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N° 1415

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 novembre 2018

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE LOI

 

visant à améliorer la trésorerie des associations ( 1329)

PAR Mme Sarah EL HAÏRY
Députée

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Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1329.

 


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SOMMAIRE

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Pages

avant-propos .............................................. 5

examen des articles

Article 1er (art. 9-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations) Permettre aux associations de conserver un excédent raisonnable

Article 2 (art. L. 511-7-1 [nouveau] du code monétaire et financier) Permettre aux associations de procéder à des prêts au sein dun même réseau

Article 3 (art. L. 312-20 du code monétaire et financier) Affecter le produit des comptes bancaires en déshérence des associations au Fonds pour le développement de la vie associative

Article 4 (art. 706-160 du code de procédure pénale) Confier à des associations dintérêt général la gestion dimmeubles saisis lors de procédures pénales

Article 5 Rapport du Gouvernement sur létat des lieux de la fiscalité liée aux dons

Article 6 Gage de recevabilité financière

COMPTE-rendu des débats

personnes entendues par la rapporteure

 


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MESDAMES, MESSIEURS,

117 ans après le vote de la loi de 1901, les Français continuent d’user du droit d’association avec beaucoup d’énergie, de dynamisme et de créativité : le secteur compte ainsi 1,3 million d’organisations – dont 70 000 sont créées chaque année –, 14 millions de bénévoles et quasiment deux millions de salariés.

Lors du lancement du plan de développement pour la vie associative, le 9 novembre 2017, le Premier ministre avait signifié la volonté du Gouvernement d’accompagner et de soutenir la transformation en cours du secteur associatif.

Le secteur connaît en effet, depuis quelques années déjà, de profondes mutations, liées notamment à une baisse des subventions publiques, passées de 34 % à 24 % de leurs recettes d’activité, selon les chiffres du Haut Conseil à la vie associative (HCVA). Ce phénomène a contribué à la disparition d’un certain nombre d’associations de taille moyenne, moins outillées que d’autres pour trouver de nouvelles formes de financement.

Alors que la part des financements publics dans le budget moyen des associations est désormais tombée en-deçà de 50 %, les financements privés, dans un contexte de concurrence accrue due à l’immixtion d’entreprises privées lucratives dans les champs associatifs traditionnels, n’ont pas permis de compenser cette baisse.

C’est pour répondre à ces défis que le Gouvernement a entrepris, il y a un plus d’un an, une démarche de réflexion et de co-construction d’une nouvelle politique en direction des associations, en partenariat avec l’ensemble des acteurs du secteur.

Au terme de plusieurs mois de travaux, pilotés à la fois par les acteurs institutionnels et le Mouvement associatif, ce ne sont pas moins de 59 propositions qui ont été formulées à l’attention du Premier ministre lors de la remise du rapport final, en mai dernier.

Dans l’attente de la présentation du plan d’action du Gouvernement, la présente proposition de loi a pour objet de reprendre quatre des 59 propositions du rapport du Mouvement associatif.

Ces propositions répondent toutes à la même nécessité d’accompagner le développement des associations en leur permettant de renforcer leurs fonds propres et d’obtenir de nouvelles formes de financement :

– l’article 1er a pour objet d’inscrire dans la loi la possibilité pour les associations de conserver un excédent, dans la limite du raisonnable, correspondant au reliquat d’une subvention non dépensée pour leur permettre de financer leur développement ;

– l’article 2 a pour objet, à l’image des prêts inter-entreprises, de permettre aux associations d’un même réseau de s’accorder des prêts entre elles pour faciliter la création et le démarrage de nouvelles structures ;

– l’article 3 doit permettre l’affectation du produit des comptes bancaires en déshérence des associations gérés par la Caisse des dépôts et des consignations au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) ;

– l’article 4 vise à permettre à l’État de confier à des associations reconnues d’intérêt général la gestion des biens immeubles dont il est devenu propriétaire à l’occasion d’une instance pénale.

Ces quatre propositions, déjà présentes dans un rapport du HCVA de 2014, font l’objet aujourd’hui d’un large consensus au sein du monde associatif et sont attendues avec une certaine impatience. Deux d’entre elles avaient même été adoptées par le Parlement lors du vote de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté du 27 janvier 2017, avant d’être censurées comme « cavaliers législatifs » par le Conseil constitutionnel.

L’article 5 demande la remise au Parlement d’un rapport dressant un état des lieux de la fiscalité liée aux dons afin que celui-ci puisse se prononcer sereinement dans un sens qui encourage la philanthropie.

Avec le soutien de l’ensemble des groupes qui la composent, la commission des Lois a adopté cette proposition de loi lors de sa réunion du 21 novembre 2018.

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   examen des articles

Article 1er
(art. 9-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations)
Permettre aux associations de conserver un excédent raisonnable

Adopté par la Commission avec modifications

 

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet d’inscrire dans la loi la possibilité pour les associations de conserver un excédent, dans la limite du raisonnable, correspondant au reliquat d’une subvention non dépensée pour leur permettre de financer leur développement.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 9-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations a été créé par l’article 59 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire.

Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement de votre rapporteure qui réécrit cet article afin d’y inscrire la notion « d’excédent raisonnable » plutôt que celle de « bénéfice ».

1.   L’état du droit

● De par leur modèle économique et la nature de leurs activités, essentiellement à but non lucratif, les associations possèdent souvent une assise économique et financière fragile, du fait de l’absence de fonds propres.

Ceux-ci sont pourtant indispensables pour assurer leur gestion quotidienne, faire face à des décalages de trésorerie ou encore financer leur développement dans de bonnes conditions. C’est particulièrement vrai dans le secteur médico-social et de santé, par exemple, qui doit réaliser régulièrement d’importants travaux de mise à niveau de ses infrastructures.

 

À défaut de dotation en patrimoine à sa création, une association dispose en fait de peu de moyens pour se constituer des fonds propres : vente de produits ou de services – mais de façon limitée pour conserver le caractère non-lucratif de son activité –, dons, ou encore excédents réalisés sur les subventions versées par l’autorité publique.

● Les subventions constituent en effet une ressource financière importante pour les associations. Elles répondent à des caractéristiques propres qui les distinguent clairement des contrats de la commande publique, au regard de leurs finalités et modalités de mise en œuvre. L’article 59 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire a inséré un article 9-1 dans la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative au droit des citoyens dans leurs relations avec les administrations pour en apporter, pour la première fois, une définition.

Définition dune subvention – Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative au droit des citoyens dans leurs relations avec les administrations

« Art. 9-1. – Constituent des subventions, au sens de la présente loi, les contributions facultatives de toute nature, valorisées dans lacte dattribution, décidées par les autorités administratives et les organismes chargés de la gestion dun service public industriel et commercial, justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation dune action ou dun projet dinvestissement, à la contribution au développement dactivités ou au financement global de lactivité de lorganisme de droit privé bénéficiaire. Ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par les organismes de droit privé bénéficiaires.

« Ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent. »

Les principales caractéristiques juridiques d’une subvention sont les suivantes :

– elle n’a pas pour objet de répondre à un besoin propre exprimé au préalable par une autorité publique, à la différence d’un contrat de commande publique ;

– elle est allouée pour un objet déterminé, un projet spécifique, ou est dédiée au financement global de l’activité associative ;

– son montant ne doit pas excéder le coût de la mise en œuvre.

De fait, les subventions sont toujours calculées au plus juste et les éventuels reliquats, même s’ils résultent d’une bonne gestion de la part de l’association, sont généralement repris par les autorités publiques qui les ont versées.

Aussi, si rien ne leur interdit de réaliser des excédents, à condition qu’ils ne donnent pas lieu à un partage entre leurs membres ([1]) mais soient réinvestis dans leur activité, les associations éprouvent beaucoup de difficultés à se constituer des fonds propres.

● Le droit européen, depuis l’entrée en vigueur, en 2012, du paquet Almunia ([2]), a introduit une notion intéressante, qui s’applique aux subventions publiques versées aux associations exerçant une activité de service d’intérêt économique général (SIEG) : celle de « bénéfice raisonnable ». La convention qui lie l’autorité publique à l’organisme bénéficiaire doit ainsi préciser les modalités de reversement d’un éventuel trop-versé de subvention (« surcompensation ») au-delà d’un bénéfice (ou « excédent de gestion ») raisonnable.

Dans son avis rendu en novembre 2012 sur le paquet Almunia, le Haut Conseil à la vie associative (HCVA) avait jugé cette notion de « bénéfice raisonnable » peu adaptée au secteur associatif et lui avait préféré la notion d’excédent, afin de souligner la différence avec les organismes à but lucratif.

Dans sa circulaire du 29 septembre 2015, qui constitue la déclinaison de la charte des engagements réciproques entre les pouvoirs publics et les associations, le Premier ministre reprend cette notion dexcédent raisonnable, pour préciser qu’il peut être conservé par l’association lors du contrôle de l’emploi de la subvention par l’autorité publique.

2.   Le dispositif proposé

● Le présent article propose d’inscrire dans la loi la possibilité pour les associations de conserver un éventuel excédent trop versé de subvention.

Cette proposition figurait déjà dans le rapport du HCVA sur le financement privé du secteur associatif, adopté le 13 mars 2014 ([3]), et a été reprise par le Mouvement associatif dans son rapport Pour une politique de vie associative ambitieuse et le développement dune société de lengagement ([4]), remis au Premier ministre le 8 juin 2018.

La proposition n° 50 était ainsi rédigée : « Renforcer les fonds propres des associations par la conservation des excédents, y compris pour les secteurs associatifs social, médico-social et de santé « tarifés », et éclairer les financeurs sur le bon niveau de fonds propres nécessaires en fonction de la taille et de lactivité de lassociation. »

● L’article 9-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative au droit des citoyens dans leurs relations avec les administrations, qui définit la notion de subvention, serait donc complété de façon à préciser que l’acte d’attribution de la subvention comprendra les modalités de reversement d’un éventuel excédent de subvention au-delà d’un bénéfice raisonnable.

Si certaines personnes entendues par votre rapporteure ont proposé de qualifier avec précision cette notion d’excédent raisonnable – six mois de besoin de fonds de roulement, par exemple, pour la Compagnie nationale des commissaires aux comptes – le choix a été fait de ne pas entrer dans ce niveau de détail, compte tenu de la variété des associations et de leurs secteurs d’intervention. Il appartiendra ainsi aux autorités publiques, le cas échéant avec le concours du juge, d’apprécier au cas par cas ce caractère raisonnable de l’excédent.

3.   La position de la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteure qui réécrit cet article afin :

– d’introduire la notion « d’excédent raisonnable » plutôt que de « bénéfice raisonnable », le monde associatif la jugeant plus adaptée à son activité ;

– de limiter le champ d’application de cet article aux seuls organismes à but non lucratif.

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Article 2
(art. L. 511-7-1 [nouveau] du code monétaire et financier)
Permettre aux associations de procéder à des prêts au sein dun même réseau

Adopté par la Commission sans modification

 

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet, à l’image du prêt inter-entreprises, de permettre aux associations d’un même réseau de s’accorder des prêts entre elles.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article L. 511-7 du code monétaire et financier, relatif aux prêts inter-entreprises, a été modifié par l’ordonnance n° 2016-1408 du 20 octobre 2016 relative à la réorganisation de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction.

Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

1.   L’état du droit

Pour répondre aux besoins en trésorerie de leurs membres, certains réseaux associatifs développent depuis quelques années des opérations de mutualisation de trésorerie entre leurs membres, afin que la trésorerie des uns bénéficie à ceux qui ont des difficultés.

Bien que de plus en plus courante, cette pratique, assimilable à des prêts, se heurte pourtant au monopole bancaire. L’article L. 511-5 du code monétaire et financier interdit en effet « à toute personne autre quun établissement de crédit ou une société de financement deffectuer des opérations de crédit à titre habituel ».

Cette interdiction souffre toutefois d’une exception, pour les sociétés appartenant à un groupe. L’article L. 511-7 du même code précise ainsi qu’une entreprise, quelle que soit sa nature, peut « procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement ou indirectement, des liens de capital conférant à lune des entreprises liées un pouvoir de contrôle effectif sur les autres ».

La notion de groupe de sociétés a été précisée par la Cour d’appel de Paris dans un arrêt du 21 novembre 1990. Elle implique « dune part, lexistence entre ses membres de relations croisées fréquentes et régulières, constituées par des liens financiers étroits, des liaisons économiques privilégiées, des rapports commerciaux préférentiels, dautre part, un contrôle densemble, une unité de décision, une stratégie commune assurée seulement par lune des sociétés, la société mère détenant des participations dans les autres sociétés, auxquelles elle apporte, conformément à son objet et à sa nature, son concours financier. »

Si de nombreuses unions ou fédérations d’associations développent entre elles, de la même façon que des groupes de sociétés, une stratégie commune, des relations fréquentes et régulières, lexigence dun lien en capital leur interdit, par définition, de bénéficier de la même dérogation au monopole bancaire que les groupes de société.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article a pour objet de prévoir une nouvelle dérogation au monopole bancaire pour autoriser la mise en commun de fonds propres entre structures d’un même réseau associatif et autoriser les prêts entre associations affiliées à un même groupe.

Cette proposition figurait déjà dans le rapport précité du HCVA de mars 2014 sur le financement privé du secteur associatif, ainsi que dans celui du Mouvement associatif de juin 2018 (proposition n° 52).

L’alinéa 2 précise que cette possibilité ne concernera que les associations ou fondations reconnues d’utilité publique, pour éviter toute dérive dans le secteur associatif. Les réseaux associatifs sont caractérisés, pour reprendre la jurisprudence de la Cour d’appel de Paris, par des « relations croisées, fréquentes et régulières, ainsi quune stratégie commune définie » par l’une des associations.

Par définition, cette mesure ne devrait concerner que des petites sommes, principalement au moment de la création d’une association locale d’un réseau existant, par exemple. Cette activité de prêteur de deniers demeurera naturellement accessoire dans l’activité des associations ou fondations concernées, pour que celles-ci puissent conserver leur but non lucratif et leur mission d’utilité publique.

L’alinéa 3 précise que les conditions d’application de cet article, notamment l’encadrement des taux de prêt, seront fixées par décret en Conseil d’État.

3.   La position de votre Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 3
(art. L. 312-20 du code monétaire et financier)
Affecter le produit des comptes bancaires en déshérence des associations au Fonds pour le développement de la vie associative

Adopté par la Commission avec modifications

 

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de permettre l’affectation du produit des comptes bancaires en déshérence des associations gérés par la Caisse des dépôts et des consignations au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA).

 

 

Dernières modifications législatives intervenues

L’article L. 312-20 du code monétaire et financier a été modifié par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement de votre rapporteure qui réécrit l’alinéa 5 afin de le rendre conforme aux exigences constitutionnelles et organiques.

1.   La gestion des comptes bancaires en déshérence

À la suite d’un rapport de la Cour des comptes sur les avoirs bancaires et les contrats d’assurance-vie en déshérence ([5]), commandé par la commission des Finances de l’Assemblée nationale, le Parlement a adopté la loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance-vie en déshérence.

Cette loi confie à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) la mission de centraliser, conserver et restituer les sommes issues de comptes « inactifs » et de contrats d’assurance-vie « non réglés ».

Cela se traduit par deux obligations pour les établissements bancaires :

– l’obligation pour les teneurs de compte de recenser chaque année les comptes inactifs et de rechercher les titulaires de comptes décédés par le biais d’une consultation annuelle du répertoire national d’identification des personnes physiques (RNIPP) ;

– l’obligation de transférer à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) les fonds non réclamés à l’issue d’un délai de dix ans d’inactivité pour les comptes « abandonnés » par leur titulaire et, pour les comptes de personnes défuntes, à l’issue d’un délai de deux ans après le décès du titulaire du compte.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi, ce sont près de 8 millions de comptes bancaires qui ont été ainsi transférés à la Caisse des dépôts, représentant un total d’un peu plus de 5 milliards deuros.

La Caisse conserve ensuite ces dépôts durant vingt ans et gère pendant cette durée les demandes de restitution des bénéficiaires via le site Internet Ciclade.fr

À l’issue de ce délai de vingt ans – et donc de trente ans d’inactivité au total – largent non réclamé est définitivement reversé à lÉtat, en application de la déchéance trentenaire édictée au profit du Trésor public, prévue par l’article L. 518-24 du code monétaire et financier.

69,7 millions d’euros ont été reversés par ce biais-là au comptable des domaines de l’État au titre de la déchéance 2016 et 50,3 millions au titre de la déchéance 2017.

2.   Abonder le Fonds pour le développement de la vie associative

Le présent article a pour objet de permettre le reversement du produit des comptes en déshérence des associations conservés par la Caisse des dépôts et consignations au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA).

Cette proposition figurait déjà dans le rapport du Haut conseil pour la vie associative (HCVA) de 2014 précité, reprise par le rapport du Mouvement associatif de 2018 dans sa proposition n° 25. Elle avait été adoptée par le biais d’un amendement parlementaire (article 48) dans la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à légalité et à la citoyenneté, avant d’être censurée par le Conseil constitutionnel au motif qu’elle n’avait pas de lien, même indirect, avec l’objet du projet de loi initial ([6]).

L’alinéa 3 impose tout d’abord aux établissements bancaires le soin d’identifier, au sein des comptes inactifs, les comptes appartenant à des personnes physiques et ceux appartenant à des personnes morales et, au sein de ces derniers, de distinguer les différents statuts juridiques. Il s’agit de permettre lidentification des comptes appartenant à des associations, disposition qui n’est aujourd’hui prévue par aucun texte. Cette identification par les banques est indispensable pour que la Caisse des dépôts puisse ensuite recenser ces comptes lorsqu’ils lui seront reversés par les établissements bancaires.

L’alinéa 5 prévoit un mécanisme pour qu’une partie des comptes en déshérence des associations détenus par la Caisse des dépôts puisse venir abonder le Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), à l’image du dispositif existant en Grande-Bretagne, à la faveur du « Dormant Bank and Building Society Account Act 2008 ».

Une commission, dont la composition reste à déterminer, serait chargée, chaque année, de fixer le pourcentage de sommes figurant sur ces comptes associatifs gérés par la Caisse des dépôts qui serait reversé au FDVA et le pourcentage de celles devant être conservées pour faire face à d’éventuelles demandes de restitution.

Cela permettrait à ce fonds de disposer d’une ressource pérenne pour assurer le financement de la vie associative et aider ainsi les acteurs à se projeter dans la durée. Les auditions conduites par votre rapporteure n’ont pas permis de procéder à une estimation fiable des sommes potentiellement concernées. Certains chiffres avancés par le monde associatif, faisant état d’un million de comptes d’associations en déshérence disposant de plusieurs centaines d’euros chacun, semblent en tout cas très au-delà de la réalité.

Le Fonds pour le développement de la vie associative

Le Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) a été créé par le décret n° 2011-2121 du 30 décembre 2011. Il a remplacé le Conseil du développement de la vie associative (CDVA).

Depuis 2018, le FDVA a pris la suite des subventions octroyées par les parlementaires aux associations, par le biais de la « réserve parlementaire », supprimée par l’article 14 de la loi organique n° 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.

Par la loi de finances pour 2018, le Parlement a fait le choix d’abonder à hauteur de 25 millions d’euros le FDVA dans son rôle de soutien au développement de la vie associative. Le FDVA a donc connu une extension significative de ses missions de soutien à la vie associative.

Le FDVA finance ainsi, depuis cette date :

– les associations pour la formation des bénévoles. L’appel à projet national annuel « FDVA – Formation des bénévoles » est publié en début de chaque année. Il soutient des associations nationales et locales ;

– les associations pour leur fonctionnement et leurs projets innovants, dans la suite de l’ancienne réserve parlementaire, par le biais du « FDVA – Fonctionnement et actions innovantes ».

Pour 2019, le projet de loi de finances prévoit de lui affecter 33,15 millions d’euros, dont 8,15 pour la formation des bénévoles et 25 millions d’euros pour le soutien au fonctionnement et les projets innovants.

3.   La position de la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteure qui simplifie le dispositif prévu par l’alinéa 5. Celui-ci se heurtait en effet à deux difficultés :

– l’affectation des avoirs détenus sur les comptes inactifs pour alimenter le Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) relève du domaine de la loi de finances ;

– il n’est pas possible que ces avoirs fassent l’objet d’une acquisition par anticipation de la prescription trentenaire sans porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété et à l’égalité entre les titulaires de comptes inactifs.

Le dispositif adopté complète donc le contenu du rapport que la Caisse des dépôts adresse chaque année au Parlement sur les comptes inactifs pour qu’il fasse désormais également état des sommes qui auront été reversées au FDVA. Il appartiendra donc au Gouvernement de prendre chaque année les mesures nécessaires pour affecter ces sommes au FDVA.

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Article 4
(art. 706-160 du code de procédure pénale)
Confier à des associations dintérêt général la gestion dimmeubles saisis lors de procédures pénales

Adopté par la Commission avec modifications

Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de permettre à l’État de confier à des associations reconnues d’intérêt général la gestion des biens immeubles dont il est devenu propriétaire à l’occasion d’une instance pénale.

Dernières modifications législatives intervenues

L’article 706-160 du code pénal avait été modifié par la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale.

Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement de votre rapporteure qui exclut notamment du dispositif les entreprises agréées d’utilité sociale.

1.   L’état du droit

Lors d’une instance pénale, l’État peut devenir propriétaire d’un bien immeuble ayant été confisqué en tant que produit ou instrument d’une infraction. Le bien immobilier peut aussi être saisi si les amendes auxquelles son propriétaire a été condamné n’ont pas été payées ou pour assurer l’indemnisation des victimes, sans même que cet immeuble ait un lien avec la commission de l’infraction.

Un bien peut également être saisi en cours d’instance lorsqu’il est utile à la manifestation de la vérité. Enfin, la propriété d’un bien immobilier saisi peut être transférée à l’État s’il n’a pas fait l’objet d’une demande de restitution passé un certain délai ([7]).

Les procédures de saisies des biens immeubles sont mises en œuvre par l’Agence de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC).

LAgence de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC)

Dirigée par un magistrat de l’ordre judiciaire, l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués est un établissement public administratif placé sous la double tutelle des ministères de la Justice et du Budget dont la création a été prévue par la loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale.

Ayant pour rôle d’améliorer le traitement judiciaire des saisies et des confiscations en matière pénale, l’agence a principalement pour mission, outre l’aide et le conseil donnés aux magistrats en matière de saisies et de confiscations :

– d’assurer la gestion centralisée, sur un compte qu’elle a ouvert à la Caisse des Dépôts et Consignations, de toutes les sommes saisies (c’est-à-dire appréhendées dans l’attente d’un jugement définitif, en vue d’une éventuelle confiscation) lors de procédures pénales en France ;

– de procéder à l’ensemble des ventes avant jugement de biens meubles saisis, décidées par les magistrats lorsque ces biens meubles ne sont plus utiles à la manifestation de la vérité et qu’ils sont susceptibles de dépréciation. Dans ce cas, la somme issue de la vente est consignée sur le compte tenu à la CDC de l’agence, et est restituée au propriétaire du bien si celui-ci bénéficie d’un acquittement, d’un non-lieu ou d’une relaxe ou si le bien ne lui est pas confisqué ;

– de procéder à l’ensemble des publications, auprès des Bureaux de conservation des hypothèques, des saisies pénales immobilières ;

– de veiller, enfin, le cas échéant, à l’information préalable des créanciers (créanciers publics ou victimes) avant exécution de toute décision judiciaire de restitution et à l’indemnisation prioritaire des parties civiles sur les biens confisqués à la personne condamnée.

Depuis sa création, l’Agence a traité plus de 87 722 affaires correspondant à la gestion de 173 077 biens de nature très diverse (numéraires, comptes bancaires, véhicules, bateaux, biens immobiliers..), d’un montant total évalué à 920 millions d’euros.

D’une manière générale, l’État évite d’avoir à gérer les biens immobiliers dont il est propriétaire, en raison des difficultés pratiques et des coûts induits. Il choisit donc soit de les mettre à la disposition de ses services, soit de les vendre, notamment pour construire des logements sociaux ([8]).

Enfin, dans des cas peu fréquents, des biens immobiliers saisis par l’État font l’objet d’une location à une structure privée pour faire face à des situations exceptionnelles. L’État détermine alors contractuellement le loyer, qui peut prendre en compte la situation financière du co-contractant.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article a pour objet de permettre à l’État de confier à des associations reconnues d’intérêt général la gestion des biens immeubles dont il est devenu propriétaire à l’occasion d’une instance pénale.

Cette disposition figurait déjà dans le rapport du Haut conseil pour la vie associative (HCVA) de 2014 précités, reprise par le rapport du Mouvement associatif de 2018 dans sa proposition n° 54. Elle avait été adoptée par le biais d’un amendement parlementaire (article 45) dans la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à légalité et à la citoyenneté, avant d’être censurée par le Conseil constitutionnel au motif qu’elle n’avait pas de lien, même indirect, avec l’objet du projet de loi initial ([9]).

Elle s’inscrit, en outre, dans le prolongement de la directive 2014/42/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 concernant le gel et la confiscation des instruments et des produits du crime dans l’Union européenne qui invite, dans son article 10, les États membres à a adopter des dispositifs « permettant que les biens confisqués soient utilisés à des fins dintérêt public ou pour des finalités sociales. » Plusieurs pays européens, dont l’Italie, ont déjà adopté des dispositions en ce sens.

L’alinéa 2 du présent article prévoit que les modalités pratiques de cette mise à disposition des immeubles aux associations fassent l’objet d’une convention, pour déterminer notamment les obligations incombant à l’utilisateur en matière d’entretien ou d’aménagement de l’immeuble.

Lors de son entretien avec votre rapporteure, la directrice générale de l’AGRASC a fait état de la diversité, sur l’ensemble du territoire national, des immeubles gérés par l’agence, dont certains pourraient parfaitement correspondre aux besoins du monde associatif.

3.   La position de la Commission

La Commission a adopté un amendement de votre rapporteure qui vise à :

– restreindre la mise à disposition des biens immobiliers confisqués à des fins de réutilisation sociales aux seules associations déclarées ou inscrites depuis au moins trois ans, pour éviter les effets d’aubaine, et dont l’ensemble des activités sont celles visées en matière de dons ;

– limiter la mesure aux seules associations, et non à toutes les entreprises agréées d’utilité sociale qui peuvent distribuer des bénéfices.

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Article 5
Rapport du Gouvernement sur létat des lieux de la fiscalité liée aux dons

Adopté par la Commission avec modifications

Le présent article demande la remise au Parlement, dans un délai de douze mois, d’un rapport du Gouvernement sur l’état des lieux de la fiscalité liée aux dons.

Il s’agit, en effet, d’un sujet complexe, qui a fait l’objet de nombreuses propositions du monde associatif ces dernières années, et il importe que le Parlement dispose d’une vision exhaustive afin de pouvoir se prononcer sereinement dans un sens qui encourage la philanthropie.

La Commission a adopté un amendement de précision rédactionnelle de votre rapporteure.

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Article 6
Gage de recevabilité financière

Adopté par la Commission sans modification

Cet article a pour objet de compenser les éventuelles pertes de recettes pour l’État qui pourraient résulter de la mise en œuvre de la proposition de loi. Il prévoit, à cette fin, la création d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs, prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La Commission a adopté cet article sans modification.

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   COMPTE-rendu des débats

Lors de sa réunion du mercredi 21 novembre 2018, la Commission examine la proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations ( 1329) (Mme Sarah El Haïry, rapporteure).

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Madame la présidente, mes chers collègues, je suis très heureuse de vous présenter cette proposition de loi qui souhaite donner au tissu associatif les moyens de se développer. Quelle que soit notre appartenance politique, nous partageons cette ambition. Le secteur associatif est très dynamique dans notre pays, et nous pouvons en être fiers : 1,3 million d’associations, plus de 70 000 créations par an, 14 millions de bénévoles et quasiment 2 millions d’emplois.

Mais, pour fonctionner, ce secteur a besoin de financements, et la réduction des financements publics oblige les associations à se tourner vers la générosité du secteur privé – particuliers ou entreprises. Le Gouvernement, vous le savez, est très attentif à la vitalité du monde associatif. Il a lancé en novembre 2017 une grande concertation avec l’ensemble des acteurs du secteur, qui s’est traduite en mai dernier par la remise d’un rapport du Mouvement associatif au Premier ministre, comprenant cinquante-neuf propositions. Le Gouvernement devrait annoncer dans les prochains jours les orientations qu’il retient.

Notre proposition de loi reprend quatre propositions qui font l’objet d’un grand consensus dans le monde associatif – et qui, je l’espère, feront également consensus au sein de notre Commission. Elles figurent dans le rapport de mars 2014 du Haut Conseil à la vie associative (HCVA) concernant le financement privé des associations, ainsi que dans le rapport du Mouvement associatif rendu en mai dernier. Elles figuraient aussi, pour deux d’entre elles, dans la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, avant d’être censurées en tant que cavaliers législatifs par le Conseil constitutionnel. Elles ne sont donc pas particulièrement nouvelles, mais sont indispensables pour faciliter le développement du tissu associatif et sont attendues avec impatience.

L’article 1er vise à inscrire dans la loi la possibilité pour les associations de conserver un excédent budgétaire – dans la limite du raisonnable – correspondant au reliquat d’une subvention non dépensée, afin de financer leur développement. Actuellement, les subventions sont toujours calculées au plus juste et les éventuels reliquats, même lorsqu’ils résultent de la bonne gestion de l’association, sont généralement repris par les autorités publiques qui les ont versés. En l’état actuel du droit, rien n’interdit aux associations de réaliser des excédents, à condition qu’ils ne donnent pas lieu à un partage entre leurs membres, mais soient réinvestis dans leur activité. En conséquence, les associations éprouvent beaucoup de difficultés à constituer des fonds propres. Nous proposons donc d’inscrire dans la loi la notion d’« excédent raisonnable », actuellement présente dans une simple circulaire du Premier ministre.

L’article 2 a pour objet de permettre aux associations d’un même réseau de s’accorder des prêts entre elles, sur le modèle du prêt interentreprises. Par définition, cette mesure ne devrait concerner que de petites sommes, par exemple au moment de la création de l’association locale d’un réseau existant. Cette activité de prêt devra demeurer accessoire, afin que l’objectif non lucratif et la mission d’utilité publique de l’association ou de la fondation restent prioritaires.

L’article 3 permettra l’affectation au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) du produit des comptes bancaires en déshérence des associations, gérés par la Caisse des dépôts et des consignations (CDC). Depuis 2014, la CDC centralise, conserve et restitue les sommes issues des comptes inactifs et des contrats d’assurance-vie non réglés. Elle gère à ce titre plus de huit millions de comptes, représentant 5 milliards d’euros. Et si elles ne sont pas réclamées à l’issue de trente années d’inactivité, les sommes sont reversées au budget de l’État : 70 millions d’euros l’ont ainsi été en 2016 et 50 millions en 2017. Nous proposons donc d’identifier les comptes appartenant à des associations et de les reverser, à l’issue de la prescription trentenaire, au FDVA. C’est le sens de l’amendement que je vous présenterai tout à l’heure, la rédaction actuelle de l’article 3 n’étant pas satisfaisante.

L’article 4 permettra à l’État de confier à des associations reconnues d’intérêt général la gestion des biens immeubles dont il est devenu propriétaire à l’occasion d’une instance pénale. Les procédures de saisies des biens immeubles mal acquis – par crime ou délinquance – sont mises en œuvre par l’Agence de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC). Cet article prévoit que les modalités pratiques de cette mise à disposition des immeubles fassent l’objet d’une convention, pour déterminer notamment les obligations incombant à l’utilisateur en matière d’entretien ou d’aménagement de l’immeuble.

Lors de son audition, la directrice générale de l’AGRASC a fait état de la diversité des immeubles gérés par l’agence sur l’ensemble du territoire national, dont certains pourraient parfaitement correspondre aux besoins du monde associatif, alors que les revenus issus de leur revente sont versés au budget général de l’État.

L’article 5 demande au Gouvernement de remettre au Parlement, dans un délai de douze mois, un état des lieux de la fiscalité liée aux dons. Il s’agit en effet d’un sujet complexe, qui a fait l’objet de nombreuses propositions du monde associatif ces dernières années. Il importe que le Parlement dispose d’un bilan exhaustif, afin de pouvoir se prononcer sereinement, dans un sens favorable à une véritable philanthropie à la française.

Les amendements que je vous proposerai visent à clarifier certaines rédactions de la proposition de loi.

M. Fabien Matras. Le monde associatif est un acteur majeur de la vie des territoires. Les associations contribuent à leur vie économique, culturelle, patrimoniale et écologique et œuvrent en faveur de la solidarité, sur le plan local ou national.

Composé de plus de 1,3 million d’entités, de 14 millions de bénévoles, employant deux millions de salariés et générant un volume financier de 110 milliards d’euros, le secteur associatif est un acteur économique et social majeur. Les pouvoirs publics sont depuis toujours partenaires des associations. Ils leur versent des subventions, reconnaissant ainsi leur qualité d’intervenant essentiel dans la mise en œuvre des politiques publiques sur le territoire national.

Néanmoins, ces dernières années, la réduction de la dotation globale de fonctionnement (DGF) a mis en péril le monde associatif, victime par ricochet de la diminution des moyens financiers des collectivités. Même si, depuis deux ans maintenant, nous avons mis un terme à ces baisses, et même si les associations se sont tournées vers des financements privés, peu d’entre elles ont retrouvé les marges de manœuvre budgétaire qui étaient les leurs par le passé. Il devient donc nécessaire de mener une politique plus affirmée de soutien au monde associatif. La proposition de loi s’inscrit dans cette dynamique, constituant une étape nécessaire de la réforme d’ampleur que le secrétaire d’État Gabriel Attal présentera la semaine prochaine.

La trésorerie des associations est un enjeu important, leurs fonds propres étant généralement faibles, ce qui constitue un frein à leur capacité à innover dans la mise en œuvre d’actions ou de projets. En ce sens, l’article 1er constitue une avancée nécessaire ; il permettra aux associations de préserver d’une année sur l’autre d’éventuels excédents et de les capitaliser en vue d’un développement futur.

Dans la même optique, l’article 2 vient répondre aux besoins de financement des associations : les structures qui appartiennent au même réseau pourront se financer entre elles. La solidarité inter-associative pourra fonctionner, palliant la frilosité du milieu bancaire lorsqu’il s’agit d’effectuer des prêts aux associations.

La capacité des associations à innover passe aussi par un renforcement de la politique d’accompagnement des pouvoirs publics, via une augmentation des aides financières. L’article 3 constitue une opportunité pour les associations. Il ne s’agit pas ici de demander un effort aux collectivités territoriales, mais simplement de faciliter le reversement au FDVA des sommes présentes sur les comptes inactifs des associations gérés par la CDC. C’est un cercle vertueux : l’argent du monde associatif reviendra aux associations.

Enfin, pour mener leurs actions, de nombreuses associations ont également besoin d’immobilier. Les immeubles occupés par les associations sont le plus souvent mis à disposition par les collectivités lorsque ces dernières le peuvent. L’article 4 de la proposition de loi autorise la mise à disposition par l’AGRASC des immeubles saisis suite à une décision pénale. Cette disposition est vertueuse, tant pour les associations, qui auront ainsi accès à de nouveaux biens, que pour l’État, puisque l’entretien des locaux sera assuré par les associations.

Enfin, l’article 5 vise à demander au Gouvernement un état des lieux de la fiscalité liée aux dons, rendu indispensable par les récentes modifications évoquées par la rapporteure.

M. Julien Dive. Madame El Haïry, je vous remercie d’avoir déposé cette proposition de loi. C’est un sujet qui vous tient à cœur ; nous avons d’ailleurs dialogué à ce propos la semaine dernière, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances, puisque je défendais, comme d’autres collègues, des amendements visant à soutenir les associations.

Nous avions compris que leur trésorerie allait faire l’objet d’une proposition de loi. Si je voulais faire du mauvais esprit, je dirais « après la suppression de la réserve parlementaire, il était temps ! » Mais n’enfonçons pas le clou…

Nous souhaitons tous accompagner nos associations locales. Vous avez rappelé les chiffres, ils sont éloquents : elles sont très présentes dans les territoires et tissent le maillage de notre cohésion sociale. Très souvent, elles pallient l’absence de l’État et de l’administration. Elles peuvent également constituer des leviers économiques, font vivre le tissu économique local, les artisans et les commerçants locaux. Elles animent la vie de nos territoires et des quartiers de nos villes. Nous mettons leur action en valeur, par exemple par l’attribution de bourses au bénévolat, comme c’était le cas dans ma ville, Saint-Quentin, ce week-end. Ces événements permettent de solliciter des personnes qui souhaitent s’engager – retraités ou jeunes majeurs.

La législation a beaucoup évolué. En 2016, lors des débats sur le projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté – Régis Juanico s’en souvient probablement – le bénévolat a été sécurisé pour les mineurs. Il y a quelques mois, Sylvain Waserman a présenté une proposition de loi améliorant la protection des dirigeants associatifs. Ce sujet suscite l’engouement ; il fait consensus. Nous débattrons probablement de certains points, mais les membres du groupe Les Républicains sont heureux de participer à ce travail.

Je reviens sur la suppression de la réserve parlementaire. Elle est en partie palliée par les crédits du FDVA, mais nous constatons certains dysfonctionnements dans l’information transmise aux associations, comme je le soulignais la semaine dernière dans l’hémicycle. Les porteurs de projets associatifs nous font part de lourdeurs administratives. Simplifions les démarches pour mieux accompagner les structures associatives ! Pourquoi ne pas réfléchir à un dossier unique de demande de subvention ? Actuellement, chaque niveau d’administration – commune, département, région, État – demande un dossier séparé et, qui plus est, jamais au même moment…

Nous devons faciliter la vie de nos associations, mais aussi les rassurer et les accompagner, d’autant qu’il devient complexe pour elles d’obtenir des financements publics. Ainsi, dans mon département, l’Aisne, le président a dû réduire les subventions attribuées aux associations pour payer le douzième mois du revenu de solidarité active (RSA). Pourquoi ne pas réfléchir à une forme de péréquation avec le FDVA ?

Je le redis, le groupe Les Républicains participera constructivement et avec beaucoup d’entrain à ce débat.

M. Erwan Balanant. Je salue l’intervention de mon collègue Julien Dive et son soutien. Effectivement, la vie associative est le terreau de notre démocratie. Beaucoup de personnalités politiques ont commencé leur vie politique et citoyenne dans une association. La loi de 1901 est originale, on l’oublie souvent. Peu de pays disposent d’une telle structure associative. Je la considère comme la dernière grande avancée démocratique après le suffrage universel.

La vie associative crée du lien social dans les territoires. Elle permet à des personnes de se rencontrer – ainsi, des parents emmènent leur enfant au football, sympathisent, puis s’organisent pour covoiturer. Les associations contribuent donc à la cohésion de notre pays. Elles sont multiples : associations sportives, mais aussi associations d’insertion ou associations d’aide – comme le réseau d’aide à domicile en milieu rural (ADMR), important dans la structuration de nos villes et de nos campagnes. Enfin, les associations d’éducation populaire sont complémentaires de l’éducation nationale et de l’éducation parentale – je dis cela pour faire le lien avec la proposition de loi que nous venons d’examiner.

Il nous faut les aider et trouver des solutions face aux changements et à l’évolution de leur financement. C’est pourquoi le groupe MoDem a souhaité faire de la vie associative le fil rouge de ses journées réservées. Plutôt qu’une proposition de loi globale, nous avons pris le parti d’avancer à petits pas : la proposition de loi défendue par Sylvain Waserman concernait la responsabilité des présidents d’associations. Aujourd’hui, Sarah El Haïry, habituellement commissaire aux finances, grande connaisseuse du monde de l’économie sociale et solidaire et de la vie associative, se penche sur le financement des associations. Les qualités de la rapporteure vont nous permettre d’avancer sur ce sujet.

Le financement de la vie associative est en effet une question cruciale. Si le bénévolat joue un rôle important dans les associations, celles-ci doivent aussi disposer d’une trésorerie pour développer des projets et une activité et, éventuellement, pouvoir emprunter.

Vous avez évoqué la réserve parlementaire : si les associations avaient dû attendre son existence pour agir, il n’y aurait plus de vie associative depuis longtemps ! La masse globale des subventions publiques est en effet sans commune mesure avec cette réserve, ce qui ne veut pas dire que sa suppression soit sans conséquences. L’amendement de M. Juanico proposant que les parlementaires soient associés à certaines structures mérite réflexion : depuis la fin du cumul des mandats, nous ne sommes pas toujours assez impliqués dans la vie nos territoires et la vie associative peut être une façon pour nous de continuer à l’être.

Le groupe MoDem soutiendra ce texte avec enthousiasme.

M. Régis Juanico. Une proposition de loi soutenant la vie associative est toujours la bienvenue, même si on la souhaiterait plus ambitieuse. J’appelle de mes vœux le consensus le plus large possible des groupes politiques sur l’essentiel des articles de ce texte. J’ai bien compris que la politique du Mouvement Démocrate était celle des petits pas (Sourires), mais nous aimerions que le Gouvernement exprime une ambition afin que la vie associative ne soit plus l’angle mort des politiques publiques dans notre pays. Il y a des attentes considérables dans le monde associatif et, plus encore, un malaise au sein des associations de taille moyenne : de nombreux bénévoles responsables finissent par baisser les bras parce qu’ils estiment ne plus être soutenus. Erwan Balanant a raison de parler du « terreau » de la démocratie que représente la vie associative.

Je voudrais vous alerter, mes chers collègues, sur deux points.

Le premier concerne l’emploi associatif. Le nombre des contrats aidés a diminué de 80 % entre 2016 et 2019 et, sur les 3,5 milliards d’euros d’économies réalisées par le Gouvernement, plusieurs milliards touchent la vie associative. L’association Recherches et Solidarités nous indique qu’en 2017, pour la première fois, le nombre de créations d’emplois associatifs comme celui des créations d’associations ont stagné. De plus, 25 000 associations des secteurs sportif, culturel et médicosocial, qui étaient en très grande difficulté, ont dû mettre la clef sous la porte. Cette situation doit nous alerter, car les chiffres de 2018 risquent d’être encore plus mauvais.

Le second point a trait à la générosité publique. Une étude de France Générosités fait état d’un tassement du nombre de donateurs aux associations d’intérêt général. Des associations, par ailleurs, appellent notre attention sur la baisse importante des dons des personnes physiques. Les donateurs sont en effet affectés par les réformes fiscales appliquées depuis un an, notamment par la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) qui a réduit le nombre de contribuables éligibles à certains dispositifs. Ces réformes fiscales se traduisent, pour certaines fondations et associations, par une baisse pouvant atteindre 60 % ou 70 % de leurs ressources financières par rapport à l’année précédente. Citons aussi la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) et des charges pesant sur les retraités et l’annonce du prélèvement à la source – dispositif qui ne changera pas grand-chose aux dons des personnes physiques, mais dont les modalités d’application peuvent inquiéter.

Ce contexte doit nous mobiliser dans les prochaines semaines. Ce n’est pas un rapport du Gouvernement qu’il faudrait demander – comme vous le faites, madame la rapporteure, à l’article 5 – mais bien un rapport du Parlement, dans le cadre d’une mission d’évaluation et de contrôle (MEC).

Nous portons une appréciation positive sur les quatre autres articles, et en particulier sur les deux dispositions relatives aux comptes inactifs et aux biens mal acquis qui avaient été censurées injustement par le Conseil constitutionnel dans la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté. Nous voterons donc en faveur de la proposition de loi.

M. Pierre Morel-À-l’Huissier. Je me félicite de cette proposition de loi tant le secteur associatif est fondamental dans notre pays. Je salue la possibilité offerte aux associations de conserver un excédent, dans la limite du raisonnable, et de s’accorder des prêts entre elles au sein d’un même réseau, tout comme la faculté d’affecter le produit de certains comptes bancaires au Fonds de développement de la vie associative.

Je regrette cependant que la proposition de loi ne soit assortie d’aucune étude d’impact. Il eût été intéressant de savoir ce qu’il en était réellement de la situation financière des associations, d’autant que le texte ne distingue pas entre grosses et petites associations, ni entre associations qui emploient du personnel et associations qui n’en emploient pas. Nous avions déposé, au cours des années antérieures, plusieurs propositions de loi sur la situation des bénévoles, prévoyant l’octroi de trimestres de retraite supplémentaires, mais ces propositions n’ont jamais abouti.

Le dispositif des dons aux associations pour frais engagés par les bénévoles n’est pas forcément bien connu, malgré son utilité. La suppression progressive des contrats aidés pose d’importants problèmes aux petites associations. Quant à la réserve parlementaire, que j’ai connue pendant seize ans, elle représentait des montants non négligeables, pouvant aller jusqu’à 250 000 euros par an, et aidait de nombreuses structures. Le FDVA, qui lui succède, est géré par les préfets de région après avis des préfets de départementales – c’est dire la difficulté qu’a parfois l’État à faire des choix. Enfin, il serait justifié que les parlementaires aient leur mot à dire sur la représentativité de telle ou telle association.

Encore une fois, cette proposition de loi est intéressante mais elle aurait nécessité une étude d’impact.

Mme Danièle Obono. Nous saluons, nous aussi, l’initiative du groupe du Mouvement Démocrate et apparentés. L’examen de cette proposition de loi est l’occasion de débattre au sein du Parlement du rôle fondamental – sur le plan social, culturel et politique au sens large – des associations dans la construction du lien social. Celles-ci rendent service au quotidien à des millions de citoyens et de citoyennes, notamment dans les quartiers populaires où beaucoup de services publics ne sont plus assurés.

Notre collègue Régis Juanico a souligné la difficulté qu’ont les associations à garantir la pérennité de leur action du fait du gel des emplois aidés. C’est un des premiers problèmes qui m’aient été rapportés par certaines associations des 18e et 19e arrondissements de Paris. Plus globalement, notre débat soulève les questions de la santé financière des associations et du modèle économique sur lequel elles sont fondées.

Nous sommes favorables à cette proposition de loi et avons déposé plusieurs amendements pour renforcer la démarche engagée.

M. Jean-Félix Acquaviva. Je voudrais à mon tour saluer le travail de la rapporteure et de l’ensemble des personnes ayant contribué à l’élaboration de cette proposition de loi. Je souhaite également revenir sur l’importance du mouvement associatif. Les associations sont un moyen majeur de créer du lien social et de la cohésion territoriale. Dans une société marquée par des rapports interpersonnels de plus en plus violents, par une précarité grandissante et par un manque d’engagement dans la vie citoyenne, les associations sont fondamentales pour la démocratie : c’est en leur sein qu’on apprend le chemin de la responsabilisation individuelle et collective et qu’on peut réaliser son avenir plutôt que de déléguer sa responsabilité aux élus. Toute association, qu’elle ait une visée sociale, culturelle ou d’insertion, est confrontée aux réalités et aux spécificités locales : elle est donc un creuset de propositions et d’innovations qui doivent servir la fabrique de la loi, des règlements et des propositions économiques, sociales et culturelles. Quand on pense que, dans un pays comme la Roumanie, la dictature de Nicolae Ceauşescu a détruit les rouages démocratiques au point qu’il n’y a aucun réflexe naturel à créer des associations, on se rend compte de la chance que l’on a en France et de la nécessité de ne pas laisser ce thème de côté.

Nous soutiendrons cette proposition de loi, qui va dans le bon sens même si elle n’est qu’un petit pas, comme nous avons soutenu avec force l’amélioration du crédit d’impôt « mécénat » pour les TPE-PME, qui aura un effet de levier pour les associations.

À l’instar de Régis Juanico, je relèverai certains faits. On a assisté, en 2017-2018, à une baisse des créations d’emplois et des créations d’associations et à une augmentation des liquidations d’associations, le tout dans un contexte général de découragement et d’usure des bénévoles. Quiconque ici a été membre d’une association a pu constater la nécessité de tenir dans la durée face aux contraintes financières de la vie associative. Les associations ont souffert pour de multiples raisons, dont la suppression des contrats aidés.

C’est pourquoi les articles 1er, 2 et 3 de cette proposition de loi sont absolument essentiels. Les questions d’excédent et de bénéfice raisonnable sont très importantes dans la vie quotidienne des associations : alors que ces dernières ont besoin d’être rassurées quant à la pérennité de leurs moyens, elles se sont heurtées jusqu’ici à une incompréhension des administrations de l’État et des régions en la matière. De même, la possibilité pour les associations de s’accorder des prêts au sein d’un même réseau est une innovation très intéressante. Nous sommes, bien sûr, favorables aussi à la possibilité d’affecter au FDVA le produit des comptes bancaires en déshérence, de même qu’à l’idée, inspirée du modèle italien, de confier à des associations d’intérêt général la gestion d’immeubles saisis lors de procédures pénales.

Simplement, cette logique des petits pas pourrait déboucher sur une loi-cadre plus générale, vu le contexte de désengagement de la vie publique dans lequel nous nous trouvons. Je soulèverai aussi, comme cela a été fait par un membre du groupe Les Républicains, la question de l’articulation entre ce texte et la proposition de loi de notre collègue Sylvain Waserman sur l’engagement associatif.

Enfin, nous avons déposé quelques amendements pour enrichir le texte et nous soulignons, encore une fois, le caractère très positif de ce petit pas.

M. Alain Tourret. Si cette proposition de loi est incontestablement un bon texte, je voudrais relever certains problèmes rencontrés par les associations.

Premièrement, la réserve parlementaire était utile. Je le dis d’autant plus que j’appartiens à un groupe qui a proposé sa suppression – on n’est pas toujours suivi dans ses conseils… (Sourires.)

Deuxièmement, les comptables des petites associations demandent actuellement à celles-ci de leur verser la somme de 200 euros pour préparer la mise en application du prélèvement à la source. Cela va à l’encontre de toutes les déclarations du Président de la République, c’est pourquoi je suis intervenu auprès du directeur des services fiscaux. 200 euros, ce n’est pas rien pour une association.

Troisièmement, nous n’avons pas fini de voir les conséquences de la réforme de l’ISF sur les ressources des associations. La suppression de la partie « actions, obligations, portefeuille » de l’ISF remet en cause la possibilité pour les contribuables de faire des dons pour diminuer l’assiette de leur impôt.

Enfin, j’ai créé et présidé l’association « Peindre en Normandie » qui a pour vocation d’acheter des tableaux impressionnistes. Cette grande association est propriétaire de 150 toiles, dont certaines de Claude Monet. Fort de cette expérience associative, je voudrais soulever deux autres problèmes. D’une part, la notion de contrôle n’apparaît guère dans cette proposition de loi : comment, dans les associations, contrôler la vente des actifs et la réception des legs ? D’autre part, vous proposez de rendre possibles les prêts entre associations, ce qui risque d’entraîner certaines d’entre elles dans une situation de désastre financier si l’argent qu’elles prêtent ne leur est pas remboursé. Bref, les contrôles doivent être systématiques si l’on veut améliorer la trésorerie des associations.

M. Rémy Rebeyrotte. Je voudrais tempérer la vision que certains d’entre nous pourraient avoir, en rappelant qu’à partir de janvier les associations bénéficieront de la baisse des charges patronales alors qu’elles ne bénéficiaient évidemment pas du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Cela représente quand même une manne financière de plusieurs millions d’euros.

Il reste que, depuis des années, on a de plus en plus de mal à trouver des personnes acceptant de prendre des responsabilités associatives. Par ailleurs, on peut se demander en quoi le numérique va transformer la vie associative et l’engagement associatif. Enfin, on a reparlé des emplois aidés. Or, dans ma circonscription, les questions qui me sont posées à ce sujet sont d’une tout autre nature que celles qui ont été soulevées ici. Elles me sont adressées par des personnes ayant bénéficié des premiers types d’emplois aidés comme les contrats emploi solidarité (CES) et les contrats emploi consolidé (CEC). Ces personnes, qui ne savaient pas qu’elles ne cotisaient pas pour leur retraite et qui atteignent aujourd’hui l’âge de cette retraite, se retrouvent dans des difficultés énormes car elles vont toucher une pension tout à fait indécente au regard du travail qu’elles ont accompli. Plusieurs d’entre nous, en tant que présidents d’association, avons embauché des personnes en contrat aidé au bénéfice de nos structures, mais je crains que certaines de ces personnes n’en paient le prix au moment d’accéder à la retraite.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Je suis ravie de cette unanimité – dont je ne doutais pas une seconde – et partage plusieurs de vos constats.

La mise en place du FDVA a effectivement posé des problèmes de calendrier, et le dispositif doit être amélioré de sorte que nos territoires soient traités à égalité. C’est la première année que ce fonds est mis en œuvre. À nous de renforcer l’accès à l’information.

Il est possible d’apporter des réponses à la baisse des dons, par exemple en élargissant l’assiette, en relevant le taux de la déduction d’impôt de 66 % à 70 % ou encore en portant le plafond de cette déduction de 20 % du revenu à 25 % ou 30 %. L’article 5, qui prévoit la remise d’un rapport au Parlement, nous donnera la base nécessaire pour aller plus loin en matière de fiscalité du mécénat et du don. Tout cela devrait rassurer notre collègue Pierre Morel-À-L’Huissier.

Quant à la diversité des associations sur nos territoires, elle est nécessaire. Celles-ci répondent à des problématiques de société telles que l’éducation populaire, la solidarité entre les territoires, le sport ou encore l’esprit national qui nous unit – je pense là aux associations d’anciens combattants et aux associations mémorielles.

Nous sommes collectivement en phase. Ce texte n’est qu’un petit pas mais, comme le dit l’adage, « qui veut voyager loin ménage sa monture ». Il faut que nous avancions lentement mais sûrement en suivant le bon axe. Nous alimentons aujourd’hui le sentiment que quand l’Assemblée nationale est saisie d’une question d’intérêt général, nous savons collectivement y répondre. C’est pourquoi je me félicite que nos collègues Julien Dive, Danièle Obono, Fabien Matras, Erwan Balanant et Jean-Félix Acquaviva aient souligné l’importance et la particularité des associations sur nos territoires.

La Commission en vient à l’examen des articles.

Article 1er (art. 9-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations) : Permettre aux associations de conserver un excédent raisonnable

La Commission examine l’amendement CL16 de la rapporteure.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Lors de nos auditions est apparue la question du contrôle et de l’évaluation, également soulevée par notre collègue Alain Tourret. Cet amendement y répond tout en satisfaisant un excellent amendement déposé par le groupe La France insoumise sur les associations à but non lucratif. L’adoption de mon amendement fera tomber l’amendement CL1. Je tiens donc à souligner que j’aurais été favorable à ce dernier.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 1er est ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement CL1 de M. Ugo Bernalicis tombe.

Article 2 (art. L. 511-7-1 [nouveau] du code monétaire et financier) : Permettre aux associations de procéder à des prêts au sein d’un même réseau

La Commission étudie l’amendement CL14 de M. Michel Fanget.

M. Philippe Latombe. Il s’agit d’un amendement de clarification rédactionnelle.

Mme Sarah El Haïry. Je vous demanderai de le retirer car il est satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL2 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Aux termes de l’article 2, « dès lors qu’existent entre elles des relations croisées, fréquentes et régulières ainsi qu’une stratégie commune définie par l’une d’entre elles », les associations ou fondations reconnues d’utilité publique peuvent tenir une trésorerie commune. Les modalités de la définition de cette « stratégie commune » nous paraissent ouvrir la voie à la mise sous tutelle de nombreuses associations par de grandes fondations dotées de moyens financiers importants. Nous proposons donc de prévenir ce risque en précisant que la stratégie commune doit être définie démocratiquement, selon le principe : « Un organisme, un droit de vote ».

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Avis défavorable. De fait, les associations ne peuvent avoir une trésorerie commune. Je comprends votre crainte, madame Obono – je suis moi-même particulièrement attachée au fonctionnement démocratique des associations –, mais elle n’est pas fondée. En outre, votre amendement risquerait de nuire à l’objectif de l’article 2, qui est de faciliter les liens que les associations peuvent tisser entre elles.

M. Fabien Matras. Le groupe La République en Marche est également opposé à cet amendement. J’entends la crainte de Mme Obono, mais je rappelle que, pour être reconnue d’utilité publique, une fondation ou une association doit fonctionner de manière démocratique. Il me semble donc que l’amendement CL2 est satisfait par le droit actuel.

Mme Danièle Obono. Notre objectif est de rééquilibrer les relations qui peuvent exister entre une très grande fondation, comme celles qui sont citées dans l’exposé sommaire, et une petite association, en renforçant le principe d’égalité dans la prise de décision. Nous maintenons donc l’amendement et nous lançons un appel à la vigilance.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements CL3 de M. Ugo Bernalicis et CL4 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Ces amendements ont pour objet de remédier aux difficultés bancaires des associations. Nous proposons en effet que soit expérimentée, soit la minoration de moitié – c’est l’objet de l’amendement CL3 –, soit la suppression – c’est l’objet de l’amendement CL4 – des frais bancaires des associations relevant du b de l’article 200 du code général des impôts et des organismes ayant pour objet la protection de l’environnement. Dans les deux cas, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) serait chargée de vérifier que les établissements ne répercutent pas cette minoration sur les autres clients et pourrait prendre, le cas échéant, des sanctions adaptées.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Avis défavorable. Nous avons déjà débattu de cette question lors de l’examen du projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE). Il s’agit, en l’espèce, d’offrir aux associations la possibilité de s’accorder des prêts, notamment dans les cas où les établissements bancaires leur refusent tout accompagnement.

M. Fabien Matras. Le groupe La République en Marche est également défavorable à ces amendements, qui porteraient atteinte à la liberté contractuelle dans la mesure où les taux des frais bancaires sont fixés dans le contrat qui lie la banque à son client.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l’article 2 sans modification.

Article 3 (art. L. 312-20 du code monétaire et financier) : Affecter le produit des comptes bancaires en déshérence des associations au Fonds pour le développement de la vie associative

La Commission est saisie de l’amendement CL19 de la rapporteure.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Cet amendement tend à réécrire l’article 3, car son alinéa 5, relatif à l’affectation au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) des avoirs détenus sur les comptes inactifs, relève de la loi de finances. Nous proposons donc un dispositif alternatif qui nous permettra d’aboutir au même résultat. Il est en effet prévu que, dans le rapport qu’elle remet chaque année au Parlement sur la gestion des comptes bancaires inactifs, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) fasse état des sommes qui auront été reversées au FDVA. Ainsi, nous pourrons vérifier si l’État verse, ou non, ces sommes au Fonds. Nous pourrons aller plus loin dans un second temps, en créant un fléchage automatique dans le cadre d’un projet de loi de finances.

Il s’agit donc, ici, d’un premier pas : grâce à cet amendement, les banques devront identifier les comptes des associations et nous pourrons connaître, chaque année, le montant des sommes qui doivent être affectées au FDVA.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. L’adoption de cet amendement ferait tomber les amendements CL15 et CL5. J’invite donc ceux de leurs auteurs qui le souhaitent à prendre la parole avant la mise aux voix.

M. Philippe Latombe. Nous approuvons l’amendement de Mme la rapporteure ; nous aurions donc, en tout état de cause, retiré le CL15.

Mme Danièle Obono. L’amendement CL5 est un amendement d’appel. Il vise à abonder le FDVA par le produit d’une taxe additionnelle dont devraient s’acquitter les entreprises qui auraient été condamnées pour fraude fiscale, corruption et atteinte à l’environnement ainsi que pour des infractions à la législation sanitaire.

M. Julien Dive. Je profite de l’examen de cet amendement pour évoquer le second volet du FDVA. Celui-ci est destiné au financement du fonctionnement et des projets innovants des associations. Or, la défunte réserve parlementaire, qu’il remplace, permettait de financer également des investissements : un défibrillateur cardiaque pour une salle des fêtes ou un tatami pour un club de judo, par exemple. Peut-être pourrions-nous étendre le second volet du FDVA au financement d’investissements, en prévoyant éventuellement un plafonnement afin d’éviter les excès.

M. Régis Juanico. Le groupe Socialistes et apparentés est favorable à la réécriture de l’article 3, puisqu’il s’agit de tenir compte du monopole des lois de finances en matière fiscale. Toutefois, je souhaite rappeler l’enjeu de cette disposition, qui consiste à permettre à l’État d’affecter au FDVA le produit des comptes bancaires en déshérence des associations. Actuellement, on recense 2,4 millions de comptes bancaires d’associations, pour seulement 1,3 million d’associations actives. Le nombre des comptes inactifs est donc de plus d’un million. J’ignore le montant exact des sommes qui y sont déposées, mais peu importe : elles représentent en tout état de cause plusieurs dizaines de millions d’euros qui pourraient, dans le cadre de la « loi Eckert », revenir au FDVA via la Caisse des dépôts et consignations. Je souhaiterais donc, madame la rapporteure, que vous nous indiquiez, d’une part, quels sont les obstacles techniques à l’identification des comptes des personnes morales – ne nous oppose-t-on pas des arguties à des fins dilatoires ? – et, d’autre part, quels sont les montants qui pourraient être récupérés par ce moyen.

M. Rémy Rebeyrotte. Je rejoins M. Juanico. Il faudrait inventer un dispositif qui permette que les moyens d’une association, dès qu’il a été constaté qu’elle n’avait plus de vie véritable, puissent bénéficier à d’autres associations œuvrant dans le même secteur. C’est du reste ce qui est prévu dans les statuts de la loi de 1901. Encore faut-il que les membres de l’association prennent le soin de la dissoudre et de transférer ses fonds vers une structure équivalente. Or, bien souvent, les choses restent en l’état. C’est dommage, car ces comptes dormants abritent des dizaines de millions qui pourraient être utiles à la vie associative.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Monsieur Dive, vous avez raison. Je me rappelle de nos débats lors de la création du FDVA : dans l’esprit du ministre, le financement pouvait concerner l’investissement comme le fonctionnement. Je m’en souviens car j’avais proposé le financement du drapeau d’une association d’anciens combattants ; or, il se trouve qu’une telle dépense est considérée comme un investissement. Cette question mérite que nous y réfléchissions.

Monsieur Juanico, la loi dite Eckert prévoit bien qu’il est possible de distinguer les structures selon qu’elles sont ou non associatives. Mais, comme la distinction n’est pas obligatoire, aucune banque ne mentionne cette information lorsqu’elle transfère le compte à la CDC. Or, si nous voulons mettre en œuvre un fléchage vers le FDVA, cette information est nécessaire. C’est le seul obstacle mentionné par la Caisse. Il faut donc que nous rendions l’information obligatoire ; c’est ce que je vous propose. Quant au montant des fonds, son estimation est très variable. On connaît la somme globale – 50 millions – qui a été versée cette année et on sait que les avoirs s’élèvent en moyenne, tous comptes confondus, à 680 euros. Mais le plus important – c’est l’esprit de cette disposition – est que nous posions le principe d’un transfert, quelle que soit la somme.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 3 est ainsi rédigé.

Les amendements CL15 de M. Michel Fanget et CL5 de M. Ugo Bernalicis tombent.

Après l’article 3

La Commission est saisie de l’amendement CL10 de M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Je ne reviendrai pas sur les conditions de fonctionnement du FDVA lors de sa première année d’existence, car nous en avons déjà longuement discuté dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2019. En l’espèce, nous proposons, par l’amendement CL10, que les parlementaires dont les circonscriptions sont situées dans la région soient membres de droit du collège départemental consultatif de la commission régionale du FDVA. Je rappelle que tel est déjà le cas pour la commission d’attribution de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), même si le nombre des parlementaires qui y siègent est limité à quatre.

Ces derniers peuvent faire bénéficier la commission de leur ancrage territorial et jouer un rôle de facilitateur auprès des associations, qui ont eu beaucoup de mal à être parfaitement « dans les clous » des cahiers des charges élaborés en préfecture. Je ne vois pas pourquoi les élus locaux pourraient siéger dans cette instance, et pas les parlementaires.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. M. Juanico ne sera pas étonné : avis défavorable. Sans doute faut-il faire évoluer le FDVA, mais la présence de parlementaires serait contraire aux dispositions que nous avons votées dans la loi rétablissant la confiance dans la vie politique.

M. Fabien Matras. Quels que soient les arguments utilisés, qui peuvent être entendus, une telle disposition serait contraire à ce que nous avons voté l’été dernier. Le groupe La République en Marche y est donc également défavorable.

M. Julien Dive. Pardonnez-moi, madame la rapporteure, mais votre argument ne tient pas, puisque des parlementaires siègent actuellement dans les commissions DETR, lesquelles attribuent des financements pour des projets communaux. J’ajoute que, dans la commission du FDVA, ils siégeraient parmi les élus locaux et les services de l’État notamment, ce qui n’était pas le cas dans le cadre de la réserve parlementaire, même si celle-ci était soumise à une procédure très transparente.

La proposition de M. Juanico est donc de bon sens. Dans les faits, les responsables d’associations viennent nous voir dans nos permanences. Auparavant, ils nous demandaient de les aider à boucler le financement d’un projet – il est même arrivé, depuis la suppression de la réserve parlementaire, que je fasse, et je ne suis sans doute pas le seul, des dons personnels à une association. Désormais, ils souhaitent qu’on les aide à remplir les dossiers du FDVA. Dans ce domaine, plus que le sous-préfet, puisque cette question relève de la compétence du préfet, le parlementaire est le référent dans sa circonscription. Il peut donc jouer un rôle important, sans pour autant influencer la décision de la commission. Du reste, il arrive que le préfet adresse au député – c’est mon cas – la liste des projets de sa circonscription qui ont été retenus par la commission du FDVA. Allons donc au bout des choses, en permettant au parlementaire d’être aux côtés du préfet, qui, souvent, ne connaît pas les associations.

Mme Emmanuelle Ménard. Je soutiens l’amendement CL10. D’abord parce que, le FDVA remplaçant la réserve parlementaire, il me semble logique que les députés puissent être associés à l’examen des dossiers soumis à la commission. Ensuite parce que c’est bien souvent le député qui informe les associations de l’existence de ce fonds, de sorte que celles-ci le sollicitent fréquemment pour qu’il les aide à remplir les dossiers ou leur indiquer l’état d’avancement de la procédure. Lorsque vous entretenez des relations cordiales avec le préfet et le sous-préfet, les choses se passent bien, mais ce n’est pas toujours le cas. Que le député soit associé de près au traitement des dossiers ne peut être que bénéfique.

M. Jean-Félix Acquaviva. Nous soutiendrons également l’amendement CL10, qui nous semble de bon sens. Le parallélisme des formes doit être respecté : nous participons, en tant que députés, à la commission DETR, qui arbitre en opportunité, donc de manière politique, en fonction de la qualité des projets ; il paraît donc logique que nous siégions au sein de la commission du FDVA, qui plus est dans un organe consultatif.

J’observe que, par petits pas, on donne beaucoup de pouvoir politique au préfet. De fait, leur décision d’aider telle ou telle association n’est pas seulement juridique ou administrative ; elle est politique, puisqu’elle relève de l’opportunité. Moi, cela me dérange. En démocratie, l’élu du peuple est un garant, quelle que soit la commission concernée. Encore une fois, l’amendement CL10 est modéré, puisqu’il ne prévoit qu’un avis consultatif. Qu’on prive l’élu du peuple, qui concourt à la fabrique de la loi, de la possibilité de donner un tel avis, c’est tout de même fort de café !

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Je soutiens également cet amendement, qui me semble de bon aloi. Qui connaît le mieux les associations d’un territoire ? Certainement pas le préfet, qui ne reste pas en poste plus de deux ans et demi, ni la Direction de la population, qui n’a pas souvent l’occasion de se rendre sur le terrain. Nous, nous connaissons, et les associations et leurs administrateurs : nous savons s’ils sont sérieux ou non. Il est donc très important que nous puissions donner un avis sur l’affectation des subventions.

M. Philippe Latombe. Nous avons déjà débattu de ce sujet à l’été 2017. Il n’est pas question de revenir sur ces dispositions : actuellement, sur le terrain, le dispositif fonctionne bien, même en notre absence.

Mme Emmanuelle Ménard. Non !

M. Philippe Latombe. Si. Par ailleurs, s’agissant de la DETR, la commission dans laquelle siègent les parlementaires rend un avis consultatif. Nous avons décidé, il y a quelques mois, que ces derniers ne participeraient pas à la commission du FDVA. Il n’y a pas de raison de revenir sur notre décision. Je voterai donc contre l’amendement.

M. Paul Molac. Cher collègue, l’avis de la commission DETR n’est pas simplement consultatif, et les parlementaires qui y siègent disposent du droit de vote dans les mêmes conditions que les autres membres. La commission se prononce sur la base des critères retenus par le préfet, mais peut également décider d’en imposer d’autres, et c’est bien à eux qu’il revient de valider la répartition de celles attribuées au titre de la DETR – alors que les élus sont simplement informés des sommes attribuées au titre de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL).

Le fait de redonner des pouvoirs aux préfets en matière d’attribution des subventions locales a sans doute contribué au mécontentement des associations, en raison des maladresses commises par certains préfets ayant tendance à empiéter sur les compétences des élus locaux – qui, comme nous, tirent leur légitimité de leur élection au suffrage universel.

Pour ma part, je voterai donc en faveur de l’amendement présenté par notre collègue Régis Juanico.

Mme Laurence Dumont. Il serait incohérent, de la part de la majorité, de refuser que les parlementaires siègent au sein du collège départemental de la commission régionale du FDVA, qui n’a qu’un rôle consultatif, alors qu’elle les a récemment intégrés à la commission DETR, qui dispose d’un vrai pouvoir de décision.

M. Rémy Rebeyrotte. La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), adoptée sous la précédente législature, a consacré un véritable retour en force des préfets en donnant à ceux-ci le pouvoir d’intervenir dans les décisions revenant jusqu’alors aux élus locaux : quand j’entends dire que la majorité actuelle est recentralisatrice, il me semble que certains ont la mémoire courte !

Mme Laurence Dumont. Le rapporteur de cette loi était Olivier Dussopt !

M. Rémy Rebeyrotte. Par ailleurs, il me semble que l’on ne peut que se féliciter de voir que l’annonce de la création d’un fonds dédié à la vie associative, faite lors de la suppression de la réserve parlementaire – un dispositif qui, quoi qu’on en dise, s’apparentait tout de même au fait du prince –, se concrétise aujourd’hui, ce qui laisse espérer que ce fonds pourra être mobilisé dès le premier semestre 2019. Certaines modifications peuvent éventuellement être apportées au FDVA, mais sachons au moins reconnaître que les choses évoluent au bénéfice de la vie associative sur nos territoires.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Je comprends que l’on puisse se poser des questions sur le calendrier de mise en place, le fonctionnement et la gouvernance du FDVA, ainsi que le parallélisme que l’on peut établir à son sujet avec la DETR, et je suggère que l’on ouvre le débat en séance publique sur tous ces points. En tout état de cause, les disparités objectives existant entre les territoires justifient que l’on procède à un état des lieux.

La Commission rejette l’amendement.

Article 4 (art. 706-160 du code de procédure pénale) : Confier à des associations d’intérêt général la gestion d’immeubles saisis lors de procédures pénales

La Commission examine l’amendement CL13 de M. Michel Fanget.

M. Philippe Latombe. Cet amendement vise à permettre aux fondations reconnues d’utilité publique de bénéficier, au même titre que les associations reconnues d’utilité publique, du dispositif de mise à disposition pour des finalités sociales de biens immobiliers confisqués.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Pour des raisons de forme, je vous suggère de retirer cet amendement.

M. Philippe Latombe. Cette proposition très simple revient en fait à se demander ce qui justifie que les fondations, dont la forme est très proche de celle des associations, ne bénéficient pas du même dispositif qu’elles.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Je ne conteste pas le bien-fondé de cette proposition, mais sa rédaction poserait un problème de coordination avec la suite de l’alinéa, qui fait référence à la loi de 1901 et au droit alsacien et mosellan.

M. Philippe Latombe. Nous le retirons et nous efforcerons de le modifier d’ici à la séance publique.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL18 de la rapporteure.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Afin d’éviter les effets d’aubaine, cet amendement vise à restreindre la mise à disposition des biens immobiliers confisqués à des fins de réutilisation sociales aux seules associations déclarées ou inscrites depuis au moins trois ans et dont l’ensemble des activités sont celles visées en matière de dons. En effet, il paraît opportun de circonscrire la mesure aux associations plutôt que de l’appliquer à toutes les entreprises agréées d’utilité sociale, qui peuvent distribuer des bénéfices.

M. Laurent Saint-Martin. Notre amendement CL9 sera satisfait par celui de la rapporteure.

M. Philippe Latombe. Notre amendement CL12 le sera également.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CL9 et CL12 tombent.

La Commission adopte l’article 4 modifié.

Article 5 : Rapport du Gouvernement sur l’état des lieux de la fiscalité liée aux dons

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL17 de la rapporteure.

Elle examine l’amendement CL6 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, nous souhaitons que la demande de rapport formulée par cette proposition de loi puisse aussi aborder le vrai sujet de fond qu’est la prise en charge par le secteur associatif de certains services publics locaux et nationaux.

En effet, dans une logique de coupes budgétaires marquées par l’austérité, et à un moment où le Gouvernement semble vouloir s’affranchir des règles de la fonction publique pour leur préférer celles, plus flexibles, du privé, de nombreux services publics, tant locaux que nationaux, ont été confiés à des associations, et d’anciens emplois de fonctionnaires ou d’agents publics se sont, de fait, trouvés transférés à des structures associatives – embauchant selon le code du travail et n’étant pas soumises aux mêmes règles comptables que les services de l’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics.

J’en veux pour preuve la place prise par les associations dans la mise en œuvre du service public, entérinée dès 2010 par une circulaire du Premier ministre, et qui va de pair avec l’austérité budgétaire imposée aux collectivités territoriales : désormais, les activités culturelles ou sportives ne sont plus assurées par les communes en régie, mais par des associations dédiées.

De nombreuses associations ont fait valoir que ce qui constitue un véritable transfert de compétences remet en question le sens même de leur action, notamment aux yeux des usagers du service public. S’il est souhaitable que les associations se développent, il convient de rechercher l’équilibre et la complémentarité entre leurs missions et celles relevant du service public, auxquelles elles n’ont pas vocation à se substituer.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Pour intéressante qu’elle soit, cette proposition me paraît très éloignée du texte, c’est pourquoi j’y suis défavorable.

M. Fabien Matras. Effectivement, nous pourrions envisager d’engager une réflexion sur la question soulevée par cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 5 modifié.

Après l’article 5

La Commission est saisie de l’amendement CL11 de M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. L’amendement CL11 vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l’opportunité d’affecter les dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations sur un compte d’affectation spéciale au bénéfice du Fonds pour le développement de la vie associative. Nous le retirons en commission, dans la mesure où il a surtout pour objet de permettre que s’engage une discussion en séance avec le ministre sur la question évoquée.

L’amendement est retiré.

Article 6 : Gage de recevabilité financière

La Commission adopte l’article 6 sans modification.

Après l’article 6

La Commission examine l’amendement CL7 de M. Jean-Félix Acquaviva.

M. Jean-Félix Acquaviva. Le seuil maximal d’exonération des principaux impôts commerciaux pour les associations s’élève, depuis le début des années 2000, à 62 250 euros du montant des recettes d’exploitation des activités lucratives.

Ce seuil mérite, à notre sens, d’être réévalué en tenant compte notamment de l’inflation.

Par ailleurs, selon le Haut Conseil à la vie associative (HCVA), ce seuil ne tient pas compte de la différence de situation entre les associations constituées sous forme fédérale et celles constituées sous forme d’une structure centralisée, dans la mesure où seule la personnalité morale est prise en compte.

Afin de supprimer ce qui constitue une différence de traitement, une limite en pourcentage de l’ensemble des ressources de l’association concernée – 3 % par exemple – pourrait être instaurée. C’est l’objet de cet amendement ayant pour finalité d’améliorer le financement des associations.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. Je comprends la motivation de cet amendement mais, compte tenu du fait que nous avons voté à l’article 5 l’établissement d’un rapport portant sur l’ensemble de la fiscalité associative, il me semble opportun que nous attendions d’en avoir pris connaissance avant de nous prononcer sur les questions particulières qui sont ici évoquées. Dans l’immédiat, je vous suggère donc de retirer cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL8 de M. Jean-Félix Acquaviva.

M. Jean-Félix Acquaviva. Le lancement de campagnes est l’un des moyens offerts aux associations pour développer leurs ressources privées. Si ces campagnes doivent faire l'objet d'une déclaration administrative, il n’est prévu aucun récépissé ni aucune mesure de publicité. Le donateur potentiel n’a donc aucun moyen de vérifier le respect des obligations déclaratives des associations qui le sollicitent.

Afin de sécuriser les campagnes d’appel aux dons, on peut envisager un récépissé de dépôt de déclaration de campagne et une publication sur le site de la direction de l’information légale et administrative (DILA). Ces mesures seraient de nature à renforcer la confiance des potentiels donateurs.

Mme Sarah El Haïry, rapporteure. La nécessité de sécuriser le donateur est essentielle pour renforcer le lien de confiance qui unit celui-ci aux associations. Cependant, l’amendement présenté aurait pour conséquence d’alourdir excessivement la procédure, la délivrance d’un récépissé nécessitant actuellement un délai beaucoup trop long. En attendant que ce récépissé puisse être émis au plus près du terrain, c’est-à-dire au niveau départemental, je vous invite à retirer votre amendement.

M. Jean-Félix Acquaviva. Je le retire, mais la question sera réabordée en séance.

L’amendement CL8 est retiré.

La Commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, la proposition de loi que nous venons d’adopter sera examinée en séance publique le jeudi 29 novembre.

*

*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de ladministration générale de la République vous demande dadopter la proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 

 


—  1 

   personnes entendues par la rapporteure

—  M. Jean-Benoît Dujol, délégué interministériel à la jeunesse, directeur

—  Mme Chantal Bruneau, secrétaire générale

—  M. Thierry Guillois, membre du bureau, président de la commission juridique

—  M. Christian Alibay, membre du bureau

—  Mme Elisabeth Viola, directrice, direction des clientèles bancaires

—  Mme Laetitia Dordain, directrice déléguée du département consignations et dépôts spécialisés, direction des clientèles bancaires

—  Mme Audrey Zarka, juriste, direction juridique et fiscale

—  M. Philippe Blanchot, directeur des relations institutionnelles

—  Mme Marie-Anne Barbat Layani, directrice générale

—  M. Nicolas Bodilis Reguer, directeur du département relations institutionnelles France

—  M. Pierre Bocquet, directeur du département banque de détail et banque à distance

—  Mme Anne Kostomaroff, directrice générale

—  M. Etienne Donat, chargé de la communication et de la formation

—  Mme Frédérique Pfrunder, déléguée générale

 


([1]) Article 1er de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association : « L'association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d'une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices. »

([2]) Décision 2012/21/UE et communication 2012/C8/03 de la Commission.

([3])  https://www.associations.gouv.fr/IMG/pdf/hcva-rapport_definitif_financement.pdf

([4])  https://www.associations.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_complet_chantier_vie_asso_lma.pdf

([5])  https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-avoirs-bancaires-et-les-contrats-dassurance-vie-en-desherence

([6])  Décision n° 2016-745 DC du 26 janvier 2017, paragraphe 176.

([7])  Délai calculé à compter de la décision de classement sans suite de l'affaire ou après la décision définitive de la dernière juridiction saisie.

([8]) Dans cette dernière hypothèse, l'État peut consentir à une décote de la valeur vénale du bien en application de l'article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques.

([9])  Décision n° 2016-745 DC du 26 janvier 2017, paragraphe 176.