N° 681

______

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 février 2018.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE sur le premier « paquet Mobilité », présenté par la Commission européenne le 31 mai 2017 (n° 658).

PAR M. Damien PICHEREAU

Député

——

 

 Voir le numéro : 658.

 


—  1  —

SOMMAIRE

___

 Pages

introduction

I. Une révision profonde de la directive « eurovignette » est engagée

A. La directive « eurovignette » de 1999, plusieurs fois révisée

B. Les dispositions du « paquet mobilitÉ » relatives aux pÉages et droits d’usage

C. la position de la commission des affaires europÉennes

II. un dispositif nouveau pour les données relatives aux émissions de co2 et à la consommation de carburant

III. les autres propositions législatives du premier « paquet mobilité »

A. les règles d’accès à la profession et d’accès au marché du transport routier international de marchandises

1. Les propositions du « paquet mobilité »

2. La position de la commission des affaires européennes

B. le volet social du premier paquet mobilité : Les conditions de travail dans le secteur du transport routier

1. Les propositions du « paquet mobilité »

a. Sur les durées de conduite et les temps de repos des conducteurs

b. Sur le détachement des travailleurs dans le secteur du transport routier

2. La position de la commission des affaires européennes

C. L’utilisation de vÉhicules louÉs sans chauffeur dans le transport routier de marchandises

1. Les propositions du « paquet mobilité »

2. Position de la commission des affaires européennes

D. l’interopérabilité des systèmes de télépéage et l’échange d’informations entre états

1. Les propositions du « paquet mobilité »

2. La position de la commission des affaires européennes

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Discussion gÉNÉrale

II. examen de L’article unique

Texte de la proposition de résolution européenne adopté par la commission des affaires européennes


—  1  —

 

   introduction

 

Au fil des ans, l’Union européenne a élaboré un ensemble de règles spécifiques à ce secteur, mais l’évaluation des textes existants a montré la nécessité de moderniser ceux-ci, pour rendre les transports routiers à la fois plus compétitifs économiquement et plus justes socialement tout en encourageant l’évolution, déjà amorcée, vers un transport routier plus « propre ».

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire est saisie de la proposition de résolution européenne déposée par votre Rapporteur sur le premier « paquet mobilité » présenté par la Commission européenne le 31 mai 2017. Cette proposition de résolution a été adoptée à l’unanimité par la commission des affaires européennes (n° 658) le 8 février 2018, qui a considéré que l’attractivité et la compétitivité du secteur concerné nécessitent une réforme profonde du cadre réglementaire européen.

Pour le présent rapport, votre Rapporteur a choisi de concentrer son propos sur celles des huit propositions législatives du « paquet » qui ont un lien direct avec deux problématiques centrales relevant des compétences de la commission du développement durable, tout particulièrement dans la perspective du futur projet de loi d’orientation sur les mobilités : les aspects financiers et environnementaux du transport routier. À ces deux problématiques correspondent les deux propositions de la Commission européenne visant à réviser la « directive Eurovignette » et la proposition de règlement sur la surveillance et la communication des données relatives aux émissions de CO2 et à la consommation de carburant des véhicules utilitaires lourds neufs. Les autres textes du « paquet » ne seront que rapidement présentés, leur analyse complète ayant été réalisée dans le rapport présenté à la commission des affaires européennes par votre Rapporteur ([1]).

Il convient de noter que les travaux de la commission des affaires européennes et de votre Rapporteur se poursuivront ensuite, la Commission européenne ayant présenté en novembre 2017 un deuxième « paquet mobilité » et ayant annoncé la présentation ultérieure d’un troisième ensemble de textes.

 


—  1  —

I.   Une révision profonde de la directive « eurovignette » est engagée

Deux des huit textes législatifs du premier « paquet mobilité » visent à modifier la directive 1999/68/CE du 17 juin 1999 dite « directive Eurovignette » ([2]). Celle-ci visait essentiellement à éliminer les distorsions de concurrence entre les entreprises de transport routier de marchandises afin d’améliorer le fonctionnement du Marché unique et du principe essentiel de libre circulation des marchandises. Ses révisions successives, ainsi que la nouvelle révision proposée dans le cadre du « paquet mobilité », ont tendu à accroître la mise en œuvre du principe « utilisateur-payeur » et du principe « pollueur‑payeur » dans la définition des dispositifs de tarification routière.

A.   La directive « eurovignette » de 1999, plusieurs fois révisée

La directive « Eurovignette » a été adoptée en 1999, puis révisée à plusieurs reprises, les modifications les plus importantes ayant été introduites en 2011 ([3]). Cette directive s’applique d’une part, aux taxes sur les poids lourds (en fixant des niveaux minimaux pour ces taxes), et d’autre part, à deux types de prélèvement pour usage des infrastructures routières :

– le « droit d’usage » (user charge) dont le paiement donne à l’utilisateur le droit d’emprunter la route concernée pour une période de temps donnée (une journée, une semaine, un mois ou un an) quelle que soit la distance parcourue pendant cette période,

– et le « péage » (toll), qui dépend de la distance parcourue et du type de véhicule.

La taxation des véhicules et la tarification routière sont des compétences nationales : la directive « Eurovignette » n’oblige pas les États membres à établir des taxes sur les poids lourds, et ne les oblige pas non plus à maintenir ou à établir des péages ou des droits d’usage, mais pose des règles à respecter lorsque les États décident d’introduire, pour faire payer l’usage des routes par les poids lourds, des dispositifs qui entrent dans son champ d’application du fait des véhicules et des zones géographiques concernés.

● Dispositions applicables aux droits d’usage : la directive fixe des plafonds en euros pour les droits d’usage (montants maximaux, frais administratifs compris), dans un tableau figurant en annexe. Ces plafonds sont fixés pour les droits annuels, par catégorie EURO de véhicules. Le droit d’usage journalier est harmonisé : il s’élève à 12 euros pour toutes les catégories de véhicules.

Deux ou plusieurs États membres peuvent coopérer pour introduire un système commun de droits d’usage applicable à l’ensemble de leurs territoires ([4]).

 Véhicules concernés : le texte initial s’appliquait aux véhicules de transport de marchandises dont le poids total autorisé en charge (PTAC) était égal ou supérieur à 12 tonnes ; la modification de la directive en 2006 a étendu le champ des véhicules couverts aux véhicules de transport de marchandises compris entre 3,5 et 12 tonnes. Les États ont conservé ensuite la possibilité d’appliquer les péages et/ou droits d’usage uniquement aux véhicules de 12 tonnes et plus, mais ne peuvent faire usage de cette possibilité que dans des conditions strictes définies par la directive.

Ni les voitures particulières, ni les camionnettes, ni les minibus, autobus ou autocars ne sont concernés par la directive.

 Routes concernées : la directive s’applique aux routes qui font partie du Réseau Trans-Européen de Transport (RTE‑T) ([5]), et à toutes les autoroutes (qu’elles fassent partie ou non du RTE-T). Les autres routes se trouvent exclues du champ de la directive – ce qui ne signifie pas que les États n’ont pas le droit d’en rendre l’usage payant, ou qu’ils ne peuvent pas mettre en place de dispositifs couvrant l’intégralité des routes sur leur territoire.

En tout état de cause, tous les péages et droits d’usage nationaux doivent être conformes aux principes généraux du droit communautaire que sont le caractère non-discriminatoire à l’égard du trafic international et l’interdiction des distorsions de concurrence entre les opérateurs. L’article 7 § 3 précise que « les péages et droits d’usage sont appliqués sans discrimination, directe ou indirecte, en raison de la nationalité du transporteur, de l’État [d’établissement] du transporteur ou d’immatriculation du véhicule, ou de l’origine ou de la destination du transport ».

 Non-cumul : l’article 7 § 2 interdit aux États d’imposer cumulativement des péages et des droits d’usage pour une catégorie de véhicules donnée pour l’utilisation d’un même tronçon de route, à l’exception du franchissement de ponts, de tunnels et de cols.

● Possibilités de modulations, de taux réduits et d’exonérations : pour les péages, pour les droits d’usage et pour les taxes sur les véhicules, les États peuvent prévoir des taux réduits ou des exonérations pour :

– les véhicules exonérés de l’obligation d’être équipés d’un chronotachygraphe (en application d’un règlement du 20 décembre 1985) ;

– les véhicules visés par l’article 6 de la directive Eurovignette : d’une part, plusieurs catégories de véhicules utilisés pour l’exercice de missions de service public (défense nationale, protection civile, services d’urgence, entretien des routes…), et d’autre part « les véhicules qui ne circulent qu'occasionnellement sur les voies publiques (…) et qui sont utilisés par des personnes (…) dont l'activité principale n'est pas le transport de marchandises, à condition que les transports effectués par ces véhicules n'entraînent pas de distorsions de concurrence et sous réserve de l'accord de la Commission. ».

D’autre part, la directive initiale prenait en compte – de façon très limitée – les coûts externes en donnant une possibilité très encadrée de modulation des tarifs selon le degré de congestion de certains axes ou selon les émissions des catégories de véhicules. La révision de la directive en 2006 a permis aux États membres de moduler de manière plus diversifiée, en fonction de la distance parcourue, du type d’infrastructure, de la vitesse, des caractéristiques du véhicule, du moment de la journée, du niveau de congestion… La révision de 2011 a généralisé la démarche d’intégration des coûts externes (pollution atmosphérique, pollution sonore), de sorte que la tarification reflète mieux le coût réel du transport.

Les définitions données par la directive en vigueur :

Péage. Une somme déterminée, payable pour un véhicule, fondée sur la distance parcourue sur une infrastructure donnée et sur le type du véhicule, qui comprend une redevance d’infrastructure et/ou une redevance pour coûts externes.

Redevance d’infrastructure. Une redevance perçue aux fins de recouvrer les coûts de construction, d’entretien, d’exploitation et de développement des infrastructures supportés dans un État membre.

Redevance pour coûts externes. Une redevance perçue aux fins de recouvrer les coûts supportés dans un État membre en raison de la pollution atmosphérique due au trafic (définis comme le coût des dommages causés par le rejet de particules et de précurseurs d’ozone lors de l’utilisation des véhicules) et/ou de la pollution sonore due au trafic (c’est-à-dire le coût des dommages causés par le bruit émis par les véhicules ou créé par leur interaction avec la surface de la route).

● Utilisation des recettes produites par ces prélèvements : la directive de 1999 recommande que les recettes tirées de ces prélèvements soient utilisées au bénéfice du secteur des transports et pour optimiser l’ensemble du système de transport, mais n’oblige nullement les États à affecter ainsi ces recettes. Seule une disposition spécifique pour les zones montagneuses crée une obligation d’affecter des recettes au financement des infrastructures de transports.

Une prise en compte de la spécificité des zones de montagne (article 7 septies) depuis 2011 dans la directive Eurovignette

La révision de la directive en 2011 a permis d’inclure une disposition en faveur du financement de projets d’infrastructures de transport dans les zones montagneuses : la directive permet désormais d’augmenter les péages sur des sections routières dans ces zones (« sur-péage »), à condition que la recette additionnelle correspondante soit affectée au financement de la construction des projets prioritaires du RTE-T offrant des itinéraires alternatifs pour ces trajets, y compris lorsque ces projets portent sur d’autres modes de transport que le transport routier.

B.   Les dispositions du « paquet mobilitÉ » relatives aux pÉages et droits d’usage

● S’agissant du champ d’application de la directive Eurovignette, la Commission européenne a proposé qu’à partir du 1er janvier 2020, les systèmes de péage existants et nouveaux qui s’appliquent aux poids lourds qui transportent des marchandises s’appliquent également aux bus et aux autocars ([6]).

Par ailleurs, il ne serait plus possible d’exonérer les moins de 12 tonnes de ces péages, afin de limiter la distorsion de concurrence qui s’est développée entre les véhicules de transport, et afin de ne pas faire porter la charge des redevances aux seuls poids lourds de plus de 12 tonnes.

Enfin, la Commission européenne propose d’élargir certaines dispositions de la directive aux véhicules légers (voitures particulières, minibus et camionnettes), notamment les possibilités de modulation des tarifs des redevances d’infrastructure, en précisant que les droits d’usage imposés aux minibus et camionnettes doivent obligatoirement être plus élevés que ceux imposés aux voitures.

● S’agissant des caractéristiques des redevances, la Commission propose principalement :

– d’interdire les droits d’usage (vignettes) pour les véhicules lourds à partir du 1er janvier 2024, et pour les véhicules légers à partir du 1er janvier 2028, afin de mieux appliquer le principe « utilisateur-payeur » ; au-delà de ces dates, les États membres n’auraient donc plus que le choix entre instaurer des péages ou n’instaurer aucune tarification de l’usage des infrastructures routières ;

– de mettre en place des redevances pour congestion ([7]), dont les recettes, si les États décident de recourir à cet outil, devront être affectées à la résolution des problèmes de congestion ; des niveaux maximaux sont définis pour les tarifs de ces redevances ([8]);

– d’autoriser l’instauration de majorations (sur-péages) de manière générale sur les tronçons routiers qui sont régulièrement saturés ou dont l’utilisation cause des dommages importants à l’environnement, et non plus uniquement dans les zones de montagne ; les recettes de ces majorations sont obligatoirement affectées au financement d’infrastructures de transport routier permettant d’atténuer la congestion ou les dommages à l’environnement ;

– de rendre obligatoire la modulation des redevances d’infrastructure en fonction des émissions de CO2 pour les poids lourds ([9]) à partir de 2021, et en fonction des émissions de CO2 et des normes EURO pour les véhicules légers ; en revanche, la modulation en fonction des nuisances sonores resterait facultative ;

– de réduire de 75 % les redevances d’infrastructure pour les véhicules « zéro émissions » ;

– de rendre obligatoire la mise en place, pour les poids lourds, de redevances pour coûts externes sur les axes routiers soumis à péage et où les dommages environnementaux provoqués par la circulation des poids lourds sont plus importants que la moyenne ;

– de renforcer la transparence des systèmes de péage et le suivi de l’utilisation des recettes : l’absence d’obligation d’affecter ces recettes aux infrastructures routières demeure inchangée, mais une obligation de rendre compte chaque année de leur utilisation est introduite.

Par ailleurs, considérant que les taxes sur les véhicules représentent un coût pour le secteur du transport, indépendamment de la décision d’un État d’appliquer ou non des péages, la Commission européenne recommande que les États soient incités à réduire leurs taux de taxation des poids lourds en dessous des minima initialement établis par la directive de 1999.

L’argumentaire de la Commission européenne est le suivant : « les taxes annuelles sur les véhicules sont des paiements liés au fait que le véhicule est immatriculé au nom du contribuable pour une période donnée. À ce titre, elles ne reflètent pas une utilisation particulière de l’infrastructure. Pour des raisons similaires, les taxes sur les véhicules ne sont pas efficaces lorsqu’il s’agit d’encourager des opérations plus propres et plus efficaces ou de réduire la congestion. Les péages, quant à eux, sont directement liés à l’utilisation de la route. Ils sont donc bien mieux adaptés à la réalisation de ces objectifs. L’application de taxes sur les véhicules représente un coût que les entreprises doivent jusqu’à présent supporter dans tous les cas, même si des États membres décident d’imposer des péages. De ce fait, les taxes sur les véhicules peuvent constituer un obstacle à l’instauration de péages. Il convient dès lors que les États membres disposent d'une plus grande latitude pour réduire les taxes sur les véhicules, ce qui implique d’abaisser les minima fixés dans la directive 1999/62/CE. » La modification proposée consiste en une réduction progressive des minima jusqu’à zéro, en 5 étapes étalées sur 5 années consécutives, représentant chacune 20 % des minima actuels.

En France, la taxe différentielle sur les véhicules à moteur ayant été supprimée, la seule taxe concernée par ce dispositif est la taxe spéciale sur certains véhicules routiers, dite « taxe à l’essieu » (régie par les articles 284 bis et suivants du code des douanes), applicable aux poids lourds de plus de 12 tonnes, qualifiée d’« impôt archaïque » par la Cour des comptes en 2014.

C.   la position de la commission des affaires europÉennes

Votre Rapporteur a exposé dans son rapport d’information les raisons pour lesquelles il lui semble que la nouvelle révision proposée pour la directive « Eurovignette » est bienvenue dans son principe mais trop rigide et mal proportionnée dans ses modalités.

La Commission européenne poursuit, certes, l’objectif de long terme de couverture de tous les coûts attachés au transport routier par les usagers de la route : elle propose d’étendre l’application du principe « utilisateur-payeur » à l’ensemble de véhicules à quatre roues, de supprimer à terme la possibilité pour chaque État de choisir entre un système de tarification liée à la distance et un système de tarification en fonction de la durée de circulation, et de remplacer à terme la modulation des péages basée sur les classes EURO des véhicules par une modulation basée sur les émissions de CO2.

Mais à ce stade, l’élargissement de la tarification à l’ensemble des véhicules suscite l’opposition de la majorité des États membres. La suppression du choix entre tarification à la durée et tarification à la distance, ne laissant subsister que la seconde possibilité, est également très critiquée par plusieurs États, dont la France, comme l’a indiqué la ministre chargée des Transports, Mme Elisabeth Borne, lors de son audition par la commission des affaires européennes le 23 novembre dernier.

Comme le préconisait votre Rapporteur, la commission des affaires européennes de l’Assemblée a pris position, dans la proposition de résolution, en faveur du maintien d’une pluralité d’options en matière de critères de tarification, pour tenir compte de la diversité des situations nationales. D’autre part, le principe d’une réduction, en parallèle, des taxes nationales sur les véhicules est pertinent, mais devrait être plus rapide que ce qui est préconisé par le « paquet mobilité ». Par ailleurs, le Gouvernement français devra veiller, dans les négociations, à ce que la révision n’entraîne pas de remise en cause des concessions autoroutières existantes, et à ce que les États conservent la responsabilité – et donc toute latitude – pour décider de l’affectation des recettes des péages à un ou plusieurs modes de transport.

Il regrette, qu’à terme, seules les émissions de CO2 soient prises en compte et s’interroge donc sur la modulation des péages proposée par la Commission européenne. Les véhicules sont également à l’origine de polluants tels que d’oxydes d’azote, NOx et particules fines que la réglementation européenne prend en considération dans le cadre du règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007, relatif à la réception des véhicules à moteur au regard des émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 5 et Euro 6). Les études scientifiques sur la nocivité des particules les plus petites s’accumulent et sont jugées responsables de nombreux problèmes de santé (asthme, infarctus, AVC notamment). Il souhaiterait donc revenir sur cette suppression.

C’est donc un soutien conditionné au respect d’une exigence de souplesse qui est proposé à la révision de la directive « Eurovignette ».

 


—  1  —

II.   un dispositif nouveau pour les données relatives aux émissions de co2 et à la consommation de carburant

Pour poursuivre l’effort, déjà engagé au niveau européen, d’amélioration des dispositifs de mesure et de vérification des émissions polluantes des véhicules, la Commission a inclus dans le premier « paquet mobilité » une proposition de règlement concernant la surveillance et la communication des données relatives aux émissions de CO2 et à la consommation de carburant des véhicules utilitaires lourds neufs (camions, autobus, autocars). Ce texte prépare l’introduction d’un dispositif de déclaration et de surveillance similaire à celui qui existe déjà pour les voitures et pour les véhicules utilitaires légers ([10]).

Contrairement aux voitures particulières et autres véhicules à quatre roues légers, les émissions de CO2 et la consommation de carburant des véhicules utilitaires lourds neufs mis sur le marché de l’Union européenne ne font aujourd’hui l’objet d’aucune certification ni exigence de surveillance ou de communication de manière objective et comparable. En empêchant l’élaboration de politiques permettant d’améliorer le rendement énergétique, ce manque de transparence nuit aux opérateurs de transport et a accru la dépendance de l’Union à l’égard des importations de combustibles fossiles. En outre, il n’incite pas à l’innovation. Enfin, il rend difficile la mise en œuvre d’actions conjointes au niveau européen et national visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) des véhicules utilitaires lourds, pourtant à l’origine de 5 % du total des émissions de l’Union et 25 % de celles dues au secteur routier (en 2014).

La Commission européenne a développé le logiciel VECTO (Vehicle Energy Consumption Calculation Tool outil de calcul de la consommation d’énergie des véhicules) permettant de calculer la consommation et les émissions des véhicules utilitaires lourds neufs. Elle a ensuite adopté un règlement d’application ([11]), dit « règlement sur la certification », qui a introduit l’obligation, pour tout véhicule lourd neuf mis sur le marché, d’effectuer une simulation des émissions de CO2 et de la consommation de carburant au moyen de VECTO.

Ce règlement « certification » a été adopté quelques mois avant la présentation des propositions constituant le premier « paquet mobilité » et va entrer en vigueur de manière progressive. Mais ce texte ne suffit pas à garantir une transparence totale du marché, les informations relatives aux performances du véhicule n’étant consultables que par l’acheteur dudit véhicule et les autorités nationales auprès desquelles il est immatriculé.

C’est pourquoi le « paquet mobilité » comporte une nouvelle proposition de règlement sur la surveillance et la communication des données relatives aux émissions de CO2 et à la consommation de carburant des véhicules utilitaires lourds neufs ([12]), qui vise à éclairer les décisions d’achat des opérateurs de transport, à stimuler l’innovation dans le secteur automobile et à permettre la mise en œuvre d’actions favorisant les véhicules utilitaires lourds plus économes en carburant (mesures fiscales, systèmes de péages). Enfin, le système de surveillance et de communication des données prévu par cette proposition devrait faciliter l’analyse des données et rendre possible l’évaluation de la conformité aux futures normes en matière d’émissions de CO2 des véhicules utilitaires lourds.

Les principales dispositions de cette proposition de règlement sont les suivantes :

● création d’obligations imposées aux États membres sur les véhicules utilitaires lourds neufs (poids lourds, autobus, autocars), avec la définition des données à surveiller et les échéances à respecter ; il est précisé que les autorités compétentes pour assurer la surveillance et la communication des données seront les mêmes que celles qui sont déjà chargées de ces missions pour les véhicules utilitaires légers ;

● création d’obligations imposées aux constructeurs automobiles (obligation de collecter chaque année les données dont la liste est fixée par le texte pour les véhicules produits l’année précédente, et de communiquer ces données), avec également des échéances à respecter ;

● création d’un registre central des données relatives aux véhicules lourds, accessible au public et tenu par l’Agence européenne pour l’environnement (AEE), déjà responsable d’un registre analogue rassemblant les données relatives aux véhicules utilitaires légers.

La proposition s’accompagne d’annexes qui définissent les paramètres techniques des données soumises à surveillance et les étapes de la procédure administrative de surveillance et de communication des données. Elle précise que les autorités compétentes et les constructeurs sont responsables de l’exactitude et de la qualité des données qu’ils déclarent. La Commission européenne pourra effectuer ses propres vérifications concernant les données communiquées, et, en cas de divergences, prendre des mesures pour corriger les données publiées au registre central.

Loin d’être une mesure isolée, cette proposition du « paquet mobilité » s’inscrit pleinement dans la stratégie de l’Union et sera complétée ultérieurement par d’autres mesures ([13]). Ainsi, elle fait suite à la communication de 2014 sur la stratégie pour la réduction de la consommation de carburant et des émissions de CO2 des véhicules utilitaires lourds, qui prévoyait déjà une proposition législative relative à la surveillance et à la communication des données en matière d’émissions. Conforme à l’engagement pris par l’Union dans son cadre d’action pour le climat et l’énergie de réduire d’au moins 40 % ses émissions d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990, elle répond aux objectifs de la stratégie européenne pour une mobilité à faible taux d’émissions de 2016, en particulier la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) dans les transports d’au moins 60 % d’ici à 2050 par rapport aux niveaux de 1990. Enfin, elle vient en appui de la mise en œuvre de la directive « Eurovignette » en permettant l’élaboration d’une méthode pour moduler le coût d’utilisation des infrastructures en fonction des émissions de CO2.

Votre Rapporteur juge pertinent le nouveau dispositif proposé, la transparence ainsi installée permettra aux consommateurs de faire des achats éclairés, aux constructeurs d’orienter leurs activités vers le développement de solutions moins émettrices de CO2, et aux États de disposer d’un nouvel outil. Il souhaiterait étendre cette proposition aux émissions polluantes dans leur ensemble.

 


—  1  —

III.   les autres propositions législatives du premier « paquet mobilité »

A.   les règles d’accès à la profession et d’accès au marché du transport routier international de marchandises

1.   Les propositions du « paquet mobilité »

Le « paquet mobilité » comprend une proposition visant à modifier deux règlements du 21 octobre 2009 « en vue de les adapter aux évolutions du secteur » ([14]) : le règlement n° 1071/2009 sur l’accès à la profession de transporteur par route et le règlement n° 1072/2009 sur l’accès au marché international du transport routier.

Le règlement n° 1071/2009 fixe les conditions que les entreprises doivent respecter pour exercer la profession de transporteur (de marchandises ou de voyageurs) par route. Le règlement n° 1072/2009 ne concerne que le transport routier de marchandises ; il fixe les règles que les entreprises doivent respecter lorsqu’elles veulent opérer sur le marché du transport international et sur les marchés nationaux autres que le leur. Il contient notamment des dispositions relatives aux documents que l’État membre d’immatriculation d’un poids lourds doit fournir à ces entreprises (licence communautaire), et aux conducteurs de pays tiers (attestation de conducteur).

Les propositions de la Commission européenne apportent des changements principalement sur quatre sujets : les sociétés dites « boîtes aux lettres », les véhicules utilitaires légers (VUL), les outils de contrôle, et le cabotage – c’est-à-dire le transport de marchandises à l’intérieur d’un État membre, par une entreprise de transport établie dans un autre État membre, à la suite d’un transport international de marchandises.

● Les sociétés « boîtes aux lettres » sont des filiales fictives qu’ouvrent certains transporteurs dans les États membres où les coûts salariaux sont les plus bas, en vue d’exploiter les écarts salariaux alors que leurs activités ne s’exercent que dans des États membres où les salaires sont plus élevés. Ils en tirent un avantage concurrentiel déloyal. La Commission propose, d’une part, de renforcer les critères d’établissement afin de garantir qu’un transporteur a réellement une activité dans l’État membre dans lequel il est établi, et d’autre part, de renforcer la coopération entre États pour détecter ces sociétés « boîtes aux lettres ».

● Actuellement, les VUL (véhicules de moins de 3,5 tonnes) sont exclus du champ d’application du règlement sur l’accès à la profession de transporteur. Mais comme les États membres étaient autorisés à appliquer certaines de ses dispositions aux VUL immatriculés sur leur territoire, les exigences étaient devenues très hétérogènes dans l’Union européenne. La Commission propose donc d’introduire des règles communes les concernant, notamment pour leur appliquer les exigences en matière d’établissement stable et de capacité financière.

● Les règles en vigueur obligent les États à créer et à alimenter des registres électroniques nationaux, et les invitent à s’engager dans une coopération administrative ; la Commission propose d’enrichir la liste des informations devant être enregistrées dans les registres nationaux, d’imposer aux États un délai maximal pour répondre aux demandes d’autres États, et de les obliger à réaliser des inspections dans les entreprises pour lesquelles des éléments fournis par un autre État membre tendent à prouver le non-respect des règles d’établissement ;

● Le cabotage est, dans le droit en vigueur, soumis à des restrictions : le règlement autorise 3 opérations de cabotage dans un délai de 7 jours à compter d’une livraison internationale. Ces règles sont très difficiles à mettre en œuvre. Les autorités de contrôle exigent des documents relatifs au nombre d’opérations de cabotage, mais cela ne fonctionne pas efficacement. L’absence d’harmonisation dans la mise en œuvre des différentes réglementations nationales a entraîné des lourdeurs administratives, une insécurité juridique et une concurrence déloyale.

La Commission propose d’instaurer une nouvelle règle : l’autorisation illimitée d’effectuer des transports de cabotage dans les 5 jours suivant un transport international ; en contrepartie, sera exigée une stricte application des droits relatifs au salaire minimum et aux congés payés de l’État membre où a lieu le premier transport de cabotage, et les États membres devront réaliser un pourcentage minimal de contrôles des transports de cabotage (avec des seuils annuels obligatoires définis au niveau européen et des mesures renforcées en matière d’échanges d’informations entre les États).

2.   La position de la commission des affaires européennes

● Sur les sociétés « boîtes aux lettres », ainsi que sur les mesures tendant à améliorer les contrôles et la coopération entre les États, la position adoptée par la commission est globalement favorable au dispositif proposé ;

● Sur l’extension aux VUL des règles applicables aux poids lourds, le soutien est plus réservé par manque d’ambition des propositions sur cette question, notamment sur le respect de seulement deux (établissement et capacité financière mais à un niveau de contrainte moindre) des quatre critères d’accès à la profession de transporteur routier ;

● Votre Rapporteur considère que les propositions de la Commission en ce qui concerne le cabotage vont trop loin dans la libéralisation de cette activité, et a donc formulé cinq exigences dans le cadre de la proposition de résolution :

– maintenir dans les dispositions du règlement un nombre maximum d’opérations ;

– réduire la période de cabotage autorisée ;

– instaurer une période de carence d’au moins trois semaines entre deux périodes de cabotage ;

– supprimer la possibilité de caboter dans des États membres limitrophes ;

– conserver la règle actuelle qui n’autorise le cabotage qu’après le dernier déchargement de la cargaison internationale.

En revanche, les propositions relatives à la coopération des États en matière de contrôle vont bien dans le sens d’une plus grande efficacité des échanges d’informations et donc des contrôles.

B.   le volet social du premier paquet mobilité : Les conditions de travail dans le secteur du transport routier

Comme l’a souligné l’un des rapporteurs du Parlement européen sur le premier « paquet mobilité » ([15]), « le transport routier, en particulier sur de longues distances ou transfrontalier, est confronté à une pénurie imminente de conducteurs, tous États membres confondus. Cela s’explique en partie par les conditions de vie et de travail des conducteurs, notamment les longues périodes passées loin de leur lieu de résidence et le manque endémique de lieux d’hébergement adaptés. ».

L’évaluation de la législation sociale européenne existante pour ce secteur a montré qu’elle comporte un certain nombre de lacunes et pose des problèmes considérables en ce qui concerne sa mise en œuvre. Il existe des disparités excessives dans la manière dont les différents États membres l’interprètent, l’appliquent et en contrôle le respect. Il en résulte une insécurité juridique et une inégalité de traitement pour les conducteurs et les opérateurs de transport routier.

1.   Les propositions du « paquet mobilité »

a.   Sur les durées de conduite et les temps de repos des conducteurs

Les règlements et directives en vigueur ([16]) relatifs aux durées maximales de conduite, aux temps de repos et à la localisation au moyen de tachygraphes ont été adoptés pour améliorer les conditions de travail des conducteurs, pour contribuer à une concurrence équitable entre transporteurs et pour améliorer la sécurité routière.

Ainsi, le règlement du 15 mars 2006 prévoit que la durée de conduite journalière ne doit pas dépasser 9 heures, mais peut être prolongée jusqu’à 10 heures (au maximum deux fois au cours d’une même semaine) ; la durée de conduite ne peut pas dépasser 56 heures par semaine et 90 heures sur deux semaines consécutives ; une pause d’au moins 45 minutes est obligatoire après quatre heures et demi de conduite. Quant au temps de repos journalier, il est également encadré par ce règlement. D’autre part, la directive du 11 mars 2002 limite la durée hebdomadaire du travail des conducteurs à 48 heures en principe, avec possibilité de dérogation (dans la limite de 60 heures et à certaines conditions).

Mais ces textes ont donné lieu à des interprétations, des règles nationales et des pratiques de contrôle divergentes dans les États membres, notamment sur le droit ou non d’obliger les conducteurs à passer leur temps de repos dans la cabine de leur camion ([17]).

Le « paquet mobilité » comprend donc une proposition de règlement qui cherche à remédier aux lacunes des textes antérieurs, à leur manque de clarté sur certains points et à l’absence d’uniformité et d’efficacité dans leur application. Les principales dispositions de ce texte sont les suivantes :

● une interdiction claire de la prise du repos hebdomadaire normal en cabine, et l’obligation imposée aux employeurs de mettre à la disposition de ses salariés conducteurs un lieu d’hébergement adéquat si les conducteurs ne sont pas en mesure de prendre leur repos dans un lieu privé de leur choix ; le Gouvernement français soutient avec force l’interdiction proposée ;

● l’obligation pour les employeurs de laisser aux conducteurs la libre disposition de leur temps durant leur période de repos ;

● des modifications du règlement antérieur pour permettre un retour plus fréquent des conducteurs à leur domicile ;

● des éléments de souplesse pour tenir compte de circonstances particulières.

b.   Sur le détachement des travailleurs dans le secteur du transport routier

La question du détachement des travailleurs du transport routier est, dans les discussions sur le premier « paquet mobilité », celle qui s’annonce la plus difficile – et qui suscite, à juste titre, le plus d’inquiétudes.

Il existe depuis 1996, au niveau européen, un cadre juridique général pour le détachement des travailleurs – élément indispensable pour la mise en œuvre de l’un des principes fondamentaux de la construction européenne : la libre circulation des personnes à l’intérieur de l’espace européen. Le transport routier international n’est pas exclu du champ juridique de ce régime mais il est apparu, en pratique, très difficile de lui appliquer ces règles, compte tenu du caractère très mobile de cette activité : le principe du détachement nécessite d’identifier de manière incontestable un pays « d’accueil » et un pays « d’origine » de chaque travailleur ; or le cabotage rend cette distinction complexe en pratique.

Bien qu’une révision soit en cours sur les règles générales contenues dans la directive de 1996, il a été décidé – et la France a joué un rôle essentiel dans cette décision – de consacrer un texte spécifique au détachement pour le secteur routier. C’est la proposition de directive sur le détachement qui figure dans le premier « paquet mobilité » ([18]), et qui vise à instaurer des règles spéciales dérogatoires à celles de la directive générale sur le détachement. La dérogation centrale consiste à définir un seuil temporel en deçà duquel les règles du pays d’accueil relatives à la rémunération et aux congés payés ne s’appliqueraient pas ; pour le transport international routier (TIR), le seuil proposé est « plus de 3 jours cumulés par mois civil ». En revanche, les règles du détachement s’appliqueraient dès la première opération de cabotage dans un État membre.

2.   La position de la commission des affaires européennes

S’agissant des dispositions sur les temps de travail, de conduite et de repos, votre Rapporteur a exprimé de fortes inquiétudes sur les propositions de la Commission et sur le déroulement des négociations en cours entre les États membres, d’une part, et au sein du Parlement européen, d’autre part. La proposition de résolution adoptée par la commission des affaires européennes appelle à une grande vigilance pour que les éléments de progrès des conditions de travail des conducteurs (qui correspondent aussi à des éléments d’amélioration de la sécurité routière) ne soient pas remis en cause au cours des négociations. Elle appelle également à ce que les nouvelles règles plus protectrices soient rendues applicables aux conducteurs de VUL.

S’agissant du texte spécial consacré au détachement des travailleurs du transport routier, votre Rapporteur juge inacceptable d’introduire un seuil d’application : la proposition de résolution demande que les règles afférentes au détachement s’appliquent dès le début d’une opération de transport, quelle que soit sa nature, y compris pendant les périodes de repos des conducteurs.

C.   L’utilisation de vÉhicules louÉs sans chauffeur dans le transport routier de marchandises

1.   Les propositions du « paquet mobilité »

La directive 2006/1/CE relative à l’utilisation de véhicules loués sans chauffeur dans le transport de marchandises par route autorise les États membres à restreindre l’utilisation des véhicules loués aux véhicules de plus de 6 tonnes pour les opérations pour compte propre, et permet de limiter l’utilisation des véhicules loués dans un autre État membre que celui où est établie l’entreprise qui les prend en location. De plus, les États ne sont pas obligés d’autoriser l’utilisation d’un véhicule loué sur leur territoire si le véhicule a été immatriculé ou mis en circulation dans un État autre que celui où l’entreprise utilisatrice est établie.

Les règles applicables dans les différents pays sont, en conséquence, très disparates ([19]). La Commission européenne propose d’éliminer ces restrictions et d’établir un cadre réglementaire uniforme pour garantir aux entreprises de location et de location-vente un égal accès au marché des véhicules loués tout en réduisant les charges administratives superflues ([20]).

2.   Position de la commission des affaires européennes

La possibilité d’utiliser de manière flexible et sans entraves la location de véhicules sans chauffeur présente un intérêt certain pour les entreprises. Toutefois, la possibilité accrue de louer dans un autre pays pour faire des opérations de transport peut soulever des questions sur le paiement des primes d’assurance et au plan fiscal (un véhicule pourrait être facilement loué dans un État où la fiscalité sur les véhicules est plus avantageuse que dans l’État où le véhicule sera utilisé). La proposition de résolution adoptée par la commission des affaires européennes signale donc le risque d’incohérence entre ce texte et les dispositions tendant à lutter plus efficacement contre les sociétés « boîtes aux lettres » présentées dans la proposition précitée sur l’accès à la profession et au marché.

D.   l’interopérabilité des systèmes de télépéage et l’échange d’informations entre états

1.   Les propositions du « paquet mobilité »

Des systèmes de perception par télépéage existent au niveau national, régional ou local dans 20 des 28 États membres de l’Union européenne, et leur nombre est en augmentation. La grande majorité de ces systèmes requièrent que les usagers de la route installent des équipements spéciaux (« unités embarquées ») à bord de leurs véhicules. Mais très peu d’entre eux offrent une interopérabilité transfrontalière. Par conséquent, les usagers sont contraints d’équiper leurs véhicules de plusieurs unités embarquées différentes pour pouvoir circuler, ce qui représente des coûts considérables (estimés par la Commission européenne à plus de 330 millions d’euros par an).

La législation en vigueur sur le service européen de télépéage (SET), adoptée en 2004, visait à améliorer le fonctionnement du marché du transport routier grâce à la fourniture d’un service à partir d’un appareil embarqué capable de dialoguer avec l’infrastructure de chacun des pays traversés par le véhicule, avec pour objectif la création d’un système interopérable de dimension européenne : l’objectif était de permettre aux usagers de la route de payer facilement les péages dans toute l’Union avec un seul contrat, souscrit auprès d’un seul prestataire et avec un équipement embarqué unique.

Mais cet objectif est loin d’être atteint, notamment parce que les prestataires de télépéages sont confrontés à d’importantes barrières à l’entrée (procédures d’agrément longues, spécificités techniques divergentes…) La Commission européenne propose donc d’apporter des modifications ([21]) pour :

– prendre en considération les évolutions technologiques pour actualiser la liste des technologies autorisées, et imposer que les équipements embarqués qui utilisent la technologie de localisation par satellite soient compatibles avec les services fournis par les systèmes européens Galileo et EGNOS ;

– différencier les services de télépéage entre les poids lourds et les véhicules utilitaires légers (VUL) ;

– et lever certains obstacles, en particulier donner une base juridique à l’échange d’informations relatives à l’immatriculation des véhicules entre les États membres, qui serait utile au recouvrement coercitif des redevances routières.

2.   La position de la commission des affaires européennes

La poursuite des travaux sur l’interopérabilité au niveau européen est nécessaire, et il est particulièrement important d’inciter au recours aux services satellitaires européens. De même, les propositions relatives à un dispositif transfrontalier de recouvrement des péages en cas d’infractions ont reçu le soutien de la commission des affaires européennes.

En revanche, votre Rapporteur a souligné le problème majeur que pose la différenciation envisagée entre les règles applicables aux VUL et celles applicables aux véhicules lourds : le risque d’accélérer le développement du transport international de marchandises par VUL au détriment des poids lourds doit être pris en considération. La proposition de résolution n’exprime donc pas d’avis favorable aux propositions de la Commission européenne sur ce point, mais rappelle que l’un des objectifs doit demeurer l’instauration d’une concurrence équitable au sein de l’Union.


—  1  —

   TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.   Discussion gÉNÉrale

Lors de sa réunion du 21 février 2018, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné, sur le rapport de M. Damien Pichereau, la proposition de résolution européenne sur le premier « paquet Mobilité », présenté par la Commission européenne le 31 mai 2017.

Mme Barbara Pompili, Présidente. Mes chers collègues, l’ordre du jour appelle l’examen de la proposition de résolution européenne de M. Damien Pichereau sur le premier « paquet Mobilité » présenté par la Commission européenne le 31 mai 2017.

Ce « paquet Mobilité » comporte trois volets : un volet économique et social, un volet relatif à la simplification et la numérisation des procédures et des contrôles, et un volet sur la tarification des infrastructures. La proposition de résolution européenne concerne chacun d’entre eux, et elle émet quelques réserves sur certaines des mesures envisagées.

Cette proposition de résolution européenne a été adoptée par la commission des affaires européennes de notre assemblée le 8 février dernier, et renvoyée à notre commission. Elle sera examinée en séance publique le mardi 6 mars prochain, dans la séance de l’après-midi.

Je vous rappelle que, le 14 février dernier, notre commission a procédé à la nomination de M. Damien Pichereau comme rapporteur. À l’issue du délai de dépôt, le secrétariat de la commission a enregistré neuf amendements.

M. Damien Pichereau, rapporteur. Cette initiative pour le transport routier est la première des trois annoncées au printemps dernier par la Commissaire européenne aux transports, Mme Violeta Bulc. Outre ce paquet Mobilité I, un « paquet Mobilité propre », ou « paquet Mobilité II », a été publié le 8 novembre. Les textes restants paraîtront vraisemblablement au printemps 2018.

Pourquoi prendre position ? Parce que le cadre juridique applicable au transport routier est complexe et dépassé, avec un fractionnement réglementaire accentué par les disparités économiques et sociales au sein de l’Union européenne. Cette situation a pour conséquence un transfert géographique de l’activité de transport routier de marchandises (TRM) vers les acteurs établis hors du cœur géographique de l’Union européenne – phénomène qui va en s’accentuant.

Les États membres ne sont pas d’accord sur les politiques européennes qu’il convient de mener dans ce secteur. Depuis plusieurs années, ils expriment leurs préoccupations d’une manière particulièrement clivée, se partageant entre les États situés à l’ouest de l’Union, mobilisés contre la libéralisation totale du cabotage et les dérives liées au détachement, et les États situés à l’est et au sud, qui privilégient la liberté de circulation. Le risque clairement identifié par le Président de la République dans son discours sur l’Europe, à la Sorbonne, le 26 septembre dernier, est que la « compétition sans règles [devienne] la division sans retour ».

Que notre commission, compétente en matière de transports, prenne position me semble encore plus indispensable aujourd’hui, pour rappeler ce que nous attendons de l’Union européenne : une harmonisation par le haut, non seulement des règles applicables aux volets « marché » et « social » du transport routier couverts par ce paquet, mais aussi des pratiques des États membres en matière de contrôle, en particulier l’obligation d’installation du tachygraphe intelligent sur l’ensemble de la flotte européenne, obligation dont la mise en œuvre doit être accélérée.

Ce secteur est emblématique de l’Europe que nous voulons.

Je parle d’une Europe au sein de laquelle la Commission européenne reconnaît l’existence de déséquilibres dans le marché unique, déséquilibres que le marché à lui seul ne suffit pas à réguler. Telle est bien l’origine des initiatives sur le détachement « général » et sur le volet économique et social que l’on trouve dans ce paquet. En la matière, il faut saluer le rôle du président M. Juncker qui, poussé et soutenu par des États membres pugnaces, a su insuffler ce changement de cap.

Je parle d’une Europe où, par l’écoute et l’échange, et non par l’invective ou l’anathème, on obtient des résultats concrets pour nos concitoyens, quand et là où c’est nécessaire. C’est avec cette méthode que le Président de la République a réussi, alors que beaucoup pensaient qu’il allait échouer, en obtenant, d’abord, en juin, une renégociation de la directive détachement, puis un accord, en octobre dernier, et, enfin, une lex specialis qui régira le secteur routier.

J’en viens aux trois volets thématiques de ce paquet Mobilité.

Un volet est consacré aux aspects sociaux et à l’accès au marché. Il comporte la plupart des points durs de la négociation. J’ai pu le constater lors de déplacements en Roumanie et au Portugal, deux pays représentatifs du « bloc » avec lequel nous devons discuter. Je veux évoquer quatre enjeux de ce volet.

La question des règles liées au détachement constitue un premier enjeu. Dans la proposition de la Commission, le transport international routier (TIR) serait l’objet de règles spécifiques, avec un seuil de déclenchement de trois jours, apprécié mensuellement – en deçà duquel les règles relatives à la rémunération et aux congés payés du pays d’accueil ne s’appliqueraient pas. Le régime du détachement s’appliquera en revanche sans seuil spécifique pour le cabotage. Une déclaration de la Commission a levé l’ambiguïté sur le cas du transit : il ne donne pas lieu à l’application des règles du détachement, même si l’Allemagne y tient encore.

La négociation parallèle de la directive générale a ralenti les discussions au Conseil sous présidence estonienne. L’actuelle présidence bulgare semble avoir une vision très libérale, avec un seuil d’application non seulement triplé pour le TIR mais qui s’étend également au cabotage.

Des signaux négatifs ont été donnés au Parlement européen, au moins dans le rapport de Mme Merja Kyllönen – elle était absente lors de la réunion de la commission des transports du Parlement européen, le 23 janvier. Sans se prononcer sur le seuil numérique de déclenchement du régime du détachement pour le TIR, Mme Kyllönen a semblé d’ores et déjà en valider le principe. Elle a fait des propositions qui, si elles étaient acceptées, aboutiraient à une double inégalité de traitement : d’une part, entre les travailleurs détachés en fonction de leur secteur d’activité, et, d’autre part, entre les conducteurs routiers en fonction de la nature de la cargaison transportée ou de celle de leur employeur.

Ouvrir aussi largement les dérogations revient à détourner le principe accepté de l’application du détachement dans le secteur routier. Il est donc indispensable que l’Assemblée nationale apporte son soutien à l’opposition ferme exprimée par le Gouvernement.

La question du cabotage est un deuxième enjeu. En contrepartie d’un nombre illimité d’opérations de cabotage, la Commission européenne propose de réduire la période autorisée à cinq jours, au lieu de trois opérations sur une période de sept jours actuellement, et de l’étendre aux États limitrophes. Il s’agit, à mes yeux, à une libéralisation déguisée. Le cabotage remplit une fonction environnementale et économique dans l’intérêt de tous, c’est indéniable, et il faut donc le maintenir, mais l’ouverture proposée ne ferait que cannibaliser les marchés intérieurs des États membres situés géographiquement au cœur de l’Europe.

Le rapporteur du Parlement européen, M. Jens Nilsson, a choisi de limiter significativement les possibilités de cabotage notamment en réduisant la période autorisée à quarante-huit heures au maximum, tout en maintenant le déplafonnement du nombre d’opérations. Cette option a reçu un accueil « mitigé » au Parlement européen. Un tel déplafonnement s’oppose dans son essence même au principe selon lequel le cabotage n’est pas et ne doit pas s’apparenter à un mode opératoire ordinaire du transport routier.

La solution consiste, selon moi, à maintenir une limite au nombre d’opérations, à réduire la période autorisée, et, en même temps, à instaurer une période de carence entre deux périodes de cabotage. Cette période de carence fait partie des sujets de discussion abordés au Conseil. La présidence estonienne en a proposé le principe, et la présidence bulgare a entamé les discussions sur sa durée, en proposant de la fixer à deux jours seulement. C’est clairement insuffisant pour respecter à la fois la lettre et l’esprit du cabotage. Je vous propose donc d’appeler à fixer cette période de carence à trois semaines.

Un troisième enjeu se joue avec la question du repos hebdomadaire. Il est à craindre que l’interdiction claire, proposée par la Commission et affirmée par la Cour de Justice de l’Union européenne, le 20 décembre dernier, de la prise du repos normal en cabine, laisse la place à un compromis boiteux, avec une autorisation lorsque des installations appropriées et/ou des parkings sécurisés sont disponibles.

Pour moi, la discussion ouverte aujourd’hui au Conseil et au Parlement européen sur les critères des « zones appropriées » permettant le repos en cabine n’a pas lieu d’être, et je m’inquiète du signal ainsi donné.

À l’inverse, je me réjouis de la proposition de M. Wim van de Camp, rapporteur au Parlement européen, d’appliquer les règles en matière de temps de repos et de conduite à tous les véhicules effectuant du transport international, prenant ainsi en compte la part de plus en plus grande des véhicules utilitaires légers (VUL) dans cette activité.

J’en viens précisément à un quatrième et dernier enjeu : l’extension du champ de la réglementation aux véhicules utilitaires légers, les VUL. Il s’agit d’un sujet très important pour lequel le Premier ministre m’a nommé député en mission – je rendrai mon rapport à la mi-mars.

La Commission européenne prend enfin acte d’un phénomène aujourd’hui largement répandu, le transport de marchandises par des camionnettes et des minivans, qui ne sont soumis ni aux contraintes « statutaires » des transports par poids lourds – établissement, honorabilité, capacité financière et professionnelle –, ni même aux règles sur les temps de conduite et de repos. Outre la concurrence déloyale que cela implique, il faut souligner le risque en matière de sécurité routière, l’atteinte à la dignité des conducteurs – ils vivent et dorment dans des conditions qui ne sont pas acceptables –, et l’impact négatif en termes de pollution.

La Commission européenne fait des propositions, mais ces dernières sont modestes, puisqu’elle ne propose de soumettre ces VUL qu’à deux des quatre critères exigibles pour les poids lourds – en matière d’établissement et de capacité financière, dans une version amoindrie et adaptée à l’activité.

Pour ma part, j’estime, comme le Gouvernement, que le seul critère pertinent est celui de l’activité : tous les VUL impliqués dans des opérations de transport devraient être concernés dans la mesure où ils sont en concurrence avec les entreprises de transport utilisant des poids lourds. Il est par conséquent nécessaire de disposer de moyens de contrôle adéquats pour éviter le contournement des règles.

Le deuxième volet du paquet Mobilité concerne la simplification des procédures et le renforcement des contrôles, ainsi que leur numérisation.

Pour être efficaces, nous devons renforcer les règles et, en même temps, nous donner les moyens de les mettre en œuvre et de les contrôler de façon effective. C’est un sujet dont m’ont beaucoup parlé mes interlocuteurs belges et français, mais aussi, en insistant sur la simplification et la numérisation, mes interlocuteurs roumains et portugais. Une convergence semble donc possible.

Les propositions de la Commission comportent en ce sens toute une série de propositions fortement soutenues par la France : nouvelles données obligatoires pour lutter contre les sociétés « boîtes aux lettres », modèle unique et dématérialisé pour les déclarations, relèvement des objectifs de contrôle en matière sociale et de cabotage assignés aux États membres, renforcement de la coopération en cas de saisine d’un État membre par une autorité de contrôle d’un autre État, et enregistrement des passages de frontières.

L’exigence réaffirmée de coopération loyale entre les États membres mérite d’être soulignée. À ce titre, il faut saluer l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) du 6 février dernier : en cas de fraude avérée, le tribunal d’un État membre peut laisser inappliqués, voire annuler, des certificats attestant de l’affiliation de travailleurs détachés à la sécurité sociale de leur pays de provenance si l’autorité émettrice ne procède pas dans un délai raisonnable au réexamen desdits certificats sur la base des éléments soumis par le pays d’accueil attestant la fraude.

La mise en place de l’Autorité européenne du travail, annoncée dans son discours sur l’état de l’Union européenne devant le Parlement européen par le président de la Commission, M. Juncker, en septembre 2017, afin de garantir que les règles de l’Union sur la mobilité de la main-d’œuvre soient appliquées de façon juste, simple et efficace, se précise. Cette autorité sera dotée d’un volet mobilité qui ne se concentrera pas sur le seul détachement mais concernera toutes les questions de mobilité transfrontalière, y compris la lutte contre le travail non déclaré.

L’installation du tachygraphe intelligent constitue un enjeu majeur du paquet Mobilité I. La question posée est celle du délai de transition pour la flotte existante, sachant que la date-butoir est aujourd’hui fixée au 15 juin 2034. La proposition initiale de la Commission européenne était muette sur ce point, mais tant le Conseil que les trois rapporteurs du premier volet, Mme Merja Kyllönen, M. Jens Nilsson et M. Wim van de Camp, ont mis ce sujet sur la table. Ce dernier souhaite que cette date-butoir soit fixée au 2 janvier 2020, alors que la présidence bulgare semble préférer le 31 janvier 2028. La mise en place du tachygraphe intelligent doit être accélérée, suffisamment mais de manière réaliste. Dans la résolution, je vous propose en conséquence de retenir 2023 comme date limite.

J’en termine avec le troisième volet du paquet Mobilité, relatif à la tarification des infrastructures.

La Commission étend l’application du principe « utilisateur-payeur » à l’ensemble des véhicules à quatre roues. Elle supprime à terme la possibilité de choix entre un système de tarification à la distance ou à la durée. Elle renforce le panel d’outils d’intégration des externalités négatives dans le calcul de la tarification, et elle vise à remplacer la modulation des péages basés sur les classes EURO par un système fondé sur les émissions de CO2. Sur ce point, je souhaite réfléchir à un amendement en vue du passage en séance afin de prendre en compte de façon plus poussée les émissions polluantes en général.

Par ailleurs, la Commission permet aux États membres de réduire voire de supprimer les taxes sur les véhicules en plusieurs étapes – je pense à la taxe à l’essieu que la Cour des comptes a récemment qualifié d’archaïque.

Sur la question principale de la disparition programmée des systèmes de vignette, une divergence nette existe aussi entre les États membres, la Commission et la rapporteure du Parlement européen, Mme Revault d’Allonnes-Bonnefoy.

Lors du débat d’orientation dans le cadre du Conseil Transports du 5 décembre dernier, l’élargissement du champ d’application de la directive « Eurovignette » à l’ensemble des véhicules a rencontré une opposition nette d’une majorité des États membres. L’obligation de mettre fin au système de vignette est également très discutée, les États membres affichant leur préférence pour conserver la flexibilité nécessaire pour choisir le type de système convenant le mieux à leurs caractéristiques spécifiques.

De son côté, Mme Revault d’Allonnes-Bonnefoy entend aller beaucoup plus loin que ce qui est proposé par la Commission européenne, en défendant une tarification à la distance obligatoire, élargie et homogène, dans un délai plus rapide. En contrepartie, elle prévoit des mesures pour faciliter l’acceptabilité par toutes les parties prenantes du dispositif proposé.

Le poids du secteur du transport dans les émissions de gaz à effet de serre et les efforts à fournir pour respecter les engagements de l’Union européenne en application de l’Accord de Paris sur le climat nous obligent à agir.

Un cadre général est nécessaire, mais la diversité des situations des États membres exige une approche plus souple et proportionnée. Il convient donc de préserver, dans des conditions strictement définies, l’option de la tarification basée sur la durée.

Je partage en revanche l’opinion de notre collègue députée européenne sur l’impact positif, en termes d’acceptabilité sociale, de mécanismes d’affectation, au bénéfice des transports, des recettes ainsi générées, mais il convient une nouvelle fois de faire preuve de souplesse et de flexibilité pour ne pas aller à rencontre de l’objectif recherché.

Mme Bérangère Abba. Le paquet Mobilité préconise la mise en place de nombreuses règles nouvelles, mais les moyens de les contrôler risquent d’être inopérants.

Les règles de contrôle du cabotage sont, par exemple, relativement complexes. L’absence d’harmonisation dans la mise en œuvre des différentes réglementations nationales a entraîné lourdeurs administratives, insécurité juridique et concurrence déloyale. Aujourd’hui, les outils numériques peuvent permettre une plus grande efficacité du contrôle de ces différents aspects, et une meilleure coopération entre les États pour ces échanges d’informations, tant en termes logistiques qu’en matière de contrôle du travail illégal.

Peut-on espérer un déploiement rapide d’outils comme le chronotachygraphe pour faciliter le contrôle des temps de conduite, des repos des conducteurs, et des périodes de cabotage autorisées ? Comment inciter réellement les États membres à adopter la lettre de voiture électronique, aussi appelée e-CMR, qui permet de retracer l’activité réelle du véhicule de manière dématérialisée ?

M. Jean-Marie Sermier. Selon la présidente de la commission des transports et du tourisme du Parlement européen, « les propositions de la Commission sont de la plus haute importance car elles font écho à deux défis majeurs en Europe : la réduction de la pollution et le dumping social qui déchire le continent d’est en ouest ».

Pour les députés Les Républicains, il est indispensable d’arrêter la fragmentation du marché du transport routier des marchandises en Europe, et d’établir des conditions de concurrence légales et loyales.

Nous reconnaissons que le premier paquet Mobilité de la Commission comporte certainement des avancées, comme l’encadrement des véhicules utilitaires légers, ou la lutte contre les sociétés « boîtes aux lettres ». Toutefois, les problèmes du cabotage et du détachement des travailleurs persistent.

Il faut non seulement continuer de lutter contre la concurrence déséquilibrée et les pratiques frauduleuses, mais aussi intégrer davantage le secteur des transports routiers dans l’Union européenne par l’harmonisation des règles relatives à la protection sociale.

Pour nous, il est prioritaire d’en finir avec l’absence de régulation, et de combattre cette concurrence. Nous soutenons en conséquence les propositions de régulation au niveau européen concernant les VUL, qui comportent en particulier : la transposition des conditions d’accès à la profession de transport léger française, au niveau européen ; la transposition aux VUL des règles du détachement et du cabotage ; l’interdiction du repos en cabine, et la mise en place d’un système de suivi des temps de conduite pour le transport léger international.

Pour ce qui est du détachement des travailleurs, les professionnels du secteur routier nous expliquent que la réglementation du détachement de salariés n’est pas adaptée à une activité mobile comme la leur, et qu’il faudrait lui préférer un régime européen du travailleur mobile pour parvenir à une meilleure égalité de concurrence. Mais, si nous ne faisons rien, le temps d’en discuter et de mettre ce régime en place, nos entreprises continueront à se faire laminer par leurs concurrents étrangers, moins chers et moins contraints.

Le détachement n’est pas parfait. Il est lourd administrativement, et son contrôle doit être amélioré, notamment s’agissant du paiement effectif du salaire français à des conducteurs européens ayant réalisé soit un cabotage soit un transport international sur le territoire français. Ce ne peut qu’être un régime transitoire, dans l’attente de dispositions spécifiques au secteur des transports, qui doivent passer par une harmonisation préalable des règles fiscales et sociales afin de créer un système de concurrence loyale.

Le cabotage doit être mieux encadré. Il est urgent de réduire la période de cabotage à trois jours et mettre en place un délai de carence entre deux périodes.

En conclusion, le groupe Les Républicains soutient cette proposition de résolution européenne qui reprend nos propres priorités pour aboutir à des conditions d’égalité de concurrence dans le secteur européen du transport des marchandises, et défendre nos entreprises soumises depuis trop longtemps à une concurrence déloyale.

Mme Aude Luquet. Le paquet Mobilité présente des avancées utiles pour structurer le secteur routier, comme la volonté d’encadrer l’utilisation des véhicules utilitaires légers, la lutte contre les sociétés « boîtes aux lettres » ou l’instauration d’un principe « pollueur-payeur ». Il n’en reste pas moins que certaines mesures ne vont pas encore assez loin ou se révèlent inquiétantes.

La France se doit de défendre une concurrence saine et loyale. Elle ne peut accepter des régressions par rapport au droit existant. Les points de divergence avec la Commission européenne portent notamment sur le cabotage, le détachement des travailleurs ou encore le repos en cabine, autant de sujets qui nécessitent un cadre clair et renforcé.

Concernant les règles encadrant le cabotage, il est impératif de trouver un compromis acceptable pour le transport routier au niveau européen si nous voulons éviter des distorsions de concurrence. La France ne peut accepter ni la suppression de la limite du nombre de livraisons en période de cabotage, ni une période de carence de seulement deux jours entre deux périodes de cabotage de cinq jours. En faussant la concurrence, ces dispositions risquent de déstabiliser un peu plus les entreprises locales.

Le groupe MODEM et apparentés est donc favorable à l’instauration d’une période de carence d’au moins vingt et un jours entre deux périodes de cabotage, au maintien d’un nombre maximal d’opérations hebdomadaires, et à la suppression de la possibilité de caboter dans les États membres limitrophes.

S’agissant des règles relatives aux temps de conduite et de repos, des conditions sociales dignes et des conditions de sécurité strictes doivent être garanties aux conducteurs, notamment en obligeant l’employeur à leur fournir un hébergement décent pour la prise du repos hebdomadaire, et à leur accorder un droit de retour au domicile ou à un lieu de leur choix, au moins toutes les trois semaines.

Si des règles strictes sont nécessaires, elles ne suffisent pas. La pertinence d’une règle n’a de sens que si son contrôle est effectif, et si les abus sont sanctionnés. Aujourd’hui, les contrôles sont insuffisants et les documents de transport sur des supports papier ne facilitent pas les choses. Il est impératif d’accélérer le développement et la généralisation des tachygraphes intelligents contrôlables à distance, et l’utilisation de la lettre de voiture électronique.

De plus, il reste surprenant de constater que le projet de réforme du paquet Mobilité n’apporte aucune réponse concrète à la question de l’efficience des contrôles. Le texte propose tout juste des objectifs de contrôle dérisoires, en fixant un seuil minimal de contrôle des transports de cabotage de 2 % en 2020, et 3 % en 2022.

En conséquence, il nous semble pertinent de proposer le renforcement de l’efficience des contrôles, un raccourcissement de la période de transition du déploiement des tachygraphes intelligents, ainsi qu’un durcissement des exigences d’arrêt au passage des frontières pour les camions équipés de tachygraphes analogiques ou digitaux.

Pour conclure sur l’aspect écologique du paquet Mobilité, nous soutenons les principes « utilisateur-payeur » et « pollueur-payeur », qui passent par une modulation des péages non plus basée sur les normes EURO, mais sur les émissions de CO2, données rendant mieux compte de l’impact écologique des véhicules. Comme le souligne la proposition de résolution européenne, il est souhaitable qu’au moins une partie de la taxation sur les véhicules soit clairement affectée au développement de modes de transports alternatifs.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe MODEM et apparentés soutient cette proposition de résolution européenne.

M. Guy Bricout. Présenté en mai dernier, le premier volet du paquet Mobilité traite de sujets très variés comme le détachement, le cabotage, et la tarification. La proposition de résolution européenne présentée par le rapporteur se situe dans la droite ligne de la position exprimée par le Gouvernement. Le groupe UDI, Agir et Indépendants est en accord avec la plupart des constats qu’elle dresse, y compris de façon sévère.

Sur le détachement, l’accord obtenu en octobre est relativement bancal. En effet, les règles encadrant le détachement s’appliqueront bien au transport routier, mais uniquement lorsque de nouvelles dispositions auront été fixées dans ce paquet Mobilité. Il est donc extrêmement important de ne pas perdre de vue les aspects sociaux, en particulier en termes de temps de repos.

Sur le cabotage, les contre-propositions de M. le rapporteur nous semblent intéressantes. Le fait qu’une entreprise étrangère puisse effectuer un nombre illimité d’opérations dans l’un des États membres pendant cinq jours nous semble problématique. Plus qu’une libéralisation, on nous propose une dérégulation du cabotage.

Sur ces deux sujets, nous ne nous voilons pas la face : deux Europe s’opposent. Les modifications des règles actuelles ne sont acceptables que dans le cadre d’une concurrence loyale et adaptée au secteur routier. Les entreprises françaises concernées ne peuvent pas être exposées à un dumping qui leur serait préjudiciable.

Enfin, sur la tarification, si une harmonisation est nécessaire, il faut que chaque pays puisse conserver une marge de manœuvre. Je ferai deux remarques à ce sujet. En matière de transition énergétique, la Commission européenne estime que les redevances d’infrastructures sont plus efficaces que les taxes, puisqu’elles ouvrent la voie à une baisse de ces dernières, or, en France, nous avons tendance à faire les deux à la fois. Certains voient parfois la tarification, en particulier l’écotaxe régionale, comme un moyen de financer les infrastructures. Le groupe de travail dédié lors des Assises de mobilité avait d’ailleurs suggéré cette piste. En revanche, dans les Hauts-de-France, elle a été collectivement écartée dans le cadre du financement du canal Seine-Nord Europe – il fallait bien que j’en parle. Dans certaines régions, une telle taxe pèserait réellement sur le tissu économique local. Là encore, il faut des marges de manœuvre, mais, cette fois, elles doivent être infranationales.

Monsieur le rapporteur, compte tenu de vos recommandations, êtes-vous optimiste sur la suite de négociation ?

M. Christophe Bouillon. Tout part d’un constat : le fractionnement réglementaire et le dumping social dans le secteur des transports routiers de marchandises ont conduit à un transfert géographique des entreprises concernées de la partie occidentale de l’Europe vers sa partie centrale et orientale. Dans l’attente du vote du paquet Mobilité, la directive générale sur le détachement de 1996 s’applique aux transporteurs routiers. Ce cadre juridique est notoirement complexe et dépassé.

Dans cet objectif, le paquet Mobilité a été présenté en mai 2017 par la Commission. Il couvre plusieurs textes législatifs de base qui forment l’ossature d’un cadre réglementaire européen pour le secteur routier. Les enjeux sont multiples : cabotage, temps de repos, contrôle, etc. L’issue des négociations sur ce paquet aura des effets sur le secteur routier au moins pour les vingt prochaines années.

Ce texte, qui traite plusieurs aspects, comporte en particulier un volet « marché et social ». Le transport routier de marchandises est à la fois soumis à la liberté de circulation et d’établissement, et à des règles spécifiques communes d’exercice – établissement stable, conditions d’honorabilité, capacité financière, capacité professionnelle. Les lacunes dans les contrôles ont conduit à de trop nombreux abus, notamment celle des sociétés dites « boîtes aux lettres ». La Commission a donc souhaité durcir les deux critères relatifs à l’établissement et à l’honorabilité.

Les grandes lignes de la position française sont issues du travail effectué lors de la précédente législature. Le secrétaire d’État chargé des transports, M. Alain Vidalies, avait œuvré pour constituer à l’échelle européenne une coalition des pays favorables à la régulation : l’Alliance du routier. Les positions de la Commission mettent en exergue, pour le détachement comme pour le cabotage, la nécessité de lutter contre toute libéralisation accrue d’un secteur déjà sous forte tension. C’est une bonne chose !

J’insiste sur ces deux dimensions : l’harmonisation des règles, et le caractère contraignant de leur application. Les règles doivent s’appliquer dès le premier jour, et il faut renforcer les critères d’établissement.

Le paquet Mobilité révise également la directive Eurovignette. Cette révision va dans le sens d’une application plus stricte des principes « utilisateur-payeur » et « pollueur-payeur ». Elle vise à les étendre à tous les véhicules à quatre roues et à supprimer la possibilité de choix entre un système de tarification à la distance, par péage, ou à la durée, par l’acquittement d’une vignette, en privilégiant la distance. Elle permet aussi aux États membres de supprimer les taxes sur les véhicules, et de flécher les nouvelles recettes vers les infrastructures de transport.

Ce débat est d’actualité, alors que le rapport du Conseil d’orientation des infrastructures comporte dans son chapitre 4, dédié au financement, un appel à la redéfinition d’un accord entre maîtres d’ouvrage et usagers, pour financer les infrastructures.

L’échec de l’écotaxe a posé plusieurs questions relatives à l’acceptabilité des dispositifs de financement des infrastructures, et aux modalités de conception des dispositifs de financement des infrastructures.

Il faut aujourd’hui une tarification à la distance, obligatoire, élargie et homogène, dans un délai plus rapide, comme le souhaite la rapporteure du Parlement européen sur le sujet, Mme Christine Revault d’Allonnes-Bonnefoy. Nous avons déposé des amendements en ce sens.

M. Loïc Prud’homme. Vous ne serez pas surpris que je ne partage pas totalement les positions exposées jusqu’à maintenant, mis à part celle de notre collègue membre du groupe Nouvelle Gauche, qui vient de s’exprimer.

Une nouvelle fois, nous sommes confrontés à la philosophie générale de l’Union européenne, qui consiste à tenter d’amender les choses à la marge du paradigme fondateur de la libre concurrence prétendument non faussée. Il suffit de s’intéresser à la problématique des travailleurs détachés pour constater que l’on ne nous propose qu’un habillage, car le dumping se poursuit, qu’il soit social ou environnemental. Finalement, c’est business as usual, comme vous dites !

Nous continuons aussi notre chemin avec une Commission qui tourne le dos à l’Accord de Paris en proposant des objectifs de réduction de CO2 bien trop faibles, qui viennent bien trop tard. De nombreuses associations ont relevé cet effet délétère.

Si les émissions de gaz à effet de serre dans l’Union européenne ont globalement diminué de 23 % entre 1990 et 2016, celles du secteur des transports sont en hausse de 20 % pour la même période. Il est clair que le secteur routier pose un problème de cohérence et que, par exemple, les mesurettes que vous proposez ne permettront en aucun cas au fret ferroviaire de redevenir compétitif.

La Commission européenne ne parle jamais des « externalités négatives » des transports routiers. Chaque année, sur notre territoire, ils nous coûtent 101 milliards d’euros en pollution de l’air. Ils ont aussi un coût social considérable avec 48 000 morts sur nos routes. Ces dimensions sont occultées pour satisfaire aux principes de la concurrence libre et non faussée et permettre le déménagement du monde d’un bout à l’autre de l’Europe et de la planète.

Tout cela ne me semble pas aller dans le sens d’une amélioration des conditions de travail ni d’une harmonisation sociale et environnementale qui est pourtant un impératif majeur dans la période actuelle.

M. le rapporteur. Je commencerai par répondre au dernier orateur. Monsieur Prud’homme, je suis étonné que vous ne partagiez pas les positions exprimées par votre collègue du groupe La France insoumise, le 8 février dernier, lors de la réunion de la commission des affaires européennes de l’Assemblée. A priori, il y a quelques dissonances au sein de votre groupe !

Je ne partage évidemment pas vos positions. Aujourd’hui, s’applique un principe de libre circulation des biens et des personnes. Le seul moyen d’y renoncer serait de sortir de l’Europe. Peut-être s’agit-il de votre projet ; en tout cas, ce n’est pas le mien ! Dès lors, nous allons tenter de réguler cette concurrence : c’est notre objectif. Si vous souhaitez le faire avec nous, vous feriez mieux de soutenir la proposition de résolution européenne que nous examinons.

S’agissant des objectifs en matière de CO2, je suis tout à fait d’accord avec vous. Je tiens seulement à rappeler que le paquet Mobilité I se décline en trois volets : « économique et social », « simplification et numérisation des procédures et des contrôles », et « tarification des infrastructures ». Toutes les questions environnementales sont abordées dans un paquet Mobilité II, c’est-à-dire dans un autre texte, ce qui explique que je n’en ai pas beaucoup parlé.

Vous citez les externalités négatives. Je vous invite à lire le texte de notre proposition de résolution européenne : vous constaterez qu’elles sont prises en compte, en particulier pour construire le dispositif « Eurovignette » de tarification des infrastructures.

Mme Abba m’a interrogé concernant les moyens de contrôler le cabotage. Ils sont doubles.

Il y a tout d’abord le tachygraphe intelligent – dont nous souhaitons la mise en place le plus rapidement possible. Nos homologues des pays du bloc de Visegrád considèrent qu’un accord a déjà été trouvé pour 2034 et qu’on ne doit pas revenir dessus. Cela étant, cette date est très éloignée et il est possible de faire du rétrofit sur les chronotachygraphes des pays de l’Est où le parc de véhicules est plus vieillissant. Le coût d’installation d’un tachygraphe intelligent étant relativement faible – de 700 à 800 euros –, nous essayons de faire en sorte que ce dispositif soit déployé au plus vite. La date de 2023 me semblerait la bonne.

Il y a ensuite l’e-CMR – qui est déjà en train d’être testé entre la France et l’Espagne et qui fonctionne bien. Le déploiement de ce système est souhaité au niveau européen mais il fait aussi consensus au sein des États membres. Les Roumains se disent ainsi prêts à l’utiliser mais souhaiteraient que les Français les accompagnent dans son déploiement.

Ainsi, les négociations en cours vont globalement dans le bon sens. Ayant assisté à des contrôles à Paris, j’ai pu constater que le tachygraphe intelligent allait induire une évolution importante : il va nous permettre de savoir en temps réel si un camion est ou non en infraction.

J’ai été interrogé concernant l’efficience des contrôles : si on arrive à mieux cibler ces derniers, grâce au chronotachygraphe intelligent, sur des véhicules potentiellement en infraction, ce sera déjà une avancée. D’une part, parce qu’un contrôle prend du temps – à peu près une heure et demie pour un poids lourd – et d’autre part, parce qu’il nécessite du personnel et représente donc des coûts.

Vous avez été plusieurs à souligner la nécessité de mieux encadrer l’usage des véhicules utilitaires légers. On a la volonté de durcir les règles de concurrence applicables aux différents acteurs du marché dans le cadre du paquet Mobilité mais si l’on n’applique pas ces règles aux VUL, leur nombre risque d’exploser. Théoriquement, ces véhicules ne sont pas du tout compétitifs mais un tel flou réglementaire les entoure, notamment en matière de temps de conduite – certains chauffeurs roulant en surcharge et jusqu’à 90 heures par semaine sans que les forces de l’ordre aient les moyens de les contrôler – qu’ils finissent par devenir compétitifs. La multiplication des VUL aurait des effets très négatifs sur les plans environnemental et social – certains chauffeurs dormant dans leur capucine, juste au-dessus de leur cabine, sans chauffage, et prenant leur douche avec des jerricanes à l’arrière de leur camion. On ne peut plus accepter de telles conditions de travail en 2018.

M. Bouillon a évoqué la possibilité d’instituer une eurovignette dont la tarification serait fondée sur un calcul de la distance parcourue. Je préfère pour ma part qu’on laisse aux États membres la liberté de choisir entre une tarification à la distance et une tarification à la durée. Le dispositif « Eurovignette » déjà en place n’est d’ailleurs guère un succès, étant jugé insuffisamment flexible.

M. Thierry Michels. Monsieur le rapporteur, vous soulignez dans votre rapport que la contribution du secteur des transports aux émissions de gaz à effet de serre a augmenté de 16 % entre 1990 et 2015. Parmi les différents modes, le transport routier est le premier contributeur à ces émissions. Si cette évolution est liée à l’augmentation de la demande de transport, elle reflète également le besoin de renforcer les politiques de mobilité durable dans l’Union européenne et dans les États membres au regard des objectifs climatiques. Je me félicite donc que le paquet Mobilité présenté par la Commission européenne comporte des dispositions fortes en faveur du climat. Il est notamment positif de renforcer l’application du principe pollueur-payeur en intégrant davantage les externalités négatives dans le calcul de la tarification de l’usage des infrastructures routières. Nous avons tous en mémoire les fortes résistances qu’a suscitées le projet d’écotaxe en France alors même qu’en Allemagne, un tel dispositif existe et est accepté. Comment surmonter les principales différences entre les États pour converger vers des mesures ambitieuses en faveur du transport durable ?

M. Jean-Yves Bony. Monsieur le rapporteur, votre proposition de résolution semble faire la quasi-unanimité mais la voix de la France sera difficile à faire entendre. Un certain consensus se dégage néanmoins en faveur de la lutte contre les entreprises « boîtes aux lettres ». Comment comptez-vous faire pour lutter contre ces sociétés créées pour contourner les normes européennes ? Quels sont les critères restrictifs et les moyens mis en œuvre pour renforcer ces contrôles ?

Mme Zivka Park. Ma question portera également sur les « boîtes aux lettres », ces sociétés qui ont recours à des travailleurs détachés pour contourner les règles sociales et le droit du travail. Le transport routier est un exemple de secteur faisant l’objet d’un dumping social au sein de l’Union européenne. Pensez-vous que la proposition de la Commission européenne de durcissement des conditions d’établissement d’une entreprise de transport dans un État membre soit plus efficace pour lutter contre la concurrence déloyale qui sévit dans ce secteur qu’un alignement des conditions de travail des travailleurs détachés sur celles des travailleurs locaux qui, jusqu’à présent, a été combattu, notamment par les pays de l’Est ?

M. Martial Saddier. L’Union européenne vient de lancer une quinzaine de précontentieux contre plusieurs États membres concernant les NOx et les particules fines PM10. Nous serions donc bien inspirés de faire en sorte, d’ici à la séance publique, que cette proposition de résolution européenne prenne en compte l’ensemble des enjeux de la qualité de l’air et non seulement le CO2 et le réchauffement climatique.

D’autre part, je voudrais soutenir votre proposition consistant à avancer à 2023 la date-butoir d’installation du tachygraphe intelligent. Étant député de la Haute-Savoie et donc du tunnel du Mont-Blanc, je peux vous dire que les poids lourds les plus anciens, qui ne sont pas équipés d’un tachygraphe automatique, sont les plus dangereux – ce sont même quelquefois des bombes roulantes – et les plus polluants.

M. Benoit Simian. La Commission européenne entend faire évoluer le dispositif européen de tarification de certains axes routiers afin de permettre aux États membres d’atteindre les objectifs climatiques de l’Accord de Paris. Monsieur le rapporteur, vous partagez l’ambition de la Commission en la matière mais vous estimez qu’il faut veiller à prendre en compte la diversité des États membres, ce dont je me réjouis. Les Espagnols ont récemment mis en place une écotaxe au Pays basque espagnol qui a été acceptée sans heurt. Que pensez-vous de la mise en place d’une redevance kilométrique régionalisée en France qui pourrait notamment servir à financer les grands projets d’infrastructure – comme le Grand projet ferroviaire du sud-ouest (GPSO) – afin de faire plus de fret ferroviaire vers l’Espagne, ou à financer plus de transports quotidiens, notamment sur nos lignes régionales ?

M. Vincent Descoeur. Je salue vos propositions de bon sens et de nature à lutter contre la dérégulation de ce secteur, qui passe notamment par le cabotage et le recours aux véhicules utilitaires légers. J’ai bien entendu vos propos sur le tachygraphe intelligent. Ma question rejoint celle qu’a posée Martial Saddier sur le calendrier de mise en place du tachygraphe intelligent qui, de toute évidence, ne peut être celui qui avait été initialement annoncé. Je m’interroge aussi sur les moyens qui peuvent être mis en œuvre pour s’assurer demain du strict respect de ces dispositions.

M. Adrien Morenas. Au cœur du dispositif du paquet Mobilité relatif aux péages et aux droits d’usage, il est préconisé de rendre obligatoire la modulation de redevances d’infrastructures en fonction des émissions de CO2 sur les poids lourds à partir de 2021 et en fonction des émissions de CO2 et des normes EURO pour les véhicules légers. Vous avez, en tant que rapporteur, jugé pertinent le nouveau dispositif proposé et je vous rejoins volontiers dans votre analyse. Cependant, il faut que les sociétés concessionnaires d’autoroutes remplissent leur part du marché. La Commissaire européenne chargée des transports, Mme Violeta Bulc, voudrait leur imposer le recours à un système de télépéages européen unifié. Ce changement aurait un coût que les autoroutes seraient tentées, j’imagine, de répercuter sur leurs clients usagers. N’oublions pas qu’un nombre conséquent de nos concitoyens ne peuvent pas opter pour une mobilité moins carbonée. Pour des raisons financières, il serait bon de leur éviter une potentielle double peine, vécue comme de l’écologie punitive. Quelles seraient d’après vous les solutions à prévoir afin d’éviter aux Français de subir financièrement ce changement salutaire pour notre planète ?

M. Jean-Pierre Vigier. Cette proposition de résolution européenne, si elle va dans le bon sens, ne va pas assez loin s’agissant du cabotage réalisé par les transporteurs routiers qui viennent notamment des pays de l’Est. Il aurait fallu appliquer des mesures plus restrictives en ce domaine. Il convient de limiter au maximum ce cabotage et d’augmenter le plus possible la période de carence entre deux cabotages. Le cabotage n’est en effet rien d’autre qu’une forme de concurrence déloyale vis-à-vis des transporteurs routiers français. Il ne faut pas oublier que ce sont ces derniers qui créent de l’emploi en France et qui font vivre nos familles. Le précédent Gouvernement voulait mettre en place une écotaxe applicable à l’ensemble des transporteurs routiers. Cette écotaxe ne pourrait-elle pas s’appliquer au cabotage réalisé par ces transporteurs routiers venant des pays de l’Est afin d’éviter cette concurrence totalement déloyale ?

M. le rapporteur. Plusieurs questions m’ont été posées quant à la possibilité d’instaurer une nouvelle écotaxe. Cette solution n’est pas dans les objectifs de la Commission européenne. Il s’agit bien dans ce paquet Mobilité de tarification des infrastructures et nous souhaitons garder une certaine souplesse à ce texte. Rappelons-nous le contexte dans lequel avait été instituée l’écotaxe en France. Tout d’abord, la prise de décision politique a été très longue puisque l’idée a été lancée en 2007. En 2011, le dispositif était prêt mais les élections approchant, sa mise en application a été repoussée. Par la suite, l’action des « bonnets rouges » couplée à un certain manque de courage ont fait que nous sommes probablement passés à côté de l’occasion d’avoir une tarification des infrastructures et de faire en sorte que l’ensemble des utilisateurs de la route et des pollueurs soit soumis à une mesure incitative. Aujourd’hui, le contexte est différent. La nécessité de dégager des moyens pour financer nos infrastructures est davantage prise en compte. Nos transporteurs prennent quant à eux davantage en considération la nécessité d’avoir un parc de véhicules plus vert et plus moderne, ce qui implique le passage de ces derniers au gaz naturel pour véhicule (GNV) et au bio-GNV – solution que beaucoup retiennent tant elle est pragmatique.

Vous m’avez interrogé concernant les sociétés « boîtes aux lettres » et le durcissement de leurs conditions d’établissement. L’une des mesures que je soutiens consiste à obliger toute société de transport à avoir un parking d’un volume correspondant au nombre de véhicules qu’elle est censée détenir. On constate en effet que des personnes seules se lancent depuis leur domicile dans une forme de courtage pour aider au détachement.

Monsieur Saddier, je partage tout à fait votre position concernant les PM10 et les NOx. Nous réfléchirons à la rédaction d’un amendement en vue de la séance publique.

Monsieur Simian, selon moi, une écotaxe doit, comme son nom l’indique, avoir une visée avant tout incitative sur le plan environnemental et non pas pour objectif premier de financer des infrastructures. En outre, elle doit prendre en compte les émissions non seulement de CO2 mais aussi de particules fines. Surtout, laissons déjà l’Union européenne nous offrir la possibilité de faire nos choix et discutons de ces derniers au sein de notre assemblée. Des Assises de la mobilité ont eu lieu. Un projet de loi d’orientation des mobilités sera en outre examiné par notre commission d’ici à quelques semaines. Nous aurons donc l’occasion de discuter de la régionalisation ou pas de notre dispositif ainsi que du niveau auquel on souhaite placer les autorités organisatrices de la mobilité (AOM).

S’agissant du tachygraphe intelligent, le respect de la réglementation suppose effectivement un renforcement des contrôles. Cela étant, les tachygraphes doivent être contrôlés tous les un ou deux ans, ce qui peut aussi donner l’occasion de repérer les véhicules qui ne seraient plus aux normes. Au bout d’un certain temps, les transporteurs seront automatiquement équipés de ces tachygraphes intelligents, lorsqu’ils acquerront des véhicules neufs.

La commission en vient à l’examen de la proposition de résolution.

 


—  1  —

II.   examen de L’article unique

Article unique

La commission est saisie de l’amendement CD1 de M. Christophe Bouillon.

M. Christophe Bouillon. Cet amendement vise à soutenir l’approche promue par la rapporteure du Parlement européen, Mme Christine Revault D’Allonnes Bonnefoy, qui procède à l’élargissement de la taxation aux véhicules concernés ainsi qu’aux réseaux concernés et consacre l’obligation et non plus la faculté de remplacer le système de vignette par une tarification fondée sur la distance parcourue. En effet, seule une tarification de ce type permet de tenir réellement compte des émissions de gaz à effet de serre et autres polluants de chaque véhicule. La rapporteure du Parlement européen souhaite ainsi, ni plus ni moins, être fidèle aux objectifs fixés par le Livre blanc européen sur les transports.

M. le rapporteur. Votre exposé des motifs fait référence aux positions de la rapporteure du Parlement européen, à une taxation des deux-roues et aux systèmes de péage. Or, il n’est fait mention dans le dispositif de votre amendement ni des deux-roues ni des péages. Vous proposez que la taxe à l’essieu et ses équivalents dans les autres États soient imposés de manière uniforme dans l’ensemble de l’Union européenne mais il n’appartient pas à cette dernière d’uniformiser l’impôt. La compétence des États doit être respectée.

Deux éléments doivent être pris en considération.

Il convient tout d’abord d’être pragmatique et de prendre en compte l’acceptabilité du système non seulement par les États membres mais aussi par les utilisateurs. Je suis favorable à l’extension du champ des véhicules concernés pour prendre en compte tous les véhicules ayant un impact significatif sur les infrastructures routières et sur la pollution de l’air. En revanche, le problème de cette tarification kilométrique est que l’article 7, alinéa 2, de la directive Eurovignette interdit aux États d’imposer cumulativement des péages et des droits d’usage pour une catégorie de véhicule donnée, pour l’utilisation d’un même tronçon de route, à l’exception du franchissement de ponts, de tunnels et de cols. Ces dispositions rendraient problématique, juridiquement, l’introduction de l’écotaxe poids lourds sur les autoroutes à péages.

Surtout, notre principale divergence concerne l’interdiction d’une tarification à la durée au bénéfice d’une tarification à la distance. Lorsqu’on met en place un dispositif légal, on doit prendre en compte les mesures qui ont été prises auparavant, l’effet qu’elles ont produit, l’opinion de nos concitoyens à leur sujet et vérifier si l’objectif encouru a été atteint. Le constat est clair. En 2017, la moitié des États membres soit ne disposait d’aucun système de tarification des infrastructures pour les poids lourds – c’était le cas de Chypre, de l’Estonie, de la Finlande et de Malte – soit avait un système de vignette fondée sur le temps – c’était le cas dans neuf États. Depuis 2011, très peu de pays ont fait le choix de faire payer la pollution, qu’elle soit sonore ou atmosphérique. Seules l’Autriche et l’Allemagne ont utilisé cette possibilité. La Commission européenne a elle-même reconnu que si aussi peu d’États membres avaient fait ce choix, c’est que les conditions prévues étaient trop complexes et trop rigides. Or, vous proposez de les rigidifier encore davantage en imposant un système unique, kilométrique. Cela ne me semble pas pertinent. Avis défavorable.

M. Christophe Bouillon. Je maintiens mon amendement. Ce qui compte, c’est d’être efficace en matière de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. Démonstration a été faite – vous ne le contestez pas – que ce système de péage à la distance est le plus efficace en la matière. On ne tiendra pas les objectifs de lutte contre le changement climatique à l’échelle de l’Europe si on ne recourt pas aux moyens appropriés.

La commission rejette l’amendement CD1.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD6, CD4 et CD5 du rapporteur.

Ensuite, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CD2 et CD3 de M. Christophe Bouillon.

Enfin, elle adopte l’article unique, modifié.

*

La commission adopte la proposition de résolution européenne ainsi modifiée.

*

 

 


1

   Texte de la proposition de résolution européenne
adopté par la commission des affaires européennes

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 90 et 91 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu le règlement (CE) nº 561/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, modifiant les règlements (CEE) no 3821/85 et (CE) no 2135/98 du Conseil et abrogeant le règlement (CEE) no 3820/85 du Conseil,

Vu le règlement (CE) nº 1071/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes sur les conditions à respecter pour exercer la profession de transporteur par route et abrogeant la directive 96/26/CE du Conseil,

Vu le règlement (CE) nº 1072/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l’accès au marché du transport international de marchandises par route,

Vu le règlement (UE) nº 165/2014 du Parlement européen et du Conseil du 4 février 2014 relatif aux tachygraphes dans les transports routiers, abrogeant le règlement (CEE) no 3821/85 du Conseil concernant l’appareil de contrôle dans le domaine des transports par route et modifiant le règlement (CE) no 561/2006 du Parlement européen et du Conseil relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route,

Vu la directive 96/71/CE du 16 décembre 1996 du Parlement européen et du Conseil concernant le détachement des travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services,

Vu la directive 1999/62/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures,

Vu la directive 2002/15/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 relative à l’aménagement du temps de travail des personnes exécutant des activités mobiles de transport routier,

Vu la directive 2004/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 concernant l’interopérabilité des systèmes de télépéage routier dans la Communauté,

Vu la directive 2006/1/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 janvier 2006 relative à l’utilisation de véhicules loués sans chauffeur dans le transport de marchandises par route,

Vu la directive 2006/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant les conditions minimales à respecter pour la mise en œuvre des règlements du Conseil (CEE) no 3820/85 et (CEE) no 3821/85 concernant la législation sociale relative aux activités de transport routier et abrogeant la directive n° 88/599/CEE du Conseil,

Vu la directive 2014/67/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à l’exécution de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services et modifiant le règlement (UE) n° 1024/2012 concernant la coopération administrative par l’intermédiaire du système d’information du marché intérieur,

Vu la directive (UE) 2015/413 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2015 facilitant l’échange transfrontalier d’informations concernant les infractions en matière de sécurité routière,

Vu la résolution du Parlement européen du 18 mai 2017 sur le transport routier dans l’Union européenne (2017/2545[RSP]),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 561/2006 en ce qui concerne les exigences minimales relatives aux durées maximales de conduite journalière et hebdomadaire et à la durée minimale des pauses et des temps de repos journalier et hebdomadaire, et le règlement (UE) n° 165/2014 en ce qui concerne la localisation au moyen de tachygraphes (COM[2017] 277 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la surveillance et la communication des données relatives aux émissions de CO2 et à la consommation de carburant des véhicules utilitaires lourds neufs (COM[2017] 279 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1071/2009 et le règlement (CE) n° 1072/2009 en vue de les adapter aux évolutions du secteur (COM[2017] 281 final),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 96/71/CE du 16 décembre 1996 du Parlement européen et du Conseil concernant le détachement des travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services (COM[2016] 128 final),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures (COM[2017] 275 final),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/22/CE quant aux exigences en matière de contrôle et établissant des règles spécifiques en ce qui concerne la directive 96/71/CE et la directive 2014/67/UE pour le détachement de conducteurs dans le secteur du transport routier (COM[2017] 278 final),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’interopérabilité des systèmes de télépéage et facilitant l’échange transfrontière d’informations relatives au défaut de paiement des redevances routières dans l’Union (refonte) (COM[2017] 280 final),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/1/CE relative à l’utilisation de véhicules loués sans chauffeur dans le transport de marchandises par route (COM[2017] 282 final),

Vu la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures (COM[2017] 276 final),

Vu la résolution européenne de l’Assemblée nationale du 6 décembre 2017 sur le détachement des travailleurs au sein de l’Union européenne (T.A. n° 42),

Considérant que, à l’échelle de l’Union européenne comme à celle des États membres, le secteur du transport routier joue un rôle essentiel en faveur de la croissance économique, de l’innovation technologique et de la création d’emplois, et est un acteur majeur de la transition vers une économie décarbonée, ainsi que de la cohésion de l’espace européen né des élargissements successifs ;

Considérant que le marché européen du transport routier de marchandises demeure fragile, voire dégradé, en raison de l’absence d’harmonisation économique et sociale, ainsi que des fortes disparités dans les pratiques et niveaux de contrôle, entre les États membres ;

Considérant que les évolutions technologiques, en particulier la révolution numérique, modifient en profondeur le secteur du transport routier, mais offrent également des opportunités pour améliorer les pratiques tant des acteurs économiques que des États membres ;

Considérant que, si la recherche de la compétitivité de ce secteur est un objectif légitime, elle ne peut se faire au détriment des conditions de vie et de travail des conducteurs mais également des enjeux liés à la sécurité routière, qui affectent tous les citoyens de l’Union européenne ;

Considérant que les externalités négatives liées aux transports routiers ont un impact qui n’est pas négligeable sur la santé et le bien-être des citoyens de l’Union européenne, sur l’économie et l’environnement des États membres ainsi que sur le climat ;

Considérant que l’attractivité et la compétitivité de ce secteur passent par une réforme en profondeur du cadre réglementaire, avec pour objectifs des transports routiers plus durables, plus sûrs, assurant au sein du marché intérieur une concurrence loyale et des conditions équitables aux opérateurs, en particulier les petites et moyennes entreprises, ainsi qu’aux travailleurs de ce secteur ;

1. Est attentive à l’initiative de la Commission européenne visant, d’une part, à modifier le cadre réglementaire applicable au transport routier et, d’autre part, à réviser les règles en matière de tarification des infrastructures ;

2. Souligne toutefois qu’elle en attend une harmonisation par le haut tant des règles applicables aux volets « social » et « marché » que des pratiques des États membres ;

3. Rappelle qu’à ses yeux, les valeurs sur lesquelles est fondée l’Union européenne s’opposent à ce que les salariés de ce secteur soient traités comme des citoyens de seconde classe et que l’égalité de traitement entre les travailleurs au sein du marché intérieur est la condition sine qua non d’une concurrence loyale entre les entreprises européennes ;

4. Indique qu’il importe, dans cette perspective, d’établir de nouvelles règles et, en même temps, de mettre en œuvre de façon effective les moyens de les contrôler, et souligne l’absolue nécessité d’instaurer un système de preuves solide, en veillant en particulier au respect du principe de coopération loyale entre les États membres ;

5. Soutient la révision du cadre européen de taxation des véhicules mais souligne que ce dernier doit, en même temps, être incitatif en instaurant des règles communes et permettre son utilisation de la manière la plus adaptée possible aux contextes nationaux ;

Sur l’aménagement des règles relatives au détachement et aux temps de conduite et de repos

6. Refuse que des normes sociales spécifiques dans le transport routier aboutissent à y appliquer des règles plus libérales que pour les autres secteurs économiques ;

7. Apporte donc son plein soutien à la position des autorités françaises en matière de détachement et demande que les règles afférentes à celui-ci s’appliquent dans le secteur des transports routiers dès le début de l’opération de transport, quelle que soit sa nature, y compris pendant les périodes de repos des conducteurs, ces dernières relevant du contrat de travail ;

8. Rappelle la récente décision de la Cour de Justice de l’Union européenne confirmant l’interdiction, au nom de l’amélioration des conditions de travail et de vie des transporteurs routiers ainsi que de la sécurité routière, de prendre à bord du véhicule le repos hebdomadaire normal ; approuve la proposition de la Commission européenne d’interdire clairement la prise du repos hebdomadaire normal en cabine ainsi que l’introduction de l’obligation pour l’employeur d’offrir un hébergement décent et d’un droit au retour du conducteur à son domicile ou à un lieu de son choix a minima toutes les trois semaines ; appelle à une grande vigilance lors des négociations afin que la définition du contenu de ces notions préserve l’effectivité des nouvelles règles ainsi posées ; souhaite que ces dernières soient étendues aux véhicules utilitaires légers (VUL) ;

9. S’inquiète de la flexibilité accrue donnée aux employeurs dans l’organisation du travail de leurs conducteurs grâce à l’assouplissement des règles relatives à la prise de repos réduit, en rappelant la nécessité de placer au premier rang des priorités la sécurité routière et la préservation des conditions de vie et de travail des conducteurs ; juge par conséquent indispensable d’encadrer plus rigoureusement tant le recours au repos hebdomadaire réduit que ses modalités de compensation, en favorisant notamment un repos hors de la cabine et en garantissant le respect des plafonds maximaux de temps de conduite hebdomadaire actuels ;

Sur la révision des règles d’accès au marché et à la profession de transporteur routier de marchandises et de voyageurs

10. Considère que le cabotage remplit une fonction environnementale et économique dans l’intérêt de tous mais juge que les propositions de la Commission européenne aboutissent dans les faits à une libéralisation quasi totale de ce dernier, et appelle en conséquence à :

a) Maintenir un nombre maximum d’opérations et à réduire la période de cabotage autorisée ;

b) Instaurer une période de carence d’au moins vingt-et-un jours entre deux périodes de cabotage, ainsi qu’à supprimer la possibilité de caboter dans les États membres limitrophes ;

c) N’autoriser, comme aujourd’hui, cette activité qu’après le dernier déchargement de la cargaison internationale, pour des raisons environnementales ;

11. Approuve l’extension aux VUL du champ de la réglementation applicable aux transporteurs opérant avec des véhicules lourds, mais note son caractère limité au respect de seulement deux des quatre critères d’accès à la profession de transporteur routier, soit ceux relatifs à l’établissement et à la capacité financière de façon adaptée ; demande, d’une part, que les VUL soient également soumis aux conditions d’honorabilité et de capacité professionnelle et, d’autre part, que leur soit applicable la réglementation relative aux temps de conduite et de repos, sans critère de masse ni de type d’activité, avec les moyens de contrôle adéquats pour éviter les contournements des règles ;

12. Partage la volonté de la Commission européenne de lutter plus efficacement contre les sociétés « boîtes aux lettres » pour rétablir l’équilibre du marché, en renforçant les critères relatifs à la condition d’établissement stable, mais s’interroge sur la proposition, faite simultanément par la Commission européenne, d’assouplir les règles de location de véhicules sans chauffeur hors de l’État d’établissement, compte tenu des biais possibles ; souligne l’intérêt qu’il y aurait à durcir également le critère d’honorabilité ;

Sur les mesures renforçant les contrôles opérés par les États membres tout en encadrant leurs pratiques

13. Est d’avis que la faible coopération administrative entre États membres et les différences entre les systèmes d’évaluation des risques amoindrissent grandement l’efficacité des échanges d’information et, partant, des contrôles ;

14. Juge pertinente l’approche fondée sur le risque, l’harmonisation des contrôles et la promotion des outils numériques, et soutient notamment :

a) La définition au niveau européen de la méthodologie permettant de définir le niveau de risque d’une entreprise, mais aussi une harmonisation de la numérotation des licences communautaires, laissée aujourd’hui à l’appréciation de chaque État membre ;

b) L’inscription dans les registres électroniques nationaux de nouvelles données obligatoires, accessibles en temps réel aux autorités de contrôle des États membres autres que l’État d’établissement ;

c) La simplification des procédures grâce à la numérisation et l’uniformisation de la déclaration de détachement ;

d) Le renforcement des objectifs de contrôle en matière sociale et de cabotage assignés aux États membres, l’obligation imposée aux autorités de contrôle de coopérer pleinement et la définition de délais maximaux de réponse en cas de saisine par une autorité de contrôle d’un autre État membre – tout en s’interrogeant sur le caractère trop limité de certains d’entre eux ;

e) L’amélioration de l’interopérabilité des systèmes de péage, à condition de respecter les systèmes les plus avancés et de garantir une concurrence équitable au sein de l’Union européenne, et la mise en place d’un dispositif transfrontalier de recouvrement des infractions aux péages, particulièrement importante dans la perspective du développement des péages en flux libres ;

15. Juge toutefois que certaines des modalités proposées ne permettront pas d’atteindre les objectifs recherchés et insiste, afin de garantir des vérifications efficaces, pour que :

a) Les États membres conservent la possibilité d’imposer aux entreprises non établies d’avoir un représentant dans l’État membre d’accueil ;

b) Le nombre de jours de données contrôlables et la période de contrôle de la réglementation sur les temps de repos soient augmentés ;

c) Soit prévu un mécanisme de résolution d’un éventuel différend entre deux États membres quant à la transmission effective d’une information ;

d) Les cas d’immobilisation des poids lourds soient élargis aux infractions liées à la non-présentation des documents obligatoires de transport, que les modalités de mise en œuvre des consignations soient simplifiées et que leur montant soit fortement réévalué ;

16. Relève la fragilité de l’enregistrement manuel prévu pour le passage des frontières des véhicules équipés de tachygraphes analogiques ou digitaux ne réalisant pas de relevés automatiques, regrette le caractère excessif du délai de transition octroyé à la flotte existante pour l’équipement en chronotachygraphes intelligents et suggère donc, d’une part, de durcir les exigences d’arrêt au passage des frontières pour les camions équipés des tachygraphes les plus anciens et par conséquent les moins fiables et, d’autre part, de raccourcir de 2034 à 2023 la période de transition ;

17. Souligne que les corps de contrôle des États membres rencontrent des difficultés pour retracer la réelle activité du véhicule en raison notamment de la fragilité du modèle papier des documents de transport (falsification, sanctions pour non-présentation non dissuasives, etc.) et propose de compléter la palette d’outils numériques par l’utilisation de la lettre de voiture électronique (« e-CMR ») et l’instauration d’une obligation de déclaration dématérialisée préalablement à l’exécution de toute opération de cabotage ;

Sur la révision du cadre juridique européen relatif à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certains axes routiers

18. Partage l’ambition de la Commission européenne de faire évoluer le dispositif européen de tarification de certains axes routiers en étendant l’application du principe « utilisateur-payeur » à l’ensemble des véhicules à quatre roues, en accentuant le panel d’outils d’intégration des externalités négatives (pollution sonore ou atmosphérique, congestion, etc.) dans le calcul de la tarification, avec notamment la prise en compte, dans la modulation des péages, outre la distinction entre les classes EURO, des émissions de CO2, compte tenu du poids du secteur du transport dans les émissions de gaz à effet de serre et des efforts à fournir pour respecter les engagements de l’Union européenne ; appelle cependant, sur ce dernier point, à une cohérence accrue entre les différents textes qui encadrent les émissions de CO2 et à une plus grande transparence de la part des constructeurs ;

19. Est aussi d’avis qu’il convient de permettre aux États membres de réduire, voire de supprimer plus rapidement les taxes sur les véhicules, dont l’inefficacité, par rapport à la tarification des infrastructures, est avérée ;

20. Considère toutefois que la diversité des situations des États membres exige une approche plus souple et proportionnée, ces derniers devant garder la responsabilité de choisir les solutions les plus efficaces et les plus adaptées à leur contexte ;

21. S’oppose en particulier à l’interdiction totale faite aux États membres de continuer à pouvoir choisir entre des systèmes de vignette (basés sur la durée d’utilisation du réseau) et des péages (basés sur la distance parcourue) par la mise en extinction des premiers, et appelle à préserver, dans des conditions strictement définies, l’option de la tarification basée sur la durée ; est également défavorable à ce que la mobilisation de ces nouveaux outils générateurs de financement entraîne la remise en cause des concessions autoroutières existantes ;

22. Considère que l’acceptabilité sociale de ce cadre européen de taxation des véhicules dans les États membres serait grandement facilitée par des mécanismes d’affectation, au bénéfice des transports, des ressources issues de cette tarification rénovée, de façon souple, en particulier pour la promotion du report modal qui doit être possible quel que soit le lieu soumis à tarification ; souhaite à ce titre une plus grande latitude dans l’utilisation de l’outil du surpéage pour développer d’autres modes de transports.

 


([1]) Rapport d’information n° 657 de M. Damien Pichereau sur le premier paquet mobilité (8 février 2018).

([2]) Directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures.

([3]) Une version consolidée de la directive est publiée sur le site du Journal Officiel de l’Union européenne :

http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:01999L0062-20160401&rid=1

([4]) Cette possibilité a été concrétisée par le Danemark, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suède, qui ont créé ensemble un système appelé « système Eurovignette » applicable aux poids lourds de plus de 12 tonnes circulant sur les autoroutes.

([5]) Le réseau routier transeuropéen a été défini en 1996 (cartes annexées à la décision n° 1692/96/CE du Parlement européen et du Conseil) puis révisé en 2013.

([6]) La proposition de directive regroupe donc au sein de la notion de « véhicule utilitaire lourd » les poids-lourds de masse supérieure à 3,5 tonnes destinés au transport de marchandises et les autocars ou autobus destinés au transport de passagers et de masse supérieure à 3,5 tonnes. La notion de « véhicule utilitaire léger », quant à elle, regroupe les voitures particulières, les minibus et les camionnettes.

([7]) La proposition introduit en conséquence dans la directive une définition de la congestion : « situation dans laquelle les volumes de trafic sont proches de la capacité des axes routiers ou la dépassent ».

([8]) Par exemple, pour les véhicules utilitaires légers, le niveau maximal de la redevance de congestion est fixé à 67 cents/véhicule-kilomètre dans les aires métropolitaines et à 34 cents/véhicule-kilomètre sur les axes routiers non métropolitains (annexe VI de la proposition de la Commission européenne).

([9]) Un autre texte du premier « paquet mobilité » propose d’organiser la collecte et la transmission des données relatives aux émissions de CO2, calculées pour chaque véhicule utilitaire lourd produit – voir infra. Par ailleurs, le deuxième paquet mobilité (présenté en novembre 2017) propose de nouveaux objectifs de réduction des émissions moyennes de CO2 de l’ensemble de la flotte de véhicules légers.

([10]) Règlement (CE) n° 443/2009 du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 établissant des normes de performance en matière d’émissions pour les voitures particulières neuves dans le cadre de l’approche intégrée de la Communauté visant à réduire les émissions de CO2 des véhicules légers.

([11]) Règlement (UE) 2017/2400 du 12 décembre 2017 portant application du règlement (CE) n° 595/2009 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne la détermination des émissions de CO2 et de la consommation de carburant des véhicules utilitaires lourds et modifiant la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil ainsi que le règlement (UE) n° 582/2011 de la Commission.

([12]) Proposition de règlement du Parlement et du Conseil concernant la surveillance et la communication des données relatives aux émissions de CO2 et à la consommation de carburant des véhicules utilitaires lourds neufs (COM(2017)279 final – 31 mai 2017).

([13]) En particulier, de nouvelles normes applicables aux véhicules légers après 2020 figurent dans le deuxième « paquet mobilité », présenté par la Commission en novembre 2017.

([14]) Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1071/2009 et le règlement (CE) n° 1072/2009 en vue de les adapter aux évolutions du secteur (COM(2017) 281 final – 31 mai 2017).

([15]) Rapport de M. Wim van de Camp (PPE – Pays-Bas), rapporteur de la commission des transports et du tourisme du Parlement européen sur la proposition de règlement modifiant le règlement n° 561/2006 et le règlement n° 165/2014 (décembre 2017)

([16]) Règlement n° 561/2006 du 15 mars 2006 relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, et directive n° 2002/15 du 11 mars 2002 relative à l’aménagement du temps de travail des personnes exécutant des activités mobiles de transport routier.

([17]) Le 20 décembre 2017, la Cour de Justice de l’Union européenne a interprété le règlement de 2006 comme interdisant que le temps de repos hebdomadaire normal soit pris à bord du véhicule.

([18]) Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/22/CE quant aux exigences en matière de contrôle et établissant des règles spécifiques en ce qui concerne la directive 96/71/CE et la directive 2014/67/UE pour le détachement de conducteurs dans le secteur du transport routier (COM(2017) 278 final – 31 mai 2017).

([19]) La réglementation française, en revanche, est très souple : elle autorise sans limitation de durée la location transfrontalière de véhicules, tant pour le transport public que pour le transport en compte propre, pour le transport international comme pour le transport intérieur, que les entreprises soient établies en France ou dans un autre État membre (arrêté ministériel du 5 mai 2003).

([20]) Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/1/CE relative à l’utilisation de véhicules loués sans chauffeur dans le transport de marchandises par route (COM(2017) 282 final – 31 mai 2017).

([21]) Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’interopérabilité des systèmes de télépéage et facilitant l’échange transfrontière d’informations relatives au défaut de paiement des redevances routières dans l’Union (refonte) (COM(2017) 280 final – 31 mai 2017).