N° 414

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIEME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 novembre 2017

 

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI autorisant l’approbation du protocole annexe à la convention générale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire sur la sécurité sociale du 1er octobre 1980 relatif aux soins de santé programmés dispensés en France aux ressortissants algériens assurés sociaux et démunis non assurés sociaux résidant en Algérie

PAR M. Michel  FANGET

Député

——

 

ET

 

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale : 13.

 


 


 

 

 

 


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SOMMAIRE

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 Pages

introduction

I. l’existant : un dispositif administratif inadapté pour l’accueil des patients algériens dans les hôpitaux français

A. Un accord bilatéral de moins en moins opérationnel

B. Une question qui s’inscrit dans celle, plus générale, de la gestion de l’accueil des patients étrangers

1. L’accueil des patients étrangers, une opportunité mais aussi des risques pour les hôpitaux français

2. L’exemple de l’AP-HP : une accumulation de créances sur les patients étrangers jusqu’à une période récente

3. Des mesures correctives qui portent leurs fruits

a. Le règlement de la dette de la CNAS à l’AP-HP

b. Le règlement d’autres créances sur des institutions étrangères

c. De nouvelles orientations pour l’accueil des patients étrangers à l’AP-HP

d. Mais une vraie difficulté à maîtriser l’entrée de patients étrangers pour des soins « inopinés »

e. Une politique globale pour l’accueil des patients étrangers dans le système hospitalier français ?

II. un nouvel instrument destiné à inscrire l’accueil des patients algériens dans un cadre administratif solide

A. Un accord qui rend compte de la relation particulière entre la France et l’Algérie

1. L’intensité des échanges humains

2. Un accord qui rend compte d’une volonté d’approfondir la relation bilatérale

B. Un cadre unique pour la prise en charge des patients algériens

1. Un champ d’application à vocation quasi-universelle

2. La garantie des droits des patients

3. Une obligation d’autorisation préalable des prises en charge

4. Un dispositif centralisé de liquidation et de recouvrement des frais

5. Les dispositions institutionnelles

6. Les dispositions finales

CONclusion

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Réunion du mercredi 19 juillet 2017

II. Réunion du mercredi 22 novembre 2017

annexes

Annexe  1 : TExte adopté par la commission

annexe  2 : Liste des personnes auditionnées par le bureau de la commission


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   introduction

 

Mesdames, Messieurs,

 

L’Histoire a tissé entre les peuples français et algérien des liens particulièrement étroits. De très nombreux Algériens ont des attaches très fortes en France, même s’ils résident en Algérie. Ils sont nombreux à souhaiter, lorsqu’ils sont malades, bénéficier de soins dans nos établissements hospitaliers, dont la réputation d’excellence n’est plus à faire.

Cependant, du point de vue administratif, l’accueil de ces patients n’a pas jusqu’à présent été organisé dans les meilleures conditions. Il existe bien un instrument bilatéral qui le régit en principe depuis 1980, mais il est devenu largement inopérant, de sorte que ces patients viennent, soit dans le cadre d’accords directs entre la sécurité sociale algérienne et certains hôpitaux français, soit à titre individuel sans prise en charge organisée.

Cette situation a entraîné pour nos hôpitaux une accumulation de difficultés administratives et financières, dues, soit aux contestations sur les montants des frais médicaux facturés, soit à l’impossibilité de recouvrer une part significative de ces factures. Les responsabilités dans cet état de fait sont sans doute partagées, les établissements français n’ayant souvent, jusque tout récemment, pas su mettre en place des procédures adéquates. D’ailleurs, ces problèmes de créances non recouvrées sont loin de concerner les seuls patients algériens et des difficultés de même nature existent avec bon nombre d’autres pays.

Il ne faut pas non plus exagérer les enjeux : on parle de dettes hospitalières de quelques dizaines de millions d’euros, ce qui ne met évidemment pas en faillite un système hospitalier qui délivre globalement 90 milliards d’euros de soins par an.

Pour autant cette situation appelait des correctifs, tout à la fois parce que l’accueil de patients étrangers devient un véritable enjeu économique – et la qualité de l’offre française de soins justifie que nos établissements puissent valoriser leurs atouts – et parce que notre relation bilatérale avec l’Algérie est particulièrement essentielle. Plusieurs mesures ont déjà été prises, telles que le règlement de certaines des dettes bilatérales existantes ou, plus généralement, des mesures d’organisation dans les principaux établissements hospitaliers pour recevoir des patients étrangers dans un cadre administratif plus adapté.

Le protocole qui a été signé en avril 2016 à Alger et est aujourd’hui soumis à l’Assemblée nationale vise quant à lui à organiser à l’avenir l’accueil de patients algériens dont les soins en France sont programmés. Il institue un dispositif solide de prise en charge administrative et de financement des frais par la sécurité sociale algérienne, de façon à limiter au maximum, à l’avenir, les difficultés.

Lors du premier échange sur ce texte, le 19 juillet dernier, les membres de la commission ont fait état de leurs interrogations sur sa portée et plus généralement sur les conséquences financières de l’accueil de patients étrangers dans notre système hospitalier. Le bureau de la commission a donc procédé en septembre à plusieurs auditions de personnalités. Ces auditions ont mis en lumière l’effet des mesures correctives mises en place à partir de 2015, mais aussi la permanence de certaines dérives. Pour cette raison, justement, elles ont confirmé l’utilité du protocole dont nous débattons : il ne règle pas tout, mais contribue incontestablement à inscrire l’accueil des patients algériens par les hôpitaux français dans un cadre administratif mieux contrôlé et plus sûr financièrement.

 


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I.   l’existant : un dispositif administratif inadapté pour l’accueil des patients algériens dans les hôpitaux français

A.   Un accord bilatéral de moins en moins opérationnel

La France et l’Algérie sont liées depuis 1980 par une convention de sécurité sociale. Dans ce cadre, la prise en charge de soins médicaux délivrés en France à des personnes résidant en Algérie est prévue, mais avec un champ restreint aux seuls salariés et fonctionnaires, à l’exclusion de leurs ayants droit. En pratique, ce dispositif, notamment du fait de cette restriction, a été de moins en moins invoqué au cours des années.

De fait, la Caisse nationale des assurances sociales des travailleurs salariés (CNAS) algérienne a parallèlement développé des relations contractuelles directes avec des hôpitaux français pour le transfert en France, pour des soins programmés, de patients algériens. Ces relations ont le plus souvent remplacé le dispositif conventionnel susmentionné. C’est ainsi, au cours des années les plus récentes, que le nombre de patients algériens admis dans le cadre du dispositif conventionnel de 1980 n’était plus que de 40 à 60 par an, pour 0,4 à 0,6 million d’euros de facturation annuelle, contre 500 à 700 patients algériens adressés par la CNAS directement aux hôpitaux français, lesquels représentent annuellement un flux financier de 15 à 20 millions d’euros d’après des éléments fournis à votre rapporteur (l’étude d’impact afférente au présent projet de loi évoque plutôt un montant moyen de 8 millions d’euros, les incertitudes semblant donc importantes sur l’évaluation de ces flux).

Cependant, ces relations directes établies entre la CNAS et les hôpitaux français (principalement ceux de l’Assistance publique-Hôpitaux de paris – AP-HP) se sont accompagnées de nombreuses difficultés et contestations, portant notamment sur le montant des frais facturés et leur recouvrement auprès de la CNAS. Face à ces difficultés, l’Assistance publique-hôpitaux de Marseille et les CHU de Strasbourg et de Lyon ont même cessé d’admettre des patients munis d’une prise en charge de la CNAS. L’AP-HP a continué à recevoir des patients dans ce cadre, mais en étant confrontée à des problèmes récurrents de recouvrement auprès de la CNAS.

Par ailleurs, il existe un flux important d’Algériens qui viennent se faire  soigner en France à titre individuel, sans prise en charge organisée et avec souvent une entrée via les services d’urgences, ce qui entraîne des difficultés de recouvrement dès lors que les établissements qui les reçoivent ne se sont pas dotés de procédures adéquates.

B.   Une question qui s’inscrit dans celle, plus générale, de la gestion de l’accueil des patients étrangers

La problématique de la gestion des patients venant d’Algérie s’inscrit dans celle de l’accueil des patients étrangers dans les hôpitaux français. Le développement du « tourisme médical » constitue en effet un versant de la mondialisation que l’on ne doit pas négliger. La spécificité des relations franco-algériennes ne doit pas occulter une perspective plus globale.

1.   L’accueil des patients étrangers, une opportunité mais aussi des risques pour les hôpitaux français

L’accueil de patients étrangers solvables par les systèmes de santé les plus attractifs représenterait déjà un « marché » mondial d’environ 60 milliards d’euros dans le monde ([1]) et certains pays ont délibérément misé sur cette activité. La France a manifestement des atouts évidents à faire jouer à cet égard : la réputation et l’excellence objective de son système de santé et en particulier des équipes de pointe de ses grands hôpitaux, attestées par les classements internationaux ; les coûts cependant compétitifs (comparés notamment à ceux pratiqués aux États-Unis) des soins et interventions ; l’attrait touristique… Pourtant, en comparaison d’autres pays, ces atouts n’ont guère été valorisés jusqu’à présent, malgré une tradition ancienne d’accueil de patients étrangers, notamment dans une optique humanitaire, mais aussi dans quelques établissements précocement orientés vers la clientèle étrangère solvable.

C’est dans ce contexte que le Gouvernement a commissionné en 2014 un expert de l’économie de la santé, M. Jean de Kervasdoué, pour lui rendre un rapport traitant de la question ([2]). Ce rapport conclut qu’une politique volontariste pourrait laisser espérer, à terme, en se fondant sur l’expérience engagée en Allemagne, la réalisation d’un chiffre d’affaires annuel supplémentaire de l’ordre de 2 milliards d’euros avec des patients étrangers venant pour des soins programmés dans nos hôpitaux, montant à comparer aux environ 90 milliards d’euros de dépenses de soins réalisées globalement dans nos hôpitaux (en 2015) ; cette activité nouvelle pourrait générer de 25 000 à 30 000 emplois.

La perspective d’une évolution de cette nature suscite cependant des craintes et des réticences, souvent légitimes et illustrées par des anecdotes récurrentes, quant à une marchandisation accrue de la santé et au développement d’un système « à deux vitesses » où les patients français passeraient après la clientèle étrangère payant le prix fort…

Outre de répondre à ces préoccupations, une telle évolution impliquerait un certain nombre de mutations dans les réglementations et modes de fonctionnement de nos hôpitaux et administrations que le rapport susmentionné souligne : capacité de produire rapidement des devis pour les soins demandés et d’adapter souplement les tarifs à ce que les patients sont prêts à payer ; facilitation de l’octroi des visas si nécessaire ; accélération des facturations, recouvrements et éventuels remboursements de trop-perçus ; atténuation des restrictions à la publicité des établissements et des équipes médicales ; conciliation avec les politiques globales et rigides d’autorisation d’achat d’équipements médicaux ou de recrutement ; amélioration de l’offre « hôtelière » dans ou près des hôpitaux et assouplissement des règles de recours à des partenaires privés à cette fin, etc.

2.   L’exemple de l’AP-HP : une accumulation de créances sur les patients étrangers jusqu’à une période récente

L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris a publié en 2015 des données sur le recouvrement des facturations à des patients étrangers qui montrent l’importance des difficultés de recouvrement de ces créances, mais aussi qu’il ne s’agit pas d’un problème propre aux patients venant d’Algérie.

Il apparaît qu’en novembre 2014, les créances à recouvrer sur patients venant de l’étranger s’élevaient globalement pour l’AP-HP à 118,6 millions d’euros ([3]) (montant à prendre avec précaution car couvrant des vieilles créances irrécouvrables, mais aussi une part d’autres en cours d’encaissement). Sur ce total, les créances algériennes représentaient 31,6 millions d’euros, soit le quart, suivies par celles concernant des patients marocains (11,1 millions d’euros), américains (5,6 millions), belges, tunisiens, italiens, saoudiens…

Les patients provenant d’Algérie étant les plus nombreux à être accueillis à l’AP-HP parmi les patients venant de l’étranger (2 400 en 2014, devant les Marocains, moins de 1 000), il n’est pas surprenant qu’ils soient à l’origine du plus gros stock de créances à recouvrer, mais le problème existe donc aussi pour des pays étrangers de continents et de niveaux de développement différents.

Dans le même document, l’AP-HP évoquait très clairement les difficultés de recouvrement au titre des patients étrangers, avec fin 2014 un taux de recouvrement des créances nées en 2014 de seulement 32 % concernant les particuliers étrangers dits « non majorés » (souvent des personnes entrées en urgence), 80 % pour ceux auxquels était appliquée la majoration réservée aux patients étrangers venant pour des soins programmés et un petit 36 % pour les créances sur des organismes (soins programmés avec par exemple la CNAS algérienne). Le document relevait que le recouvrement sur les organismes étrangers était long, ce qui expliquait ce taux très faible à échéance d’un an, mais que le taux final de recouvrement restait inférieur à 70 %.

Cette question des créances sur des patients étrangers, notamment algériens, concerne au premier chef l’AP-HP, mais aussi quelques autres grands centres hospitaliers dans une moindre mesure, comme le montre le décompte suivant, transmis par le Gouvernement. En mars 2017, ces créances « algériennes » atteignaient près de 39 millions d’euros au niveau national, dont près de 28 millions pour Paris, qui représentait donc plus de 70 % de ce total.

Créances hospitalières à l’égard d’organismes publics algériens (dette publique)                ou de patients algériens (dette privée) au 31 mars 2017

Source : Gouvernement.

 

3.   Des mesures correctives qui portent leurs fruits

Les difficultés de gestion liées à l’accueil des patients étrangers, notamment algériens, ont entraîné depuis quelques années une prise de conscience et des mesures correctives.

a.   Le règlement de la dette de la CNAS à l’AP-HP

S’agissant spécifiquement de la prise en charge des patients algériens adressés par la CNAS à l’AP-HP, le montant cumulé des créances non recouvrées a culminé en 2012 à 16 millions d’euros, avant de revenir à 11 millions en 2015, puis moins de 4 millions en 2017, du fait de plusieurs versements de la partie algérienne.

Le présent protocole ne traite pas des dettes issues du passé (comme on y reviendra, il régira les relations futures), mais sa négociation, très longue, a clairement été liée par la partie française au solde des dettes existantes. Elle a même été suspendue durant quatre ans, avant qu’un important versement de la CNAS en 2013 ne permette la reprise des conversations en 2014. Enfin, la conclusion du protocole en avril 2016 a été précédée d’un accord entre la CNAS et l’AP-HP prévoyant l’apurement total des créances justifiées, avec le versement de plus de 10 millions d’euros. À cette occasion, certaines créances insuffisamment justifiées (ayant fait l’objet d’erreurs de ventilation ou correspondant à des dépassements de la durée de séjour initialement programmée et actée par la CNAS) ont été remises, pour un total de 1,6 million d’euros.

b.   Le règlement d’autres créances sur des institutions étrangères

La récupération des impayés laissés par différents États ou régimes sociaux étrangers ne concerne d’ailleurs pas que l’Algérie et constitue une priorité de la direction actuelle de l’AP-HP, qui obtient des résultats : de novembre 2014 à août 2017, le montant cumulé des créances de l’AP-HP sur des ambassades et organismes étrangers (caisses sociales et assurances) est passé de 40 millions d’euros à 23 millions, diminuant donc de 43 %.

Le tableau ci-après présente le dernier état connu des créances sur l’étranger à l’AP-HP.

Dettes des particuliers, organismes étrangers et ambassades à l’AP-HP au 31 août 2017

Source : AP-HP.

c.   De nouvelles orientations pour l’accueil des patients étrangers à l’AP-HP

Plus généralement, l’AP-HP a récemment adopté de nouvelles orientations pour l’accueil des patients étrangers, en vue notamment de limiter les impayés. Une politique de paiement systématique d’une avance sur devis (pour des soins programmés) par les patients étrangers a été mise en place, seule une dizaine d’organismes étrangers (dont la CNAS) restant dispensés de cette avance, contre 600 auparavant ([4]). En conséquence, 86 % des flux programmés sont désormais payés à l’avance et le taux global de recouvrement des créances est donc en nette amélioration. Pour ces soins programmés, des forfaits par pathologie ont été établis et des services ont été plus spécialement fléchés pour accueillir les patients en cause.

d.   Mais une vraie difficulté à maîtriser l’entrée de patients étrangers pour des soins « inopinés »

Des étrangers entrés en France avec un visa de tourisme peuvent être admis dans le système hospitalier – en particulier à l’AP-HP – via les urgences (ou simplement par le biais de rendez-vous pris directement). S’ils sont atteints de pathologies très sévères, la déontologie médicale impose qu’ils soient traités, quand bien même l’on saurait d’avance que les chances de paiement ultérieur d’hospitalisations qui coûtent des dizaines, voire des centaines de milliers d’euros sont faibles.

Les frais restent donc souvent, en fin de parcours, à la charge des hôpitaux eux-mêmes ou bien de l’État, par le biais de l’aide médicale d’État (AME), lorsque les patients peuvent en bénéficier, ce qui est le cas lorsque leur visa Schengen de trois mois est expiré ([5]). En théorie, ces frais médicaux pourraient être pris en charge par les assurances privées qui sont exigées lors de la délivrance d’un visa, mais ces assurances ne couvrent que les soins réellement inopinés, par exemple suite à un accident ou un malaise soudain, et les assureurs veillent à ne pas prendre en charge les cas de figure qui ne rentrent pas vraiment dans ce cadre…

Pour ce qui est des particuliers algériens qui viennent se faire soigner en dehors du circuit de la CNAS, l’AP-HP, depuis fin 2015, signale les dettes privées au consulat de France à Alger, qui conditionne l’octroi de nouveaux visas à leur règlement. Cela reste le seul vrai moyen de pression dont dispose l’administration, qui, de plus, peut être contourné si les intéressés obtiennent un visa d’un autre pays de l’espace Schengen, avec lequel ils peuvent entrer en France.

Dans ce contexte, le nombre de patients algériens recevant des soins à l’AP-HP continue à croître. On y décompte par an environ 3 000 séjours de patients algériens Les créances de l’AP-HP sur des particuliers algériens continuent aussi à progresser : elles sont passées de 20,3 millions d’euros en novembre 2014 à 24,9 millions en août 2017.

Plus généralement, de novembre 2014 à août 2017, le montant cumulé des créances de l’AP-HP sur des particuliers étrangers (non-résidents) est passé de 78 millions d’euros à 92 millions (+ 18 %). Cette évolution compense pratiquement la diminution des créances sur les institutions et États étrangers (voir supra), de sorte que, globalement, la « dette étrangère » à l’AP-HP atteignait en août 2017 pratiquement le niveau de fin 2014 : 115 millions d’euros contre 118 millions deux ans plus tôt.

e.   Une politique globale pour l’accueil des patients étrangers dans le système hospitalier français ?

Suite au rapport précité de M. de Kervasdoué, Mme Marisol Touraine et M. Laurent Fabius, alors respectivement ministres de la santé et des affaires étrangères, ont annoncé le 31 juillet 2015 un ensemble de mesures en vue de renforcer la visibilité internationale de notre offre de soins et de mettre en place des procédures d’admission adaptées à la patientèle étrangère : mise en place d’une « task force » ad hoc regroupant les fédérations et les principaux établissements de santé ; création d’une brochure et d’un portail internet présentant l’offre de soins française à l’international ; allégements administratifs pour l’accueil de médecins et de patients étrangers ; systématisation des devis et facturations préalables des soins programmés ; création d’un compte spécifique de recettes internationales pour les établissements de santé ; accompagnement des métiers touchant à la conciergerie médicale (l’organisation matérielle des séjours de « tourisme médical ») et à l’hôtellerie à proximité des établissements…

S’agissant en particulier de la gestion financière des patients étrangers, le ministère de la santé prépare actuellement une instruction ministérielle destinée à homogénéiser et sécuriser les pratiques des établissements de soins en vue d’une limitation des problèmes de recouvrement. Il est également prévu, pour la campagne tarifaire de 2018, de faire figurer dans les remontées mensuelles des établissements de santé l’assurance du pays pour les patients non couverts par notre sécurité sociale. Cela permettra de construire des indicateurs sur les hospitalisations de patients étrangers.

Au  niveau de l’AP-HP, une filiale commerciale « AP-HP International » a été créée au 1er janvier 2017 pour exporter l’expertise de l’institution. Toutefois, les auditions conduites ont aussi montré les réticences que l’éventualité d’une généralisation de l’accueil payant de patients étrangers suscite : l’ouverture internationale est souhaitée dans une optique de rayonnement et à des fins humanitaires, mais pas à des fins strictement lucratives – même s’il ne s’agit pas non plus de perdre de l’argent en recevant des patients étrangers. Il y a également un souci d’égalité d’accès aux soins : l’insertion des patients étrangers dans les flux de soins ne doit pas retarder celle des patients français. L’accueil de patients étrangers dans le service public hospitalier pour des soins programmés devrait donc continuer à se développer, mais à un rythme modéré.

Lors de l’examen du présent accord en commission le 22 novembre 2017, les commissaires ont estimé que cette question, dont la portée dépasse largement le cadre du présent rapport, pourrait utilement être l’objet de travaux menés par exemple par l’Inspection générale des affaires sociales.

 


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II.   un nouvel instrument destiné à inscrire l’accueil des patients algériens dans un cadre administratif solide

Le protocole soumis à l’examen de l’Assemblée nationale constitue un dispositif unique : en dehors de la coordination européenne de sécurité sociale, la France ne dispose d’aucune convention bilatérale avec un État tiers prévoyant globalement de possibilité analogue de soins programmés en France. Ceci rend compte de la relation particulière qui unit la France et l’Algérie.

En instaurant un système unique d’autorisation préalable, puis de prise en charge des frais, ce pour un champ élargi de bénéficiaires potentiels, ce texte vise à permettre au plus grand nombre possible d’Algériens de pouvoir bénéficier de soins programmés en France, tout en évitant les contentieux et impayés du passé. De ce fait, tout en satisfaisant les besoins d’une patientèle souvent très attachée à la France, il devrait apporter aux établissements français une activité supplémentaire significative dans des conditions financières sûres.

A.   Un accord qui rend compte de la relation particulière entre la France et l’Algérie

1.   L’intensité des échanges humains

L’histoire partagée entre la France et l’Algérie a conduit à l’établissement entre les deux rives de la Méditerranée d’une circulation et d’un brassage particulièrement intenses des populations, d’où l’importance d’assurer dans de bonnes conditions  – et sous réserve d’un dispositif de financement fiable – l’accès aux soins des Algériens, qui ont souvent des liens forts avec la France.

Selon les statistiques de l’INSEE (données du recensement), l’Algérie est le premier pays d’origine des personnes nées à l’étranger et résidant en France (indépendamment de leur nationalité) avec, en 2014, 774 000 personnes dans cette situation. En termes de nationalité, près de 582 000 Algériens étaient fin 2015 titulaires d’un titre de séjour en France, auxquels il faut bien sûr ajouter les binationaux et plus généralement tous nos compatriotes ayant à des degrés divers des racines en Algérie. Dans l’autre sens, fin 2016, 41 000 Français étaient inscrits sur les registres consulaires en Algérie (l’inscription donnant une image a minima des communautés françaises à l’étranger). S’agissant enfin des voyages plus brefs, l’Algérie reste le second pays au monde, derrière la Chine, pour la demande de visas d’entrée en France, avec en 2016 plus de 409 000 visas (de tous types) délivrés.

2.   Un accord qui rend compte d’une volonté d’approfondir la relation bilatérale

La signature du présent accord rend compte d’une volonté partagée, entre les autorités françaises et algériennes, de régler les situations litigieuses afin de pouvoir intensifier la coopération dans plusieurs domaines.

On l’a dit, sa négociation a été longue : elle a débuté en 2002. Elle a ensuite été interrompue de 2010 à 2014 du fait du contentieux sur les dettes hospitalières et n’a pu finalement être reprise, puis aboutir, qu’après que la partie algérienne a accepté d’opérer plusieurs versements pour solder les impayés du passé.

Depuis 2012, il a été mis en place du Comité intergouvernemental de haut niveau (CIHN) réunissant les deux gouvernements à l’occasion de sommets franco-algériens annuels. La tenue de la troisième session du CIHN à Alger le 10 avril 2016 en présence de M. Manuel Valls (alors Premier ministre) et de dix ministres et secrétaires d’État a permis la signature d’une douzaine d’accords dans le domaine institutionnel, dont le présent protocole, et d’une quinzaine d’accords dans le secteur économique.

B.   Un cadre unique pour la prise en charge des patients algériens

Le présent protocole a pour objet d’établir un cadre administratif unifié et fiable pour l’organisation et la prise en charge des soins prodigués en France à des Algériens, dans la mesure où ces soins ne peuvent leur être dispensés en Algérie.

Il est à noter que les modalités d’application du protocole sont, selon son article 11, fixées par un arrangement administratif. De fait, ce document a été signé concomitamment au protocole. Il n’est pas en tant que tel soumis à approbation parlementaire, mais le présent rapport tient naturellement compte de ses dispositions, qui rendent opérationnel le protocole.

1.   Un champ d’application à vocation quasi-universelle

Le présent protocole prévoit tout d’abord un champ de bénéficiaires potentiels particulièrement large. Il s’agit de sortir de la situation présente dans laquelle un nombre de plus en plus faible de personnes résidant en Algérie viennent se faire soigner en France dans le cadre de l’instrument bilatéral en place depuis 1980, tandis que d’autres y viennent dans le cadre de relations contractuelles plus ou moins bien réglées entre la sécurité sociale algérienne et des hôpitaux français et d’autres enfin suite à des démarches individuelles.

L’enjeu est notamment de réduire le risque financier pour les établissements hospitaliers français en sécurisant le remboursement des soins, de sorte que cesse l’accumulation de litiges avec la sécurité sociale algérienne et d’impayés difficiles à recouvrer de la part de personnes soignées hors de tout cadre conventionnel.

L’article 1er du présent protocole définit donc largement le champ d’application personnel du protocole annexe. Ce dernier s’appliquera aux ressortissants algériens, résidant en Algérie et qui sont soit des assurés sociaux, soit des « démunis » non assurés sociaux, soit des ayants droits des uns et des autres.

L’Algérie dispose d’un système social qui a les mêmes sources que le nôtre et a gardé des caractéristiques institutionnelles assez proches : la sécurité sociale s’y est d’abord développée sur une base d’affiliation professionnelle (avec un financement par cotisations sur les salaires ou revenus), puis les régimes ont été unifiés et le bénéfice étendu à la plus grande partie de la population, du fait de l’affiliation obligatoire de toutes les personnes exerçant une activité professionnelle et assimilées et de leurs ayants droit. En pratique, toutefois, il semble que le taux de couverture des Algériens soit fortement diminué par l’importance du travail « informel » échappant aux déclarations et cotisations : un tiers des salariés et quatre cinquièmes des indépendants pourraient ainsi être hors du système de sécurité sociale ([6]). L’État algérien a en conséquence développé sur fonds budgétaires des mesures destinées aux personnes démunies non assurées sociales, notamment en matière de santé.

La définition susmentionnée, qui inclue aussi les « démunis » et les ayants droit, paraît donc de nature à faire potentiellement bénéficier du protocole pratiquement tous les Algériens. De plus, le présent article 1er dispose que d’autres catégories pourraient être d’un commun accord  admises « à titre dérogatoire ».

L’article 2 du présent protocole définit son champ d’application territorial. Pour la France, il couvre le territoire métropolitain ainsi que les départements d’outre-mer, mais pas les autres collectivités d’outre-mer (Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis et Futuna, Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, notamment), car les compétences en matière de protection sociale leur ont été transférées ou bien y subsistent des dispositifs spécifiques différents du régime de droit commun.

2.   La garantie des droits des patients

L’article 3 du présent protocole garantit aux patients algériens qui en bénéficieront l’application de la réglementation française en matière de santé publique et de droits des patients. Sans en faire une liste exhaustive, on rappelle que ces droits comprennent notamment celui à une information complète sur les traitements prodigués et l’accès au dossier médical, l’obligation de recueil du consentement éclairé, la protection du secret médical, les dispositions spécifiques aux personnes en fin de vie, etc.

Certaines dispositions opérationnelles ont déjà été prises. Depuis le début de l’année 2017, la CNAS (interface algérienne) a mis à disposition du pôle médical du Centre national des soins à l’étranger (interface française pour la gestion du protocole : voir infra) un serveur sécurisé permettant l’échange des rapports médicaux entre les différents professionnels concernés dans le respect du secret médical ou de la confidentialité.

Il faut également souligner, s’agissant de patients pas nécessairement francophones, l’importance de mettre en place un accueil dans leur langue et/ou de bonnes prestations d’interprétariat, afin de respecter les obligations en matière d’information et de recueil du consentement.

3.   Une obligation d’autorisation préalable des prises en charge

Les articles 4 à 6 du présent protocole établissent un dispositif rigoureux d’autorisation et d’évaluation financière préalable (devis) des soins programmés pour des patients algériens dans des établissements français.

Ainsi l’article 4 garantit-il à ces patients l’accès aux prestations en nature de l’assurance maladie sous réserve que l’institution algérienne compétente, c’est-à-dire la Caisse nationale des assurances sociales des travailleurs salariés (CNAS), leur ait délivré, avant leur départ du territoire algérien, une « attestation de droits aux soins programmés ».

Selon l’article 5, la délivrance de cette attestation devra être précédée d’un échange entre la CNAS et l’établissement français concerné, lequel aura notamment établi un devis sur la base d’un tarif journalier forfaitaire (comme les établissements en établissent communément) – le cas particulier des hospitalisations discontinues avec soins ambulatoires étant prévu.

L’article 6 traite en détail des situations où les soins devront être prolongés au-delà de la période initialement programmée, car les frais supplémentaires générés de ce fait sont dans les dispositifs en vigueur à l’origine de multiples litiges. Il est donc prévu un système de demande de prolongation des soins avec un échange entre l’établissement français et la CNAS encadré dans un délai restreint (la CNAS disposera de quatre jours pour statuer et son silence vaudra acceptation), compte tenu des enjeux, un recours possible à une expertise médicale et une exception pour les cas où le pronostic vital serait engagé.

4.   Un dispositif centralisé de liquidation et de recouvrement des frais

L’un des objectifs majeurs du présent protocole étant de sécuriser la facturation et le recouvrement des frais médicaux des patients algériens soignés en France, ses articles 7 et 8, complétés par les dispositions de l’arrangement administratif signé en même temps, prévoient des obligations financières précises et un circuit financier bien organisé.

L’article 7 met ainsi à la charge de la CNAS algérienne le rapatriement des patients ou de leur dépouille, ainsi que, le cas échéant, les soins prodigués avant ce rapatriement après un rejet d’une demande de prolongation de soins. Tout est donc fait pour éviter que certains frais au statut mal déterminé ne restent à la charge des établissements français.

L’article 8 prévoit que l’institution compétente française (soit, conformément à l’article 6 de l’arrangement administratif précité, la caisse primaire d’assurance maladie – CPAM – dans le ressort de laquelle la personne reçoit les soins) finance les prestations en nature délivrées dans l’établissement hospitalier concerné pour le compte de l’institution algérienne. Le correspondant financier des hôpitaux sera donc désormais, pour les patients algériens, la CPAM locale, comme pour les patients français. Ces patients algériens seront d’ailleurs immatriculés par la CPAM, afin que les dossiers individuels puissent être suivis de manière sûre.

Le tarif de prise en charge, fixé par l’article 2 de l’arrangement administratif, sera le « tarif journalier des prestations non majoré applicable aux patients relevant d’une sécurité sociale coordonnée avec la législation française en application d’un accord international ». Ce tarif correspond au prix de journée facturé par les hôpitaux aux patients étrangers relevant d’un accord de coordination (carte européenne d’assurance maladie ou conventions bilatérales). Il est variable selon la spécialité et propre à chaque établissement (mais validé annuellement par l’Agence régionale de santé). Pour certains patients étrangers, il peut être majoré, mais, dans le cas présent, ces majorations sont donc exclues. En revanche, l’arrangement administratif précise qu’à ce tarif journalier pourront être ajoutés les coûts de molécules et prestations onéreuses et innovantes.

Le reste à charge appliqué aux patients français (ticket modérateur, forfait journalier et franchises médicales) ne sera pas facturé aux patient couverts par le protocole, mais sera directement pris en charge par la CPAM en cause (et donc ensuite par la CNAS).

La CNAS algérienne remboursera les frais réels à partir des relevés de dépenses et des comptes rendus hospitaliers transmis par un organisme de liaison français. Selon l’article 7 de l’arrangement administratif précité, cet organisme de liaison sera le Centre national des soins à l’étranger (CNSE). Le CNSE a été créé en 2006 et est rattaché à la CPAM du Morbihan ; il emploie environ 55 personnes. Il est chargé du remboursement des soins à l’étranger aux assurés du régime général, dans le cas où ces assurés ont acquitté leurs factures. Il est également chargé depuis 2015 de gérer les dettes et créances internationales relatives aux soins de santé pour le compte des institutions françaises de sécurité sociale intéressées, dettes et créances résultant de l’application de la coordination européenne de sécurité sociale et des conventions bilatérales de sécurité sociale. Il est donc logique qu’il soit sollicité dans le cadre du présent dispositif. Le recours à une institution spécifiquement chargée, d’ores et déjà, de gérer de manière stricte des relations financières de sécurité sociale avec l’étranger apparaît de nature à éviter que l’application du présent protocole ne conduise à des dérives financières. 

Il est disposé que les remboursements par la CNAS seront effectués dans un délai de trois mois sur la base d’un décompte global semestriel des créances adressé par le CNSE (article 9 de l’arrangement administratif). Afin d’éviter ou de limiter les décalages de trésorerie, la CNAS devra également verser pour chaque exercice des avances sur la base de 35 % du montant des créances soldées au titre de l’exercice précédent, en application de l’article 10 de l’arrangement administratif. De plus, selon l’article 11 du même texte, des frais forfaitaires de gestion administrative seront facturés par le CNSE à la CNAS.

Dans la mesure où le nouveau système sera tout de même relativement lourd (avec l’obligation d’autorisation préalable et de devis), il est essentiel que soient mises en œuvre pour son application des procédures administratives efficientes (circuits de transmission sécurisée de documents standardisés produits dans les délais les plus brefs) entre les établissements de santé, les CPAM et le CNSE ; à défaut, le risque de contournement par les acteurs serait réel.

De telles procédures ont été testées entre l’AP-HP et le CNSE fin 2015 et ont facilité l’apurement du contentieux hospitalier. Elles devront être étendues à l’ensemble des établissements de soins susceptibles de recevoir des patients et aux CPAM concernées.

Il sera également important que les consulats français en Algérie « jouent le jeu » en délivrant rapidement des visas aux patients qui s’inscriront dans le dispositif.

Il n’est pas possible d’anticiper précisément le nombre de patients et le montant global des soins médicaux qui seront pris en charge dans le nouveau dispositif. Comme on l’a dit, ce sont actuellement 15 à 20 millions d’euros par an que la CNAS prend en charge au titre des soins programmés pour des patients algériens dans le cadre du dispositif conventionnel de 1980 et de ses accords directs avec des hôpitaux français, pour environ 800 patients. De plus, le présent protocole élargit le champ des bénéficiaires potentiels en Algérie et, en sécurisant les circuits administratifs et financiers, devrait amener un plus grand nombre d’hôpitaux français à accueillir des patients venus d’Algérie, alors qu’ils sont surtout concentrés sur l’AP-HP pour le moment ; on peut espérer que le protocole permettra une diminution du nombre de patients algériens soignés en France dans le cadre de démarches purement personnelles, lesquels génèrent des problèmes de recouvrement et une dette « privée », en partie irrécouvrable, qui est très significative. À cet égard, le nouveau dispositif devrait répondre au double objectif d’élargissement de la patientèle venue d’Algérie et de réduction des problèmes de dette hospitalière.

5.   Les dispositions institutionnelles

La convention de sécurité sociale franco-algérienne de 1980 a institué une commission mixte composée de hauts fonctionnaires et chargée d’interpréter la convention, régler les différends et apurer les dettes et les créances. Elle se réunit tous les ans, alternativement en France et en Algérie. L’article 9 du présent protocole étend la compétence de cette commission mixte à l’application dudit protocole. Elle aura notamment pour mission la détermination des avances annuelles versées par la partie algérienne en fonction des dépenses de l’exercice précédent et l’apurement des créances.

L’article 10 fixe les conditions du recours à l’expertise médicale en cas de contestation de frais médicaux par la CNAS.

L’article 12 prévoit la désignation par chacune des parties d’un « point de contact permanent » pour la bonne application du protocole. Les points de contact sont nommés dans l’article 8 de l’arrangement administratif précité. Il s’agit du CNSE pour la France et de la CNAS pour l’Algérie.

L’article 13 prévoit, comme dans tout accord impliquant des échanges de données à caractère personnel, des dispositions de protection : ces données ne seront transmises qu’aux fins exclusives d’application du protocole et ne pourront le cas échéant être divulguées qu’avec l’accord de la partie qui les a transmises ; leur transmission, leur stockage et leur traitement devront se conformer aux législations des deux parties en la matière, ainsi qu’en matière de secret médical. Devront donc être respectés, notamment, la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, ainsi que le règlement européen n° 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données. En pratique, l’organisation des échanges de données personnelles (en particulier les données médicales) entre le CNSE et la CNAS nécessitera l’élaboration d’un arrangement technique qui sera soumis à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).

6.   Les dispositions finales

Les articles 14 à 17 du présent protocole comprennent des dispositions transitoires et finales de facture classique dans un accord international : le nouveau texte se substituera à celui en vigueur depuis 1980, devenu inopérant et donc abrogé ; il s’appliquera pour une durée indéterminée (il est conclu pour un an mais sera ensuite tacitement reconduit, sauf dénonciation par une des parties) ; il entrera en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la notification par la moins diligente des deux parties de l’accomplissement de ses procédures internes d’approbation. L’étude d’impact relève que l’approbation algérienne se fera par décret présidentiel et pourrait donc être rapide dès lors que la France aura achevé sa propre procédure, donc que l’Assemblée nationale puis le Sénat auront adopté le présent projet de loi portant approbation du protocole.


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   CONclusion

Le protocole dont l’approbation est proposée à l’Assemblée nationale a pour objet d’inscrire, à l’avenir, l’accueil des patients algériens dans les établissements hospitaliers français pour des soins programmés dans un cadre administratif unifié. Il est conçu pour couvrir potentiellement la plus grande partie de la population algérienne, donc limiter le nombre d’Algériens venant se faire soigner en dehors d’un cadre organisé, et assorti d’un système rigoureux et centralisé d’établissement et de paiement par la sécurité sociale algérienne des frais médicaux afférents. De la sorte, les litiges que l’on constatait jusqu’à présent sur le montant des frais facturés ainsi que les difficultés de recouvrement devraient être très fortement réduits. Bref, ce texte n’empêchera pas toutes les dérives financières liées à l’accueil d’étrangers non-résidents dans notre système hospitalier, mais contribuera à les limiter.

En outre, la négociation et la conclusion du protocole ont été subordonnées au règlement d’une grande part des créances litigieuses héritées du passé.

Ce texte devrait donc permettre de resserrer nos liens avec le peuple algérien en répondant mieux à ses besoins dans ce domaine essentiel qu’est la santé.

Pour nos établissements hospitaliers, il offre la perspective, en sécurisant les circuits financiers, d’une plus grande ouverture à cette patientèle étrangère. À cet égard, il s’inscrit dans une politique volontariste d’ouverture aux patients étrangers que justifie l’excellence du système de santé et en particulier des équipes hospitalières de notre pays.

Votre commission vous propose donc d’adopter le présent projet de loi.

    


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.   Réunion du mercredi 19 juillet 2017

Au cours de sa séance du mercredi 19 juillet 2017, la commission débat, sur le rapport de M. Michel Fanget, du projet de loi autorisant l’approbation du protocole annexe à la convention générale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire sur la sécurité sociale du 1er octobre 1980 relatif aux soins de santé programmés dispensés en France aux ressortissants algériens assurés sociaux et démunis non assurés sociaux résidant en Algérie.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.

M. Claude Goasguen. Je qualifie ce texte, qui a été signé par Mme Marisol Touraine, de supercherie. Je connais bien la gestion de l’aide médicale d’État (AME) pour les étrangers et les difficultés que sa gestion comporte pour avoir rédigé sur le sujet quatre rapports au nom de la commission des finances. Les hôpitaux publics se sont retrouvés face à une situation ubuesque : les gens demandaient à bénéficier de l’AME, qui est financée par le budget de l’Etat, mais l’AME refusait de payer. En réalité, le système qui vous est proposé permet d’intégrer à la comptabilité de la sécurité sociale les frais qui étaient auparavant financés par le budget de l’Etat. L’intérêt est évidemment de diminuer le montant mirobolant de l’AME qui n’a d’ailleurs pas été rectifié depuis que j’ai réussi à démontrer devant la commission des finances qu’il ne représentait pas 1 milliard d’euros mais 1,5 milliard. Nous sommes donc face à une manipulation financière classique que, malheureusement, le problème des soins à l’étranger couvre depuis de nombreuses années sous les gouvernements de droite comme de gauche. Je vous invite donc à regarder de très près les conséquences financières du système qui vous est proposé et à veiller à ce que nous puissions avoir un jour un débat sur ce problème des soins aux étrangers, qui demeure une terre inconnue. La prudence nous impose de ne pas suivre le calcul de Marisol Touraine qui s’inscrivait dans un contexte politique qui est, je l’espère, obsolète.

M. Jean-Paul Lecoq. Dans ce protocole et dans l’explication du rapporteur il y a une certaine confusion des notions de tourisme médical et de soins aux ressortissants étrangers. Or, il s’agit de deux choses très différentes. Le tourisme médical n’est pas une économie que je souhaite voir se développer. Je préfère des coopérations entre États permettant aux gens de se faire soigner chez eux. L’impact de ce protocole sur le budget de la sécurité sociale et de l’Etat n’est pas évalué. Rien non plus sur son impact sur le fonctionnement de nos hôpitaux.  Ce protocole a permis d’obtenir le remboursement d’une dette mais je ne pense pas qu’il permette de cadrer les choses de manière satisfaisante pour l’avenir.

M. Buon Tan. Je voudrais revenir sur les dépenses liées aux soins « touristiques ». Je connais plus particulièrement le problème du site de la Pitié-Salpêtrière qui fait face, pendant la période estivale, à une recrudescence de patients qui prétendent être tombés malades et sont pris en charge pour des opérations très lourdes qui auraient dû être planifiées à l’avance. Cette situation engendre d’importantes difficultés pour les gestionnaires et des ardoises parfois très lourdes, s’agissant de patients qui n’ont souvent pas les moyens de payer. Or, il s’avère qu’il s’agit souvent de personnes qui sont en demande d’AME ou des touristes de passage à Paris et que le corps médical est obligé de soigner. Ce protocole prévoie un encadrement des soins programmés mais qu’en est-il des soins non programmés ? Y a-t-il une procédure pour gérer les cas qui ne devraient pas entrer dans ce cadre ? Y a-t-il moyen de ne pas les accepter ou de les traiter autrement ?

Mme Marine Le Pen. Il est pour le moins inquiétant de ne pas disposer de chiffres. Un accord a été signé avec la sécurité sociale algérienne mais on ignore si des efforts ont déjà été consentis dans ce cadre. On ne peut que s’étonner de voir ce type de protocole arriver devant nous, alors qu’un tiers de nos compatriotes ne peut pas se soigner correctement parce qu’ils n’en ont plus les moyens, que les services hospitaliers nous font savoir en toutes circonstances qu’ils sont débordés et qu’on met les patients en danger faute de moyens et de personnels. Parallèlement on s’étonne aussi de constater que le tourisme médical s’effectue aussi dans l’autre sens, des pays comme le Maroc et la Tunisie offrant des soins, notamment dentaires, bien meilleur marché que chez nous. Je partage évidemment les inquiétudes exprimées par Claude Goasguen et estime que l’absence de chiffres ne permet pas de voter ce texte.  L’Algérie est-elle d’accord pour prendre en charge l’intégralité des frais relatifs à des ressortissants qui viennent se faire soigner en France en détournant le système au détriment de nos propres compatriotes dont les conditions d’accès aux soins sont mises en péril dans de nombreux hôpitaux ?

M. Jacques Maire. Il convient de recadrer l’enjeu de ce protocole qui n’embrasse pas l’ensemble des sujets que nous avons évoqués. Ce que je comprends c’est qu’il y a les parcours de soins qui sont anticipés, négociés par le système national de sécurité sociale algérien, lequel prend contact avec les autorités françaises hospitalières et de sécurité sociale avec un système de préfinancement partiel et de remboursement in fine. Ce cadre-là est exceptionnel puisqu’il ne concerne que quelques dizaines de patients par an. Ce n’est pas le sujet de l’AME. Le protocole règle la question du parcours de soins algéro-français de manière techniquement correcte mais ne règle en rien la question de l’AME et des difficultés budgétaires qui y sont liées.

Mme Marine Le Pen. J’aimerais vraiment qu’on puisse avoir une réponse à la question qui a été posée tout à l’heure. Y a-t-il une prise en charge à 100 % des soins au coût réel par la sécurité sociale algérienne ? La sécurité sociale algérienne est-elle si puissante et riche ? Ou y a-t-il un reste à charge pour les hôpitaux français ? Ou adaptons-nous le prix des prestations médicales qui sont fournies au remboursement effectué par la sécurité sociale algérienne, ce qui serait profondément scandaleux puisque nos compatriotes n’ont pas la possibilité de bénéficier de ces tarifs beaucoup plus intéressants ?

M. Alain David. Jusqu’à présent un certain nombre de soins à des citoyens algériens se faisait par le biais de certificats d’hébergement de trois mois qui étaient demandés par les familles. Il s’agissait d’un subterfuge qui permettait de venir dans notre pays pour bénéficier de soins quelquefois non contrôlés. Il y a donc à cet égard une clarification qui me paraît intéressante.

M. Claude Goasguen. Je voudrais rappeler à mes collègues que dans une affaire comme celle-là on peut invoquer le principe international de la nation la plus favorisée et que si nous acceptons des un traitement spécifique à l’égard de l’Algérie, je ne vois pas dans quelle mesure on pourrait refuser à d’autres pays les mêmes droits. La vérité est que le système qui est proposé correspond à un moment historique particulier que j’ai parfaitement suivi à la commission des finances et qui correspond aux graves difficultés rencontrées par Madame Touraine sur l’évaluation des chiffres de l’AME. À la lecture de ce texte, tout pousse à gonfler les chiffres de l’AME parce qu’il est évident que les mécanismes de remboursement de la sécurité sociale algérienne ne sont pas à la hauteur des ambitions : il n’y aura pas d’application stricte de ce texte et il conduira à gonfler un peu plus l’AME, car les trois mois d’hébergement que vous évoquez sont les trois mois qui étaient justement nécessaires pour pouvoir bénéficier de l’AME.

Mme Laetitia Saint-Paul. La procédure accélérée ne fait pas l’unanimité et me pose également problème puisque nous manquons de chiffres. L’article 8 du protocole indique que le reste à charge ne sera pas facturé au patient et sera intégralement payé par la CPAM à l’établissement de santé ; l’institution algérienne remboursera les frais réels à partir des relevés de dépenses transmis par l’organisme de liaison français. Nous ne disposons d’aucune information sur le passif depuis des dizaines d’années. Or, je suppose que la dette s’accumule à hauteur de plusieurs dizaines voire centaines de millions. Nous manquons de données pour accepter cette procédure accélérée.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Je suis d’accord avec l’ensemble des intervenants : nous manquons cruellement de chiffres et sommes insuffisamment éclairés. Nous avons la possibilité de reporter l’examen de ce texte d’une semaine pour recueillir des informations complémentaires. Cela permettra d’audition de la directrice générale de l’offre de soins du ministère de la santé afin d’obtenir des chiffres et un état précis de la situation, ou bien le patron de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

M. Christian Hutin. Je souscris à votre analyse. Nous ne disposons pas des éléments nécessaires. Nous avons des avis politiquement divergents sur la question de l’AME. Je me permets de rappeler, puisqu’un débat est lancé dans notre pays sur la question de l’obligation de vaccination, que le développement dans notre pays de certaines maladies est aussi dû au fait qu’un certain nombre de clandestins souffrent de ces maladies et ne peuvent pas se soigner. Il me semble par ailleurs qu’il n’y a aucune urgence à examiner ce texte.

M. Jean-Luc Mélenchon. Je ne suis pas un spécialiste du dossier mais je constate qu’il est entouré de fantasmes, en particulier sur l’existence d’une dette accumulée. Je rappelle tout de même que l’Algérie n’est pas un pays pauvre et qu’elle ne demande pas l’aumône. J’approuve néanmoins votre proposition, madame la présidente. Il conviendra par ailleurs de donner des garanties à la personne que nous serons amenés à entendre afin qu’elle ne soit pas poussée à la démission si elle exprime franchement son point de vue comme l’a fait le général de Villiers.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Nous pourrons lui proposer le huis clos, même si visiblement il ne garantit pas de tout.

M. Buon Tan. Je rejoins M. Hutin sur l’absence d’urgence à examiner ce texte. Je suggère également par ailleurs que nous entendions un représentant de l’AP-HP ou, mieux, de la Pitié-Salpêtrière, qui gère ce type de problème directement au quotidien.

Mme Sonia Krimi. Je regrette beaucoup les dérives auxquelles ont donné lieu les débats de ce matin. J’ai entendu parler de déchéance de nationalité, citer Israël comme modèle. Je préfère pour ma part Gandhi et Mère Teresa. Je souhaite surtout qu’on arrête de vouloir toujours taper sur les plus faibles. Je rappelle que le trou de la sécurité sociale est de 4 milliards d’euros et que l’Etat réalise 15 milliards d’euros de gains en raison de tous ceux qui ne demandent pas à bénéficier de leurs droits.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Il n’y a ici de suspicion à l’égard de personne. En exigeant des éléments supplémentaires, nous ne faisons que notre travail de parlementaire sans aucune arrière-pensée.

M. Frédéric Petit. Serait-il possible de choisir la personne à auditionner de façon à ce que le débat puisse être élargi aux autres pays que l’Algérie ?

M. Meyer Habib. Nous voyons bien que ce texte suscite de nombreuses interrogations. Si nous décalons son examen d’une semaine, je ne suis pas sûr que nous pourrons y répondre, quelles que soient les auditions que nous ferons. Je pense que nous devons décaler l’examen de ce texte à la rentrée, voire au-delà.

M. Bernard Deflesselles. Je partage l’idée que nous devons prendre notre temps. S’agissant des auditions, ne nous cantonnons pas à une seule voix : nous devons entendre l’AP-HP, la direction compétente du ministère et la sécurité sociale, au moins. Peut-être pourrons-nous alors y voir plus clair.

Mme Liliane Tanguy. C’est en effet un problème compliqué, nous devons prendre le temps d’aller au fond des choses. Le texte ne porte que sur les soins programmés, mais je suggère que nous considérions aussi la question des soins d’urgence, à l’origine de non-paiements de la part des ressortissants étrangers.

Mme Olga Giverney. Pourquoi le projet de loi est-il examiné en procédure accélérée ?

Mme la Présidente Marielle de Sarnez. C’est la procédure habituelle à laquelle à recours le Gouvernement pour accélérer l’inscription et le vote d’un texte. Mais cette procédure n’est sans doute pas exempte de critiques et nous pouvons intervenir.

M. Jean François M’Baye. Je viens de l’Office nationale d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), qui doit aussi gérer cette problématique des dépenses de santé des ressortissants étrangers. Je suggère donc que nous auditionnions son directeur.

Mme la Présidente Marielle de Sarnez. Nous avons deux solutions : soit nous auditionnons la semaine prochaine une ou plusieurs personnes sur ce sujet ; soit je demande à la Conférence des présidents le report de l’examen de ce texte en séance publique. À vous entendre, je penche plutôt pour la deuxième solution, qui nous permettra d’aller au fond du sujet, dans la transparence et dans l’intérêt mutuel de la France et de l’Algérie. Qu’en pensez-vous, M. le rapporteur ?

M. Michel Fanget. Je souscris tout à fait à cette proposition. Ce texte a le mérite de proposer une organisation plus claire pour les soins programmés, mais nous nous sommes vite aperçus que sa portée était bien supérieure.

Mme la Présidente Marielle de Sarnez. Je porterai donc cette proposition à la Conférence des présidents de mardi prochain et l’en informerai par courrier. Dans cet intervalle, je vous invite, monsieur le rapporteur, à étudier les auditions que nous pouvons effectuer en fonction de ce que nos collègues ont exprimé aujourd’hui. Vous pouvez d’ailleurs bien évidemment vous rapprocher du rapporteur si vous avez d’autres idées.

Le projet de loi n’est donc pas mis aux voix.


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II.   Réunion du mercredi 22 novembre 2017

Au cours de sa seconde séance du mercredi 22 novembre 2017, la commission examine, sur le rapport de M. Michel Fanget, le présent projet de loi.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.

Mme Laetitia Saint-Paul. Je voudrais remercier le rapporteur pour le travail qui a été conduit. Le groupe La République en marche était particulièrement dubitatif, mais forts de l’éclairage que vous venez de nous apporter, nous voterons pour ce projet de loi. Vous avez indiqué que les États-Unis et l’Arabie Saoudite ont une dette substantielle, un projet analogue est-il envisagé avec ces pays ?

M. Christian Hutin. Je me souviens précisément du débat que nous avions eu et je regrette que ceux qui avaient souhaité cet éclairage supplémentaire soient absents ce soir. Votre rapport montre bien que nous parlons de sommes qui sont minimes par rapport au budget de la sécurité sociale. Nous parlons de 35 millions d’euros.

M. Michel Fanget, rapporteur. À comparer à un budget des hôpitaux qui est de 90 milliards d’euros…

M. Christian Hutin. Tout le reste relève du fantasme. Je me rappelle un discours de Nicolas Sarkozy devant une université américaine, à l’époque de l’Obamacare, dans lequel il avait expliqué aux étudiants que, quelles que soient votre couleur, votre nationalité, lorsque vous tombez malade en France on vous soigne et on ne s’occupe pas de savoir qui paie. C’est là la richesse de notre pays.

L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) pourrait peut-être fournir une étude sur le sujet. Il y a assez d’inspecteurs qui sont un peu en itinérance à l’IGAS, à l’image de certains ambassadeurs, pour effectuer une telle étude… Le rapport qui nous est présenté aujourd’hui est clair, transparent et précise les choses d’une manière extrêmement républicaine et humaniste.

En ce qui concerne la commercialisation des soins hospitaliers, lors de l’examen d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale, j’avais été choqué lorsque nous avions voté des conditions particulières d’accueil dans les hôpitaux parisiens pour une clientèle spécifique. Si cela rapporte de l’argent, le républicain qui considère que les soins de santé doivent être les mêmes pour tous s’interroge sur la moralité d’une telle évolution. Les hôpitaux de Paris ont créé de petits hôtels pour des étrangers richissimes qui viennent se faire soigner chez nous.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Il me semblerait en effet intéressant que le rapporteur demande dans son rapport une étude de l’IGAS sur ces questions.

M. Michel Fanget, rapporteur. Je le ferai. Je précise à Laetitia Saint-Paul que la dette de patients des États-Unis est de 6 millions d’euros. Il n’y a pas de solution globale à trouver en l’occurrence car il s’agit de recouvrement à faire auprès d’assurances privées.

J’indique à Christian Hutin, s’agissant de la commercialisation, que Martin Hirsch, que nous avons entendu dans le cadre de la présentation de ce rapport, est tout à fait opposé à la création de circuits particuliers pour des patients étrangers particulièrement solvables. Nos hôpitaux et nos spécialistes sont réputés mais si des étrangers viennent se faire soigner dans un tel cadre, ils ne doivent absolument pas prendre la place de patients français

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Je propose que nous transmettions ce rapport à la ministre de la santé.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte le projet de loi n° 13 sans modification.

 

 


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   annexes

Annexe n° 1 :
TExte adopté par la commission

 

Article unique

Est autorisée l’approbation du protocole annexe à la convention générale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire sur la sécurité sociale du 1er octobre 1980 relatif aux soins de santé programmés dispensés en France aux ressortissants algériens assurés sociaux et démunis non assurés sociaux résidant en Algérie, signé à Alger le 10 avril 2016, et dont le texte est annexé à la présente loi.


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annexe n° 2 :
Liste des personnes auditionnées par le bureau de la commission

       M. Jean de Kervasdoué (professeur au Conservatoire national des arts et métiers, ancien directeur des hôpitaux au ministère de la santé – 1981-1986 –, auteur en 2014 du rapport au Gouvernement « Valoriser les atouts de la France pour l’accueil des patients étrangers »)

       Caisse nationale d’assurance maladie (CNAMTS) : Mme Fanny Richard, responsable de la réglementation, M. Mohamed Azgag, directeur de la caisse primaire du Morbihan en charge de la gestion du Centre national des soins à l’étranger, et Mme Frédérique Boitard, directrice adjointe en charge de ce centre

       Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) : M. Martin Hirsch, directeur général, et Mmes Karine Istin, chef du département « pilotage, comptabilité et facturation », et Florence Veber, directrice de la délégation aux relations internationales


([1]) France Inter, Secrets d’info, 7 janvier 2017.

([2]) « Valoriser les atouts de la France pour l’accueil des patients étrangers ».

([3]) «  Politique d’accueil des patients non résidents », CME 7 juillet 2015, AP-HP.

([4]) « Politique d’accueil des patients non résidents – Bilan des nouvelles orientations », CME 13 septembre 2016, AP-HP.

([5]) L’AME est attribuée aux personnes en séjour irrégulier à partir de trois mois de présence ininterrompue, avec des exceptions à cette condition de durée pour les mineurs, « à titre humanitaire », ou dans le cas de soins urgents « dont l’absence mettrait en jeu le pronostic vital » (cette AME est alors prise en charge par l’assurance maladie, qui reçoit à ce titre une subvention forfaitaire de l’État).

([6]) Voir : Les cahiers du CREAD n°107-108, 2014, « Le système algérien de protection sociale : entre bismarckien et beveridgien », par Walid Merouani, Nacer-Eddine Hammouda et Claire El Moudden.