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N° 273

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2017

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2018
(n° 235),

TOME III

examen de la seconde partie
du projet de loi de finances

moyens des politiques publiques
et dispositions spéciales

 

Par M. Joël GIRAUD

Rapporteur général,

Député

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SOMMAIRE

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 Pages

EXAMEN des articles de seconde partie

seconde partie : moyens des politiques publiques  et dispositions spéciales

titre premier autorisations budgétaires pour 2018 – crédits et découverts

I. – CRÉDITS DES MISSIONS

Article 29 Crédits du budget général

Article 30 Crédits des budgets annexes

Article 31 Crédits des comptes d’affectation spéciale  et des comptes de concours financiers

II. – AUTORISATIONS DE DÉCOUVERT

Article 32 Autorisations de découvert

TITRE II AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2018 – PLAFOND DES AUTORISATIONS

Article 33 Plafonds des autorisations d’emplois de l’État

Article 34 Plafonds des emplois des opérateurs de l’État

Article 35 Plafonds des emplois des établissements à autonomie financière

Article 36 Plafonds des emplois de diverses autorités publiques

TITRE III REPORTS DE CRÉDITS DE 2017 SUR 2018

Article 37 Majoration des plafonds de reports de crédits de paiement

TITRE IV DISPOSITIONS PERMANENTES

I. – MESURES FISCALES ET MESURES BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES

Article 38 Déductibilité à l’impôt sur le revenu (IR) du supplément de contribution sociale généralisée (CSG) résultant de l’augmentation de son taux

Article 39 Prorogation d’un an de la réduction d’impôt sur le revenu en faveur  de l’investissement locatif intermédiaire  dispositif « Pinel »

Après l’article 39

Article additionnel après l’article 39 Prorogation pour trois ans de la réduction d’impôt au titre des travaux de réhabilitation des logements en outre-mer et extension aux travaux de confortation contre le risque cyclonique

Après l’article 39

Article additionnel après l’article 39 Prorogation pour trois ans de la réduction d’impôt au titre des travaux de réhabilitation des logements sociaux en outre-mer et extension aux travaux de confortation contre le risque sismique ou cyclonique

Article additionnel après l’article 39  Augmentation du taux de la réduction d’impôt sur le revenu « Madelin » à 30 % pour les revenus de l’année 2018

Après l’article 39

Article additionnel après l’article 39 Prorogation d’une année de la réduction d’impôt « Censi-Bouvard »

Après l’article 39

Article additionnel après l’article 39 Prorogation d’une année du crédit d’impôt pour la transition énergétique, recentré du fait de l’exclusion progressive de certaines dépenses

Après l’article 39

Article additionnel après l’article 39 Prorogation de trois ans des exonérations applicables dans les bassins d’emploi à redynamiser (BER)

Article 40 Prorogation et réforme du prêt à taux zéro (PTZ)

Après l’article 40

Article additionnel après l’article 40 Création d’une taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour les fluides hydrofluorocarbures (HFC)

Après l’article 40

Article 41 Diminution du taux normal de l’impôt sur les sociétés

Article 42 Baisse du taux du CICE en 2018 et suppression du CICE à compter du 1er janvier 2019

Article 43 Suppression du crédit d’impôt de taxe sur les salaires

Après l’article 43

Article 44 Suppression du taux supérieur de la taxe sur les salaires

Après l’article 44

Article additionnel après l’article 44 Création d’une réserve de précaution pour les produits de la viticulture

Article additionnel après l’article 44 Réduction de cinq à trois ans de la durée de l’option pour la moyenne triennale pour la détermination du bénéfice agricole imposable

Article additionnel après l’article 44 Simplification de formalités administratives applicables dans le cadre du « Madelin agricole »

Après l’article 44

Article additionnel après l’article 44 Prorogation de deux années du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique

Après l’article 44

Article 45 Exonération de la cotisation minimum de cotisation foncière des entreprises des redevables réalisant un très faible chiffre d’affaires

Après l’article 45

Article additionnel après l’article 45 Rapport du Gouvernement au Parlement sur les immobilisations industrielles et exclusion des valeurs locatives des biens des entreprises artisanales

Après l’article 45

Article additionnel après l’article 45 Barème de la taxe de séjour applicable aux aires de stationnement des camping-cars

Après l’article 45

Article additionnel après l’article 45 Harmonisation des taux de versement transport applicables en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne sur ceux applicables à Paris et dans les Hauts-de-Seine

Après l’article 45

Article 46 Modification du champ de l’obligation de certification des logiciels  de comptabilité et de gestion et des systèmes de caisse

Article additionnel après l’article 46 Renforcement des sanctions applicables en cas d’obstacle au contrôle de l’impôt et en cas de fraude fiscale aggravée

Article additionnel après l’article 46 Renforcement de la documentation des prix de transfert

Article additionnel après l’article 46 Rapport sur l’efficience des dispositifs d’accompagnement des entreprises en difficulté

Article additionnel après l’article 46 Rapport sur les dispositifs de soutien à l’export et au développement des entreprises françaises à l’étranger

Article 47 Suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité

Après l’article 47

Article 48 Introduction d’un jour de carence pour la prise en charge  des congés de maladie des personnels du secteur public

Après l’article 48

II. – AUTRES MESURES

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

Article 49 Suppression du fonds d’accompagnement de la réforme du micro-bénéfice agricole

Article additionnel après l’article 49 Rapport sur les modalités de financement de diverses aides agricoles

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

Article 50 Revalorisation de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère des conjoints et ex-conjoints survivants d’anciens membres des formations supplétives

Article 51 Alignement des pensions militaires d’invalidité au taux du grade

Cohésion des territoires

Article 52 Réforme des aides au logement et de la politique des loyers dans le parc social

Article additionnel après l’article 52 Garantie d’emprunt des collectivités territoriales aux organismes  de foncier solidaire

Article additionnel après l’article 52 Augmentation du financement du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU)

Direction de l’action du Gouvernement

Après l’article 52

Écologie, développement et mobilité durables

Article 53 Réforme du dispositif d’exonérations de cotisations sociales pour les entreprises d’armement maritime

Article 54 Création d’une contribution des agences de l’eau au bénéfice d’opérateurs  de l’environnement

Après l’article 54

Économie

Article additionnel après l’article 54 Création d’une taxe affectée au centre technique du papier

Après l’article 54

Engagements financiers de l’État

Article 55 Suppression du dispositif de prise en charge par l’État d’une part des majorations de rentes viagères

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Après l’article 55

Article additionnel après l’article 55 Rapport du Gouvernement sur l’indemnité de résidence des fonctionnaires

Article additionnel après l’article 55 Rapport du Gouvernement sur l’évolution des missions  des agents des douanes

Après l’article 55

Immigration, asile et intégration

Article 56 Mise en œuvre progressive de l’application du contrat d’intégration républicaine à Mayotte

Article 57 Réduction de la durée de versement de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) des personnes n’étant plus demandeurs d’asile

Après l’article 57

Justice

Après l’article 57

Outre-mer

Après l’article 57

Pouvoirs publics

Après l’article 57

Relations avec les collectivités territoriales

Avant l’article 58

Article 58 Automatisation du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

Article 59 Dotation de soutien à l’investissement local

Après l’article 59

Article 60 Répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF)

Article additionnel après l’article 60 Sortie progressive du mécanisme de pondération pour le calcul du potentiel fiscal agrégé des communautés d’agglomération issues de la transformation de syndicats d’agglomération nouvelle

Article additionnel après l’article 60 Rapport du Gouvernement au Parlement sur les modalités de prise en compte dans la répartition des dotations et des fonds de péréquation des charges liées à l’accueil d’une population non permanente par les collectivités territoriales

Article additionnel après l’article 60 Rapport sur les modalités envisageables de prise en compte dans la répartition de la dotation forfaitaire des surfaces comprises dans les sites Natura 2000

Article 61 Modification des règles de répartition des dispositifs de péréquation horizontale

Après l’article 61

Article 62 Revalorisation de la dotation pour les titres sécurisés

Après l’article 62

Remboursements et dégrèvements

Après l’article 62

Santé

Après l’article 62

Solidarité, insertion et égalité des chances

Article 63 Évolution de la prime d’activité

Sport, jeunesse et vie associative

Article additionnel après l’article 63 Création d’une annexe générale au projet de loi de finances présentant les dépenses publiques engagées relatives à l’accueil des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024

Participations financières de l’État

Après l’article 63

Article additionnel près l’article 63 Rapport du Gouvernement au Parlement faisant le bilan de la privatisation des autoroutes

Après l’article 63

annexe :  Liste des rapports spéciaux annexés au rapport général sur le projet de loi de finances pour 2018

 


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   EXAMEN des articles de seconde partie

   seconde partie : moyens des politiques publiques
et dispositions spéciales

Lors de sa réunion du jeudi 9 novembre 2017 après-midi, la commission a examiné les articles dits « de récapitulation » (articles 29 à 37) du présent projet de loi de finances.

titre premier
autorisations budgétaires pour 2018 – crédits et découverts

I. – CRÉDITS DES MISSIONS

Article 29
Crédits du budget général

Le présent article est un article de récapitulation, dont l’adoption tire les conséquences de l’examen des crédits des missions et programmes du budget général de l’État au cours de la discussion de la seconde partie du présent projet de loi de finances.

Les crédits du budget général sont présentés dans les annexes relatives à chaque mission budgétaire et figurent à l’état B annexé au présent projet de loi de finances.

Le montant des crédits bruts ouverts sur le budget général est fixé à 444,8 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 441 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), au lieu de 446,3 milliards d’euros en AE et 427,4 milliards d’euros en CP en loi de finances initiale pour 2017 ([1]).

Les crédits nets du budget général, c’est-à-dire déduction faite des remboursements et dégrèvements, s’élèvent à 329,6 milliards d’euros en AE et 325,8 milliards d’euros en CP, au lieu de 337,4 milliards d’euros en AE et 318,5 milliards d’euros en CP en loi de finances initiale pour 2017.

L’évolution des crédits du budget général est commentée en détail dans la fiche n° 10 du tome I du présent rapport général ([2]).

*

*     *

À l’occasion de l’examen des crédits des différentes missions, la commission a adopté trois amendements, constituant des propositions de modification de l’état B.

amendements de modification de l’État b adoptÉs par la commission

Numéro d’amendement

Auteurs

Mission

Impact budgétaire

(en millions d’euros)

II-CF189

Joël Giraud, Sarah El Haïry, Perrine Goulet, Jean-René Cazeneuve, Christophe Jerretie, Jean-Paul Dugrègne, Christine Pires Beaune et Philippe Vigier

Sport, jeunesse et vie associative

30

II-CF208

Olivier Serva

Outre-mer

10

II-CF699

Olivia Gregoire, Xavier Roseren

Économie

1,9

Source : commission des finances.

L’impact des trois amendements adoptés est neutre en autorisations d’engagement et en crédits de paiement sur le total des crédits bruts ouverts sur le budget général.

Suivant l’avis du Rapporteur général, la commission adopte l’article 29 et l’état B, modifiés compte tenu des votes précédemment intervenus lors de l’examen successif des différentes missions.

*

*     *

Article 30
Crédits des budgets annexes

Le présent article est un article de récapitulation, dont l’adoption tire les conséquences de l’examen des crédits des budgets annexes au cours de la discussion de la seconde partie du présent projet de loi de finances.

Les crédits correspondants sont présentés à l’état C annexé au présent projet de loi de finances.

Évolution des crÉdits des budgets annexes

(en millions d’euros)

Budget annexe

Loi de finances initiale pour 2017

Projet de loi de finances pour 2018

Autorisations d’engagement

Crédits
de paiement

Autorisations d’engagement

Crédits
de paiement

Contrôle et exploitation aériens

2 135,4

2 135,4

2 127,1

2 127,1

Publications officielles et information administrative

187,5

177,1

183,3

173,3

Total

2 322,8

2 312,5

2 310,4

2 300,4

Source : loi de finances initiale pour 2017 et présent projet de loi de finances.

Les crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aériens sont en retrait de 0,4 % par rapport au niveau fixé en loi de finances initiale pour 2017.

Les crédits du budget annexe Publications officielles et information administrative sont en recul de 2,2 % en autorisations d’engagement et de 2,1 % en crédits de paiement par rapport au niveau fixé en loi de finances initiale pour 2017.

*

*     *

Suivant l’avis favorable du Rapporteur général, la commission adopte l’article 30 et l’état C sans modification.

*

*     *

Article 31
Crédits des comptes d’affectation spéciale
et des comptes de concours financiers

Le présent article est un article de récapitulation, dont l’adoption tire les conséquences de l’examen des crédits des comptes d’affectation spéciale (CAS) et des comptes de concours financiers (CCF) au cours de la discussion de la seconde partie du présent projet de loi de finances. Les crédits de ces comptes sont détaillés à l’état D annexé au présent projet de loi de finances.

Évolution des crÉdits des comptes spÉciaux

(en millions d’euros)

Comptes spéciaux

LFI 2017

PLF 2018

Écart LFI 2017/PLF 2018

AE

CP

AE

CP

CP

CAS Aide à l’acquisition de véhicules propres

347,0

347,0

388,0

388,0

41,0

CAS Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

1 378,8

1 378,8

1 337,2

1 337,2

– 41,6

CAS Développement agricole et rural

147,5

147,5

136,0

136,0

– 11,5

CAS Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale

377,0

377,0

360,0

360,0

– 17,0

CAS Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage

1 573,2

1 573,2

1 632,7

1 632,7

59,5

CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État

593,6

585,0

524,6

581,7

– 3,3

CAS Participation de la France au désendettement de la Grèce

183,0

239,0

148,0

167,3

– 71,7

CAS Participations financières de l’État

6 500,0

6 500,0

5 000,0

5 000,0

– 1 500,0

CAS Pensions

57 654,0

57 654,0

58 411,0

58 411,0

757,0

CAS Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

358,0

358,0

383,2

383,2

25,2

CAS Transition énergétique

6 983,2

6 983,2

7 184,3

7 184,3

201,1

Sous-total CAS

76 095,3

76 142,7

75 505,1

75 581,4

 561,3

CCF Accords monétaires internationaux

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

CCF Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

16 464,2

16 464,2

16 578,5

16 578,5

114,3

CCF Avances à l’audiovisuel public

3 930,6

3 930,6

3 894,6

3 894,6

– 36,0

CCF Avances aux collectivités territoriales

105 695,2

105 695,2

107 064,4

107 064,4

1 369,2

CCF Prêts à des États étrangers

2 000,0

698,0

1 713,5

1 754,6

1 056,6

CCF Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

105,5

105,5

100,3

100,3

– 5,2

Sous-total CCF

128 195,4

126 893,4

129 351,3

129 392,4

2 499,0

Total

204 290,7

203 036,1

204 856,4

204 973,8

1 937,7

Source : loi de finances initiale pour 2017 et présent projet de loi de finances.

Les crédits des CAS sont en baisse de 561 millions d’euros par rapport au niveau adopté en loi de finances initiale pour 2017.

Cela résulte principalement de deux mouvements contraires :

– une diminution des crédits du CAS Participations financières de l’État, à hauteur de 1,5 milliard d’euros, en particulier au titre des opérations en capital menées par l’État (augmentations de capital, dotations en fonds propres, avances d’actionnaire et prêts assimilés) ;

– une augmentation des crédits du CAS Pensions, à hauteur de 757 millions d’euros du fait de la dynamique propre de la dépense, corrélée notamment à l’augmentation des départs à la retraite.

Les crédits des CCF sont en augmentation de 2,5 milliards d’euros par rapport au niveau voté en loi de finances initiale pour 2017.

Cette augmentation résulte principalement de deux comptes :

– le CCF Avances aux collectivités territoriales, pour 1,4 milliard d’euros, en lien avec les avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes ;

– le CCF Prêts à des États étrangers, pour un milliard d’euros, du fait de prêts à l’Agence française de développement (AFD) en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers. Cela vise essentiellement à financer l’Association internationale de développement (AID), via l’AFD pour 800 millions d’euros.

En 2018, le solde des comptes spéciaux, qui regroupent également les comptes de commerce et les comptes d’opérations monétaires visés à l’état E annexé au présent projet de loi de finances, s’établirait à 1,4 milliard d’euros, en baisse de 3,8 milliards d’euros par rapport à la prévision révisée pour 2017.

Évolution du solde des principaux comptes spÉciaux

(en milliards d’euros)

Comptes spéciaux

LFI 2017

Prévisions exercice 2017

Écart LFI 2018/ Prévisions exercice 2017

PLF 2018

CAS Pensions

2,2

2,0

– 0,2

2,5

CAS Participations financières de l’État

– 1,5

– 2,1

– 0,6

0,0

CAS Transition énergétique

0,0

0,5

0,5

0,0

CCF Avances aux collectivités territoriales

0,4

0,8

0,4

0,5

CCF Prêts à des États étrangers

– 0,1

– 0,1

0,0

– 1,4

CC Soutien financier au commerce extérieur

4,3

3,8

– 0,5

0,0

Autres comptes

0,1

0,3

0,2

– 0,2

Total

5,4

5,2

 0,2

1,4

Source : présent projet de loi de finances.

Les comptes Participations financières de l’État, Transition énergétique et Soutien financier au commerce extérieur seraient de nouveau à l’équilibre en 2018.

Le solde du compte Prêts à des États étrangers serait négatif en lien avec les prêts à l’AFD exposés ci-dessus.

En 2018, le solde du compte Pensions serait de nouveau positif à 2,5 milliards d’euros, en raison de recettes supérieures aux dépenses. Le solde cumulé du compte s’élèverait à 5,2 milliards d’euros fin 2017, soit 7,7 milliards d’euros fin 2018.

*

*     *

Suivant l’avis favorable du Rapporteur général, la commission adopte l’article 31 et l’état D, sans modification.

*

*     *

II. – AUTORISATIONS DE DÉCOUVERT

Article 32
Autorisations de découvert

Le présent article autorise les découverts des comptes de commerce et des comptes d’opérations monétaires, qui sont détaillés à l’état E annexé au présent projet de loi de finances. Les justifications des autorisations de découvert demandées sont quant à elles présentées dans les annexes relatives à chacune de ces deux catégories de comptes.

Les comptes de commerce et les comptes d’opérations monétaires

Les comptes de commerce retracent des opérations de caractère industriel et commercial effectuées à titre accessoire par des services de l’État non dotés de la personnalité morale. Les évaluations de recettes et les prévisions de dépenses de ces comptes ont un caractère indicatif. Seul le découvert fixé pour chacun d’entre eux a un caractère limitatif (1).

Les comptes d’opérations monétaires retracent les recettes et les dépenses de caractère monétaire. Pour cette catégorie de comptes, les évaluations de recettes et les prévisions de dépenses ont un caractère indicatif. Seul le découvert fixé pour chacun d’entre eux a un caractère limitatif (2).

(1) Article 22 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

(2) Article 23 de la LOLF.

Le présent article prévoit ainsi que les autorisations de découvert accordées pour 2018 s’élèvent :

– à 19 880 809 800 euros au titre des comptes de commerce ;

– et à 250 000 000 euros au titre des comptes d’opérations monétaires.

La loi de finances initiale pour 2017 avait fixé les autorisations de découvert aux niveaux suivants :

– 20 471 809 800 euros au titre des comptes de commerce ;

– et 250 000 000 euros au titre des comptes d’opérations monétaires.

Conformément à l’article 42 de la LOLF, les découverts sont votés par compte spécial. La décomposition des autorisations de découvert pour 2018 est ainsi prévue :

Découvert des comptes de commerce

(en millions d’euros)

Approvisionnement de l’État et des forces armées en produits pétroliers, biens et services complémentaires

125

Cantine et travail des détenus dans le cadre pénitentiaire

23

Couverture des risques financiers de l’État

526

Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État

0

Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État

19 200

Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes

0

Opérations commerciales des domaines

0

Régie industrielle des établissements pénitentiaires

0,6

Renouvellement des concessions hydrauliques

6,2

Soutien financier au commerce extérieur

0

Total

19 881

découverts des comptes d’opérations monétaires

(en millions d’euros)

Émission des monnaies métalliques

0

Opérations avec le Fonds monétaire international

0

Pertes et bénéfices de change

250

Total

250

*

*     *

Suivant l’avis favorable du Rapporteur général, la commission adopte l’article 32 et l’état E sans modification.

*

*     *

 


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TITRE II
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2018 –
PLAFOND DES AUTORISATIONS

Article 33
Plafonds des autorisations d’emplois de l’État

Le présent article fixe les plafonds des autorisations d’emplois par ministère et par budget annexe.

En application du 6° du I de l’article 34 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ([3]), la première partie de loi de finances de l’année fixe le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État. Ce plafond est fixé pour 2018, à l’article d’équilibre du présent projet de loi de finances (article 28), à 1 960 333 équivalents temps plein travaillé (ETPT), au lieu de 1 944 325 ETPT en loi de finances initiale pour 2017.

En seconde partie, la loi de finances détermine la répartition de ces plafonds par ministère et par budget annexe, comme le prévoit le présent article. En application de l’article 43 de la LOLF, ces plafonds donnent lieu à un vote unique.

L’évolution des plafonds des autorisations d’emplois par ministère par rapport à la loi de finances initiale pour 2017 est la suivante.

Évolution des plafonds des autorisations d’emplois par ministère

(en équivalents temps plein travaillé – ETPT)

Ministère

Plafond des autorisations d’emplois prévu

LFI 2017

Plafond des autorisations d’emplois prévu

PLF 2018

Action et comptes publics

128 023

126 536

Agriculture et alimentation

30 530

30 362

Armées

273 280

274 580

Cohésion des territoires

597

573

Culture

11 189

11 148

Économie et finances

13 279

13 137

Éducation nationale

1 007 579

1 021 721

Enseignement supérieur, recherche et innovation

8 023

8 016

Europe et affaires étrangères

13 834

13 530

Intérieur

285 374

287 325

Justice

83 216

84 969

Outre-mer

5 505

5 525

Services du Premier ministre

11 315

11 536

Solidarités et santé

10 225

9 938

Transition écologique et solidaire

41 391

40 805

Travail

9 523

9 251

Total Budget général

1 932 883

1 948 952

Contrôle et exploitations aériens

10 679

10 677

Publications officielles et information administrative

763

704

Total Budgets annexes

11 442

11 381

Total général

1 944 325

1 960 333

Source : présent projet de loi de finances.

Au niveau global, le plafond des autorisations d’emplois pour le budget général s’élève à 1 948 952 ETPT, soit une augmentation de 16 069 ETPT par rapport au niveau fixé en loi de finances initiale pour 2017.

Le plafond des autorisations d’emplois pour les budgets annexes s’élève à 11 381 ETPT, soit un niveau en baisse de 61 ETPT par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

Au total, le plafond des autorisations d’emplois de l’État (budget général et budgets annexes) s’élève à 1 960 333 ETPT, en augmentation de 16 008 ETPT par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

Cela résulte principalement des éléments suivants :

– des mesures de transfert et de périmètre, à hauteur de 6 347 ETPT, correspondant à la transformation des contrats d’accompagnement d’élèves en situation de handicap (AESH) en contrats pérennes portés par le ministère de l’éducation nationale ;

– l’effet en année pleine des hausses d’effectifs intervenues en 2017 (+ 10 392 ETPT), dont 7 774 ETPT relèvent du ministère de l’éducation nationale.

Le Rapporteur général ne peut que regretter l’absence de présentation, à périmètre constant, de l’évolution du schéma d’emplois de l’État (budget général et budget annexes) par rapport à la loi de finances initiale pour 2017. Celle-ci avait été introduite dans l’exposé général des motifs du projet de loi de finances pour 2017. Elle permettait d’identifier les mouvements de créations et de suppressions de postes au sein des différents ministères.

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*     *

Suivant l’avis favorable du Rapporteur général, la commission adopte l’article 33, sans modification.

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Article 34
Plafonds des emplois des opérateurs de l’État

Le présent article arrête les plafonds des autorisations d’emplois des opérateurs de l’État à 404 472 équivalents temps plein travaillé (ETPT) pour 2018 au lieu de 398 680 ETPT en loi de finances initiale pour 2017, soit une augmentation 5 792 emplois.

plafond d’emplois des opérateurs de l’état

(en ETPT)

Missions (opérateurs de l’État)

Plafond des autorisations d’emplois
LFI 2017

Plafond des autorisations d’emplois

PLF 2018

Écart

Action extérieure de l’État

6 846

6 765

– 81

Administration générale et territoriale de l’État

443

443

0

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

14 439

14 340

– 99

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

1 301

1 327

26

Cohésion des territoires

379

379

Culture

14 470

14 361

– 109

Défense

6 600

6 603

3

Direction de l’action du Gouvernement

611

597

– 14

Écologie, développement et mobilité durables

20 237

19 791

– 446

Économie

2 612

2 591

– 21

Égalité des territoires et logement

291

– 291

Enseignement scolaire

3 400

3 359

– 41

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

1 347

1 328

– 19

Immigration, asile et intégration

1 829

1 879

50

Justice

575

580

5

Médias, livre et industries culturelles

3 033

3 023

– 10

Outre-mer

127

127

0

Politique des territoires

96

– 96

Recherche et enseignement supérieur

259 352

259 376

24

Régimes sociaux et de retraite

337

319

– 18

Santé

2 253

1 658

– 595

Sécurités

267

267

0

Solidarité, insertion et égalité des chances

8 627

8 368

– 259

Sport, jeunesse et vie associative

580

580

0

Travail et emploi

48 161

55 558

7 397

Contrôle et exploitation aériens

812

812

0

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

34

41

7

Total

398 680

404 472

5 792

Source : loi de finances initiale pour 2017 et présent projet de loi de finances.

Cette hausse résulte essentiellement de mesures de périmètre (+ 7 249 ETPT), dont l’entrée dans le champ des opérateurs de l’établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes (AFPA), qui représente 7 710 ETPT.

Pour autant, les effectifs des opérateurs de l’État devraient diminuer à hauteur de 1 276 ETP en 2018, selon le schéma d’emplois prévu par le présent projet de loi de finances. Les principales créations et suppressions d’emplois concernent les opérateurs :

– du ministère de la transition écologique et solidaire (– 496 ETP), notamment Voies navigables de France, les Agences de l’eau, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, Météo-France, l’Institut national de l’information géographique et forestière et le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement ;

– du ministère du travail (– 347 ETP), principalement Pôle emploi ;

– du ministère des solidarités et de la santé (– 272 ETP), principalement les agences régionales de santé ;

– du ministère de l’agriculture et de l’alimentation (– 95 ETP), l’Agence de services et de paiement, FranceAgrimer et l’Institut français du cheval et de l’équitation ;

– et du ministère de l’intérieur (+ 57 ETP), dont 35 ETP pour l’Office français de l’immigration et de l’intégration et 15 ETP pour l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA).

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*     *

Suivant l’avis favorable du Rapporteur général, la commission adopte l’article 34, sans modification.

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*     *

Article 35
Plafonds des emplois des établissements à autonomie financière

Le présent article fixe le plafond des autorisations d’emplois des établissements à autonomie financière (EAF) pour 2018.

Cette disposition, prévue à l’article 76 de la loi de finances initiale pour 2009 ([4]), complète les dispositifs de plafonnement des autorisations d’emplois de l’État et des opérateurs de l’État.

Elle est applicable aux emplois d’établissements dépourvus de la personnalité morale et qui ne constituent pas des opérateurs de l’État. Cette catégorie d’établissements est visée à l’article 66 de la loi de finances pour 1974 ([5]), qui prévoit qu’un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles « l’autonomie financière pourra être conférée à des établissements et organismes de diffusion culturelle ou d’enseignement situés à l’étranger et dépendant du ministère des affaires étrangères ».

Ces établissements relèvent du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. Leur liste est fixée par arrêté conjoint du ministre de l’économie et des finances et du ministre des affaires étrangères.

Le plafond des autorisations d’emplois s’applique uniquement aux agents de droit local recrutés à durée indéterminée.

plafonds des emplois des établissements à autonomie financière

(en équivalents temps plein – ETP)

Mission

Action extérieure de l’État

Plafond

LFI 2012

Plafond LFI 2013

Plafond

LFI 2014

Plafond LFI 2015

Plafond LFI 2016

Plafond LFI 2017

Plafond LFI 2017

Programme Diplomatie culturelle et d’influence

3 540

3 600

3 564

3 489

3 449

3 449

3 449

Source : lois de finances initiales.

Ce plafond, fixé à 3 449 ETP, est stable depuis la loi de finances initiale pour 2016.

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*     *

Suivant l’avis favorable du Rapporteur général, la commission adopte l’article 35, sans modification.

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*     *

Article 36
Plafonds des emplois de diverses autorités publiques

Le présent article fixe le plafond des autorisations d’emplois des autorités publiques indépendantes (API) et des autorités administratives indépendantes (AAI) dont les effectifs ne sont pas inclus dans un plafond des emplois rémunérés par l’État.

La loi de finances pour 2012 ([6]) a instauré la fixation de ce plafond d’autorisations d’emplois. Celle-ci avait également prévu la création d’une annexe générale au projet de loi de finances de l’année relative aux API et aux AAI dont les effectifs ne sont pas inclus dans un plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État ([7]). Cette annexe générale est désormais prévue à l’article 23 de la loi du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ([8]).

Ces dispositions sont de nature à améliorer l’information du Parlement, à renforcer le contrôle de l’évolution des effectifs au sein des API et des AAI, ainsi que le suivi de leurs dépenses. Cependant, le Rapporteur général ne peut que regretter la transmission tardive de l’annexe générale. Ainsi, celle-ci a été publiée seulement le 27 octobre en 2016. Pourtant, l’examen en seconde partie de cet article devrait laisser le temps au Gouvernement de transmettre ce document en temps utile.

Les plafonds d’emplois des autorités publiques indépendantes, fixés en loi de finances initiale, sont relativement stables sur moyenne période.

Évolution des plafonds d’emplois des autorités publiques indépendantes

(en ETPT)

Autorité

LFI

2012

LFI

2013

LFI

2014

LFI

2015

LFI

2016

LFI 2017

PLF 2018

Écart entre LFI 2017 et PLF 2018

ACPR – Autorité de contrôle prudentiel et de résolution

1 121

1 121

1 121

1 121

1 121

1 121

1 121

0

AFLD  Agence française de lutte contre le dopage

65

65

64

62

62

62

62

0

AMF – Autorité des marchés financiers

469

469

469

469

469

469

469

0

ARAFER – Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières

52

56

59

63

68

75

75

0

CSA  Conseil supérieur de l’audiovisuel

284

284

284

284

0

H3C – Haut Conseil du commissariat aux comptes

43

50

50

55

58

61

65

+ 4

HADOPI – Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet

71

71

71

71

65

65

65

0

HAS – Haute Autorité de santé

409

411

394

395

394

395

395

0

MNE – Médiateur national de l’énergie

47

46

41

41

41

41

41

0

Total

2 277

2 289

2 269

2 561

2 562

2 573

2 577

+ 4

Source : lois de finances initiales, présent projet de loi de finances.

L’augmentation du plafond de 4 emplois entre 2017 et 2018 concerne exclusivement le Haut Conseil du commissariat aux comptes, afin de mettre en œuvre les nouvelles missions issues de l’ordonnance du 17 mars 2016 ([9]).

L’article 6 de l’ordonnance a redéfini en particulier les compétences du Haut Conseil relatives à l’inscription des commissaires aux comptes, à ses pouvoirs d’enquête, de sanction, à la supervision de la formation continue et à l’élaboration des normes applicables à la profession.

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*     *

Suivant l’avis favorable du Rapporteur général, la commission adopte l’article 36, sans modification.

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*     *

 


—  1  —

TITRE III
REPORTS DE CRÉDITS DE 2017 SUR 2018

Article 37
Majoration des plafonds de reports de crédits de paiement

L’article 15 de la LOLF prévoit que les crédits de paiement disponibles sur un programme à la fin de l’année peuvent être reportés sur le même programme ou, à défaut, sur un programme poursuivant les mêmes objectifs. Ce report est mis en place dans la limite de 3 % des crédits initiaux inscrits, sur le même titre, du programme à partir duquel les crédits sont reportés.

S’agissant des crédits hors dépenses de personnel, cet article précise que « ce plafond peut être majoré par une disposition de loi de finances ».

Le Parlement peut donc accorder au Gouvernement une souplesse de gestion permettant un report supérieur à 3 % des crédits initiaux du programme sur l’exercice budgétaire suivant, à la condition que ces crédits ne portent pas sur des dépenses de personnel.

Le présent article a pour objet de prévoir cette exception au titre de trois programmes au lieu de vingt-neuf programmes en loi de finances initiale pour 2017. Toutefois, le projet de loi de finances pour 2017 prévoyait cette exception pour six programmes. Le Gouvernement avait étendu cette exception à d’autres programmes en cours d’examen du projet de loi de finances.

Le montant de ces reports, non communiqué par le Gouvernement à la date de la rédaction du présent rapport général, sera présenté de manière prévisionnelle en loi de finances rectificative de fin d’année, puis définitive en loi de règlement pour 2017.

Les programmes concernés par la majoration des plafonds de reports de crédits de paiement sont les suivants.

Programmes concernés par une majoration de reports
de crédits de paiement

Mission

Programme

Motif de report

Aide publique au développement

Aide économique et financière au développement

Report d’une opération de traitement de dette d’un État étranger

Conseil et contrôle de l’État

Conseil d’État et autres juridictions administratives

Report sur 2018 du financement de travaux immobiliers

Administration générale et territoriale de l’État

Vie politique, cultuelle et associative

Délais de remboursements des dépenses de campagne des candidats aux élections présidentielle, législatives et sénatoriales

Source : présent projet de loi de finances.

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*     *

Suivant l’avis favorable du Rapporteur général, la commission adopte l’article 37, sans modification.

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*     *

 


—  1  —

TITRE IV
DISPOSITIONS PERMANENTES

I. – MESURES FISCALES ET MESURES BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES

Lors de ses réunions du jeudi 9 novembre 2017 matin et après-midi, la commission a examiné les articles non rattachés à une mission budgétaire.

Article 38
Déductibilité à l’impôt sur le revenu (IR) du supplément de contribution sociale généralisée (CSG) résultant de l’augmentation de son taux

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article dispose que la hausse de 1,7 point de contribution sociale généralisée (CSG) prévue par l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, applicable à toutes les catégories de revenus à compter du 1er janvier 2018, sera déductible de l’assiette de l’impôt sur le revenu.

S’agissant des revenus du capital, le présent article tire également les conséquences de l’article 11 du présent projet de loi de finances, prévoyant la mise en place d’un prélèvement forfaitaire unique sur une grande partie de ces revenus. Il en résulte que la déductibilité de la CSG sera circonscrite à ceux de ces revenus qui resteront soumis, de plein droit ou sur option du contribuable, à une imposition au barème de l’impôt sur le revenu.

Cette mesure devrait se traduire par la minoration de l’assiette de l’impôt sur le revenu à hauteur de 22,9 milliards d’euros en 2018 et par des pertes de recettes évaluées à 3,9 milliards d’euros en 2019, pour la seule prise en compte de la déductibilité de la hausse de CSG.

Au total, les effets consolidés de la « bascule » des cotisations salariales vers la CSG sur l’impôt sur le revenu devraient représenter :

– des pertes de recettes d’impôt sur le revenu de 590 millions d’euros en 2019 ;

– des recettes supplémentaires de l’ordre de 160 millions d’euros en 2020.

Dernières modifications législatives intervenues

La loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie a augmenté le taux de la CSG de 0,7 point sur les revenus du capital et de 0,4 point sur les pensions de retraite et d’invalidité, tandis que la loi de finances rectificative pour 2004 a rendu ces hausses de CSG déductibles de l’impôt sur le revenu.

La loi de finances pour 2013 est revenue sur la déductibilité de la hausse de 0,7 point sur les revenus du capital, la rendant non déductible.

I.   L’État du droit

A.   Cadrage général sur la CSG

● La contribution sociale généralisée (CSG) comporte juridiquement quatre contributions distinctes :

– la CSG sur les revenus d’activité (salaires, primes, intéressement, avantages en nature, avec une déduction forfaitaire de 1,75 % au titre des frais professionnels) et de remplacement (pensions de retraite et d’invalidité, allocations chômage ([10]), indemnités journalières de sécurité sociale, allocations de préretraite…), prévue par l’article L. 136-1 du code de la sécurité sociale ;

– la CSG sur les revenus du patrimoine, à laquelle sont notamment soumis les revenus fonciers, les rentes viagères à titre onéreux, les plus-values mobilières, en application de l’article L. 136-6 du même code ;

– la CSG sur les produits de placement, pour la plupart des revenus de capitaux mobiliers, ainsi que pour les plus-values immobilières, notamment, en application de l’article L. 136-7 du même code ;

– la CSG sur les gains et mises de jeu, prévue par l’article L. 136-7-1.

● S’agissant des revenus d’activité et de remplacement, sont assujetties à la CSG les personnes qui sont, cumulativement, domiciliées fiscalement en France et à la charge d’un régime obligatoire français d’assurance maladie.

S’agissant des revenus du capital, sont assujetties à la CSG les personnes qui sont domiciliées fiscalement en France. Néanmoins, sont également redevables de la CSG les non-résidents sur leurs revenus fonciers et sur leurs plus-values immobilières de source française, et ce depuis la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 ([11]).

● Le taux de la CSG varie selon les différentes catégories de revenus, comme le retrace le tableau ci-après :

Catégories de revenus

Taux de CSG

Revenus d’activité

7,5 %

Revenus de remplacement

 

Pensions de retraite, préretraite et invalidité

6,6 %

Autres revenus de remplacement (allocations chômage, indemnités journalières de sécurité sociale…)

6,2 %

Revenus de remplacement des foyers fiscaux dont le revenu fiscal de référence (RFR) est inférieur à un certain seuil (14 375 euros pour un célibataire, 22 051 euros pour un couple) et supérieur au seuil conditionnant l’exonération (Cf. ligne suivante)

3,8 %

Revenus de remplacement des foyers fiscaux dont le RFR est inférieur à un certain seuil (10 996 euros pour un célibataire, 16 868 euros pour un couple)

0 %

Revenus du capital

8,2 %

Revenus du patrimoine

8,2 %

Produits de placement

8,2 %

Produits des jeux

6,9 %/9,5 %/12 %

● Ses recettes nettes ont atteint 97 milliards d’euros en 2016, dont environ 69 % au titre de la CSG pesant sur les revenus d’activité, 19,3 % sur les revenus de remplacement et 10,7 % sur les revenus du capital.

Évolution du montant de la CSG depuis 2010

(en millions d’euros)

Revenus

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

CSG brute sur

84 006

86 677

90 413

91 176

92 526

95 064

97 457

Revenus d’activité

59 514

60 773

63 262

63 814

64 813

66 341

67 573

Revenus de remplacement

15 101

15 552

16 142

16 891

17 652

18 515

18 845

Revenus du capital

8 779

9 822

10 420

9 910

9 509

9 670

10 440

dont revenus du patrimoine

3 763

3 940

4 324

4 686

4 408

4 579

5 043

dont revenus de placement

5 016

5 882

6 096

5 224

5 101

5 091

5 397

Jeux

400

349

351

349

346

355

365

Majorations et pénalités

212

181

238

212

205

183

234

CSG nette (après consolidation et reprises)

83 054

86 551

89 906

90 483

91 702

94 258

97 004

Source : rapports de la commission des comptes de la sécurité sociale.

B.   la déductibilité d’Une part majoritaire de la CSG pour les revenus d’activité et de remplacement

Selon la qualification retenue par le Conseil constitutionnel dans sa décision sur la loi de finances initiale pour 1991 ([12]), qui créait la CSG, cette contribution est une « imposition de toute nature », du fait de l’absence de contrepartie à son versement, à la différence des cotisations sociales, qui, elles, ouvrent des droits et avantages servis par les régimes de sécurité sociale ([13]).

De façon générale, la règle fiscale de droit commun est que les impôts de même nature ne sont pas déductibles entre eux. Toutefois, depuis 1997, une partie de la CSG est déductible de l’assiette de l’impôt sur le revenu, en application de l’article 154 quinquies du code général des impôts (CGI) introduit par la loi de finances pour 1997 ([14]), pour des parts variables selon les catégories de revenus.

1.   La part déductible de la CSG résulte de la substitution de la CSG à des cotisations salariales en 1997 et 1998

Les modalités de déductibilité de la CSG résultent des conditions de sa création et de son extension au cours des années.

● Lorsque la loi de finances pour 1991 ([15]) a institué la CSG au taux de 1,1 %, elle n’avait pas prévu sa déductibilité à l’assiette de l’impôt sur le revenu, puisque la CSG se substituait alors à des cotisations patronales de sécurité sociale, destinées à la branche « famille » et que l’objectif recherché était de renforcer la progressivité d’ensemble de l’imposition des revenus.

Puis, lors de l’augmentation de 1,3 % du taux de la CSG réalisée par la première loi de finances rectificative pour 1993 et destinée à financer le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), la déductibilité de cette augmentation de la CSG avait été prévue ([16]) ; toutefois, la loi de finances pour 1994 ([17]) est revenue sur cette décision en réaffirmant le caractère non déductible de la CSG. Telle est l’origine de la part de 2,4 % de CSG non déductible que l’on retrouve aujourd’hui pour les revenus d’activité et de remplacement.

● En revanche, lorsque le taux de la CSG sur les revenus d’activité a été augmenté par les lois de financement de la sécurité sociale pour 1997 et pour 1998 ([18]), à hauteur de 1 point puis de 4,1 points, la CSG venait se substituer à des cotisations salariales d’assurance maladie qui étaient déductibles de l’assiette de l’impôt sur le revenu ([19]). A donc été prévue une déductibilité des augmentations de taux de CSG correspondant une substitution à des cotisations déductibles ([20]). L’absence de déductibilité de ces 5,1 points de CSG aurait conduit à majorer significativement le revenu imposable des salariés, alors même que le basculement de cotisations maladie vers la CSG était également destiné à accroître leur pouvoir d’achat.

Cette déductibilité a concerné l’intégralité de la CSG, y compris celle portant sur les revenus de remplacement (pour lesquels la CSG a augmenté de 1 point en 1997 puis de 2,8 points en 1998) et les revenus du capital, qui pourtant n’étaient pas auparavant soumis à cotisations.

● En 2004, la CSG sur les revenus du capital a été augmentée de 0,7 point, pour être portée à 8,2 %, et celle sur les pensions de retraite, préretraite et invalidité a été augmentée de 0,4 point, passant de 6,2 à 6,6 % ([21]). La loi de finances rectificative pour 2004 ([22]) a prévu la déductibilité de ces augmentations de CSG, maintenant la part non déductible à 2,4 points pour chacune des composantes de la CSG.

Toutefois, la loi de finances pour 2013 est revenue sur la déductibilité de la hausse de 0,7 point pour la CSG sur les revenus du capital, ce qui a porté la part non-déductible à 3,1 points (voir infra).

● En application du I de l’article 154 quinquies du CSG, la part déductible de la CSG pour les revenus d’activité s’élève à 5,1 %. S’agissant des revenus de remplacement, lorsque leurs titulaires relèvent du taux de 6,6 % ou de 6,2 %, la part déductible est de respectivement 4,2 % ou 3,8 %. Pour les personnes relevant du taux réduit à 3,8 %, la totalité de la CSG acquittée est déductible du revenu imposable.

Part de CSG déductible et non déductible
pour les différentes catégories de revenus

Catégories de revenus

CSG déductible

CSG non déductible

Total

Part de CSG déductible

Revenus d’activité

5,1

2,4

7,5

68 %

Revenus de remplacement

 

 

 

 

Pensions de retraite, préretraite et invalidité

4,2

2,4

6,6

63,6 %

Autres revenus de remplacement

3,8

2,4

6,2

61,3 %

Revenus de remplacement-taux réduit

3,8

0

3,8

100 %

Revenus de remplacement-exonération

0

0

0

Revenus du capital

 

 

 

 

Revenus du patrimoine

5,1

3,1

8,2

62,2 %

Produits de placement

5,1

3,1

8,2

62,2 %

● Le Conseil constitutionnel a été amené à se prononcer sur la déductibilité de la CSG de l’assiette de l’impôt sur le revenu, notamment dans sa décision sur la loi de finances pour 2013 ([23]). Il a estimé que « le principe d’égalité devant les charges publiques ne fait pas obstacle à ce que le législateur, dans l’exercice des compétences qu’il tient de l’article 34 de la Constitution, rende déductible un impôt de l’assiette d’un autre impôt ou modifie cette déductibilité, dès lors qu’en modifiant ainsi la charge pesant sur les contribuables, il n’entraîne pas de rupture caractérisée de l’égalité entre ceux-ci ».

Il reprenait les termes utilisés dans sa décision de 1993 sur la loi de finances rectificative pour 1993 ([24]). Il avait alors admis la déductibilité de la hausse de CSG de 1,3 point, en jugeant qu’en l’espèce, « la déduction opérée par la loi, qui [était] au demeurant partielle et limitée dans son montant par un mécanisme de plafonnement, ne remet[tait] pas en cause le caractère progressif du montant de l’imposition globale du revenu des personnes physiques ; qu’elle ne saurait, par suite, être regardée comme contraire à l’article 13 de la Déclaration de 1789 ».

Comme le relève le rapport particulier sur le cadre juridique de réformes de l’impôt sur le revenu et de la CSG du Conseil des prélèvements obligatoires, publié en 2015 ([25]), la déductibilité ou non de la CSG de l’assiette de l’impôt sur le revenu constitue un choix du législateur, soumis uniquement au contrôle de cohérence qui est exercé par le Conseil constitutionnel entre les buts poursuivis et les moyens mis en œuvre pour les atteindre.

2.   Les interactions entre CSG et impôt sur le revenu

● Pour la détermination des bases d’imposition à l’impôt sur le revenu, la CSG acquittée sur les revenus d’activité et les revenus de remplacement est déductible l’année de son paiement, à hauteur de 5,1 points, 4,2 points ou 3,8 points du montant des traitements, salaires et pensions payés et des avantages en nature accordés, avant application de la déduction forfaitaire ou au réel des frais professionnels, ou de l’abattement forfaitaire de 10 % sur les pensions.

● La déductibilité d’une partie de la CSG de l’assiette de l’impôt sur le revenu se traduit mécaniquement par des interactions entre les deux impositions : une hausse nette de la CSG déductible se traduit par une diminution des recettes d’impôt sur le revenu, et inversement, une baisse de la CSG déductible emporte une hausse des recettes d’impôt sur le revenu.

Exemple : un salarié perçoit un salaire brut mensuel de 3 200 euros, soit un salaire net perçu de 2 489 euros (après déduction des cotisations sociales, de la CSG et de la contribution au remboursement de la dette sociale  CRDS).

La CSG acquittée s’établit à 235,8 euros, dont 160,3 euros de CSG déductible de l’assiette de l’impôt sur le revenu et 75,5 euros de CSG non déductible.

Son salaire net imposable s’élève à 2 489 euros + 75,5 euros de CSG non déductible [+ 15,7 euros de CRDS non déductible] = 2 580,20 euros.

     Le revenu net imposable annuel est égal à 30 962 euros, soit un RFR de 27 866 euros (après déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels). L’impôt sur le revenu à acquitter s’élève à 2 710 euros ([26]).

     Si la CSG était intégralement déductible, le revenu net imposable s’élèverait à 30 056 euros (la CRDS n’étant pas déductible), soit un RFR de 27 050 euros. L’impôt sur le revenu serait égal à 2 465 euros.

     Si la CSG n’était pas du tout déductible, le revenu net imposable s’élèverait à 32 886 euros, soit un RFR de 29 597 euros. L’impôt sur le revenu serait égal à 3 229 euros.

● Les sommes en jeu sont considérables, puisque la déductibilité de la CSG sur les différentes catégories de revenus se traduit par des moindres recettes d’impôt sur le revenu évaluées à 11 milliards d’euros, selon les estimations réalisées par la direction générale du Trésor en 2014, évoquées par le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires précité intitulé Impôt sur le revenu, CSG, quelles réformes ?, de février 2015.

Inversement, rendre déductibles les 2,4 ou 3,1 points de CSG qui ne le sont pas aujourd’hui se traduirait par des pertes de recettes qui ont été évaluées à 5 milliards d’euros par la direction de la législation fiscale en 2013, ainsi que l’indiquait la Cour des comptes dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale de 2013.

C.   La déductibilité de la CSG pesant sur les revenus du capital

Les revenus du capital sont actuellement soumis aux prélèvements sociaux au taux global de 15,5 %, dont 8,2 % au titre de la seule CSG. Sur cette fraction de 8,2 %, 5,1 points sont déductibles de l’impôt sur le revenu lorsque ces revenus du capital sont imposés au barème.

Compte tenu de l’augmentation de cette CSG de 1,7 point prévue par l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, le présent article prévoit d’ajuster cette déductibilité de la CSG en la faisant passer de 5,1 à 6,8 points.

Par comparaison aux revenus d’activité ou de remplacement, dans leur ensemble imposables au barème de l’impôt sur le revenu, les revenus du capital n’y sont soumis qu’en partie ; de ce fait, la déductibilité de la CSG est limitée à cette seule partie des revenus du capital.

Compte tenu de la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU) prévue par l’article 11 du présent projet de loi de finances, la part de ces revenus soumis au barème de l’impôt sur le revenu devrait en outre devenir plus marginale.

De ce fait, l’augmentation de la déductibilité prévue par le présent article aura des conséquences budgétaires limitées.

1.   Une déductibilité circonscrite aux revenus du capital imposés au barème de l’impôt sur le revenu

Actuellement, les articles L. 136‑6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale définissent les revenus du capital comme l’ensemble constitué des revenus du patrimoine et les revenus de placement.

Si la distinction entre ces deux catégories de revenus du capital semble reposer sur un critère économique, elle vise en réalité à séparer ces revenus en fonction des modalités selon lesquelles les prélèvements sociaux pesant sur ces revenus sont recouvrés :

– pour les revenus du patrimoine, les prélèvements sociaux sont perçus par voie de rôle en année N + 1 en même temps que l’impôt sur le revenu ; le fait que ces revenus soient prélevés par voie de rôle signifie en règle générale qu’ils sont actuellement imposés au barème de l’impôt sur le revenu (IR) ;

– pour les revenus de placement, les prélèvements sociaux sont perçus par le biais d’un prélèvement à la source encaissé directement lors du paiement de ces sommes.

Le tableau ci-dessous offre une vision d’ensemble des revenus du capital en fonction du mode de leur mode d’imposition.

L’imposition des revenus du capital

Catégorie de revenus

Modalités d’imposition à l’IR

Les revenus de placement

Revenus de l’assurance-vie soumis au prélèvement forfaitaire libératoire (PFL) (à défaut d’option pour le barème de l’IR)

– PFL au titre de l’IR de 35 % (si le contrat a moins de quatre ans), de 15 % (entre quatre et huit ans) ou 7,5 % (plus de huit ans) perçu en année N

– Pour les contrats de plus de huit ans, le montant des gains contenus dans le rachat du contrat fait l’objet d’un abattement annuel de 4 600 euros pour une personne seule et 9 200 euros pour un couple (valable au PFL comme au barème)

 Prélèvements sociaux de 15,5 % perçus au même moment que le prélèvement forfaitaire

Intérêts d’obligations soumis à PFL

– Prélèvement libératoire du barème de l’IR de 5 % dans le cadre du mécanisme solidaire de don à des œuvres d’intérêt général

– Prélèvement libératoire du barème de l’IR de 75 % lorsque les intérêts sont versés à un bénéficiaire établi dans un État ou territoire non coopératif (ETNC)

– Prélèvement libératoire du barème de l’IR de 60 % applicable aux bons anonymes

 Prélèvements sociaux de 15,5 % perçus au même moment que le prélèvement forfaitaire

Revenus de capitaux mobiliers soumis au prélèvement forfaitaire obligatoire (PFO) non libératoire du barème

– En application des articles 125 A et 117 quater du CGI, les revenus de capitaux mobiliers sont soumis à un PFO respectivement de 21 % pour les dividendes et de 24 % pour les intérêts d’obligations, lorsque l’établissement payeur se situe en France

 Prélèvements sociaux de 15,5 % perçus au même moment que le prélèvement forfaitaire

Plus-values immobilières

– Imposition selon un taux forfaitaire au titre de l’IR de 19 % et de 15,5 % au titre des prélèvements sociaux

– Ces impositions sont encaissées au moment de la mutation immobilière

Produits de l’épargne logement

– Les produits des comptes épargne logement sont exonérés d’IR mais pas des prélèvements sociaux qui sont perçus au moment de leur inscription en compte

– Les produits des plans d’épargne logement sont exonérés d’IR pendant les douze premières années du plan puis soumis au barème de l’IR ; les prélèvements sociaux

Les revenus du patrimoine

Revenus fonciers

– Imposition au barème de l’IR en année N + 1 ; perception des prélèvements sociaux au taux de 15,5 %

– Imputation possible du déficit foncier sur le revenu global à hauteur de 10 700 euros puis report éventuel du surplus sur les dix années suivantes

– Modalités complexes de prise en compte des charges déductibles du revenu foncier brut

– Option possible pour le régime micro-foncier avec un abattement forfaitaire de 30 % au titre des charges

Rentes viagères à titre onéreux

– Imposition au barème de l’IR en année N + 1 ; perception des prélèvements sociaux au taux de 15,5 %

– Seule une fraction de la rente est intégrée au barème, en fonction de l’âge du bénéficiaire (de 70 % avant cinquante ans jusqu’à 30 % après soixante-neuf ans)

Revenus de capitaux mobiliers non soumis à un prélèvement forfaitaire

Dividendes d’actions :

– Imposition au barème de l’IR (depuis 2013) et prélèvements sociaux de 15,5 %, en année N + 1

– PFO (à la source) de 21 % en année N

– Abattement de 40 % pour éviter la double imposition (au niveau de l’entreprise et de l’actionnaire)

Intérêts d’obligations :

– Imposition au barème de l’IR (depuis 2013) et prélèvements sociaux de 15,5 %, en année N + 1

– PFO (à la source) de 24 % en année N (sauf quand le revenu fiscal de référence est inférieur à 25 000 euros, ou 50 000 euros pour un couple)

– Prélèvement à la source à 24 % libératoire du barème lorsque le montant total annuel des intérêts est inférieur à 2 000 euros

Plus-values mobilières, gain d’acquisition d’actions gratuites, plus-values en report d’imposition

– Imposition au barème de l’IR (depuis le 1er janvier 2013) et prélèvements sociaux de 15,5 %, en année N + 1

– Pas de prélèvement à la source ;

– Deux abattements de la plus-value pour durée de détention :

  • Abattement de droit commun (50 % après deux ans, 65 % après huit ans)
  • Abattement renforcé pour les start up (50 % après un an, 65 % après quatre ans, 85 % après huit ans)

– Abattement fixe de 500 000 euros pour les dirigeants de PME partant à la retraite

Conformément à la jurisprudence constitutionnelle, la déductibilité de la CSG perçue sur les revenus du capital est limitée aux cas où ces revenus sont imposés au barème de l’impôt sur le revenu, à l’exclusion des cas où l’imposition est réalisée à un taux proportionnel.

Le Conseil constitutionnel a, en effet jugé, dans sa décision sur la loi de finances pour 1998 ([27]), qu’« il appartenait au législateur de prévoir, afin de ne pas remettre en cause le caractère progressif du montant de l’imposition du revenu des personnes physiques, que la déductibilité partielle de la contribution sociale généralisée continuerait à ne bénéficier qu’aux revenus et produits soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu et non à ceux soumis à un taux proportionnel ».

Cette décision emporte des modalités pratiques de déductibilité différentes suivant qu’il s’agit de revenus du patrimoine ou de revenus de placement :

– les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine perçus en année N sont recouvrés par voie de rôle en année N + 1 en même temps que l’impôt sur le revenu. La part déductible de la CSG sur ces revenus est déduite en année N + 2 à l’occasion de la liquidation de l’impôt sur le revenu de l’année N + 1. Le montant admis en déduction figure alors sur l’avis d’imposition ;

– les revenus de placement dont les prélèvements sociaux font l’objet d’une retenue à la source en année N voient la CSG déduite, lorsque ces revenus sont soumis au barème de l’impôt sur le revenu, à l’occasion de la liquidation de cet impôt en année N + 1.

2.   Évolution historique de cette déductibilité

Le tableau ci-dessous synthétise l’évolution des prélèvements sociaux sur les revenus du capital, dont la CSG, ainsi que la part de cette CSG déductible lorsque ces revenus sont soumis au barème de l’impôt sur le revenu.

Les prélèvements sociaux sur les revenus du capital
et la part déductible de la CSG

année

Total des prélèvements sociaux

dont CSG

Part de la CSG déductible (en points)

Part de la CSG non déductible (en points)

1976/1966

0 %

1984

1 %

1985

1 %

1987

2 %

1991

3,1 %

1,1 %

1993

4,4 %

2,4 %

1996

4,9 %

2,4 %

1997

5,4 %

3,4 %

1

2,4

1998

10 %

7,5 %

5,1

2,4

2004

10,3 %

7,5 %

5,1

2,4

2005

11 %

8,2 %

5,8

2,4

2008

11 %

8,2 %

5,8

2,4

2009

12,1 %

8,2 %

5,8

2,4

1er janvier 2011

12,3 %

8,2 %

5,8

2,4

1er octobre 2011

13,5 %

8,2 %

5,8

2,4

1er janvier 2012

13,5 %

8,2 %

5,8

2,4

1er juillet 2012

15,5 %

8,2 %

5,8

2,4

1er janvier 2013

15,5 %

8,2 %

5,1

3,1

1er janvier 2018

17,2 %

9,9 %

6,8

3,1

Si l’augmentation de la part déductible de la CSG a « suivi » l’augmentation de cette contribution depuis 1997, de manière à conserver constante la part non déductible à 2,4 points, tel n’a pas été le choix opéré par le législateur à compter du 1er janvier 2013, lorsque l’essentiel des revenus du capital ont été soumis au barème de l’impôt sur le revenu.

Dans un objectif essentiellement de rendement budgétaire, la part non déductible de la CSG a été augmentée à 3,1 points, alors même que celle afférente aux revenus d’activité et de remplacement est restée fixe à 2,4 points, introduisant une différence entre la taxation, au titre des prélèvements sociaux, des revenus du travail et des revenus du capital.

Selon le Rapporteur général, cette augmentation de la part non déductible devait rapporter 61 millions d’euros en 2013 et 119 millions d’euros à compter de 2014.

Celui-ci relevait d’ailleurs le fait que cette augmentation introduisait pour la première fois une différence de traitement entre les revenus du travail et ceux du capital qui pourrait entraîner une rupture d’égalité entre catégorie de revenus. Dans sa décision sur la loi de finances pour 1998 précitée ([28]), concernant l’augmentation de la CSG à 7,5 %, le Conseil constitutionnel avait, en effet, relevé que l’augmentation alors réalisée de la part de la CSG déductible « n’a ni pour objet, ni pour effet de traiter les revenus et produits du patrimoine différemment des autres revenus au regard de la déductibilité de la contribution sociale généralisée ; qu’en effet, ces revenus et produits, dans leur ensemble, bénéficient de cette déductibilité dès lors qu’ils sont soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu ».

Dans le considérant 47 de sa décision sur la loi de finances pour 2013 ([29]), le Conseil constitutionnel a toutefois validé ce traitement différencié eu égard à son caractère limité : « Considérant, en l’espèce, que la réduction de la part de la contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine et les produits de placement admise en déduction de l’assiette de l’impôt sur le revenu a pour effet d’augmenter les recettes fiscales et d’accroître le caractère progressif de l’imposition globale des revenus du patrimoine et des produits de placement des personnes physiques ; que cette réduction de la déductibilité, qui ne porte que sur la contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, demeure limitée ; que son incidence sur la majoration du taux d’imposition des revenus du patrimoine et des produits de placement soumis au barème de l’impôt sur le revenu ne saurait, par suite, conduire à la regarder comme entraînant une rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques ».

3.   Le dispositif de l’article 154 quinquies du code général des impôts en vigueur

L’article 154 quinquies du CGI en vigueur dresse la liste exhaustive des revenus du capital qui, en raison de leurs modalités d’imposition, sont éligibles à la déductibilité de la CSG. Il s’agit :

– des revenus fonciers ;

– des rentes viagères constituées à titre onéreux ;

– des revenus de capitaux mobiliers, à l’exception de ceux qui ont déjà supporté les prélèvements sociaux dans la catégorie des revenus de placement ;

– des plus-values mobilières, y compris les distributions d’un fonds commun de placement à risques, d’un fonds professionnel spécialisé ou d’un fonds professionnel de capital investissement, les plus-values d’un organisme de placement en valeurs mobilières (OPCVM) et les gains réalisés par le biais d’une fiducie ou d’une société de capital-risque.

Cette catégorie comprend également la part du gain d’acquisition d’une action gratuite qui, bien qu’imposée dans la catégorie des traitements et salaires, bénéficie actuellement de l’application des abattements pour durée de détention prévus par l’article 150-0 D ou 150-0 D ter du CGI.

N’entrent pas dans cette catégorie, pour l’application de la déductibilité de la CSG, les plus-values professionnelles de long terme, imposées au titre de l’impôt sur le revenu au taux proportionnel de 16 % (en application de l’article 39 quindecies du CGI), les gains liés aux bons de souscription de parts de créateurs d’entreprises (BSPCE), imposés au taux proportionnel de 19 %, ainsi que les gains liés au rachat anticipé d’un plan d’épargne en actions (imposés, suivant la date du rachat, au taux proportionnel de 22,5 % ou 19 %). Les actions gratuites et les stock-options imposées, en application de régime antérieur au 28 septembre 2012, à un taux proportionnel sont également exclues de cette catégorie ;

– de l’ensemble des revenus entrant dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), des bénéfices non commerciaux (BNC) ou des bénéfices agricoles (BA) qui ne sont pas soumis aux prélèvements sociaux sur les revenus d’activité ou de remplacement ;

– des revenus de l’assurance-vie dont l’imposition est réalisée, sur option du redevable, au barème de l’impôt sur le revenu.

L’article 154 quinquies en vigueur prévoit, par ailleurs, que la CSG afférente aux plus-values mobilières bénéficiant de certains abattements est déductible dans la limite du montant imposable de chacun de ces gains.

Il s’agit :

– des gains liés à la cession d’une petite ou moyenne entreprise (PME) lorsque son dirigeant prend sa retraite, qui bénéficient actuellement d’un abattement fixe de 500 000 euros (en application de l’article 150-0 D ter du CGI) ;

– des gains bénéficiant des abattements pour durée de détention prévus par l’article 150-0 A du CGI, c’est-à-dire l’abattement pour durée de détention de droit commun (qui aboutit à un abattement de 65 % de cette plus-value après huit ans de détention) ou l’abattement renforcé pour les dirigeants d’une PME de moins de dix ans (qui aboutit à un abattement maximal de 85 % de cette plus-value après huit ans de détention).

Exemple

En 2014, à l’occasion de son départ à la retraite, un dirigeant de PME réalise une plus-value de 600 000 euros pour la cession de ses titres qu’il détient depuis plus de huit ans. Il bénéficie de l’abattement fixe de 500 000 euros et de l’abattement pour durée de détention renforcé.

Pour l’imposition des revenus de l’année 2014, cette plus-value est soumise à la CSG au taux de 8,2 % sur la totalité du gain, soit 49 200 euros.

Pour l’imposition au titre de l’impôt sur le revenu, la plus-value est soumise au barème de l’impôt sur le revenu après application de l’abattement fixe de 500 000 euros et, pour le surplus éventuel, de l’abattement pour durée de détention renforcé.

La plus-value imposable est donc de 15 000 euros (= 600 000 euros  500 000 euros × 15 %).

Alors que la CSG déductible aurait dû atteindre 5,1 % de la plus-value, soit 30 600 euros, elle ne sera déductible que dans la limite de 15 000 euros.

II.   Le contexte de la réforme : la hausse de 1,7 point de CSG dans le cadre de la « bascule » de cotisations salariales vers la CSG

● Le présent article est directement corrélé aux dispositions de l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, qui rehausse le taux de la CSG de 1,7 point, pour toutes les catégories de revenus, en contrepartie d’une diminution des cotisations salariales([30]), se traduisant par une mise à contribution plus forte des revenus du capital et des pensions de retraite pour le financement de la protection sociale.

Cette « bascule » de cotisations salariales sur la CSG ainsi que les différentes mesures d’adaptation prévues pour certaines catégories d’actifs sont présentées à grands traits dans le commentaire, dans le présent rapport général, de l’article 47 relatif à la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité, ainsi que, de façon détaillée, dans le rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 fait au nom de la commission des affaires sociales.

● L’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 augmente de 1,7 point le taux de CSG pour les différentes catégories de revenus :

– le taux de la CSG sur les revenus d’activité est porté de 7,5 % à 9,2 % ;

– le taux de la CSG sur les revenus du patrimoine et sur les produits de placement est porté de 8,2 % à 9,9 % ;

– le taux de la CSG sur les jeux exploités par la Française des jeux est porté de 6,9 % à 8,6 %, celui de la CSG sur les jeux de casino est porté de respectivement 9,5 % et 12 % à 11,2 % et 13,7 % ;

– le taux de la CSG sur les revenus de remplacement est porté de 6,6 % à 8,3 %.

S’agissant des revenus de remplacement, ne sont concernés par la hausse de 1,7 point que les revenus aujourd’hui assujettis au taux de 6,6 %, soit les pensions de retraite et d’invalidité perçues par des personnes dont RFR de l’année N – 2 est supérieur aux seuils déterminés par le 2° du III de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, à savoir, pour l’année 2017, 14 375 euros pour une personne seule et 22 051 euros pour un couple.

En revanche, les autres revenus de remplacement, notamment les allocations chômage et les indemnités journalières de sécurité sociale, relevant du taux de CSG de 6,2 %, ne se trouvent pas dans le champ de la hausse de CSG. Les titulaires de pensions de retraite ou d’invalidité bénéficiant du taux réduit de CSG de 3,8 %, ou d’une exonération, ne sont pas concernés non plus.

● La hausse du taux de la CSG devrait se traduire par des recettes supplémentaires évaluées à 22,9 milliards d’euros en 2018, qui sont ventilées comme suit entre les différentes catégories de revenus :

VENTILATION DES RECETTES SUPPLÉMENTAIRES
ISSUES DE LA HAUSSE DE 1,7 POINT DE CSG EN 2018

Nature des revenus

Montant de recettes supplémentaires de CSG

Revenus d’activité

16,1

Dont actifs privés

11

Dont actifs public

3

Dont travailleurs indépendants

2,1

Revenus de remplacement

4,5

Revenus du capital

2,2

Jeux

0,1

Total

22,9

Source : évaluation préalable du présent article.

III.   le dispositif proposé

A.   La déductibilité de la hausse de 1,7 point de CSG sur les revenus d’activité et de remplacement

1.   Le droit proposé

● Parallèlement à la hausse de CSG prévue à l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, l’alinéa 2 ( du I) du présent article majore de 1,7 point la part déductible de la CSG sur les revenus d’activité et de remplacement prévue par l’article 154 quinquies du CGI :

– la part de CSG déductible est portée de 5,1 à 6,8 points pour les revenus d’activité ;

– la part de CSG déductible est portée de 4,2 à 5,9 points pour les pensions de retraite et d’invalidité soumises à taux plein (le 1° du I effectue aussi la coordination nécessaire pour le taux de CSG applicable à ces revenus de remplacement, qui passe de 6,6 % à 8,3 %).

L’alinéa 8 (III) prévoit que la hausse de la part déductible de CSG s’applique à compter de l’imposition des revenus de l’année 2018, corrélativement à l’application de l’augmentation de CSG, à compter du 1er janvier 2018.

● Le tableau ci-après récapitule l’évolution de la part de CSG déductible et non déductible, avant et après la réforme :

évolution de la Part de CSG déductible et non déductible pour les revenus d’activité et de remplacement

 

Catégories de revenus

Droit existant

Droit proposé

CSG déductible

CSG non déductible

Total

Proportion de CSG déductible

CSG déductible

CSG non déductible

Total

Proportion de CSG déductible

Revenus d’activité

5,1

2,4

7,5

68 %

6,8

2,4

9,2

73,9 %

Revenus de remplacement

 

 

 

 

 

 

 

 

Pensions de retraite, préretraite et invalidité

4,2

2,4

6,6

63,6 %

5,9

2,4

8,3

71,1 %

Autres revenus de remplacement

3,8

2,4

6,2

61,3 %

3,8

2,4

6,2

61,3 %

Revenus de remplacement-taux réduit

3,8

0

3,8

100 %

3,8

0

3,8

100 %

Revenus de remplacement-exonération

0

0

0

0

0

0

2.   Les effets de la réforme selon les catégories de revenus

La solution retenue, à savoir rendre déductible de l’impôt sur le revenu la hausse de CSG réalisée parallèlement à une baisse de cotisations sociales, elles-mêmes déductibles, s’inscrit dans la continuité des précédentes réformes de « bascule » réalisées en 1997 et 1998 – les deux hausses de CSG ayant été rendues déductibles pour toutes les catégories de revenus.

Les effets de la mesure proposée ne sont pas les mêmes pour les revenus d’activité, d’une part, et les revenus de remplacement, d’autre part.

a.   Une hausse du revenu imposable égale à celle du revenu effectivement perçu, pour les personnes percevant des revenus d’activité

● Dans le cadre de la bascule de cotisations salariales vers la CSG, les personnes percevant des revenus d’activité bénéficieront d’un allégement de cotisations sociales ([31]), et le cas échéant du versement d’une prime compensatrice (pour les fonctionnaires qui ne bénéficient pas des allégements de cotisations, ou n’en bénéficient que pour partie), parallèlement à la hausse de 1,7 point de la CSG.

De ce fait, in fine, leur revenu net imposable a vocation à augmenter – à hauteur de 0,53 point de revenu brut pour les neuf premiers mois de 2018, puis de 1,48 point à compter du 1er octobre 2018 ([32]) pour les salariés du secteur privé et d’une part variable pour les travailleurs indépendants percevant un revenu inférieur à 43 000 euros – ou à rester stable, pour les travailleurs indépendants percevant un revenu supérieur à 43 000 euros et les fonctionnaires. 

Rendre déductible la hausse de 1,7 point de CSG conduit à ce que la hausse du revenu imposable net du salarié du secteur privé soit égale à la hausse de son revenu net disponible – et non à la hausse du revenu résultant des seuls allégements de cotisations sociales, à hauteur de 3,15 points, sans prise en compte de la hausse de CSG.

À l’inverse, la non-déductibilité du 1,7 point de CSG conduirait à creuser l’écart entre le revenu disponible du salarié et son revenu imposable, et à restreindre l’effet favorable de la réforme. En effet, les salariés devraient acquitter de l’impôt sur un revenu imposable supplémentaire plus de deux fois supérieur au revenu supplémentaire perçu (soit 3,15 points de revenu brut, au lieu de 1,48 point).

Exemple : Un salarié perçoit un salaire net de 2 000 euros par mois.

Grâce à la réforme, en année pleine (donc à compter de 2019), son revenu net augmentera de 38,10 euros par mois, du fait des effets combinés de la diminution de cotisations maladie et chômage (+ 81,1 euros) et de la hausse de CSG (– 43 euros).

Si la hausse de CSG de 1,7 point n’était pas déductible, son revenu imposable augmenterait de 81,1 euros par mois (soit le montant de baisse de cotisations salariales).

Avec une hausse de CSG déductible, son revenu imposable augmentera de 38,1 euros par mois, soit la hausse du revenu net perçu.

S’agissant des fonctionnaires, pour lesquels la hausse de CSG sera compensée à la fois par des primes et par une diminution de cotisations, la déductibilité de la hausse de 1,7 point de CSG permet de maintenir au même niveau le revenu imposable net. En l’absence de déductibilité, leur revenu imposable augmenterait à due concurrence du montant des primes compensatrices et/ou de l’allégement de cotisations. Les fonctionnaires verraient donc leur impôt sur le revenu augmenter, alors même que leur revenu disponible resterait le même.

Exemple : Un fonctionnaire perçoit un salaire net de 2 200 euros par mois.

Dans le cadre de la réforme, son revenu net restera stable, la hausse de la CSG de 45,2 euros par mois ayant vocation à être neutralisée par la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité, à hauteur de 24,4 euros, et par le versement d’une prime compensatrice, de 20,8 euros (voir article 47 du présent projet de loi de finances).

Si la hausse de CSG de 1,7 point n’était pas déductible, son revenu imposable augmenterait de 45,2 euros par mois (soit la somme de la prime et de la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité), alors que son revenu disponible serait stable.

Avec une hausse de CSG déductible, le revenu imposable reste stable lui aussi.

Il convient enfin de noter qu’en l’absence de déductibilité de la hausse de CSG, le RFR ([33]) des foyers aurait, comme le revenu imposable, augmenté davantage que le revenu disponible des ménages, ou aurait augmenté alors que le revenu des ménages restait stable, ce qui aurait pu conduire les foyers concernés à perdre le bénéfice de certains avantages sociaux et fiscaux conditionnés à leur niveau de RFR, alors même que l’évolution effective de leur revenu disponible ne le justifiait pas.

Du fait de la déductibilité de la CSG, les foyers verront leur RFR augmenter de la même façon que leur revenu disponible. Le gain procuré par la « bascule » de cotisations sociales vers la CSG pourra entraîner des répercussions sur le bénéfice de certains des dispositifs conditionnés à des plafonds de RFR ; elles seront proportionnées à l’évolution effective de leur revenu.

● La hausse de pouvoir d’achat résultant de la réforme est minorée en année N + 1 par l’augmentation d’impôt sur le revenu découlant de la hausse de revenu imposable, pour les seuls foyers imposés, ou pour les foyers qui le deviendraient du fait de la hausse de leur revenu.

Cet « effet retour » au titre de l’impôt sur le revenu est d’autant plus important que le niveau de revenu l’est, du fait de la progressivité du barème de l’impôt sur le revenu.

En tout état de cause, l’impôt sur le revenu acquitté augmentera uniquement en conséquence de la hausse de revenu effectivement perçu, et non de la hausse de revenu résultant des seuls allégements de cotisations.

b.   L’allégement de l’impôt sur le revenu acquitté par les titulaires
de pensions de retraite et d’invalidité, parallèlement à la hausse de CSG

● Les titulaires de pensions de retraite et d’invalidité ne bénéficient pas de mesures de compensation à la hausse de CSG, et leur revenu net diminuera en 2018 à hauteur de 1,7 point de leur retraite brute. Si la hausse de CSG n’était pas rendue déductible, leur revenu imposable serait maintenu constant en dépit de la baisse du revenu net perçu.

À l’inverse, la déductibilité du 1,7 point supplémentaire de CSG viendra minorer leur revenu net imposable en année N + 1 à hauteur de la diminution de leur revenu perçu. Elle se traduira, pour les ménages imposés, par la diminution de l’impôt acquitté en année N + 1 ou l’absence d’imposition. Cet « effet retour » au titre de l’impôt sur le revenu – en sens inverse cette fois – permet de compenser pour une partie la hausse de CSG subie en année N. Cet effet est d’autant plus fort que le revenu, donc le taux d’imposition, est important.

Exemple : une personne retraitée perçoit une pension de retraite nette de 3 000 euros par mois en 2018.

La hausse de 1,7 point de CSG représente une hausse des prélèvements de 661 euros. Toutefois, le revenu imposable en est minoré d’autant, ce qui se traduit par une baisse d’impôt sur le revenu acquitté en 2019 égale à 179 euros.

In fine, la perte « nette » à la hausse de CSG s’établit à 482 euros, une fois pris en compte la diminution de l’impôt sur le revenu, et non 661 euros.

La très grande majorité des personnes retraitées concernées par la hausse de 1,7 point de CSG, c’est-à-dire celles dont le RFR est supérieur aux seuils déterminés par le 2° du III de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale (pour l’année 2017, 14 375 euros pour une personne seule et 22 051 euros pour un couple) acquittent l’impôt sur le revenu, du fait de leur niveau de ressources, et bénéficieront donc de cet allégement d’impôt. En effet, une personne seule retraitée sera imposable sur ses revenus de 2018 à compter d’un RFR de 14 915 euros, ce qui correspond à un revenu mensuel imposable de l’ordre de 1 381 euros pour une personne de moins de soixante-cinq ans, et à un revenu mensuel imposable de l’ordre de 1 491 euros pour une personne de plus de soixante-cinq ans ([34]).

● Le RFR des titulaires de pensions de retraite et d’invalidité concernés par la hausse de la CSG diminuera dans les mêmes proportions que leur revenu imposable, ce qui pourrait les faire bénéficier d’avantages fiscaux et sociaux, le cas échéant.

B.   La déductibilité de la CSG pesant sur les revenus du capital

Les alinéas 3 à 7 du présent article tirent les conséquences de la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU) prévue par l’article 11 du présent projet de loi de finances et de l’augmentation de la CSG prévue par l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Il s’ensuit une simplification globale de la rédaction de l’article 154 quinquies du CGI s’agissant des règles de déductibilité de la CSG pesant sur les revenus du capital.

En effet, une grande partie des revenus du capital étant appelés à être, à compter du 1er janvier 2018, imposés selon un taux proportionnel, il était nécessaire de circonscrire le dispositif de déductibilité de la CSG à ceux de ces revenus qui restent imposés au barème de l’impôt sur le revenu, que ce soit de plein droit ou sur option du contribuable.

1.   Rappel succinct sur le champ des revenus du capital soumis au PFU

Le commentaire de l’article 11 du présent projet de loi de finances permettra certainement une compréhension plus complète du champ de la réforme du PFU.

Pour l’explicitation du présent article, il convient d’indiquer que le PFU ne concernera pas :

– les revenus fonciers, qui resteront imposés au barème de l’impôt sur le revenu avec des modalités particulières d’imputation d’un éventuel déficit foncier sur le revenu global ;

– les plus-values immobilières, qui sont déjà imposées selon un taux proportionnel proche du PFU ;

– les revenus tirés des biens meubles corporels, eux aussi imposés selon un taux proportionnel ;

– certains revenus du capital sont également exclus du champ de la réforme (livret d’épargne réglementée sauf l’épargne logement, plan d’épargne en actions, épargne salariale, stock-options).

Le tableau ci-dessous synthétise les revenus du capital impactés par l’article 11 du présent projet de loi de finances.

Les revenus du capital impactés par la mise en place du PFU

Dénomination

Modalités d’impositions actuelles

Modalités d’imposition à compter du 1er janvier 2018

LE RÉGIME GÉNÉRAL

1. Revenus du patrimoine mobilier : revenus de capitaux mobiliers (RCM)

 

Application de plein droit du PFU au taux global de 30 % (soit 12,8 % au titre de l’IR et 17,2 % au titre des prélèvements sociaux)

a. Dividendes liés à la détention d’une action

– Imposition au barème de l’IR (depuis 2013) et prélèvements sociaux (PS) de 15,5 %, en année N + 1

– Prélèvement forfaitaire obligatoire (à la source) de 21 % en année N

– Abattement de 40 % pour éviter la double imposition (au niveau de l’entreprise et de l’actionnaire)

b. Intérêts liés à la détention d’une obligation

– Imposition au barème de l’IR (depuis 2013) et PS de 15,5 %, en année N + 1

– Prélèvement forfaitaire obligatoire (à la source) de 24 % en année N (sauf quand le revenu fiscal de référence est inférieur à 25 000 euros, ou 50 000 euros pour un couple)

– Le prélèvement à la source à 24 % est libératoire du barème lorsque le montant total annuel des intérêts est inférieur à 2 000 euros

2. Revenus du patrimoine mobilier : plus-values mobilières

– Imposition au barème de l’IR (depuis le 1er janvier 2013) et PS de 15,5 %, en année N + 1

– Pas de prélèvement à la source

– Deux abattements de la plus-value pour durée de détention :

  • Abattement de droit commun (50 % après deux ans, 65 % après huit ans)
  • Abattement renforcé pour les start up (50 % après un an, 65 % après quatre ans, 85 % après huit ans)

– Un abattement fixe de 500 000 euros pour les dirigeants de PME partant à la retraite

 

 

 

Application de plein droit du PFU au taux global de 30 % (soit 12,8 % au titre de l’IR et 17,2 % au titre des prélèvements sociaux)

LES RÉGIMES PARTICULIERS

1. Assurance-vie

– Prélèvement forfaitaire libératoire de 35 % (si le contrat a moins de quatre ans), de 15 % (entre quatre et huit ans) ou 7,5 % (plus de huit ans) au titre de l’IR

– Prélèvement au titre des PS de 15,5 %

– Possibilité d’opter pour le barème de l’IR lorsque cette imposition est plus avantageuse pour le redevable

– Pour les contrats de plus de huit ans, le montant des gains contenus dans le rachat du contrat fait l’objet d’un abattement annuel de 4 600 euros pour une personne seule et 9 200 euros pour un couple (valable au PFL comme au barème)

Application du PFU aux gains liés à des rachats opérés à compter du 1er janvier 2018, liés à des versements opérés après le 27 septembre 2017, lorsque l’encours de l’ensemble des contrats du redevable est supérieur à 150 000 euros

2. Épargne logement : comptes épargne logement (CEL)

– Exonération d’IR mais pas des PS de 15,5 %

Application du PFU aux nouveaux CEL ouverts à compter du 1er janvier 2018

3. Épargne logement : plans épargne logement (PEL)

– Exonération d’IR pendant les douze premières années du plan, puis soumission des intérêts au barème de l’IR

– PS de 15,5 %

Application du PFU aux nouveaux PEL ouverts à compter du 1er janvier 2018 (dès la première année du plan)

Application du PFU aux intérêts des PEL de plus de douze ans existants avant cette date

4. Actionnariat salarié : actions gratuites

– Gain d’acquisition (valeur de l’action au moment de son acquisition définitive) :

Barème de l’IR comme plus-value mobilière jusqu’à 300 000 euros (abattements pour durée de détention)

Barème de l’IR comme salaire ensuite (sans abattements)

– Gain de cession (différence entre la valeur de l’action au moment de son acquisition et sa cession) :

Régime des plus-values mobilières de droit commun (abattements pour durée de détention)

Le gain d’acquisition est qualifié d’avantage salarial :

Imposition dans la catégorie des traitements et salaires (suppression des abattements pour durée de détention)

Abattement de 50 % sur la seule fraction inférieure à 300 000 euros

Application éventuelle de l’abattement de 500 000 euros propre aux dirigeants partant en retraite.

5. Actionnariat salarié : bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE)

– Imposition selon un PFL de 34,5 % (19 % au titre de l’IR et 15,5 % au titre des PS)

Application de plein droit du PFU avec option possible pour le barème.

L’ensemble des revenus du capital soumis au PFU, selon les modalités décrites ci-dessus, ne seront donc plus éligibles à la déductibilité de la CSG, sauf dans le cas où le contribuable opte pour leur imposition au barème de l’IR.

2.   Le dispositif prévu par le présent article

a.   L’augmentation de 1,7 point de la déductibilité

L’alinéa 4 prévoit d’augmenter de 5,1 points à 6,8 points la part de la CSG déductible du revenu imposable, soit une augmentation de 1,7 point.

b.   La simplification de la liste des revenus du capital bénéficiant de cette déductibilité

Cet alinéa 4 simplifie par ailleurs la définition du champ des revenus du capital bénéficiant de la déductibilité de la CSG, par un renvoi à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, en limitant cette déductibilité à ceux de ces revenus qui sont imposés selon les conditions prévues à l’article 197 du CGI, c’est-à-dire au barème de l’impôt sur le revenu.

Dès lors qu’ils sont imposés au barème de l’impôt sur le revenu (soit de plein droit soit sur option du contribuable), sont donc éligibles à la déductibilité de la CSG les revenus du capital suivants :

– les revenus fonciers ;

– les rentes viagères constituées à titre onéreux ;

– les revenus de capitaux mobiliers ;

– les plus-values mobilières ;

– l’ensemble des revenus entrant dans la catégorie des BIC, BNC ou BA dès lors qu’ils ne supportent pas la CSG spécifique sur les revenus d’activité ou de remplacement.

c.   Une déductibilité proportionnelle pour les plus-values mobilières bénéficiant de certains abattements

Les alinéas 5 à 7 prévoient un mécanisme de pondération de la déductibilité de la CSG pesant sur certaines plus-values qui font l’objet d’abattements importants :

– les plus-values mobilières faisant l’objet d’un abattement fixe de 500 000 euros lorsque le dirigeant d’une PME cède ses parts avant de partir en retraite ;

– les plus-values mobilières liées à la cession de parts de PME de moins de dix ans faisant l’objet d’un abattement pour durée de détention renforcé, qui peut éventuellement se cumuler avec l’abattement fixe de 500 000 euros mentionné ci-dessus. Si l’article 11 du présent projet de loi de finances prévoit la suppression des abattements pour durée de détention pour les titres acquis à compter du 1er janvier 2018, le redevable pourra toutefois continuer à en bénéficier pour les titres acquis avant cette date à condition que l’imposition soit effectuée au barème de l’impôt sur le revenu ;

– le gain d’acquisition d’une action gratuite imposé, jusqu’au 1er janvier 2018, dans la catégorie des plus-values mobilières dans la limite de 300 000 euros avec application des abattements pour durée de détention normal ou renforcé.

À compter du 1er janvier 2018, ce gain d’acquisition sera imposé, en application de l’article 11 du présent projet de loi de finances, au barème de l’impôt sur le revenu mais avec un abattement spécifique de 50 % qui viendra éventuellement s’ajouter à l’abattement fixe de 500 000 euros mentionné précédemment.

Paradoxalement, ce gain d’acquisition, pourtant qualifié d’avantage salarial par l’article 11 du présent projet de loi de finances, sera soumis, à compter du 1er janvier 2018, aux prélèvements sociaux sur les revenus du capital et non à ceux pesant sur les revenus d’activité ou de remplacement.

Pour l’ensemble de ces gains, le présent article prévoit que la CSG sera déductible à hauteur du rapport entre le montant soumis à l’impôt sur le revenu (après les abattements mentionnés ci-dessus) et le montant soumis à la CSG.

Exemple

En 2018, à l’occasion de son départ à la retraite, un dirigeant de PME réalisera une plus-value de 600 000 euros pour la cession de ses titres qu’il détient depuis plus de huit ans. Il bénéficiera de l’abattement fixe de 500 000 euros et de l’abattement pour durée de détention renforcé, en optant pour une imposition au barème de l’impôt sur le revenu.

Pour l’imposition des revenus de l’année 2018, cette plus-value est soumise à la CSG au taux de 9,9 % sur la totalité du gain, soit 59 400 euros.

Pour l’imposition au titre de l’IR, la plus-value est soumise au barème de l’IR après application de l’abattement fixe de 500 000 euros et, pour le surplus éventuel, de l’abattement pour durée de détention renforcé.

La plus-value imposable est donc de 15 000 euros (= 600 000 euros  500 000 euros × 15 %).

La CSG sera en principe déductible à hauteur de 6,8 %, soit 40 800 euros.

Cette déductibilité sera toutefois pondérée en fonction du rapport entre le montant imposable à l’IR et le montant soumis à la CSG, soit 15 000 euros × 600 000 euros.

Le montant déductible sera donc de 40 800 euros multiplié par ce rapport, soit 1 020 euros.

IV.   L’impact budgétaire attendu

A.   Des pertes de recettes évaluées à près de 4 milliards d’euros en 2019, au titre de la seule déductibilité de la CSG

La hausse de 1,7 point de CSG devrait se traduire par des recettes supplémentaires de CSG de 22,9 milliards d’euros en 2018 ([35]). Mécaniquement, la déductibilité de cette hausse de CSG se traduira par une diminution à due concurrence de l’assiette de l’impôt sur le revenu, et par des pertes de recettes à ce titre évaluées à 3,9 milliards d’euros en 2019.

La hausse de CSG déductible a été décomposée en plusieurs sous-assiettes, à savoir les revenus d’activité (avec en leur sein, les revenus des salariés du secteur privé, les agents des fonctions publiques d’État, territoriale et hospitalière, et les revenus des indépendants), les revenus de remplacement et les revenus du capital. Pour chacune de ces sous-assiettes, a été appliqué le taux marginal d’imposition moyen constaté pour les contribuables déclarant les revenus correspondants ([36]).

VENTILATION DES RECETTES SUPPLÉMENTAIRES DE CSG
ISSUES DE LA HAUSSE DE 1,7 POINT DE CSG EN 2018

(en milliards d’euros)

Nature des revenus

Montant de recettes supplémentaires de CSG

Taux marginal d’imposition moyen

Effet retour au titre de l’IR acquitté en 2019

Revenus d’activité

16,1

2,8

Dont actifs privés

11

17,1 %

1,9

Dont actifs public

3

17,9 %

0,54

Dont travailleurs indépendants

2,1

15,8 %

0,33

Revenus de remplacement

4,5

20,9 %

0,94

Revenus du capital

2,2

Revenus fonciers

0,7

25,6 %

0,18

Revenus du capital hors revenus fonciers

1,6

Total

22,9

3,9

Source : évaluation préalable.

S’agissant des revenus du capital, il a été retenu pour hypothèse que le retour au titre de l’impôt sur le revenu serait nul pour les revenus se trouvant dans le champ du PFU, puisque les seuls contribuables ayant vocation à opter pour l’imposition au barème seraient les foyers non imposés – et dans ce cas, il n’y aurait pas de retour au titre de l’impôt sur le revenu. En revanche, les revenus fonciers, qui ne se trouvent pas dans le champ du PFU, resteront systématiquement soumis au barème, ce qui devrait se traduire par un des moindres recettes d’impôt sur le revenu de l’ordre de 200 millions d’euros.

Il convient de noter que la hausse de CSG pour les titulaires de revenus de remplacement, soit pour l’essentiel les retraités, à hauteur de 4,5 milliards d’euros, se traduit par une diminution de l’impôt sur le revenu acquitté de l’ordre de 900 millions d’euros, soit une compensation en année N + 1 d’environ 20 % (égale au taux marginal d’imposition moyen des contribuables concernés).

B.   en prenant en compte l’ensemble de la réforme, Des pertes de recettes de l’ordre de 600 millions d’euros en 2019 et une hausse des recettes de l’ordre de 150 millions d’euros à compter de 2020

● Les évaluations de pertes de recettes présentées supra ne prennent en compte que les effets de la déductibilité de la CSG de l’assiette de l’impôt sur le revenu, toutes choses étant égales par ailleurs. Or, parallèlement, le revenu imposable au titre des revenus d’activité va croître en 2019, puis à nouveau en 2020, sous l’effet de la diminution des cotisations salariales – qui ne jouera à plein qu’en 2020 – ce qui devrait se traduire par une augmentation des recettes d’impôt.

● En l’absence de réponses du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général sur les effets consolidés de la réforme, tant au titre de la déductibilité de la CSG que des allégements de cotisations, sur l’effet « retour » pour l’impôt sur le revenu, il est possible de procéder à une évaluation sommaire, sur la base des informations disponibles :

– les allégements de cotisations salariales maladie et chômage représentent de l’ordre de 14,1 milliards d’euros en 2018 et de 18,5 milliards d’euros en 2019 (sous l’effet de la suppression progressive de la cotisation chômage, qui ne joue à plein qu’à compter de 2019), pour les salariés du secteur privé ;

– les allégements de cotisations pour les travailleurs indépendants représentent également environ 2,1 milliards d’euros ([37]) ;

– la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité (1,4 milliard) et les primes compensatrices (1,6 milliard) représentent environ 3 milliards d’euros pour les fonctionnaires.

Les recettes supplémentaires de CSG par catégories de revenus sont supposées stables entre 2018 et 2019, en l’absence d’informations précises de la part du Gouvernement.

● Sur la base de ces données, pour l’impôt sur le revenu acquitté en 2019, il apparaît que :

– la hausse du revenu imposable des salariés du privé en 2018, évaluée à 3,1 milliards d’euros, devrait se traduire par des recettes supplémentaires de l’ordre de 530 millions d’euros ;

– le revenu imposable des travailleurs indépendants et des fonctionnaires devrait rester stable en 2018, sous l’effet des mesures de compensation ; l’impact sur les recettes devrait être nul ;

– la hausse de l’impôt sur le revenu acquitté par les salariés est inférieure aux pertes de recettes de 1,12 milliard d’euros résultant de la déductibilité de la CSG pour les titulaires de pensions de retraite et de revenus fonciers.

In fine, la diminution des recettes d’impôt sur le revenu résultant de la bascule CSG-cotisations sociales peut être évaluée à 590 millions d’euros pour l’année 2019.


Effet retour de la « bascule » au titre de l’impôt sur le revenu en 2019

(en milliards d’euros)

Nature des revenus

Montant de recettes de CSG

Taux marginal d’imposition moyen

Effet retour au titre de l’IR

Gain de pouvoir d’achat résultant des allégements de cotisations et des primes

Taux marginal d’imposition moyen

Effet retour au titre de l’IR

Effet retour au titre de l’IR consolidé

Revenus d’activité

16,1

 2,75

3,28

0,53

Dont actifs privés

11

17,1 %

– 1,88

14,1

17,1 %

2,41

0,53

Dont actifs public

3

17,9 %

– 0,54

3

17,9 %

0,54

0

Dont travailleurs indépendants

2,1

15,8 %

– 0,33

2,1

15,8 %

0,33

0

Revenus de remplacement

4,5

20,9 %

 0,94

0

20,9 %

0

 0,94

Revenus du capital

2,2

Revenus fonciers

0,7

25,6 %

– 0,18

0

25,6 %

0

 0,18

Hors revenus fonciers

1,6

0

Total

22,8

 3,87

19,2

 

+ 3,28

 0,59

● Pour l’année 2019, la hausse du revenu imposable des salariés du privé, évaluée à 7,5 milliards d’euros, devrait se traduire par des recettes supplémentaires d’impôt sur le revenu de l’ordre de 1,28 milliard d’euros.

De ce fait, l’effet « retour » au titre de l’impôt sur le revenu en 2020 devrait être positif, avec environ 160 millions d’euros de recettes supplémentaires.

EFFET RETOUR DE LA « BASCULE » AU TITRE DE L’IMPÔT SUR LE REVENU EN 2020

(en milliards d’euros)

Nature des revenus

Montant de recettes de CSG

Taux marginal d’imposition moyen

Effet retour au titre de l’IR

Gain de pouvoir d’achat résultant des allégements de cotisations et des primes

Taux marginal d’imposition moyen

Effet retour au titre de l’IR

Effet retour au titre de l’IR consolidé

Revenus d’activité

16,1

 2,75

4,03

1,28

Dont actifs privés

11

17,1 %

– 1,88

18,5

17,1 %

3,16

1,28

Dont actifs public

3

17,9 %

– 0,54

3

17,9 %

0,54

0

Dont travailleurs indépendants

2,1

15,8 %

– 0,33

2,1

15,8 %

0,33

0

Revenus de remplacement

4,5

20,9 %

 0,94

0

20,9 %

0

 0,94

Revenus du capital

2,2

Revenus fonciers

0,7

25,6 %

– 0,18

0

25,6 %

0

 0,18

Hors revenus fonciers

1,6

0

Total

22,8

 

 3,87

23,6

 

4,03

0,16

*

*     *

La commission adopte l’article 38 sans modification.

*

*     *

Article 39
Prorogation d’un an de la réduction d’impôt sur le revenu en faveur
de l’investissement locatif intermédiaire  dispositif « Pinel »

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article comporte deux mesures :

– il proroge la réduction d’impôt en faveur de l’investissement locatif intermédiaire, dit « dispositif Pinel », pour quatre années, en portant son terme au 31 décembre 2021 ;

– il recentre, à compter du 1er janvier 2018, le bénéfice de l’avantage fiscal sur les investissements réalisés dans des communes relevant des zones les plus tendues, soit les zones A bis, A et B1, à l’exclusion des zones B2 et C jusqu’alors éligibles lorsque les communes ont obtenu un agrément.

Le présent article se traduirait par des pertes de recettes d’impôt sur le revenu à hauteur de 59 millions d’euros en 2019, de 159 millions d’euros en 2020, de 360 millions en 2021 et de 566 millions d’euros en 2022.

Dernières modifications législatives intervenues

La loi de finances pour 2015 a modifié la réduction d’impôt dite « Duflot », qui a été rebaptisée « Pinel », en prévoyant la possibilité de moduler la durée de l’engagement de location et corrélativement le taux de la réduction d’impôt, et en permettant au contribuable de louer le bien ouvrant droit à l’avantage fiscal à un ascendant ou un descendant.

La loi de finances pour 2017 a prorogé d’une année la réduction d’impôt « Pinel », en ouvrant son bénéfice aux investissements réalisés en zone C pour l’année 2017, sous réserve de l’obtention d’un agrément par la commune.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté un amendement du Rapporteur général prévoyant l’éligibilité au dispositif « Pinel » des communes dont le territoire est couvert par un contrat de redynamisation de site de défense, et ce jusqu’en 2021.

Elle a également adopté un amendement du Rapporteur général destiné à assurer une sortie plus progressive des zones B2 et C du dispositif « Pinel », tout en conditionnant à l’obtention d’un agrément l’éligibilité des communes de zone B1.

Enfin, ont été adoptés deux amendements du Rapporteur général, l’un demandant la remise d’un rapport sur le zonage géographique établi pour l’application du dispositif « Pinel », l’autre avançant la date de remise du rapport d’évaluation de cet avantage fiscal au 1er septembre 2019, au lieu du 31 décembre 2019.

I.   L’état du droit : un dispositif de soutien fiscal en faveur de l’inVestissement locatif intermédiaire mis en place en 2013

Le dispositif « Pinel », introduit par la loi de finances pour 2013 ([38]) et remanié par la loi de finances pour 2015 ([39]), est venu s’inscrire dans la lignée des différentes aides au secteur locatif neuf qui se sont succédé depuis plus de trois décennies.

Présentation des différents dispositifs incitatifs à l’investissement locatif applicables jusqu’en 2012

Le premier dispositif d’aide fiscale à l’investissement locatif, dit « Quilès », a été mis en place en 1985. Il accordait une réduction d’impôt plafonnée, permettant aux investisseurs personnes physiques et aux sociétés non soumises à l’impôt sur les sociétés de soustraire de leur impôt une fraction de leur investissement (5 % étalés sur deux ans) en échange d’un engagement de location durant six ans. Le « Quilès-Méhaignerie » l’a ensuite remplacé deux ans plus tard en doublant l’avantage fiscal.

En 1993, un « Quilès-Méhaignerie intermédiaire » a également été mis en place. Il triplait l’avantage initial du « Quilès » pour les investisseurs qui respectaient des loyers plafonnés et des plafonds de ressources pour leurs locataires au niveau du logement locatif intermédiaire, en distinguant deux zones : Paris et la province.

En 1996, le dispositif « Périssol » a introduit un changement de logique fiscale et d’échelle d’intervention publique. La réduction d’impôt a en effet laissé place à un système d’amortissement permettant à l’investisseur de déduire de ses revenus fonciers un pourcentage du prix d’acquisition du bien pendant plusieurs années, ce qui crée alors un déficit (ou éventuellement un moindre bénéfice), et donc une diminution du revenu imposable global. En fixant le niveau de l’amortissement à 80 % sur vingt‑quatre ans, le dispositif « Périssol » a fortement accru l’attractivité de l’aide.

Le dispositif « Besson » a remplacé le « Périssol » à l’été 1999. Outre une réduction de l’amortissement cumulé à 50 %, cette nouvelle mesure avait la caractéristique principale de cibler le locatif intermédiaire, avec des plafonds de loyers et des plafonds de ressources pour les locataires, établis sur la base d’un zonage historique du logement locatif social qui distinguait quatre zones : zone I bis (Paris et les communes limitrophes), zone I (reste de l’Île-de-France), zone II (agglomérations de plus de 100 000 habitants), zone III (reste de la France). La territorialisation du dispositif visait alors à adapter les caractéristiques de l’aide aux réalités des marchés locaux.

En 2003, le « Robien » s’est substitué au « Besson » en atténuant les contraintes pour les investisseurs, par la suppression du plafond de ressources pour les locataires et la hausse des plafonds de loyers, pour les situer au niveau du marché. Un nouveau découpage en trois zones (A, B et C) a également été élaboré pour mieux prendre en compte la réalité des tensions des marchés locatifs locaux. Le 1er septembre 2006, ce zonage a d’ailleurs été revu afin de limiter les constructions dans les secteurs de moindre tension, alors même que certains investissements peu viables économiquement, et peu utiles pour le marché locatif, avaient été favorisés par le « Robien » dans sa première version. Une subdivision de la zone B a été mise en place pour créer une zone B2 avec un plafond de loyer inférieur ; en outre, le plafond de loyer de la zone C a été diminué. Le dispositif avec ces nouvelles caractéristiques a alors été dénommé « Robien recentré ».

Cette révision du « Robien » a par ailleurs été accompagnée de la création d’un nouveau dispositif, proche du « Besson » : le « Borloo populaire ». Plus incitatif que le « Robien recentré », il ciblait le logement intermédiaire.

À compter de 2009, une nouvelle incitation fiscale en faveur de la construction neuve, dite « Scellier », a été introduite, prenant la forme d’une réduction d’impôt de 25 % (dont le taux a ensuite été réduit) sur le prix de revient de l’investissement immobilier, dans les limites d’un plafond de 300 000 euros comprenant les éventuels travaux de réhabilitation. La réduction d’impôt était répartie en parts égales sur les neuf années constituant la durée minimale de l’engagement de location par le contribuable.

La réduction d’impôt « Pinel », codifiée à l’article 199 novovicies du CGI, a repris l’architecture générale du dispositif « Scellier », tout en s’en distinguant sur plusieurs points : elle ne s’applique qu’à des investissements locatifs dans le secteur intermédiaire, avec la définition de plafonds de loyers et de ressources pour les locataires ; les logements doivent être situés dans des zones tendues, selon un zonage recentré par rapport à celui applicable au « Scellier », et respecter un niveau de performance énergétique globale élevé.

A.   Les investissements éligibles à la réduction d’impôt

La réduction d’impôt s’applique aux contribuables domiciliés fiscalement en France et investissant dans un logement locatif neuf en direct ou par le biais d’une société non soumise à l’impôt sur les sociétés, par exemple une société civile immobilière de gestion ou toute autre société de personnes. Un contribuable peut également bénéficier de la réduction d’impôt, sous certaines conditions, au titre de ses souscriptions de parts dans une société civile de placement immobilier (SCPI).

● Les investissements éligibles à la réduction d’impôt sont les logements acquis ou construits entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017 qui appartiennent à l’une des catégories suivantes :

Tableau rÉcapitulatif des logements ouvrant droit À la rÉduction d’impÔt

Type de logement

Conditions particulières à respecter

Logement neuf

Logement en l’état futur d’achèvement

Achèvement du logement dans les trente mois qui suivent la date de la signature de l’acte authentique d’acquisition

Logement que le contribuable fait construire

– Dépôt de permis de construire entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017

– Achèvement du logement dans les trente mois qui suivent la date de l’obtention du permis de construire

Logement qui fait ou qui a fait l’objet de travaux concourant à la production ou à la livraison d’un immeuble neuf

– Si les travaux ont été réalisés avant l’acquisition du logement par le contribuable, la réduction d’impôt s’applique aux logements qui n’ont pas été utilisés ou occupés depuis l’achèvement des travaux

– Si les travaux sont réalisés après l’acquisition du logement, leur achèvement doit intervenir au plus tard le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l’acquisition du bien concerné

Logement qui ne satisfait pas aux caractéristiques de décence qui fait ou qui a fait l’objet de travaux permettant à ce logement d’acquérir des performances techniques voisines de celles d’un logement neuf

Local affecté à un usage autre que l’habitation qui fait ou qui a fait l’objet de travaux de transformation en logement

La loi de finances pour 2013 prévoyait que la réduction d’impôt avait vocation à s’appliquer pour les investissements réalisés entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2016. L’article 68 de la loi de finances pour 2017 ([40]) a prorogé l’avantage fiscal pour une année, en portant son terme au 31 décembre 2017.

● L’avantage fiscal « Pinel » bénéficie également aux personnes qui souscrivent des parts de SCPI, sous réserve que 95 % du montant de la souscription servent exclusivement à financer un investissement répondant aux conditions d’application de l’article 199 novovicies.

Afin de favoriser le développement de ces SCPI, en les rendant plus attractives, l’article 5 de la loi de finances pour 2015 a augmenté la base de la réduction d’impôt pour ces investissements, en la portant de 95 % à 100 % du montant de la souscription. Cette disposition s’est appliquée aux souscriptions réalisées à compter du 1er septembre 2014.

● Pour être éligibles à la réduction d’impôt, les logements doivent atteindre un certain niveau de performance énergétique, et être situés dans des communes dans lesquelles existent de fortes tensions sur le marché locatif.

Un classement des communes au sein des cinq zones A bis, A, B1, B2 et C ([41]) est prévu par un arrêté des ministres chargés du logement et du budget. Le zonage géographique actuel résulte d’un arrêté du 1er août 2014 ([42]), applicable depuis le 1er octobre 2014 et non modifié depuis.

Dans le cadre du « Pinel », aux termes du premier alinéa du IV de l’article 199 novovicies, ouvrent droit à la réduction d’impôt les logements situés dans des communes classées dans des zones géographiques caractérisées par un « déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement sur le parc locatif existant », à savoir les zones A bis, A et B1.

Sont toutefois prévues des possibilités de dérogation, pour les communes relevant des zones B2 et C. Ainsi, en application du deuxième alinéa du IV de l’article 199 novovicies, la réduction d’impôt peut s’appliquer pour les logements situés dans des communes relevant de la zone B2 « caractérisées par des besoins particuliers en logement locatif », lorsqu’elles ont fait l’objet d’un agrément du représentant de l’État dans la région, après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement.

Par ailleurs, l’article 68 de la loi de finances pour 2017 a complété le IV de l’article 199 novovicies, pour prévoir qu’entre le 1er janvier et le 31 décembre 2017, la réduction d’impôt peut également s’appliquer pour les logements se trouvant dans des communes de la zone C « caractérisées par des besoins particuliers en logement locatif liés à une dynamique démographique ou économique particulière », lorsqu’elles ont fait l’objet d’un agrément du représentant de l’État dans la région après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement – cet avis devant être conforme, à la différence des agréments portant sur des communes de zone B2.

À cet égard, on peut rappeler que le dispositif « Scellier » s’appliquait de plein droit en zone B2 et qu’il était possible, par dérogation, de rendre éligibles au dispositif certaines communes classées en zone C, sous réserve de l’obtention d’un agrément délivré par le ministère chargé du logement.

B.   Une réduction d’impôt au taux variable selon la durée d’engagement de location

● Dans le cadre de la réduction d’impôt « Duflot », telle qu’issue de la loi de finances pour 2013, les logements devaient être loués nus à usage d’habitation principale pendant une durée minimale de neuf ans et ce, dans un délai de douze mois après la date d’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition par le contribuable si celle-ci était postérieure. Le taux de la réduction d’impôt était fixé à 18 %, tandis que son montant était réparti de manière égale (soit 2 % par an) sur neuf années à compter de l’année d’achèvement du logement ou de l’année de son acquisition si elle était postérieure.

L’article 5 de la loi de finances pour 2015 a introduit la possibilité de moduler la durée de l’engagement de location, avec corrélativement une modulation du taux de la réduction d’impôt, tout en conservant les autres dispositions présentées supra. Ainsi, pour les investissements réalisés à compter du 1er septembre 2014, le contribuable peut bénéficier de la réduction d’impôt en contrepartie d’un engagement de location minimal de six années, et non plus seulement de neuf années ; le taux de la réduction d’impôt est alors ramené à 12 %.

A également été introduite la possibilité pour le contribuable de proroger son engagement initial pour une durée de trois ans ; cette prorogation est renouvelable une fois dans le cas d’un engagement initial de six ans (avec une réduction d’impôt de 6 % pour les trois premières années, puis de 3 % pour les trois dernières années), et non renouvelable dans le cas d’un engagement initial de neuf ans (avec une réduction d’impôt de 3 % pour ces trois années supplémentaires).

Il en résulte que le contribuable peut s’engager à louer le bien pour une période de six, neuf ou douze années, en bénéficiant d’une réduction d’impôt de respectivement 12 %, 18 % et 21 %, et ce quelle que soit la durée de son engagement initial (six ou neuf ans). Le montant de la réduction d’impôt est réparti sur les six, neuf ou douze années (soit 2 % ou 1 % par an) à compter de l’année d’achèvement du logement ou de l’année de son acquisition si elle est postérieure. La réduction s’impute pour la première fois sur l’impôt dû au titre des revenus de cette même année, puis sur celui des huit années suivantes.

Enfin, s’agissant des investissements locatifs réalisés outre-mer, le taux de la réduction d’impôt, fixé à 29 % pour un engagement de location de neuf ans, est ramené à 23 % pour un engagement de location de six ans, tandis qu’il s’établit à 32 % pour un engagement de douze ans.

TAUX DE RÉDUCTION D’IMPÔT APPLICABLES
EN FONCTION DE LA DURÉE ET DU LIEU DE L’INVESTISSEMENT

Taux

Engagement de location de six années

Engagement de location de neuf années

Engagement de location de douze années

Taux de la réduction d’impôt en métropole

12 %

18 %

21 %

Taux de la réduction d’impôt en outre-mer

23 %

29 %

32 %

● Le taux de la réduction d’impôt s’applique au prix de revient d’au plus deux logements, retenu dans la limite d’un plafond par mètre carré de surface habitable, fixé à 5 500 euros, afin de limiter l’effet inflationniste de la réduction d’impôt sur les prix de l’immobilier dans les zones les plus tendues.

Le montant total des dépenses retenues pour l’application de la réduction d’impôt au titre de l’acquisition ou de la construction d’au plus deux logements et de la souscription de titres, ne peut excéder globalement 300 000 euros par contribuable pour une même année d’imposition.

De ce fait, l’avantage fiscal maximal pouvant être retiré du dispositif « Pinel » s’établit à 6 000 euros par an, pour un investissement réalisé en métropole, et à 11 500 euros par an pour un investissement réalisé en outre-mer.

● L’avantage fiscal résultant du dispositif « Pinel » est pris en compte pour le calcul du plafonnement global des niches fiscales, prévu par l’article 200‑0 A du CGI, soit 10 000 euros.

Toutefois, en application de l’article 82 de la loi de finances pour 2015, la réduction d’impôt au titre des investissements réalisés en outre-mer à compter du 1er septembre 2014 bénéficie du plafond spécifique de 18 000 euros, qui était jusqu’alors réservé aux investissements au titre des SOFICA (sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle) ainsi qu’à ceux réalisés en outre-mer dans le cadre des articles 199 undecies A, 199 undecies B et 199 undecies C ([43]) du CGI – l’avantage fiscal au titre des investissements effectués en métropole restant soumis au plafonnement de droit commun de 10 000 euros.

● Le dispositif « Pinel » a été réservé aux seuls logements loués dans le secteur intermédiaire : l’avantage fiscal est accordé en contrepartie de la fixation de loyers situés à un niveau intermédiaire entre le parc social et le parc privé, soit le niveau des loyers de marché minoré de 20 %.

Les loyers ne peuvent ainsi excéder certains plafonds mensuels par mètre carré, qui varient selon la zone où sont situés les logements et sont déterminés par l’article 2 terdecies D de l’annexe III au CGI. À ces plafonds de loyers, il est ensuite appliqué un coefficient multiplicateur, fonction de la surface (S) du logement, et égal à 0,7 + 19/S – S correspondant à la surface du logement, et le coefficient ainsi obtenu ne pouvant excéder 1,2.

 

Zone

Zone A bis

Zone A

Zone B1

Zones B2 et C

Plafond de loyer mensuel par mètre carré

(charges non comprises)

16,83 euros

12,50 euros

10,07 euros

8,75 euros

Les ressources des locataires ne doivent pas être supérieures à des plafonds fixés en fonction de la composition du foyer fiscal et, là encore, de la zone où se trouvent les logements. Ces plafonds sont eux aussi fixés par l’article 2 terdecies D de l’annexe III précité.

● L’article 5 de la loi de finances pour 2015 a levé l’interdiction pour le contribuable de louer le bien ouvrant droit à l’avantage fiscal à un ascendant ou un descendant, et ce pour les investissements réalisés à compter du 1er janvier 2015.

En revanche, l’interdiction de conclure la location avec un membre du foyer fiscal a été maintenue. De ce fait, un contribuable ne peut cumuler le bénéfice d’une demi-part (ou d’une part) de quotient familial au titre d’un enfant rattaché au foyer fiscal – par exemple d’un enfant étudiant de moins de vingt-cinq ans – tout en louant à celui-ci le bien ouvrant droit au dispositif « Pinel ».

II.   Le contexte économique et budgétaire

A.   La contribution du dispositif « Pinel » à la relance de la construction neuve

Les chiffres publiés au cours des derniers trimestres par la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) permettent de constater l’impact de la réduction d’impôt « Pinel » sur les ventes de logements neufs à des investisseurs, lesquelles se sont notablement redressées à compter du dernier trimestre 2014 – soit l’entrée en vigueur de la plupart des dispositions de la loi de finances pour 2015 – et ont continué à croître au cours de l’année 2016, pour atteindre 61 325 ventes nettes, soit le double du chiffre constaté en 2013.

Évolution du nombre de ventes nettes au détail de logement
à des investisseurs

Source : chiffres de l’observatoire de l’immobilier de la FPI.

Le nombre de ventes nettes a crû de 14,4 % entre 2013 et 2014, de près de 44 % entre 2014 et 2015, et de près de 24 % entre 2015 et 2016. Les deux premiers trimestres de 2017 traduisent un maintien du niveau des ventes au niveau constaté en 2016.

L’évaluation préalable du présent article relève que « cette reprise du marché témoigne de la réussite du dispositif ʺ Pinel ʺ, qui répond aux attentes des investisseurs et constitue, de fait, un moteur pour la relance de la construction ».

B.   Environ 60 000 foyers fiscaux bénéficiaires de l’avantage fiscal en 2016

● La réduction d’impôt « Pinel » bénéficiait en 2016 à près de 60 000 foyers fiscaux, pour une dépense fiscale de 191 millions d’euros, tandis que les prévisions de pertes de recettes pour 2017 et 2018 s’établissent à respectivement 354 et 554 millions d’euros.

Évolution de la dÉpense fiscale associÉe au PInel-Duflot

Année

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Pertes de recettes (en millions d’euros)

20

77

191

354

554

Nombre de foyers fiscaux bénéficiaires

7 016

25 307

59 044

Source : tome II des Évaluations des voies et moyens annexées aux projets de loi de finances.

En l’absence de réponses du Gouvernement aux questions du Rapporteur général, il n’est pas possible de présenter de chiffres plus détaillés et actualisés. En se fondant sur des chiffres transmis en 2016, environ 34 000 foyers fiscaux ont déclaré un investissement au titre de la réduction d’impôt « Duflot » ou « Pinel » au titre de l’imposition de revenus de 2015, pour un montant total d’investissements de 5,922 milliards d’euros – soit un investissement moyen de 173 700 euros. Environ 25 000 foyers fiscaux ont déclaré de tels investissements « Duflot » et « Pinel » en 2013 et 2014.

Comme pour les dispositifs précédents de soutien à l’investissement locatif, l’avantage fiscal est étalé sur plusieurs années, et la dépense fiscale au titre de l’année de réalisation de l’investissement ne représente qu’un neuvième de la dépense fiscale totale associée à l’investissement concerné – ou, depuis la réforme de la loi de finances pour 2015, qu’un sixième ou qu’un douzième.

De ce fait, les pertes de recettes se cumulent d’une année sur l’autre, ce qui explique leur forte croissance entre 2015 et 2018, et s’échelonnent jusqu’en 2032.

Il convient de noter qu’il peut exister un décalage entre l’année d’engagement de l’investissement, selon les modalités d’acquisition du logement neuf ou ancien à réhabiliter, et l’année d’imputation de la réduction d’impôt, ce qui explique que les effets du dispositif « Pinel » ne s’achèvent pas en 2030 (soit douze ans à partir de 2018), mais en 2032.

À titre d’exemple, un contribuable ayant acquis un logement en l’état futur d’achèvement en décembre 2017 bénéficiera de la réduction d’impôt au titre de l’année où le logement est achevé. Si le logement est achevé en février 2020, par exemple (soit dans la limite du délai de trente mois), le contribuable bénéficiera de la réduction d’impôt à compter de 2021 (au titre de l’imposition des revenus de 2020) ; s’il opte pour un engagement de location de douze années, la dépense fiscale afférente à cet investissement s’échelonnera jusqu’en 2032.

● Le coût annuel cumulé des différentes mesures qui se sont succédé en faveur de l’investissement locatif neuf a fortement augmenté en vingt-cinq ans. Il est ainsi passé de 345 millions d’euros en 1989 à 1,85 milliard d’euros en 2016, avec des prévisions de 1,86 milliard pour l’année 2017 et de 1,96 milliard pour l’année 2018.

Le dispositif « Scellier », y compris son volet dit « intermédiaire », représente à lui seul 60 % de la dépense fiscale enregistrée en 2016, soit près de 1,16 milliard d’euros.

Par ailleurs, l’incidence sur le budget de l’État de ces différentes mesures s’échelonne jusqu’en 2032 pour les plus récentes.

évolution de la dÉpense fiscale en faveur de l’investissement locatif
en métropole

(en millions d’euros)

Dispositif

Nombre de bénéficiaires en 2016

Fin

d’incidence budgétaire

Coût 2011

Coût 2012

Coût 2013

Coût 2014

Coût 2015

Coût 2016

Coût 2017

Coût 2018

« Périssol »

70 000

2024

60

51

50

45

45

45

45

45

« Besson » ancien

53 000

2020

35

26

20

28

42

37

nd

nd

« Besson » neuf

21 000

2019

37

26

22

18

17

17

14

10

« Robien » classique

215 000

2018

455

331

285

260

260

285

190

95

« Robien » ZRR + Scellier ZRR (1)

8 700

2021

14

9

9

10

10

13

13

13

« Borloo » populaire

29 600

2024

60

40

40

50

50

68

68

68

« Borloo » ancien

42 000

2027

20

20

24

28

44

40

40

40

« Scellier »

nd

2024

240

430

620

748

788

774

760

760

« Scellier »

 intermédiaire

nd

2030

120

215

325

408

394

387

380

380

« Duflot-Pinel »

59 044

2032

20

77

191

354

554

Total

 

 

1 041

1 148

1 395

1 615

1 727

1 857

1 864

1 965

(1) ZRR : zones de revitalisation rurale.

Source : Évaluations des voies et moyens, tome II, annexées aux projets de loi de finances.

III.   Le droit proposé : la prorogation du dispositif pour quatre années, parallèlement à son recentrage géographique

A.   La prorogation de la réduction d’impôt jusqu’au 31 décembre 2021

● Le présent article vient proroger de quatre années la réduction d’impôt « Pinel », en portant son terme au 31 décembre 2021 (a du du I), ce qui permet de donner une visibilité certaine aux investisseurs.

Seraient donc éligibles à l’avantage fiscal :

– les logements acquis neufs ou en l’état futur d’achèvement avant le 31 décembre 2021 ;

– les logements que le contribuable fait construire et qui font l’objet d’un dépôt de demande de permis de construire avant le 31 décembre 2021 ;

– les logements acquis avant le 31 décembre 2021 et qui font ou ont fait l’objet de travaux concourant à la production ou à la livraison d’un immeuble neuf ;

 les logements vétustes acquis avant le 31 décembre 2021 et qui font ou ont fait l’objet de travaux de réhabilitation leur permettant d’acquérir des performances techniques voisines de celles des logements neufs ;

 les locaux affectés à un usage autre que l’habitation acquis avant le 31 décembre 2021 et qui font ou ont fait l’objet de travaux de transformation en logements.

● Le présent article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport d’évaluation de la réduction d’impôt « Pinel » avant le 31 décembre 2019, soit à mi-parcours de la période de prorogation de quatre années (III).

Dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques publié en juin dernier, la Cour des comptes relevait que les dispositifs d’incitation fiscale à l’investissement locatif n’ont jamais été évalués par leurs différents concepteurs, et qu’ils ne faisaient pas l’objet de contrôles permettant de s’assurer que les contreparties des allégements fiscaux ont bien été assurées sur la durée impartie.

Il apparaît donc utile de prévoir un travail d’évaluation et d’analyse sur le sujet, alors même que la prorogation de l’avantage fiscal porte sur une durée non négligeable, soit quatre années, et que ses incidences budgétaires vont s’étaler jusqu’en 2036.

B.   Le recentrage de l’avantage fiscal sur les zones géographiques les plus tendues

1.   Le découpage du territoire en cinq zones

● Le découpage du territoire national en zones A, B et C a été créé en 2003, dans le cadre du dispositif d’investissement locatif dit « Robien ». Il a été révisé en 2006, puis en 2009. La dernière révision a été réalisée par l’arrêté du 1er août 2014, mentionné supra, en application de l’article R. 304-1 du code de la construction et de l’habitation (CCH).

Le territoire est désormais découpé en cinq zones (A bis, A, B1, B2 et C), de la plus tendue (A bis) à la plus détendue (C). Ce zonage s’appuie sur des critères statistiques liés aux dynamiques territoriales (évolution démographique, notamment), à la tension des marchés locaux et aux niveaux de loyers et de prix.

● Selon les informations transmises par le ministère de la cohésion des territoires, les indicateurs retenus lors de la révision 2014 du zonage A/B/C étaient les suivants :

– part des ménages locataires du parc privé et allocataires des aides au logement dont le taux d’effort est supérieur à 39 % (données Caisse nationale des allocations familiales – CNAF) ;

– écart de loyer moyen entre le parc social et le parc privé chez les allocataires des aides au logement (données CNAF) ;

– part de ménages avec personne(s) rattachée(s) de dix-huit à trente ans (données Fichiers logements communaux – FILOCOM) ;

– taux de croissance de la population entre les recensements 1999 et 2010 (données Institut national de la statistique et des études économiques – INSEE) ;

– taux de croissance du nombre d’emplois entre les recensements 1999 et 2010 (données INSEE) ;

– taux de vacance supérieure à un an des logements du parc privé construits après 1989 (données FILOCOM) ;

– niveau des prix de vente moyens au mètre carré des appartements sur 2008 et 2010 (données INSEE) ;

– niveau des prix de vente médian des maisons sur 2008 et 2010 (données INSEE) ;

– niveau des loyers de stock en 2011 chez les allocataires des aides au logement (données INSEE ou Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne – OLAP).

Les six premiers indicateurs ont été agrégés au niveau des bassins de vie, et les trois derniers à l’échelle des unités urbaines.

● La carte ci-après présente le zonage géographique qui s’applique aujourd’hui, tel qu’issu de l’arrêté du 1er août 2014 :

Répartition du territoire entre les zones A bis, A, B1, B2 et C

Source : ministère de la cohésion des territoires.

La zone A bis comprend Paris et 76 communes des Yvelines, des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne et du Val-d’Oise.

La zone A inclut la zone A bis, ainsi que la Côte d’Azur, la partie française de l’agglomération genevoise, et certaines agglomérations ou communes où les loyers et les prix des logements sont très élevés, comme Montpellier, Lyon, Marseille, Lille, Toulon…

La zone B1 comprend certaines grandes agglomérations et des villes où les loyers et le prix des logements sont élevés (Grenoble, Bordeaux, Strasbourg, Bayonne, Toulouse, Nantes, Nîmes, Metz, Amiens, Chambéry, Limoges…), une partie de la grande couronne parisienne non située en zone A bis ou A, ainsi que les départements d’outre-mer.

La zone B2 inclut des villes et communes où les loyers et les prix des logements sont assez élevés (Brest, Carcassonne, Béziers, Gap, Angers, Le Mans, Troyes, La Roche-sur-Yon…), des communes de la grande couronne autour de Paris non situées en zone A bis, A et B1, ainsi que les communes de Corse non situées en zones A ou B1.

La zone C correspond au reste du territoire national.

● Le tableau ci-après retrace la répartition de la population nationale entre les différentes zones :

VENTILATION DE LA POPULATION, DU NOMBRE DE MÉNAGES ET DU NOMBRE DE COMMUNES PAR ZONES A BIS, A, B1, B2 ET C

Zone

Population(1)

Nombre de ménages (1)

Nombre de communes (2)

bis

5 247 939

2 472 737

77

A

10 990 589

4 636 235

650

B1

14 933 754

6 629 268

1 545

B2

12 964 417

5 756 759

3 860

C

21 770 461

9 270 889

29 753

Total

65 907 160

28 765 888

35 885

(1) Chiffres résultant du recensement de la population 2014.

(2) Chiffres évolutifs à la marge en fonction de fusions de communes.

Source : ministère de la cohésion des territoires.

Aux termes de l’article R. 304-1 du CCH, l’arrêté établissant le classement des communes par zones géographiques doit être révisé au moins tous les trois ans. L’arrêté du 1er août 2014 devrait donc être révisé prochainement : selon les informations transmises au Rapporteur général, des travaux préparatoires ont été réalisés, mais doivent être complétés, pour permettre une révision du zonage au début de l’année 2018.

2.   Le recentrage de la réduction d’impôt sur les logements situés dans les zones A bis, A et B1

● Le présent article dispose qu’à compter du 31 décembre 2017, ne seront éligibles à l’avantage fiscal que les logements situés dans des communes relevant des zones A bis, A et B1, soit les zones classées dans des « zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement sur le parc locatif existant ».

En effet, les dispositions prévoyant que les logements situés dans les zones B2 et C peuvent être éligibles à l’avantage fiscal, dès lors qu’ils se trouvent dans des communes ayant fait l’objet d’un agrément du représentant de l’État dans la région après avis (conforme dans le cas de la zone C, simple dans le cas de la zone B2) du comité régional de l’habitat et de l’hébergement, sont supprimées (b du du I). Cette suppression emporte une coordination à l’article 279-0 bis A relatif à l’application du taux réduit de TVA ( du I).

L’objectif de cette mesure est de recentrer le bénéfice de l’avantage fiscal sur les zones les plus tendues : l’évaluation préalable relève à cet égard que « dès lors que la reprise du marché immobilier est avérée, notamment en matière de relance de la construction de logements neufs, la question de la pertinence du soutien fiscal pour les zones du territoire ne présentant pas une tension importante sur le marché locatif doit être posée, notamment au regard du coût budgétaire croissant du dispositif ʺ Pinel ʺ ».

Cette mesure de recentrage s’inscrit dans le prolongement des préconisations de la Cour des comptes : dans son rapport précité de juin dernier sur la situation des finances publiques, qui faisait lui-même écho à des travaux conduits en 2015 ([44]), la Cour recommandait de réformer les aides fiscales en les concentrant sur les zones les plus tendues du territoire. Il s’agit à la fois d’améliorer l’efficience de la dépense publique et d’éviter aux investisseurs le risque de ne pas trouver de locataires, du fait de la surabondance d’offre.

Néanmoins, le Rapporteur général estime qu’il serait nécessaire de prévoir une sortie plus progressive des communes relevant des zones B2 et C, lorsqu’elles ont obtenu un agrément les rendant éligibles au dispositif « Pinel ». Cela semble d’autant plus utile que le classement des communes dans les différentes zones géographiques n’apparaît pas toujours cohérent, et peut conduire à s’interroger sur les critères retenus pour l’établir.

● Le tableau ci-après récapitule l’évolution du zonage du dispositif « Pinel » dans le temps, mise en regard avec celui du dispositif « Scellier », applicable entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012 :

 

Zone

« Scellier »

(2009-2012)

« Duflot-Pinel » avant la LFI 2017

(2013-2016)

« Pinel » après LFI 2017

(2017)

« Pinel » après LFI 2018

(2018-2021)

Zones éligibles

bis, A, B1 et B2

bis, A, B1

bis, A, B1

bis, A, B1

Zones éligibles par dérogation

C

(agrément délivré par le ministre chargé du logement)

B2 (agrément du préfet de région après avis du comité régional de l’habitat)

B2 et C (agrément du préfet de région après avis du comité régional de l’habitat)

Zones non éligibles

C

B2 et C

● Selon les informations transmises au Rapporteur général, au 1er juillet 2017, 903 agréments délivrés au profit de communes de la zone B2 étaient actifs, soit environ un quart du total des communes et 60 % de la population totale de la zone B2.

S’agissant des communes relevant de la zone C, le décret relatif à l’agrément et au classement de ces communes est paru le 4 mai 2017 ; au 26 septembre 2017, 16 communes de la zone C faisaient l’objet d’un agrément ([45]). La portée effective de l’élargissement du dispositif « Pinel » à la zone C réalisé par la loi de finances pour 2017 pourrait donc s’avérer très limitée, compte tenu des délais restreints pour la réalisation des investissements – l’extension à la zone C ne s’appliquant que pour l’année 2017, et pour les logements réalisés à compter de l’entrée en vigueur d’un agrément. Cet état de fait ne semble pas satisfaisant, et il serait utile de prévoir des dispositions spécifiques permettant aux communes de zone C qui viennent d’obtenir un agrément de bénéficier effectivement du dispositif « Pinel ».

Sur la base des données de la direction générale des finances publiques (DGFiP), la Cour des comptes a établi une répartition de la part des différents dispositifs incitatifs fiscaux par zones géographiques, jusqu’aux investissements réalisés en 2015 :

Répartition de la part de chaque dispositif fiscal
selon les zones géographiques

Zones

« Scellier »

« Scellier » intermédiaire

« Duflot »

« Pinel »

2013

2014

2015

2013

2014

2015

2013

2014

2015

2014

2015

bis

8,57 %

12,15 %

12,55 %

4,36 %

6,73 %

6,55 %

1,45 %

2,35 %

5,95 %

2,12 %

2,95 %

A

33 %

35,3 %

32,20 %

27,53 %

27,98 %

28,50 %

18,52 %

22,78 %

29,49 %

21,39 %

23,2 %

B1

42,29 %

40,06 %

40,84 %

52,74 %

52,6 %

49,17 %

61,62 %

61 %

54,99 %

63,53 %

60,92 %

B2

15,97 %

12,16 %

13,84 %

15,29 %

12,56 %

15,56 %

18,41 %

13,88 %

9,58 %

12,97 %

12,94 %

C

0,17 %

0,33 %

0,58 %

0,08 %

0,13 %

0,22 %

Source : DGFiP, retraitement de la Cour des comptes.

Ces chiffres permettent de constater que les investissements réalisés en zone B2 représentent environ 13 % des opérations dans le cadre du dispositif « Pinel » – cette part étant d’ailleurs relativement constante pour les différents dispositifs incitatifs qui se sont succédé.

Les informations figurant dans ce tableau montrent également qu’une part prépondérante des investissements « Pinel », soit plus de 60 %, est réalisée dans la zone B1, tandis qu’une très faible partie des investissements, inférieure à 3 %, relève de la zone A bis.

● Le présent article prévoit des dispositions transitoires (II), pour accompagner l’exclusion des zones B2 et C du dispositif. Pour assurer la sécurité juridique des contribuables qui seraient engagés dans l’acquisition d’un logement en zone B2 ou en zone C, des dispositions sont proposées pour maintenir dans ces zones l’éligibilité des acquisitions de logements réalisées avant le 31 mars 2018, sous réserve que le contribuable puisse justifier :

– d’une promesse d’achat ou d’une promesse synallagmatique de vente signée avant le 1er janvier 2018 ;

– ou, s’agissant d’un logement en l’état futur d’achèvement, d’un contrat préliminaire de réservation, par lequel le vendeur s’engage à réserver à un acheteur un immeuble ou une partie d’immeuble, signé et déposé au rang des minutes d’un notaire ou enregistré au service des impôts, et ce avant le 1er janvier 2018.

IV.   L’impact budgétaire de la réforme proposée

● Le coût budgétaire de cette mesure est évalué à 59 millions d’euros pour l’année 2019 – soit les pertes de recettes d’impôt sur le revenu au titre des investissements réalisés au cours de l’année 2018 –, à 159 millions d’euros en 2020, à 360 millions d’euros en 2021 et à 566 millions d’euros en 2022.

Le coût total de la prorogation est évalué à 6,9 milliards d’euros sur la période comprise entre 2019 et 2036 ([46]) – du fait de l’échelonnement de l’avantage fiscal sur une période pouvant aller jusqu’à douze ans et de la chronique d’achèvement des investissements.

● Les chiffres sont fondés sur l’hypothèse d’une chronique d’achèvement des investissements de 30 % la première année, de 20 % la seconde et de 50 % la troisième année – car comme vu supra, il existe un décalage entre l’année d’engagement de l’investissement et l’année d’imputation de la réduction d’impôt.

Par ailleurs, le nombre total de logements bénéficiant de la mesure a été estimé à 57 700, sur la base du nombre de logements réalisés en 2016 hors zone B2. Il est malaisé d’anticiper les effets du recentrage géographique proposé par le présent article. En tout état de cause, son impact sur la dépense fiscale devrait s’avérer assez limité, compte tenu de la part assez faible des investissements réalisés en zone B2, de l’ordre de 13 %, et de la possibilité d’un report des investissements sur les zones A bis, A et B1.

Le « coût générationnel » par année d’investissement est donc estimé à 1,7 milliard d’euros, ce qui correspondrait à une dépense par logement pour l’État de l’ordre de 30 000 euros.

Ce chiffre est proche de celui constaté pour l’année 2015, pour laquelle le coût générationnel a été estimé à 1,563 milliard d’euros, tandis que le nombre de logements produits a été évalué à 50 000, soit une dépense moyenne de 31 000 euros par logement. Cette estimation est également cohérente avec le montant moyen des investissements, soit environ 175 000 euros, auquel s’appliquerait une réduction d’impôt de 18 % (en retenant un engagement de location de neuf années).

● En l’absence de réponses du Gouvernement aux questions du Rapporteur général sur la chronique de coût de la prorogation de quatre années du dispositif « Pinel », il est difficile d’établir une projection de la dépense fiscale associée au dispositif jusqu’à son extinction. Néanmoins, sur la base de chiffres non actualisés, car transmis en 2016 lors de la prorogation d’un an réalisée par la loi de finances pour 2017, ainsi que des données de l’évaluation préalable sur l’effet budgétaire de la présente prorogation en 2019, 2020, 2021 et 2022, il est possible d’établir le tableau suivant :

projection de la dÉpense fiscale associÉe au duflot-PInel à partir de 2014

(en millions d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

2026

Dépense fiscale avant la prorogation LFI 2018

20

77

191

354

554

695

756

752

734

677

577

455

333

Dépense fiscale après la prorogation LFI 2018

20

77

191

354

554

754

915

1 112

1 300

nc

nc

nc

nc

Source : tome II des Évaluations des voies et moyens annexées aux projets de loi de finances et DGFiP.

Ainsi, la réduction d’impôt « Pinel » devrait occasionner des pertes de recettes de 1,3 milliard d’euros en 2022 ; son coût devrait croître jusqu’en 2024-2025, pour diminuer ensuite.

projection de la dÉpense fiscale associÉe au duflot-PInel à partir de 2014

(en millions d’euros)

*

*     *

La commission examine l’amendement II-CF536 de M. Fabien Roussel.

M. Jean-Paul Dufrègne. Par l’amendement II-CF536, nous proposons de supprimer le dispositif dit « Pinel ». Certes, il présentait son utilité lorsqu’il fallait relancer la construction de logements et soutenir l’économie, mais il coûte aujourd’hui particulièrement cher. Redéployons les moyens qui y sont consacrés au profit d’autres dispositifs favorables à la construction, la réhabilitation et la rénovation énergétique. Quant à réserver le bénéfice du dispositif aux zones dites « tendues », ce serait reconcentrer l’économie sur certains territoires au détriment des autres.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, elle rejette l’amendement IICF478 de M. Jean-Noël Barrot.

Elle en vient à l’amendement II-CF708 du Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Il s’agit tout simplement de prévoir l’éligibilité au dispositif « Pinel » de toutes les communes signataires d’un contrat de redynamisation de site de défense (CRSD). Ce sont au total plus d’une dizaine de communes, concernées par la suppression totale de certaines casernes, en lieu et place desquelles il est prévu de construire des logements neufs. Ne brisons pas les dynamiques des CRSD.

M. Charles de Courson. Très bon amendement !

M. Pierre Cordier. Pourriez-vous nous donner la liste des communes concernées ?

M. le Rapporteur général. Il s’agit de communes situées en zone C ou en zone B2, de Givet à Barcelonnette en passant par Châteauroux. Nous vous en transmettrons la liste.

La commission adopte l’amendement (amendement  II-1486).

Puis elle examine l’amendement II-CF712 du Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Je propose que la sortie des communes situées en zones B2 et C du dispositif soit plus progressive, tout en conditionnant l’éligibilité des investissements réalisés en zone B1 à l’obtention par les communes d’un agrément. Je rappelle qu’un agrément est prévu dans le cadre du « Pinel » pour les communes de zone B2 et C ; cet agrément est attribué par le préfet de région après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement (CRHH). Il est difficile de supprimer le dispositif du jour au lendemain quand des communes viennent d’obtenir l’agrément. Quelque 16 communes sont en zone C, et 900 en zone B2.

Mme Sylvia Pinel. Quand vous évoquez l’agrément à propos de la zone B1, cela veut-il dire, monsieur le Rapporteur général, que vous voulez la soumettre aux mêmes principes dérogatoires que les zones B2 et C ?

M. le Rapporteur général. Je propose effectivement un système d’agrément en zone B1, dans un souci de maîtrise budgétaire.

M. Jean-Paul Mattei. Selon le dispositif de l’amendement, l’acte authentique d’acquisition doit être signé avant le 30 juin 2019. Ne faudrait-il pas prévoir qu’un programme éligible au « Pinel » puisse le rester, indépendamment de cette date de signature ? Des logements d’un même programme de deux ou trois ans risqueraient d’être soumis à des traitements fiscaux différents.

M. le Rapporteur général. Adoptons cet amendement aujourd’hui, et réfléchissons-y d’ici à l’examen de l’article dans l’hémicycle. Votre remarque, cher collègue, me semble fondée.

Mme Sylvia Pinel. Le lissage proposé par notre Rapporteur général me paraît intéressant. En revanche, ce qui est prévu pour la zone B1 me paraît contrevenir au souci de simplicité, de lisibilité et d’efficacité du dispositif. Pourquoi redemander un agrément alors que la cartographie a été refaite en 2014 ? Je peux comprendre que l’on veuille revoir une cartographie dont le terme est d’ailleurs l’année 2017, mais redemander des agréments, quand on sait à quel point la procédure peut parfois être complexe et longue… Cela ne me paraît propice à une véritable relance de la construction.

M. le Rapporteur général. J’ai effectivement demandé que l’on revoie le zonage, parce que c’est parfois un peu incohérent, et c’est à l’aune de ce que nous ferons en la matière que je pourrai peut-être vous répondre plus précisément, chère collègue. Actuellement, des villes de 100 000 habitants sont en zone C, des communes rurales de 120 habitants sont en zone B2 – j’en connais au moins une. Il arrive que la commune-centre soit dans une zone et les communes limitrophes dans une autre, alors que, non loin de là, une agglomération soit tout entière dans la même zone. Je sais bien que la cartographie repose sur le caractère plus ou moins tendu de la zone, mais je peux difficilement comprendre qu’une zone rurale soit en zone B2 et une ville de 100 000 habitants en zone C. Je demande donc un rapport complet sur la question.

La commission adopte l’amendement II-CF712 (amendement  II-1487).

En conséquence, les amendements II-CF703 de M. Denis Sommer et IICF386 de Mme Valérie Lacroute tombent, ainsi que les amendements identiques II-CF45 de M. Martial Saddier, II-CF145 de M. Raphaël Schellenberger, II-CF410 de Mme Véronique Louwagie, IICF415 de M. Thibault Bazin, II-CF431 de M. Marc Le Fur et II-CF610 de Mme Christine Pires Beaune.

Les amendements II-CF183 de M. Christophe Naegelen, II-CF516 de M. Jean-Paul Mattei et II-CF621 de Mme Sylvia Pinel, les amendements identiques II-CF245 de M. Éric Alauzet, II-CF261 de Mme Lise Magnier, IICF475 de M. Jean-Luc Lagleize et II-CF605 de M. François Pupponi, ainsi que les amendements II-CF392 de Mme Stéphanie Do, II-CF476 de M. Jean-Luc Lagleize et II-CF184 de M. Christophe Naegelen tombent également.

Puis la commission se saisit des amendements identiques II-CF588 de Mme Sylvia Pinel et II-CF677 de M. Bertrand Sorre.

M. le Rapporteur général. S’ils ne tombent pas, ces amendements identiques n’en sont pas moins contradictoires avec ce que nous venons d’adopter.

Mme Sylvia Pinel. La problématique du foncier se pose dans les communes littorales ou touristiques en zone B2, avec des tensions sur les prix et entre marché libre et logement social. La vocation de ce dispositif d’investissement locatif est, je le rappelle, de permettre de construire dans les zones tendues. Il faut pouvoir le maintenir en zone B2, après avis du CRHH, car la problématique de la zone B2 n’est pas la même sur tout le territoire. Tel est le sens de l’amendement II-CF588.

M. le Rapporteur général. L’amendement II-CF712, que nous venons d’adopter, prévoit le maintien de l’agrément accordé à 900 communes. Il ne leur impose pas d’obtenir un nouvel agrément !

M. Bertrand Sorre. L’amendement II-CF677 vise à maintenir le dispositif en zone B2. Je peux en témoigner en tant qu’ancien maire d’une petite commune littorale en zone B2 : les effets du dispositif y sont tout à fait palpables, puisqu’il permet un équilibre générationnel et social. Cela se fait particulièrement sentir dans les écoles de ces territoires à la population vieillissante.

M. le Rapporteur général. Une commune qui dispose de l’agrément continuera de bénéficier des effets de celui-ci, cher collègue.

Mme Véronique Louwagie. Le maintien du dispositif sur une grande partie du territoire est très important. Nonobstant l’amendement du Rapporteur général, 95 % du territoire sera exclu du dispositif. Nos territoires ruraux doivent pouvoir en bénéficier. Aujourd’hui, les agréments et les zonages sont complètement à revoir. Comme on ne les a pas revus, il est inopportun de modifier le dispositif. Ne faisons pas le travail à l’envers. Il faudrait d’abord revoir les zonages, et ensuite, éventuellement, revoir le dispositif. Je soutiens l’amendement de Mme Pinel.

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF146, II-CF147, II-CF148, II-CF149 de M. Raphaël Schellenberger, ainsi que l’amendement II-CF477, de M. Jean-Luc Lagleize.

M. le Rapporteur général. Je suis défavorable à l’amendement II-CF146, plus strict que le mien puisqu’il prive toutes les communes de la zone C du bénéfice du dispositif, alors que je le conserve aux communes qui ont obtenu un agrément.

M. Jean-Luc Lagleize. Membre de la commission des affaires économiques, je n’ai pu voter l’amendement de Mme Pinel, mais j’y étais favorable. Par l’amendement II-CF477, je propose simplement le maintien du dispositif en zone B2, tout en ramenant le taux de défiscalisation à 18 %, au lieu de 21 %.

M. le Rapporteur général. Avis également défavorable à cet amendement ainsi qu’aux autres.

La commission rejette successivement les amendements II-CF146, II-CF147, IICF148, II-CF149 et II-CF477.

Puis elle étudie, en discussion commune, les amendements II-CF511, II-CF512 et IICF514 de M. Jean-Paul Mattei.

M. Jean-Paul Mattei. L’amendement II-CF511 vise à ne pas exclure du dispositif les communes qui font l’objet d’un programme de rénovation urbaine. Les amendements II-CF512 et II-CF514 visent à préserver les mesures liées à l’investissement locatif dans les quartiers prioritaires situés en zone B2. Ne créons pas des séparations au sein de programmes éligibles pour des raisons de date. Cela peut être préjudiciable à la construction, car nuisible à la sécurité juridique.

M. le Rapporteur général. Toutes les communes qui ont obtenu l’agrément en zone B2 continueront à bénéficier du dispositif. Il n’y a pas, en revanche, de nouveau dispositif, et il est vrai que je demande également, par voie d’amendement, que l’on réexamine la question du zonage avant le 1er septembre 2018, pour que nous en ayons une vision claire au moment d’aborder le projet de loi de finances pour 2019.

Cela étant, vous comprendrez que je sois défavorable à l’ensemble de ces amendements qui découpent en morceaux, si j’ose dire, la politique de la ville, sinon les villes concernées.

Mme Sylvia Pinel. Monsieur Mattei, les amendements que vous venez de défendre sont intéressants, notamment pour assurer une mixité sociale dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Monsieur le Rapporteur général, je vous rappelle que la révision du zonage relève du pouvoir réglementaire. Le Gouvernement est-il d’accord pour revoir ce zonage ?

M. François Pupponi. Si nous favorisons le dispositif « Pinel » dans les zones où opère l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), des investisseurs construiront des logements pour les louer à des populations éventuellement fragiles. En somme, on augmente le nombre de logements sociaux là où l’on veut faciliter l’accession à la propriété ! Le « Pinel » doit être manié avec beaucoup de précaution en zone ANRU. Je suis très réservé sur la possibilité d’améliorer ainsi la mixité sociale.

M. Jean-Paul Mattei. Il y a certes le cas des quartiers ANRU, mais ne créons pas de déséquilibre au sein d’une commune ou d’une agglomération. Il faut qu’il y ait plusieurs offres.

Par ailleurs, quant aux ressources fiscales, n’oublions pas les rentrées de taxe sur la valeur ajoutée dans le cadre des ventes en état futur d’achèvement (VEFA). Entre l’avantage fiscal accordé et la ressource procurée par les ventes, je m’interroge sur la réalité du manque à gagner induit par le « Pinel ».

M. le Rapporteur général. Madame Pinel, le Gouvernement compte en effet travailler à une révision du zonage à partir du début de l’année prochaine, d’où l’intérêt du rapport demandé.

La commission rejette successivement les amendements II-CF511, IICF512 et IICF514.

Puis, elle examine l’amendement II-CF515 de M. Jean-Paul Mattei.

M. Jean-Paul Mattei. Je trouve ridicule d’exclure des territoires ruraux du dispositif « Pinel ». Certes, ils ne sont pas forcément en zone tendue, mais la constructibilité y connaît d’autres limites, tels les schémas de cohérence territoriale (SCoT). Il n’y a donc pas de risque d’appel d’air. Je propose donc que les communes de moins de 5 000 habitants en zone B2 soient éligibles au dispositif « Pinel », afin de favoriser la rénovation des bourgs ruraux.

M. le Rapporteur général. Notre logique consiste plutôt à demander un rapport qui nous permette d’appréhender globalement les problèmes relatifs à ces zones. Je suis donc défavorable à cet amendement. Je le répète, le problème est beaucoup plus compliqué : il y a des communes de 100 000 habitants en zone C.

La commission rejette l’amendement.

Elle se saisit ensuite de l’amendement II-CF399 de M. Didier Le Gac.

M. Didier Le Gac. L’ensemble des 22 métropoles françaises sont comprises dans le dispositif, sauf Brest et Saint-Étienne – ville de mon collègue Jean-Michel Mis, cosignataire de l’amendement. C’est là une forme de rupture d’égalité. De surcroît, la métropole de Saint-Étienne est en cours de création. Quant à Brest, elle connaît une forte pression immobilière. Je vous rappelle que les métropoles ont été créées pour permettre aux grandes agglomérations françaises d’agir de manière efficace sur les territoires et de répondre aux besoins de leurs administrés.

M. le Rapporteur général. Si Saint-Étienne et Brest ont demandé et obtenu l’agrément, l’amendement II-CF712 que nous avons adopté en début de réunion s’y appliquera – et cela m’étonnerait qu’elles ne l’aient pas fait.

M. Marc Le Fur. C’est un amendement intéressant, qui va d’ailleurs dans le sens des propos du Rapporteur général lorsqu’il constate qu’il existe des décalages entre agglomérations de tailles analogues. C’est une incohérence à laquelle il faut mettre un terme.

M. Jean-Michel Mis. Je considère cet amendement comme un amendement d’appel, car il serait opportun de revoir la cartographie, qui comporte certaines incohérences.

M. le Rapporteur général. L’amendement que je vais défendre tout à l’heure pour revoir entièrement la cartographie répond à ce problème, car Saint-Étienne et Brest ne sont pas les seules villes concernées. Je vous ai cité le classement de Châteauroux en zone C, ce qui me paraît complètement surréaliste, mais il y a d’autres villes de même taille, dont le dynamisme démographique est identique et qui sont situées dans le même département mais dont le zonage est différent : ainsi, dans l’Allier, Montluçon et Vichy sont en B2 tandis que Moulins est en C. Il faut donc revoir l’intégralité du dispositif pour lui rendre sa cohérence. On n’y arrivera pas en procédant par petites touches.

Mme Véronique Louwagie. Au vu de toutes ces situations problématiques, ne vaudrait-il pas mieux demander au Gouvernement qu’il revoie l’ensemble du zonage et qu’il reporte cet article 39 qui, s’il est maintenu, ne va faire qu’accroître les inégalités.

M. le Rapporteur général. C’est en effet une question qui mérite d’être posée, et je pense que mon amendement relatif à l’ensemble du zonage permettra de disposer d’une vision plus cohérente et plus globale du zonage pour le prochain projet de loi de finances.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-CF496 de M. Olivier Serva.

M. Mohamed Laqhila. Il s’agit d’augmenter de 5 points le taux de la réduction d’impôt du dispositif « Pinel outre-mer » afin de favoriser l’investissement locatif dans les logements intermédiaires, dans les départements d’outre-mer. On estime en effet qu’il y manque plus de 10 000 logements.

M. le Rapporteur général. Le « Pinel outre-mer » est déjà plus favorable que celui qui s’applique en métropole, puisqu’il bénéficie d’un taux majoré et qu’il est placé sous le plafonnement global à 18 000 euros, au lieu du plafond de droit commun de 10 000 euros. J’ignore quel serait le coût de cet amendement, mais il se traduirait par des taux de réduction d’impôt deux fois plus élevés en outre-mer qu’en métropole. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF706 du Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Il s’agit de la demande de rapport sur le zonage que nous avons évoquée.

M. François Pupponi. Elle ne concerne que le « Pinel » ?

M. le Rapporteur général. J’ai demandé, par un amendement ultérieur, le même rapport sur le PTZ, si c’est le sens de votre remarque.

La commission adopte l’amendement (amendement  II-1488).

Puis elle examine l’amendement II-CF707 du Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Il s’agit d’avancer de quatre mois la date de remise du rapport d’évaluation sur le dispositif « Pinel ». Le Gouvernement prévoit cette remise pour le 31 décembre 2019, mais l’intérêt de ce rapport est qu’il soit remis avant la discussion budgétaire. Je propose donc d’avancer cette date de remise au 1er septembre 2019.

La commission adopte l’amendement (amendement  II-1489).

Puis elle adopte l’article 39 modifié.

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Après l’article 39

La commission est saisie de l’amendement II-CF369 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Même si la réforme n’était pas souhaitable, le prélèvement à la source a été décalé d’une année et il s’appliquera, ce qui signifie que nous paierons en 2018 les impôts sur les revenus de 2017, et en 2019 les impôts sur les revenus de 2019. L’année 2018 sera donc une année blanche, durant laquelle il n’y aura aucun bénéfice à solliciter des déductions fiscales, puisque les revenus de l’année ne seront pas à proprement parler imposés. Cela soulève des questions extrêmement complexes, notamment en ce qui concerne le système de retraite complémentaire Préfon, qui offre un avantage fiscal puisque les cotisations au régime sont déduites du revenu. Or personne n’aura intérêt à cotiser à la Préfon en 2018, et on évalue entre 40 % et 50 % la baisse des cotisations liée au prélèvement à la source.

Si je mets cette difficulté en exergue, c’est que la nouvelle assemblée n’a pas eu l’occasion de débattre de ce prélèvement à la source, intégré aux ordonnances, et que nous avons sans doute avec cette loi de finances l’une des dernières occasions de supprimer ce prélèvement ou, à tout le moins, d’en atténuer les effets négatifs.

M. le Rapporteur général. Le Gouvernement s’est engagé à ce que la question du prélèvement à la source soit examinée lors du projet de loi de finances rectificative de fin d’année – en l’occurrence, si tout va bien, dès la semaine prochaine.

Votre question est néanmoins légitime et je m’engage pour ma part à ce que votre amendement puisse être adopté dans le cadre de ce projet de loi de finances rectificative, quitte à ce que nous le modifiions à la marge. Je propose donc que vous le retiriez.

L’amendement est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF479 et IICF480 de M. Marc Fesneau ainsi que l’amendement II-CF450 de M. Bertrand Pancher.

M. Jean-Paul Mattei. Il convient de reconduire le dispositif d’encouragement à l’investissement en forêt qui doit s’éteindre le 31 décembre 2017. C’est l’objet de l’amendement II-CF479.

L’amendement II-CF480, quant à lui, propose que le dispositif ne soit plus limité aux parcelles de plus de 4 hectares. Il s’agit d’améliorer ce dispositif d’investissement en faveur des forêts, lesquelles ont toute leur importance dans le développement durable.

M. Vincent Ledoux. L’amendement II-CF450 vise à proroger le dispositif d’encouragement à l’investissement en forêt et à doubler les plafonds de dépenses éligibles.

M. le Rapporteur général. Je suis favorable à la prorogation du dispositif proposée par l’amendement II-CF479, mais pas à la majoration de 7 points des taux. Je vous suggère donc de redéposer votre amendement, modifié, sur le prochain projet de loi de finances rectificative.

Je suis en revanche défavorable aux amendements II-CF480 et II-CF450.

M. Charles de Courson. Pour quelle durée le dispositif serait-il prolongé ?

M. le Rapporteur général. Pour quatre ans, j’imagine.

Les amendements II-CF479 et II-CF480 sont retirés.

La commission rejette l’amendement II-CF450.

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Article additionnel après l’article 39
Prorogation pour trois ans de la réduction d’impôt au titre des travaux
de réhabilitation des logements en outre-mer et extension aux travaux
de confortation contre le risque cyclonique

La commission en vient à l’examen, en discussion commune, des amendements IICF501 et IICF502 de M. Olivier Serva.

M. Mohamed Laqhila. Dans un contexte marqué par les catastrophes climatiques, l’amendement II-CF501 vise à proroger le dispositif de réduction d’impôt pour les travaux de réhabilitation jusqu’en 2020, à étendre ensuite au risque cyclonique le champ d’application du dispositif en vigueur, limité actuellement aux travaux de confortation sismique, et, enfin, à porter son taux de réduction d’impôt de 18 % à 26 %.

L’amendement II-CF502 est un amendement de repli, qui ne comporte pas de modification du taux de réduction d’impôt.

M. le Rapporteur général. Vous soulevez un problème important pour les territoires ultramarins. Je suis favorable à la prorogation du dispositif, mais non à la majoration du taux. Je donne donc un avis défavorable à l’amendement II‑CF501 mais favorable à l’amendement II-CF502.

L’amendement II-CF501 est retiré.

La commission adopte l’amendement II-CF502 (amendement  II-1490).

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Après l’article 39

Puis la commission examine, en discussion commune, les amendements IICF497 et II-CF498 de M. Olivier Serva.

M. Mohamed Laqhila. L’amendement II-CF497 tend à geler les seuils de chiffre d’affaires qui imposent de recourir au crédit d’impôt plutôt qu’à la défiscalisation et de proroger de cinq ans le dispositif établi par l’article 199 undecies B du CGI.

L’amendement II-CF498 est un amendement de repli, qui ne prévoit pas la prorogation du dispositif.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable. Il est dommage de supprimer la sortie en sifflet du dispositif, alors que la logique de la réforme engagée est bien de basculer progressivement de la défiscalisation vers le crédit d’impôt.

La commission rejette successivement les amendements.

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Article additionnel après l’article 39
Prorogation pour trois ans de la réduction d’impôt au titre des travaux
de réhabilitation des logements sociaux en outre-mer et extension
aux travaux de confortation contre le risque sismique ou cyclonique

La commission examine ensuite l’amendement II-CF500 de M. Olivier Serva.

M. Mohamed Laqhila. Il s’agit de proroger le dispositif d’aide fiscale à l’investissement inscrit à l’article 199 undecies B du CGI pour les travaux de réhabilitation dans le secteur du logement social et d’élargir le champ des travaux éligibles aux travaux de confortation contre le risque sismique ou cyclonique.

M. le Rapporteur général. Compte tenu de ce qu’ont subi récemment les départements et territoires d’outre-mer, j’émets un avis favorable à cet amendement, sous réserve que sa rédaction soit modifiée à la marge d’ici la séance.

La commission adopte l’amendement (amendement  II-1491).

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Article additionnel après l’article 39
Augmentation du taux de la réduction d’impôt sur le revenu « Madelin »
à 30 % pour les revenus de l’année 2018

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF458 du président Éric Woerth, II-CF636 de Mme Amélie de Montchalin et IICF487 de M. Jean-Noël Barrot.

M. le président Éric Woerth. Suite à la suppression du dispositif « ISF-PME », il s’agit de renforcer l’incitation à investir dans les PME au titre du « Madelin », en faisant passer le taux de réduction d’impôt de 18 % à 30 % et en portant les plafonds à 100 000 euros pour un contribuable célibataire et à 200 000 euros pour un contribuable marié.

Mme Amélie de Montchalin. Si nous travaillons activement, dans le cadre de la réforme fiscale, à mettre en place de nouveaux produits et de nouveaux outils qui aident les épargnants français à investir dans les PME, il est important que l’année 2018 soit une année de transition réussie. Dans cette optique, nous proposons de renforcer pour un an le « Madelin » en portant le taux de la réduction d’impôt de 18 % à 30 % du montant investi, tout en maintenant cette réduction d’impôt sous le plafond global de 10 000 euros. Il est essentiel, en effet, de ne pas donner le sentiment que nous entendons piloter l’épargne grâce aux niches fiscales, et que le signal que nous adressons soit au contraire un signal qui privilégie le rendement et le risque. Nous entendons procéder à un véritable changement de la culture de l’épargne dans notre pays, ce à quoi devrait contribuer la loi sur les entreprises que proposeront en 2018 MM. Bruno Le Maire et Benjamin Griveaux.

M. Jean-Paul Mattei. Dans le même esprit, l’amendement II-CF487 tend à porter le taux de réduction à 22 %, sous un plafond de 18 000 euros.

M. le Rapporteur général. L’amendement II-CF458 aborde à juste titre la question de la suppression du dispositif « ISF-PME ». Néanmoins il propose un dispositif pérenne, alors que la majorité privilégierait pour un dispositif transitoire. Avis défavorable.

Quant à l’amendement défendu par Mme de Montchalin, beaucoup plus raisonnable que l’amendement II-CF487 auquel je suis défavorable, je m’en remets à la sagesse de la commission des finances.

Mme Véronique Louwagie. Il est tout à fait contre-productif de relever le taux de réduction de l’impôt sans toucher au plafond, ainsi que le propose l’amendement de Mme de Montchalin. En effet, avec un taux de 30 %, un contribuable, s’il veut bénéficier du plafond de 10 000 euros de réduction, n’aura pas besoin d’investir plus de 33 000 euros, au lieu de 55 000 euros avec un taux de 18 %. Cette mesure n’a donc en réalité aucun effet incitatif pour les contribuables qui souhaiteraient investir dans les PME.

Mme Valérie Rabault. Il me semble que nous nous étions mis d’accord sur le fait de ne plus adopter d’amendements sans que leur coût prévisionnel ait été chiffré. Je m’étonne donc que Mme de Montchalin n’ait pas chiffré le sien. D’ailleurs, la plupart des amendements de la liasse ne sont pas chiffrés. Il semble donc que nous sommes retournés dans l’« ancien monde », prêts à voter les yeux fermés sans que personne y trouve à redire.

Si l’on tente néanmoins de chiffrer cet amendement, on parvient à un coût plus élevé que celui de l’amendement que nous avions proposé et qui visait à faire bénéficier toutes les PME de France d’un impôt sur les sociétés au taux réduit de 15 %, puisque, selon les données fournies par le Rapporteur général, 20 000 PME ne bénéficient plus du taux réduit sur les premiers 38 120 euros de résultat net.

Tandis que nous proposions une mesure en faveur des PME, la vôtre s’adresse avant tout aux investisseurs. Nous voterons donc contre ces amendements, même si je relève la sagesse de Mme de Montchalin qui nous propose une mesure temporaire et ne touche pas au plafond de 10 000 euros, contrairement aux amendements du président et du Modem, qui proposent une augmentation du taux et le placement de la réduction d’impôt sous le plafonnement à 18 000 euros. Pour autant, après avoir beaucoup fait pour les investisseurs en supprimant l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), vous auriez pu faire un geste vers les entreprises et faire bénéficier l’ensemble des PME du taux réduit de l’IS.

M. Charles de Courson. Je pensais que nous étions d’accord pour compenser la suppression de l’ISF par le « Madelin », ce qui pose la question du taux, du plafond et de la durée. En ce qui concerne le taux, tout le monde semble s’accorder sur un taux de 30 %. Quant au plafond, il faut également le remonter, sinon on est en pleine incohérence. N’instaurer cette mesure que pour une durée d’un an ne me paraît enfin pas du tout raisonnable. Il faut au minimum s’engager sur la durée de la législature.

Je pense donc qu’un dispositif d’une durée de cinq ans avec un taux de 30 % et un plafonnement à 18 000 euros serait la meilleure solution. Je rappelle par ailleurs que l’« ISF-PME » coûtait aux alentours de 500 millions d’euros par an, à côté desquels les dépenses liées au « Madelin » sont très limitées.

M. Laurent Saint-Martin. Monsieur de Courson, je vous renvoie à la philosophie qui préside à ces mesures. Notre idée n’est pas de remplacer un dispositif de défiscalisation par un autre, mais de procéder à un tuilage, le temps que nous ayons élaboré, avec tous les acteurs financiers, dans la banque et les assurances, de nouveaux dispositifs et de nouveaux produits favorables à l’investissement en fonds propres des entreprises et que l’ensemble de la tuyauterie soit en place. Cela ne peut donc être qu’une mesure temporaire – qui, contrairement à ce que dit Valérie Rabault, a été chiffrée à 350 millions d’euros –, et cinq ans ne se justifient pas plus qu’un an.

Par ailleurs, il ne s’agit pas d’opposer les investisseurs et les entreprises, puisque nous favorisons directement les entreprises en facilitant leur financement en fonds propres, ce qui n’a rien à voir avec un cadeau fiscal. En renforçant les fonds propres des entreprises, nous leur permettrons d’investir et d’embaucher.

Mme Véronique Louwagie. Lors de l’examen de la première partie du présent projet de loi de finances, vous aviez déclaré, Mme de Montchalin : « La majorité déposera lors de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances un amendement qui portera sur les sommes investies en 2018 […] avec un taux autour de 30 % et un plafond fixé à 18 000 euros, qui correspond à celui dont bénéficient les sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel. » Que s’est-il donc passé depuis cette discussion ?

Nous partageons votre idée qu’il faut aider les entreprises à se financer, mais je répète que votre amendement est contre-productif dans la mesure où vous augmentez les taux sans augmenter le plafond. Il serait donc souhaitable que vous agissiez conformément aux propos que vous aviez tenus ici même, lors de l’examen de la première partie.

Mme Amélie de Montchalin. Ce qui s’est passé, c’est que nous avons fait ce que Mme Rabault nous incite à faire, c’est-à-dire chiffrer nos mesures. Nous avons ainsi constaté qu’en rehaussant le plafond de 10 000 à 18 000 euros, nous parvenions à une mesure concernant environ 40 000 ménages, soit une cohorte assez faible par rapport au coût, quasiment doublé, pour les finances publiques.

Je le répète, nous n’avons pas l’intention de piloter l’investissement par la défiscalisation. Nous nous bornons à proposer aux Français qui souhaitent investir en 2018 un outil qui leur permette de le faire facilement. Il faut en finir avec ce « biberonnage » collectif à la défiscalisation ! Les intermédiaires financiers doivent savoir vendre autre chose que des produits ayant un intérêt fiscal ; ils doivent à la place proposer des produits ayant un intérêt économique.

Dans ce cas précis, j’entends vos remarques sur le plafond mais nous avons pris en compte le fait que les dépenses fiscales coûtent très chères à l’État et qu’en l’occurrence le prix à payer aurait été trop élevé.

M. François Pupponi. J’en viens à me demander si nous sommes dirigés par un gouvernement ou par une entreprise de plomberie, puisqu’on nous parle de tuyauterie… Pour reprendre l’exemple des aides personnalisées au logement (APL), là où vous attendiez 1,5 milliard d’euros d’économies, vous n’en réaliserez que 800 millions, puisque le dispositif ne sera applicable qu’en juin. Vous mettez donc en effet en œuvre tout un système de tuyauterie pour rentrer dans vos frais, ce qui montre en vérité que tout ceci n’est pas bien préparé. On parle quand même ici d’un amendement à 350 millions d’euros…

Mme Valérie Rabault. Si l’on fait la somme de tous les amendements qu’a fait adopter la majorité, on atteint le milliard d’euros, et je souhaiterais que chaque amendement proposé soit chiffré noir sur blanc.

Je ne comprends toujours pas en effet pourquoi vous avez refusé mon amendement en faveur des entreprises qui ne coûtait que 200 millions d’euros, mais acceptez un amendement à 350 millions d’euros en faveur de ménages qui bénéficient déjà du dispositif. J’aimerais d’ailleurs que vous nous disiez quels montants récupèrent déjà ces ménages grâce aux crédits d’impôt et aux niches fiscales, sachant par ailleurs que vous avez supprimé les 200 millions d’euros qui devaient permettre à 20 000 PME de bénéficier du taux réduit d’impôt sur les sociétés, alors que la mesure était inscrite dans la loi et devait s’appliquer au 1er janvier 2019.

Vous êtes en train de réaliser qu’en supprimant l’ISF vous avez signé un chèque en blanc qui ne sera pas nécessairement libellé à l’ordre des PME. Vous tentez donc de rafistoler le système avec des amendements comme celui-ci, qui ne sont que des rustines.

M. le Rapporteur général. Nous avons évalué ce dispositif à 50 millions d’euros. Le « Madelin » représente un coût de 57 millions d’euros en 2018. Si l’on ajoute les fonds d’investissement de proximité (FIP) et les fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI), on atteint 110 ou 120 millions d’euros. Cela représente, selon nos estimations, 350 millions d’euros sur cinq ans.

M. Éric Coquerel. L’idée de rustine me plaît, mais c’est aussi l’aveu d’un échec possible et annoncé. Vous pensez que le fait de donner 9 milliards d’euros aux investisseurs va provoquer un changement culturel. Je suis, il est vrai, assez matérialiste, mais je ne vois pas de changement culturel : vous donnez de l’argent sans contreparties, en croyant que cela va permettre des investissements dans le futur. Si vous imposez des contraintes, des conditions, des fléchages, nous écouterons peut-être ce que vous avez à nous dire. Mais votre dispositif n’en comporte pas. Par ailleurs, vous inventez des rustines et des amortisseurs pour traiter les problèmes car vous n’êtes absolument pas sûrs que tout cela va produire des effets – nous sommes à peu près sûrs de l’inverse. En réalité, cet amendement est intéressant quand on le décortique : après le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui n’a produit aucun des effets annoncés, vous continuez de faire de cadeaux et vous êtes obligés de coller des rustines.

M. Stanislas Guerini. Je veux réagir sur deux points en réponse aux propos de Valérie Rabault. Le coût de 350 millions d’euros que vous évoquez n’est pas le bon. Le coût doit être calculé déduction faite du report naturel de l’ISF-PME vers l’« IR-PME ».

Par ailleurs, vous opposez les montants de diminution du taux d’IS pour certaines PME et le fait de favoriser les investissements dans les PME. Nos visions sont fondamentalement différentes : vous voulez moins taxer les bénéfices de ces PME. Mais, avant de faire des bénéfices qu’on puisse taxer, il faut produire ses bénéfices ! Pour cela il faut que l’on puisse investir dans les PME, pour qu’elles puissent innover, s’agrandir, conquérir des marchés à l’international, créer de nouveaux produits. Notre projet permettra en réalité d’augmenter la base taxable de bénéfice. Il ne faut pas opposer les investisseurs et les PME : les investisseurs permettent aux PME de renforcer leurs fonds propres et de réussir.

Mme Véronique Louwagie. Quelle est la nature du coût évoqué ? Par ailleurs, est-ce 50 millions d’euros ou 350 millions d’euros ? Tout cela n’est pas très sérieux !

J’ai refait les calculs : avec un plafond équivalent, en portant le taux de 18 % à 30 %, on réduit de 40 % les investissements vers les entreprises.

M. Jean-Pierre Vigier. L’impréparation qui a présidé à cet amendement et le manque d’anticipation de son impact sur le budget m’inquiètent. 50 ou 350 millions d’euros, ce n’est quand même pas la même chose !

M. le président Éric Woerth. Madame de Montchalin, n’accepteriez-vous pas de sous-amender votre amendement en portant le plafond de 10 000 à 18 000 euros, ce qui résoudrait le problème ?

Mme Amélie de Montchalin. Si, d’ici à la séance, certains veulent proposer un sous-amendement, qu’ils le fassent. Vous savez comment fonctionnent ces crédits d’impôt : ils ont un coût annuel et un coût cumulé. Pour l’année prochaine, le coût pour les finances publiques est estimé à 50 millions d’euros. Le coût cumulé, estimé sur la durée de vie du crédit d’impôt, sera de 350 millions d’euros. Vous connaissez les mécanismes mieux que personne dans cette salle !

S’agissant du plafond, nous avons fait un choix assumé, celui de ne pas piloter l’épargne par la niche fiscale. Je ne comprends pas pourquoi cela baisserait. Actuellement, la baisse d’impôt est de 18 % sous le seuil de 10 000 euros. Avec notre amendement, le taux passe à 30 %, toujours sous le seuil de 10 000 euros. Nous permettons donc à ceux qui investissent des montants sous le plafond de pouvoir le faire avec un avantage plus important. Cela veut dire qu’on démocratise l’investissement dans les PME et que plus de ménages auront la possibilité d’investir plus d’argent, même s’ils ne sont pas au plafond de l’impôt payé.

M. le président Éric Woerth. Enfin, il s’agit surtout qu’il y ait des flux d’investissements. Il faut se placer du côté de l’entreprise, pas de celui-ci qui investit.

Mme Amélie de Montchalin. Je suis d’accord. Si vous souhaitez accroître le coût de cette mesure pour nos finances publiques, la séance publique sera le bon endroit pour en parler.

M. le président Éric Woerth. Il y a probablement des niches fiscales irrationnelles ou favorisant les abus, mais il en est aussi de pertinentes. Sinon, elles n’existeraient plus ! Le pilotage d’une partie du financement de l’économie passe par les niches fiscales, comme vous le constaterez l’an prochain lorsque vous en proposerez de nouvelles.

M. Charles de Courson. Je partage entièrement la position de notre Rapporteur général. Madame de Montchalin, je vous mets au défi de me démontrer que votre amendement coûte 350 millions d’euros. Je ne sais pas qui vous a raconté cela. Les services, peut-être ? C’est impossible ! Quand vous passez de 18 % à 30 %, avec un plafond maintenu à 10 000 euros, la modification ne sert presque à rien.

La commission rejette l’amendement II-CF458.

Puis elle adopte l’amendement II-CF636 (amendement  II-1492).

En conséquence, l’amendement II-CF487 tombe.

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Après l’article 39

La commission examine l’amendement II-CF503 de M. Olivier Serva.

M. Mohamed Laqhila. Cet amendement vise à élargir le champ de des dépenses d’investissements éligibles aux fonds d’investissement de proximité outre-mer (FIP-DOM).

M. le Rapporteur général. Vous souhaitez supprimer le ciblage des secteurs économiques productifs et permettre aux FIP-DOM d’investir dans tous les secteurs économiques, y compris par exemple sur les activités immobilières financières. J’y suis très défavorable.

La commission rejette l’amendement.

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Article additionnel après l’article 39
Prorogation d’une année de la réduction d’impôt « Censi-Bouvard »

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF188 de Mme Lise Magnier et II-CF608 de M. François Pupponi, ainsi que les amendements II-CF472 et II-CF473 de M. Philippe Latombe, IICF474 de M. Jean-Luc Lagleize et II-CF694 du Rapporteur général.

Mme Lise Magnier. Cet amendement vise à prolonger le dispositif « Censi-Bouvard », au même titre que le « Pinel ».

M. François Pupponi. Le « Censi-Bouvard », qui devait s’arrêter au 31 décembre 2017, permet de flécher l’épargne vers la construction de logements pour les personnes âgées et les étudiants. Financer des logements étudiants à moindre coût permet de faire baisser les APL puisque le loyer est maîtrisé. Nous proposons également de prolonger ce dispositif.

M. Philippe Latombe. Notre souhait est de prolonger, en l’aménageant, le « Censi-Bouvard », qui contribue à la construction de logements et, donc, à la maîtrise des coûts pour les étudiants et les personnes âgées. Nous proposons de ramener le taux de réduction d’impôt de 11 % à 8 %, en contrepartie de la possibilité pour les investisseurs de bénéficier de l’amortissement sur le bien selon les règles générales applicables au secteur de la location meublée.

Nous voulons également étendre ce dispositif aux résidences de tourisme, alors que des besoins de construction existent dans certaines zones du territoire français. Cela permettrait de maîtriser les prix dans ces zones et de concurrencer de façon très intéressante les plateformes du type de Airbnb.

M. le Rapporteur général. Ces amendements recouvrent deux problématiques. La première, c’est la prolongation du « Censi-Bouvard » pour les résidences de personnes âgées et les résidences étudiantes. Ce dispositif recentré est toutefois trop récent pour que l’on dispose d’un véritable bilan. Mon amendement propose de proroger d’un an le dispositif pour bénéficier de ce bilan. Nous n’avons pour le moment pas suffisamment de recul.

D’autre part, si le « Censi-Bouvard » a été réorienté de la construction neuve de résidences de tourisme vers leur réhabilitation, c’est parce que des friches touristiques commençaient à se développer dans beaucoup de zones touristiques, sans qu’aucun dispositif ne finance la réhabilitation de ces immeubles. Nous avions eu l’occasion de le souligner lors des débats sur le deuxième volet de la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne. Je suis défavorable à la réouverture du débat pour les résidences de tourisme neuves. En revanche, je suis favorable, je le répète, à la prorogation du dispositif d’un an pour les résidences étudiantes et pour les personnes âgées, de façon à disposer d’un bilan et savoir quoi faire à l’issue de ce bilan.

M. Charles de Courson. Il faudrait alors sous-amender votre amendement pour préciser qu’on demande une évaluation. Pour ce dispositif, comme beaucoup d’autres, il faut savoir à qui bénéficie l’avantage fiscal. Bénéficie-t-il aux promoteurs, à l’acquéreur, ou aux deux ? Notre évaluation des dispositifs applicables dans les départements et territoires d’outre-mer soulignait que 7 % à 8 % des gains allaient aux intermédiaires qui montaient les produits de défiscalisation et que 25 % à 30 % partaient dans le « sur-prix ». Les bénéficiaires finaux ne touchaient donc que d’une moitié de l’avantage. Cela pose le problème de l’efficacité de ces mesures, qu’il convient d’évaluer.

M. le Rapporteur général. Effectivement, pour la séance, notre amendement sera complété.

La commission rejette successivement les amendements identiques IICF188 et II-CF-608, puis les amendements II-CF472, II-CF473 et II-CF474.

Elle adopte l’amendement IICF694 (amendement  II-1493).

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Après l’article 39

La commission examine l’amendement II-CF77 de Mme Émilie Bonnivard.

Mme Émilie Bonnivard. Cet amendement a trait à l’hébergement touristique dans les stations de montagne ou littorales. Ces dernières font face depuis plusieurs années à un phénomène que l’on peine à régler : les « lits froids ». Il s’agit de logements touristiques vieillissants qui ne sont plus mis en location. S’y ajoutent les difficultés et les contraintes qui pèsent sur les constructions neuves. Les zones touristiques ont un vrai problème de capacités d’accueil. Or le modèle économique des stations, notamment de montagne, en dépend. Chaque année, ce sont 1 % à 5 % des lits touristiques qui sortent du marché locatif. Les trois quarts des résidences secondaires et des meublés de tourisme ont été construits avant 1990.

Mon amendement prévoit une incitation fiscale pour favoriser la rénovation. Il lie l’avantage fiscal à une obligation de mise en location des logements touristiques. Le taux de réduction d’impôt serait de 20 % sur le prix de revient des travaux réalisés dans les logements, avec un plafond de travaux à 50 000 euros et une réduction étalée sur cinq ans, en contrepartie d’un engagement du propriétaire de mise en location pendant au moins neuf ans, sur une durée minimale de douze semaines et une location effective de huit semaines.

M. le Rapporteur général. Le dispositif « Censi-Bouvard réhabilitation », dont je viens de parler, a été adopté à la quasi-unanimité du Parlement. Il s’applique non seulement en montagne, mais également dans toutes les zones concernées, car un dispositif de ce type ne peut pas être réservé à la montagne. Votre dispositif est plus large et plus favorable. Je propose qu’on en reste à la réduction d’impôt que nous avons votée en loi de finances pour 2017, car votre amendement serait quelque peu coûteux. Je ne voudrais pas que l’on retombe dans les écueils du dispositif « Censi-Bouvard neuf ».

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-CF459 du président Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Il s’agit ici de financer les PME par l’impôt sur le revenu. L’amendement vise à renforcer l’avantage « Madelin ». L’avantage fiscal est plafonné à 18 000 euros. Mais je vais retirer l’amendement car nous en avons déjà beaucoup parlé. La discussion aura lieu en séance.

L’amendement II-CF459 est retiré.

La commission en vient l’amendement II-CF466 de Mme Sarah El Haïry.

M. Jean-Paul Mattei. Cet amendement vise à relever de 20 % à 50 % la part du revenu imposable pouvant être déduite au titre des dons faits aux associations et à porter le plafond annuel de 530 à 670 euros.

M. le Rapporteur général. Le dispositif « ISF-dons » étant maintenu, cet amendement est satisfait.

L’amendement est retiré.

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Article additionnel après l’article 39
Prorogation d’une année du crédit d’impôt pour la transition énergétique, recentré du fait de l’exclusion progressive de certaines dépenses

La commission examine, en discussion commune, l’amendement II-CF709 du rapporteur et les amendements identiques II-CF408 de Mme Véronique Louwagie et II-CF430 de M. Marc Le Fur.

M. le Rapporteur général. Je vous rappelle que notre commission a adopté un amendement de tuilage concernant la sortie de certaines dépenses du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), rédigé par M. Jean-Noël Barrot. Cet amendement avait été adopté à la quasi-unanimité de notre commission. Entre-temps, le Gouvernement a reporté le dispositif en seconde partie du présent projet de loi de finances. Je vous propose donc de reprendre les dispositions prévues par l’amendement déposé par notre collègue M. Barrot.

Mme Véronique Louwagie. Notre amendement vise à maintenir le CITE dans son format actuel.

M. le Rapporteur général. Je suis défavorable aux deux amendements identiques. Ils proposent le maintien du système existant, pour un coût de 900 millions d’euros. Je préfère le consensus que nous avons trouvé autour de l’amendement de M. Barrot.

La commission adopte l’amendement II-CF709 (amendement  II-1494).

En conséquence, les amendements identiques II-CF408 et II-CF430 tombent.

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Après l’article 39

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement IICF32 de M. Marc Le Fur.

Puis elle examine l’amendement II-CF460 du président Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Nous considérons que le prélèvement à la source, à propos duquel j’ai redéposé cet amendement, est une bonne chose car il supprime l’écart actuel d’un an. L’impôt doit correspondre aux revenus de l’année en cours : c’est ce que l’on appelle la contemporanéité. Par contre, la retenue à la source via les entreprises est une mauvaise solution.

En utilisant la déclaration sociale nominative (DSN), il serait possible de conserver la contemporanéité, sous réserve de deux mois de décalage, et le lien direct entre le contribuable et l’administration fiscale. Cela faciliterait d’ailleurs le maintien de conjugalisation et éviterait de devoir jouer sur différents taux.

Le rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) d’octobre dernier a montré que la retenue à la source aura un impact très négatif sur les charges des entreprises, ce qui est résolument contradictoire avec la politique du Gouvernement qui veut, à juste titre, stimuler l’économie et les entreprises. Et je ne parle même pas des tensions salariales qui peuvent naître d’un tel système.

Le dispositif que nous proposons consiste à conserver la suppression du décalage d’un an, mais dans le cadre d’une contemporanéité gérée mensuellement par l’administration fiscale.

M. le Rapporteur général. Votre amendement comporte plusieurs éléments, qui ont fait l’objet d’analyses dans les rapports remis en octobre dernier par l’IGF. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Gouvernement va sans doute rouvrir, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, la discussion sur certains éléments contenus dans ce rapport. Je vous propose de retirer votre amendement et de redéposer lors de l’examen du collectif de fin d’année pour sa partie évoquée dans les rapports de l’IGF.

M. le président Éric Woerth. Depuis l’année dernière, on me propose de le retirer pour le déposer sur le texte suivant ! Le gouvernement socialiste avait fait la même chose. Mais mon amendement est une véritable alternative à ce prélèvement à la source, à la charge des entreprises.

M. Charles de Courson. Nous voterons cet amendement. Je pense que le Gouvernement est actuellement dans un entre-deux : c’est à juste raison qu’il a repoussé l’application du prélèvement à la source, mais il n’a pas pris position sur le maintien, ou non, du dispositif. Mme de Montchalin a certainement des informations plus récentes que les miennes – à la source, peut-être ? – et pourrait nous éclairer. L’amendement du président prendra tout son intérêt si le Gouvernement décide in fine de renoncer à cette formule.

Mme Amélie de Montchalin. Ce n’est pas à moi de faire des annonces au nom du Gouvernement, et l’hémicycle sera le lieu idoine de cette discussion. À notre connaissance, le Gouvernement n’a pas renoncé. Le rapport de l’IGF était essentiel pour savoir si nous étions prêts et connaître les ajustements à consentir pour être pleinement opérationnels lors du lancement. Je pense que le ministre de l’action et des comptes publics sera ravi de vous apporter des précisions. Aucun signal ne nous laisse à penser que nous sommes dans un entre-deux, sinon celui du calendrier : 2019 est toujours notre cible.

M. le président Éric Woerth. Vous devriez inciter le Gouvernement à travailler dans l’esprit de mon amendement. Il s’épargnerait ainsi un grand nombre de difficultés.

Mme Cendra Motin. Après la lecture du très intéressant rapport que nous a remis le ministre de l’action et des comptes publics, et qui conclut à l’intérêt de la solution initialement proposée, avec quelques aménagements, j’ai consulté des professionnels pour connaître leur avis, notamment sur la question des coûts pour les entreprises. On m’a confirmé que le coût des développements à partir des DSN serait relativement modique, y compris pour les très petites et moyennes entreprises (TPE‑PME). Cela devrait vous rassurer, monsieur le président, car je tiens cela d’un des principaux éditeurs de paie en France, qui n’est pas le dernier à faire payer ses prestations…

M. le président Éric Woerth. Ce n’est pas uniquement une affaire de charges, mais aussi de net à payer, de confidentialité, de conjugalisation. Cela signifie aussi un risque de pression sur les salaires. Le danger, plus généralement, est que cela conduise le salarié à considérer que son travail est net d’impôts. Or je pense, au contraire, que le travail doit être non net d’impôts, et que l’impôt doit être réglé après, sans quoi, un jour, nos factures d’électricité seront-elles aussi prélevées à la source.

Mme Cendra Motin. Le taux d’imposition d’une personne ne dit absolument rien de sa situation fiscale. Certaines personnes, certains couples, ont des propriétés, ou beaucoup d’enfants, et un taux d’imposition identique à celui d’un célibataire sans enfant. Derrière les taux de prélèvement, les réalités sont très diverses et ne donnent à l’employeur aucune indication dont elle ne dispose déjà. La situation familiale des salariés est connue, pas celle relative à ses propriétés.

M. le président Éric Woerth. Il reste que nous sommes favorables à la fiscalisation contemporaine et non à la retenue à la source.

M. Marc Le Fur. Si le Gouvernement maintient le droit actuel, c’est-à-dire les dispositions de l’ordonnance – le décalage d’un an –, c’est pour valoriser la baisse des cotisations salariales en janvier prochain. Vous vouliez éviter que cette mesure, évidemment positive en termes salariaux, ne soit masquée par le prélèvement à la source. Vous reconnaissez de ce fait que le prélèvement à source qui interviendra en 2019 annihilera les effets de la baisse des cotisations salariales. Cela a été quasi explicitement indiqué à l’époque. Si les deux mesures étaient intervenues en même temps, la baisse des cotisations salariales aurait été invisible !

Mme Amélie de Montchalin. Monsieur Le Fur, je ne peux pas vous laisser dire que le prélèvement à la source annihilera le gain de pouvoir achat. Le rapport de l’IGF l’indique, et MM. Sapin et Eckert, quand ils ont été auditionnés en commission, l’ont confirmé : l’essentiel était de faire un test pour vérifier que nous étions prêts. Nous avons fait un test, évalué cette expérimentation et nous réalisons maintenant des ajustements, que le ministre présentera dans le collectif de fin d’année.

Le prélèvement à la source va contribuer à améliorer le pouvoir d’achat : les Français auront besoin de moins d’épargne de précaution car ils sauront exactement combien ils peuvent dépenser après avoir payé leurs impôts au fil des mois. Par ailleurs, je vous rappelle qu’un vrai gain de pouvoir d’achat proviendra également de la baisse de cotisations salariales, de telle sorte qu’une personne payée au SMIC gagnera 260 euros de plus par an. Si nous ne l’avons pas fait en 2018, c’est que nous n’étions pas prêts, monsieur Le Fur !

M. le président Éric Woerth. M. Le Fur n’a tout à fait pas tort, et vous le savez : l’addition du prélèvement à la source et de la baisse des cotisations aurait rendu la lecture de la feuille de paie un peu compliquée.

Mme Amélie de Montchalin. Un peu compliquée sans doute, mais on ne peut pas parler d’annihilation !

Mme Stella Dupont. Ces débats me font parfois sourire. C’est un procès d’intention qui nous est fait. Nous n’étions pas prêts, tout le monde le sait : inutile de se raconter des histoires.

M. le président Éric Woerth. Lorsque le précédent gouvernement a voulu instaurer le prélèvement à la source, l’administration fiscale nous assurait que tout était prêt. Les mêmes fonctionnaires nous ont dit le contraire, assis aux mêmes places, quelques mois après. Il y a donc une place laissée à l’interprétation...

Mme Véronique Louwagie. S’agissant des obligations des entreprises, la DSN a engendré des retards, des difficultés innombrables. Ce n’est d’ailleurs pas fini. Nous avons plusieurs fois interpellé le Gouvernement à ce sujet.

S’agissant de la confidentialité, madame Motin, vous dites que l’employeur connaît la situation de son personnel. Il connaît peut-être sa situation familiale, mais pas forcément – et c’est heureux. Mais il ne sait rien de la situation fiscale, patrimoniale, de ses salariés. La protection de la vie privée est essentielle. Le taux d’imposition ne révèle pas tout, loin de là, mais il n’en demeure pas moins qu’il sera connu de l’employeur. Dès lors, il peut y avoir des fuites. Cela risque de modifier l’ambiance dans certaines entreprises.

La commission rejette l’amendement II-CF460.

Elle se saisit ensuite de l’amendement II-CF29 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Le prélèvement à la source peut constituer un système relativement convenable pour des salariés dont les revenus sont réguliers. Mais, dans certaines professions, dans le monde agricole en particulier, les revenus sont erratiques : cela entraînera des régularisations très importantes, dans les deux sens. Dès lors, il n’y aura plus de visibilité, et cela posera des problèmes de trésorerie très importants.

Je vous incite donc à la plus grande prudence sur ce sujet.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable, et il en ira de même pour toute la série d’amendements de M. Le Fur portant sur le prélèvement à la source. Nous en débattrons – le Gouvernement s’y est engagé – dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, sur la base du rapport de l’IGF, qui a notamment établi que le dispositif n’aurait pas pu être mis en œuvre à la date prévue par le précédent gouvernement.

Mme Cendra Motin. Le rapport de l’IGF a souligné que tout n’était pas entièrement prêt. En particulier, monsieur Le Fur, les contribuables doivent pouvoir modifier leur taux d’imposition de manière préventive, lorsqu’ils savent que leurs revenus vont fortement varier. Cela fait partie des propositions du rapport.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-CF30 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je voudrais alerter nos collègues, et en particulier nos nouveaux collègues puisque ce débat a eu lieu sous la législature précédente.

Aujourd’hui, les Français sont imposés sur l’année N – 1 : on paye des impôts sur ses revenus, et on peut déduire différents montants.

Désormais, les impôts seront prélevés, mais ce n’est que l’année suivante que l’on pourra faire valoir des droits à déductions et crédits d’impôts divers et variés. La contemporanéité est réelle quant aux revenus, mais pas quant aux avantages dont bénéficient les contribuables ! C’est un vrai problème de trésorerie : ils ne seront remboursés de sommes auxquelles ils ont droit qu’une année plus tard.

La contemporanéité ne concerne que les mauvaises nouvelles : les bonnes sont décalées d’un an. Or, dans certains cas, un crédit d’impôt peut faire disparaître complètement l’impôt sur le revenu. Les contribuables concernés paieront, puis seront remboursés un an plus tard : bref, ils auront assuré la trésorerie de l’État.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable, comme je l’ai annoncé tout à l’heure.

Mme Amélie de Montchalin. Sans entrer dans le détail de la trésorerie de tous les ménages français, vous voyez bien qu’à partir de la deuxième année le phénomène que vous décrivez cesse de poser problème. De plus, conscients de ces questions, nous avons demandé à Bercy un rapport sur la contemporanéisation du crédit d’impôt pour services à la personne. Nous pourrons ainsi étudier le problème.

Il y a en effet une année qui s’annonce un peu compliquée, et nous devons y travailler.

M. Marc Le Fur. Je ne peux pas laisser dire cela ! Vous donnez le sentiment que les avantages fiscaux sont à peu près constants, et se compenseraient plus ou moins d’une année sur l’autre. Mais c’est faux ! L’achat d’une nouvelle chaudière, par exemple, ne jouera que sur une année. C’est une vraie difficulté.

La commission rejette l’amendement.

L’amendement II-CF31 de M. Marc Le Fur est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF34, IICF375, II-CF376, II-CF377, II-CF378, II-CF380 et II-CF383 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Ces amendements portent sur le taux neutre, imaginé par le gouvernement précédent pour remédier aux problèmes de confidentialité.

Imaginons une secrétaire dont les revenus sont modestes, mais dont le conjoint a des revenus très élevés. Ou l’inverse ! Son taux d’impôt sera très conséquent, et connu de l’employeur. C’est pourquoi le Gouvernement a imaginé un taux neutre, mais celui-ci est si difficile d’accès et si défavorable au contribuable que personne n’aura intérêt à l’utiliser.

Le taux neutre ne doit, à tout le moins, pas pénaliser le contribuable. C’est pourquoi je vous propose cette série d’amendements, tous dans la même logique.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette successivement ces amendements.

Elle se saisit ensuite des amendements identiques II-CF370 de M. Marc Le Fur et IICF389 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. En matière de retenue à la source, une disposition particulière a été adoptée pour les salariés en contrat à durée déterminée. En revanche, rien n’a été fait pour les salariés en intérim. Cet amendement vise à corriger cette omission.

M. le Rapporteur général. C’est en effet un problème qui doit être analysé et réglé. Il le sera, je m’y engage, mais dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de fin d’année.

Les amendements sont retirés.

Puis, suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements II-CF35 et II-CF36 de M. Marc Le Fur.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF366 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement concerne les tickets-restaurant. On ne parle pas beaucoup de ce dispositif, symbole du dialogue social, qui fonctionne très bien mais dont seuls les salariés bénéficient aujourd’hui. Cet amendement vise à étendre le dispositif aux travailleurs non salariés, afin que ceux-ci profitent des mêmes avantages fiscaux et sociaux. Ce serait financièrement positif, d’après une étude réalisée en juillet 2017.

M. le Rapporteur général. Les indépendants que vous citez peuvent déjà déduire leurs frais de repas, au titre des frais réels. Votre amendement pourrait conduire ainsi à une double niche fiscale. Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie. De quelle manière pourraient-ils déduire leurs frais de repas personnels ? Ils peuvent le faire s’ils reçoivent des clients, par exemple, c’est-à-dire si ces frais relèvent de dépenses professionnelles, mais rien de plus.

M. le Rapporteur général. Je pense que c’est possible, mais je vérifierai.

Mme Cendra Motin. En tant qu’ancienne indépendante, je confirme que l’on peut déduire ces frais. J’ajoute que les frais de gestion et d’édition des tickets-restaurant, notamment sur carte à puce, sont si élevés qu’un indépendant n’y trouverait aucun intérêt.

M. le président Éric Woerth. Ce n’est pas ce que disent les indépendants, madame Motin. C’est un sujet qui revient régulièrement, et c’est une question de justice.

M. Charles de Courson. Vous avez tous à la fois raison et tort. Vous pouvez déduire les frais si les dépenses engagées ont un lien avec l’entreprise. Avec le titre-restaurant, il n’y a pas de conditions.

M. le président Éric Woerth. C’est bien ce que disait Mme Louwagie, mais le Rapporteur général pense le contraire. Des éclaircissements sont nécessaires.

M. Charles de Courson. On ne peut pas compter en frais réels un simple déjeuner au restaurant !

Mme Véronique Louwagie. Absolument. Ce sont deux choses différentes. Les repas privés ne peuvent pas être déduits.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement II-CF28 de M. Marc Le Fur.

Elle étudie ensuite, en discussion commune les amendements II-CF37, IICF38, IICF39, II-CF40, II-CF41, II-CF42 et II-CF43 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il y aura en 2018 une année « blanche », dont les revenus ne seront pas imposés. Pour éviter l’optimisation, le Gouvernement a prévu un dispositif d’imposition des « revenus exceptionnels ». Mais qu’est-ce qu’un revenu exceptionnel ? Imaginons un salarié licencié qui reçoit des indemnités importantes. Ce n’est évidemment pas un revenu exceptionnel, puisqu’il n’a pris aucune initiative à cet effet. Pourtant, dans le texte actuel, c’en est un. Cela vaut sur de multiples sujets, en matière d’épargne par exemple.

J’appelle l’attention de nos collègues sur le fait qu’au 1er janvier 2018 de nombreux revenus risquent de donner lieu à prélèvement alors que l’année est réputée blanche pour la majorité des Français.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable, pour les raisons évoquées tout à l’heure : nous en débattrons dans le cadre du prochain projet de loi de finances rectificative. Par ailleurs, certains de ces amendements, monsieur Le Fur, ont déjà été adoptés l’an dernier. C’est le cas, en particulier, des amendements II‑CF43 et II-CF44. Je vous invite donc à déposer des amendements complémentaires de ce qui a été adopté, plutôt que des amendements redondants.

La commission rejette successivement ces amendements.

Puis, suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, elle rejette les amendements II-CF48, II-CF64 et II-CF49 de M. Marc Le Fur.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF50 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Comme les précédents, cet amendement soulève des problèmes quotidiens, et qui ne sont pas résolus, en l’occurrence celui de la participation et de l’intéressement.

M. le président Éric Woerth. Nous entendrons à nouveau l’administration fiscale sur ces sujets.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle se saisit de l’amendement II-CF44 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il s’agit ici des congés payés non pris.

M. le Rapporteur général. Cet amendement est l’un de ceux qui ont été adoptés l’an dernier.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF65 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Cet amendement aborde le problème du compte épargne-temps, qui n’est absolument pas résolu. Cette épargne s’accumule d’une année sur l’autre, et le salarié qui la liquide reçoit un supplément de revenu non négligeable : si cela survient en 2018, s’agit-il d’un revenu exceptionnel ?

M. le Rapporteur général. Avis défavorable. Nous aurons ce débat à l’occasion de l’examen du projet de collectif de fin d’année. De plus, un plafond de dix jours a été prévu, en deçà duquel les revenus retirés sont considérés comme des revenus non exceptionnels.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF51, II-CF52, IICF66 et II-CF67 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. L’adjectif « surérogatoire » ne nous est pas encore familier... Quand une prime, une rémunération variable, une commission, une prime liée à une performance particulière deviennent-elles « surérogatoires » ? C’est très incertain, très mal défini. Une clarification est nécessaire. Beaucoup de primes risquent, sinon, d’être considérées comme des revenus exceptionnels, alors que la règle est bien qu’il n’y a pas d’imposition en 2018.

C’est de la vie quotidienne de nos compatriotes que nous parlons.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette successivement ces amendements.

Puis, suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, elle rejette l’amendement IICF53 de M. Marc Le Fur.

Elle se penche ensuite sur l’amendement II-CF55 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Puisqu’il y a prélèvement à la source, c’est finalement l’employeur qui va décider si un revenu perçu en 2018 est exceptionnel, donc imposé. C’est une situation curieuse. L’amendement avait été adopté, monsieur le Rapporteur général, mais il a, je crois, été retiré par la suite.

M. le Rapporteur général. Non seulement il a été adopté, mais le décret d’application est paru.

Mme Cendra Motin. La DSN oblige déjà l’employeur à déclarer les revenus de façon très précise. Tout ce qui sort de l’habituel est très encadré. Ce n’est donc pas l’employeur qui choisit si un revenu est exceptionnel : cela dépend de la nature de la somme versée et de l’occasion à laquelle elle est versée. Je vous renvoie au site internet du service public, qui est très bien fait. Tout est très normé.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement II-CF58 de M. Marc Le Fur.

M. le Rapporteur général. Monsieur Le Fur, je vous propose de faire, avant la séance, le point sur l’ensemble des questions que vous soulevez. Nous serons ainsi plus efficaces.

M. le président Éric Woerth. Excellente proposition !

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement II-CF60 de M. Marc Le Fur.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF62 et II-CF63 de M. Marc Le Fur.

M. le Rapporteur général. Il s’agit ici d’un vrai problème – celui des déductions pour travaux réalisés dans les immeubles loués – que nous devrons régler, mais dans le cadre du projet de loi de finances rectificative.

La commission rejette successivement ces amendements.

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Article additionnel après l’article 39
Prorogation de trois ans des exonérations applicables
dans les bassins d’emploi à redynamiser (BER)

La commission en vient à l’amendement II-CF372 de M. Pierre Cordier, qui fait l’objet du sous-amendement II-CF730 de M. Charles de Courson.

M. Pierre Cordier. Cet amendement très important pour les départements des Ardennes et de l’Ariège vise à proroger les exonérations applicables dans les bassins d’emploi à redynamiser. Instaurée en 2007 et prorogée par les gouvernements qui se sont succédé depuis, cette mesure prise pour répondre aux difficultés d’emploi consiste en des exonérations fiscales et sociales conditionnées dans les bassins en question. Je propose de la reconduire pour cinq ans, étant entendu que le manque à gagner pour l’État sera compensé par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du CGI.

M. Charles de Courson. Cette mesure, que j’avais à l’époque aidé M. Warsmann à rédiger, ne concerne qu’une partie de deux départements : les Ardennes et l’Ariège. Elle expire en 2017. M. Cordier propose de la proroger pendant cinq ans. J’ai déposé le sous-amendement II-CF730 pour ramener cette prorogation à trois ans, délai qui me paraît plus raisonnable.

M. le Rapporteur général. Je remercie M. de Courson d’avoir entendu ma préoccupation sur le délai de cette mesure ; son sous-amendement me satisfait. Nous devons encore vérifier si cette situation n’est pas couverte par d’autres dispositifs ; en attendant, j’émets un avis de sagesse sur l’amendement – sous réserve de l’adoption du sous-amendement – afin que le débat puisse avoir lieu en séance avec le Gouvernement.

M. Pierre Cordier. Je déposerai les amendements nécessaires pour qu’ils soient débattus en séance dès jeudi prochain.

Mme Amélie de Montchalin. Il est indispensable de prévoir une évaluation pour obtenir, pendant la durée de la prorogation, un retour d’expérience sur le bénéfice économique concret de cette mesure afin de nous assurer que ce manque à gagner pour l’État produit bien les effets attendus.

M. Pierre Cordier. Je ne suis naturellement pas en mesure de vous donner un bilan chiffré mais, dans des départements comme les Ardennes et l’Ariège, cette mesure a permis de sauver des emplois. Je suis reconnaissant à la commission d’avoir adopté cet amendement.

La commission adopte successivement le sous-amendement II-CF730 et l’amendement II-CF372 sous-amendé (amendement  II-1495).

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*     *

Article 40
Prorogation et réforme du prêt à taux zéro (PTZ)

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article proroge le dispositif du prêt à taux zéro (PTZ) pour quatre années supplémentaires, soit jusqu’au 31 décembre 2021.

Il modifie en contrepartie les critères d’éligibilité au PTZ pour les logements neufs et au PTZ pour les logements anciens en tenant compte des difficultés d’accès aux logements rencontrées dans certaines zones géographiques. À cette fin, il est proposé de conditionner :

– les PTZ pour les logements neufs à la localisation du logement dans les communes classées dans une zone géographique se caractérisant par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement dans le parc résidentiel existant (zones A, B1 et B2) ; à partir du 1er janvier 2019, le déséquilibre entre l’offre et la demande de logements devra être important (zones A et B1) ;

– les PTZ pour les logements anciens à la localisation du logement dans les communes classées dans une zone géographique ne se caractérisant pas par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logement (zones C et B2).

Le Président de la République a toutefois annoncé, à l’occasion des « 24 heures du bâtiment » de la Fédération française du bâtiment, le maintien du PTZ dans le neuf en zones B2 et C pendant deux années supplémentaires, soit jusqu’en 2019 inclus, mais avec une quotité de prêt inférieure à la quotité actuelle.

Enfin, il modifie les critères de dérogation à la condition de primo-accession du PTZ afin de tenir compte de la mise en place au 1er janvier 2017 de la carte « mobilité inclusion » avec la mention « invalidité ».

Dernières modifications législatives intervenues

La loi de finances pour 2015 a prolongé le PTZ jusqu’au 31 décembre 2017 et l’a étendu aux opérations d’acquisition dans l’ancien, sous condition de travaux de réhabilitation, dans 5 920 communes répondant à certains critères : commune située en zone rurale ou au sein d’une unité urbaine de moins de 10 000 habitants ; comprenant un nombre minimal de huit équipements de proximité ; connaissant un niveau de vacance du parc de logements au moins supérieur à la moyenne nationale.

La loi de finances pour 2016 a étendu le PTZ pour les logements anciens, sous condition de travaux de réhabilitation, à toutes les zones. Les quotités du PTZ et les plafonds de revenus ont été augmentés, et les conditions de remboursement et de résidence principale ont été assouplies. Le plafond de dépense générationnelle a été augmenté d’un milliard à 2,1 milliards d’euros.

La loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique a mis en place au 1er janvier 2017 une carte « mobilité inclusion » remplaçant les cartes de priorité, d’invalidité et de stationnement.

La loi de finances rectificative pour 2016 a rendu éligible aux PTZ l’accès à la propriété dans le cadre d’un bail réel solidaire.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

L’amendement CF700 a mis en œuvre l’annonce présidentielle des « 24 heures du bâtiment » en prolongeant le PTZ dans le neuf pour toutes les zones pendant deux années supplémentaires, tout en maintenant, indépendamment du zonage, le PTZ neufs pour les communes signataires d’un contrat de redynamisation de sites de défense (CRDS), dans la mesure où de nombreux sites de défense y ont été rasés pour réaliser des logements neufs.

L’amendement CF701 propose la remise d’un rapport d’évaluation des zones géographiques retenues pour l’attribution du PTZ avant le 1er septembre 2018.

L’amendement CF702 avance de quatre mois la remise du rapport d’évaluation du dispositif du PTZ afin de permettre au Parlement de disposer de ces informations en vue de l’examen du projet de loi de finances.

I.   L’État du droit

A.   les conditions du bénéfice du PTZ ont ÉtÉ régulièrement modifiÉes depuis la crÉation du dispositif en 2011

1.   Un prêt ne portant pas intérêt consenti pour financer la primo‑accession à la propriété

Créé par la loi de finances pour 2011 ([47]), le prêt à taux zéro (PTZ) est un prêt ne portant pas intérêt consenti par les établissements de crédits et les sociétés de financement aux ménages pour contribuer au financement de leur résidence principale dans le cadre d’une première accession à la propriété.

L’article L. 31‑10‑2 du code de la construction et de l’habitation (CCH) précise qu’aucun « frais de dossier, frais d’expertise, intérêt ou intérêt intercalaire ne peut être perçu sur ces prêts ». Les conditions du prêt sont fonction du coût de l’opération, de la composition et des ressources du ménage, de la localisation du logement dans une zone géographique, du caractère neuf du logement ou, pour un logement ancien, du respect de la condition de travaux de réhabilitation. Depuis la loi de finances pour 2016 ([48]), le PTZ dans le neuf comme dans l’ancien peut de nouveau être demandé sur l’ensemble du territoire, le zonage en fonction du déséquilibre entre l’offre et la demande de logements (zones A, B et C) n’étant utilisé que pour la détermination de la condition de ressources, ainsi que du montant et des modalités de remboursement du prêt.

L’effort financier consenti dans ce cadre par les établissements de crédits et les sociétés de financement leur est compensé, en application de l’article 244 quater V du CGI, par le biais d’un crédit d’impôt sur les bénéfices, dont l’imputation est répartie sur les cinq exercices suivant l’émission du prêt.

Prévu initialement pour être émis du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2014, le PTZ a été maintenu pour trois années supplémentaires par la loi de finances pour 2015 ([49]) dans le cadre du plan de relance de la construction de logements du précédent Gouvernement. Dans l’état du droit, le dispositif doit prendre fin au 31 décembre 2017.

Les conditions du bénéfice et les modalités de mise en œuvre du PTZ sont prévues au chapitre X du titre Ier du livre II de la partie législative du CCH, aux articles L. 31‑10‑1 à L. 31‑10‑14, ainsi qu’au chapitre X du titre Ier du livre III de la partie réglementaire du même code, aux articles R. 31‑10‑1 à R. 31‑12‑12.

2.   Un prêt pouvant intervenir pour l’acquisition ou la construction d’un logement neuf, ainsi que pour la rénovation d’un logement ancien

Lors de la mise en place du dispositif par la loi de finances pour 2011 ([50]), le PTZ pouvait être utilisé par tous les ménages, sans plafond de ressources, pour l’acquisition ou la construction d’un logement neuf ainsi que pour l’acquisition d’un logement ancien, sur l’ensemble du territoire.

Dès la loi de finances pour 2012 ([51]), le champ d’intervention du PTZ a été réduit, d’une part, par l’introduction de conditions de performance énergétique élevées pour les logements neufs (respect de la réglementation thermique RT 2012) et, d’autre part, par la suppression du PTZ dans l’ancien en dehors de la vente du parc social à ses occupants. Ce dernier cas concerne les ventes à leurs occupants des logements appartenant à un organisme d’habitation à loyer modéré (HLM) ou des logements conventionnés appartenant à un organisme de logement social. La loi de finances pour 2012 a également conditionné le versement du prêt au respect d’une condition de ressources, fonction de la composition du ménage et de la localisation géographique du logement.

La condition de performance énergétique pour les logements neufs a été par la suite supprimée par la loi de finances pour 2015 ([52]), au motif que la réglementation RT 2012 s’imposait depuis le 1er janvier 2013 à l’ensemble des constructions de logements neufs. Le dispositif, qui devait s’éteindre au 31 décembre 2014, a été prorogé au 31 décembre 2017. De plus, la loi de finances pour 2015 a ouvert de nouveau le PTZ pour l’acquisition d’un logement ancien mais uniquement sous condition de travaux de rénovation et dans les communes respectant les trois critères suivants :

– être située en zone rurale ou au sein d’une unité urbaine de moins de 10 000 habitants ;

– connaître un niveau de vacance du parc de logements au moins supérieur à la moyenne nationale, fixé à 8 % par décret ;

– comprendre un nombre minimal de huit équipements de proximité et recensé par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE).

Remplissent la condition de travaux les logements anciens qui, au moment de l’acquisition, font l’objet d’un programme de travaux d’amélioration présenté par l’acquéreur et, dans un délai qui ne peut dépasser trois ans à compter de la date d’émission de l’offre de prêt, de travaux d’amélioration d’un montant supérieur à une quotité du coût total de l’opération. Cette quotité, dont l’article L. 31-10-3 du CCH prévoit un encadrement entre 20 % et 30 % du coût de l’opération, est actuellement fixée par décret à 25 %. Autrement dit, le montant minimal de travaux à réaliser est égal à un tiers du montant de l’opération hors travaux ([53]). Ces derniers s’entendent des travaux ayant pour objet la création de surfaces habitables ou annexes, la modernisation, l’assainissement ou l’aménagement des surfaces habitables ou annexes, ainsi que certains travaux destinés à réaliser des économies d’énergie.

L’élargissement du PTZ dans l’ancien avec travaux a concerné près de 5 920 communes en 2015, principalement situées en zone rurale ne faisant pas l’objet d’un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements (zone C) ([54]). L’objectif était de recentrer le PTZ pour les logements anciens prioritairement sur les centre-bourgs des zones rurales.

Dans la perspective, d’une part, de simplifier les critères d’éligibilité des communes au PTZ pour les logements anciens, jugés particulièrement complexes à mettre en œuvre et conduisant à une localisation dispersée des territoires éligibles, d’autre part, de soutenir l’accession à la propriété des ménages aux revenus modestes et intermédiaires, la loi de finances pour 2016 ([55]) a étendu à l’ensemble du territoire le PTZ pour les logements anciens, tout en maintenant la condition de travaux de rénovation.

Évolution des opérations éligibles au PTZ

Loi de finances

Logement neuf

Logement ancien

LFI 2011

Acquisition ou construction

Acquisition, avec ou sans travaux

LFI 2012

Acquisition ou construction d’un logement justifiant d’un niveau élevé de performances énergétiques

Acquisition d’un logement sous condition de vente du parc social à ses occupants

LFI 2015

Acquisition ou construction

Acquisition d’un logement, sous condition de vente du parc social à ses occupants ou sous condition de travaux dans 5 920 communes, situées principalement en zone C, répondant à certains critères (moins de 10 000 habitants, taux de vacance supérieur ou égal à 8 %, nombre minimal d’équipements de proximité)

LFI 2016

Acquisition ou construction

Acquisition d’un logement sous condition de vente du parc social à ses occupants ou sous condition de travaux (élargissement du PTZ à l’ensemble du territoire français)

Source : commission des finances.

Ainsi, le PTZ permet actuellement de financer la construction ou l’acquisition d’un logement neuf, à savoir :

– la construction d’un logement, avec ou sans acquisition du terrain ;

– l’acquisition d’un logement neuf construit ou vendu en l’état futur d’achèvement et n’ayant jamais fait l’objet d’une occupation ;

– l’acquisition et l’aménagement à usage de logements de locaux non destinés initialement à l’habitation ;

– l’acquisition et la remise à neuf d’un logement, au sens où les travaux réalisés ont conduit à la remise à neuf soit de la majorité des fondations, soit de la majorité de la consistance des façades hors ravalement, soit de l’ensemble des éléments de second œuvre dans une proportion fixée par décret.

Il permet également de financer l’acquisition d’un logement existant, à savoir :

– l’acquisition d’un logement du parc social par ses occupants, en particulier les ventes des logements appartenant à un organisme de logement social au locataire du logement ou à un locataire appartenant au même bailleur dans le département ;

– l’acquisition d’un logement existant sous condition de réalisation de travaux de rénovation d’un montant au moins égal à 25 % du montant total de l’opération.

Enfin, deux cas particuliers doivent être abordés : le PTZ permet également de financer l’acquisition d’un logement dans le cadre soit d’un contrat de location-accession ([56]), soit d’un BRS ([57]). Dans les deux cas, il s’agit de dispositifs particuliers d’accession à un logement, neuf comme ancien, pour les ménages aux revenus modestes et intermédiaires :

– la location-accession à la propriété permet à un locataire d’acheter un logement après l’avoir loué pendant une période définie avec le propriétaire au moment de la signature du contrat ; elle peut porter sur un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte, collectif ou individuel, achevé ou en cours de construction, neuf ou ancien ; bien qu’elle ne soit pas limitée à ce secteur, elle est principalement pratiquée par les organismes d’habitation à loyer modéré ;

– le BRS, d’une durée comprise entre dix-huit ans et quatre-vingt-dix-neuf ans, permet à un organisme de foncier solidaire (OFS) de mettre à disposition le foncier dont il est propriétaire à un preneur en vue de l’accession à la propriété de logements anciens ayant fait l’objet d’une réhabilitation ou neufs devant être occupés à titre de résidence principale, en contrepartie du versement d’une redevance.

3.   Un prêt accordé uniquement aux primo-accédants sous conditions de ressources

L’article L. 31‑10‑2 du CCH réserve depuis la création du dispositif le prêt uniquement aux personnes physiques lorsqu’elles acquièrent ou font construire leur résidence principale en accession à la première propriété. La condition de primo-accession est considérée comme remplie lorsque ces personnes n’ont pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des deux dernières années précédant l’émission de l’offre de prêt.

Toutefois, l’article L. 31‑10‑3 du CCH précise que cette condition de primo-accession n’est pas exigée lorsque le bénéficiaire ou l’un des occupants du logement à titre principal :

– est titulaire de la carte d’invalidité de deuxième ou de troisième catégorie, qui concerne soit les invalides absolument incapables d’exercer une profession quelconque, soit les invalides qui, étant absolument incapables d’exercer une profession, sont dans l’obligation d’avoir recours à l’assistance d’une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie ;

– ou bénéficie de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) ou de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) ;

– ou a été victime d’une catastrophe ayant conduit à rendre inhabitable de manière définitive sa résidence principale.

Depuis la loi de finances pour 2012, le PTZ est accordé sous conditions de ressources, en fonction de la composition du ménage et de la localisation géographique du logement. L’article L. 31-10-3 du CCH dispose que le montant total des ressources, c’est-à-dire l’ensemble des ressources des personnes destinées à occuper à titre de résidence principale le logement, divisé par le coefficient familial, doit être inférieur à un plafond fixé par décret, en fonction de la localisation du logement. Le coefficient familial est déterminé en fonction du nombre de personnes destinées à occuper le logement.

CoEfficient familial applicable pour le calcul
de la condition de ressource

Nombre de personnes

1

2

3

4

5

6

7

8 et plus

Coefficient familial

1

1,4

1,7

2

2,3

2,6

2,9

3,2

Source : article L. 31-10-10 du code de la construction et de l’habitation.

L’article L. 31‑10‑5 du CCH dispose que le montant total des ressources pris en compte pour bénéficier du PTZ est le plus élevé des deux montants suivants :

– soit la somme des revenus fiscaux de référence (RFR) des personnes destinées à occuper le logement à titre de résidence principale, au titre de l’avant-dernière année précédant celle de l’émission de l’offre de prêt ;

– soit le coût total de l’opération toutes taxes comprises divisé par neuf ([58]) (« revenu plancher »).

L’instauration du « revenu plancher » permet de ne pas accorder le PTZ à des ménages dont les ressources ont fortement augmenté entre l’année de référence et la demande de prêt, ou qui disposent d’un apport personnel significatif.

La loi prévoit enfin que le plafond de ressources fixé pour bénéficier du PTZ ne peut être supérieur à 37 000 euros ni inférieur à 16 500 euros. Le décret du 29 décembre 2015 a mis en place de nouveaux plafonds de ressources par zone géographique afin de tenir compte de la hausse du plafond légal de 36 000 euros à 37 000 euros introduite par la loi de finances pour 2016 ([59]).

Plafonds de ressources par zone géographique et par composition du ménage pour bénéficier du PTZ

(en euros)

Nombre de personnes

Zone A

Zone B1

Zone B2

Zone C

1

37 000

30 000

27 000

24 000

2

51 800

42 000

37 800

33 600

3

62 900

51 000

45 900

40 800

4

74 000

60 000

54 000

48 000

5

85 100

69 000

62 100

55 200

6

96 200

78 000

70 200

62 400

7

107 300

87 000

78 300

69 600

8 et plus

118 400

96 000

86 400

76 800

Note : le plafond de ressource pour un ménage de deux personnes situé dans une commune de la zone A (ex. région parisienne) est de 51 800 euros (37 000 euros multipliés par le coefficient familial de 1,4).

Source : article R. 31-10-3-1 du code de la construction et de l’habitation.

Le zonage géographique du PTZ

L’article R. 304-1 du CCH dispose que, pour l’application du PTZ, « un arrêté des ministres chargés du logement et du budget, révisé au moins tous les trois ans, établit un classement des communes du territoire national en zones géographiques en fonction du déséquilibre entre l’offre et la demande de logements ». Il précise que ces zones « sont désignées, par ordre de déséquilibre décroissant, sous les lettres A bis, A, B1, B2 et C », la zone A bis étant incluse dans la zone A, les zones B1 et B2 formant la zone B.

L’arrêté du 30 septembre 2014 définit l’ensemble des zones de la manière suivante :

Zone A bis : Paris et 76 communes des Yvelines, des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne et du Val-d’Oise ;

Zone A : agglomération de Paris (dont zone A bis), la Côte d’Azur, la partie française de l’agglomération genevoise, certaines agglomérations ou communes où les loyers et les prix des logements sont très élevés ;

Zone B1 : certaines agglomérations ou communes où les loyers et les prix des logements sont élevés, une partie de la grande couronne parisienne non située en zones A bis ou A et les départements d’outre-mer ;

Zone B2 : villes-centre de certaines grandes agglomérations, grande couronne autour de Paris non située en zones A bis, A et B1, certaines communes où les loyers et les prix des logements sont assez élevés et les communes de Corse non situées en zones A ou B1 ;

Zone C : reste du territoire.

4.   Un prêt dont le montant ne peut dépasser une quotité appliquée au coût total de l’opération

L’article L. 31-10-8 du CCH dispose que « le montant du prêt est égal à une quotité du coût total de l’opération retenu dans la limite d’un plafond. Il ne peut excéder le montant du ou des autres prêts, d’une durée au moins égale à deux ans, concourant au financement de la même opération ». Le montant du PTZ dépend donc d’une quotité (un pourcentage) appliquée au coût total de l’opération, dans la limite d’un plafond.

Le coût total de l’opération pris en compte pour le calcul du montant du prêt est plafonné en fonction de la localisation du logement et de la composition du ménage. La loi précise que le plafond retenu ne peut être supérieur à 156 000 euros ni inférieur à 79 000 euros pour une personne seule, et fait l’objet pour les ménages d’une déclinaison en fonction du coefficient familial déjà mentionné pour la détermination du plafond des ressources de l’emprunteur.

Le décret du 29 décembre 2015 ([60]) modifiant l’article R. 31-10-10 du CCH prévoit que le plafond de ressource retenu varie de la manière suivante :

Plafonds du coût de l’opération par zone géographique
et par composition du ménage

(en euros)

Nombre de personnes

Zone A

Zone B1

Zone B2

Zone C

1

150 000

135 000

110 000

100 000

2

210 000

189 000

154 000

140 000

3

255 000

230 000

187 000

170 000

4

300 000

270 000

220 000

200 000

5 et plus

345 000

311 000

253 000

230 000

Note : pour un célibataire et pour un projet immobilier de 150 000 euros en zone B1, le montant pris en compte pour le calcul du prêt est 135 000 euros (plafond atteint) ; à l’inverse, pour un projet immobilier de 100 000 euros en zone B2, le montant pris en compte pour le calcul du prêt est 100 000 euros (plafond non-atteint).

Source : article R. 31-10-10 du code de la construction et de l’habitation.

À partir du coût total de l’opération, le cas échéant en tenant compte du plafond, l’article L. 31-10-9 du CCH précise que la quotité du PTZ est fonction, d’une part, de la localisation du logement et, d’autre part, de son caractère neuf ou, pour un logement ancien, du respect de la condition de travaux. Il prévoit également qu’elle ne peut pas être supérieure à 40 % ni inférieure à 10 % du coût total de l’opération. La loi de finances pour 2015 a sensiblement augmenté la borne supérieure de la quotité de 35 % à 40 % afin d’élargir les projets éligibles au PTZ.

Le décret du 29 décembre 2015 ([61]) modifiant l’article R. 31‑10‑9 du CCH prévoit que la quotité est fixée :

– pour un logement neuf ou pour un logement ancien respectant la condition de travaux à 40 % ;

– pour un logement ancien respectant la condition de vente du parc social à ses occupants à 10 %.

À titre d’exemple, un couple éligible au PTZ pour un logement neuf situé en zone C dans le cadre d’une opération de 160 000 euros, peut bénéficier d’un PTZ pour un montant maximal de 56 000 euros (40 % du plafond de 140 000 euros).

Pour rappel, le précédent décret de décembre 2014 prévoyait une quotité, pour un logement neuf ou ancien, qui variait en fonction de la localisation du bien immobilier de 18 % pour la zone C à 21 % pour la zone B2 et 26 % pour les zones A et B1.

5.   Un prêt aux conditions de remboursement particulières

Les conditions de remboursement du prêt sont fonction des ressources de l’emprunteur et de la composition des ménages, sans que la durée totale de remboursement ne puisse être supérieure à vingt-cinq ans.

L’article L. 31‑10‑11 du CCH dispose que « le remboursement du prêt s’effectue, en fonction des ressources de l’emprunteur, soit en une seule période, soit, lorsqu’il y a un différé de remboursement sur une fraction ou la totalité de son montant, en deux périodes ». Depuis le décret du 29 décembre 2015, seule la seconde option est proposée aux bénéficiaires du PTZ.

La fraction du prêt faisant l’objet du différé de remboursement et la durée de chacune des périodes de remboursement sont fixées suivant un maximum de dix tranches (trois actuellement), « en fonction de la localisation du logement et du montant total des ressources (…) divisé par le coefficient familial » utilisé pour la détermination des plafonds de ressources. Pour chaque tranche sont déterminées des conditions particulières de remboursement du prêt.

L’article R. 31‑10‑11 du CCH précise les plafonds de revenus permettant de déterminer la tranche retenue pour les conditions de remboursement du prêt. Les plafonds de revenus permettant de déterminer la tranche sont fixés, en fonction de la localisation du logement, dans les conditions suivantes :

Plafonds de revenus pour une personne permettant de déterminer l’appartenance à une tranche

(en euros)

Tranches

Zone A

Zone B1

Zone B2

Zone C

1

≤ 22 000

≤ 19 500

≤ 16 500

≤ 14 000

2

≤ 25 000

≤ 21 500

≤ 18 000

≤ 15 000

3

≤ 37 000

≤ 30 000

≤ 27 000

≤ 24 000

Source : article R. 31-10-11 du code de la construction et de l’habitation.

L’appartenance à l’une des tranches mentionnées ci-dessus est déterminée pour les ménages de plus d’une personne par la correspondance entre, d’une part, les limites de tranche et, d’autre part, le montant total des ressources divisé par le coefficient familial présenté précédemment.

Une fois l’appartenance à une tranche déterminée, la fraction du prêt faisant l’objet d’un différé de remboursement et la durée de chacune des périodes de remboursement sont fixées dans les conditions suivantes :

Conditions de remboursement du PTZ en fonction des Tranches

Tranches

Capital différé

Durée de la période 1

Durée de la période 2

1

100 %

15 ans

10 ans

2

100 %

10 ans

12 ans

3

100 %

5 ans

15 ans

La période 1, ou période de différé, est la période pendant laquelle les ménages ne payent aucune mensualité lorsque 100 % du capital est différé. Le remboursement du prêt commence dès lors à l’issue de cette période.

Source : article R. 31-10-11 du code de la construction et de l’habitation.

Ainsi, plus les ressources des ménages considérés sont élevées, plus ils se situent dans une tranche élevée, et plus la durée de la période 1 pendant laquelle les mensualités sont nulles sera courte, étant précisé que, dans tous les cas, le différé de remboursement porte sur la totalité du montant du prêt (100 % du capital). Le nouveau barème ne repose plus que sur trois tranches avec un différé de capital toujours intégral.

Par exemple, un couple cherchant à acquérir un logement dans une zone B2 et dont le montant total des ressources est de 28 000 euros, se voit appliquer un coefficient familial de 1,4, conduisant à un revenu de référence de 20 000 euros. Il se situe dans la zone B2 et bénéficie à ce titre des conditions de remboursement de la tranche 3, à savoir une première période sans mensualité de cinq ans suivie d’une seconde période de quinze ans donnant lieu au remboursement de 100 % du capital, pour une durée totale d’emprunt de vingt ans.

Enfin, l’article L. 31‑10‑6 du CCH impose que « le logement doit demeurer la résidence principale de l’emprunteur et ne peut être proposé à la location » pendant une période de six ans suivant la date de versement du prêt. Cette condition de résidence a été assouplie par la loi de finances pour 2016, puisqu’elle courrait auparavant pour l’intégralité de la durée de remboursement du prêt, soit potentiellement pendant vingt-cinq ans.

Quelques cas pratiques d’application du PTZ

Composition du ménage

Zone

Revenus annuels

Prix de l’achat

Montant PTZ

Période de différé

Durée totale du PTZ

Gain pour le ménage (1)

Célibataire

Paris

Zone A

30 000 €

180 000 €

60 000 €

5 ans

20 ans

10 800 €

Couple sans enfants

Brest

Zone B2

36 000 €

220 000 €

61 600 €

5 ans

20 ans

11 100 €

Couple avec deux enfants

Vesoul

Zone C

24 000 €

150 000 €

60 000 €

15 ans

25 ans

15 400 €

(1) Le gain a été calculé sur la base d’une hypothèse d’un prêt d’un montant et d’une durée équivalents, avec un taux d’intérêt annuel de 1,7 % sur 20 ans et 1,9 % sur 25 ans.

Source : commission des finances.

Synthèse des conditions du bénéfice du PTZ

Critères

PTZ pour les logements anciens

PTZ pour les logements neufs

Type d’opération

Acquisition par leurs occupants d’un logement ancien du parc social ou acquisition d’un logement ancien sous condition de la réalisation de travaux de rénovation d’un montant au moins égal à 25 % du montant total de l’opération

Construction ou acquisition d’un logement neuf, construit ou vendu en l’état futur d’achèvement, et n’ayant jamais fait l’objet d’une occupation

Acquisition d’un logement dans le cadre soit d’un contrat de location-accession, soit d’un bail réel solidaire

Localisation du logement

Sur l’ensemble du territoire

Condition de primo-accession

Uniquement pour la résidence principale en accession à la première propriété, sauf lorsque le bénéficiaire ou l’un des occupants du logement à titre principal est titulaire de la carte d’invalidité de deuxième ou de troisième catégorie, ou bénéficie de l’AEEH ou de l’AAH, ou a été victime d’une catastrophe ayant conduit à rendre inhabitable de manière définitive sa résidence principale

Condition de ressources

Sous condition de ressource, en fonction de la composition du ménage et de la localisation du logement dans un zonage géographique tenant compte du déséquilibre entre l’offre et la demande de logements (zones A, B1, B2 et C) : pour une personne seule, de 37 000 euros en zone A à 24 000 euros en zone C

Montant du prêt

Le montant du PTZ dépend d’une quotité (un pourcentage) appliquée au coût total de l’opération, dans la limite d’un plafond. La quotité est fixée à 40 % pour un logement neuf ou pour un logement ancien respectant la condition de travaux et à 10 % pour un logement ancien respectant la condition de vente du parc social à ses occupants. Le montant total de l’opération pris en compte pour le calcul du prêt ne peut être supérieur à un plafond fixé en fonction de la composition du ménage et de la localisation du logement dans un zonage géographique tenant compte du déséquilibre entre l’offre et la demande de logements (zones A, B1, B2 et C) : pour une personne seule, de 150 000 euros en zone A à 100 000 euros en zone C

Modalité de remboursement du prêt

En fonction des revenus et de la composition du ménage, ainsi que de la localisation du logement dans un zonage géographique tenant compte du déséquilibre entre l’offre et la demande de logements (zones A, B1, B2 et C) : durée du prêt de 20 à 25 ans avec une première période sans mensualité de 5 à 15 ans.

Source : commission des finances.

B.   L’effort financier consenti par les établissements de crédit est compensé par un crédit d’impôt sur les bénéfices

Les PTZ sont distribués par les établissements de crédits et les sociétés de financement habilités à cet effet par une convention avec l’État. Pour compenser le coût que représente l’attribution à certains ménages d’un PTZ, les établissements de crédits et les sociétés de financement bénéficient en retour d’un crédit d’impôt sur les bénéfices « égal à l’écart entre la somme actualisée des mensualités dues au titre du prêt ne portant pas intérêt et la somme actualisée des montants perçus au titre d’un prêt de mêmes montant et durée de remboursement, consenti à des conditions normales de taux à la date d’émission de l’offre de prêt ne portant pas intérêt » ([62]). Le crédit d’impôt permet de couvrir à la fois le coût de la ressource pour les établissements de crédit mais également une marge commerciale.

Il s’agit d’un crédit d’impôt sur les bénéfices, prévu par l’article 244 quater V du CGI, dont l’imputation sur les comptes de l’entreprise est répartie par fractions égales sur les cinq exercices suivant l’émission du prêt. Il « fait naître au profit de l’établissement de crédit ou la société de financement une créance, inaliénable et incessible, d’égal montant ».

L’État a donné mandat, par convention, à la Société de gestion du fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété (SGFGAS), pour recueillir les déclarations de PTZ effectuées par les banques. Cette dernière détermine les éléments de calcul du montant du crédit d’impôt afférent aux prêts accordés par l’établissement de crédit puis lui adresse le résultat de ce calcul au moyen d’une attestation lui permettant de remplir une déclaration fiscale spéciale. Elle assure également le suivi statistique des crédits d’impôt dont bénéficient les banques.

La dépense fiscale liée au crédit d’impôt fait l’objet d’un plafonnement dans la mesure où les conditions d’attribution et les modalités des prêts sont fixées par décret, auquel doit être joint une étude d’impact faisant « apparaître les mesures prises pour que le montant des crédits d’impôt afférents aux prêts ne portant pas intérêt émis sur une même période de douze mois ne dépasse pas 2,1 milliards d’euros ». Il s’agit d’un plafonnement de la dépense générationnelle liée aux PTZ émis au cours d’une même année, c’est-à-dire de la dépense fiscale qui correspond aux créances que l’État devra, par le biais du crédit d’impôt, rembourser aux banques pendant les cinq années suivant l’émission du PTZ. Les modalités du bénéfice du PTZ sont adaptées chaque année par décret afin de s’assurer que les barèmes fixés permettent de maîtriser la dépense générationnelle afférente au dispositif, notamment en cas de hausse soudaine des taux d’intérêt.

II.   Le contexte Économique et budgÉtaire

Après plusieurs années de faible mobilisation, les mesures mises en œuvre dans le cadre de la loi de finances pour 2016 ont conduit à une augmentation significative du nombre de PTZ émis. Cette hausse, couplée à une augmentation de la quotité moyenne du PTZ, a également conduit à faire progresser sensiblement le montant de la dépense fiscale associée.

A.   Principales caractéristiques des prêts à taux zéro émis

Le nombre de PTZ émis a atteint 114 943 en 2016 au lieu de 58 800 en 2015 et 43 167 en 2013, soit un quasi-doublement du nombre de prêts émis en moins d’un an (+ 95 %).

Outre l’effet conjoncturel lié à la baisse des taux d’intérêt, les principales raisons de cette forte hausse sont multiples :

– la hausse des plafonds de revenus de 36 000 à 37 000 euros qui a permis de rendre éligibles 8 577 PTZ supplémentaires ;

– l’extension à l’ensemble de la zone C du PTZ pour les logements anciens sous condition de travaux qui a permis de rendre éligibles 18 989 PTZ supplémentaires ;

– l’augmentation de la quotité du PTZ à 40 % pour toutes les tranches et quelle que soit la zone (impact sur le nombre de prêts non quantifiable).

Nombre de PTZ Émis ou mis en force En France métropolitaine

Année

2011

2012

2013

2014

2015

2016

PTZ émis

351 932

79 116

43 167

47 192

58 800

114 943

PTZ mis en force

266 677

122 614

59 178

48 342

59 766

96 804

Un PTZ émis correspond à l’émission d’une offre de prêt par la banque ; un PTZ mis en force correspond au déblocage du premier euro de capital par la banque ; des délais existent entre ces étapes ce qui conduit au fait qu’un prêt émis une année peut être mis en force au cours d’une année ultérieure.

Source : Société de gestion du fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété (SGFGAS).

Les PTZ sont principalement émis en zones tendues, puisque 59,7 % en 2016 et 63,7 % en 2015 des prêts ont été émis pour un logement situé en zones A, B1 ou B2. Cette part est en légère baisse du fait de la généralisation du PTZ pour les logements anciens à l’ensemble du territoire en 2016 : 40,4 % des PTZ ont été émis pour un logement situé en zone C en 2016 contre 36,4 % en 2015.

L’augmentation de la quotité du PTZ à 40 % pour toutes les tranches et quelle que soit la zone a conduit à une hausse sensible de la quotité moyenne entre 2015 et 2016. Pour rappel, le précédent dispositif en vigueur en décembre 2014 prévoyait une quotité, pour un logement neuf ou ancien, qui variait en fonction de la localisation du bien immobilier : 18 % pour la zone C, 21 % pour la zone B2 et 26 % pour la zone A et B1. Ainsi, la quotité moyenne et le montant moyen du PTZ ont sensiblement augmenté pour l’ensemble des zones géographiques : de 33,7 % pour un montant moyen du PTZ de 64 395 euros en 2016 contre 19,6 % pour un montant moyen du PTZ de 37 656 euros en 2015, soit une hausse du montant moyen du PTZ de près de 71 %. En revanche, le montant moyen de l’opération financée est en baisse de 0,6 % par rapport à 2015, et se situe en 2016 à 191 367 euros.

Répartition des PTZ par zone géographique en France métropolitaine en 2016 et en 2015

2016

Zone A

Zone B1

Zone B2

Zone C

Ensemble

PTZ émis

23 399

22 837

22 264

46 443

114 943

 part ensemble PTZ

20,4 %

19,9 %

19,4 %

40,4 %

100 %

Montant moyen de l’opération

234 410 €

204 590 €

182 908 €

167 233 €

191 367 €

Montant moyen du PTZ

77 823 €

70 175 €

61 353 €

56 246 €

64 395 €

Quotité du PTZ

33,6 %

34,6 %

34,3 %

34,6 %

33,7 %

 

2015

Zone A

Zone B1

Zone B2

Zone C

Ensemble

PTZ émis

14 384

12 640

10 386

21 390

58 800

 part ensemble PTZ

24,5 %

21,5 %

17,7 %

36,4 %

100 %

Montant moyen de l’opération

227 103 €

196 714 €

186 009 €

170 144 €

192 592 €

Montant moyen du PTZ

50 080 €

45 651 €

33 693 €

26 501 €

37 656 €

Quotité du PTZ

22,3 %

23,3 %

18,3 %

15,8 %

19,6 %

Source : SGFGAS.

Du fait de la hausse du nombre de PTZ émis ainsi que du montant moyen du PTZ, le montant prêté a atteint 7,4 milliards d’euros en 2016 (2,2 milliards d’euros en 2015) pour un montant total d’opération de 22 milliards d’euros (11,3 milliards d’euros en 2015), soit une hausse du montant total des opérations de 94 % par rapport à 2015.

Il convient également de comparer les principales caractéristiques des PTZ en fonction du type d’opération concerné :

– pour les PTZ concernant les logements neufs, près de 88 598 offres ont été émises en 2016 contre 55 554 offres en 2015, soit une progression de 59,5 % ;

– pour les PTZ concernant les logements anciens, près de 26 345 offres ont été émises en 2016 contre 3 246 offres en 2015, soit une multiplication par 8 du nombre de PTZ émis.

Ainsi, les PTZ pour les logements neufs représentent 77 % des PTZ émis en 2016 contre 94 % en 2015. La forte augmentation du nombre de PTZ pour les logements anciens résulte principalement de la généralisation en 2016 de ce dispositif à l’ensemble du territoire : en 2015, 97 % des PTZ pour les logements anciens ont été émis en zone C contre un peu moins de 60 % en 2016. En revanche, les PTZ pour les logements neufs sont principalement concentrés en 2015 comme en 2016 sur les zones à forte tension sur le marché immobilier (zones A, B1 et B2), puisque ces zones concentraient respectivement 64,4 % et 64,2 % des PTZ dans le neuf émis sur l’ensemble du territoire.

Principales caractéristiques des PTZ selon le type d’opération
en 2015 et en 2016

Année

2015

2016

Neuf

Ancien avec travaux

Neuf

Anciens avec travaux

Nombre de PTZ émis

55 554

3 246

88 598

26 345

Montant moyen des opérations (en euros)

196 723

114 060

205 579

144 655

Prix au m2 moyen (en euros)

2 429

1 160

2 503

1 542

RFR moyen (en euros)

25 238

19 876

25 987

21 866

Taille moyenne du ménage

2,6

2,2

2,6

2,4

Pourcentage par zone

En zone A

24,8

0

24,6

4,0

En zone B1

21,7

0,4

21,4

12,8

En zone B2

17,9

2,6

18,2

23,3

En zone C

35,5

97,0

35,7

59,9

Pourcentage par tranche (1)

En tranche 1

47,6

45,6

42,8

48,9

En tranche 2

13,0

8,7

12,1

9,7

En tranche 3

39,4

45,8

45,1

41,4

RFR : revenu fiscal de référence.

(1) Tranches applicables en 2016 permettant de déterminer les modalités de remboursement du PTZ.

Source : SGFGAS.

Du fait de la prépondérance du PTZ pour les logements neufs dans les zones tendues, les emprunteurs du PTZ sont principalement localisés dans les grands pôles urbains et leur couronne : en 2016, près de 77,4 % des prêts ont été effectués pour un logement situé dans une telle commune. Toutefois, le caractère urbain du PTZ décroît légèrement puisque cette part était de 80,1 % en 2015. Inversement, moins de 5,2 % des PTZ ont été émis dans des pôles urbains de taille moyenne ou petite en 2016 contre 4,6 % en 2015.

Nombre de PTZ selon le type d’opération et la catÉgorie de commune

(effectif)

Année

2015

2016

Neuf

Ancien avec travaux

Neuf

Anciens avec travaux

Grands pôles urbains (plus de 10 000 emplois)

27 704

1 413

44 353

10 301

Couronnes des grands pôles urbains

17 386

582

27 734

6 524

Communes multipolarisées des grandes aires urbaines

3 204

223

5 068

2 154

Moyens pôles (5 000 à 10 000 emplois)

959

66

1 534

859

Couronnes des moyens pôles

351

19

567

267

Petits pôles (moins de 5 000 emplois)

1 472

251

2 350

1 377

Couronnes des petits pôles

127

5

191

122

Autres communes multipolarisées

2 812

373

4 339

2 805

Communes isolées hors influence des pôles

1 539

314

2 462

1 936

Source : SGFGAS.

Part DE PTZ SELON LE TYPE D’OPÉRATION ET LA CATÉGORIE DE COMMUNE

(en %)

Année

2015

2016

Neuf

Ancien avec travaux

Neuf

Anciens avec travaux

Grands pôles urbains (plus de 10 000 emplois)

47,1

2,4

38,6

9,0

Couronnes des grands pôles urbains

29,6

1,0

24,1

5,7

Communes multipolarisées des grandes aires urbaines

5,4

0,4

4,4

1,9

Moyens pôles (5 000 à 10 000 emplois)

1,6

0,1

1,3

0,7

Couronnes des moyens pôles

0,6

0,0

0,5

0,2

Petits pôles (moins de 5 000 emplois)

2,5

0,4

2,0

1,2

Couronnes des petits pôles

0,2

0,0

0,2

0,1

Autres communes multipolarisées

4,8

0,6

3,8

2,4

Communes isolées hors influence des pôles

2,6

0,5

2,1

1,7

Ensemble

94,5

5,5

77,1

22,9

Source : SGFGAS.

Enfin, les principales catégories utilisatrices du PTZ en 2016 sont, par ordre décroissant, les employés (34,7 %), les professions intermédiaires (23,9 %), et les ouvriers (22,8 %). Au total, ces trois groupes constituent près de 81,4 % des bénéficiaires du PTZ. Le dispositif vise avant tout les ménages ayant des revenus compris entre 2 et 3 SMIC : ce ciblage n’a rien d’étonnant, dans la mesure où le PTZ ne constitue pas une aide sociale, mais un dispositif d’accession à la propriété centré sur les ménages qui disposent d’un certain niveau de pouvoir d’achat immobilier. Par conséquent, ce prêt a vocation à s’adresser à une gamme de primo-accédants assez large, même s’il est attribué sous conditions de ressources. On observe également une certaine stabilité des revenus des bénéficiaires du PTZ entre 2015 et 2016.

Répartition des emprunteurs selon leur revenu mensuel

Niveau de revenu

2015

2016

Effectif

Part

Effectif

Part

Revenu mensuel < 1 SMIC

155

0,3 %

485

0,5 %

1 SMIC ≤ Revenu mensuel < 2 SMIC

15 285

28,3 %

32 874

31,4 %

2 SMIC ≤ Revenu mensuel < 3 SMIC

24 380

45,2 %

44 339

42,4 %

3 SMIC ≤ Revenu mensuel < 4 SMIC

11 010

20,4 %

20 520

19,6 %

4 SMIC ≤ Revenu mensuel < 5 SMIC

2 273

4,2 %

4 659

4,5 %

Revenu mensuel ≥ 5 SMIC

859

1,6 %

1 751

1,6 %

Source : SGFGAS.

Le rapport sur les aides à l’accession à la propriété du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale souligne que ce ciblage sur les ménages aux revenus modestes et intermédiaires obéit à une logique économique particulière : le PTZ est en effet « un prêt complémentaire, qui permet de « solvabiliser » les opérations d’accession des ménages qui ont du mal à acquérir un logement, en raison des prix élevés de l’immobilier (…) mais qui disposent des ressources pour rembourser les mensualités de deux prêts » ([63]). Il conclut ainsi que « les équilibres sociaux du dispositif actuel, qui évite de cibler les ménages aux ressources faibles  car ce serait leur faire prendre des risques trop importants  et d’aider les catégories plus aisées, (…) sont satisfaisants » ([64]).

Toutefois, la Cour des comptes tire des conclusions différentes de la situation actuelle, et estime que « dans un objectif d’efficacité et d’efficience, les aides à l’accession pourraient tout d’abord être recentrées sur les ménages qui en ont le plus besoin pour accéder à la propriété », notamment en tenant compte des enjeux particuliers de l’accession à la propriété dans « les zones tendues » et les « centres anciens dégradés », situés en zones détendues ([65]). Pour la Cour, de telles mesures permettraient de recentrer le dispositif dans les zones où son efficacité est la plus forte, tout en maîtrisant la dépense fiscale associée.

B.   Coût unitaire moyen et dépense fiscale associée

Le coût unitaire moyen pour l’État d’une génération de PTZ était en 2016 de 13 009 euros par PTZ, soit une augmentation de 54 % par rapport à 2015 où le coût unitaire moyen s’élevait à 8 456 euros par PTZ. Il a ainsi doublé depuis sa mise en place en 2011, où il s’élevait à 6 592 euros.

Coût unitaire moyen pour l’État du PTZ

(en euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Coût unitaire moyen

6 592

7 769

14 127

12 900

8 456

13 009

Source : questionnaire budgétaire.

L’augmentation observée en 2013 résulte du recentrage du dispositif sur les ménages aux revenus modestes et intermédiaires et sur les zones tendues qui s’est traduit, pour un plafond de dépense générationnelle inchangé à 820 millions d’euros, par des effectifs plus réduits mais par un montant moyen du PTZ renforcé pour les ménages bénéficiaires. Puis, le coût unitaire diminue sensiblement en 2015, principalement du fait de la diminution des taux d’intérêt et des modifications significatives apportées au barème. Enfin, en 2016, le coût moyen est en forte augmentation conformément aux effets attendu de la réforme mise en œuvre, en particulier de la hausse de la quotité pour l’ensemble des zones à 40 %.

Évolution du coût du PTZ en fonction des modifications du dispositif

Année

Évolution du dispositif

Coût unitaire moyen

(en euros)

Coût générationnel

(en euros)

Nombre de prêts octroyés

2011

Mise en place du dispositif du PTZ

6 592

2 298

351 932

2012

Instauration d’une condition de ressources

pour le PTZ et suppression du PTZ ancien en dehors du logement social

7 769

616

79 116

2013

Recentrage réglementaire sur les ménages aux revenus modestes et intermédiaires

14 127

616

43 167

2014

Conditions identiques à celles de 2013

12 900

605

47 192

2015

Modifications apportées au barème (baisse de l’aide aux zones tendues) et extension du PTZ dans l’ancien sous condition de travaux dans 5 920 communes

8 456

506

58 800

2016

Élargissement du PTZ (quotité de 40 % et

ouverture à l’ancien avec travaux sur tout le

territoire)

13 009

1 519

114 943

Source : Mme Audrey Linkenheld et M. Michel Piron, Rapport d’information du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation des aides à l’accession à la propriété, XIVe législature, n° 4536, 22 février 2017, page 31.

La compensation de l’absence d’intérêts sur le montant du prêt fait l’objet d’un crédit d’impôt en faveur des établissements de crédit, étalé sur cinq ans. Il convient de différencier la dépense fiscale par année d’imputation de la dépense fiscale par génération de prêts émis ([66]).

La dépense générationnelle en 2016 s’élevait à 1,52 milliard d’euros au lieu de 506 millions d’euros en 2015, soit un quasi-triplement du coût générationnel de la dépense fiscale. Elle reste toutefois très inférieure au plafond fixé par l’article 244 quater V du CGI qui dispose que « le montant des crédits d’impôt afférents aux prêts ne portant pas intérêt émis sur une même période de douze mois ne [doit pas dépasser] 2,1 milliards d’euros ».

Crédit d’impôt du PTZ par génération et par type d’opération

(en millions d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Crédit d’impôt par génération

2 298

616

616

605

506

1 519

 dont ancien

1 354

1

1

2,5

11

266

 dont neuf

944

615

615

603

495

1 253

Plafond (1)

2 600

820

820

820

1 000

2 100

(1) L’article 244 quater V du code général des impôts fixe un plafond de dépense générationnelle pour le PTZ.

Source : questionnaire budgétaire.

Le montant du crédit d’impôt imputé chaque année diffère de la dépense générationnelle, du fait d’une période de temps avant la mise en force du prêt ainsi que de l’étalement de la créance sur les cinq exercices suivant la date d’émission du prêt : il s’élevait à 936 millions d’euros en 2016 contre 1 249 millions d’euros en 2015. Il reflète principalement le coût cumulé des PTZ émis au cours des cinq dernières années.

Crédit d’impôt du PTZ par année d’imputation

(en millions d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Crédit d’impôt

1 562

1 726

1 618

1 433

1 249

936

Source : questionnaire budgétaire.

III.   Le dispositif proposÉ

En l’absence de nouvelle mesure législative, le PTZ prend fin au 31 décembre 2017. Or, il s’agit de l’un des principaux dispositifs favorisant l’accession des ménages à la propriété. Il apporte en effet « une aide aux ménages à revenus moyens et intermédiaires qui souhaitent renforcer leur enveloppe d’acquisition » ([67]).

Ainsi, il est proposé, par le II du présent article, de proroger le dispositif pour quatre années supplémentaires, soit jusqu’au 31 décembre 2021.

Il est également proposé, d’une part, de recentrer l’aide à l’accession des ménages et le soutien à la production de logements neufs dans les zones tendues et le soutien à la rénovation de logements anciens dans les zones détendues, d’autre part, de modifier les critères de dérogation à la condition de primo-accession pour certains cas d’invalidité.

A.   Un recentrage en fonction des difficultés d’accès aux logements constatées dans certaines zones

Il s’agit, par cet article, de répondre à l’engagement du Président de la République d’apporter une « réponse différenciée » à chacun des territoires en fonction de ses besoins en matière de logements : « Pour ce qui est du logement, là aussi, c’est une réponse différenciée que nous devons apporter. Nous le savons bien, les politiques qui consistent à inciter à la construction de logements partout sur le territoire avec des outils fiscaux extrêmement chers ne fonctionnent plus. » ([68]) Il fait ainsi siennes les recommandations formulées par la Cour des comptes en faveur d’un recentrage du PTZ vers les ménages qui en ont le plus besoin ([69]).

À cette fin, il est proposé une modification des critères d’éligibilité du PTZ pour les logements neufs et anciens en fonction des difficultés d’accès aux logements constatées dans certaines zones géographiques.

À cette fin, le A du I du présent article subordonne :

– à partir du 1er janvier 2018, les PTZ pour les logements neufs à la localisation du logement dans les communes classées dans une zone géographique se caractérisant par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement dans le parc résidentiel existant ; à partir du 1er janvier 2019, ce déséquilibre devra être important ;

– les PTZ pour les logements anciens à la localisation du logement dans les communes classées dans une zone géographique ne se caractérisant pas par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logement.

Un arrêté devra établir à cette fin « le classement des communes par zone géographique, en fonction principalement des besoins en logements ainsi que du montant des prix de vente et des loyers de l’immobilier résidentiel » et préciser lesquelles des zones géographiques satisfont aux conditions de localisation. Ainsi, le zonage en vigueur pourrait être amené à évoluer afin de tenir compte de ces nouveaux critères de tension sur le parc résidentiel, à savoir les besoins en logements, le montant des prix de vente et le montant des loyers de l’immobilier résidentiel.

Ainsi, le PTZ pour les logements neufs est progressivement recentré dans les zones les plus tendues, tandis que le PTZ pour les logements anciens est recentré sur les zones détendues.

Trois critères sont ainsi retenus afin de définir ces zones géographiques, avec une application échelonnée dans le temps pour l’un d’entre eux :

– concernant les PTZ pour les logements neufs, à partir du 1er janvier 2018, un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements, soit les zones actuelles A, B1 et B2 ;

– concernant les PTZ pour les logements neufs, à partir du 1er janvier 2019, un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements, soit les zones actuelles A et B1 ;

– concernant les PTZ pour les logements anciens, à partir du 1er janvier 2018, une zone géographique ne se caractérisant pas par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements, soit les zones actuelles B2 et C.

Évolution proposÉe par le projet de loi des critÈres gÉographiques d’ÉligibilitÉ au PTZ

Zone

2015

2016-2017

2018

2019

Zone A et A bis

PTZ neufs et, pour 5 920 communes, PTZ anciens

PTZ neufs
et anciens

PTZ neufs

PTZ neufs

Zone B1

Zone B2

PTZ neufs
et anciens

PTZ anciens

Zone C

PTZ anciens

Source : commission des finances.

Le Président de la République a toutefois annoncé, à l’occasion des « 24 heures du bâtiment » de la Fédération française du bâtiment du 6 octobre 2017, le maintien du PTZ dans le neuf en zones B2 et C pendant deux années supplémentaires, soit jusqu’en 2019 inclus, mais avec une quotité de prêt inférieure à la quotité actuelle (20 % au lieu de 40 % du coût de l’opération actuellement). Le Rapporteur général propose dès lors, au stade de la commission, la mise en œuvre de cette annonce présidentielle en prolongeant le PTZ dans le neuf pour toutes les zones pendant deux années supplémentaires, tout en maintenant, indépendamment du zonage, le PTZ neufs pour les communes signataires d’un contrat de redynamisation de sites de défense (CRDS), dans la mesure où de nombreux sites de défense y ont été rasés pour réaliser des logements neufs.

Nouvelle évolution des critÈres gÉographiques d’ÉligibilitÉ au PTZ
à la suite de l’annonce du Président de la République

 

2015

2016-2017

2018-2019

2020

Zone A et A bis

PTZ neufs et pour 5 920 communes PTZ anciens

PTZ neufs et anciens

PTZ neufs

PTZ neufs

Zone B1

Zone B2

PTZ neufs
et anciens

PTZ anciens

Zone C

Source : commission des finances.

Enfin, le III du présent article prévoit la remise au Parlement d’un rapport d’évaluation du dispositif du PTZ et de la dépense fiscale associée avant le 31 décembre 2019. Ce rapport serait complémentaire de celui déjà prévu par l’article 244 quater V qui prévoit la remise d’une étude d’impact, jointe au décret fixant les conditions d’attribution et les modalités des PTZ, faisant « apparaître les mesures prises pour que le montant des crédits d’impôt (…) ne dépasse pas 2,1 milliards d’euros ». Le Rapporteur général propose qu’en complément de ce rapport, le Gouvernement remette également au Parlement un rapport d’évaluation des zones géographiques retenues pour l’attribution du PTZ avant le 1er septembre 2018, à la suite de la définition du nouveau zonage qui devrait intervenir en début d’année prochaine.

B.   Une modification des critères de dérogation à la condition de primo-accession pour certains cas d’invalidité

En parallèle, le présent article étend les critères de dérogation à la condition de primo-accession pour certains cas d’invalidité.

Pour rappel, l’article L. 31‑10‑3 du CCH précise que cette condition n’est pas exigée lorsque le bénéficiaire ou l’un des occupants du logement à titre principal est titulaire de la carte d’invalidité de deuxième ou de troisième catégorie, qui concerne soit les invalides absolument incapables d’exercer une profession quelconque, soit les invalides qui, étant absolument incapables d’exercer une profession, sont dans l’obligation d’avoir recours à l’assistance d’une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie. Il s’agit de catégories notamment utilisées en vue de la détermination du montant de la pension d’invalidité versée dans le cadre de l’assurance invalidité.

La loi pour une République numérique ([70]) a mis en place au 1er janvier 2017 une carte « mobilité inclusion » remplaçant les cartes de priorité, d’invalidité et de stationnement. Le nouvel article L. 241‑3 du code de l’action sociale et des familles dispose que la mention « invalidité » de cette nouvelle carte « mobilité inclusion » est attribuée à toute personne dont le taux d’incapacité permanente est au moins de 80 % ou qui a été classée dans la troisième catégorie par l’article L. 341‑4 du code de la sécurité sociale, qui concerne les invalides qui, étant absolument incapables d’exercer une profession, sont dans l’obligation d’avoir recours à l’assistance d’une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie.

La disposition étend ainsi le bénéfice de la dérogation à la primo-accession aux personnes invalides dont le taux d’incapacité permanente est au moins de 80 % sans être pour autant classées dans la deuxième ou troisième catégorie précédemment citée.

Par souci de cohérence, le B du I étend le bénéfice de la dérogation à la condition de primo-accession à l’ensemble des personnes titulaires de la carte « mobilité inclusion » comportant la mention « invalidité ». Le C du I effectue les coordinations nécessaires pour l’application de la présente dérogation à Mayotte.

IV.   L’impact Économique et budgétaire attendu

L’objectif de la mesure de reconduction du dispositif est de maintenir pour quatre années supplémentaires un dispositif de soutien à l’accession des ménages aux revenus modestes et intermédiaires.

Par ailleurs, dans un souci de recentrage de la politique de soutien à la demande de logements neufs et de rénovation des logements anciens, le PTZ dans le neuf est progressivement recentré sur les zones tendues et le PTZ dans l’ancien est restreint aux zones détendues. La mesure de recentrage du neuf sur les zones tendues, (zones A, B1 et B2 en 2018 ; puis zones A et B1 en 2019) doit permettre de concentrer l’aide à l’accession des ménages sur les territoires où il est le plus difficile d’accéder à un logement en raison de prix de l’immobilier trop élevés. Il permet également de soutenir l’offre de logements neufs et donc de soutenir la production, ce qui conduit à détendre le marché locatif en accroissant l’offre de logements disponibles. Toutefois, afin d’éviter une baisse trop brutale de l’activité de constructions neuves dans les zones rurales ou peu tendues, le Gouvernement s’est engagé à maintenir pour deux années supplémentaires le PTZ dans le neuf pour les zones B2 et C, mais avec une quotité inférieure.

La mesure de recentrage de l’achat d’un logement ancien avec travaux vers les zones détendues (zones C et B2) répond à l’objectif de concentrer la rénovation dans les zones où l’offre de logements existants est déjà suffisante, mais nécessite une remise à niveau en termes qualitatifs. La mesure permet de soutenir la réhabilitation des logements existants tout en limitant la consommation d’espaces non urbanisés.

À partir du nombre de PTZ émis au second semestre de l’année 2017, le recentrage initialement prévu pour les logements neufs aurait conduit à sortir du dispositif 8 227 prêts (soit 36 % des prêts neufs émis) pour la zone C, puis 3 981 prêts (17 % des prêts dans le neuf émis) pour la zone B2. Le recentrage prévu des logements anciens sur les zones B2 et C aurait conduit à sortir du dispositif près de 1 375 prêts (19,5 % des prêts dans l’ancien émis).

Effectif par zonage et type d’opération au second semestre 2017

Source : SGFGAS.

Ce recentrage sera éventuellement accompagné d’une modification par voie réglementaire des modalités d’octroi du PTZ afin d’adapter en conséquence les plafonds de ressources, les quotités du prêt, les plafonds du coût de l’opération, les différentes tranches applicables et les modalités de remboursement. Une baisse de la quotité dans les zones B2 et C pour les logements neufs a été annoncée par le Gouvernement.

D’un point de vue budgétaire, le décalage entre l’offre de prêt et le versement effectif des fonds, ainsi que l’étalement de la créance sur les cinq années suivant l’émission de prêt, conduit à un report dans le temps de la dépense fiscale associée. Cette dernière croît également dans le temps, du fait de l’accumulation progressive des différentes générations de prêts émises à partir de 2018. L’incidence budgétaire du présent article est ainsi évaluée pour l’ensemble du quinquennat à 2,035 milliards d’euros (par rapport à la non-prolongation du dispositif au-delà de 2017 ; sans tenir compte des annonces présidentielles).

*

*     *

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF606 de M. François Pupponi, II-CF700 du Rapporteur général et II-CF471 de M. Jean-Luc Lagleize, les amendements identiques II-CF411 de Mme Véronique Louwagie, II-CF414 de M. Thibault Bazin et II-CF432 de M. Marc Le Fur, ainsi que les amendements II-CF202 de M. Julien Dive et IICF385 de Mme Valérie Lacroute.

M. François Pupponi. Mon amendement est le premier d’une série portant sur le prêt à taux zéro (PTZ). Le projet de loi de finances prévoit la suppression du PTZ dans le neuf dans les zones B2 et C, ce qui est une erreur puisque 53 % des opérations y sont effectuées grâce au PTZ – soit 47 500 logements en 2016. Autrement dit, le PTZ fonctionne bien dans les zones B2 et C, puisque c’est précisément là qu’il est le plus utilisé. Je vous propose, par l’amendement II-CF606, de l’y maintenir.

M. le Rapporteur général. Si j’approuve l’esprit de cet amendement, il pose néanmoins un réel problème puisqu’il revient à supprimer l’intégralité de la réforme. Il me semble plus intelligent d’adopter l’amendement II-CF700 qui suit, plus raisonnable, par lequel je propose le maintien du PTZ dans les logements neufs pour les zones B2 et C pendant deux ans, conformément à l’engagement clair du Président de la République. J’y ajoute les communes concernées par un contrat de redynamisation des sites de défense (CRSD), où des logements neufs ont été construits après que des casernes ont été rasées.

Je vous propose donc de retirer votre amendement au profit du mien, sans quoi j’y serais défavorable.

M. Thibault Bazin. Pour la lisibilité de nos débats, monsieur le Rapporteur général, pouvez-vous préciser si l’adoption de votre amendement ferait tomber les amendements suivants sur le même sujet ?

M. le Rapporteur général. Oui.

M. François Pupponi. Je pourrais éventuellement retirer mon amendement sous réserve d’une précision : votre amendement, monsieur le Rapporteur général, modifiera-t-il également les quotités du PTZ ?

M. le Rapporteur général. Non, la fixation des quotités relève du domaine réglementaire.

M. le président Éric Woerth. Je vous propose, monsieur le Rapporteur général, de présenter dès maintenant votre amendement II-CF700, étant précisé que son adoption ferait tomber tous les autres amendements à l’article 40 à l’exception des amendements II-CF122, II‑CF124, II-CF701, II-CF702, II-CF488, II-CF622 et II-CF609.

M. le Rapporteur général. Lors des « 24 heures du bâtiment », le Président de la République a annoncé le maintien du PTZ dans le logement neuf en zones B2 et C pendant deux années supplémentaires, c’est-à-dire jusqu’au 31 décembre 2019. L’amendement II‑CF700 vise donc à appliquer cet engagement présidentiel tout en maintenant, indépendamment du zonage, les PTZ dans le logement neuf sur le territoire des communes signataires d’un CRSD.

Les prêts à taux zéro dans les logements neufs seront ainsi maintenus dans toutes les zones pendant deux années supplémentaires, puis dans les zones A et B1 ainsi que les communes signataires d’un CRSD à partir du 1er janvier 2020. Pour les logements anciens, les PTZ seront recentrés sur les zones B2 et C dès le 1er janvier 2018. C’est une solution de compromis qui offre une sortie progressive et intelligente du mécanisme tout en le recentrant à terme vers les zones les plus adaptées.

Je rappelle que je propose la remise d’un rapport à l’automne 2018 sur le zonage géographique pour que nous puissions résoudre cette question trop complexe.

M. François Pupponi. J’entends votre explication, monsieur le Rapporteur général, mais s’agissant du logement ancien, elle me semble contradictoire avec la volonté affichée par le Gouvernement de favoriser l’accession sociale à la propriété, en particulier parmi les locataires de logements sociaux. Chaque logement social vendu permet d’en construire trois nouveaux. Or, pour favoriser l’accession sociale à la propriété des locataires occupants, il faut que ceux-ci puissent bénéficier du PTZ dans le logement ancien – ce qu’il est par définition puisqu’ils l’occupent. Ne peut-on donc pas, dans un premier temps, maintenir le PTZ dans l’ancien dans les cas où un locataire devient acquéreur de son logement social à la demande du bailleur ?

M. Thibault Bazin. L’amendement du Rapporteur général ne me convient pas du tout. D’une part, une prolongation de deux ans seulement ne suffit pas. D’autre part, recentrer le périmètre du PTZ pose un problème de fond lié à la notion de déséquilibre important entre l’offre et la demande. En zone rurale ou rurbaine, la possibilité de construire des logements neufs impose une pression sur l’ancien et crée un cercle vertueux. En Lorraine, par exemple, 98 % des logements seront touchés par vos dispositions. La vraie question est celle de l’accès au PTZ. Il faut offrir aux familles ayant des revenus modestes la chance d’accéder à la propriété sur tout le territoire français, car ces familles sont souvent très éloignées des zones où vous entendez recentrer la mesure. C’est pourquoi cet amendement ne peut pas, selon moi, être accepté en l’état.

M. le Rapporteur général. L’idée est de maintenir le PTZ dans les logements neufs pendant deux années supplémentaires, et ce dans toutes les zones, en attendant le rapport sur le zonage.

Permettez-moi, monsieur Pupponi, de citer le projet de loi de finances : « Lorsque le logement est ancien, les prêts sont octroyés sous condition de vente du parc social à ses occupants. » La condition de localisation du logement dans une zone géographique ne s’applique pas dans ce cas.

M. Marc Le Fur. J’ai consulté l’ensemble des agences bancaires, notamment du Crédit agricole et du Crédit mutuel, de ma circonscription : l’essentiel des prêts à l’accession est associé à un PTZ, complété par un prêt au taux du marché. En cas de suppression du PTZ, à quoi s’ajoutera la disparition des APL « accession », nous assisterons à l’effondrement de l’accession des personnes de classe modeste moyenne dans les zones rurales. Vous nous proposez un amendement qui revient à dire « Encore un instant, monsieur le bourreau ! », puisqu’il accorde une courte prorogation.

En outre, vous ne touchez pas aux quotités du PTZ, au motif qu’ils relèvent du domaine réglementaire. La quotité maximale est de 40 % de la valeur de l’opération ; il semble qu’elle passerait à 20 %, ce qui change tout. Les taux du marché, en effet, peuvent remonter, ce qui aggravera les difficultés de financement des ménages.

Mme Christine Pires-Beaune. Essayons de bien comprendre ce sur quoi nous allons voter : le PTZ ne disparaît pas dans le logement ancien lorsque les prêts sont octroyés sous condition de vente du parc social, indépendamment de la question du zonage. Je suppose cependant que dans la mesure où il est revu pour le « Pinel », le zonage sera également revu pour le PTZ ?

M. le Rapporteur général. En effet, c’est l’objet de l’un des amendements en discussion.

Mme Véronique Louwagie. N’aurions-nous pas intérêt à attendre la nouvelle carte du zonage pour en comprendre toutes les conséquences avec clarté pour ensuite, le cas échéant, revoir le dispositif ?

D’autre part, l’amendement du Rapporteur général est un moindre mal par rapport à la version initiale de l’article 40 mais il n’est pas satisfaisant car le PTZ, dans de nombreuses situations, est l’élément déclencheur de l’accès à la propriété. Or, on en prive les intéressés, alors qu’il était parfois l’élément qui permettait de faire accepter un dossier par une banque.

M. Denis Sommer. J’ai bien compris que le PTZ dans le neuf serait maintenu jusqu’à la fin de 2019, mais je m’interroge sur les communes dans lesquelles certains quartiers relèvent de la politique de la ville. Les processus de rénovation urbaine et d’accompagnement social engagés depuis plusieurs années vont se poursuivre. La mixité sociale est absolument primordiale ; c’est même le premier objectif de l’ANRU. Or, en matière de mixité sociale, on constate que les objectifs n’ont été atteints nulle part ou presque, pour toutes sortes de raisons. Quoi qu’il en soit, la question de l’accession sociale à la propriété dans l’ancien et dans le neuf est essentielle dans les quartiers relevant de l’ANRU comme dans leurs périphéries, afin de dégager des espaces pour poursuivre le processus de rénovation urbaine.

En clair, dans les communes où se trouvent des quartiers qui relèvent de la politique de la ville, il faut prolonger cette mesure au-delà de décembre 2019, parce que les délais de commercialisation sont beaucoup plus longs qu’ailleurs et les délais de construction sont généralement de dix-huit à vingt-quatre mois. Autrement dit, en cas d’interruption à la fin 2019 du dispositif du PTZ dans le neuf, certains projets pour lesquels des dossiers sont constitués et des permis de construire octroyés aujourd’hui ne pourront pas bénéficier du dispositif. C’est pourquoi les investisseurs renoncent déjà à certains projets. Si la mesure cesse à la fin 2019, certaines villes connaîtront une panne de projets ; voilà la réalité !

Mme Sylvia Pinel. Cette mesure est très importante et, par son amendement, le Rapporteur général s’emploie à réparer les erreurs annoncées. Le problème qui se pose, en réalité, ne relève guère du domaine législatif, puisque le Rapporteur général entend rétablir le PTZ dans le logement neuf ; l’essentiel est plutôt de savoir si les quotités qui s’appliquaient jusqu’ici au PTZ seront maintenues ou non. C’est ce prêt qui, en effet, permet de solvabiliser les ménages et, ainsi, de favoriser la mixité sociale qu’évoquait M. Sommer à l’instant.

Pouvez-vous donc nous confirmer, monsieur le Rapporteur général, que cet amendement se contentera de respecter les annonces du Président de la République en ramenant de 40 % à 20 % la quotité du PTZ en zones B2 et C ? Dans ce cas, avec la suppression de l’APL « accession », le dispositif change complètement. Je précise qu’en l’état, la loi fixe à 40 % la quotité maximale.

M. Fabien Di Filippo. Je peine à comprendre pourquoi, s’agissant du PTZ, on place sur deux plans totalement différents les zones rurales et les zones urbaines en prétendant que le foncier est moins cher dans les premières. C’est méconnaître complètement les contraintes de la ruralité, tant en matière de difficultés économiques que de niveau de vie. Les conditions du PTZ devraient être strictement équivalentes dans les zones rurales et urbaines et le PTZ dans le neuf devrait être prolongé bien au-delà de 2019 pour que la ruralité ait tout simplement les mêmes chances de se développer que les grandes agglomérations.

M. le Rapporteur général. La question des quotités, que Mme Pinel et plusieurs autres ont soulevée, relève du domaine réglementaire. Je vous invite donc à poser la question en séance au ministre, car c’est à lui de s’engager sur ce sujet – dont je suis conscient qu’il est extrêmement important – afin que nous obtenions des réponses très claires.

S’agissant du zonage et du sous-zonage, je proposerai, comme sur le dispositif « Pinel », qu’un rapport fasse le point sur ces questions aberrantes. Les notions de zones tendues et non tendues, par exemple, sont très particulières : certaines villes de même taille situées dans un même bassin d’emploi ne sont pourtant pas classées dans la même catégorie ; ailleurs, tantôt les agglomérations sont retenues avec les villes, tantôt elles ne le sont pas. Il arrive même que des communes de moins de 500 habitants soient classées dans la catégorie B2.

En clair, il faut revoir toutes ces questions de zonage. Je vous propose donc qu’un rapport soit rédigé sur cette question en même temps que celui que Mme Pinel a demandé sur le dispositif qui porte son nom. Nous nous calerons ensuite sur la volonté du Gouvernement d’apporter des modifications à la problématique du zonage, qui est devenue confuse à l’excès.

M. le président Éric Woerth. Une précision : le PTZ couvrira-t-il le logement ancien dans toutes les zones, tendues ou non, comme c’est déjà le cas ? Autrement dit, le dispositif restera-t-il inchangé dans l’ancien ?

M. le Rapporteur général. Attention : le texte du projet de loi exclut les zones A et B1 pour les PTZ dans les logements anciens octroyés sous condition de travaux.

M. le président Éric Woerth. Le logement ancien ne bénéficiera plus du PTZ dans les zones tendues, où le PTZ ne s’appliquera qu’au logement neuf. C’est un changement important par rapport à ce qui existe.

M. François Pupponi. Le logement ancien n’est plus couvert dans les zones tendues. Le Gouvernement annonce pourtant son intention de favoriser l’accession sociale à la propriété pour les locataires occupant des logements sociaux – les bailleurs, encore une fois, pouvant construire en moyenne trois logements neufs pour chaque logement vendu – et, dans le même temps, il supprime la disposition qui permet précisément de devenir propriétaire ! Finissons-en avec cette schizophrénie. Si l’on veut favoriser l’accession sociale à la propriété, y compris dans le parc existant, pour que les bailleurs perçoivent des recettes, alors il ne faut pas supprimer le PTZ dans le logement ancien en zones tendues et, dans le même temps, l’APL « accession » : c’est complètement contradictoire !

M. le Rapporteur général. La vente du parc social à ses occupants dans l’ancien n’est pas concernée par le zonage.

M. François Pupponi. Pourtant, le PTZ est supprimé dans le logement ancien en zones tendues !

M. le Rapporteur général. En cas de rachat d’un logement social par le locataire occupant, le prêt fonctionne.

M. Marc Le Fur. Le PTZ est dont possible en cas d’achat d’un HLM ?

M. le Rapporteur général. Par ses occupants, oui. Je conviens que les articles de cette sorte ne soient pas les plus lisibles, mais je vous cite, de nouveau, l’alinéa 5 de l’article 40 : « Lorsque le logement est ancien, les prêts sont octroyés sous condition de vente du parc social à ses occupants ou sous condition de travaux dans les communes classées dans une zone géographique ».

M. François Pupponi. Autrement dit, ils ne sont pas octroyés dans toutes les zones !

M. le Rapporteur général. Vous doutez de la clarté du « ou » et vous n’avez pas tort. L’intention du Gouvernement n’est pas, me semble-t-il, de soumettre la vente du parc social à ses occupants à des conditions de zonage géographique. Nous déposerons si nécessaire un amendement de précision en séance publique.

Mme Amélie de Montchalin. De même, il sera très utile – et je m’y emploierai – que le Gouvernement nous présente cet article avec l’ensemble des conditions nouvelles sous la forme d’un tableau clair, de telle sorte que l’ensemble des citoyens et des élus comprennent bien de quelle situation ils relèveront à partir de l’année prochaine et des suivantes. Nous demanderons une communication non seulement juridique, mais aussi explicative.

M. le président Éric Woerth. Cela semble nécessaire, en effet.

M. Marc Le Fur. Ce que nous comprenons envoie un message extrêmement grave ! Le monde rural aura donc le droit de conduire des opérations dans le logement ancien, mais ne pourra plus construire ; la situation sera figée. Au contraire, le monde des métropoles aura le monopole des constructions nouvelles.

Mme Amélie de Montchalin. Sauf dans le logement social !

M. Marc Le Fur. C’est encore plus grave que ce que je pensais initialement ! Vous êtes en train d’annoncer que vous spécialisez le développement urbain dans les métropoles ; les autres zones, elles, ont bien le droit de réhabiliter les masures, mais pas davantage ! C’est une logique extrêmement grave contre laquelle je m’inscris en faux.

M. le Rapporteur général. Mon amendement II-CF700 maintient pendant deux années supplémentaires le PTZ dans les logements neufs en zones B2 et C.

M. le président Éric Woerth. En effet, l’amendement préserve la situation actuelle pendant deux ans hors logements anciens.

Mme Amélie de Montchalin. Je suis surprise, monsieur Le Fur : dans l’hémicycle, vous nous dites qu’il faut revitaliser l’existant dans les centres-bourgs. Précisément, nous faisons le choix d’encourager la rénovation, l’entretien et l’achat dans le logement ancien en zones B2 et C.

M. Marc Le Fur. Vous choisissez pour les autres !

Mme Amélie de Montchalin. Pas du tout ! Je viens de la même France que vous – de Picardie, des bourgs de l’Essonne. Les noms d’oiseaux n’ont pas leur place dans cette commission. Nous faisons un choix politique.

M. Marc Le Fur. Très politique !

Mme Amélie de Montchalin. C’est un choix qui vise à donner les moyens de rénover l’existant dans les zones « détendues » en faveur des centres-bourgs, notamment.

M. Julien Aubert. Je peine à comprendre l’articulation de cette politique avec la politique de maîtrise de l’énergie. Chacun sait en effet où se trouvent les passoires énergétiques. J’ai l’impression qu’il existe deux France. Plutôt que de chercher des mesures qui garantiraient l’égalité des Français face au bénéfice de l’action publique et la mise à niveau de l’immobilier, nous créons un système à deux vitesses. De surcroît, notre politique en matière d’immobilier me semble incohérente avec le message que la majorité s’emploie à faire passer sur l’efficacité énergétique et le pouvoir d’achat des plus pauvres, dont on sait qu’ils habitent dans des passoires énergétiques. Ce n’est pas en maintenant les gens dans des logements anciens en zones rurales, malgré les réhabilitations, que nous susciteront des économies de chauffage !

M. le président Éric Woerth. Le CITE pose également un problème, en effet.

Mme Sylvia Pinel. Je ne comprends pas la volonté que manifeste la majorité d’opposer les dispositifs entre eux. Nous avons tout à la fois besoin de rénovation et de construction. Nous partageons ces objectifs, mais nous ne résoudrons pas le problème de la fluidité des parcours résidentiels, de l’accession sociale à la propriété en s’autocensurant et en limitant certaines mesures qui ont fait leurs preuves. Je veux bien entendre tous les arguments invoqués ce matin, mais les chiffres sont clairs : depuis que ces dispositifs existent, ils ont permis de relancer la construction et la rénovation et de lutter contre le clivage territorial. L’essentiel est de maintenir le PTZ dans les logements neufs et anciens en conservant le zonage tel qu’il existe. Encore une fois, la question que le Gouvernement devra préciser est celle de la quotité du PTZ, car c’est cela qui permet de solvabiliser les ménages.

M. François Pupponi. Les collectivités locales déposent actuellement leurs dossiers de convention avec l’ANRU. L’ANRU et l’État souhaitent favoriser l’accession sociale à la propriété pour éviter la concentration de logements sociaux ; dans le même temps, les dispositifs qui permettent l’accession sont supprimés ! Sans doute faudra-t-il donc sous-amender votre amendement, monsieur le Rapporteur général, en précisant que le PTZ est maintenu jusqu’en 2024 dans les zones relevant de l’ANRU. On ne saurait en effet encourager les gens à privilégier l’accession sur le logement social tout en supprimant les PTZ dans les quartiers concernés !

La commission rejette l’amendement II-CF606.

Puis elle adopte l’amendement II-CF700 (amendement  II-1496).

En conséquence, les amendements II-CF471, II-CF411, II-CF414, IICF432, IICF202 et II-CF385, ainsi que les amendements II-CF635 de Mme Sylvia Pinel, IICF393 de Mme Stéphanie Do, II-CF330 et II-CF350 de Mme Émilie Bonnivard, II-CF607 de M. François Pupponi, II-CF434 de M. JeanLouis Bricout, II-CF322 de Mme Émilie Bonnivard, II-CF591 de M. Marc Le Fur, II-CF469 de M Jean-Noël Barrot, II-CF185 de M. Christophe Naegelen, IICF517, II-CF518, II-CF520 et II-CF521 de M. Jean-Paul Mattei, IICF123 de M Denis Sommer, II-CF637 de Mme Sylvia Pinel, II-CF47 de M. Martial Saddier, II-CF143 de M. Raphaël Schellenberger, II-CF470 de M. Jean-Noël Barrot, II-CF186 de M. Christophe Naegelen et II-CF144 de M Raphaël Schellenberger tombent.

La commission est saisie de l’amendement II-CF122 de M. Denis Sommer.

M. Denis Sommer. Je l’ai défendu lors de la discussion précédente.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement IICF124 de M. Denis Sommer.

Elle se saisit ensuite de l’amendement II-CF701 du Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. C’est l’amendement par lequel je demande au Gouvernement de remettre avant le 1er septembre 2018 un rapport d’évaluation des zones géographiques retenues pour l’attribution du PTZ.

La commission adopte l’amendement (amendement n° II-1497).

Puis elle examine l’amendement II-CF702 du Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Il s’agit d’avancer au 1er septembre la date de remise du rapport d’évaluation du dispositif du PTZ pour que nous puissions l’étudier avant d’examiner le projet de loi de finances.

La commission adopte l’amendement (amendement n° II-1498).

Elle examine ensuite l’amendement II-CF488 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Nous proposons que la réforme du PTZ ne s’applique pas au territoire de la collectivité de Corse et que, à compter du 1er janvier 2021, l’Assemblée de Corse soit saisie pour avis des suites données à ce dispositif. L’objectif est de maintenir les dispositions du prêt à taux zéro dans l’intégralité du territoire corse jusqu’au 31 décembre 2021 sans sortie « en sifflet ».

Compte tenu de la pression fiscale considérable à laquelle est soumise la Corse, des effets d’une spéculation immobilière débridée et du fait que l’indivision freine considérablement la rénovation du parc de logements, nous proposons d’adapter les politiques publiques à la situation particulière de la Corse, notamment pour favoriser l’installation de primo-accédants – cela conforte en outre la politique de rénovation urbaine engagée à Bastia.

M. le Rapporteur général. La spécificité corse est prise en compte par le zonage : il n’existe en Corse que des zones A, B1 et B2 ; il n’y a pas de zones C. Ce territoire fait donc l’objet d’une attention toute particulière. De plus, avec la prolongation pour deux années supplémentaires du dispositif du PTZ dans le neuf en zone B2, la Corse ne sera pas mal servie.

Le retrait de l’amendement serait souhaitable. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La commission en vient à l’amendement II-CF609 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Je retire cet amendement, satisfait par celui du Rapporteur général.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 40 modifié.

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*     *

Après l’article 40

La commission se saisit des amendements identiques II-CF360 de Mme Véronique Louwagie et II-CF657 de M. Charles de Courson.

Mme Véronique Louwagie. Il s’agit de mobiliser des ressources en faveur de l’investissement productif, pour aider nos entreprises, tout en privilégiant la préparation de la retraite. L’amendement II-CF360 vise donc à instaurer une exonération unique au profit des contrats d’assurance-vie détenus depuis huit ans ou plus qui auraient été investis à hauteur d’au moins 50 % en engagements de type « eurocroissance ».

M. Charles de Courson. Nous n’avons cessé de nous demander si tel ou tel amendement incitait à l’investissement dans les entreprises. Eh bien, l’amendement II-CF657 va dans ce sens !

M. le Rapporteur général. Le projet de loi de finances prévoit d’inverser une logique : au lieu d’alléger la fiscalité de l’assurance-vie, il est prévu d’alourdir celle qui pèse sur les contrats de plus de huit ans. Vous comprendrez donc que je sois défavorable à ces amendements.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement II-CF540 de M. Fabien Roussel.

M. Jean-Paul Dufrègne. Cet amendement vise à abonder les moyens de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) pour faire face aux besoins en investissement dans le réseau ferré, les transports urbains et les aménagements cyclables. Nous proposons la création d’une taxe additionnelle à la taxe sur les locaux à usage de bureaux à Paris et dans les Hauts-de-Seine, qui concentrent une très grande part de l’immobilier de bureau – à l’échelle de la région d’Île-de-France et à l’échelle du pays. Cette hyper-concentration participe d’un développement économique déséquilibré du pays et cause de nombreux déplacements vers ces centres d’affaires. Pour développer des transports durables dans tout le pays et rééquilibrer son développement économique au profit des autres régions, il est légitime que ces acteurs participent au financement de l’AFITF via une contribution qui reste très modérée au regard des loyers pharaoniques acquittés par les entreprises pour occuper ces bureaux.

M. le Rapporteur général. Cet amendement double la taxe dans les deux départements concernés. Par ailleurs, les plafonds sont déjà atteints. J’y suis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement II-CF169 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Le Gouvernement a indiqué qu’il fallait relever le taux de la TVA dans le logement social pour financer la suppression de la réduction de loyer de solidarité. Il y aura une période de l’année où l’APL ne pourra être l’objet d’un prélèvement et où le loyer ne pourra être réduit. Pour compenser cette perte d’économies, le Gouvernement propose une TVA à 10 %, comme nous l’avions fait dans notre contre-budget. Cet amendement met en œuvre notre proposition et celle du Gouvernement.

M. le Rapporteur général. Cette mesure est présentée comme une alternative à l’application de la réduction de loyer de solidarité (RLS) et de la hausse de la contribution à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Elle répond aux critiques formulées par la Cour des comptes et aurait un impact financier de près de 750 millions d’euros sur les bailleurs sociaux. Il me semble que le débat que nous avons eu lors de l’examen de l’article 52 rattaché à la mission Cohésion des territoires a permis une clarification. Dans tous les cas de figure, si nous devons adopter une hausse de la TVA en lieu et place de la RLS, elle devra être effective dès 2018. Je vous invite donc à déposer votre amendement en projet de loi de finances rectificative de fin d’année avec une entrée en vigueur en 2018. Cela me semblerait beaucoup plus raisonnable que ce que vous proposez, et vous auriez une réponse plus adéquate. En attendant, je suis défavorable à cet amendement.

M. François Pupponi. Je retire l’amendement, et le redéposerai, mais je répète que je ne fais que reprendre une proposition faite au banc par le Gouvernement.

L’amendement est retiré.

La commission étudie l’amendement II-CF291 de M. Bertrand Pancher.

M. Vincent Ledoux. Cet amendement vise à réduire les droits de mutation auxquels sont soumis les dons de parts de groupements fonciers agricoles et de groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC).

M. le Rapporteur général. Il existe déjà des dispositions importantes en cette matière : une exonération de 75 % des droits de mutation est déjà prévue, et des mesures sont applicables dans un certain nombre de territoires particuliers. Le dispositif que vous proposez risque de provoquer une rupture d’égalité entre les groupements agricoles visés par l’amendement et les autres formes d’exploitation agricole. J’y suis donc défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF541 de M. Fabien Roussel.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’urbanisme commercial entraîne dans notre pays des comportements de consommation problématiques, notamment en termes de transport. Les hypermarchés, dont le développement en France est un phénomène unique en Europe, sont sources de nuisances, en termes tant de concurrence avec les commerces de centre-ville que d’accessibilité. Il est normal que, causant de nombreux déplacements automobiles, ils contribuent au financement d’une politique d’aménagement et de transport plus respectueuse de l’environnement. Dans cet esprit, nous proposons d’étendre à l’ensemble du territoire la taxe additionnelle sur les surfaces de stationnement annexées aux locaux commerciaux et aux locaux de stockage d’une superficie supérieure à 2 500 mètres carrés de surface de vente.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Elle se saisit de l’amendement II-CF289 de M. Bertrand Pancher.

M. Vincent Ledoux. M. Pancher propose d’échelonner l’acquittement des droits de mutation sur quinze ans afin de faciliter le règlement des successions au sein des exploitations agricoles et des petites entreprises.

M. le Rapporteur général. Je suis défavorable à cet amendement, d’autant qu’un taux d’intérêt légal s’appliquerait aux sommes dues.

M. le président Éric Woerth. Un taux qui sera quand même divisé par deux !

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement II-CF690 de M. Arnaud Viala.

M. Thibault Bazin. Mon collègue Viala a fait un travail de fond en vue de sa proposition de loi visant à améliorer la situation de nos agriculteurs, qui traversent une crise sans précédent. M. le Rapporteur général me répondra certes que beaucoup a déjà été fait, mais cet amendement complète l’article 730 bis du CGI, afin de réduire le montant du droit d’enregistrement appliqué aux cessions à titre onéreux de parts de groupements fonciers agricoles et de GAEC. Actuellement de 125 euros, le montant du droit sera abaissé à 100 euros lorsque la cession intervient entre le cédant des parts et un parent ou allié jusqu’au quatrième degré inclus, ou entre membres soit d’un même groupement foncier agricole, soit d’un même groupement agricole d’exploitation en commun. Vous me direz que c’est symbolique, mais il s’agit de faciliter ces transmissions, et ce serait un signal positif pour les jeunes qui reprennent le flambeau de notre production agricole.

M. le Rapporteur général. La fiscalité agricole sera l’objet d’un débat complet. En attendant, je suis défavorable à l’amendement.

M. Julien Aubert. Cette réponse est un petit peu exaspérante, monsieur le Rapporteur général. Je suis souvent présent en commission et dans l’hémicycle, mais jamais au bon moment pour débattre du bon sujet ! : « Monsieur le député, le sujet que vous évoquez est intéressant ; malheureusement, ce sera discuté un autre jour… »

Je crois pourtant que le Parlement est souverain. Je vous invite chers collègues à ouvrir le débat : le Parlement a-t-il le droit de débattre de fiscalité agricole à un autre moment que celui souhaité par le Gouvernement ? Oui, et les auteurs de l’amendement nous font une proposition intelligente. Cette baisse de 25 euros est de l’ordre du symbole. Les parlementaires ont-ils le droit de déplacer une virgule dans le projet de budget qui leur est présenté ? Pour défendre ce droit, je vous invite à adopter cet amendement.

Mme Cendra Motin. Je vous rassure, cher collègue, notre majorité réfléchit, elle construit ses textes, mais elle aime examiner les problèmes dans leur globalité, de A à Z, plutôt que de se contenter d’une vue partielle. C’est pourquoi, effectivement, nous travaillons depuis quelques mois sur les problématiques agricoles, nous nous posons toutes les questions et nous réfléchissons à des propositions en matière de fiscalité agricole. Nous serons très heureux de pouvoir en débattre avec vous en commission et dans l’hémicycle lorsque nous présenterons les textes.

M. Fabien Di Filippo. Je ne doute pas de la volonté et de la capacité de la majorité à réfléchir et à débattre tant que cela ne contrecarre pas la communication gouvernementale et présidentielle. C’est de cela que je vous accuse : vous refusez toute mesure qui la contrarie, même quand vous êtes d’accord avec nous ! Nous, lorsque nous sommes d’accord avec vous, nous sommes capables de voter toute une série de dispositions. Vous ne voulez pas contrarier la communication jupitérienne, et cela commence à être réellement problématique. Vous me direz que cette mesure est symbolique, mais elle correspond à un problème grave : chaque jour, en France, des agriculteurs se suicident !

Prenons maintenant les mesures que nous pouvons prendre, cela ne vous empêchera pas de mener les États généraux de l’alimentation jusqu’à leur terme et de compléter le dispositif, mais ayez une conception un peu plus élevée de votre fonction et de votre travail. Soyez un peu autonomes. Si vous êtes « en marche », mettez-vous au moins à trottiner, nous avancerons plus vite !

Mme Lise Magnier. On ne touche donc à rien en matière agricole, en attendant la fin des États généraux de l’alimentation, mais on remet en question toute la fiscalité du logement, sans attendre la loi qui doit être consacrée au logement ! Il y a quand même là un petit problème de cohérence, chers collègues de la majorité.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle se saisit des amendements identiques II-CF190 de M. Dino Cinieri, IICF456 de M. Bertrand Pancher et II-CF678 de M. Paul Christophe.

Mme Véronique Louwagie. L’amendement II-CF190 va permettre de corriger une situation, précisément parce que tout n’avait pas été vu de A à Z. Il existe un certain nombre d’exonérations ou réductions de droits d’enregistrement subordonnées au respect de conditions de fond et de forme. Il ne s’agit pas revenir sur les conditions de fond, qui doivent bien entendu être respectées, mais certaines conditions de forme sont des obligations déclaratives particulièrement lourdes. Ainsi, si une seule des pièces qui doivent être produites dans le cadre du dispositif dit « Dutreil » manque, c’est tout le bénéfice de celui-ci qui est remis en question. Le rapport remis par Thierry Mandon du mois de juillet 2013 préconisait d’ailleurs de substituer aux obligations déclaratives des obligations de transmission à première demande.

Nous proposons que le défaut de production d’une pièce justificative ne remette pas en cause le bénéfice d’un régime de faveur, les montants en jeu et les effets pouvant être très importants.

M. le Rapporteur général. Il faut effectivement régler la question des obligations pesant sur les bénéficiaires d’un pacte « Dutreil ». Je crains cependant que la solution proposée ne soit trop large : elle porte sur l’ensemble des exonérations de droits de transmission. J’émettrai un avis défavorable, mais il est opportun d’évoquer le sujet, notamment avec le Gouvernement, alors que le travail sur la future loi relative à la transmission des entreprises a commencé. Nous pouvons même anticiper en essayant de parvenir à un accord sur la question.

M. le président Éric Woerth. Il s’agirait de parvenir à une simplification.

M. le Rapporteur général. Tout à fait.

Mme Olivia Gregoire. Je suis, madame Louwagie, des personnes qui travaillent sur ces sujets – création d’entreprises, croissance, cession, transmission et rebond. Je suis à votre disposition pour que nous en parlions et que nous réfléchissions à votre proposition.

M. le président Éric Woerth. N’est-il pas possible de le faire en l’adoptant, chère collègue ? J’ai bien compris que la solution proposée était tout de même trop large.

Mme Véronique Louwagie. Monsieur le Rapporteur général, madame Gregoire, j’entends bien ce que vous dites. Qu’il y ait une réflexion sur les dispositifs de transmission, soit, mais ce que proposent ces amendements est tout de même relativement simple. Il est question non pas de revenir sur les conditions de fond, mais simplement d’instaurer une obligation de remise à première demande du document manquant et d’éviter une remise en cause intégrale du bénéfice du dispositif. C’est tout simple et sans autre impact !

M. Charles de Courson. Ce que nous proposons par l’amendement II-CF678, c’est de permettre qu’une pièce justificative manquante soit produite dans un délai d’un mois, sans que la sanction tombe immédiatement. Ce n’est quand même pas révolutionnaire !

M. Jean-Paul Mattei. Je soutiens ces amendements de bon sens. Les conditions de fond doivent être respectées. Les conditions de forme sont des usines à gaz. Je suis tout à fait favorable à cet amendement, même si la réflexion doit se poursuivre.

Tout à l’heure, je n’ai pas voté l’amendement sur les groupements fonciers, parce que le monde agricole mérite mieux que des baisses de 25 euros, soyons sérieux. Le monde agricole mérite des amendements bien plus substantiels.

M. le président Éric Woerth. Bien sûr, mais nous avions aussi évoqué la dotation pour aléas et de nombreux autres sujets agricoles.

M. le Rapporteur général. J’appelle votre attention, chers collègues, sur le fait que, dans leur rédaction actuelle, ces amendements identiques modifient beaucoup de choses. Vous touchez à des situations très diverses : les donations entre vifs, les exonérations de succession en Corse, les acquisitions d’un terrain en vue de reboisement, certaines exonérations en faveur de l’hôtellerie outre-mer. Le champ en est plus large que le pacte « Dutreil ». Je souhaite résoudre le problème de ce dernier, mais sans ces effets de bord qui en poseraient d’autres. Je demande donc le retrait de ces amendements.

Mme Amélie de Montchalin. Sachez, chers collègues, que nous avons un œil très attentif sur le problème du pacte « Dutreil ». La rédaction de ces amendements identiques n’en est pas moins trop large et pourrait entraîner des effets de bord. Si elle peut être affinée pour que l’on se concentre sur le pacte « Dutreil », nous serons très bienveillants.

Les amendements identiques sont retirés.

La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF446 de M. Bertrand Pancher, II-CF295, II-CF243 et II-CF244, ces trois derniers de M. Éric Alauzet.

M. Charles de Courson. Il s’agirait de territorialiser la contribution climat-énergie. C’est une idée intéressante, que celle d’arrêter de mener des politiques purement nationales et d’essayer de les décliner territorialement.

M. Éric Alauzet. Charles de Courson a raison, c’est très intéressant. Il s’agit de prendre le relais d’une politique extrêmement judicieuse menée en matière de transition énergétique dans les territoires sur trois ans, de 2015 à 2017 – même si Nicolas Hulot ne dispose pas des moyens financiers suffisants pour boucler complètement le projet en 2017. Nous avons vu naître une belle dynamique, notamment dans les territoires ruraux, où les élus se sont approprié ces problématiques et ont mené des réflexions globales, avec de l’ingénierie, à propos de toutes les dimensions de la transition – transports, bâtiments, économies d’énergie, etc.

Je vous rappelle que la contribution climat-énergie s’incrémente tous les ans de 1,4 milliard d’euros supplémentaires. Pour les régions qui ont défini un schéma régional climat air énergie et pour les collectivités qui se sont dotées d’un plan climat territorial, le coût est à peu près de 200 millions d’euros par an. Cela me paraît tout à fait faisable.

L’amendement II-CF295 prévoit une aide et aux régions et aux intercommunalités. L’amendement II-CF243 ne porte que sur les intercommunalités. L’amendement II-CF244 fait en particulier référence au Grand plan d’investissement. On peut flécher une partie de la contribution climat-énergie, mais cela vient aussi s’intégrer dans le cadre du Grand plan d’investissement et des 20 milliards d’euros fléchés pour la transition énergétique. Il s’agit d’articuler tout cela. C’est vraiment un amendement d’appel pour poursuivre ce qui est engagé et qui est vraiment dynamisant.

M. le Rapporteur général. Nous avons déjà eu ce débat en première partie. Je suis défavorable à ces amendements, mais j’ai bien compris que certains sont des amendements d’appel. Le Gouvernement répondra donc au banc.

M. Julien Aubert. L’idée est intéressante, mais, en réalité, elle devrait être corrélée aux objectifs nationaux que nous fixons, même si on peut les contester – je parle de la loi sur la transition énergétique. Il faut des contrats d’objectifs et de moyens environnementaux qui soient signés avec les collectivités ; à l’heure actuelle, chacun fait son petit plan dans son coin, pas forcément en cohérence avec les objectifs nationaux. Il convient de respecter certaines obligations et la déclinaison des objectifs nationaux, effectivement en étant libre des moyens employés. Je ne sais pas si faire passer la fiscalité avant la stratégie est une bonne idée. Le risque est qu’ensuite ce soit absorbé et que cela ne se traduise pas par une mise en cohérence de la stratégie territoriale avec la stratégie nationale.

La commission rejette successivement les amendements II-CF446, IICF295, IICF243 et II-CF244.

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Article additionnel après l’article 40
Création d’une taxe générale sur les activités polluantes (TGAP)
pour les fluides hydrofluorocarbures (HFC)

La commission se saisit de l’amendement II-CF526 de M. Emmanuel Maquet.

M. Emmanuel Maquet. Cet amendement vise à instaurer une taxe sur les gaz hydrofluorocarbures, ou gaz HFC, utilisés dans l’industrie du refroidissement et connus pour être particulièrement polluants en termes de gaz à effet de serre. Les entreprises françaises ont déjà développé des technologies moins polluantes. Les gaz HFC sont majoritairement utilisés sur notre territoire par des industriels étrangers, qui alourdissent d’autant notre bilan carbone. Nos voisins européens, comme l’Espagne ou le Danemark, ont déjà réussi à diminuer leurs émissions de gaz à effet de serre grâce à une taxe semblable.

M. le Rapporteur général. C’est un amendement dont j’avais demandé qu’il soit déposé en seconde partie. J’approuve plutôt l’esprit dont il procède, même s’il faut peut-être une certaine réécriture. Je m’en remets à votre sagesse, pour que le débat ait lieu avec le Gouvernement. J’espère qu’un amendement sera adopté sur ces sujets.

La commission adopte l’amendement (amendement n° II-1499).

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Après l’article 40

La commission examine l’amendement II-CF482 de M. Bruno Millienne.

M. Jean-Paul Mattei. Conformément à l’engagement du Président de la République lors de la campagne présidentielle, le présent amendement assure un doublement progressif du fonds chaleur de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), dont le montant s’élève aujourd’hui à environ 210 millions.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, elle rejette ensuite les amendements identiques II-CF405 de M. Nicolas Forissier et II-CF616 de M. Olivier Dussopt.

Puis elle examine l’amendement II-CF481 de M. Marc Fesneau.

Mme Sarah El Haïry. La taxe affectée à l’Agence de services et de paiement sur le fondement de l’article L. 341-6 du code forestier a pour objet d’alimenter le fonds stratégique de la forêt et du bois.

Initialement établi à 18 millions, le plafond des indemnités affectées au fonds stratégique de la forêt et du bois a été abaissé à 2 millions par la loi de finances pour 2017. Afin que toutes les indemnités de défrichement servent bien au financement d’actions relevant du secteur forestier, il convient d’augmenter le plafond.

M. le Rapporteur général. Qu’il soit clair que, par principe j’émettrai systématiquement un avis défavorable à tous les amendements traitant des taxes affectées plafonnées, car ils relèvent de la première partie du projet de loi de finances.

M. Charles de Courson. Lorsqu’elle a été créée, la taxe sur les défrichements devait être affectée à des investissements dans le domaine forestier. Or, ce n’est qu’en partie le cas, puisqu’elle est écrêtée. Pourriez-vous d’ailleurs nous rappeler, monsieur le Rapporteur général, quel est son produit actuel ?

M. le Rapporteur général. Elle rapporte 200 000 euros, et le plafond est donc loin d’être atteint.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF596 et II-CF597 de M. Olivier Faure.

Mme Christine Pires Beaune. Ces deux amendements visent à flécher le reliquat de la taxe « Chirac », taxe de solidarité sur les billets d’avion, vers l’Institut national du cancer (INCa), et plus précisément vers la recherche sur les cancers pédiatriques. Je précise que cela n’a aucune incidence sur l’aide au développement.

M. le Rapporteur général. Il s’agit d’une taxe affectée plafonnée, donc avis défavorable. Par ailleurs, je m’étonne de ces amendements car, en première partie, M. Faure s’était opposé à un amendement identique.

La commission rejette l’amendement.

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Article 41
Diminution du taux normal de l’impôt sur les sociétés

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article dresse la trajectoire de la baisse progressive du taux normal de l’impôt sur les sociétés (IS) à 25 % entre 2018 et 2022 :

– en 2018, un taux normal de 28 % pour toutes les entreprises sur les 500 000 premiers euros de bénéfice et, au-delà, un taux de 33 1/3 %, comme le prévoit déjà la loi de finances pour 2017 ;

– en 2019, au-delà des 500 000 premiers euros de bénéfice, un taux normal de 31 % pour toutes les entreprises ;

– en 2020, un taux normal de 28 % sur l’ensemble du bénéfice de toutes les entreprises ;

– en 2021, un taux normal de 26,5 % sur l’ensemble du bénéfice de toutes les entreprises ;

– à compter de 2022, un taux normal de 25 % sur l’ensemble du bénéfice de toutes les entreprises.

Cette trajectoire n’est pas exclusive de l’application du taux réduit de 15 % applicable sur les 38 120 premiers euros des petites et moyennes entreprises (PME) dont le chiffre d’affaires n’excède pas 7,63 millions d’euros.

L’impact pour les finances publiques est estimé, une fois la baisse du taux normal complète en vigueur, à une perte de recettes annuelle de 4,1 milliards d’euros.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 11 de la loi de finances pour 2017 a prévu une baisse progressive du taux normal de l’IS à 28 % entre 2017 et 2020, de façon progressive. Il a également prévu, à compter de 2019, de relever le plafond de chiffre d’affaires rendant une entreprise éligible au taux réduit de 15 % sur les 38 120 premiers euros de bénéfice, le faisant passer de 7,63 à 50 millions d’euros.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’état du droit

Créé en 1948 ([71]), l’impôt sur les sociétés (IS) est dû par les sociétés de capitaux, assujetties de plein droit, ainsi que par certaines sociétés de personnes sur option en ce sens ([72]). Payé au moyen de quatre acomptes versés lors de l’exercice au titre duquel il est dû, l’IS fait ensuite l’objet d’une régularisation au cours de l’exercice N + 1, lors du solde.

Pour des précisions complémentaires sur les entreprises assujetties et les modalités de paiement de l’IS, il est renvoyé aux commentaires sous les articles 6 et 7 du projet de loi de finances pour 2017 ([73]).

A.   la baisse à 28 % du taux normal de l’is entre 2017 et 2020

L’IS ne repose pas sur un taux unique mais sur plusieurs, qui dépendent du montant du bénéfice imposable, de celui du chiffre d’affaires ou de la nature du revenu. Par ailleurs, s’y ajoute une contribution additionnelle ([74]).

Le taux normal de l’IS est de 33 1/3 %. Sa baisse progressive à 28 % en 2020 est prévue par l’article 11 de la loi de finances pour 2017 ([75]).

1.   Le taux normal de l’IS de 33 1/3 %

Aux termes du deuxième alinéa du I de l’article 219 du CGI, le taux normal de l’IS est de 33 1/3 % du bénéfice imposable. Il a été introduit par l’article 11 de la loi de finances pour 1993 ([76]) (le taux normal était auparavant de 34 %).

À titre d’exemple, une entreprise réalisant un bénéfice net imposable de 120 000 euros doit verser 40 000 euros au titre de l’IS.

2.   La trajectoire de la baisse du taux normal à 28 %

La baisse du taux normal a été programmée par l’article 11 de la loi de finances pour 2017 précitée, de façon progressive entre 2017 et 2020, pour qu’il atteigne 28 % à cet horizon.

La trajectoire de la baisse du taux normal, faite par étape, est la suivante :

– en 2017, taux de 28 % pour les 75 000 premiers euros de bénéfice des PME au sens européen, c’est-à-dire des entreprises qui emploient moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le total de bilan n’excède pas 43 millions d’euros ([77]) ;

– en 2018, taux de 28 % pour les 500 000 premiers euros de bénéfice de l’ensemble des entreprises ;

– en 2019, taux de 28 % sur la totalité du bénéfice pour les entreprises dont le chiffre d’affaires n’excède pas un milliard d’euros (pour celles dont le chiffre d’affaires excède ce montant, aucune modification n’est apportée par rapport à l’étape 2018) ;

– enfin, en 2020, taux de 28 % sur la totalité du bénéfice pour l’ensemble des entreprises.

Le bénéfice du taux réduit pour les PME (Cf. infra, C) est maintenu à chaque étape de la trajectoire.

B.   Le taux facial d’IS

Le taux facial d’IS, utilisé dans les comparaisons internationales, est plus élevé que le taux normal dans la mesure où il intègre les contributions additionnelles à l’IS en vigueur.

Avec la prise en compte de la contribution sociale sur l’IS, prévue à l’article 235 ter ZC du CGI, assise sur l’IS au taux de 3,3 %, le taux facial de l’impôt est porté à 34,43 %.

Jusqu’en 2016, la prise en compte de la contribution exceptionnelle sur l’IS prévue à l’article 235 ter ZAA du CGI, au taux de 10,7 %, conduisait à ce que le taux facial soit de 38 %. Due par les entreprises dont l’exercice était clos au plus tard le 30 décembre 2016, elle n’a pas été reconduite.

En conséquence, le taux facial actuel de l’IS est de 34,43 % ([78]).

Le graphique ci-après fait état de la trajectoire de la baisse du taux normal prévue par la loi de finances pour 2017, ainsi que de celle, liée, du taux facial intégrant la contribution sociale sur l’IS.

C.   Les taux réduits d’IS

a.   Le taux réduit de 15 % pour certaines PME

En application du b du I de l’article 219 du CGI, un taux réduit de 15 % est applicable aux 38 120 premiers euros de bénéfice ([79]) des entreprises qui satisfont aux conditions suivantes :

– leur chiffre d’affaires est inférieur à 7,63 millions d’euros ;

– elles ont un capital détenu par au moins 75 % de personnes physiques ou par des sociétés satisfaisant à ces conditions.

Le gain tiré du bénéfice du taux réduit est, par définition, variable selon le taux normal d’IS. Le tableau suivant fait état du montant de l’avantage fiscal résultant de l’application du taux réduit, avec un taux normal de 33 1/3 % (situation jusqu’en 2017) et avec un taux normal de 28 % (situation depuis 2017 pour les entreprises concernées).

comparaison du gain induit par le taux réduit d’is
en fonction du taux normal

(en euros)

Taux normal d’IS

IS au taux normal sur 38 120 euros

IS au taux réduit sur 38 120 euros

Gain

33 1/3 %

12 706,7

5 718,0

6 988,7

28 %

10 673,6

5 718,0

4 955,6

Source : commission des finances.

L’article 11 de la loi de finances pour 2017 a prévu d’étendre le bénéfice du taux réduit de 15 % aux entreprises dont le chiffre d’affaires n’excède pas 50 millions d’euros ([80]). Cette extension du champ d’application du taux réduit est censée s’appliquer aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019 ([81]).

Le rehaussement du chiffre d’affaires rendant éligible au bénéfice du taux réduit a conduit à modifier l’article 1586 quater du CGI, portant sur le taux de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), afin d’éviter qu’il ait un effet de bord non voulu. En effet, le taux effectif de la CVAE, pour les sociétés membres d’un groupe fiscalement intégré, est calculé à partir d’une consolidation du chiffre d’affaires de ces sociétés au niveau du groupe, sauf si cette consolidation est inférieure à 7,63 millions d’euros, par renvoi au plafond du taux réduit. Il n’aurait pas été souhaitable que le rehaussement du plafond de chiffre d’affaires applicable au taux réduit soit étendu aux modalités de calcul de la CVAE, d’où la mesure de coordination prévue au 2° du I de l’article 11 précité ([82]).

b.   Les autres taux réduits

D’autres taux réduits sont prévus pour certains revenus ou opérations.

Ainsi, et à titre d’exemple, peuvent être mentionnés :

– un taux de 19 % pour les cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilières cotées ;

– un taux de 15 % pour les cessions et les concessions de produits de la propriété intellectuelle ;

– un taux de 15 % pour les plus-values nettes à long terme.

D.   Synthèse de la trajectoire de la baisse du taux normal d’IS à 28 % prévue par la loi de finances pour 2017

Le tableau suivant dresse la synthèse de la baisse programmée par la loi de finances pour 2017 et des taux applicable, chaque année, aux parts de bénéfice visées.

échéancier de la trajectoire de la baisse du taux normal d’is à 28 %
prévu par la loi de finances pour 2017
(2017-2020)

Année

Taux d’IS

(en %)

Bénéfice imposable (B)
(en euros)

Chiffre d’affaires (CA)
(en million d’euros)

2017

15

B ≤ 38 120

et si CA < 7,63

28

B ≤ 75 000

et si CA ≤ 50

33 1/3

tous les autres cas

tous les autres cas

2018

15

B ≤ 38 120

et si CA < 7,63

28

B ≤ 500 000

pas de condition

33 1/3

B > 500 000

pas de condition

2019

15

B ≤ 38 120

et si CA < 50

28

Totalité

si CA ≤ 1 000

28

B ≤ 500 000

si CA > 1 000

33 1/3

B > 500 000

si CA > 1 000

2020

15

B ≤ 38 120

et si CA < 50

28

Totalité

pas de condition

Source : commission des finances.

II.   Le contexte économique et budgétaire

Le taux nominal de l’IS en France est le plus élevé de l’Union européenne (à l’exception de Malte). Principal indicateur fiscal pour les investisseurs étrangers – ou du moins le plus visible –, son niveau est susceptible de freiner l’attractivité du territoire et s’inscrit dans un contexte national de forts prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises.

A.   L’importance des charges pesant sur les entreprises françaises, frein à la compétitivité et à l’attractivité

Le poids des prélèvements obligatoires qui pèsent en France sur les entreprises et l’importance du taux facial de l’IS peuvent nuire à l’attractivité de la France et à sa compétitivité internationale.

1.   Les liens entre fiscalité et attractivité

Un taux facial d’impôt sur les bénéfices des sociétés élevé est susceptible de décourager les investisseurs et les entrepreneurs étrangers.

Les choix des investisseurs reposent avant tout sur l’importance du marché et la qualité, l’abondance et le coût des facteurs de production. Ainsi, un État doté d’une fiscalité lourde peut tout à fait, s’il satisfait aux précédents critères de choix, se montrer particulièrement attractif et performant. Néanmoins, à situations comparables, la fiscalité a un impact et peut s’avérer déterminante dans l’arbitrage des investisseurs.

De Mooij et Ederveen (2003) ont ainsi montré qu’une baisse d’un point du taux de l’impôt sur les sociétés entraîne, toutes choses égales par ailleurs, une hausse des investissements directs étrangers (IDE) de 3 à 4 % ([83]).

Plus généralement, le taux facial de l’imposition des bénéfices constitue une donnée facilement identifiable et permet de procéder à des comparaisons rapides qui, si elles ne sont pas toujours pertinentes, n’en restent pas moins importantes, commentées et suivies par les investisseurs.

2.   La comparaison internationale du niveau des prélèvements obligatoires sur les entreprises

En 2013, une étude réalisée par le cabinet d’audit PricewaterhouseCoopers (PwC) à l’initiative de la Banque mondiale, intitulée Paying Taxes 2013 – The Global Picture, a cherché à comparer le poids des prélèvements obligatoires pour les entreprises pays par pays. Ainsi le montant des prélèvements obligatoires de toute nature supportés a été rapporté au profit commercial ([84]).

Les résultats de cette étude n’étaient pas favorables à la France, qui affichait un taux de 65,7 %, soit le troisième taux le plus élevé d’Europe (derrière l’Italie et l’Estonie), très au-delà de la moyenne des États membres de l’Union européenne et de l’Association européenne de libre-échange, établie à 42,6 %, et nettement supérieure à la moyenne mondiale (taux de 44,7 %).

À l’occasion d’une étude complémentaire réalisée en 2015, a été souligné l’important changement qui était en train de se réaliser en France (le sous-titre de la partie de l’étude consacrée à la France étant, de façon éloquente, « Le système fiscal français commence à changer »), notamment depuis les réformes mises en place à partir de 2013 et 2014 ([85]).

Néanmoins, et ainsi que l’illustre le tableau suivant, le taux de la France reste largement supérieur à celui de ses principaux partenaires européens (à l’exception de l’Italie, qui partait cependant de plus loin et dont la variation constatée est trois fois supérieure à celle de la France), qui pour la plupart ont substantiellement réduit les charges pesant sur les entreprises.

Rapport des prélèvements obligatoires sur les entreprises
au profit commercial (2005-2015)

(en %)

État

2005

2015

Variation 2015 / 2005

France

66

62,7

− 5,0 %

Allemagne

47,7

48,8

+2,3 %

Belgique

60,1

58,4

− 2,8 %

Espagne

60,4

50

− 17,2 %

Italie

76,7

64,8

− 15,5 %

Pays-Bas

47,7

41

− 14,0 %

Royaume-Uni

34,7

32

− 7,8 %

Source : données Banque mondiale, 2016.

B.   Le poids de l’impôt sur les sociétés françaises : un taux facial élevé mais un produit modéré

1.   Le taux facial de l’IS français est l’un des plus élevé au monde

Malgré la trajectoire de baisse du taux normal prévue par la loi de finances pour 2017 précitée, le taux normal de l’IS retenu pour les comparaisons internationales restera, jusqu’en 2020, de 33 1/3 % et, en intégrant la contribution sociale de 3,3 %, de 34,43 %. Ce taux est l’un des plus élevés de l’Union européenne et du monde, ainsi que l’illustre le graphique suivant.

Source : Commission européenne, Taxation trends 2017, Staturory tax rates ; OCDE, Statutory corporate income tax, 2017.

Si deux pays, Malte et les États-Unis d’Amérique, affichent un taux facial supérieur à celui de la France, ce constat doit être nuancé.

À Malte, le taux apparent est de 35 %, mais de très nombreux dispositifs d’incitations conduisent à un taux réel très largement inférieur (à titre d’exemple, les entreprises étrangères s’implantant à Malte et réalisant l’essentiel de leur activité en dehors du pays sont soumises à un IS dont le taux est de 5 %).

Le taux apparent américain, de 38,91 %, quant à lui, ne tient naturellement pas compte des annonces faites par le président Donald Trump le 27 septembre 2017, consistant en une baisse du taux normal fédéral de 35 % pour le ramener à 20 %. A également été avancée la mise en place d’une « tax holiday », dispositif fiscal dérogatoire qui consiste à imposer à un taux réduit les bénéfices logés à l’étranger et qui seraient rapatriés aux États‑Unis. L’objectif de ce mécanisme est d’inciter les entreprises à faire revenir leurs bénéfices par une imposition à un taux exceptionnel. Cet outil, qui revient in fine à récompenser les entreprises s’étant livrées à de l’évitement fiscal, a été utilisé en 2005, avec un taux de 5 %. Il aurait permis de ramener sur le territoire américain environ 300 milliards de dollars, conduisant à une hausse des recettes de l’ordre de 15 milliards de dollars ([86]).

L’importance du taux facial de l’IS dans les comparaisons internationales, qu’il s’agisse de celles de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ou de la Commission européenne, pénalise la France et son attractivité. Elle grève également la compétitivité des entreprises. D’après la quinzième édition du Baromètre de l’attractivité France (2016), étude réalisée par le cabinet d’audit Ernst & Young, 72 % des investisseurs internationaux jugent la fiscalité française peu ou pas attractive. Pourtant, malgré son taux élevé, l’IS voit ses recettes nettes diminuer.

2.   Un rendement d’IS en diminution

Malgré son taux élevé, le rendement net de l’IS a diminué de plus de moitié en dix ans, ainsi qu’en témoignent le tableau et le graphique ci-après.

Évolution du rendement net de l’is

(2007-2017)

(en milliards d’euros)

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017 (p.)

Rendement net

63,3

62,6

55,1

51,4

53

41,3

47,2

35,3

33,5

30

28,4

N.B. : le rendement 2017 est prévisionnel.

Source : commission des finances et exposé des motifs du présent projet de loi de finances.

Le graphique suivant compare, sur la période 2012-2017, l’évolution des rendements brut et net de l’IS.

Source : commission des finances et exposé des motifs du présent projet de loi de finances.

 

En 2017, pour la première fois, le rendement net de l’IS devrait être inférieur à la moitié du rendement brut – ce dernier ayant été relativement constant depuis 2012.

La diminution soudaine du rendement net de l’IS à compter de 2014, au-delà de la question de la volatilité du produit de cet impôt, très fortement corrélé à l’activité économique et donc à la conjoncture, trouve sa source principale dans la mise en œuvre du CICE, dont la première imputation sur l’IS est intervenue en 2014.

Le tableau ci-dessous illustre l’évolution de l’impact budgétaire du CICE depuis 2014.

Coût budgétaire du CICE (2014-2017)

(en milliards d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017 (prév.)

Total

Coût budgétaire

6,6

12,5

12,9

16,5

48,5

Source : évaluation préalable ; Comité de suivi du CICE, Rapport 2016, octobre 2016, et Rapport 2017, octobre 2017 ; commission des finances, Rapport sur le projet de loi de finances pour 2017.

Le montant total des créances de chaque millésime commence à pouvoir être déterminé avec précision pour les premières années du dispositif, ainsi qu’il ressort du rapport du Comité de suivi du CICE publié en octobre 2017 ([87]).

montant des créances de cice des millésimes 2013 à 2016
des redevables de l’is
(situation au 5 août 2017)

(en milliards d’euros)

Millésime

2013

2014

2015

2016

Total

Montant des créances

11,2

16,7

17,0

14,3

59,2

Source : Comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

Les détails des aspects budgétaires du CICE figurent, dans le présent rapport général, dans le commentaire de l’article 42.

3.   Une assiette présentée comme « mitée » mais progressivement résorbée

L’assiette de l’IS est souvent présentée comme « mitée », notamment par les dépenses fiscales telles que le CICE ou les possibilités de déductibilité offertes au titre des charges.

Cependant, ce « mitage » doit être relativisé dans la mesure où de nombreuses mesures, notamment depuis 2011, ont conduit à résorber l’assiette. Peuvent ainsi être mentionnés :

– la limitation à une année du report de déficit en arrière (« carry back ») ;

– le plafonnement en volume au titre de chaque exercice du report de déficit en avant (« carry forward ») ;

– l’encadrement strict de la déductibilité des charges financières :

– restrictions des exonérations et quasi-exonérations :

Ces réformes ont ainsi conduit à ce que l’assiette de l’IS soit élargie. Pourtant, le taux de l’IS est resté élevé, pénalisant les entreprises et s’inscrivant à rebours du principe fiscal selon lequel un bon impôt est un impôt à assiette large et à taux faible.

4.   La baisse du taux normal à 28 % : une mesure nécessaire mais insuffisante pour ramener la France dans la moyenne des autres États

La baisse du taux normal de l’IS prévue par la loi de finances pour 2017 est une mesure opportune qui s’inscrit dans la bonne direction :

– elle réduit la charge fiscale qui pèse sur les entreprises et donc permet d’améliorer leur compétitivité et, à termes, les embauches ;

– elle fournit aux investisseurs étrangers un signal positif susceptible de les attirer par un taux facial diminué.

Cependant, même avec un taux normal de 28 %, la France se situerait toujours dans le groupe des États européens ayant les taux d’IS les plus élevés, ainsi que l’illustre le graphique suivant (qui reprend le graphique comparant les taux nominaux, en actualisant le taux français, établi à 28,924 % avec la contribution sociale de 3,3 %).

Au demeurant, ce graphique ne tient pas compte des baisses possibles ou annoncées mais non encore effectives qui pourraient intervenir dans les autres États d’ici 2020.

Ces éléments militent pour une poursuite de la baisse du taux, afin que la France puisse s’inscrire à un niveau proche de la moyenne de ses principaux partenaires. Cette poursuite est notamment préconisée par le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) qui, dans son rapport de décembre 2016, estimait que le taux cible pertinent de l’IS français était de 25 % ([88]). Il se fondait sur une étude comparée de la moyenne des taux d’IS pondérée en fonction de la valeur ajoutée du secteur privé, reprise dans l’évaluation préalable du présent article. D’après cette étude, reposant sur les calculs de la Commission européenne, la moyenne pondérée s’établissait en 2015 à 25,6 % pour l’Union européenne hors France, et à 26,2 % pour les grandes économies européennes, hors France ([89]).

5.   La question débattue des taux implicite d’imposition

Si toutes les entreprises sont soumises au même taux d’IS – exceptions faites des taux réduits pour certaines catégories ou opérations –, des dispositifs relatifs à la détermination de l’assiette imposable seraient de nature à différencier la part d’impôt réellement supportée par chaque catégorie d’entreprises.

Afin de mesurer la charge fiscale réelle, il est fait usage du taux implicite d’imposition, qui rapporte le montant d’impôt à sa base économique, indépendamment des modalités juridiques de calcul. Si différentes méthodes de calcul des taux implicites existent, ces derniers correspondent généralement au rapport entre l’impôt dû et le résultat d’exploitation.

En 2011, une note de la direction générale du Trésor portant sur les données fiscales de l’année 2007 avait souligné une importante disparité dans les taux implicites, entre PME et grandes entreprises :

– le taux implicite des PME (hors TPE) s’établissait à 39,5 % ;

– le taux implicite des grandes entreprises s’établissait à 18,6 %.

Une actualisation de ces résultats a été réalisée en 2014 par le Gouvernement, qui constatait alors une résorption substantielle de l’écart de taux implicite entre PME et grandes entreprises. De près de 20 points, il s’établissait alors à 8 points :

– le taux implicite des PME était de 32 % ;

– celui des grandes entreprises était de 26 %.

Enfin, en 2016 le CPO estimait, après une nouvelle actualisation des données, que l’écart était faible, voire nul : « Le constat d’une différence de taux d’imposition entre PME et grandes entreprises ne paraît donc pas établi, et en tout état de cause il ne semble pas que la taille de l’entreprise exerce une influence déterminante sur son niveau d’imposition. » ([90])

Le CPO souligne toutefois la délicatesse des études comparatives portant sur l’imposition implicite des entreprises, dont les résultats dépendent fortement des paramètres retenus : « L’interprétation des écarts de taux implicites d’imposition doit donc être conduite avec la plus grande prudence. » ([91]) Dès lors, s’il est possible que l’absence de différence de taux implicite entre PME et grandes entreprises soit contestée, il est également tout à fait envisageable que les différences initialement constatées puissent avoir été quelque peu faussées. En tout état de cause, toute comparaison reposant sur les taux implicites d’imposition suppose, en amont, une clarification méthodologique sûre et des travaux académiques complémentaires ([92]).

6.   Les critiques dirigées contre le taux réduit

Dans son rapport de décembre 2016 précité, le CPO suggérait de supprimer le taux réduit de 15 % pour les PME, permettant une économie de 1,9 milliard d’euros par an pour un taux normal de 28 %, et de 1,47 milliard d’euros par an pour un taux normal de 25 % ([93]).

Au-delà des considérations budgétaires pouvant militer pour la suppression du taux réduit, le CPO appuyait sa proposition sur une analyse des effets de ce dispositif.

Selon lui, une imposition plus faible des entreprises les moins bénéficiaires n’est justifiée par aucun raisonnement économique, au contraire. Un dispositif tel que le taux réduit pour les PME serait un outil conduisant à la survie artificielle, via une dépense fiscale, des entreprises les moins performantes. Cette analyse, qui est aussi celle de l’OCDE, considère également que les entreprises les plus performantes, dont le bénéfice croît, sont pénalisées par une imposition plus forte qui limite le réinvestissement des profits ([94]).

Le CPO relevait que l’existence d’un taux réduit est un facteur d’incitation à des stratégies d’évitement de l’impôt. Ses travaux mettent en évidence une augmentation du nombre de redevables dont le bénéfice se situe autour de 38 120 euros, traduisant un effet de seuil et une pratique de structuration artificielle de groupes en petites entités afin que le bénéfice de ces dernières se trouve intégralement imposé au taux réduit.

Cette pratique de structuration artificielle en petites entités n’est pas propre au taux réduit pour les PME. Elle peut être rapprochée de celle en matière de CVAE, dont le taux effectivement supporté par les entreprises dépend du chiffre d’affaires, à travers un barème progressif. Pour éviter que les groupes au sein desquels les liens capitalistiques sont forts (détention d’au moins 95 % du capital) ne procèdent à des structurations artificielles à travers une filialisation, le chiffre d’affaires retenu pour déterminer le taux applicable à chaque société membre de ces groupes est celui consolidé au niveau du groupe ([95]).

III.   Le dispositif proposé

Malgré sa relative longueur et son apparente complexité, le présent article consiste pour l’essentiel à prévoir la baisse progressive du taux normal de l’IS jusqu’à 25 % entre 2019 et 2022.

A.   La trajectoire de baisse du taux normal d’IS rénovée et amplifiée

1.   La diminution progressive du taux normal d’IS à 25 % d’ici 2022

La baisse du taux normal d’IS prévue par le présent article est fixée par les , ,  et  du F de son I.

Le  de ce F porte sur la trajectoire prévue pour les années 2019 à 2021, et le 2° du même F concerne le taux applicable à compter de 2022.

Le a du dudit F porte sur le champ d’application du taux de 28 % en 2018 et 2019, son b tirant les conséquences de la modification de la trajectoire de la baisse en 2019, par rapport au dispositif prévue dans la loi de finances pour 2017.

Le  du F tire les conséquences de l’application généralisée du taux de 28 % en 2020.

Enfin, le II du présent article procède aux coordinations requises par la nouvelle trajectoire prévues par le dispositif proposé, en modifiant en conséquence l’article 11 de la loi de finances pour 2017 et abrogeant à cet effet les a et d du 1° du I de cet article 11.

Concrètement, la trajectoire proposée est la suivante :

– aucune modification n’est apportée à l’étape 2017 prévue dans la loi de finances pour 2017, à savoir l’application d’un taux de 28 % pour les 75 000 premiers euros de bénéfice des PME. Cette année n’est en effet pas prise en compte par l’article, ce dernier s’appliquant à compter de 2018 ;

– l’étape 2018, à savoir l’application d’un taux de 28 % sur les 500 000 premiers euros de bénéfice de l’ensemble des entreprises, est maintenue telle quelle. Le Gouvernement considère en effet qu’il aurait été peu judicieux de changer la trajectoire dès l’année d’entrée en vigueur de la loi de finances qui résulterait de l’adoption du présent projet de loi, sauf à prendre en défaut les anticipations des entreprises ;

– en 2019, toutes les entreprises seront imposées à un taux de 31 % sur l’intégralité de leur bénéfice. Il y a là une différence importante avec la trajectoire résultant de la loi de finances pour 2017, qui distinguait selon les entreprises en fonction de leur chiffre d’affaires. Pour mémoire, était initialement prévu en 2019 un taux de 28 % sur l’intégralité des bénéfices pour les entreprises dont le chiffre d’affaires n’excède pas un milliard d’euros (les autres entreprises ne tirant aucun avantage cette année-là) ;

– en 2020, l’intégralité du bénéfice de l’ensemble des entreprises sera imposée à 28 %, ainsi que le prévoyait la loi de finances pour 2017 ;

– en 2021, le taux normal sera ramené à 26,5 %, là aussi pour l’intégralité du bénéfice de toutes les entreprises ;

– enfin, à compter de 2022, le taux normal de l’IS sera de 25 %.

2.   Le maintien du périmètre en vigueur du taux réduit pour les PME

Par rapport à ce que prévoyait la loi de finances pour 2017, au-delà de la modification de l’étape 2019 et de la poursuite de la trajectoire de baisse après 2020, le dispositif proposé prévoit une autre modification.

Le  de son II abroge le b du 1° du I de l’article 11 de la loi de finances pour 2017 précitée, qui prévoyait qu’à compter de 2019, le taux réduit de 15 % serait applicable aux entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 50 millions d’euros – contre 7,63 millions d’euros à l’heure actuelle.

Il ne s’agit pas d’une suppression du taux réduit – qui est maintenu sans modification par rapport au droit en vigueur – mais de la suppression du rehaussement du plafond de chiffre d’affaires, prévu par la loi de finances pour 2017 et non encore entré en vigueur.

Tirant les conséquences de cette suppression, le même  du II abroge également le 2° du I et les 3 et 4 du II de l’article 11 précité, qui portaient mesures de coordination du rehaussement du chiffre d’affaires s’agissant de la CVAE et prévoyaient l’entrée en vigueur de ce rehaussement à compter de 2019.

Le tableau ci-après dresse la synthèse de la trajectoire proposée par le présent article.

taux d’is applicables entre 2018 et 2022

(Trajectoire proposée)

Année

Entreprises concernées

Part de bénéfice imposable (B)
(en euros)

Taux applicable

2018

PME jusqu’à 7,63 millions d’euros de chiffre d’affaires

B ≤ 38 120

15 %

Toutes les entreprises

38 120 < B ≤ 500 000

28 %

Toutes les entreprises

500 000 < B

33 1/3 %

2019

PME jusqu’à 7,63 millions d’euros de chiffre d’affaires

B ≤ 38 120

15 %

Toutes les entreprises

38 120 < B ≤ 500 000

28 %

Toutes les entreprises

500 000 < B

31 %

2020

PME jusqu’à 7,63 millions d’euros de chiffre d’affaires

B ≤ 38 120

15 %

Toutes les entreprises

Intégralité du bénéfice

28 %

2021

PME jusqu’à 7,63 millions d’euros de chiffre d’affaires

B ≤ 38 120

15 %

Toutes les entreprises

Intégralité du bénéfice

26,5 %

2022

PME jusqu’à 7,63 millions d’euros de chiffre d’affaires

B ≤ 38 120

15 %

Toutes les entreprises

Intégralité du bénéfice

25 %

N.B. : le tableau fait état du taux réduit de 15 % en plus du taux normal sur lequel la trajectoire de baisse porte. L’application du taux normal résultant de la trajectoire ne fait en effet pas obstacle au bénéfice du taux réduit de 15 %.

B.   Les coordinations induites par la baisse du taux normal d’IS à 25 %

Le présent article procède à de nombreuses coordinations liées à la baisse du taux normal de l’IS, qui n’avaient pas été faites par l’article 11 de la loi de finances pour 2017. Il ne s’agit pas de simples aménagements légistiques, mais bien de coordinations importantes ayant un impact sur le fond.

1.   L’ajustement des taux des retenues et prélèvements à la source

Les C, D et G du I ajustent les taux des retenues à la source et prélèvements applicables lorsque le bénéficiaire des revenus imposés ne dispose pas d’une installation professionnelle permanente en France, afin de les aligner sur la baisse du taux normal prévue par le présent article, à savoir 31 % en 2019, 28 % en 2020, 26,5 % en 2021 et 25 % à compter de 2022.

● Le C porte sur la retenue à la source prévue à l’article 182 B du CGI, qui concerne certains revenus non salariaux tirés de prestations réalisées en France (ainsi que les salaires payés à raison de prestations sportives, qui ne sont pas concernées par le dispositif proposé). Le taux de cette retenue à la source, pour les revenus dans le champ du présent article, est de 33 1/3 % (il est de 75 % lorsque le bénéficiaire des revenus est établi dans un État ou territoire non coopératif ─ ETNC ─ au sens de l’article 238‑0 A du CGI). Le C aligne le taux de 33 1/3 % sur le taux normal de l’IS résultant de la trajectoire proposée.

● Le D porte sur la retenue à la source applicable aux produits distribués par des sociétés françaises à des non-résidents prévue à l’article 119 bis du CGI, et dont les taux sont fixés à l’article 187 du même code. Quatre taux sont applicables en fonction des revenus et de leurs bénéficiaires :

– un taux de 21 % pour les revenus de capitaux mobiliers soumis à l’IS, éligibles à l’abattement de 40 % et bénéficiant à des personnes physiques ;

– un taux de 15 % pour les dividendes bénéficiant à des organismes à but non lucratif établis dans l’Union européenne ou dans l’Espace économique européen ;

– un taux de 75 % pour les dividendes payés dans un ETNC ;

– enfin, un taux de 30 % pour les autres revenus distribués.

C’est ce dernier taux de 30 % que le D modifie, l’alignant sur le taux normal résultant de la trajectoire proposée.

● Le G, enfin, porte sur le prélèvement prévu à l’article 244 bis du CGI relatif au prélèvement applicable aux bénéfices industriels et commerciaux réalisés par des contribuables qui n’ont pas d’établissement en France, et dont le taux est de 33 1/3 % (et de 75 % lorsque le contribuable est établi dans un ETNC). Là aussi, ce taux de 33 1/3 % est modifié pour être aligné sur le taux normal résultant de la trajectoire proposée.

2.   L’ajustement du mécanisme d’encadrement de déductibilité des charges afférentes aux redevances de propriété intellectuelle

Les revenus tirés de la concession de licences d’exploitation de brevets sont imposables à l’IS au taux réduit de 15 %.

Afin de limiter des schémas d’optimisation fiscale assis sur l’asymétrie reposant sur, d’une part, la taxation à taux réduit des redevances tirées d’une sous-concession et, d’autre part, la déduction des redevances versées du résultat imposable au taux normal, l’article 11 de la loi de finances pour 2012 ([96]) a introduit à l’article 39 du CGI un 12 bis encadrant les modalités de déduction des redevances versées :

– le taux réduit de 15 % s’applique non sur l’intégralité des redevances perçues, mais sur la différence entre les redevances perçues et celles versées : à cet effet, les redevances versées ne sont pas déduites du résultat imposable au taux normal, mais uniquement des redevances perçues ;

– lorsqu’une entreprise sous-concédante verse et perçoit des redevances dans le même exercice mais que le solde de ces opérations est négatif, le montant déductible du résultat imposable au taux normal correspond à une fraction du solde négatif égale à 15 % de ce dernier ;

– enfin, lorsque l’entreprise sous-concédante verse une redevance au cours d’un exercice N et perçoit une redevance au titre d’un exercice ultérieur, lors de la sous-concession, une fraction des redevances versées est réintégrée au résultat (les redevances versées ont en effet pu être déduites du résultat imposable au taux normal, faute à l’époque du versement d’avoir perçu des redevances, la sous-concession étant ultérieure). Cette fraction est égale à (18 1/3) / (33 1/3), soit 55 % des redevances déduites. Le numérateur, 18 1/3, correspond à la différence entre le taux normal (33 1/3 %) et le taux réduit (15 %).

Le A du I du présent article modifie les modalités de calcul de la fraction à réintégrer, afin de substituer au rapport (18 1/3) / (33 1/3), assis sur l’ancien taux normal d’IS, un nouveau rapport tirant les conséquences de la trajectoire proposée de baisse du taux normal. Aucun taux n’est mentionné en tant que tel, afin de permettre un ajustement automatique entre 2019 et 2021 puis à compter de 2022, en fonction du taux normal applicable.

Évolution du montant de la fraction des redevances à réintégrer au résultat

En 2018, le rapport est inchangé, le taux normal étant de 33 1/3 %.

En 2019, le rapport sera de (31 – 15) / (31), soit 16 / 31, correspondant à 51,6 %.

En 2020, le rapport sera de (28 – 15) / (28), soit 13 / 28, correspondant à 46,4 %.

En 2021, le rapport sera de (26,5 – 15) / (26,5), soit 11,5 / 26,5, correspondant à 43,4 %.

Enfin, à compter de 2022, le rapport sera de (25 – 15) / (25), soit 10 / 25, correspondant à 40 %.

3.   L’ajustement de l’imputation des moins-values de long terme sur le résultat imposable

En application de l’article 39 quindecies et du a bis du I de l’article 219 du CGI, en cas de liquidation d’une entreprise, les moins-values nettes à long terme (soit l’excédent des moins-values à long terme sur les plus-values à long terme) peuvent être imputées sur le résultat imposable de l’exercice de liquidation, à hauteur d’une fraction égale au rapport entre, d’une part, le taux d’imposition des plus-values à long terme applicable lors de l’exercice de réalisation des moins‑values et, d’autre part, le taux normal de l’IS applicable au titre de l’exercice de liquidation (33 1/3 % jusqu’en 2018 inclus).

Pour les entreprises à l’impôt sur le revenu (IR), l’article 39 quindecies prévoit que la fraction des moins-values nettes à long terme imputable est de 16 / 34 de leur montant (soit 47 %). Le numérateur, 16, correspond au taux d’imposition des plus-values nettes à long terme pour les sociétés relevant de l’IR (16 %), tandis que le dénominateur, 34, correspond au taux normal de l’IS applicable jusqu’au 1er janvier 1993 (34 %). La doctrine fiscale prévoit cependant que le rapport est bien celui indiqué plus haut, en prenant au dénominateur le taux normal d’IS applicable au titre de l’exercice de liquidation, ce qui permet de retenir le taux de 33 1/3 ([97]).

Pour les entreprises relevant de l’IS, en vertu du a bis du I de l’article 219, la fraction imputable est égale à 15 / (33 1/3), soit 45 %.

Le B et le 3° du F du I du présent article, à l’image des coordinations précédemment décrites, ajuste le montant des moins-values nettes à long terme imputable sur le résultat à la trajectoire de baisse du taux normal de l’IS.

Cette coordination, au-delà de son intérêt compte tenu de la trajectoire de la baisse du taux normal d’IS, a le mérite de corriger dans la loi, après un quart de siècle d’oubli, le dénominateur du rapport à prendre en compte au titre de l’article 39 quindecies pour les sociétés à l’IR (correction apportée jusque-là de façon opportune par la doctrine).

Évolution de la fraction de moins-value nette à long terme imputable
sur le bénéfice de l’exercice de liquidation

Pour les entreprises à l’IR, le montant des moins-values nettes à long terme imputable sur le résultat de l’exercice de liquidation sera :

– en 2018, de 16/ (33 1/3), soit 48 % ;

– en 2019, de 16 / 31, soit 51,6 % ;

– en 2020, de 16 / 28, soit 57,1 % ;

– en 2021, de 16 / 26,5, soit 60,4 % ;

– à compter de 2022, de 16 / 25, soit 64 %.

Pour les entreprises à l’IS, la chronique sera similaire, le numérateur étant de 15 et non de 16. La fraction imputable correspondra donc, sur la même période, à 45 %, à 48,4 %, 53,6 %, 56,6 % et 60 %.

4.   La précision des conditions de déductibilité des intérêts d’emprunt

L’article 212 du CGI porte sur l’un des nombreux outils existant dans le droit fiscal français pour encadrer la déductibilité des charges financières aux fins de lutte contre certains comportements d’optimisation ([98]).

Son I encadre la déductibilité des intérêts d’emprunt servis à une entreprise liée, et le b de ce I porte prévoit un dispositif particulier contre les dispositifs hybrides (dispositifs qui reposent sur le traitement différent d’un même objet, conduisant entre deux juridictions fiscales à une double non-imposition ou à une déduction sans imposition). En application de ce b, les intérêts d’emprunt servis à une entreprise liée sont déductibles si cette dernière est assujettie, au titre des intérêts qui lui sont servis, à un impôt dont le montant est au moins égal au quart de l’IS français déterminé dans les conditions de droit commun.

Le E du I du présent article précise que l’IS français pris en compte est celui au taux normal découlant de la trajectoire proposée.

Montant minimal de l’impôt supporté par l’entreprise liée
à laquelle les intérêts sont servis

La déductibilité des intérêts d’emprunt servis à une société liée jouera donc si cette dernière, au titre des intérêts perçus, est assujettie à un impôt au moins égal :

– à 8,33 % des intérêts en 2018 ;

– à 7,75 % des intérêts en 2019 ;

– à 7 % des intérêts en 2020 ;

– à 6,625 % des intérêts en 2021 ;

– à 6,25 % des intérêts à compter de 2022.

IV.   L’impact budgétaire ET économique

La baisse du taux normal d’IS à 25 % conduira à alléger la charge fiscale pesant sur les entreprises de 4,1 milliards d’euros supplémentaires par rapport à la trajectoire prévue par la loi de finances pour 2017 précitée. Elle entraînera, à partir de 2023, une perte de recettes budgétaires annuelles supplémentaires équivalente. Cette nouvelle trajectoire permettra d’abaisser plus rapidement et plus fortement le taux facial d’IS utilisé dans les comparaisons internationales.

A.   Un coût annuel supplémentaire de 4,1 milliards d’euros

Le tableau suivant dresse l’évolution de l’impact budgétaire de cette baisse, en partant de la trajectoire adoptée dans la loi de finances pour 2017.

impact budgétaire de la trajectoire de baisse du taux normal d’IS à 25 %

(Par rapport à la trajectoire prévue par la loi de finances pour 2017)

(en milliards d’euros)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Perte de recettes

0

0

+ 0,5

+ 0,2

– 1,66

– 3,75

– 4,1

– 4,1

Source : évaluation préalable.

La nouvelle trajectoire ne modifiant pas celle prévue par la loi de finances pour 2017 s’agissant de l’année 2017 (non prise en compte) et de l’année 2018, elle n’entraîne aucune perte de recettes supplémentaire.

La hausse constatée en 2019 et 2020 est due, pour l’essentiel, à la modification de la trajectoire de baisse du taux normal en 2019 par rapport à l’étape, cette même année, prévue par la loi de finances pour 2017.

L’impact consolidé de la baisse à 25 %, c’est-à-dire l’impact total au regard d’un taux normal de 33 1/3 %, n’est pas fourni par l’évaluation préalable du Gouvernement. Toutefois, il peut être calculé en partant du principe selon lequel la chronique du coût budgétaire de la trajectoire proposée est faite à partir de celle prévue par la loi de finances pour 2017.

Cette consolidation repose sur les données figurant dans les évaluations préalables des projets de loi de finances pour 2017 et 2018. L’évaluation préalable du projet de loi de finances pour 2017 n’intégrait pas le coût lié au rehaussement du plafond de chiffre d’affaires pour bénéficier du taux réduit pour les PME, la mesure ayant été adoptée par voie d’amendement. En 2019, toutes les entreprises concernées par ce rehaussement auraient été imposées à 28 % avec la trajectoire prévue par la loi de finances pour 2017. Le gain par entreprise induit par le bénéfice du taux réduit se serait donc établi à 4 955,6 euros. D’après l’évaluation préalable du présent article, 20 400 entreprises sont concernées. Sur cette base, le coût du rehaussement aurait donc été de l’ordre de 100 millions d’euros par an, à compter de 2019. En conséquence, le tableau intègre dans la trajectoire de la loi de finances pour 2017, et à compter de 2019, ce coût supplémentaire. L’impact consolidé présenté est donc, toujours à compter de 2019, majoré de 0,1 milliard d’euros.

impact consolidé de la baisse du taux normal d’is à 25 %

(en milliards d’euros)

Impact

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Impact de la trajectoire du PLF 2018

0

0

+ 0,5

+ 0,2

– 1,66

– 3,75

– 4,1

Impact de la trajectoire de la LFI 2017

– 0,33

– 1,45

– 4,0

– 6,7

– 7,10

– 7,10

– 7,1

Impact consolidé de la baisse à 25 %

 0,33

 1,45

 3,5

 6,5

 8,76

 10,85

 11,2

Source : commission des finances et évaluations préalables des projets de loi de finances pour 2017 et 2018.

L’impact consolidé d’un passage du taux normal de 33 1/3 % à 25 % serait donc, au regard de cette évaluation, de 11,2 milliards d’euros à compter de 2023.

B.   une trajectoire plus avantageuse pour les entreprises

1.   La nouvelle trajectoire accélère et accentue la baisse du taux normal

La trajectoire proposée par le présent article s’appuie sur celle prévue par la loi de finances pour 2017, en la prolongeant et l’accentuant après 2020, et en s’en écartant en 2019. Malgré ces différences, elle se révèle nettement plus avantageuse pour toutes les entreprises. Le tableau suivant compare la trajectoire prévue au présent article avec celle figurant dans la loi de finances pour 2017.

comparaison des trajectoires de baisse du taux normal de l’is

Année

Trajectoire LFI 2017

Trajectoire PLF 2018

2017

28 % sur les 75 000 premiers euros de bénéfice pour les PME

Année non concernée par le PLF 2018

2018

28 % sur les 500 000 premiers euros de bénéfice pour toutes les entreprises
 

28 % sur les 500 000 premiers euros de bénéfice pour toutes les entreprises
(Pas de modification)

2019

28 % sur l’intégralité du bénéfice pour les entreprises dont le CA n’excède pas un milliard d’euros

Relèvement du plafond de chiffre d’affaires pour bénéficier du taux réduit PME de 7,63 à 50 millions d’euros

31 % sur la part de bénéfice excédant 500 000 euros pour toutes les entreprises


Suppression du relèvement du plafond de chiffre d’affaires pour bénéficier du taux réduit PME
 

2020

28 % sur l’intégralité du bénéfice de toutes les entreprises

28 % sur l’intégralité du bénéfice de toutes les entreprises (Pas de modification)

2021

26,5 % sur l’intégralité du bénéfice de toutes les entreprises

2022

25 % sur l’intégralité du bénéfice de toutes les entreprises

N.B. : le taux réduit de 15 % sur les 38 120 premiers euros continue à s’appliquer à chacune des étapes des deux trajectoires.

La poursuite de la baisse du taux normal entamée par la dernière loi de finances sera nécessairement plus avantageuse pour les entreprises dans la mesure où elle accentuera la réduction de ce taux d’un point et demi en 2021 et de trois points à compter de 2022. Le graphique suivant illustre la différence des deux trajectoires de baisse du taux normal d’IS (hors impact des contributions exceptionnelles prévues à l’article 1er du premier projet de loi de finances rectificative pour 2017).

S’agissant du taux facial, utilisé dans le cadre des comparaisons internationales, la nouvelle trajectoire se révèle aussi plus avantageuse et ce, dès 2019, ainsi que l’illustre le graphique ci-après (également hors impact des contributions exceptionnelles prévues à l’article 1er du premier projet de loi de finances rectificative pour 2017).

2.   Le changement de trajectoire en 2019

Ainsi qu’il a été vu, la loi de finances pour 2017 prévoit, en 2019, l’application du taux de 28 % sur l’intégralité du bénéfice des sociétés dont le chiffre d’affaires n’excède pas un milliard d’euros. Pour les autres, le taux de 28 % ne s’applique qu’aux 500 000 premiers euros de bénéfice, le taux de 33 1/3 % s’appliquant au-delà (il n’y a donc pour elle aucun changement par rapport à 2018).

La nouvelle trajectoire proposée par le présent article prévoit qu’au-delà des 500 000 premiers euros de bénéfice (sur lesquels un taux de 28 % s’applique), le taux normal d’IS sera de 31 %.

Cette modification au titre de l’année 2019 emporte quatre effets.

● En premier lieu, elle met fin à la distinction reposant sur le chiffre d’affaires et supprime donc l’important effet de seuil que celle-ci entraînait. Le tableau suivant illustre l’effet de seuil ainsi produit, à travers la situation de deux entreprises dont le chiffre d’affaires n’est séparé que d’un euro.

comparaison de l’is dû en 2019 selon la trajectoire applicable

(en euros)

Entreprise

Chiffre d’affaires

Bénéfice

LFI 2017

PLF 2018

Entreprise A

1 000 000 000

43 892 215,57

12 289 820

13 606 587,83

Entreprise B

1 000 000 001

43 892 215,61

14 604 072

13 606 587,84

Différence

1

0,04

2 314 252

0,01

Variation

0 %

0 %

18,8 %

0 %

Source : commission des finances, d’après les ratios bénéfice / chiffre d’affaires des entreprises dont le chiffre d’affaires excède un milliard d’euros fournis par l’administration fiscale en réponse au questionnaire du Rapporteur général sur le premier projet de loi de finances rectificative pour 2017.

En application de la loi de finances pour 2017, la charge fiscale de l’entreprise B, dont le chiffre d’affaires n’est supérieur à celui de l’entreprise B que d’un euro, aurait été alourdie de plus de 2,3 millions d’euros, soit un supplément de 18,8 %.

La nouvelle trajectoire supprime cet effet de seuil, qui aurait pu entraîner des conséquences négatives en termes de croissance pour les entreprises.

● En deuxième lieu, pour les entreprises dont le chiffre d’affaires n’excède pas un milliard d’euros, la nouvelle trajectoire conduira, en 2019, à une imposition plus importante puisque le taux normal sera de 31 % et non de 28 %.

Cependant, la totalité des TPE et la très grande majorité des autres PME ne seront pas concernées par cette étape, leur bénéfice n’excédant pas 500 000 euros. D’après l’évaluation préalable du présent article, la nouvelle étape 2019 fera 27 174 « perdants ». Si ce chiffre peut paraître important, il convient de le rapporter à celui des entreprises soumises à l’IS, soit 1,5 million.

En conséquence, moins de 2 % des entreprises concernées par le présent article paieront un IS plus élevé en 2019 par rapport à la trajectoire de la loi de finances pour 2017. En tout état de cause, en 2020, l’IS dû au titre des deux trajectoires sera le même, tandis qu’à compter de 2021, et plus encore à compter de 2022, la nouvelle trajectoire bénéficiera à toutes les entreprises.

● En troisième lieu, cette trajectoire allégera dès 2019 la charge pesant sur les entreprises de taille intermédiaire (ETI) les plus importantes et les grandes entreprises, qui auraient dû attendre 2020 pour profiter d’une baisse substantielle dans le cadre de la précédente trajectoire.

● Enfin, en quatrième et dernier lieu, la suppression de la distinction en fonction du chiffre d’affaires permettra, dès 2019, d’afficher un taux facial en diminution, là où la trajectoire prévue par la loi de finances pour 2017 supposait pour cela d’attendre 2020.

3.   Le maintien du champ du taux réduit PME actuellement en vigueur

Ainsi qu’il a été vu, l’article 11 de la loi de finances précitée prévoyait un rehaussement du plafond de chiffre d’affaires rendant éligible au taux réduit PME, le faisant passer de 7,63 millions d’euros à 50 millions d’euros. Ce rehaussement, toutefois, ne devait pas entrer en vigueur avant 2019 : les entreprises concernées n’en bénéficient donc pas encore.

Le présent article revient sur ce rehaussement futur, en conservant le périmètre actuel du taux réduit de 15 %, et donc le plafond de chiffre d’affaires de 7,63 millions d’euros. Il ne change donc rien à la situation des entreprises telle qu’elle existe actuellement.

L’extension du champ d’application du taux réduit pour les PME, décidée par la loi de finances pour 2017 et devant entrer en vigueur à compter de 2019, visait à alléger la charge fiscale pesant sur l’ensemble des PME, et non plus uniquement sur celles dont le chiffre d’affaires est inférieur à 7,63 millions d’euros.

Compte tenu de la nouvelle trajectoire de baisse du taux normal de l’IS, qui prévoit que ce dernier s’établira à 25 % à compter de 2022, le Gouvernement a décidé de revenir sur l’extension du taux réduit. S’il peut paraître a priori défavorable aux entreprises concernées, ce choix repose en réalité sur plusieurs motivations.

a.   La pertinence du maintien du périmètre du taux réduit pour les PME

Le maintien du périmètre du taux réduit au plafond de 7,63 millions de chiffre d’affaires se justifie par plusieurs séries de considérations, au-delà des critiques précédemment mentionnées dont l’outil fait l’objet (Cf. supra, II, B, 6).

● En premier lieu, le rehaussement prévu à compter de 2019, s’il conduisait à englober l’ensemble des PME – à l’exception de celles dont le chiffre d’affaires aurait été exactement de 50 millions d’euros –, aurait concerné environ 20 400 entreprises, d’après les données contenues dans l’évaluation préalable, là où le nombre actuel de bénéficiaires du taux réduit s’élève à 708 000 entreprises ([99]). Si le nombre de bénéficiaires potentiels n’est naturellement pas négligeable, l’essentiel des PME profitent cependant déjà du dispositif.

● En deuxième lieu, le gain fiscal qu’auraient retiré les PME concernées en 2019 aurait été de moins de 5 000 euros (4 955,6 euros exactement, correspondant à la différence entre l’impôt dû sur 38 120 euros de bénéfice à un taux de 28 % et l’impôt dû sur le même montant à un taux de 15 %). Le tableau suivant illustre, pour différentes PME rendues éligibles au taux réduit à compter de 2019 par la loi de finances pour 2017, le gain tiré de ce taux réduit par rapport à l’IS dû en 2019 en vertu de cette trajectoire.

Gain résultant du taux réduit pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est compris entre 7,63 et 50 millions d’euros

(en euros)

Chiffre d’affaires

Bénéfice imposable

IS sans taux réduit

IS avec taux réduit

Gain au regard de l’IS dû

7 630 000

381 500 

106 820

101 864

4,64%

10 000 000

412 000 

115 360

110 404

4,30%

20 000 000

824 000 

230 720

225 764

2,15%

30 000 000

1 236 000 

346 080

341 124

1,43%

40 000 000

1 648 000 

461 440

456 484

1,07%

49 900 000

2 055 880 

575 646

570 691

0,86%

Source : commission des finances, d’après les ratios de bénéfice sur chiffre d’affaires fournis par l’administration fiscale.

De façon logique, plus le chiffre d’affaires est grand, plus le bénéfice imposable est important et plus l’impact du taux réduit est marginal. Pour les plus grandes des PME, le bénéfice du taux réduit est de l’ordre de 1 % de l’impôt dû, voire moins.

● En troisième lieu, ainsi qu’il a été vu, le coût du rehaussement aurait été de l’ordre de 100 millions d’euros. Cela est loin d’être neutre, surtout pour un dispositif qui, s’il pouvait se justifier dans le cadre de la précédente trajectoire, a perdu son utilité au regard de l’amplification de la baisse du taux normal. La nouvelle trajectoire est en effet plus intéressante pour l’ensemble des entreprises, y compris celles qui ne bénéficieront pas du taux réduit.

b.   Le gain supérieur tiré de la trajectoire proposée

La trajectoire prévue par le dispositif proposé, à savoir une baisse du taux d’IS progressive jusqu’à 25 % à compter de 2022, est plus intéressante pour l’ensemble des entreprises que celle prévue dans la loi de finances pour 2017. S’agissant plus particulièrement des entreprises concernées par la mesure de rehaussement, c’est-à-dire celles dont le chiffre d’affaires est compris entre 7,63 millions d’euros et 50 millions d’euros, l’absence de bénéfice du taux réduit pour les PME sera effacée par un avantage supérieur tiré d’une imposition au taux normal de 25 %.

Le tableau suivant dresse la comparaison de la trajectoire prévue par la loi de finances pour 2017 et celle proposée dans le présent article, pour les entreprises concernées par le rehaussement.

Comparaison de la charge fiscale découlant des deux trajectoires pour les PME concernées par la mesure relative au taux réduit d’IS

(en euros)

Chiffre d’affaires

Bénéfice

LFI 2017

PLF 2018

2019
à 2022

2019

2020

2021

2022

Différence 2022
PLF-LFI

Variation 2022 PLF/LFI

10 000 000

412 000

110 404,4

115 360,0

115 360,0

109 180,0

103 000

– 7 404,4

– 7,2%

20 000 000

824 000

225 764,4

240 440,0

230 720,0

218 360,0

206 000

– 19 764,4

– 9,6%

30 000 000

1 236 000

341 124,4

368 160,0

346 080,0

327 540,0

309 000

– 32 124,4

– 10,4%

40 000 000

1 648 000

456 484,4

495 880,0

461 440,0

436 720,0

412 000

– 44 484,4

– 10,8%

49 900 000

2 055 880

570 690,8

622 322,8

575 646,4

544 808,2

513 970

– 56 720,8

– 11,0%

N.B. : le bénéfice de chaque société a été déterminé au regard des rapports entre bénéfice imposable et chiffre d’affaires communiqués par l’administration fiscale.

Source : commission des finances

En 2019 et 2020, au titre de la nouvelle trajectoire proposée par le présent projet de loi de finances, les PME dont le chiffre d’affaires est compris entre 7,63 et 50 millions d’euros supporteront une charge fiscale plus élevée que celle qui résulterait de la trajectoire prévue par la loi de finances pour 2017. Cela est dû :

– pour 2019, essentiellement par la modification de la trajectoire de baisse du taux normal, avec un seul taux pour toutes les entreprises fixé à 31 % (sous réserve du taux de 28 % pour les 500 000 premiers euros de bénéfice), mais aussi par l’absence de bénéfice du taux réduit ;

– pour 2020, exclusivement par l’absence du bénéfice du taux réduit (le manque à gagner étant de 4 955,6 euros).

En revanche, dès 2021, du fait de la poursuite de la baisse du taux réduit, toutes les PME concernées verront leur charge fiscale diminuer, diminution qui s’accentue à compter de 2022 avec l’application du taux de 25 %.

Au demeurant, il faut rappeler qu’en 2019, les entreprises bénéficieront d’un double avantage dû à la perception du CICE millésime 2018 et au bénéfice des allégements de charges patronales, ce qui fera plus que compenser la hausse
– provisoire – de leur charge fiscale.

Les deux graphiques suivants illustrent l’évolution de l’IS dû, entre 2019 et 2022, en fonction de la trajectoire retenue, pour deux entreprises aux chiffres d’affaires respectifs de 10 et 40 millions d’euros, et témoignent de l’avantage substantiel retiré par les entreprises avec la trajectoire proposée, même en l’absence de bénéfice du taux réduit, par rapport à la trajectoire prévue par la loi de finances pour 2017.

D’une manière générale, à partir d’un certain stade, un taux normal de 25 % s’appliquant à l’intégralité du bénéfice imposable est plus avantageux pour les entreprises qu’un taux normal de 28 % avec un taux réduit de 15 % sur les 38 120 premiers euros de bénéfice.

Le niveau de bénéfice à partir duquel un taux intégral de 25 % est plus avantageux se situe à 166 000 euros, comme l’illustre le tableau suivant.

is dû selon le taux applicable

(en euros)

Bénéfice

LFI 2017

Taux intégral de 25 %

Taux réduit de 15 %
(sur 38 120 euros)

Taux normal de 28 %
(au-delà de 38 120 euros)

Total

165 000

5 718

35 526,4

41 244,4

41 250

166 000

5 718

35 806,4

41 524,4

41 500

Source : commission des finances.

Sur la base des ratios bénéfice / chiffre d’affaires transmis par l’administration fiscale, un bénéfice de 166 000 euros correspond à un chiffre d’affaires d’environ 2,8 millions d’euros. Le taux réduit s’appliquant aux entreprises dont le chiffre d’affaires n’excède pas 7,63 millions d’euros, son champ va au-delà du point à partir duquel un taux normal de 25 % sur l’intégralité du bénéfice est plus intéressant. Dès lors, la nouvelle trajectoire est systématiquement plus avantageuse que la précédente. Le graphique suivant illustre cela, sur la base des ratios bénéfice / chiffre d’affaires transmis par l’administration fiscale.

Il ressort de ce graphique que :

– à partir d’un bénéfice de 166 000 euros, il est plus avantageux d’être imposé à 25 % sur l’intégralité du bénéfice (courbe verte) que d’être imposé à 15 % sur les 38 120 premiers euros de bénéfice et à 28 % au-delà (courbe bleue, correspondant à la trajectoire prévue par la loi de finances pour 2017) ;

– la trajectoire prévue par le présent article, consistant en l’application d’un taux réduit de 15 % sur la même tranche de bénéfice et d’un taux normal de 25 % au-delà (courbe rouge), se révèle – logiquement – systématiquement plus intéressante que la trajectoire prévue par la loi de finances pour 2017 (courbe bleue) pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 7,63 millions d’euros.

c.   L’inopportunité de la suppression totale du taux réduit

Malgré les critiques émises contre le taux réduit pour les PME, la suppression totale de ce dernier, préconisée par le CPO, ne paraît pas souhaitable.

D’une part, pour les entreprises concernées par ce taux tel qu’il existe, notamment les microentreprises dont le chiffre d’affaires n’excède pas 2 millions d’euros, il peut représenter un gain fiscal non négligeable – à la différence des PME les plus importantes –, susceptible d’appuyer et d’accompagner leur développement.

D’autre part, une telle suppression pourrait être vue comme adressant un mauvais signal aux PME dont le chiffre d’affaires est inférieur à 7,63 millions d’euros.

Cette suppression concernerait potentiellement 1,5 million d’entreprises, et 704 000 qui en bénéficient effectivement. Elle se révélerait donc inopportune, malgré le gain budgétaire qu’elle entraînerait.

4.   L’impact consolidé de la nouvelle trajectoire pour les entreprises

La trajectoire proposée par le présent article profitera à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, comme l’illustre le tableau suivant.

comparaison de l’is dû en 2022

(en euros)

Chiffre d’affaires

Bénéfice

Droit antérieur
à 2017

LFI 2017

PLF 2018

Différence PLF-LFI

Variation PLF/LFI

Différence PLF-droit antérieur

Variation PLF-droit antérieur

500 000

30 050

4 507,5

4 507,5

4 507,5

0,0

0 %

0,0

0 %

1 000 000

60 100

13 044,7

11 872,4

11 213,0

– 659,4

– 6 %

– 1 831,7

– 14 %

2 000 000

120 200

33 078,0

28 700,4

26 238,0

– 2 462,4

– 9 %

– 6 840,0

– 21 %

5 000 000

300 500

93 178,0

79 184,4

71 313,0

– 7 871,4

– 10 %

– 21 865,0

– 23 %

10 000 000

412 000

137 333,3

110 404,4

103 000,0

– 7 404,4

– 7 %

– 34 333,3

– 25 %

40 000 000

1 648 000

549 333,3

456 484,4

412 000,0

– 44 484,4

– 10 %

– 137 333,3

– 25 %

100 000 000

3 410 000

1 136 666,7

954 800,0

852 500,0

– 102 300,0

– 11 %

– 284 166,7

– 25 %

500 000 000

14 150 000

4 716 666,7

3 962 000,0

3 537 500,0

– 424 500,0

– 11 %

– 1 179 166,7

– 25 %

2 000 000 000

87 784 431

29 261 477,1

24 579 640,1

21 946 107,8

– 2 633 532,9

– 11 %

– 7 315 369,3

– 25 %

Source : commission des finances, à partir des ratios bénéfice / chiffre d’affaires transmis par l’administration fiscale et, pour les entreprises dont le chiffre d’affaires excède un milliard d’euros, par les réponses au questionnaire du Rapporteur général sur le premier projet de loi de finances rectificative pour 2017.

Un seul type d’entreprise ne réalise aucun gain, sans que cela ne constitue un désavantage : il s’agit des entreprises dont l’intégralité du bénéfice imposable relève du taux réduit de 15 %. La trajectoire ne portant que sur le taux normal, si seul le taux réduit s’applique, il ne peut y avoir de gain (que soit retenue la trajectoire prévue par la dernière loi de finances ou celle proposée).

Par rapport au droit antérieur à la loi de finances pour 2017, les entreprises voient leur charge fiscale au titre de l’IS diminuer de 25 %. Cette diminution est, en proportion, plus faible pour les entreprises bénéficiant du taux réduit de 15 %, puisque l’impact de la baisse du taux normal est moins conséquent.

Enfin, par rapport à la trajectoire prévue dans la loi de finances pour 2017, l’IS dû baisse en moyenne de 11 %. La baisse est moins appuyée pour les PME dont le chiffre d’affaires est compris entre 7,63 et 50 millions d’euros, dans la mesure où ces entreprises ne bénéficieront pas du taux réduit. Néanmoins, cette baisse est tangible et témoigne du caractère plus avantageux de la trajectoire prévue par le présent article.

*

*     *

La commission examine l’amendement II-CF581 de M. Jean-Paul Dufrègne

M. Jean-Paul Dufrègne. Le présent amendement propose de supprimer cet article, qui vise à diminuer progressivement le taux de l’IS. En dix ans, le rendement net de cet impôt a été plus que divisé par deux, un rendement désormais largement inférieur à la moyenne des pays de l’OCDE.

Il y a lieu de supprimer ou de recentrer les dispositifs dérogatoires à l’impôt sur les sociétés, en particulier le CICE, afin d’en améliorer le rendement, de créer de l’emploi, de favoriser l’investissement et la conversion écologique de l’économie.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement II-CF461 de M. Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Il s’agit de réduire le taux de l’impôt sur les sociétés pour absorber l’impact de la transformation du CICE en baisses de charges. La baisse des charges va en effet se traduire par une hausse des résultats, donc de l’impôt, dans des proportions considérables puisqu’on parle d’un montant de 5 à 6 milliards d’euros. Nous voulons éviter que l’État reprenne d’une main ce qu’il donne de l’autre.

M. le Rapporteur général. J’émets un avis défavorable à ce petit amendement à 3 milliards d’euros, en précisant que, sur chacun des exercices 2019 et 2020, son coût atteindrait même les 5 milliards d’euros.

M. le président Éric Woerth. J’ai bien conscience que c’est un peu cher, mais cela me semble une mesure juste.

M. Julien Aubert. Je soutiens l’excellent amendement de notre président. On a connu quelques petits cafouillages récents sur la fiscalité, avec notamment des taux d’impôt sur les sociétés qui seront bien supérieurs en 2018 à ce qui avait été annoncé. Ne faudrait-il pas que le Gouvernement harmonise sa politique fiscale et sa communication ?

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF592 et IICF593 de Mme Valérie Rabault.

Mme Christine Pires Beaune. Ces amendements visent à favoriser les PME. Le premier leur applique un taux d’IS réduit jusqu’à un bénéfice imposable de 100 000 euros ; le second est un amendement de repli, qui conserve le plafond actuel de 38 120 euros.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable. J’ajoute que, si Mme Rabault a reproché à Amélie de Montchalin de ne pas chiffrer ses amendements, elle n’a pas non plus chiffré le premier des deux que vous venez de présenter. Nous l’avons fait : l’adoption de l’amendement II-CF592 coûterait à l’État 1,5 milliard d’euros.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 41 sans modification.

*

*     *

Article 42
Baisse du taux du CICE en 2018 et suppression du CICE
à compter du 1er janvier 2019

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article s’inscrit dans le cadre de la substitution au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) d’allégements de charges patronales à compter de 2019 prévus par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Il rétablit le taux du CICE à 6 % pour les rémunérations versées à compter de 2018, avant de supprimer le CICE à partir de 2019 en abrogeant l’article 244 quater C du code général des impôts (CGI).

La mesure relative au taux du CICE devrait conduire à la réalisation d’un gain de 1,8 milliard d’euros en 2019 en comptabilité budgétaire (3,1 milliards d’euros en comptabilité nationale), tandis que la suppression du CICE devrait, à compter de 2020, permettre un gain estimé à 22,5 milliards d’euros en comptabilité nationale.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 72 de la loi de finances pour 2017 a augmenté d’un point le taux du CICE, pour les rémunérations versées à compter de 2017, le faisant passer de 6 % à 7 %.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’état du droit

Le CICE a été créé par l’article 66 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 ([100]), qui a rétabli dans le code général des impôts (CGI) l’article 244 quater ([101]). Il est entré en vigueur le 1er janvier 2013.

A.   Les bénéficiaires du CICE

Le CICE est ouvert aux entreprises imposées d’après leur bénéfice réel, qu’elles soient assujetties à l’impôt sur les sociétés (IS) ou à l’impôt sur le revenu (IR). Les entreprises imposées d’après les régimes « micro » ne sont ainsi pas incluses dans le champ du crédit d’impôt ([102]).

Il bénéficie également à certaines entreprises exonérées temporairement d’impôt en application des dispositifs d’exonérations zonées ou en faveur des « jeunes entreprises innovantes » ([103]).

Les organismes à but non lucratif peuvent également bénéficier du CICE s’ils exercent des activités lucratives, au titre des salaires versés aux personnes affectées à de telles activités.

B.   L’assiette du CICE : les rémunérations n’excédant pas 2,5 SMIC

Aux termes du premier alinéa du II de l’article 244 quater C du CGI, l’assiette du CICE est constituée des rémunérations brutes qui n’excèdent pas 2,5 SMIC. Les rémunérations supérieures à ce plafond sont exclues du dispositif dans leur totalité, y compris pour leur fraction inférieure ou égale à 2,5 SMIC.

Les éléments de rémunération pris en compte sont ceux retenus pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, ainsi que le prévoit l’article L. 242‑1 du code de la sécurité sociale : salaires ou gains, indemnités de congés payés, retenues pour cotisations ouvrières, indemnités, primes, gratifications, avantages en nature et sommes perçues directement ou par l’entremise d’un tiers à titre de pourboire.

Les majorations pour heures supplémentaires ou complémentaires sont également incluses dans l’assiette si elles ne conduisent pas à un dépassement du plafond de 2,5 SMIC.

C.   Le taux du CICE

1.   Un taux de droit commun de 7 % depuis 2017

Le taux du CICE a évolué depuis 2013 :

– pour les rémunérations versées en 2013, il était de 4 % ;

– pour les rémunérations versées entre 2014 et 2016 inclus, il était de 6 % ;

– pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2017, le taux est de 7 %, en vertu de l’article 72 de la loi de finances pour 2017 ([104]).

2.   Un taux majoré en outre-mer depuis 2015

Depuis 2015, le taux du CICE assis sur les rémunérations versées à des salariés affectés à des exploitations situées dans les départements d’outre-mer est majoré ([105]) :

– pour les rémunérations versées en 2015, le taux était de 7,5 % ;

– pour celles versées à compter du 1er janvier 2016, le taux est de 9 %.

Afin de garantir la compatibilité de cette majoration avec le droit européen en matière d’aides d’État, l’article 111 de la loi de finances rectificative pour 2016 ([106]) a expressément subordonné le bénéfice du taux majoré au respect de l’article 15 du règlement général d’exemption par catégorie du 17 juin 2014 ([107]).

D.   les Modalités d’imputation du CICE

Les modalités d’utilisation du CICE par les entreprises bénéficiaires sont définies à l’article 199 ter C du CGI s’agissant des redevables de l’IR. Elles sont également applicables aux redevables de l’IS en vertu de l’article 220 C du même code.

Comme tout crédit d’impôt, le CICE connaît un décalage d’un an entre son fait générateur et sa perception. Cependant, les spécificités de ses modalités d’imputation conduisent à accroître ce décalage, qui peut aller jusqu’à quatre ans après le versement des rémunérations, diluant substantiellement le gain susceptible d’être retiré par les entreprises.

1.   L’imputation de droit commun

Le CICE s’impute sur l’impôt dû au titre de l’année durant laquelle les rémunérations servant d’assiette ont été versées (le « millésime »). À titre d’exemple, le CICE dû au titre des rémunérations versées en 2016 constitue le « millésime 2016 ».

Si le CICE excède l’impôt dû, son bénéficiaire se trouve titulaire d’une créance sur l’État qui s’imputera sur l’impôt dû au titre des trois années suivantes. Si, à l’issue de cette période, l’intégralité de la créance de CICE n’a pas été consommée, l’excédent est remboursé. L’intégralité de l’avantage fiscal, dans une telle hypothèse, est donc perçue par l’entreprise quatre ans après le versement des rémunérations lui servant d’assiette.

2.   Le remboursement immédiat de la créance

En vertu du II de l’article 199 ter C du CGI, certaines entreprises peuvent obtenir le remboursement immédiat de la créance de CICE, sans avoir à atteindre le terme de la période de trois ans :

– les PME, au sens de l’article 2 de l’annexe I du règlement (UE) n° 651/2014 précité ;

– les entreprises nouvelles, sous réserve qu’elles satisfassent à des conditions de détention de capital et qu’elles ne résultent pas d’une concentration, d’une restructuration ou d’une extension ou reprise d’activités préexistantes ;

– les JEI (Cf. supra, A) ;

– les entreprises en difficulté, à compter de la date de la décision ou du jugement qui a ouvert la procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.

3.   Le préfinancement du CICE

Comme tout crédit d’impôt, le CICE ne bénéficie aux entreprises qu’avec une année de décalage. Aussi, afin de limiter, voire de supprimer ce retard d’un an qui peut porter préjudice à certaines entreprises, a été mis en place un mécanisme de préfinancement.

Le préfinancement repose sur les principes suivants :

– le montant du CICE auquel une entreprise aura droit au titre d’une année est estimé ;

– la créance « en germe » ainsi évaluée est cédée à un établissement de crédit, qui ouvre en contrepartie une avance de trésorerie immédiate à l’entreprise ([108]). La ligne de crédit ouverte à l’entreprise ne peut excéder 85 % de la valeur estimée de la créance ;

– la rémunération du préfinancement est réalisée selon des modalités fixées préalablement entre l’établissement de crédit et l’entreprise ;

– enfin, l’établissement peut s’adosser à un fonds de garantie, géré par Bpifrance, pour appuyer le préfinancement à destination des très petites entreprises (TPE) et des PME.

Bpifrance intervient dans le préfinancement du CICE par deux canaux :

– directement en octroyant des crédits couvrant une partie de la créance estimée ;

– indirectement, en fournissant une garantie à l’établissement de crédit qui accorde un préfinancement à l’entreprise.

4.   Synthèse des modalités d’utilisation du CICE

Le graphique ci‑après dresse la synthèse des modalités d’utilisation du CICE d’un millésime N, faisant notamment état du préfinancement, des restitutions immédiates et de l’imputation décalée en cas d’excédent sur l’impôt dû.

Source : commission des finances.

E.   Le contrôle et l’évaluation du CICE

Si l’article 244 quater C ne subordonne pas l’obtention du CICE à la satisfaction de certaines finalités, il fixe néanmoins à son I les objectifs que doit remplir le crédit d’impôt.

Ce dernier a pour objet « le financement de l’amélioration de [la] compétitivité [des entreprises] à travers notamment des efforts en matière d’investissement, de recherche, d’innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution de leur fonds de roulement ». À l’inverse, le CICE ne peut « ni financer une hausse de la part des bénéfices distribués, ni augmenter les rémunérations des personnes exerçant des fonctions de direction dans l’entreprise ».

L’administration fiscale ne contrôle pas l’usage du CICE fait par les entreprises. En revanche, les partenaires sociaux disposent d’un droit de regard sur cet usage : le comité d’entreprise doit être informé et consulté sur l’utilisation du CICE et peut, s’il estime que ce dernier n’a pas été employé de manière conforme à ses objectifs, établir un rapport qui sera transmis au comité de suivi régional du CICE.

Par ailleurs, l’article 66 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 précitée a prévu la création d’un comité de suivi du CICE, chargé de veiller au suivi et à la mise en œuvre de l’outil. À cet égard, il établit chaque année, avant le dépôt du projet de loi de finances, un rapport public sur les évaluations réalisées et les effets mesurés. Présidé par une personnalité nommée par le Premier ministre, il est composé de deux députés et deux sénateurs, dont deux appartiennent à l’opposition, et, à parts égales, de représentants des partenaires sociaux (organisations patronales et salariales) et des administrations compétentes ([109]). En outre, un comité technique, constitué de chercheurs et d’experts en économétrie, assiste le comité de suivi dans les travaux de recherche.

F.   Le dispositif particulier pour le secteur non lucratif

Afin de résorber la distorsion de concurrence entre organismes à but lucratif, bénéficiant du CICE, et organismes non lucratifs, exclus de son champ en raison de leur non-assujettissement aux impôts commerciaux, l’article 88 de la loi de finances pour 2017 ([110]) a mis en place, à compter de 2017, un crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires (CITS), prévu à l’article 231 A du CGI.

Le CITS, dont le régime est inspiré de celui du CICE et présenté précédemment, correspond à 4 % des rémunérations comprises dans l’assiette de la taxe sur les salaires et qui n’excèdent pas 2,5 SMIC.

Ses bénéficiaires sont les organismes non lucratifs éligibles à l’abattement de taxe sur les salaires prévu à l’article 1679 A du CGI ([111]).

L’article 43 du présent de loi de finances, par cohérence avec la suppression du CICE et les mesures d’allégements de charges prévues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, prévoit la suppression du CITS à compter de 2019.

II.   Les effets budgétaires et économiques du CICE

Le CICE constitue une dépense fiscale dont l’impact sur les comptes publics s’est accru, logiquement, à mesure de son appropriation par les entreprises et en raison de la hausse de son taux. L’évaluation des effets du CICE ne peut que s’inscrire dans le temps long, eu égard aux canaux de diffusion qu’il emprunte, pouvant ainsi expliquer les effets perçus jusque-là. Le décalage important entre fait générateur et perception de l’avantage, par ailleurs, accentue l’étalement des effets du CICE dans le temps.

A.   L’évolution du coût du CICE depuis 2014

Depuis sa création en 2013, le coût du CICE, ressenti pour la première fois en 2014, s’est substantiellement accru du fait de l’augmentation du nombre d’entreprises bénéficiaires et des hausses de taux qu’il a connues, d’abord en 2014, puis à compter de 2017.

1.   L’évolution du montant des créances de CICE

Au 5 août 2017, les données budgétaires du CICE, tous millésimes confondus, sont les suivantes :

– 62,1 milliards d’euros de créances déclarées ;

– 42,3 milliards d’euros de créances consommées ;

– 10,7 milliards d’euros de créances ayant fait l’objet d’un préfinancement.

Le tableau et le graphique ci-après font état, pour chaque millésime entre 2013 et 2016, du montant des créances déclarées au 5 août 2017.

évolution du montant des créances de cice (2013-2016)

(en milliards d’euros)

Millésime

2013

2014

2015

2016

Montant des créances

11,6

17,5

17,9

15,1

N.B. : les données sont celles à jour au 5 août 2017. Compte tenu du décalage dans le temps du CICE, plus le millésime est proche, moins les données correspondent à l’intégralité des créances au titre de ce millésime.

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

2.   L’évolution de l’impact du CICE sur les finances publiques

S’il croît à mesure que le montant des créances de chaque millésime augmente, le coût du CICE connaît une année de décalage indissociable d’un crédit d’impôt, et peut, surtout en comptabilité budgétaire, révéler un décalage supplémentaire de trois ans.

Le tableau ci-après fait état de l’évolution du coût du CICE, distinguant le coût en comptabilité nationale et celui en comptabilité budgétaire. La première, qui correspond à une comptabilité d’engagement, tient compte des créances déclarées auprès de l’administration, qu’elles soient consommées ou non. La seconde, qui est une comptabilité de caisse, repose sur les créances effectivement consommées (imputées sur l’impôt ou ayant fait l’objet de restitution immédiate).

Évolution du coût du cice
(hors mesures Projet de loi de finances pour 2018)

(en milliards d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Coût en comptabilité nationale

10,2

17,6

18,4

19,2

22,8

23,6

24,5

Coût en comptabilité budgétaire

6,6

12,5

12,9

16,5

21,0

21,4

22,3

N.B. : les montants indiqués jusqu’en 2018 inclus sont ceux actualisés dans le rapport 2017 du comité de suivi. Ceux des années 2019 et 2020 sont ceux calculés par la commission des finances en 2016, intégrant la hausse du taux du CICE à compter de 2017, produisant un impact à partir de 2018.

Source : commission des finances, comité de suivi du CICE, Rapport 2016, octobre 2016, et Rapport 2017, octobre 2017.

Le graphique ci-après illustre l’évolution du coût du CICE entre 2014 et 2020, intégrant le passage d’un taux de 6 % à 7 % à compter de 2017.

La hausse constatée entre 2014 et 2015 correspond au passage d’un taux de 4 % à un taux de 6 %. L’année 2017 connaît également un ressaut par rapport à l’année précédente, qui s’explique par le fait qu’il s’agit de la première année dans laquelle l’intégralité du CICE « millésime 2013 » est imputée. Enfin, l’augmentation entre 2017 et 2018 réside dans une nouvelle hausse du taux pour les salaires versés à compter de 2017.

3.   Les modalités de consommation du CICE par les entreprises

Le CICE peut s’imputer sur l’impôt dû, l’excédent étant alors reporté, ou faire l’objet d’une restitution immédiate pour certaines entreprises (notamment les jeunes entreprises et celles en difficultés).

Le tableau suivant fait état, pour chaque millésime entre 2013 et 2016, du montant des créances selon leur consommation, en distinguant selon l’impact sur l’IS ou l’IR.

Consommation des créances des cice 2013 à 2016

(situation au 5 août 2017)

(en milliards d’euros)

Millésime

Restitutions

Imputations

Total des consommations

Total des créances

2013

IS

4,28

5,055

9,335

11,218

IR

0,076

0,294

0,370

0,373

Total 2013

4,356

5,349

9,705

11,591

2014

IS

4,378

7,029

11,408

16,76

IR

0,195

0,58

0,775

0,781

Total 2014

4,573

7,609

12,183

17,541

2015

IS

4,261

6,931

11,193

17,003

IR

0,236

0,650

0,886

0,891

Total 2015

4,497

7,581

12,079

17,894

2016

IS

2,602

4,966

7,568

14,324

IR

0,173

0,610

0,783

0,787

Total 2017

2,775

5,576

8,351

15,111

Total

16,201

26,115

42,318

62,137

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

Les imputations assorties d’un report sont systématiquement plus importantes que les restitutions immédiates. Par ailleurs, les données du tableau permettent de constater, au regard du rapport entre les créances consommées et celles déclarées, que les entreprises à l’IR consomment quasiment l’intégralité d’un CICE donné dès la première année.

B.   Les bénéficiaires du CICE

1.   La répartition des bénéficiaires en fonction du régime d’imposition

Les entreprises imposées d’après un régime réel d’imposition sont éligibles au CICE, qu’elles relèvent de l’IR ou de l’IS. Ce sont cependant celles à l’IS qui constituent le contingent le plus nombreux et qui captent la très grande majorité des créances, ainsi que l’illustre le tableau ci–après.

répartition des créances de cice par catégorie de redevables
(millésimes 2013-2016)

Redevables

Nombre de bénéficiaires

Montant des créances
(en milliards d’euros)

2013

2014

2015

2016

2013

2014

2015

2016

Redevables IS

779 372

809 300

825 622

571 319

11,218

16,760

16,996

14,324

Redevables IR

274 983

433 455

440 722

408 080

0,373

0,781

0,891

0,786

Total

1 054 355

1 242 755

1 266 344

979 399

11,591

17,541

17,887

15,110

Part IS

73,9 %

65,1 %

65,2 %

58,3 %

96,8 %

95,5 %

95,0 %

94,8 %

Part IR

26,1 %

34,9 %

34,8 %

41,7 %

3,2 %

4,5 %

5,0 %

5,2 %

N.B. : les données sont celles à jour au 5 août 2017. Compte tenu du décalage dans le temps du CICE, plus le millésime est proche, moins les données correspondent à l’intégralité des créances au titre de ce millésime.

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

Si la part des redevables relevant de l’IS a substantiellement décru entre 2013 et 2016, passant de près des trois quarts à un peu plus de la moitié des bénéficiaires du CICE ayant déclaré des créances, ils restent ceux qui concentrent les montants de créances les plus importants (la baisse constatée à ce titre étant marginale). Cela s’explique par le fait que si les redevables à l’IR, souvent des TPE et des PME, sont nombreux dans le tissu entrepreneurial français, ils emploient généralement moins de salariés que les entreprises à l’IS : leur assiette de CICE est donc plus faible, diminuant par conséquent le montant de leurs créances.

Le graphique ci-après fait état de l’évolution du nombre de bénéficiaires du CICE, selon leur régime d’imposition, au titre de chaque millésime entre 2013 et 2016.

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

Pour chaque millésime, les données sont celles disponibles au 5 août 2017, expliquant les valeurs au titre de l’année 2016, pour laquelle les données sont les plus incomplètes. Aussi, la diminution importante qui ressort du graphique entre 2015 et 2016 ne doit pas être prise comme une désaffection des entreprises vis-à-vis du CICE : il s’agit d’un biais statistique.

2.   La répartition des bénéficiaires par catégorie d’entreprises

Ouvert à l’ensemble des entreprises, quelle que soit leur taille, le CICE se répartit de façon inégale entre les différentes catégories d’entreprises (micro-entreprises, PME, entreprises de taille intermédiaire – ETI – et grandes entreprises), ainsi que l’illustrent le tableau et le graphique ci-après (qui ne concerne que le CICE 2016 des entreprises à l’IS).

Répartition de la créance de CICE 2016 des redevables à l’is
selon les catégories d’entreprises
(situation au 5 août 2017)

 

Catégorie

Bénéficiaires

Montant des créances
(en milliards d’euros)

Micro-entreprises

446 069

1,6

PME

120 353

4,6

Entreprises de taille intermédiaire

4 644

3,3

Grandes entreprises

253

4,8

Total

571 319

14,3

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

La circonstance que les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises perçoivent plus de la moitié du montant des créances de CICE n’est pas anormale : ces entreprises emploient plus de la moitié des salariés du secteur marchand.

Le tableau suivant compare, pour chaque catégorie d’entreprises, les effectifs employés et les créances de CICE perçues, en euros.

comparaison des effectifs salariés et du montant de cice perçu

Catégorie

Effectifs salariés
en 2013
(en milliers)

Part dans l’effectif salarié total

Montant de CICE 2016 perçu
(en milliard d’euros)

Part dans le total de CICE 2016

Micro-entreprises

2 808

19,0 %

1,6

11,2 %

PME

4 169

28,2 %

4,6

32,2 %

ETI

3 473

23,5 %

3,3

23,1 %

Grandes entreprises

4 333

29,3 %

4,8

33,6 %

Total

14 782

100,0 %

14,3

100,0 %

N.B. : la somme des arrondis peut différer de l’arrondi de la somme.

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017 ; INSEE, Les entreprises en France, édition 2016.

Il ressort de ces données la part du CICE perçue par les PME est plus importante que la part d’emploi de ces entreprises. Le même constat est tiré s’agissant des grandes entreprises. Les ETI, quant à elles, connaissent une relative constance entre montant de CICE et part dans l’emploi salarié. Les micro-entreprises, elles, perçoivent moins que leur part dans l’emploi. Plutôt qu’un dysfonctionnement dans le ciblage du CICE, ce décalage s’explique probablement par un moindre taux de déclarations tendant à bénéficier du CICE chez ces entreprises.

3.   La répartition des bénéficiaires par secteur d’activité

Comme l’a relevé le comité de suivi du CICE dans son rapport 2017, le CICE s’est diffusé dans l’ensemble du système productif français au travers des consommations intermédiaires des entreprises.

Tous les secteurs, néanmoins, ne bénéficient pas à part égale du CICE. Cela s’explique aisément par les effectifs et le niveau de rémunération de chaque secteur. Ainsi, une entreprise dont l’activité suppose une main-d’œuvre importante mais dont une grande part des rémunérations sont comprises dans l’assiette du CICE sera susceptible de percevoir un gain plus important qu’une entreprise aux effectifs peu élevés ou qu’une entreprise au sein de laquelle les rémunérations excèdent 2,5 SMIC.

Le graphique ci-après illustre la répartition, par secteur d’activité, de l’assiette du CICE 2016, estimée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) à partir des déclarations sociales des entreprises aux Urssaf.

N.B. : les données relatives au secteur agricole, comprises dans « Autres » et dont la part dans l’assiette est de 0,07 %, ne sont pas significatives dans la mesure où les entreprises agricoles déclarent leur CICE auprès de la Mutualité sociale agricole – MSA.

Source : commission des finances, d’après le rapport 2017 du comité de suivi du CICE.

C.   Des effets débattus mais s’inscrivant dans le long terme

Eu égard à son montant conséquent, le CICE fait l’objet de critiques au regard des effets constatés. Cependant, ainsi que le souligne le comité de suivi du CICE, certains des effets attendus s’inscrivent dans le long terme, tandis que d’autres sont déjà perceptibles.

1.   L’inévitable étalement dans le temps des effets du CICE

Les effets du CICE ne peuvent être appréciés immédiatement dans leur totalité, compte tenu de la variété des canaux de transmission empruntés par l’outil et de la temporalité associée à chacun d’eux, ainsi que l’illustre le graphique ci‑après produit par le comité de suivi.

Canaux de transmission des effets du CICE dans l’économie

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

Selon le canal, les effets varient et mettent plus ou moins de temps à se faire ressentir :

– à court terme, via le canal financier, le CICE est censé avoir un impact positif sur la trésorerie des entreprises et limiter les défaillances de ces dernières, ce qui peut conduire à sauvegarder des emplois qui, en cas de défaillance, auraient été supprimés ;

– à moyen terme, via le canal coût du travail, l’entreprise peut embaucher, augmenter ses salaires ou diminuer ses prix. Les deux dernières modalités, à terme, sont susceptibles d’avoir un effet positif sur l’emploi par l’amélioration des performances de l’entreprise, qui sera capable d’embaucher ;

– à long terme, enfin, le canal des profits permet aux entreprises de rétablir leurs marges, offrant la possibilité d’investir, ce qui renforce la compétitivité des entreprises et leur permet, in fine, d’embaucher plus.

Outre les effets différés selon le canal emprunté, le CICE est marqué par un fort décalage temporel qui entraîne, pour chaque millésime de CICE, une dilution de l’avantage jusqu’à quatre ans. À titre d’exemple, l’avantage fiscal associé au premier millésime de CICE, celui de 2013, sera finalement perçu dans son intégralité seulement en 2017.

Malgré ce décalage, certains effets ont pu être constatés, tandis que d’autres font l’objet d’appréciations différentes.

2.   Les effets constatés : la restauration des marges des entreprises et la limitation des défaillances

Les deux principaux effets relativement tangibles du CICE sont le rétablissement des marges des entreprises et la limitation des défaillances.

S’agissant du taux de marge ([112]), qui avait atteint son plus bas niveau en 2013 pour s’établir à 29,9 %, le CICE a permis un redressement substantiel puisque ce taux, en 2016 – dernière année pour laquelle les données définitives sont connues – s’est fixé à 31,9 %, soit une hausse de deux points en trois ans, ainsi que l’illustre le graphique ci-après.

Sources : INSEE ; Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

L’infléchissement constaté après 2016 ne saurait conduire à une remise en cause des effets du CICE sur le taux de marge des entreprises, au contraire. D’après le Gouvernement, l’évolution est notamment due à une hausse des prix du pétrole, conduisant à augmenter le prix des intrants.

Le CICE a également permis une limitation de la défaillance des entreprises. Le comité de suivi note que le CICE, via son préfinancement, aurait permis de sauver 2 500 emplois en 2013. Si ce nombre peut paraître faible, il correspond en réalité à 25 % des effectifs totaux des entreprises ayant connu une défaillance cette année-là. Le « bol d’air » financier induit par le préfinancement a ainsi permis aux entreprises concernées, majoritairement des PME et des ETI, d’améliorer leur trésorerie.

Depuis 2013, 10,7 milliards d’euros de créance de CICE ont fait l’objet d’un préfinancement, ce qui correspond à environ 60 000 dossiers, dont 7,5 milliards d’euros de créance avancés par Bpifrance ([113]).

3.   Les effets débattus : l’emploi, le niveau des salaires, l’investissement et les exportations

Le comité de suivi, dans son rapport publié en octobre 2017, souligne que le CICE a eu un effet positif sur la sauvegarde d’emploi, sans pour autant pouvoir établir avec certitude le nombre d’emplois concernés : ce dernier est d’environ 100 000 emplois créés ou sauvegardés. La relative modestie des effets sur l’emploi du CICE a nourri des critiques contre l’outil. Néanmoins, là aussi, une explication peut résider dans la temporalité de la diffusion des effets du CICE.

Par ailleurs, le comité considère comme robustes les résultats concluant à l’absence d’impact de court terme du CICE sur l’investissement, la recherche et les exportations ([114]).

Cependant, il ajoute que cette conclusion n’est guère surprenante eu égard au temps de diffusion du CICE s’agissant de l’investissement : les entreprises doivent d’abord rétablir leurs marges, et les décisions peuvent mettre du temps à se concrétiser.

Au demeurant, la dynamique de l’investissement est positive ces dernières années : ayant crû de 3,1 % en 2015 et de 3,6 % en 2016, cette dynamique devrait se poursuivre en 2017 et 2018 avec une hausse de 3,7 % ([115]). Si le dispositif exceptionnel de « suramortissement » de 40 % prévu à l’article 39 decies du CGI, applicable entre avril 2015 et avril 2017, a probablement joué un rôle dans cette dynamique – notamment du fait de son caractère incitatif lié à son côté temporaire –, le CICE a pu, lui aussi, avoir un impact en la matière. Le graphique ci-après illustre, pour la période 2011‑2018, le taux d’investissement des sociétés non financières ([116]).

Sources : INSEE ; Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

Ce graphique témoigne d’une nette progression à compter de 2014, date de la première imputation du CICE, progression qui se poursuit après 2017, malgré la fin du « suramortissement ».

S’agissant des salaires, les conclusions des équipes de recherche du comité de suivi diffèrent, conduisant ce dernier à ne pas retenir d’effet notable. Toutefois, là encore, la temporalité de la transmission des effets du CICE ne permet pas d’établir avec certitude une absence totale d’effets pour l’avenir.

Enfin, aucun élément tangible ne permet de conclure à un impact positif de l’outil sur les exportations. Ce constat peut cependant être nuancé sur deux aspects :

– d’une part, cibler spécifiquement les secteurs exportateurs aurait présenté des difficultés juridiques : l’outil aurait pu être vu comme constitutif d’une aide sectorielle, incompatible avec le droit européen, et la notion d’entreprise exportatrice est délicate à appréhender par le droit ;

– d’autre part, du fait de l’intégration de l’économie, les effets du CICE peuvent, tout en bénéficiant d’abord à des entreprises non exportatrices, se diffuser dans toute la chaîne économique. Le comité de suivi relève à cet égard que « le CICE s’est en partie diffusé dans l’ensemble du système productif, le long de la chaîne de valeur » ([117]).

4.   Une temporalité longue militant pour un dispositif plus contemporain et réactif

Si l’absence d’effets remarquables et tangibles du CICE, en dehors du rétablissement des marges et de la limitation des défaillances d’entreprises, trouve certainement sa source dans le caractère de long terme de l’impact attendu, il n’en reste pas moins que l’outil, en lui-même, participe à cette temporalité étendue.

En effet, ainsi qu’il a été vu, l’imputation d’un millésime de CICE peut se faire pendant les quatre années qui suivent celle du versement des rémunérations. Cela a pour effet :

– de diluer considérablement le gain pour les entreprises ;

– de repousser le bénéfice dudit gain ;

– de retarder la matérialisation des effets induits par ce gain.

Un dispositif plus contemporain, outre sa lisibilité et sa simplicité, serait de nature à accentuer les effets attendus ou, du moins, devrait être susceptible de limiter la période d’incubation de ces effets.

III.   Le dispositif proposé

A.   Le rétablissement du taux à 6 % en 2018 et la suppression du CICE en 2019

Le présent article, qui s’inscrit dans le cadre de la transformation du CICE en allégements de charges patronales prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, propose un dispositif en deux temps :

– il rétablit pour 2018 le taux du CICE qui prévalait jusqu’en 2016 inclus, en le ramenant de 7 % à 6 % ( du I) ;

– il supprime, à compter de 2019, le CICE. À cet effet, le  de son I abroge :

En outre, est supprimé le deuxième alinéa de l’article L. 172 G du livre des procédures fiscales, relatif au droit de reprise de l’administration au titre du CICE (III du présent article).

B.   Les abrogations de coordination relatives au suivi du CICE

Outre l’abrogation du CICE et de ses modalités de consommation, d’autres mesures de coordination sont prévues, avec effet à compter de 2019.

Le II du présent article abroge les dispositions du code du travail relatives à l’association des représentants du personnel dans l’utilisation du CICE :

– l’article L. 2313‑7‑1, relatif à l’obligation d’information et de consultation des délégués du personnel sur l’utilisation du CICE, dans les entreprises comptant moins de cinquante salariés ;

– le 5° de l’article L. 2323‑13, prévoyant la mise à disposition du comité d’entreprise des informations sur les sommes reçues au titre du CICE et sur leur utilisation ;

– les articles L. 2323‑56 et L. 2323‑57, relatifs aux modalités de contrôle, par le comité d’entreprise, de l’emploi du CICE par l’entreprise (prévoyant notamment la remise d’un rapport transmis au comité de suivi régional du CICE et, le cas échéant, la saisine des organes d’administration ou de surveillance et l’information des associés) ;

– le deuxième alinéa du 3° de l’article L. 1233‑57‑3, prévoyant la prise en compte par l’administration du rapport prévu à l’article L. 2323‑56 dans le cadre de l’homologation d’un accord au titre d’un plan de sauvegarde de l’emploi.

Seule l’abrogation de cette dernière disposition paraît réellement utile. Les autres articles, en effet, seront abrogés à compter du 1er janvier 2018 par l’article 1er de l’ordonnance du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales, qui réécrit les titres Ier et II du livre III de la deuxième partie du code du travail, dans lesquels se trouvent les dispositions concernées ([118]).

En revanche, les nouvelles dispositions résultant de cette ordonnance et ayant un objet équivalent aux anciennes devront être abrogées à compter du 1er janvier 2019 ([119]).

Le IV du présent article abroge l’article 66 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 précitée. En réalité, seuls les IV et V de cet article, qui portent le comité de suivi du CICE et les comités de suivi régionaux, doivent être abrogés.

IV.   L’impact économique et budgétaire de la disparition programmée du CICE

La disparition programmée du CICE, du fait de sa transformation en allégements de charges patronales, aura un impact positif sur les recettes fiscales d’IS – direct et indirect – et offrira aux entreprises un avantage plus simple et immédiat que celui obtenu sous l’empire du CICE.

À titre liminaire, le Rapporteur général regrette que, sur un sujet aussi important économiquement et budgétairement, l’évaluation préalable du présent article – mais aussi l’étude d’impact de l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 – ne soit pas aussi précise que l’on aurait pu le souhaiter.

A.   L’impact du dispositif proposé sur les finances publiques

Le présent article contient deux mesures ayant un impact sur le budget de l’État : le rétablissement du taux antérieur de CICE, d’une part, la suppression de ce dernier à compter de 2019, d’autre part.

En comptabilité nationale, d’après l’évaluation préalable du présent article, l’impact de ces deux mesures sur les recettes d’IS et d’IR sera :

– un gain de 3,1 milliards en 2019 en raison du rétablissement du taux à 6 % ;

– un gain d’environ 22,5 milliards d’euros à compter de 2020 en raison de la suppression du CICE à partir de 2019.

Le tableau suivant précise, pour la période 2018-2022, l’impact consolidé du dispositif proposé en comptabilité budgétaire.

impact du dispositif sur les recettes fiscales

(en milliards d’euros)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Impact sur les recettes fiscales

0

+ 1,8

+ 11,2

+ 13,3

+ 18,5

Source : évaluation préalable.

Compte tenu de la répartition des créances entre IR et IS, l’essentiel du gain portera sur les recettes de ce dernier.

Le tableau suivant présente, de façon plus détaillée, l’impact de chacune des deux mesures prévues par le présent article, ainsi que l’impact consolidé associé, en comptabilité nationale et en comptabilité budgétaire, entre 2018 et 2022. Le graphique ci-après illustre cette évolution.

Les données présentées résultent des calculs de la commission des finances. L’administration fiscale, malgré plusieurs demandes du Rapporteur général, n’a en effet pas fourni d’éléments sur ce point.

gain fiscal dû au dispositif proposé

(en milliards d’euros)

Comptabilité

Mesure

2018

2019

2020

2021

2022

Comptabilité budgétaire

Taux à 6 %

0

1,8

2,0

2,1

3,2

Suppression CICE

0

0

9,2

11,2

15,3

Total

0

1,8

11,2

13,3

18,5

Comptabilité nationale

Taux à 6 %

0

3,1

3,4

3,6

3,7

Suppression CICE

0

0

19,2

21,7

22,4

Total

0

3,1

22,7

25,3

26,1

Source : commission des finances.

B.   L’évolution du coût du CICE au regard du dispositif proposé

Du fait du rétablissement d’un taux de 6 % en 2018 et de la suppression de l’outil en 2019, le dispositif proposé conduira à un allégement substantiel du coût du CICE, allant à terme jusqu’à sa disparition totale. Le tableau et le graphique ci-après détaillent l’évolution du coût du CICE, intégrant les effets du présent article.

Évolution du coût du cice

(en milliards d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Coût en comptabilité nationale

10,2

17,6

18,4

19,2

22,8

20,6

1,5

Dont IS

9,8

16,8

17,5

18,2

21,7

19,7

1,5

Dont IR

0,4

0,8

0,9

0,9

1,1

1,0

0,0

Coût en comptabilité budgétaire

6,6

12,5

12,9

16,5

21,0

19,6

10,2

Dont IS

6,2

11,7

12,0

15,5

19,9

18,6

10,2

Dont IR

0,4

0,8

0,9

0,9

1,1

1,0

0,0

N.B. : l’arrondi de la somme peut différer de la somme des arrondis.

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

En cohérence avec la part que les entreprises à l’IS ont dans les créances de CICE, le coût de ce dernier porte essentiellement sur cet impôt. Par ailleurs, l’absence de décalage entre les coûts en comptabilité nationale et budgétaire, s’agissant de l’IR, s’explique par le fait que les redevables à l’IR sont réputés consommer l’intégralité du CICE d’un millésime N dès l’année suivante.

Pour la première fois, en 2020, le coût en comptabilité nationale sera inférieur au coût en comptabilité budgétaire. Cette évolution s’explique par la suppression du CICE à compter de 2019 :

– l’impact de cette suppression en comptabilité nationale sera presque immédiat ;

– en revanche, en 2020, des créances des millésimes 2016 à 2018 continueront de s’imputer sur l’impôt dû.

Le tableau suivant fait état de l’évolution des créances de CICE, intégrant les estimations au titre de 2018, dernière année d’existence du dispositif.

prévisions de créances (millésimes 2013-2018)

(en milliards d’euros)

Année

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Prévisions de créances

11,5

17,7

18,6

19,2

23,1

20,5

Dont IS

11,2

16,9

17,7

18,3

22,0

19,5

Dont IR

0,4

0,8

0,9

0,9

1,1

1,0

Source : comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

C.   L’impact de la substitution au CICE d’allégements de charges patronales

La suppression du CICE, de même que, pour 2018, le rétablissement du taux antérieur, est indissociable des allégements de charges patronales prévus dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, à son article 8.

1.   Les allégements de charges patronales prévues par le projet de loi
de financement de la sécurité sociale pour 2018

L’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 prévoit un renforcement des allégements de cotisations patronales, selon deux modalités complémentaires.

● D’une part, une réduction de 6 points des cotisations maladie dues par les employeurs, pour les rémunérations n’excédant pas 2,5 SMIC. La mesure consistant à ramener le taux du CICE à la situation de 2017, soit 6 %, permet une concordance avec cet allégement. Cette mesure est traduite par l’introduction d’un nouvel article L. 241‑2‑1 dans le code de la sécurité sociale (CSS).

Cette réduction de 6 points peut être vue comme un « équivalent CICE » en matière de charges patronales ([120]). Elle conduira à ce que le taux de cotisation, établi à 12,89 % en 2017, soit ramené à 6,89 %.

● D’autre part, une extension de l’allégement général des cotisations patronales, applicable aux rémunérations comprises entre un SMIC et 1,6 SMIC, aux cotisations patronales d’assurance chômage et de retraite complémentaire (dont la cotisation pour l’association pour la gestion du fonds de financement
– AGF). Cette mesure, traduite par une modification de l’article L. 241‑13 du CSS, conduira à une réduction supplémentaire des cotisations patronales de 3,9 points au niveau du SMIC, portant la réduction globale à ce niveau de rémunération à 9,9 points (en ajoutant la réduction de cotisation maladie).

Ainsi, au niveau du SMIC, seront intégralement exonérées :

– les cotisations de sécurité sociale (maladie, vieillesse, part mutualisée au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles et allocations familiales) ;

– la contribution solidarité autonomie (CSA) ;

– la contribution au Fonds national pour l’aide au logement (FNAL) ;

– les contributions d’assurance chômage ;

– enfin, les cotisations de retraite complémentaire (AGIRC-ARRCO et AGF).

Les seules charges patronales qui subsisteront au niveau du SMIC seront la contribution au dialogue social, la cotisation « AGS » (Association pour la gestion du régime d’assurance des créances des salariés), la taxe d’apprentissage et, pour certaines entreprises, la participation à l’effort de construction et la participation à la formation professionnelle.

● Le coût de la réduction des cotisations maladie est évalué à près de 21,6 milliards d’euros par an. Celui de l’extension du champ de l’allégement général est évalué à près de 3,3 milliards. Le coût total de la mesure serait de 24,8 milliards d’euros par an. Le tableau suivant dresse la synthèse des aspects budgétaires du dispositif.

impact financier des allégements de charges patronales
(en comptabilité nationale)

(en milliards d’euros)

Mesure

Coût annuel

Réduction de 6 points des cotisations maladie

21,6

Renforcement de l’allégement général entre 1 et 1,6 SMIC

3,3

Total

24,8

N.B. : l’arrondi de la somme peut différer de la somme des arrondis

Source : étude d’impact de l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Le tableau suivant fait état de l’évolution de l’impact financier des allégements de charges entre 2019 et 2021.

Évolution de l’impact financier des allégements de charges patronales
(en droits constatés)

(en milliards d’euros)

Année

2018

2019

2020

2021

Impact

0

– 24,8

– 25,6

– 26,4

Source : étude d’impact de l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

L’impact de cette mesure fera l’objet d’une neutralisation dans le cadre de transferts entre branches : le dispositif prévoit l’intervention de l’ACOSS, qui reversera à l’Unédic et à l’AGIRC-ARRCO les montants correspondant aux allégements de cotisations chômage et retraite complémentaire. Les branches du régime général assureront l’équilibre financier de l’ACOSS. Ce dispositif, comme l’indique l’exposé des motifs de l’article 8, est destiné notamment à assurer le bon placement de l’extension de l’allégement général en loi de financement de la sécurité sociale, en raison de l’impact qu’il a sur l’équilibre financier des régimes de sécurité sociale.

La perte de recettes pour la sécurité sociale donnera lieu à une compensation, ainsi que l’indique l’évaluation préalable de l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Pour plus de précisions sur les allégements de charges, notamment s’agissant de leurs modalités, de leur coût et de leur impact sur les secteurs d’activité, il est possible de se référer au commentaire du rapporteur général de la commission des affaires sociales sur l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 ([121]).

2.   Les avantages pour les entreprises entraînés par la transformation du CICE en allégements de charges

À compter de 2019, les rémunérations versées par les entreprises et n’excédant pas 2,5 SMIC n’ouvriront plus droit au CICE. En revanche, elles fourniront aux employeurs un gain annuel de 24,8 milliards d’euros qui présente, par rapport au CICE, des avantages décisifs, ceux de l’immédiateté et de la simplicité.

En effet, là où le CICE fait l’objet d’un décalage temporel important, du fait d’un étalement pouvant aller jusqu’à cinq ans (année de versement des rémunérations et quatre années d’imputation), les allégements induiront un gain qui sera immédiat, contemporain au versement des rémunérations.

Cette simplification et l’immédiateté de l’avantage seront de nature à accélérer la diffusion des effets constatés et potentiels du CICE, notamment s’agissant de l’emploi : alors qu’un crédit d’impôt n’est pas forcément interprété par les entreprises comme une mesure de réduction du coût du travail, il en va différemment pour des allégements directs de charges, qui par définition sont destinés à réduire ce coût et donc à favoriser l’embauche et, plus généralement, le développement de l’activité des entreprises.

Comme toute réforme d’ampleur, la transformation du CICE en allégements de charges pourrait faire des « gagnants » et des « perdants ». Ces termes doivent toutefois être relativisés dans la mesure où il s’agit de « gains » ou de « pertes » relatives, par rapport aux avantages offerts sous l’empire du CICE.

3.   2019 : une « année double » marquée par un niveau inédit de soutien public aux employeurs

En 2019, les finances publiques supporteront en comptabilité nationale, d’une part, le coût du CICE 2018 et, d’autre part, celui des allégements de charges de cette année : le coût pour les administrations publiques sera double.

a.   Une mesure qui ne devrait pas compromettre les engagements européens de la France

Cette circonstance ne devrait pas avoir d’effet sur la position de la France au regard de ses obligations européennes en matière de déficit public. En effet, il s’agit d’une mesure conjoncturelle, qui n’a par définition pas vocation à se reproduire. Le ministre de l’économie et des finances, M. Bruno Le Maire, a d’ailleurs souligné le 3 octobre 2017 devant les commissions des finances et des affaires européennes de l’Assemblée nationale, que la Commission européenne devrait regarder la transformation du CICE en allégements de charges et son impact sur le déficit comme une mesure exceptionnelle (dite de « one-off »), autorisée dans le cadre du respect du plafond de déficit à 3 % du produit intérieur brut ([122]).

M. Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et aux douanes, a quant à lui indiqué aux deux mêmes commissions, lors de son audition le 4 octobre 2017, que la transformation du CICE en allégements de charges sociale « pourrait être considérée comme une opération ponctuelle qui n’affecterait pas l’appréciation portée par la Commission européenne sur les finances publiques françaises ». Il ajoutait qu’il ne semblait pas « que cette situation crée en soi une incompatibilité fondamentale avec les règles applicables aux finances publiques » ([123]).

b.   L’absence d’alternative satisfaisante

Une alternative en apparence simple à l’année double aurait pu consister en une dissociation des deux mesures :

– suppression du CICE à compter de 2018 ;

– mise en œuvre des allégements à compter de 2019.

Cette solution, qui aurait évité de creuser temporairement le déficit et d’alourdir les charges tout en permettant aux entreprises, en 2018, de bénéficier du CICE 2017, peut paraître séduisante de prime abord. Néanmoins, elle présente des inconvénients dirimants qui ont conduit le Gouvernement à ne pas la retenir, de façon opportune :

– elle aurait privé les entreprises créées à la fin 2017 et surtout en 2018 de tout avantage fiscal, les handicapant lourdement ;

– elle aurait empêché tout préfinancement en 2018, faute de CICE cette année-là, ce qui aurait principalement nui aux entreprises fragiles ayant un besoin de trésorerie ;

– enfin, elle aurait pu avoir un effet négatif sur l’emploi, limitant les embauches en 2018 faute d’avantage fiscal assis sur les rémunérations versées cette année-là.

Compte tenu de ces éléments, la solution finalement retenue paraît la plus pertinente.

4.   L’absence d’effet pénalisant de la diminution d’un point du taux du CICE en 2018

Ainsi qu’il a été vu, le présent article prévoit de ramener de 7 % à 6 % le taux du CICE en 2018, conduisant à une économie de 3,1 milliards d’euros en comptabilité nationale pour les finances publiques. Si cette mesure a pu être perçue comme susceptible de pénaliser les entreprises, en ce qu’elle réduit un avantage, tel n’est pas le cas.

D’une part, en 2018, les entreprises percevront le CICE du millésime 2017, au taux de 7 %.

D’autre part, en 2019, elles percevront certes un CICE réduit d’un point, mais bénéficieront massivement des nouveaux allégements de charges, à hauteur de 24,8 milliards d’euros.

Les années suivantes, elles continueront à bénéficier des allégements de charges mais percevront toujours une partie du CICE, du fait du décalage temporel de l’outil.

Le tableau suivant présente la chronique de l’évolution du gain pour les entreprises par rapport au bénéfice d’un CICE à 7 %. Il repose sur le chiffrage des allégements de charges à 24,8 milliards d’euros (supposé constant). La chronique débute en 2019 dans la mesure où la baisse du taux du CICE ne produit d’effet qu’à compter de cette année. Le montant associé à la suppression du CICE inclut l’effet de la baisse d’un point du taux.

consolidation du gain pour les entreprises de la suppression du CICE à 6 %
et des allégements de charges

(en milliards d’euros)

Mesure

2019

2020

2021

2022

Suppression du CICE

– 1,8

– 11,2

– 13,3

– 18,5

Allégements de charges

+ 24,8

+ 24,8

+ 24,8

+ 24,8

Total

+ 23,0

+ 13,6

+ 11,5

+ 6,3

N.B. : le montant des allégements est présenté constant dans un souci de lisibilité et de simplicité. Il ne tient pas compte de la dynamique de la dépense sociale précédemment présentée (faute, notamment, de disposer des données pour 2022).

Source : commission des finances, à partir de l’évaluation préalable du présent article et de l’étude d’impact de l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Il ressort de ces données que la transformation du CICE, même à 6 %, en allégements de charges, ne pénalisera pas les entreprises ni en 2019, « année double », ni les années suivantes du fait du décalage temporel de la perception du CICE.

Dès lors, il ne paraît pas utile de rétablir le taux du CICE à 7 % au titre de l’année 2018 :

– si cela ferait gagner 3,1 milliards d’euros aux entreprises, ce gain ne semble pas indispensable compte tenu de l’ampleur des avantages qui seront effectivement perçus et qui surcompensent largement la baisse du taux ;

– cela alourdirait substantiellement la charge pesant sur les finances publiques.

5.   Les effets indirects pour les finances publiques et les entreprises

Au-delà de l’impact immédiat pour les finances publiques et les entreprises, la transformation du CICE en allégements de charges aura des conséquences indirectes, mais non négligeables.

a.   Un « effet retour » d’IS évalué à 5 milliards d’euros

Le passage d’un crédit d’impôt imputable sur l’IS ou l’IR à des allégements de charges patronales entraînera, pour les entreprises, un « effet retour » sur l’impôt. Les charges patronales sont en effet déductibles du résultat imposable ; leur diminution consécutive aux allégements aura donc pour conséquence mécanique d’accroître ce résultat, augmentant ainsi l’impôt dû.

À titre d’exemple, un euro de CICE conduit à un euro de gain. En revanche, un euro d’allégement de charges conduit à accroître l’assiette imposable d’un euro. Pour un IS à 25 %, le gain net est donc de 0,75 euro.

Il ressort de l’évaluation préalable – là encore peu développée – que l’effet retour d’IS est estimé à environ 5 milliards d’euros. Sur la base d’un coût associé aux allégements évalué à 24,8 milliards d’euros, l’estimation de l’effet retour d’IS reposerait sur un taux moyen d’imposition de l’ordre de 20 %.

La transformation conduira donc à un gain net de l’ordre de 5 milliards d’euros pour les recettes fiscales de l’État ([124]). Le Rapporteur général ne peut, une fois de plus, que regretter l’absence de réponses de l’administration fiscale aux questions posées sur ce sujet.

L’effet retour d’IS ne devrait toutefois pas pénaliser les entreprises, en particulier celles qui emploient des salariés rémunérés entre 1 et 1,6 SMIC compte tenu de l’allégement supplémentaire dont elles bénéficieront, ainsi que l’illustre l’exemple ci-après, fournit par le Gouvernement.

Illustration de l’impact de la transformation

Une entreprise dont le bénéfice est imposé au taux réduit de 15 % emploie trois salariés, deux au SMIC et un à 1,3 SMIC. En versant les rémunérations en N, elle bénéficie, au titre du CICE, d’un avantage de 4 105 euros, perçu en N + 1.

Avec les allégements de charges, elle percevra, dès l’année N, un gain de 5 315 euros. L’effet retour d’IS sera quant à lui de 795 euros, dû en N + 1, lors du paiement du solde d’IS.

Au total, dans le cadre des allégements, l’entreprise gagne 415 euros de plus que ce qu’elle percevait comme avantage au titre du CICE (5 315 – [4 105 + 795] = 415).

La transformation lui permet donc de gagner plus et plus rapidement.

Source : Gouvernement, PLF 2018 – Les moyens de l’action.

b.   L’augmentation de la réserve de participation

Prévue aux articles L. 3322‑1 et suivants du code du travail, la participation des salariés aux résultats de l’entreprise est un dispositif légal prévoyant la redistribution, au profit des salariés, d’une partie des bénéfices qu’ils ont contribué, par leur travail, à réaliser. Obligatoire pour les entreprises de cinquante salariés ou plus – dès lors qu’elles dégagent un bénéfice fiscal suffisant – et facultative pour les autres, la participation est mise en place par un accord qui précise les modalités de son application.

La réserve de participation, en vertu de l’article L. 3324‑1 du même code, est calculée selon la formule suivante :

RP = ½ (BN  5 % CP) × (S / VA),

où RP correspond au montant de la réserve de participation, BN au bénéfice net (après impôt sur les bénéfices), CP aux capitaux propres, S aux salaires versés et VA à la valeur ajoutée.

Exemple du calcul de la réserve de participation

Une entreprise dont les capitaux propres sont de 200, les salaires versés de 100 et la valeur ajoutée de 150 réalise un bénéfice net après impôt de 100.

La réserve de participation s’élèvera à : ½ (100 – (0,05 × 200) × (100 / 150) = 30.

Jusqu’en 2013, et en application d’une doctrine fiscale constante, l’impôt venant en diminution du bénéfice pour le calcul du bénéfice net s’entendait comme l’impôt après imputation du CICE. Cela avait donc pour effet de diminuer l’impôt à déduire, et donc d’augmenter le bénéfice net pris en compte. En conséquence, la réserve de participation était plus élevée.

Toutefois, cette doctrine a été contredite par le Conseil d’État dans une décision rendue le 20 mars 2013 ([125]) : pour le juge administratif, l’administration fiscale ne pouvait d’elle-même décider que l’impôt à prendre en compte était celui après imputation des crédits d’impôts. Cette décision a donc eu pour effet d’augmenter l’impôt considéré, et donc de réduire le bénéfice net et par suite le montant de la réserve de participation ([126]).

La suppression du CICE ne changera rien à cette situation, puisque la jurisprudence le neutralisait. En revanche, les allégements de charges auront un impact sur la réserve de participation. Ils conduiront en effet, ainsi qu’il a été vu, à accroître l’assiette imposable. Si cela aura pour effet d’augmenter également l’impôt dû, le bénéfice net après impôt sera néanmoins supérieur à la situation actuelle. En conséquence, la réserve de participation sera elle aussi plus importante.

Dès lors, si la transformation du CICE en allégements de charges, alliée aux autres mesures destinées aux entreprises, conduira à fournir à ces dernières un avantage important, elle aura également pour effet de profiter aux salariés.

D.   L’impact consolidé de la transformation du CICE en allégements de charges pour les entreprises

Le gain pour les finances publiques tiré de la suppression du CICE à compter de 2020 est estimé par l’évaluation préalable à 22,5 milliards d’euros en comptabilité nationale. Le coût maximal du CICE en comptabilité nationale, d’après le rapport 2017 du comité de suivi, est de 22,8 milliards d’euros : c’est ce chiffre qui sera retenu pour apprécier l’impact consolidé de la transformation du CICE en allégements de charges.

Les allégements, quant à eux, sont évalués à 21,6 et 3,3 milliards d’euros par an à compter de 2019. Pour apprécier l’impact concret de la mesure pour les entreprises, il faut intégrer l’effet retour d’IS mais aussi d’autres paramètres, tels que la baisse du taux normal de l’IS à 25 %, la disparition de la contribution de 3 % sur les montants distribués (respectivement prévues aux articles 41 et 13 du présent projet de loi de finances).

Le tableau suivait fait état du gain pour les entreprises – sur la base des calculs de la commission des finances et de ceux de la commission des affaires sociales, le Rapporteur général n’ayant, là encore, pas reçu de réponses de la part de l’administration.

gain pour les entreprises à l’horizon 2023

(en milliards d’euros)

Mesure

Impact en 2023 (par rapport à 2017)

Suppression du CICE

– 22,8

Baisse du taux du CICE de 7 % à 6 %

– 3,1

Allégement de 6 points des cotisations patronales maladie

+ 21,6

Renforcement de l’allégement général de 3,9 points

+ 3,3

Effet retour d’IS

– 5,0

Disparition de la contribution de 3 % sur les montants distribués

+ 1,9

Diminution du taux normal de l’IS (1)

+ 10,9

Total

+ 6,8

(1) Sur la base d’un coût de 11,2 milliards d’euros pour le passage du taux normal de 33 1/3 % à 25 %, et d’un impact en 2017 de la trajectoire estimé par l’évaluation préalable de l’article 6 du projet de loi de finances pour 2017 à 0,3 milliard d’euros.

Source : commission des finances et commission des affaires sociales.

En tout état de cause, indépendamment des éventuels effets induits par la transformation, le Gouvernement considère que cette mesure, conjuguée à la mise en œuvre des autres réformes proposées, devrait conduire à ce que tous les secteurs économiques soient gagnants au plus tard à compter de 2022, ainsi que l’illustre le graphique ci-après.

Impact consolidé des mesures portant sur les entreprises
prévues par le présent projet de loi de finances

Source : ministère de l’économie et des finances, ministère de l’action et des comptes publics, PLF 2018  Les moyens de l’action, 28 septembre 2017.

D’après les estimations du Gouvernement, l’ensemble des entreprises imposables au régime normal de l’IS réaliseront un gain de 8,2 milliards par an à compter de 2022, par rapport à 2017. S’agissant de certains secteurs économiques :

– l’industrie devrait réaliser un gain net de 2 milliards d’euros ([127]) ;

– le commerce devrait lui aussi réaliser un gain net de 2 milliards d’euros ([128]) ;

– le secteur non lucratif, bien que non concerné par la baisse du taux normal de l’IS, devrait bénéficier des allégements à hauteur de 2 milliards d’euros, soit un gain net de 1,4 milliard d’euros une fois intégrée la suppression du CITS ([129]).

*

*     *

La commission examine, en discussion commune, les amendements IICF505 et IICF504 de M. Olivier Serva.

M. Mohamed Laqhila. Il s’agir de maintenir le CICE dans les départements d’outre-mer, en portant son taux à 9 %, avec une exception pour le secteur du tourisme où il serait porté à 50 %.

M. le Rapporteur général. Nous supprimons le CICE, et il n’y a aucune raison de ne pas le faire pour l’ensemble du territoire, d’autant que le maintenir avec un taux de 50 % serait assez démesuré. Je me demande en outre si cela ne pourrait pas être assimilé à une aide d’État incompatible avec le droit européen.

La commission rejette successivement les deux amendements.

Puis elle examine, en discussion commune les amendements identiques IICF128 de Mme Lise Magnier et II-CF656 de M. Charles de Courson, ainsi que les amendements IICF462 et II-CF412 de M. Éric Woerth

M. Charles de Courson. Nous avons toujours dit que nous étions favorables au remplacement du CICE par une baisse des charges. Néanmoins, l’article 42 prévoit de baisser le taux du CICE de 7 % à 6 %. Par ailleurs, on a déjà évoqué le fait que le remplacement du crédit d’impôt par une baisse des charges entraînait une hausse de l’assiette imposable des entreprises, donc de l’IS. On parle ici de sommes considérables, de l’ordre de 6 milliards d’euros – 3 milliards liés à la baisse du taux de CICE et 3 milliards liés à la hausse de l’IS.

Pour que la mesure soit neutre, il faudrait que la baisse des taux du crédit d’impôt s’applique non pas jusqu’à 2,5 SMIC mais au moins jusqu’à 3,5 SMIC car, contrairement à une idée reçue, on gagne plutôt mieux sa vie dans l’industrie que dans d’autres secteurs. C’est en tout cas le sens de ce que préconise le rapport Gallois pour doper la compétitivité de nos entreprises.

M. le président Éric Woerth. L’amendement II-CF462 supprime la baisse du taux du CICE. L’amendement II-CF412 élargit l’assiette du CICE jusqu’à 3,5 SMIC. Il y va tout simplement de la compétitivité de nos entreprises.

M. le Rapporteur général. Je tiens à souligner le coût de ces amendements : plus de 3 milliards d’euros pour les premiers et environ 13 milliards d’euros pour le dernier. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF128 et II-CF656, puis elle rejette successivement les amendements II-CF462 et II-CF412.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF665 de M. Fabien Roussel.

M. Jean-Paul Dufrègne. Le présent amendement vise à supprimer dès 2018 le CICE. France Stratégie a chiffré à 400 000 euros par emploi sauvegardé ou créé le coût de ce dispositif, aussi dispendieux qu’inefficace. Nous faisons valoir la nécessité de bâtir une nouvelle architecture des aides aux entreprises, en privilégiant les aides directes et ciblées sur les mesures de portée générale, potentiellement génératrices d’effets d’aubaine et de gaspillage de l’argent public. C’est le sens des propositions que nous formulons dans le cadre de notre contre-budget.

M. le Rapporteur général. Monsieur Dufrègne, je vous invite à faire preuve d’un petit peu de patience : le Gouvernement vous donnera satisfaction en 2019.

Si la mesure s’appliquait dès 2018, dans la mesure où il n’existe pas de soutien alternatif, les entreprises risqueraient d’être pénalisées et d’être contraintes, pour les plus fragiles, de mettre la clef sous la porte.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette ensuite l’amendement II-CF664 de M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Éric Coquerel. L’esprit de ces amendements n’était pas de prolonger le CICE par des exonérations définitives mais de faire en sorte qu’on arrête d’accorder des aides aux entreprises sans contrepartie.

La commission adopte l’article 42 sans modification.

*

*     *

Article 43
Suppression du crédit d’impôt de taxe sur les salaires

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article supprime, à compter de 2019, le crédit d’impôt de taxe sur les salaires (CITS) dont bénéficient certains organismes à but non lucratif, en abrogeant l’article 231 A du code général des impôts (CGI).

Il s’agit d’une mesure indissociable des allégements de charges patronales prévus à compter de 2019 par le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le dispositif proposé est le pendant de l’article 42 du présent projet de loi de finances relatif à la suppression du CICE.

Dernières modifications législatives intervenues

Le CITS – et l’article 231 A du CGI qui le consacre – a été introduit par l’article 88 de la loi de finances pour 2017.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’état du droit

Le CITS, prévu à l’article 231 A du CGI, a été introduit par l’article 88 de la loi de finances pour 2017 ([130]) à la suite de l’adoption d’un amendement parlementaire.

Sa création était motivée par un souci d’égalité fiscale entre acteurs marchands, éligibles au CICE et acteurs non lucratifs, qui n’en bénéficient en principe pas, dans la mesure où ils ne sont pas assujettis aux impôts commerciaux (impôt sur le revenu – IR – ou impôt sur les sociétés – IS) ([131]).

A.   Le régime du CITS

Le CITS, comme son nom l’indique, s’impute sur la taxe sur les salaires due par certains organismes non lucratifs (la taxe sur les salaires, en application de l’article 231 du CGI, est due par les employeurs qui ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée – TVA – ou qui ne l’ont pas été sur au moins 90 % de leur chiffre d’affaires ([132])).

Le régime du CITS est calqué sur celui du CICE :

– il est assis sur les rémunérations qui n’excèdent pas 2,5 SMIC ;

– il s’impute sur la taxe sur les salaires due au titre des rémunérations versées en année N, lors du solde de cette taxe, en N + 1 ;

– l’éventuel excédent de CITS constitue une créance qui s’impute sur la taxe sur les salaires due au titre des trois années suivantes (N + 2 à N + 4) ;

– si, à l’issue de cette période, un excédent est constaté, ce dernier est remboursé à l’organisme.

À l’image de ce qui existe pour le CICE, un préfinancement du CITS est possible, permettant aux organismes éligibles de bénéficier, dès l’année de versement des rémunérations, d’un avantage financier.

Le taux du CITS est de 4 %. Il avait été fixé à partir d’une étude conduite pour le compte de l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire (UDES), qui avait évalué à cette hauteur la différence du coût de main-d’œuvre entre bénéficiaires du CICE et acteurs non lucratifs exclus de ce dernier.

Afin d’éviter l’octroi d’un double avantage fiscal, l’article 231 A exclut expressément le cumul du CITS et de l’abattement prévu à l’article 1679 A du CGI (Cf. infra B).

B.   Les bénéficiaires du CITS

Les organismes bénéficiant du CITS sont ceux éligibles à l’abattement prévu à l’article 1679 A du CGI (« abattement Hamon »), en application du premier alinéa du I de l’article 231 A du CGI qui renvoie à cet article. Cet abattement est de 20 304 euros ; seule la fraction de taxe sur les salaires excédant ce montant est exigible.

Sont concernés :

– les associations régies par la loi du 1er juillet 1901 ;

– les fondations reconnues d’utilité publique ;

– les syndicats professionnels et leurs unions ;

– les mutuelles régies par le code de la mutualité :

– les centres de lutte contre le cancer.

La suppression de la condition d’effectif pour les mutuelles relevant du livre III du code de la mutualité et l’inclusion des centres de lutte contre le cancer à la liste des bénéficiaires de l’abattement ont été introduites par l’article 88 de la loi de finances pour 2017 précitée.

II.   Le contexte économique et budgétaire

A.   La porosité accrue des activités marchandes et non lucratives a conduit à la création du cits

Le secteur non lucratif est un important pourvoyeur d’emploi : près de 2 millions de personnes sont salariés par des organismes non lucratifs, dont environ 1,5 million par 25 000 associations.

Les activités conduites par ces organismes font l’objet d’une porosité de plus en plus importante avec celles des acteurs privés marchands, qui interviennent dans des secteurs dont ils étaient jusque-là absents – tels que les soins à domicile ou la gestion d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Or, les organismes marchands et les organismes non lucratifs ne supportent pas les mêmes impôts. Les organismes non lucratifs non fiscalisés, cas de nombreux EHPAD associatifs, acquittent ainsi la taxe d’habitation et la taxe foncière, qui ne sont pas dues par les organismes marchands. Ces derniers, en revanche, sont assujettis aux impôts commerciaux (IR ou IS), à la cotisation foncière des entreprises (CFE), à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et à la TVA.

Un rapport sur l’impact du CICE sur la fiscalité du secteur privé non lucratif remis au Premier ministre en décembre 2013 soulignait que « le secteur privé lucratif est entré récemment dans certains secteurs (la garde d’enfant, les services à la personne, les EHPAD…) et a créé une concurrence dans des secteurs qui auparavant étaient uniquement associatifs ou publics, donc n’étaient pas en concurrence avec le secteur privé lucratif : cette concurrence apparaît notamment lorsque l’augmentation des aides permet de mieux solvabiliser les usagers » ([133]).

Certains acteurs non lucratifs peuvent, ainsi qu’il a été vu, bénéficier de l’« abattement Hamon », exonérant de fait les organismes qui doivent acquitter une taxe sur les salaires n’excédant pas 20 304 euros.

Cet abattement était cependant perçu comme ne permettant pas d’assurer une égalité fiscale suffisante entre acteurs marchands et acteurs non lucratifs, conduisant à la mise en place du CITS.

B.   La transformation du CICE et du CITS en allégements de charges patronales : un gain net de 1,4 milliard d’euros pour le secteur non lucratif

Le CICE et le CITS, s’ils fournissent à leurs bénéficiaires un indéniable gain fiscal, reposent sur une architecture et un mode de fonctionnement relativement complexes. Leur principal défaut réside dans l’important décalage temporel existant entre le fait générateur du crédit d’impôt – le versement des rémunérations – et la perception de ce dernier. En effet, au décalage d’un an propre à tout crédit d’impôt, s’ajoute un décalage pouvant aller jusqu’à trois années supplémentaires.

Cette dilution du gain milite pour une refonte des dispositifs, à laquelle procède l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018. Cet article prévoit, à compter de 2019 :

– une réduction de 6 points des cotisations maladie dues par les employeurs au titre des rémunérations n’excédant pas 2,5 SMIC (un « équivalent CICE ») ([134]) ;

– une extension de l’allégement général de cotisations patronales au niveau du SMIC, correspondant à une réduction supplémentaire de 3,9 points au niveau du SMIC, dégressive jusqu’à 1,6 SMIC.

Le coût de ces allégements est estimé à 24,8 milliards d’euros par an, à compter de 2019 ([135]).

À la différence du CICE et du CITS, les allégements de charges permettront un gain contemporain, perçus à chaque versement de cotisations.

Pour le secteur non lucratif en particulier, le gain tiré des allégements est estimé à 2 milliards d’euros, soit un gain net de 1,4 milliard d’euros après suppression du CITS ([136]).

III.   Le dispositif proposé

Le I du présent article supprime le CITS en abrogeant l’article 231 A du CGI. Cette suppression s’appliquera aux rémunérations versées à compter du 1er janvier 2019, en vertu du II du présent article.

Le dispositif est un miroir de celui prévu à l’article 42, qui supprime, à compter de la même date, le CICE pour les organismes qui en bénéficiaient. Ainsi qu’il a été vu, ces suppressions sont dues à la transformation du CICE et du CITS en allégements de charges patronales prévue à l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Il s’agit donc en quelque sorte d’une mesure de coordination consécutive à la mise en place des allégements de charges précédemment mentionnés.

IV.   L’impact économique et budgétaire

A.   Un gain annuel pérenne de 600 millions d’euros pour l’État à compter de 2020

Le produit de la taxe sur les salaires est affecté à la sécurité sociale. La perte de recettes entraînée par le CITS fait l’objet d’une compensation de la part de l’État. En conséquence, la suppression du CITS mettra fin à cette compensation : elle sera neutre pour la sécurité sociale mais permettra à l’État la réalisation d’un gain pérenne annuel de 600 millions d’euros à compter de 2020, ainsi que l’illustre le tableau suivant.

impact budgétaire de la suppression du cits à compter de 2019

(en millions d’euros)

Bénéficiaire

2018

2019

2020

2021

2022

État

0

0

+ 600

+ 600

+ 600

Sécurité sociale

0

0

0

0

0

Total

0

0

+ 600

+ 600

+ 600

Source : évaluation préalable.

L’impact budgétaire est nul en 2019 dans la mesure où le CITS s’impute l’année suivant celle au cours de laquelle les rémunérations sur lesquelles il est assis sont versées. En conséquence, la suppression du CITS à compter de 2019 ne produira des effets budgétaires qu’à partir de 2020.

B.   Un gain supérieur pour les organismes non lucratifs tirés des allégements de charges

Si, à première vue, la suppression du CITS peut apparaître comme pénalisant les acteurs non lucratifs qui en bénéficient, cette mesure doit impérativement être mise en relation avec les allégements de charges patronales prévues par l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Or, d’après l’évaluation préalable du présent article et les documents produits par le Gouvernement lors de la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, le secteur non lucratif sera l’un de ceux retirant le gain le plus important de la transformation du CICE et du CITS en allégements de charges. Le gain net, incluant la suppression du CITS, est évalué à 1,4 milliard d’euros par an, ainsi qu’il a été vu.

L’ampleur du gain s’explique notamment par le passage d’un crédit d’impôt au taux de 4 % à des allégements renforcés de 9,9 points, conduisant à une diminution plus importante du coût du travail que celle offerte sous l’empire du CITS.

Si le CITS n’était pas supprimé, non seulement les organismes éligibles bénéficieraient d’un cumul d’allégements de charges et du crédit d’impôt, mais cela conduirait à créer une rupture de concurrence vis-à-vis des acteurs marchands, pour lesquels le CICE disparaîtrait.

En tout état de cause, l’année de la suppression du CITS, en 2019, les organismes éligibles bénéficieront d’un soutien inégalé :

– au titre des allégements de charges, perçus dès 2019 ;

– au titre des créances de CITS du millésime 2018 – ainsi que les excédents éventuels des millésimes précédents.

Le présent article, indissociable de la mise en place d’allégements de charge, s’inscrit donc dans la volonté du Gouvernement d’appuyer l’économie sociale et solidaire.

*

*     *

La commission adopte l’article 43 sans modification.

*

*     *

Après l’article 43

La commission est saisie des amendements identiques II-CF116 de M. Gilles Lurton et II-CF598 de Mme Ericka Bareigts.

M. Gilles Lurton. L’article 43 supprime le CITS à compter de 2019, pour le remplacer, dans le cadre de l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2018, par un dispositif pérenne de baisse de cotisations patronales applicables à l’ensemble du secteur privé non-lucratif.

L’objet de cet amendement n’est pas de remettre en cause la transformation du CITS en dispositif de baisse de cotisations patronales, appelée de ses vœux par le secteur, mais de rehausser le taux du CITS de 4 à 6 %, le rapprochant ainsi du niveau du différentiel de charges sociales et fiscales du secteur public hospitalier, social et médico-social.

M. le Rapporteur général. J’ai moi aussi reçu de la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP) la proposition que reprend l’amendement de M. Lurton. Cet amendement coûterait 300 millions d’euros à la sécurité sociale, alors que le secteur non lucratif va être l’un des principaux gagnants de la transformation des allégements de charges, puisque le gain net pour ce secteur sera de 1,4 milliard d’euros par an. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement II-CF114 de M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. L’objet de cet amendement est de créer un crédit d’impôt recherche (CIR) imputable sur la taxe sur les salaires pour les organismes privés non lucratifs. Il s’agit d’une rédaction en miroir de l’article 244 quater B du CGI, portant sur le crédit impôt recherche, déjà ouvert aux structures privées de statut commercial de l’économie sociale et solidaire, et de l’économie en général.

M. le Rapporteur général. Sachant toujours d’où provient cette proposition, je considère que vouloir étendre tous les avantages des entreprises au secteur non lucratif n’est pas évident ni nécessairement opportun. Avis défavorable.

M. Gilles Lurton. Je ne suis pas totalement opposé à la position du Rapporteur général, mais je crains que le secteur non lucratif soit demain très désavantagé.

M. le Rapporteur général. Avec 1,4 milliard d’euros de gain net par an, on n’est pas vraiment désavantagé. Par ailleurs, j’aimerais qu’on m’explique quelles sont, dans ce secteur, les dépenses qui relèvent de la recherche et qui ne font pas déjà l’objet de subventions publiques.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, elle rejette ensuite l’amendement II-CF115 de M. Gilles Lurton.

*

*     *

Article 44
Suppression du taux supérieur de la taxe sur les salaires

Résumé du dispositif et effets principaux :

Le présent article supprime le troisième taux majoré de la taxe sur les salaires (taux de 20 %), applicable à la fraction de rémunération individuelle annuelle excédant 152 279 euros.

Le dispositif entraînera une perte de recettes annuelles de 140 millions d’euros pour la sécurité sociale à compter de 2018, et une perte nette de 110 millions d’euros pour l’ensemble des administrations publiques, pour un produit total de taxe sur les salaires de l’ordre de 14 milliards d’euros.

Il s’inscrit dans la démarche de renforcement de l’attractivité du territoire national entreprise par le Gouvernement, notamment dans le contexte du « Brexit » et de la relocalisation d’activités financières hors du Royaume-Uni, notamment en Allemagne, en Irlande, au Luxembourg et en France.

Dernières modifications législatives intervenues

Le troisième taux majoré de la taxe sur les salaires a été introduit par l’article 13 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

La loi de finances pour 2017 a mis en place un crédit d’impôt de taxe sur les salaires (CITS) au bénéfice de certains organismes à but non lucratif, en miroir du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) dont bénéficient les acteurs privés marchands. L’article 43 du présent projet de loi de finances supprime le CITS, en lien avec la suppression du CICE prévue à l’article 42, du fait de la transformation des deux outils en allégements de charges à compter de 2019.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’état du droit

Créée en 1948 ([137]) à titre provisoire sous la forme d’un versement forfaitaire de 5 % des rémunérations versées, la taxe sur les salaires fut pérennisée par la loi de finances pour 1952 ([138]) et prit sa dénomination actuelle en 1966 ([139]).

A.   Les redevables de la taxe sur les salaires

Prévue aux articles 231 et suivants du CGI, la taxe sur les salaires est un impôt progressif assis sur les rémunérations versées par certains employeurs. Son produit est affecté aux administrations de sécurité sociale.

Son assiette est identique à celle de la contribution sociale généralisée (CSG), par renvoi à l’article L. 136‑2 du code de la sécurité sociale.

Cette taxe est due par les employeurs domiciliés en France qui ne sont pas soumis à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur la totalité de leur chiffre d’affaires. Concrètement, cela concerne les employeurs :

– qui ne sont pas assujettis à la TVA ;

– ou qui n’ont pas été assujettis à la TVA sur au moins 90 % de leur chiffre d’affaires au titre de l’année précédant celle de versement des rémunérations (dans cette seconde hypothèse, la taxe est due à raison du rapport entre le chiffre d’affaires non assujetti à la TVA et le chiffre d’affaires total ; c’est le « rapport d’assujettissement ») ([140]).

Toutefois, un certain nombre d’exonérations sont prévues. Peuvent ainsi être mentionnées les exonérations suivantes :

– les rémunérations versées par l’État sur le budget général ([141]), si cela n’entraîne pas de distorsion de concurrence (les activités régaliennes sont donc exonérées ; en revanche, la taxe sur les salaires peut être due au titre d’activités de production de biens ou de services marchands) ;

– les régions, départements, communes et établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – (syndicats ou EPCI à fiscalité propre) ;

– les régies personnalisées créées par les collectivités territoriales ou les EPCI pour gérer un service public administratif, les services départementaux d’incendie et de secours, les centres de formation des personnels communaux, les centres d’action sociale, les caisses des écoles et les syndicats mixtes constitués exclusivement de collectivités territoriales ;

– les rémunérations versées par un particulier employant un seul salarié à domicile ou un seul assistant maternel (l’emploi de plusieurs personnes peut néanmoins ouvrir droit à l’exonération lorsque leur présence au domicile de l’employeur est requise pour l’accomplissement des actes ordinaires de la vie) ;

– les rémunérations versées aux apprentis par les entreprises qui emploient au plus dix salariés ;

– les employeurs qui exercent une profession agricole au sens des dispositions régissant la mutualité sociale agricole (MSA), ce qui recouvre notamment les exploitations de culture et d’élevage, les entreprises de travaux agricoles ou encore celles de travaux forestiers ([142]).

B.   la liquidation de la taxe sur les salaires : les taux applicables

1.   Le barème progressif de la taxe sur les salaires

Impôt progressif, la taxe sur les salaires repose sur un barème applicable aux rémunérations individuelles annuelles comptant quatre tranches, prévu au 2 bis de l’article 231 du CGI. Ce barème est présenté dans le tableau suivant.

barème de la taxe sur les salaires

Fraction de rémunération individuelle annuelle

Taux applicable

Inférieure ou égale à 7 721 euros

4,25 %

Supérieure à 7 721 euros et inférieure ou égale à 15 417 euros

8,50 %

Supérieure à 15 417 euros et inférieure ou égale à 152 279 euros

13,60 %

Supérieure à 152 279 euros

20,00 %

N.B. : la lettre du 2 bis de l’article 231 du CGI est imprécise, en ce qu’elle fait état, pour chaque tranche, d’une fraction de rémunération « comprise entre » deux montants, pouvant conduire à ce que le même montant constitue à la fois la limite supérieure d’une tranche et la limite inférieure de la tranche suivante. La précision de l’articulation des limites de chaque tranche est apportée par le Bulletin officiel des finances publiques (BOI-TPS-TS-30).

Les limites des tranches du barème sont relevées chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.

Le troisième taux majoré (taux supérieur de 20 %), applicable à la fraction de rémunération supérieure à 152 279 euros, a été introduit par l’article 13 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 ([143]).

Une autre présentation du barème de la taxe sur les salaires consiste à soustraire à chacun des trois taux majorés le taux normal de 4,25 %, et d’appliquer ce dernier à l’ensemble de la rémunération, et non seulement à la fraction n’excédant pas 7 721 euros. Les taux majorés sont alors de :

– 4,25 % (8,50 % – 4,25 %) pour la deuxième tranche ;

– 9,35 % (13,60 % – 4,25 %) pour la troisième tranche ;

– 15,75 % (20 % – 4,25 %) pour la quatrième et dernière tranche.

Le barème prévu au 2 bis de l’article 231 s’applique aux rémunérations annuelles. Le barème applicable aux rémunérations mensuelles correspond au précédent, divisé par douze (et arrondi à l’euro supérieur). Il figure dans le tableau suivant.

barème mensuel de la taxe sur les salaires

Fraction de rémunération individuelle mensuelle

Taux applicable

Inférieure ou égale à 644 euros

4,25 %

Supérieure à 644 euros et inférieure ou égale à 1 285 euros

8,50 %

Supérieure à 1 285 euros et inférieure ou égale à 12 690 euros

13,60 %

Supérieure à 12 690 euros

20,00 %

Les exemples suivants illustrent les modalités de liquidation de la taxe sur les salaires, en fonction des taux applicables à chaque fraction de rémunération considérée. Le premier exemple utilise la méthode consistant à appliquer à l’ensemble de la rémunération le taux normal de 4,25 %, puis à appliquer à chaque tranche supérieure le taux majoré duquel est soustrait le taux normal. Le second exemple applique le barème tel qu’il est défini à l’article 231 à chaque fraction de rémunération.

Calcul de la taxe sur les salaires – exemple 1
(taux normal sur tout le salaire et des taux majorés à chaque tranche)

Un employeur verse deux salaires annuels, l’un de 36 000 euros, l’autre de 12 000 euros. Pour le premier salaire, en plus du taux normal, devront être appliqués les deux premiers taux majorés. Pour le second salaire, seul le premier taux majoré sera applicable.

Taxe due au titre du premier salaire :

– 4,25 % sur 36 000 euros, soit 1 530 euros ;

– 4,25 % sur (15 417 euros – 7 721 euros), soit 327 euros ;

– 9,35 % sur (36 000 euros – 15 417 euros), soit 1 925 euros.

Au titre du premier salaire, la taxe due sera de 3 782 euros.

Taxe due au titre du second salaire :

– 4,25 % sur 12 000 euros, soit 510 euros ;

– 4,25 % sur (12 000 euros – 7 721 euros), soit 182 euros.

Au titre du second salaire, la taxe due sera de 692 euros.

Le montant total de taxe sur les salaires sera donc de 4 474 euros.

 

Calcul de la taxe sur les salaires – exemple 2
(application directe du barème progressif)

Un employeur verse deux salaires annuels, l’un de 180 000 euros, l’autre de 210 000 euros. Pour chacun des deux salaires, en plus du taux normal, les trois taux majorés seront applicables.

Taxe due au titre du premier salaire :

– 4,25 % sur 7 721 euros, soit 328 euros ;

– 8,50 % sur (15 417 euros – 7 721 euros), soit 654 euros ;

– 13,60 % sur (152 279 euros – 15 417 euros), soit 18 613 euros ;

– 20 % sur (180 000 euros – 152 279 euros), soit 5 544 euros.

Au titre du premier salaire, la taxe due sera de 25 139 euros.

Taxe due au titre du second salaire :

– les montants dus au titre des trois premières tranches sont les mêmes que ceux du précédent calcul ;

– seule la dernière tranche diffère et correspond à 20 % sur (210 000 euros – 152 279 euros), soit 11 544 euros.

Au titre du second salaire, la taxe due sera de 31 140 euros.

Le montant total de taxe sur les salaires sera donc de 56 279 euros.

2.   Les taux préférentiels applicables en outre-mer

En application des 2 bis et 5 de l’article 231 du CGI, le barème progressif de la taxe sur les salaires ne s’applique pas aux rémunérations versées dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution. S’y substitue un taux unique préférentiel :

– de 2,95 % en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion ;

– de 2,55 % en Guyane et à Mayotte.

L’article 111 de la loi de finances rectificative pour 2016 ([144]) a subordonné le bénéfice de ces taux préférentiels au respect du règlement général d’exemption par catégorie (RGEC) du 17 juin 2014 ([145]).

3.   La franchise et la décote de taxe sur les salaires

L’article 1679 du CGI prévoit deux mécanismes d’allégement des charges induites par la taxe sur les salaires.

D’une part, existe une franchise de 1 200 euros, dispensant l’employeur du paiement de la taxe sur les salaires lorsque son montant annuel n’excède pas cette somme.

D’autre part, est prévue une décote, applicable lorsque la taxe sur les salaires due est supérieure à 1 200 euros mais n’excède pas 2 040 euros, et égale au trois quarts de la différence entre 2 040 euros et le montant dû.

Illustration du mécanisme de décote de la taxe sur les salaires

Un employeur doit 1 500 euros en application du barème de la taxe sur les salaires.

Il bénéficie d’une décote égale à (2 040 – 1 500) × 0,75 = 405 euros.

La taxe sur les salaires finalement due sera donc de 1 500 – 405 = 1 095 euros.

4.   L’abattement de taxe sur les salaires pour le secteur non lucratif

L’article 1679 A du CGI prévoit un abattement de taxe sur les salaires, d’un montant de 20 304 euros (en 2017), appelé « abattement Hamon ».

Cet abattement bénéficie à certains organismes non lucratifs : associations régies par la loi de 1901, fondations reconnues d’utilité publiques, syndicats professionnels et leurs unions, mutuelles et centres de lutte contre le cancer.

5.   Le crédit d’impôt de taxe sur les salaires

L’article 88 de la loi de finances pour 2017 ([146]) a mis en place un CITS au bénéfice des organismes éligibles à l’« abattement Hamon » (et a également élargi la liste de ces organismes).

La création du CITS visait à compenser l’absence, pour les organismes concernés, de bénéfice du CICE, que perçoivent les acteurs privés marchands, dont certains interviennent dans les mêmes secteurs d’activité que les acteurs non lucratifs. Le CITS, d’un taux de 4 %, obéit à un régime inspiré de celui du CICE.

La suppression du CICE et du CITS est prévue à compter de 2019 par les articles 42 et 43 du présent projet de loi de finances, dans le cadre de la transformation de ces deux outils en allégements de charges patronales prévus par l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 ([147]).

C.   Le paiement de la taxe sur les salaires

Les modalités de paiement de la taxe sur les salaires varient en fonction du montant total de la taxe sur les salaires due l’année précédente, qui conditionnera la périodicité des versements à effectuer. Le tableau suivant fait état de ces modalités, prévues à l’article 369 de l’annexe III du CGI.

périodicité des versements de taxe sur les salaires

Montant total de la taxe acquittée en N  1

Périodicité des versements en N

Inférieure à 4 000 euros

Annuelle

Comprise entre 4 000 euros et 10 000 euros

Trimestrielle

Supérieure à 10 000 euros

Mensuelle

L’article 374 de la même annexe III prévoit que la taxe assise sur des rémunérations versées par l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics fait l’objet de versements trimestriels.

Au plus tard le 15 janvier de l’année suivant celle de versement des rémunérations ([148]), chaque employeur redevable de la taxe sur les salaires doit déposer une déclaration annuelle permettant la liquidation et la régularisation de la taxe due. Lors du dépôt de cette déclaration, l’employeur :

– acquitte le versement dû au titre du mois de décembre N – 1 s’il est soumis à une périodicité mensuelle ;

– acquitte le versement dû au titre du dernier trimestre N – 1 s’il est soumis à une périodicité trimestrielle ;

– acquitte le versement dû au titre de l’année N – 1 s’il est soumis à une périodicité annuelle.

II.   Le contexte économique et budgétaire

A.   Une taxe dynamique pesant principalement sur les secteurs sanitaire, social et financier

1.   Le dynamisme du produit de la taxe sur les salaires

Le produit de la taxe sur les salaires est affecté à la sécurité sociale. Cette taxe constitue la troisième plus importante recette du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), après les cotisations sociales et la CSG.

Compte tenu de son assiette, qui a tendance à croître d’une année sur l’autre, la taxe sur les salaires a un rendement marqué par un dynamisme certain, ainsi que l’illustrent le tableau et le graphique suivants, qui font état de l’évolution du produit depuis 2010 et des prévisions 2017 et 2018.

Évolution du produit de la taxe sur les salaires (2010-2018)

(en milliards d’euros)

Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017 (p.)

2018 (p.)

Produit

11,1

11,3

11,6

12,8

12,7

13,2

13,5

13,9

14,2

N.B. : les prévisions 2018 ne tiennent pas compte de la suppression du taux supérieur prévu au présent article.

Source : commission des comptes de la sécurité sociale, Résultats 2015 et prévisions 2016 et 2017, septembre 2016 ; Résultats 2016 et prévisions 2017 et 2018, volume 1, septembre 2017.

L’augmentation de 1,2 milliard d’euros constaté entre 2012 et 2013 trouve son origine dans deux mesures introduites par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 précitée :

– un élargissement du champ des rémunérations assujetties à la taxe sur les salaires (par l’inclusion de l’intéressement, de la participation ou encore de la prévoyance) afin d’aligner son assiette sur celle de la CSG. Cette mesure expliquerait l’essentiel de la hausse (1,1 milliard d’euros) ;

– l’introduction du troisième taux majoré de 20 % (qui expliquerait 0,1 milliard d’euros de la hausse).

Inversement, la diminution de 100 millions d’euros constatée entre 2013 et 2014 trouve son origine dans la forte augmentation de l’ « abattement Hamon », qui est passé de 6 002 euros en 2013 à 20 000 euros en 2014.

D’après la commission des comptes de la sécurité sociale, cette mesure aurait renchéri le coût de l’abattement de 300 millions d’euros. Cela témoigne donc bien du dynamisme naturel du produit, dans la mesure où la différence de produit constatée entre 2013 et 2014 est de 100 millions d’euros ([149]).

2.   Une taxe concentrée sur les secteurs sanitaire, social et financier

La taxe sur les salaires étant due par les employeurs qui ne sont pas assujettis à la TVA sur la totalité de leur chiffre d’affaires, elle ne touche pas – ou très peu – les secteurs agricole, industriel et de la construction.

En réalité, environ 80 % du produit de la taxe sur les salaires sont concentrés sur deux secteurs d’activité :

– le secteur de l’administration publique, de l’enseignement, de la santé humaine et de l’action sociale, qui représente un peu plus de la moitié du rendement (52,8 % en 2014) ;

– le secteur des activités financières et d’assurances, qui représente entre un quart et un tiers du rendement (28,6 % en 2014).

Parmi les activités du premier de ces deux secteurs, ce sont celles de nature sociale et sanitaire qui contribuent le plus au rendement de la taxe sur les salaires. Le tableau suivant fait état de la part de chacun des secteurs d’activité dans le rendement de la taxe en 2014.

répartition du produit de taxe sur les salaires par secteurs d’activité

(en millions d’euros)

Activités

2011

2012

2013

2014

Part (2014)

Activités financières et d’assurance

Activités des services financiers (hors assurance et caisses de retraite)

1 742,6

1 807,7

2 199,3

2 219,0

17,5 %

Assurances

784,6

806,7

946,1

955,9

7,5 %

Activités auxiliaires

333,5

353,8

441,1

452,0

3,6 %

Total

2 860,7

2 968,2

3 586,5

3 626,9

28,6 %

Administration publique, enseignement, santé humaine et action sociale

Administration publique et défense ; sécurité sociale obligatoire

960,4

996,1

1 084,5

1 100,0

8,7 %

Enseignement

347,5

356,0

365,8

330,5

2,6 %

Activités pour la santé humaine

3 500,0

3 617,9

3 755,8

3 817,7

30,1 %

Hébergement médico-social et social

697,0

716,6

760,9

770,7

6,1 %

Action sociale sans hébergement

657,5

679,4

720,6

671,9

5,3 %

Total

6 162,3

6 366,0

6 687,5

6 690,8

52,8 %

Autres

2 269,7

2 280,5

2 530,7

2 350,2

18,6 %

Total

11 292,8

11 614,7

12 804,8

12 667,8

100 %

Source : commission des comptes de la sécurité sociale, Résultats 2015 et prévisions 2016 et 2017, septembre 2016.

Si le secteur sanitaire et social reste le plus important contributeur, la dynamique enregistrée par le secteur financier est incontestable. La très importante croissance constatée entre 2012 et 2013 sur ce seul secteur (21 %, contre 10 % sur l’ensemble des secteurs) est due au ciblage des mesures prévues dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 : l’élargissement de l’assiette à la participation et à l’intéressement et l’introduction d’un troisième taux majoré frappant les rémunérations très élevées concerne principalement les activités financières et d’assurance.

3.   Un taux supérieur élevé frappant le secteur financier et d’assurance pour un rendement relativement faible

Le troisième taux majoré de la taxe sur les salaires, de 20 %, a été introduit en 2013. Applicable aux rémunérations annuelles supérieures à 152 279 euros (150 000 euros lors de sa création), il cible essentiellement le secteur de la finance et de l’assurance, les autres secteurs d’activité relevant de la taxe sur les salaires versant peu de salaires mensuels excédant 12 600 euros.

En 2016, ainsi qu’il a été vu, la commission des comptes de la sécurité sociale estimait que ce nouveau taux avait permis d’accroître le produit 2013 de la taxe de 100 millions d’euros, soit 0,8 % du produit total de 12,8 milliards d’euros.

Le graphique suivant fait état de la répartition du produit de taxe sur les salaires par tranche de barème, en fonction du taux applicable.

Décomposition du produit de la taxe sur les salaires (2010-2014)

(en milliards d’euros)

Source : commission des comptes de la sécurité sociale, Résultats 2015 et prévisions 2016 et 2017, septembre 2016.

Il ressort de ces données que le troisième taux majoré ne contribue que peu au produit total de la taxe. Ce sont surtout le taux normal de 4,25 % et le deuxième taux majoré, de 13,60 %, qui participent au produit et expliquent l’ampleur de ce dernier.

B.   L’enjeu de l’attractivité financière de la France dans le contexte du « Brexit »

Le troisième taux majoré de 20 % de la taxe sur les salaires ne permet qu’un rendement relativement modeste, rapporté au produit total de la taxe, mais peut avoir des conséquences négatives en termes d’affichage pour l’attractivité nationale.

Ainsi qu’il a été vu, ce taux supérieur concerne essentiellement les entreprises financières et d’assurance, et principalement les plus importantes d’entre elles compte tenu des rémunérations ciblées.

Si la France, et singulièrement Paris et La Défense, sont des places financières importantes, la première au niveau européen est Londres : plus de la moitié des actions européennes y sont échangées, tandis que le Royaume-Uni détient 22 % des parts de marché de l’Union européenne dans les domaines de l’assurance et de la réassurance, 26 % des prêts bancaires et 35 % des financements interbancaires. En 2015, les services financiers ont représenté 7 % du produit intérieur brut britannique ([150]), 4 % de l’emploi et 11 % des recettes fiscales nationales ([151]).

À la suite du vote en faveur du « leave » dans le cadre du référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union européenne tenu le 23 juin 2016, l’avenir britannique de nombreux établissements financiers et d’assurance a été remis en cause. Les négociations en cours entre le Royaume-Uni et les 27 autres États membres, parallèlement aux autres questions essentielles telles que le sort des citoyens britanniques et des ressortissants européens, devront aborder deux sujets majeurs pour le futur de la place financière britannique :

– le « passeport financier », qui permet à une société financière ayant obtenu un agrément de l’autorité de son pays d’origine d’exercer ses activités dans l’ensemble de l’Union européenne ;

– la localisation au Royaume-Uni des chambres de compensation en euros (aujourd’hui possible en vertu d’un accord entre la Banque centrale européenne 
– BCE – et la Banque d’Angleterre, qui prévoit une supervision par la BCE des opérations en euros).

À défaut d’un accord spécifique, les banques opérant depuis le Royaume-Uni risquent de perdre leur « passeport financier », tandis que la localisation de chambres de compensation en euros sur le sol britannique ne devrait plus être possible.

De nombreux établissements ont annoncé leur intention de relocaliser leurs activités hors du Royaume-Uni, notamment en Allemagne, en Irlande, au Luxembourg et France, ou à tout le moins ont indiqué étudier de telles délocalisations ([152]).

D’après les éléments parus dans la presse, et pour ne prendre que des exemples portant sur les plus grands établissements mondiaux, Bank of America et Barclays envisageraient de s’installer à Dublin, JP Morgan Chase aurait choisi Francfort et HSBC prévoirait de relocaliser 1 000 emplois à Paris. Ce serait toutefois Francfort, siège de la BCE, qui attirerait le plus les banques mondiales, qui choisiraient d’y implanter leur siège européen ou d’accroître les effectifs des établissements dont elles disposeraient déjà. L’organisme Frankfurt Main Finance, chargé de la promotion du centre financier, indiquait ainsi qu’il s’attendait à ce que 10 000 postes supplémentaires déménagent à Francfort d’ici 2022 ([153]).

À cet égard, l’existence du taux supérieur de la taxe sur les salaires est un facteur de handicap pour l’attractivité de la place financière parisienne. Si les choix des établissements ne seront pas exclusivement motivés par des considérations fiscales, la question du coût du travail fera partie des éléments pris en compte. Or, d’après l’évaluation préalable du présent article, la France est, avec le Danemark, le seul pays ayant un impôt du type de la taxe sur les salaires, dont le taux supérieur accentue le coût du travail, ainsi que l’illustre le tableau suivant.

montant de Taxe sur les salaires dû sur de très hautes rémunérations

(en euros)

Rémunération annuelle

Taxe sur les salaires due

Rapport taxe / rémunération

200 000

29 140

14,6 %

250 000

39 140

15,7 %

300 000

49 140

16,4 %

500 000

89 139

17,8 %

Source : commission des finances

Le taux supérieur de 20 % conduit à augmenter le montant de la taxe de 10 000 euros par tranche de 50 000 euros au-delà du seuil de la dernière tranche du barème progressif.

III.   Le dispositif proposé

Le présent article supprime le troisième taux majoré de taxe sur les salaires, de 20 %, applicable à la fraction de rémunération individuelle annuelle qui excède 152 279 euros.

En plus du taux normal de 4,25 %, deux taux majorés existeront :

– le taux de 8,50 % applicable à la fraction de rémunération supérieure à 7 721 euros et inférieure ou égale à 15 417 euros ;

– le taux de 13,60 % applicable à la fraction de rémunération supérieure à 15 417 euros.

La mesure s’appliquera aux rémunérations versées à compter du 1er janvier 2018.

IV.   L’impact budgétaire et économique

A.   Un coût pérenne de 110 millions d’euros par an

La suppression du troisième taux majoré de la taxe sur les salaires entraînera pour la sécurité sociale une perte de recettes de 140 millions d’euros par an à compter de 2018. En revanche, elle se traduira par un gain net pour l’État au titre des recettes de l’impôt sur les sociétés (IS) : la taxe sur les salaires, en effet, est déductible de l’assiette imposable à l’IS. Sa réduction conduira donc à accroître cette assiette et, par conséquent, l’IS dû. Le tableau suivant fait état de la chronique budgétaire de la mesure proposée.

impact budgétaire de la suppression du taux supérieur
de la taxe sur les salaires

(en millions d’euros)

Bénéficiaire

2018

2019

2020

2021

2022

État

+ 60

+ 30

+ 30

+ 30

Sécurité sociale

– 140

– 140

– 140

– 140

– 140

Total

 140

 80

 110

 110

 110

Source : évaluation préalable.

La hausse de recettes au titre de l’IS, pour l’État, est évaluée à 30 millions d’euros par an à partir de 2020 en raison de l’augmentation des acomptes d’IS dû au titre de chaque exercice.

En 2018, aucun gain ne sera réalisé, les acomptes d’IS versés au titre de cette année-là étant assis sur les résultats 2016 (pour le premier acompte) et 2017 (pour les trois suivants), dont sont déduits les montants dus au titre de la taxe sur les salaires ([154]).

En 2019, le gain sera double :

– l’État récupérera 30 millions d’euros sur le solde de l’IS 2018, dont les acomptes n’auront pas intégré l’élargissement de l’assiette imposable ;

– l’État percevra 30 millions d’euros supplémentaires sur les acomptes versés au titre de l’IS 2019.

À partir de 2020, seuls les acomptes augmentés de 30 millions d’euros seront perçus.

La perte de recettes enregistrée par la sécurité sociale doit être mise en relation avec le gain tiré de la suppression du CITS, prévue à l’article 43 du présent projet de loi de finances et qui s’élèvera à 600 millions d’euros par an à compter de 2020.

L’opportunité de la mesure est d’autant plus marquée que son coût, au regard du produit total de taxe sur les salaires, est relativement modeste :

– 140 millions d’euros de pertes pour la sécurité sociale sur un produit 2018 estimé à 14,2 milliards, soit 0,99 % de ce dernier ;

– 110 millions d’euros de pertes nettes, soit 0,77 % du produit 2018.

Le coût de la mesure est d’ailleurs inférieur au dynamisme du produit de la taxe sur les salaires, qui devrait croître de 300 millions d’euros entre 2017 et 2018 hors suppression du taux supérieur, et devrait ainsi connaître une croissance nette de 160 millions d’euros.

B.   Le renforcement de l’attractivité de la France

Le taux supérieur de la taxe sur les salaires renchérit le coût du travail d’emplois à très haute valeur ajoutée et dont les titulaires sont, en règle générale, particulièrement mobiles.

Sa suppression devrait donc permettre aux entreprises concernées de réaliser des économies substantielles, ainsi que l’illustre le tableau suivant, comparant la taxe due avec et sans le troisième taux majoré.

comparaison de la taxe sur les salaires due
avec et sans application du taux supérieur

(en euros)

Rémunération annuelle

Taxe due
(droit existant)

Taxe due
(droit proposé)

Différence

Rapport taxe / rémunération (droit proposé)

200 000

29 140

26 086

3 054

13,04 %

250 000

39 140

32 886

6 254

13,15 %

300 000

49 140

39 686

9 454

13,23 %

500 000

89 139

66 886

22 254

13,38 %

Source : commission des finances.

Le rapport entre la taxe due et la rémunération versée est relativement constant, autour de 13 %, là où, pour les mêmes rémunérations, il variait de 14,6 % à près de 18 % avec application du taux supérieur.

Malgré des questions posées en ce sens, le Rapporteur général n’a pas obtenu, de la part de l’administration fiscale, d’éléments sur le nombre d’entreprises concernées par cette suppression et le montant moyen des rémunérations touchées par le taux supérieur de taxe sur les salaires.

La suppression du taux supérieur devrait permettre :

– d’alléger le coût du travail pesant sur les entreprises déjà en France ;

– de renforcer l’attractivité de la France afin d’amener le plus possible d’entreprises étrangères à s’implanter dans le pays ou à y accroître leur présence ;

– d’éliminer un désavantage concurrentiel dans le contexte post-Brexit, marqué par une relocalisation importante de nombreux établissements bancaires.

Ces questions d’attractivité ne se limitent pas aux seuls établissements financiers et aux seuls emplois du secteur bancaire : elles concernent l’ensemble de l’économie, par capillarité.

L’effet signal ainsi envoyé aux entreprises étrangères sera important, et doit être mis en relation avec la suppression de l’extension de la taxe sur les transactions financières aux opérations intra-journalières (« intraday »), à laquelle procède l’article 15 du présent projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale lors de l’examen de sa première partie.

*

*     *

La commission examine les amendements identiques II-CF429 de Mme Muriel Ressiguier, II-CF594 de Mme Valérie Rabault, II-CF611 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF669 de M. Fabien Roussel.

M. Éric Coquerel. Notre amendement vise à faire une double bonne action : rapporter des recettes à l’État tout en luttant contre les écarts excessifs de salaires.

L’article 44 vise à supprimer le taux supérieur de la taxe sur les salaires, imputable sur les salaires supérieurs à 8,5 fois le SMIC, soit 152 279 euros par an. Une entreprise qui décide d’octroyer de telles rémunérations à ses salariés a, nous semble-t-il, de quoi payer une taxe à l’État. Nous proposons donc la suppression de cet article.

Par ailleurs, nous serions favorables à une loi qui contienne les écarts salariaux entre un et vingt.

Mme Christine Pires Beaune. Mon amendement vise aussi à supprimer l’article 44, afin de maintenir la dernière tranche de taxe sur les salaires, qui ne s’applique que pour des rémunérations supérieures à 152 279 euros. Quand on peut payer un cadre plus de 152 000 euros, on doit pouvoir payer une taxe sur cette dernière tranche de salaires, sachant que sa suppression entraînerait une perte de 140 millions pour la sécurité sociale, et ce, dès 2018.

M. Jean-Paul Dufrègne. Brexit, Brexit, Brexit ! Bienvenue à tous sur la place de Paris ! Le Gouvernement fait preuve d’une bien plus grande générosité à l’égard des entreprises qu’à l’égard des territoires ruraux dans lesquels on ne peut même plus construire de logements neufs. Cette différence de traitement est inacceptable !

M. le Rapporteur général. Je comprends l’objectif de ces amendements, mais cette mesure n’est pas, comme on l’a caricaturée, un cadeau au monde de la finance. Elle participe d’un train de mesures destinées à renforcer l’attractivité des entreprises de ce pays.

Je signale en outre, s’agissant du rendement de cette taxe, que, malgré la suppression du taux majoré, son produit devrait être supérieur en 2018 à ce qu’il est en 2017. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement II-CF448 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Cet amendement propose de conserver l’article 44 mais d’augmenter la taxe sur les salaires.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 44 sans modification.

*

*     *

Après l’article 44

La commission examine l’amendement II-CF284 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Il s’agit, avec cet amendement, de réactiver un dispositif qui a existé il y a une quinzaine d’années et qui permet aux entreprises individuelles de constituer des provisions pour investissement et pour dépenses de mise en conformité, à compter du 1er janvier 2019. L’amendement prend en compte pour cela la définition des petites entreprises, telle qu’établie par le règlement de l’Union européenne n° 651/2014 et intègre également dans le champ du dispositif les entreprises de transport et les entreprises de transformation des produits agricoles.

Comme je mesure que cet amendement a un coût, nous demandons la réalisation d’une étude d’impact d’ici cinq ans. C’est un dispositif qui a fait ses preuves et pourrait être utile à des entreprises qui ont des projets mais ne peuvent investir du fait de leur situation financière.

M. le Rapporteur général. Le dispositif que veut rétablir l’amendement a été supprimé en 2009, mais remplacé par différentes mesures de soutien. Par ailleurs, l’investissement connaît actuellement une dynamique qui devrait se confirmer dans les années à venir : + 3,7 % en 2017, + 4,2 % hors construction, après une hausse de 3,9 points en 2016 et des prévisions pour 2018 à + 4,1 %. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement II-CF14 de M. Mohamed Laqhila.

M. Mohamed Laqhila. Il s’agit d’un dispositif introduit par la « loi Macron », qui a permis de faire progresser les investissements de 3,4 % en 2016. Malheureusement ce dispositif a pris fin le 14 avril 2017 et la hausse des investissements est retombée à 2,9 % pour 2017. C’est pourquoi, il est proposé de le réactiver.

M. le Rapporteur général. En premier lieu, le dispositif visé par l’amendement n’est pas le bon : il porte sur le suramortissement des poids lourds utilisant certains types de carburants, non sur le suramortissement exceptionnel général.

Par ailleurs, je ne souhaite pas que nous relancions le débat qui a permis à notre ami Charles de Courson de faire son buzz médiatique.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient ensuite à l’amendement II-CF603 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. La clause d’embauche locale permettait à une entreprise de bénéficier des avantages attachés aux zones franches urbaines (ZFU) lorsqu’elle employait un tiers de salariés habitant en ZFU. Le dispositif a été modifié pour établir le ratio à un salarié sur deux. Cela partait d’une bonne volonté, mais, en pratique, c’est un objectif compliqué à atteindre.

Dans la mesure où l’Assemblée a adopté hier le dispositif des emplois francs, qui va faciliter l’embauche des habitants de ces quartiers à l’extérieur, nous proposons de rétablir la clause d’embauche locale à son niveau antérieur d’un habitant sur trois.

M. le Rapporteur général. Cet amendement est problématique dans la mesure où il ne prend en compte que l’aspect fiscal de l’implantation en ZFU, sans se préoccuper de la question des exonérations de charges sociales.

Par ailleurs, je ne suis pas certain que la diminution du ratio d’embauches locales dans les ZFU soit opportune du point de vue de l’emploi local.

Mme Cendra Motin. Pour avoir été employeur en zone franche et présidé une association d’entreprises en zone franche, je peux vous assurer que la question du recrutement d’employés habitant dans ces zones est un frein à l’embauche et que beaucoup d’entreprises ont limité leurs recrutements pour ne pas avoir à embaucher les habitants des ZFU.

Maintenir le ratio à un employé sur deux me paraît une bonne chose, sachant que les emplois francs viendront en complément du dispositif.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-CF438 de M. Guy Bricout.

Mme Lise Magnier. Cet amendement vise à permettre aux exploitants agricoles, soumis à un régime réel d’imposition, de pratiquer une déduction pour épargne de précaution.

J’entends déjà le Rapporteur général me renvoyer aux États généraux de l’alimentation mais, dans la mesure où nous allons examiner deux amendements qu’il a lui-même déposés et qui modifient le régime fiscal applicable aux activités viticoles et agricoles, une telle réponse me paraîtrait parfaitement incohérente.

M. le Rapporteur général. Votre amendement est un amendement d’appel, je vous demande donc de le retirer.

Mme Lise Magnier. Avant de le retirer, j’ai une petite question. Je suppose que les États généraux de l’alimentation vont déboucher sur une loi agricole d’ampleur qui portera notamment sur la fiscalité agricole. Cette loi sera-t-elle adossée à une loi de finances rectificative ?

M. le Rapporteur général. Mystère…

Mme Amélie de Montchalin. Nous travaillons toujours avec le souci d’être cohérents et d’aborder les problèmes dans leur globalité. Toutes les mesures ayant un impact sur les lois de finances seront donc prises en compte. Reste qu’il m’est difficile de dire si cela sera fait fin 2018 ou avant et quels seront les véhicules choisis – certains ont évoqué des ordonnances. C’est aux groupes de travail et au ministre de prendre cette décision.

La commission rejette l’amendement.

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*     *

Article additionnel après l’article 44
Création d’une réserve de précaution pour les produits de la viticulture

La commission examine l’amendement II-CF403 du Rapporteur général.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Cet amendement concerne les viticulteurs. Sans remettre en cause la pertinence et l’opportunité de la refonte d’ensemble de la fiscalité agricole annoncée par le ministre de l’économie lors de l’examen de la première partie du présent projet de loi, nous voudrions garantir la pérennité des exploitations, notamment en cas d’aléas climatiques. Aujourd’hui, le viticulteur est fiscalisé sur le raisin qu’il récolte, qu’il vende son vin ou qu’il le stocke. La fiscalité actuelle n’encourage pas la gestion pluriannuelle de ses stocks, pourtant de plus en plus nécessaire. Nous souhaitons permettre une défiscalisation des stocks, plafonnée à hauteur de 20 % du chiffre d’affaires, pour faire face aux aléas climatiques qui sont de plus en plus fréquents.

M. le Rapporteur général. J’ai cosigné cet amendement car je souhaite que la question particulière des stocks viticoles, qui n’a jamais été réglée, le soit dans le futur dispositif et fasse l’objet d’un engagement du ministre. Je réponds à cette occasion à Mme Magnier : dès que nous aurons des engagements sur ce cas particulier, unique dans le milieu agricole, le retrait s’imposera.

M. Charles de Courson. J’ai bien compris qu’il s’agit d’un amendement d’appel, mais j’ai été étonné que M. le Rapporteur général cosigne cet amendement. Il faudrait l’articuler avec le dispositif qui fonctionne maintenant depuis six ou sept ans en Champagne : la réserve individuelle, qui est précisément destinée à régler ce problème. Elle permet de conserver ce qui est de qualité, au-delà du quantum. Une éventuelle décision future permet ensuite le déblocage, quand il y a une mauvaise récolte.

Plusieurs autres appellations demandent à bénéficier de ce dispositif dont la traduction fiscale semble être l’objet de l’amendement de notre Rapporteur général. Mais, si je puis me permettre, je pense qu’il faudrait mieux l’articuler à ce dispositif de réserve individuelle.

Mais si c’est un amendement d’appel, nous pouvons, par amitié, le voter.

M. le président Éric Woerth. Nous allons donc voter cette extension de la déduction pour aléas.

La commission adopte l’amendement IICF403 (amendement n° II-1500).

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Article additionnel après l’article 44
Réduction de cinq à trois ans de la durée de l’option pour la moyenne triennale pour la détermination du bénéfice agricole imposable

La commission examine ensuite l’amendement II-CF309 du Rapporteur général.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Cet amendement vise à améliorer la progressivité de l’impôt. Aujourd’hui, lorsque leurs revenus sont à la hausse, les exploitants agricoles ont une option intéressante qui leur permet d’être imposés sur le bénéfice issu de la moyenne des bénéfices de l’année d’imposition et des deux années précédentes. Cette option est valable pour cinq ans. Nous demandons à revenir à une durée de trois ans, plus cohérente avec l’activité.

M. le Rapporteur général. Il s’agit de l’une des recommandations impératives du rapport de la mission d’information de 2015 présidée par Marc Le Fur sur la fiscalité agricole, dont le rapporteur était François André. Il ne s’agit pas d’un amendement d’appel, mais bien d’une mesure qu’il convient de mettre en œuvre, conformément à leurs recommandations. Elle n’entre pas en contradiction avec le futur débat sur la fiscalité agricole, et permettra par ailleurs de résoudre un certain nombre de problèmes dont a parlé Marc Le Fur sur le prélèvement à la source.

M. Charles de Courson. Pouvez-vous nous confirmer que la disposition s’applique aussi au calcul des cotisations sociales agricoles, puisque je rappelle qu’elles sont calées l’une sur l’autre ?

M. le Rapporteur général. Elle est calée sur l’assiette de l’impôt sur le revenu.

M. Charles de Courson. Le bénéfice agricole sert de base au calcul des cotisations sociales agricoles. Nous n’allons pas dans la bonne direction si nous disposons d’un concept lié à l’impôt sur le revenu pour le bénéfice agricole et d’un autre concept pour la Mutualité sociale agricole. Nous avons toujours essayé d’harmoniser les deux assiettes. Si nous votons cet amendement, s’applique-t-il à l’assiette ? Il me semble que c’est le cas, mais ce n’est pas évident.

M. le Rapporteur général. J’entends bien votre importante remarque. L’amendement est rédigé afin de tenir compte de la variabilité de l’assiette. Nous allons étudier comment il se coordonne avec la Mutualité sociale agricole, mais la prise en compte de la variabilité est prépondérante. Il conviendra peut-être de prévoir un amendement de coordination.

La commission adopte l’amendement II-CF309 (amendement n° II-1501).

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Article additionnel après l’article 44
Simplification de formalités administratives applicables dans le cadre
du « Madelin agricole »

La commission examine ensuite les amendements identiques II-CF191 de M. Dino Cinieri et II-CF681 de M. Bertrand Pancher.

M. Thibault Bazin. Nous vous proposons une mesure de simplification. L’adhésion au contrat de retraite complémentaire facultatif pour les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, les conjoints ou les membres de sa famille, est subordonnée à la justification par l’adhérent de la régularité de sa situation vis-à-vis du régime d’assurance vieillesse de base obligatoire. De même, une autre justification est prévue auprès des services fiscaux pour la déduction des cotisations versées au titre de ces complémentaires, qui fait donc double emploi avec celle qui est déjà exigée auprès de l’organisme assureur et qui est redondante pour le contribuable.

Afin de simplifier les démarches administratives des agriculteurs, je propose de supprimer l’attestation visée au II de l’article 154 bis-0 A du CGI, dès lors que le contribuable justifie de cette régularité vis-à-vis du régime obligatoire d’assurance vieillesse auprès d’organismes assureurs. Cette information pourra être connue des services fiscaux dans le cadre des échanges d’informations entre agents des organismes sociaux et agents de l’administration fiscale, qui sont déjà juridiquement possibles.

M. Charles de Courson. Mon amendement est défendu. Notre collègue vient de donner une excellente explication.

M. le Rapporteur général. Ces amendements apportent une simplification qui me semble utile. Sous réserve qu’une expertise plus approfondie soulève d’éventuelles difficultés, j’y suis favorable.

La commission adopte les amendements identiques II-CF191 et II-CF681 (amendement n° II-1502).

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Après l’article 44

Elle en vient à l’amendement II-CF301 de M. Pierre-Yves Bournazel.

M. Pierre-Yves Bournazel. Afin de préserver la diversité de l’offre de création du théâtre privé, dans un contexte extrêmement difficile pour le secteur, je propose un crédit d’impôt pour le théâtre, seule activité culturelle de création à ne pas disposer d’un tel dispositif.

En effet, de très nombreux l’ensemble des secteurs culturels bénéficient déjà d’un crédit d’impôt : le spectacle vivant musical ou de variété, les œuvres phonographiques, l’audiovisuel, le cinéma, la création de jeux vidéo ou les entrepreneurs de spectacles. Pour stimuler la création et développer de nouveaux talents, il faut ouvrir cette possibilité aux entreprises de spectacle d’art dramatique. Le dispositif de crédit d’impôt aurait un impact budgétaire raisonnable et maîtrisé, tout en étant une incitation particulièrement efficace à la prise de risques artistiques et à la création d’emplois. Cela pourrait aussi concourir au rayonnement de notre pays et de nos villes. Notre théâtre a besoin de soutien !

M. le Rapporteur général. Vous avez raison, le secteur culturel bénéficie déjà d’une série de crédits d’impôt. Très honnêtement, ces derniers ont connu un emballement extrêmement préoccupant, à la suite de plusieurs élargissements votés entre 2014 et 2016. L’inflation des enveloppes est très spectaculaire : on constate un doublement entre 2016 et 2018. Même si ce que vous proposez peut apparaître modeste, depuis quelques années, nous maîtrisons mal ces crédits d’impôt culturels, sans pour autant être en mesure de savoir s’il s’agit du bon vecteur pour soutenir un secteur qui dispose par ailleurs d’autres soutiens. Mon avis sera défavorable. Par ailleurs, je vais demander une évaluation de tous les crédits d’impôt de ce secteur.

La commission rejette l’amendement II-CF301.

Les amendements II-CF113 de M. Gilles Lurton et II-CF523 de M. Mohammed Laqhila sont successivement retirés.

La commission examine l’amendement II-CF20 de M. Mohammed Laqhila.

M. Mohamed Laqhila. Cet amendement vise à modifier le crédit d’impôt collection (CIC). Alors qu’il profite principalement aux grandes marques, il conviendrait d’en ouvrir le bénéfice aux fabricants, dans la mesure où ils participent à la réalisation de nouvelles collections, par l’élaboration de prototypes définitifs et de nouveaux modèles, avec des personnels dédiés comme les modélistes.

M. le Rapporteur général. Je suis perplexe face à l’architecture de l’amendement. Dès lors, je me pose des questions : vise-t-il le premier poste de dépenses éligibles au CIC ? S’agit-il de supprimer toutes les dépenses autres que celles qui sont mentionnées par l’amendement ? Très honnêtement, ce n’est pas très lisible. Je vous inviterais volontiers à le retirer pour revenir en séance avec un amendement d’appel plus clair.

L’amendement II-CF20 est retiré.

La commission examine l’amendement II-CF419 de Mme Amélie de Montchalin.

Mme Amélie de Montchalin. Cet amendement vise à améliorer le CIR en faveur des titulaires d’un doctorat. Ce crédit d’impôt est utile à la localisation des activités de recherche en France, mais nous manquons d’éléments clairs quant à son impact sur l’embauche de chercheurs et de docteurs formés et ayant fait leurs études et leurs travaux de recherche en France.

Le présent amendement vise à obtenir plus d’informations pour mieux évaluer et ajuster le dispositif et pour inciter à moyen terme les entreprises à s’interroger plus fortement sur leur politique de recrutement de docteurs en fonction de leurs besoins, liés à leurs projets de recherche. Mon rapport spécial sur le budget de la recherche soulève cette difficulté particulière : si l’embauche des docteurs par les grands organismes de recherche atteint un volume honorable, lié à leurs activités, nous formons néanmoins plus de docteurs qu’il n’y a de places dans ces grands organismes. Il est donc essentiel d’assurer à ces chercheurs un avenir dans les entreprises qui ont des activités de recherche.

M. le Rapporteur général. Je comprends la demande, mais je suis un peu perplexe sur la déconnexion entre l’obligation déclarative existante et le montant des dépenses de recherche et développement (R&D) engagées, à travers l’extension de cette obligation aux entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 100 millions d’euros, dont toutes n’engagent pas d’importantes dépenses de R&D. Je vous invite à retirer cet amendement pour le redéposer en séance, en conservant le lien, utile, entre les obligations supplémentaires au titre du CIR et le montant des dépenses de R&D. Il conviendrait sans doute d’abaisser le montant des dépenses de recherche et développement à partir desquelles les déclarations sont prévues, de façon à ce que l’amendement soit plus synthétique et plus lisible, sans effets collatéraux.

Mme Amélie de Montchalin. Je suis prête à modifier mon amendement afin qu’il soit pleinement recevable en séance.

L’amendement II-CF419 est retiré.

La commission examine l’amendement II-CF559 de Mme Natalia Pouzyreff.

Mme Natalia Pouzyreff. Cet amendement reprend les éléments communiqués par Mme de Montchalin à propos du CIR et de la problématique particulière des jeunes docteurs. Il convient d’améliorer ce dispositif pour compenser une discrimination de fait entre le recrutement d’ingénieurs et de jeunes docteurs par les entreprises. Pour cela, je propose de porter le plafond des dépenses à hauteur de cinq fois le montant des dépenses de personnel afférentes aux chercheurs diplômés d’un doctorat, contre deux fois actuellement.

M. le Rapporteur général. Comme tout à l’heure, je comprends l’objectif mais je ne suis pas certain que les modalités soient opportunes. L’incitation existe déjà par le doublement des dépenses prises en compte pour recruter des docteurs. Le lien que vous proposez dans l’amendement est inverse : il n’avantage pas le recrutement de docteurs, tout en pénalisant le recrutement de non-docteurs – techniciens, laborantins, ingénieurs sans doctorat. Vous risquez aussi de pénaliser les entreprises qui ont peu de docteurs, non par choix mais parce qu’elles n’en ont pas le besoin.

En l’état de sa rédaction, l’amendement pourrait en outre conduire à ce que les dépenses de personnel liées à l’emploi de docteurs soient prises en compte non pour le double de leur montant, mais pour cinq fois ce montant. Je vous invite à le retirer.

Mme Natalia Pouzyreff. Je comprends vos arguments. Je retire donc l’amendement, mais je le transformerai en amendement d’appel pour souligner le fait que le CIR finance des ingénieurs qui développent la gamme de produits de l’entreprise mais ne finance pas réellement la recherche et l’innovation.

L’amendement II-CF559 est retiré.

La commission examine les amendements identiques II-CF409 de Mme Véronique Louwagie et II-CF682 de M. Gilles Lurton.

Mme Véronique Louwagie. Le crédit d’impôt famille (CIFAM) ne bénéficie qu’aux entreprises qui ont des salariés. Les professions libérales et les gérants non salariés ne peuvent donc en bénéficier qu’à condition qu’ils emploient des salariés. C’est incohérent et inique. Cet amendement vise à y remédier en étendant l’assiette du CIFAM afin que tous les chefs d’entreprise, professions libérales, gérants non salariés, bénéficient du dispositif. C’est la même philosophie qui présidait à mon amendement sur les tickets restaurant.

M. Gilles Lurton. Cet amendement aurait aussi pour avantage d’entraîner un redémarrage des créations de places de crèches, dont nous manquons cruellement.

M. le Rapporteur général. Je comprends votre objectif, mais ce sujet a déjà été débattu. Je crois me souvenir que, lors de débats au Sénat, Emmanuel Macron, alors ministre, avait fait état de son opposition en raison du coût de cette modification. On ne maîtrise pas l’augmentation des coûts qui pourrait correspondre à l’extension de ce système aux gérants non salariés et aux collaborateurs libéraux. En quoi cette extension est-elle vraiment indispensable ? L’application du dispositif relatif au CIFAM est souple : il est admis que les établissements accueillant les enfants des salariés de l’entreprise peuvent également accueillir les enfants du personnel non salarié, sans que cela conduise à priver l’entreprise du bénéfice du crédit d’impôt. Tant sur l’opportunité que sur le coût, mon avis est défavorable.

M. Julien Aubert. Il me semble que c’est une question de principe et d’égalité. Dire que l’égalité coûte cher n’est guère recevable, monsieur le Rapporteur général, car on pourrait étendre cet argument à beaucoup de sujets !

Ensuite, la politique d’Emmanuel Macron consiste justement à rapprocher les indépendants du régime général. On le voit avec le Régime social des indépendants (RSI). On nous explique que tout le monde doit être traité de la même façon. Ces amendements vont donc dans le sens de l’histoire, en tout cas de votre histoire…

Mme Véronique Louwagie. Monsieur le Rapporteur général, vous dites que le dispositif est souple. Il est peut-être souple, mais exclusif pour certaines catégories de personnes, les autres ne pouvant en bénéficier. C’est bien le problème.

M. le Rapporteur général. S’il s’agit de particuliers, il existe un crédit d’impôt pour la garde d’enfants et l’égalité est donc réelle, monsieur Aubert. Je rappelle en outre que dispositions modifiées par l’amendement bénéficient aux entreprises, non à leurs salariés.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement II-CF684 de M. Paul Christophe.

Mme Lise Magnier. Alors que la France compte 8,5 millions d’aidants familiaux, 4 millions d’entre eux exercent en parallèle une activité professionnelle. Nous le savons tous : l’aide quotidienne qu’ils apportent à leurs proches est indispensable pour notre pays. La valorisation économique de leur contribution est estimée à 7 milliards d’euros. La loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement a posé les bases juridiques d’une définition des aidants. Le code du travail prévoit des droits à congés spécifiques et une organisation de travail adaptée pour les salariés aidants. Certaines entreprises vont plus loin et financent des dispositifs d’accompagnement spécifiques.

Cet amendement vise à inciter les entreprises, indépendamment de leur taille, à développer de tels dispositifs, par une déduction fiscale des dépenses engagées à ce titre.

M. le Rapporteur général. L’accroche que vous avez choisie est le crédit d’impôt famille. Il porte sur les dépenses des entreprises au titre de la garde d’enfants des salariés en crèche. Le lien avec les aidants familiaux ne me semble pas évident. Par ailleurs, il n’y a pas d’évaluation du coût. Je suis donc défavorable.

La commission rejette l’amendement.

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Article additionnel après l’article 44
Prorogation de deux années du crédit d’impôt
en faveur de l’agriculture biologique

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF240, II-CF238, II-CF239 et II-CF237 de M. Alauzet.

M. Éric Alauzet. Suite à la reventilation des crédits de l’Union européenne du premier vers le deuxième pilier de la politique agricole commune (PAC), les dispositifs de maintien en agriculture biologique sont fragilisés. Les dispositifs de conversion ne sont pas touchés, mais les aides au maintien vont être supprimées. Or, cette agriculture est fragile. Il faut trois ans pour effectuer une conversion. Les revenus de ces agriculteurs ne sont pas importants. Les produits restent plus chers que la moyenne et les marges sont faibles pour les producteurs – peut-être moins pour les distributeurs… Je crains que les nouvelles dispositions ne mettent en difficulté cette agriculture. On nous explique que, la demande étant importante, elle peut vivre d’elle-même. Mais si on tenait le même raisonnement pour le reste de l’agriculture, on suspendrait bien des subventions ! Certaines agricultures sont totalement installées depuis des décennies, pourtant on leur apporte encore des aides très importantes.

Je mets en garde mes collègues : nous risquons de fragiliser cette agriculture naissante.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable.

Mme Christine Pires Beaune. Je souhaite également vous alerter et soutenir les amendements. J’ai reçu des agriculteurs installés il y a quelques années grâce à ces aides à la conversion et au maintien Le changement brutal des règles du jeu est terriblement déstabilisant. J’ai interrogé la chambre d’agriculture : la viabilité des exploitations est en jeu.

Mme Véronique Louwagie. Pour les mêmes raisons que Mme Pires Beaune, je voterai ces amendements. Il faut continuer de soutenir l’agriculture biologique, car nous sommes bien loin d’avoir atteint nos objectifs.

Mme Cendra Motin. Seules les aides au maintien ne seront plus versées. De plus, l’arrêt de certaines aides sera compensé par les régions, en coordination avec l’État.

Mme Christine Pires Beaune. Oui, sauf que ma région refuse de le faire ! L’articulation ne se fait pas de façon mécanique.

L’amendement II-CF240 est adopté (amendement n° II-1503).

En conséquence, les amendements II-CF238, II-CF239 et II-CF237 tombent.

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Après l’article 44

La commission se saisit de l’amendement II-CF258 de Mme Huguette Bello.

M. Jean-Paul Dufrègne. La loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (LODEOM) a permis la défiscalisation de la construction de logements dits « à loyers intermédiaires ». Depuis le 1er juillet 2014, il est possible d’obtenir un crédit d’impôt pour les investissements productifs réalisés dans les territoires d’outre-mer.

L’amendement propose d’assouplir la période de mise en location des logements à loyers intermédiaires.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF257 et II-CF256 de Mme Huguette Bello.

M. Jean-Paul Dufrègne. L’amendement II-CF257 propose de faire passer de six à douze mois la période de mise en location des logements et de prendre en compte le contrat préliminaire de réservation, en raison des procédures et des délais de la location-vente. L’amendement II-CF256 propose de faire passer de six à dix-huit mois la période de commercialisation des logements.

La location-vente permet l’acquisition d’un logement social par ses occupants ; outre une location d’au moins un an, elle comprend une phase d’achat matérialisé par la signature d’un contrat de réservation, équivalent à un compromis de vente, avec les différentes démarches afférentes – validation par un notaire, recherche d’un prêt, obligation de lever le droit de préemption des communes… Il faut prendre en considération ces impératifs spécifiques.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette successivement ces deux amendements.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette ensuite l’amendement II-CF255 de Mme Huguette Bello.

Puis la commission se saisit de l’amendement II-CF205 de Mme Huguette Bello.

M. Jean-Paul Dufrègne. Le présent amendement vise à ouvrir le crédit d’impôt aux travaux de réhabilitation et de rénovation du parc immobilier détenu par des organismes de logement social dans les outre-mer. Cette possibilité est déjà ouverte aux rénovations et réhabilitations d’hôtels, de résidences de tourisme et de village de vacances, mais pas au logement social.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

La commission examine ensuite l’amendement II-CF683 de M. Paul Christophe.

Mme Lise Magnier. Selon le même principe que tout à l’heure, cet amendement vise à inciter les entreprises à développer des dispositifs d’accompagnement de leurs salariés aidants. Il devrait davantage plaire à notre Rapporteur général, puisqu’il n’est pas adossé au CIFAM.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable, nous avons eu ce débat tout à l’heure.

La commission rejette l’amendement.

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Article 45
Exonération de la cotisation minimum de cotisation foncière des entreprises des redevables réalisant un très faible chiffre d’affaires

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article met en place, à compter de 2019, une exonération de cotisation minimum de cotisation foncière des entreprises (CFE) au bénéfice des contribuables dont le chiffre d’affaires n’excède pas 5 000 euros et qui, en l’état du droit, peuvent être amenés à acquitter une cotisation minimum de CFE disproportionnée au regard des revenus perçus.

Il prévoit également, au profit des mêmes contribuables et à compter de 2019, des exonérations des taxes consulaires additionnelles à la CFE.

Le coût du dispositif est estimé à 85 millions d’euros par an, dont 57 millions d’euros pour l’État (il sera neutre pour les collectivités, l’État prenant à sa charge la perte de recettes à travers un prélèvement sur recettes).

Dernières modifications législatives intervenues

La CFE a été créée par la loi de finances pour 2010, dans le cadre de la substitution de la contribution économique territoriale (CET) à la taxe professionnelle.

Le barème en vigueur de cotisation minimum de CFE, constitué de six tranches, a été fixé par la loi de finances pour 2014.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

I.   L’état du droit

A.   Présentation générale de la cotisation foncière des entreprises

La cotisation foncière des entreprises (CFE) constitue, avec la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), l’une des deux composantes de la contribution économique territoriale (CET) mise en place par l’article 2 de la loi de finances pour 2010 en remplacement de la taxe professionnelle ([155]).

1.   L’assiette de la CFE

Aux termes des articles 1467 et 1467 A du CGI, la CFE est assise sur la valeur locative des biens :

– passibles d’une taxe foncière ;

– utilisés par le contribuable pour les besoins de son activité professionnelle ;

– l’avant-dernière année précédant celle de l’imposition (soit en N – 2).

La CFE est due pour l’année entière par le redevable qui exerce l’activité au 1er janvier, en vertu de l’article 1478 du CGI (sauf dérogations au principe d’annualité en cas de création ou de cessation d’établissement ou de changement d’exploitant). En conséquence, pour les nouvelles entreprises créées en cours d’année, la CFE n’est pas due l’année de création, en application du II de l’article 1478 du CGI.

Dans certaines hypothèses, la base d’imposition est réduite (nouvelles entreprises, établissements industriels notamment).

2.   Le champ d’application de la CFE

La CFE, en application de l’article 1447 du CGI, est due par toute personne physique ou morale qui exerce à titre habituel une activité professionnelle non salariée et qui ne bénéficie d’aucune exonération. Le statut juridique de la personne, la nature de l’activité réalisée et la situation au regard de la taxe sur la valeur ajoutée et de l’impôt sur les bénéfices sont indifférents ([156]).

Le caractère habituel de l’activité inclut les activités saisonnières, mais aussi les activités exercées à titre précaire lorsqu’elles sont répétées. Il exclut en revanche les actes isolés, accidentels, occasionnels ou exceptionnels.

Le caractère professionnel de l’activité exclut les activités sans but lucratif et celles se limitant à la gestion d’un patrimoine privé (telle que la gestion de son propre portefeuille de valeurs mobilières).

Enfin, le caractère non salarié de l’activité exclut les titulaires de revenus relevant de la catégorie des traitements et salaires, étant précisé qu’est considéré le caractère du revenu, non les modalités d’imposition : une personne exerçant une activité non commerciale et optant pour le régime fiscal des salariés sera assujettie à la CFE si les autres conditions sont remplies.

Certaines personnes et activités peuvent être exonérées de CFE, de plein droit – en vertu de la loi – ou à titre facultatif – sur délibération de l’organe délibérant de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), dans les hypothèses prévues par la loi. Ces exonérations sont permanentes ou temporaires.

Les exonérations sont prévues aux articles 1449 à 1466 F du CGI :

– les exonérations de plein droit permanentes sont prévues aux articles 1449 à 1463 du CGI ([157]). Elles concernent notamment les collectivités territoriales, les établissements publics et les organismes de l’État, pour leurs activités essentiellement culturelles, éducatives, sanitaires, sociales, sportives ou touristiques, les exploitants agricoles, certaines sociétés coopératives agricoles, certaines sociétés coopératives d’artisans ainsi que les pêcheurs, certaines activités de presse, d’enseignement et artistiques ou encore certains professionnels médicaux ;

– il n’existe plus qu’une exonération de plein droit temporaire, prévue au 8° de l’article 1460, exonérant de CFE les jeunes avocats pendant les deux premières années qui suivent le début de l’exercice de la profession ([158]) ;

– les exonérations facultatives permanentes sont prévues aux articles 1464 à 1464 M du CGI, concernant notamment les entreprises de spectacles vivants et les cinémas, ainsi que certaines activités des établissements publics administratifs d’enseignement supérieur ou de recherche ([159]) ;

– des exonérations facultatives temporaires sont prévues au titre de l’aménagement du territoire aux articles 1465 à 1465 B, et au titre de la politique de la ville à l’article 1466 A ;

– enfin, les autres exonérations facultatives temporaires sont prévues à l’article 1464 D et aux articles 1466 A à F. Sont notamment concernées les « jeunes entreprises innovantes », les entreprises situées en Corse ou encore les entreprises implantées dans les zones franches d’activité en outre-mer.

3.   Le taux de la CFE

Le taux de la CFE est arrêté par l’organe délibérant de la commune ou de l’EPCI sur le territoire de laquelle ou duquel sont situés les biens considérés.

Son évolution fait l’objet d’un encadrement prévu à l’article 1636 B sexies du CGI. En application de l’article 1636 B septies, le taux de CFE est plafonné à deux fois le taux moyen constaté l’année précédente au niveau national.

En 2016, le taux moyen national de CFE s’est établi à 26,13 %. Le taux plafond de CFE pour 2017 est donc de 52,26 % ([160]).

4.   Le paiement de la CFE

La CFE est acquittée de façon dématérialisée, selon différentes modalités :

– paiement en ligne, pour l’acompte et le solde ;

– paiement par prélèvements mensuels (sur dix mois, de janvier à octobre) ;

– paiement par prélèvement à l’échéance.

Pour les contribuables qui n’ont pas opté pour les prélèvements mensuels, et lorsque la CFE due au titre de l’année N – 1 est supérieure à 3 000 euros, un acompte correspondant à 50 % de la CFE due l’année précédente est dû au plus tard le 15 juin de l’année N.

Le solde de CFE est acquitté au plus tard le 15 décembre N.

B.   La cotisation minimum de CFE

Lorsque la valeur locative des biens professionnels sur lesquels est assise la CFE est très faible, une cotisation minimum de CFE est prévue.

Cette cotisation minimum repose sur une base fixée par la commune ou l’EPCI, dans le cadre d’une fourchette qui varie selon le chiffre d’affaires réalisé et prévue à l’article 1647 D du CGI. Le tableau suivant reproduit le barème figurant à cet article.

barème 2017 de la cotisation minimum de cfe

(en euros)

Montant du chiffre d’affaires ou des recettes

Montant de la base minimum

Inférieur ou égal à 10 000

Entre 216 et 514

Supérieur à 10 000 et inférieur ou égal à 32 600

Entre 216 et 1 027

Supérieur à 32 600 et inférieur ou égal à 100 000

Entre 216 et 2 157

Supérieur à 100 000 et inférieur ou égal à 250 000

Entre 216 et 3 596

Supérieur à 250 000 et inférieur ou égal à 500 000

Entre 216 et 5 136

Supérieur à 500 000

Entre 216 et 6 678

La cotisation minimum a été introduite par la loi de finances pour 2010 précitée. Initialement, une seule tranche était prévue. Une deuxième tranche a été ajoutée par la loi de finances pour 2011 ([161]), puis une troisième par la troisième loi de finances rectificative pour 2012 ([162]). Les six tranches actuelles ont été introduites par la loi de finances pour 2014 ([163]).

Sont effectivement assujettis à cette cotisation minimum les redevables dont la base nette de leur principal établissement est inférieure à la base minimum applicable à la tranche de chiffre d’affaires. Cela inclut notamment :

– les redevables dont l’activité professionnelle est domiciliée à leur lieu d’habitation, y compris s’ils exercent leur activité hors de ce dernier et ne disposent pas chez eux de locaux dédiés à cette activité ;

– ceux dont la base nette est nulle, tels que les loueurs de fonds de commerce.

La cotisation minimum correspond au produit de cette base minimum par le taux de CFE applicable dans la commune ou l’EPCI.

Illustration de la liquidation de la cotisation minimum de CFE

Un redevable réalise un chiffre d’affaires de 20 000 euros.

La commune a retenu un montant de base minimum de 1 000 (dans une fourchette entre 216 et 1 027). Le taux de CFE est de 30 %.

La cotisation minimum s’élèvera donc à 1 000 × 30 %, soit 300 euros.

C.   Les taxes additionnelles à la CFE

Les redevables de la CFE sont assujettis à deux taxes consulaires additionnelles perçues au profit des chambres de commerce et d’industrie (CCI) et des chambres de métiers et de l’artisanat (CMA).

● D’une part, l’article 1600 du CGI prévoit une taxe additionnelle à la CFE pour frais de CCI ([164]). Elle est due proportionnellement à la base d’imposition des contribuables – y compris donc la base minimum, lorsqu’elle s’applique. Le taux est fixé par les CCI.

Par dérogation, et en application de l’article 1600 A du CGI, la taxe additionnelle due par les micro-entrepreneurs est assise sur le chiffre d’affaires, selon un taux variable en fonction de l’activité ([165]).

● D’autre part, l’article 1601 du CGI prévoit une taxe pour frais de CMA due par les entreprises soumises à l’obligation de s’inscrire au répertoire des métiers ou qui y demeurent immatriculées. Cette taxe est composée d’un droit fixe et de deux droits additionnels, dont un additionnel à la CFE qui ne peut excéder 60 % du droit fixe ([166]).

À l’image de ce qui existe pour la taxe additionnelle allouée aux CCI, celle perçue au profit des CMA prévoit une dérogation pour les micro-entrepreneurs. L’article 1601‑0 A du CGI, auquel est prévue cette dérogation, fixe également le taux applicable, variable selon la nature de l’activité ([167]).

II.   Le contexte économique et budgétaire

A.   2,7 millions de redevables sont assujettis à la cotisation minimum de CFE

Un peu plus de 4 millions de contribuables sont assujettis à la CFE, parmi lesquels 2,7 millions relèvent de la cotisation minimum. Cela signifie que les deux tiers des redevables de la CFE disposent de locaux dont la valeur locative est inférieure aux bases minimum, voire ne disposent d’aucun local professionnel dédié.

Tel est notamment le cas des travailleurs qui domicilient leur activité professionnelle à leur lieu d’habitation à des fins administratives, mais qui réalisent leur activité à l’extérieur – ou qui n’utilise pas de local particulier, réalisant leur activité depuis chez eux, par exemple en utilisant leur ordinateur.

B.   Près d’un million de redevables réalisent un chiffre d’affaires n’excédant pas 5 000 euros et supportent une cfe disproportionnée

Parmi les 2,7 millions de redevables assujettis à la cotisation minimum de CFE, près d’un million réalisent un chiffre d’affaires annuel qui n’excède pas 5 000 euros.

Du fait de la détermination forfaitaire de la base minimum servant au calcul de la CFE due, ces redevables se trouvent face à une charge fiscale au titre de la CFE qui peut se révéler disproportionnée par rapport aux revenus perçus, ainsi que l’illustre l’exemple suivant.

Quatre redevables A, B, C et D réalisent respectivement un chiffre d’affaires de 300, 1 000, 2 500 et 4 500 euros au titre d’une activité de vente. Ils optent pour le régime « micro‑BIC » (bénéfices industriels et commerciaux), prévoyant un abattement de 71 % sur le chiffre d’affaires pour déterminer le revenu imposable à l’impôt sur le revenu (IR) ([168]).

La commune dans laquelle ils exercent retient comme base minimum un montant de 500 euros (dans la fourchette comprise entre 216 et 514 euros). Le taux de CFE correspond au taux moyen national, soit 26 %. La cotisation minimum s’élève donc à 130 euros.

comparaison du montant de cfe due et du revenu impoSable pour des redevables relevant du « micro‑BIC » au titre de prestations

(en euros)

Redevable

Chiffre d’affaires

Cotisation minimum de CFE

Revenu imposable à l’IR

Rapport CFE / revenu imposable

A

500

130

145

90 %

B

1 000

130

290

45 %

C

2 500

130

725

18 %

D

4 500

130

1 305

10 %

Source : commission des finances

Par comparaison, un redevable dont le chiffre d’affaires serait de 80 000 euros et qui relèverait du même régime micro-fiscal aurait un revenu imposable de 23 200 euros. À supposer que la commune retienne le montant de base minimum le plus élevé autorisé dans la tranche de chiffre d’affaires pertinente, soit 2 157 euros, la cotisation minimum de CFE due par ce redevable serait de 561 euros (2 157 × 26 %). Cette cotisation correspondrait donc à 2,4 % du revenu imposable, contre 10 % à 90 % pour les redevables à faible chiffre d’affaires.

La disproportion ainsi constatée explique, au moins en partie, l’importance des défauts de paiement de cotisation minimum de CFE. D’après l’évaluation préalable, si 16 % des redevables de la cotisation minimum connaissent une défaillance de paiement, le taux monte à 38 % parmi les micro‑entrepreneurs ([169]).

C.   Le programme gouvernemental en faveur des indépendants

Afin de soutenir les personnes de plus en plus nombreuses qui prennent le risque de lancer leur activité et d’entreprendre, le Gouvernement a mis en place un programme à destination des travailleurs indépendants, destiné à simplifier leurs démarches et à alléger leurs charges.

Sont notamment prévus :

– une « année blanche » de cotisations sociales pour les créateurs ou repreneurs d’entreprises, à compter du 1er janvier 2019 (article 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018) ;

– un allégement des démarches sociales des petits déclarants par l’extension de l’utilisation du chèque emploi service universel (CESU) (article 10 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018) ;

– la suppression du régime social des indépendants et l’adossement des travailleurs indépendants au régime général (article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018) ;

– le rehaussement des plafonds de chiffre d’affaires rendant éligible aux régimes micro-fiscaux (article 10 du présent projet de loi de finances) ;

– l’exonération de cotisation minimum de CFE et des taxes consulaires additionnelles pour les redevables dont le chiffre d’affaires n’excède pas 5 000 euros, mesure proposée par le présent article.

III.   Le dispositif proposé

Le présent article prévoit d’exonérer de cotisation minimum de CFE les redevables dont le chiffre d’affaires n’excède pas 5 000 euros. Sont également prévues, en conséquence, les exonérations des taxes consulaires additionnelles.

A.   L’exonération de cotisation minimum de CFE lorsque le chiffre d’affaires n’excède pas 5 000 euros

Le cœur du dispositif proposé réside au  du I du présent article, qui modifie l’article 1647 A du CGI relatif à la cotisation minimum de CFE.

Ce 4° du I introduit après le deuxième alinéa de l’article 1647 A, constitué d’un tableau figurant le barème de base minimum, un nouvel alinéa prévoyant que les redevables dont le chiffre d’affaires ou les recettes n’excèdent pas 5 000 euros sont exonérés de cotisation minimum de CFE.

Ce nouvel alinéa subordonne le bénéfice de cette nouvelle exonération au respect du règlement européen relatif aux aides de minimis ([170]), afin de garantir que le dispositif ne sera pas qualifié d’aide d’État illégale incompatible avec le marché intérieur.

B.   L’exonération des taxes consulaires additionnelles

Les  et  du I du présent article, par coordination, prévoient d’exonérer des taxes consulaires additionnelles les redevables bénéficiant de l’exonération de cotisation minimum de CFE.

● Le  complète le I de l’article 1600 du CGI, relatif à la taxe pour frais de CCI, en y rétablissant un 12° exonérant de cette taxe les redevables précédemment mentionnés. L’exonération porte sur l’ensemble de la taxe, dans ses deux composantes (taxe additionnelle à la CFE et taxe additionnelle à la CVAE – cette dernière n’étant en tout état de cause pas due dans la mesure où elle est assise sur une fraction de la CVAE due, qui n’est effectivement due qu’à partir d’un chiffre d’affaires de 500 000 euros).

● Le  complète le sixième alinéa de l’article 1601 du CGI ([171]), relatif à la taxe pour frais de CMA, afin d’ajouter après la mention des redevables de cette taxe et des personnes dégrevées d’office, que les redevables exonérés de la cotisation minimum de CFE sont également exonérés des droits composant cette taxe.

● Enfin, le  modifie l’article 1601‑0 A du CGI, relatif aux modalités de calcul de la taxe pour frais de CMA due par les micro-entrepreneurs.

Il s’agit en quelque sorte d’une coordination de coordination, rendue nécessaire par la terminologie employée aux articles 1601 et 1601‑0 A. En effet, la nouvelle rédaction proposée de l’article 1601 prévoit d’exonérer les redevables non pas de la taxe en tant que telle, mais des droits la composant (cela revenant en pratique au même). Or, l’article 1601‑0 A, relatif aux micro‑entrepreneurs, porte sur le calcul non des droits, mais de la taxe elle-même qui, pour ces micro‑entrepreneurs, n’est pas constituée de droits mais assise sur le chiffre d’affaires. En conséquence, une simple exonération des droits n’aurait pas eu pour effet d’exonérer automatiquement les micro‑entrepreneurs, puisqu’ils ne versent pas ces droits mais directement la taxe, calculée selon des modalités particulières. C’est pourquoi le présent article prévoit une modification expresse de l’article 1601‑0 A.

En revanche, aucune modification n’est apportée à l’article 1600 A du CGI, relatif aux modalités de calcul de la taxe pour frais de CCI, cela n’étant pas utile : l’exonération introduite à l’article 1600 par le 1° du présent article porte bien sur l’ensemble de la taxe consulaire, que vise l’article 1600 A.

C.   La compensation du bloc communal par un prélèvement sur recettes

L’exonération de cotisation minimum de CFE conduira à une perte de recettes pour les collectivités territoriales affectataires du produit de cet impôt, à savoir les communes et les EPCI. Afin de ne pas pénaliser ces collectivités, le II du présent article prévoit un mécanisme de compensation à travers un prélèvement sur recettes de l’État.

Ce prélèvement sur recettes correspondra, pour chaque commune ou EPCI, aux bases minimum perdues en vertu de l’exonération multipliées par le taux de CFE appliqué en 2018 dans la commune ou l’EPCI.

Le II précise que, pour les communes membres d’un EPCI sans fiscalité propre (syndicat), le taux retenu pour la détermination de la compensation est celui applicable dans la commune en 2018 majoré du taux appliqué au profit de l’EPCI (un syndicat ne pouvant, par définition, voter de taux, ce dernier est calculé par l’administration sur la base du produit voté par le syndicat, et s’ajoute au taux voté par la commune).

Enfin, pour les EPCI décidant de faire application, à compter de 2019, des règles applicables aux EPCI à fiscalité additionnelle ([172]), le taux retenu pour le calcul de la compensation est le taux moyen pondéré des communes membres constaté en 2018, majoré du taux appliqué au profit de l’EPCI (qui, dans cette hypothèse, est voté par ce dernier).

D.   Une entrée en vigueur du dispositif à compter de 2019

L’exonération de CFE et les mesures entraînées par elle et présentées supra, à savoir les exonérations de taxes consulaires et la compensation pour les collectivités territoriales, n’entreront pas en vigueur dès 2018, mais à compter de 2019.

Le Gouvernement estime en effet qu’une entrée en vigueur immédiate serait risquée. Un décalage d’un an devrait permettre de garantir la fiabilité du processus de récupération automatique des chiffres d’affaires, qui n’a été mis en place qu’en 2017. Le délai supplémentaire octroyé consolidera le processus.

IV.   L’impact économique et budgétaire

Les exonérations prévues au présent article présentent un coût relativement modeste au regard du nombre de redevables concernés – environ un million.

A.   Une perte de recettes pérenne de 85 millions d’euros par an, dont 57 millions d’euros pour l’État

D’après l’évaluation préalable, le présent article entraînera, à compter de 2019, un coût total de 85 millions d’euros, dont 57 millions d’euros pour l’État et 28 millions pour les réseaux des CCI et des CMA. Le tableau suivant illustre l’impact budgétaire du dispositif.

impact des exonérations de cotisation minimum de cfe
et de taxes consulaires

(en millions d’euros)

Bénéficiaire

2018

2019

2020

2021

2022

État

0

– 57

– 57

– 57

– 57

Collectivités territoriales

0

0

0

0

0

CCI

0

– 4

– 4

– 4

– 4

CMA

0

– 24

– 24

– 24

– 24

Total

0

 85

 85

 85

 85

Source : évaluation préalable.

L’impact est neutre pour les collectivités territoriales (en l’occurrence, le bloc communal, affectataire de la CFE) dans la mesure où est prévue la mise en place d’un prélèvement sur recettes de l’État pour compenser la perte de recettes induites par l’exonération.

D’après l’évaluation préalable, le produit reversé aux collectivités territoriales (134 millions d’euros) et aux chambres consulaires (24 millions d’euros) s’élève à 162 millions d’euros. Sur ce montant, l’État supporte un coût de 77 millions d’euros au titre des impôts non perçus, mais dont le produit est néanmoins reversé aux collectivités et aux chambres.

Les exonérations prévues portent donc sur la différence entre le produit reversé et le montant déjà supporté par l’État, soit 85 millions d’euros, répartis comme suit :

– 57 millions d’euros au titre de la cotisation minimum de CFE, que l’État compensera à travers un prélèvement sur recettes ;

– 28 millions d’euros au titre des taxes consulaires additionnelles.

Ce calcul ne semble pas tenir compte des 6 millions d’euros perçus par l’État au titre des frais de gestion. Or, les exonérations proposées priveront l’État de cette recette. En conséquence, le coût total paraît devoir être majoré de 6 millions d’euros, s’établissant à 91 millions d’euros dont 63 millions d’euros supportés par l’État. L’administration fiscale, interrogée sur ce point par le Rapporteur général, n’a fourni aucune réponse. En tout état de cause, ce coût, qui n’est naturellement pas négligeable, doit impérativement être rapporté au nombre de redevables concernées, qui s’établit à près d’un million.

B.   Un allégement substantiel de la charge fiscalE pour près d’un million de redevables

Ainsi qu’il a été vu, près d’un million de redevables de la cotisation minimum de CFE réalisent un chiffre d’affaires inférieur à 5 000 euros.

Le dispositif proposé par le présent article offrira donc un gain moyen de 85 euros à chacun d’eux ([173]), s’inscrivant donc non seulement dans le train de mesures destinées à alléger la charge des entreprises et des travailleurs indépendants, mais également dans la lignée des mesures en faveur du pouvoir d’achat des ménages.

D’une manière générale, cet article met un terme à une imposition qui, du fait de sa détermination assise sur une base forfaitaire arrêtée par l’organe délibérant compétent, pouvait conduire, ainsi qu’il a été vu, à une charge fiscale disproportionnée au regard des recettes encaissées par les redevables.

C.   Un allégement des charges administratives de l’État

Au-delà des incidences budgétaires et des avantages offerts aux redevables concernés, le présent article va alléger la charge supportée par l’État au titre du recouvrement des impositions dont l’exonération est proposée.

Compte tenu de l’important volume des défauts de paiement – estimés à 38 % parmi les micro‑entrepreneurs –, les opérations de recouvrement de la cotisation minimum de CFE et des taxes consulaires additionnelles supposent de la part des services fiscaux de l’État un lourd travail de traitement des demandes gracieuses, de relance et de recouvrement forcé. Rapporté au montant moyen des créances en jeu, évalué à 211 euros, ces opérations paraissent hors de proportion des enjeux financiers.

Dès lors les exonérations prévues, qui dispensent de fait les services de l’État des opérations mentionnées pour les redevables concernées, allégeront de façon importante la charge pesant sur l’administration.

Ces allégements permettront notamment une réallocation des ressources humaines, matérielles et temporelles ainsi libérées sur d’autres opérations et d’autres missions, participant au renforcement de l’efficacité de l’administration fiscale française.

*

*     *

La commission examine les amendements identiques, II-CF298 de Mme Véronique Louwagie, II-CF356 de M. Éric Alauzet, II-CF612 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF614 de M. Olivier Dussopt.

Mme Véronique Louwagie. L’article 45 prévoit des exonérations de cotisation foncière des entreprises (CFE) dans certaines situations. Cet amendement vise à transformer l’exonération en dégrèvement, afin de protéger les ressources des collectivités locales. Il ne s’agit pas de remettre en cause les allégements de CFE prévus pour les entreprises redevables dont le chiffre d’affaires est inférieur ou égal à 5 000 euros ; mais l’exonération fiscale amoindrit l’autonomie fiscale des collectivités territoriales, à l’inverse du dégrèvement. De plus, dans l’hypothèse d’une exonération fiscale, le prélèvement sur recettes de l’État qui serait institué pour pouvoir compenser le manque à gagner des collectivités territoriales pèsera dans l’enveloppe globale des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales, dont l’évolution est limitée.

M. Éric Alauzet. C’est le même débat – exonération ou dégrèvement – que nous avons eu sur la taxe d’habitation.

Mme Christine Pires Beaune. Nous connaissons tous maintenant la différence entre exonération et dégrèvement. Le second est plus favorable aux collectivités territoriales.

M. Jean-Louis Bricout. Le Gouvernement ne doit pas faire payer par les collectivités une politique publique sectorielle visant à soutenir les travailleurs indépendants.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable. Nous avons déjà bien progressé en faisant sortir de l’enveloppe normée le Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) et la TVA « régions ».

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’article 45 sans modification.

*

*     *

Après l’article 45

La commission examine d’abord l’amendement II-CF689 de M. Arnaud Viala.

M. Thibault Bazin. Cet amendement vise à diminuer les droits d’enregistrement et la taxe foncière acquittés lors des apports à un groupement foncier agricole. Il s’agit de faciliter les transmissions familiales, dont le coût, même modique, peut constituer un frein en cette période particulièrement difficile pour nos agriculteurs.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Puis elle se saisit, en discussion commune, des amendements II-CF303 de Mme Véronique Louwagie et II-CF542 de M. Fabien Roussel.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement propose de fusionner la taxe sur les logements vacants et la majoration de taxe d’habitation sur les résidences secondaires, afin de préserver les mécanismes destinés à inciter à l’occupation des logements, d’améliorer la lisibilité et d’éviter les effets d’aubaine.

M. Jean-Paul Dufrègne. La crise du logement en France est une crise des zones tendues, où la pénurie augmente et où les prix rendent le quotidien de millions de Français de plus en plus difficile. Paradoxalement, dans ces mêmes zones tendues, le nombre de logements vacants et de résidences secondaires, dont des locations meublées de courte durée, ne cesse d’augmenter. Dans la seule agglomération parisienne, plus de 300 000 logements sont soit des résidences secondaires occupées pour la plupart moins d’une semaine par an, soit tout simplement vacants.

Il est indispensable de mieux mobiliser cette offre vide ou très peu occupée, afin de libérer des centaines de milliers de logements.

Afin de doter les communes d’un levier fiscal simple et efficace, notre amendement propose la fusion de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires applicable aux zones tendues et de la taxe d’habitation sur les logements vacants, sous le nom de « taxe pour la mobilisation des logements sous-occupés en zones tendues ».

M. le Rapporteur général. C’est un problème qui se posera si la taxe d’habitation est complètement supprimée en 2020. Pour aujourd’hui, avis défavorable. J’appelle de plus votre attention, monsieur Dufrègne, sur le fait que votre amendement abroge les deux taxes immédiatement, tout en renvoyant le dispositif de substitution à 2019.

La commission rejette successivement les deux amendements.

Elle examine alors l’amendement II-CF87 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Le CGI prévoit que les bateaux utilisés en un point fixe et aménagés pour l’habitation, le commerce ou l’industrie sont imposables à la taxe foncière sur les propriétés bâties, même s’ils sont seulement retenus par des amarres.

Or, les propriétaires des bateaux-logements sont surimposés. En effet, outre la taxe foncière, la taxe d’habitation et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), ils doivent acquitter une redevance annuelle en contrepartie de l’occupation privative du domaine public fluvial.

Il est donc proposé un abattement de 75 % de la taxe foncière en raison des charges et des contraintes qui pèsent sur eux.

J’appelle enfin votre attention sur le mauvais état de nos canaux.

M. le Rapporteur général. Sur ce dernier point, je ne peux que vous approuver. Toutefois, votre amendement prive les collectivités territoriales de recettes alors que les occupants de ces bateaux bénéficient de services publics locaux.

M. Thibault Bazin. Ils paient la taxe d’habitation, la TEOM… Ils subissent une double peine. De plus, il y a de moins en moins péniches habitées.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle se saisit de l’amendement II-CF194 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement tend à exonérer de taxe foncière sur les propriétés bâties les parties d’une installation hydroélectrique destinées à la préservation de la biodiversité et de la continuité écologique. Cette taxe met en péril la rentabilité même de ces installations. Cette exonération est d’ailleurs dans la droite ligne de la réduction fiscale prévue pour les installations destinées à la lutte contre la pollution des eaux et de l’atmosphère.

M. le Rapporteur général. Vous proposez une exonération obligatoire et non compensée aux collectivités territoriales – si toutefois le gage était levé, ce dont je doute fort, cela représenterait un coût de 3,6 millions d’euros, concentrés sur quelques collectivités seulement. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF56 de Mme Lise Magnier.

Mme Lise Magnier. Cet amendement tend à exonérer de plein droit de la taxe foncière sur les propriétés bâties les bâtiments affectés à l’activité de déshydratation de fourrages, à compter des taxes dues au titre de 2018, afin de ne plus subordonner cette exonération à la délibération des collectivités territoriales concernées, dans un souci d’équité et de justice.

M. le Rapporteur général. Il s’agit encore d’une exonération obligatoire non compensée. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle se saisit de l’amendement II-CF193 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement propose d’étendre, si les collectivités le souhaitent, les exonérations de taxe foncière et de cotisation foncière des entreprises à toutes les installations et sociétés de méthanisation.

M. le Rapporteur général. Le coût serait très important. Avis défavorable.

M. Michel Castellani. Je suis favorable à cet amendement, qui va dans le sens du développement durable, de l’emploi et de la réduction de la dépendance énergétique, donc d’une amélioration du solde de notre commerce extérieur.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine alors l’amendement II-CF86 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Alors que la politique énergétique française vise au développement des énergies renouvelables, la première d’entre elles, l’hydroélectricité, est dans une situation particulièrement difficile. Elle joue pourtant un rôle majeur quand le soleil et le vent sont aux abonnés absents – comme en ce moment.

De nombreux producteurs ne bénéficient pas ou plus de l’obligation d’achat de l’électricité produite, ni de complément de rémunération, et vendent donc leur électricité sur le marché. Or, dans la situation actuelle, le prix de marché de l’électricité, conjugué à l’importance des charges fiscales, ne permet plus de couvrir les coûts de nombreuses installations.

Dès lors, non seulement le développement de nouvelles installations est entravé, mais le maintien de l’activité de certaines centrales existantes se pose. C’est le cas dans ma circonscription.

Pour offrir la possibilité aux collectivités locales de contribuer au maintien et au développement d’une activité nécessaire pour atteindre nos objectifs en matière de développement durable et de lutte contre le changement climatique, mais aussi structurante pour les territoires ruraux ou de montagne qui l’accueillent, je vous propose de permettre aux départements, aux communes et aux EPCI à fiscalité propre d’exonérer temporairement, pour la part de taxe foncière sur les propriétés bâties qui leur revient, les installations et bâtiments affectés à la production d’hydroélectricité.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF236 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Il s’agit d’un feuilleton à épisodes : cet amendement porte une fois encore sur la taxe d’habitation payée par les retraités accueillis en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Ici, il s’agit des EHPAD à but lucratif, le mécanisme prévu étant un dégrèvement de CFE.

M. le Rapporteur général. Il ne me paraît pas raisonnable d’utiliser la CFE pour compenser un écart de montant entre deux autres impositions de nature totalement différente. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

*

*     *

Article additionnel après l’article 45
Rapport du Gouvernement au Parlement sur les immobilisations industrielles et exclusion des valeurs locatives des biens des entreprises artisanales

La commission examine en discussion commune les amendements identiques II-CF292 de Mme Lise Magnier, IICF325 de M. Patrick Hetzel et IICF400 de M. Daniel Labaronne, les amendements IICF93 de Mme Véronique Louwagie, II-CF522 de M. Jean-Paul Mattei, II-CF80 de M. Gilles Lurton, IICF524 de M. Jean-Paul Mattei, II-CF599 de Mme Valérie Rabault, les amendements identiques II-CF294 de Mme Lise Magnier, II-CF317 de Mme Véronique Louwagie et II-CF327 de M. Patrick Hetzel, et enfin les amendements II-CF631 de Mme Amélie de Montchalin, IICF692 du Rapporteur général et II-CF600 de Mme Valérie Rabault.

Mme Lise Magnier. Faute de définition légale de la notion d’immobilisation industrielle, l’administration fiscale l’interprète de façon extensive et aléatoire. Elle multiplie les requalifications en immobilisation industrielle d’entrepôts ou de bâtiments de stockage de produits agricoles ou manufacturés, au seul motif qu’y sont utilisés chariots élévateurs, monte-charges et autres outils destinés à faciliter le travail des salariés et à en limiter la pénibilité, et alors même qu’aucune transformation n’est apportée aux marchandises.

Toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, subissent cette incertitude. Cet amendement propose une clarification nécessaire.

M. Thibault Bazin. Lors des discussions budgétaires de la fin d’année dernière, l’attention du Parlement et du Gouvernement avait été appelée sur les difficultés résultant de l’imprécision de l’article 1499 du CGI qui définit le régime applicable aux immobilisations industrielles en matière de taxes foncières.

Nous souhaitons lever une incertitude qui pèse lourdement sur l’attractivité du site France.

M. Daniel Labaronne. Une clarification semble en effet indispensable, afin d’encadrer l’action des corps de contrôle. L’article 1499 du CGI doit être précisé.

M. le Rapporteur général. La qualification d’un établissement en immobilisation industrielle se fait au cas par cas et résulte d’une définition issue d’une décision du Conseil d’État de 2005. Nombre d’entre nous ont été prévenus des difficultés rencontrées par des entreprises qui estiment que les services fiscaux ont procédé à des requalifications injustifiées : c’est une situation que l’on trouve partout.

L’an dernier déjà, nous avions tenté de résoudre le problème en présentant des amendements. Je me souviens que le député-maire du Havre de l’époque était intervenu : dans les zones portuaires, les amendements revenaient à exonérer de fait l’intégralité des hangars industriels, ce qui provoquait entre autres un effondrement du produit des impôts locaux.

J’ai demandé à la direction générale des finances publiques (DGFiP) de me donner rapidement une vue globale des pratiques des directions régionales des finances publiques (DRFiP), en liaison avec le cabinet du ministre de l’action et des comptes publics. À ce jour, je n’ai pas reçu de document exploitable.

Mon amendement II-CF692 demande qu’un rapport complet nous soit remis sur ce sujet, avant le 1er juillet 2018, afin de clarifier le débat. La DGFiP aura ainsi un calendrier clair. Le sujet n’est pas simple, puisqu’il faut agréger des données de différentes sources.

Je vous propose également, par ce même amendement, de résoudre un problème soulevé par plusieurs d’entre vous : conformément à la loi de 1996 sur l’artisanat, mon amendement vise à exclure des immobilisations industrielles, à partir du 1er janvier 2019, tous les locaux artisanaux. La date de 2019 nous permettra de repenser globalement le dispositif, à partir du rapport qui nous sera rendu : pour le moment, nous n’avons aucune vue d’ensemble.

Sur ce sujet parfaitement transpartisan, tous ceux qui le souhaitent pourront cosigner cet amendement en vue de la séance publique. Le principe en est déjà validé par le Gouvernement.

Mme Émilie Cariou. Il me paraît essentiel de demander un rapport. Il faudra récupérer les données du contrôle fiscal : ces requalifications ont souvent suivi des contrôles fiscaux.

M. le Rapporteur général. Je précise que la DGFiP n’est pas seule concernée : le travail devra être mené en commun avec la direction générale des collectivités locales (DGCL). C’est un sujet vraiment complexe, qui entraîne des mouvements fiscaux très importants. Nous devons nous montrer extrêmement prudents.

M. Daniel Labaronne. Ne serait-il pas possible d’envisager un moratoire ? Cette situation d’incertitude fiscale dure depuis longtemps, et elle a de lourdes conséquences pour les comptes d’exploitation ; un grand nombre d’entreprises risquent de connaître des difficultés graves.

M. Gilles Lurton. J’adhère entièrement aux propos qui viennent d’être tenus. Au 1er juillet prochain déjà, beaucoup d’entreprises auront subi des redressements très pénalisants.

M. le Rapporteur général. Les amendements qui demandent un moratoire portent atteinte au principe de séparation des pouvoirs : une injonction au pouvoir exécutif et une immixtion dans le cours de procédures juridictionnelles seraient immanquablement censurées par le Conseil constitutionnel.

C’est pourquoi nous devons avoir cette discussion avec le ministre en séance publique, afin qu’il calme le jeu en attendant que le rapport soit remis. Lui seul a l’autorité pour agir.

M. le président Éric Woerth. C’est là, je crois, la solution : le ministre doit fixer la doctrine en séance, en attendant qu’elle le soit plus fermement.

Mes chers collègues, y a-t-il un consensus autour de l’amendement du Rapporteur général, qui pourra être cosigné par ceux qui le souhaitent ?

M. Jean-Paul Mattei. J’accepte cette proposition. Mais il revient tout de même au législateur de fixer le sens dans lequel il veut aller. Ce n’est pas un rapport qui nous dira ce qu’il faut faire.

Mme Véronique Louwagie. En effet, nous constatons tous des difficultés qui s’apparentent même à une épée de Damoclès pour certaines entreprises, qui peuvent subir une augmentation allant jusqu’à 300 %. Il faut donc que le ministre s’engage pour ne pas laisser les entreprises dans cette incertitude. Il appartient au législateur de leur donner de la sécurité juridique, nonobstant les difficultés liées au moratoire et à la séparation des pouvoirs. La sécurité juridique dépend de nous.

M. le président Éric Woerth. Le ministre pourrait par exemple s’engager à proposer une rédaction plus précise lors du projet de loi de finances rectificative de fin d’année.

M. le Rapporteur général. Pour répondre aux questions qui m’ont été posées sur ce point, je rappelle l’objet du rapport tel qu’il est précisé dans le texte de l’amendement : « Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er juillet 2018, un rapport présentant, au niveau national, par département et par établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, les modalités d’évaluation des immobilisations industrielles et, pour les trois dernières années, les requalifications réalisées ainsi que les réclamations administratives et les demandes contentieuses dirigées contre ces requalifications et les montants sur lesquels elles portent. Ce rapport précise en outre les conséquences des requalifications en immobilisation industrielle de certains locaux, notamment les entrepôts de stockage et de services logistiques et les locaux artisanaux, ainsi que les effets qu’aurait un dispositif excluant ces locaux d’une telle qualification sur les recettes des collectivités territoriales. Ce rapporte présente enfin des propositions de sécurisation de la qualification d’immobilisation industrielle. »

M. le président Éric Woerth. Cette solution devrait convenir à tous, étant entendu que nous demanderons des précisions en séance publique.

M. Daniel Labaronne. L’essentiel est de définir l’immobilisation industrielle. Ce rapport débouchera-t-il sur cette définition très précise ?

M. le Rapporteur général. Je relis la dernière phrase : « Ce rapport présente enfin des propositions de sécurisation de la qualification d’immobilisation industrielle. » Il s’agit bien de sécurisation juridique !

M. Jean-Paul Mattei. Nous souhaitons fixer nous-mêmes l’axe d’action ; ce n’est pas au rapport d’imposer quoi faire au législateur.

M. le Rapporteur général. C’est pourquoi je demande que le rapport présente des propositions de sécurisation de la qualification ; il nous appartiendra ensuite de délibérer à partir des éléments qui nous auront été donnés.

M. le président Éric Woerth. En réalité, nous ne parviendrons pas à écrire cette qualification : c’est le genre de question qui ne peut se résoudre par la voie d’un amendement parlementaire. C’est au ministre et à l’administration de s’en saisir. La méthode proposée est donc assez pragmatique : le Parlement appelle l’attention du Gouvernement sur un manque et demande au ministre de faire le point sur une situation totalement inégalitaire et même dramatique pour certaines entreprises, et de préciser, au niveau national, ce qu’est et ce que n’est pas un établissement industriel.

M. Jean-Louis Bricout. J’approuve pleinement cette proposition de rapport, qui nous conduira à retirer les amendements II-CF599 et II-CF600. En revanche, il faut tenir compte tout à la fois de la qualification du bien et des conséquences qu’elle peut entraîner sur les recettes des collectivités territoriales ; d’où l’importance de l’étude d’impact.

Les amendements II-CF292, II-CF325, II-CF400, II-CF93, II-CF522, IICF80, IICF524, II-CF599, II-CF294, II-CF317, II-CF327, II-CF631 et IICF600 sont retirés.

La commission adopte l’amendement II-CF692 (amendement n° II-1504).

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Après l’article 45

Puis elle examine les amendements identiques II-CF293 de Mme Lise Magnier, IICF315 de Mme Véronique Louwagie et II-CF326 de M. Patrick Hetzel.

Mme Lise Magnier. En attendant de disposer de ce rapport et d’une définition beaucoup plus précise qui sécurise les entreprises, il faut aussi empêcher la rétroactivité des requalifications. Il ne serait pas acceptable, en effet, qu’un redevable de bonne foi subisse les conséquences d’une erreur liée au flou juridique. L’amendement II-CF293 vise donc à faire progresser la matérialisation du droit à l’erreur et à tirer les conséquences de la bonne foi du redevable en prévoyant que la requalification ne peut avoir aucun effet rétroactif dans le flou juridique actuel.

M. le Rapporteur général. La non-rétroactivité d’un contrôle fiscal pose quelques problèmes. Je m’engage donc à interroger le ministre lors de la présentation de mon amendement sur l’opportunité de « lever le pied » concernant certains contrôles fiscaux, mais la non-rétroactivité, a fortiori réservée à certains contrôles seulement, présenterait un réel risque constitutionnel ; je ne saurais donc la demander. Avis défavorable.

Les amendements II-CF315 et II-CF326 sont retirés.

La commission rejette l’amendement IICF293.

Puis elle examine l’amendement II-CF195 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement vise à soutenir les stations de transfert d’énergie par pompage en leur accordant une exonération d’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), car elle contribue parfois à leur déséquilibre économique. Or, il est indispensable de soutenir ces stations qui, en stockant l’électricité, permettent d’améliorer tous les dispositifs relatifs aux énergies renouvelables, notamment intermittentes.

M. le Rapporteur général. Vous privez les collectivités locales de nombreuses recettes, en particulier les collectivités de montagne. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle est saisie des amendements identiques II-CF299 de Mme Véronique Louwagie et II-CF615 de M. Olivier Dussopt.

M. Jean-Louis Bricout. L’amendement II-CF615 vise à adapter la TEOM aux évolutions des pratiques en matière de gestion des déchets, qui posent des problèmes de sécurité juridique aux collectivités et qui suscitent des contentieux. L’objectif est de moderniser la rédaction des dispositions du code général des impôts en englobant les dépenses de gestion des déchets plutôt que les seules dépenses du service de collecte et de traitement. Grâce à cette rédaction actualisée, les collectivités pourraient faire figurer dans l’annexe TEOM la totalité des charges pesant sur leur budget au titre de la gestion des déchets. De plus, cet amendement ne créerait aucun effet d’aubaine.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement II-CF451 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Cet amendement reprend le rapport présenté en juillet 2017 par le président de l’exécutif de Corse et approuvé par l’Assemblée de Corse. Il apparaît nécessaire de réguler et maîtriser la circulation des 30 000 camping-cars qui fréquentent la Corse, notamment pendant les quatre mois d’été, dont chacun comprend qu’ils ont des répercussions importantes sur l’écosystème, sans parler de l’encombrement des routes. Nous proposons donc d’instaurer une écotaxe à caractère incitatif pour privilégier les stationnements aménagés au détriment des stationnements sauvages, qui sont trop fréquents. La collectivité territoriale de Corse remboursera le montant de la taxe sur présentation de justificatifs attestant du stationnement du véhicule dans des aires adaptées.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

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Article additionnel après l’article 45
Barème de la taxe de séjour applicable aux aires de stationnement
des camping-cars

Elle en vient à l’amendement II-CF276 de M. Yannick Haury.

M. Yannick Haury. Depuis le 1er janvier 2015, la taxe de séjour est perceptible dans une aire de camping-cars. La tarification pose problème au regard du plafond fixé dans le code général des collectivités territoriales, car la taxe de séjour est plus élevée dans les aires qu’en camping à une ou deux étoiles. Autrement dit, lorsqu’un camping-car stationne sur un terrain de camping où des prestations sont fournies, il paie moins que lorsqu’il stationne sur une aire de camping-cars. C’est pourquoi l’amendement II-CF276 vise à classer les emplacements situés dans les aires de camping-cars et les terrains de camping dans la même catégorie.

M. le Rapporteur général. Cette harmonisation me semble souhaitable ; avis favorable.

La commission adopte l’amendement (amendement n° II-1505).

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Après l’article 45

La commission examine l’amendement II-CF705 de M. Olivier Dussopt.

M. Jean-Louis Bricout. Cet amendement vise à offrir la possibilité aux collectivités ayant instauré́ la taxe de séjour de calculer cette taxe, pour les seuls meublés non classés, sur la base d’un pourcentage appliqué au prix de la nuit en lieu et place d’un tarif. Cette proposition vise à rétablir une certaine équité entre les niveaux d’imposition des secteurs classés et non classés. C’est le tarif le plus bas – 74 centimes au maximum – qui s’applique à tous les meublés non classés, tels que les locations réalisées via des plateformes de réservation du type Airbnb, alors que les biens loués sont parfois d’une catégorie bien supérieure. Afin de rétablir l’équité fiscale entre les hébergeurs classés et non classés, il est donc proposé d’offrir la possibilité aux collectivités qui le souhaitent d’appliquer à ces meublés non classés une taxation proportionnelle au prix de la chambre, dans la limite de 5 %, Ainsi la taxe de séjour acquittée serait bien, pour ces établissements non classés, proportionnelle à la qualité de l’hébergement.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable ; aucun plafond n’est prévu.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-CF704 de M. Olivier Dussopt.

M. Jean-Louis Bricout. La loi de finances pour 2015 s’est traduite par une réforme d’envergure de la taxe de séjour. Elle a ouvert la possibilité aux plateformes internet assurant un service de réservation ou de mise en relation en vue de la location d’hébergements de collecter la taxe de séjour sur habilitation des propriétaires. Afin d’accompagner le développement de la location touristique par le biais des plateformes internet et d’assurer la juste collecte de la taxe, l’amendement II-CF704 vise à rendre automatique, à partir du 1er juillet 2019, la collecte de la taxe de séjour par les plateformes qui font office d’intermédiaires de paiement.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

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Article additionnel après l’article 45
Harmonisation des taux de versement transport applicables
en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne
sur ceux applicables à Paris et dans les Hauts-de-Seine

La commission est saisie, en discussion commune, de l’amendement IICF539 de M. Fabien Roussel, des amendements identiques II-CF555 de Mme Amélie de Montchalin et II-CF693 du Rapporteur général, ainsi que des amendements identiques II-CF557 de Mme Amélie de Montchalin et II-CF695 du Rapporteur général.

Mme Amélie de Montchalin. L’amendement II-CF555 vise à poursuivre jusqu’en 2021 l’harmonisation progressive des taux du versement transport ; l’amendement II-CF557 ne proroge cette mesure qu’en 2018. Il serait plus efficace d’adopter le premier, qui s’appliquera pendant quatre ans ; cela nous éviterait d’avoir le même débat tous les ans.

Il s’agit de transcrire dans la loi un protocole ajouté au contrat de plan État-région afin d’assurer le bon financement des réseaux de RER par Île‑de‑France Mobilités, notamment, en harmonisant les taux du versement transport dans les départements du Val-de-Marne et de Seine-Saint-Denis avec ceux qui s’appliquent à Paris et dans les communes de la Petite Couronne.

Cette proposition conclue par l’État et la région en 2016 a été transcrite dans la loi l’an dernier, mais pas pour les autres années du contrat de plan. Par souci de sincérité budgétaire, nous proposons donc de veiller à ce que la parole donnée de l’État soit bien respectée.

M. le Rapporteur général. Comme l’amendement II-CF557, l’amendement II‑CF695 est un amendement de repli ; ma préférence va donc aux amendements II-CF555 et II-CF693, qui portent sur l’ensemble de la période, comme vient de l’expliquer Mme de Montchalin. Par ailleurs, j’émets un avis défavorable à l’amendement II-CF539.

La commission rejette l’amendement II-CF539.

Puis elle adopte les amendements identiques II-CF555 et II-CF693 (amendement n° II-1506).

En conséquence, les amendements identiques II-CF557 et II-CF695 tombent.

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Après l’article 45

La commission examine l’amendement II-CF465 de M. Marc Fesneau.

Mme Sarah El Haïry. Alors que la revalorisation des valeurs locatives pour les locaux professionnels produit ses effets sur les feuilles d’impôt reçues dès l’automne, nous souhaitons alerter sur le fait qu’elle pénalisera beaucoup plus les commerces de centre-ville et de centre-bourg que les grandes surfaces de plus de 400 mètres carrés. Pour que le bloc communal puisse prendre en compte l’impact local de cette actualisation, nous proposons donc la possibilité d’une part d’un abattement jusqu’à 15 % sur la taxe foncière portant sur les locaux commerciaux, d’autre part de moduler davantage le coefficient s’appliquant à la taxe sur les surfaces commerciales afin que les communes puissent équilibrer leurs ressources et piloter l’équilibre entre grandes surfaces commerciales et commerces de centre-ville. Autrement dit, l’objet de cet amendement consiste à permettre aux commerces de centre-ville et de centre-bourg de s’en sortir et ne pas subir un impact plus fort que les grandes surfaces. Il laisse la possibilité aux communes de s’adapter à la revalorisation des bases locatives en élargissant les possibilités de pilotage dont elles disposent via la taxe foncière et la taxe sur les surfaces commerciales.

M. le Rapporteur général. À titre personnel, je trouve cette idée très intéressante, mais cet amendement attribue aux communes deux facultés qui ne sont pas reliées juridiquement, ce qui est problématique. Je vous invite à le retravailler en vue de la séance publique afin de pouvoir au moins donner un avis de sagesse ; en l’état, avis défavorable.

Mme Sarah El Haïry. Sur cette déclaration, je retire l’amendement pour le remanier avant la séance publique.

L’amendement est retiré.

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Article 46
Modification du champ de l’obligation de certification des logiciels
de comptabilité et de gestion et des systèmes de caisse

Résumé du dispositif et effets principaux

La loi de finances pour 2016 a imposé aux assujettis à la TVA qui enregistrent les règlements de leurs clients au moyen d’un logiciel de comptabilité ou de gestion ou d’un système de caisse, de fournir à compter du 1er janvier 2018, en vue du contrôle de l’administration fiscale, un certificat ou une attestation permettant de prouver que le logiciel ou le système de caisse utilisé satisfait « à des conditions d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage des données ». Les contrevenants peuvent être sanctionnés par une amende fiscale de 7 500 euros par logiciel de comptabilité ou de gestion ou par système de caisse frauduleux.

L’obligation de certification concerne l’ensemble des assujettis à la TVA ainsi que tous les types de logiciels de gestion ou de comptabilité et tous les types de systèmes de caisse. Le présent article propose, d’une part, de limiter l’obligation aux seuls logiciels et systèmes de caisse pour lesquels il existe des risques de fraude à la TVA et, d’autre part, de ne pas soumettre à cette obligation les assujettis à la TVA pour lesquels il n’existe pas d’enjeux en matière de fraude à la TVA (personnes effectuant des livraisons de biens et des prestations de service donnant lieu à facturation ; personnes bénéficiant de la franchise en base TVA ou effectuant exclusivement des opérations exonérées de TVA).

Dernières modifications législatives intervenues

La loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière a créé au profit de l’administration un droit de communication spécifique auprès des éditeurs et concepteurs de logiciels de comptabilité ou de caisse. L’éditeur ou le concepteur d’un logiciel comprenant des fonctions frauduleuses ainsi que les personnes ayant sciemment distribué un tel logiciel ou paramétré les fonctions frauduleuses peuvent être sanctionnés par une amende fiscale égale à 15 % du chiffre d’affaires tiré de la commercialisation du logiciel.

La loi du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 précitée.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

Plusieurs amendements identiques ont été adoptés afin d’exonérer de l’obligation de certification les personnes soumises au remboursement forfaitaire agricole (RFA) à TVA. En effet, pour leurs opérations agricoles, les exploitants agricoles sont placés sous le régime du RFA prévu aux articles 298 quater et 298 quinquies du CGI. Ils sont dispensés dans ce cadre du paiement de la TVA et des obligations qui incombent aux assujettis.

I.   L’État du droit

Afin de lutter contre la dissimulation d’une partie de l’assiette de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) par l’utilisation de logiciels ou systèmes de caisse frauduleux, plusieurs dispositifs législatifs sont venus progressivement renforcer les obligations incombant non seulement aux éditeurs et aux distributeurs de tels logiciels ou systèmes, mais également aux utilisateurs assujettis à la TVA. L’utilisation de logiciels ou de systèmes de caisse frauduleux ou permissifs ([174]) permet à son utilisation d’effacer des recettes de la comptabilité de l’entreprise et de reconstituer fictivement une comptabilité de caisse, réduisant d’autant l’assiette de la TVA de manière frauduleuse.

A.   Les obligations applicables aux Éditeurs et aux distributeurs

La loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière ([175]) a mis en place, au titre II de la première partie du livre des procédures fiscales, un ensemble d’obligations applicables aux concepteurs et éditeurs de logiciels de comptabilité ou de gestion et des systèmes de caisse.

L’article L. 96 J du livre des procédures fiscales (LPF) institue un droit de communication spécifique qui permet à l’administration fiscale de demander aux « entreprises ou aux opérateurs qui conçoivent ou éditent des logiciels de comptabilité, de gestion ou des systèmes de caisse » ou qui « interviennent techniquement sur les fonctionnalités de ces produits » affectant, directement ou indirectement, la tenue informatique des écritures de caisse ou comptables ([176]), de leur présenter « tous codes, données, traitements ou documentation qui s’y rattachent ». Pour permettre à l’administration fiscale de disposer de ces informations dans la durée, l’article L. 102 D du LPF dispose que « les codes, données, traitements ainsi que la documentation doivent être conservés jusqu’à l’expiration de la troisième année suivant celle au cours de laquelle le logiciel ou le système de caisse a cessé d’être diffusé ».

En cas de manquement à ces deux obligations, l’article 1734 du CGI prévoit une amende fiscale égale à 1 500 euros « par logiciel ou système de caisse vendu ou par client pour lequel une prestation a été réalisée dans l’année ».

La loi a également institué, à l’encontre des concepteurs et éditeurs de logiciels et des systèmes de caisse frauduleux, une amende fiscale égale à 15 % du chiffre d’affaires provenant de la commercialisation des logiciels et des prestations réalisées pour développer les fonctionnalités frauduleuses. L’article 1770 undecies du CGI dispose que la sanction s’applique « lorsque les caractéristiques de ces logiciels ou systèmes ou l’intervention opérée ont permis, par une manœuvre destinée à égarer l’administration », d’omettre des écritures ou de faire passer des écritures inexactes ou fictives au livre-journal ([177]) de l’entreprise, « en modifiant, supprimant ou altérant de toute autre manière un enregistrement stocké ou conservé au moyen d’un dispositif électronique, sans préserver les données originales ». En outre, les personnes passibles de l’amende sont solidairement responsables du paiement des droits rappelés mis à la charge des utilisateurs d’un logiciel ou système de caisse frauduleux.

B.   Les obligations applicables aux personnes assujetties À la TVA en matière de sÉcurisation des logiciels et systÈmes de caisses

D’une manière générale, diverses obligations déclaratives et comptables mises à la charge des entreprises soumises à la TVA permettent à l’administration fiscale de contrôler le montant de TVA collectée par les entreprises auprès de leurs clients. L’article 286 du CGI, dans sa rédaction actuelle, liste l’ensemble des obligations qui s’imposent à toute personne assujettie à la TVA afin de faciliter le contrôle de leur activité par l’administration fiscale. Les assujettis à la TVA sont ainsi tenus :

– de déclarer le commencement ou la cessation de leur activité dans un délai maximal de quinze jours à compter de ces événements ;

– de fournir à l’administration fiscale tous renseignements relatifs à leur activité professionnelle ;

– de tenir une comptabilité permettant de déterminer leur chiffre d’affaires, ou à défaut, un livre sur lequel est inscrit chaque jour le montant de chacune des opérations, tout en conservant les pièces justificatives afférentes à chacune d’entre elles ;

– de fournir aux agents de l’administration fiscale toutes justifications nécessaires à la fixation du montant des opérations imposables à la TVA.

Il est toutefois prévu que l’obligation relative à la tenue d’une comptabilité ou d’un livre comptable ne s’applique pas aux personnes assujetties bénéficiant de la franchise en base TVA. Ces derniers doivent toutefois tenir un registre annuel, présentant le détail de leurs achats, ainsi qu’un livre-journal quotidien présentant le détail de leurs recettes professionnelles, appuyés des factures et de toutes autres pièces justificatives ([178]).

Ainsi, avant la loi de finances pour 2016 ([179]), aucune disposition législative ou réglementaire n’interdisait aux entreprises assujetties à la TVA de détenir ou d’utiliser un logiciel frauduleux : seule leur commercialisation était sanctionnée par l’article 1770 undecies du CGI.

1.   Une obligation pour les assujettis à la TVA de recourir à un logiciel de comptabilité ou de gestion ou d’un système de caisse sécurisé

Afin de compléter le dispositif de lutte contre les logiciels ou systèmes de caisse frauduleux, l’arsenal à la disposition de l’administration des douanes doit être renforcé prochainement par la mise en place d’un volet relatif aux utilisateurs et détenteurs de ces logiciels ou systèmes.

À cette fin, la loi de finances pour 2016 a modifié l’article 286 du CGI qui prévoit désormais, qu’à partir du 1er janvier 2018, les assujettis à la TVA qui enregistrent les règlements de leurs clients au moyen d’un logiciel de comptabilité ou de gestion ou d’un système de caisse, devront désormais fournir, en vue du contrôle de l’administration fiscale, un document permettant d’attester que le logiciel utilisé satisfait « à des conditions d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage des données ». Il s’agit de l’ensemble des données qui concourent à la réalisation d’une transaction participant à la formation des résultats comptables et fiscaux (vente, prestation de services, réception d’un paiement, etc.).

a.   Une obligation qui s’impose à l’ensemble des personnes assujetties à la TVA

L’obligation de certification s’impose à toutes les personnes assujetties à la TVA, personnes physiques ou morales, de droit privé ou de droit public, qui enregistrent eux-mêmes les règlements de leurs clients dans un logiciel de comptabilité ou de gestion ou un système de caisse, y compris en cas d’enregistrement sur un logiciel ou système accessible en ligne. Elle concerne également les assujettis dont tout ou partie des opérations réalisées sont exonérées de TVA ou relevant du régime de la franchise en base de TVA.

b.   Une obligation qui concerne tous les types de logiciels et systèmes de caisse

L’obligation s’impose à tous les types de logiciels et systèmes de caisse : il s’agit des mêmes logiciels et systèmes de caisse que ceux visés par le droit de communication prévu à l’article L. 96 J du LPF. L’obligation vise ainsi tout matériel qui permet d’automatiser des calculs et de mémoriser des opérations d’encaissement : les logiciels de comptabilité, les logiciels de gestion et les systèmes de caisse.

L’administration fiscale définit les logiciels de comptabilité et les logiciels de gestion de la manière suivante :

– un logiciel de comptabilité est « un programme informatique permettant à un appareil informatique d’assurer tout ou partie des tâches de la comptabilité d’une entreprise en enregistrant et traitant toutes les transactions réalisées par l’entreprise dans différents modules fonctionnels (comptabilité fournisseurs, comptabilité clients, paie, grand livre, etc.) » ;

– un logiciel de gestion est « un programme informatique permettant à un appareil informatique d’assurer des tâches de gestion commerciale (gestion automatisée des devis, des factures, des commandes, des bons de livraison, suivi des achats et des stocks, suivi du chiffre d’affaires, etc.) » ([180]).

Il définit les systèmes de caisse comme des systèmes d’information dotés d’un ou de plusieurs logiciels permettant l’enregistrement des opérations d’encaissement. Il définit trois types de système de caisse :

– les systèmes de caisse autonomes, ou « caisses enregistreuses », qui « possèdent la capacité d’enregistrer des données de règlement sans pouvoir » communiquer avec d’autres systèmes de caisse ;

– les systèmes de caisse reliés à un système informatisé « capables d’enregistrer, de sécuriser et d’archiver les données d’encaissement en temps réel directement dans le système ; selon le cas, ils génèrent ou non directement les écritures comptables » ([181]) ;

– les logiciels d’encaissement installés sur un appareil informatique et capables d’enregistrer, de sécuriser et d’archiver des données d’encaissement en temps réel directement dans le système, tout en disposant de fonctionnalités de comptabilité et de gestion comptable et financière.

Dans tous les cas, pour les systèmes de caisse, les écritures comptables ne sont pas directement générées par le système à partir des données d’encaissement enregistrées. Les données d’encaissement sont exportées pour permettre la tenue de la comptabilité et des écritures du livre-journal.

Ainsi, l’obligation de sécurisation s’applique à « tous les systèmes informatisés comptables, à tous les systèmes de gestion commerciale et d’encaissement qui enregistrent des données ou informations concourant à la détermination du résultat comptable, et plus généralement, à tous les systèmes de caisse, c’est-à-dire à tous les matériels permettant l’enregistrement des opérations d’encaissement, notamment de ventes et de prestations de services » ([182]).

Il est enfin précisé que l’obligation s’impose également aux logiciels comptables ou de gestion dits « libres » ou développés en interne par l’assujetti lui-même, étant entendu que « les modifications que les utilisateurs peuvent apporter au logiciel libre ou développé en interne ne doivent pas avoir pour objet ou pour effet d’altérer le respect des conditions d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage » ([183]).

c.   Une obligation d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage

Les conditions d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage des données du logiciel ou du système de caisse doivent permettre à l’administration fiscale de lutter contre l’utilisation de logiciels ou systèmes frauduleux. À cette fin, le logiciel de comptabilité ou de gestion ou le système de caisse doit respecter quatre conditions :

– inaltérabilité : il doit enregistrer toutes les données d’origine relatives aux règlements et les rendre inaltérable, c’est-à-dire respecter le principe du caractère intangible ou de l’irréversibilité des écritures comptables ; aussi les opérations de correction doivent-elles donner également lieu à un enregistrement ;

– sécurisation : il doit garantir la restitution des données de règlement dans l’état de leur enregistrement d’origine ;

– conservation : toutes les données doivent être conservées, soit en ligne, c’est-à-dire dans le logiciel ou système, soit dans une archive ; les logiciels et systèmes doivent, de plus, prévoir la possibilité d’une clôture journalière, mensuelle et annuelle (ou par exercice), avec une conservation des données de manière cumulatives et récapitulatives d’une clôture à l’autre ;

– archivage : il doit permettre de figer les données dans le temps, qui doivent pouvoir être lues aisément par l’administration fiscale en cas de contrôle, y compris lorsque l’entreprise a changé de logiciel ou de système.

d.   Une obligation attestée par l’éditeur ou certifiée par un organisme accrédité

Le respect des conditions d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage des données doit être justifié :

– soit par une attestation individuelle de conformité de l’éditeur du logiciel de comptabilité ou de gestion ou du système de caisse, conforme à un modèle fixé par l’administration ;

– soit par un certificat délivré par un organisme accrédité par l’instance nationale d’accréditation, à savoir le Comité français d’accréditation (Cofrac).

Lorsqu’une entreprise détient plusieurs systèmes de caisse et/ou logiciels de comptabilité ou de gestion différents dans lesquels elle enregistre les règlements de ses clients, elle doit présenter un certificat ou une attestation pour chacun de ces produits.

Concrètement, lorsque le logiciel ou le système a été acquis avant la mise en œuvre de la mesure, chaque commerçant est tenu de demander à l’éditeur de son logiciel ou système de caisse de lui remettre un certificat si le logiciel ou système a été certifié ou, à défaut, de lui remettre une attestation individuelle de conformité. S’il achète un nouveau logiciel ou système de caisse, soit celui-ci est déjà certifié à la demande de l’éditeur par un organisme accréditeur, soit l’éditeur du logiciel délivre lui-même une attestation individuelle de conformité.

2.   Une sanction des éventuels manquements à l’obligation de conformité par une amende fiscale

L’article 88 de la loi de finances pour 2016 a inséré dans le CGI un article 1770 duodecies, afin de prévoir une amende fiscale de 7 500 euros par logiciel de comptabilité ou de gestion ou par système de caisse frauduleux à la charge des détenteurs, qu’ils soient propriétaires ou locataires. Lorsque les agents de l’administration fiscale ont constaté un manquement à l’obligation de sécurisation, l’assujetti dispose d’un délai de trente jours pour formuler ses observations et, le cas échéant, fournir l’attestation ou le certificat manquant. Si l’intéressé apporte les justificatifs demandés dans le délai imparti, l’amende n’est pas appliquée. Dans le cas contraire, l’amende est appliquée et le détenteur dispose d’un délai de soixante jours pour se mettre en conformité, sous peine de se voir appliquer de nouveau l’amende. Cette dernière est également applicable lorsque l’assujetti refuse l’intervention des agents de l’administration dans le cadre de la procédure de contrôle.

En effet, la loi de finances pour 2016 a également créé une nouvelle procédure de contrôle codifiée à l’article L. 80 O du LPF afin de doter l’administration fiscale d’un droit de contrôle spécifique : ses agents peuvent intervenir de manière inopinée dans les locaux professionnels d’une personne assujettie à la TVA pour vérifier la détention par cette personne de l’attestation ou du certificat pour chacun des logiciels ou systèmes de caisse, et le cas échéant, d’appliquer l’amende fiscale prévue à l’article 1770 duodecies du CGI. L’intervention peut être mise en œuvre de 8 heures à 20 heures ou, en dehors de ces heures, durant les heures d’activité professionnelle de la personne contrôlée. Elle donne lieu, au début de l’intervention, à la remise d’un avis d’intervention, et lors de la conclusion de la procédure, à la remise d’un procès-verbal qui mentionne le cas échéant l’obligation de mise en conformité dans un délai de soixante jours. Dans le cas où l’assujetti refuse l’intervention des agents, ceux-ci en dressent également procès-verbal.

Il est également précisé que ces contrôles spécifiques ne relèvent pas des procédures de contrôle de l’impôt prévues aux articles L. 10 à L. 54 A du LPF. Il s’agit ainsi de limiter la nouvelle procédure aux seules constatations matérielle, sans examens de la situation fiscale ou de la comptabilité de l’entreprise, qui supposent l’engagement de procédures particulières.

Il convient enfin de rappeler que l’amende prévue peut être cumulée avec les rappels d’impôt et les pénalités qui seraient dus à la suite d’une vérification de comptabilité de l’entreprise, au titre des recettes que le logiciel frauduleux aurait permis de dissimuler. En effet, lorsque la fraude est établie au titre d’une vérification de comptabilité, les assujettis qui ont dissimulé leurs recettes se voient notifier des rappels de TVA, d’impôts sur les sociétés ou le revenu, assortis de fortes pénalités, à savoir 40 % en cas de manquement délibéré ou d’abus de droit, et 80 % en cas de manœuvres frauduleuses destinées à égarer l’administration. Par ailleurs, dans les cas les plus graves, l’administration peut demander l’engagement de poursuites pénales pour fraude fiscale et complicité de fraude fiscale, après avis de la commission des infractions fiscales (CIF).

3.   Une entrée en vigueur au 1er janvier 2018 afin de laisser aux personnes concernées un temps d’adaptation

L’article 88 de la loi de finances pour 2016 dispose que l’obligation de certification ainsi que la nouvelle procédure de contrôle s’appliquent à tous les logiciels de comptabilité ou de gestion et à tous les systèmes de caisse utilisés par un assujetti à la TVA à compter du 1er janvier 2018 pour enregistrer les règlements de ses clients. Ce délai était jugé nécessaire pour laisser aux assujettis le temps de procéder aux mises à jour requises ou à l’acquisition d’un nouveau logiciel ou système de caisse, ainsi qu’aux éditeurs de diffuser les mises à jour et de transmettre les attestations ou certificats requis.

Le ministre de l’action et des comptes publics a par ailleurs demandé à l’administration fiscale d’accompagner les entreprises dans la première année d’application des nouvelles règles ([184]).

II.   Le contexte Économique et budgÉtaire

L’obligation de certification des logiciels de gestion ou de comptabilité et des systèmes de caisses s’inscrit dans un cadre plus large de lutte contre la fraude à la TVA en France comme en Europe. Elle est toutefois, dans sa rédaction issue de la loi de finances pour 2016, jugée trop contraignante à mettre en œuvre pour les entreprises, sans permettre pour autant d’appréhender efficacement la lutte contre l’effacement de l’assiette de la TVA par les logiciels et systèmes frauduleux.

A.   Une mesure qui s’inscrit plus globalement dans le cadre d’un renforcement de la lutte contre la fraude À la TVA

La lutte contre la fraude à la TVA constitue un enjeu financier significatif pour les recettes de l’État. La Commission européenne a récemment estimé que l’écart de TVA (ou « VAT Gap »), à savoir l’écart entre le montant de TVA effectivement collectée et le montant théorique de recettes de TVA, évalué en fonction d’indicateurs économiques dans chaque État membre, s’élevait en Europe ([185]) à 151,5 milliards d’euros en 2015 par rapport à un montant théorique de recettes de TVA de 1 187,8 milliards d’euros, soit un écart de TVA représentant 12,8 % des recettes théoriques, en baisse par rapport à 2014 où il s’élevait à 14,1 % des recettes théoriques ([186]).

Les écarts de TVA les plus faibles sont observés en Suède (– 1,42 %), en Espagne (3,52 %) et en Croatie (3,92 %). Les écarts de TVA les plus élevés ont été calculés pour la Roumanie (37,18 %), la Slovaquie (29,39 %) ou encore la Grèce (28,27 %). Dans l’ensemble, la moitié des États membres de l’Union européenne présente un écart de TVA inférieur à 10,8 % ([187]). L’écart de TVA a diminué dans la majorité des États membres, les améliorations les plus significatives étant observées à Malte, en Roumanie et en Espagne ; seuls 7 États membres subissent une hausse de leur écart de TVA, à savoir la Belgique, le Danemark, l’Irlande, la Grèce, le Luxembourg, la Finlande et le Royaume-Uni.

Écart de TVA en pourcentage du montant thÉorique de recettes collectÉes dans les États membres de l’Union europÉenne

Source : Commission européenne, direction générale de la fiscalité et des douanes (DG TAXUD), Study and Reports on the VAT Gap in the EU-28 Member States : 2017 Final Report, 18 septembre 2017.

En France, l’écart de TVA est évalué à 20,1 milliards d’euros en 2015 par rapport à un montant théorique de recettes de TVA de 171,7 milliards d’euros, soit un écart de TVA représentant 11,7 % des recettes théoriques, en baisse par rapport à 2014 où il s’élevait à 12,9 % des recettes théoriques, mais en forte hausse par rapport à 2011 où il s’élevait à moins de 7,9 %. Ainsi, l’écart de TVA en France fluctue autour de 12 % depuis la hausse importante de 4 points observée en 2011.

Écart de TVA en France entre 2011 et 2015

(en millions d’euros)

TVA

2011

2012

2016

2014

2015

TVA théorique

152 667

162 380

162 708

170 435

171 735

TVA collectée

140 552

142 527

144 490

148 454

151 622

Écart de TVA

12 115

19 853

18 218

21 981

20 113

Écart de TVA (en %)

7,94 %

12,23 %

11,20 %

12,90 %

11,71 %

Source : Commission européenne, direction générale de la fiscalité et des douanes (DG TAXUD), Study and Reports on the VAT Gap in the EU-28 Member States : 2017 Final Report, 18 septembre 2017.

Toutefois, l’écart de TVA ne doit pas entièrement être assimilé au montant de fraude et d’évasion fiscale à la TVA, puisqu’il peut également être influencé par des faillites ou insolvabilités d’entreprises, des arriérés d’impôts non recouverts ou encore des imprécisions dans les montants ou le périmètre de la comptabilité nationale de chaque État membre.

Pour rappel, face à ce constat, la Commission européenne a lancé en avril 2016 un plan d’action sur la TVA afin de rendre le système de TVA de l’Union européenne plus simple, plus étanche à la fraude et plus propice aux entreprises. Dans ce cadre, elle a proposé le 4 octobre 2017 une réforme en profondeur du système de TVA pour les échanges intra-communautaires : un prélèvement de la TVA sur les ventes transfrontières par l’autorité fiscale du pays d’origine en lieu et place du dispositif actuel d’exonération des importations intra-communautaires et d’auto-liquidation dans le pays de destination ; la mise en place d’un guichet unique en ligne pour les entreprises qui réalisent des ventes transfrontières, sur le modèle de ce qui existe déjà pour les ventes de services électroniques ; et la création d’un label européen « assujetti certifié » pour les entreprises fiables qui pourront continuer à acheter des biens en exonération de TVA dans un autre État membre. L’objectif affiché est de mettre un terme à 80 % de la fraude à la TVA transfrontière, dont le montant est estimé à environ 50 milliards d’euros par an dans l’Union européenne.

B.   Une mesure jugÉe en l’État actuel trop contraignante
À mettre en œuvre par les entreprises concernÉes

Si l’objectif initial de l’obligation de certification était de lutter contre la fraude à la TVA permise par l’utilisation de logiciels ou systèmes de caisse frauduleux, son champ d’application s’est rapidement révélé trop vaste et contre-productif. Ainsi, l’obligation doit en l’état s’imposer à l’ensemble des assujettis à la TVA, y compris les assujettis non redevables de la TVA, tels que les personnes bénéficiant de la franchise en base TVA ou celles effectuant uniquement des opérations exonérées par la loi, alors même que le risque de fraude pour ces personnes est inexistant.

De plus, le nombre de logiciels, progiciels ou matériels de caisse concernés représente un volume important à certifier pour les éditeurs dans un délai relativement court. La mise à jour et le renouvellement en moins d’un an de l’ensemble des logiciels de gestion ou de comptabilité des entreprises est jugé coûteux et trop complexe par la plupart des organisations professionnelles concernés.

Dans ce cadre, le 15 juin 2017, le ministre de l’action et des comptes publics a annoncé par communiqué de presse que « face à l’inquiétude exprimée par les entreprises, notamment les plus petites d’entre elles » ([188]), le dispositif sera recentré et simplifié par le projet de loi de finances pour 2018. Il s’agit de recentrer le dispositif vers les comportements les plus à risque en matière d’utilisation de logiciel ou système de caisse permissifs ou frauduleux, sans réduire pour autant l’efficacité de la mesure.

III.   Le dispositif proposÉ et les enjeux juridiques

L’obligation de certification mise en place par la loi de finances pour 2016 concerne, à partir du 1er janvier 2018, l’ensemble des assujettis à la TVA ainsi que tous les types de logiciels de gestion ou de comptabilité et tous les types de systèmes de caisse. Le présent article propose, d’une part, de limiter l’obligation aux seuls logiciels et systèmes de caisse pour lesquels il existe des risques de fraude à la TVA et, d’autre part, de ne pas soumettre à cette obligation les assujettis à la TVA pour lesquels il n’existe pas d’enjeux en matière de fraude à la TVA.

A.   Un recentrage de la mesure aux seuls logiciels et systÈmes de caisse

Le dispositif actuel impose la sécurisation non seulement des logiciels de caisse, qui concentrent en effet les principaux risques de fraude, mais également des logiciels de gestion et de comptabilité. Or, les données contenues dans ces deux dernières catégories de logiciels peuvent être contrôlées par d’autres moyens dont dispose l’administration fiscale lors des vérifications de comptabilité.

En effet, l’article L. 47 A du LPF dispose que les contribuables qui tiennent leur comptabilité au moyen de systèmes informatisés doivent la présenter sous forme de fichiers dématérialisés lorsqu’ils font l’objet d’une vérification de comptabilité par l’administration fiscale. Dans ce cadre, un contrôle est effectué dans les locaux de l’entreprise sur « l’ensemble des informations, données et traitements informatiques qui concourent directement ou indirectement à la formation des résultats comptables ou fiscaux et à l’élaboration des déclarations rendues obligatoires par le code général des impôts ainsi que sur la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l’exécution des traitements » (article L. 13 du LPF). Depuis la loi relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière ([189]), les agents de l’administration fiscale peuvent, dans le cadre des contrôles inopinés tendant à la constatation de l’existence et de l’état des documents comptables, « réaliser deux copies des fichiers relatifs aux informations, données et traitements informatiques ainsi que de la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l’exécution des traitements » (article L. 47 A du LPF).

Depuis la loi de finances pour 2016 ([190]), l’article L. 13 G du LPF dispose que les agents de l’administration peuvent également, lorsque les contribuables tiennent leur comptabilité au moyen de systèmes informatisés, examiner cette comptabilité sans se rendre sur place. L’examen de comptabilité – différent de la vérification de comptabilité ([191]) – est une procédure de contrôle qui permet à l’administration fiscale de réaliser des opérations de contrôle à distance, à partir de la comptabilité remise par l’entreprise sous forme dématérialisée (article L. 47 AA du LPF). Dans ce cadre, le contribuable doit adresser dans un délai de quinze jours à l’administration, sous forme dématérialisée, une copie des fichiers des écritures comptables (FEC). Le défaut de présentation de la comptabilité « entraîne l’application d’une amende égale à 5 000 euros ou, en cas de rectification et si le montant est plus élevé, d’une majoration de 10 % des droits mis à la charge du contribuable » (article 1729 D du CGI).

Dès lors, lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, celle-ci fait déjà l’objet de vérifications lors des examens et des vérifications de comptabilité. Le du A et le B du I ainsi que le II proposent de cibler l’obligation légale sur les seuls logiciels et systèmes de caisse, respectivement pour l’obligation de certification (article 286 du CGI), l’amende fiscale de 7 500 euros (article 1770 duodecies du CGI) ainsi que la procédure de contrôle (article L. 80 O du LPF). Ainsi, les logiciels de gestion sans fonctionnalités de caisse et les logiciels de comptabilité seront exclus de l’obligation.

B.   Une limitation du dispositif aux seuls assujettis pour lesquels il existe un risque en matiÈre de fraude À la TVA

Le dispositif actuel concerne l’ensemble des assujettis à la TVA, y compris ceux qui bénéficient de la franchise TVA ou qui ne réalisent que des opérations exonérées, et qui donc ne présentent pas de risque de fraude à la TVA. De même, il englobe les opérations entre professionnels alors qu’elles sont soumises à une obligation de facturation permettant le contrôle de l’administration fiscale.

Le  et le  du A du I propose ainsi de ne pas soumettre à la nouvelle obligation de certification des logiciels et systèmes de caisse les assujettis à la TVA :

– effectuant des livraisons de biens et des prestations de service donnant lieu à facturation conformément à l’article 289 du CGI ;

– bénéficiant de la franchise de taxe mentionnée à l’article 293 B du CGI ;

– effectuant exclusivement des opérations ou des prestations de service exonérées de TVA.

Le premier cas concerne les assujettis à la TVA effectuant des livraisons de biens et des prestations de service donnant lieu à facturation conformément à l’article 289 du CGI. Cet article dispose que tout assujetti est tenu de s’assurer qu’une facture est émise pour :

– toute prestation de service ou de vente de marchandise entre professionnels ;

– toute opération de vente à distance, à savoir les échanges intracommunautaires pour lesquels l’acquéreur est un particulier (notamment vente par correspondance) ;

– toute livraison aux enchères publiques de biens d’occasion, d’œuvres d’art, d’objets de collection ou d’antiquité.

La facture doit être délivrée par le fournisseur, qui peut cependant déléguer cette obligation à un tiers sous-traitant ou au client (en situation d’auto-facturation), par un contrat de mandat préalable exprès. Tout manquement à l’obligation de facturation entre professionnels est passible d’une amende fiscale de 50 % de la somme facturée ou de celle qui aurait dû être facturée (article 1737 du CGI).

Dans la mesure où les factures émises servent de justificatifs, nécessaires à l’établissement de la comptabilité, et font office de support à la détermination des droits sur la TVA et au contrôle de l’administration fiscale, il n’est pas nécessaire d’imposer à ces assujettis une obligation additionnelle de sécurisation des logiciels et systèmes de caisse. En effet, la fraude aux recettes à la TVA est principalement constatée lorsque les assujettis ne sont pas tenus d’effectuer, pour leurs opérations ou leurs prestations, une facturation. Il s’agit ainsi de ne pas soumettre à l’obligation les prestations de service ou de vente de marchandise entre professionnels, et de la recentrer sur le secteur du commerce et des ventes aux particuliers.

Le second cas concerne les assujettis bénéficiant de la franchise en base TVA. Pour rappel, le bénéfice de cette franchise, prévu à l’article 293 B du CGI, est réservé aux assujettis établis en France, quelle que soit leur forme juridique, à la seule condition que leur chiffre d’affaires hors taxes de l’année précédente n’excède pas :

– 82 800 euros ou 91 000 euros (mais à condition dans ce dernier cas que le chiffre d’affaires de la pénultième année n’excède pas 82 800 euros) pour les assujettis dont le commerce principal est de vendre des marchandises ou de fournir un logement ;

– 33 200 euros ou 35 200 euros (mais à condition dans ce dernier cas que le chiffre d’affaires de la pénultième année n’excède pas 33 200 euros) pour les autres activités de prestation de services.

Un seuil spécifique de 42 900 euros est prévu pour certaines professions (avocats, avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation, auteurs d’œuvres de l’esprit et artistes-interprètes).

Dans la mesure où ces assujettis ne sont pas redevables du paiement de la TVA ([192]), il n’est pas utile de les soumettre à une obligation de certification des logiciels ou systèmes de caisse destinée à lutter contre la fraude à la TVA.

Enfin, le troisième cas concerne l’ensemble des assujettis à la TVA effectuant exclusivement des opérations ou des prestations de service exonérées de TVA. En effet, certaines livraisons de biens ou prestations de services, bien que normalement taxables, sont exonérées en vertu d’une disposition expresse de la loi. Sont notamment concernées, sans que cette liste soit exhaustive :

– certaines opérations soumises à une autre forme d’imposition, telles que les cessions de biens meubles incorporels soumises au droit proportionnel d’enregistrement, ou l’organisation de jeux de hasard ou d’argent soumis au prélèvement progressif sur le produit des jeux des casinos ou à l’impôt sur les spectacles, jeux et divertissements ;

– les opérations de soins dispensés par les professions médicales et paramédicales ou encore les frais d’hospitalisation et de traitement dans les établissements de soins privés ;

– les prestations de services et livraisons de biens étroitement liées à l’enseignement scolaire et universitaire, la formation professionnelle continue, ainsi que les cours et leçons particulières fournis par des personnes physiques ;

– les opérations effectuées par les organismes agissant sans but lucratif, notamment les services de caractère social, éducatif, culturel ou sportif rendus à leurs membres par les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif et dont la gestion est désintéressée ;

– ou encore les locations immobilières, certaines activités relevant de la pêche, certaines opérations liées à la garde d’enfants, etc.

Dans la mesure où ces assujettis effectuent exclusivement des opérations ou des prestations exonérées de TVA, ils ne sont pas redevables du paiement de la TVA et il n’est pas non plus utile de les soumettre à une obligation de certification des logiciels ou systèmes de caisse destinée à lutter contre la fraude à la TVA.

IV.   L’impact Économique et budgétaire attendu

La mise en place au 1er janvier 2018 de l’obligation de sécurisation devrait permettre de consolider les recettes de TVA au profit du budget de l’État en dissuadant l’utilisation des logiciels ou systèmes de caisse frauduleux. Or, avec des recettes nettes estimées à 152,8 milliards d’euros en 2018, la TVA demeure la première recette du budget de l’État : l’impact pour les finances publiques peut dès lors rapidement devenir significatif. Il permettra également de mettre un terme aux distorsions de concurrence induites par l’utilisation de tels logiciels entre acteurs économiques. Il est néanmoins difficile de chiffrer avec précision l’impact financier de l’obligation de certification puisque l’ampleur des techniques de fraude et le préjudice causé ne font l’objet d’aucun chiffrement.

Dans ce cadre, la mesure proposée aura peu de conséquence pour les finances publiques : par exemple, le fait de ne pas imposer l’obligation de sécurisation des logiciels aux personnes assujetties à la TVA mais non redevables n’est qu’une mesure de simplification sans conséquences sur la lutte contre la fraude à la TVA. Elle pourrait néanmoins avoir une conséquence marginale pour les personnes effectuant des opérations soumises à facturation obligatoire ou pour les personnes utilisant les logiciels de comptabilité et de gestion. Toutefois, dans la mesure où l’administration fiscale dispose déjà, pour ces cas précis, de moyens de lutte contre la fraude (contrôle des factures ou vérification et examen de comptabilité), la fin de l’obligation de certification n’aura pas d’impact substantiel sur le recours par ces assujettis à des logiciels frauduleux.

Dans tous les cas, la mesure proposée constitue une mesure de simplification bienvenue pour de nombreuses petites entreprises, notamment celles soumises à la franchise de base, qui avait émises de nombreuses inquiétudes quant au coût de la mesure. Lors de l’examen de l’article 88 de la loi de finances pour 2016, la rapporteure générale avait ainsi estimé le coût de l’acquisition d’un nouveau logiciel ou système de caisse de l’ordre de 300 à 500 euros par caisse ([193]).

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*     *

La commission examine l’amendement II-CF348 de Mme Laure de La Raudière.

Mme Lise Magnier. Cet amendement vise à simplifier le processus de certification des logiciels dits anti-fraude à la TVA, bientôt obligatoires, qui sont développés en open source ou en interne.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement II-CF15 de M. Mohamed Laqhila.

Elle passe aux amendements identiques II-CF288 de Mme Véronique Louwagie et IICF358 de Mme Lise Magnier.

Mme Véronique Louwagie. En imposant l’obligation d’utiliser un logiciel de comptabilité ou de gestion ou un système de caisse conforme à certaines conditions, l’article 46 aura des répercussions sur les entreprises. Celles-ci ne sont pas prêtes, en effet, et les concepteurs de logiciels ne le sont pas tous non plus. En outre, certains logiciels spécifiques ont été développés par les entreprises elles-mêmes. L’adoption de cette mesure placerait donc les entreprises face à une difficulté. C’est pourquoi il vous est proposé de reporter d’un an l’application de la mesure, ce qui laisserait aux entreprises le temps d’apprécier la situation et de s’adapter à cette nouvelle charge.

Mme Lise Magnier. L’amendement II-CF358 est défendu.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable. Je précise que le ministre de l’action et des comptes publics a demandé à l’administration fiscale d’accompagner les entreprises pendant la première année d’application de ces nouvelles règles.

Mme Cendra Motin. Cette obligation, déjà votée, est circonscrite aux logiciels et systèmes de caisse et non aux logiciels de comptabilité ou de gestion. En outre, un accompagnement est prévu la première année de mise en œuvre. Précisons tout de même qu’il s’agit de lutter contre la fraude à la TVA – un sujet particulièrement important en ce moment. Il ne s’agit pas d’une obligation nouvelle : les éditeurs et tous ceux qui possèdent une caisse savent qu’ils doivent l’appliquer depuis 2016. Les caisses des commerces sont de plus en plus souvent louées sous forme de services de logiciels en mode SAAS (software as a service) et les sociétés de services et d’ingénierie en informatique (SSII) effectuent les mises à jour sans difficulté. En clair, l’existence d’un accompagnement et le fait que les éditeurs sont prêts à mettre en œuvre cette mesure qui n’est pas nouvelle doivent nous inciter à envisager son application avec optimisme.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques II-CF96 de Mme Véronique Louwagie, II-CF127 de Mme Lise Magnier et II-CF442 de M. Hervé Pellois.

Mme Véronique Louwagie. L’amendement II-CF96 vise à réparer une omission. L’article exclut de l’obligation de certification des logiciels et des systèmes de caisse les personnes relevant du régime de la franchise en base de TVA du régime général ; nous proposons, par souci d’équité, d’étendre cette exclusion aux exploitants agricoles non redevables de la TVA qui relèvent du régime du remboursement forfaitaire agricole.

M. Hervé Pellois. L’obligation de certification pose en effet un problème pour la vente directe des petits exploitants agricoles dont le chiffre d’affaires est inférieur à 46 000 euros. Il n’y a aucune raison pour qu’ils ne soient pas exclus de cette obligation comme les sont les entreprises relevant de la franchise de base de TVA.

M. le Rapporteur général. L’idée me semble bonne a priori. J’émets donc un avis favorable pour que le débat puisse avoir lieu en séance publique.

La commission adopte les amendements (amendement n° II1507).

Suivant l’avis défavorable du Rapporteur général, la commission rejette l’amendement II-CF347 de Mme Laure de La Raudière.

Puis elle examine l’amendement II-CF13 de M. Mohamed Laqhila.

Mme Sarah El Haïry. Il s’agit d’un amendement symbolique. Le Gouvernement entend passer de la culture du contrôle à celle de l’accompagnement. Or, l’amende sanctionnant le manquement à l’obligation d’utiliser un logiciel ou système de caisse certifié s’élève à 7 500 euros. Cela nous semble excessif pour des commerçants dont le chiffre d’affaires est faible. Nous proposons de diminuer cette amende fiscale à 5 000 euros.

M. le Rapporteur général. Avis défavorable : il n’est pas insensé de maintenir cette amende à un niveau convenable dans le cadre de la lutte contre la fraude à la TVA.

La commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement II-CF92 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement vise à reporter l’entrée en vigueur de l’amende au 1er janvier 2019.

Les SSII sont sans doute prêtes, madame Motin, mais elles travaillent le plus souvent avec de grandes entreprises. Les TPE, en revanche, seront en difficulté. Certaines exploitations agricoles qui pratiquent la vente directe, par exemple, ne disposent pas des logiciels adaptés. C’est pour aider ces petites entreprises que nous proposons le report de l’amende.

M. le Rapporteur général. Je l’ai dit, le ministre s’est engagé à accompagner les entreprises ; avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle passe aux amendements identiques II-CF12 de M. Mohamed Laqhila et IICF310 de M. Éric Alauzet.

Mme Sarah El Haïry. Dans la même logique que le précédent, l’amendement II‑CF12 part du principe qu’en cas de contrôle, les commerçants ne respectant pas l’obligation de certification seront passibles d’une amende fiscale. Nous proposons d’étaler l’application de la mesure dans le temps en la reportant d’un an seulement, pour laisser le temps aux commerçants de s’équiper.

M. Éric Alauzet. L’amendement II-CF310 vise à interroger le Gouvernement, compte tenu de la fragilité des petites exploitations et des commerçants vulnérables, qui sont à la merci des éditeurs, qui ne se sont équipés que récemment et ignorent si leur matériel est conforme, qui peinent à obtenir les certifications et ont besoin d’être rassurés. Il faudra que le Gouvernement complète les explications qui viennent d’être données.

M. le Rapporteur général. Ces amendements visent à reporter les mesures favorables de l’article et auraient pour effet de rétablir le dispositif initial. Mieux vaut ne pas les reporter. Je vous invite donc à les retirer ; à défaut, avis défavorable.

Les amendements sont retirés.

La commission adopte l’article 46 modifié.

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*     *

Article additionnel après l’article 46
Renforcement des sanctions applicables en cas d’obstacle
au contrôle de l’impôt et en cas de fraude fiscale aggravée

La commission examine l’amendement II-CF634 de Mme Amélie de Montchalin, qui fait l’objet du sous-amendement II-CF725 du Rapporteur général.

M. Stanislas Guerini. L’amendement II-CF634 vise à renforcer les sanctions applicables à la fraude fiscale commise en bande organisée ou avec des circonstances aggravantes, telles qu’une dissimulation d’identité ou une domiciliation fiscale fictive à l’étranger.

Il est en effet insupportable pour la société que des contribuables refusent de se soumettre à l’impôt et violent ainsi notre pacte républicain. Par cet amendement, nous proposons donc qu’en cas de condamnation pour fraude fiscale aggravée, la peine complémentaire de privation des droits civiques soit obligatoire, sauf motivation spéciale du juge. Nous proposons également d’alourdir la sanction financière prévue pour cette infraction ainsi que les amendes prévues en cas de refus de communication d’une information demandée par l’administration. L’article XIII de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen pose le principe selon lequel « pour l’entretien de la force publique [...] une contribution commune est indispensable [...] ». Le lien entre cette contribution et la citoyenneté est donc clair.

M. le Rapporteur général. Le sous-amendement a pour objet de coordonner le renforcement des peines prévues pour la répression de la fraude fiscale avec les dispositions pénales issues de la loi du 15 septembre 2017 sur la confiance dans la vie politique. Je suis donc favorable à l’amendement ainsi sous-amendé.

Mme Véronique Louwagie. L’aggravation des sanctions prévue dans l’amendement s’appliquerait-elle à l’article 46 tel que nous l’avons adopté ce matin et dont je rappelle qu’il rend obligatoire la certification des logiciels de caisse ?

M. le président Éric Woerth. Considérez-vous que le non-respect de cette obligation constitue une fraude fiscale ?

M. Stanislas Guerini. L’amendement tend à alourdir l’amende prévue en cas de non-certification des logiciels de caisse en étendant, au passage, cette notion à celle d’application informatique. Il me semble donc que cette disposition est cohérente avec l’article 46.

M. le Rapporteur général. Je précise que l’amendement vise les cas de fraude fiscale aggravée, ce qui ne correspond pas à l’hypothèse que vous mentionnez, madame Louwagie, à moins que la non-certification des logiciels de caisse ne relève d’une manœuvre organisée à l’échelle d’un réseau commercial ou afin de placer de l’argent dans un paradis fiscal.

M. le président Éric Woerth. Ce que dit le Rapporteur général est important. Cet amendement s’inscrit dans la continuité de ce que le Parlement a voté au cours des dernières années, mais il ne peut s’appliquer qu’en cas de fraude fiscale aggravée. Il serait donc utile que le ministre nous apporte des précisions sur ce point en séance publique.

M. François Pupponi. Je souhaite appeler votre attention sur le fait que, si l’administration fiscale estime qu’une personne a commis une fraude fiscale aggravée, elle lui impose un redressement et saisit le procureur au titre de l’article 40 du code de procédure pénale. On peut donc être condamné au pénal pour fraude fiscale. Et si, dix ans plus tard, le Conseil d’État juge que le redressement était injustifié, votre condamnation pénale demeure, car les deux procédures sont distinctes. Il faudrait donc tout de même que nous précisions, un jour, que la plainte ne peut être déposée que lorsque le redressement est certain et ne fait pas l’objet d’un contentieux.

M. le président Éric Woerth. Le « verrou de Bercy » est fait aussi pour éviter ce type de situations.

Mme Émilie Cariou. Je partage la préoccupation de M. Pupponi, mais la solution qu’il propose soulève le problème de la prescription pénale.

M. François Pupponi. Il faut changer la loi !

Mme Émilie Cariou. Par ailleurs, je ne suis pas certaine d’avoir bien compris la réponse qui a été apportée à la question de Mme Louwagie : en cas de non-certification des logiciels de caisse, peut-on se voir appliquer la peine complémentaire de privation des droits civiques ?

M. Stanislas Guerini. La non-certification d’un logiciel n’entraîne pas la privation des droits civiques. Ce sont deux dispositions bien distinctes. Le I de l’amendement porte sur l’article 1734 du CGI, relatif à la non-certification des logiciels et au refus de transmission d’une information demandée par l’administration ; le II vise, quant à lui, à modifier l’article 1741 du même code afin de renforcer les sanctions prévues et de rendre obligatoire la privation des droits civiques en cas de fraude fiscale avec circonstances aggravantes.

M. François Pupponi. Mme Louwagie a raison : si l’administration fiscale considère que la non-certification des caisses enregistreuses s’inscrit dans le cadre d’une fraude fiscale aggravée, l’auteur de celle-ci peut être privé de ses droits civiques. Ce n’est pas automatique, mais c’est possible.

M. le président Éric Woerth. Encore faut-il que l’administration fiscale soit en mesure de porter plainte.

Mme Véronique Louwagie. L’article 46, que nous avons adopté ce matin, s’appliquera dès le 1er janvier 2018. Or, nous savons d’ores et déjà que les logiciels de certaines entreprises ne pourront pas être certifiés à cette date. Il est donc aberrant d’adopter une telle disposition. C’est pourquoi nous avions déposé des amendements tendant à reporter la date d’application de l’article 46, pour l’un, au 1er janvier 2019 et, pour l’autre, qui était de repli, l’application de la sanction financière. De fait, le risque existe que, dans le cadre d’un contrôle, l’administration fiscale qualifie l’absence de certification des logiciels de fraude fiscale aggravée, qualification qui emporterait, en cas de condamnation, la privation des droits civiques. Je comprends votre démarche, monsieur Guerini. Elle est légitime, mais l’application de l’article 46 au 1er janvier 2018 soulève un véritable problème.

M. Stanislas Guerini. Je souhaite apporter deux précisions. Le I de l’amendement, qui a trait aux logiciels de caisse, sera applicable en 2019 seulement, car nous avons pris la précaution d’en différer l’application pour tenir compte d’une modification récente du droit et laisser, précisément, aux différents acteurs le temps de s’organiser. Votre préoccupation est donc satisfaite, madame Louwagie.

Sur le fond, je le répète, il s’agit de deux mesures bien distinctes : nous ne créons pas un lien de cause à effet entre le défaut de certification de logiciels et la privation des droits civiques.

M. le président Éric Woerth. Pourriez-vous faire préciser ce point par le ministre en séance publique ?

M. Stanislas Guerini. Bien sûr.

La commission adopte le sous-amendement II-CF725.

Puis elle adopte l’amendement II-CF634 sous-amendé (amendement n° II-1508).

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Article additionnel après l’article 46
Renforcement de la documentation des prix de transfert

Elle est ensuite saisie de l’amendement II-CF463 du président Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Cet amendement a trait aux prix de transfert, qui sont un des éléments extrêmement importants de la fraude et de l’évasion fiscales, lesquelles sont plus que jamais à l’ordre du jour. En 2009, nous avions fait en sorte, avec Christine Lagarde, de compléter la documentation qui peut être demandée par l’administration fiscale pour contrôler le niveau des prix de transfert. Or, depuis cette date, la France n’a pas revu cette liste de documents, contrairement à l’OCDE. Nous vous proposons donc d’adopter le standard international en la matière ; cela me paraît absolument nécessaire.

M. le Rapporteur général. Un certain nombre de choses ont déjà été faites dans ce domaine, mais il est vrai que votre proposition est extrêmement intéressante. J’émets donc, une fois n’est pas coutume, un avis favorable à cet amendement, qui nous permettra d’avoir le point de vue du Gouvernement sur cette initiative dont j’approuve totalement l’esprit. Je pense toutefois qu’il sera peut-être nécessaire, en séance publique, de reporter d’un an, voire de deux ans, la date de remise du rapport demandé par l’amendement et portant sur la mise en œuvre du dispositif, qui est prévue pour l’automne 2019, soit moins d’un an après la mise en application du dispositif. Mais, je le répète, j’approuve l’esprit de l’amendement et son caractère éthique.

Mme Émilie Cariou. J’approuve également – une fois n’est pas coutume non plus... – l’esprit de cet amendement, qui comprend le kit complet du contrôle des prix de transfert. Il est en effet urgent que toute entreprise dispose d’une véritable politique de prix de transfert, à jour, qui permette de faire l’analyse fonctionnelle du groupe et de valoriser les prix de transfert au sein de celui-ci. Je suis donc favorable à l’amendement et, pour aller un peu plus loin, je défendrai sans doute, en séance publique, d’autres amendements, relatifs à l’assiette fiscale des multinationales.

La commission adopte l’amendement (amendement  II-1509).

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Article additionnel après l’article 46
Rapport sur l’efficience des dispositifs d’accompagnement
des entreprises en difficulté

Puis elle examine l’amendement II-CF394 de Mme Olivia Gregoire.

Mme Olivia Gregoire. Par cet amendement, je propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les dispositifs d’accompagnement et de sauvetage des entreprises en difficulté et sur leur potentielle amélioration, sujet auquel nous accordons tous, me semble-t-il, une importance extrême. La France mène une politique assez volontariste en la matière, mais des progrès peuvent et doivent être réalisés afin d’obtenir de meilleurs résultats, notamment en détectant les défaillances plus tôt. L’enjeu est d’éviter que des défaillances ne s’accompagnent de plans sociaux. Sans doute faut-il, pour cela, améliorer la coopération entre les acteurs et repenser la politique de résolution de ces situations.

M. le Rapporteur général. Un tel rapport permettrait d’interroger le ministre sur le coût des dispositifs en vigueur et leurs résultats concrets, ainsi que sur les pistes de réforme et sur l’ambition du futur projet de loi sur les entreprises. J’émets donc un avis favorable.

La commission adopte l’amendement (amendement  II-1510).

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Article additionnel après l’article 46
Rapport sur les dispositifs de soutien à l’export et au développement des entreprises françaises à l’étranger

La commission examine l’amendement II-CF632 de Mme Amélie de Montchalin.

Mme Amélie de Montchalin. Il s’agit encore d’une demande de rapport, proposée par notre collègue Buon Tan et que nous avons évoquée lors de la commission élargie consacrée à l’examen de la mission Économie. Ce rapport devrait porter sur l’amélioration de l’évaluation et, éventuellement, la rationalisation des dispositifs de soutien, direct et indirect, à l’export et au développement des entreprises françaises à l’étranger. Nous constatons en effet que le déficit commercial se creuse et qu’un certain nombre de mécanismes internes à l’administration et notre réseau diplomatique ne sont pas toujours efficaces.

M. le Rapporteur général. Vous poursuivez dans une voie qui avait été tracée par notre ancienne collègue Monique Rabin, qui avait fait adopter sous la précédente législature un amendement visant à créer un document de politique transversale relatif au développement international de l’économie française et du commerce extérieur. Vous proposez d’aller plus loin, et cela me paraît plus qu’intéressant. J’émets donc un avis favorable.

La commission adopte l’amendement (amendement  II-1511).

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Article 47
Suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article supprime la contribution exceptionnelle de solidarité (CES), au taux de 1 %, à laquelle sont assujettis les fonctionnaires et salariés du secteur public et parapublic.

Cette mesure, qui s’applique à compter du 1er janvier 2018, constitue la première étape de la compensation pour les fonctionnaires de la hausse de 1,7 point de contribution sociale généralisée (CSG) prévue par l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Elle occasionne des pertes de recettes de 1,4 milliard d’euros en 2018.

Dernières modifications législatives intervenues

La CES a été créée par la loi du 4 novembre 1982 afin de financer les allocations de solidarité destinées aux personnes privées d’emploi.

L’article 143 de la loi de finances rectificative pour 2016 prévoyait le transfert du recouvrement de cette contribution au réseau des URSSAF à partir du 1er janvier 2018, et, corrélativement, la suppression du Fonds de solidarité qui était chargé jusqu’alors de sa collecte.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté un amendement du Rapporteur général demandant la remise d’un rapport au Parlement sur les mesures de compensation de la hausse de la CSG pour les agents publics et les salariés du secteur parapublic.

I.   L’état du droit

A.   Une contribution instaurée en 1982 et acquittée par les salariés des employeurs du secteur public et parapublic

La loi du 4 novembre 1982 ([194]) a institué la contribution exceptionnelle de solidarité (CES) de 1 %, qui est prélevée, dans le cadre de l’effort collectif de solidarité à l’égard des personnes privées d’emploi, sur les rémunérations des fonctionnaires et, plus largement, celles des salariés du secteur public et parapublic qui ne relèvent pas du régime d’assurance chômage de droit commun.

Le produit total de cette contribution s’est établi à 1,42 milliard d’euros en 2016.

1.   Le champ des redevables de la CES

Aux termes de l’article L. 5423-26 du code du travail, les salariés des employeurs du secteur public et parapublic versent une CES, au taux de 1 %.

En principe, ces salariés ne relèvent pas de la cotisation chômage du régime de l’Unédic. Si, comme les salariés du secteur privé, ils ont droit à une allocation chômage en cas de perte d’emploi (article L. 5424-1 du code du travail), le risque chômage est en principe auto-assuré par les employeurs publics (article L. 5424-2 du même code).

● Se trouvent nécessairement dans le champ de la CES – et non de la cotisation salariale chômage au taux de 2,4 % –, tous les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l’État et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales, les agents statutaires des autres établissements publics administratifs, ainsi que les militaires.

● Se trouvent en principe dans le champ de la CES les salariés employés par :

– les entreprises inscrites au répertoire national des entreprises contrôlées majoritairement par l’État ([195]), les établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales, les sociétés d’économie mixte dans lesquelles ces collectivités ont une participation majoritaire ;

– les chambres de métiers, les services à caractère industriel et commercial gérés par les chambres de commerce et d’industrie territoriales, les chambres d’agriculture, ainsi que les établissements et services d’utilité agricole de ces chambres ;

– les entreprises de la branche professionnelle des industries électriques et gazières soumises au statut national du personnel des industries électriques et gazières.

Toutefois, ces différents employeurs ont la faculté, par l’exercice d’une option irrévocable, de se placer sous le régime d’assurance chômage de droit commun, de préférence à l’auto-assurance ; dans ce cas, les salariés sont assujettis à des cotisations salariales chômage au taux prévu par la convention Unédic, soit 2,4 %, tandis que le taux des cotisations patronales s’élève à 4,05 %.

● Enfin, se trouvent également dans le champ de la CES, en principe, les agents non titulaires des collectivités territoriales et les agents non statutaires des établissements publics administratifs autres que ceux de l’État, ainsi que les agents non statutaires des groupements d’intérêt public, les agents non titulaires des établissements publics d’enseignement supérieur et des établissements publics à caractère scientifique et technologique, ainsi que les assistants d’éducation de certains établissements d’enseignement.

Pour ces salariés, leurs employeurs peuvent choisir, pour leur indemnisation, entre le régime de l’auto-assurance et celui de l’Unédic. Ce choix est transparent pour le salarié, puisque celui-ci se trouve en tout état de cause soumis à une contribution au taux de 1 % :

– lorsque l’employeur a opté pour l’auto-assurance, le salarié acquitte la CES, au taux de 1 % ;

– lorsque l’employeur a adhéré au régime de l’Unédic, la cotisation chômage du salarié est égale au montant de CES qu’il aurait dû verser en application de l’article L. 5423-26 du code du travail (article R. 5424-1) ; l’employeur supporte la différence entre ce montant et la cotisation globale due (soit la part salariale restante et la part patronale).

● Du fait des possibilités d’option en faveur du régime Unédic d’assurance chômage, le nombre total d’employeurs et de salariés relevant de la CES n’est pas connu. Dans son Rapport public annuel de février 2016, la Cour des comptes soulignait que le Fonds de solidarité, créé par la loi précitée du 4 novembre 1982 afin de collecter cette contribution, ne disposait d’aucun recensement des employeurs assujettis à la CES et que cette situation, relevée lors d’un premier contrôle de la Cour en 1991, n’avait pas évolué depuis lors.

La Cour indiquait que 45 000 employeurs précomptaient et versaient la contribution ; pour autant, il n’était pas possible d’avancer une estimation fiable du nombre d’employeurs qui devraient être collecteurs – puisque l’identification des employeurs redevables reposait sur un système déclaratif – ni de disposer d’une liste de ces employeurs.

En réponse aux questions du Rapporteur général, le Gouvernement s’est contenté d’indiquer que « sont redevables de la CES l’ensemble des personnels des secteurs public et parapublic qui ne cotisent pas à l’assurance chômage, ce qui inclut entre autres les agents des trois fonctions publiques, les salariés sous statut de la SNCF, de la RATP, une partie des agents sous statut des industries électriques et gazières, ou encore les fonctionnaires de la Poste et France Télécom, ainsi que les parlementaires ». En ce qui concerne les employeurs des secteurs public et parapublic autres que l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics administratifs, « compte tenu du nombre d’organismes et de la diversité des situations, il n’existe pas de liste exhaustive des établissements soumis au régime de la contribution de solidarité ».

2.   L’assiette de la contribution

● En application de l’article L. 5423-27 du code du travail, l’assiette de la CES est la rémunération nette totale des salariés – y compris l’ensemble des éléments ayant le caractère d’accessoire du traitement, de la solde ou du salaire, à l’exclusion des remboursements de frais professionnels –, dans la limite d’un plafond égal à quatre fois le plafond annuel de sécurité sociale (PASS) ([196]), qui correspond à une rémunération mensuelle de 13 076 euros. Il s’agit donc du même plafond que celui retenu pour l’assiette de la cotisation chômage dans le régime Unédic.

La contribution sociale généralisée (CSG), dans sa totalité, la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) et les cotisations de prévoyance ne sont pas déductibles de l’assiette de la CES, à la différence des cotisations retraite (principale et complémentaire) et, le cas échéant, de la cotisation maladie.

Par ailleurs, sont exonérés du versement de la CES les salariés dont la rémunération mensuelle nette ([197]) est inférieure à un certain seuil (article L. 542332), fixé à 1 467 euros par mois, soit le traitement afférent à l’indice majoré 313. Ce plafond, applicable depuis le 1er mars 2017, résulte du décret du 24 février 2017 ([198]).

● Une définition précise de l’assiette de la contribution est donc nécessaire, non seulement pour calculer son montant, mais aussi pour déterminer si le salarié est exonéré ou non de la CES.

Or, ainsi que le relève la Cour des comptes dans son rapport précité, du fait du caractère périodique de certains éléments de rémunération, qui peuvent être versés mensuellement, trimestriellement ou annuellement, cette assiette a été précisée à plusieurs reprises, par diverses dispositions législatives ainsi que par des circulaires, et celles-ci ont donné lieu à des interprétations contradictoires. Certains éléments de rémunération et certaines primes ont été intégrés, ou non, selon les administrations, lors de la liquidation de la contribution, ce qui a conduit à un traitement différencié des agents publics selon leurs employeurs, ce qui n’est guère satisfaisant.

● Il n’existe pas de statistiques fines sur le nombre de personnes exonérées de la CES du fait d’une rémunération inférieure au seuil prévu par l’article L. 5423-32 du code du travail.

Selon les éléments transmis par le Gouvernement, les estimations disponibles reposent sur l’analyse des montants globaux recouvrés par le Fonds de solidarité, comparés aux montants qui résulteraient de l’application d’un taux de 1 % à l’assiette globale des rémunérations nettes. Le différentiel permet d’estimer la perte de recettes résultant de l’exonération des salaires inférieurs à 1 467 euros par mois, et d’évaluer approximativement le nombre d’agents concernés pour chaque versant de la fonction publique.

Ces estimations, qui comportent une marge d’erreur importante, figurent dans le tableau ci-dessous. Elles permettent de constater que, sur environ 5,5 millions d’agents de la fonction publique d’État, territoriale et hospitalière, environ 1,1 million, soit 20 %, sont exonérés de CES du fait de leur niveau de rémunération.

VENTILATION PAR EMPLOYEUR DES PERSONNES EXONÉRÉES DE CES
DU FAIT DE LEUR NIVEAU DE RÉMUNÉRATION

Employeur

État

Opérateurs

Fonction publique territoriale

Fonction publique hospitalière

Total des trois fonctions publiques

Montant des exonérations de CES (en millions d’euros)

55

15

130

80

280

Nombre de personnes exonérées

225 000

50 000

525 000

300 000

1 100 000

Source : direction du budget.

B.   Une contribution destinée au financement d’allocations de solidarité versées aux personnes privées d’emploi, dont le rendement s’est établi à 1,4 milliard d’euros en 2016

● Le produit de la CES, collecté par le Fonds de solidarité, est destiné à financer les allocations de solidarité versées aux demandeurs d’emploi qui ne peuvent pas ou plus bénéficier du régime d’assurance chômage. Ce produit est inscrit au sein de la sous-action 1 Indemnisation des demandeurs d’emploi, du programme 102 Accès et retour à l’emploi, dans la mission Travail et emploi.

Sont notamment financées par le Fonds les allocations suivantes :

– l’allocation de solidarité spécifique (ASS), versée aux bénéficiaires de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) arrivés en fin de droit et sous réserve de certaines conditions ; son montant a atteint 2,575 milliards d’euros en 2016 ;

– l’allocation équivalent retraite (AER), destinée à garantir un niveau minimum de ressources aux demandeurs d’emploi qui ne peuvent pas percevoir leur pension de retraite, faute d’avoir soixante ans, alors qu’ils ont validé 160 trimestres au titre de l’assurance vieillesse, et dont le montant a atteint 25,8 millions d’euros en 2016 ;  cette allocation, supprimée le 1er janvier 2011, est aujourd’hui en extinction ;

– l’allocation de solidarité spécifique-formation (ASS-F), versée au bénéficiaire de l’ASS qui suit une formation inscrite dans son projet personnalisé d’accès à l’emploi, pour 23,6 millions d’euros en 2016 ;

– l’allocation spécifique de solidarité versée aux bénéficiaires de l’aide aux chômeurs créant ou reprenant une entreprise (ACCRE), pour 39 millions d’euros en 2016 ;

– l’allocation spécifique de solidarité-intéressement, ou prime forfaitaire pour reprise d’activité, versée aux bénéficiaires de l’ASS reprenant, sous conditions, une activité professionnelle d’une durée au moins égale à soixante-dix-huit heures par mois, et représentant 75,9 millions d’euros en 2016 ; ce dispositif a été réformé par l’article 87 de la loi de finances pour 2017 ([199]), la prime forfaitaire ayant été supprimée et remplacée par la prime d’activité ;

– l’allocation de professionnalisation et de solidarité et l’allocation de fin de droits, versées aux personnes relevant du statut des intermittents du spectacle, pour un montant de 3,75 millions d’euros en 2016.

Pour les seules années 2015 et 2016, une fraction du produit de la CES, égale à 15,2 %, était affectée au financement du Fonds national des solidarités actives (FNSA) ([200]). Le FNSA a été supprimé par l’article 152 de la loi de finances pour 2017, et ce à compter du 1er janvier 2017, afin de tirer les conséquences de la création de la prime d’activité, venue remplacer le RSA (revenu de solidarité active) dans son volet « activité », qui constituait la source principale de dépenses du FNSA.

● Initialement, la CES devrait couvrir la totalité des besoins financiers du régime de solidarité institué par une ordonnance du 16 février 1984 ([201]). Mais dès la fin des années 1980, il s’est avéré nécessaire de compléter les ressources du Fonds issues de la CES par des subventions de l’État.

Par ailleurs, au fil du temps, d’autres sources de financement sont venues transitoirement abonder le Fonds de solidarité, par exemple une partie du produit du droit de consommation sur les tabacs, jusqu’en 2013, puis une fraction des deux prélèvements de solidarité institués sur les revenus du patrimoine et sur les produits de placement.

En 2016, le montant de la CES s’est établi à 1 419,3 millions d’euros, pour des dépenses supérieures à 2 740 millions d’euros. La subvention de l’État est venue compléter les ressources du Fonds à hauteur de 1 473 millions d’euros.

ÉVOLUTION DES RESSOURCES ET DES DÉPENSES DU FONDS DE SOLIDARITÉ

(en millions d’euros)

Ressources

2012

2013

2014

2015

2016

2017

(prévisions)

Produit de la CES (1)

1 358,6

1 334

1 353,4

1 400

1 419,3

1 473

Subvention d’équilibre versée par l’État (2)

851,6

1 128

1 279

1 767

1 473

1 333

Prélèvements (au profit du FNSA, notamment), frais de gestion et charges, et autres ressources (3)

– 283,4

– 144

– 158

347,4

149,3

Dépenses du fonds au titre des allocations

soit (1) + (2)  (3)

2 493

2 606

2 790

2 820

2 743

2 806

Source : projets annuels de performances de la mission Travail et emploi annexés aux projets de loi de finances successifs.

C.   Les dernières modifications intervenues : la suppression du Fonds de solidarité et le transfert de la collecte de la contribution aux URSSAF

● La CES est recouvrée par le Fonds de solidarité, lequel est chargé de la reverser à Pôle emploi, pour sa section « Solidarité ». Cette section retrace, en dépenses, les allocations et aides versées pour le compte de l’État, ainsi que les cotisations sociales afférentes à ces allocations, et, en recettes, la CES ainsi qu’une contribution de l’État permettant d’assurer l’équilibre.

En revanche, le fonds n’assure pas l’instruction des demandes ni le versement des allocations de solidarité présentées supra, puisque ces missions sont déléguées à Pôle emploi.

Le fonctionnement du Fonds de solidarité a fait l’objet de critiques nourries de la part de la Cour des comptes, dans son Rapport public annuel de 2016 précité. La Cour a pointé son manque d’autonomie et son absence de marges de manœuvre en matière budgétaire, ainsi que des carences dans sa mission de collecte : le Fonds n’est pas en mesure de recenser les employeurs en charge de la contribution, ni de faire appliquer de façon uniforme par ces différents employeurs des règles de définition de l’assiette de la contribution, tandis que ses moyens de contrôle sont jugés inadaptés. La Cour conclut que l’intervention de cet établissement public spécialisé apparaît en définitive peu justifiée, compte tenu de sa faible valeur ajoutée et de son absence de poids institutionnel, alors même que d’autres circuits de recouvrement fonctionnent de façon plus efficace.

● L’article 143 de la loi de finances rectificative pour 2016 ([202]) est venu tirer les conclusions des constats de la Cour des comptes, en supprimant le Fonds de solidarité et en transférant le recouvrement de la CES à la branche recouvrement de la sécurité sociale, c’est-à-dire aux Unions de recouvrement des cotisations de la sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF), à compter du 1er janvier 2018.

II.   Le contexte de la réforme proposée

La présente mesure s’inscrit dans la réforme prévue par l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, en faveur du pouvoir d’achat pour les actifs.

Si le présent commentaire se limite à présenter à grands traits ses principales dispositions, les modalités et les effets de la réforme font l’objet d’une présentation détaillée dans le rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 fait au nom de la commission des affaires sociales.

A.   La bascule d’une partie des cotisations sociales salariales vers la CSG

● Aux termes de son évaluation préalable, l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 vise à « accorder un gain de pouvoir d’achat sans précédent à tous les actifs ». Pour ce faire, il prévoit :

– la suppression du paiement de la cotisation salariale maladie de 0,75 point, au 1er janvier 2018 ;

– la suppression du paiement de la cotisation salariale chômage de 2,4 points, qui interviendra en deux temps, avec une baisse de 1,45 point au 1er janvier 2018, et la suppression du 0,95 point restant au 1er octobre 2018.

Ainsi, les cotisations salariales seront réduites de 2,2 points à compter du 1er janvier 2018, et de 3,15 points à compter du 1er octobre 2018.

En contrepartie, pour assurer le financement de la mesure, le taux de la CSG augmentera de 1,7 point pour toutes les catégories de revenus, soit les revenus d’activité et de remplacement, les revenus du patrimoine, les produits de placement et les produits des jeux.

Il convient de préciser que la hausse de 1,7 point de CSG ne s’appliquera, s’agissant des revenus de remplacement, qu’aux seuls revenus soumis au taux de 6,6 %, soit les pensions de retraite et d’invalidité ([203]) perçues par des personnes dont le revenu fiscal de référence (RFR) de l’année N – 2 est supérieur aux seuils déterminés par le 2° du III de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, à savoir, pour l’année 2017, 14 375 euros pour une personne seule et 22 051 euros pour un couple.

● Cette « bascule » se traduira par un gain de pouvoir d’achat final de 0,5 point entre le 1er janvier et le 30 septembre 2018, puis de 1,45 point à compter du 1er octobre 2018, pour les salariés du secteur privé.

Il s’agit d’une présentation quelque peu simplifié. En effet, l’assiette des cotisations maladie et chômage est légèrement plus large que celle de la CSG (l’assiette de la CSG faisant l’objet d’un abattement de 1,75 % au titre des frais professionnels, jusqu’à un montant de rémunération égal à 4 PASS, à la différence des cotisations sociales), ce qui majore le gain de pouvoir d’achat à 0,53 point et 1,48 point ([204]), tandis que certains éléments de rémunération, tels que l’intéressement et la participation, sont exonérés de cotisations sociales mais assujettis à la CSG, ce qui minore le gain retiré de la réforme pour les personnes percevant ce type de revenus.

Au total, de l’ordre de 3 milliards d’euros de pouvoir d’achat seraient redistribués aux salariés du secteur privé en 2018, puis environ 7,5 milliards d’euros en 2019, si l’on retranche de l’allégement de cotisations sociales (14,1 milliards d’euros en 2018 et 18,5 milliards d’euros en 2019) le montant supplémentaire de CSG acquitté (estimé à 11 milliards d’euros en 2018).

En revanche, la hausse de 1,7 point de CSG ne sera pas compensée par des baisses de cotisations pour certains titulaires de revenus, à savoir les titulaires de revenus de remplacement (qui bénéficieront toutefois de la réforme de la taxe d’habitation, permettant de compenser, pour partie ou en totalité, la hausse de la CSG pour une majorité de retraités) ainsi que les titulaires de revenus du capital
– lesquels bénéficient de la mise en place du prélèvement forfaitaire unique.

Par ailleurs, le mécanisme proposé, à savoir la suppression du paiement des cotisations salariales maladie et chômage, parallèlement à la hausse de CSG, impose de prévoir des mesures particulières pour deux catégories d’actifs, dont le régime de cotisations sociales présente des spécificités : les travailleurs indépendants et les salariés d’employeurs publics et parapublics.

B.   La nécessité de prévoir des mesures d’adaptation pour les travailleurs indépendants et les fonctionnaires

● Les travailleurs indépendants n’acquittent pas de cotisations salariales ni de cotisations chômage, ce qui ne leur permet pas de bénéficier des mesures prévues pour les salariés du secteur privé.

Pour compenser la hausse de 1,7 point de la CSG pour cette catégorie d’actifs, l’article 7 précité prévoit de renforcer les exonérations dégressives des cotisations famille et maladie dont ils bénéficient déjà :

– en permettant une réduction de 2,15 points supplémentaires de la cotisation famille (correspondant au 1,7 point de hausse de CSG, du fait des différences d’assiette) ;

– en permettant une réduction de 1,5 point supplémentaire de la cotisation maladie, pour les indépendants dont le revenu annuel est inférieur à 43 000 euros.

La réforme proposée devrait assurer un gain de pouvoir d’achat pour les travailleurs indépendants dont le revenu est inférieur au plafond de 43 000 euros
– soit 75 % des travailleurs indépendants –, le gain étant maximal pour un revenu d’activité de l’ordre de deux SMIC et devenant dégressif ensuite. En revanche, au‑delà de ce seuil de revenu, la réforme serait neutre en termes de pouvoir d’achat, la hausse de CSG étant simplement compensée par la baisse de cotisations famille.

Au total, environ 180 millions d’euros de pouvoir d’achat supplémentaire devraient être distribués aux travailleurs indépendants.

● S’agissant des fonctionnaires et des salariés des employeurs publics et parapublics, comme vu supra, ils ne sont en principe pas assujettis à la cotisation chômage au taux de 2,4 %, comme les salariés du secteur privé – sauf si leur employeur a la faculté d’opter pour le régime Unédic et l’a effectivement exercée.

Par ailleurs, s’agissant de la fonction publique, les agents sous statut (fonctionnaires, magistrats, militaires, ouvriers de l’État) ne sont pas assujettis à la cotisation salariale maladie, à quelques exceptions près ([205]). Tel n’est pas le cas des agents contractuels, qui sont affiliés au régime général et donc soumis à la cotisation maladie ([206]) ; ils représentent environ 18 % des fonctionnaires.

De ce fait, les salariés des employeurs publics et parapublics se trouveront soumis à la hausse de 1,7 point de CSG, mais ne pourront pas bénéficier des mesures prévues d’allégement de cotisations salariales, à l’exception de ceux dont l’employeur a opté pour le régime d’assurance chômage de l’Unédic, et de ceux assujettis à la cotisation maladie de 0,75 %.

III.   Le droit proposé

● Le présent article vise à supprimer la CES à laquelle sont assujettis les fonctionnaires et salariés du secteur public et parapublic, de façon cohérente avec la suppression du paiement des cotisations d’assurance chômage acquittées par les salariés du secteur privé.

L’évaluation préalable relève également que le transfert de la collecte de la CES aux URSSAF aurait pu poser des difficultés de recouvrement, compte tenu des règles particulières applicables à la CES en termes d’assiette et de critères d’exonération ; elle conclut ainsi que le risque entourant la bascule du recouvrement de la CES aux URSSAF au 1er janvier 2018 invite également à supprimer la CES dans le cadre de la compensation de la hausse de CSG – même si l’on peut se demander si les spécificités de la CES étaient d’une complexité telle qu’elles auraient empêché sa collecte.

● Pour ce faire, la section 2 du chapitre III du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail, comprenant les articles L. 5423-26 à L. 542332 définissant les redevables, l’assiette et le taux de la CES, est abrogée ( du I).

Il en va de même pour la loi du 4 novembre 1982 précitée qui a institué la CES (III).

Par coordination, la référence à la CES, mentionnée au 4° de l’article L. 5312-7 du code du travail parmi les recettes de la section « Solidarité » de Pôle emploi, est supprimée ( du I) : ne figure plus, au titre des recettes de cette section, que la contribution de l’État permettant d’en assurer l’équilibre, au regard des dépenses versées au titre des allocations et aides.

Le II du présent article supprime également par coordination le 2° ter de l’article 83 du CGI, qui prévoit la déductibilité de la CES du revenu imposable des personnes assujetties – de la même façon que sont déductibles du revenu imposable les cotisations de sécurité sociale (1° de l’article 83) et les cotisations chômage (2° bis de l’article 83).

Enfin, le du I procède à la clarification des compétences de Pôle emploi, en complétant l’article L. 5312-1 qui énumère les différentes allocations de solidarité dont il assure le service. Pour ce faire, le 1° du I reprend des dispositions de l’article L. 5423-30-1 du code du travail, qui liste les allocations financées par la contribution exceptionnelle de solidarité ([207]).

Outre l’allocation de solidarité spécifique et les allocations versées aux personnes relevant du statut des intermittents du spectacle, qui figurent d’ores et déjà dans l’article L. 5312-1, sont insérés les sommes restant dues au titre de l’allocation équivalent retraite, les sommes restant dues au titre de la prime forfaitaire pour reprise d’activité (ces deux prestations étant toutes deux en extinction), ainsi que l’aide prévue au II de l’article 136 de la loi de finances pour 1997 ([208]).

La suppression de la CES s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2018 (IV), soit la date à compter de laquelle s’applique la hausse de 1,7 point de CSG.

● Parallèlement, la suppression de la CES se traduit par la hausse des crédits budgétaires inscrits au sein de la mission Travail et emploi du présent projet de loi de finances, à hauteur du produit attendu de la CES.

Les dépenses au titre du régime de solidarité d’indemnisation du chômage seront entièrement financées par les crédits budgétaires du programme 102 Accès et retour à l’emploi, à hauteur de 2,462 milliards d’euros, alors que la subvention d’équilibre prévue pour l’État dans le projet de loi de finances pour 2017 s’élevait à 1,333 milliard d’euros.

Il convient néanmoins de souligner que le montant prévisionnel des dépenses au titre du régime de solidarité est en diminution, avec 2,462 milliards d’euros inscrits en projet de loi de finances pour 2018, contre 2,806 milliards d’euros figurant en projet de loi de finances pour 2017, ce qui résulte d’une diminution, à la fois constatée et prévisionnelle, du nombre d’allocataires de l’ASS.

IV.   L’impact de la mesure

A.   la suppression de la CES : une compensation partielle de la hausse de CSG pour au moins 4,4 millions de fonctionnaires

La suppression de la CES constitue la première étape de la compensation de la hausse de la CSG pour les salariés qui ne bénéficient pas des allégements de cotisations salariales prévus par l’article 7 précité du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

● Comme vu supra, cette mesure concerne tous les salariés des employeurs du secteur public et parapublic qui ne relèvent pas de la cotisation d’assurance chômage de l’Unédic. Elle ne bénéficie toutefois qu’aux salariés qui s’acquittent effectivement de la CES, dont le revenu mensuel net est supérieur à 1 467 euros.

Sur la base des informations disponibles, on peut évaluer à au moins 4,4 millions le nombre de bénéficiaires de la présente mesure, soit les effectifs de la fonction publique d’État, territoriale et hospitalière (environ 5,5 millions) dont sont retranchés les 1,1 million de personnes exonérées de CES du fait de leur niveau de revenu.

Le nombre des autres bénéficiaires de la présente mesure, qu’ils soient employés par des entreprises publiques, ou encore par La Poste ou les chambres de commerce et d’industrie, n’est pas connu.

Il n’est donc pas possible de déterminer le gain moyen résultant de la mesure proposée, puisque l’on ignore le nombre total de bénéficiaires.

● La suppression de la CES ne compense que de façon partielle la hausse de 1,7 point de la CSG pour les personnes se trouvant dans son champ :

– du fait de son taux de 1 % ;

– du fait de son assiette, qui est plus étroite que celle de la CSG.

En effet, l’assiette de la CES est la rémunération nette totale des salariés, dont sont notamment déduites les cotisations de retraite (soit, généralement, pour les fonctionnaires, une cotisation principale au taux de 10,29 % portant sur le traitement indiciaire et la nouvelle bonification indiciaire, et une cotisation de retraite complémentaire, dont l’assiette et le taux varient selon les cas) et la cotisation maladie, le cas échéant ; or l’assiette de la CSG est celle des cotisations sociales, soit la rémunération brute, minorée d’une déduction forfaitaire de 1,75 % au titre des frais professionnels.

– du fait qu’une partie des salariés relevant de la CES, et non de la cotisation d’assurance chômage de 2,4 %, n’acquittent pas la contribution en pratique, du fait du niveau modeste de leurs revenus.

Le tableau ci-dessous retrace l’évolution mensuelle des prélèvements pesant sur les rémunérations des personnels relevant de la CES et non assujettis à la cotisation maladie, compte tenu de la hausse de la CSG :

Évolution mensuelle des prélèvements résultant de la hausse de CSG
et de la suppression de la CES, en fonction du niveau de revenu net mensuel,
avant les autres mesures de compensation

Source : commission des finances.

● Pour apprécier le niveau de compensation de la hausse de 1,7 point de CSG, il convient également de déterminer si les personnes concernées par la suppression de la CES sont ou non assujetties à la cotisation maladie. Dans les faits, quatre grandes catégories de cas peuvent se présenter, qui sont représentés de façon schématique dans le tableau ci-après :

 

Cas

Assujettissement à la cotisation maladie

Assujettissement à la CES

Total des baisses de cotisations résultant de l’article 7 du PLFSS 2018 et du présent article

Reste à compenser sur la hausse de CSG

Fonctionnaires titulaires aux revenus inférieurs à 1 467 euros/mois

Non

Non

0

1,7 %

Fonctionnaires titulaires aux revenus supérieurs à 1 467 euros/mois

Non

Oui

1 % de CES

0,7 %

Agents contractuels de la fonction publique, ou salariés d’une entreprise relevant de la CES, dont les revenus sont inférieurs à 1 467 euros/mois

Oui

Non

0,75 % de cotisation maladie

0,95 %

Agents contractuels de la fonction publique, ou salariés d’une entreprise relevant de la CES, aux revenus supérieurs à 1 467 euros/mois

Oui

Oui

1 % de CES + 0,75 % de cotisation maladie

Epsilon

Note de lecture : par souci de simplicité, il est considéré qu’un point de CES = un point de CSG= un point de cotisation maladie ; ce qui n’est pas exact, puisque l’assiette de la CSG est nettement plus large que celle de la CES, mais moins large que celle de la cotisation maladie (du fait de la déduction forfaitaire de 1,75 % sur l’assiette de la CSG au titre des frais professionnels).

Dans les faits, si les agents publics contractuels, soumis à la cotisation maladie et acquittant effectivement la CES, ne verraient pas leur rémunération évoluer du fait de la hausse de 1,7 point de CSG, les fonctionnaires titulaires dont la rémunération est inférieure à 1 467 euros subiraient, en l’absence d’autres mesures de compensation, une diminution de revenu égale à la hausse de la CSG, soit 1,67 % de leur salaire brut ([209]).

B.   Les autres mesures de compensation prévues pour les fonctionnaires, destinées à neutraliser les effets de la hausse de CSG

Le Gouvernement a annoncé que la hausse de 1,7 point de CSG serait neutralisée pour les agents publics, ce qui signifie que la réforme proposée ne devrait pas occasionner de diminution de leur revenu, mais qu’elle ne leur offrirait pas de gain de pouvoir d’achat, à la différence des salariés du secteur privé et des travailleurs indépendants dont le revenu est inférieur à 43 000 euros annuels.

Selon les données figurant dans l’évaluation préalable de l’article 38 du présent projet de loi de finances, portant sur la déductibilité du 1,7 point de CSG de l’assiette de l’impôt sur le revenu, les recettes supplémentaires issues de la hausse de CSG se répartissent comme suit :

VENTILATION DES RECETTES SUPPLÉMENTAIRES
ISSUES DE LA HAUSSE DE 1,7 POINT DE CSG EN 2018

(en milliards d’euros)

Nature des revenus

Montant de recettes supplémentaires de CSG

Revenus d’activité

16,1

Dont actifs privés

11

Dont actifs public

3

Dont travailleurs indépendants

2,1

Revenus de remplacement

4,5

Revenus du capital

2,2

Jeux

0,1

Total

22,9

Source : évaluation préalable de l’article 38 du présent projet de loi de finances.

La hausse de 1,7 point de CSG se traduit par un prélèvement supplémentaire de 3 milliards d’euros pour les personnels des fonctions publiques d’État, territoriale et hospitalière (soit un montant moyen de l’ordre de 545 euros).

De façon schématique, alors que la suppression de la CES représente un coût de 1,4 milliard d’euros, la neutralisation de l’effet de la hausse de 1,7 point de CSG suppose de prévoir une enveloppe de l’ordre de 1,6 milliard d’euros pour les fonctionnaires.

1.   Le versement de primes pour les agents publics civils et militaires, représentant un montant évalué à 1,6 milliard d’euros

La compensation de la hausse de la CSG pour les fonctionnaires d’État, territoriaux et hospitaliers devrait prendre la forme de primes.

● Selon les informations transmises par le Gouvernement, serait ainsi versée « une indemnité compensatoire qui couvrira le différentiel constaté pour chaque agent, de manière à assurer une compensation intégrale. »

Afin de « permettre une mise en place rapide de l’indemnité, compte tenu de la multiplicité des cas particuliers, une règle de calcul uniforme pour tous les agents, quel que soit leur statut, sera retenue. Elle consiste à calculer le manque à gagner résultant de la hausse de CSG, déduction faite, le cas échéant, de la CES et de la cotisation maladie effectivement dues sur cette même rémunération (montant qui sera nul pour les agents exonérés ou non soumis à ces cotisations), en intégrant le " retour CSG-CRDS " ».

L’indemnité versée serait ainsi égale à 1,67 % de la rémunération globale brute de l’agent perçue en 2017 (soit le montant égal à la hausse de 1,7 point de CSG, compte tenu de la déduction forfaitaire de 1,75 % pour frais professionnels), dont seraient déduites, le cas échéant, la CES versée en 2017 et la cotisation maladie versée en 2017. Le montant obtenu serait alors multiplié par un coefficient de 1,1053, afin de neutraliser les effets de l’assujettissement de cette prime à la CSG au taux de 9,2 % et à la CRDS de 0,5 % (le coefficient serait ainsi égal à).

Exemple simplifié 1 : un fonctionnaire prend ses fonctions au 1er janvier 2017 ; sa rémunération brute est de 1 585 euros, et sa rémunération nette de 1 301,8 euros, en 2017.

Rémunération nette = (1 585  7,5 % de CSG  0,5 % de CRDS  10 % de cotisations retraite) = 1 301,80 euros

En janvier 2018, sa rémunération nette sera calculée de la façon suivante :

Rémunération nette = (1 585  9,2 % de CSG  0,5 % de CRDS  10 % de cotisations retraite) + prime compensatrice [(1 585 × 0,0167 × 1,1053)  9,2 % de CSG  0,5 % de CRDS]

Rémunération nette = 1 275,3 + (29,25  2,79) = 1 301,80 euros

● Cette indemnité, dont le montant serait figé dans le temps, serait toutefois « réactualisée début 2019 sur la base de la rémunération perçue en 2018, afin d’intégrer les évolutions statutaires les plus récentes ». Le Gouvernement indique qu’il n’était en effet pas possible, pour une mise en œuvre en janvier 2018, de prendre en compte la dernière situation de l’agent sans un retraitement qui aurait reporté le versement de l’indemnité.

De ce fait, un agent dont la rémunération augmentera au cours de l’année 2017, entre 2017 et 2018, ou au-delà, sous l’effet d’un avancement d’échelon ou de grade, par exemple, percevra une prime calculée sur la base de sa rémunération antérieure – de 2017 en 2018, et de 2018 en 2019 et les années suivantes –, qui sera moins élevée ; la compensation de la hausse de la CSG ne sera pas intégrale dans ce cas.

Le Gouvernement indique que « l’indemnité tiendra compte des situations de vie particulières (congés maladie, temps partiel) ».

● Enfin, est précisé qu’« afin de ne pas dégrader l’attractivité de la fonction publique, il a été décidé d’étendre le bénéfice d’une prime calculée de manière plus forfaitaire aux nouveaux entrants. », c’est-à-dire aux agents publics entrant en fonction après le 1er janvier 2018 – ainsi que ceux réintégrés (soit les agents éloignés du service et ne percevant pas de rémunération en leur qualité d’agent public au 31 décembre 2017).

Pour ces agents, la compensation serait « calculée de manière forfaitaire, par application d’un pourcentage de 0,76 % à la rémunération brute assujettie à la CSG correspondant au premier mois de leur prise en charge. Ce pourcentage de 0,76 % correspond au différentiel entre la hausse de CSG et le taux de la CES de 1 % (que ces agents n’auront jamais à acquitter) » – ce taux prenant en compte l’assiette de la CSG (compte tenu de la déduction forfaitaire de 1,75 %) et du « retour CSG-CRDS ».

Pour les agents « nouveaux entrants » qui auraient été exonérés de CES (si elle avait été maintenue), compte tenu de leur niveau de traitement, la compensation prévue conduira à ce que leur rémunération nette soit moins élevée que celle des agents occupant les mêmes emplois et entrés en fonction avant le 1er janvier 2018, ce qui pourrait susciter des incompréhensions.

Exemple simplifié 2 : un salarié au même salaire brut que celui de l’exemple précédent prend ses fonctions au 1er février 2018. Sa rémunération brute est de 1 585 euros, et sa rémunération nette sera la suivante :

Rémunération nette = (1 585  9,2 % de CSG  0,5 % de CRDS  10 % de cotisations retraite) + prime compensatrice [(1 585 × 0,0076 × 1,1053)  9,2 % de CSG  0,5 % de CRDS]

Rémunération nette =1 275,3 + (13,31  1,27) = 1 287,3 euros

Sa rémunération sera donc inférieure à celle du fonctionnaire entré en fonctions un an avant lui, et dont la rémunération nette s’élèvera à 1 301,8 euros en février 2018.

Ce mode de calcul spécifique de la prime est justifiée, selon le Gouvernement, par le fait qu’il n’est pas possible d’adopter le même mode de calcul pour les « nouveaux arrivants » que pour les fonctionnaires déjà en poste, puisque la compensation de ces derniers est calculée sur les rémunérations 2017 et 2018, mode de calcul qui ne peut être appliqué aux arrivants ultérieurs, car cela conduirait à leur verser une prime nulle. Par ailleurs, le Gouvernement souligne qu’il serait impossible de reconstituer si le nouvel agent aurait payé la CES ou non, dès lors que cette contribution n’existe plus, et que son mode de calcul était très complexe ; il n’est donc pas apparu « opportun ni faisable en pratique de faire perdurer ces difficultés en maintenant une « simulation » de la CES qui aurait été due, d’autant que l’indice seuil pouvait évoluer dans le temps ».

Seraient exclus du bénéfice de cette prime les agents actuellement redevables de la cotisation salariale du régime général d’assurance maladie, qui bénéficieront de la suppression de la cotisation maladie de 0,75 %.

● Pour 2018, le coût de cette indemnité est estimé à 1,6 milliard d’euros pour les trois versants de la fonction publique, dont 700 millions d’euros au titre de la fonction publique de l’État et de l’ordre de 900 millions d’euros au titre de la fonction publique territoriale et hospitalière.

● Se pose la question des salariés d’employeurs du secteur public et parapublic, qui ne sont pas fonctionnaires d’État, hospitaliers ou territoriaux, mais qui se trouvent dans le champ de la CES – par exemple des salariés de La Poste ou de chambres de commerce et d’industrie.

Pour les salariés dont le niveau de revenus est inférieur au seuil d’assujettissement à la CES (soit 1 467 euros), la hausse de 1,7 point de CSG ne sera pas compensée par la suppression de la CES, mais seulement par la suppression de la cotisation maladie. Ils ne bénéficieront pas du dispositif d’indemnités compensatrices présenté supra, et, en l’absence de toute autre mesure, la réforme se traduirait pour eux par une diminution de leur revenu net d’environ 1 %. Les salariés redevables de la CES, quant à eux, ne bénéficieraient pas d’un gain de pouvoir d’achat, mais d’une neutralisation de la hausse de CSG, comme les fonctionnaires.

Les éléments de réponse du Gouvernement sur le nombre de salariés concernés et les mesures envisagées se singularisent par un degré de précision relatif : « conformément aux engagements du Gouvernement, les salariés du secteur public seront également compensés de la hausse de la CSG, par des baisses de cotisations ou à défaut par des mesures salariales. Les situations étant assez diverses, les modalités précises de compensation, et de financement le cas échéant, sont en cours de définition pour chaque régime ».

2.   Les modalités de financement de ces mesures de compensation, pour l’État, ainsi que pour les collectivités territoriales et les hôpitaux

● Selon les informations fournies par le Gouvernement, s’agissant de la fonction publique d’État, un amendement au présent projet de loi de finances devrait être déposé pour assurer le financement de ces indemnités compensatrices, en prenant en compte également les économies associées au report des revalorisations qui étaient prévues en 2018 dans le cadre du protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR).

● S’agissant de la fonction publique territoriale et hospitalière, la charge résultant du versement de l’indemnité pour les employeurs sera compensée. Est indiqué que « cette compensation doit s’effectuer de manière globale et non à hauteur du montant indemnitaire réel payé par chaque employeur ». En effet, elle doit « prendre la forme d’une réduction du taux de la cotisation patronale du régime spécial d’assurance maladie des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers ».

Par un communiqué de presse du ministre de l’action et des comptes publics publié le 10 novembre, le Gouvernement précise que pour les collectivités locales, le montant total de l’indemnité à verser aux agents à compter de janvier 2018 est estimé à 530 millions d’euros par an, tandis qu’il est estimé à 320 millions d’euros par an pour les employeurs hospitaliers, soit un total de 850 millions d’euros par an.

Il indique qu’« alors qu’il n’y était pas juridiquement contraint, comme dans le cas d’un transfert de compétences aux collectivités locales, le Gouvernement  a décidé la compensation intégrale de cette indemnité », qui « prendra la forme d’une baisse de 1,62 point du taux de cotisation employeur maladie sur les fonctionnaires de la fonction publique territoriale et hospitalière, qui passera ainsi de 11,5 % à 9,88 % ».

Le décret prévoyant la baisse de ce taux de cotisation a été transmis le 10 novembre au Conseil national d’évaluation des normes (CNEN), pour un examen lors sa prochaine séance le 30 novembre prochain, en même temps que l’indemnité compensatrice. Le communiqué précise enfin que « les différents textes législatifs et règlementaires seront publiés de manière à permettre une mise en œuvre de la mesure en janvier 2018, dès l’entrée en vigueur de la hausse de CSG ».

● Le tableau ci-après récapitule les différentes mesures d’allégement de cotisations et de versement de primes prévues dans le cadre de la bascule des cotisations salariales vers la CSG :

EFFETS DES MESURES D’ALLÉGEMENTS DE COTISATIONS et de versement de primes
SELON LES CATÉGORIES D’ACTIFS

(en milliards d’euros)

Mesures

2018

2019

Baisses de cotisations pour les salariés du secteur privé

14,1

18,5

Suppression de la cotisation maladie

4,7

4,7

Baisse puis suppression de la cotisation chômage

9,4

13,8

Gain de pouvoir d’achat pour les salariés du secteur privé

3,1

7,5

Mesures de compensation pour les travailleurs indépendants

2,1

2,1

Gain de pouvoir d’achat pour les travailleurs indépendants

0,18

0,18

Mesures de compensation pour les employés du secteur public et parapublic

3

3

Dont suppression de la CES

1,4

1,4

Dont primes

1,6

1,6

Total des mesures d’allégements de cotisations et de versement de primes

19,2

23,6

Recettes totales de CSG

22,5

nc

Note de lecture : le montant des recettes supplémentaires de CSG en 2018 est estimé à 22,5 milliards d’euros dans l’évaluation préalable de l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, soit 400 millions d’euros de moins que dans l’évaluation préalable de l’article 38 du projet de loi de finances.

Le montant des recettes supplémentaires de CSG en 2019, et leur ventilation par catégories de revenus, ne sont pas connus, en l’absence de réponses du Gouvernement aux questions du Rapporteur général ; il en va de même pour l’évolution du coût des mesures de compensation pour les travailleurs indépendants et les fonctionnaires en 2019, ainsi que pour le montant du gain pour les travailleurs indépendants ; par défaut, sont repris les mêmes montants qu’en 2018.

Le gain de pouvoir d’achat pour les salariés du secteur privé est établi en déduisant du montant des baisses de cotisations celui des recettes supplémentaires de CSG, estimé à 11 milliards d’euros pour 2018 dans l’évaluation préalable de l’article 38 du présent projet de loi. Ce même montant de 11 milliards d’euros est repris pour le calcul du gain en 2019, en l’absence d’éléments plus précis.

Source : commission des finances, sur la base des données figurant dans l’évaluation préalable de l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

*

*     *

La commission est saisie de l’amendement II-CF464 du président Éric Woerth.

M. le président Éric Woerth. Cet amendement tend à maintenir la contribution exceptionnelle de solidarité payée par les fonctionnaires, que le Gouvernement souhaite supprimer dans le cadre de la compensation de l’augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG). Si les fonctionnaires doivent bénéficier d’une compensation, il ne nous paraît pas judicieux que celle-ci se traduise par la suppression de cette contribution, qui marque la solidarité des fonctionnaires, non exposés au risque du chômage, avec les salariés du privé. Ce serait envoyer un mauvais message. Je laisse au Gouvernement le soin de trouver une autre compensation, qui pourrait consister en une augmentation des primes, pourvu que cette augmentation soit compensée aux collectivités locales.

M. le Rapporteur général. Je ne vois pas beaucoup d’alternatives à ce dispositif de compensation en faveur des fonctionnaires. Du reste, votre amendement n’en propose pas. Avis défavorable, donc.

M. Jean-Louis Bourlanges. Monsieur le président, il serait tout de même intéressant que vous nous indiquiez une piste alternative. Votre réquisitoire est formidable, mais votre plaidoyer insuffisant.

M. le président Éric Woerth. J’ai indiqué une piste, mais je considère qu’il appartient au Gouvernement de choisir une alternative ; je n’étais pas favorable, au demeurant, à l’augmentation de la CSG. En réalité, la suppression de cette contribution de 1 % ne suffit pas, si bien que le Gouvernement a annoncé qu’il la compléterait par un versement supplémentaire sous la forme d’une prime. Je propose donc que celle-ci soit augmentée de manière à compenser entièrement la hausse de la CSG. J’ai précisé, du reste, que, s’agissant des fonctionnaires territoriaux, l’État devrait évidemment, comme s’y est engagé le ministre, compenser le surcoût que représenterait cette mesure pour les collectivités territoriales.

Mme Cendra Motin. Cela coûterait très cher !

M. le président Éric Woerth. Oui, mais la suppression de la cotisation de solidarité coûte cher également. Or, celle-ci a un sens, puisqu’elle associe le secteur public, qui ne prend pas de risque, au risque pris par le secteur privé.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-CF617 de Mme Valérie Rabault.

M. Jean-Louis Bricout. Une fois n’est pas coutume non plus, il me semble qu’il y a un problème d’insincérité. Force est en effet de constater que l’on ne retrouve pas dans le budget l’engagement qu’avait pris le Gouvernement de compenser la hausse de 1,7 point de la CSG pour les agents publics. Cette mesure, qui coûtera 3 milliards d’euros à ces derniers, doit être compensée en partie par la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité et en partie, puisque celle-ci ne rapporte que 1,4 milliard, par une prime. Or, à la lecture de la mission Crédits non répartis, on s’aperçoit que l’État n’a provisionné que 290,5 millions d’euros pour 2018. Le compte n’y est donc pas. C’est pourquoi nous proposons, par cet amendement, que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er septembre prochain, un rapport faisant le point sur les mesures de compensation pour les agents publics.

M. le Rapporteur général. Votre demande de rapport me semble justifiée. Mais puisque, dans un autre amendement, M. Pellois demande un rapport identique pour des agents du secteur parapublic, notamment ceux des chambres d’agriculture, je vous propose de vous rallier tous deux à mon amendement II‑CF710, par lequel je propose que le rapport porte sur les agents du secteur public et parapublic, qui sont dans la même situation.

M. Jean-Louis Bricout. J’accepte de retirer mon amendement, dès lors que nous pourrons obtenir un rapport plus complet.

L’amendement est retiré.

La commission examine l’amendement II-CF710 du Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Il s’agit précisément, comme je viens de l’indiquer, de demander au Gouvernement de remettre au Parlement, avant le 30 juin 2018, un rapport évaluant les mesures prises pour compenser la hausse de la CSG pour les agents des secteurs public et parapublic.

La commission adopte l’amendement (amendement n° II-1512).

Puis elle adopte l’article 47 modifié.

*

*     *

Après l’article 47

La commission examine l’amendement II-CF197 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement a pour objet de clarifier le régime fiscal applicable aux installations d’énergies marines renouvelables, en cohérence avec la volonté du législateur, exprimée dans la loi du 20 juin 2016 pour l’économie bleue, de rattacher le régime de ces installations à la branche des assurances maritimes, en étendant l’exonération de taxe sur les conventions d’assurance dont bénéficient les véhicules maritimes aux installations d’énergies marines renouvelables. Il s’agit donc de réparer ce qui est probablement une omission.

M. le Rapporteur général. Le problème soulevé est virtuel, car les premiers parcs devraient être fonctionnels entre 2019 et 2021. En outre, la filière bénéficie de nombreux dispositifs de soutien public : tarifs d’achat garantis ou soutien financier par les programmes d’investissements d’avenir (PIA). Avis défavorable.

M. le président Éric Woerth. Une éolienne de mer a été inaugurée récemment, nous dit Mme El Haïry.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-CF365 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement tend à accorder l’exonération de taxe sur les véhicules de société (TVS) pendant une période de huit trimestres aux véhicules fonctionnant au superéthanol-E85, comme c’est le cas pour les véhicules fonctionnant au gaz naturel pour véhicules (GNV) ou au gaz de pétrole liquéfié (GPL). Je précise, avant que le Rapporteur général ne le souligne, que la commission des finances a déjà examiné des amendements analogues.

M. le Rapporteur général. Cet amendement a en effet été examiné, et rejeté, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2018. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement II-CF200 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement, en revanche, n’a jamais, je crois, été présenté. Il a la même inspiration que celui que j’ai défendu lors de la discussion de la première partie et qui concernait la non-déduction de la TVA pour les véhicules affectés à des écoles de conduite. En l’espèce, il s’agit d’exonérer de TVS ces véhicules utilisés exclusivement pour l’enseignement à la conduite car ils représentent, pour les centres de conduite, des biens professionnels, des investissements productifs essentiels. Ces centres se trouvent en concurrence avec ceux de pays voisins, notamment lorsqu’ils sont proches de la frontière, et il est important que nous les soutenions.

M. le Rapporteur général. On essaie de nous faire croire qu’une voiture de classe GT ou qu’une Formule 1 se conduit comme un monospace familial dès lors que, conduite sur un circuit, elle serait affectée à l’apprentissage de la conduite. Avis défavorable.

M. le président Éric Woerth. Je crois, monsieur le Rapporteur général, que vous avez une mauvaise compréhension du sujet. Il ne s’agit pas de Formule 1 ou d’anciennes Formule 1, mais de voitures utilisées dans le cadre de stages de conduite. Du point de vue fiscal, les circuits où elles sont utilisées sont traités de façon inégale selon leur localisation et la direction des impôts dont ils dépendent. Je peux me tromper, car je n’ai pas une connaissance particulière de ces circuits, mais je crois qu’il s’agit d’un véritable problème.

M. le Rapporteur général. Je précise que les véhicules en question ne sont pas « exclusivement affectés » à l’apprentissage de la conduite ; ils sont surtout affectés au pilotage sur circuit pour la recherche de sensations fortes. C’est parfaitement légitime, mais, de ce fait, ils ne relèvent pas exclusivement de l’enseignement. C’est pourquoi, madame Louwagie, si votre amendement était adopté, il n’aurait absolument pas pour effet d’exonérer les sociétés concernées.

M. le président Éric Woerth. Dans ce cas, je pense qu’il faudrait au moins demander au ministre de clarifier la doctrine de l’administration concernant le traitement de ces circuits. Je suis pour l’égalité de traitement.

Mme Véronique Louwagie. Il est vrai que les entreprises dont nous parlons n’enseignent pas forcément la conduite traditionnelle : il s’agit plutôt de perfectionnement ou d’enseignement de la conduite à caractère sportif ou de loisir. Ensuite, vous indiquez, monsieur le Rapporteur général, que le fait qu’il s’agisse d’une activité de loisir impliquerait la non-déduction de la TVA et l’application de la TVS. Or, beaucoup d’entreprises travaillent dans le domaine sportif ou le tourisme et peuvent bénéficier de la déduction de TVA au titre des investissements productifs nécessaires à la réalisation de leur activité.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement II-CF74 de M. Marc Le Fur.

Mme Véronique Louwagie. Il est défendu.

M. le Rapporteur général. Je doute que les auteurs de l’amendement aient vraiment envie de supprimer une taxe qui rapporte environ 125 millions d’euros par an au régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire de la protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF25 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement vise à supprimer la taxe sur les farines, mais je m’interroge : n’a-t-il pas déjà été adopté par notre commission ? Chacun s’accorde à constater que cette taxe a perdu tout lien avec les motivations ayant présidé à sa création, qu’elle est inéquitable car elle ne pèse pas sur les farines d’importation, et que sa collecte coûte démesurément cher par rapport à son produit.

M. le Rapporteur général. L’Assemblée nationale a rejeté un amendement similaire pourtant adopté par notre commission, saisie pour avis du PLFSS pour 2018. Je vais donc me ranger à la position prise en séance publique et donner un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement II-CF525 de M. Hervé Pellois.

M. Hervé Pellois. L’adoption de l’amendement II-CF710 du Rapporteur général a rendu le mien sans objet. Je le retire donc.

L’amendement est retiré.

*

*     *

Article 48
Introduction d’un jour de carence pour la prise en charge
des congés de maladie des personnels du secteur public

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de rétablir une journée de carence pour la prise en charge des congés de maladie des agents publics civils et militaires.

Dernières modifications législatives intervenues

– Article 105 de la loi de finances pour 2012, ayant institué un jour de carence pour les agents de la fonction publique ;

– Article 126 de la loi de finances pour 2014 ayant abrogé ce jour de carence.

Principaux amendements adoptés par la commission des finances

La commission a adopté cet article sans modification.

Le présent article a pour objet de rétablir un jour de carence pour la prise en charge des congés de maladie des agents publics civils et militaires.

Selon les termes de l’évaluation préalable, le présent article vise à :

– améliorer la qualité et l’efficience du service public en réduisant les absences pour raison de santé de courte durée dans les administrations publiques ;

– et à faire converger les règles applicables aux secteurs public et privé en matière de prise en charge des congés de maladie.

I.   L’État du droit

A.   l’instauration d’un jour de carence pour les personnels du secteur public en 2012

L’article 105 de la loi de finances initiale pour 2012 a instauré un jour de carence pour les agents publics civils et militaires, ainsi que les agents non titulaires de droit public ([210]).

Le jour de carence signifie que les agents, en cas de congé maladie, ne perçoivent pas leur rémunération au titre du premier jour de ce congé.

Le délai de carence ne s’appliquait pas dans les cas suivants :

– congé de longue maladie ;

– congé de longue durée ;

– incapacité professionnelle résultant, notamment, de blessures ou de maladie contractées ou aggravées du fait des activités de service ([211]) ;

– accident survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions.

Cette disposition a été présentée par amendement à l’initiative du Gouvernement, dès lors sans évaluation préalable de la mesure ([212]). Selon l’exposé sommaire dudit amendement, il s’agissait d’une « mesure d’équité entre secteur privé et secteur public ». Celle-ci s’inscrivait dans un contexte d’extension à un quatrième jour de carence s’agissant du régime applicable au secteur privé, qui représentait environ 200 millions d’euros d’économies pour l’assurance maladie. Cette dernière mesure avait été envisagée puis abandonnée lors des discussions relatives au projet de loi de financement de la sécurité sociale ([213]).

Par souci d’égalité de traitement et d’équité, un sous-amendement du Gouvernement a étendu le dispositif du jour de carence aux salariés bénéficiant d’un dispositif de maintien de salaire prévu par un statut et non des indemnités journalières d’un régime de sécurité sociale ([214]).

La disposition relative au jour de carence dans la fonction publique est entrée en vigueur le 1er janvier 2012 et a été mise en application par une circulaire du 24 février 2012 ([215]). Celle-ci a précisé que le délai de carence ne s’appliquait pas non plus :

– au congé de grave maladie ;

– au congé de longue durée pour maladie ;

– au congé de maternité, ni pendant les congés supplémentaires liés à un état pathologique résultant soit de la grossesse, soit des suites de couches, à l’instar du dispositif en vigueur dans le régime général de la sécurité sociale ;

– au congé de paternité ;

– et au congé d’adoption.

Le jour de carence a été mis en œuvre en 2012 et 2013, avant d’être abrogé à compter du 1er janvier 2014.

B.   la suppression du jour de carence et le renforcement du contrôle des arrêts maladie dans la fonction publique en 2014

1.   La suppression du jour de carence

L’article 126 de la loi de finances pour 2014 a abrogé le jour de carence dans la fonction publique ([216]).

Selon l’évaluation préalable de l’article précité, l’instauration d’un jour de carence appliqué aux fonctionnaires a permis d’économiser 164,3 millions d’euros en 2012 pour l’ensemble de la fonction publique ([217]).

Économies générées par le jour de carence

(en millions d’euros)

Fonction publique

Économies

État

60,8

Hospitalière

63,5

Territoriale

40

Total

164,3

Source : évaluation préalable du projet de loi de finances pour 2014.

Pour la fonction publique de l’État, il a été possible d’assurer le suivi de la mise en place du jour de carence à partir des fichiers mensuels de paye des agents de l’État, représentant 75 % des effectifs de ce versant de la fonction publique. Selon les éléments transmis par le Gouvernement, il apparaît que 22 % des agents ont fait l’objet d’une retenue pour journée de carence en 2012, soit 500 000 agents pour un total de 755 000 journées de carence comptabilisées ([218]).

Toutefois, l’exposé des motifs dudit article précise que « l’instauration du délai de carence n’a pas eu les effets escomptés et n’a pas permis de réduire significativement l’absentéisme dans la fonction publique ». Celui-ci cite l’enquête emploi 2011-2012 de l’INSEE, qui relève que la proportion d’agents en arrêt de courte durée est passée de 1,2 % à 1 % dans la fonction publique d’État, de 0,8 % à 0,7 % dans la fonction publique hospitalière et est restée stable à 1,1 % dans la fonction publique territoriale.

Par ailleurs, l’exposé des motifs contestait l’élément d’équité entre le secteur public et le secteur privé lié à l’instauration d’un jour de carence dans la fonction publique. Celui-ci fait référence à un rapport de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES), qui relève que 64 % des salariés et 75 % de ceux relevant d’entreprises de plus de 250 salariés bénéficient d’une couverture complémentaire aux prestations du régime de base obligatoire prévoyant, sur la base de l’article L. 911‑1 du code de la sécurité sociale, la neutralisation du délai de carence ([219]).

2.   Le renforcement du contrôle des arrêts maladie dans la fonction publique

Par ailleurs, la loi de finances initiale pour 2014 a prévu diverses mesures de renforcement du contrôle des arrêts maladie dans la fonction publique.

a.   La prolongation de l’expérimentation transférant le contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires aux services de l’assurance maladie

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 a initié une expérimentation visant à transférer le contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires aux caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) et aux services du contrôle médical placés auprès d’elles ([220]).

L’expérimentation s’applique aux arrêts prescrits pour une durée inférieure à six mois consécutifs et n’ouvrant pas droit au régime des congés de longue maladie ou de longue durée. Elle porte à la fois sur le contrôle médical des arrêts de travail et le contrôle des heures de sortie autorisées.

L’expérimentation est applicable aux agents de la fonction publique de l’État, territoriale et hospitalière, à compter de la signature d’une convention entre le directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et les ministres chargés de la sécurité sociale, de la fonction publique et les collectivités territoriales concernées.

Les conventions-cadres dressant la liste des administrations participant à l’expérimentation, les engagements réciproques et les modalités de suivi et d’évaluation ont été signées le 26 mars 2010 pour la fonction publique de l’État et le 25 juin 2010 pour les deux autres ([221]).

L’expérimentation devait durer initialement deux ans, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 a prorogé cette durée à quatre ans ([222]). La loi de finances initiale pour 2014 l’a de nouveau prorogée jusqu’au 31 décembre 2015, avant que la loi de finances initiale pour 2016 ne la prolonge jusqu’au 31 décembre 2018 ([223]).

Une évaluation est prévue six mois avant la fin de l’expérimentation et son éventuelle généralisation ([224]). Celle-ci vise à remplacer le dispositif applicable consistant à faire procéder par un médecin agréé à des contre-visites médicales d’agents en situation d’arrêt maladie de moins de six mois.

Au 31 août 2017, 69 183 fonctionnaires de l’État étaient concernés par l’expérimentation pour un total de 348 204 arrêts de maladie saisis dans le logiciel dédié au contrôle. Les services des caisses primaires d’assurance maladie avaient réalisé 17 810 contrôles, soit un taux de contrôle de 5,1 %. Ces contrôles ont permis la constatation que 5,7 % des arrêts n’étaient pas médicalement justifiés le jour du contrôle, ce qui n’exclut pas qu’ils l’aient été au moment de leur prescription.

b.   La mise en place de dispositifs de contrôle des arrêts maladie, alignés sur le régime général

La loi de finances initiale pour 2014 a instauré un dispositif de sanction des arrêts abusifs de travail, aligné sur la procédure de contrôle applicable dans le régime général.

Depuis le 7 mai 2012, les agents de la fonction publique de l’État sont soumis à l’obligation de transmettre leur certificat médical dans un délai de quarante-huit heures, à l’instar des dispositions applicables dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière ([225]). Toutefois, ce dispositif de transmission des arrêts de travail dans un délai de quarante-huit heures ne s’applique pas aux personnels militaires, qui bénéficient de dispositions statutaires spécifiques relatives à l’octroi des congés maladie.

Cependant, cette disposition de l’État était dépourvue de sanction en cas de non-respect. En conséquence, la loi de finances initiale pour 2014 a instauré une réduction de 50 % de la rémunération versée au fonctionnaire au titre de son congé de maladie, dès lors qu’il ne satisfait pas, deux fois sur une période de vingt-quatre mois, à l’obligation de transmission de son avis d’arrêt de travail à l’administration dans un délai de quarante-huit heures.

Procédure de sanction applicable

La procédure de sanction est désormais la suivante (1) :

– envoi par le fonctionnaire dans les quarante-huit heures de l’arrêt de travail à l’administration dont il relève, indiquant la durée probable de l’incapacité de travail ;

– en cas de retard dans l’envoi de l’arrêt de travail, l’administration informe le fonctionnaire du retard constaté et de la sanction à laquelle il s’expose en cas de nouvel envoi tardif dans les vingt-quatre mois suivants la date de prescription de l’arrêt considéré ;

– en cas de nouvel envoi tardif, dans ce délai de vingt-quatre mois, sauf si le fonctionnaire est hospitalisé ou s’il justifie de l’impossibilité d’envoyer son arrêt de travail en temps utile, réduction de 50 % du montant de la rémunération afférente à la période écoulée entre la date de prescription de l’arrêt de travail et la date d’envoi de l’avis d’arrêt de travail.

(1)    Évaluation préalable au projet de loi de finances pour 2014.

Cette mesure consistait à aligner le régime applicable aux fonctionnaires, qui n’était jusqu’alors assorti d’aucune sanction, sur le régime prévu par le code de la sécurité sociale pour les salariés du secteur privé.

L’évaluation préalable du présent article a évalué l’effet du renforcement des sanctions à 7,7 millions d’euros d’économies pour l’ensemble de la fonction publique.

Économies gÉnÉrÉes par le renforcement des sanctions

(en millions d’euros)

Fonction publique

Économies

État

3,2

Hospitalière

1,6

Territoriale

2,9

Total

7,7

Source : évaluation préalable du projet de loi de finances pour 2014.

Selon les éléments transmis par le Gouvernement de janvier à août 2017, 11,6 agents ont été sanctionnés en moyenne par mois représentant 16,1 arrêts maladie en moyenne par agent et pour un montant mensuel moyen par agent sanctionné de 215 euros, dans le champ de la paie assurée par la DGFiP.

II.   Le contexte Économique et budgÉtaire

A.   La situation applicable dans le secteur privÉ

1.   Les trois jours de carence applicables dans le secteur privé

Aux termes du 1° de l’article R. 323-1 du code de la sécurité sociale, les salariés du secteur privé sont soumis à trois jours de carence, avant de pouvoir bénéficier d’une prise en charge par l’assurance maladie, via le versement des indemnités journalières de maladie.

Selon l’évaluation du présent article, les salariés bénéficient d’un système de couverture à trois étages :

– une couverture de base, sous la forme d’un revenu de substitution versée par l’assurance maladie, via les indemnités journalières, représentant 50 % du salaire (dans la limite d’un plafond et sous réserve d’une durée minimale de cotisation antérieure) à partir du quatrième jour d’arrêt maladie ;

– une couverture complémentaire obligatoire versée par l’employeur, complétant à partir du huitième jour d’arrêt les indemnités journalières de base des salariés afin d’atteindre 90 % puis 66 % du salaire de base, sous condition d’ancienneté et de durée des arrêts ([226]) ;

– une couverture complémentaire conventionnelle ou facultative d’entreprise, prévue par convention ou accord de branche, visant à la prise en charge totale du salaire (100 % du salaire dans 98 % des cas).

2.   La prise en charge de la rémunération en cas de maladie

Les salariés du privé et les agents non titulaires de la fonction publique sont placés dans une situation différente des agents titulaires de la fonction publique vis-à-vis de la prise en charge de la rémunération en cas de maladie.

Ainsi, les agents titulaires de la fonction publique bénéficient d’une prise en charge de leur revenu par leur employeur, au titre d’une logique d’auto-assurance. En revanche, les salariés et les agents non titulaires de la fonction publique perçoivent un revenu de substitution de l’assurance maladie, via les indemnités journalières.

Cette différence de prise en charge explique la fixation d’un taux de cotisation employeur plus faible pour les agents titulaires et l’absence de cotisation agent au titre de l’assurance maladie.

Prise en charge de la rémunération en cas de maladie

Agent

1er jour

2e jour/3e jour

4e jour et suivants

Taux de cotisation employeur

Assurance maladie

Taux de cotisation salarié / agent

Fonctionnaire FPE sans délai de carence

Employeur

Employeur

Employeur

9,70

Fonctionnaire FPE avec délai de carence

Pas de rémunération

Employeur

Employeur

9,70

Fonctionnaire FPT/FPH sans délai de carence

Employeur

Employeur

Employeur

11,50

Fonctionnaire FPT/FPH avec délai de carence

Pas de rémunération

Employeur

Employeur

11,50

Agent non titulaire 3FP sans délai de carence

Employeur*

Employeur*

Assurance maladie

12,89

0,75

Agent non titulaire 3FP avec délai de carence

Pas de rémunération

Employeur*

Assurance maladie

12,89

0,75

Agent du privé sans jour de carence

Pas de rémunération

Pas de rémunération

Assurance maladie

12,89

0,75

Agent du privé avec jour de carence

Complémentaire

Complémentaire

Assurance maladie

12,89

0,75

FPE : fonction publique d’État.

FPT : fonction publique territoriale.

FPH : fonction publique hospitalière.

* Versement direct ou remboursement de l’assurance maladie par l’employeur.

Source : évaluation préalable du projet de loi de finances pour 2014.

Toutefois, cette différence devrait s’atténuer avec l’adoption du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, qui prévoit en son article 7 la suppression de la cotisation salarié maladie de 0,75 %.

3.   La proportion de salariés couverts par des conventions garantissant le maintien partiel ou total de la rémunération au cours des trois jours de carence

Il apparaît que les deux tiers des salariés du secteur privé bénéficient d’une couverture partielle ou totale des trois premiers jours d’arrêt via les mécanismes de couverture complémentaire obligatoire ou conventionnelle ([227]).

Toutefois, cette couverture complémentaire concerne des publics très hétérogènes. Elle apparaît relativement inégalitaire dans la mesure où elle est plus répandue dans les grandes entreprises et dans les secteurs à haute valeur ajoutée.

Ainsi, les établissements du commerce et de la construction apparaissent moins susceptibles de couvrir leurs salariés que les établissements de l’industrie et des autres activités de services. L’évaluation préalable du présent article souligne que les salariés du secteur privé ne bénéficiant pas d’une prise en charge des jours de carence relèvent principalement des petites et moyennes entreprises.

B.   les DiffÉrences de taux d’absentÉisme

Il apparaît qu’il n’existe pas de différence fondamentale entre le taux d’absentéisme au sein de la fonction publique et dans le secteur privé.

1.   Un taux d’absentéisme semblable dans les secteurs public et privé

Les rares études sur le sujet ont souligné le niveau équivalent du taux d’absentéisme pour raisons de santé entre le secteur public et le secteur privé. En 2012, le taux d’absentéisme pour raisons de santé s’établissait à 3,8 % pour la fonction publique et 3,6 % pour le secteur privé.

Taux d’absentÉisme pour raisons de santÉ

(en pourcentage)

Secteurs

2011

2012

2006-2012

Fonction publique de l’État

2,9

2,9

2,9

Enseignants

1,9

2,3

2,3

Hors enseignants

3,2

3,1

3,1

Fonction publique hospitalière

3,5

4,0

4,2

Fonction publique territoriale

4,5

4,5

4,4

Ensemble de la fonction publique

3,7

3,8

3,8

Secteur privé

3,8

3,6

3,5

Ensemble

3,7

3,7

3,6

Champ : salariés résidant en France métropolitaine (sont exclus les apprentis, les stagiaires, les emplois aidés, les salariés des particuliers employeurs et les salariés travaillant habituellement à domicile).

Source : INSEE, enquête emploi 2006 à 2012, calculs DARES-DGAFP.

En 2015, la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) a publié une étude sur le lien entre absence pour raisons de santé et les conditions de travail dans la fonction publique et le secteur privé ([228]). Celle-ci relève la proportion d’agents de la fonction publique et de salariés dans le secteur privé ayant eu au moins un arrêt maladie dans l’année.

occurrence des arrêts maladie

(en pourcentage)

Secteurs

Au moins un arrêt maladie
dans l’année

Arrêts maladie de moins
de 8 jours

Fonction publique de l’État

32

56

Fonction publique territoriale

35

49

Fonction publique hospitalière

33

46

Secteur privé

28

46

Source : DGAFP.

Si les agents de la fonction publique sont plus souvent en arrêt maladie au cours de l’année, cette étude montre que leur absence est de plus courte durée que dans le secteur privé. En effet, les agents de la fonction publique de l’État et territoriale sont en proportion plus nombreux à avoir des arrêts maladie inférieurs à huit jours par rapport aux salariés du secteur privé.

En outre, cette étude souligne que pour sept salariés sur dix absents au moins une fois, dans la fonction publique comme dans le secteur privé, il ne s’agit que d’un seul arrêt maladie dans l’année.

L’INSEE a publié récemment une étude sur le jour de carence dans la fonction publique de l’État et constate que le niveau de prévalence des absences pour raisons de santé est plus élevé dans le secteur privé que dans la fonction publique de l’État ([229]). La prévalence des absences pour raisons de santé représente la part des agents qui sont absents pour raison de santé au moins une partie de la semaine étudiée.

prévalences des absences pour raison de santé

(en pourcentage)

Année

Fonction publique de l’État

Secteur privé

2006

2,61

3,25

2007

2,77

3,18

2008

2,71

3,20

2009

2,82

3,51

2010

2,84

3,45

2011

2,79

3,61

2012

2,75

3,41

2013

2,78

3,58

2014

2,91

3,68

Source : INSEE.

Toutefois, cette différence de prévalence résulte notamment des caractéristiques observées des individus et de leur poste. En effet, une étude de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) relève que « la probabilité qu’un salarié s’absente pour maladie dépend de variables sociodémographiques comme l’âge, le sexe, la composition du foyer, la catégorie socioprofessionnelle et le secteur d’activité dans lequel il est employé » ([230]). Ainsi, les salariés en contrat à durée indéterminé (CDI) avec plus d’un an d’ancienneté et les fonctionnaires sont relativement plus souvent absents que les personnes en contrat à durée déterminée (CDD) ou récemment embauchées en CDI (respectivement 3,7 et 3,9 %, contre 2,6 %). Par ailleurs, l’absentéisme augmente fortement avec le niveau d’exposition aux contraintes physiques et psychosociales. Les salariés non exposés aux contraintes psychosociales ont un taux d’absentéisme pour raisons de santé de 2,5 %, contre 7,5 % pour les salariés exposés à trois contraintes psychosociales ou plus. Ces résultats amènent donc à relativiser les taux d’absentéisme bruts et les éventuelles comparaisons entre secteurs d’activité.

2.   Les différences de taux d’absentéisme au sein de la fonction publique

Le nombre moyen de jours d’absence pour maladie ordinaire apparaît différent pour les trois versants de la fonction publique.

nombre moyen de jours d’absence pour maladie ordinaire

Fonction publique

Nombre moyen de jours d’absence

État (2003)

7

Hospitalière (2008)

9,4

Territoriale (2011)

11,9

Source : enquête sur l’aménagement et la réduction du temps de travail en 2003, DGAFP, département des études et statistiques ; bilans sociaux 2011, DGCL ; enquête « Bilan social 2008 », DGOS.

La Cour des comptes a confirmé ce constat, en relevant que l’absentéisme affectait de manière différenciée les versants de la fonction publique :

– 3,5 jours d’absence pour maladies ordinaires pour les personnels hospitaliers médicaux ;

– 7,1 jours pour les agents de l’État ;

– 12,1 jours pour les agents des collectivités territoriales ;

– et 12,3 jours pour les personnels hospitaliers non médicaux ([231]).

C.   les Études relatives aux effets des dÉlais de carence

Selon les éléments transmis au Parlement, le Gouvernement précise qu’aucune étude n’a été publiée à ce jour pour analyser l’impact global de la suppression de la journée de carence dans la fonction publique.

La seule étude disponible est celle d’un assureur privé portant sur la fonction publique territoriale. Celle-ci révèle que les arrêts de travail d’une journée pour maladie ordinaire auraient diminué de 43 % dans la fonction publique territoriale en 2012, dont une baisse de 18 % pour les absences de deux jours et de 12 % pour celles de trois jours ([232]). Cependant, cette étude relève que les absences de plus de quinze jours auraient continué d’augmenter dans le même temps, entraînant une poursuite de l’augmentation du taux d’absence.

La direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) a publié une étude en janvier 2015 relative à l’effet du délai de carence sur le recours aux arrêts maladie des salariés du secteur privé ([233]).

recours aux arrêts maladie selon la prise en charge du délai de carence

Prise en charge

Probabilité

Intensité

Sinistralité globale

Salariés ayant eu au moins un arrêt maladie au cours des 12 derniers mois

Durée cumulée des arrêts maladie par salarié ayant eu au moins un arrêt

(moyenne)

Durée cumulée des arrêts maladie par salarié

(moyenne)

Non couverts

28,7 %

21,3 jours

6,1 jours

Couverts

29,2 %

14,5 jours

4,2 jours

Ensemble

29 %

16,9 jours

4,9 jours

Écart

0,5 point de %

– 6,8 jours

– 1,9 jour

Source : DREES.

Celle-ci a conclu que « les salariés couverts durant le délai de carence n’ont pas de probabilité plus élevée d’avoir un arrêt dans l’année, mais ont des durées totales d’arrêt maladie significativement plus courtes ».

Le phénomène d’une durée d’arrêt maladie plus longue pour les salariés couverts par une prise en charge du délai de carence peut avoir deux explications :

– un effet de présentéisme, incitant les salariés malades non couverts à rester en entreprise dans un premier temps, avant de devoir s’arrêter plus longtemps en raison d’une aggravation de l’état de santé ;

– un effet d’aléa moral ex-post, conduisant les salariés à avoir une préférence pour des arrêts longs partiellement indemnisés à des arrêts courts non indemnisés.

Par ailleurs, l’effet de présentéisme peut avoir un effet pervers de contagion et de transmission des maladies aux collègues du salarié malade.

III.   le dispositif proposÉ

A.   le principe du jour de carence

1.   Le principe du jour de carence posé comme l’amorce d’une harmonisation avec le secteur privé

Le I du présent article prévoit instaure un jour de carence pour les agents publics civils et militaires en congé de maladie.

Cela signifie qu’ils ne bénéficient plus du maintien de leur traitement ou de leur rémunération, ou du versement de prestations en espèces au cours de leur premier jour de congé de maladie.

L’évaluation préalable du présent article associe la mesure à l’amorce d’une harmonisation avec le cadre juridique applicable aux salariés du secteur privé.

Le présent article ne comporte pas de mesure visant les salariés bénéficiant d’un dispositif de maintien de salaire prévu par un statut et non des indemnités journalières d’un régime de sécurité sociale. Cette mesure avait été intégrée par un sous-amendement du Gouvernement lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012 ayant instauré un jour de carence au sein de la fonction publique. Celle-ci semblait viser les salariés relevant d’un régime spécial.

L’évaluation préalable du présent article cite le rapport de la Cour des comptes sur les finances locales pour 2016 ([234]) et l’étude de 2015 de l’assureur Sofaxis ([235]) pour illustrer l’efficacité de l’instauration d’un jour de carence en 2012 dans la réduction de l’absentéisme de courte durée pour raison de santé. Le premier rapport a constaté une stabilité des arrêts de courte durée entre 2012 et 2013, avant une remontée en 2014. Le second rapport a identifié une diminution du nombre d’arrêts maladie ordinaires courts entre 2011 et 2013, sur un panel de collectivités.

2.   Le refus d’une poursuite de l’expérimentation du contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires par les caisses primaires d’assurance maladie

L’évaluation préalable du présent article rejette l’idée d’une poursuite de l’expérimentation du contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires par les caisses primaires d’assurance maladie.

Ce refus est fondé sur le rapport conjoint de l’inspection générale de l’administration (IGA), de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l’inspection générale des finances (IGF) remis en décembre 2015 ([236]). Celui-ci a relevé un « défaut de cadrage, conjugué à l’absence de diagnostic existant » de ladite expérimentation. Celle-ci a d’ailleurs été recentrée sur le contrôle des congés maladie ordinaires d’une durée de quarante-cinq jours à six mois, soit un périmètre éloigné des enjeux de lutte contre les absences de courte et très courte durée.

Le rapport a conclu que la généralisation de l’expérimentation était « inenvisageable et sa poursuite en l’état ne saurait constituer une option de bonne administration ».

B.   les exceptions au principe du jour de carence

Le II du présent article prévoit quatre exceptions au principe du jour de carence :

– lorsque la maladie provient d’une invalidité, prévue aux articles L. 27 et L. 35 du code des pensions civiles et militaires de retraite, « ou d’un accident survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions » ;

– « au deuxième congé de maladie, lorsque la reprise du travail entre deux congés de maladie accordés au titre de la même cause n’a pas excédé 48 heures » ;

– « au congé pour invalidité temporaire imputable au service, au congé de longue maladie, au congé de longue durée et au congé de grave maladie » ;

– « aux congés de maladie accordés postérieurement à un premier congé de maladie au titre d’une même affection de longue durée », pour une période de trois ans à compter de ce premier congé de maladie.

Il apparaît que les exceptions au principe du jour de carence sont plus nombreuses que celles prévues lors de la loi de finances pour 2012, qui ne visait que :

–les cas de congé de longue maladie ;

– les congés de longue durée ;

– les maladies provenant d’une invalidité prévue à l’article L. 27 du code précité ;

– ou d’un accident survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions.

Toutefois, la circulaire d’application du 24 février 2012 précitée avait prévu que le périmètre des exceptions au principe du jour de carence concernerait le congé de grave maladie, le congé de paternité, le congé d’adoption et le congé de maternité, ainsi que les congés supplémentaires liés à un état pathologique résultant soit de la grossesse, soit des suites de couches. La même solution devrait vraisemblablement être retenue lors de la transcription réglementaire du présent article.

IV.   L’impact budgÉtaire et Économique attendu

À titre de rappel, la masse salariale s’élève à environ 85 milliards d’euros pour le périmètre de l’État (hors contributions au compte d’affectation spéciale Pensions), 10 milliards d’euros pour les opérateurs de l’État, 70 milliards d’euros pour la fonction publique territoriale et 55 milliards d’euros pour la fonction publique hospitalière.

La Cour des comptes a préconisé à différentes reprises le rétablissement d’une journée de carence au sein de la fonction publique ([237]). En juin dernier, elle évaluait la restauration du jour de carence à 0,4 milliard d’euros d’économies.

L’évaluation préalable du présent article prévoit une économie budgétaire de 270 millions d’euros, toutes administrations publiques confondues.

Économies gÉnÉrÉes par le jour de carence

(en millions d’euros)

Fonction publique

Économies

PLF 2014

Secteur d’administration

Économies

PLF 2018

État

60,8

État

108

Hospitalière

63,5

Sécurité sociale

50

Territoriale

40

Collectivités territoriales

100

Opérateurs de droit public

13

Total

164,3

Total

270

Source : évaluations préalables du présent article et du projet de loi de finances pour 2014.

Cette estimation est à rapprocher des économies constatées en 2012 et transmises au Parlement lors de l’évaluation préalable de l’article 67 du projet de loi de finances pour 2014 prévoyant l’abrogation du jour de carence. Celles-ci s’élevaient à 164,3 millions d’euros pour l’ensemble de la fonction publique. À ce stade, le Gouvernement n’a pas précisé les éléments justifiant un tel écart avec les économies anticipées au titre de l’exercice 2018.

*

*     *

La commission se saisit de l’amendement II-CF413 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement vise à établir l’équité entre les salariés du secteur public et du secteur privé en instituant un deuxième jour de carence dans la fonction publique pour la prise en charge des congés de maladie.

Pour rapprocher la situation des fonctionnaires de celle des salariés du privé, le jour de carence dans la fonction publique avait été institué en 2011 ; il a été supprimé en 2013, et la Cour des comptes a constaté qu’aussitôt après cette suppression l’absentéisme de court terme a sensiblement augmenté.

Nous sommes tous préoccupés par la maîtrise de la dépense publique comme par l’équité, c’est pourquoi nous proposons ce rapprochement entre le régime du public et celui du privé.

M. le Rapporteur général. Vous n’êtes pas sans savoir, chère collègue, que les deux régimes ne sont pas véritablement comparables.

Les salariés du secteur privé sont soumis à trois jours de carence avant de pouvoir prétendre au versement par l’assurance maladie d’indemnités journalières (IJ). Toutefois, il apparaît que deux tiers d’entre eux bénéficient d’une couverture partielle ou totale des trois premiers jours d’arrêt via des mécanismes de couverture complémentaire obligatoire ou conventionnelle.

Le Gouvernement nous propose de rétablir un jour de carence pour l’ensemble des fonctionnaires, quand un tiers des salariés du privé sont soumis à trois jours de carence sans couverture d’aucune sorte. Cette mesure apparaît plus équitable et équilibrée que celle que vous souhaitez instaurer. Avis défavorable, donc.

M. le président Éric Woerth. La suppression de la contribution de solidarité de 1 % à laquelle sont assujettis les fonctionnaires, additionnée à la non-instauration du deuxième jour de carence, crée beaucoup de distorsions entre le secteur public et le secteur privé.

Mme Cendra Motin. Les deux choses n’ont rien à voir.

M. le président Éric Woerth. Si.

Mme Cendra Motin. Il ne s’agit pas d’aligner un régime sur un autre. Le statut des agents de la fonction publique est clair : ils ne sont pas assurés contre le chômage puisqu’ils bénéficient de la garantie de l’emploi.

Les deux systèmes de prise en compte de la maladie sont si éloignés qu’il serait vain de vouloir les comparer, singulièrement à cause de l’hétérogénéité de la prise en charge caractérisant le secteur privé et de l’aspect monolithique du régime applicable aux salariés du secteur public.

Cela ne doit pas nous dispenser de réfléchir à des mécanismes proches de la prévoyance, qui ne sont encore que facultatifs, mais cette tâche appartient au ministre de l’action et des comptes publics, qui est en pourparlers à ce sujet avec les organisations syndicales représentatives des fonctionnaires depuis l’été dernier.

La question du deuxième jour de carence renvoie au problème du micro-absentéisme dans la fonction publique, qui pèse à la fois sur les services, sur la qualité du service rendu aux usagers, ainsi que sur les personnes ayant à pallier ces absences. La question du mal-être au travail, cause de ce micro-absentéisme, que mettent en évidence toutes les études portant sur les relations humaines, ne doit pas être ignorée.

En tout état de cause, il ne me semble pas que l’ajout d’un, de deux ou de trois jours de carence supplémentaires soit de nature à améliorer la prise en charge globale des agents de la fonction publique.

M. le président Éric Woerth. Vous semblez estimer qu’un jour de carence est juste, mais pas deux...

Mme Cendra Motin. Lorsqu’il a été institué, c’était un jour et un seul ; pourquoi aller plus loin ?

M. Jean-Louis Bourlanges. Nous sommes confrontés à un réel problème. Le Rapporteur général a évoqué des dispositions conventionnelles et obligatoires, mais je serais curieux de savoir quelles sont les parts respectives du conventionnel et de l’obligatoire dans le secteur privé.

Trancher à la va-vite relèverait de la pure provocation. Si je m’exprimais comme le Michel Audiard des Tontons flingueurs, je dirais qu’il s’agit d’un « bourre-pif en pleine paix » ! Je ne crois pas qu’il revienne à cette commission, ce soir, d’ouvrir un débat susceptible de perturber fortement les relations entre les secteurs public et privé.

La question de l’égalité entre les deux catégories demeure posée, mais il s’agit d’un vaste programme !

M. le président Éric Woerth. Je vous le concède...

Mme Véronique Louwagie. L’article que nous sommes en train d’examiner étant justement celui qui rétablit le jour de carence, il me semble que nous sommes libres de notre expression et de nos propositions.

Mme Motin a considéré qu’il n’y avait pas lieu de comparer les deux régimes. Il ne s’agit effectivement pas de comparer pour comparer, mais nous sommes aussi là pour prendre position sur des questions d’inégalité et d’inéquité, car c’est dans ces termes que beaucoup de Français perçoivent ces différences de traitement. Nous devons donc essayer de rapprocher les systèmes de protection sociale et faire que chacun participe à leur financement de la même façon.

Comme le Rapporteur général l’a relevé, les salariés du privé sont déjà soumis à un régime variable en fonction des systèmes de protection complémentaire qui leur sont offerts. Notre amendement ne fait que proposer une mesure tendant à rapprocher les systèmes.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 48 sans modification.

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*     *

Après l’article 48

La commission est saisie de l’amendement II-CF670 de Mme Valérie Rabault.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement a trait à la Caisse d’assurance maladie des industries électriques et gazières (CAMIEG), organisme de sécurité sociale créé par le décret du 30 mars 2007. Alors qu’un grand nombre d’avantages fiscaux et sociaux sont conditionnés au respect d’un plafond de ressources exprimé en termes de revenu fiscal de référence, la modification de ce plafond résultant de l’adoption, depuis 2008, de plusieurs mesures relative à l’imposition sur le revenu a pu faire perdre à des contribuables le bénéfice de différents avantages, sans que leurs ressources aient nécessairement augmenté. Tel est le cas pour le régime complémentaire de la CAMIEG, dont les ayants droit peuvent bénéficier des prestations complémentaires de cette caisse tout en étant couverts par un autre régime d’assurance maladie, dès lors que leurs ressources sont inférieures à un certain seuil.

Nous sommes confrontés à la même mésaventure que celle que nous avons connue avec la taxe d’habitation. Nous avons déjà présenté cet amendement l’an passé ; l’engagement avait été pris d’y donner suite, mais cette promesse n’a pas été tenue.

M. le Rapporteur général. Vous avez tout à fait raison de soulever à nouveau ce problème, mais sa solution ne me paraît pas relever d’une disposition législative. Je vous invite donc à retirer l’amendement et à le redéposer en séance publique afin d’obtenir une réponse ferme du Gouvernement.

L’amendement est retiré.

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—  1  —

II. – AUTRES MESURES

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

Article 49
Suppression du fonds d’accompagnement de la réforme
du micro-bénéfice agricole

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, qui ont été examinés par la commission le jeudi 26 octobre 2017 matin.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Hervé Pellois et Mme Émilie Cariou, rapporteurs spéciaux) ([238]).

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*     *

Suivant l’avis favorable des rapporteurs spéciaux, la commission adopte l’article 49 rattaché, sans modification.

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Article additionnel après l’article 49
Rapport sur les modalités de financement de diverses aides agricoles

La commission examine l’amendement IICF107 de Mme Lise Magnier.

M. Antoine Herth. Cet amendement prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er février 2018, un rapport étudiant les modalités de financement des aides compensatoires de handicaps naturels (ICHN), des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) et des aides à la conversion en agriculture biologique, pour les années 2019 et 2020. Cet éclairage est indispensable, pour pouvoir préparer dans de bonnes conditions la nouvelle politique agricole commune qui sera mise en place en 2020.

Mme Émilie Cariou, rapporteure spéciale. Je suis favorable à cet amendement à condition qu’il soit rectifié. Il faudrait, en effet, prévoir un délai plus long pour la remise de ce rapport. La date du 1er juin 2018 serait plus adaptée.

La commission adopte l’amendement  II-CF107 ainsi rectifié (amendement n° II-135).

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Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

Article 50
Revalorisation de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère des conjoints et ex-conjoints survivants d’anciens membres des formations supplétives

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation, qui ont été examinés par la commission le mercredi 25 octobre 2017 matin.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Fabien Roussel, rapporteur spécial) ([239]).

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Suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission adopte l’article 50 rattaché, sans modification.

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Article 51
Alignement des pensions militaires d’invalidité au taux du grade

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation, qui ont été examinés par la commission le mercredi 25 octobre 2017 matin.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Fabien Roussel, rapporteur spécial) ([240]).

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Suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission adopte l’article 51 rattaché, sans modification.

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Cohésion des territoires

Article 52
Réforme des aides au logement et de la politique des loyers dans le parc social

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Cohésion des territoires, qui ont été examinés par la commission le vendredi 27 octobre 2017 matin.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans les rapports spéciaux relatifs à cette mission et annexé au présent rapport général (M. François Jolivet et M. Mohamed Laqhila, rapporteurs spéciaux) ([241]).

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La commission examine les amendements de suppression de l’article IICF150 de M. Marc Le Fur, II-CF160 de M. François Pupponi, II-CD24 de M. Guy Bricout, II-CD48 de Mme Mathilde Panot, II-CL23 de M. Stéphane Peu, II-CL51 de M. Jean-Louis Masson et IIDN6 de Thibault Bazin.

M. Marc Le Fur. Cet amendement vise à supprimer l’article 52 qui impose aux bailleurs sociaux d’absorber la baisse des aides personnalisées au logement (APL). Cela va mettre en péril des bailleurs sociaux déjà fragiles et mettre en cause des collectivités territoriales qui sont garantes des emprunts des bailleurs sociaux. De plus, cela va menacer les programmes d’investissement de construction, de réhabilitation et de mise aux normes.

M. François Pupponi. Je demande également la suppression de cet article notamment parce qu’il y a un problème de calendrier. La baisse de l’APL sera opérée par les caisses d’allocations familiales (CAF) au 1er janvier 2018, mais la mise en œuvre du sous-loyer par les bailleurs sera opérationnelle au mieux en juin 2018. Ainsi, pendant six mois, les allocataires vont perdre une partie des APL sans aucune baisse de loyer. Avez-vous anticipé ce problème ?

M. Éric Cocquerel. Samedi, il y a eu un rassemblement à Paris de tous les bailleurs sociaux et des associations. Une personne me disait que ce qui lui permettait de ne pas penser qu’il tombait dans la précarité était d’avoir sur lui un billet de 5 euros. Cela pour montrer la portée d’un chiffre qui, par ailleurs, ne fait qu’amorcer la baisse future des allocations logement.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. La réduction de loyer de solidarité est un prélèvement sur l’APL qui aurait dû être versé au locataire puisque l’article 52 définit des plafonds permettant de retirer des APL aux bailleurs qui les perçoivent. Il y aura de ce fait des locataires qui verront leur loyer baisser alors qu’ils ne touchent pas d’APL.

M. Thibault Bazin. La mesure de baisse des APL et des loyers prévue à l’article 52 souffre d’un manque de concertation. Les collectivités qui garantissent les prêts pourraient notamment se trouver responsables en cas de faillites de certains offices publics de l’habitat (OPH) et la production de logements neufs risque d’être divisée par deux. Nous proposons donc de revenir sur cette question quand le projet de loi sur le logement sera discuté.

M. Stéphane Peu. Les compensations envisagées et les financements alternatifs, en contrepartie de la baisse des APL, ne sont pas précisés dans cet article. Cette mesure aura un effet récessif sur l’économie : 12 milliards d’euros de moins sur le carnet de commandes des PME du bâtiment et des artisans.

M. Guy Bricout. Je me joins à cette proposition. Le dispositif du Gouvernement déstabiliserait totalement le secteur du logement social et serait contre-productif tant d’un point de vue social qu’économique.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Concernant la réduction de loyer de solidarité, c’est en réalité un prélèvement forfaitaire sur l’APL qui est prévu. Le loyer ne sera jamais modifié. Je rappelle que les baux sont enregistrés à la conservation des hypothèques pour les conventions APL. En revanche, je reconnais qu’il existe un temps de latence pour que les CAF et les bailleurs puissent modifier leurs systèmes d’information. Les CAF ne devraient verser les APL modifiées qu’à compter d’avril 2018, et il y aura un rappel d’indus des montants que les bailleurs auront perçus à tort.

Sur la mise en œuvre des garanties d’emprunt, je crois pouvoir dire que cela n’est jamais arrivé. Par contre, les municipalités peuvent être amenées par des subventions à participer au plan de redressement des organismes.

Enfin, les chantiers en cours ne vont pas s’arrêter du jour au lendemain, nous sommes ici sur des temps longs, sur l’équilibre d’opérations à trois ans. Comme l’a précisé le ministre, nous nous donnons trois années pour parvenir à la montée en charge de la réforme et préserver un équilibre d’exploitation qui permette aux bailleurs sociaux de mieux supporter les effets de bord de cette réforme. Je rappelle que la baisse de la dépense publique reste un impératif. Dans le secteur marchand, cela ne pourra être qu’un choc d’offre qui fasse baisser les prix. L’article 52 est une invitation à négocier pour les bailleurs. Le budget du logement augmente tous les ans et cela ne fonctionne pas. Il faut arriver à transformer l’économie du monde HLM.

M. Jean-Louis Masson. À l’échelle européenne, on constate que partout les constructions sont insuffisantes et les prix trop élevés. L’inflation des prix dépasse la progression des revenus et de plus en plus d’Européens sont écrasés par les prix du logement. 11,3 % des ménages de l’Union Européenne consacrent plus de 40 % de leurs revenus à leur logement ; 5,7 % seulement des ménages en France. La France a produit 100 000 logements sociaux en 2016, c’est-à-dire 25 % de la production européenne. Ces politiques n’ont donc pas été aussi inefficaces que vous le prétendez.

M. Éric Coquerel. Le vrai problème est celui de la rareté du logement qui fait que le taux d’effort des familles ne cesse d’augmenter. Il faudrait construire un million de logements sociaux en cinq ans.

Mme Sylvia Pinel. Si les APL augmentent depuis des décennies, comme l’affirme le Rapporteur général, c’est bien en raison de la faiblesse des revenus des allocataires. On ne peut pas considérer que ces aides ne sont pas utiles. Sur la question des logements du parc privé, nous n’avons aucune réponse de la part du Gouvernement. On parle de l’effet inflationniste des APL dans le seul secteur social, alors que les loyers y sont encadrés. Il y aura un impact certain de votre réforme sur la construction et la rénovation. Quant à la mutualisation, qui avait été encouragée par le précédent gouvernement, je suis surprise des montants faibles que vous y consacrez. Je suis donc pour la suppression de cet article.

M. Stéphane Peu. Si l’article 52 est adopté, des organismes annuleront des opérations de construction dès 2018. Toute la production de logements neufs va en pâtir ainsi que les opérations d’isolation thermique. Quand vous avez 85 % de vos fonds propres qui disparaissent, c’est la double peine pour les locataires HLM : moins de pouvoir d’achat et moins d’entretien du patrimoine.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je précise que notre pays est le seul à ne pas avoir tiré les conséquences de la monoparentalité dans les foyers. Nous avons toujours les mêmes dispositifs, prévus pour deux salaires. Sur la péréquation du Fonds national des aides à la pierre (FNAP), dans le projet de loi, il est envisagé d’essayer de valoriser les actifs des organismes de logements sociaux avec la réalisation d’un système autoporté.

La commission rejette les amendements de suppression de l’article 52.

Puis, elle examine les amendements II-CF151 de M. Marc Le Fur, IICF161 de M. François Pupponi, II-CL50 de M. Jean-Louis Masson et II-DN7 de M. Thibault Bazin.

M. François Pupponi. La suppression de l’APL accession est complètement contra‑cyclique. Aujourd’hui, 120 000 personnes peuvent acheter un premier logement en libérant du logement social ou privé. En supprimant l’APL accession, ils ne pourront plus être solvabilisés. Plutôt que de financer l’APL accession, on va financer l’APL classique car on ne leur permettra pas de sortir du logement social et donc cela continue de peser sur le financement de l’État.

M. Jean-Louis Masson. Effectivement, 70 % des moins de trente ans sont éligibles à l’APL accession. Sans pouvoir accéder à la propriété, ils resteront dans le logement social.

M. Thibault Bazin. Dans l’évaluation préalable de l’article, il est écrit qu’on supprime un mécanisme peu efficace et peu attractif. Cet argument n’est pas tenable. Tout ce qui contribue à l’accès à la propriété doit être maintenu et même étoffé. C’est peu d’argent qui représente un réel effet de levier.

M. Stéphane Peu. L’APL accession est un outil précieux pour fluidifier la mobilité dans le parc HLM, je suis opposé à sa suppression.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. La question de l’APL accession fait partie des négociations globales toujours en cours. À ce stade, mon avis est donc défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF151, II-CF161, II-CL50 et II-DN7 puis rejette les amendements II-CF152 de M. Marc Le Fur et II-DN8 de M. Thibault Bazin portant sur le même sujet.

La commission examine ensuite les amendements identiques IICF154 de M. Marc Le Fur et II-DN10 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Je propose que la mutualisation financière entre les bailleurs sociaux soit établie sur la base d’une péréquation équilibrée entre les territoires. Tous les bailleurs n’ont pas des fonds propres importants, il existe des disparités entre eux. Il est donc important que la péréquation ne se fasse pas au sein du périmètre des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF154 et II-DN10.

Puis elle examine l’amendement II-CF162 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Cet amendement vise à supprimer les modifications apportées par l’article 52 à l’application du supplément de loyer de solidarité. Appliquer le surloyer dès le premier euro de dépassement va à l’encontre de la mixité sociale et risque de faire partir les classes moyennes vers le parc locatif privé alors que dans certains territoires il est hors de portée de cette population.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. J’ai bien compris vos inquiétudes mais mon avis est défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF162 de M. François Pupponi.

Puis elle examine l’amendement II-CL52 de M. Jean-Louis Masson. Après l’avis défavorable du rapporteur spécial, l’amendement IICL52 est rejeté.

La commission examine ensuite l’amendement II-CF163 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Si l’article 52 s’applique aussi aux résidences étudiantes, les étudiants verront leur loyer baisser et verseront moins au gestionnaire de leurs résidences, gestionnaire qui, lui, doit payer un loyer au propriétaire et qui ne verra pas son loyer baisser. Le modèle économique des résidences étudiantes ne fonctionnerait plus. Je propose donc que les deux loyers baissent : celui payé par l’étudiant au gestionnaire et celui du gestionnaire au propriétaire.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Je suis en désaccord avec votre lecture de l’article 52, vos inquiétudes n’ont pas lieu d’être. Le ministre l’a encore rappelé précédemment.

La commission rejette l’amendement II-CF163.

Puis elle examine les amendements identiques II-CF153 de M. Marc Le Fur et IIDN9 de Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Cet amendement vise à laisser plus de temps aux bailleurs sociaux pour s’accorder sur le système de mutualisation en reportant ce délai de discussion d’avril à juillet.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-CF153 et II-DN9.

Puis elle adopte l’article 52 sans modification.

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Article additionnel après l’article 52
Garantie d’emprunt des collectivités territoriales aux organismes
de foncier solidaire

La commission examine les amendements II-CF168, II-CF167 et II-CF164 de M. François Pupponi qui fixent respectivement le reste à charge de loyer à 20 %, 15 % et 10 % du montant du loyer acquitté par les locataires.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Mon avis est défavorable concernant ces trois amendements. Cependant, il ouvre un débat important.

La commission rejette les amendements II-CF168, II-CF167 et II-CF164.

Puis elle examine l’amendement II-CD25 de M. Guy Bricout.

M. Guy Bricout. Cet amendement vise à autoriser les collectivités territoriales à apporter leur garantie d’emprunt aux organismes de foncier solidaire (OFS) qui acquièrent des terrains en vue d’y faire réaliser des opérations en bail réel solidaire. Ceci afin de permettre à ces OFS d’avoir accès aux prêts de long terme de la Caisse des dépôts.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement II-CD25 (amendement  II-351).

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Article additionnel après l’article 52
Augmentation du financement du nouveau programme national
de renouvellement urbain (NPNRU)

Puis elle examine l’amendement II-CF156 de M. Mohamed Laqhila.

M. Mohamed Laqhila, rapporteur spécial des crédits Politique du territoire. Cet amendement propose de porter le montant du financement du nouveau programme de renouvellement urbain dans la loi de 2014 de programmation pour la ville ([242]) de 6 milliards d’euros à 10 milliards d’euros, conformément aux engagements du Président de la République, et de confirmer l’engagement de l’État au financement du programme à hauteur d’un milliard d’euros.

J’espère que cet amendement, identique dans sa rédaction à celui déposé par la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques Mme Annaïg Le Meur, avec laquelle j’ai conduit plusieurs auditions, saura rassurer les députés qui ont déposé des amendements de crédits en vue d’abonder les moyens de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

La commission adopte l’amendement II-CF156 (amendement  II-352).

Puis elle examine l’amendement II-CF166 défendu par M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Cet amendement propose que soit créé, à compter de 2018, un prélèvement sur le fonds de roulement des organismes HLM non vertueux, au profit du FNAP, dont l’objet est le financement des opérations de développement, d’amélioration et de démolition du parc de logements locatifs sociaux appartenant aux organismes d’habitations à loyer modéré.

M. François Jolivet, rapporteur spécial. Cette idée est aussi au cœur des négociations entre les organismes HLM et le gouvernement. Pour l’instant, c’est un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF166.

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Direction de l’action du Gouvernement

Après l’article 52

Lors de sa réunion du lundi 6 novembre 2017 après-midi, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Direction de l’action du Gouvernement, la commission examine l’amendement II-CL96 de M. Ugo Bernalicis.

M. Alexis Corbière : Cet amendement est dans l’esprit du précédent rattaché à la mission Pouvoirs publics mais concerne particulièrement les missions du Défenseur des droits.

Mme Marie-Christine Dalloz, rapporteure spéciale. Vous demandez un rapport sur les moyens financiers et humains destinés aux autorités administratives indépendantes. J’ai anticipé votre demande, puisque j’ai demandé l’an dernier, en tant que membre de la commission des finances, un rapport à la Cour des comptes sur la politique salariale des autorités administratives indépendantes. Il devrait être très prochainement transmis. Ce sera une bonne base pour étudier les besoins des autorités administratives indépendantes. Avis défavorable sur votre amendement.

La commission rejette l’amendement II-CL96 de M. Ugo Bernalicis.

Puis, elle examine l’amendement II-CL97 de Mme Danièle Obono.

M. Alexis Corbière. Cet amendement porte sur la sécurité numérique. On compte cette année plus de 1 000 incidents informatiques qui concernent les différentes autorités françaises. Nous demandons donc un rapport qui permettrait d’apprécier l’adéquation du budget de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) pour une remise à niveau digne de notre rang dans le monde.

Mme Marie-Christine Dalloz, rapporteure spéciale. Vous demandez un rapport sur les risques en matière de cyberattaques. Je vous invite à vous reporter au dernier livre blanc sur la défense et la sécurité nationale qui y consacre de longs développements. Ce sont des sujets très sensibles. J’ai auditionné le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), et je pense qu’il y a des sujets qu’il faut éviter de mettre sur la place publique afin de ne pas justement inspirer des cyberattaques. Je vous invite également à consulter le site internet réalisé avec le concours de l’ANSSI pour accompagner les citoyens, les collectivités, les entreprises et associations face au risque numérique : « cybermalveillance.gouv.fr. ». Ce site est très bien fait et accessible. Avis défavorable sur votre amendement.

La commission rejette l’amendement II-CL97 de Mme Danièle Obono.

La commission examine l’amendement II-CL98 de M. Ugo Bernalicis.

M. Alexis Corbière. Il s’agit d’une demande de rapport sur les fonds spéciaux. Combien de dépenses indues dans ces fonds spéciaux qui représentent tout de même chaque année plus de 60 millions d’euros ? Nous estimons important d’avoir une étude exhaustive sur l’utilisation non régulée de ces fonds, sachant qu’il y a eu par le passé des pratiques assez peu tolérables.

Mme Marie-Christine Dalloz, rapporteure spéciale. Je pense qu’il ne revient pas au Parlement d’effectuer un contrôle d’opportunité sur l’utilisation des fonds spéciaux dès lors que les critères de recours aux fonds spéciaux sont bien remplis. Or, c’est justement le Parlement, via la commission de vérification des fonds spéciaux (CVFS), qui s’en assure. Elle dispose d’un droit d’accès à l’ensemble des pièces comptables liées à l’utilisation des fonds spéciaux et je fais confiance à la CVFS pour ce contrôle. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CL98 de M. Ugo Bernalicis.

 

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Écologie, développement et mobilité durables

Article 53
Réforme du dispositif d’exonérations de cotisations sociales pour les entreprises d’armement maritime

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables, pour la partie relative aux Affaires maritimes, crédits qui ont été examinés par la commission le mardi 31 octobre 2017 après-midi et soir.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Saïd Ahamada, rapporteur spécial) ([243]).

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Suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission adopte l’article 53 rattaché, sans modification.

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Article 54
Création d’une contribution des agences de l’eau au bénéfice d’opérateurs
de l’environnement

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables, pour la partie Paysage, eau et biodiversité  Prévention des risques  Expertise, information géographique et météorologie  Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables, crédits qui ont été examinés par la commission le mardi 31 octobre 2017 après-midi et soir.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Éric Coquerel, rapporteur spécial) ([244]).

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La commission examine l’amendement II-CF214 de suppression, présenté par M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel rapporteur spécial. Je rappelle que la politique de l’eau est un enjeu essentiel : 85 % des eaux et 92 % des cours d’eau sont pollués ; 2,8 millions de Français boivent de l’eau polluée. Nous avons même été condamnés par la Cour de justice de l’Union européenne. Avec cet article, les agences de l’eau seront l’unique organisme à participer au financement de l’Agence française pour la biodiversité – AFB – et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage – ONCFS – alors qu’à partir de 2019, un plafond mordant leur coûtera au minimum 136 millions d’euros par an. Les 700 millions d’euros thésaurisés par ces agences vont diminuer très vite, alors même que l’on élargit leurs attributions, notamment avec l’accompagnement des collectivités territoriales dans la mise en place de la compétence GEMAPI – gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations. Nous demandons donc la suppression de l’article 54 car la question de l’eau et de la biodiversité est essentielle.

La commission rejette l’amendement II-CF214, puis, malgré l’avis défavorable du rapporteur spécial, adopte l’article 54, sans modification.

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Après l’article 54

La commission examine les amendements II-CF216 et II-CF220 de M. Éric Coquerel, portant articles additionnels après l’article 54.

M. Éric Coquerel rapporteur spécial. L’amendement II-CF216 vise à ouvrir le débat, y compris avec les parlementaires de la majorité, sur la mise en danger d’opérateurs cruciaux pour la transition écologique, notamment Météo-France. Cet opérateur subit depuis 2012 une baisse conséquente de ses effectifs
– de 3 383 agents en 2012 à 3 020 en 2017 qui résulte de sa restructuration territoriale a conduit à la fermeture de 53 centres départementaux sur les 108 centres existants. La direction espérait une stabilisation des effectifs. Or, il est prévu une diminution à hauteur de 90 équivalents temps plein (ETP) par an sur le quinquennat, soit une baisse de plus de 350 agents jusqu’à 2022.

Dans cet univers très concurrentiel qu’est la météorologie, le risque est celui de la perte de compétences. Certains services ne pourront plus être proposés. Ne nous leurrons pas, Météo-France ne fera pas plus avec moins. Nous avons la chance d’avoir en France un fleuron de la météorologie mondiale, et celui-ci est mis en danger.

L’autre enjeu concerne la montée en puissance de leur nouveau supercalculateur. L’appel d’offres doit être lancé à partir de 2018 pour une livraison espérée en 2019. Or, les budgets ne sont pas assez précis sur ce sujet-là. Il est à craindre qu’ils ne soient pas à la hauteur de ce qu’il faudrait pour permettre une modélisation optimale.

Pour fournir les financements nécessaires à Météo-France, nous proposons que 5 % des revenus issus du système communautaire d’échange de quotas d’émissions de CO2 lui soient affectés, dans la limite de 550 millions d’euros par an. Nous reprenons ici une proposition du rapport de 2016 du Conseil général de l’environnement et du développement durable, dit « rapport Lavarde ».

L’amendement II-CF220 propose quant à lui la remise d’un rapport d’information du Gouvernement sur les moyens alloués à Météo-France.

La commission rejette successivement les amendements II-CF216 et IICF220.

Puis elle examine les amendements II-CF217et II-CF221 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Le ministre a parlé de la dette que nous pourrions laisser à nos enfants en termes financiers, mais il y en a une autre, la dette écologique. C’est la règle verte : nous ne pouvons pas continuer de consommer et produire plus que ce que la terre peut donner ou absorber. Toutes les ressources que la planète est capable de renouveler en un an sont consommées dès le mois d’août, alors que c’était en décembre il y a trente ans.

Il est inconcevable que des opérateurs fers de lance de la transition écologique subissent des baisses de crédits au seul motif que la dette financière va augmenter. La réelle dette qui va peser sur nos enfants, c’est de ne pas pouvoir habiter sur cette planète !

Je pense notamment au Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement – CEREMA –, dont les crédits sont amputés de 5 millions d’euros par an à partir de 2018 et qui subira 105 suppressions de poste. Son expertise est primordiale en matière d’effets environnementaux causés, par exemple, par la construction d’autoroute ou par de grands travaux comme ceux des Jeux olympiques. De plus, son champ de compétences est élargi du fait du développement du parc éolien maritime. Il existe un réel malaise social et une tension syndicale forte au sein de l’établissement. Ce qui en jeu, c’est sa disparition pure et simple.

Nous proposons donc, sur le modèle du financement de l’AFITF – Agence de financement des infrastructures de transport en France – dont il partage d’ailleurs le domaine d’action, d’affecter une partie de la fiscalité revenant à l’État au profit du CEREMA.

L’amendement II-CF221 propose quant à lui la remise d’un rapport d’information du Gouvernement sur les moyens alloués au CEREMA.

La commission rejette successivement les amendements II-CF217 et IICF221.

Puis elle examine l’amendement II-CF215 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Nous demandons un rapport d’information sur les moyens alloués à l’INERIS – Institut national de l’environnement industriel et des risques. J’ai été surpris d’entendre le ministre dire que ses effectifs augmentent alors qu’ils baissent de 2 % par an depuis 2013. Le rôle de l’INERIS est crucial dans la prévention des risques industriels. Une diminution de ses effectifs à hauteur de 11 agents est encore prévue pour 2018. Il faut attendre un gros accident industriel de type AZF pour que les crédits de l’opérateur augmentent, ce qui contredit la définition même de la prévention !

La commission rejette l’amendement II-CF215.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF218 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Concernant les agences de l’eau, je demande un rapport d’information pour les motifs que j’ai développés en défendant l’amendement II-CF214.

La commission rejette l’amendement II-CF218.

Elle en vient à l’amendement II-CF219 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Nous demandons enfin une mission d’information sur les moyens alloués à l’Autorité de sûreté nucléaire
– ASN –, notamment en ce qui concerne le démantèlement des centrales nucléaires. Nos connaissances en la matière sont encore très faibles. Nous voudrions savoir ce que cela impliquerait pour l’Agence en termes de personnel et de compétences.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Je suis en désaccord avec notre collègue. Nous avons une expertise sur les opérations de démantèlement – à Chooz dans les Ardennes par exemple –, qui ne concerne certes pas tous les réacteurs. De plus, le démantèlement entier du parc n’est pas prévu et l’ASN n’est pas directement concernée. L’Autorité peut superviser le démantèlement des centrales avec les moyens qui lui sont alloués actuellement. Il n’y a pas lieu d’augmenter ses crédits pour cet objectif précis.

M. Éric Coquerel, rapporteur spécial. Je ne demande pas l’augmentation des crédits de l’ASN mais une mission d’information. Je suis étonné de la réponse de M. Aubert car, comme il nous l’explique, nos connaissances en matière de démantèlement ne concernent qu’une partie des réacteurs. De plus, l’ASN jouera un rôle très important pour garder un niveau de sûreté optimal lors du démantèlement des centrales, comme elle le fait aujourd’hui dans la surveillance de leur fonctionnement.

Je tiens à vous rappeler que l’ASN a arrêté les quatre réacteurs du Tricastin le 4 octobre dernier parce qu’une digue aurait dû être surélevée depuis des années et que cela n’avait pas été fait.

Nous pouvons donc supposer qu’au moment du démantèlement, le danger radioactif ne disparaîtra pas et que l’ASN aura toujours une mission de contrôle absolument essentielle. Je doute que cette planification soit aussi simple et je demande donc une mission d’information à ce sujet. Cela représente pour moi un principe de précaution minimum.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Le sujet du Tricastin n’a aucun lien avec le démantèlement des centrales. Dans le cas d’espèce, il s’agissait d’une digue pour laquelle l’ASN a estimé qu’en cas de séisme cinq fois supérieur au séisme le plus important observé depuis mille ans dans la zone, et au cas où, au même moment, il se produirait une inondation de la centrale, alors il y aurait un risque – bien entendu de très faible probabilité. EDF a d’ailleurs contesté cette procédure.

L’ASN est donc capable de faire son travail avec ses moyens actuels.

Mme Émilie Cariou, présidente. Je trouve que l’idée d’une mission d’information est intéressante mais pas seulement sur la question du démantèlement des centrales, également sur celle de leur prolongation. J’avais déposé un amendement sur les moyens de l’IRSN à cette fin. Nous devons engager le dialogue avec le Gouvernement quant aux coûts à attendre dans le secteur nucléaire, notamment les travaux d’expertise de l’IRSN et de l’ASN.

La commission rejette l’amendement II-CF219.

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Économie

Article additionnel après l’article 54
Création d’une taxe affectée au centre technique du papier

Lors de sa réunion du mercredi 8 novembre 2017 après-midi, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Économie, la commission examine l’amendement II-CF698 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Le centre technique du papier soutient la filière du papier à recycler, filière au potentiel de croissance extrêmement important. Cet amendement propose de créer une taxe affectée pour financer ce centre. Conformément à l’article 15 du projet de loi de programmation des finances publiques, je précise que l’affectation de cette taxe sera plafonnée par un amendement qui sera déposé au cours de la navette, au moment de la discussion des articles de la première partie de la loi de finances.

M. Damien Adam. Le groupe La République en Marche est favorable à cet amendement.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial des crédits Développement des entreprises et régulations. Le centre technique du papier était un des derniers organismes de ce type à ne pas être financé par une taxe affectée. Nous sommes favorables à cet amendement qui donnera au centre les moyens de son action.

La commission adopte l’amendement II-CF698.

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Après l’article 54

La commission examine l’amendement II-CE77 de M. François Ruffin

M. François Ruffin. Le programme de campagne d’Emmanuel Macron accordait bien plus de place à la fraude sociale qu’à la fraude fiscale, alors que le coût pour l’État de cette dernière est 200 fois plus élevé. Nous demandons donc un rapport évaluant le nombre d’agents à recruter dans l’administration fiscale et les dispositifs à mettre en place pour réduire la fraude fiscale de 40 milliards d’euros par an.

Nous souhaitons également que nos propositions soient évaluées : obliger les entreprises à déclarer leurs résultats pays par pays, créer un impôt universel en soumettant chaque citoyen français aux impôts français quel que soit son pays de résidence comme le font les États-Unis, interdire aux banques françaises toute activité dans les paradis fiscaux en retirant leurs licences bancaires aux établissements récalcitrants...

M. Alexandre Holroyd, rapporteur spécial des crédits Statistiques et études économiques et Stratégie économique et fiscale. La lutte contre la fraude fiscale est une priorité de la législature, comme le montre la proposition de déchéance des droits civiques pour les fraudeurs fiscaux. Votre amendement paraît relever plutôt de la mission Gestion des finances publiques, relative aux moyens de la direction générale des finances publiques, alors que la mission Économie porte les effectifs de la direction de la législation fiscale. Je donne donc un avis défavorable.

M. Damien Adam. Le groupe La République en Marche est défavorable à cet amendement car de nombreux rapports ont été rendus sur le sujet. Il n’est plus temps de réfléchir, il faut passer à l’action.

M. le président Éric Woerth. Lors de l’examen d’un amendement, l’avis du groupe devrait être donné par un membre de la commission des finances.

M. Damien Adam. Je continuerai à prendre la parole si je le souhaite.

M. Sébastien Jumel. Je soutiens cet amendement, qui est pleinement d’actualité. Il ne faut plus se contenter de dénoncer des réalités, il est urgent de passer aux actes. Depuis 2010, 3 000 emplois ont été supprimés dans les services administratifs chargés de lutter contre la fraude, l’évasion et l’optimisation fiscales.

M. François Ruffin. Si des rapports ont déjà été rendus, je souhaiterais savoir quels effectifs de fonctionnaires supplémentaires seront recrutés pour mieux lutter contre la fraude fiscale.

M. Xavier Roseren, rapporteur spécial. Je vous renvoie au rapport public 2016 de la Cour des comptes et au rapport d’activité annuel de la commission des infractions fiscales, établi conformément à l’article 16 de la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière. Le ministre Gérald Darmanin a rappelé qu’il s’agit d’une priorité, car la fraude fiscale porte atteinte au pacte républicain.

La commission rejette l’amendement IICE77.

La commission examine l’amendement IICE416 demandant un rapport sur le dumping fiscal intra-européen.

Suivant l’avis défavorable de M. Philippe Chassaing, rapporteur spécial des crédits Statistiques et études économiques et Stratégie économique et fiscale, la commission rejette l’amendement IICE416.

La commission examine l’amendement II-CE417.

M. François Ruffin. Nous demandons un rapport sur les pratiques d’optimisation fiscale des multinationales. Une entreprise réalisant des profits sur le territoire national profite des investissements de l’État dans les infrastructures, les services publics, l’éducation des salariés ou tout simplement le marché national. Le principe d’égalité et de justice veut que ces mêmes entreprises participent à l’effort national en payant des impôts ; pourtant, les grandes multinationales parviennent à s’en exonérer ce qui révèle l’existence de carences légales et fiscales.

M. Alexandre Holroyd, rapporteur spécial. La commission des finances a auditionné début septembre M. Pascal Saint-Amans, responsable de l’OCDE sur plan de lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, le BEPS, une initiative majeure qui comporte de nombreuses mesures qui accroissent la transparence et le reporting pays par pays. Comme l’a dit le ministre Bruno Le Maire, l’optimisation fiscale des multinationales est une perte de recettes pour l’État mais aussi une atteinte à la démocratie.

M. Sébastien Jumel. Les révélations de la presse conduisent à douter que ces mesures suffisent. Les rapports parlementaires de nos collègues Alain et Éric Bocquet sur l’évasion fiscale comportaient des préconisations qui n’ont pas été mises en œuvre. L’optimisation fiscale est une évasion fiscale consentie et parfois encouragée. Nous ne cesserons de vous interpeller sur le sujet, car si les riches échappent à l’impôt, les pauvres continuent de le payer.

M. Jean-Paul Dufrègne. Le contexte actuel montre que notre Assemblée attend des résultats qui ne sont pas là.

M. le président Éric Woerth. Les coopérations entre les États et les administrations fiscales se renforcent considérablement depuis dix ans. La communauté internationale progresse sur ce sujet.

M. Philippe Chassaing, rapporteur spécial. Vous n’avez pas, monsieur Jumel, le monopole de l’indignation sur la fraude fiscale. Le ministre est pleinement engagé dans ce combat et a fixé un délai de deux années pour progresser encore en la matière.

M. Alexandre Holroyd, rapporteur spécial. Au 30 septembre dernier, une cinquantaine de pays pratiquent l’échange automatique de renseignements bancaires et financiers sur les contribuables et ce nombre dépassera la centaine dans un an, dont tous les États à secret bancaire. C’est l’effet de dix années d’améliorations dans la coopération entre État, en particulier grâce à l’action de l’OCDE, un travail dans lequel notre majorité se reconnaît et qui va être poursuivi.

M. François Ruffin. M. Bernard Arnault, première fortune de France, a recours à des paradis fiscaux et soutient M. Macron.

La commission rejette l’amendement II-CE417.

Enfin, elle examine l’amendement II-CL84 demandant un rapport sur les moyens humains et financiers dégagés en cas de suppression de la mission d’appui aux partenariats public-privé.

Sur l’avis défavorable de M. Philippe Chassaing, rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CL84.

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Engagements financiers de l’État

Article 55
Suppression du dispositif de prise en charge par l’État d’une part des majorations de rentes viagères

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Engagements financiers de l’État, qui ont été examinés par la commission le jeudi 9 novembre 2017 après-midi.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (Mme Bénédicte Peyrol et Mme Dominique David, rapporteures spéciales) ([245]).

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Mme Bénédicte Peyrol, rapporteure spéciale. Il s’agit de mettre fin à la majoration d’une quote-part de la majoration des rentes que l’État prend en charge.

Suivant l’avis favorable des rapporteures spéciales, la commission adopte l’article 55, rattaché.

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Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Après l’article 55

Lors de sa réunion du jeudi 2 novembre 2017 après-midi, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, la commission examine en présentation commune les amendements II-CF277, IICF280 et IICF278 de Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale des crédits Fonction publique.

Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale. Ces amendements sont des amendements d’appel. Leur objectif est d’inciter le Gouvernement à une réflexion sur deux indemnités incluses dans le traitement des fonctionnaires.

Il s’agit d’une part de l’indemnité de résidence, dont le calcul repose sur des critères datant des années 1970 : même s’ils sont révisés périodiquement afin d’essayer de correspondre davantage à la réalité des situations locales, je propose qu’elle soit revue à la lumière du travail engagé par le ministre de la cohésion des territoires sur la révision des zonages. D’autre part, à propos du supplément familial de traitement, qui, pour certains bénéficiaires, constitue une part importante de leur rémunération, je souhaite sensibiliser le Gouvernement, dans le cadre de la réforme de grande ampleur de notre politique familiale qui sera prochainement engagée, à la nécessité d’une réflexion sur certains dispositifs spécifiques aux fonctionnaires. Comme il est nécessaire de prendre le temps de la maturation et de la discussion, je retire ces amendements.

Les amendements II-CF277, II-CF280 et II-CF278 sont retirés.

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Article additionnel après l’article 55
Rapport du Gouvernement sur l’indemnité de résidence des fonctionnaires

La commission en vient à l’amendement II-CF279 de Mme Cendra Motin.

Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale. Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur la pertinence de modifier le zonage de l’indemnité de résidence des fonctionnaires et sur les effets qu’aurait le rattachement de cette indemnité au lieu de résidence des agents et non au plus au lieu de leur résidence administrative.

La commission adopte l’amendement II-CF279 (amendement  II-662).

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Article additionnel après l’article 55
Rapport du Gouvernement sur l’évolution des missions
des agents des douanes

La commission est saisie de l’amendement II-CL79 de Mme Danièle Obono, qui fait l’objet d’un sous-amendement II-CF335 de M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial des crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.

Mme Danièle Obono. Cet amendement porte sur le programme 302 relatif aux douanes, qui est un des rares au sein de la mission pour lequel les crédits semblent augmenter. Il s’agit, en réalité, d’une hausse de façade. En effet, les missions des douanes ont considérablement évolué depuis une dizaine d’années. L’espace Schengen est en crise profonde, les frontières sont devenues, d’une part, des abstractions juridiques et, d’autre part, des barbelés qui tuent des milliers de migrants poussés à l’exil vers la France et l’Europe. La lutte contre le terrorisme est venue s’ajouter aux missions traditionnelles de ce service. Nous demandons donc à ce qu’il soit établi un bilan précis du ratio entre les missions des services des douanes et les moyens qui leur sont dévolus pour les accomplir.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Il faut avoir à l’esprit que ces multiples demandes de rapport constituent une charge de travail considérable pour les administrations, alors même que nous cherchons à optimiser leur efficacité. J’appellerai donc à la retenue quant à ces demandes, d’autant que les données peuvent être disponibles. C’est aussi le rôle des rapporteurs spéciaux que d’analyser l’adéquation entre les effectifs des administrations et les missions dont elles ont la charge.

Sur cet amendement précis, je reconnais toutefois l’intérêt de votre demande et je propose un sous-amendement pour d’une part élargir le champ de l’étude aux conséquences du Brexit sur l’organisation de la douane et d’autre part supprimer le troisième alinéa qui risque d’être inconstitutionnel.

La commission adopte le sous-amendement II-CF335 puis elle adopte l’amendement II-CL79 ainsi amendé (amendement  II-664).

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Après l’article 55

La commission examine ensuite l’amendement II-CL86 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Nos demandes de rapport n’ont pas pour objet de donner plus de travail à des agents qui sont déjà surchargés mais il nous semble nécessaire de cibler un certain nombre de questions budgétaires précises sur lesquelles des données n’existent pas ou sont anciennes. Ici, il s’agit d’aborder l’angle mort de la politique du Gouvernement, le contrôle de nos frontières. La lutte contre la fraude douanière et la contrebande est essentielle pour la santé de nos concitoyens comme pour l’emploi en France. Le risque de dumping social est réel. Il nous faut donc savoir précisément quelle est la part des marchandises importées en France qui ont fait l’objet d’un contrôle douanier et si les moyens humains et financiers des douanes pour effectuer ces contrôles sont suffisants.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Dans le rapport spécial vous verrez que justement la direction des douanes a modifié ses indicateurs de performance pour retenir un plus grand nombre d’indicateurs qualitatifs, initiative que je salue. Vous trouverez dans les prochains rapports de la douane la majeure partie des informations que vous sollicitez. Je suis donc défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement II-CL86.

La commission examine l’amendement II-CL85 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Cet amendement demande un rapport sur l’effectivité du contrôle des administrations fiscales en fournissant des informations sur le nombre de fois où un contribuable est contrôlé au regard de son niveau de revenu ou de patrimoine. Il est aussi important de savoir si ces contrôles sont correctement effectués. Des cas récents en matière de sous-évaluation de patrimoines ont, en effet, montré les limites de ces contrôles.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Je vous renvoie à ce qui a été dit par le ministre. Notre majorité souhaite proposer une nouvelle société de la confiance entre l’administration et les usagers et souhaite aller vers une administration du conseil plus que de la sanction. Votre amendement ne va pas dans ce sens. Par ailleurs, il existe d’abondantes statistiques sur ce sujet disponibles sur le site de l’administration des finances.

Mme Danièle Obono. Nous parlons ici d’une administration dont le contrôle est la mission. Elle doit être suffisamment dotée en moyens humains justement pour suivre les dossiers et faire de la prévention pas seulement de la sanction, à l’égard des TPE et des PME notamment. Nous savons tous les effets de l’évasion fiscale sur les finances publiques : il y aurait là un investissement source d’efficacité.

La commission rejette l’amendement II-CL85.

La commission examine ensuite l’amendement II-CL81 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Nous demandons un rapport d’information sur les moyens des administrations face aux pratiques de fraude et d’optimisation fiscales indues et une évaluation du manque à gagner pour les finances publiques résultant du manque de moyens humains et financiers dédiés à la lutte contre ces pratiques, qui constituent un véritable désarmement fiscal.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Avis défavorable.

Mme Émilie Cariou, présidente. Je précise que nous avons obtenu, lors du vote de la loi de règlement, la réalisation d’un document de politique transversale sur les moyens de lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales.

La commission rejette l’amendement II-CL81.

La commission examine ensuite l’amendement II-CL82 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Le CICE représente plusieurs milliards d’euros octroyés par l’État aux entreprises et, en particulier, aux grandes entreprises. Cela mérite au moins d’être contrôlé mais les gouvernements précédents et le gouvernement actuel ont saigné l’administration fiscale. Un bilan de l’adéquation des moyens de l’administration au suivi du CICE est nécessaire.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Je comprends mal la demande. Il pourrait s’agir de tout crédit d’impôt. De toute façon nous allons remplacer le CICE par une baisse de charges. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CL82.

La commission examine ensuite l’amendement II-CL80 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. L’égalité des droits devant l’impôt est mise à mal par les multinationales qui évitent de payer l’impôt en France ou par les gros contribuables qui font échapper leur patrimoine à l’impôt, alors que les simples contribuables sont normalement assujettis. Ce rapport permettra de faire le point sur le niveau d’impôt qui serait recouvré si l’égalité réelle était respectée.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. L’optimisation fiscale, que je déplore comme vous, est un vrai sujet en particulier quand elle est agressive, mais un rapport n’y apportera pas de solution. Cela passera par la coopération internationale et par une meilleure lisibilité de la fiscalité, ce que nous avons commencé à faire sur les revenus du capital.

La commission rejette l’amendement II-CL80.

La commission examine l’amendement II-CL87 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. L’État a vendu des biens immobiliers pour un montant de 7 milliards d’euros depuis 2005, ce qui représente potentiellement plusieurs millions de mètres carrés qui ont changé de main, depuis que l’État a décidé de mettre en œuvre une nouvelle politique de gestion de son patrimoine. L’État doit être fort et intraitable sur ces questions. Il importe d’établir le bilan de ces dix années de ventes accélérées pour combler le déficit budgétaire.

C’est la raison pour laquelle nous proposons la création d’un groupe de travail généraliste formé d’associations dont l’intégrité n’est plus à démontrer comme Anticor ou Sherpa. Nous pourrons disposer d’une étude claire sur les travers constatés notamment dans la presse de ces ventes « express » qui pourraient avoir été réalisées dans des conditions douteuses. Par là même, nous lèverons des soupçons sur des ventes qui peuvent paraître peu conformes.

M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial des crédits Gestion du patrimoine immobilier de l’État. La valorisation du patrimoine immobilier de l’État, que ce soit d’ailleurs dans le cadre ou en dehors d’une cession, est un vrai sujet.

Comme M. Saint Martin, je ne pense pas que la remise d’un rapport soit un procédé très efficace, surtout dans le délai de trois mois que vous prévoyez. Il existe beaucoup de travaux d’origine parlementaire, également des travaux de la Cour des comptes qui retracent, exercice après exercice, les opérations de cession. Du reste, on peut s’interroger sur l’objet même du rapport que vous demandez. Vous évoquez la notion de ventes à « vil prix ». L’appréciation du prix de cession d’un bien public est compliquée, qui souvent ressort de choix politiques. Je souhaiterais donc que vous retiriez votre amendement. À défaut, j’émets un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CL87.

Puis la commission examine l’amendement II-CL88 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. La ministre de la justice a annoncé la semaine dernière en commission élargie que son ministère ne recourrait plus aux partenariats public-privé. Ceci est peut-être le signe que la Cour des comptes s’apprête à publier un rapport incendiaire sur ce sujet mais cela traduit aussi sans doute une évolution, du fait des scandales environnementaux, des affaires de conflits d’intérêts et de corruption engendrés par ces montages, ainsi qu’en raison de l’explosion de leurs coûts. Nous saluons donc ce geste car les partenariats public-privé sont, de notre point de vue, un danger pour les finances publiques et le bon fonctionnement de l’État.

Nous souhaitons donc que le Gouvernement réalise un rapport qui établisse de manière précise le surcoût engendré par les partenariats pour les grands projets, y compris ceux des collectivités territoriales, tels que le Grand stade de Lille.

M. Jean-Paul Mattei, rapporteur spécial. J’aurais tendance à dire : encore un rapport ? J’ajoute que l’Assemblée nationale s’est déjà prononcée contre l’opportunité d’un tel rapport dans le cadre de l’examen de la mission Justice. J’exprime donc un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CL88.

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Immigration, asile et intégration

Article 56
Mise en œuvre progressive de l’application du contrat d’intégration républicaine à Mayotte

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Immigration, asile et intégration, qui ont été examinés par la commission le lundi 30 octobre 2017 après-midi.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (MM. Stanislas Guerini et Jean-Noël Barrot, rapporteurs spéciaux) ([246]).

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La commission est saisie de l’amendement  II-CF206 de Mme Muriel Ressiguier.

M. Éric Coquerel. Cet amendement est défendu.

M. Stanislas Guerini, rapporteur spécial. L’amendement propose la suppression de l’article 56, qui reporte l’entrée en vigueur à Mayotte du dispositif des contrats d’intégration républicaine de 2018 à 2020. Comme les auteurs de l’amendement, les rapporteurs sont attachés à ce que ces contrats puissent, à terme, être mis en œuvre à Mayotte, afin de faciliter l’intégration des étrangers dans le département. Ils plaident en outre pour une refondation plus générale de la politique d’intégration, afin de la rendre plus ambitieuse. Ils constatent et regrettent que les conditions pour mettre en œuvre ce dispositif au 1er janvier 2018 ne soient toujours pas réunies. D’abord, ainsi que l’a rappelé l’Office français de l’immigration et de l’intégration, il n’y a pas à Mayotte assez de prestataires pour répondre au besoin de formation, qui devrait concerner 6 000 personnes par an au regard du nombre de titres délivrés entre 2011 et 2015. Ensuite, le décret prévoyant les conditions de la mise en œuvre progressive des formations linguistiques n’a toujours pas été pris. Enfin, la mise en place de ces contrats ne peut être déconnectée de la situation plus générale de Mayotte, rappelée durant les débats de la commission élargie, qui est très problématique en ce qui concerne le fonctionnement des services publics, notamment celui de l’éducation. Ils considèrent au regard de ces éléments, que ce sujet devra être abordé dans le cadre des assises de l’outre-mer. Avis défavorable sur cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis favorable de MM. Jean-Noël Barrot et Stanislas Guerini, rapporteurs spéciaux, la commission adopte l’article 56 rattaché, sans modification.

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Article 57
Réduction de la durée de versement de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) des personnes n’étant plus demandeurs d’asile

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Immigration, asile et intégration, qui ont été examinés par la commission le lundi 30 octobre 2017 après-midi.

Il a également fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (MM. Stanislas Guerini et Jean-Noël Barrot, rapporteurs spéciaux) ([247]).

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La commission est saisie de l’amendement  II-CF207 de Mme Muriel Ressiguier.

Mme Danièle Obono. Il s’agit d’un amendement de suppression de l’article. Actuellement, les demandeurs d’asile bénéficient d’une allocation, supprimée le deuxième mois à compter de la décision du refus. Nous souhaitons maintenir ce système, car nous considérons que l’on ne peut laisser des personnes sans ressources aussi brutalement, d’autant qu’un droit de recours existe en matière d’asile.

M. Stanislas Guerini, rapporteur spécial. Cet amendement part d’une préoccupation louable et partagée, celle du traitement humain des personnes, qu’elles soient réfugiées, déboutées du droit d’asile ou dans toute autre situation. Toutefois, l’exposé des motifs de l’amendement laisse penser que le droit de recours pourrait être remis en cause. L’article 57 prévoit, outre de ne rien changer pour les personnes qui obtiendraient le statut de réfugier, deux cas de figure : si, à la suite d’une décision négative de l’Office français pour la protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), la personne n’exerce pas son droit de recours, l’allocation pour demandeur d’asile est versée pendant la durée du possible exercice de ce droit, qui est d’un mois, et jusqu’à la fin du mois au cours duquel la décision est notifiée. Si, à la suite d’une décision négative de l’OFPRA, la personne exerce son droit de recours, l’allocation est alors versée pendant toute la durée de la procédure et jusqu’à la fin du mois au cours duquel la décision définitive est notifiée. Le droit de recours est donc garanti dans les mêmes conditions qu’auparavant. Concernant la préoccupation d’une sortie rapide de l’aide, la situation est très différente selon que la notification de la décision de rejet de la demande intervient en début ou en fin de mois. Aussi, les rapporteurs ont déposé un amendement visant à permettre le versement de l’allocation, pour les personnes déboutées, durant un mois calendaire à partir de la notification de la décision définitive. Le délai de versement de l’allocation sera alors aligné sur celui durant lequel une personne a le droit de se maintenir dans un hébergement en vue de préparer la sortie de celui-ci. Avis défavorable sur cet amendement.

La commission rejette l’amendement II-CF207.

La commission est ensuite saisie de l’amendement n° II-CF235 de MM. Jean-Noël Barrot et Stanislas Guerini, rapporteurs spéciaux.

M. Stanislas Guerini, rapporteur spécial. Il s’agit de l’amendement mentionné à l’instant, qui vise à faire coïncider strictement, pour les personnes déboutées du droit d’asile, le délai de versement de l’allocation pour demandeurs d’asile avec le délai de préparation de la sortie du centre d’hébergement. Ce délai est d’un mois calendaire.

La commission adopte l’amendement II-CF235 (amendement  II-493).

Suivant l’avis favorable de MM. Jean-Noël Barrot et Stanislas Guerini, rapporteurs spéciaux, la commission adopte l’article 57 rattaché, ainsi modifié.

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Après l’article 57

La commission examine l’amendement n° II431 du Gouvernement.

M. Stanislas Guerini, rapporteur spécial. Les rapporteurs spéciaux donnent un avis favorable à cet amendement. Il permettra l’application effective du droit en vigueur, notamment la convention de Schengen, en précisant le délai pendant lequel les compagnies de transport sont tenues de prendre en charge financièrement les personnes auxquelles l’entrée sur le territoire est refusée. Selon les termes de l’amendement, ce délai courra de la décision de refus d’entrée jusqu’au réacheminement de la personne par la compagnie. Cette précision facilitera l’établissement d’une redevance visant à recouvrer 7 millions d’euros avancés chaque année par l’État aux entreprises de transport et jamais remboursés.

La commission accepte l’amendement n° II431.

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Justice

Après l’article 57

Lors de sa réunion du mercredi 25 octobre 2017 soir, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Justice, la commission examine l’amendement n° II-CF54 du Gouvernement relatif au financement du Haut Conseil du commissariat aux comptes.

M. Patrick Hetzel, rapporteur spécial. Le présent amendement propose de remanier profondément les modalités de financement du Haut Conseil au commissariat aux comptes (H3C) en remplaçant les actuels droits et contributions prévus pesant sur les commissaires aux comptes et sur la Compagnie nationale des commissaires aux comptes.

Il institue une contribution forfaitaire à la charge des contrôleurs des pays tiers qui sollicitent leur inscription sur une liste établie par le H3C permettant d’exercer les fonctions de commissaires aux comptes. Il crée ensuite deux cotisations assises sur les honoraires facturés par les commissaires aux comptes et prévoit un plafonnement de leur produit.

Si je ne suis pas opposé sur le principe, l’amendement du Gouvernement n’est accompagné d’aucune évaluation de la charge qu’il représenterait pour les commissaires aux comptes. On ne comprend pas nécessairement la pertinence d’une seconde cotisation ne pesant que sur les honoraires des missions accomplies auprès d’« entités d’intérêt public », champ qu’il reste à définir. Enfin, le plafonnement du produit versé au H3C n’est pas déterminé puisque l’exposé des motifs évoque un amendement de coordination avec les dispositions de l’article 15 du projet de loi de programmation des finances publiques en cours d’examen.

De toute évidence, des précisions paraissent indispensables. À ce stade, j’émets donc un avis défavorable et je demande à ce que nous en rediscutions en séance publique.

M. le président Éric Woerth. Nous ne connaissons pas non plus l’état de la concertation avec les commissaires aux comptes.

Après l’avis défavorable du rapporteur spécial et l’abstention de ses membres, la commission n’accepte pas l’amendement II-CF54.

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Outre-mer

Après l’article 57

Lors de sa réunion du lundi 30 octobre 2017 soir, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Outre-mer, la commission examine l’amendement examine l’amendement IIAS18 de M. JeanHugues Ratenon.

Mme Bénédicte Taurine. Nombreux sont les grands projets inutiles et imposés qui défigurent le territoire hexagonal et mettent en danger notre biodiversité. Les collectivités d’outre‑mer n’ont malheureusement pas non plus été épargnées par la rapacité de grandes entreprises ou de promoteurs qui ont induit en erreur les décideurs publics, dévoyant volontairement ou non l’intérêt général au profit d’intérêts bassement particuliers. On peut notamment citer le mégaprojet de nouvelle route du littoral à La Réunion, qui implique Bouygues et Vinci, auquel l’opposition ferme, sérieuse et organisée des citoyens et des élus mettra nécessairement un terme. La spécificité des territoires ultramarins ne nous laisse pourtant aucun droit à l’erreur, tant en termes d’urbanisme que de protection de la biodiversité. C’est pourquoi nous demandons un rapport afin de faire un point global sur ces grands projets d’infrastructures en outre‑mer, qui risquent de mettre en danger les services publics pour des profits privés et qui constituent souvent des atteintes graves et injustifiées aux écosystèmes.

M. Olivier Serva, rapporteur spécial. Je partage tout à fait la volonté d’apporter un éclairage sur les grands projets d’investissements dans les outre‑mer, notamment par le biais d’un rapport. Cependant, l’article 17 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 prévoit déjà que les projets d’investissements financés par l’État dont le coût excède un certain seuil font l’objet d’évaluations socio‑économiques ; celles‑ci sont soumises à des contre‑expertises dont le Parlement est destinataire. Par ailleurs, le document de politique transversale Évaluation des grands projets d’investissements publics dresse l’inventaire des projets d’investissements réalisés. Comme vous le demandez, il récapitule les dossiers qui ont fait l’objet d’une contre‑expertise. En outre, le droit de l’environnement prévoit un certain nombre de dispositifs, comme l’enquête publique, qui permettent de prendre en compte les impacts sur les écosystèmes. Enfin, dans chaque territoire, les projets de convergence permettront d’établir un diagnostic clair sur les besoins et de programmer les investissements nécessaires en fonction des constats qui seront établis. Pour toutes ces raisons, je vous suggère de retirer votre amendement ; la séance publique sera l’occasion de demander à la ministre des précisions sur tel ou tel point.

L’amendement IIAS18 est rejeté.

La commission en vient à l’amendement IIAS19 de M. JeanHugues Ratenon.

Mme Bénédicte Taurine. Du coût de la vie à la fracture numérique, en passant par l’accès aux soins, de très nombreuses inégalités handicapent les territoires ultramarins. Le taux d’illettrisme en constitue l’un des indicateurs les plus flagrants : selon l’INSEE, il s’élevait en 2012 à 33 % à Mayotte et 23 % à La Réunion contre seulement 7 % en France métropolitaine. De même que les inégalités entre citoyens et entre territoires sont inacceptables en métropole, nous ne pouvons nous résigner aux inégalités avec les outre‑mer : c’est une question de justice sociale et d’égalité républicaine. Nous demandons un rapport afin que les députés disposent des informations nécessaires sur cette question primordiale pour la République et puissent avoir à l’esprit ces particularités lorsqu’ils légifèrent.

M. le rapporteur spécial. Vous proposez l’établissement d’un diagnostic sur les moyens nécessaires à la réalisation de la convergence. Votre démarche rejoint donc celle des articles 7 et 8 de la loi « égalité réelle » ([248]) qui prévoient que l’État et les collectivités d’outre‑mer élaborent, pour chaque territoire, des plans de convergence. J’espère, comme vous, que ces plans se traduiront rapidement dans les faits ; nous y veillerons. En revanche, je ne pense pas qu’il faille ajouter un rapport établissant un diagnostic qui aura déjà été posé. Je vous suggère donc de retirer votre amendement.

M. Olivier Damaisin. Je trouve fort regrettable que ceux qui ont déposé des amendements ne soient pas là pour les voter alors même que ceux qui les défendent ne souhaitent pas les retirer.

L’amendement IIAS19 est rejeté.

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Pouvoirs publics

Après l’article 57

Lors de sa réunion du lundi 6 novembre 2017 après-midi, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Pouvoirs publics, la commission examine l’amendement II-CL117 de M. Ugo Bernalicis.

M. Alexis Corbière. Le statut des conjoints et conjointes des présidents et présidentes de la République – si tel est le cas un jour – pose un réel problème démocratique. Nous en voulons pour preuve la charte de transparence publiée en août dernier par une présidence qui semblait quelque peu embarrassée par ce statut hybride.

Un conjoint ou une conjointe n’a en effet aucune légitimité démocratique et ne devrait pas avoir de titre officiel. Nous estimons donc nécessaire la réalisation d’une étude pour que le Parlement sache ce qu’il en est vraiment des fonds alloués à l’épouse du Président de la République – actuellement, mais aussi, le cas échéant, sous les présidences précédentes – et se fasse une idée précise du poids budgétaire et politique de ce statut.

M. Philippe Vigier, rapporteur spécial des crédits de la mission Pouvoirs publics. Avis défavorable. J’ai posé des questions extrêmement précises à la présidence de la République, dont certaines étaient en lien avec cette fameuse charte de transparence. Ce texte est d’ailleurs une première sous la Ve République, alors que j’avais relevé des errements il y a quelques années.

L’épouse du chef de l’État ne dispose pas de frais de représentation. Elle s’appuie en revanche sur une équipe de collaborateurs. J’ai constaté les rémunérations des personnes nommées pour exercer ces responsabilités et je n’ai pas remarqué de problème particulier. Je suis extrêmement vigilant quant au contenu des délégations et aux moyens utilisés. On doit savoir où passe l’argent du contribuable.

M. Alexis Corbière. Connaissant votre rigueur, je vous trouve là bien clément. Je vous renvoie aux propos tenus en juillet au sujet des compagnes et compagnons des parlementaires. Restons fidèles à l’esprit qui a prévalu lorsque nous avons pris ces décisions !

Pour un républicain, celui ou celle qui accompagne le Président ne doit pas avoir de statut. Tel est l’esprit de notre amendement. Nous ne préjugeons pas de la sincérité de ce qui est fait à l’heure actuelle : ce n’est pas un problème de mauvaise gestion, c’est une question de principe.

M. Philippe Vigier, rapporteur spécial. J’ai la chance d’être rapporteur spécial depuis une dizaine d’années et je crois être assez scrupuleux et vigilant. Je suis tout disposé à vous montrer l’ensemble des questions que j’ai adressées à la présidence. Vous verrez qu’elles sont plutôt sévères. J’ai même abordé un sujet qui a été soulevé dans la presse, les frais de maquillage, sur lesquels j’ai fait des recommandations dans mon rapport. Ces sujets ne sont pas passés au travers des mailles.

La commission rejette l’amendement II-CL117.

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Relations avec les collectivités territoriales

Avant l’article 58

Lors de sa réunion du jeudi 9 novembre 2017 après-midi, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, la commission examine l’amendement II-DN41 de M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Cet amendement concerne les départements qui ont constaté une perte de produit consécutive à l’application de l’abattement de 30 % de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les bailleurs sociaux signataires d’un contrat de ville situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il n’y a plus de compensation de l’État pour les départements et seul le bloc communal resterait concerné par la compensation de l’abattement. Il est prévu à travers cet amendement d’aligner le bloc départemental sur le bloc communal puisque cela correspond à une perte de 39 millions d’euros pour les départements en 2016. Le bloc communal bénéficie de cet abattement jusqu’en 2020. Rien ne justifie qu’un traitement distinct soit appliqué aux départements.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial des crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales. C’est un avis défavorable mais il nous faudra revoir ce point plus en détail pour mieux comprendre votre proposition.

La commission rejette l’amendement II-DN41.

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Article 58
Automatisation du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, qui ont été examinés par la commission le jeudi 9 novembre 2017 après-midi.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Jean-René Cazeneuve et M. Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux) ([249]).

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Suivant l’avis favorable des rapporteurs spéciaux, la commission adopte l’article 58 rattaché, sans modification.

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Article 59
Dotation de soutien à l’investissement local

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, qui ont été examinés par la commission le jeudi 9 novembre 2017 après-midi.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Jean-René Cazeneuve et M. Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux) ([250]).

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La commission examine les amendements identiques II-AC63 de Mme Annie Genevard et II-CF250 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Annie Genevard. Cet amendement porte sur la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) qui est composée de deux enveloppes : une enveloppe dédiée aux grandes priorités d’investissement et une seconde attribuée en contrepartie de la maîtrise des dépenses de fonctionnement. Or, cette disposition contrevient au principe constitutionnel de l’autonomie de gestion des collectivités locales. C’est la raison pour laquelle, il est proposé que la DSIL ne soit composée que d’une seule enveloppe dédiée aux grandes priorités d’investissement, avec la possibilité d’affecter 10 % de façon dérogatoire aux dépenses de fonctionnement, par exemple pour des études préalables.

Mme Véronique Louwagie. Il faut laisser des libertés aux collectivités territoriales. Si on veut les soutenir de manière efficace, il faut laisser aux élus la possibilité de faire preuve de discernement dans leurs choix d’investissement.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Un amendement du Rapporteur général Joël Giraud pourrait répondre à vos préoccupations. Je vous propose donc de retirer ces amendements. Si tel n’est pas le cas, mon avis sera défavorable.

La commission examine donc l’amendement II-CF718 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Cet amendement propose que les 50 millions d’euros de la seconde part de la DSIL soient transférés en crédits de dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR). Ils seront donc attribués au niveau départemental après avis des commissions DETR et correspondront ainsi mieux aux besoins de financement des communes. Je pense donc que cet amendement peut satisfaire les auteurs des précédents amendements.

Mme Annie Genevard. Je ne suis que partiellement satisfaite car les élus locaux n’ont pas d’autonomie. Nous retirons nos amendements car cela satisfait une partie de notre demande mais nous aimerions que la composition de la commission DETR laisse une place plus importante aux parlementaires.

Mme Christine Pires Beaune. Ces 50 millions d’euros du fonds de modernisation vont-ils rejoindre l’enveloppe globale de la DETR ou vont-ils former une enveloppe au sein de la DETR, ce qui était quand même la conclusion de notre groupe de travail ?

M. le Rapporteur général. Suivant l’arbitrage du Gouvernement, il ne s’agit pas d’une enveloppe indépendante mais d’un abondement des crédits de la DETR à hauteur de 50 millions d’euros avec des conséquences bénéfiques sur un grand nombre de départements comprenant des communes rurales. Le niveau moyen est de 500 000 euros de plus sur la DETR, avec des montants qui peuvent aller jusqu’à 892 000 euros de DETR pour le département le mieux doté.

M. Jean-Louis Bricout. Je m’inquiète de la réaffectation de 50 millions d’euros provenant de l’ancienne enveloppe parlementaire à la DETR. La réserve parlementaire permettait de financer des projets en plus de la DETR, pour aider les plus petites communes. On ne s’y retrouve pas complètement.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Je m’inquiète du fait qu’il existe beaucoup de petites communes qui ne sont pas éligibles à la DETR et qui ne peuvent donc pas passer devant les commissions d’attribution de cette dotation. Si l’enveloppe n’est pas indépendante, elles sont exclues de fait du nouveau dispositif. Ma seconde crainte porte sur le fait que la diminution de l’enveloppe globale de la DETR, ne conduise à une diminution en proportion de cette enveloppe. Il me semblait qu’un consensus s’était créé pour que cette enveloppe indépendante soit sanctuarisée et je vois que la conclusion est toute autre.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Nous avons un objectif de simplification à tenir qui va à l’encontre de la formation de deux enveloppes distinctes. De plus, nous ne voulons pas recréer la réserve parlementaire. Notre objectif est que ce soit les élus qui aient une autonomie de gestion de ces montants, au plus proche du terrain.

M. le Rapporteur général. J’ai défendu la position du groupe de travail. Le compromis avec le Gouvernement est intéressant car ce sont 50 millions d’euros supplémentaires. Nous avons négocié avec le ministre de l’intérieur une refonte de la circulaire qui permettra de signaler que les projets de petite ampleur pourront être pris en compte.

Mme Christine Pires Beaune. Je veux remercier le Rapporteur général et mes collègues du groupe de travail pour leurs efforts, mais je trouve dommage d’être arrivé à un consensus transpartisan pour avoir ce résultat là aujourd’hui.

Les amendements II-AC63 et II-CF250 sont retirés et la commission adopte l’amendement II-CF718 (amendement  II-1463). En conséquence, les amendements II-CF406 de M. Nicolas Forissier et II-CE84 de M. Julien Dive tombent.

Puis la commission examine l’amendement II-CF719 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Concernant les contrats de ruralité, les sommes annoncées à hauteur de 45 millions d’euros ne permettent pas d’assurer la totalité des crédits de paiement correspondant aux autorisations d’engagement des contrats de ruralité. Cet amendement a pour but de doubler l’enveloppe au sein de la DSIL, donc à enveloppe constante. Le ministre nous éclairera de manière précise sur la façon dont seront gérés ces contrats mais je souhaite que cet amendement ouvre le dialogue.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis favorable.

M. Jean-Louis Bricout. Je me réjouis de l’abondement de crédits vers les contrats de ruralité avec des crédits réellement fléchés. Nous avons eu la triste expérience des contrats bourgs-centres qui faisaient appel à des subventions de droit commun noyées parmi d’autres subventions. Je souhaite donc que vous nous précisiez la répartition et les garanties apportées au fléchage.

Mme Christine Pires Beaune. Monsieur le président, je voudrais que vous vous engagiez à demander l’utilisation de la DSIL en 2017 et que la commission des finances soit destinataire de la répartition de ce fonds. En effet, l’année dernière, ce fonds possédait plusieurs enveloppes : une de 150 millions d’euros réservés aux métropoles, une autre de 440 millions d’euros au sein de laquelle les métropoles pouvaient encore émarger. S’il y a des nouvelles métropoles, il faudra que les crédits les concernant soient mis à part pour que la DSIL globale ne subisse pas de diminution.

M. le président Éric Woerth. Je suis d’accord avec vous, nous auditionnerons le ministre à ce sujet.

La commission adopte l’amendement II-CF719 (amendement  II-1418).

Puis elle examine en discussion commune les amendements II-DN44, IIDN43 et IIDN45 de M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Ces trois amendements concernent la commission DETR. Le premier vise à ce qu’elle rende un avis décisionnel à la majorité des trois cinquièmes dès le premier euro dépensé, sans aucun seuil minimum. Le deuxième vise à ce qu’y soient représentés les députés et les sénateurs dont les circonscriptions se trouvent dans le département. Le troisième vise à ce qu’il y ait un représentant du conseil départemental qui est pour l’instant totalement absent de cette commission. Je souhaite également souligner un point important : j’ai entendu le souhait du ministre de ne pas déséquilibrer les commissions DETR en y faisant venir tous les parlementaires. Mais alors sur quel critère va-t-on choisir les deux députés et les deux sénateurs dans les territoires où il y a plus de quatre parlementaires ? Il faut associer l’ensemble de la représentation nationale à ce sujet important. Ce sera compliqué pour le président de groupe de choisir entre ses collègues dans le département.

M. le président Éric Woerth. Ils n’ont aucunement envie de faire ce choix.

Mme Christine Pires Beaune. Je ne comprends pas pourquoi tous les parlementaires ne sont pas invités sans voix délibérative ; de toute façon, très peu iront à ces réunions et c’est déjà comme cela que nous procédons pour la commission départementale de coopération intercommunale.

M. le président Éric Woerth. Je vous invite à reposer la question en séance publique. Nous pourrions, en effet, être observateurs.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis défavorable mais nous sommes tous attentifs à ce que les parlementaires aient les informations. Lorsqu’il y a quatre parlementaires dans un département cela ne poserait pas de problème mais s’il y en a vingt‑cinq ? On serait face à des problématiques de gouvernance et de séparation des pouvoirs s’il y a plus de parlementaires que d’élus locaux. Il faut éviter de complètement modifier les commissions DETR qui globalement fonctionnent correctement.

M. Damien Abad. Il faudra me préciser les départements où il y a vingt-cinq parlementaires. Il faut au moins que les parlementaires puissent être associés, c’est important.

La commission rejette successivement les amendements II-DN44, II-DN43 et II-DN45.

Puis elle examine l’amendement II-CF565 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement vise à confier la répartition de la DSIL au préfet de département avec la même commission que pour la DETR, car pour des grandes régions comme par exemple Nouvelle-Aquitaine ou Auvergne-Rhône-Alpes, il sera impossible de simplement comprendre les projets proposés qui correspondent à des enjeux locaux.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. C’est une idée intéressante. Le choix a été que la DSIL reste au préfet de région qui est l’échelon de tête en matière économique et d’aménagement du territoire. Nous poserons la question au ministre, mais avis défavorable pour l’instant.

M. Jean-Louis Bricout. Se pose la question de la ventilation de ces fonds par département ou par régions ? Il faut que nous ayons une visibilité.

La commission rejette l’amendement II-CF565.

L’amendement II-CF564 de Mme Christine Pires Beaune est retiré.

La commission examine les amendements identiques II-CF249 de Mme Véronique Louwagie, II-CF509 de M. Benoit Simian et II-DN28 de M. Marc Fesneau.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement vise à prévoir pour l’attribution de la DSIL un dispositif équivalent à celui qui existe avec la commission DETR. Une commission composée d’élus se prononcerait sur les dispositifs et les investissements qui peuvent recueillir le soutien de la DSIL. C’est important et cela permettrait d’associer les parlementaires.

M. Benoit Simian.  Dans le même esprit, cet amendement vise à défendre davantage de dialogue et de transparence pour l’attribution de la DSIL. Cette commission pourrait être composée de maires, de présidents d’intercommunalités et éventuellement de parlementaires sur le même modèle que la DETR.

Mme Sarah El Haïry. Nous sommes dans la continuité de ce qui a été dit. Nous souhaitons un modèle similaire à celui de la DETR pour plus de transparence et de dialogue. Aujourd’hui aucune transparence n’est obligatoire sachant que la DETR fonctionne plutôt bien on aimerait élargir son mode de fonctionnement à la DSIL, surtout au regard du montant de cette dernière.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. La DSIL est un fonds réparti à l’échelon régional et dédié à des aménagements importants. Cela pose une question en effet et il faudra voir avec le ministre mais j’émets un avis défavorable à ce stade.

M. le Président Éric Woerth. Nous sommes sur un sujet difficile : les parlementaires veulent être associés avec les élus locaux aux choix des aides aux investissements. Et on voit bien que c’est le préfet qui a la main.

La commission rejette les amendements II-CF249, II-CF509 et II-DN28.

La commission examine l’amendement II-DN46 de M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Il s’agit d’une demande de rapport sur l’impact et la nécessité du maintien et de l’évolution du fonds de soutien à l’investissement local (FSIL) pour voir notamment comment on peut y associer les parlementaires.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis défavorable.

L’amendement II-DN46 est retiré.

La commission adopte l’article 59 rattaché, ainsi modifié.

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Après l’article 59

La commission examine l’amendement II-CF728 de MM. Jean-René Cazeneuve et Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux, qui fait l’objet du sousamendement II-CF729 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Cet amendement vise à baisser le seuil en deçà duquel les dossiers sont examinés par les commissions DETR pour le faire passer de 150 000 à 50 000 euros.

M. le Rapporteur général. Je propose de fixer ce seuil à 100 000 euros au lieu de 150 000 parce qu’il y a un compromis possible avec le gouvernement sur cette somme. C’est déjà très bien de descendre à 100 000. Ces 100 000 euros concernent l’assiette de la subvention.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Favorable au sous-amendement.

Mme Christine Pires Beaune. Sous réserve de vérification, l’exposé des motifs est inexact. Aujourd’hui les commissions DETR examinent les dossiers dont la subvention est supérieure à 150 000 euros ce qui veut dire qu’ils examinent 3 % des dossiers soumis à la DETR.

M. le président Éric Woerth. Il y a une ambiguïté qu’il faudrait éclaircir.

L’amendement II-CF728 est retiré et le sous-amendement II-CF729 tombe.

La commission examine en discussion commune les amendements IIDN32, II-DN31, II-DN29 et II-DN30 de M. Marc Fesneau.

Mme Sarah El Haïry. Il faut permettre aux parlementaires d’être dans les commissions DETR. Nous avons proposé quatre amendements du plus idéal au plus réaliste pour montrer à quel point le sujet est important. L’amendement IIDN32 prévoit la présence de tous les parlementaires pour toutes les subventions. Pour l’amendement II‑DN31, il s’agit de tous les parlementaires pour les dossiers au‑dessus de 150 000 euros. Par l’amendement II‑DN29 on descend à 100 000 pour le seuil. Par l’amendement II-DN30, nous souhaitons que l’ensemble des parlementaires soient informés mais que seulement quatre participent à la commission avec le seuil de 150 000 euros. Le message principal demeure que l’ensemble des parlementaires puissent accéder à l’information.

M. le président Éric Woerth. On retrouve la même ambiguïté sur les 150 000 euros « au titre de » mais on a le sentiment qu’il s’agit bien de la subvention et non du niveau global des travaux subventionnés.

Mme Sarah El Haïry. Il y a une ambiguïté parce que d’un département à l’autre cette limite existe ou n’existe pas.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. 150 000 euros, c’est le montant des subventions. C’est pour cela qu’il faut vraiment baisser le seuil.

M. le président Éric Woerth. Il faudrait peut-être indiquer l’assiette du subventionnement plutôt que le montant de la subvention elle-même ; à ce moment-là on toucherait plus d’investissements.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Aujourd’hui les commissions DETR fonctionnent. Changer leur mode de fonctionnement n’est pas une bonne idée. En descendant le seuil on risque de les asphyxier ; si on doit augmenter le nombre de parlementaires, cela sera la même chose. Avis défavorable.

M. Jean-Paul Mattei. J’ai du mal à comprendre ce blocage sur la présence des parlementaires. À la limite qu’ils n’aient pas le droit de vote mais au moins qu’ils puissent y assister avec un avis consultatif.

M. François Pupponi. Je rappelle que la majorité actuelle avait dénoncé le clientélisme qui aurait résulté de la réserve parlementaire, ce qui était faux car tout était public et transparent. Maintenant, quelques-uns vont distribuer les subventions dans le département et ils vont faire de la politique. Je déclare publiquement ici qu’il y a des associations de ma circonscription qui ont déjà été contactées par des députés La République en Marche qui leur ont affirmé « on va vous donner des subventions, dites-nous ce que vous voulez ». Je donnerai des noms. Quel est ce fonctionnement que l’on met en place dans lequel certains ont le droit d’attribuer des subventions sur le dos des autres !

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Votre propos est excessif. La réserve parlementaire est supprimée. De ce point de vue, toutes les commissions seraient à remettre en question. C’est à nous de créer l’impartialité. Si certains ont ce genre d’attitude, nous traiterons le problème.

La commission rejette successivement les amendements II-DN32, II-DN31, II-DN29 et II-DN30.

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Article 60
Répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF)

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, qui ont été examinés par la commission le jeudi 9 novembre 2017 après-midi.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Jean-René Cazeneuve et M. Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux) ([251]).

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La commission examine l’amendement II-CF715 rect. de MM. Jean-René Cazeneuve et Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Un ensemble de communes qui aurait déjà bénéficié des différents avantages aurait la possibilité avec l’ajout d’une commune supplémentaire de bénéficier de ces mêmes avantages. Nous avons voulu mettre un garde-fou afin d’éviter un effet d’aubaine pour les métropoles en limitant à 2 000 habitants la taille des communes supplémentaires.

La commission adopte l’amendement II-CF715 rectifié (amendement n° II-1419).

La commission examine en discussion commune les amendements II-CF720 de M. Joël Giraud, Rapporteur général, et II-CF566 et II-CF567 de Mme Christine Pires Beaune.

M. le Rapporteur général. Quand une commune nouvelle formée à partir de plusieurs communes compte moins de 1 000 habitants, elle ne bénéficie pas de la DGF bonifiée de 5 %. Ceci freine l’incitation au regroupement des petites communes. Cet amendement supprime donc ce plancher de 1 000 habitants. L’amendement relève également de 10 000 à 15 000 habitants le seuil de population pour bénéficier de cette bonification. Ces dispositions ont été négociées avec le Gouvernement et la direction générale des collectivités locales.

Mme Christine Pires Beaune. Mes amendements visent à ne pas remettre en cause les règles adoptées pour la création des communes nouvelles. En ce qui concerne la proposition du Rapporteur général, je précise que les planchers et les plafonds visaient à favoriser des vrais regroupements et à limiter les effets d’aubaine.

M. le président Éric Woerth. Les élus n’opèrent pas de fusion dans le but de bénéficier de dotations.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Supprimer le plancher va accroître très significativement le nombre des communes nouvelles, ce qui contribue à moderniser notre organisation territoriale. Nous avons un ensemble de dispositifs très innovants en faveur des communes nouvelle qui est conforté et prolongé.

La commission adopte l’amendement II-CF720 (amendement  II-1438). En conséquence, les amendements IICF566 et II-CF567 tombent.

La commission examine en discussion commune les amendements identiques II-CD88 de M. Martial Saddier, II-CF344 de Mme Émilie Bonnivard, II-CF552 de M. Xavier Roseren et CF663 de Mme Sylvia Pinel, ainsi que l’amendement II-CF384 de Mme Émilie Bonnivard.

M. Martial Saddier. Les communes touristiques connaissent des variations de population extrêmement importantes qui conditionnent le dimensionnement de leurs infrastructures, même si les lits correspondants ne sont pas occupés toute l’année. Il convient de mieux prendre en compte ces variations de population.

Mme Émilie Bonnivard. L’observatoire des finances et de la gestion publique locale a établi le fait que les dépenses de fonctionnement par habitant des communes touristiques sont supérieures de 65 % par rapport aux communes de même strate de population DGF. Il faut se rapprocher de la réalité des charges de fonctionnement supportées par ces communes en comptabilisant deux habitants par résidence secondaire.

M. Xavier Roseren. Les dotations sont calculées par rapport à la « population DGF » qui comptabilise un habitant par résidence secondaire. Les résidences secondaires sont de plus en plus souvent réellement occupées par leurs propriétaires, par exemple s’ils exercent leur activité en télétravail ou bien s’ils sont retraités.

Mme Émilie Bonnivard. Je défends également un amendement de repli qui propose de retenir 1,5 habitant par résidence secondaire.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Ces amendements risquent d’engendrer de très fortes iniquités entre les collectivités. De grandes villes touristiques vont bénéficier d’un abondement très important de DGF. De surcroît, même si les communes touristiques ont plus de charges, elles bénéficient aussi de revenus supérieurs. Il ne convient pas de changer les dispositifs actuels. Ne modifions pas des critères qui sont globalement satisfaisants.

M. le Rapporteur général. Ces amendements soulèvent plusieurs questions dont celle des charges que connaissent les communes touristiques en termes d’équipement et de prise en compte de la population touristique dans la DGF. Il est exact que seules sont prises en compte les résidences secondaires et non les résidences de tourisme. Mettre en place un coefficient multiplicateur aurait cependant des effets considérables pour les grandes villes touristiques. Ces amendements multiplieraient par deux la DGF de la ville de Nice par exemple. Je préconiserai l’élaboration d’un rapport sur la problématique des communes touristiques par mon amendement II-CF722 que nous examinerons ultérieurement. D’autre part, ces communes étaient financées par la fraction bourg-centre de la dotation de solidarité rurale (DSR) à laquelle nous avons mis fin. Pour éviter une dotation de solidarité rurale nulle en 2018, je propose un amendement complémentaire pour que la garantie de sortie soit prolongée d’un an dans l’attente de ce rapport.

La commission rejette les amendements II-CD88, II-CF344, II-CF552 et II-CF663 identiques puis l’amendement II-CF384.

La commission examine les amendements identiques II-AC71 de Mme Annie Genevard, II-CE87 de Mme Marie-Noëlle Battistel, II-CF349 de Mme Émilie Bonnivard, IICF676 de Mme Sylvia Pinel et II-DN33 de M. Damien Abad.

Mme Annie Genevard. Nous souhaitons que soient interdites les ponctions sur la fiscalité qui sont opérées lorsque le montant de la DGF n’est pas suffisant pour contribuer au redressement des finances publiques.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Cet amendement vise à appeler l’attention sur les difficultés des communes qui sont fortement impactées par le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) et qui ont en plus une DGF négative.

Mme Émilie Bonnivard. Certaines communes cumulent les désavantages.

M. Damien Abad. En effet, c’est la double peine pour les communes touristiques de montagne.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. La DGF négative est la résultante de la contribution des communes au redressement des finances publiques, mais ne pas en tenir compte pour des communes qui sont globalement les plus riches créerait un avantage. C’est donc une mesure de justice, d’équité et de solidarité entre les communes, et mon avis est défavorable.

M. le président Éric Woerth. Je ne vois pas où est la justice quand des communes qui ont une DGF négative voient une augmentation de 500 % de leur contribution au FPIC. Ces communes deviennent pauvres. On ne se mettra pas d’accord sur ce sujet-là parce que ceux qui reçoivent sont plus nombreux que ceux qui payent.

Mme Annie Genevard. Ceux qui payent ne sont pas forcément riches, c’est bien là le problème. Ceux qui ont des ressources peuvent également avoir de lourdes charges. Je pense aux communes de montagne qui doivent faire face à des investissements considérables. Soit on considère qu’il y a un sujet et on accepte d’y travailler, soit on ne laisse aux communes contributrices qu’un seul horizon : devenir pauvres à leur tour, ce qui est inacceptable.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Nous allons travailler sur les deux sujets de péréquation, la DGF et le FPIC. Nous avons choisi comme principe de traiter chaque sujet individuellement. L’année prochaine, nous travaillerons sur le FPIC pour avoir quelque chose de plus clair et de plus satisfaisant. Je suis d’accord avec vous, il y a des communes pauvres qui payent le FPIC.

Mme Christine Pires Beaune. Je suis d’accord avec le rapporteur spécial et je suis contre ces amendements. Rappelez-vous que la contribution sur la fiscalité a été mise en place pour introduire de l’équité parce que certaines communes ne contribuaient pas au redressement des comptes publics. Il ne faudrait pas revenir en arrière.

M. Gilles Carrez. J’appuie ce que vient de dire Christine Pires Beaune. Nous nous sommes rendu compte il y a deux ou trois ans du problème posé par les communes en DGF négative, parce qu’elles ne payaient plus rien. Je pense à certaines communes d’Île-de-France, extrêmement riches, qui ne contribuaient pas du tout au redressement des finances publiques.

La commission rejette les amendements II-AC71, II-CE87, II-CF349, IICF676 et IIDN33.

M. le président Éric Woerth. Nous devons vraiment avoir ce débat, messieurs les rapporteurs.

La commission examine l’amendement II-CF568 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. L’amendement prévoit une progression de la péréquation pour le bloc communal identique à celle de l’année dernière.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Il ne faudrait pas présenter comme historique le montant de péréquation de l’année dernière. En 2014, l’augmentation de la dotation de solidarité urbaine (DSU) et de la DSR se montait à 100 millions d’euros. Ces dernières années, les fonds de péréquation ont été augmentés significativement car en parallèle les dotations ont baissé. Ce qui n’est pas le cas cette année : 90 millions d’euros est quand même un montant considérable et supérieur au montant historique. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF568.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques II-CF569 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF572 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Il faut que les rapporteurs et la majorité prennent conscience de ce qui se passe en matière de politique de la ville. Quand la République va reculer dans ces quartiers, ce sont ses adversaires, et en particulier certains réseaux, qui vont prendre la place : 100 millions au lieu de 150 sur la dotation politique de la ville (DPV), la DSU qui augmente moins que sur les autres années, les compensations qui diminuent les recettes. Vous vous trompez et vous continuez dans l’erreur. Il y a un geste à faire dans ce projet de loi de finances pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Des efforts sont faits pour la ruralité, pour les métropoles mais pas pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Il y a 90 millions d’euros de plus en DSU.

La commission rejette les amendements II-CF569 et II-CF572.

Suivant l’avis défavorable de M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial, la commission rejette les amendements identiques II-CF570 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF573 de M. François Pupponi.

La commission examine l’amendement II-CF721 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Cet amendement propose de prolonger pour l’année 2018 la garantie de sortie attribuée aux communes ayant perdu en 2017 leur éligibilité à la fraction bourg-centre de la DSR, le temps que soit réalisé le rapport proposé par l’amendement II-CF722 que nous examinerons ensuite.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Cette mesure est évaluée à 900 000 euros. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement II-CF721 (amendement  II-1439).

Elle examine l’amendement II-CF697 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Une bonification de la dotation d’intercommunalité est attribuée aux communautés de communes à fiscalité professionnelle unique qui exercent un certain nombre de compétences, parmi une liste dont le contenu est fixé par la loi. Jusqu’en 2017, il convenait d’exercer au moins six compétences sur une liste de onze au total. À partir de 2018, il faudrait exercer au moins neuf compétences sur une liste de douze. Nous n’aurions alors aucune intercommunalité qui bénéficierait de la dotation bonifiée. Je vous propose donc de descendre à huit compétences ce critère, ce qui permettra d’avoir des intercommunalités éligibles.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement II-CF697 (amendement  II-1441), puis l’article 60 modifié.

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Article additionnel après l’article 60
Sortie progressive du mécanisme de pondération pour le calcul du potentiel fiscal agrégé des communautés d’agglomération issues de la transformation de syndicats d’agglomération nouvelle

La commission examine en discussion commune les amendements II-CF713 de MM. Jean-René Cazeneuve et Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux, IICF510 du président Éric Woerth et II-CF468 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Cet amendement porte sur les syndicats d’agglomération nouvelle (SAN). La question a été fortement débattue les années précédentes. Les SAN ont été transformés en communautés d’agglomération. Ces communautés d’agglomération bénéficient encore d’un mécanisme dérogatoire de pondération du potentiel fiscal et du potentiel fiscal agrégé. L’année dernière, la loi de finances a mis fin à ce mécanisme, puis une proposition de loi a été adoptée au mois de février 2017. Je propose une sortie progressive : une année de stabilité en 2018, le temps de finaliser les budgets, puis un rythme progressif sur quatre ans. Je pense que cet amendement constitue un compromis intéressant puisque, si le Gouvernement propose trois ans, certains députés proposent dix ans et d’autres une sortie dès 2018.

M. Gilles Carrez. J’apprécie cette proposition. Les ex-SAN sont rentrés dans le droit commun. Ils ont pour caractéristique d’avoir permis la construction de milliers de logements en une seule génération. Il a fallu construire des équipements et les amortir. Ils ont donc des ressources importantes puisqu’on a réussi à y faire venir des activités mais ils ont également des dettes considérables. Lorsqu’a été mise en place la dotation d’intercommunalité dans le cadre de la « loi Chevènement », puis le FPIC, on a veillé à ce que leur potentiel fiscal soit corrigé de leur surendettement. Fin 2016, Christine Pires Beaune, qui était rapporteure spéciale, a souhaité qu’on revienne plus rapidement au droit commun. Avec Dominique Lefebvre, nous avons déposé une proposition de loi qui a été adoptée très rapidement pour donner un an de délai. Dans notre amendement, je propose un délai de dix ans, mais je me rallie bien volontiers à la position de nos rapporteurs spéciaux.

M. Jean-Paul Mattei. Nous proposions une prorogation plus courte, mais je retire également mon amendement au profit de celui des rapporteurs.

Mme Christine Pires Beaune. Avant que cette discussion ne soit poursuivie en séance, je souhaiterais que tout le monde lise le rapport du Gouvernement. Il prouve que les ex-SAN ont bénéficié d’un régime dérogatoire particulièrement favorable et qu’aujourd’hui certains ont des taux d’endettement inférieurs à celui d’autres communautés d’agglomération. Ce statut dérogatoire a des conséquences considérables sur le FPIC car ce qui n’est pas payé par les uns est toujours payé par les autres.

M. Gilles Carrez. On demande encore à ces collectivités d’accueillir des milliers de logements. Dans les cinq communes de région parisienne concernées, nous sommes en zone tendue et s’il n’y avait pas les villes nouvelles pour continuer à mettre à disposition chaque année 2 000 ou 3 000 logements, on serait dans une situation difficile. Tous ceux qui sont élus locaux savent qu’accueillir ces nouvelles familles est tout sauf évident.

M. le président Éric Woerth. Je suis sensible à l’argument de Mme Pires Beaune relatif au FPIC.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Effectivement, pour ceux qui n’ont pas lu ce rapport, il montre que ces collectivités ont eu des avantages. Mais elles ne sont pas toutes dans la même situation : certaines ont une épargne brute très favorable, d’autres sont en difficulté, notamment autour de Paris. L’objectif est clairement de trouver un compromis qui fonctionne pour tout le monde. Nous travaillerons l’année prochaine sur le FPIC, ce qui permettra de clore cette question très importante et qui perdure depuis quelques années.

Les amendements II-CF510 et II-CF468 sont retirés.

La commission adopte l’amendement II-CF713 (amendement  II-1444).

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Article additionnel après l’article 60
Rapport du Gouvernement au Parlement sur les modalités de prise
en compte dans la répartition des dotations et des fonds de péréquation
des charges liées à l’accueil d’une population non permanente
par les collectivités territoriales

La commission examine l’amendement II-CF722 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. L’amendement demande un rapport sur les modalités de prise en compte dans la répartition des dotations et des fonds de péréquation des charges liées à l’accueil d’une population touristique.

Suivant l’avis favorable de M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement (amendement  II-1446).

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Article additionnel après l’article 60
Rapport sur les modalités envisageables de prise en compte
dans la répartition de la dotation forfaitaire des surfaces comprises
dans les sites Natura 2000

La commission en vient à l’amendement II-CF273 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Cet amendement est d’une autre nature. Il existe dans la DGF une prise en compte des sujétions spéciales imposées par l’État, à savoir les zones centrales des parcs nationaux. Je demande une étude pour qu’une autre sujétion spéciale imposée par l’État, les zones Natura 2000, puisse faire l’objet d’une compensation dans la mesure où, dans ces zones, il faut faire une étude d’impact avant de réaliser des travaux. Et c’est parfois très onéreux.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis favorable. Cet amendement peut également concerner les communes des zones touristiques de montagne qui ont beaucoup de zones Natura 2000, comme dans les Alpes.

La commission adopte l’amendement II-CF723 (amendement  II-1447).

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Article 61
Modification des règles de répartition des dispositifs
de péréquation horizontale

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, qui ont été examinés par la commission le jeudi 9 novembre 2017 après-midi.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Jean-René Cazeneuve et M. Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux) ([252]).

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La commission examine en discussion commune l’amendement II-CF574 de Mme Christine Pires Beaune et l’amendement CF575 de M. François Pupponi.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement vise à revenir sur l’assiette du plafonnement des prélèvements au titre du FPIC. Aujourd’hui, le plafond permet aux communes contributrices au FPIC de ne pas contribuer au-delà de 13 % de FPIC et Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France (FSRIF) réunis. Ce plafond est calculé en pourcentage des recettes fiscales. Je ne comprends pas pourquoi il n’est pas calculé par rapport à l’ensemble des recettes réelles de fonctionnement des communes. Lorsque la contribution au redressement des finances publiques a été créée, nous avons raisonné par rapport aux recettes réelles de fonctionnement. Cela réglerait peut-être une partie du problème rencontré par les communes de montagne. Il peut, en effet, y avoir des communes avec peu de recettes fiscales mais beaucoup de recettes réelles de fonctionnement et qui sont par conséquent plafonnées alors qu’elles ne devraient pas l’être. Il s’agit donc d’un amendement d’appel pour que ce plafond soit réexaminé.

M. le président Éric Woerth. Les communes de montagne ne sont pas les seules concernées.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. J’émets un avis défavorable, mais nous avons prévu de travailler sur cette question.

L’amendement II-CF574 est retiré. La commission rejette l’amendement II-CF575.

La commission examine les amendements identiques II-AC69 de Mme Annie Genevard et II-CF336 de Mme Émilie Bonnivard.

Mme Annie Genevard. Nous demandons la réduction de l’enveloppe du FPIC, qui est aujourd’hui d’un milliard d’euros, à 780 millions d’euros. Bien que l’enveloppe soit stable, les contributions sont en forte progression. En effet, le nombre de contributeurs diminuant, le montant de leur contribution augmente. Cette situation a pour corollaire l’imprévisibilité de la contribution.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis défavorable.

Mme Christine Pires Beaune. Le montant moyen prélevé en 2017 est inférieur au montant moyen prélevé en 2016. La baisse du nombre de contributeurs n’entraîne donc pas d’augmentation du montant prélevé.

Mme Annie Genevard. Le montant moyen ne rend pas compte des situations singulières, par définition.

La commission rejette les amendements II-AC69 et II-CF336.

La commission examine en discussion commune les amendements identiques II-AC66 de Mme Annie Genevard et II-CE90 de Mme Marie-Noëlle Battistel, ainsi que les amendements identiques II-AC67 de Mme Annie Genevard, II-CE88 de Mme Marie-Noëlle Battistel et II-CF346 de Mme Émilie Bonnivard.

Mme Annie Genevard. Cet amendement propose que le calcul du potentiel financier agrégé (PFIA) intègre l’attribution du FPIC. Il s’agit objectivement d’une ressource supplémentaire pour les collectivités. En miroir, nous proposons que soit déduite du PFIA la contribution au FPIC car il s’agit objectivement d’une charge.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Cet amendement va dans le sens de la soutenabilité du FPIC.

Mme Émilie Bonnivard. Cet amendement vise à corriger une anomalie relative à la non-prise en compte des contributions au FPIC pour le calcul de leur PFIA des ensembles intercommunaux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Vous relevez à juste titre des dysfonctionnements. Nous allons en faire un sujet de notre travail cette année dans l’objectif de mener une réflexion d’ensemble. J’émets donc un avis défavorable.

La commission rejette les amendements II-AC66 et II-CE90, puis les amendements IIAC67, II-CE88 et II-CF346.

La commission examine l’amendement II-CD12 de M. Martial Saddier visant à intégrer dans le calcul du FPIC la charge induite par la population touristique.

Suivant l’avis défavorable des rapporteurs spéciaux, la commission rejette l’amendement II-CD12.

La commission examine l’amendement II-CF311 de Mme Émilie Bonnivard.

Mme Émilie Bonnivard. Il s’agit d’un amendement de cohérence. On ne peut pas être riche et pauvre à la fois. Les communes défavorisées, et notamment les communes qui sont bénéficiaires du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP), ont par essence moins de ressources propres et plus de charges. Cet amendement vise à les exonérer de toute contribution au FPIC.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Il s’agit d’un sujet important que nous allons intégrer à notre travail. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement II-CF311.

La commission examine l’amendement II-CF696 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. La somme des prélèvements au titre du FPIC et FSRIF ne peut excéder 13 % des ressources prises en compte pour le calcul du PFIA. Nous proposons de rehausser ce plafond à 13,5 %. Trois établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) seront impactés : Paris-Ouest, Paris-La Défense et la communauté de communes des Falaises du Talou.

Suivant l’avis favorable des rapporteurs spéciaux, la commission adopte l’amendement II-CF696 (amendement  II-1448).

La commission examine l’amendement II-CF252 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement vise à rendre moins brutale la sortie du FPIC par ses anciens bénéficiaires.

Suivant l’avis défavorable des rapporteurs spéciaux, la commission rejette l’amendement II-CF252.

La commission examine l’amendement II-CF576 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Un fonds de solidarité Île-de-France a été créé il y a plusieurs décennies, le FSRIF. Il permet aux communes riches d’Île-de-France de financer les communes pauvres. Ce fonds a toujours augmenté depuis dix ans. Le Gouvernement propose d’arrêter cette augmentation en 2018. Cet amendement propose de la poursuivre en prévoyant une contribution supplémentaire de 20 millions d’euros. Elle serait payée à hauteur de 10 millions d’euros par la ville de Paris et de 10 millions par les communes riches des Hauts‑de‑Seine.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. La loi a fixé pour le fonds un objectif annuel de ressources s’établissant à 230 millions en 2013, 250 millions d’euros en 2014, 270 millions d’euros en 2015, 290 millions d’euros en 2016, 310 millions d’euros en 2017. Cet objectif permet de garantir la visibilité de ses ressources du fonds et témoigne de la volonté d’accroître la réduction des inégalités entre les communes franciliennes. Par parallélisme avec le FPIC, il n’est pas souhaitable d’augmenter le FSRIF.

Mme Christine Pires Beaune. Je plaide en faveur de cet amendement. Ce fonds ne peut être mis sur le même plan que le FPIC et car il est concentré sur l’Île-de-France, qui paye pour elle-même. L’incidence sur le FPIC est minime car le FSRIF passe avant le FPIC.

La commission rejette l’amendement II-CF576.

La commission examine l’amendement II-CF489 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Nous avons déjà débattu à plusieurs reprises de la fusion des deux départements et de l’actuelle collectivité territoriale de Corse en une collectivité unique. Cette fusion a pour effet de modifier les valeurs utilisées dans le calcul des dotations, notamment la dotation de péréquation. La dotation agrégée des deux départements s’élevait à 3,8 millions d’euros. En appliquant les nouvelles formules de calcul, la fusion en collectivité unique ferait diminuer la dotation à 0,5 million d’euros, soit une perte de 3,3 millions d’euros. L’objectif de cet amendement est de maintenir les données des deux départements de manière indépendante afin de ne pas pénaliser la vitalité de la future collectivité unique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Je vous propose de retirer cet amendement afin d’en expertiser les conséquences en vue de son examen en séance publique car il fige des données qui seront nécessairement modifiées avec la création de la nouvelle collectivité. Vous en avez parlé directement avec le ministre et vous savez que la collectivité de Corse sera prise en considération par le Gouvernement.

La commission rejette l’amendement II-CF489.

La commission examine l’amendement II-CF724 de M. Joël Giraud, Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Chaque année, un rapport sur le FPIC est remis au Parlement. Or, ce rapport n’a jamais analysé les problématiques dites des indicateurs agrégés mobilisés dans la répartition. En 2017, les règles ont été modifiées afin de prendre en compte un certain nombre de situations. Je demande que le rapport relatif au FPIC intègre ces données. Il s’agit d’une demande de longue date du Comité des finances locales à laquelle il n’a jamais été fait droit.

M. le président Éric Woerth. C’est une bonne idée.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur spécial. Avis favorable car cela précisera le rapport actuel.

La commission adopte l’amendement II-CF724 (amendement  II-1450), puis adopte l’article 61 modifié.

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Après l’article 61

La commission examine l’amendement II-CF583 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. La dotation de politique de la ville porte mal son nom car c’est en réalité une subvention. Nous proposons qu’elle devienne une vraie dotation affectée aux communes en début d’année afin qu’elle ne soit plus à la main des préfets qui ne distribuent, chaque année, que la moitié de la somme qui devrait revenir aux quartiers.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. La DPV, si elle devenait une dotation, entrera-t-elle dans la DSU ? On ne va pas faire une DSU bis. Avis défavorable.

M. François Pupponi. La DSU est une dotation à destination des communes pauvres, de banlieue ou non, alors que la DPV s’adresse spécifiquement aux communes qui relèvent de la politique de la ville. J’ajoute que ma proposition ne coûterait rien puisque la DPV est déjà budgétée.

La commission rejette l’amendement II-CF583.

L’amendement II-CF577 de M. François Pupponi est retiré.

La commission examine l’amendement II-CF585 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Cet amendement vise à remédier aux effets d’aubaine apparus avec la fusion des intercommunalités. Des communes riches qui ont intégré des intercommunalités pauvres ont vu leur contribution au FPIC diminuer ou disparaître et des communes pauvres n’en n’ont plus bénéficié. Avant la création des établissements publics territoriaux (EPT) en Île-de-France, la ville de Clichy-sous-Bois touchait 500 000 euros du FPIC, et Rosny-sous-Bois contribuait pour 8 millions. Aujourd’hui la première ne touche plus rien et la seconde gagne 8 millions. La réforme a permis que les pauvres s’appauvrissent et les riches s’enrichissent.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. On en revient toujours au même débat. Avis défavorable. Cela fait partie des sujets dont on discutera l’année prochaine.

L’amendement II-CF585 est rejeté.

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Article 62
Revalorisation de la dotation pour les titres sécurisés

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Relations avec les collectivités territoriales, qui ont été examinés par la commission le jeudi 9 novembre 2017 après-midi.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (M. Jean-René Cazeneuve et M. Christophe Jerretie, rapporteurs spéciaux) ([253]).

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Suivant l’avis favorable des rapporteurs spéciaux, la commission adopte l’article 62 rattaché, sans modification.

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Après l’article 62

La commission examine les amendements identiques II-CF345 de Mme Émilie Bonnivard et II-CF551 de M. Xavier Roseren.

Mme Émilie Bonnivard. Cet amendement vise à revenir à la situation antérieure à la loi de finances pour 2017 en ne conditionnant plus l’attribution de la fraction bourg-centre de la DSR à un plafonnement de la population DGF. La situation ainsi créée était particulièrement injuste pour des communes à forte attractivité touristique. En effet, les charges de centralité importantes auxquelles elles ont à faire face malgré une population permanente inférieure à 1 500 habitants ne sont pas prises en compte.

M. Xavier Roseren. Le plafonnement de la population DGF a été créé en 2017 sans simulation ni concertation avec les communes concernées. La perte de leur fraction bourg-centre menace la pérennité des services publics de proximité qu’elles doivent assurer, et engendre un effet de seuil extrêmement brutal, excluant une dizaine de communes du dispositif dont la moitié en zone de montagne.

M. Christophe Jerretie, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le Rapporteur général. Nous venons de voter la remise d’un rapport qui répond à cette préoccupation.

Les amendements II-CF345 et II-CF551 sont retirés.

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Remboursements et dégrèvements

Après l’article 62

Lors de sa réunion du mercredi 8 novembre 2017 matin, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Remboursements et dégrèvements, la commission est saisie de l’amendement IICF691 de Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale.

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. Cet amendement vise à revenir sur le taux des intérêts moratoires. Nous avons évoqué ce sujet au cours de la commission élargie de ce matin ainsi qu’à l’occasion de l’examen du premier projet de loi de finances rectificative pour 2017. Au vu de ce que vient de nous indiquer le ministre et de ce qui devrait donc figurer dans le second projet de loi de finances rectificative, je retire l’amendement, dont j’ai d’ailleurs conscience qu’il omet d’inclure la question des intérêts de retard, en souhaitant que le Gouvernement tienne son engagement dans ce prochain « collectif » de fin d’année.

M. Charles de Courson. Je rappelle qu’au moment de nos précédentes discussions sur le sujet, en 2006, l’écart entre le taux applicable aux créances et celui applicable aux dettes était scandaleux, de l’ordre de un à trois. Nous avons alors souhaité les rapprocher et j’ai même défendu l’idée qu’ils devaient être symétriques. Il faudra donc bien vérifier que la proposition du Gouvernement porte à la fois sur les créances et les dettes. En outre, si nous voulons éviter que ce débat revienne périodiquement, il conviendrait que le taux soit indexé, par exemple sur celui des obligations assimilables du trésor (OAT), afin de pouvoir évoluer en fonction des taux d’intérêt.

M. le président Éric Woerth. Ces questions ont été longuement évoquées lundi dernier en séance publique. Le Gouvernement n’ayant pas souhaité que soit adopté un amendement parlementaire, il doit maintenant veiller à donner une solution complète au problème posé.

Mme Amélie de Montchalin. Il en a effectivement déjà été question tant en commission qu’en séance publique. Nous souhaitons que le prochain projet de loi de finances rectificative inclue une telle disposition mais les échanges que j’ai pu avoir, notamment avec Mme Rabault, sur le point de savoir s’il était possible d’aborder la question sous un angle plus dynamique montrent que l’absence d’existence légale de l’OAT soulève des difficultés d’ordre juridique. Dès lors, le Parlement devrait s’engager à réviser régulièrement le taux – bien entendu de façon symétrique, à la fois pour les créanciers et pour les débiteurs. Nous aurons évidemment l’occasion d’en reparler.

L’amendement IICF691 est retiré.

La commission en vient à l’amendement II–CL103 de M. Ugo Bernalicis.

M. Éric Coquerel. Nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur les exonérations et dégrèvements d’impôts locaux, qui se situent à un niveau élevé. Ce sont des mécanismes différents : lorsqu’il s’agit de dégrèvements, les collectivités territoriales conservent la maîtrise de l’assiette et du taux, alors qu’elles ne disposent plus d’aucune marge de manœuvre lorsqu’il s’agit d’exonérations, l’État leur transférant forfaitairement les fonds évalués en compensation de ces exonérations. Il serait intéressant que nous soyons informés des conséquences de cette politique qui est menée depuis de nombreuses années, de façon à pouvoir juger des politiques à venir en la matière.

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. J’émettrai un avis défavorable à cet amendement. Non pas que le sujet ne soit pas intéressant, bien au contraire, mais la mission Remboursements et dégrèvements ne comprend pas les compensations des exonérations. En effet, prenant la forme de prélèvements sur recettes, elles ne sont pas incluses dans cette mission. En revanche, mon rapport spécial traite des dégrèvements. Je vous renvoie en outre au « jaune » Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales, qui présente des éléments à la fois sur les exonérations et sur les dégrèvements, au rapport annuel de l’Observatoire des finances locales, au rapport de la Cour des comptes sur les finances locales ainsi qu’aux publications statistiques des directions générales des finances publiques et des collectivités locales. Surtout, la loi de finances pour 2017 prévoit qu’un rapport sera remis au Parlement sur le coût pour les collectivités territoriales des mesures d’exonération et d’abattement d’impôts directs locaux.

La commission rejette l’amendement II–CL103.

La commission examine l’amendement II–CL104 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale. Je souhaite que cet amendement soit retiré, puis fasse l’objet d’une rédaction différente afin d’être déposé en vue de la séance publique, car nous n’avons pas d’éléments sur ces remises gracieuses et il serait donc intéressant de pouvoir en disposer.

M. Éric Coquerel. L’amendement sera modifié et redéposé en vue de la séance publique.

L’amendement II–CL104 est retiré.

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Santé

Après l’article 62

Lors de sa réunion du mardi 7 novembre 2017 soir, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Santé, la commission examine l’amendement II-CF357 de M. Julien Aubert.

M. Thibault Bazin. Le précédent gouvernement a supprimé en 2012 deux dispositions importantes du dispositif de l’aide médicale de l’État pour les étrangers (AME), qui participait à sa bonne gestion. Il s’agit d’une part du droit annuel forfaitaire de 30 euros, dit « droit de timbre », qui en conditionnait le bénéfice pour les majeurs. Gérald Darmanin, lui-même, avait indiqué en 2014 « que le problème n’était pas l’AME mais la suppression du droit de timbre. C’est le principe que même quand on est dans le besoin on doit contribuer ». D’autre part, la procédure d’agrément préalable pour les soins hospitaliers les plus coûteux a aussi été supprimée. Or, il n’y a pas de contrôle des ressources des bénéficiaires, une simple attestation sur l’honneur étant demandée. Pour des raisons éthiques et sanitaires, il faudrait remplacer l’AME par une aide médicale d’urgence. Nous ne voulons priver personne de soins mais il faudrait rétablir ces deux dispositifs qui responsabilisent la consommation de soins.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale des crédits de la mission Santé. J’insiste sur le fait qu’il ne s’agit pas d’un amendement de suppression de l’AME mais que l’objectif est de rétablir des dispositions qui ont existé. Quand on voit les sommes importantes qui sont consacrés à l’AME, cela est indispensable. Je suis favorable à cet amendement dont je suis cosignataire.

M. Jean-Louis Touraine. Cet amendement risque de conduire à un report de l’accès aux soins pour les personnes les plus en difficulté. Avant 2012, on a pu constater que les soins étaient plus tardifs et effectués en milieu hospitalier. S’y ajoute le risque de contamination accru dans le cas de pathologies infectieuses transmissibles. Ces résultats désastreux en termes de coût et de santé publique avaient conduit à leur abrogation.

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous raisonnez en termes de coûts en comparant celui de l’AME avant 2012 et son montant d’aujourd’hui. Au regard de la progression de cette ligne budgétaire, on doit se poser des questions. Mais surtout, comment peut-on admettre que des Français en situation régulière soient obligés de payer un reste à charge en matière de santé, alors que d’autres personnes en situation irrégulière ont gratuitement accès à tous les soins. Cela va contre l’équité. Il faut mettre en place sur ce sujet une politique cohérente.

Mme Émilie Cariou, présidente. Mme la ministre a bien précisé que l’AME n’ouvrait pas un accès gratuit à tous les soins mais à un panier de soins bien défini.

Mme Amélie de Montchalin. Le groupe La République en marche votera contre cet amendement. Rétablir le droit de timbre va aboutir un report de la demande de soins pour finalement un coût médical qui sera plus élevé. Il est essentiel que le panier de soins auquel la ministre a fait référence soit accessible à tous ceux qui en ont besoin, sans délai, dans l’intérêt de tous sur le territoire.

M. Michel Lauzanna. Des personnes contagieuses, si elles ne sont pas soignées peuvent constituer un risque pour l’ensemble de la population qui peut donc contribuer pour que ces personnes puissent être traitées.

M. Thibault Bazin. Personne dans notre groupe ne souhaite que des personnes demeurent sans soins. Nous recherchons un système efficace et qui responsabilise les malades. S’en tenir à une déclaration sur l’honneur des ressources du bénéficiaire de l’AME comme c’est le cas aujourd’hui, empêche tout contrôle. Grâce à la dispense d’avance de frais, des patients à l’AME ne connaissent aucune restriction d’accès à la consommation des soins. Nous proposons une réforme de l’AME pas sa suppression.

Mme Amélie de Montchalin. Quand l’accès aux soins est conditionné au paiement d’un droit annuel, on constate que les patients qui ne sont pas en mesure de payer, renoncent à se soigner. Leur prise en charge est finalement plus coûteuse car elle est plus tardive et cette situation n’est pas sans danger en termes de santé publique.

La commission rejette l’amendement II-CF357.

La commission examine l’amendement II-CF402 de Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale. Cet amendement demande la remise d’un rapport analysant les raisons de l’évolution des dépenses au titre de l’AME. Les crédits du programme Protection maladie ont augmenté de façon particulièrement marquée ces dernières années en raison du coût de l’AME. On dépasse aujourd’hui le milliard d’euros, si l’on prend en compte les soins urgents financés par l’assurance maladie, l’accès aux soins des étrangers en situation irrégulière de Mayotte et les personnes qui restent sur le territoire après le rejet de leur demande d’asile. Ces crédits sont chaque année sous-évalués. On ne peut laisser dériver les comptes de ce système généreux sans au moins en comprendre les raisons.

Les seuls crédits dédiés à l’AME augmentent, de plus de 109 millions d’euros en 2018, alors même que le nombre des bénéficiaires diminue au dernier trimestre. La direction de la sécurité sociale, dont j’ai rencontré les représentants, n’est pas en mesure d’expliquer cette baisse. Nous avons besoin d’une étude sur ce sujet.

Mme Amélie de Montchalin. Un rapport peut toujours être utile, mais la ministre n’a pas cherché pas à cacher des éléments, les données figurent dans les documents budgétaires et vous avez accès en tant que rapporteure spéciale aux informations que vous souhaitez. Comme cela vient d’être dit, la diminution du nombre de bénéficiaires intervient après une forte hausse et le budget est, en réalité, maîtrisé. Le contrôle de ces questions relève des missions des rapporteurs spéciaux.

M. Jean-Louis Touraine. L’augmentation des coûts est proportionnelle à celle des bénéficiaires qui sont passés entre 2003 et 2016, de 180 000 à 311 000. Leur diminution des derniers mois laisse penser qu’il n’y aura pas d’envolée des demandes. Le coût fluctue en fonction du nombre de bénéficiaires et pour chacun d’entre eux reste constant. Nous n’avons pas besoin d’un nouveau rapport.

M. Thibault Bazin. Nous avons passé une grande partie de la réunion de commission élargie à discuter de l’AME. Soutenir cet amendement nous permettra de repartir d’un bilan partagé.

Mme Émilie Cariou, présidente. Nous avons abordé bien d’autres sujets importants au cours de notre réunion.

Mme Véronique Louwagie. Notre interrogation n’est pas polémique, elle relève de notre devoir de contrôle de l’action du Gouvernement car nous n’avons pas toutes les explications sur l’évolution des bénéficiaires de l’AME et de ses coûts.

Mme Amélie de Montchalin. C’est bien le rôle des rapporteurs spéciaux que de travailler en bonne intelligence avec l’administration et le ministre pour établir des constats qui pourront être partagés. Le rapport spécial est le bon outil pour effectuer ce suivi.

La commission rejette l’amendement II-CF402.

La commission examine l’amendement II-CE75 de Mme Ericka Bareigts.

Mme Ericka Bareigts. Cet amendement demande à ce qu’un rapport soit élaboré sur la possibilité de créer un fonds d’indemnisation pour les victimes du dispositif médical implantable de stérilisation définitive Essure. Au moins 2 000 femmes seraient concernées. Elles subissent au quotidien de multiples effets indésirables. Nombreuses sont celles qui ont dû renoncer à leur activité professionnelle et n’ont ainsi plus de revenus. Ces femmes sont en contentieux avec le laboratoire Bayer dans des procédures qui pourront durer de nombreuses années. Par ailleurs, aucun protocole de retrait permettant l’explantation du dispositif n’a été prévu en cas d’échec ou de complications. Son retrait impose une intervention chirurgicale lourde. Comme pour les victimes du Mediator et de la Dépakine, elles souhaitent la création d’un fonds d’indemnisation adossé à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), sans préjudice des actions qui peuvent être exercées selon le droit commun.

M. Jean-Louis Touraine. Cette demande d’indemnisation est légitime. Le nickel présent dans ce dispositif peut susciter des allergies ou des intolérances. Faut-il pour autant mettre en place un processus d’indemnisation dérogatoire ? Aujourd’hui, les fonds spécifiques sont créés en cas de faute des pouvoirs publics, d’indemnisations de très grande ampleur ou de risque de défaut d’indemnisation. Il faut éviter de multiplier les fonds difficiles à calibrer car on ne connaît pas le nombre des victimes au moment de leur création, mais au contraire mutualiser le risque en cas d’accident thérapeutique, dans le fonds de droit commun sachant que l’indemnisation sera la même.

Mme Ericka Bareigts. Les procédures contentieuses sont extrêmement longues. Mettre en place une indemnisation par un fonds permet qu’il soit activé rapidement et qu’ensuite l’État se retourne vers les responsables.

M. Jean-Louis Touraine. Pour ajouter à ce que vous dites, les femmes avec ce dispositif pâtissent d’un préjudice psychologique lié au risque potentiel qu’il peut présenter pour elles. Cela dit, l’indemnisation par le biais du fonds de l’ONIAM et selon les procédures standards est tout aussi rapide. L’État se retourne ensuite contre les fabricants. Ce résultat peut être obtenu sans création d’un fonds spécifique.

Mme Véronique Louwagie, rapporteure spéciale. Il est important de faciliter leur parcours d’indemnisation. Un rapport sur la possibilité de créer un fonds permettrait de mesurer le phénomène pour lui apporter la bonne réponse.

Mme Amélie de Montchalin. Il faut, dans un premier temps, s’en tenir au dispositif de droit commun qui permet l’indemnisation et suivre son bon déroulement. Il serait prématuré dès aujourd’hui de créer un fonds spécifique.

Mme Émilie Cariou, présidente. Les femmes subissent souvent des choix aléatoires en matière médicale, on ne peut les laisser sans solution. La ministre saura en séance publique nous fournir les informations nécessaires sur le suivi de ces victimes.

La commission rejette l’amendement II-CE75.

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Solidarité, insertion et égalité des chances

Article 63
Évolution de la prime d’activité

Cet article a été rattaché aux crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, qui ont été examinés par la commission le vendredi 3 novembre 2017 après-midi.

Il a fait l’objet d’un commentaire dans le rapport spécial relatif à cette mission et annexé au présent rapport général (Mme Stella Dupont, rapporteure spéciale) ([254]).

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Suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission adopte l’article 63 rattaché, sans modification.

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Sport, jeunesse et vie associative

Article additionnel après l’article 63
Création d’une annexe générale au projet de loi de finances
présentant les dépenses publiques engagées relatives
à l’accueil des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024

Lors de sa réunion du mercredi 25 octobre 2017 après-midi, à l’issue de l’examen des crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative, la commission examine l’amendement IICF126 de Mme Perrine Goulet.

Mme Perrine Goulet, rapporteure spéciale. L’amendement CF126 propose de créer un « jaune » permettant de faire toute la transparence sur le financement public des Jeux olympiques et paralympiques de 2024, afin notamment d’identifier toute dérive des coûts.

M. Éric Coquerel. Je voterai pour l’amendement, dont le champ pourrait d’ailleurs être élargi aux conditions sociales dans lesquelles se dérouleront les préparatifs de ces Jeux.

La commission adopte l’amendement II-CF126 (amendement  II-97).

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Participations financières de l’État

Après l’article 63

Lors de sa réunion du mercredi 8 novembre 2017 matin, à l’issue de l’examen des crédits du compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État, la commission examine l’amendement II–CF440 de Mme Muriel Ressiguier.

M. Éric Coquerel. L’État était présenté tout à l’heure comme mauvais gestionnaire d’entreprises. Je ne sais pas si l’État est mauvais gestionnaire – je pense plutôt qu’il ne l’est pas – mais les entreprises privées n’ont pas de leçons à donner, en tout cas s’agissant des intérêts stratégiques et de l’intérêt général. Je pense notamment aux cessions qui ont concerné Florange, Alstom, les Chantiers navals STX Saint-Nazaire, Nexter et Alcatel-Lucent, toutes entreprises liées à des intérêts stratégiques, notamment à la question de la transition écologique.

Chacun comprendra en effet que fermer des hauts fourneaux nous oblige à importer des produits métallurgiques à un coût carbone très élevé. Avec Alstom, les incidences viennent tant de General Electric – ce qui nous prive aujourd’hui du seul fabricant français d’éoliennes marines – que du ferroviaire – ce qui pose un problème en termes de planification et d’aménagement du territoire ainsi que d’écologie. Les Chantiers navals de Saint‑Nazaire soulèvent la question de l’économie de la mer, alors qu’elle devrait être un gisement d’emplois industriels dans les années à venir en France, ce qui aurait dû nous inciter à ne pas vendre cette entreprise à l’Italien Fincantieri. Enfin, pour ce qui est de l’armement, au travers de Nexter, chacun sait par exemple que la France n’est plus aujourd’hui capable de fournir à ses armées des munitions qui soient fabriquées sur le sol national.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous souhaitons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport qui évaluerait le coût financier d’une reprise éventuelle par l’État de sites industriels et de fleurons que je viens d’évoquer et permettrait de savoir aussi en quoi cette reprise serait bénéfique pour la transition écologique ou, plus globalement, pour les intérêts stratégiques de l’État.

Mme Christine Pires Beaune, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure spéciale. Je précise qu’il s’agit sur cette série d’amendements de l’avis de Valérie Rabault, en tant que rapporteure spéciale, que je supplée.

Sur ce premier amendement, elle considère qu’il s’agit davantage d’un amendement d’appel pour discuter en séance publique avec le Gouvernement sur les actions à mener en matière de sauvetage d’entreprises que d’une réelle demande d’informations. Son avis est donc défavorable.

La commission rejette l’amendement II–CF440.

La commission examine l’amendement II–CF441 de Mme Muriel Ressiguier.

M. Éric Coquerel. Cet amendement est du même type mais il va plus loin. Depuis 1986, de nombreuses privatisations et cessions de participations de l’État sont intervenues dans des secteurs économiques, industriels et stratégiques pour la Nation, notamment dans les secteurs de la banque, des assurances, de l’énergie et des transports. Si l’on considère le taux d’industrialisation qui, dans notre pays, a constamment baissé durant cette période, puisqu’il atteint désormais à peine 12 %, si l’on considère la politique d’investissement et la politique bancaire, on peut s’interroger sur les raisons qui ont conduit la France à désarmer ainsi l’État en matière de stratégie industrielle ou financière et sur leurs conséquences.

Mme Christine Pires Beaune, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure spéciale. Même avis. En outre, la rapporteure spéciale publiera des données complémentaires de nature pédagogique.

La commission rejette l’amendement II–CF441.

La commission examine l’amendement II–CF534 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Cet amendement est relatif à une discussion que nous avons eue tout à l’heure à l’occasion des questions posées au ministre. Il nous semble opportun et urgent de procéder à un audit de la dette publique qui, contrairement à ce qui a été affirmé à maintes reprises, n’est pas due à l’explosion des dépenses publiques mais plutôt au fait que l’État s’est privé de recettes depuis de nombreuses années. J’ai cité un certain nombre d’exemples, ne serait‑ce que dans le présent projet de loi de finances pour 2018, notamment au travers de la flat tax et de l’impôt de solidarité sur la fortune, mais on peut également penser au CICE. La dette a également augmenté en raison du renflouement du secteur bancaire après la crise de 2008. Cet audit permettrait de distinguer dette légitime, qui contribue à l’investissement et au bien‑être la Nation, et dette illégitime, qui sert avant tout à socialiser des pertes des marchés privés ou des marchés financiers. Beaucoup en parlent et il nous semble nécessaire de le concrétiser au travers de ce rapport.

Mme Christine Pires Beaune, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure spéciale. Avis défavorable. Au demeurant, cet amendement relève davantage de la mission Engagements financiers de l’État.

La commission rejette l’amendement II–CF534.

Suivant l’avis de Mme Christine Pires Beaune, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure spéciale, la commission rejette ensuite l’amendement IICF543 de M. Éric Coquerel.

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Article additionnel près l’article 63
Rapport du Gouvernement au Parlement faisant le bilan
de la privatisation des autoroutes

La commission en vient à l’amendement II–CF545 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Il s’agit ici d’un rapport sur l’un des plus grands scandales en matière de privatisations, celui des autoroutes, qui mêle conflits d’intérêts, puisque nous avons réussi l’exploit de vendre des autoroutes à des multinationales – Eiffage, Abertis et Vinci – qui agissent à la fois sur les transports et sur les travaux faits sur ces voies, dans une opacité totale. Ces sociétés ont fait des bénéfices sur des investissements provenant de l’État et la quasi‑totalité de l’augmentation des péages autoroutiers, c’est‑à‑dire environ 20 % depuis les privatisations, a en fait été reversée à la rente. Pour toutes ces raisons, auxquelles s’ajoutent les pertes de recettes pour l’État, il nous semble important que soit remis au Parlement un rapport sur cette question.

Mme Christine Pires Beaune, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure spéciale. Je rappelle que la privatisation a été décidée en 2006 par M. Dominique de Villepin, alors Premier ministre. En juillet 2013, un rapport de la Cour des comptes a fait apparaître que l’État a accepté de compenser par des hausses de tarifs un grand nombre d’investissements de faible ampleur, dont l’utilité pour l’usager n’était pas toujours avérée ou qui relevaient des obligations normales des concessionnaires. Depuis 2006, la hausse des tarifs des péages a presque toujours été constamment supérieure à l’inflation : en 2008, par exemple, l’inflation s’est élevée à 1,8 % mais une société d’autoroutes a imposé une augmentation des tarifs de 4,32 %. Ces hausses permettent de bien servir les actionnaires, comme le relève l’Autorité de la concurrence. La politique de distribution des dividendes a radicalement changé depuis la privatisation. Lors de son audition par notre commission en 2014, l’Autorité a estimé qu’« on peut aujourd’hui parler d’une rentabilité exceptionnelle des sociétés concessionnaires d’autoroutes, qui ne paraît justifiée ni par le risque propre à leur activité, ni par les évolutions de leurs charges, ni même par le poids de leur dette ». Gilles Carrez avait d’ailleurs répondu que « nous étions assez nombreux à considérer en 2005 qu’il valait mieux garder ces sociétés dans l’orbite de l’État ». Je crois que tout est dit. C’est pourquoi je donne un avis favorable à cet amendement.

M. Charles de Courson. J’étais de ceux qui ont combattu cette privatisation – privatisation non pas des autoroutes, mais des sociétés concessionnaires, puisqu’à l’échéance des concessions, l’État est toujours propriétaire des infrastructures. C’était une énorme erreur à tout point de vue. En 2013, le très intéressant rapport de la Cour des comptes s’est interrogé sur le point de savoir si les groupes avaient abusé de leurs pouvoirs de concessionnaires pour réaliser les travaux avec leurs filiales de BTP. C’est, pour partie, le cas et la Cour a essayé de comparer les prix de revient en fonction du caractère, interne ou externe à ces groupes, des travaux, relevant quelques écarts, quoique relativement faibles. Je rappelle que l’administration maîtrise la réévaluation des tarifs des péages mais que le système du foisonnement a abouti à une augmentation du point moyen des péages. Je ne suis donc pas défavorable à cet amendement. Certains pensent même que l’État devrait racheter les concessions, mais à quel coût ?

Mme Émilie Cariou. Compte tenu des interventions de M. Coquerel et de Mme Pires Beaune, complétées par l’avis éclairé de M. de Courson, je pense qu’il s’agit d’un sujet essentiel sur lequel nous avons besoin d’y voir beaucoup plus clair. Un rapport ciblé nous paraît tout à fait justifié et nous y sommes donc favorables.

La commission adopte l’amendement II–CF545 (amendement  II1142).

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Après l’article 63

Suivant l’avis de Mme Christine Pires Beaune, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure spéciale, la commission rejette l’amendement II–CF547 de M. Éric Coquerel demandant un rapport sur la stratégie de l’État actionnaire.

La commission examine ensuite l’amendement II–CF553 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Le ministre a parlé tout à l’heure d’aides aux PME, y compris aux entreprises en difficulté, et estimé que faire des cadeaux fiscaux aux détenteurs de capitaux pouvait permettre de développer l’investissement productif – on connaît tout le discours sur les cadeaux au capital, les investissements productifs de demain et l’emploi d’après-demain. Très franchement, je ne vois pas comment favoriser les dividendes des très grandes entreprises aurait un effet mécanique sur les PME. Au contraire, j’ai même tendance à penser, y compris par expérience pratique et personnelle, que, très souvent, les PME, en réalité, payent au niveau de leur chiffre d’affaires et de leurs marges précisément ceux qui, en dernier ressort, sont leurs donneurs d’ordres, même de manière indirecte, et qu’elles financent ainsi la rente des plus grosses entreprises. C’est une des raisons pour lesquelles un pôle public bancaire serait aujourd’hui nécessaire, car il pourrait assurer ce qui manque cruellement aux PME aujourd’hui, à savoir des taux d’intérêt très faibles, quand elles sont en difficultés et que les banques, dans ces situations‑là, se montrent – c’est le moins qu’on puisse dire – assez impitoyables avec elles.

Mme Christine Pires Beaune, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure spéciale. Avis défavorable.

Mme Amélie de Montchalin. Nous avons déjà eu l’occasion d’aborder ce sujet. L’offre bancaire est extrêmement variée, avec Bpifrance, les banques mutualistes et même les banques de la sphère de l’économie sociale et solidaire. Il nous semble que le problème principal auquel nous devons faire face est moins l’accès au crédit que l’accès à des financements de long terme, souvent en fonds propres. Ces outils ne relèvent pas forcément du pôle public bancaire à nouveau en termes de crédits, puisqu’ils fragiliseraient des PME déjà extrêmement endettées, mais il s’agit de comprendre comment la panoplie d’instruments de financement peut être développée. Par ailleurs, Bpifrance est déjà d’une certaine manière un pôle public bancaire puisqu’elle garantit les banques quand celles‑ci prêtent à des entreprises qui pourraient avoir un profil plus risqué. Nous pensons donc que le sujet mérite attention mais que se lancer dans une grande réflexion sur les modalités de création d’un pôle public bancaire semble prématuré et qu’il faut dès lors, à ce stade, travailler sur d’autres solutions.

M. le président Éric Woerth. Il existe déjà, en effet, de grands pôles publics.

M. Éric Coquerel. Je ne vois pas pourquoi tous les arguments que vous invoquez ne pourraient pas être inclus dans le rapport que nous demandons afin d’être éclairés.

Mme Amélie de Montchalin. Dans ce cas, faisons‑le au Parlement : je ne suis pas sûre que demander au Gouvernement de faire ce travail soit la bonne solution. Les parlementaires peuvent très bien se saisir de cette question.

M. Éric Coquerel. Nous avons toujours le même débat sur ce point depuis quelques jours.

La commission rejette l’amendement II–CF553.

Elle est ensuite saisie de l’amendement II–CF554 de M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Au moment où il est question de privatiser les aéroports de Paris, cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement « un rapport d’information faisant état des privatisations des aéroports de Toulouse, Nice et Lyon et des problèmes financiers, de sécurité et de souveraineté nationale que ces privatisations peuvent poser ». Chacun conviendra que les aéroports sont un secteur stratégique pour l’État à tous égards, que ce soit en matière de sécurité, y compris face aux actes terroristes, de sécurité aérienne ou de gestion du transport aérien. Il nous semble donc nécessaire de disposer d’un rapport au moment même où commence à se développer la vente de ces aéroports, y compris à des sociétés étrangères. Cela nous semble à la fois poser un problème stratégique en matière de transports et de sécurité aérienne et constituer une mauvaise opération pour l’État.

Mme Christine Pires Beaune, suppléant Mme Valérie Rabault, rapporteure spéciale. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement II–CF554.

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Au cours de sa séance du jeudi 9 novembre 2017 après-midi, la commission adopte la seconde partie du projet de loi de finances pour 2018 modifiée.

Puis, elle adopte l’ensemble du projet de loi de finances pour 2018 ainsi modifié.

 


—  1  —

annexe :

Liste des rapports spéciaux annexés au rapport général
sur le projet de loi de finances pour 2018

 

Rapports spéciaux

Rapporteurs spéciaux

Date de la réunion de la commission des finances

1. Action extérieure de l’État

M. Vincent LEDOUX

Jeudi 26 octobre
17 h 20

2. Action extérieure de l’État : Tourisme

Mme Émilie BONNIVARD

Jeudi 26 octobre
17 h 20

3. Administration générale et territoriale de l’État

M. Jacques SAVATIER

Mardi 24 octobre
18 h 55

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales :

4. Politiques de l’agriculture, forêt, pêche et aquaculture ; Développement agricole et rural

5. Sécurité alimentaire

 

M. Hervé PELLOIS

Mme Émilie CARIOU

 

M. Michel LAUZZANA

Jeudi 26 octobre
11 h 40

6. Aide publique au développement ; Prêts à des États étrangers

M. Marc LE FUR

Vendredi 27 octobre
16 h 45

7. Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

M. Fabien ROUSSEL

Mercredi 25 octobre
11 h 45

Cohésion des territoires :

8. Logement et hébergement d’urgence

9. Politique des territoires

 

M. François JOLIVET

M. Mohamed LAQHILA

Vendredi 27 octobre
12 h 20

10. Conseil et contrôle de l’État

M. Daniel LABARONNE

Lundi 6 novembre
18 h 45

Culture :

11. Création ; transmission des savoirs et démocratisation de la culture

12. Patrimoines

 

M. Pierre PERSON

 

M. Gilles CARREZ

Mardi 7 novembre
11 h 20

Défense :

13. Préparation de l’avenir

14. Budget opérationnel de la défense

 

M. François CORNUT-GENTILLE

M. Olivier GAILLARD

Jeudi 2 novembre
23 h 50

15. Direction de l’action du Gouvernement ; Publications officielles et information administrative. Investissements d’avenir

Mme Marie-Christine DALLOZ

Lundi 6 novembre
18 h 45

Écologie, développement et mobilité durables :

16. Paysage, eau et biodiversité ; Prévention des risques ; Expertise, information géographique et météorologie ; Conduite et pilotage des politiques

17. Affaires maritimes

18. Énergie, climat et après-mines ; Service public de l’énergie ; Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ; Transition énergétique

19. Infrastructures et services de transports ; Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ; Aides à l’acquisition de véhicules propres ; Contrôle et exploitation aériens

 

 

M. Éric COQUEREL

 

 

M. Saïd AHAMADA

 

 

M. Julien AUBERT

 

 

 

Mme Anne-Laure CATTELOT

M. Benoît SIMIAN

 

Mercredi 1er novembre
0 h 10

Économie :

20. Développement des entreprises et du tourisme ; Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

21. Commerce extérieur

22. Statistiques et études économiques ; Stratégie économique et fiscale ; Accords monétaires internationaux

 

 

Mme Olivia GREGOIRE

M. Xavier ROSEREN

 

Mme Nicolas FORISSIER

 

M. Philippe CHASSAING

M. Alexandre HOLROYD

Mercredi 8 novembre
19 h 10

23. Engagements financiers de l’État

Mme Bénédicte PEYROL

Mme Dominique DAVID

Mercredi 8 novembre
11 h 10

24. Enseignement scolaire

Mme Catherine OSSON

Mme Aina KURIC

Vendredi 3 novembre
11 h 35

Gestion des finances publiques et des ressources humaines :

25. Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local ; Facilitation et sécurisation des échanges. Conduite et pilotage des politiques économiques et financières ; Action et transformation publiques

26. Fonction publique ; Crédits non répartis

27. Gestion du patrimoine immobilier de l’État

 

 

 

 

M. Laurent SAINT-MARTIN

 

 

 

Mme Cendra MOTIN

M. Jean-Paul MATTEI

Jeudi 2 novembre
17 h 25

28. Immigration, asile et intégration

M. Stanislas GUERINI

M. Jean-Noël BARROT

Lundi 30 octobre
18 h 15

29. Justice

M. Patrick HETZEL

Mercredi 25 octobre
22 h 55

30. Médias, livre et industries culturelles ; Avances à l’audiovisuel public

Mme Marie-Ange MAGNE

Mardi 7 novembre
18 h 40

31. Outremer

M. Olivier SERVA

Lundi 30 octobre
23 h 25

32. Pouvoirs publics

M. Philippe VIGIER

Lundi 6 novembre
18 h 45

Recherche et enseignement supérieur :

33. Recherche

34. Enseignement supérieur et vie étudiante

 

Mme Amélie DE MONTCHALIN

M. Fabrice LE VIGOUREUX

Mardi 24 octobre
23 h 15

35. Régimes sociaux et de retraite ;
Pensions

M. Olivier DAMAISIN

Jeudi 2 novembre
17 h 25

36. Relations avec les collectivités territoriales ; Avances aux collectivités territoriales

M. Jean-René CAZENEUVE

M. Christophe JERRETIE

Jeudi 9 novembre
17 h 20

37. Remboursements et dégrèvements

Mme Christine PIRES BEAUNE

Mercredi 8 novembre
11 h 10

38. Santé

Mme Véronique LOUWAGIE

Mardi 7 novembre
23 h 00

Sécurités

39. Police, gendarmerie, sécurité routière, Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

40. Sécurité civile

 

 

M. Romain GRAU

Mme Nadia HAI

 

M. Patrick MIGNOLA

Jeudi 26 octobre
23 h 20

41. Solidarité, insertion et égalité des chances

Mme Stella DUPONT

Vendredi 3 novembre
16 h 50

42. Sport, jeunesse et vie associative

Mme Perrine GOULET

Mme Sarah EL HAÏRY

Mercredi 25 octobre
18 h 20

43. Travail et emploi ; Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage

Mme Marie-Christine VERDIER-JOUCLAS

M. Gilles LE GENDRE

Mardi 31 octobre
11 h 35

44. Participations financières de l’État ; Participation de la France au désendettement de la Grèce ; Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

Mme Valérie RABAULT

Mercredi 8 novembre
11 h 10

 


([1]) Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, article 51.

([2]) (lien).

([3]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

([4]) Loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

([5]) Loi n° 73-1150 du 27 décembre 1973 de finances pour 1974.

([6]) Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, article 72.

([7]) Loi précitée, article 106.

([8]) Loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. L’article 52 de la présente loi a abrogé l’article 106 de la loi de finances précitée.

([9]) Ordonnance n° 2016-315 du 17 mars 2016 relative au commissariat aux comptes.

([10]) Auxquelles s’applique également la déduction forfaitaire de 1,75 %.

([11]) Loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012, article 29.

([12]) Conseil constitutionnel, décision n° 90-285 DC du 28 décembre 1990, Loi de finances initiale pour 1991.

([13]) En revanche, la CSG est assimilée à une contribution sociale en droit européen, conséquence de la décision de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) du 15 février 2000, Commission c/ France. La Cour de cassation, dans un arrêt du 31 mai 2012, a confirmé cette « double nature » de la CSG, imposition de toute nature en droit interne et contribution sociale au regard du droit européen.

([14]) Loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 de finances pour 1997, article 94.

([15]) Loi  90-1168 du 29 décembre 1990 de finances pour 1991.  

([16]) Loi n° 93-859 du 22 juin 1993 de finances rectificative pour 1993, article 42.

([17]) Loi n° 93-1352 du 30 décembre 1993 de finances pour 1994, article 2.

([18]) Loi n° 96-1160 du 27 décembre 1996 de financement de la sécurité sociale pour 1997, article 17, et loi n° 97-1164 du 19 décembre 1997 de financement de la sécurité sociale pour 1998, article 5.

([19]) En 1997, parallèlement à l’augmentation de la CSG d’un point, affecté à l’assurance maladie, la cotisation salariale d’assurance maladie a été réduite de 1,3 point (pour les salariés et les régimes spéciaux) et de 1,5 point pour les non-salariés. En 1998, compte tenu de la majoration de la CSG maladie de 4,1 %, la cotisation salariale d’assurance maladie a été réduite de 4,75 points, le reliquat de 0,75 % devant financer les indemnités journalières maladie.

([20]) Loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 de finances pour 1997, article 94, et loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 de finances pour 1998, article 80.

([21]) Loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, article 72.

([22]) Loi  2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004, article 37.

([23]) Conseil constitutionnel, décision n° 2012-662 du 29 décembre 2012, Loi de finances pour 2013.

([24]) Conseil constitutionnel, décision n° 93-320 DC du 21 juin 1993, Loi de finances rectificative pour 1993.

([25]) M. Jean-Luc Matt, Rapport particulier sur le cadre juridique de réformes de l’impôt sur revenu et de la CSG, dans le cadre du rapport Impôt sur le revenu, CSG, quelles réformes ?, février 2015.

([26]) En appliquant le barème de l’impôt 2017 sur les revenus de 2016.

([27]) Conseil constitutionnel, décision n° 97-395 DC du 30 décembre 1997, Loi de finances pour 1998.

([28]) Conseil constitutionnel, décision n° 97-395 DC du 30 décembre 1997, Loi de finances pour 1998.

([29]) Conseil constitutionnel, décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012, Loi de finances pour 2013.

([30]) À savoir la suppression de la cotisation salariale maladie de 0,75 % et de la cotisation salariale chômage de 2,4 % (cette suppression intervenant en deux temps, avec une diminution de 1,45 point à compter du 1er janvier 2018 et la suppression du 0,95 point restant à compter du 1er octobre 2018), l’allégement de cotisations famille et maladie pour les travailleurs indépendants et la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité pour les fonctionnaires.

([31]) À savoir la suppression de la cotisation salariale maladie de 0,75 % et de la cotisation salariale chômage de 2,4 % (cette suppression intervenant en deux temps, avec une diminution de 1,45 point à compter du 1er janvier 2018 et la suppression du 0,95 point restant à compter du 1er octobre 2018), allégement de cotisations famille et maladie pour les travailleurs indépendants et suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité pour les fonctionnaires.

([32]) La CSG portant sur 98,25 % du revenu brut, la hausse de 1,7 point se traduit par une hausse de prélèvement de 1,67 point du revenu brut in fine (soit 1,7 × 0,9825). La baisse de cotisations atteint 2,2 points au 1er janvier 2018 (0,75 + 1,45), et 3,15 au 1er octobre 2018 (0,75 + 2,4), soit, après prise en compte de la CSG, une hausse de revenu disponible de 0,53 point pour les neuf premiers mois de 2018 et de 1,48 point à compter du 1er octobre 2018.

([33]) Le RFR correspond au revenu net imposable du foyer fiscal, auquel différents abattements et revenus exonérés sont réintégrés, afin de refléter ses capacités contributives effectives. Le RFR sert de façon croissante de critère pour déterminer l’éligibilité à des avantages fiscaux et sociaux – notamment l’allégement puis le dégrèvement total de taxe d’habitation prévu par l’article 3 du présent projet de loi de finances –, et de certaines prestations sociales.

([34]) En prenant en compte l’effet de l’abattement sur le revenu global net prévu par l’article 157 bis pour les personnes de plus de soixante-cinq ans ou invalides, qui s’élève à 1 176 euros pour ce niveau de revenus en 2017, sachant que ce montant devrait être revalorisé de 1 % en 2018, en application de l’article 2 du présent projet de loi de finances.

([35]) L’évaluation préalable de l’article 7 du projet de loi de financement pour la sécurité sociale pour 2018 évalue toutefois le gain en recettes pour la CSG à 22,5 milliards d’euros en 2018, soit 400 millions d’euros de moins.

([36]) Le taux marginal d’imposition moyen pour les revenus de remplacement est celui des foyers fiscaux déclarant des revenus de remplacement concernés par la hausse de CSG, et non l’ensemble des foyers fiscaux percevant des revenus de remplacement.

([37]) S’ils se traduisent, selon les chiffres de l’évaluation préalable de l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, par un gain de pouvoir d’achat de 180 millions d’euros, les chiffres disponibles (soit 2,1 milliards d’euros de recettes supplémentaires de CSG figurant dans le tableau de l’évaluation préalable du présent article et 2,1 milliards d’euros d’allégements de cotisations mentionnés dans l’évaluation préalable de l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018) ne permettent pas de le déceler.

([38]) Loi n° 2012‑1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013, article 80.

([39]) Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, article 5.

([40]) Loi  2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([41]) La zone A bis regroupant les marchés locatifs les plus tendus et la zone C les marchés détendus.

([42]) Arrêté du 1er août 2014 pris en application de l’article R. 304-1 du code de la construction et de l’habitation.

([43]) Soit respectivement les réductions d’impôt accordées au titre d’investissements dans le logement, au titre d’investissements productifs et au titre d’investissements dans le logement social.

([44]) Rapport public thématique de la Cour des comptes sur le logement en Île-de-France, avril 2015.

([45]) Valdahon, Bain-de-Bretagne, Bréal-sous-Montfort, Châteaubourg, Châteaugiron, Combourg, Dol-de-Bretagne, Guichen, Janzé, Liffré, Melesse, Montauban-de-Bretagne, Montfort-sur-Meu, Vitré, Aizenay, Le Poiré-sur-Vie.

([46])  Le coût brut est évalué à 7,4 milliards d’euros, et le coût net est ramené à 6,9 milliards d’euros, une fois prise en compte la partie de la réduction d’impôt qui ne pourra être imputée sur l’impôt, du fait du plafonnement des niches pour l’essentiel.

([47]) Loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, article 90.

([48]) Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, article 107.

([49]) Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

([50]) Loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, article 90.

([51]) Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, article 86.

([52]) Loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, article 59.

([53]) Pour l’achat d’une maison de 250 000 euros, le montant des travaux pour être éligible au PTZ pour les logements anciens doit s’élever au minimum à 83 334 euros.

([54]) Arrêté du 30 décembre 2014 relatif au champ d’application géographique des prêts ne portant pas intérêt consentis pour financer des opérations de primo-accession dans l’ancien sous conditions de travaux.

([55]) Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, article 107.

([56]) Loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.

([57]) Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

([58]) L’article 59 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 a augmenté le revenu plancher en diminuant ce dénominateur de dix à neuf.

([59]) L’article 107 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 a augmenté le plafond de 36 000 euros à 37 000 euros.

([60]) Décret n° 2015-1813 du 29 décembre 2015 relatif aux prêts ne portant pas intérêt consentis pour financer la primo-accession à la propriété.

([61]) Idem.

([62]) Article 244 quater V du code général des impôts.

([63])  Mme Audrey Linkenheld et M. Michel Piron, Rapport d’information du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation des aides à l’accession à la propriété, XIVe législature, n° 4536, 22 février 2017 (lien).

([64]) Idem.

([65]) Cour des comptes, Les aides de l’État à l’accession à la propriété, enquête demandée par le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale, novembre 2016 (lien).

([66]) La dépense générationnelle est la dépense fiscale qui correspond aux créances que l’État devra, par le biais du crédit d’impôt, rembourser aux banques pendant les cinq années suivant l’émission du PTZ.

([67]) Mme Audrey Linkenheld et M. Michel Piron, Rapport d’information du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation des aides à l’accession à la propriété, XIVe législature, n° 4536, 22 février 2017 (lien).

([68]) Discours du Président de la République au Sénat lors de la Conférence nationale des territoires, 17 juillet 2017 (lien).

([69]) Cour des comptes, Les aides de l’État à l’accession à la propriété, enquête demandée par le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale, novembre 2016 (lien).

([70]) Loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, article 107.

([71]) Article 1er du décret n° 48‑1986 du 9 décembre 1948 porte réforme fiscale des impôts directs, des impôts indirects, des droits d’enregistrement et des droits de mutation qui, à compter du 1er janvier 1949, a substitué aux anciennes impositions l’impôt sur le revenu des personnes physiques et l’impôt sur les sociétés.

([72]) D’après le Conseil des prélèvements obligatoires, environ 40 % des entreprises françaises sont assujetties à l’IS – 51 % si seules les entreprises ayant déposé une déclaration de résultats sont retenues. 27 % d’entre elles acquittent effectivement l’impôt.

([73]) Rapport sur le projet de loi de finances pour 2017, tome II, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 4125, 13 octobre 2016, pages 155‑190.

([74]) Les nouvelles contributions additionnelles à l’IS prévues par le premier projet de loi de finances rectificative pour 2017 pour faire face au coût du contentieux de la contribution de 3 % ne sont pas intégrées au présent commentaire. Pour plus de détails concernant ce dispositif, il est renvoyé au commentaire sur l’article 1er du rapport sur ce projet de loi de finances rectificative (M. Joël Giraud, Rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2017, Assemblée nationale, XVe législature, n° 365, 3 novembre 2017).

([75]) Loi n° 2016‑1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([76]) Loi n° 92‑1376 du 30 décembre 1992 de finances pour 1993.

([77]) Règlement (UE) n ° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

([78]) La contribution additionnelle à l’IS au titre des montants distribués, prévue à l’article 235 ter ZCA du CGI, n’est pas intégrée aux calculs du taux facial dans la mesure où, contrairement à son intitulé, elle n’est pas une réelle contribution additionnelle à cet impôt : elle est assise sur les montants distribués, non sur l’IS. Sa suppression est prévue par l’article 13 du présent projet de loi de finances ; l’alinéa de l’article 235 ter ZCA prévoyant son principe a par ailleurs été abrogé à compter du 8 octobre 2017 à la suite d’une décision du Conseil constitutionnel du 6 octobre 2017 (décision n° 2017‑660 QPC).

([79]) Fraction ajustée, le cas échéant, prorata temporis.

([80]) Cette extension résulte de l’adoption d’un amendement du Gouvernement.

([81]) En application des dispositions combinées du b du 1° du I et du 3 du II de l’article 11 de la loi de finances pour 2017 précitée.

([82]) Pour plus de précisions sur les modalités de calcul du taux effectif de la CVAE, il est renvoyé au commentaire de l’article 7 du présent projet de loi de finances (M. Joël Giraud, Rapport sur le projet de loi de finances pour 2018, tome II, Assemblée nationale, XVe législature, n° 273, 12 octobre 2017). Cet article prévoit notamment l’extension de la consolidation du chiffre d’affaires aux sociétés qui, sans constituer un groupe fiscalement intégré, satisfont aux conditions de détention du capital pour en être un, tirant les conséquences d’une décision du Conseil constitutionnel.

([83]) Ruud De Mooij et Sjef Ederveen (2003), « Taxation and Foreign Direct Investment : A Synthesis of Empirical Research », International Tax and Public Finance, 10, 2003, pages 673-693.

([84]) Le profit commercial, dans cette étude, est calculé en soustrayant au produit des ventes (recettes) les coûts de consommation intermédiaire, les salaires bruts, les dépenses administratives, les provisions et la dépréciation commerciale.

([85]) Paying Taxes 2015, page 95.

([86]) M. Pierre‑Alain Muet, Rapport d’information sur l’optimisation fiscale des entreprises dans un contexte international, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 1243, 10 juillet 2013.

([87]) France Stratégie – Comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017.

([88]) Conseil des prélèvements obligatoires, Adapter l’impôt sur les sociétés à une économie ouverte, décembre 2016.

([89]) Ont été qualifiées de « grandes économies » de l’Union européenne les pays dont la valeur ajoutée privée représente au moins 20 % de celle de la France. Sept pays répondent à ce critère : Allemagne, Espagne, Italie, Pays-Bas, Pologne, Suède, Royaume-Uni.

([90]) Conseil des prélèvements obligatoires, Adapter l’impôt sur les sociétés à une économie ouverte, décembre 2016, pages 122.

([91]) Id., page 40.

([92]) Id., page 122.

([93]) Id., pages 129.

([94])  OCDE, Taxation of SMEs in OECD and G20 countries, septembre 2015.

([95]) Pour plus de précisions sur les modalités de détermination du taux effectif de CVAE pour les sociétés membres de tels groupe, il est renvoyé au commentaire précité de l’article 7 du présent projet de loi de finances.

([96]) Loi n° 2011‑1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

([97]) Bulletin officiel des finances publiques, BOI-BIC-PVMV-20-40-20. La dernière modification législative apportée à l’article 39 quindecies remonte à la loi n° 91‑1322 du 30 décembre 1991 de finances pour 1992, soit avant le passage du taux normal de l’IS de 34 % à 33 1/3 %.

([98]) Pour le détail des principaux dispositifs d’encadrement de la déductibilité des charges financières, il est renvoyé au commentaire de l’article 14 du présent projet de loi de finances (M. Joël Giraud, Rapport sur le projet de loi de finances pour 2018, tome II, Assemblée nationale, XVe législature, n° 273, 12 octobre 2017).

([99]) Documents annexés au projet de loi de finances pour 2018, Évaluations des voies et moyens, tome II, Dépenses fiscales, page 228.

([100]) Loi n° 2012‑1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012.

([101]) Dont le dispositif initial portait sur un crédit d’impôt au titre des dépenses de formation pour les entreprises.

([102]) Micro-BIC (bénéfices industriels et commerciaux) prévu à l’article 50‑0, micro-BNC (bénéfices non commerciaux) prévu à l’article 102 ter et micro-BA (bénéfices agricoles), prévu à l’article 64 bis du CGI.

([103]) Jeunes entreprises innovantes définies à l’article 44 sexies‑0 A au titre de l’article 44 sexies A, entreprises créées dans les zones d’aide à finalité régionales (ZAFR) au titre de l’article 44 sexies, entreprises créées pour reprendre une entreprise industrielle en difficulté au titre de l’article 44 septies, entreprises qui exercent une activité ou se créent dans les zones franches urbaines – territoires entrepreneurs (ZFU‑TE) au titre des articles 44 octies et 44 octies A, entreprises implantées dans des bassins d’emploi à redynamiser (BEAR) au titre de l’article 44 duodecies, entreprises créées dans les zones de restructuration de la défense (ZRD) au titre de l’article 44 terdecies, PME créées dans les zones franches d’activités des départements d’outre-mer (ZFADOM) au titre de l’article 44 quaterdecies, et enfin entreprises créées dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) au titre de l’article 44 quindecies.

([104]) Loi n° 2016‑1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2016.

([105]) En vertu de l’article 65 de la loi n° 2014‑1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

([106]) Loi n° 2016‑1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

([107]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

([108]) La différence entre le montant réel du CICE et le montant cédé pourra être imputée sur l’impôt dû.

([109]) En 2017, le comité est présidé par M. Michel Yahiel, commissaire général à la stratégie et à la prospective. Les partenaires sociaux représentés proviennent de la CGT, de la CFDT, de la CGT-FO, de la CFTC, de la CFE-CGC, du Medef, de la CPME et de l’U2P. Parmi les administrations présentes, peuvent notamment être mentionnées la direction générale des finances publiques, la direction général du Trésor, celles du travail et de la sécurité sociale, la direction générale de l’INSEE ou encore la Banque de France et l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS).

([110]) Loi n° 2016‑1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([111]) Il s’agit des associations loi 1901, des fondations reconnues d’utilité publique, des syndicats professionnels et de leurs unions, des mutuelle – avec un plafonnement à 30 salariés pour celles qui n’interviennent pas dans la sphère sanitaire et sociale – et des centres de lutte contre le cancer.

([112]) Qui correspond au rapport de l’excédent brut d’exploitation à la valeur ajoutée.

([113]) France Stratégie, comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017, page 54.

([114]) Id., page 27.

([115]) Projet de loi de finances pour 2018, Rapport économique, social et financier, page 48.

([116]) Qui correspond au rapport de la formation brute de capital fixe à la valeur ajoutée.

([117]) France Stratégie, comité de suivi du CICE, Rapport 2017, octobre 2017, page 27.

([118]) Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales. L’article L. 1233‑57‑3 du code du travail n’est pas modifié par cette ordonnance s’agissant de la référence au rapport concernant l’utilisation du CICE.

([119]) À cet effet, il faudrait supprimer le second alinéa du I de l’article L. 2312‑25 et abroger le paragraphe 3 de la sous-section 5 de la section 3 du chapitre II du titre Ier du livre III de la deuxième partie de ce code, contenant les articles L. 2312‑61 et L. 2312‑62.

([120]) Rapport au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, Assemblée nationale, XVe législature, n° 316, 18 octobre 2017, page 163.

([121]) Rapport précité sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, pages 152 sqq.

([122]) Commission des finances, Audition, conjointe avec la commission des affaires européennes, de M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances, préalable au Conseil « Ecofin » du 10 octobre 2017, mardi 3 octobre 2017, séance de 17 heures, compte rendu n° 1.

([123]) Commission des finances, Audition, conjointe avec la commission des affaires européenne, de M. Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et aux douanes, mercredi 4 octobre 2017, séance de 8 heures 30, compte rendu n° 3.

([124]) IS et IR, mais eu égard à la relative modestie des créances sur l’IR au regard de celles sur l’IS, seul ce dernier impôt a été pris en compte.

([125]) Conseil d’État, 20 mars 2013, Sociétés Études et Productions Schlumberger, n° 347633, aux Tables.

([126]) Concernant le crédit d’impôt recherche, cette décision était applicable mutatis mutandis au CICE.

([127]) D’après l’évaluation préalable.

([128]) Id.

([129]) Ainsi que l’a indiqué à l’Assemblée nationale Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, lors de l’examen de l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 le jeudi 26 octobre 2017. Cela ressort également du dossier de présentation des mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 (PLFSS 2018  Les moyens de l’action, 28 septembre 2017, page 20).

([130]) Loi n° 2016‑1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([131]) Le Gouvernement avait en effet indiqué en 2014 que la Commission européenne considérait le bénéfice du CICE à des organismes exonérés d’IS comme un avantage sélectif incompatible avec la réglementation européenne en matière d’aides d’État.

([132]) Pour plus de détails concernant la taxe sur les salaires, il est renvoyé au commentaire de l’article 44 du présent projet de loi de finances.

([133]) MM. Yves Blein, Laurent Grandguillaume, Jérôme Guedj et Régis Juanico, Rapport sur l’impact de la mise en œuvre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) sur la fiscalité du secteur non lucratif, décembre 2013.

([134]) Rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, XVe législature, n° 316, 18 octobre 2016, page 163.

([135]) Pour le détail du dispositif d’allégements de charge, il est renvoyé au commentaire de l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 (rapport précité).

([136]) Ainsi que l’a indiqué à l’Assemblée nationale Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, lors de l’examen de l’article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 le jeudi 26 octobre 2017. Cela ressort également du dossier de présentation des mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 (projet de loi de financement de la sécurité sociale 2018  Les moyens de l’action, 28 septembre 2017, page 20).

([137]) Article 70 du décret n° 48‑1986 du 9 décembre 1948 porte réforme fiscale des impôts directs, des impôts indirects, des droits d’enregistrement et des droits de mutation. Ce décret a également créé l’impôt sur les sociétés.

([138]) Loi n° 52‑401 du 14 avril 1952 de finances pour l’exercice 1952, article 39.

([139]) Loi n° 66‑10 du 6 janvier 1966 portant réforme des taxes sur le chiffre d’affaires, article 39.

([140]) Sont également exonérés les employeurs dont le chiffre d’affaires de l’année précédant celle de versement des rémunérations n’excède pas les plafonds de la franchise en base de TVA, prévus à l’article 293 B du CGI.

([141]) En conséquence, les rémunérations qui seraient versées, de façon dérogatoire, directement depuis les budgets annexes et les comptes spéciaux du Trésor sont assujetties à la taxe sur les salaires.

([142]) Il s’agit, pour ces employeurs agricoles, d’une exonération de fait. Le 3 de l’article 231 du CGI renvoie en effet à un décret le soin de fixer les modalités particulières de calcul de la taxe sur les salaires pour les professions relevant du régime agricole « au regard des lois sur la sécurité sociale ». Or, le seul décret paru sur ce fondement concerne les organismes coopératifs, mutualistes et professionnels agricoles et les agriculteurs effectuant des opérations de caractère industriel ou commercial, respectivement visés par les articles 53 bis et 53 ter de l’annexe III du CGI. Les autres employeurs agricoles, à défaut d’être régis par les modalités particulières prévues à l’article 231 du CGI, se trouvent donc exonérés.

([143]) Loi n° 2012‑1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.

([144]) Loi n° 2016‑1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

([145]) Règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission, du 17 juin 2014, déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité. Pour plus de détails sur ce dispositif, il est renvoyé au commentaire de l’article 33 du projet de loi de finances pour 2016 (Rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2016, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 4272, 1er décembre 2016, pages 546-556).

([146]) Loi n° 2016‑1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([147]) Pour plus de détails sur le CITS, il est renvoyé au commentaire de l’article 43 du présent projet de loi de finances.

([148]) Il est admis que le dépôt puisse intervenir au plus tard le 31 janvier.

([149]) Commission des comptes de la sécurité sociale, Résultats 2015 et prévisions 2016 et 2017, septembre 2016.

([150]) Voire 11,8 % en y intégrant des activités proches selon la fédération professionnelle TheCityUK.

([151]) M. Claude Bartolone, Rapport d’information sur les suites du référendum britannique et le suivi des négociations, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 4485, 15 février 2017.

([152]) Mouvement appelé « Brexodus ».

([153]) Brexit : Francfort en pole position dans la course à la relocalisation des banques, in Les Échos, 21 juillet 2017.

([154]) En réalité, la mesure devrait, théoriquement, avoir un impact léger dès 2018, en raison des modalités particulières de liquidation de l’IS dû par les entreprises dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 250 millions d’euros : le dernier acompte d’IS de ces entreprises, appelé « cinquième acompte », n’est pas assis sur le résultat de l’exercice précédent mais sur une fraction de l’IS estimé dû au titre de l’exercice en cours. Ce « cinquième acompte » intègrera donc l’élargissement de l’assiette consécutif à la suppression du taux supérieur de taxe sur les salaires. Toutefois, l’impact est difficilement évaluable et reste, en tout état de cause, très indirect par rapport au dispositif proposé. Cela ne remet donc pas en cause la pertinence du placement du présent article en seconde partie.

([155]) Loi n° 2009‑1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.

([156]) Cependant, l’activité doit être assujettie à l’impôt sur le revenu ou l’impôt sur les sociétés.

([157]) À l’exception du 3° de l’article 1459(qui permet à la commune ou à l’EPCI de s’opposer à l’exonération) et du 8° de l’article 1460 (qui prévoit une exonération temporaire de deux ans pour les avocats).

([158]) Jusqu’en 2013 inclus, existait une exonération temporaire d’un an pour les autoentrepreneurs démarrant leur activité.

([159]) Sont également exonérées de façon facultative à titre permanent certaines locations de meublés, en application du 3° de l’article 1459.

([160]) Direction générale des collectivités locales, Fiscalité locale – éléments de référence 2016 pour 2017.

([161]) Loi n° 2010‑1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, article 108.

([162]) Loi n° 2012‑1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012, article 37.

([163]) Loi n° 2013‑1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, article 76.

([164]) Existe également une taxe additionnelle à la CVAE pour les CCI, prévue aux I et III de l’article 1600.

([165]) Le taux est de 0,044 % pour les prestations de service, de 0,015 % pour l’achat-vente et la fourniture de logement, et de 0,007 % pour les artisans régulièrement inscrits au répertoire des métiers et qui restent sur la liste électorale de la CCI de leur circonscription.

([166]) À compter de 2018, la taxe ne sera plus composée que du droit fixe et du droit additionnel à la CFE.

([167]) Le taux est de 0,48 % pour les prestations de service (0,65 % en Alsace et 0,83 % en Moselle), et de 0,22 % pour l’achat-vente (0,29 % en Alsace et 0,37 % en Moselle).

([168]) Pour le détail des régimes micro-fiscaux, il est renvoyé au commentaire de l’article 10 du présent projet de loi de finances (Joël Giraud, Rapport sur le projet de loi de finances pour 2018, tome II, Assemblée nationale, XVe législature, n° 273, 12 octobre 2017, pages 311‑327).

([169]) Le chiffre d’affaires annuel moyen d’un micro‑entrepreneur est d’environ 14 000 euros, d’après les données de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) publiées en juillet 2017.

([170]) Règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission, du 18 décembre 2013, relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis.

([171]) Dans sa rédaction résultant de l’article 41 de la loi n° 2016‑1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite loi « El Khomri », qui a abrogé à compter de 2018 le second droit additionnel composant la taxe.

([172]) En application des articles 1609 nonies C et 1609 quinquies C du CGI.

([173]) Gain théorique moyen de 162 euros, ramené à 85 euros du fait des sommes non versées par les redevables.

([174]) Un logiciel est frauduleux lorsqu’il fait directement l’objet d’une programmation spécifique par l’éditeur pour permettre l’effacement des recettes, tandis qu’il est permissif lorsqu’il permet d’installer une mise à jour rendant la fraude possible par l’utilisateur.

([175]) Loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, article 20.

([176]) L’article L. 123-12 du code de commerce dispose que « toute personne physique ou morale ayant la qualité de commerçant doit procéder à l’enregistrement comptable des mouvements affectant le patrimoine de son entreprise ». Il dispose également qu’elle « doit établir des comptes annuels à la clôture de l’exercice au vu des enregistrements comptables et de l’inventaire. Ces comptes annuels comprennent le bilan, le compte de résultat et une annexe, qui forment un tout indissociable ».

([177]) Le livre-journal constitue un registre dans lequel l’entreprise inscrit de manière quotidienne les différentes opérations financières qu’elle effectue et qui font évoluer le patrimoine de son entreprise.

([178]) Le bénéfice de la franchise en base TVA, prévu à l’article 293 B du CGI, fait l’objet d’un développement spécifique au B du III.

([179]) Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, article 88.

([180]) Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP), « Droit de communication et procédures de recherche et de lutte contre la fraude, Droit de communication auprès de diverses personnes », n° 180, 3 août 2016 (lien).

([181]) Idem.

([182]) Idem.

([183]) BOFiP, « Obligation d’utiliser un logiciel de comptabilité ou de gestion ou un système de caisse satisfaisant à des conditions d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage des données en vue du contrôle de l’administration fiscale », n  40, 3 août 2016 (lien).

([184]) Communiqué du ministre de l’action et des comptes publics, Lutte contre les logiciels frauduleux : simplification du dispositif applicable au 1er janvier 2018, n° 22, 15 juin 2017 (lien).

([185]) Pour les 28 États membres de l’Union européenne, à l’exception de Chypre.

([186]) Commission européenne, Direction générale de la fiscalité et des douanes (DG TAXUD), Study and Reports on the VAT Gap in the EU-28 Member States: 2017 Final Report, 18 septembre 2017 (lien).

([187]) Idem.

([188]) Communiqué du ministre de l’action et des comptes publics, Lutte contre les logiciels frauduleux : simplification du dispositif applicable au 1er janvier 2018, n° 22, 15 juin 2017 (lien).

([189]) Loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, article 14.

([190]) Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016, article 14.

([191]) La vérification de comptabilité permet à l’administration de contrôler sur place, dans les locaux de l’entreprise, la comptabilité et de la confronter à certaines données ou faits pour vérifier l’exactitude des déclarations souscrites. L’examen de comptabilité permet d’effectuer des opérations de contrôle du bureau sans se déplacer dans les locaux de l’entreprise.

([192]) Une personne assujettie à la TVA est une personne qui réalise des opérations économiques qui réalise des ventes de biens ou des prestations de services de manière indépendante, qu’elle paye ou non l’impôt. Le redevable est celui qui paye l’impôt : si un redevable est toujours assujetti, la réciproque n’est pas valable du fait de l’existence d’exonérations ou d’une franchise en base TVA.

([193]) Rapport sur le projet de loi de finances pour 2016, tome II, n° 3096, XIVe législature, 8 octobre 2015, page 128.

([194]) Loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d’emploi.

([195]) Par exemple La Poste, la SNCF, la RATP, Naval Group…

([196]) Le PASS est égal à 39 228 euros pour l’année 2017.

([197]) Cette rémunération nette comprend la rémunération de base mensuelle brute augmentée de l’indemnité de résidence et diminuée des cotisations de sécurité sociale obligatoires, des prélèvements pour pension et, le cas échéant, des prélèvements au profit des régimes de retraite complémentaire obligatoires.

([198]) Décret n° 2017-241 du 24 février 2017 modifiant le seuil d’assujettissement à la contribution exceptionnelle de solidarité.

([199]) Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([200]) Le FNSA finançait, à titre principal, la part « activité » du RSA, ainsi que le « RSA jeunes » et la prime de Noël versée aux bénéficiaires de certaines prestations sociales.

([201]) Ordonnance n° 84-106 du 16 février 1984 relative au revenu de remplacement des travailleurs involontairement privés d’emploi.

([202]) Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

([203]) Les allocations chômage ainsi que les indemnités journalières de sécurité sociale ne sont donc pas dans le champ de la hausse de 1,7 point de CSG.

([204]) Puisque la hausse de CSG est égale à 1,67 point (soit 98,25 % de 1,7 %).

([205]) Les fonctionnaires territoriaux à temps incomplet (moins de vingt-huit heures par semaine) sont affiliés au régime général de la sécurité sociale, et non au régime spécial des fonctionnaires, et à ce titre, ils sont redevables de la cotisation maladie de 0,75 %.

([206]) Sauf exceptions, telles que les maîtres et documentalistes contractuels de l’enseignement privé.

([207]) Cet article, introduit par l’article 143 de la loi de finances rectificative pour 2016, devait entrer en vigueur au 1er janvier 2018, mais il est supprimé par le 3° du I du présent article.

([208]) Loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 de finances pour 1997.

([209]) Soit 1,7 % de 98,25 % de leur salaire brut, compte tenu de la déduction forfaitaire de 1,75 % au titre des frais professionnels.

([210]) Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, article 105.

([211]) Article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

([212]) Amendement n° 817, adopté à l’Assemblée nationale lors de la troisième séance du 15 novembre 2011.

([213]) M. Yves Bur, Rapport d’information fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi, modifié par le Sénat, de financement de la sécurité sociale pour 2012, Assemblée nationale, XIIIe législature, n° 3966, 16 novembre 2011, page 27.

([214]) Sous-amendement du Gouvernement n° 314 à l’amendement n° 215 de la commission des finances, adopté en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale le 14 décembre 2011.

([215]) Circulaire MFPF1205478C du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État et du ministre de la fonction publique, 24 février 2012.

([216]) Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

([217]) Données issues de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), direction générale de l’offre de soins (DGOS) et direction générale des collectivités locales (DGCL), juillet 2013.

([218]) Sur le périmètre des payes versées par la direction générale des finances publiques (DGFiP), c’est-à-dire hors militaires, établissements publics, etc.

([219]) IRDES, L’enquête Protection sociale complémentaire d’entreprise 2009 – Résultats de l’enquête PSCE 2009, juillet 2012.

([220]) Loi n° 2009-1646 du 24 décembre 2009 de financement de la sécurité sociale pour 2010, article 91.

([221]) L’expérimentation pour la fonction publique de l’État concerne par exemple l’ensemble des administrations déconcentrées situées dans le ressort des caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) de Clermont-Ferrand, Lyon, Nice, Rennes et Strasbourg/Sélestat/Haguenau, ainsi que certains services centraux du ministère de l’économie et des finances de Paris.

([222]) Loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012, article 76.

([223]) Loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, article 147.

([224]) L’exposé des motifs de l’article 67 du projet de loi de finances pour 2014 précisait qu’« il est prévu de préparer la généralisation du contrôle du bien-fondé des arrêts maladie par les caisses primaires d’assurance maladie, afin de remédier aux insuffisances du mécanisme de contrôle existant fondé sur le recours aux médecins agréés ».

([225]) Décret n° 2012-173 du 7 mai 2012 modifiant le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l’organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d’aptitude physique pour l’admission aux emplois publics et au régime des congés de maladie des fonctionnaires.

([226]) Prévue à l’article L. 1226-1 du code du travail.

([227]) Catherine Pollak, « L’effet du délai de carence sur le recours aux arrêts maladie des salariés du secteur privé », Dossiers solidarité et santé, DREES, janvier 2015.

([228]) Emma Davie, « Absence pour raisons de santé et lien avec les conditions de travail dans la fonction publique et le secteur privé », Rapport annuel sur l’état de la fonction publique, DGAFP, 2015.

([229]) INSEE, « Le jour de carence dans la fonction publique de l’État : moins d’absences courtes, plus d’absences longues », Insee Analyses, n° 36, novembre 2017.

([230]) Dares Analyses, « Les absences au travail des salariés pour raisons de santé : un rôle important des conditions de travail », n° 9, février 2013.

([231]) Cour des comptes, La situation et les perspectives des finances publiques, juin 2017, page 151.

([232]) Catherine Pollak, idem.

([233]) Catherine Pollak, idem.

([234]) Cour des comptes, Les finances publiques locales 2016, octobre 2016.

([235]) Catherine Pollak, idem.

([236]) IGA, IGAS, IGF, Évaluation du dispositif expérimental confiant à six caisses primaires d’assurance maladie le contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires, décembre 2015.

([237]) Dernièrement dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2017, page 151.

([238]) Rapport n° 273, annexe n° 4 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a4.asp.

([239]) Rapport n° 273, annexe n° 7 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a7.asp.

([240]) Rapport n° 273, annexe n° 7 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a7.asp.

([241]) Rapport n° 273, annexe n° 8 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a8.asp et annexe n° 9 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a9.asp.

([242]) Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

([243]) Rapport n° 273, annexe n° 17 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a17.asp.

([244]) Rapport n° 273, annexe n° 16 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a16.asp.

([245]) Rapport n° 273, annexe n° 23 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a23.asp.

([246]) Rapport n° 273, annexe n° 28 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a28.asp.

([247]) Rapport n° 273, annexe n° 28 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a28.asp.

([248]) Loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

([249]) Rapport n° 273, annexe n° 36 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a36.asp.

([250]) Rapport n° 273, annexe n° 36 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a36.asp.

([251]) Rapport n° 273, annexe n° 36 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a36.asp.

([252]) Rapport n° 273, annexe n° 36 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a36.asp.

([253]) Rapport n° 273, annexe n° 36 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a36.asp.

([254]) Rapport n° 273, annexe n° 41 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/b0273-tIII-a41.asp.