économiques. Larticle 5 ter est ainsi rédigé.

Chapitre IV
Dispositions relatives aux contrôles des biocarburants

Article 6
(articles L. 661-4 et L. 661-10 à L.661-20 [nouveaux] du code de lénergie)
Performance environnementale des biocarburants et
contrôle du non-respect des règles de durabilité :
transposition de la directive (UE) 2015/1513 du 9 septembre 2015

L’objectif de cet article est, selon son exposé des motifs, d’assurer le respect, par l’ensemble des acteurs concernés, des exigences de qualité environnementale des biocarburants incorporés aux carburants d’origine fossile, et de garantir par la même occasion la qualité des produits vendus aux consommateurs.

Pour ce faire, le projet de loi transpose au niveau législatif deux ensembles de mesures issues des directives européennes encadrant le secteur des biocarburants.

I.   Une législation de source européenne

A.   La stratégie européenne pour réduire la consommation d’énergies fossiles et améliorer la qualité de l’air

Depuis une vingtaine d’années, l’Union européenne s’attache à favoriser le déploiement de politiques nationales visant à réduire autant les consommations d’énergies fossiles que les émissions de gaz à effet de serre.

La directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables – dite EnR – assigne ainsi à la France l’objectif de 23 % ([52]) d’énergie de sources renouvelables dans le bouquet énergétique en 2020, et à 10 % sa part dans la consommation finale du secteur des transports.

Étant donné son poids dans les besoins énergétiques et le bilan carbone des pays, le secteur des transports est en effet particulièrement ciblé.

La directive 98/70/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 1998 concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel imposait déjà à chaque États membres d’exiger de leurs fournisseurs de carburants de réduire d’au moins 6 % au 31 décembre 2020 les émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie (« du puits à la roue » selon l’expression consacrée) des carburants utilisés dans les transports routiers. Depuis sa révision en 2003, les États membres ont également l’obligation de disposer d’un système de surveillance de la performance des carburants distribués sur leur territoire. La directive 2009/30/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 a renforcé ces diverses exigences, portant notamment l’objectif pour les fournisseurs de 6 à 10 % de réduction d’émissions de gaz à effet de serre en 2020.

Enfin, la directive (UE) 2015/1513 du 9 septembre 2015 – dite CASI (pour « changement daffectation des sols indirects » ou ILUC pour « indirect land use change ») – modifie à son tour les directives 28/70/CD et 2009/28/CE afin d’accroître les exigences sur le développement des biocarburants et leur prise en compte dans la réalisation des cibles environnementales.

L’incorporation de biocarburants dans les carburants et combustibles d’origine fossile est, en effet, une des méthodes à la disposition des États membres pour atteindre leurs objectifs nationaux.

Produits à partir de la biomasse – telle qu’elle est définie à l’article L. 2112 du code de l’énergie –, les biocarburants constituent une ressource énergétique alternative et en tout ou partie renouvelable. En outre, ils sont censés participer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans la mesure où le CO2 dégagé lors de leur combustion est compensé par le CO2 absorbé lors de la croissance des végétaux utilisés pour les produire.

B.   Les règles déjà transposées en France

Pour encourager le développement de lutilisation des biocarburants, ainsi que le préconise lEurope, larticle 32 de la loi de finances pour 2005 a créé un prélèvement supplémentaire de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur la distribution de carburants destinés aux transports routiers avec la possibilité simultanée de modérer cette taxation à proportion de la quantité dénergie renouvelable des biocarburants qu’ils contiennent. L’esprit du dispositif défini à larticle 266 quindecies du code des douanes est de pénaliser fiscalement les opérateurs qui mettent à la consommation une proportion de biocarburants inférieure à leur objectif d’incorporation. Les taux de prélèvement supplémentaire sont, depuis 2014, de 7 % pour la filière essence et de 7,7 % pour la filière gazole.

Mais lessentiel des exigences européennes relatives aux biocarburants a été introduit en droit français par l’ordonnance n° 2011-1105 du 14 septembre 2011, ratifiée et complétée par la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 :

– Larticle L. 641-7 du code de lénergie introduit par l’ordonnance du 14 septembre 2011 impose aux distributeurs de carburants destinés aux transports de réduire de 10 % au plus tard le 31 décembre 2020 les émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie de ces produits par rapport à la moyenne des émissions générées par les carburants fossiles.

– Larticle L. 646-6 du code de lénergie introduit par la loi du 29 décembre précitée fixe un objectif chiffré de consommation dénergies renouvelables dans le secteur des transports. Initialement fixé à 10 % en 2020, comme le prévoyait la directive 2009/28/CE, la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte l’a renforcé en préconisant que : « lÉtat crée les conditions pour que la part de lénergie produite à partir de sources renouvelables utilisée dans tous les modes de transport en 2020 soit égale à 10 % au moins de la consommation finale dénergie dans le secteur des transports et à au moins 15 % en 2030. »

L’ordonnance de 2011 et la loi de 2013 ont de plus créé un titre spécifique dans le code de l’énergie consacré aux Biocarburants et bioliquides retranscrivant dans un chapitre unique – les articles L. 661-1 à L. 661-9 – la plupart des principes énoncés par la réglementation européenne :

 Larticle L. 661-1 définit les termes de « biocarburants » et « bioliquides » et précise que le titre VI simpose à tous ceux qui sont consommés en France, que leurs matières premières aient été produites ou non dans notre pays. Les substances issues d’huiles de palme cultivées et extraites à l’étranger doivent donc respecter les mêmes conditions de « durabilité » que celles obtenues à partir de colza français pour bénéficier des avantages fiscaux accordés aux biocarburants ;

 Larticle L. 661-1-1, introduit ultérieurement par la loi du 17 août 2015 précitée définit les biocarburants « avancés » (distingués des biocarburants de première génération dits « conventionnels ») qui doivent être produits à partir de matières premières « qui ne compromettent pas la vocation alimentaire dune terre et ne comportent pas ou peu de risques de changements indirects dans laffectation des sols ». Encore au stade de l’expérimentation, ces biocarburants sont issus d’algues ou de résidus de végétaux, de bois ou de paille.

Au-delà de l’intérêt propre d’un recyclage des déchets, nécessitant moins de terres pour la « culture » de leurs matières premières, ces nouvelles générations de biocarburants apparaissent en effet comme une réponse à l’un des principaux défauts reprochés aux premiers types de biocarburants, dits « conventionnels ».

La France comme l’Union européenne ont en effet réalisé que les cultures fournissant les sucres ou les huiles nécessaires à leur production mobilisent d’importantes surfaces de terres, captant des pâturages ou des terres agricoles auparavant destinés à l’alimentation humaine ou animale et obligeant à reporter les cultures alimentaires sur des espaces naturels qui représentent des stocks de carbone (jachères, tourbières, forêts… – on parle de « changements indirects daffectation des sols ») ou les exploitant directement (le changement d’affectation des sols est alors direct). La captation des terres arables peut avoir des impacts environnementaux et sociaux lourds dans des pays fragiles : menace pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle, appropriation du foncier au détriment des populations locales, déforestations massives… Ces changements d’affectation des sols ont, dans tous les cas, un bilan carbone non neutre. Ils entraînent des émissions de gaz à effet de serre supplémentaires qui réduisent, voire annulent les réductions attendues de l’incorporation de biocarburants par rapport aux carburants fossiles bruts. Une étude de l’ONG européenne Transports et environnement, publiée en avril 2016, affirme que les biodiesels seraient même plus polluants que le diesel pur ([53]).

Les premières estimations montreraient en revanche que les nouvelles générations de biocarburants permettraient de diviser par dix les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux carburants fossiles de référence (gazole ou essence). Les biocarburants avancés ne sont pas encore produits à échelle industrielle, mais la France et lEurope sont convaincues de la nécessité de favoriser leur développement – ainsi que, corrélativement, de la nécessité de limiter l’utilisation des biocarburants conventionnels.

– Larticle L. 661-2 précise, comme le préconisent les directives européennes, que, pour déterminer leur contribution à la réalisation des objectifs nationaux de développement des énergies renouvelables dans le secteur des transports et dans la consommation totale d’énergie, ainsi que dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre ne sont pris en compte que les biocarburants (et bioliquides) qui satisfont à des critères visant un développement et une performance durables – dénommés « critères de durabilité ». Le bénéfice de toutes les aides publiques favorisant la production et la consommation des biocarburants, tels les avantages fiscaux définis aux articles 265 et 266 quindecies du code des douanes, doit être lié au respect de lensemble de ces critères ;

– Les articles L. 661-4 à L. 661-6 définissent les critères de durabilité évoqués à l’article L. 661-2. Ils simposent à « toutes les étapes de la chaîne » (le « cycle de vie » dans la réglementation européenne) de la production à la distribution (article L. 661-3). Et leur respect est exigé – en principe – de tous les acteurs intervenant dans cette chaîne. Chacun a notamment l’obligation d’« être en mesure de justifier » du respect des critères de durabilité à l’étape où il intervient mais aussi pour les étapes précédentes. L’article L. 661-7 esquisse à cet effet les modalités de la procédure déclarative à suivre.

Ces critères de qualité environnementale sont cumulatifs :

– Les biocarburants et bioliquides ne peuvent être produits à partir de matières premières provenant de terres de grande valeur en termes de biodiversité, présentant un important stock de carbone ou ayant le caractère de tourbières (sauf exceptions définies par décret en conseil d’État). Ces critères sont dits « liés aux terres » (articles L.661-5 et R.661 à R. 661-3) ;

– Ils ne peuvent être produits non plus à partir de matières premières ne respectant pas les exigences agricoles ou environnementales applicables dans la politique agricole communautaire si elles sont cultivées dans l’Union européenne (articles L. 661-6 et R. 661-3) ;

– La production et l’utilisation de ces biocarburants et bioliquides doivent présenter un potentiel minimal de réduction des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux émissions de gaz à effet de serre résultant des carburants et combustibles d’origine fossile (articles L. 661-4 et D. 661).

– Les articles L. 661-7 et L. 661-8 définissent les modalités choisies par la France pour assurer le contrôle du respect des critères de durabilité par les carburants consommés sur son territoire.

L’Europe laisse en effet aux États membres la liberté de choisir entre différents modes de contrôle de cette qualité. La loi française s’appuie sur la responsabilité au premier rang des opérateurs économiques de la chaîne de production et de distribution. Les opérateurs qui mettent les biocarburants à la consommation doivent ainsi recueillir les données utiles sur les précédentes étapes.

Conformément aux suggestions européennes, l’article L. 661-7 laisse à chaque opérateur le choix, pour apporter ses justifications, de recourir aux règles définies soit par des « systèmes volontaires » reconnus par la Commission européenne, soit par des accords conclus avec des pays tiers mais reconnus par la Commission européenne, soit par le « système national » adopté par l’État membre. Chacun de ces systèmes est censé organiser la traçabilité des produits.

Dans les faits, les opérateurs intervenant en France recourent le plus souvent au système national, appelé « système de durabilité des biocarburants et bioliquides » et précisé par les articles R. 661-4 à R. 661-9 du code de l’énergie et l’arrêté du 23 novembre 201 relatif à la durabilité des biocarburants et bioliquides.

Les opérateurs sont, dans tous les cas, tenus de soumettre les informations exigées à un contrôle indépendant et de niveau suffisant. Il peut être prévu par les dispositifs auxquels ils ont choisi de se soumettre ; sinon ils s’adressent à des organismes certificateurs reconnus par l’autorité compétente. L’article R. 661-9 du code de l’énergie prévoit enfin que les ministres compétents désignent un organisme chargé du système national de durabilité, qui est alors l’interlocuteur des opérateurs économiques. Il s’agit de la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) du ministère de la Transition écologique et solidaire, et plus précisément de ses agents spécialement chargés de ce contrôle au bureau de la logistique pétrolière et des carburants alternatifs.

Les opérateurs qui produisent et commercialisent les matières premières, les biocarburants ou les mélanges de carburants doivent fournir une « attestation de durabilité » à leurs clients ; ceux qui réalisent l’incorporation des biocarburants et mettent à la consommation les produits finaux doivent adresser une « déclaration de durabilité » – en sus du rapport sur l’intensité des émissions de gaz à effet de serre des lots mis en vente exigé par l’article L. 641-6 du code de l’énergie – à l’organisme qui gère le système de contrôle, la DGEC en l’espèce.

II.   Les modifications proposées par le projet de loi : achever la transposition de la directive (UE) 2015/1513

En dépit des mesures déjà adoptées par la France, certaines dispositions de la directive (UE) 2015/1513 du 9 septembre 2015 restent encore à transposer dans notre système juridique national, la transposition de cette directive devant en principe s’achever avant le 19 septembre 2017.

A.   Le renforcement des exigences en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre

En premier lieu, larticle 6 propose, par une nouvelle rédaction de l’article L. 661-4 du code de l’énergie, d’élever les exigences sur le niveau minimal de réduction des émissions de gaz à effet de serre attendue des biocarburants et bioliquides en modifiant les seuils.

Cet article L. 661-4 définit le critère quantitatif de durabilité que les biocarburants et bioliquides doivent respecter pour être comptabilisés dans la réalisation des objectifs nationaux de performance environnementale et bénéficier des avantages fiscaux accordés par la France. Depuis le 1er janvier 2017, pour être éligibles, l’ensemble du cycle de vie (de la production à l’utilisation) des biocarburants et bioliquides doit permettre une réduction des gaz à effet de serre d’au moins 50 % par rapport aux émissions des carburants et combustibles d’origine fossile bruts. Ce pourcentage minimal est même fixé à 60 % à partir de 2018 pour ceux qui sont fabriqués dans des installations dont la production aura démarré au 1er janvier 2017. Toute nouvelle installation se doit donc d’être plus performante.

L’article 6 du projet de loi maintient le seuil de 50 % pour les biocarburants et bioliquides produits dans les installations mises en service avant le 5 octobre 2015 (alinéa 4), mais propose de porter immédiatement à 60 % le seuil à atteindre pour les biocarburants et bioliquides produits par les unités de fabrication qui auront été mises en service depuis le 5 octobre 2015 (alinéa 5).

Ce nouveau seuil est celui fixé dans la directive 2015/1513 du 9 septembre 2015 tant dans la proportion exigée que dans la date de mise en application. Le nouvel article L.661-4 définit également ce qu’est une installation « en service » dans les mêmes termes que la directive (« dès lors quune production physique y a eu lieu »). C’est donc bien le démarrage d’une production de biocarburant qui « date » l’installation.

La directive en question prévoyait une application immédiate, mais elle est intervenue après l’adoption de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte qui n’a pas anticipé le renforcement des exigences européennes. L’évolution proposée par le 2° de l’article 6 est donc le rattrapage nécessaire du décalage qui persiste depuis 2015. On relèvera néanmoins que le projet de loi conserve une nuance de la loi française : alors que les directives européennes évoquent directement une « réduction » des émissions de gaz à effet de serre pour résultat attendu, le droit français se réfère à un « potentiel de réduction » des émissions des biocarburants et bioliquides. Cependant cette précision ne remet pas en cause l’application du seuil minimal de réduction de gaz à effet de serre ; elle permet seulement de l’apprécier sur la globalité du cycle de vie en tolérant des performances plus variables à certaines étapes.

Quant au durcissement du seuil, il n’aurait aucun impact sur les productions françaises existantes puisqu’aucune entité industrielle française n’a démarré son activité depuis le 5 octobre 2015. Elles restent donc soumises au seuil des 50 % déjà en vigueur. De même, si une unité de fabrication antérieure reprend une activité après avoir connu une interruption, elle relèverait logiquement du premier taux. Le durcissement du seuil pourrait en revanche avoir un effet sur des productions étrangères ; il relève surtout le niveau d’exigence pour l’avenir, en particulier à l’égard des futures productions de biocarburants avancés.

Sur le texte initial du 2°, votre Rapporteur n’a proposé à la Commission que quelques précisions rédactionnelles et la correction dun petit vide juridique créé par le projet de loi qui ne permet pas de classer, dans l’un ou l’autre des cas envisagés, les installations qui auraient démarré leur production le jour même du 5 octobre 2015.

Il soulève toutefois la question des éléments retenus pour le calcul des réductions démissions de gaz à effet de serre. Il s’agit en effet que l’évaluation des qualités environnementales des biocarburants reflète la réalité de leurs performances ; que les aides publiques soient accordées à bon escient ; et, pour les produits les plus discutables, que le remède ne soit pas pire que le mal...

Les émissions de gaz à effet de serre des carburants fossiles de référence sont déterminées par la directive 2009/28/CE du 23 avril 2009. Cette valeur, de 83,8 gCO2eq/MJ, a été reprise dans la réglementation nationale.

Quant à l’évaluation des émissions générées par la production et l’utilisation des biocarburants et bioliquides, le bilan global additionne les émissions de gaz à effet de serre aux stades de la culture de la matière première, de la fabrication de la molécule incorporée, du transport et de la distribution. Concrètement, les producteurs de biocarburants établissent pour chaque lot une POS (Proof of sustainability) sous couvert du système de traçabilité retenu. Une fois que les déclarations de durabilité sont validées, la DGEC les exploite et élabore le bilan annuel du gain de gaz à effet de serre, notamment.

Mais il apparaît que les modalités de calcul actuellement pratiquées en France n’intègrent pas les coûts carbone des changements indirects dans l’affectation des sols (dits CASI ou ILUC, cf. supra), alors que cette problématique est au cœur de la directive européenne 2015/1513 précitée ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’Union européenne insiste pour que les déclarations des fournisseurs de carburants prennent au moins en compte les « émissions estimatives provisoires moyennes liées aux changements indirects dans laffectation des sols ».

Interrogé par votre Rapporteur, le ministère en charge de la transition écologique et solidaire reconnaît que la directive 2015/1513 n’est pas encore transposée sur ce point. Il a toutefois indiqué que lintégration des émissions estimatives est prévue dans le prochain arrêté traitant de la durabilité des biocarburants.

Au demeurant, l’Union européenne poursuit sa réflexion sur le décompte des émissions liées aux changements indirect d’affectation des sols : dans le projet de directive dite RED 2 en cours d’élaboration, les émissions estimatives ont été supprimées et remplacées par une formule, plus proche de la réalité, permettant de calculer les émissions annualisées résultant de la modification de stock de carbone. Mais le ministère n’envisage pas d’anticiper ces évolutions, qui sont encore en discussion au niveau européen.

On notera qu’il reste aussi à transposer par voie réglementaire les définitions visées à l’article 1er de la directive 2015/1513 et la liste des biocarburants conventionnels et avancés éligibles aux comptabilisations des performances nationales et aux dispositifs de soutien public. En revanche, les objectifs d’incorporations des différentes familles de biocarburants (conventionnels ou avancés) continueront d’être fixés au travers l’article 266 quindecies du code des douanes.

B.   La consolidation du dispositif de contrôle et de sanction des manquements aux obligations de durabilité

Même si l’organisation de la traçabilité des biocarburants et bioliquides peut relever de systèmes volontaires, la responsabilité de prendre des mesures lorsque des cas de fraude sont détectés relève des seuls États membres (cf. point 5 de l’article 3 de la directive 2009/28/CE).

Or, plusieurs États membres ont constaté diverses fraudes. Elles sont surtout de deux ordres ;

– un même lot de biocarburants durables peut être déclaré dans plusieurs pays ;

– ou des huiles brutes peuvent être volontairement contaminées pour être vendues comme usagées et bénéficier ainsi de l’avantage fiscal du double décompte prévu à l’article 266 quindecies.

Le droit français prévoit bien que l’organisme chargé de la gestion du système national de durabilité contrôle en dernier ressort les déclarations réalisées par tous les opérateurs commercialisant des biocarburants et bioliquides après les avoir incorporés aux carburants classiques, qu’ils s’inscrivent dans le cadre des systèmes volontaires ou du système national (articles L. 661-7 et L. 661-8 du code de l’énergie).

Selon le cahier des charges de ces deux systèmes, les adhérents doivent être audités par un organisme indépendant au moins une fois par an. Or, les audits effectués dans le cadre national, duquel relève la quasi-totalité des opérateurs concernés, s’attachent particulièrement à vérifier les déclarations de durabilité. Pour autant, en bout de chaîne, chaque opérateur mettant un lot de biocarburant à la consommation doit adresser mensuellement une déclaration de durabilité à la DGEC – ainsi qu’aux douanes pour bénéficier des allégements fiscaux. Ce document contient notamment les informations relatives aux émissions de gaz à effet de serre. Les déclarations de durabilité sont vérifiées systématiquement par la DGEC qui s’assure de la pertinence des données et du respect du niveau minimal de réduction. S’il était constaté qu’un lot de biocarburant ne répond pas à l’un des critères de durabilité, un signalement serait effectué au bureau F2 de la douane et ce lot serait déduit des quantités de biocarburants prises en compte pour la minoration de TGAP.

Toutefois, le dispositif existant comporte deux limites importantes :

– les agents compétents ne disposent pas de pouvoirs de police permettant de conduire des investigations poussées ;

– et en pratique, la seule véritable sanction étant la perte de la minoration fiscale prévue à l’article 266 quindecies, seuls les distributeurs sont susceptibles d’être pénalisés en cas de fraude, alors qu’elle a pu intervenir en amont, du fait des cultivateurs ou des fabricants industriels.

La loi française actuelle ne permet donc pas de sanctionner ces derniers.

Le 3° de larticle 6 crée donc un régime de contrôle et de sanction plus complet, et plus conforme aux préconisations de lUnion européenne, qui rappelle notamment la responsabilité de chaque opérateur intervenant dans le cycle de vie d’un biocarburant ou d’un bioliquide. Ce régime est défini dans les deux nouveaux chapitres, « Contrôles et sanctions administratives » et « Sanctions pénales », qu’il propose d’introduire au Titre VI du Livre VI du code de l’énergie.

Le 3 ° du présent article 6 propose donc de définir :

 Un dispositif de contrôle renforcé :

Le nouvel article L. 661-10 du code de l’énergie confie la « surveillance administrative » du respect des « obligations de durabilité » ou « règles de durabilité » (article L. 661-11) – à savoir les différents critères de durabilité et toutes les obligations, notamment de déclaration et de justification, incombant aux acteurs des filières de biocarburants énoncés aux articles L. 661-1-1 à L. 661-7 – au préfet de département dans les limites, évidemment, de son territoire de compétence.

La DGEC reste compétente pour juger de la pertinence des déclarations de durabilité et du respect du seuil de réduction des émissions de gaz à effet de serre annoncé par l’opérateur. Elle sera évidemment seule compétente pour exploiter les informations recueillies à l’occasion d’un de ces contrôles. Le préfet encadrera la mise en œuvre des nouveaux pouvoirs d’enquête et de constatation des manquements, mais il exercera cette responsabilité « sous lautorité des ministres chargés de lénergie et de lagriculture ».

En pratique, il s’agit de permettre aux agents de la DGEC, en cas d’enquête, de s’appuyer localement – après demande au préfet concerné – sur les agents placés sous l’autorité de ce dernier.

L’article L. 661-10 précise que cette surveillance active portera sur les obligations incombant aux opérateurs de l’ensemble de la chaîne de production des biocarburants. En dépit du silence du projet de texte, l’esprit du dispositif est de s’appliquer aussi aux obligations des distributeurs : non seulement les déclarations des opérateurs mettant des biocarburants à la consommation seront toujours examinées, mais des vérifications pourront être opérées jusque dans leurs bureaux. Afin de lever toute ambiguïté, votre Rapporteur a proposé de préciser à l’alinéa 12 quil sagit des opérateurs de la chaîne de production « et de distribution » selon l’expression déjà employée à l’article L. 661-3. Il n’y aura donc pas de basculement de la charge des responsabilités des distributeurs sur les producteurs mais un élargissement aux acteurs qui étaient peu mis en cause jusqu’alors.

Votre Rapporteur a proposé par ailleurs d’étendre ce nouveau régime de contrôle et de sanction aux bioliquides. Le projet de loi faisait le choix, pleinement assumé, de réserver ce régime aux biocarburants au motif que seuls les biocarburants sont concernés par le prélèvement supplémentaire de TGAP prévu à l’article 266 quindecies et sa minoration. Votre Rapporteur regrettait que l’on se prive d’un tel instrument opérationnel pour faire respecter les critères de durabilité et autres obligations qui s’imposent autant aux opérateurs des bioliquides qu’aux filières des biocarburants. Certes, l’administration ne disposera pas du levier fiscal pour punir les fausses déclarations, mais elle pourra utiliser les nouvelles sanctions pécuniaires voire pénales, et mettre fin à des publicités mensongères qui leur donneraient un avantage concurrentiel immérité.

L’article L. 661-11 suivant identifie, aux alinéas 13 à 18, les agents qui seront compétents pour « rechercher et constater les manquements » aux obligations précédemment rappelées, y compris s’agissant des obligations déclaratives.

Les agents de la DGEC déjà compétents sur ces questions seront ainsi renforcés et relayés par plusieurs autres catégories dagents publics exerçant déjà des pouvoirs de police administrative sur les différents terrains potentiels (territoire national ou communal, espaces naturels, forêts etc.) et/ou disposant des expertises techniques leur permettant de repérer les anomalies. Il s’agit :

– des inspecteurs de l’environnement mentionnés à l’article L. 172-1 du code de l’environnement ;

– des gardes champêtres ;

– des agents des douanes ;

– des agents des services de l’État chargés des forêts ;

– des agents de l’Office national des forêts, ces deux dernières catégories restant cantonnées à leur périmètre de mission, les zones forestières ;

– enfin, les agents des réserves naturelles mentionnés au I de l’article L. 332-20 du code de l’environnement, eux-mêmes dans les limites de leurs compétences.

On peut observer que cette liste est très proche de la liste définie par ledit article L. 332-20 pour la constatation des infractions sur les réserves naturelles.

Chacun de ces agents publics, dont les agents de la DGEC, sera « commissionné et assermenté » pour exercer ces nouvelles missions. Ils devront donc avoir prêté serment et détenir une commission prouvant leur identité et leur habilitation à enquêter, effectuer les contrôles et, le cas échéant, constater les infractions.

Le croisement des périmètres d’intervention de ces différentes catégories d’agents permettra de couvrir tout le territoire national. En revanche, ils ne disposent pas de pouvoir de police hors des frontières. En cas de suspicion, les agents de la DGEC solliciteront leurs homologues étrangers pour que des investigations soient conduites. Et en cas de doutes sérieux, le lot de biocarburants concerné pourra être provisoirement écarté jusqu’à ce que les acteurs aient apporté les justificatifs nécessaires.

Au demeurant, le ministère en charge de la transition écologique et solidaire poursuit son action pour que la Commission européenne mette en place un système de traçabilité, du puits à la roue, unique et obligatoire pour éviter notamment les fraudes jouant sur les disparités entre les législations nationales.

Entièrement favorable au nouveau dispositif proposé, Votre Rapporteur a présenté un amendement de réécriture globale de l’article L. 661-11 à des fins uniquement rédactionnelles.

Le nouvel article L. 661-12 définit les pouvoirs d’investigation sur pièces et sur place dévolus aux agents dûment assermentés : ils auront accès aux zones de culture ainsi qu’à tous lieux ou bâtiments où se réaliserait une des étapes de la « chaîne de durabilité des biocarburants ». Cette « chaîne » correspond au cycle de vie des biocarburants déjà évoqué, mais aussi à la phase où le distributeur doit établir des déclarations de durabilité pour justifier de la qualité environnementale de ses produits. Pour le ministère, les agents assermentés doivent pouvoir accéder aux bureaux des distributeurs et à la documentation dont ils disposent. Pour que la portée de l’article soit incontestable, votre Rapporteur a proposé une rédaction plus explicite de la notion de chaîne de durabilité.

L’accès aux installations sera limité à leurs heures d’ouverture ; mais les agents pourront dépasser cette contrainte en obtenant une autorisation judiciaire par ordonnance du juge des libertés et de la détention sur le fondement des articles L. 142-23 à L. 142-29 du code de l’énergie – qui complètent aussi les pouvoirs d’enquête des agents intervenant dans les secteurs électriques et gaziers.

Enfin, l’article assure aux agents assermentés « un accès à tous les documents, quel quen soit le support, quils jugent utiles à la réalisation de leur mission ».

 Une procédure garantissant les droits de la défense des opérateurs :

Si le dispositif définit de nouveaux pouvoirs de contrôle plus importants, il reste équilibré grâce aux garanties quil accorde aux opérateurs mis en cause.

L’article L. 661-13 précise ainsi que :

– les manquements constatés feront l’objet de procès-verbaux ;

– ces procès-verbaux, de même que les sanctions infligées lorsqu’elles sont maximales, seront notifiés aux « personnes concernées » (soit, plus exactement, les opérateurs concernés par le constat de manquement, comme l’a précisé la Commission sur proposition de votre Rapporteur), parallèlement à l’information de « lautorité administrative » (à savoir le ministère) ;

– ces personnes seront invitées à présenter leurs observations écrites ou orales dans un délai de quinze jours à compter de la notification. Un renvoi à l’article L. 142-33 du code de l’énergie impose en outre que les sanctions soient prononcées après que les intéressés aient reçu notification des griefs et aient eu la possibilité de consulter le dossier et présenter leurs observations avec l’assistance de leur choix.

Larticle L. 661-14 interdit de saisir l’autorité administrative de faits remontant à plus de trois ans « sil na été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction ».

Il s’agit d’un délai de prescription commun, qui n’interdit pas que des faits apparus à l’occasion d’une procédure puissent être utilisés à l’encontre d’un autre opérateur dès lors que leur découverte date de moins de trois ans.

L’article L. 661-15 rappelle le caractère contradictoire de l’instruction et de la procédure conduite devant l’autorité administrative selon la procédure décrite à l’article L. 661-16. L’autorité administrative doit notamment mettre l’opérateur en demeure de se conformer aux obligations de durabilité prévues au Titre VI avant de prononcer une sanction pour manquement.

Le délai imparti à cette mise en demeure fait partie des modalités d’application du nouveau chapitre dont la définition est renvoyée à un décret en Conseil d’État, au même titre que l’assermentation mentionnée à l’article L. 661‑11 (cf. article L. 661-19).

Enfin, l’article L. 661-18 exige que les décisions prononçant la sanction pécuniaire prévue dans le nouveau régime soient motivées et notifiées à l’opérateur concerné.

 De nouvelles sanctions :

Corrélativement à la perte éventuelle de l’allégement fiscal prévu à l’article 266 quindecies, le dispositif proposé par le prévoit plusieurs niveaux de sanction :

– La mise en demeure d’un opérateur coupable de manquement à ses obligations de durabilité peut être rendue publique (article L. 661-16) ;

– Si l’opérateur ne se conforme pas à cette mise en demeure, ou qu’il a « sciemment » déclaré comme durable un produit, une matière première ou un produit intermédiaire ne respectant pas l’un des critères de durabilité, l’autorité administrative peut prononcer à son encontre une sanction pécuniaire (même article). La décision prononçant cette sanction peut aussi faire l’objet d’une publication au Journal officiel selon la gravité de l’infraction (article L. 661-18).

L’article L. 661-17 précise toutefois que la sanction pécuniaire ne peut être prononcée que si le manquement n’est pas constitutif d’une infraction pénale. Elle doit respecter un principe de proportionnalité : son montant est « proportionné à la gravité de ce manquement, à la situation de lintéressé, à lampleur du dommage et aux avantages qui en ont été retirés ». Enfin, en tout état de cause, ce montant « ne peut excéder le double de la transaction commerciale dont le produit ou la matière première ne respectant pas les règles de durabilité a fait lobjet ». Ainsi, l’administration ne pourra demander, à titre de sanction, plus du double du prix que l’opérateur a retiré de la vente des produits incriminés.

Votre Rapporteur a proposé de corriger une lacune du texte qui avait omis, sans nécessité, de viser les transactions commerciales portant sur les produits intermédiaires dans la définition du plafonnement des sanctions.

Outre quelques corrections rédactionnelles, votre Rapporteur a également proposé de préciser, une nouvelle fois, les « règles de durabilité » visées à l’alinéa 28 comme l’ensemble des obligations de qualité environnementale et de responsabilité prévues aux articles L. 661-1-1 à L. 661-7.

– Enfin, la dernière sanction créée par le dispositif (article L. 661-20) est d’ordre pénal : elle vise à punir ceux qui s’opposent aux enquêtes et constatations menées par les agents assermentés dans le cadre du nouveau régime, ou qui refusent de leur communiquer les documents mentionnés à l’article L. 661-12 (c’est-à-dire tous les documents « quils jugent utiles à la réalisation de leur mission »).

Ces infractions seront punies de trois mois de prison et 7 500 euros d’amende.

*

*     *

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD98 du rapporteur.

Puis elle examine les amendements identiques CD65 de M. Loïc Prud’homme et CD84 de Mme Delphine Batho.

M. Loïc Prud’homme. L’amendement CD65 vise à ajouter les mots « directes et indirectes » après la première occurrence du mot « émissions » à l’alinéa 4 de l’article 6, qui consiste à préciser que la production et l’utilisation de biocarburants et de bioliquides doivent représenter un potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 50 % par rapport aux émissions liées aux carburants et combustibles d’origine fossile pour les biocarburants et les bioliquides.

Il s’agit de compléter ces dispositions de façon à tenir compte, dans le calcul du potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre, des émissions indirectes liées notamment aux conditions de production de ces biocarburants et bioliquides. En effet, il nous semble indispensable – comme aux associations sollicitées – de souligner les incidences néfastes du changement d’affectation de sols naturels qui participent du stockage de carbone, tels que les forêts, en terres cultivées pour la production de ces substances.

Mme Delphine Batho. L’amendement CD84, déjà défendu hier en commission des affaires économiques, vise à tenir compte, dans la comparaison entre les émissions de gaz à effet de serre liées aux biocarburants et celles qui sont liées aux énergies fossiles, des émissions qui procèdent d’un changement d’affectation des sols.

M. le ministre d’État. L’article 6 reprend les dispositions de la directive européenne 2015/1513 du 9 septembre 2015, dite directive ILUC – Indirect Land Use Change, ou changement indirect d’affectation des sols – qui prévoit, il est vrai, que les effets indirects des changements dans l’affectation des sols soient pris en compte par les États membres. Je souscris au principe qui inspire votre amendement mais, en pratique, force est de reconnaître que des incertitudes pèsent sur le calcul de ces effets, raison pour laquelle la directive propose une méthode d’évaluation estimative provisoire qui permettra aux États de les quantifier et d’en rendre compte. Ces dispositions seront reprises par voie réglementaire lors de la modification de l’arrêté du 23 novembre 2011. Dans ces conditions, le Gouvernement suggère le retrait de ces deux amendements.

M. le rapporteur. Je partage le point de vue des auteurs des amendements quant à la nécessité de tenir compte des émissions de gaz à effet de serre résultant des changements d’affectation des sols. Cependant, leur rédaction me semble donner une définition trop floue des effets « indirects » puisqu’elle ne vise pas explicitement les changements d’affectation des sols. Prenant note de l’intention qu’a le Gouvernement de modifier prochainement l’arrêté pour intégrer ces effets au calcul des réductions d’émissions de gaz à effet de serre, je propose également le retrait de ces amendements.

M. Loïc Prud’homme. Nous maintenons le nôtre malgré ces arguments car il nous semble important de tenir compte des impacts de ces changements d’affectation des sols.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels ou de précision CD99, CD100, CD102, CD103, CD104 et CD105 du rapporteur.

Elle se penche ensuite sur l’amendement CD106 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à étendre le périmètre de la nouvelle surveillance administrative aux bioliquides. Il serait regrettable de se priver d’utiliser un instrument opérationnel tel que ce nouveau dispositif, qui couvre les biocarburants, en n’englobant pas également les bioliquides afin de faire respecter les critères de durabilité et autres obligations déclaratives qui s’imposent autant aux opérateurs des chaînes des bioliquides qu’aux filières des biocarburants.

M. le ministre d’État. Actuellement, le système de déclaration de la durabilité existe pour les biocarburants mais pas pour les bioliquides tels que les biolubrifiants et les biocombustibles de chauffage, dont les distributeurs ne sont pas astreints à déclarer leur mise à la consommation, ce qui empêche de relever d’éventuelles infractions. Au demeurant, il ne semble pas nécessaire d’élargir aux bioliquides les sanctions prévues pour les biocarburants étant donné la faiblesse des flux de produits vendus – et donc des enjeux. Un tel élargissement ne présentant toutefois aucune difficulté, je m’en remets à la sagesse du Parlement.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD107 et CD108 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CD109 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement de précision juridique explicite quelles étapes de la chaîne peuvent faire l’objet de la surveillance : il s’agit de la production, de la distribution et de la déclaration.

M. le ministre d’État. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement CD109.

Elle adopte successivement l’amendement de coordination CD110 et les amendements rédactionnels ou de précision CD111, CD112, CD113, CD114, CD115 et CD116 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CD117 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement substitue l’expression « l’opérateur économique » au terme « l’intéressé » : autrement dit, ce n’est pas l’employé d’une entreprise qui est à mettre en cause, mais l’entreprise elle-même. C’est la preuve que les amendements d’apparence purement rédactionnelle sont parfois fort utiles !

Mme la présidente Barbara Pompili. Je n’en doutais pas, monsieur le rapporteur…

M. le ministre d’État. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement CD117.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels ou de précision juridique CD118, CD119, CD120 et CD121 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement CD122 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à préciser qu’il n’est pas seulement tenu compte du produit final ou de la matière première pour fixer le montant de la sanction, mais aussi du produit intermédiaire qui sert aux mélanges de carburants.

M. le ministre d’État. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements CD123, CD124, CD125 et CD126 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 6 modifié.

Article 6 bis [nouveau]
(articles L. 651-2 et L. 651-3 [nouveaux] du code de lénergie)
Nouvelles garanties pour la distribution de carburants

Le développement de l’utilisation des biocarburants est un des moyens de réduire la consommation des énergies fossiles et, dans une certaine mesure, les émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports.

Mais tous les mélanges ne sont pas compatibles avec tous les véhicules ou les engins fonctionnant aux carburants (comme les machines agricoles) actuellement en service. Or, l’Union européenne exige non seulement que les consommateurs soient clairement informés des contraintes d’utilisation des carburants mis en vente, mais qu’une distribution suffisante des carburants compatibles avec tout type de véhicule soit assurée.

Votre Rapporteur a ainsi proposé l’introduction, au titre V La distribution du livre VI Les dispositions relatives au pétrole, biocarburants et bioliquides du code de l’énergie, de deux nouveaux articles L. 651-2 et L. 651-3 qui donneront à l’État les moyens de sécuriser ces approvisionnements en carburants.

S’agissant de la filière essence, le supercarburant E10 (ou SP95-E10), par exemple, qui contient 10 % de volume d’éthanol, a vocation à devenir le carburant de référence. Mais il n’est pas utilisable par les véhicules mis en circulation avant 2000. Or, les parts de marché de l’essence E5 (SP95 ou SP98), qui ne nécessite aucune adaptation des moteurs, diminuent. Anticipant les difficultés à venir, le nouvel article L. 651-3 ouvre la possibilité dorganiser, en cas de raréfaction de sa distribution, un dispositif assurant une fourniture suffisante d’E5 si nombre de véhicules ou engins incompatibles avec l’E10 sont encore en fonctionnement.

S’agissant de la filière diesel, l’Union européenne demande d’ores et déjà à la France d’imposer le maintien d’une distribution de gazole compatible avec tous véhicules dans les stations-service qui mettront en vente le nouveau gazole B10 (pouvant contenir jusqu’à 10 % d’esters méthyliques d’acides gras – EMAG).

Le nouvel article L. 651-2 conditionne donc la distribution de ce nouveau carburant au maintien, dans chaque station-service qui le proposerait à la consommation, de la fourniture de carburant compatible avec les moteurs diesel des véhicules ou engins en service.

*

*     *

La commission examine l’amendement CD152 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet article additionnel encadre notamment la future distribution du biodiésel B10. Les carburants qui contiennent une part plus importante de biocarburant ont vocation à se développer mais ne sont pas actuellement utilisables par tous les véhicules. Il s’agit d’éviter que l’essor de la distribution de ces nouveaux carburants n’évince la distribution des carburants compatibles avec tous les véhicules en circulation. Cela correspond à une exigence de l’Union européenne concernant la mise en vente du nouveau gazole B10, mais c’est aussi une précaution à prendre pour accompagner le développement de l’essence E10.

M. le ministre d’État. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Chapitre V
Dispositions relatives à la réduction des émissions de certains polluants atmosphériques

Article 7
(article L. 222-9 du code de lenvironnement)
Réduction des émissions de polluants atmosphériques : transposition de la directive 2016/2284 du 14 décembre 2016

I.   La législation européenne sur la qualité de l’air

A.   Trois dispositifs juridiques de dimension européenne

La pollution de lair est un problème pris en considération à léchelle européenne : de nombreux polluants se diffusent sur de grandes distances. Par exemple, une étude publiée en juin 2016 sur la pollution atmosphérique causée par la combustion de charbon ([54]) indique que, bien que la Pologne et lAllemagne – qui recourent de manière importante à ce combustible – soient, logiquement, fortement impactées en termes sanitaires, la France, pourtant faible utilisateur de cette énergie fossile, subit sur son territoire les effets des émissions transfrontalières provenant de ces deux pays (selon cette étude, sur les 1 380 décès annuels dus au charbon dans le pays, seuls 50 sont liés à lactivité française, contre 460 « importés » dAllemagne, et 160 de Pologne).

La législation de l’Union européenne sur la qualité de l’air comprend trois volets :

1° La définition d’objectifs de réduction pour la concentration de polluants dans l’air ambiant ;

2° La fixation de limites nationales contraignantes pour l’ensemble des polluants de l’air ;

3° Des dispositions de régulation des émissions pour certains secteurs ou sources identifiés, soit par la fixation de standards (par exemple pour les émissions des véhicules, avec la série des normes Euro 1 à 6 pour les véhicules légers et les normes EURO I à VI pour les poids lourds), soit par la définition d’exigences de qualité des produits (par exemple pour le soufre, le plomb et le benzène dans les carburants).

S’agissant du premier volet d’action, à savoir la définition d’objectifs de réduction pour la concentration de polluants dans l’air ambiant, le cadre juridique en vigueur au niveau de l’Union européenne est défini par la directive 2004/107/CE du 15 décembre 2004 concernant larsenic, le cadmium, le mercure, le nickel et les hydrocarbures aromatiques polycycliques dans lair ambiant (modifiée en 2009, puis en 2015) et par la directive 2008/50/CE du 21 mai 2008 concernant la qualité de lair ambiant et un air pur pour lEurope (également modifiée en 2015).

Le deuxième volet d’action, visant à fixer des limites nationales contraignantes pour l’ensemble des polluants de l’air – a trouvé une première traduction juridique en 2001, avec l’adoption de la directive dite « NEC » (National Emission Ceilings – plafonds nationaux d’émission) ([55]). Modifiée à plusieurs reprises (en 2006, en 2009 et en 2013), la réglementation de ces plafonds nationaux d’émission a été remplacée par une nouvelle directive en décembre 2016 ([56]). Cest à la transposition de cette nouvelle directive du 14 décembre 2016 quest directement lié larticle 7 du présent projet de loi.

En complément des trois dispositifs précités, le droit de l’Union européenne comporte plusieurs directives dont la mise en œuvre contribue indirectement à lutter contre la pollution de l’air (par exemple la « directive nitrates » de 1991, qui concerne la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles).

Au-delà, l’Union européenne est également partie prenante de dispositifs internationaux tendant à la définition d’objectifs de réduction des émissions polluantes, notamment la Convention des Nations Unies sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance.

B.   Des progrès significatifs, mais insuffisants

L’Union européenne est parvenue à réduire de manière significative les émissions de plusieurs substances polluantes pour l’air au cours des dernières décennies, notamment le dioxyde de soufre, le monoxyde de carbone, le benzène et le plomb. Des niveaux de qualité de l’air acceptables ont pu être atteints à travers l’Europe en ce qui concerne le carbone et le plomb ; les émissions de monoxyde de carbone ont diminué de 32 % dans l’UE entre 2002 et 2011.

La mise en œuvre de la directive « NEC » de 2001 a joué un rôle déterminant en la matière, en plafonnant, à partir de 2010, les émissions annuelles totales de dioxyde de soufre (SO2), d’oxydes d’azote (NOx), de composés organiques volatils non méthaniques (COVNM) et d’ammoniac (NH3) des États membres ([57]).

En dépit de ces progrès, la pollution de l’air continue de se traduire par des nuisances importantes sur la santé et l’environnement. En particulier, l’ozone, les particules, le dioxyde d’azote et certains composés organiques représentent des menaces significatives pour la santé humaine, les écosystèmes, les récoltes agricoles… Selon l’Agence européenne pour l’environnement, « près de 90 % de la population urbaine en Europe est exposée à des polluants dont les concentrations sont supérieures aux niveaux de qualité de lair supposés nocifs pour la santé. »

Le rapport « Air quality in Europe » de l’Agence européenne pour l’environnement
(décembre 2016)

Ce rapport de l’Agence européenne pour l’environnement, qui se base sur des données recueillies de 2000 à 2014 dans les 28 États de l’Union, montre que les politiques d’amélioration de la qualité de l’air par réduction des émissions polluantes ont produit et continuent de produire des résultats tangibles, mais qu’une grande partie des habitants et des écosystèmes européens sont encore exposés à une pollution de l’air qui excède les standards, en particulier ceux fixés par les « lignes directrices sur la qualité de l’air » de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

L’ensemble des émissions contribuant aux concentrations de particules, d’ozone et de dioxyde d’azote ont diminué sur la période 2000-2014. Mais les concentrations de particules fines PM10, notamment, étaient, en 2014, au-dessus des seuils de référence journaliers dans 21 des 28 États, et les émissions d’ozone étaient supérieures aux seuils dans 16 des 28 États.

La pollution de lair continue de produire des effets négatifs importants sur la santé des populations, avec des impacts significatifs sur léconomie (réduction de la durée de vie, augmentation des dépenses médicales, réduction de la productivité…). Les trois polluants les plus préoccupants pour la santé humaine en Europe sont les particules fines, le dioxyde dazote et lozone. Les estimations citées par le rapport font état de 436 000 décès en 2013 dus à une exposition prolongée aux particules fines PM2,5, 68 000 décès dus à lexposition aux concentrations de dioxyde dazote, et 16 000 à lozone. Quant aux polluants les plus nuisibles pour les écosystèmes européens, le rapport démontre que sont particulièrement nocifs lozone, lammoniac et loxyde dazote ; ils ont un effet négatif sur la croissance des plantes, et contribuent à lacidification des sols et des eaux douces, causant ainsi des dégâts significatifs pour la biodiversité.

Les transports, l’industrie, les installations produisant de l’électricité, l’agriculture, le chauffage des habitations et le traitement des déchets contribuent tous à la pollution de l’air en Europe. Certains secteurs n’ont pas réduit suffisamment leurs émissions pour permettre à l’Europe de se conformer aux recommandations de l’OMS (notamment s’agissant des émissions d’ammoniac NH3 par le secteur agricole et des émissions d’oxyde d’azote par le transport routier), voire ont augmenté leurs émissions de certains polluants.

C.   La directive 2016/2284 du 14 décembre 2016

Lobjet de la directive 14 décembre 2016 est de fixer de nouveaux engagements des États membres, les « engagements nationaux de réduction des émissions », pour cinq catégories de substances polluantes : les émissions anthropiques de dioxyde de soufre (SO2), doxydes dazote (NOx), de composés organiques volatils non méthaniques (COVNM), dammoniac (NH3) et – nouveauté par rapport à la directive « NEC » de 2001 – de particules fines PM2,5 ([58]).

Polluants anthropiques et polluants naturels

Les polluants atmosphériques peuvent être classés en différentes catégories. On distingue ainsi les polluants « primaires » (directement émis dans l’atmosphère) des polluants « secondaires » (qui se forment dans l’atmosphère à partir de substances gazeuses). On distingue également les polluants naturels des polluants anthropiques, selon l’origine des émissions. Les « émissions anthropiques » sont définies, par la directive « NEC » de 2001 comme par celle de 2016, comme « les émissions de polluants dans latmosphère liées à lactivité humaine ».

Par exemple, les particules fines primaires trouvent leur origine soit dans des phénomènes naturels (cendres volcaniques, pollens…), soit dans des activités humaines (émissions anthropiques : incinération de déchets, chauffage domestique, particules émises lors du freinage des véhicules…). Le méthane (CH4), qui cause la formation de polluants secondaires, est principalement émis par les activités du secteur agricole (ruminants), le traitement des déchets et la production d’énergie.

L’annexe I de la directive du 14 décembre 2016 prévoit que les émissions naturelles doivent être déclarées annuellement par les États membres mais ne sont pas intégrées aux totaux nationaux et font l’objet d’une déclaration séparée.

Contrairement au dispositif antérieur mis en place par la directive de 2001, qui assignait des objectifs chiffrés en volumes (kilotonnes), la directive de 2016 (annexe II) fixe des objectifs chiffrés pour chaque État membre, exprimés en pourcentages sur une base annuelle : ainsi, à titre d’exemple, la France, l’Allemagne, la Pologne, l’Italie, la Roumanie et l’Irlande se sont engagées à réaliser les réductions suivantes par rapport aux niveaux constatés pendant l’année de référence (qui est l’année 2005) :

● Pour chaque année de 2020 à 2029, les réductions doivent être d’au moins :

 

Réduction des émissions de SO2 par rapport à 2005

Réduction des émissions de NOx par rapport à 2005

Réduction des émissions de COVNM par rapport à 2005

Réduction des émissions de NH3 par rapport à 2005

Réduction des émissions de PM2,5 par rapport à 2005

France

55 %

50 %

43 %

4 %

27 %

Allemagne

21 %

39 %

13 %

5 %

26 %

Pologne

59 %

30 %

25 %

1 %

16 %

Italie

35 %

40 %

35 %

5 %

10 %

Roumanie

77 %

45 %

25 %

13 %

28 %

Irlande

65 %

49 %

25 %

1 %

18 %

● Pour chaque année à partir de 2030, les réductions doivent être d’au moins :

 

Réduction des émissions de SO2 par rapport à 2005

Réduction des émissions de NOx par rapport à 2005

Réduction des émissions de COVNM par rapport à 2005

Réduction des émissions de NH3 par rapport à 2005

Réduction des émissions de PM2,5 par rapport à 2005

France

77 %

69 %

52 %

13 %

57 %

Allemagne

58 %

65 %

28 %

29 %

43 %

Pologne

70 %

39 %

26 %

17 %

58 %

Italie

71 %

65 %

46 %

16 %

40 %

Roumanie

88 %

60 %

45 %

25 %

58 %

Irlande

85 %

69 %

32 %

5 %

41 %

Chaque État doit établir et mettre en œuvre un programme national de lutte contre la pollution atmosphérique en vue de remplir ses engagements de réduction des émissions, et communiquer ce programme à la Commission européenne. Il a l’obligation de consulter le public et les autorités locales compétentes en matière de qualité de l’air. Ces programmes nationaux « devraient envisager des mesures applicables à tous les secteurs concernés, y compris lagriculture, lénergie, lindustrie, le transport routier, le transport maritime intérieur, le chauffage domestique et lutilisation dengins mobiles non routiers et de solvants ». Chaque État doit également définir le régime de sanctions applicable en cas de violation des règles nationales adoptées en vertu de la directive.

Toutefois, chaque État membre a le libre choix des mesures à adopter pour respecter ses engagements de réduction (par exemple, choisir entre une trajectoire linéaire ou une trajectoire non linéaire de réduction). La directive fixe une liste de mesures obligatoires (notamment l’interdiction d’utiliser des engrais au carbonate d’ammonium), une liste de mesures facultatives (par exemple l’interdiction du brûlage des déchets agricoles), et la possibilité de recourir à « des mesures ayant un effet datténuation équivalent » ainsi que la possibilité d’exempter, par exemple, les petites entreprises.

L’article 6 de la directive prévoit que les États membres « mettent à jour leurs programmes nationaux de lutte contre la pollution atmosphérique au minimum tous les quatre ans ». La Commission européenne examine chaque programme national au regard des exigences posées par la directive ; ses conclusions sont publiées.

Il s’y ajoute pour les États des obligations annuelles de recensement et de déclaration. L’article 8 dispose qu’ils doivent élaborer, communiquer et mettre à jour chaque année des « inventaires nationaux des émissions » pour dix substances polluantes, énumérées dans l’annexe I de la directive : les cinq substances faisant l’objet des engagements de réduction, auxquelles s’ajoutent trois métaux lourds (plomb, mercure et cadmium), les « polluants organiques persistants » (POP) et les particules PM10. Ces inventaires doivent répertorier les émissions nationales totales de chacun de ces polluants en distinguant par catégorie de sources.

D’autre part, les États doivent présenter tous les quatre ans des inventaires nationaux des émissions réparties dans l’espace et des inventaires des grandes sources ponctuelles, ainsi que, tous les deux ans, des projections nationales concernant les cinq substances faisant l’objet de leurs engagements de réduction.

L’ensemble des inventaires et projections doit être communiqué à la Commission européenne et à l’Agence européenne pour l’environnement. Celles-ci examinent les données ainsi fournies, et réalisent des contrôles « destinés à vérifier la transparence, lexactitude, la cohérence, la comparabilité et lexhaustivité des informations communiquées ».

La directive précise – ce qui est également nouveau par rapport à la directive antérieure – que, outre la révision quadriennale, le contenu des programmes nationaux doit être mis à jour dans les dix-huit mois suivant la présentation d’un inventaire national ou des dernières projections nationales si, selon les données présentées, les engagements nationaux ne sont pas respectés ou risquent de ne pas lêtre.

Les États doivent enfin prendre les mesures nécessaires pour que leurs programmes nationaux et leurs inventaires, ainsi que leurs mises à jour, soient rendus publics (par publication sur un site Internet).

Les États membres doivent transposer cette directive dans leur droit national avant le 1er juillet 2018.

II.   Le droit national en vigueur : l’article L. 222-9 du code de l’environnement

La planification de l’action en matière de qualité de l’air est dotée de plusieurs outils juridiques régis par le code de l’environnement : le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie (articles L. 222-1 à L. 222-3), le plan de protection de l’atmosphère (articles L. 222-4 à L. 222-7) et le plan de déplacements urbains (article L. 222-8).

– Le schéma régional du climat, de lair et de lénergie (SRCAE) est élaboré conjointement par l’État et la région. Ayant un caractère obligatoire, il fixe des orientations et des objectifs à l’horizon 2020 et 2050 ;

– Le plan de protection de latmosphère (PPA) est élaboré par le préfet, est obligatoire pour toutes les agglomérations de plus de 250 000 habitants ainsi que pour certaines autres zones, et doit être compatible avec le SRCAE. Le PPA comporte les mesures nécessaires pour ramener, à l’intérieur de la zone qu’il couvre, la concentration en polluants dans l’atmosphère à un niveau conforme aux normes de qualité de l’air ;

– Le plan de déplacements urbains (PDU) définit les principes de l’organisation des transports de personnes et de marchandises, de la circulation et du stationnement, dans un périmètre de transports urbains, c’est-à-dire à l’échelle d’une commune ou d’un EPCI compétent en matière de transport de personnes. Le PDU est arrêté par l’autorité organisatrice. Il doit également être compatible avec le SRCAE.

D’autre part, les SRADDET (schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires), élaborés par les régions, créés par la loi dite « NOTRe » ([59]) et définis par l’article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, doivent fixer des objectifs de moyen et long termes en matière de pollution de l’air.

À ces quatre catégories de plans définis par le législateur, s’est ajouté en 2003, conformément à la directive 2001/81/CE du 23 octobre 2001 (directive « NEC »), un « programme de réduction des émissions de polluants atmosphériques », établi au niveau national, par arrêté ministériel du 8 juillet 2003.

L’article 64 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a introduit dans le code de l’environnement un nouvel article L. 222-9, qui dispose que des objectifs nationaux de réduction des émissions de polluants atmosphériques, à l’exclusion des émissions de méthane entérique naturellement produites par l’élevage de ruminants, doivent être fixés par décret pour l’année 2020, pour l’année 2025 et pour l’année 2030.

Il prévoit également qu’un plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA) est publié par voie d’arrêté afin d’atteindre ces objectifs, et que ce plan est réévalué tous les cinq ans.

Il dispose enfin que les objectifs et les actions du plan national doivent être « pris en compte » dans les schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE), dans les « schémas régionaux en tenant lieu », et dans les plans de protection de l’atmosphère (PPA).

Le PREPA prévu par larticle L. 222-9 a été élaboré et publié récemment (décret n° 2017-949 et arrêté du 10 mai 2017) ; il porte sur la période 2017-2021 et comporte 54 séries de mesures, parmi lesquelles : le renforcement des mesures d’urgence dans le secteur industriel en cas de pic de pollution, l’expérimentation d’un fonds « air-industrie » avec les collectivités territoriales, la convergence de la fiscalité entre l’essence et le gazole, la mise en œuvre des zones à circulation restreinte (ZCR, l’élaboration d’une feuille de route pour réduire les émissions polluantes des navires, l’interdiction de la vente des incinérateurs de jardin, ainsi que plusieurs mesures de sensibilisation des citoyens et de valorisation des bonnes pratiques.

III.   Les dispositions du projet de loi

La directive 2016/2284 du 14 décembre 2016 ayant été adoptée après la promulgation de la loi du 17 août 2015, le présent projet de loi propose une rédaction globale de l’article L. 222-9 du code de l’environnement pour transcrire les dispositions de cette directive. Ce faisant, compte tenu du dispositif déjà ambitieux mis en place par la France, les adaptations législatives apparaissent marginales.

Les modifications apportées à la rédaction de l’article L. 222-9 sont les suivantes :

En premier lieu, conformément aux termes de la directive du 14 décembre 2016, la nouvelle rédaction de l’article L. 222-9 précise que les objectifs nationaux à fixer ne concernent que les émissions anthropiques ; tout comme la rédaction antérieure, sont exclues de façon explicite les émissions de méthane entérique naturellement produites par l’élevage de ruminants (cet élevage, activité humaine, est considéré comme produisant des émissions anthropiques et non des émissions naturelles).

En second lieu, les objectifs ne sont plus fixés pour l’année 2020, l’année 2025 et l’année 2030, mais pour les périodes 2020-2024, 2025-2029 et « à partir de 2030 ». Ce faisant, on peut noter que ce calendrier n’est pas strictement calé sur celui de la directive, qui fixe des engagements des États pour chaque année à partir de 2020.

S’agissant du plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques, il lui revient désormais de fixer également « les actions à mettre en œuvre » afin d’atteindre les objectifs de réduction des émissions polluantes.

Enfin, conformément à la directive européenne, les modalités de révision du plan sont précisées :

– d’une part, tous les quatre ans (et non plus tous les cinq ans comme le prévoyait la rédaction antérieure de l’article L. 222-9),

– d’autre part, dans l’intervalle, si les données d’un nouvel inventaire national des émissions ou de nouvelles projections nationales montrent que les objectifs ne sont pas respectés ou risquent de ne pas l’être ; le délai pour procéder à la révision du plan est alors de dix-huit mois à compter de la présentation du dernier inventaire ou des dernières projections.

Votre Rapporteur salue la volonté du Gouvernement de transposer rapidement la nouvelle directive dans le droit national, en rappelant que la France n’a, jusqu’à présent, pas été exemplaire en matière d’application du droit européen sur la qualité de l’air : la France fait malheureusement partie des États de l’Union concernés par une procédure contentieuse engagée par la Commission européenne, qui a constaté des manquements répétés aux engagements pris par ces États en matière de réduction des émissions de dioxyde d’azote en vertu de la directive précitée du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe.

*

*     *

La commission adopte successivement les amendements CD127 et CD128 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CD130 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à préciser à quel type de schéma il est fait référence dans tel et tel type de région.

M. le ministre d’État. Pour englober les collectivités d’outre-mer, il conviendrait d’ajouter une référence aux schémas régionaux d’aménagement prévus à l’article L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales.

M. le rapporteur. La mention figure dans le texte de l’amendement.

M. le ministre d’État. Dans ce cas, j’émets un avis favorable.

La commission adopte l’amendement CD130.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD129 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à supprimer une redondance.

M. le ministre d’État. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement CD129.

Puis elle adopte l’article 7 modifié.

Article 7 bis [nouveau]
(article L. 222-5 du code de lenvironnement)
Plans daction dans le périmètre des PPA

L’article L. 222-4 du code de l’environnement dispose que, dans toutes les agglomérations de plus de 250 000 habitants, ainsi que dans des zones définies par décret dans lesquelles les normes de qualité de l’air ne sont pas respectées ou risquent de ne pas l’être, le préfet doit élaborer un plan de protection de l’atmosphère (PPA). L’article L. 222-5 précise que l’objet d’un PPA est de ramener, à l’intérieur du périmètre qu’il couvre, les concentrations de polluants dans l’atmosphère à un niveau conforme aux normes.

La commission a adopté un amendement de M. Martial Saddier, complétant l’article L. 222-5 et visant à imposer, dans le périmètre des PPA, l’élaboration par le préfet de département, en concertation avec les collectivités locales concernées, d’un plan d’action favorisant le recours aux énergies les moins émettrices de particules et facilitant le raccordement aux infrastructures gazières publiques existantes.

*

*     *

La commission examine l’amendement CD4 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Je connais votre engagement en faveur de la qualité de l’air, monsieur le ministre d’État, et vous connaissez le mien. Cet amendement vise à ce qu’il soit donné, dans les plans de protection de l’atmosphère (PPA), la possibilité aux préfets d’élaborer avec les collectivités territoriales un schéma encourageant le recours aux énergies les moins émettrices de particules.

L’annonce que vous avez faite aujourd’hui va dans le sens de cet amendement : vous avez, semble-t-il, autorisé le financement à 40 % du raccordement des réseaux de biogaz par le réseau de gaz naturel existant. C’est une décision très importante, puisque le gaz naturel, a fortiori le biogaz, n’émettent aucune particule fine. Pourtant, les élus des zones touchées par des enjeux liés aux particules fines savent tous combien il est difficile, voire impossible d’étendre le réseau de gaz naturel compte tenu des coûts de raccordement.

Encore une fois, vous avez pris une très bonne décision pour le biogaz. L’amendement vise à ce qu’il soit possible – au moins dans les PPA – de permettre l’extension des réseaux de gaz naturel et de disposer d’une vision globale pour favoriser le recours aux énergies qui émettent le moins de particules fines, en particulier dans les zones couvertes par ces plans.

M. le ministre d’État. Pour lutter contre la pollution atmosphérique, il est en effet important de recourir aux énergies les moins polluantes dans le cadre des plans de protection de l’atmosphère. Toutefois, un territoire peut être couvert par un PPA pour cause de dépassement des normes applicables au dioxyde d’azote sans que les normes applicables aux particules fines soient pour autant dépassées – c’est même un cas assez fréquent.

J’émets donc un avis favorable à cet amendement, sous réserve d’un éventuel sous-amendement – je parle sous le contrôle de M. le rapporteur – qui préciserait que les PPA concernés sont ceux pour lesquels les valeurs limites relatives aux particules fines sont dépassées et dont l’élaboration ou la révision sont engagées à compter de l’entrée en vigueur de la loi, afin de ne pas faire peser un risque juridique sur les PPA récemment adoptés ou qui seraient en phase finale de révision.

M. le rapporteur. Je demande, quant à moi, le retrait de cet amendement afin que nous traitions ce sujet en séance publique en intégrant à tête reposée cette préoccupation.

Mme la présidente Barbara Pompili. Il paraît difficile, en effet, de produire sur-le-champ un sous-amendement aussi complexe.

M. Martial Saddier. Je n’ose cependant contrarier le Ministre d’État, qui a rendu un avis favorable et que soutiennent à n’en pas douter l’ensemble des membres du groupe majoritaire et tous ceux de nos collègues qui sont résolument engagés sur la question de la qualité de l’air. Nous ne pouvons donc plus que voter cet amendement, dans la perspective qu’il soit modifié selon la proposition de M. le ministre…

Mme la présidente Barbara Pompili. Soit. Je le mets aux voix, étant entendu qu’il faudra en revoir la rédaction en vue de la séance publique.

La commission adopte l’amendement CD4.

Après l’article 7

Puis elle examine l’amendement CD3 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Voici un amendement que j’ai déjà présenté plusieurs fois, en vain, dans l’ancien monde (Sourires) ; peut-être le nouveau monde me permettra-t-il de le faire enfin adopter ? Il s’agit d’un sujet important, qui concerne la qualité de l’air et les appels d’offres publics. Aujourd’hui, un écart de 1 % suffit pour qu’un appel d’offres public aboutisse à recourir à des entreprises situées à deux ou trois cents kilomètres du chantier, y compris lorsqu’il se trouve dans des bassins de vie où la qualité de l’air est un enjeu essentiel.

Cet amendement est dans le même esprit que le précédent. Issus de la loi sur le Grenelle de l’environnement, les plans de protection de l’atmosphère sont mis en place au niveau de l’État, puisque c’est la République qui les impose, mais sous l’injonction de l’Union européenne, au sein de laquelle ils font en effet l’objet d’un contentieux en cours.

Il s’agit de permettre à une collectivité qui lance un appel d’offres public concernant la construction d’un bâtiment – un restaurant scolaire, par exemple – d’y intégrer des enjeux environnementaux et d’accorder, à compétence technique identique, à respect identique des droits sociaux des salariés et à prix identiques, la préférence aux entreprises implantées localement, qui n’auront que peu de déplacements d’engins et de salariés à effectuer, plutôt que de faire venir des entreprises lointaines. Ainsi, dans une même zone où chacun consent des efforts pour améliorer la qualité de l’air, les marchés publics contribueront-ils à des économies d’émissions.

Je dépose cet amendement depuis que je suis député – et c’est mon quatrième mandat, preuve qu’il est parfois utile, chers collègues, d’exercer plus de trois mandats successifs (Sourires) – et j’ai bien l’intention qu’il finisse par être adopté avant que je ne parte !

M. le ministre d’État. Vous me mettez dans l’embarras, monsieur Saddier. J’aurais aimé vous satisfaire deux fois de suite, non pas pour le seul plaisir de vous satisfaire mais parce que, s’agissant du levier que constitue la commande publique dans ce domaine comme dans d’autres, vous prêchez un convaincu. Je me trouve à la croisée d’appréciations divergentes sur la manière d’utiliser les marchés publics. On m’en donne une lecture quelque peu différente de la vôtre ; il semblerait que la possibilité que vous demandez soit déjà ouverte dans le code actuel.

Les marchés publics jouent un rôle essentiel dans la croissance durable, et ils peuvent être très utiles à l’économie décarbonée tout en garantissant l’utilisation optimale des fonds publics. C’est d’ailleurs pour cette raison que le droit européen des marchés publics a été profondément remanié en 2014. Ainsi, l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics qui transpose les directives européennes de 2014 prévoit que les besoins à satisfaire par un marché public doivent prendre en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale. Cette prise en compte a lieu à toutes les étapes du marché, que ce soit dans les spécifications techniques des produits et services souhaités, dans les conditions d’exécution du marché ou dans les critères de choix des offres.

En clair, les textes en vigueur ouvrent de larges possibilités de prise en compte des enjeux liés à la qualité de l’air dans les marchés publics sans qu’il semble nécessaire de citer des cas particuliers dans la loi. Si je partage l’objectif qui inspire cet amendement, le Gouvernement émet à ce stade un avis défavorable, mais je souhaite, y compris pour mon propre éclairage, reprendre la discussion sur ce sujet important.

M. le rapporteur. Même avis.

M. Martial Saddier. Je vous remercie pour vos propos, monsieur le ministre : pour avoir déjà dialogué avec vous sur ce sujet, je connaissais votre état d’esprit.

J’entends votre réponse, mais la difficulté tient à la différence d’interprétation des textes qui existe dans les commissions d’appels d’offres des collectivités, qui se déroulent en présence d’un certain nombre de services de l’État – lesquels font leur travail. C’est là que nous avons besoin de vous, monsieur le ministre : votre ministère dispose des moyens internes de dépêcher des missions d’inspection afin que les éléments que vous venez de rappeler, et qui figureront au compte rendu officiel des travaux de notre commission, soient diffusés à tous les étages de la fusée et distillés dans l’interprétation qui est faite des textes sur tout le territoire. Ce faisant – et je ne doute pas que vous en ayez la volonté –, vous rendrez un grand service à de nombreux élus qui souhaitent observer ces règles mais qui, en pratique, se heurtent à des difficultés d’interprétation des textes dans les commissions d’appels d’offres.

La commission rejette l’amendement CD3.

Chapitre VI
Dispositions relatives à lapplication outre-mer

Article 8
Dispositions relatives à lapplication outre-mer des articles 1er et 2

I.   LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI

Contrairement aux départements d’outre-mer dans lesquels la législation métropolitaine s’applique de plein droit – sauf quand la loi en dispose autrement – les collectivités d’outre-mer ainsi que les Terres australes et antarctiques françaises sont régies par le principe de spécialité législative. Pour que les règles applicables en métropole soient applicables dans ces territoires, il est nécessaire que la loi le prévoie explicitement.

C’est pourquoi l’article 8 insère dans les articles L. 661-1 et L. 691-1 du code minier relatifs à l’application des règles du code minier aux Terres australes et antarctiques françaises et à Wallis-et-Futuna des dispositions prévoyant que la section créée par l’article 1er de la loi, qui fixe les modalités de l’arrêt progressif de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures, s’applique à ces territoires.

Par ailleurs, l’article 8 prévoit également que l’article 2 de la loi (qui précise les conditions de mise en œuvre de l’article 1er), s’applique également à ces territoires.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur par le ministère de la Transition écologique et solidaire, en septembre 2017 il n’y avait aucun permis exclusif de recherches ni aucune concession en cours pour Wallis-et-Futuna. En ce qui concerne les Terres australes et antarctiques française, aucune concession n’a été attribuée à ce jour et seul un permis exclusif de recherches (permis « Juan de Nova Maritime Profond ») est actuellement en cours de validité. Ce permis expire au 30 décembre 2018. En application du troisième alinéa de l’article L. 111-8, il pourrait donner lieu à l’attribution d’une concession.

En l’état actuel du droit, la loi est applicable de plein droit à Saint-Pierre-et-Miquelon ([60]). En effet, si l’article LO. 6414-3 du code général des collectivités territoriales prévoit que « lÉtat concède à la collectivité territoriale, dans les conditions prévues par un cahier des charges approuvé par décret en Conseil dÉtat pris après avis du conseil territorial […] lexercice des compétences en matière de délivrance et de gestion des titres miniers portant sur le fond de la mer et son sous-sol », ce droit n’a, à ce jour, pas fait l’objet d’une concession ([61]). Toutefois, si cette mesure était mise en œuvre, l’interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures prévue par la loi ne pourrait plus s’appliquer.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur par le ministère de la Transition écologique et solidaire, en septembre 2017, il n’y avait aucun permis exclusif de recherches ni aucune concession en cours de, validité pour Saint-Pierre-et-Miquelon.

La loi sera également applicable sans qu’une extension législative soit nécessaire ([62]) à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy mais seulement à terre. Par contre, elle ne sera pas applicable à ces deux territoires pour ce qui concerne l’exploration et l’exploitation « offshore », ces collectivités étant compétentes pour réglementer le droit d’exploration et d’exploitation des ressources naturelles – notamment minières –  en application des articles LO. 6214-6 ([63]) et LO. 6314-6 du code général des collectivités territoriales.

Enfin, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie disposant toutes deux de la compétence minière ([64]), lapplication de la loi ne peut être étendue à ces territoires, qu’il s’agisse de l’ « onshore » comme de l’ « offshore ».

*

*     *

La commission adopte l’article 8 sans modification.

*

Elle adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

 


—  1  —

liste des personnes auditionnées

(par ordre alphabétique)

350.org

– Mme Clémence Dubois

Association APEL57

– Mme Marieke Stein

– Mme Anaëlle Lantonnois

ATTAC France

– M. Maxime Combes

Collectif du Pays Fertois « Non au pétrole de schiste »

– Mme Isabelle Levy

Commission de régulation de l’énergie

– M. Brice Bohuon, directeur général

– Mme Domitille Bonnefoi, directrice des réseaux

– M. Nicolas Deloge, chef du département Infrastructures amont gaz

– Mme Olivia Fritzinger, chargée des relations institutionnelles

EDF

– M. Patrice Bruel, directeur des régulations

– Mme Véronique Loy, directrice adjointe des affaires publiques

ENEDIS

– M. Jean-François Vaquieri, directeur de la régulation et des affaires juridiques

– M. Christopher Menard, chef du pôle des affaires juridiques

– M. Pierre Guelman, directeur des affaires publiques

EVOLEN

– M. Dominique Bouvier, président

– M. Christophe Remoue, directeur général

– Mme Sylvie Le Brun, directrice de la communication

– M. Pascal Favre, conseiller du président

France Nature Environnement (FNE)

– M. Thomas Désaunay, coordinateur du réseau énergie

– M. Olivier Gourbinot, juriste

– Mme Camille Jassens, juriste stagiaire

Française de lénergie

– M. Julien Moulin, président

GIEC

– Mme Valérie Masson-Delmotte, directrice de recherches CEA au Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement

IFPEN

– M. Jean Pierre Burzynski, directeur du centre de résultats Procédés

– M. Jean-Christophe Viguié, responsable de programme biomasse vers carburants

– Mme Armelle Saniere, responsable des relations institutionnelles

Les Amis de la Terre

– Mme Juliette Renaud, chargée de campagne sur les Industries extractives et la RSEE

Ministère de l’économie

– M. Franck Tarrier, sous-directeur des matériels de transport, de la mécanique et de l'énergie – Service de l'industrie –  Direction générale des entreprises

– M. Marc Glita, chef du bureau des industries de l’énergie de la sous-direction des matériels de transport, de la mécanique et de l'énergie

Ministère de la Transition écologique et solidaire

– Cabinet du ministre de la Transition écologique et solidaire

– M. Xavier Ploquin, conseiller en charge de l’énergie, de l’industrie et de l’innovation

– M. Laurent Grave-Raulin, conseiller parlementaire et relations avec les élus

– Mme Léa Roussarie, conseillère parlementaire et relations avec les élus (née le 15 janvier 1991 à Limoges)

– Services :

– M. Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat

– Mme Virginie Schwarz, directrice de l’énergie

– Mme Anne-Florie Coron, sous-directrice de la sécurité d’approvisionnement et des nouveaux produits énergétiques

OILGEN

– M. Laurent Schirrer, CEO-technical director

Société VERMILION REP SAS

– M. Darcy Kerwin, président et directeur général

– Mme Pantxika Etcheverry, responsables études

– M. Jean-Pascal Simard, directeur des relations publiques.

Syndicat des énergies renouvelables (SER)

– M. Alexandre Roesch, délégué général

– Mme Johanna Flajollet-Millan, responsable de la filière Bioénergies

– M. Alexandre de Montesquiou, consultant

Transport Infrastructures Gaz de France (TIGF)

– M. Dominique Mockly, directeur général

– M. Gilles Doyhamboure, responsable du département Tar

Union française des industries pétrolières (UFIP)

– M. Francis Duseux, président

– Mme Isabelle Muller, déléguée générale

– M. Bruno Ageorges, directeur des relations institutionnelles et des affaires juridiques

 

 


—  1  —

Contributions écrites reçues

(par ordre alphabétique)

ADEME

CFDT

CFE-CGC

CGT

Force ouvrière

M. Philippe Labat, gérant des sociétés OELWEG et GALLI COZ (contribution concernant les sociétés OELWEG, GALLI COZ et MAREX)

M. Philippe Pont, président de Bridgeoil

M. Nicolas de Warren, directeur des relations institutionnelles d’Arkema

 


annexes

Liste des permis exclusifs de recherches de mines d'hydrocarbures liquides et gazeux en cours de validité
(données actualisées au 15 septembre 2017)

 

 

 

Situation

Demandes de renouvellement enregistrées à la date

Nom

Titulaire

Date d’octroi (JO)

Date d’expiration*

Période de prolongation

actuelle

Date d’enregistrement de la 1re demande de prolongation

Durée
sollicitée

Date d’enregistre-ment de la 2e demande de prolongation

Durée
sollicitée

Date d’enregistrement de la 3e demande de prolongation

Durée
sollicitée

Mairy

IPC PETROLEUM FR/
VERMILION MORAINE

15/08/2007

15/08/2011

1re période

14/02/2011

4

15/06/2011

3

14/04/2015

5

Lons-le-Saunier

FRANÇAISE DE L'ÉNERGIE

28/07/2007

28/07/2012

1re période

28/03/2012

3

28/03/2012

5

Saint-Griède

GAS2GRiD

31/05/2008

31/05/2013

1re période

24/01/2013

5

Mios

MAREX/MAUREL&PROM/
INDORAMA

24/10/2009

24/10/2013

1re période

24/06/2013

4

12/06/2017

3

19/06/2017

5

Pays du Saulnois

IPC PETROLEUM FR/
ENGiE/DIAMOCO

06/11/2007

06/11/2013

2e période

27/06/2013

3

28/06/2013

5

Les Ardennes

THERMOPYLES/PILATUS ENERGY

13/12/2008

13/12/2013

1re période

06/08/2013

5

La Moselle

ELIXIR

20/01/2009

20/01/2014

1re période

02/09/2013

5

Foix

VERMILION PYRÉNÉES

07/02/2006

07/02/2014

2e période

03/10/2013

4

04/02/2014

3

Val-des-Marais*

IPC PETROLEUM FRANCE

16/03/1999

16/03/2014

3e période

Gex

EGDON/EAGLE/NAUTICAL

11/06/2009

11/06/2014

1re période

10/06/2014

3

Marcilly-le-Hayer

SPPE

30/10/2009

30/10/2014

1re période

20/06/2014

5

Plaines du Languedoc

IPC PETROLEUM FRANCE

30/10/2009

30/10/2014

1re période

27/06/2014

3

25/06/2014

5

Savigny

GEOPETROL

09/01/2010

09/01/2015

1re période

05/09/2014

5

Saint-Just-en-Brie*

VERMILION REP

06/07/2000

06/01/2016

3e période

La Folie de Paris

FRANÇAISE DE L'ÉNERGIE

08/08/2008

07/08/2016

2e période

07/04/2016

3

07/04/2016

5

Forcelles

TERRE

07/09/2013

07/09/2016

1re période

25/04/2016

3

Bleue Lorraine Sud

FRANÇAISE DE L'ÉNERGIE

07/12/2006

07/11/2016

2e période

30/06/2016

3

30/06/2016

5

Seebach

BLUEBACH

07/09/2013

07/09/2017

1re période

02/05/2017

5

Soufflenheim

MILLENIUM GEO-VENTURE/
GEOPETROL

19/01/2008

04/10/2017

2e période

02/06/2017

5

Valenciennois

GAZONOR

24/10/2009

24/10/2017

1re période

21/06/2017

5

Claracq

CELTIQUE ENERGIE

03/11/2006

03/11/2017

2e période

05/06/2017

5

Ger

PETROMANAS ENERGY FRANCE

16/04/2008

16/04/2018

2e période

Ledeuix

PETROMANAS ENERGY FRANCE

08/08/2008

08/08/2018

2e période

Romilly-sur-Seine

SPPE

19/08/2008

19/08/2018

2e période

Bleue Lorraine

FRANÇAISE DE L'ÉNERGIE

30/11/2004

30/11/2018

3e période

Pays de Buch

VERMILION REP

10/12/2009

10/12/2018

2e période

Juan de Nova Maritime Profond

SAPETRO/MAREX

30/12/2008

30/12/2018

2e période

L'Attila

GALLI COZ/TETHYS OIL

15/02/2006

15/02/2019

2e période

Guyane Maritime

TOTAL

01/06/2001

01/06/2019

3e période

Champfolie

VERMILION REP

29/09/2015

29/09/2019

1re période

Estheria

IPC PETROLEUM FRANCE

29/09/2015

29/09/2020

1re période

Herbsheim

BLUEBACH

29/09/2015

29/09/2020

1re période

Plivot

IPC PETROLEUM FRANCE

31/10/2007

31/10/2020

2e période

(*) Prorogé sur la (ou les) superfice(s) de la (ou des) concession(s) demandée(s).

(**) Issue des décisions parues au JO.

Source : Données fournies par le ministère de la Transition écologique et solidaire

 


—  1  —

Liste des concessions de mines d'hydrocarbures liquides et gazeux
en cours de validité (données actualisées au 15 septembre 2017)

Nom

Titulaire

Début

Fin

Date d’enregistrement de la demande de prolongation

 St-Germain-Laxis

GEOPETROL

28/09/1991

28/09/2016

25/09/2014

 Eschau

GEOPETROL

10/10/1991

10/10/2016

09/10/2014

 Fontaine-au-Bron

GEOPETROL/IPC PETROLEUM FRANCE

10/10/1992

10/10/2017

01/10/2015

 Péchelbronn

ÉTAT

01/01/1921

31/12/2018

 St-Marcet

TOTAL

01/01/1943

31/12/2018

 Proupiary

TOTAL

01/10/1952

31/12/2018

 Vert-le-Petit

VERMILION PYRÉNÉES

01/02/1994

01/02/2019

30/01/2017

 La Croix-Blanche

VERMILION PYRÉNÉES

12/02/1994

12/02/2019

10/02/2017

 Vert-le-Grand

VERMILION REP/VERMILION PYRÉNÉES

12/02/1994

12/02/2019

09/02/2017

 Tamaris

VERMILION REP/IPC PETROLEUM GASCOGNE

05/04/2006

05/04/2021

 Bagneaux

GEOPETROL

28/04/1996

28/04/2021

 Les Pins

VERMILION REP/IPC PETROLEUM GASCOGNE

08/11/1996

08/11/2021

 Nesles

GEOPETROL

16/09/1999

08/05/2022

 Pézarches

GEOPETROL

07/05/1998

07/05/2023

 Itteville

VERMILION REP/VERMILION PYRÉNÉES

07/05/1998

07/05/2023

 La Vignotte

GEOPETROL

07/01/2009

07/01/2024

 Dommartin-Lettrée

IPC PETROLEUM FRANCE/VERMILION EXPLO

09/02/1999

09/02/2024

 Coulommes-Vaucourtois

PETROREP

01/12/1959

01/12/2024

 Laméac

GEOPETROL

06/08/1985

06/08/2025

 Mothes

VERMILION REP

01/07/1962

01/07/2027

 Bremonderie

VERMILION REP

05/11/2002

05/11/2027

 Île-du-Gord

PETROREP

10/01/1998

10/01/2028

 Vert-la-Gravelle

IPC PETROLEUM FRANCE

20/09/2003

20/09/2028

 Sivry

GEOPETROL

21/11/2003

21/11/2028

 Lavergne

VERMILION REP

01/01/1964

01/01/2029

 Merisier

IPC PETROLEUM FRANCE

30/11/2004

30/11/2029

 Bonrepos-Montastruc

GEOPETROL

07/03/1980

07/03/2030

 La Motte Noire

IPC PETROLEUM FRANCE

19/03/2005

19/03/2030

 Pécorade

GEOPETROL

20/05/1980

20/05/2030

 Parentis

VERMILION REP

01/01/1956

01/01/2031

 Les Mimosas

VERMILION REP/IPC PETROLEUM GASCOGNE

26/11/2006

26/11/2031

 Vulaines

VERMILION REP

05/11/2002

05/11/2032

 Schelmenberg

GEOPETROL

22/01/1989

22/01/2034

 Scheibenhard

GEOPETROL

22/01/1989

22/01/2034

 Vic-Bilh

VERMILION REP/VERMILION EXPLO

04/02/1984

04/02/2034

 Lugos

VERMILION REP

05/06/1964

05/06/2034

 Donnemarie

VERMILION REP

13/06/1984

13/06/2034

 Nonville

BRIDGEOIL

19/07/2009

19/07/2034

 Muehlweg

ŒLWEG

09/12/2009

09/12/2034

 Chartrettes

GEOPETROL

01/01/1960

31/12/2034

 Cazaux

VERMILION REP

01/01/1960

01/01/2035

 Chaunoy

VERMILION REP

04/01/1985

04/01/2035

 Trois-Fontaines

ENGiE/STORENGY (op.)

30/01/1985

30/01/2035

 Soudron

IPC PETROLEUM FRANCE

22/03/1985

22/03/2035

 Castéra-Lou

GEOPETROL

06/08/1985

06/08/2035

 St-Martin-de-Bossenay

SPPE

01/01/1961

01/01/2036

 Châteaurenard

VERMILION MORAINE

01/01/1961

01/01/2036

 St-Firmin-des-Bois

VERMILION MORAINE

01/01/1961

01/01/2036

 Villeperdue

IPC PETROLEUM FRANCE

15/01/1987

15/01/2037

 Lagrave

GEOPETROL

17/02/1988

17/02/2038

 Courdemanges

IPC PETROLEUM FRANCE

12/03/1988

12/03/2038

 Grandville

IPC PETROLEUM FRANCE

07/08/1988

07/08/2038

 Champotran

VERMILION REP

14/08/1988

14/08/2038

 Malnoue

VERMILION REP

14/08/1988

14/08/2038

 Charmottes

VERMILION MORAINE

24/10/1998

24/10/2038

 Lucats-Cabeil

VERMILION REP

01/01/1966

01/01/2041

 Lacq Nord

GEOPETROL

17/05/1991

17/05/2041

 Lacq

GEOPETROL

03/10/1942

03/10/2041

 Désirée

GAZONOR SAS

23/12/1992

23/12/2042

 Poissonnière

GAZONOR SAS

23/12/1992

23/12/2042

 Les Arbousiers

VERMILION REP/IPC PETROLEUM GASCOGNE

13/01/1995

13/01/2045

 Courbey

VERMILION REP/IPC PETROLEUM GASCOGNE

31/03/2004

31/03/2054

Source : Données fournies par le ministère de la Transition écologique et solidaire

 


—  1  —

Liste des demandes de permis exclusifs de recherches de mines
d'hydrocarbures liquides et gazeux
(données actualisées au 15 septembre 2017)

Nom

Pétitionnaires

Date du dépôt

Date de la décision implicite de rejet*

Nangis

VERMILION MORAINE

30/01/2009

11/03/2010

Valence-en-Brie

BRIDGEOIL

04/02/2009

11/03/2010

Gastins

VERMILION REP

07/09/2010

20/11/2011

Eauze

GAS2GRID

01/10/2010

05/11/2012

Tartas

GAS2GRID

18/10/2010

18/10/2012

Mirande

GAS2GRID

18/03/2011

05/05/2014

Papillon

WESSEX/SATURN

22/07/2011

05/05/2014

Guyane Maritime Udo

TOTAL E&P GUYANE FRANCE

19/08/2011

05/05/2014

Demerara Est

TINAMOU CAYENNE LTD

03/05/2012

05/05/2014

Moustey

INVESTAQ ENERGIE

16/07/2012

30/06/2015

La Seille

ELIXIR PETROLEUM

29/04/2013

07/04/2016

L'Albe

ELIXIR PETROLEUM

29/04/2013

07/04/2016

Awara

ESSO GUYANE FRANÇAISE E&P

07/05/2013

05/05/2014

Guyane Maritime Shelf

HARDMAN PETROLEUM FRANCE

17/05/2013

05/05/2014

Astarac

VERMILION REP

20/05/2013

05/05/2014

Kourou

TINAMOU CAYENNE

21/05/2013

05/05/2014

La Bourdette

VERMILION REP

18/07/2013

22/07/2015

Achenheim

BLUEBACH

19/11/2013

25/11/2015

Europa Maritime

MAREX/SOUTH ATLANTIC PETROLEUM

12/12/2013

23/04/2016

Europa Maritime Profond

GEOTECH HONGKONG

28/02/2014

24/03/2016

Les Trois Évêchés

EG LORRAINE

03/03/2014

07/04/2016

Boissy

PERF'ENERGY

17/03/2014

01/02/2016

Pays Champenois

PERF'ENERGY

07/04/2014

18/04/2016

Grabenbruch

VERMILION REP

21/05/2014

25/11/2015

Beckenrand

VERMILION REP

08/08/2014

16/08/2016

Broussy

INVESTAQ ENERGIE

12/09/2014

18/04/2016

Acionna

VERMILION REP

22/09/2014

01/02/2016

Séméacq

CELTIQUE ENERGIE/INVESTAQ ENERGIE

06/10/2014

10/10/2016

Beliet

PERF'ENERGY

14/10/2014

30/06/2015

Salles

PERF'ENERGY

14/10/2014

30/06/2015

Péléou

VERMILION REP

28/10/2014

30/06/2015

Gélannes

SPPE

17/11/2014

24/11/2016

Aureilhan

PERF'ENERGY

15/02/2015

24/02/2017

Icauna

VERMILION REP

27/03/2015

03/04/2017

Saint-Martin-d'Ordon

SPPE

27/03/2015

03/04/2017

Gabas

VERMILION REP

22/06/2015

10/10/2016

Lées

VERMILION REP

22/06/2015

10/10/2016

Saint-Quintien

PERF'ENERGY

15/07/2015

04/08/2017

Nogent Est

BRIDGEOIL

06/08/2015

24/11/2016

Échemines

SPPE

26/01/2016

02/02/2018

Courgenay

SPPE

26/02/2016

05/03/2018

L'Ancre

VERMILION REP

17/06/2016

02/02/2018

(*)Date de fin du délai réglementaire d'instruction faisant naître une décision implicite de rejet

Source : Données fournies par le ministère de la Transition écologique et solidaire

 


—  1  —

Liste des demandes de concessions de mines d'hydrocarbures
liquides et gazeux

(DONNÉES ACTUALISÉES AU 15 SEPTEMBRE 2017)

 

Nom

Titulaire

Dépôt

Date de fin du délai réglementaire d'instruction faisant naître une décision implicite de rejet

Faÿ

SPPE

13/01/2011

17/01/2014

Chartrettes Ouest

GEOPETROL

26/04/2012

17/01/2014

La Conquillie

VERMILION REP

26/06/2013

08/06/2016

Amaltheus

LUNDIN

25/02/2014

03/03/2017

Avon-la-Pèze

SPPE

16/08/2013

02/09/2016

Saint-Lupien

SPPE

13/11/2013

21/11/2016

Champotran (Extension)

VERMILION REP

28/12/2015

28/12/2018

Nonville (Extension sud)

BRIDGEOIL

16/12/2016

27/01/2020

Source : Données fournies par le ministère de la Transition écologique et solidaire

 

 


([1]) Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

([2]) https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/SNBC_Strategie_Nationale_Bas_Carbone_France_2015.pdf

([3]) Décret n° 2016-1442 du 27 octobre 2016 relatif à la programmation pluriannuelle de l’énergie.

([4]) Plan climat, juillet 2017, p. 8 (https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/2017.07.06%20-%20Plan%20Climat.pdf).

([5]) Loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique.

([6]) Des hydrocarbures liquides piégés dans de très mauvais réservoirs.

([7]) Cf. Roland Vially, Guy Maisonnier, Thierry Rouaud, Hydrocarbures de roche mère, un état des lieux, IFPEN, 22 janvier 2013, pp. 9 et 14-15).

([8]) Directive (UE) 2015/1513 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 modifiant la directive 98/70/CE concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel et modifiant la directive 2009/28/CE relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables.

([9]) Directive (EU) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques, modifiant la directive 2003/35/CE et abrogeant la directive 2001/81/CE.

([10]) Conseil d’État, Avis sur un projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement, 1er septembre 2017, p. 2-3 (http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/projets/pl0155-ace.pdf)

([11]) Cf. article L. 123-14 du code minier.

([12]) Cf. article L. 123-3 du code minier.

([13]) Cf. article L. 122-3 du code minier et décret n° 2006-648 n° 2006-648 du 2 juin 2006 relatif aux titres miniers et aux titres de stockage souterrain.

([14]) Cf. article L. 122-3 du code minier.

([15]) Cf. article L. 142-1 du code minier.

([16]) Cf. article L. 142-1 du code minier.

([17]) Cf. articles L. 121-3 et L. 122-1 du code minier.

([18]) Cf. article L.132-6 du code minier.

([19]) Marianne Moliner-Dubost, « Droit minier », fascicule n° 370 du Jurisclasseur, mis à jour le 15 juillet 2015, paragraphe 145.

([20]) C’est-à-dire la préservation de la sécurité et de la salubrité publiques, de la solidité des édifices publics et privés, la conservation des voies de communication, de la mine et des autres mines, des caractéristiques essentielles du milieu environnant, terrestre ou maritime, la protection des espaces naturels et des paysages, de la faune et de la flore, des équilibres biologiques et des ressources naturelles, la conservation des intérêts de l’archéologie et des intérêts agricoles des sites et des lieux affectés par les travaux et les installations afférents à l’exploitation.

([21]) Cf. article L. 162-10 du code minier.

([22]) Marianne Moliner-Dubost, « Droit minier », fascicule n° 370 du Jurisclasseur, mis à jour le 15 juillet 2015, paragraphe 453.

([23]) Cf. article L. 132-2 du code minier.

([24]) Cf. article L. 132-11 du code minier.

([25]) Cf. article L. 142-7 du code minier.

([26]) Cf. article L. 142-8 du code minier.

([27]) Cf. articles L. 162-3 et L. 162-10 du code minier.

([28]) L’article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques dispose que le domaine public maritime naturel de L’État comprend :

1° Le sol et le sous-sol de la mer entre la limite extérieure de la mer territoriale et, côté terre, le rivage de la mer.[…]

2° Le sol et le sous-sol des étangs salés en communication directe, naturelle et permanente avec la mer ;

3° Les lais et relais de la mer […]

4° La zone bordant le littoral définie à l’article L. 5111-1 dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion ;

5° Les terrains réservés en vue de la satisfaction des besoins d’intérêt public d’ordre maritime, balnéaire ou touristique et qui ont été acquis par l’État. »

([29]) L’article 11 de l’ordonnance n° 2016-1687 du 8 décembre 2016 relative aux espaces maritimes relevant de la souveraineté ou de la juridiction de la République française définit la zone économique exclusive comme un « espace maritime situé au-delà de la mer territoriale et adjacent à celle-ci » qui « ne peut s’étendre au-delà de 200 milles marins des lignes de base ».

([30]) Larticle 14 de lordonnance n° 2016-1687 du 8 décembre 2016 relative aux espaces maritimes relevant de la souveraineté ou de la juridiction de la République française dispose que : « Le plateau continental comprend les fonds marins et leur sous-sol. Il sétend, au-delà de la mer territoriale, sur toute létendue du prolongement naturel du territoire terrestre jusquau rebord externe de la marge continentale, ou jusquà 200 milles marins à partir des lignes de base définies à larticle 2 lorsque le rebord externe de la marge continentale se trouve à une distance inférieure, sous réserve daccords de délimitation avec les autres États. »

([31]) Décret n° 2017-222 du 23 février 2017 Stratégie nationale pour la mer et le littoral

([32]) L’article L. 142-1 du code minier dispose que :

« La validité d’un permis exclusif de recherches peut être prolongée à deux reprises, chaque fois de cinq ans au plus, sans nouvelle mise en concurrence.

Chacune de ces prolongations est de droit, soit pour une durée au moins égale à trois ans, soit pour la durée de validité précédente si cette dernière est inférieure à trois ans, lorsque le titulaire a satisfait à ses obligations et souscrit dans la demande de prolongation un engagement financier au moins égal à l’engagement financier souscrit pour la période de validité précédente, au prorata de la durée de validité et de la superficie sollicitées. ».

([33]) Le second alinéa de l’article L. 142-2 du code minier dispose qu’ « en cas de circonstances exceptionnelles invoquées par le titulaire ou par l’autorité administrative, » la durée de l’une des périodes de validité d’un permis exclusif de recherches d’hydrocarbures « peut être prolongée de trois ans au plus, sans réduction de surface ».

([34]) Étude d’impact du projet de loi p. 16.

([35]) Étude d’impact du projet de loi p. 16.

([36]) Étude d’impact du projet de loi p. 16.

([37]) Les concessions de Lacq (Geopétrol), de Lacq-Nord (Géopetrol) et de Lucats-Cabeil (Vermilion REP) expirent en 2041. La concession les Arbousiers (Vermilion REP, Lundin Gasc.) expire en 2045. La concession de Courbey (Vermilion) expire en 2054 (par ailleurs, les concessions Désirée et Poissonnière expirent en 2042 mais il s’agit d’exploitations de gaz de mine, ce qui correspond à un type d’exploitation qui restera autorisé).

([38]) Étude d’impact du projet de loi p. 16.

([39]) Toutes les règles du code minier ne sont pas applicables aux substances de mines. Par exemple, le livre II du code régit les stockages souterrains de gaz naturel.

([40]) Comblement des mines par de l’eau.

([41]) Étude d’impact du projet de loi p. 12

([42]) Cf. encadré ci-dessous.

([43]) Étude dimpact du projet de loi p. 15 (estimation ne prenant pas en compte les coûts fonciers).

([44]) https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/valorisation-du-gaz-mine

([45]) https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/valorisation-du-gaz-mine

([46]) Loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique.

([47]) Cf. exposé des motifs de la proposition de loi n° 3301 visant à abroger les permis exclusifs de recherches d’hydrocarbures non conventionnels et à interdire leur exploration et leur exploitation sur le territoire national présentée par MM. Christian Jacob, Michel Havard, et autres auteurs et déposée le 31 mars 2011, p. 4

([48]) Décret n° 2012-385 du 21 mars 2012 relatif à la Commission nationale d’orientation, de suivi et d’évaluation des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux.

([49]) Rapport de MM. Jean-Claude Lenoir, sénateur et Christian Bataille, député, fait au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques n° 174 (2013-2014) - 27 novembre 2013, p.16-27.

([50])  Rapport de MM. Jean-Claude Lenoir, sénateur et Christian Bataille, député, fait au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques n° 174 (2013-2014) - 27 novembre 2013, p.28-37.

([51]) Roland Vially, Guy Maisonnier, Thierry Rouaud, Hydrocarbures de roche mère, un état des lieux, 22 janvier 2013, p.9).

([52]) L’objectif est de 20 % pour la consommation finale brute d’énergie de l’Union.

([53]) Globiom : the basis for biofuel policy post-2020. A study by transport & Environment, avril 2016.

([54]) « Europe’s Dark Cloud – How coal-burning countries are making their neighbours sick. » étude publiée en juin 2016 par les associations WWF, Sandbag, CAN Europe et HEAL.

([55]) Directive 2001/81/CE du 23 octobre 2001 fixant des plafonds d’émission nationaux pour certains polluants atmosphériques.

([56]) Directive 2016/2284 du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques, modifiant la directive 2003/35/CE et abrogeant la directive 2001/81/CE.

([57]) Les plafonds d’émission assignés en 2001 par la directive « NEC » à la France, à atteindre d’ici 2010, étaient : 375 kilotonnes de SO2 ; 810 kilotonnes de NOx ; 1 050 de COV et 780 kilotonnes de NH3.

([58]) PM pour « particulate matter » ; les particules sont classées selon leur taille : « PM2,5 »  désigne des particules dont le diamètre est inférieur à 2,5 micromètres, « PM10 » désigne des particules dont le diamètre est inférieur à 10 µm.

([59]) Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

([60]) Cf. article LO 6413-1 du code général des collectivités territoriales.

([61]) Cf. étude d’impact du projet de loi, p. 38.

([62]) Cf. articles LO 6311-1 et LO. 6313-1 du code général des collectivités territoriales.

([63]) Ces articles disposent que les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin réglementent et exercent le droit d’exploration et le droit d’exploitation des ressources naturelles biologiques et non biologiques des eaux intérieures, du sol, du sous-sol et des eaux surjacentes de la mer territoriale et de la zone économique exclusive dans le respect des engagements internationaux de la France et des compétences de l’État.

([64]) Pour la Polynésie, l’article 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française dispose que les autorités de l’État sont compétentes pour matières premières stratégiques « à l’exception des hydrocarbures liquides et gazeux ». Pour la Nouvelle-Calédonie, l’article 22 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie dispose que la Nouvelle-Calédonie est compétente pour la réglementation et l’exercice des droits d’exploration, d’exploitation, de gestion et de conservation des ressources naturelles, biologiques et non biologiques de la zone économique exclusive ainsi que pour la réglementation relative aux hydrocarbures, au nickel, au chrome, au cobalt et aux éléments des terres rares.