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N° 430

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 novembre 2017.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION de loi visant à instaurer une taxe sur les transferts de sportifs professionnels,

 

 

 

Par M. Michel ZUMKELLER,

 

 

Député.

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale :  248.

 


 

 

 


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SOMMAIRE

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 Pages

introduction

I. Les graves difficultÉs financiÈres des clubs amateurs contrastent avec les montants astronomiques des indemnitÉs de transfert de certains sportifs professionnels

II. Des mÉcanismes de soutien du sport professionnel au sport amateur existent mais demeurent insuffisants

III. La prÉsente proposition de loi, si elle n’est pas exempte de critiques, exprime la volontÉ de ses auteurs de trouver des solutions aux difficultÉs du sport amateur

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Discussion générale

II. Examen de larticle unique

Article unique Instauration dune contribution assise sur les recettes brutes générées par les indemnités de mutation de sportifs professionnels

Après l’article unique

Annexe 1 : Liste des personnes auditionnÉEs par le rapporteur

Annexe 2 : liste des textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

 


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   introduction

La Commission est aujourd’hui saisie de la proposition de loi visant à instaurer une taxe sur les transferts de sportifs professionnels, déposée le 3 octobre 2017, et inscrite par le groupe UDI, Agir et Indépendants à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale le 7 décembre prochain.

Ce texte, dont le rapporteur est premier signataire, a été cosigné par une quarantaine de députés ([1]) appartenant à des groupes parlementaires de sensibilité très diverse, preuve du caractère non‑partisan des enjeux qu’il soulève, enjeux qui pourraient se résumer ainsi : comment faire davantage participer le sport professionnel ([2]) au financement du sport amateur ?

 


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I.   Les graves difficultÉs financiÈres des clubs amateurs contrastent avec les montants astronomiques des indemnitÉs de transfert de certains sportifs professionnels

Cette proposition de loi se nourrit des remontées des petits clubs de sport amateur qui peinent de plus en plus à trouver les financements nécessaires à leur activité, et même, pour certains, à leur survie.

Ces clubs sont pris en tenaille entre, d’une part, l’accroissement de leurs dépenses liées au durcissement des normes qui leur sont imposées – qu’il s’agisse des règles relatives au niveau de formation des éducateurs ou des normes techniques applicables aux équipements et aux stades – et, d’autre part, la réduction des financements publics : les financements d’État peinent à irriguer effectivement les clubs (cf. infra) tandis que les collectivités territoriales, qui demeurent les premiers financeurs publics du sport amateur, ne parviennent pas à maintenir leurs niveaux de participation en raison de la baisse des dotations de l’État. En particulier, les petites communes ne peuvent bien souvent plus financer les investissements pourtant nécessaires à leurs petits clubs locaux.

Les fédérations sportives quant à elles, qui encouragent la montée en gamme du service offert aux sportifs amateurs, ne compensent pas financièrement l’accroissement des règles qu’elles imposent aux clubs : ce n’est pas l’accroissement des normes qui est en soi problématique, mais bien l’absence de compensation financière.

Au total, nombre de clubs ne survivent aujourd’hui que grâce au dévouement de leurs bénévoles, mais ces bénévoles se lassent (cf. en encadré ci‑dessous le témoignage d’un président de club amateur rencontré par le rapporteur) et certains clubs, surtout dans les territoires ruraux, sont contraints de se regrouper, faute de moyens.

Illustration des difficultés financières des « petits clubs » :
entretien avec M. Philippe Sarda, Président de lEntente sportive du Territoire de Belfort (ESTB) - Handball à Valdoie

Le rapporteur a souhaité entendre le témoignage du président d’une association locale afin d’illustrer concrètement les difficultés vécues sur le terrain.

Pour M. Philippe Sarda, toutes les actions qui permettront de sauver les petites associations de terrain seront appréciées par les présidents de clubs amateurs sur tout le territoire car ces clubs souffrent aujourd’hui. Pour ce qui concerne l’Entente sportive du Territoire de Belfort (ESTB) – Handball qu’il préside, il faut savoir que 75 % du produit des cotisations versées par les licenciés sont reversées automatiquement à la Fédération nationale de Handball. Ainsi, sur les 25 000 euros reçus des 250 licenciés que compte encore le club, 18 000 euros sont reversés à la Fédération. Ce chiffre est à rapprocher du budget général de l’association : 100 000 euros par an, dont la moitié est financée par les collectivités territoriales.

Le club est constitué en association, qui ne fonctionne que grâce à ses bénévoles ; par manque de moyens financiers, il doit se passer des services d’un salarié à temps plein, dont il aurait pourtant largement besoin.

À cela s’ajoutent les multiples contraintes que la Fédération impose aux clubs, telle la remise aux normes de certains équipements ou la promotion d’actions en direction de publics spécifiques, notamment les personnes en situation de handicap, sans toutefois participer au financement des investissements nécessaires. Et il ne serait pas envisageable d’augmenter les tarifs des licences qui sont déjà assez élevés (plus de 100 euros par an) et constituent un lourd budget pour les familles.

M. Philippe Sarda a au total estimé que le produit de la taxe instaurée par la proposition de loi constituerait une « véritable bouffée doxygène » pour les petits clubs dans les années à venir.

Lorsque l’on connaît les mérites de la pratique sportive amateur sur le développement des jeunes et des moins jeunes, cette situation ne peut qu’alerter la Représentation nationale et il est urgent qu’elle se saisisse pleinement de cette question. C’est pourquoi le groupe UDI, Agir et Indépendants a demandé l’inscription de cette proposition de loi à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dans le cadre de sa journée réservée.

 Aujourdhui, un fossé se creuse entre le sport amateur et le sport professionnel et, si on ne fait rien, cest tout le sport qui va sen trouver fragilisé. Or, nos plus grands sportifs professionnels ont un jour débuté dans des petits clubs, qui demeurent les maillons essentiels de la formation à tous les niveaux. Le sport professionnel a besoin du sport amateur pour vivre : pour que demain un club de football professionnel français puisse recruter un joueur aussi talentueux par exemple que M. Kylian Mbappé, il est absolument nécessaire de soutenir aujourd’hui le vivier de joueurs que constituent les clubs amateurs sur tout le territoire.

Cette question est d’autant plus cruciale que Paris vient d’être désignée par le Comité international Olympique ville hôte des Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024 : l’impact que cet événement et sa préparation auront sur la société française, et notamment sa jeunesse, est très important ; il est indispensable de saisir cette opportunité pour mieux soutenir les clubs amateurs.

Il n’est d’ailleurs pas dans l’esprit du rapporteur d’opposer sport professionnel et sport amateur, mais bien d’alerter sur les difficultés rencontrées par les clubs amateurs, qui contrastent de manière criante avec les dérives constatées récemment dans le prix des transferts de certains joueurs professionnels, qui choquent nombre de nos concitoyens.

 

Rappelons que, depuis quinze ans – notablement depuis l’arrêt Bosman de la Cour de Justice des Communautés Européennes de 1995 ([3]), qui a eu pour effet d’ouvrir un véritable marché européen allant de pair avec une augmentation des salaires et du prix des transactions –, le marché européen des transferts croît chaque année de manière exponentielle : dans les années 1994‑95, le montant total des transferts au sein de l’Union européenne avoisinait 400 millions d’euros ; elle dépassait les 3 milliards d’euros au cours des dernières années. Cinq pays
– l’Angleterre, l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne et la France – concentrent à eux‑seuls 55 % des transactions.

Le régime des transferts de joueurs dans le football

On appelle communément « transfert » la cession par un club sportif d’un droit à contracter avec un joueur. Cette transaction nécessite l’accord entre le club qui se sépare du joueur et le club qui souhaite le recruter, ainsi que du joueur lui-même. Une indemnité pour cessation anticipée du contrat est fixée par le contrat qui lie le joueur à son club : c’est l’indemnité de transfert que devra verser tout nouveau club qui souhaitera recruter le joueur.

Afin de garantir l’intégrité des compétitions, des règles encadrent au plan international le marché des transferts, ou « mercato », période durant laquelle les clubs professionnels de football sont autorisés à transférer ou à prêter leurs joueurs à d’autres clubs : il existe un « mercato d’été » qui se déroule durant la trêve estivale des compétitions internationales, avant la reprise de la saison en septembre, et un « mercato d’hiver » qui se déroule durant la trêve hivernale. En dehors de ces deux périodes, un joueur ne peut pas être transféré d’un club à un autre.

Les indemnités de transferts sont soumises à l’impôt dans des conditions de droit commun : en France, elles sont taxées au titre du régime des plus‑values de cession réalisées par le club vendeur et soumises à l’impôt sur les sociétés en tant que résultat exceptionnel. D’autre part, le montant du transfert est soumis à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Le rapporteur se défend de tout « effet Neymar ([4]) » qui aurait guidé sa démarche, une proposition de loi tendant aux mêmes fins ayant été déposée par lui avant le changement de législature, en octobre 2016 ([5]).

L’entraîneur du club Manchester United, M. José Mourinho, a lui-même récemment déclaré que cette inflation des niveaux d’indemnités de transfert n’avait plus beaucoup de sens et conduisait à relever pour tous les joueurs les niveaux des indemnités dues au club d’origine en cas de transfert. Le monde du sport, et notablement du football, est engagé dans une course illusoire qui enfle une bulle spéculative dont tous n’ont pas mesuré les dangers.

Le rapporteur fait remarquer que l’encadrement et la moralisation de l’exercice de la fonction d’intermédiaire sportif, dont les commissions de transferts s’élèvent souvent à plus de 10 % des transactions, constituent également un sujet important dans ce débat ([6]).

II.   Des mÉcanismes de soutien du sport professionnel au sport amateur existent mais demeurent insuffisants

La présente proposition de loi vise à créer un nouveau mécanisme de solidarité financière entre le sport professionnel et le sport amateur, aux côtés des mécanismes déjà existants, tant au plan national qu’au plan international.

● Le principal mécanisme de solidarité en droit interne est la taxe de 5 % prélevée sur les cessions de droits de diffusion télévisuelle des manifestations ou compétitions sportives, dite « taxe Buffet », créée en 2000 ([7]). Le produit de cette taxe est affecté ([8]), depuis 2006, au Centre national pour le développement du sport (CNDS), établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère en charge des sports. Depuis le 1er juillet 2008, le champ d’application de la « taxe Buffet » a été étendu à tous les canaux de diffusion de la télévision – incluant internet et la téléphonie mobile – et à la diffusion de manifestations ou compétitions sportives en vidéo à la demande.

● Le mouvement sportif de son côté a organisé une certaine solidarité entre sport professionnel et sport amateur, tant au plan international que national.

Au plan international, le Règlement de la Fédération internationale de football (FIFA) prévoit depuis 2001 le versement d’indemnités de formation et de solidarité lors des transferts internationaux de joueurs à destination des clubs formateurs : ainsi, au titre de la solidarité, une taxe de 5 % est prélevée sur chaque transfert entre clubs de pays différents et redistribuée entre tous les clubs formateurs où le joueur est passé entre son 12e et son 23e anniversaire. Ainsi par exemple en 2016, pour le transfert de M. Paul Pogba de la Juventus de Turin à Manchester United, l’Union Sportive de Roissy-en-Brie, son premier club, a reçu près de 300 000 euros, soit cinq fois son budget annuel. Une telle disposition n’est en revanche pas applicable lorsque le transfert concerne deux clubs d’un même pays. Au titre de la formation, le règlement de la FIFA prévoit en outre d’allouer une somme forfaitaire aux clubs ayant formé le joueur entre son 12e et son 23e anniversaire. Ces dispositifs apparaissent pleinement cohérents, car la valeur d’un joueur dans le cadre d’un transfert est liée à ses performances sportives, performances qui dépendent non seulement des capacités du joueur mais aussi de l’apprentissage qu’il a reçu tout au long de sa formation en clubs. La qualité de la formation reçue par le joueur exerce ainsi une influence très importante sur sa capacité à être recruté par un grand club professionnel.

Au plan national, les fédérations ont mis en place des dispositifs de solidarité, au travers d’une redistribution financière des ligues professionnelles, qui sont chargées de la gestion centralisée des droits du sport professionnel, vers les fédérations, à charge pour ces dernières de redistribuer ces sommes aux clubs amateurs. Certaines fédérations ont en outre mis en place des fonds de solidarité ; c’est notamment le cas du football (cf. encadré ci-après).

Les mécanismes de solidarité interne entre football professionnel et football amateur

Le football professionnel français finance directement le football amateur à hauteur de 100 millions d’euros par an ([9]) : outre le versement au CNDS du produit de la « taxe Buffet » par les clubs professionnels, à hauteur de 39,3 millions d’euros, il faut prendre en compte le versement par la Ligue de football professionnel (LFP) d’une contribution de 17 millions d’euros à la Fédération française de football (FFF) destinée au financement du football amateur, ainsi que le versement par les clubs de subventions d’équilibre à leurs associations sportives.

À cela s’ajoute le Fonds d’Aide au Football Amateur (FAFA), doté de 15 millions d’euros et principalement alimenté par la FFF et la LFP mais également, de manière résiduelle, par l'instance dirigeante du football européen, l’Union des associations européennes de football (UEFA), au travers de sa politique de construction de nouveaux espaces de pratiques (terrains de Foot à cinq ou de futsal). Ce fonds soutient le développement et la structuration du football amateur. Les collectivités locales peuvent également bénéficier d’aides pour le financement d’équipements. À titre d’exemples, le FAFA participe au financement d’aménagements de terrains ou de changement de revêtement du gazon synthétique, à la création ou la rénovation de systèmes d’éclairage avec des projecteurs LED ou au soutien à la création de postes de responsables administratif ou sportif. Un bonus de 10 % est accordé pour des projets d’équipement sur les Zones de revitalisation rurale et de Quartiers prioritaires de la politique de la ville.

La mise en place de l’ensemble de ces mécanismes doit bien entendu être saluée mais il faut avoir en tête que les mécanismes internationaux ne sont applicables qu’entre clubs de nationalité différente et que les montants en jeu ne sont pas suffisants pour répondre aux difficultés des clubs amateurs.

III.   La prÉsente proposition de loi, si elle n’est pas exempte de critiques, exprime la volontÉ de ses auteurs de trouver des solutions aux difficultÉs du sport amateur

● La présente proposition de loi vise à créer un nouveau mécanisme de solidarité entre sport professionnel et sport amateur au travers d’une taxe qui serait, comme la taxe Buffet, affectée au CNDS. Ce mécanisme soumet les transferts de sportifs professionnels à un prélèvement de 5 % sur les recettes brutes générées par les indemnités de mutation entre clubs professionnels français ou, à partir d’un seuil qui sera fixé par voie réglementaire, entre un club français et un club étranger. Cette taxe a vocation à s’appliquer à tous les sports dans lesquels la pratique des indemnités de mutations a cours mais, compte tenu des montants en jeu, c’est surtout dans le football qu’elle aura un impact important. C’est d’ailleurs la ligue et la fédération de football qui ont immédiatement répondu à la sollicitation du rapporteur pour être entendues en auditions.

La philosophie qui préside à cette taxe relève de la priorité qu’il convient de donner, dans l’esprit du rapporteur, à la taxation des flux sur la taxation des actifs. À terme pour lui, la taxe devrait être compensée par une réduction qu’il appelle de ses vœux des prélèvements portant sur les salaires, réduction qui bénéficierait également aux sportifs, ce qui permettrait de ne pas pénaliser notre pays dans la compétition internationale que se livrent les grands clubs professionnels. Les contraintes liées à l’application de l’article 40 de la Constitution aux initiatives des parlementaires ne permettent cependant pas aux auteurs de la proposition de loi d’inscrire dans le texte une réduction de recettes non compensée à due concurrence…

● Afin de préparer l’examen de la présente proposition de loi, le rapporteur a sollicité un certain nombre d’acteurs du sport professionnel et du sport amateur. Certains ont accepté d’être entendus à l’Assemblée nationale malgré les délais très courts imposés par l’inscription de la proposition de loi à l’ordre du jour et le rapporteur les en remercie vivement. Force est de constater que ce texte suscite des réactions contrastées, selon que les interlocuteurs représentent le sport professionnel ou les petits clubs amateurs ([10]).

Les arguments objectés au rapporteur par les représentants des ligues professionnelles sont de plusieurs ordres. En premier lieu, la proposition de loi est accusée de nuire à la compétitivité des clubs français dans un marché particulièrement concurrentiel, alors même que la France est déjà pénalisée par un coût du travail plus élevé que chez nos voisins européens. La taxe ne s’appliquera qu’aux clubs français ; dès lors, à valeur sportive égale, un club étranger préfèrera désormais, du fait de la taxe, recruter un joueur dans un club non situé en France. Les ligues font en outre valoir que pour garder les talents qu’ils ont formés, favoriser leur rayonnement national et international, et garantir un spectacle de qualité et la sécurité des spectateurs, les clubs doivent pouvoir s’appuyer sur un environnement économique stable et favorable.

À cela s’ajoute le fait que le sport professionnel français dans son ensemble ne se porte pas bien – le club de football du Paris Saint-Germain ne représentant pas la réalité du sport professionnel français – et crée déjà beaucoup moins de valeur que les meilleurs acteurs du marché européen. De nombreux clubs professionnels ont des fonds propres négatifs. Or la valeur des contrats des joueurs est comptabilisée à l’actif dans le bilan des clubs. Dans ces circonstances, comme l’ont rappelé les représentants du Syndicat Première Ligue qui représente dix-huit clubs de football professionnel, ce sont aujourd’hui les produits issus de la vente des joueurs qui permettent d’équilibrer les comptes des clubs aux côtés, pour certains d’entre eux, des droits liés à la retransmission télévisée des matches. Taxer les transferts revient à minorer la valeur des contrats des joueurs et donc à nuire à l’équilibre financier des clubs.

Au total, selon les termes de M. Patrick Wolff, président de l’Association nationale des ligues de sport professionnel, adopter la proposition de loi dans un cadre franco-français reviendrait à ne plus permettre aux grands clubs français de recruter des « stars » à même de remplir des stades et de générer ainsi de substantiels droits de retransmission télévisée (dont une part alimente le financement du sport amateur) et donc, in fine, à tuer « la poule aux œufs d’or »…

Le rapporteur est conscient de ces difficultés ; il estime pour autant que le législateur ne doit pas être privé de sa capacité de se saisir du sujet, d’autant que les auditions ont révélé qu’il était sans doute nécessaire de se saisir plus largement de la question de l’organisation du financement du sport amateur et des circuits internes entre fédérations nationales et clubs. Dans le football notamment, la pertinence de l’organisation pyramidale réunissant une fédération nationale (la FFF), treize ligues régionales, une centaine de districts et enfin environ 17 000 clubs pourrait être remise en cause. La FFF elle-même reconnaît que le système est perfectible. M. Kenny Jean-Marie, directeur de cabinet du président de la FFF a fait valoir que la fédération était soucieuse d’améliorer sa gouvernance en multipliant les contacts directs avec les clubs, sans passer systématiquement par les intermédiaires que sont les ligues régionales et les districts.

Interrogé par le rapporteur sur ce point, M. Dimitri Grygowski, directeur de cabinet adjoint de la Ministre des Sports, a fait valoir que le code du sport garantissait l’autonomie du mouvement sportif et qu’il ne relevait pas du ministère de s’immiscer dans les comptes des fédérations, même s’il serait sans doute utile de disposer d’une cartographie des flux financiers au sein d’une discipline donnée. Le rapporteur rappelle que l’article L. 111-1 du code du sport dispose que : « LÉtat exerce la tutelle des fédérations sportives ». Il lui semble donc justifié que l’État s’intéresse de plus près à cette question.

Sans doute les mesures de régulation et de solidarité entre sport professionnel et sport amateur devraient-elles être prises, non pas à l’échelle nationale mais à léchelle européenne – voire internationale car de grands pays situés hors de l’Union européenne participent à l’UEFA (tels la Russie, l’Azerbaïdjan ou le Kazakhstan) ([11]) et pourraient tirer profit d’une législation purement européenne en la matière. Le rapporteur est d’ailleurs pleinement conscient des risques de contrariété de la proposition de loi avec les dispositions du droit communautaire relatives à la libre circulation des travailleurs telles qu’appréciées par la Cour de Justice de l’Union européenne, notamment depuis l’arrêt Bosman du 15 décembre 1995 ([12]) .

La Commission européenne s’est déjà saisie de cette question par le passé et l’étude sur les « Aspects économiques et juridiques des transferts de joueurs », commandée par elle et publiée en janvier 2013, recommandait d’ailleurs l’établissement au plan européen d’une redevance sur les indemnités de transfert dépassant un certain montant afin de financer un mécanisme de redistribution entre les clubs les plus riches et ceux moins fortunés…. Rien n’a été fait depuis lors.

Sur ce point, M. Dimitri Grygowski, directeur de cabinet adjoint de la Ministre des Sports a fait valoir, lors de son audition par le rapporteur, que la ministre menait actuellement une action au plan européen qui recoupait partiellement les enjeux soulevés par la proposition de loi. Dans le cadre du Conseil des ministres des Sports de l’Union européenne qui s’est tenu à Bruxelles le 21 novembre 2017, la ministre a insisté sur le fait que l’attribution des Jeux Olympiques et Paralympiques à la France pour 2024 constituait l’opportunité de construire un agenda européen commun en matière sportive et de mieux collaborer à l’échelle européenne sur l’éthique, l’intégrité, la bonne gouvernance sportive, la lutte contre le dopage ou encore un meilleur partage des dividendes entre les territoires hôtes et les propriétaires d’événements. À ce titre, la mobilité européenne des sportifs de haut niveau fera partie des sujets qui seront mis à l’ordre du jour des prochaines rencontres au plan européen… Dont acte.

*

Pour le rapporteur, il est aujourd’hui nécessaire de faire évoluer rapidement le modèle de financement du sport amateur ; la présente proposition de loi a pour objectif principal de lancer un débat en ce sens, et peut-être faudra-t-il que le Parlement s’en saisisse à nouveau dans ses travaux de contrôle. Aujourd’hui, le fossé se creuse entre le sport amateur et le sport professionnel ; si rien n’est fait, c’est le sport dans son ensemble qui va s’en trouver fragilisé, ce qui serait un comble pour le pays hôte des Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024.

 

La vertu principale de cette proposition de loi, si elle était adoptée, serait de créer un effet dimitation sur les autres pays européens car le rapporteur a bien conscience du fait que cest à léchelle européenne que ce problème trouvera une solution. Un pays doit prendre l’initiative d’avancer, soyons ce pays !

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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

   I. Discussion générale

La Commission des Affaires culturelles et de léducation examine la proposition de loi lors de sa deuxième séance du mercredi 29 novembre 2017.

M. le président Bruno Studer. Nous examinons cet après-midi la proposition de loi visant à instaurer une taxe sur les transferts de sportifs professionnels. Ce texte sera examiné jeudi 7 décembre en séance, dans le cadre de la journée réservée au groupe Union des démocrates indépendants (UDI), Agir et Indépendants. Nous avons désigné comme rapporteur, le 15 novembre dernier, notre collègue Michel Zumkeller, premier signataire du texte, qui a rejoint notre commission à cette occasion. Je lui souhaite la bienvenue.

M. Michel Zumkeller, rapporteur. Je vous remercie de m’accueillir au sein de cette commission. Le groupe UDI Agir et Indépendants a décidé d’inscrire cette proposition de loi dans le cadre sa séance d’initiative réservée du 7 décembre. L’idée de départ est assez simple : nous avons constaté que la France était maillée de très nombreuses petites associations sportives qui ne vivent plus que grâce au dévouement de leurs bénévoles. Ces associations sont de plus en plus soumises à des contraintes imposées par les fédérations sportives, des contraintes financières, mais aussi en matière de formation des éducateurs, de transformation ou de changement des terrains. En matière d’investissements, elles avaient l’habitude de s’adresser aux collectivités territoriales qui font encore tout ce qu’elles peuvent, bien qu’elles aient beaucoup de mal à assurer les financements nécessaires. Les associations sportives se tournent également vers de petits sponsors locaux qui rencontrent eux-mêmes de nombreuses difficultés. Les bénévoles sont par conséquent de plus en plus désespérés parce qu’ils veulent assurer leurs missions, notamment en direction des plus jeunes, parce qu’ils veulent être présents sur tout le territoire – or, ils ont l’impression de ne plus vraiment en avoir les moyens. Parallèlement, comme nous tous, quand ils allument leur téléviseur, ils voient qu’on dépense dans le secteur sportif des sommes parfois très importantes.

Le présent texte ayant été déposé fin 2016, je tiens d’emblée à réfuter tout « effet Neymar », même si son transfert a fatalement eu un effet amplificateur.

La proposition de loi repose sur la question suivante : dans une logique de taxation des flux, pourquoi, au moment d’un transfert entre deux clubs à même d’y consacrer des sommes très importantes, ne prélèverait-on pas une petite somme, 5 %, qui peut certes se révéler une grosse somme quand il s’agit de gros transferts, étant entendu que le texte prévoit également qu’on peut déterminer un seuil – 2 millions d’euros, 3 millions, 5 millions d’euros… – au-delà duquel on procéderait au prélèvement ? L’argent récolté serait reversé au Centre national pour le développement du sport (CNDS), qui lui-même le répartirait entre les petits clubs pour assurer un suivi local et permettre aux associations de terrain de continuer à se développer et à assurer leur mission.

Pour être le plus objectifs possible, nous avons procédé à l’audition de quelques grands acteurs du monde du sport, comme les représentants de la Ligue professionnelle de football, ceux de la Fédération française de football, mais aussi ceux de l’association nationale de ligues de sport professionnel. Certes, ils ne sont pas véritablement en accord avec notre proposition, craignant que nous ne fragilisions le sport professionnel français – l’un d’entre eux m’a même dit que j’allais le tuer ! –, ce qui n’est pas mon but pour peu du reste que j’en aie le pouvoir. On nous a objecté par ailleurs – nos interlocuteurs au ministère des sports également – que notre dispositif ne pourrait fonctionner qu’au niveau européen. Je ne partage pas cet avis et pense au contraire que l’on a besoin et d’un sport professionnel fort – et le texte n’est en rien dirigé contre lui –, et d’un sport amateur fort. En effet, si l’on a la chance d’avoir des sportifs professionnels de qualité, c’est parce qu’ils sont venus de petits clubs ; or si l’on tarit cette source, on n’aura plus ce vivier.

Je rappelle en outre que des dispositifs existent, et notre collègue Marie‑George Buffet a beaucoup œuvré dans ce domaine. Ils permettent des reversements, d’une manière ou d’une autre – je pense aux droits de retransmission télévisée –, grâce auxquels le sport amateur bénéficie de la manne du sport professionnel. Seulement, si les ligues admettent reverser des sommes importantes aux fédérations, pourquoi les petits clubs, sur le terrain – et nous faisons tous le même constat – ne touchent-ils jamais rien ? J’évoque bien le petit club qui aura besoin de 2 000 ou 3 000 euros supplémentaires en fonctionnement. Dès lors, où va l’argent versé par les ligues ? Je n’accuse personne et je n’ai pas d’a priori, mais la question mérite examen. J’ai auditionné des présidents de petits clubs de ma région comme Philippe Sarda, président d’un petit club de handball, qui nous a expliqué que 3 000 euros supplémentaires suffiraient à couvrir ses besoins. Pouvons-nous trouver un juste équilibre entre nos clubs et leurs bénévoles, d’une part, et le sport professionnel, de l’autre, qui pourrait peut-être faire un petit effort supplémentaire pour les aider financièrement ?

M. Cédric Roussel. Au nom du groupe La République en Marche, je remercie les députés du groupe UDI Agir et Indépendants pour la teneur de leur proposition. Je crois que nous avons tous été choqués par les montants des dernières transactions estivales dans le milieu du football.

Le présent texte vise à instaurer une taxe de 5 % au-delà d’un montant qui, vous l’avez précisé, n’est pas encore défini, sur les transferts de sportifs professionnels. Le produit de cette taxe – qui entrerait en vigueur à partir du 1er août 2018 – serait reversé au CNDS qui le reverserait à son tour aux clubs sportifs amateurs. L’objectif de la proposition de loi est tout à fait louable ; toutefois, passée cette première impression, vient le doute quant à son application en l’état. En effet, en en examinant les aspects économiques, juridiques, financiers et techniques, ce premier élan fait place au principe de réalité.

La proposition de loi, en l’état, pourrait avoir plus d’inconvénients que d’avantages à ne considérer que son seul objectif : réguler les transferts dans le sport. Si nous devons penser la régulation de ce marché – aujourd’hui dans le football, demain dans d’autres sports –, il apparaît très difficile, dangereux même, d’établir une taxe au seul niveau national alors même que l’économie du sport 
– en l’espèce, j’y insiste, du football – est essentiellement européenne, et même internationale. D’un point de vue économique, cette taxe pénaliserait fortement les clubs français et renforcerait leur déséquilibre concurrentiel vis-à-vis des clubs des principaux pays européens, sans qu’on puisse vraiment espérer l’extension du dispositif au-delà de nos frontières. L’ensemble des acteurs du secteur sportif que j’ai contactés et que nous avons aussi, pour partie, auditionnés, ne demande pas cette mesure. Ils y sont même tous opposés si elle s’applique au seul niveau national.

D’un point de vue juridique, nous pouvons ajouter qu’il s’agit, c’est la moindre des choses, de prendre en compte la législation actuelle, en l’occurrence le droit européen de la concurrence, qui encadre les mécanismes de régulation dans le sport. La rupture d’égalité ici proposée entre les pays, entre les clubs, reviendrait à fausser la concurrence au sein de l’Union européenne à nos dépens. Par ailleurs, je tiens à rappeler qu’un mécanisme de solidarité existe déjà entre les clubs professionnels et les clubs amateurs : lorsqu’un joueur d’un club amateur est appelé à jouer dans un club qui évolue en championnat professionnel, le club ayant formé le joueur entre sa douzième et sa vingt-troisième année touche une indemnité. Dans le football, 5 % du montant du transfert est réparti entre les deux clubs acheteur et vendeur, et cela à chaque transfert du joueur.

Pour la première fois depuis 2013, la France a enregistré un solde positif à l’issue du « mercato » estival de 2017. La taxe envisagée porterait un coup à la compétitivité des clubs français, notamment des moins riches. Elle ne toucherait en outre qu’un nombre très réduit de sportifs : en 2017, sur 139 transferts franco‑français, seuls quatre ont dépassé un montant de 10 millions d’euros. Nous sommes donc là dans une toute petite niche.

J’entends bien, à la suite des transferts extraordinaires de joueurs comme Neymar et Mbappé, la volonté de légiférer. Cependant, légiférer au niveau national, établir une sorte de « taxe Neymar » pour quelques-uns, et cela au mépris de la réglementation européenne, ne répondrait pas aux problèmes légitimement soulevés. Nous devons reprendre l’idée initiale et faire preuve de pédagogie au niveau européen. Je préfère donc nous prenions un peu de temps, loin des passions, pour réfléchir sereinement et construire collectivement une réponse adaptée, conformément à ce que doit être le travail parlementaire.

M. Fabien Di Filippo. Votre constat sur les problèmes financiers des clubs amateurs, monsieur Zumkeller, est tout à fait juste. Il est vrai que ces clubs manquent de moyens pour la formation, pour l’accomplissement de leur mission, et l’on peut se demander quelles en sont les causes. Pour le groupe Les Républicains, la responsabilité est plutôt à chercher du côté du désengagement de l’État et, indirectement, des collectivités qui ont été quelque peu asphyxiées.

Or l’économie du sport est importante pour la France : le secteur est en pleine croissance, il crée des emplois, de la richesse nationale, et suscite des activités annexes en particulier dans les secteurs alimentaires, de la sécurité, des travaux publics, ou même dans le commerce de biens. Le sport représente ainsi 1,8 % du produit intérieur brut (PIB), 37 milliards de chiffre d’affaires, 275 000 emplois directs, 400 000 emplois au total.

Il existe déjà différents mécanismes de solidarité entre les clubs, principalement trois types de flux : la taxe sur les retransmissions audiovisuelles des événements sportifs nationaux, dite « taxe Buffet », versée par les ligues professionnelles au CNDS et qui représente à elle seule 45 millions d’euros pour 2017 ; il y a aussi les versements des ligues professionnelles aux fédérations nationales, ces fonds étant reversés aux ligues régionales, aux comités puis aux clubs ; enfin, les solidarités financières internes entre sociétés sportives et associations supports. En complément, les clubs professionnels réalisent toute une série d’actions caritatives, à hauteur de 72 millions d’euros l’année dernière pour les seuls clubs de football. Ils remplissent également des missions importantes de formation des jeunes par le biais de la formation professionnelle, mais aussi via leur partie associative.

On peut reprocher à cette proposition de loi de ne cibler que les clubs de football et qu’un certain nombre de transferts. C’est en effet le seul sport où il y a de réelles indemnités de transfert et le seuil, devant être fixé par décret, ne concernerait que ces clubs-ci. Mais demain, ce dispositif pénalisera toutes les autres disciplines, qui ont tendance à se développer mais qui ont pour l’heure du mal à exister quand elles n’ont pas de gros mécènes, souvent étrangers, évoluant sur la scène européenne. Seront concernés nos petits clubs des villes moyennes, qui ont parfois à leur actif de fort belles réussites.

L’instauration d’une taxe sur les transferts au seul niveau français, dans un monde sportif mondialisé, ne peut se faire qu’au détriment de nos clubs. En effet, non seulement la taxe augmentera mécaniquement le coût des indemnités de mutation pour les clubs français et nuira donc à leur attractivité et à la réalisation de transferts comme celui de Neymar, mais se pose également la question de son recouvrement puisque les autres clubs ne sont pas soumis au droit français. D’autre part, une telle taxe a déjà été instaurée, mais à un niveau mondial ; il s’agit, dans le cadre du football, de la partie des recettes des transferts
– 5 % – qui revient au club formateur et qui, très bonne chose, permet à un certain nombre de nos petits clubs de bénéficier parfois d’une manne importante. C’est donc à l’échelon mondial qu’il faut réfléchir.

Ce n’est en tout cas pas aux clubs professionnels de pallier les carences et les restrictions imposées par l’État et par le ministère des sports, que ce soit directement, via la baisse des crédits affectés au CNDS – qui atteint tout de même 64 millions d’euros dans le PLF 2018 – ou la suppression de la réserve parlementaire – qui aidait largement les associations et les petits clubs –, ou indirectement via la baisse des ressources des collectivités qui financent les équipements dans les petites villes et qui sont aussi les premiers subventionneurs des clubs.

Il nous paraîtrait plus intéressant de réfléchir au renforcement éventuel de la taxe Buffet ou à l’idée de faire évoluer le circuit financier au sein des fédérations pour qu’une plus grande partie des revenus revienne aux clubs.

Mme Sophie Mette. Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés (Modem) tient à saluer le travail de M. Zumkeller sur un sujet important mais qui doit sans doute être défendu dans une configuration plus large au sein de l’Assemblée nationale. Les questions soulevées par ce texte nous semblent en effet importantes et ciblent précisément quelques-uns des besoins du sport amateur en France. L’exposé des motifs le démontre parfaitement : nos clubs amateurs sont les parents pauvres du sport en France avec, d’un côté, une baisse des dotations de la part des collectivités, de l’autre, une augmentation importante des contraintes que leur imposent les diverses fédérations professionnelles, avec des coûts que ces mêmes fédérations ne sont pas toujours décidées à assumer. Peut-être y a-t-il là une réforme à envisager ?

Il va sans dire que l’inquiétude est attisée par la baisse des dotations au CNDS, même si celle-ci cache un redéploiement des crédits vers d’autres missions. C’est pourquoi, dans ce contexte, nous comprenons les motivations des rédacteurs de cette proposition de loi. Néanmoins, nous n’en partageons pas les conséquences. Il nous semble qu’instaurer une contribution dans le seul contexte français risque de rendre nos clubs professionnels moins compétitifs qu’ils ne le sont déjà au niveau européen ; or la compétition entre clubs est très forte et les nôtres ne sont pas toujours les mieux placés pour lutter. Du seul point de vue financier et ne s’agissant que du monde du football, l’État récupère déjà beaucoup d’argent au titre des taxes sur les transferts de joueurs payés par les clubs, ainsi que par les impôts et cotisations sociales dont les joueurs s’acquittent lors de leur venue dans un club français : on estime à 237 millions sur cinq ans le gain lié au fameux transfert de Neymar.

Aussi nous interrogeons-nous sur le signal négatif qu’enverrait l’instauration d’une nouvelle contribution. Nous devrions peut-être davantage nous assurer qu’une part de l’argent soit reversée au sport amateur – au bénéfice en particulier de l’équipement. Des mécanismes existent déjà, instaurés par la Fédération internationale de football association (FIFA), comme l’indemnité de formation qui permet aux clubs d’origine de bénéficier d’une rétribution en cas de transfert international de leurs anciens joueurs.

Le rapporteur s’est inspiré de cette disposition, mais celle-ci ne fonctionne que parce qu’elle a été instituée au niveau international. C’est pourquoi nous estimons que l’idée pertinente de cette proposition de loi ne trouvera son efficacité que si elle est instituée au moins au niveau européen. Cela n’aurait alors aucune incidence sur la compétitivité de nos clubs car l’attractivité du championnat européen de football est telle que même une contribution de 5 % n’aurait guère d’incidence.

J’appelle enfin votre attention sur le fait que ce texte touchera l’ensemble des fédérations sportives nationales et que si, bien sûr, le football – peut-être le rugby dans quelque temps – peut tirer son épingle du jeu, il n’en va pas de même de toutes les fédérations pour lesquelles cette taxe risque d’être un facteur de déstabilisation. Nous comprenons parfaitement l’enjeu que représente le soutien aux clubs amateurs qui forment une part importante de notre tissu associatif, mais il nous semble que cette proposition de loi n’est pas en mesure d’y répondre pour les raisons évoquées. À tout le moins, c’est bien le périmètre national qui ne convient pas, seul un échelon européen étant pertinent en la matière.

Pour ces raisons, les députés du groupe Modem ne soutiennent pas cette proposition de loi.

Mme Béatrice Descamps. Le groupe UDI, Agir et Indépendants salue la proposition de loi présentée par notre collègue Michel Zumkeller, qui participe d’une nécessaire prise de conscience des difficultés auxquelles fait face aujourd’hui le sport amateur. Qu’il s’agisse des disciplines professionnelles pratiquées au niveau amateur ou de disciplines qui restent pratiquées en amateur jusqu’au plus haut niveau, les clubs sportifs amateurs jouent un rôle essentiel dans nos territoires et permettent à tous les Français de se retrouver autour des valeurs de l’effort, de l’émulation et du partage. Ils rendent le sport accessible à tous et ont pour rôle incontournable de recueillir de jeunes sportifs doués auquel ils apprendront leur discipline pour leur permettre d’intégrer les formations élitistes nationales.

Au moment où nos petits clubs de sport amateur rencontrent des difficultés grandissantes en raison de l’accroissement des normes qui leur sont imposées et de la réduction des financements publics, l’adoption de cette proposition de loi permettra de créer un nouveau mécanisme de solidarité à leur attention. La création d’une taxe de 5 % sur les transferts de sportifs professionnels, alors que les coûts des transferts de joueurs professionnels atteignent des sommets, constituerait une mesure de justice.

J’ai déposé un amendement que je soumettrai à la sagesse du rapporteur, qui vise à préciser les modalités d’utilisation de la contribution sur les transferts de sportifs professionnels par le CNDS. Il s’agirait, dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 (JOP 2024), de favoriser la pratique du sport amateur au sein des clubs sportifs amateurs, l’objectif étant de mettre en valeur certaines pratiques sportives et d’inciter les jeunes et les moins jeunes à découvrir les disciplines olympiques, dont certaines sont malheureusement trop méconnues. Or nos futurs athlètes des JOP 2024 ont actuellement entre onze et quinze ans pour les plus jeunes ; ils évoluent encore au sein de clubs sportifs amateurs locaux et c’est maintenant qu’il faut leur donner les moyens de s’entraîner et de réaliser des performances pour faire briller le sport et leur pays dans sept ans.

Le groupe UDI, Agir et Indépendants soutiendra cette proposition de loi.

M. Régis Juanico. Le groupe Nouvelle Gauche est favorable au principe d’une taxe sur les transferts de sportifs professionnels, comme au renforcement et à la création de nouveaux mécanismes de solidarité entre le sport professionnel et le sport amateur. Au demeurant, la proposition de loi qui nous est soumise, même si elle part d’une bonne intention, se trompe de cible dans ses modalités d’application.

Nous croyons à la nécessité de mieux réguler et de mieux redistribuer des sommes devenues colossales, notamment dans le sport professionnel, en particulier dans le football. Il faut savoir qu’à la fin de cette année les indemnités de transfert actuellement versées dans les clubs des cinq grands championnats européens vont sans doute dépasser le record de 2016 de 4,5 milliards d’euros. Depuis dix ans, le nombre de transferts a été multiplié par trois ou quatre et les indemnités liées à ces transferts ont été multipliées par sept ou dix – des sommes considérables, je le répète, sont donc échangées.

Toutefois, autant nous plaidons en faveur de cette régulation, autant nous pensons qu’il faut agir à l’échelle européenne et à l’échelle internationale : nous ne croyons pas à une taxe qui serait instaurée dans un seul pays. En outre, il aurait été utile d’adjoindre à la proposition de loi une étude d’impact – malheureusement, les études d’impact ne sont pas encore obligatoires pour les propositions de loi inscrites à l’ordre du jour de l’Assemblée ; nous y travaillons au sein du groupe de réflexion sur l’évaluation et le contrôle. J’aurais aussi été intéressé d’avoir l’avis du Conseil d’État sur le texte, en particulier sur sa conformité au droit européen et bien évidemment sur sa faisabilité technique et juridique.

L’Union européenne des associations de football (UEFA – Union of European Football Associations) a déjà adopté plusieurs mécanismes, en particulier, en 2010, avec le fair-play financier, que connaît bien notre collègue Marie-George Buffet, qui permet de mieux réguler les budgets des grands clubs européens. La FIFA elle-même, en 2015, a décidé d’interdire la tierce propriété des footballeurs professionnels. Ces décisions vont dans le bon sens. Il existe en France une direction nationale du contrôle de gestion (DNCG), qu’il faudrait d’ailleurs pouvoir transposer à l’échelon européen. Enfin, depuis 2001, au niveau de la FIFA, une indemnité de formation et de solidarité est versée, à l’occasion des transferts internationaux de joueurs, aux clubs formateurs pour les joueurs qui y ont été formés entre leur douzième et leur vingt-troisième anniversaire. Sans doute faut-il améliorer ce dispositif qui ne profite qu’à certains clubs.

Si votre proposition de loi était adoptée, il faut savoir que les deux transferts les plus importants de l’année, celui de Neymar, depuis le FC Barcelone, et celui de Mbappé depuis l’AS Monaco, transferts d’un montant de plus de 100 millions d’euros chacun, n’auraient pas été concernés par le dispositif puisque les deux clubs ne sont pas soumis à notre législation fiscale – ce que je regrette pour l’AS Monaco…

En 2013, avec M. Guenhaël Huet, alors député Les Républicains, nous avons mené une mission d’information commune sur la politique de soutien au sport professionnel et les solidarités avec le sport amateur. Conclusion : il y a moins de 10 % de retour du sport professionnel vers le sport amateur, qu’il s’agisse de ce que donnent les ligues aux fédérations – 130 millions –, de ce que donnent les clubs professionnels à leurs associations supports – 70 millions – ou du prélèvement sur les paris sportifs – un peu plus de 30 millions. Il faut donc accroître ces ressources-là. Or, certains cosignataires de la proposition de loi ont par ailleurs décidé de diminuer les ressources du CNDS pour 2018…

Nous ne voterons pas la proposition de loi.

Mme Marie-George Buffet. Le groupe de la gauche démocrate et républicaine comprend tout à fait les motivations de cette proposition de loi : il est vrai que nous sommes confrontés à une bulle financière dans un certain nombre de clubs de football professionnel de Ligue 1, de clubs professionnels européens dont le financement provient de fonds financiers et parfois même quasiment de fonds d’État dont on ne maîtrise pas toujours le flux. Il y a un vrai problème, et vous l’avez posé avec force, de mutualisation entre le sport professionnel et le sport amateur. Nous avons besoin de moyens publics pour le développement du sport amateur comme du sport de haut niveau. Or, hélas, nous n’avons pas eu ce signe, cette année, avec la baisse de 7 % du budget des sports.

Quelles pistes suivre ? Il faudrait d’abord s’adresser au mouvement sportif européen et international lui-même. La FIFA, on l’a dit, et l’UEFA ont pris des mesures comme le fairplay financier – dispositif dont nous nous sommes rendu compte, à l’occasion des travaux de la mission d’information, qu’il fallait certainement le durcir quelque peu pour les clubs de football de la Ligue 1. Le mouvement sportif national et international doit assumer sa responsabilité de mutualisation.

Ensuite, je ne suis pas d’accord avec l’argument selon lequel on ne peut pas prendre cette mesure en France parce qu’il faut la concevoir à l’échelle européenne voire internationale. En effet, lorsque nous avons lancé la lutte contre le dopage, nous étions un peu seuls et j’ai alors entendu les mêmes objections : « Vous allez affaiblir le sport français ! » Quand nous avons instauré la taxe Buffet, le mouvement sportif nous avertissait, de la même manière, que nous allions affaiblir le sport français. Or ce n’est pas cela, le problème. Le problème est de savoir comment la France intervient auprès de l’Union européenne – qui a fait du sport l’une de ses compétences à travers le Traité de Nice – pour qu’elle soit davantage présente sur les questions sportives. Comment l’Union européenne doit‑elle faire pression sur l’UEFA ou sur d’autres mouvements européens sportifs ? Voilà une piste importante.

Enfin, l’un des inconvénients de la proposition de loi est qu’elle ne limite pas le niveau des transferts. Il faudrait s’inspirer des préconisations contenues dans le rapport de la mission d’information commune, concernant par exemple la suppression du mercato, la limitation du nombre de transferts par club, la transparence sur les agents des joueurs, l’interdiction pour les agents d’être payés à la fois par le club et par les joueurs… autant de mesures de transparence qui pourraient améliorer cette proposition – c’est d’ailleurs le sens de certains amendements que j’ai déposés.

M. François Ruffin. J’interviens au nom du groupe La France insoumise. J’ai écouté avec beaucoup d’intérêt Mme Buffet ou M. Juanico car il est évident que je ne suis pas un grand spécialiste de la question. J’apprends donc beaucoup sur le plan technique.

Au lendemain du transfert de Neymar, je courais le long de la Somme et je me suis arrêté pour faire des étirements. Se déroulait là la finale de la coupe de France de longue paume – nous sommes directement concernés puisque le Serment du Jeu de Paume est lié à ce sport qui n’existe plus aujourd’hui que dans un petit coin de la Picardie. Or, pendant ma pause, le président de la Fédération française de longue paume, en sueur et avec sa raquette, vient me voir et me dit : « Écoutez, ça tombe bien que vous soyez là parce que je suis dans une situation terrible : j’ai deux salariés grâce auxquels j’arrive à faire venir 2 000 gamins et je vais devoir en licencier un parce que je ne reçois plus que 8 000 euros du ministère des sports ; or c’est un gars qui a été formé, il a trente-cinq ans, il a deux enfants. Je n’en dors plus la nuit ». Voilà la situation dans laquelle se trouve une petite fédération et je pense que nombre de petits clubs pourront se reconnaître dans ce récit. On voit donc bien le contraste entre le transfert de Neymar et des petits clubs qui organisent la paella, le loto, ou le concours de belote. Pratiquant moi-même le football en amateur, c’est une situation que je vis très directement.

Ensuite, quel doit être notre objectif pour 2024 ? Pour moi, la médaille d’or que nous devons gagner, c’est que les gamins de chez moi pratiquent le sport. J’étais à Abbeville, dans un quartier populaire, il n’y a pas longtemps, et que me raconte une maman ? Ses enfants veulent faire du foot, seulement il faut acheter les paires de crampons et les licences coûtent 60 euros. Comme elle n’en a pas les moyens, que va-t-elle leur faire faire ? Du ping-pong parce que, là, la licence est très peu coûteuse. Mon objectif est donc que l’argent ne soit pas un obstacle à la pratique sportive.

Je ne suis pas un spécialiste, je le répète, mais, en lisant le rapport de la mission d’information commune à laquelle il a été fait allusion, je constate que la Ligue professionnelle de football représente 793 millions d’euros, et la Fédération, 215 millions : le rapport est donc de 3,7 entre l’argent disponible pour le très faible nombre de sportifs professionnels et l’argent disponible pour la masse des pratiquants amateurs.

Je considère d’ailleurs que le sport professionnel ne devrait plus être pris en compte dans le budget des collectivités consacré aux sports mais qu’il devrait figurer dans leur budget communication. Le sport professionnel, c’est de l’image ; il s’agit de vendre l’image d’Amiens avec l’ASC, etc.

Vous aurez compris que, sur le plan technique, je ne suis pas terrible – si je reconnais les limites de la proposition de loi de M. Zumkeller, je reconnais aussi les miennes. Reste que je considère que son texte va dans le bon sens et, depuis le début de mon mandat, il y a eu si peu de propositions me paraissant aller dans le bon sens, que je ne vais pas faire la fine bouche, je m’accroche à ce qu’il y a, je le prends, je le soutiens de tout cœur.

Quant à utiliser l’argument selon lequel la proposition n’est applicable qu’à l’échelle européenne, c’est la meilleure manière de tuer l’Europe, de dégoûter de l’Europe. Non, non, non : si vous aimez vraiment l’Europe, si vous voulez la soutenir, si vous voulez qu’elle aille de l’avant, eh bien, vous devez dire : faisons en matière sportive, faisons en matière de fiscalité, de droit du travail, faisons et entraînons les autres derrière nous !

M. le rapporteur. Je remercie ceux d’entre vous qui se sont exprimés, et qui ont tous en commun avec moi de vouloir défendre le sport amateur.

J’adresse des remerciements particuliers à M. Cédric Roussel, dont la participation aux auditions nous a permis d’échanger. Cependant, je ne suis pas d’accord avec lui quand il affirme que cette proposition de loi a pour objet la régulation du marché des transferts dans le sport : l’objectif de notre texte, c’est le soutien au sport amateur, aux petits clubs, aux bénévoles – et si ce soutien passe par une régulation, c’est une autre question. Quand, le 7 décembre prochain, nous nous retrouverons en séance publique pour défendre tous ensemble le sport amateur, nous aurons fait progresser cette cause.

Je suis évidemment d’accord avec notre collègue Fabien di Filippo quand il évoque un désengagement de l’État, mais il ne faut pas tout mélanger. Si nous n’avons nullement l’intention de tuer le sport professionnel, qui représente une masse considérable d’activité, nous voulons faire reconnaître tout ce que représente également le sport amateur. Comme moi, vous êtes un député de terrain et il doit vous arriver d’assister aux assemblées générales de petites associations sportives : vous connaissez des bénévoles, et vous savez à quel point la situation des clubs amateurs est critique. Or, même si le football français n’a pas vocation à régler tous les problèmes sociaux du pays, les associations sportives jouent un rôle social très important en certains points du territoire.

Notre collègue Sophie Mette a relayé plusieurs idées que nous avions déjà entendues lors des auditions, sur le thème : « C’est une très bonne idée, mais… ». Si je peux entendre ce « mais » – j’y suis habitué, puisque cela fait quinze ans que je suis député –, j’aimerais bien qu’il soit suivi d’une proposition concrète. Vous me dites que le sport professionnel donne déjà pour le sport amateur, soit. Dans ce cas, je vous invite à assister aux assemblées générales des petites associations et à examiner leur budget. Si les sportifs professionnels donnent déjà, je ne sais pas où passe leur argent, car on n’en trouve aucune trace dans le budget des clubs amateurs : je n’y ai jamais vu une ligne correspondant à des fonds provenant de la fédération ou de la ligue – alors même que mon département, le Territoire de Belfort, ne fait pas partie des plus pauvres. Peut-être l’argent provenant du sport professionnel est-il exclusivement affecté à la construction de grands districts régionaux et de bâtiments onéreux ? S’il est permis de se poser la question, une chose est certaine : quand il manque 3 000 euros à un club amateur pour former un éducateur, il est impossible de les trouver !

Béatrice Descamps s’est engagée dès le départ à nos côtés et je l’en remercie. C’est à juste titre qu’elle a évoqué les Jeux Olympiques et Paralympiques que nous allons accueillir à Paris en 2024, et qui constituent une perspective formidable pour le sport amateur. Je rappelle que cette proposition de loi ne concerne pas que le football et le rugby : elle vise à ce que le sport professionnel dans son ensemble soutienne le sport amateur – et si nous pouvons applaudir en 2024 des champions de tennis de table, de tir à l’arc, de tir à la carabine, nous en serons ravis, et ce sera l’occasion de valoriser des champions dont on parle assez peu.

M. Régis Juanico est un grand sportif, avec lequel il m’arrive de prendre part à des assemblées footballistiques. J’entends ce qu’il dit, tout comme j’entends M. François Ruffin, mais s’il faut tout demander à l’Europe, nous n’avons plus qu’à fermer l’Assemblée nationale – et c’est en Européen convaincu que je vous dis cela. Comme l’a dit Mme Marie-George Buffet, de très nombreuses initiatives sont parties de cette assemblée, alors qu’on avait tenté de décourager leurs auteurs en leur disant qu’il fallait agir au niveau européen. À quoi servons-nous si la moindre décision ne peut être prise que par le Parlement européen ? Nous pouvons au moins poser les questions qui nous paraissent importantes, et essayer de leur apporter une réponse, montrant ainsi l’exemple à nos voisins européens. C’est ainsi que je vois l’Europe, et non comme une technostructure qui nous dit : « Nous allons en discuter entre nous – la FIFA, l’UEFA et le Parlement européen – et peut-être aurons-nous une première piste de travail vers 2025… ». La démocratie parlementaire, ce n’est pas ça : on expose les sujets, on en discute et, même si on ne résout pas le problème du premier coup, on fait au moins avancer les choses.

Je salue l’implication de notre collègue Marie-George Buffet et je partage son analyse. Nous ne pouvons que nous féliciter qu’elle ait osé entreprendre quelque chose au sujet des agences antidopage, sans attendre pour cela l’accord des autres pays européens.

L’intervention énergique de M. François Ruffin était à son image, et a eu le mérite de nous ramener à la réalité du terrain, car ce qu’il a dit, c’est ce que nous entendons au sein des clubs amateurs. Si, lors des auditions, certains représentants du sport professionnel nous ont dit qu’ils n’étaient pas choqués par le montant de 222 millions d’euros des indemnités de transfert de Neymar, je peux vous dire que nos concitoyens, eux, le sont, même ceux qui aiment le football.

Comment les clubs professionnels peuvent-ils se prétendre incapables de payer une contribution de 5 % au profit du sport amateur, alors qu’ils versent sans sourciller 15 % à un intermédiaire, qui, parfois, s’empresse d’aller les placer aux Bahamas ? Pour satisfaire notre demande, il suffirait qu’ils ne donnent que 10 % à l’intermédiaire et nous reversent les 5 % de différence : cela ne leur coûtera pas plus cher, et tout le monde ne s’en portera que mieux ! Je suis sidéré d’entendre dire que ma proposition de loi va tout fragiliser car, contrairement à ces intermédiaires, elle rendrait un grand service au sport français.

Mme Marie-George Buffet. C’est eux qu’il faudrait surveiller !

 


—  1  —

   II. Examen de l’article unique

La commission en vient à l’examen de l’article unique.

Article unique
Instauration dune contribution assise sur les recettes brutes générées
par les indemnités de mutation de sportifs professionnels

Cet article insère un nouvel article au sein de la section du code du sport consacrée aux « financements affectés à létablissement public chargé du développement du sport », c’est-à-dire le Centre national pour le développement du sport (CNDS).

Cette section est, en l’état actuel du droit, composée de deux articles :

– l’article L. 411-1, relatif à l’affectation au CNDS du prélèvement effectué chaque année, dans des conditions déterminées par la loi de finances, sur les sommes misées sur les jeux exploités par La Française des Jeux (FDJ) ;

– l’article L. 411-2, relatif à l’affectation au CNDS d’une contribution sur la cession à tout service de télévision des droits de diffusion de manifestations ou compétitions sportives perçue dans les conditions prévues à l’article 302 bis ZE du code général des impôts (communément dénommée « taxe Buffet »), le produit de cette contribution étant destiné à financer le développement des associations sportives locales et la formation de leurs animateurs.

Le présent article complète cette énumération d’un nouvel article L. 411-3 qui porte création d’une contribution assise sur les recettes brutes générées par les indemnités de mutation lors des transferts de joueurs, dont le produit serait également affecté au CNDS.

Le CNDS, créé par le décret n° 2006-248 du 2 mars 2006 est un établissement public national à caractère administratif, placé sous la tutelle du ministre chargé des sports. Il a pour mission générale de contribuer au développement du sport et de la pratique sportive par l’attribution de concours financiers, sous forme de subventions d’équipement ou de fonctionnement, notamment aux associations sportives, aux collectivités territoriales, aux organismes assurant le fonctionnement des antennes médicales de prévention du dopage ainsi qu’aux associations et groupements d’intérêt public qui interviennent dans le domaine des activités physiques et sportives.

Le financement du CNDS est profondément réformé par le projet de loi de finances (PLF) pour 2018 ([13]), en cours de discussion devant le Parlement, dans le but de le recentrer sur le soutien aux actions territoriales en matière de sport pour tous : appui aux collectivités territoriales, développement du sport de proximité et du sport pour tous, réduction des inégalités territoriales au niveau déconcentré, développement de l’expertise sur l’innovation sociale grâce au sport. Il a par ailleurs été demandé au CNDS un effort de 63,8 millions d’euros d’économies, dont 28 millions d’euros pour la part territoriale. Tout comme notre collègue Pierre-Yves Bournazel, rapporteur au nom de la Commission, des crédits « Sport, jeunesse et vie associative » dans le cadre du PLF 2018 ([14]), le rapporteur estime crucial que soit menée parallèlement à ces réorganisations budgétaires une profonde réforme de la gouvernance du sport afin de rendre la dépense publique plus efficace et de mieux flécher les crédits publics vers le soutien aux clubs.

Au total, les taxes affectées au CNDS évoluent sur un an comme suit :

Financement du CNDS : Évolution des taxes affectÉes entre 2017 et 2018
 

En millions d’euros

Taxe

Plafond LFI 2017

Plafond PLF 2018

Prélèvement sur paris sportifs (FDJ et autres)

45

35

Prélèvement FDJ hors paris sportifs

159

74

Prélèvement FDJ hors paris sportifs pour le Fonds héritage JO Paris 2024

26

supprimé

« Taxe Buffet » sur droits de diffusion sportifs

41

25

TOTAL

271

(Soit 260 M€ net des frais d’assiette et recouvrement)

134

(Soit 128 M€ net des frais d’assiette et recouvrement)

Source : Projet de loi de finances pour 2018, évaluation des voies et moyens, tome 1.

Le rapporteur regrette la réduction du plafond d’affectation de la taxe Buffet dans le projet de loi de finances ; elle va à l’encontre de l’intérêt du sport amateur. Il plaide à l’inverse pour un déplafonnement de cette taxe afin que la totalité de son produit serve à alimenter le financement du sport amateur dans notre pays.

La contribution créée par le présent article serait due par :

– les associations sportives visées à l’article L. 121-1 du code du sport ;

– les sociétés sportives visées à l’article L. 122-2 du code du sport ([15]) ;

– les sociétés d’économie mixte sportives locales ([16]) visées à l’article L. 122‑12 du code du sport ;

– les personnes agissant directement ou indirectement pour le compte d’une de ces associations ou sociétés.

L’assiette de la contribution serait constituée des recettes brutes générées par les indemnités de mutation en cas de transfert d’un joueur entre deux clubs français ou entre un club français et un club étranger ; dans ce dernier cas, un décret en Conseil d’État préciserait un montant minimal de transfert à partir duquel la contribution deviendrait exigible.

Le taux de la contribution serait fixé à 5 % de ces recettes. Ce taux est cohérent tant avec le taux de la taxe Buffet qu’avec celui de la contribution de solidarité et de formation mise en place en 2001 par la FIFA.

Pour répondre à certaines critiques, le rapporteur rappelle qu’il est loisible au législateur de créer une taxe, qu’elle soit affectée ou non à l’État, en dehors d’une loi de finances. Toutes les taxes ne sont par ailleurs pas codifiées dans le code général des impôts.

*

La commission examine l’amendement AC3 de Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement vise à ce qu’une même base – en l’occurrence, un même transfert – ne puisse pas faire l’objet de deux taxations.

M. le rapporteur. Je comprends la logique de cet amendement et je suis d’accord avec l’idée consistant à s’intéresser à l’activité de tous les intermédiaires, mais je pense que nous sommes ici hors du sujet de la proposition de loi, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AC2 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Comme je l’ai dit tout à l’heure, cet amendement vise à compléter le texte en précisant les modalités d’attribution du produit de la contribution sur les transferts de sportifs professionnels par le CNDS.

M. le rapporteur. Nous sommes ici tout à fait dans l’esprit de la proposition de loi, et tout ce qui peut compléter le texte est le bienvenu. Je suis donc favorable à cet amendement.

M. Bertrand Sorre. Au-delà du sport amateur, pour lequel nous devons impérativement trouver des ressources, je trouve que notre discussion nous conduit à réfléchir également à l’accompagnement de la vie associative, elle aussi confrontée à des difficultés de financement. Nombre de clubs sportifs amateurs ont aujourd’hui un statut associatif, régi par la loi de 1901. Peut-être le football pourrait-il disposer d’autres possibilités de financement, mais on sait que nombre d’associations se perdent dans les méandres de financements nationaux, départementaux, locaux, ce qui est source de difficultés et mériterait qu’une réflexion soit engagée à ce sujet.

M. Régis Juanico. Je l’ai dit tout à l’heure, je suis tout à fait favorable à ce qu’on renforce les mécanismes de solidarité financière entre sport professionnel et sport amateur, et à ce qu’on flèche les ressources vers le CNDS. Cela dit, avant de flécher une taxe hypothétique vers le CNDS, il faudrait déjà faire en sorte de préserver les ressources actuelles de cet établissement.

Je rappelle en effet que le Gouvernement a fait voter une économie de 64 millions d’euros sur ses ressources dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018. Les taxes affectées qui se trouvent ainsi rabotées ou supprimées sont, d’une part, le prélèvement exceptionnel de 0,3 % voté l’an dernier – à l’unanimité je le rappelle –, qui assurait 25 millions d’euros chaque année jusqu’en 2024 au fonds « Héritage Paris 2024 », destiné aux petits équipements sportifs des collectivités ou à l’accompagnement des projets des clubs en lien avec les Jeux Olympiques et Paralympiques, d’autre part, la taxe Buffet, dont le plafond est abaissé de 40 millions d’euros à 25 millions d’euros. Ce prélèvement sur la cession de droits télévisés d’événements sportifs se déroulant en France était le symbole de la redistribution entre le sport professionnel et le sport amateur – nous avions même essayé d’élargir son assiette en la faisant porter également sur les organisateurs basés à l’étranger, mais avons malheureusement été censurés par le Conseil constitutionnel, ce qui nous a privés de 15 millions d’euros supplémentaires.

Enfin, je souligne que le prélèvement sur les paris sportifs a également été raboté de 10 millions d’euros, alors qu’il avait été augmenté du même montant l’an dernier, qu’il porte sur une ressource en constante augmentation – plus 20 % à 30 % chaque année – et qu’il est normal que le prélèvement effectué sur les paris sportifs revienne au monde du sport.

Bref, il ne suffit pas de parler du CNDS, il faut également abonder ses crédits !

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette ensuite l’article unique.

*

Après l’article unique

La commission examine l’amendement AC5 de Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement vise à interdire la conclusion de contrats de travail en France avec un sportif professionnel dont une partie des droits est détenue par une société tierce. Le syndicat international des footballeurs professionnels dénonce la détention de droits économiques par un tiers.

M. le rapporteur. Il s’agit là d’un sujet très important et je suis d’accord avec le principe qui est ici défendu, mais nous ne sommes pas dans le cadre de la proposition de loi, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement entre bien dans le cadre de la proposition de loi, puisqu’il a pour objet de s’attaquer à la bulle financière que représente la pratique que j’ai décrite.

M. le rapporteur. J’entends bien, madame Buffet, mais votre proposition s’inscrit bel et bien en dehors du champ d’application du texte.

M. Fabien di Filippo. Si les fonds de pension qui détiennent des droits de joueurs sont interdits en France, le marché du sport professionnel est aujourd’hui mondialisé et une grande partie des succès de clubs sportifs professionnels en France sont dus à des investisseurs étrangers. Dans le football, c’est le cas de l’AS Monaco, via un investisseur russe…

M. le rapporteur. L’AS Monaco n’est pas un club français…

M. Fabien di Filippo. C’est en tout cas un club qui évolue en France. Le Paris Saint‑Germain constitue un autre exemple, avec des investisseurs qataris.

Si nous adoptons des mesures restrictives, ces investisseurs risquent de ne plus venir en France… il n’y aura alors plus de transferts tel celui de Neymar, et ce sera bien dommage, car de telles opérations produisent toute une série d’activités et de taxes revenant à l’État, dont les montants sont bien supérieurs à ce que les montants des transferts peuvent laisser supposer. Nous devons nous interroger sur ce qu’est la mission d’un club professionnel, qui revêt souvent la forme d’une société anonyme à objet sportif, et être très prudents lorsque nous envisageons de prendre des mesures restrictives en la matière, car nous risquons de nuire à la compétitivité des clubs professionnels.

La commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AC6 de Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement d’appel s’inspire d’une des recommandations de l’étude de la commission européenne publiée en février 2013, visant à limiter les indemnités de mutation dans le football.

M. le rapporteur. J’émets un avis défavorable à cet amendement dont l’objet s’éloigne un peu du cadre de notre texte.

M. Régis Juanico. On a évoqué tout à l’heure ce que fait la Direction nationale de contrôle de gestion (DNCG), ainsi que le fair-play financier pour les grands clubs européens. Une autre idée est en train de faire son chemin actuellement, celle d’un salary cap, c’est‑à‑dire d’un plafonnement de la masse salariale d’une équipe de football professionnelle, et il existe même, dans un certain pays, un luxury cap, qui permet à un club de verser à titre exceptionnel un salaire supérieur au salary cap, en contrepartie du règlement d’une somme répartie sur l’ensemble des autres clubs, ce qui constitue une forme de solidarité financière. Je trouve que l’idée de notre collègue Marie-George Buffet est très intéressante, car elle s’inscrit parmi ces mécanismes de régulation de la masse salariale.

M. Cédric Roussel. Il ne sert à rien de « jouer perso » en la matière : les sujets dont il est ici question ont vocation à être réglés au niveau international ou du moins européen, pour peu qu’il y ait une volonté politique de le faire.

J’en profite pour souligner l’intervention de la ministre Laura Flessel lors du dernier Conseil européen des ministres des sports, visant à profiter de l’effet loupe qu’offrent à Paris les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 pour provoquer une concertation et une réflexion globale sur tous les sujets relatifs au sport européen.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AC4 de Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement vise à limiter les rémunérations des agents sportifs à 6 % du montant des indemnités de mutation, contre 10 % actuellement.

M. le rapporteur. Puisque les clubs professionnels français disent ne pas avoir les moyens de payer une contribution de 5 % au profit des amateurs, il leur est fourni, avec cet amendement, une occasion de faire des économies qui pourront être consacrées au règlement de la taxe que nous proposons de créer au profit du sport amateur. Je suis donc très favorable à cet amendement.

M. Cédric Roussel. La « loi Braillard » avait constitué une première avancée en la matière, et il me semble préférable de rester dans le cadre de cette loi plutôt que d’instaurer une nouvelle disposition.

La commission rejette l’amendement.

*

*     *

La commission ayant rejeté l’article unique ainsi que tous les amendements portant articles additionnels, la proposition de loi est rejetée.

En conséquence, en application de l’article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique se déroulera sur la base du texte initial de la proposition de loi.

 

 

 


—  1  —

   Annexe 1 :
Liste des personnes auditionnÉEs par le rapporteur

   Association nationale des ligues de sport professionnelM. Patrick Wolff, président, accompagné de M. Frédéric Besnier, directeur

   Ligue de football professionnelMme Nathalie Boy de la Tour, présidente, accompagnée de M. Didier Quillot, directeur général exécutif, et de M. Julien Taieb, directeur des affaires juridiques

   Cabinet de Mme la Ministre des SportsM. Dimitri Grygowski, directeur de cabinet adjoint

   Fédération française de footballM. Kenny Jean-Marie, directeur de cabinet du président et M. Thomas Cayot, responsable du service règlement

   Syndicat Première Ligue M. Bruno Belgodère, directeur des affaires économiques,  accompagné de Mme Marie-Hélène Patry, directrice des affaires juridiques et sociales, de M. Philippe Boindrieux, directeur général adjoint du Paris Saint-Germain, et de M. Timothé de Romance, directeur associé d’Anthenor public affairs (*)

 

 

 

 

Le rapporteur a également rencontré en circonscription M. Philippe Sarda, Président de l’Entente sportive du territoire de Belfort (ESTB) - Handball à Valdoie.

 

 

 

 

 

 

(*) Ce représentant dintérêts a procédé à son inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique sengageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de lAssemblée nationale.


 


—  1  —

   Annexe 2 :
liste des textes susceptibles d’être abrogés
ou modifiés à l’occasion de l’examen
de la proposition de loi

 

Proposition
de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d'article

unique

Code du sport

L411-3 [nouveau]

 

 

 

 

 

 


([1])  MM. Michel Zumkeller, Jean-Félix Acquaviva, Mmes Emmanuelle Anthoine, Sophie Auconie, Nathalie Bassire, MM. Thierry Benoit, Ian Boucard, Guy Bricout, Michel Castellani, Jacques Cattin, Paul-André Colombani, Mme Laure de La Raudière, M. Stéphane Demilly, Mme Béatrice Descamps, MM. Yannick Favennec Becot, Meyer Habib, Antoine Herth, Jean-Christophe Lagarde, Sébastien Leclerc, Vincent Ledoux, Franck Marlin, Maxime Minot, Pierre Morel-à‑L’Huissier, Christophe Naegelen, Mme Bérengère Poletti, MM. Napole Polutélé, Didier Quentin, Robin Reda, Jean-Luc Reitzer, François Ruffin, Jean-Marie Sermier, Francis Vercamer, Arnaud Viala, André Villiers, Mmes Josiane Corneloup, Agnès Firmin Le Bodo, Lise Magnier, MM. Thierry Solère, Philippe Vigier, Philippe Dunoyer, Franck Riester, Philippe Gomès, Bertrand Pancher, Mme Marine Brenier et M. Jean-Luc Warsmann.

([2]) Est réputé joueur professionnel tout joueur bénéficiant d’un contrat écrit avec un club et qui perçoit une indemnité supérieure au montant des frais effectifs qu’il engage dans l’exercice de cette activité. Tous les autres joueurs sont réputés amateurs.

([3]) Arrêt de la Cour de Justice des Communautés Européennes du 15 décembre 1995, Union royale belge des sociétés de football association ASBL contre Jean-Marc Bosman, Royal club liégeois SA contre Jean-Marc Bosman et autres et Union des associations européennes de football (UEFA) contre Jean-Marc Bosman, affaire C-415/93

([4]) M. Neymar da Silva Santos Júnior, dit Neymar, est un joueur de football brésilien, transféré à l’été 2017 du FC Barcelone au Paris Saint‑Germain pour un montant de 222 millions d’euros, soit le plus gros transfert de l’histoire du football international à cette date.

([5]) http://www.assemblee-nationale.fr/14/propositions/pion4120.asp

([6]) Ce sujet a été insuffisamment traité par la loi n° 2017-261 du 1er mars 2017 visant à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs. En tout état de cause, la législation en la matière devra prochainement évoluer pour s’adapter aux évolutions récentes du règlement de la Fédération internationale de football association (FIFA).

([7]) La taxe est instaurée par le II de l'article 59 de la loi de finances pour 2000, n° 99-1172 du 30 décembre 1999.

([8]) Déduction faite des frais de gestion de l'administration fiscale correspondant aujourd'hui à 4 % du montant de ce produit.

([9]) Sans compter la contribution fiscale sur les paris sportifs versés chaque année au CNDS, dont plus de la moitié sont issus de paris sur le football.

([10]) Pour le point de vue du sport amateur, cf encadré ci-dessus (I).

([11]) L’UEFA réunit 55 associations nationales de football à travers l'Europe.

([12]) Dans cet arrêt, la Cour avait estimé qu’« il y a lieu de vérifier si les règles concernant les transferts [sportifs] constituent une entrave à la libre circulation des travailleurs » ; elle avait alors considéré que le traité « soppose aux mesures qui pourraient défavoriser les ressortissants dun État membre lorsquils souhaitent exercer une activité économique sur le territoire dun autre État membre », « même si elles sappliquent indépendamment de la nationalité des travailleurs concernés » ; in fine, la Cour avait estimé que « les règles relatives aux transferts constituent des entraves à la libre circulation des travailleurs interdites, en principe, par larticle 48 du traité », qu’il « nen irait autrement  que si ces règles poursuivaient un objectif légitime compatible avec le traité et se justifiaient par des raisons impérieuses dintérêt général » et que « lapplication des règles relatives aux transferts ne constitue pas un moyen adéquat pour assurer le maintien de léquilibre financier et sportif dans le monde du football ».

([13]) La réforme consiste dans une rebudgétisation partielle des crédits jusqu’ici alloués au CNDS, à hauteur de 72 millions d’euros, répondant ainsi aux préconisations répétées de la Cour des comptes. C’est désormais le budget de l’État et non plus le CNDS qui sera en charge des dotations au Comité National Olympique et Sportif Français et au Comité Paralympique et Sportif Français, des subventions pour l’organisation des grands événements sportifs internationaux ou du soutien aux équipements structurants nationaux. 

([14]) http://www2.assemblee-nationale.fr/documents/notice/15/budget/plf2018/a0274-tVI/(index)/avis

([15]) Un club sportif est le plus souvent constitué d’une association et d’une société : en effet, l’article L. 122-1 du code du sport dispose que « Toute association sportive affiliée à une fédération sportive, qui participe habituellement à l'organisation de manifestations sportives payantes qui lui procurent des recettes d'un montant supérieur à un seuil fixé par décret en Conseil d'État ou qui emploie des sportifs dont le montant total des rémunérations excède un chiffre fixé par décret en Conseil d'État, constitue pour la gestion de ces activités une société commerciale soumise au code de commerce.

Une association sportive dont le montant des recettes et le montant des rémunérations mentionnées au premier alinéa sont inférieurs aux seuils visés au même alinéa peut également constituer une société sportive pour la gestion de ses activités payantes, dans les conditions prévues à la présente section ».

([16]) En application de la loi du 6 juillet 2000 modifiant la loi n°84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, il n’est plus possible de créer de nouvelles sociétés d’économie mixtes sportives (SEMS). Cependant, les SEMS constituées avant la date de publication de la loi n° 99-1124 du 28 décembre 1999 peuvent conserver leur régime juridique antérieur.