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N° 1598

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 janvier 2019.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION de loi pour une école vraiment inclusive,

 

 

 

 

 

Par MChristophe BOUILLON,

 

 

Député.

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale :  1540.


 


— 1 —

   SOMMAIRE

___

Pages

AVANT-PROPOS

Principaux apports de la commission des affaires culturelles et de l’Éducation

commentaires des articles

Article 1er Amélioration de la préparation de la rentrée scolaire des élèves en situation de handicap

Article 2 Recrutement des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) en contrat à durée indéterminée (CDI) et organisation de leur formation continue

Article 3 Association des accompagnants aux équipes de suivi de la scolarisation (ESS) et au projet personnalisé de scolarisation (PPS)

Article 4 Formation des enseignants et personnels de lÉducation nationale à laccueil et léducation des élèves en situation de handicap

Article 5 Effectif maximal délèves dans les classes où sont scolarisés des élèves en situation de handicap bénéficiaires dun projet personnalisé de scolarisation (PPS)

Article 6 Encadrement des quotités horaires de laide mutualisée et des délais dexamen des demandes daide humaine présentées aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH)

Article 7 Amélioration de laccessibilité et des fonctionnalités du bâti des futurs établissements denseignement public

Article 8 Rapport au Parlement sur les réalités du handicap, les besoins et linclusion sociale des jeunes en situation de handicap

Article 9 Gage

Compte rendu des débats en commission

Réunion du mercredi 23 janvier à 9 heures 30

I. Discussion générale

II. Examen des articles

Article 1er Amélioration de la préparation de la rentrée scolaire des élèves en situation de handicap

Article 2 Recrutement des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) en contrat à durée indéterminée (CDI) et organisation de leur formation continue

Après l’article 2

Article 3 Association des accompagnants aux équipes de suivi de la scolarisation (ESS) et au projet personnalisé de scolarisation (PPS)

Après l’article 3

Article 4 Formation des enseignants et personnels de l’éducation nationale à l’accueil et l’éducation des élèves en situation de handicap

Article 5 Effectif maximal d’élèves dans les classes où sont scolarisés des élèves en situation de handicap bénéficiaires d’un projet personnalisé de scolarisation (PPS)

Article 6 Encadrement des quotités horaires de l’aide mutualisée et des délais d’examen des demandes d’aide humaine présentées aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH)

Après l’article 6

Article 7 Amélioration de l’accessibilité et des fonctionnalités du bâti des futurs établissements d’enseignement public

Après l’article 7

Article 8 Rapport au Parlement sur les réalités du handicap, les besoins et l’inclusion sociale des jeunes en situation de handicap

Après l’article 8

Article 9 Gage

Après l’article 9

Titre

Annexe 1 : Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur

Annexe 2 : Liste des textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi


— 1 —

  AVANT-PROPOS

La loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République ([1]) a consacré la notion d’« inclusion scolaire » ([2]) des élèves en situation de handicap, en gravant, dans le marbre de l’article L. 111-1 du code de l’éducation, le principe selon lequel le service public de l’éducation « veille à linclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction ».

Cette loi a constitué une étape importante dans la série d’avancées qu’a connues notre législation, dans un relatif consensus, depuis la loi du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées – qui a institué la notion d’obligation scolaire ([3]) –, jusqu’à la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ([4])
– qui a instauré l’obligation d’assurer à l’élève en situation de handicap une scolarisation en milieu ordinaire au plus près du domicile, de garantir une continuité de son parcours et d’assurer l’égalité des chances aux examens –, en passant par les circulaires de 1982 visant à mettre en œuvre « une politique dintégration en faveur des enfants et adolescents handicapés » – qui ont permis de développer un meilleur accueil au sein de l’institution scolaire ([5]) – et par la ratification de la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées (CIDPH) du 13 décembre 2006.

Cependant, sans faire le procès d’aucun Gouvernement ni d’aucune majorité, force est de constater aujourd’hui qu’il reste une conséquente marge de progrès en matière d’accueil des quelque 341 500 élèves en situation de handicap qui, d’après le ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse, M. Jean-Michel Blanquer, étaient scolarisés en milieu ordinaire à la rentrée 2018 ([6]), ainsi qu’en matière d’accompagnement de la moitié de ces élèves qui bénéficie d’une aide humaine ([7]).

Un certain nombre de « ratés » ont été dénoncés par le Défenseur des droits, M. Jacques Toubon, qui, en 2016, a jugé la situation des enfants handicapés en France « préoccupante », expliquant que « laccès à lécole pour ces enfants comporte encore de réels obstacles : en matière de transport, daccompagnement humain, de matériel, daccessibilité » ([8]). Lors de son audition, la cheffe du pôle « Défense des droits de l’enfant » au sein des services du Défenseur des droits, Mme Marie Lieberherr, a ajouté que la part des réclamations relatives à des jeunes en situation de handicap sur l’ensemble des réclamations relatives aux droits de l’enfant dont elle est saisie, est passée de 22 % en 2017 à 30 % en 2018.

En 2016, c’est le comité des droits de l’enfant de l’Organisation des Nations Unies (ONU) qui, dans son rapport concernant la France, s’est déclaré « préoccupé par :

a) La persistance de la discrimination à légard des enfants handicapés, en particulier des enfants présentant des handicaps multiples, en termes daccès à léducation et dégalité avec les autres enfants, notamment pendant les activités récréatives et extrascolaires, au sein des établissements scolaires et dans le cadre de la formation professionnelle ;

b) Les grandes difficultés quont les familles à obtenir et à conserver le soutien nécessaire auquel elles ont droit, notamment des heures daccompagnement scolaire en quantité suffisante ;

c) Linsuffisance de la formation et du soutien dont bénéficie le personnel scolaire, le nombre insuffisant dassistants spécialisés et qualifiés et le nombre limité de programmes scolaires, de supports denseignement et dévaluation et de salles de classe accessibles et adaptés. » ([9])

Nul n’est besoin de lire les rapports du Défenseur des droits ou de l’ONU pour constater les lacunes d’un système que certains députés de la majorité ont eux-mêmes présenté comme « à bout de souffle » au printemps 2018 ([10]). En effet, le rapporteur, comme nombre de parlementaires, a pu voir affluer, dans les locaux de sa permanence, un nombre grandissant de familles inquiètes, désemparées et plongées dans une grande souffrance en raison des difficultés (voire de l’impossibilité) de scolariser leur enfant en milieu ordinaire faute de bénéficier de l’accompagnement humain qui a pourtant été prescrit par une commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH).

Faute de statistiques fiables et disponibles rapidement, il semble difficile d’évaluer avec précision le nombre d’élèves en situation de handicap qui, à l’échelle nationale, attendaient un accompagnement à la date de la rentrée scolaire de 2018 – ce que les services du Défenseur des droits ont regretté lors de leur audition, ajoutant qu’ils étaient toujours en attente de réponses du ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse à qui ils ont demandé un certain nombre de données en octobre dernier.

Deux rapports publiés lan passé faisaient état denviron 11 000 élèves en attente dun accompagnement fin 2016 et au 31 mars 2017 ([11]) – soit environ 7 % des élèves en situation de handicap en principe bénéficiaires dune aide humaine. Daprès les représentants dassociations entendus par le rapporteur, les chiffres les plus récents disponibles à la fin de lannée dernière au ministère de lÉducation nationale porteraient sur la rentrée scolaire de 2017. Toutefois, une enquête réalisée en septembre 2018 par plusieurs associations ([12]) révèle que, sur un échantillon de quelque deux mille familles dont les enfants et adolescents en situation de handicap se sont vus prescrire un accompagnement, cest plus du tiers dentre elles (34 % exactement) qui, à la dernière rentrée scolaire, étaient en attente.

Le rapporteur juge cette situation inadmissible : personne ne tolérerait que 30 %, 20 % ou même 10 % des élèves qui ne sont pas en situation de handicap ne soient pas pris en charge dans des conditions satisfaisantes (voire pris en charge tout court) à la rentrée scolaire. Il ny aucune raison quil en aille différemment pour les élèves en situation de handicap.

Cest la raison pour laquelle, considérant quil relevait de leur rôle de parlementaires de créer les conditions pour quil ny ait plus autant (voire plus du tout) délèves en attente daccompagnement à la prochaine rentrée scolaire, le rapporteur et ses collègues du groupe Socialistes et apparentés ont déposé, en décembre dernier, la présente proposition de loi.

Sans bouleverser l« écosystème » de la scolarisation des élèves en situation de handicap en milieu ordinaire, celle-ci avance un certain nombre de solutions pragmatiques, nourries des constats et remontées du terrain.

Afin de répondre aux préoccupations des familles qui aujourd’hui subissent souvent les conséquences d’un défaut d’anticipation de la rentrée scolaire, l’article 1er de la proposition de loi leur garantissait, avant d’être supprimé par la majorité en commission, l’affectation d’un accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH) au moins un mois et demi avant la rentrée ainsi que la tenue, au plus tard le jour ouvré précédant la rentrée scolaire, d’un entretien avec l’enseignant et l’accompagnant qui auront la charge de leur enfant. Cela suppose toutefois d’encadrer les délais d’examen des demandes d’aide humaine par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), ce que faisait l’article 6 de la proposition de loi qui a, lui aussi, été supprimé par la majorité en commission et au sujet duquel le rapporteur tient à souligner qu’il a parfaitement conscience qu’un certain nombre de difficultés ne trouveront pas de solutions sans que soit posée la question des moyens (financiers et humains).

Grâce à ces dispositifs, les élèves en situation de handicap auraient, comme les autres élèves, une visibilité sur les conditions de leur prochaine rentrée scolaire dont on pourrait par ailleurs imaginer quelle soit facilitée avec laide dun certain nombre dacteurs associatifs, comme la suggéré lors de son audition le président de lAssociation pour adultes et jeunes handicapés (APAJH), M. JeanLouis Garcia.

Par la même occasion, leurs accompagnants auraient une meilleure visibilité sur leur devenir professionnel lors de cette prochaine rentrée.

Afin de répondre aux préoccupations de ces derniers, l’article 2 de la proposition de loi (également supprimé par la majorité en commission) sécurisait :

– leur situation professionnelle, en leur garantissant un recrutement en contrat à durée indéterminée (CDI) de droit public, qui, selon le rapporteur, devrait être conçu de façon à ce que le contrat survive aux éventuels changements d’académie, rendus par exemple nécessaires pour les besoins d’éventuels rapprochements de conjoints ;

 leur parcours professionnel, en leur garantissant la formation continue et la validation des acquis de lexpérience (VAE) propices à leur évolution de carrière.

Larticle 3 clarifie quant à lui leur positionnement au sein des établissements scolaires en les associant aux équipes de suivi de la scolarisation (ESS).

Enfin, afin de répondre aux préoccupations des enseignants et personnels de l’Éducation nationale, l’article 4 de la proposition de loi organise les conditions d’une meilleure formation à l’accueil et à l’éducation des élèves en situation de handicap – formation hétérogène qui semble aujourd’hui s’apparenter davantage à de l’information.

L’article 5 (là encore supprimé par la majorité en commission) tendait quant à lui à améliorer les conditions d’enseignement, d’une part en fixant un effectif maximal au sein des classes du premier degré dans lesquelles des élèves en situation de handicap sont scolarisés, et, d’autre part, en prévoyant une majoration de la dotation horaire globalisée (DHG) des établissements du second degré accueillant ces élèves – étant précisé que, du point de vue du rapporteur, la présence dans ces établissements d’unités d’enseignement externalisées ([13]) devrait aussi conduire à une bonification de leur DHG.

L’amélioration des conditions d’enseignement passant aussi par celle du bâti et de ses fonctionnalités, l’article 7 de la proposition favorise une meilleure anticipation des besoins en prévoyant que, pour les futurs établissements de l’enseignement public, l’avis des équipes des établissements médico-sociaux sur les projets de construction soit systématiquement sollicité.

Le rapporteur n’ignore pas que le Gouvernement a pris des initiatives pour améliorer l’état des choses. Il a ainsi lancé un plan national visant l’ouverture de 250 Unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis) supplémentaires au lycée d’ici 2022 ([14]). Mais il semblerait que ce plan soit loin d’être à la hauteur des enjeux puisque, selon un rapport publié l’an dernier, sur la base du scénario actuel d’augmentation annuelle de 7 % d’élèves en Ulis de 2018 à 2022, ce n’est pas 50 Ulis supplémentaires qu’il faudrait créer chaque année, mais « 240 Ulis par an en moyenne » ([15]) – soit près de cinq fois plus que ce qu’envisage le Gouvernement.

Le Gouvernement a également engagé, en octobre dernier, une concertation intitulée « Ensemble pour une école inclusive ». Mais il ressort des auditions conduites par le rapporteur que, d’après les acteurs qui y sont associés, peu d’informations soient données quant au contenu, au véhicule (législatif ou réglementaire) et au calendrier de mise en œuvre des mesures qui pourraient être issues de cette concertation. Seront-elles, en cours de navette parlementaire, intégrées au projet de loi n° 1481 pour une école de la confiance que l’Assemblée nationale s’apprête à discuter ?

À cet égard, alors même que la perspective de lexamen de ce texte avait pu être brandie par la majorité pour rejeter de récentes initiatives parlementaires ([16]), lon ne peut que déplorer que le projet de loi déposé ne comporte aucune mesure relative à linclusion scolaire des élèves en situation de handicap.

Animée par le souci d’être constructive, la présente proposition de loi offre au Gouvernement et à la majorité une occasion de réparer cet oubli et de réaliser des avancées dès à présent, car, aux yeux du rapporteur, il est grand temps de cesser de procrastiner sur ces questions. Celles-ci appellent une réponse urgente de la représentation nationale qui pourrait, plus tard, se voir reprocher de n’avoir rien entrepris pour apaiser les souffrances et les angoisses de milliers d’élèves et de familles.

Le véritable acte de confiance, ce serait aujourd’hui celui par lequel la représentation nationale adopterait la présente proposition de loi.

 

 

 

 

 


— 1 —

   Principaux apports de la commission
des affaires culturelles et de l’Éducation

Lors de son examen de la présente proposition de loi, le mercredi 23 janvier 2019, la commission des Affaires culturelles et de l’éducation a supprimé les articles 1er, 2, 5 et 6 de la présente proposition de loi.

Elle a adopté sans modification les articles 4 et 8.

Elle a adopté, avec modifications, les articles 3 et 7.

À l’article 3, elle adopté un amendement de M. Philippe Berta et de plusieurs de ses collègues du groupe Mouvement démocrate et apparentés visant à étendre les missions des équipes de suivi de la scolarisation (ESS) à l’accompagnement des familles.

À l’article 7, elle a adopté :

– un amendement du rapporteur visant à étendre l’obligation faite par cet article au conseil municipal, départemental ou régional et à la collectivité territoriale de Corse, de recueillir l’avis des équipes des établissements sociaux et médico-sociaux sur un projet de construction d’un établissement d’enseignement public, aux éventuels projets de reconstruction ou de réhabilitation des bâtiments existants de ce type d’établissement d’enseignement qui auront été décidés après la promulgation de la présente proposition de loi ;

– un amendement de Mme Béatrice Descamps visant à clarifier la portée de l’avis ainsi sollicité par les collectivités territoriales en précisant qu’il s’agit d’un avis simple, et pas conforme.

La commission a adopté à l’unanimité la proposition de loi ainsi modifiée.

 


— 1 —

   commentaires des articles

Article 1er
Amélioration de la préparation de la rentrée scolaire
des élèves en situation de handicap

Rejeté par la commission

Le présent article vise à améliorer la préparation de la rentrée scolaire des élèves en situation de handicap en imposant que soient garanties, en amont de celle-ci :

- l’affectation d’un accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH) au moins un mois et demi avant la rentrée ;

- la tenue, au plus tard le jour ouvré précédant la rentrée scolaire, d’un entretien entre, d’une part, les parents ou le représentant légal de l’élève en situation de handicap, et, d’autre part, le ou les enseignant(s) qui en auront la charge ainsi que la personne chargée de l’aide individuelle ou mutualisée attribuée à l’élève.

Les dispositions du présent article sont directement inspirées de la proposition de loi n° 1283 visant à améliorer les conditions de rentrée scolaire des enfants en situation de handicap, que le rapporteur a déposée au début du mois d’octobre 2018.

Partant du constat que, de nos jours, la quasi-totalité des écoliers savent en juin, et même souvent plus tôt encore, dans quelles conditions ils seront scolarisés à la prochaine rentrée, la proposition de loi précitée tendait à obliger le service public de l’éducation à assurer aux familles des élèves en situation de handicap l’affectation d’un AESH ou d’un auxiliaire de vie scolaire (AVS) au plus tard à la date symbolique du 14 juillet, afin que ces élèves sachent, comme leurs camarades, dans quelles conditions ils seront accueillis à la rentrée scolaire de l’automne.

C’est loin d’être toujours le cas aujourd’hui : les élèves en situation de handicap sont, au contraire, bien souvent livrés à une incertitude qui est source d’inquiétude, pour les familles comme pour les enseignants qui ont ces élèves en charge.

En effet, l’affectation d’un AESH ou d’un AVS n’intervient que (trop) tardivement (2), à l’issue d’un long processus au cours duquel les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) jouent un rôle décisif (1).

1.   Le processus d’affectation d’une aide humaine

Créées par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, les MDPH associent le conseil départemental, les services de l’État, les organismes de protection sociale (caisses d’allocations familiales et d’assurance-maladie) ainsi que des représentants des associations représentatives des personnes en situation de handicap. Elles sont chargées de l’accueil, de l’accompagnement, de l’information et du conseil des personnes handicapées et de leurs proches dès l’apparition du handicap et tout au long de son évolution ([17]).

Dans chaque département, il existe une MDPH qui fonctionne comme un guichet unique pour toutes les démarches liées aux diverses situations de handicap et pour l’accès à tous les droits, prestations et aides dont peuvent bénéficier les personnes en situation de handicap.

Au sein des MDPH, des équipes pluridisciplinaires dévaluation (EPE) ([18]) comprenant des médecins, des infirmiers, des ergothérapeutes ou encore des psychologues procèdent à une évaluation fine des besoins des personnes en situation de handicap, sur la base de laquelle les commissions des droits et de lautonomie des personnes handicapées (CDAPH) ([19]) reconnaissent les droits à compensation des conséquences du handicap consacrés par larticle L. 114-1-1 du code de laction sociale et des familles ([20]).

Ce texte prévoit en effet que « la personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient lorigine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie. Cette compensation consiste à répondre à ses besoins, quil sagisse de laccueil de la petite enfance, de la scolarité, de lenseignement, de léducation, de linsertion professionnelle, des aménagements du domicile ou du cadre de travail nécessaires au plein exercice de sa citoyenneté et de sa capacité dautonomie ».

Les besoins de compensation sont inscrits dans un plan personnalisé de compensation du handicap élaboré en considération des besoins et des aspirations de la personne handicapée tels quils sont exprimés dans son projet de vie, formulé par la personne ellemême ou, à défaut, avec ou pour elle par son représentant légal lorsquelle ne peut exprimer son avis.

Sagissant des enfants et adolescents en situation de handicap, ils bénéficient dun projet personnalisé de scolarisation (PPS) qui détermine les conditions de leur scolarisation jusquà lenseignement supérieur. Lorsquils sont scolarisés en milieu ordinaire, la compensation des conséquences de leur handicap prend (de plus en plus) souvent la forme de laide humaine dun AVS ou dun AESH, mais elle peut aussi se traduire par la fourniture dun matériel pédagogique adapté ou encore par des aménagements pour passer les examens.

Un enfant en situation de handicap peut :

 soit être inscrit dans un établissement scolaire ordinaire disposant de classes spécialisées : unités localisées pour linclusion scolaire (Ulis école) en primaire, sections denseignement général et professionnel (Segpa) au collège, et unités localisées pour linclusion scolaire (Ulis collège ou lycée) au collège et au lycée ;

– soit être inscrit en milieu adapté, c’est-à-dire dans un établissement médico-social ;

– soit bénéficier d’un enseignement à distance délivré par le Centre national d’enseignement à distance (CNED) ou par un service d’éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) ;

– soit, s’il est hospitalisé, suivre un enseignement individualisé adapté à son âge et son handicap dans un centre scolaire du service pédiatrique de l’hôpital.

S’agissant du choix du type d’établissement dans lequel l’enfant en situation de handicap est scolarisé, il revient en principe aux CDAPH. Depuis la loi du 11 février 2005, ce n’est plus l’Éducation nationale qui est responsable de la décision d’orientation de cet enfant : elle doit fournir une réponse à des compensations décidées par les instances indépendantes que sont les CDAPH, sans préjuger des moyens de gestion.

En application de l’article L. 351-2 du code de l’éducation, ce sont en effet les CDAPH qui désignent les établissements ou les services – ou à titre exceptionnel l’établissement ou le service – correspondant aux besoins de l’enfant ou de l’adolescent en mesure de l’accueillir. Leurs décisions s’imposent aux établissements scolaires ordinaires comme aux établissements médico-sociaux, dans la limite de la spécialité au titre de laquelle ils ont été autorisés ou agréés. Lorsque les parents ou le représentant légal de l’enfant ou de l’adolescent handicapé font connaître leur préférence pour un établissement ou un service correspondant à ses besoins et en mesure de l’accueillir, les CDAPH sont tenues de faire figurer cet établissement ou service au nombre de ceux qu’elles désignent, quelle que soit sa localisation.

Par ailleurs, lorsque les CDAPH constatent que la scolarisation d’un enfant dans une classe de l’enseignement public ou d’un établissement privé sous contrat requiert une aide individuelle ou mutualisée dont elle détermine la quotité horaire et qui est apportée par un AESH, elles le notifient à ces établissements, conformément à l’article L. 351-3 du code de l’éducation.

SchÉma du parcours de mise en place de l’accompagnement
des ÉlÈves en situation de handicap

 

Source : IGAS-IGEN-IGAENR, Évaluation de laide humaine pour les élèves en situation de handicap, juin 2018, p. 34.

2.   L’allongement des délais d’attente de l’aide humaine prescrite par les CDAPH

Selon le rapport remis l’an dernier au Gouvernement par les inspections générales des Affaires sociales (IGAS), de l’Éducation nationale (IGEN) et de l’administration de l’Éducation nationale et de la recherche (IGAENR), « face aux délais dattente pour une orientation dans un établissement ou une structure [spécialisée], les parents expriment le souhait que leur enfant soit inclus dans une classe. Laide humaine devient une compensation de la difficulté à trouver une place dans les établissements médicosociaux » ([21]).

L’attribution d’une aide humaine tend donc à se développer, à tel point qu’on estime qu’en 2014, le taux de réponses favorables des CDAPH aux demandes d’aide humaine qui leur étaient adressées s’élevait à 88,4 %.

Or, face à cet essor des décisions d’octroi d’une aide humaine et aux difficultés de recrutement des personnes chargées de cette aide, les établissements scolaires auxquels sont notifiées les prescriptions d’accompagnement se trouvent confrontés à la difficulté de fournir une solution rapide au nombre toujours plus grand d’élèves concernés. Ainsi, « dans certains départements, on dénombre une trentaine délèves en situation dattente, mais dans dautres, ce nombre peut dépasser 1 500 », de sorte que l’obligation légale de déférer à la notification d’aide humaine n’est actuellement pas respectée ([22]).

Tout en soulignant que « pour les élèves scolarisés dans les établissements ordinaires, le nombre de prescriptions daccompagnement a nettement augmenté depuis 2012 (+ 64,1 % en 4 ans soit un rythme annuel moyen supérieur à 10 %) » et que « léducation nationale est parvenue à maintenir le taux de couverture des prescriptions à un niveau très élevé » (92,6 % en 2016), la Cour des comptes, dans la communication qu’elle a adressée l’an dernier à la commission des Finances du Sénat, faisait état d’environ 11 000 enfants en attente d’un accompagnement en 2016 ([23]).

ÉLÈves en attente d’un accompagnement

Source : Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO), 2017.

évolution des prescriptions des CDAPH pour la scolarisation des élèves
en situation de handicap

 

2011

2012

2013

2014

2015

2016

δ12-16 (%)

Taux de couverture des prescriptions en % (1)

92,8

93,0

94,5

93,8

93,9

92,6

 

Dont aide humaine individuelle

 

93,4

94,8

94,0

93,9

93,4

 

Dont aide humaine mutualie

 

73,4

93,5

93,2

93,9

91,5

 

Nombre de prescriptions rues (2)

75 559

89 273

103 525

119 944

130 819

146 507

64,1

Dont aide humaine individuelle

 

87 286

78 405

80 848

83 166

87 860

0,7

Dont aide humaine mutualie

 

1 987

25 120

39 096

47 653

58 647

2 852

Part de laide mutualie %

-

2

24

33

36

40

1 698

Nombre délèves en situation de handicap bénéficiant de l’aide prescrite (1)*(2)

70 119

83 024

97 831

112 507

122 839

135 665

63,4

Dont aide humaine individuelle

-

81 565

74 340

76 020

78 093

82 026

0,6

Dont aide humaine mutualie

-

1 458

23 491

36 487

44 746

53 639

3 578

Part de laide mutualie %

 

2

24

32

36

40

2 151

Nombre délèves en attente

5 440

6 249

5 694

7 437

7 980

10 842

73,5

Dont aide humaine individuelle

 

5 721

4 065

4 828

5 073

5 834

2,0

Dont aide humaine mutualie

 

529

1 629

2 609

2 907

5 008

848

Part de laide mutualie %

 

8

29

35

36

46

446

Champ : enseignements public et privé des premier et second degrés, France métropolitaine et DOM.

Sources : RAP de la MIES de 2013 et 2016, retraitement Cour des comptes

Le Défenseur des droits est régulièrement saisi des lenteurs dans la mise en place de l’accompagnement humain prescrit par les CDAPH – et ce alors même que les parents formulent globalement des demandes bien en amont de la rentrée scolaire ([24]). D’après ses services, il aurait même, à une dizaine de reprises, rappelé à l’ordre des CDAPH qui, en toute illégalité, conditionnaient l’ouverture du droit de l’enfant ou de l’adolescent à un accompagnement humain aux capacités de l’État de le mettre en place.

La presse s’est fait l’écho des défaillances constatées par le Défenseur des droits. Ainsi a-t-on appris qu’en Haute-Garonne, selon le collectif dAVS locaux et le syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGCFédération syndicale unitaire (SNUIPP-FSU), plus de 1 000 élèves en situation de handicap navaient pas daccompagnants à la rentrée scolaire 2018 (contre 600 lannée précédente) ([25]).

Plus globalement, une enquête sur la dernière rentrée scolaire réalisée auprès de quelque deux mille personnes par lassociation dinformation et de soutien pour linclusion des personnes atteintes de handicap cognitif  Tous pour linclusion ! » – TouPI) et par les associations Autisme France, Egalited et Info Droit Handicap révèle que, sur cet échantillon, ont été signalés, au 20 septembre 2018 :

 683 élèves sans AVS, dont 123 qui ont été entièrement privés de scolarisation du fait de cette absence ;

 132 élèves bénéficiaires dune aide individuelle pour un temps inférieur à celui notifié par la MDPH ;

 346 élèves encore en attente de la notification dAVS, malgré des dossiers déposés bien souvent plus de quatre mois auparavant ([26]).

Selon cette enquête, « à léchelle nationale, 12 000 à 15 000 élèves nont pas leur AVS et 2 000 à 3 000 sont privés de scolarisation en raison de labsence de leur AVS » ([27]).

Les auteurs de lenquête ajoutent que « parmi les élèves qui avaient leur AVS à la rentrée, notons que pour la plupart des familles, cest le suspense : seules 43 % des familles savaient, plus dune semaine avant la rentrée, que lAVS serait là à la rentrée. 18 % lont su moins dune semaine avant la rentrée. Et 39 % nen savaient rien jusquau jour de la rentrée. On imagine à quel point il est difficile pour les familles de sorganiser dans ces conditions, sans savoir, dans certains cas, si lenfant ira ou non à lécole. On imagine aussi la difficulté, pour les élèves, à supporter le stress de cette incertitude. Les élèves porteurs de certains handicaps comme lautisme sont très sensibles aux changements et peuvent être très perturbés lorsque, le jour de la rentrée, ils se voient refoulés de lécole faute dAVS et contraints de retourner chez eux, ou même lorsquils peuvent rester en classe, mais sans lAVS quils pensaient avoir. Outre quaucune information sur la présence ou non de lAVS nest transmise spontanément aux parents avant la rentrée, les parents témoignent de leurs difficultés à joindre les services de lÉducation nationale. Dans certains cas, en juin, on avait informé les familles que lAVS serait là. Et en septembre, elles découvrent que lAVS est absente car son contrat na pas été signé à temps ou parce quon leur a délibérément caché linformation. […] Aucune amélioration dans linformation des familles nest perceptible dans notre enquête dune année sur lautre. Pourtant la demande est forte comme lexprime cette maman : « Lidéal serait de pouvoir être informée de la situation AVANT la rentrée afin dorganiser laccueil avec présentation des spécificités de lautisme et de lélève ou prévenir lélève dune rentrée différée si pas dAVS ». » ([28]).

Cest précisément ce à quoi tend le présent article.

3.   L’amélioration des conditions de la rentrée scolaire des élèves en situation de handicap

Afin de remédier aux difficultés constatées d’une rentrée scolaire à l’autre, y compris lors de celle de 2018, de combler le défaut d’information des élèves en situation de handicap et de leurs familles et de leur épargner l’anxiété qui résulte du non-respect de l’obligation légale de déférer à la notification d’aide humaine, le I du présent article tend à favoriser les conditions d’une rentrée scolaire plus sereine en modifiant à cet effet l’article L. 112-1 du code de l’éducation.

En l’état du droit, l’alinéa premier de cet article dispose que « le service public de léducation assure une formation scolaire, professionnelle ou supérieure aux enfants, aux adolescents et aux adultes présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant. Dans ses domaines de compétence, lÉtat met en place les moyens financiers et humains nécessaires à la scolarisation en milieu ordinaire des enfants, adolescents ou adultes handicapés ».

Il s’agit de compléter cet alinéa par deux phrases.

La première prévoit que, lorsque la CDAPH, mentionnée à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles, constate que la scolarisation d’un enfant ou d’un adolescent en situation de handicap dans une classe d’un établissement d’enseignement public ou d’un établissement d’enseignement privé sous contrat (régi par l’article L. 442-1 du code de l’éducation), requiert une aide humaine individuelle ou mutualisée, le service public de l’éducation assure aux parents ou au représentant légal de cet enfant ou adolescent l’affectation d’un AESH au plus tard le quarante-cinquième jour précédant la rentrée scolaire – et ce conformément à l’article L. 111-1 du code de l’éducation. Cet article dispose en effet que le service public de l’éducation « veille à linclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction ».

Le choix de faire référence au quarante-cinquième jour précédant la rentrée scolaire plutôt qu’à la date du 14 juillet, comme proposé par le rapporteur dans une précédente proposition de loi, tient à ce que cette rentrée, qui a lieu en septembre en métropole, ne se déroule pas nécessairement au même moment sur l’ensemble du territoire national, et notamment en outre-mer.

Outre cette garantie d’affectation d’un accompagnant au moins un mois et demi avant la rentrée scolaire, la seconde phrase qu’il est proposé d’ajouter au premier alinéa de l’article L. 112-1 du code de l’éducation prévoit que les parents ou le représentant légal de l’enfant ou de l’adolescent en situation de handicap bénéficient, au plus tard le jour ouvré précédant la rentrée scolaire, d’un entretien avec non seulement le ou les enseignants qui auront la charge dudit enfant ou adolescent pour l’année scolaire, mais aussi la personne chargée de l’aide individuelle ou mutualisée (autrement dit, l’AESH – ou l’AVS, dans l’attente du recrutement de l’ensemble des accompagnants sous le statut d’AESH).

Du point de vue du rapporteur, il est important que les accompagnants soient associés à cet entretien préalable à la rentrée scolaire car, trop souvent, ils ignorent tout ou presque du handicap du ou des élève(s) qu’ils sont chargés d’accompagner et qu’ils ne « découvrent » que le jour de la rentrée.

Cela suppose toutefois que leur contrat ne débute pas au jour de la rentrée scolaire, mais un peu plus en amont – ce qui serait concevable si leur affectation était décidée au moins quarante-cinq jours avant ladite rentrée.

Le rapporteur tient à souligner que, contrairement à ce qui a pu être prétendu lors des débats sur la proposition de loi en commission, ces mesures n’ont rien d’irréaliste.

En effet, le « Vade-mecum de la rentrée scolaire » établi en mars 2018 par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) à destination des MDPH et des autorités académiques ([29])  propose un calendrier de traitement des demandes d’aide adressées aux MDPH qui fixe comme objectif la date du 6 juillet (au moins pour les demandes de renouvellement d’aide présentées avant la mi‑avril).

Par ailleurs, ainsi que l’ont souligné les représentants de la CNSA lors de leur audition, un vaste chantier d’harmonisation des systèmes d’information (et à travers eux des pratiques) des MDPH devrait être achevé d’ici la fin de l’année 2019. Cette harmonisation devrait permettre à moyen terme une accélération des délais de traitement des dossiers déposés auprès des MDPH.

Le II du présent article renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de préciser, au besoin, les modalités d’application de ce dispositif d’anticipation et de préparation de la rentrée scolaire en deux temps, qui a reçu un accueil favorable aussi bien de la part des représentants de l’IGAS, de l’IGEN et de l’IGAENR que de celle des acteurs associatifs entendus par le rapporteur, et en particulier par les représentants de l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (UNAPEI).

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Le présent article ayant été supprimé par la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, le rapporteur proposera son rétablissement en séance publique.

Toutefois, afin de tenir compte d’un certain nombre d’observations formulées aussi bien par des personnes auditionnées que par des députés lors de l’examen de la proposition de loi en commission, l’amendement de rétablissement suggérera deux évolutions par rapport à la rédaction initiale du présent article :

– 1° l’accompagnement qu’il est proposé de garantir aux familles des élèves en situation de handicap au moins quarante-cinq jours avant la rentrée scolaire pourra être aussi bien humain que matériel : cette précision a été préconisée par Mme Béatrice Descamps et plusieurs de ses collègues qui, à travers leur amendement AC 9, ont fort justement fait remarquer, lors de l’examen de la proposition de loi en commission, que l’inclusion des élèves en situation de handicap se conçoit à la fois dans sa dimension humaine (par l’affectation d’une aide humaine individuelle ou mutualisée) et dans sa dimension matérielle (par la mise à disposition d’un matériel pédagogique adapté) ;

– 2° l’échéance du quarante-cinquième jour précédant la rentrée scolaire pour la garantie de l’affectation d’une aide humaine ou d’un matériel pédagogique adapté ne s’imposera au service public de l’éducation que dans les cas où la demande d’aide aura été formulée par les familles au moins cinq mois avant la rentrée scolaire : en effet, on imagine mal garantir l’affectation d’un accompagnant ou de matériel adapté avant la mi‑juillet lorsque la demande aura été présentée à la MDPH au mois de juin. Cela paraît en revanche tout à fait réaliste lorsque cette demande d’aide a été formulée auprès de la MDPH avant la fin du mois de mars.

 

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Article 2
Recrutement des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) en contrat à durée indéterminée (CDI) et organisation de leur formation continue

Rejeté par la commission

Le présent article tend à lutter contre la précarité du statut actuel des personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap et à revaloriser ce statut, pour le rendre plus attractif en prévoyant que ces personnes :

- seront désormais recrutées sous contrat de droit public à durée indéterminée ;

- bénéficieront de la formation continue et de la validation des acquis de l’expérience de façon à favoriser une progression de carrière.

1.   La précarité du statut des personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap

– plus de 42 000 accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) – soit près de 26 800 équivalents temps plein (ETP) – qui, recrutés sur critères de qualification professionnelle dans le cadre de contrats de droit public, pouvaient apporter soit une aide individuelle (AESH-i), soit une aide mutualisée consacrée à plusieurs élèves (AESH-m), soit une aide collective consacrée à une classe entière, en collaboration étroite avec l’enseignant (AESH‑co) ;

– plus de 43 000 personnes (soit environ 25 000 ETP) recrutées dans le cadre d’un contrat unique d’insertion-contrat d’accompagnement dans l’emploi (CUI‑CAE) – contrats désormais dénommés « parcours emploi compétences » (PEC) –, autrement dit dans le cadre d’un contrat aidé de droit privé régi par le code du travail. Dans le cadre du plan de transformation des CUI-CAE en AESH, le nombre de CUI-CAE chargés de l’aide humaine aux élèves en situation de handicap devait approcher 30 500 pour la rentrée scolaire de 2018.

Au total, pour l’année 2017, le montant des crédits alloués à la rémunération de l’ensemble de ces accompagnants s’élevait à environ 480 millions d’euros (somme qui ne prend pas en compte la rémunération des assistants d’éducation – AED – pour un montant d’environ 1,3 milliard d’euros). Pour l’année 2018, le budget prévisionnel consacré à la rémunération des AVS et AESH approchait 918 millions d’euros (auxquels il faut ajouter celui alloué à la rémunération des AED pour un montant d’environ 1,35 milliard d’euros), ainsi que le montre le graphique ci-dessous.

évolution des crédits (T2/HT2) alloués pour la rémunération des personnels de l’assistance éducative au titre des plf 2014 à 2018

(en millions d’euros)

Source : DEPP-DGESCO, annexes budgétaires aux projets de loi de finances de 2014 à 2018

Parmi les AESH, certains sont rémunérés sur les crédits des dépenses de personnel de l’État (titre II), et d’autres hors titre II. En effet, les personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap peuvent être recrutées :

– soit par l’État (ministère de l’Éducation nationale) et rémunérées sur les crédits d’État (titre II) : c’est le cas des accompagnants qui sont rattachés à l’action 1 (« Vie scolaire et éducation à la responsabilité ») du programme 230 (« Vie de l’élève ») de la mission budgétaire « Enseignement scolaire » ;

– soit par les établissements publics locaux d’enseignement (EPLE) et rémunérées par l’État par le biais de subventions (donc hors titre II) versées à ces établissements au titre de l’action 3 (« Inclusion scolaire des élèves handicapés ») du même programme 230 : c’est le cas des accompagnants mutualisés et collectifs ;

– soit par les EPLE et rémunérées au titre de contrats de droit privé (CUI‑CAE) cofinancés par les ministères de l’Éducation nationale et du Travail.

Comme l’explique la Cour des comptes, « sagissant des AESH, les règles de gestion conduisant à retenir lÉtat en qualité demployeur ont été définies en 2014 : tous les AESH en CDI [contrat à durée indéterminée], ainsi que tous les AESH-i (CDD [contrat à durée déterminée] ou CDI) sont placés sous plafond demplois. Les AESH-m et AESH-co peuvent par contre, à loisir, être employés indifféremment par lÉtat ou les EPLE », de sorte qu’« une partie des AESH sont employés par les EPLE, à linstar des contrats aidés. Ils sont placés hors plafond demplois, approche que la Cour des comptes conteste depuis plusieurs années [car] leur rémunération nest pas incluse dans le titre II budgétaire du ministère [de l’Éducation nationale] » ([31]).

modalitÉs actuelles de recrutement et de rÉmunÉration des personnes
qui accompagnent les ÉlÈves en situation de handicap

Ainsi que l’ont expliqué les auteurs de l’Évaluation de laide humaine pour les élèves en situation de handicap, remise au Gouvernement en juin dernier, « AVS, AESH, CUI-CAE : cette diversité de sigles correspond à une diversité de contrats et demployeurs. […] Tous les interlocuteurs rencontrés, et en premier lieu les accompagnants, expriment le souhait dune simplification des statuts et des conditions de recrutement » ([32]).

Cela rejoint les recommandations formulées par la Cour des comptes, dans sa communication à la commission des Finances du Sénat sur Le recours croissant aux personnels contractuels, publiée en mars 2018. Notant que « les données du ministère [de l’Éducation nationale] pour décompter les contractuels et chiffrer leur coût sont insuffisantes », la Cour y explique que « la multiplicité des règles propres à chaque catégorie et la complexité des circuits de recrutement et de gestion (en particulier pour les contrats aidés) pèsent sur les services déconcentrés et les établissements scolaires. Ils assument une charge lourde et, à certains égards, inadaptée à leur mission (pour les chefs détablissement) » ([33]).

Outre une « gestion complexe et peu transparente », la Cour des comptes a pointé l’an dernier un « recours massif aux contrats aidés », signalant qu’« en moyenne nationale, environ 70 % des contrats aidés soccupent délèves handicapés » ([34]). Or, daprès une question écrite adressée au Gouvernement par le député Alexis Corbière, il semblerait que « le salaire [des auxiliaires de vie scolaire (AVS) recrutés dans le cadre de contrats aidés soit] de 687 euros par mois pour 20 heures de travail par semaine ».

Tout d’abord, l’article 124 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 a créé le statut d’AESH, défini à l’article L. 917-1 du code de l’éducation, qui a marqué un premier progrès en permettant aux accompagnants des élèves en situation de handicap d’être recrutés non plus seulement dans le cadre d’un contrat aidé de droit privé, mais aussi dans le cadre d’un contrat de droit public à durée déterminée susceptible d’être converti en CDI de droit public à l’issue d’un délai de six ans.

Ensuite, la majorité socialiste a engagé, lors de la rentrée 2016, un plan de transformation progressive, sur cinq ans, de 56 000 contrats aidés en 32 000 contrats d’AESH ouvrant accès à un CDI, afin de déprécariser les premiers et de stabiliser le « vivier » des seconds pour faire face au besoin croissant d’accompagnement éducatif. Comme l’a reconnu la Cour des comptes, ces mesures « sécurisent le recrutement des agents contractuels et pérennisent leur apport au système scolaire » ([35]). L’actuelle majorité n’a fait que poursuivre la mise en œuvre de ce plan initié avant son arrivée au pouvoir, en transformant, à la rentrée 2018, 11 200 contrats aidés en 6 400 emplois d’AESH ([36]).

Il faut cependant mettre à son crédit l’assouplissement de certaines conditions d’accès au statut d’AESH, qui a été opéré par le décret n° 2018-666 du 27 juillet 2018 modifiant le décret n° 2014-724 du 27 juin 2014 relatif aux conditions de recrutement et d’emploi des accompagnants des élèves en situation de handicap. Le décret du 27 juillet 2018 a en effet abaissé de deux ans à neuf mois la durée minimale de l’expérience professionnelle susceptible de permettre le recrutement en qualité d’AESH.

Mais le rapporteur estime qu’il faut aujourd’hui aller plus loin car, dans sa configuration actuelle, le statut d’AESH est loin de constituer la panacée, en particulier parce qu’il impose un recrutement (et six années de travail) en CDD de droit public avant de pouvoir espérer l’obtention d’un CDI de droit public ([37]) .

Or, ni le renouvellement triennal du CDD ni l’embauche en CDI ne sont garantis. Il semblerait même, d’après les témoignages d’animateurs de collectifs d’AVS et d’AESH entendus par le rapporteur, que les CDD soient plus souvent annuels que triennaux et que les passages en CDI se fassent de plus en plus rares.

Cest la raison pour laquelle le présent article propose de sécuriser davantage le statut des personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap.

2.   La pérennisation du statut des accompagnants des élèves en situation de handicap

Selon la mission menée par l’IGAS, l’IGEN et l’IGAENR, qu’elles soient recrutées dans le cadre de contrats aidés ou de contrats d’AESH, les personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap « désirent une situation contractuelle ou statutaire leur assurant une plus grande stabilité dans leur fonction et un meilleur cadre de professionnalisation » ([38]).

À cet égard, quelques mois avant que cette mission ne rende ses conclusions, la Cour des comptes avait recommandé de « réserver la fonction daccompagnement des élèves en situation de handicap aux AESH » ([39]).

Dans la même logique, le rapport précité des trois inspections, estimant que le métier d’accompagnant des élèves en situation de handicap est « un nouveau métier qui sinscrit dans un développement dune éducation inclusive » ([40]), a recommandé au Gouvernement de « simplifier la gestion et les fonctions dAESH par la création dun seul statut […] pérenne et attractif avec un parcours de carrière qui permette une véritable évolution », afin, entre autres, d’« améliorer les conditions de recrutement et de rémunération des AESH », d’« améliorer leur formation » initiale comme continue, « en fonction des besoins recensés dans les accompagnements » ([41]).

C’est tout l’objet du présent article qui propose de modifier à cet effet l’unique article (L. 917-1) du chapitre VII (« Dispositions spécifiques relatives aux accompagnants des élèves en situation de handicap ») du titre Ier (« Dispositions générales ») du livre IX (« Les personnels de l’éducation ») de la quatrième partie (« Les personnels ») de la partie législative du code de l’éducation.

En l’état du droit, les cinquième à septième alinéas de cet article L. 917-1 prévoient que :

– les AESH « sont recrutés par contrat dune durée maximale de trois ans, renouvelable dans la limite maximale de six ans » avant de pouvoir être embauchés par l’État en CDI (alinéa 6) – étant précisé que « les services accomplis en qualité dassistant déducation pour exercer des fonctions daide à linclusion scolaire des élèves en situation de handicap sont assimilés à des services accomplis en qualité daccompagnant des élèves en situation de handicap » (alinéa 7) ;

– les AESH « bénéficient dune formation spécifique pour laccomplissement de leurs fonctions, mise en œuvre en collaboration avec les associations daide aux familles denfants en situation de handicap » (alinéa 5) et « peuvent demander à faire valider l’expérience acquise dans les conditions définies aux articles L. 2323-10, L. 6111-1, L. 6311-1, L. 6411-1 et L. 6422-1 du code du travail » (droit à la validation des acquis de l’expérience (VAE) qui a pour objet l’acquisition d’un diplôme, d’un titre à finalité professionnelle ou d’un certificat de qualification figurant sur une liste établie par la commission paritaire nationale de l’emploi d’une branche professionnelle, enregistrés dans le répertoire national des certifications professionnelles ; droit à un congé pour la VAE).

Les modifications apportées à ces trois alinéas par le présent article visent non seulement à étoffer la formation des AESH (cf. infra), mais aussi à sécuriser leur statut.

Les sixième et septième alinéas de l’article L. 917-1 du code de l’éducation seraient ainsi remplacés par un alinéa prévoyant que les AESH sont recrutés par contrat à durée indéterminée, ce qui supprime l’obligation actuelle d’effectuer deux CDD avant de pouvoir prétendre à l’obtention d’un CDI.

À cet égard, le rapporteur souligne que l’article 6 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État ouvre la possibilité de recruter des agents contractuels pour une durée indéterminée et l’impose même quand il n’existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d’assurer les fonctions correspondantes.

Par ailleurs, dans la mesure où le huitième alinéa de l’article L. 917-1 précité dispose que les AESH « sont régis par les dispositions réglementaires générales applicables aux agents contractuels de lÉtat prises pour lapplication de larticle 7 de la loi n° 8416 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat », et dans la mesure où le présent article ne modifie pas ce huitième alinéa, les AESH continueront de se voir appliquer le régime de droit commun des agents non titulaires de l’État, sous réserve des dérogations déjà prévues aujourd’hui par le décret mentionné au dernier alinéa de l’article L. 917-1. Le décret mentionné à l’article 7 de la loi du 11 janvier 1984 précitée comprend notamment, compte tenu de la spécificité des conditions d’emploi des agents non titulaires, des règles de protection sociale équivalentes à celles dont bénéficient les fonctionnaires, sauf en ce qui concerne les régimes d’assurance-maladie et d’assurance-vieillesse.

Le recrutement direct des AESH en CDI de droit public serait de nature à assurer la « vocation pérenne de ces postes » que, sous la précédente législature, des députés qui appartiennent désormais à la majorité présidentielle appelaient de leurs vœux ([42]).

3.   Le développement de la formation continue des accompagnants des élèves en situation de handicap

Outre la précarité statutaire des accompagnants des élèves en situation de handicap, la Cour des comptes a dénoncé l’an dernier, « la formation de ces personnels [qui] est incontestablement un point défaillant. Les textes les régissant ne prévoient pas toujours un dispositif précis de formation et un grand nombre de contractuels prennent leurs fonctions sans préparation, alors que les employeurs publics peinent à respecter leurs obligations quand elles existent, notamment pour les contrats aidés » ([43]). Les magistrats de la rue Cambon préconisaient en conséquence de « formaliser et organiser les obligations de formation des AE et des AESH » ([44]).

Là encore, la précédente majorité n’est pas restée sans agir. C’est à son initiative qu’il est désormais requis des candidats aux fonctions d’AESH qu’ils soient titulaires d’un diplôme professionnel de niveau V dans le domaine de l’aide à la personne.

En effet, le décret n° 2016-74 du 29 janvier 2016 relatif au diplôme dÉtat daccompagnant éducatif et social et modifiant le code de laction sociale et des familles a créé un diplôme unique en remplacement des diplômes dÉtat dauxiliaire de vie sociale et daide médico-psychologique. Un arrêté du 29 janvier 2016 relatif à la formation conduisant au diplôme dÉtat daccompagnant éducatif et social a précisé le contenu de la formation de ce diplôme qui peut être obtenu, en tout ou partie, par la VAE et qui est structuré en un socle commun de compétence et trois spécialités : « Accompagnement de la vie à domicile », « Accompagnement de la vie en structure collective » et « Accompagnement à léducation inclusive et à la vie ordinaire ». La formation théorique et pratique en vue de lobtention de ce diplôme se déroule sur une amplitude de douze à vingt-quatre mois.

Cependant, le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) a invité lan dernier les autorités à parfaire encore davantage cette récente structuration de la formation initiale des personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap ([45]). Il est vrai que, dans le rapport qu’elles ont remis en juin 2018 au Gouvernement, l’IGAS, l’IGEN et l’IGAENR soulignent avec insistance le besoin de formation (initiale comme continue) des personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap. Les auteurs de ce rapport expliquent que, dans la perspective d’une professionnalisation accrue de ces tâches, l’ensemble des interlocuteurs qu’ils ont pu rencontrer mettent en exergue deux besoins :

« – une formation approfondie sur les troubles de lenfant à accompagner et sur les adaptations à mettre en place pour répondre aux besoins de lenfant en situation dapprentissage. Les trois heures de formation initiale par type de handicap ne sont pas suffisantes pour mettre en place des stratégies de réussite. De plus, il peut arriver que lAESH arrive dans une classe sans information sur le handicap de lenfant à accompagner. LAESH peut se sentir démuni et cest une des causes souvent évoquées de démission des AESH ;

une formation sur la place de lAESH dans la classe, ainsi que sur la relation avec les parents » ([46]).

Quant aux AVS recrutés dans le cadre de contrats aidés, ils ne bénéficient que d’une formation dinsertion professionnelle dune durée de 60 heures sur deux ans qui est mise en œuvre par les inspecteurs des premier et second degrés à partir de 20 modules de trois heures réalisés par l’Institut d’enseignement supérieur et de recherche Handicap et besoins éducatifs particuliers (INSHEA) ou délivrée par les réseaux des groupements d’établissements pour la formation continue de l’Éducation nationale (GRETA).

Il semblerait, d’après les auditions conduites par le rapporteur, que cette formation ne soit ni systématiquement délivrée avant le début du contrat aidé, ni adaptée au profil et au type de handicap des élèves que les AVS accompagnent.

Qui plus est, la formation continue des AVS comme des AESH, pour le moins embryonnaire, ne leur permet aucune évolution de carrière.

Si lon en croit le rapport remis lan dernier au Gouvernement par lIGAS, lIGEN et lIGAENR, « pour répondre au manque de formation continue, les AESH ont souvent recours à lautoformation [quils paient parfois sur leurs propres deniers]. Ils soulignent le manque de ressources et dinformations et/ou la difficulté de les trouver » ([47]). Certes, comme le souligne ce même rapport, « de nouvelles formations complémentaires sont en train de se développer dans certains départements et académies », afin « daccompagner les bénéficiaires à construire et valoriser une réelle qualification professionnelle acquise durant leur contrat » ([48]), mais il sagit là dinitiatives locales et de formations facultatives qui reposent sur le volontariat et qui restent à généraliser et à harmoniser à léchelle nationale.

Parmi ces initiatives, le rapporteur tient à saluer celle, prise en région parisienne, de désigner des AESH comme « tuteurs » pour conseiller, soutenir et guider les accompagnants (en particulier ceux qui sont nouvellement recrutés) et pour faire le lien (utile) entre ces accompagnants et les équipes pédagogiques (et notamment les enseignants référents ([49]) et les enseignants « ressources » susceptibles d’apporter une aide pédagogique aux accompagnants).

En somme, « la professionnalisation et la pérennisation des AESH sont considérées comme de véritables enjeux pour linclusion scolaire. Dun point de vue des ressources humaines, cela suppose de les accompagner dans leur carrière et pose la question de leur suivi, de leur évaluation, et de leur parcours » ([50]).

C’est précisément l’objectif poursuivi par le présent article qui, tout en reprenant à l’identique les dispositions de l’actuel cinquième alinéa de l’article L. 917-1 du code de l’éducation – qui prévoient que les AESH « bénéficient dune formation spécifique pour laccomplissement de leurs fonctions, mise en œuvre en collaboration avec les associations daide aux familles denfants en situation de handicap » et qu’« ils peuvent demander à faire valider lexpérience acquise dans les conditions » fixées par le code du travail – ajoute une obligation de formation continue dans le cadre de l’accomplissement des fonctions d’AESH.

Déterminées par décret en Conseil d’État, les modalités de cette formation continue devront favoriser la progression de carrière des AESH. Aujourd’hui souvent recrutés au niveau V (certificat d’aptitude professionnelle – CAP), les accompagnants des élèves en situation de handicap devront, grâce à la formation continue et à la VAE, pouvoir prétendre obtenir des diplômes classés au niveau IV (baccalauréat) du répertoire national des certifications professionnelles, voire au niveau III de ce même répertoire (c’est-à-dire bac + 2 : diplôme d’études universitaires générales – DEUG ; brevet de technicien supérieur – BTS ; diplôme universitaire de technologie – DUT ; diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques – DEUST).

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Le présent article ayant été supprimé par la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, le rapporteur proposera son rétablissement en séance publique.

Toutefois, afin de tenir compte des observations formulées par des personnes auditionnées ainsi que par M. Aurélien Pradié et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains, à travers leur amendement AC 13, lors de l’examen de la proposition de loi en commission, l’amendement de rétablissement proposera une évolution de la rédaction initiale du présent article de façon à ce que :

– 1° dans chaque département, le directeur académique des services de l’éducation nationale (DASEN) soit tenu de désigner au moins un AESH « ressources » – si ce n’est plusieurs, en fonction des effectifs scolaires du département – au(x)quel(s) pourront être confiées des missions :

– soit d’appui au bénéfice des autres accompagnants des élèves en situation de handicap, pour leur fournir des conseils et une expertise spécialisés dans l’accompagnement de certains types de handicap, comme l’autisme, ou de certaines activités proposées aux élèves en situation de handicap, en particulier dans le cadre des temps périscolaire et extrascolaire ;

– soit de remplacement ponctuel et temporaire d’accompagnants des élèves en situation de handicap intervenant au sein des établissements d’enseignement public ou privé.

– 2° la possibilité pour les AESH d’accompagner les élèves pendant les sorties scolaires soit explicitement clarifiée : si la circulaire n° 2017-084 du 3 mai 2017 relative aux missions et activités des personnels chargés de l’accompagnement des élèves en situation de handicap le prévoit, il semble que des difficultés soient régulièrement constatées en pratique, au vu du nombre de saisines dont le Défenseur des droits fait l’objet à ce sujet.

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Article 3
Association des accompagnants aux équipes de suivi de la scolarisation (ESS) et au projet personnalisé de scolarisation (PPS)

Adopté par la commission avec modifications

Le présent article vise à garantir, par la loi, que les personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap soient associées aux équipes de suivi de la scolarisation (ESS) qui veillent à la mise en œuvre des projets personnalisés de scolarisation (PPS) de ces élèves.

À cet effet, il modifie l’article L. 112-2-1 du code de l’éducation qui, en l’état du droit, dispose que « des équipes de suivi de la scolarisation sont créées dans chaque département. Elles assurent le suivi des décisions de la commission des droits et de lautonomie des personnes handicapées [CDAPH], prises au titre du 2° du I de larticle L. 241-6 du code de laction sociale et des familles », c’est‑à-dire le suivi des décisions qui désignent les établissements correspondant aux besoins de l’enfant ou de l’adolescent parmi :

– les établissements et les services sociaux et médico-sociaux mentionnés à l’article L. 312-1 du même code (notamment ceux d’entre eux qui assurent, à titre principal, une éducation adaptée et un accompagnement social ou médico‑social aux mineurs ou jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d’adaptation) ;

– les dispositifs intégrés créés par ces mêmes établissements et services médico-sociaux d’enseignement pour accompagner des enfants, des adolescents et des jeunes adultes qui, bien que leurs potentialités intellectuelles et cognitives soient préservées, présentent des difficultés psychologiques dont l’expression, notamment l’intensité des troubles du comportement, perturbe gravement la socialisation et l’accès aux apprentissages (article L. 312-7-1 du même code).

Les ESS peuvent, avec l’accord des parents ou du représentant légal de l’enfant ou de l’adolescent en situation de handicap, proposer à la CDAPH toute révision de l’orientation d’un enfant ou d’un adolescent qu’elles jugeraient utile.

Aux termes de l’article L. 112-2-1 du code de l’éducation, les ESS « comprennent lensemble des personnes qui concourent à la mise en œuvre du projet personnalisé de scolarisation et en particulier le ou les enseignants qui ont en charge lenfant ou ladolescent ».

Élaboré par l’équipe pluridisciplinaire d’évaluation (EPE) de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) à partir des besoins identifiés de l’élève, le projet personnalisé de scolarisation (PPS) définit et coordonne les modalités de déroulement de la scolarité et les actions pédagogiques, psychologiques, éducatives, sociales, médicales et paramédicales répondant aux besoins particuliers des élèves présentant un handicap.

En application de l’article D. 351-5 du code de l’éducation, il est rédigé conformément à un modèle défini par arrêté conjoint des ministres chargés de l’Éducation nationale, de l’agriculture et des personnes handicapées. Il est révisé au moins à chaque changement de cycle ou d’orientation scolaire, et comprend :

– la mention du ou des établissements où l’élève est effectivement scolarisé ;

– les objectifs pédagogiques définis par référence au socle commun de connaissances, de compétences et de culture et au contenu ou référentiel de la formation suivie au vu des besoins de l’élève ; ces objectifs tiennent compte de l’éventuelle nécessité d’adapter la scolarisation de l’élève en fonction des actions pédagogiques, psychologiques, éducatives, sociales, médicales et paramédicales ;

 les décisions de la CDAPH dans les domaines relatifs au parcours de formation mentionnés à larticle D. 351-7 du code de léducation (attribution dune aide humaine et autres mesures de compensation de nature à favoriser la scolarité de lélève handicapé, comme lattribution dun matériel pédagogique adapté) ;

– les préconisations utiles à la mise en œuvre de ce projet, telles que le niveau d’inclusion lors d’une scolarisation en dispositif collectif ou les types d’aménagements pédagogiques nécessaires.

En résumé, le PPS organise le déroulement de la scolarité de l’élève en situation de handicap, assure la cohérence et garantit la qualité des accompagnements, des aménagements, des aides et des adaptations pédagogiques nécessaires. C’est sur la base du PPS que la CDAPH statue sur l’orientation, notamment dans les structures spécialisées, et sur les moyens nécessaires, tant s’agissant du matériel pédagogique adapté que des aides humaines. Il comporte également des mesures d’adaptation pour encourager l’inclusion de l’élève dans la classe ordinaire.

Ayant vocation à garantir une continuité entre toutes les étapes de la scolarité en facilitant la transmission d’informations entre les acteurs et la mise en place de parcours cohérents, le PPS s’appuie sur une évaluation des besoins, définis dans un document normalisé au niveau national qui a vocation à rassembler toutes les informations utiles sur l’élève : le guide d’évaluation des besoins de compensation en matière de scolarisation (Geva-Sco). Ce Geva-Sco est renseigné par les équipes éducatives au sein de l’établissement scolaire. Il est ensuite complété par les ESS réunies par l’enseignant réfèrent.

En effet, les ESS, qui sont tenues de se réunir « au moins une fois par an » pour évaluer le PPS et sa mise en œuvre, comprennent :

 conformément à l’article D. 351-10 du code de l’éducation, « nécessairement lélève, ou ses parents, ou son représentant légal ainsi que lenseignant référent de lélève » ;

– et, conformément à l’article L. 112-2-1 du code de l’éducation, « le ou les enseignants qui ont en charge lenfant ou ladolescent » en situation de handicap.

Mais rien n’est explicitement dit, ni dans la loi ni dans le décret, de la participation, à ces ESS ainsi qu’à l’élaboration et au suivi du PPS, des personnes qui sont chargées d’apporter une aide individuelle ou mutualisée à l’élève en situation de handicap, que celles-ci aient le statut d’AVS ou d’AESH.

Pour reprendre lexpression employée par le député Aurélien Pradié, dans son rapport sur sa proposition de loi n° 1230 relative à linclusion des élèves en situation de handicap, récemment rejetée par lAssemblée nationale, ces « invisibles de lÉducation nationale » ([51]) que sont les AVS et AESH sont, dans le silence des textes, potentiellement totalement absents de ces dispositifs. Et il semblerait que ce soit parfois le cas en pratique, comme lont signalé, lors de leur audition, les représentants de lAssociation pour adultes et jeunes handicapés (APAJH).

Lors de l’examen de cette proposition de loi en première lecture, à l’automne dernier, plusieurs amendements émanant de divers groupes d’opposition (La France insoumise, Les Républicains) ont visé à mieux intégrer les AVS et les AESH aux équipes qui entourent les élèves en situation de handicap. Cependant, tous ces amendements ont été repoussés par la majorité, aussi bien en commission qu’en séance publique.

À leur tour, les auteurs de la présente proposition de loi souhaitent garantir aux personnes qui, sur prescription des CDAPH mentionnées à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles, apportent une aide humaine aux élèves en situation de handicap – qu’elle soit individuelle ou mutualisée – à la fois une meilleure visibilité et une meilleure association aux équipes qui assurent le suivi et l’évaluation des modalités de scolarisation de ces élèves.

Le présent article propose en conséquence de compléter le deuxième alinéa de l’article L. 112-2-1 du code de l’éducation de façon à prévoir clairement que les ESS comprennent non seulement « lensemble des personnes qui concourent à la mise en œuvre du projet personnalisé de scolarisation et en particulier le ou les enseignants qui ont en charge lenfant ou ladolescent », mais aussi « les personnes chargées de laide individuelle ou mutualisée » prescrite par une CDAPH.

Lors de son examen de la présente proposition de loi, la commission a adopté, contre l’avis du rapporteur, un amendement AC 28 de M. Philippe Berta et de plusieurs de ses collègues du groupe Mouvement démocrate et apparentés, qui a complété le présent article de façon à ce qu’il modifie non seulement le deuxième alinéa de l’article L. 112-2-1 précité, mais aussi le premier alinéa de ce texte.

En l’état du droit, ce premier alinéa prévoit que « des équipes de suivi de la scolarisation sont créées dans chaque département » et qu’« elles assurent le suivi des décisions de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées ».

Il s’agit d’ajouter à cette mission celle de « l’accompagnement des familles » – mission que le rapporteur juge assez vaste et floue… et au demeurant superfétatoire dans la mesure où les parents ou représentants légaux de l’élève sont déjà membres des ESS en application de l’article D. 351-10 du code de l’éducation, et où, comme le reconnaissait l’exposé sommaire de l’amendement adopté, ces ESS assument déjà en pratique le rôle d’interface avec les parents.

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En séance publique, le rapporteur proposera par voie d’amendement de reprendre la précision suggérée, lors de l’examen de la proposition de loi en commission, par M. Aurélien Pradié et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains, à travers leur amendement AC 16, de prévoir que les équipes de suivi de la scolarisation (ESS) soient tenues de se réunir au moins une fois par trimestre, plutôt qu’« au moins une fois par an », comme le précise aujourd'hui l’article D. 351-10 précité.

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Article 4
Formation des enseignants et personnels de lÉducation nationale à laccueil et léducation des élèves en situation de handicap

Adopté par la commission sans modifications

Le présent article tend à améliorer la formation des enseignants et personnels de l’Éducation nationale à l’accueil et l’éducation des élèves en situation de handicap.

Il complète à cet effet l’article L. 112-5 du code de l’éducation. Cet article dispose déjà que, non seulement les enseignants, mais aussi les personnels d’encadrement, d’accueil, techniques et de service de l’Éducation nationale « reçoivent, au cours de leur formation initiale et continue, une formation spécifique concernant laccueil et léducation des élèves et étudiants handicapés et qui comporte notamment une information sur le handicap […] et les différentes modalités daccompagnement scolaire ».

Cependant, il semblerait qu’il y ait en la matière une marge de progrès si l’on en croit l’avis quasi-unanime des personnes entendues par le rapporteur, qui ont expliqué que cette formation se limite souvent à une simple « information » de qualité très variable selon les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE) ([52]). Le même constat ressort du rapport sur l’école inclusive publié l’an dernier par le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH).

Tout en saluant la mise en place d’une plateforme numérique nationale « ressource » pour les enseignants à la rentrée 2018, prévue par le plan gouvernemental destiné à « Permettre à lÉcole de la République dêtre pleinement inclusive » ([53]), le CNCPH a prévenu que cette plateforme « ne saurait remplacer des formations concrètes. [Car] une formation initiale de tous les enseignants est indispensable, en présentiel, avec des temps danalyse de pratiques. [Or] la diversité et lautonomie des ESPE montrent une réelle disparité à ce sujet. Une coordination renforcée, qui pourrait être animée par lINSHEA [Institut d’enseignement supérieur et de recherche Handicap et besoins éducatifs particuliers], devrait permettre dassurer une harmonisation des contenus des maquettes des formations initiales intégrant enfin un nombre déterminé de modules obligatoires avec un volume horaire défini autour de lécole inclusive et de la scolarisation des élèves à besoins particuliers. Ces modules devraient permettre dêtre formé à lobservation, au repérage des difficultés dapprentissage et à la différenciation pédagogique, pour ne plus que la question soit “quest-ce que cet élève a”, mais bien “quest-ce que en tant quenseignant, je peux faire” » ([54]).

C’est précisément pour mettre en œuvre cette recommandation que le présent article propose de compléter l’article L. 112-5 du code de l’éducation.

Il s’agirait d’y ajouter un alinéa prévoyant qu’un décret en Conseil d’État précise le volume horaire et le cahier des charges des contenus de la formation spécifique concernant l’accueil et l’éducation des élèves et étudiants en situation de handicap, qui est délivrée aux enseignants et autres personnels de l’Éducation nationale, tant dans le cadre de leur formation initiale que dans celui de leur formation continue.

Ainsi, conformément aux préconisations du CNCPH, la formation des personnels – notamment enseignants – gagnerait en homogénéité (et peut-être en substance) à l’échelle nationale.

C’est un élément décisif car, comme l’a expliqué lors de son audition Mme Marie du Bouetiez, qui représentait l’Association nationale des directeurs de MDPH, l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap est aujourd’hui trop souvent retenu, particulièrement au collège et au lycée, comme une « solution de facilité » pour pallier aux insuffisances de la formation des enseignants à la prise en charge de ces élèves et aux contraintes imposées par les effectifs des classes.

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Article 5
Effectif maximal délèves dans les classes où sont scolarisés des élèves en situation de handicap bénéficiaires dun projet personnalisé de scolarisation (PPS)

Rejeté par la commission

Le présent article tend à limiter le nombre total d’élèves dans les classes des établissements publics et privés sous contrat, du premier comme du second degré, lorsqu’y sont scolarisés des enfants ou adolescents en situation de handicap bénéficiaires d’un projet personnalisé de scolarisation (PPS).

Afin de garantir des conditions de scolarité optimales non seulement aux élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire, mais aussi aux autres élèves scolarisés dans les classes de ces derniers, le présent article propose de s’inspirer de mesures mises en œuvre de longue date en Italie.

Ce pays fait en effet figure de pionnier en matière d’accueil et de scolarisation des élèves en situation de handicap. Depuis 1971, la loi italienne prévoit que « linstruction obligatoire se déroule [pour tous les enfants et les adolescents, sans distinction] dans les classes normales de lécole publique ». En 1977, le droit à l’instruction et à l’intégration en milieu ordinaire de tous les enfants et adolescents en situation de handicap, de l’école maternelle au collège, a été inscrit à l’article 3 de la Constitution italienne. Sur la base de la loi n° 517, les anciennes « écoles spéciales » auparavant destinées aux élèves en situation de handicap ont été fermées. C’est l’école ordinaire qui a dû s’adapter à chaque individu, au point qu’elle accueille aujourd’hui la quasi-totalité des enfants et adolescents en situation de handicap, y compris ceux qui sont porteurs de handicaps très lourds. La loi de juillet 1977 − loi relative à l’école en général, et pas spécifiquement aux personnes en situation de handicap – a notamment prévu :

– la création des services socio-psychopédagogiques ;

– la présence en classe d’enseignants spécialisés (par la suite dénommés « enseignants de soutien ») ;

– la nécessité du travail de groupe et le droit à un enseignement individualisé.

En 1984, l’intégration des élèves handicapés en milieu scolaire ordinaire a été étendue au lycée.

Huit ans plus tard, la loi 104 de 1992 (loi-cadre pour l’assistance, l’intégration sociale et les droits des personnes handicapées) a organisé une prise en charge de l’enfant en situation de handicap dès l’âge de 3 ans, avec programmation coordonnée de l’intervention des services sociaux.

Neuf ans plus tard, en 2003, la loi dite « Moratti » (du nom du ministre italien de l’Instruction de l’époque) a confirmé le principe d’une formation obligatoire des élèves en situation de handicap jusqu’à l’âge de 18 ans.

Parmi les clefs du succès ultramontain, la mission de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR) qui a remis l’an dernier au Gouvernement un rapport sur Linclusion des élèves en situation de handicap en Italie, cite les « adaptions de la scolarisation [qui] peuvent être mises en œuvre pour favoriser lintégration scolaire denfants porteurs de handicaps parfois très lourds (notamment les enfants autistes) » ([55]).

Parmi ces adaptations, le rapport mentionne :

– l’allongement du cursus scolaire jusqu’à l’âge de 20 ans pour les enfants handicapés et la possibilité exceptionnelle de triplement d’une classe ;

– l’aménagement des programmes, méthodes et examens – étant précisé que les élèves porteurs d’un handicap lourd qui ne peuvent obtenir l’Esame di stato (le baccalauréat italien) se voient délivrer un certificat de compétences reconnu par l’agence pour l’emploi, pour la recherche d’un travail ;

– l’apport d’un matériel pédagogique et technologique adapté au type de handicap (ordinateurs, logiciels, etc.) ;

– et, surtout, la limitation éventuelle de l’effectif lorsqu’une classe accueille un ou plusieurs (au maximum quatre) élèves en situation de handicap : 20 élèves pour l’école maternelle, primaire, et le collège ; 25 élèves au lycée.

L’IGAENR souligne que l’une des principales différences entre le modèle français et le modèle italien d’inclusion scolaire réside précisément « dans la réduction deffectif en fonction du nombre délèves handicapés accueillis » ([56]).

C’est précisément cette différence que le présent article ambitionne de résorber en modifiant pour ce faire l’article L. 351-1 du code de l’éducation.

En l’état du droit, cet article dispose que, lorsque ce mode de scolarisation répond aux besoins des élèves, les enfants et adolescents présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant sont scolarisés dans :

– les écoles maternelles et élémentaires ;

– les collèges, les lycées, les établissements d’éducation spéciale qui relèvent de l’État et les établissements privés sous contrat, respectivement mentionnés aux articles L. 213-2, L. 214-6, L. 422-1, L. 422-2 et L. 442-1 du code de l’éducation ;

– les établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricoles ainsi que les établissements d’enseignement et de formation professionnelle agricoles privés, mentionnés respectivement aux articles L. 811-8 et L. 813-1 du code rural et de la pêche maritime.

L’article L. 351-1 précité ajoute, en son premier alinéa, que « les parents sont étroitement associés à la décision dorientation et peuvent se faire aider par une personne de leur choix. La décision est prise par la commission mentionnée à larticle L. 146-9 du code de laction sociale et des familles [à savoir la CDAPH], en accord avec les parents ou le représentant légal. […] Dans tous les cas et lorsque leurs besoins le justifient, les élèves bénéficient des aides et accompagnements complémentaires nécessaires ».

Le présent article propose d’insérer deux alinéas après le premier alinéa de l’article L. 351-1 qui pose le principe la scolarisation en milieu ordinaire des élèves en situation de handicap, lorsqu’elle paraît appropriée.

Le premier alinéa concerne les écoles et établissements du premier degré, pour lesquels il est possible de raisonner en termes de nombre total d’élèves par classe. Il prévoit que le nombre total des élèves scolarisés au sein d’une classe des écoles maternelles et élémentaires ou des établissements d’enseignement privés du premier degré sous contrat d’association ne peut être supérieur à vingt (comme en Italie) lorsqu’est scolarisé, au sein de cette classe, au moins un élève présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant et bénéficiant à ce titre d’un PPS.

Le second alinéa concerne les établissements publics et privés sous contrat du second degré – en ce compris les établissements d’éducation spéciale qui relèvent de l’État et les établissements d’enseignement et de formation professionnelle agricoles publics et privés – pour lesquels il n’est pas possible de raisonner en termes de nombre total d’élèves par classe.

En effet, les collèges et lycées se voient attribuer une enveloppe d’heures d’enseignement par semaine pour l’ensemble de leurs élèves – dénommée dotation horaire globale ou globalisée (DHG) – par l’inspection académique ou le rectorat (respectivement). Le montant de cette enveloppe est déterminé en fonction :

– des prévisions d’effectifs au sein des établissements, qui sont établies, niveau par niveau, en début d’année scolaire pour la rentrée suivante ([57]) ;

– des options ou spécialités proposées et des diverses voies d’orientation ;

– du rapport théorique entre le nombre d’heures hebdomadaires attribué à l’établissement pour chaque élève et l’effectif total d’élèves prévu pour chaque niveau.

Pour des raisons techniques, il est donc difficile de raisonner en termes d’effectifs par classe pour les établissements du second degré.

C’est la raison pour laquelle le second alinéa inséré par le présent article au sein de l’article L. 351-1 du code de l’éducation prévoit, non pas un plafond d’élèves par classe, mais une majoration de la DHG de ces établissements proportionnelle au nombre d’élèves en situation de handicap bénéficiaires d’un PPS qui y sont scolarisés. Le soin de déterminer les modalités précises de cette bonification est renvoyé à un décret en Conseil d’État.

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Le présent article ayant été supprimé par la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, le rapporteur proposera son rétablissement en séance publique.

Toutefois, l’amendement de rétablissement suggérera une évolution par rapport à la rédaction initiale du présent article. Il sera en effet proposé qu’en cas de scolarisation d’un élève en situation de handicap au sein d’un établissement public ou privé sous contrat, le plafonnement des effectifs des classes du premier degré à vingt et la bonification proportionnelle de la DHG n’interviennent que lorsque le PPS de cet élève requiert une aide humaine individuelle ou mutualisée.

Il semble en effet au rapporteur que ces mesures de plafonnement des effectifs et de bonification de la DHG sont moins nécessaires lorsque le PPS de l’élève en situation de handicap impose un accompagnement matériel.

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Article 6
Encadrement des quotités horaires de laide mutualisée et des délais dexamen des demandes daide humaine présentées aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH)

Rejeté par la commission

Le présent article vise :

– d’une part, à imposer aux commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) qu’elles fixent une quotité horaire minimale lorsqu’elles prescrivent une aide mutualisée pour la scolarisation d’un élève en situation de handicap ;

– d’autre part, à encadrer les délais d’examen des demandes d’aide humaine présentées aux MDPH de façon à ce que soit toujours proposée une solution d’accompagnement aux élèves en situation de handicap, dès le premier jour de leur scolarité.

1.   L’encadrement des quotités horaires de l’aide mutualisée

En vertu de larticle L. 114-1-1 du code de laction sociale et des familles, « la personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient lorigine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie », et « cette compensation consiste à répondre à ses besoins, quil sagisse de laccueil de la petite enfance, de la scolarité, de lenseignement, [ou encore] de léducation ».

Pour déterminer les modalités de cette compensation, la CDAPH prend, sur la base dune évaluation des souhaits exprimés par la personne handicapée ou son représentant légal et du plan personnalisé de compensation, les décisions relatives à lensemble des droits de cette personne, notamment en matière dattribution de prestations et dorientation ([58]).

Parmi les décisions que la CDAPH peut être amenée à prendre, figure celle dattribuer (ou non) une aide humaine à un enfant ou à un adolescent en situation de handicap, pour les besoins de sa scolarisation dans des conditions optimales.

Ainsi, larticle L. 351-3 du code de léducation dispose, en son alinéa premier, que, lorsque la CDAPH « constate que la scolarisation dun enfant dans une classe de lenseignement public ou dun établissement mentionné à larticle L. 442-1 du présent code [i.e. dun établissement privé sous contrat] requiert une aide individuelle », elle peut prescrire cette aide « dont elle détermine la quotité horaire ».

Mais, « si cette scolarisation nimplique pas une aide individuelle mais que les besoins de lélève justifient quil bénéficie dune aide mutualisée, la [CDAPH] en arrête le principe » (alinéa 2 de larticle L. 351-3 précité).

Toutefois la loi nimpose pas à la CDAPH de déterminer la quotité horaire minimale de laide humaine qui doit être apportée lorsquelle est mutualisée… de sorte que les familles et représentants légaux des élèves en situation de handicap nont aujourdhui guère de garantie que ces élèves bénéficient dune durée daccompagnement suffisante pour que celui-ci puisse être qualifié de substantiel.

Or on constate que laide mutualisée se développe considérablement depuis 2012, tandis que laide individuelle stagne (voire recule).

évolution du nombre de prescriptions des CDAPH selon leur nature

Sources : RAP de la MIES de 2013 à 2016

Par ailleurs, en juillet 2018, sans aucune base législative, le Gouvernement a lancé lexpérimentation, à compter de la dernière rentrée scolaire, dans chaque académie, de « pôles inclusifs daccompagnement localisés » (PIAL) censés améliorer laccompagnement des élèves en situation de handicap en engageant toute la communauté éducative au service du processus inclusif et en déplaçant « le focus de la compensation […] vers  celui  de lorganisation pédagogique » ([59]). Cela est censé se traduire par une « coordination des moyens daccompagnement en pôle, dans une organisation plus globale des aides humaines, pédagogiques, éducatives et thérapeutiques », par la « mobilisation  de  tous  les  enseignants  pour  identifier  les  besoins  des  élèves  et  mettre  en œuvre les réponses adéquates  au  niveau  de  la  classe, mais aussi de létablissement (personnes ressources expertes, dispositifs spéciaux, groupes daides, unités dinclusion, environnement humain, environnement technique, etc) ».

Ainsi quen ont témoigné les auditions conduites par le rapporteur, la crainte est grande que le dispositif des « PIAL » ne soit utilisé pour imposer indirectement aux élèves et à leurs familles un accompagnement mutualisé alors même quil ne serait pas toujours adapté au handicap des élèves concernés.

Comme lont indiqué les représentants du collectif « AESH-loi 2005 », dans la contribution écrite quils ont adressée au rapporteur, « les PIAL annoncent la toute-puissance des chefs détablissements sur la gestion des accompagnants et la disparition des coordinations daccompagnants dont la mission est non seulement daffecter des accompagnants dans les établissement scolaires mais également de vérifier si les quotités horaires daccompagnement sont respectées. Le risque est donc de voir émerger une discrimination entre les élèves : ceux avec troubles du comportement pourraient être prioritairement accompagnés au détriment de ceux porteurs de “ dys-  ([60]). Si ce projet persistait, et nonobstant ce risque pour les élèves, il faudrait veiller à ce que les accompagnants délèves en situation de handicap soient affectés auprès dun seul élève dans une classe et pas plus de deux dans le même établissement, et ce, afin dassurer un accompagnement de qualité. Au-delà de deux élèves, lon ne peut plus sérieusement parler daccompagnement continu, mais seulement daccompagnement perlé ! »

Le rapporteur partage ces inquiétudes : il ne faudrait donc pas que lessor de laide mutualisée devienne une solution de gestion de la pénurie daccompagnants… et que la réalité de laccompagnement humain apporté dans le cadre de cette aide sémousse au point de le rendre purement théorique.

Par ailleurs, comme lobserve la Cour des comptes dans la communication quelle a adressée lan dernier à la commission des Finances du Sénat, « laide mutualisée reste globalement minoritaire mais on observe dimportantes différences dun département à lautre qui ne reflètent pas seulement celles des bénéficiaires mais traduisent des divergences dappréciation entre MDPH sur la nature et le volume daccompagnement requis dans des situations comparables, comme le montrent les quelques exemples dans le tableau ci-dessous. » ([61])

Répartition des prescriptions d’accompagnement dans quelques académies

partements et ACADEMIES

Prescriptions aide individuelle

au 31/03/2017

Prescriptions aide mutualisée

au 31/03/2017

% aide individuelle

% aide mutualisée

Doubs

447

329

58 %

42 %

Jura

134

547

20 %

80 %

Haute-Saône

440

0

100 %

0 %

Territoire de Belfort

221

9

96 %

4 %

BESANCON

1 242

885

58 %

42 %

Alpes-Maritimes (006)

1 579

386

80 %

20 %

Var (083)

1 863

15

99 %

1 %

NICE

3 442

401

90 %

10 %

Bas-Rhin

512

846

38 %

62 %

Haut-Rhin

1 017

31

97 %

3 %

STRASBOURG

1 529

877

64 %

36 %

FRANCE

91 066

63 366

59 %

41 %

Source :MEN, retraitement Cour des Comptes.

Pour sassurer que laccompagnement humain fourni dans le cadre de laide mutualisée prescrite par la CDAPH soit réel et concret, le 1° du présent article propose de préciser, au deuxième alinéa de larticle L. 351-3 du code de léducation, que, lorsquelle prescrit ce type daide humaine, la CDAPH non seulement « en arrête le principe », mais en outre « en détermine la quotité horaire minimale », comme elle le fait lorsquelle prescrit une aide individuelle.

Cela éviterait que cette quotité horaire – qui, daprès lanimatrice du Collectif AESH-loi 2005, Mme Virginie Cassand, peut osciller entre six et douze heures hebdomadaires – ne soit arbitrairement fixée.

Par ailleurs, cela nexclut pas que, dans sa décision de prescription, la CDAPH précise les types de tâches pour lesquelles laccompagnement mutualisé est souhaité, comme la préconisé, lors de son audition, la conseillère nationale « éducation familles » de lAssociation des paralysés de France (APF) – France Handicap, Mme Bénédicte Kail.

2.   L’encadrement des délais d’examen des demandes d’aide humaine présentées aux MDPH

En principe, en application de larticle R. 241-33 du code de laction sociale et des familles, les MDPH disposent dun délai de quatre mois pour se prononcer sur les demandes daide humaine qui leur sont présentées au titre du droit à compensation des conséquences du handicap.

Ce texte précise en effet que « le silence gardé pendant plus de quatre mois par la commission des droits et de lautonomie des personnes handicapées à partir de la date à laquelle la demande présentée auprès de la maison départementale des personnes handicapées doit être regardée comme recevable […] vaut décision de rejet ».

Toutefois, il semblerait que ce délai de quatre mois soit souvent dépassé et que certaines MDPH ne déclenchent la computation de ce délai quà compter de lenregistrement de la demande – enregistrement qui lui-même nest effectué quau terme de plusieurs mois, soit parce que les MDPH refusent dy procéder, soit parce quelles répondent quasi-automatiquement (mais pas nécessairement de façon malveillante) aux auteurs des demandes que des pièces manquent à leur dossier.

On a ainsi pu lire dans la presse que, dans certains départements, comme en Seine-Saint-Denis, de laveu même de la directrice académique adjointe chargée de la scolarisation des élèves à besoins éducatifs particuliers, « les délais de traitement dun dossier par la MDPH sont longs : six mois quand il arrive au complet. Cela peut aller jusquà un an. […] Nous comprenons que pour les familles, cela puisse être insupportable » ([62]).

Le fait est que le non-respect des délais semble assumé – voire quasiment institutionnalisé – par certaines MDPH, à en juger par ce quelles indiquent ellesmêmes très officiellement sur leur site internet.

On peut en effet lire sur le site internet de la MDPH de Seine-Saint-Denis (« Place Handicap »), que si « selon larticle R. 241-33 du code de laction sociale et des familles (CASF) “le silence gardé pendant plus de quatre mois par la commission des droits et de lautonomie des personnes handicapées vaut décision de rejet” », « dans les faits, le délai de 4 mois est rarement respecté par les MDPH » et qu« au vu du nombre de demandes à traiter, de leur nature et de la complexité de certaines situations, les délais de réponses varient de 4 à 6 mois.
Ils peuvent être plus longs, notamment lors de lévaluation des demandes de prestation de compensation du handicap » ([63]).

Il ny a pas que le département de Seine-Saint-Denis qui soit concerné. On peut en effet lire sur le site internet de la MDPH de Haute-Garonne que « les demandes sont prises en charge dans un délai pouvant varier de 3 à 6 mois. Par exemple, ce délai […] peut aller jusquà 6 mois pour une première demande […] dorientation scolaire ou professionnelle ou […] de prestation de compensation du handicap [et] dallocation déducation enfant handicapé » ([64]).

Pour garantir que les obligations prévues par les textes législatifs et réglementaires soient respectées et que les enfants et adolescents en situation de handicap ne soient pas dépourvus des compensations que la loi leur reconnaît, en particulier en termes d’accompagnement humain, le 2° du présent article propose de compléter l’article L. 351-3 du code de l’éducation par un nouvel alinéa.

Inspiré de l’article 4 de la proposition de loi n° 1230 relative à l’inclusion des élèves en situation de handicap, récemment rejetée par l’Assemblée nationale, ainsi que de l’amendement n° AC9 de son auteur et rapporteur, M. Aurélien Pradié – amendement repoussé par la majorité en commission des Affaires culturelles et de l’éducation –, l’alinéa nouveau qu’il s’agit d’introduire à l’article L. 351-3 précité prévoit d’imposer aux MDPH :

– qu’elles délivrent, dans un délai maximal de quinze jours à compter de la date de dépôt de la demande d’aide, un récépissé notifiant la complétude ou l’incomplétude du dossier ;

– que, dans l’hypothèse où des pièces auraient manqué au dossier, elles délivrent immédiatement un récépissé notifiant la complétude du dossier une fois ces pièces fournies ;

– qu’elles traitent la demande d’aide dans un délai maximal de deux mois à compter de la délivrance du récépissé notifiant la complétude du dossier, que cette délivrance intervienne dans les quinze jours suivant le premier dépôt du dossier ou à la suite d’une demande de pièces complémentaires.

Ce délai d’examen de deux mois sera un délai maximal : il devra, au besoin, être écourté si cela est nécessaire pour permettre une solution dès le premier jour de scolarité de l’enfant.

Comme l’ont reconnu plusieurs des personnes entendues par le rapporteur, un tel délai d’examen n’a rien d’irréaliste. Preuve en est que, d’après elles, les MDPH ont montré dans des situations d’urgence qu’elles étaient parfaitement capables d’examiner des demandes rapidement. Le rapporteur n’ignore pas que ces maisons sont investies de missions toujours plus nombreuses, sans pour autant bénéficier de dotations plus importantes. Toutefois, il serait sans doute souhaitable de hiérarchiser davantage les priorités de façon à ce que la rentrée scolaire, dont l’échéance est prévisible, soit mieux anticipée.

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Le présent article ayant été supprimé par la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, le rapporteur proposera son rétablissement en séance publique.

Toutefois, afin de tenir compte des observations formulées par un certain nombre d’acteurs lors des auditions conduites par le rapporteur, ainsi que par des députés, lors de l’examen de la proposition de loi en commission, l’amendement de rétablissement proposera une évolution par rapport au dispositif initial du présent article.

Il sera en effet suggéré, s’agissant de l’encadrement des délais d’examen des dossiers de demande d’aide par les MDPH, d’introduire une distinction entre :

– d’une part, les dossiers de première demande d’aide, dont l’examen nécessite une évaluation particulièrement poussée afin que la solution (d’orientation et, le cas échéant, d’accompagnement) proposée soit la plus adaptée à la situation de l’élève concerné et véritablement « sur-mesure » - ce qui justifie qu’un délai de trois mois soit octroyé aux EPE et à la CDAPH pour se prononcer ;

– et d’autre part, les dossiers de demande de renouvellement d’une aide, qui doivent pouvoir être tout à fait sérieusement examinés dans un délai moindre
– qu’il sera proposé de fixer à un mois à compter de la délivrance du récépissé notifiant la complétude du dossier.

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Article 7
Amélioration de laccessibilité et des fonctionnalités du bâti des futurs établissements denseignement public

Adopté par la commission avec modifications

Le présent article a pour objet d’imposer aux collectivités territoriales compétentes de recueillir, sur les futurs projets de construction d’écoles ou d’établissements d’enseignement public, l’avis d’équipes d’établissements sociaux ou médico-sociaux accueillant des jeunes en situation de handicap.

Dans le rapport qu’il a publié en avril 2018 sur l’école inclusive, le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) met en exergue une préoccupation majeure dont il estime qu’elle a été oblitérée par le plan gouvernemental de décembre 2017 destiné à « Permettre à lÉcole de la République dêtre pleinement inclusive » : l’accessibilité du bâti, des équipements et des outils pédagogiques.

Comme l’explique le CNCPH, « pour une école pleinement inclusive, lélève doit pouvoir évoluer dans un environnement adapté à ses besoins aussi bien sur les temps de cours que sur les temps périscolaires ([65]). […] Il est [donc] nécessaire de rendre les locaux scolaires et universitaires accessibles dans une logique daccessibilité universelle (ascenseurs, visiophone en cas de panne, rampes daccès, flashs lumineux, bandes de guidage…) et dadapter les dispositifs de sécurité (incendie, intrusion, confinement) à tous les handicaps (signaux et messages lumineux/visuels en sus des signaux et messages sonores, pictogrammes…) afin dassurer la sécurité de tous les élèves » ([66]).

Or, à cet égard, le CNCPH « déplore que les préconisations faites par la loi [du 11 février] 2005 et dans les rapports annuels de lObservatoire national de la sécurité et de laccessibilité des établissements denseignement ne soient pas encore effectives dans lensemble des établissements scolaires » ([67]).

Dans ses rapports annuels successifs, cet observatoire évoque régulièrement de l’accessibilité au bâti. Dans son rapport pour l’année 2016, il a notamment préconisé de « proposer des formations spécifiques sur laccessibilité aux personnels de direction, où soient traités laspect réglementaire, la gestion des locaux et les besoins pédagogiques » ou encore d’« améliorer la communication entre la collectivité et létablissement par une information en temps réel sur les questions touchant à laccessibilité et désigner une personne relais comme intervenant unique entre les établissements et les autorités académiques » ([68]).

Afin de réduire autant que possible les difficultés rencontrées lors de la scolarisation d’élèves en situation de handicap en milieu ordinaire, qui peuvent ne tenir qu’à des questions d’organisation matérielle et de configuration spatiale des classes, le présent article prévoit qu’à l’avenir, les projets de construction d’écoles maternelles et élémentaires, de collèges et de lycées de l’enseignement public devront faire l’objet d’un avis des équipes :

– soit des établissements et services sociaux et médico-sociaux d’enseignement qui, mentionnés au 2° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, « assurent, à titre principal, une éducation adaptée et un accompagnement social ou médico-social aux mineurs ou jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés dadaptation » ;

– soit des centres d’action médico-sociale précoce mentionnés au 3° du I du même article L. 312-1.

Ce faisant, le présent article s’inscrit peu ou prou dans la logique du quatrième axe du plan gouvernemental destiné à « Permettre à lÉcole de la République dêtre pleinement inclusive ». Cet axe n° 4 projette en effet d’« adosser loffre médico-sociale à lécole de la République » en :

– accroissant significativement l’appui des services médico-sociaux aux établissements scolaires – ce qu’a également préconisé, lors de son audition, l’adjoint du Défenseur des droits en charge de la lutte contre les discriminations et de la promotion de l’égalité, M. Patrick Gohet ;

– adossant tout nouveau service médico-social, intervenant pour les moins de 20 ans, à l’école pour assurer la continuité de parcours de l’élève ;

– transformant progressivement les établissements médico-sociaux en plateformes de services et de ressources d’accompagnement des élèves handicapés.

Le I du présent article décline le principe de la sollicitation de l’avis des équipes des établissements et services sociaux et médico-sociaux sur les projets de construction des locaux des différents niveaux de l’enseignement public, selon les collectivités territoriales qui en ont la charge.

Le 1° de ce I complète ainsi l’article L. 212-4 du code de l’éducation qui, en l’état du droit, dispose que « la commune a la charge des écoles publiques » et qu’« elle est propriétaire des locaux et en assure la construction, la reconstruction, lextension, les grosses réparations, léquipement et le fonctionnement, à lexception des droits dus en contrepartie de la reproduction par reprographie à usage pédagogique dœuvres protégées ».

Il s’agit d’ajouter que, lorsque la construction d’une école maternelle ou élémentaire d’enseignement public aura été décidée après la promulgation de la présente proposition de loi, le conseil municipal devra recueillir, sur le projet de construction, l’avis d’un établissement ou service mentionné aux 2° et 3° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles.

Le 2° du I du présent article adapte cette règle aux futurs projets de construction de collèges d’enseignement public. Il modifie à cet effet le premier alinéa de l’article L. 213‑2 du code de l’éducation qui, en l’état, dispose que « le département a la charge des collèges » et qu’« il en assure la construction, la reconstruction, lextension, les grosses réparations, léquipement et le fonctionnement ».

Enfin, le 3° du même I applique la même règle aux futurs projets de construction de lycées en modifiant le premier alinéa de l’article L. 214-6 du code de l’éducation qui prévoit que « la région a la charge des lycées, des établissements déducation spéciale et des lycées professionnels maritimes » et qu’« elle en assure la construction, la reconstruction, lextension, les grosses réparations, léquipement et le fonctionnement ».

Les spécificités des compétences de la collectivité territoriale de Corse en matière d’éducation et de formation professionnelle étant régies par le code général des collectivités territoriales, le II du présent article apporte des modifications à ce code.

En effet, en application de l’article L. 4424-1 de ce code, la collectivité territoriale de Corse est compétente pour établir et transmettre « au représentant de lÉtat, après consultation du conseil économique, social, environnemental et culturel de Corse, […] le schéma prévisionnel des formations des collèges, des lycées, des établissements denseignement professionnel, des établissements denseignement artistique, des établissements déducation spéciale, des lycées professionnels maritimes, des établissements denseignement agricole […] et des centres dinformation et dorientation ».

Le quatrième alinéa de l’article L. 4424-1 précité énonce qu’« à ce titre, la collectivité territoriale de Corse définit la localisation des établissements, leur capacité daccueil et le mode dhébergement des élèves ».

Et le cinquième alinéa du même article L. 4424-1 ajoute que « chaque année, après avoir consulté le conseil économique, social, environnemental et culturel de Corse et recueilli lavis du représentant de lÉtat, la collectivité territoriale de Corse arrête la liste des opérations de construction ou dextension des établissements précités ».

Il est donc proposé de compléter ce cinquième alinéa pour préciser que, lorsque la construction d’un de ces établissements d’enseignement public du premier ou du second degré aura été décidé après la promulgation de la présente proposition de loi, la collectivité territoriale de Corse sera tenue de recueillir, sur le projet de construction, l’avis des équipes des établissements et services sociaux et médico-sociaux, de façon à favoriser une accessibilité optimale des locaux aux élèves en situation de handicap.

Afin que le plus grand nombre d’établissements scolaires de l’enseignement public soit concerné, la commission a adopté l’amendement du rapporteur tendant à préciser que l’obligation de recueillir l’avis des équipes des établissements et services sociaux et médico-sociaux s’impose aussi pour les projets de reconstruction ou de réhabilitation de bâtiments existants.

Par ailleurs, suivant l’avis du rapporteur, la commission a adopté l’amendement de Mme Béatrice Descamps visant à expliciter que l’avis sollicité par les collectivités territoriales sur les projets de construction, de reconstruction ou de réhabilitation d’établissements d’enseignement public sera simple, et non pas conforme.

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Article 8
Rapport au Parlement sur les réalités du handicap, les besoins
et linclusion sociale des jeunes en situation de handicap

Adopté par la commission sans modifications

Le présent article a pour objet de demander au Gouvernement de remettre au Parlement, dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente proposition de loi, un rapport permettant de combler les nombreuses lacunes en matière d’information statistique sur les réalités du handicap, sur la situation et les besoins des jeunes handicapés, ainsi que sur leur inclusion sociale – lacunes qui ont été dénoncées par de nombreux experts et autorités telles que le Défenseur des droits ou le comité des droits de l’enfant de l’Organisation des Nations Unies (ONU).

Cela fait plusieurs années qu’aussi bien les experts que les autorités nationales et internationales déplorent les insuffisances de l’appareil statistique français pour l’appréhension de divers aspects des réalités du handicap.

Ainsi, en 2013, dans le rapport qu’elle a remis aux ministres alors chargées de la réussite éducative et des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, Mme Pénélope Komitès a regretté qu’« aucune évaluation des impacts de cette évolution [de l’intégration dans le milieu scolaire ordinaire des jeunes en situation de handicap à la suite de la loi du 11 février 2005] sur le niveau scolaire, la formation professionnelle des jeunes en situation de handicap, et leur inclusion sociale [ne soit] encore disponible » ([69]).

En 2016, c’est le comité des droits de l’enfant de l’ONU qui, dans son rapport concernant la France, s’est déclaré préoccupé que notre pays « ne dispose toujours pas de données fiables et ventilées sur de nombreux aspects visés par la Convention [internationale relative aux droits des personnes handicapées – CIDPH] et que les statistiques publiques restent fragmentaires et insuffisantes ». Le comité a recommandé à la France :

– « daméliorer son système de collecte de données pour tous les domaines visés par la Convention » ;

– « de veiller à ce que les données recueillies par les différentes autorités administratives soient utilisées pour la formulation, le suivi et lévaluation des politiques, des programmes et des projets qui visent à assurer lapplication effective de la Convention et lexercice de leurs droits par les enfants » ;

– « dorganiser la collecte de données sur les enfants handicapés et de concevoir un système efficace de détection précoce, afin de faciliter lélaboration de stratégies et de programmes appropriés en faveur de ces enfants » ([70]).

En 2017, cest au tour du Défenseur des droits de sinquiéter de ce quen France, « la mise à disposition et la valorisation des informations statistiques et des études sur le handicap ne font pas lobjet dune coordination ou dun pilotage national, doù un manque de visibilité des données produites ». Selon lui, « les diverses sources de données disponibles nont pas adopté une définition harmonisée du handicap. Certaines informations concernent le nombre et le type de prestations proposées, dautres concernent les individus. Les données administratives souffrent dun défaut de centralisation. Les sources de statistiques et les périodes de références diffèrent également souvent dune étude à lautre. Perdure aussi un manque de données sur le nombre denfants et dadultes handicapés, leur situation, leurs besoins et le niveau de satisfaction de ces besoins. De fait, la mesure de leffectivité des droits est difficile à réaliser » ([71]).

Ces défaillances ont conduit M. Jacques Toubon à adopter, le 26 septembre 2017, une décision-cadre portant recommandations générales destinées à améliorer la connaissance statistique de la situation et des besoins des personnes handicapées.

Relayant les propos de la Défenseure des enfants, Mme Geneviève Avenard, le député Aurélien Pradié, dans son récent rapport, a souligné « le besoin crucial [de données sur les jeunes en situation de handicap], dans un souci dobservation des réalités qui soit à la fois réactive, pertinente et qualitative, particulièrement sagissant des enfants qui sont privés de scolarisation faute de mise en place de solutions adaptées à leur handicap » ([72]).

Comme l’a reconnu lors de son audition la représentante de l’Association nationale des directeurs de MDPH, Mme Marie du Bouetiez, les MDPH ne disposent pas aujourd’hui d’informations sur l’effectivité et les délais de la mise en œuvre des décisions des CDAPH. Lorsque ces décisions sont mise en œuvre, les MDPH ne disposent pas non plus, faute d’indicateurs adaptés dans le guide d’évaluation des besoins de compensation en matière de scolarisation (Geva-sco) que renseignent les équipes de suivi de la scolarisation (ESS), d’éléments sur la durée hebdomadaire réelle de l’accompagnement (les quotités horaires fixées par les CDAPH ont-elles été respectées ? Si ce n’est pas le cas, la scolarisation des élèves s’est-elle malgré tout bien déroulée ou pas ?, etc.).

Interrogés sur les lacunes du dispositif statistique français en matière de handicap, les représentants de Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) des ministères sociaux ont expliqué qu’il s’agissait moins d’un problème de production des données – qui, le plus souvent, existent – que d’une insuffisante diffusion, exploitation et synthèse desdites données. Cette mise en valeur lacunaire est peut-être liée au pilotage de l’information statistique en France, qui est aujourd’hui dévolu à l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), dont le handicap n’est pas nécessairement la préoccupation première.

Toujours est-il que les représentants de la DREES ont reconnu que, faute de moyens pour financer les enquêtes en population générale sur le handicap
– dont le coût peut égaler le budget annuel de la DREES –, les dernières données qui sont issues de telles enquêtes et qui servent aujourd’hui encore à produire des analyses et à répondre à de multiples demandes (des cabinets ministériels, des inspections, etc.) remontent à 2008 et 2009.

Pour toutes ces raisons, les auteurs de la proposition de loi ont souhaité, par le présent article, demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport qui fasse état :

– des moyens de connaissance statistique de la situation et des besoins des personnes en situation de handicap, comme le préconise le Défenseur des droits, et notamment des enfants et adolescents en situation de handicap, comme le réclame le comité des droits de l’enfant l’ONU ;

– des moyens d’évaluation des politiques publiques menées en France dans le domaine du handicap, et en particulier sur l’effectivité et les délais de mise en œuvre des décisions d’attribution d’une aide humaine prises par les CDAPH mentionnées à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles, comme l’appelle de ses vœux le député Aurélien Pradié, ainsi que sur le niveau scolaire, la formation professionnelle et l’inclusion sociale des jeunes en situation de handicap, comme le recommande Mme Pénélope Komitès.

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Afin de clarifier des débats qui ont pu avoir lieu lors de l’examen de la proposition de loi en commission et de dissiper des malentendus autour de l’actualisation des indicateurs qui auront été construits sur la base du rapport demandé au Gouvernement par le présent article, le rapporteur envisage de préciser, par voie d’amendement en séance publique, de préciser qu’une fois le rapport gouvernemental remis au Parlement et les outils statistiques de connaissance de la situation et des besoins des élèves en situation de handicap mis au point, les données souhaitées pourraient être régulièrement mises à jour et diffusées par un éventuel observatoire de l’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap – dont l’opportunité de la création devra être évaluée par le même rapport – ou par toute autre instance qui apparaîtra pertinente.

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Article 9
Gage

Le présent article a pour objet d’assurer la recevabilité financière de la présente proposition de loi.

 

 

 


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   Compte rendu des débats en commission

Réunion du mercredi 23 janvier à 9 heures 30

La commission des Affaires culturelles et de l’Éducation examine la proposition de loi de M. Christophe Bouillon pour une école vraiment inclusive (n° 1540).

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7167280_5c4823a61eed2.commission-des-affaires-culturelles--proposition-de-loi-pour-une-ecole-vraiment-inclusive-23-janvier-2019

I.   Discussion générale

M. Bruno Studer, président. Chers collègues, nous examinons ce matin la proposition de loi pour une école vraiment inclusive, qui est inscrite jeudi 31 janvier en séance dans le cadre de la journée réservée au groupe Socialistes et apparentés. Nous avons désigné comme rapporteur le 18 décembre dernier notre collègue Christophe Bouillon, premier signataire du texte, qui a rejoint notre commission à cette occasion.

Je lui donne sans plus tarder la parole.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Chers collègues, imaginez si, à la dernière rentrée, plus d’un million d’élèves, soit 10 % des quelque 12,4 millions d’élèves que compte la France, n’avaient pu être pleinement scolarisés. Quel aurait été l’émoi ? On aurait sans doute parlé de scandale.

Ce scandale, les élèves en situation de handicap le vivent pourtant chaque année, toute proportion gardée. En effet, d’une rentrée scolaire à l’autre, c’est environ 10 % selon les statistiques officielles, et parfois jusqu’à 30 % d’après les chiffres de certaines associations, des quelque 150 000 élèves en situation de handicap bénéficiaires d’une aide humaine qui se retrouvent sans accompagnement le jour de la rentrée, et donc le plus souvent sans solution leur permettant d’être pleinement scolarisés.

Cette situation est inacceptable. C’est de l’indignation face à cet état de fait qu’est née la proposition de loi pour une école vraiment inclusive que j’ai déposée en décembre dernier avec mes collègues du groupe Socialistes et apparentés et que j’ai aujourd’hui l’honneur de défendre devant vous. Je n’ignore pas que c’est la seconde fois en l’espace de quatre mois que la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation est saisie, à l’initiative des oppositions, d’un texte relatif à l’inclusion des élèves en situation de handicap.

La précédente proposition de loi de notre collègue Aurélien Pradié et du groupe Les Républicains ayant été rejetée au motif que la représentation nationale serait saisie sous peu d’un projet de loi pour une école de la confiance, et ledit projet de loi ne comportant aucune disposition concernant l’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap, il m’a paru utile et constructif de vous proposer de réparer cet oubli et de cesser de procrastiner en adoptant dès à présent des mesures susceptibles de répondre de manière pragmatique à l’urgence que nous constatons toutes et tous sur nos territoires.

En effet, vous avez sans doute comme moi vu affluer dans vos permanences un nombre sans cesse croissant de familles inquiètes, démunies et plongées dans une grande souffrance en raison des difficultés, voire de l’impossibilité, de scolariser leur enfant en milieu ordinaire, faute de bénéficier de l’accompagnement humain qui a pourtant été prescrit par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH).

Il ne s’agit pas ici de faire le procès de l’actuel Gouvernement ni de l’actuelle majorité, ni même d’aucun gouvernement ou d’aucune majorité passée. On ne peut nier que des progrès ont été réalisés, depuis la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui a instauré l’obligation d’assurer à l’élève en situation de handicap une scolarisation en milieu ordinaire au plus près du domicile, jusqu’à la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, qui a gravé dans le marbre de l’article L. 111‑1 du code de l’éducation la notion d’« inclusion scolaire » des élèves en situation de handicap.

L’actuel gouvernement a quant à lui engagé en octobre dernier une concertation intitulée « Ensemble pour une école inclusive ». Il faut saluer cette initiative. Il a aussi lancé un plan national visant l’ouverture de 250 unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) supplémentaires en lycée d’ici à 2022. Mais il semblerait que ce plan soit loin d’être à la hauteur des enjeux puisque, selon un rapport publié l’an dernier, sur la base du scénario actuel d’augmentation annuelle de 7 % d’élèves en ULIS de 2018 à 2022, ce n’est pas cinquante ULIS supplémentaires qu’il faudrait créer chaque année, mais 240 par an en moyenne, soit près de cinq fois plus que ce que qui nous est proposé, même s’il faut distinguer entre lycée et collège.

Force est donc de constater qu’il y a une marge de progrès pour mieux accueillir les quelque 340 000 élèves en situation de handicap aujourd’hui scolarisés en milieu ordinaire. D’ailleurs, le Défenseur des droits dénonce régulièrement un certain nombre de « ratés », tout comme le comité des droits de l’enfant de l’Organisation des Nations unies qui, en 2016, s’est déclaré « préoccupé par la persistance en France de la discrimination à l’égard des enfants handicapés… en termes d’accès à l’éducation et d’égalité avec les autres enfants… au sein des établissements scolaires », ainsi que par « l’insuffisance de la formation et du soutien dont bénéficie le personnel scolaire ». Au printemps 2018, certains députés de la majorité ont même reconnu que le système était « à bout de souffle ».

À mes yeux, c’est notre mission de parlementaires que d’adopter les mesures propices à créer les conditions pour qu’il n’y ait plus autant, voire plus du tout, d’élèves en attente d’accompagnant à la prochaine rentrée scolaire.

Pour ce faire, la présente proposition de loi ne suggère pas de bouleverser l’écosystème de la scolarisation des élèves en situation de handicap en milieu ordinaire. S’inspirant des constats et remontées du terrain, elle propose simplement de corriger, d’aménager, voire d’étoffer les dispositifs existants pour mieux anticiper les difficultés et faire en sorte que nous ne connaissions plus les situations choquantes auxquelles nous avons aujourd’hui à remédier.

Tout d’abord, afin de répondre aux préoccupations des familles qui, aujourd’hui, subissent trop souvent les conséquences d’un défaut d’anticipation de la rentrée scolaire, l’article 1er de la proposition de loi leur garantit l’affectation d’un accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH) au moins un mois et demi avant la rentrée ainsi que la tenue, au plus tard le jour ouvré précédant la rentrée scolaire, d’un entretien avec l’enseignant et l’accompagnant qui auront la charge de leur enfant.

La mise en œuvre d’une telle mesure suppose toutefois d’encadrer les délais d’examen des demandes d’aide humaine par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), ce que fait l’article 6 de la proposition de loi. Je tiens à cet égard à préciser que j’ai parfaitement conscience qu’un certain nombre d’écueils ne pourront être surmontés sans que soit posée la question des moyens, à la fois humains et financiers. Je n’ignore pas non plus les chantiers ouverts par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), notamment en termes d’harmonisation des systèmes d’information, et le travail d’appui qu’elle mène actuellement auprès des MDPH.

Toujours est-il que, grâce à ces deux mesures des articles 1er et 6, les élèves en situation de handicap auront, comme les autres élèves, une visibilité sur les conditions de leur prochaine rentrée scolaire, dont on pourrait en outre imaginer qu’elle soit facilitée grâce à l’aide d’un certain nombre d’acteurs associatifs. Ils sont volontaires et disponibles, et ont l’expertise pour accompagner ces démarches.

Par la même occasion, les accompagnants auront une meilleure visibilité sur leur devenir professionnel lors de cette prochaine rentrée.

Afin de répondre aux préoccupations de ces derniers, l’article 2 de la proposition de loi sécurise leur situation professionnelle en leur garantissant un recrutement pérenne en contrat à durée indéterminée (CDI) de droit public, dont je souhaite qu’il soit conçu de façon que le contrat survive aux éventuels changements d’académie, rendus par exemple nécessaires pour les besoins d’éventuels rapprochements de conjoints.

Cette première étape vers la stabilisation de statuts aujourd’hui précaires est complétée par la sécurisation du parcours professionnel des accompagnants, auxquels l’article 2 garantit la formation continue et la validation des acquis de l’expérience (VAE) propices à leur évolution de carrière.

L’article 3 clarifie quant à lui leur positionnement au sein des établissements scolaires en les associant aux équipes de suivi de la scolarisation (ESS).

Enfin, pour répondre aux préoccupations des enseignants et personnels de l’éducation nationale, que les incertitudes pouvant entourer la rentrée scolaire des élèves en situation de handicap inquiètent tout autant que les familles, l’article 4 de la proposition de loi organise les conditions d’une meilleure formation à l’accueil et à l’éducation de ces élèves. Cette formation semble aujourd’hui très hétérogène et s’apparente souvent à une simple information.

L’article 5 tend quant à lui à améliorer les conditions d’enseignement, d’une part en fixant un effectif maximal au sein des classes du premier degré dans lesquelles des élèves en situation de handicap sont scolarisés, et d’autre part en prévoyant une majoration de la dotation horaire globalisée (DHG) des établissements du second degré accueillant ces élèves. À cet égard, je tiens à souligner que, de mon point de vue, la présence dans ces établissements d’unités d’enseignement externalisées devrait aussi conduire à une bonification de leur DHG.

L’amélioration des conditions d’enseignement passe aussi par celle du bâti, de son accessibilité mais aussi de ses fonctionnalités. C’est la raison pour laquelle l’article 7 favorise une meilleure anticipation des besoins en prévoyant que l’avis des équipes des établissements sociaux et médico-sociaux sur les projets de construction des futurs établissements de l’enseignement public soit systématiquement sollicité. Des amendements proposent d’élargir cette sollicitation et cet avis à d’autres professionnels qui pourraient contribuer à une meilleure adaptation de ces bâtiments. Afin que la rentrée scolaire se déroule dans des conditions optimales dans le plus grand nombre d’établissements de l’enseignement public et que l’on cesse d’être confronté chaque année à l’inadaptation des locaux et de leurs fonctionnalités, je vous proposerai par amendement que l’obligation de recueillir cet avis s’impose aussi pour les projets de reconstruction ou de réhabilitation de bâtiments existants.

Vous l’aurez compris, la présente proposition de loi ne prétend pas remettre en cause l’architecture globale de la scolarisation des élèves en situation de handicap en milieu ordinaire. Elle entend simplement apporter des réponses pratiques et concrètes à la détresse de milliers d’élèves et de familles qui attendent aujourd’hui une réponse de notre part.

Mes chers collègues, la présente proposition de loi nous donne l’occasion de faire en sorte qu’il ne nous soit pas reproché, plus tard, de n’avoir rien fait pour apaiser les souffrances et les angoisses de milliers de nos concitoyens.

Dans le contexte que nous connaissons, la majorité gagnerait non seulement à témoigner de sa confiance à l’égard de ses oppositions, mais aussi à retisser le lien de confiance entre nos concitoyens, leur école et leurs représentants. Personne n’a bien évidemment le monopole de l’école inclusive. L’histoire récente a montré que chacun a su y apporter sa pierre. Faisons en sorte que cette proposition ne soit pas celle d’un député ou d’un groupe, ou même d’une opposition, mais celle de tous.

Mme Cécile Rilhac. Monsieur le rapporteur, d’abord merci à vous et au groupe Socialistes et apparentés de nous donner à nouveau l’occasion, par le biais de cette proposition de loi, de réaffirmer notre vision de l’école inclusive et surtout d’expliquer toutes les mesures que nous avons prises depuis notre arrivée aux responsabilités concernant la prise en charge de l’accompagnement des enfants en situation de handicap.

Vous souhaitez que l’on discute de ces questions alors qu’une concertation est en cours. Cette concertation, lancée en octobre dernier, intitulée « Ensemble pour une école inclusive », est pilotée par le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) présidé par Dominique Gillot. Ses conclusions seront rendues publiques le 11 février prochain.

Si, pour certains, cette phase de concertation ne semble pas importante, pour nous elle est incontournable. C’est notre méthode, notre manière de faire : consulter, discuter, proposer. Néanmoins, cette proposition de loi apporte quelques propositions qui ont le mérite d’encourager le débat, surtout quand on la compare à celle que nous avons étudiée dernièrement sur le même sujet.

Nous partageons tous ici le constat que, sur près de 340 000 enfants en situation de handicap scolarisés cette année, 175 000 nécessitent un accompagnement humain. Ce chiffre en forte hausse lors de la rentrée de septembre dernier a occasionné des dysfonctionnements dont aucun d’entre nous ne peut se satisfaire.

Si l’accompagnement humain est essentiel pour certains, il ne peut être le seul moyen pour répondre aux besoins des élèves en situation de handicap. L’accompagnement de ces élèves nécessite une approche globale, que nous portons ici avec conviction.

Je rappelle que M. Jean-Michel Blanquer et Mme Sophie Cluzel, soutenus par notre majorité, n’ont pas attendu cette proposition de loi pour s’emparer de cette problématique, à laquelle nous nous sommes attelés avec force depuis vingt mois. Plus de 40 000 AESH et 29 000 auxiliaires de vie scolaire (AVS) étaient en poste lors de la rentrée dernière, trente-huit ULIS‑lycée ont d’ores et déjà ouvert sur les 253 prévus sur le quinquennat, 12 400 nouveaux emplois d’AESH sont financés dans le budget 2019, près de 2,3 milliards d’euros par an sont consacrés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap. Tous ces chiffres montrent notre volonté et notre attachement à rendre notre école inclusive.

Dans ce contexte, votre proposition de loi est intéressante mais ne nous semble pas répondre totalement aux besoins actuels.

En ce qui concerne l’affectation d’un accompagnant quarante-cinq jours avant la rentrée scolaire, si l’idée est louable, elle nous paraît irréalisable sur le terrain. De plus, elle ne répond pas au cas des élèves dont le projet personnalisé de scolarisation (PPS) est mis en œuvre au cours de l’année scolaire.

L’article 2 évoque beaucoup de choses mais, dès le premier alinéa, il supprime pour les assistants d’éducation (AED) la possibilité d’être considérés comme accompagnants des élèves en handicap.

L’article 5 prévoit d’une part la limitation de certains effectifs, ce qui n’est pas réalisable aujourd’hui, et, d’autre part la prise en compte des effectifs des ULIS pour augmenter les moyens budgétaires, une disposition déjà existante.

L’article 7 semble aller dans le sens de l’amélioration de l’accessibilité, et des amendements viendront le préciser.

Je le répète, cette proposition de loi engage le débat sur la question cruciale de l’école inclusive ; c’est louable, c’est nécessaire. Mais il faut prendre le temps de bâtir des réponses à la hauteur de la situation. Et si le statut des accompagnants est un des enjeux, d’autres sont tout aussi importants, comme l’accessibilité universelle de l’école, l’intégration des équipes médico-sociales au sein même de l’école, ou encore la formation initiale des enseignants.

C’est pourquoi, monsieur le rapporteur, le groupe La République en Marche accepte volontiers votre invitation faite hier par courrier et discutera dans le détail tous les articles de cette proposition de loi.

M. Aurélien Pradié. Il y a quatre mois, nous examinions ici une proposition de loi que Les Républicains avaient soumise au débat. Cette PPL avait recueilli l’assentiment constructif de plusieurs groupes politiques mais pas ceux de la majorité. J’observe, chers collègues de la majorité, que votre ton a changé et c’est heureux. Il aura fallu pour cela une proposition de loi des Républicains balayée de manière honteuse. Il aura fallu, sûrement, que vous récoltiez les fruits d’une colère citoyenne que vous avez semée et dont vous étiez les seuls responsables. À cet égard, merci, donc, monsieur le rapporteur, d’avoir remis une couche sur ce sujet essentiel, et merci à nos concitoyens, qui ont chahuté la majorité et ont permis qu’enfin, elle assume un peu son rôle de législateur.

Sur le fond, nous soutiendrons cette proposition, en la discutant comme nous le faisons toujours. Nous le ferons avec un regard très constructif car elle reprend certaines dispositions que nous avions proposées, qui ne nous appartiennent d’ailleurs pas car elles étaient le fruit d’un constat largement partagé par les différents acteurs. Sur chacun des articles, nous présenterons des dispositions complémentaires visant à améliorer le texte mais aussi parfois à corriger des orientations selon nous discutables.

Nous connaissons la situation depuis de nombreuses années. Ceux qui pensent qu’il faut encore consulter, réfléchir, n’ont sûrement pas pris le temps d’écouter les quelques acteurs qui, depuis longtemps, disent exactement la même chose sur la question de la prise en charge du handicap à l’école. De même, il faut convenir que depuis plusieurs mois rien n’a été fait de substantiel sur ce sujet. La question du handicap à l’école, comme celle du handicap en général, ne mérite pas seulement des ajustements réglementaires : elle mérite de petites révolutions législatives. Il en va de notre mission, de notre responsabilité collective et, certainement aussi, de l’honneur de la République.

Je souhaite que nous nous souvenions qu’il s’agit pour nous de trouver des solutions : pas seulement d’ouvrir des pistes mais de répondre à des questions urgentes, car il y a encore dans notre pays des élèves qui n’ont pas convenablement accès au droit fondamental de l’éducation. Ces enfants différents doivent y avoir accès comme les autres.

Au fil de nos discussions, nous tâcherons donc d’alimenter le débat de manière aussi constructive que vous l’avez fait il y a quelques mois. S’il y a bien un sujet sur lequel le rassemblement général est nécessaire, c’est celui du handicap.

M. Philippe Berta. Nous voici de nouveau saisis d’une proposition de loi relative à l’école inclusive, à peine quatre mois après le précédent texte sur ce thème. Je tiens à redire l’importance de l’accompagnement des enfants handicapés au cours de leur scolarité. Un accompagnement qui est depuis longtemps insatisfaisant. Nous ne pouvons que nous réjouir que la représentation nationale s’empare une nouvelle fois de cette problématique, à laquelle le Gouvernement s’attèle avec force par l’action conjuguée de M. Jean-Michel Blanquer et de Mme Sophie Cluzel.

Toutefois, nous regrettons ce calendrier très serré, trop serré. En effet, une consultation des acteurs est en cours et doit aboutir à une restitution en février. Nous aimerions, pour légiférer, connaître le contenu de ces échanges. Nous aimerions co-construire une solution avec les AESH et non imposer des solutions toutes faites par la loi. Nous aimerions qu’à l’heure du grand débat national, l’éthique du dialogue soit respectée à tous les échelons. Nous aimerions ne pas passer par-dessus la tête des acteurs engagés dans la concertation.

Le groupe Mouvement Démocrate et apparentés perçoit donc cette proposition de loi comme une opportunité de participer à la réflexion actuelle, de débattre, de proposer. Nous avons déposé des amendements à cette fin.

Rappelons-le, l’accompagnement des élèves handicapés pose un vrai problème. Cette année, 340 000 enfants en situation de handicap doivent être scolarisés, 175 000 d’entre eux nécessitent un accompagnement. Ce dernier chiffre est en hausse de 6 % par rapport à la précédente rentrée. Les premiers jours de l’année scolaire ont révélé un reliquat de retards et de dysfonctionnements dont nous ne pouvons nous satisfaire. Les questions liées aux délais et à la continuité de l’accompagnement sont particulièrement saillantes mais elles ne peuvent s’imposer par le seul fait d’une loi. Il est de notre responsabilité de continuer à travailler à l’amélioration de l’accueil de ces enfants.

De nouveaux outils se développent : création de 3 500 postes d’AESH à cette rentrée, assistance aux familles, développement des ULIS, création de nouveaux outils pédagogiques pour les professeurs…, et la concertation doit à présent nous permettre d’aller plus loin et de développer une approche globale.

Dans ce contexte, la proposition de loi pour une école vraiment inclusive a le grand mérite de permettre à notre commission de débattre sur ce sujet central. Et le groupe Mouvement Démocrate et apparentés souhaite se saisir de cette occasion pour rappeler trois principes importants qui, pour notre famille politique, doivent guider notre réflexion.

Tout d’abord, les politiques publiques doivent tenir compte des différents degrés de handicap pour orienter l’enfant vers la structure qui sera la meilleure pour lui. Si les contacts entre enfants handicapés et non handicapés sont à rechercher autant que faire se peut, placer par principe un enfant handicapé en milieu scolaire peut aussi lui être préjudiciable. La personnalisation est donc la clé.

Ensuite, il est indispensable de réfléchir à l’accompagnement des personnes, enfants ou adultes, en situation de handicap, en termes de parcours. La continuité du parcours, la lutte contre les ruptures doivent être une priorité. Cela à chaque étape de la vie, dans la continuité du rapport de M. Denis Piveteau, mais également à l’échelle de la journée de l’enfant. C’est pourquoi nous accueillons favorablement la proposition, à l’article 3, d’une meilleure association des accompagnants au parcours de l’élève.

Enfin, sur un tel sujet, il est important de ne pas jouer de démagogie et de prendre le temps de bâtir des réponses à la hauteur de la situation.

C’est pourquoi le groupe Mouvement Démocrate et apparentés souhaite que ce texte soit discuté et que les débats en commission et en séance puissent donner lieu à des avancées concrètes qui devront être amplifiées par la suite à la lumière des conclusions de la concertation qui se tient en ce moment même.

Mme Laurence Dumont. La proposition de loi n’a pas vocation, malheureusement, d’une certaine façon, à aborder tous les champs de l’inclusion scolaire pour les enfants en situation de handicap. En effet, il faudrait bien plus qu’une niche pour aborder l’ensemble des volets de ce dossier et traduire par la loi les nombreuses aspirations des familles, des professionnels, des enseignants et des associations. Tous nous disent que l’inclusion scolaire doit être la résultante d’une réflexion menée globalement, de façon complémentaire et simultanée sur tous les éléments à améliorer : transports, enseignement, formation et accompagnement des enseignants, matériels pédagogiques…

Néanmoins, le groupe Socialistes et apparentés a voulu par ce texte être pragmatique. Sa volonté est de permettre d’avancer rapidement sur des points concrets concernant l’amélioration des conditions d’accueil des enfants au sein de l’institution scolaire mais également celle des conditions d’exercice des AESH. Cela constitue à notre sens une étape réalisable immédiatement. Une étape qui représenterait, si nous étions suivis par la majorité, un signe positif significatif et avant-coureur, je l’espère, d’annonces que le Gouvernement envisage après cette grande concertation.

Outre l’amélioration de l’accessibilité des futurs établissements scolaires, la limitation du nombre d’élèves, la formation des enseignants et personnels de l’éducation nationale, nous proposons deux mesures fortes et complémentaires pour répondre à l’urgence et au désarroi, parfois, des familles et des AESH.

La première prévoit d’améliorer la préparation de la rentrée scolaire. L’affectation d’un AESH au moins un mois et demi avant la rentrée constitue une mesure indispensable pour l’enfant et l’accompagnant, et pour que les familles abordent avec sérénité cette étape parfois redoutée.

L’autre mesure concerne les AESH eux-mêmes. Nous avons été nombreux à recevoir des AESH après que la majorité a rejeté de récentes initiatives parlementaires sur ce sujet. Qu’il s’agisse de syndicats, de collectifs ou de personnes à titre individuel, toutes et tous nous ont décrit les conditions difficiles dans lesquelles les AESH exercent leur métier. Ces personnes sont pourtant des partenaires indispensables pour les enseignants, les enfants en situation de handicap et leurs familles. Elles sont un rouage essentiel pour rendre plus facile cette intégration au sein du milieu scolaire ordinaire et, malgré la reconnaissance unanime du rôle qu’ils jouent, les AESH exercent leur métier dans une grande précarité professionnelle, tant au niveau des salaires que des contrats de travail. Et nous parlons là de près de 80 000 personnes en France, souvent des femmes seules avec enfants, qui travaillent de vingt à vingt‑quatre heures par semaine pour 700 euros par mois.

Cette précarité au niveau des salaires et des contrats, cette double difficulté tend à rendre moins stable dans le temps l’accompagnement par une même personne des enfants en situation de handicap, mais également à réduire le vivier de personnes intéressées par cette profession. Pour rendre attractif ce métier et pour que les personnes qui l’exercent le fassent dans les meilleures conditions, il est indispensable que des améliorations profondes interviennent tout de suite. C’est pourquoi la proposition de loi prévoit une « cédéisation » dès la première embauche, un développement de la formation continue et une association des accompagnants au suivi et aux équipes de suivi des élèves.

Il s’agit d’une avancée essentielle. Dans le contexte que nous connaissons, il est fondamental que la majorité parlementaire soit à l’écoute des autres formations politiques, surtout lorsque ces dernières agissent pour le bien commun. C’est évidemment ici le cas, pour une meilleure inclusion des enfants en situation de handicap, notamment grâce à un personnel déprécarisé. Une autre attitude serait incompréhensible.

Mme Béatrice Descamps. Le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés est passé de 100 000 en 2006 à plus de 320 000 en 2017. Ces chiffres attestent de politiques publiques volontaristes pour l’inclusion des élèves en situation de handicap. Travailler à une meilleure inclusion de nos élèves est en effet un enjeu de société et, à cet égard, il convient toujours de nous remettre en question et de toujours aller plus loin pour ces enfants. Nous vous remercions donc de cette proposition, qui nous permet de nous réunir à nouveau sur le sujet. Nous approuvons que votre proposition de loi aborde différents paramètres complémentaires et indispensables qui feront que l’élève pourra trouver ou non sa place à l’école, y évoluer, s’y épanouir et progresser.

Je pense à l’accompagnement des élèves : c’est une réalité depuis plusieurs années mais nous savons tous que beaucoup reste à faire, que l’on se place du côté de l’enfant, de la famille ou de l’accompagnant. Corollaire de la hausse significative de la scolarisation des élèves en situation de handicap, le nombre d’accompagnants humains – je parle bien d’accompagnement humain et non d’accompagnement matériel – a lui aussi considérablement augmenté. Toutefois, ces personnels vivent encore dans une précarité caractérisée par des contrats à temps partiel pour une rémunération peu valorisante. Aujourd’hui, le statut unique est en marche et le décret de 2018 consolide la formation d’adaptation à l’emploi. Toutefois, nous croyons à la nécessité d’une formation plus longue avec deux niveaux de qualification, telle que proposée dans l’un de mes amendements. Subsistent aussi les questions importantes de leur temps de travail et surtout de leur salaire. Nous approuvons pleinement l’article 3 : même si les accompagnants sont généralement associés dans les faits, il est important de l’inscrire dans la loi.

Pour avancer réellement dans ce domaine de l’inclusion, pour y travailler au mieux, au plus près des besoins, il nous faut des informations statistiques, qui nous manquent cruellement à ce jour. L’article 8 a donc un réel intérêt.

Nous souhaitons par contre appeler votre attention sur des idées qui paraissent séduisantes mais qui peuvent être lourdes de conséquences, ou plutôt difficilement applicables, voire totalement inapplicables. Il s’agit par exemple de la volonté de limiter le nombre d’élèves par classe à vingt dès lors que la classe compte un élève en situation de handicap. Idée louable, mais comment faire lorsqu’il y a une seule classe de tel ou tel niveau dans une école ? Bien sûr, les équipes pédagogiques pourront jouer sur la possibilité des cours à double niveau, par exemple, mais il est évident que les choix dans l’organisation des structures d’une école sont limités.

Il s’agit aussi d’être très prudent lorsqu’on mentionne le premier jour de la scolarité, liant celui-ci à l’accompagnement alloué. Cela pourrait-il signifier qu’un élève ne pourrait être scolarisé s’il n’avait obtenu cette aide ?

Fort de l’opinion que le groupe UDI, Agir et Indépendants se fait du rôle de l’opposition dans le débat démocratique, et parce que nous partageons, monsieur le rapporteur, vos convictions sur la nécessité d’agir pour une meilleure inclusion, nous souhaitons l’examen de cette proposition de loi qui place en son centre l’intérêt de l’élève, afin d’améliorer au mieux l’environnement dans lequel il évolue avec son handicap.

M. Alexis Corbière. Merci de m’accueillir dans cette commission, pour exprimer notre soutien à ce texte important qui reprend des propositions et des axes que nous avons portés précédemment par des amendements. L’enjeu est d’agir rapidement sur des problématiques liées à l’accompagnement des élèves en situation de handicap, en particulier le statut des AESH. Nous présenterons quelques amendements visant à intégrer davantage encore ces derniers dans la fonction publique. Cela pose certains problèmes, notamment de concours, et fait débat mais il nous semble important de stabiliser ces professions, de les sortir de leur précarité ; c’est une condition pour améliorer l’accueil des enfants et les conditions de travail du personnel.

Nos collègues de la majorité soulignent le fait qu’une concertation est en cours. Je ne crois pas que cette concertation, utile, soit un obstacle au débat, voire à l’adoption de ce texte. Je ne rappellerai pas que, sur d’autres sujets, ils étaient moins attachés à la concertation, notamment concernant le code du travail ou le statut de la SNCF. Soyons à la hauteur du problème. Quels que soient les enjeux de la concertation, ce sujet nous rassemble tous et nous n’avons pas besoin de réunir l’ensemble des gens concernés pour comprendre que nous sommes particulièrement attendus. En Seine-Saint-Denis, ce manque d’AESH conduit, même s’il y a débat avec le ministre, à des fermetures ou à des non-ouvertures de classes pour élèves sourds et malentendants…

Nous sommes favorables à ce débat ainsi qu’à l’ensemble des articles proposés et à l’adoption du texte, pour améliorer la situation des enfants et les conditions de travail de ceux qui les accompagnent dans nos écoles.

Mme Elsa Faucillon. Je remercie le groupe Socialistes et apparentés qui nous offre ce matin une nouvelle possibilité d’améliorer ensemble l’accès à la scolarisation des élèves en situation de handicap, demande récurrente des familles et des AESH. Cette situation concerne évidemment plus spécifiquement les élèves en situation de handicap et leurs familles, mais nous sommes tous impliqués, parce que nous sommes face à une exigence d’égalité. C’est d’ailleurs pour cela que l’examen de la proposition de loi relative à l’inclusion des élèves de notre collègue Aurélien Pradié en octobre dernier avait eu un tel retentissement, et que son examen avait non pas fait consensus, malheureusement, mais en tout cas recueilli l’assentiment de nombreux groupes de cette assemblée. Le refus d’examiner ce texte par la majorité avait eu aussi un fort écho. C’est certainement grâce à ce retentissement que les choses ont un peu changé et que nous pourrons examiner le présent texte.

On nous avait dit que l’examen de la proposition de loi d’Aurélien Pradié avait été repoussé pour pouvoir inclure de telles dispositions dans la loi sur l’école de la confiance. Or, comme le rapporteur l’a indiqué, ce n’est pas le cas. Pourquoi, dans ce cas, puisque la concertation arrive à son terme, ne pas inclure les propositions qui en ressortent dans le projet de loi sur l’école de la confiance, ce qui permettrait de lui donner une assise forte ? Par ailleurs, la tenue de la concertation sur l’école inclusive ne saurait suffire à répondre aux attentes puisque, si je ne m’abuse, tous les acteurs du dialogue n’ont pas été auditionnés sur tous les sujets. Je sais, par exemple, que les AESH ont été entendus en dernier, sans même soulever la question par exemple de leur statut.

En revanche, la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui a le mérite de reprendre une grande partie des demandes récurrentes des familles mais également des professionnels. Chaque jour, de nombreux AESH, des familles aussi, nous alertent en nous disant à quel point le numéro vert ne répond pas aux attentes.

À la rentrée de 2018, près du tiers des élèves qui se sont vus prescrire un accompagnement étaient en attente de cet accompagnement. Cette situation est d’abord le fruit d’un manque d’aidants. La concrétisation de cette belle idée d’école inclusive quand la situation le permet nécessite de rendre le métier d’accompagnant plus attractif. Si l’éducation nationale a du mal à recruter, c’est parce que les contrats d’AESH sont précaires, peu attractifs, un temps partiel imposé et payé au SMIC. Le salaire est souvent de 700 euros par mois alors qu’il concerne très majoritairement des femmes seules avec enfants. Je connais même quelques cas de femmes qui ont elles-mêmes des enfants en situation de handicap et qui se retrouvent avec six contrats à durée déterminée (CDD) d’un an avant de pouvoir prétendre à un CDI. Cette situation n’est pas acceptable pour ces aidantes qui remplissent des missions si utiles. La liste des revendications est malheureusement très longue pour celles que l’on appelle souvent les « invisibles » de l’éducation nationale.

La présente proposition de loi prévoit une formation continue, et le groupe GDR a déposé un amendement visant à obtenir un rapport sur l’opportunité que les AESH deviennent des fonctionnaires à part entière, afin d’avoir une formation et une protection véritables.

Nous sommes également très favorables à l’ensemble des mesures tendant à préparer la rentrée des élèves en situation de handicap. Vous aurez donc compris que nous voterons cette proposition de loi.

M. Bertrand Pancher. Monsieur le président, je vous remercie de m’accueillir dans votre commission pour exprimer la position de mon groupe Libertés et Territoires sur cette proposition de loi qui concerne un sujet important : l’inclusion des enfants en situation de handicap dans les parcours de scolarisation. En la matière, nous sommes tous d’accord pour reconnaître que des progrès restent à faire.

Je partage le diagnostic de Christophe Bouillon et de son groupe. En effet, si l’inclusion en milieu ordinaire semble voulue par tous, elle n’est évidemment pas acquise. Nous sommes confrontés à des problématiques d’accessibilité des établissements, d’accompagnement des enfants et des parents. Après avoir fait le bon diagnostic, il faut souligner le bon état des lieux des solutions, comme la nécessité d’encadrer les délais d’examen des demandes d’accompagnement, la communication entre les MDPH et les services de l’éducation nationale, la sécurisation des statuts et de la rémunération des intervenants.

Mais, et Christophe Bouillon le sait en tant qu’élu local engagé, ce n’est pas tout de partager un diagnostic et de cibler un certain nombre de solutions, encore faut-il s’interroger sur les moyens et les contraintes, afin que les objectifs fixés se concrétisent vraiment. Or la professionnalisation a un coût élevé, de même que le renforcement du rôle des MDPH, et on voit bien à quoi peut correspondre en termes de moyens la diminution des délais d’examen des demandes d’accompagnement.

Par ailleurs, comment ne pas être frappé par le nombre de lois prophétiques en direction de l’éducation nationale et des collectivités, qui ne sont assortis d’aucune forme de contraintes ? Ce n’est pas tout de garantir la présence d’un ou d’une AESH le quarante‑cinquième jour précédant la rentrée scolaire, encore faut-il savoir comment contrôler une telle mesure.

Mon groupe regrette beaucoup qu’on n’ait pas ouvert le débat – mais peut‑être Christophe Bouillon en parlera-t-il dans quelques instants – du dialogue constructif ou du consensus entre toutes les parties prenantes. Comment parvenir à ce consensus, en termes de moyens, de contrôle et de suivi, entre l’État, les parents, etc. ?

Enfin, je m’étonne qu’on n’ait pas non plus ouvert le débat de la décentralisation des politiques d’accompagnement, des actions en direction de personnes handicapées, ou bien de co-construction, sujet quelque peu à la mode. Comment faire en sorte que ces politiques soient réellement partagées et mises en œuvre ?

Si notre groupe est intéressé par la présente proposition de loi, à ce stade nous pensons en rester à une abstention prudente.

M. Gaël Le Bohec. Monsieur le rapporteur, j’ai lu avec attention cette proposition de loi relative à un sujet qui nous est particulièrement cher, mais votre propos liminaire n’a malheureusement pas répondu à mes questionnements.

Tout d’abord, le titre de votre texte est quelque peu provocateur alors que dans votre intervention vous avez dit ne pas vouloir faire le procès du gouvernement actuel ni bouleverser l’ensemble du système. Aussi, pouvez-vous nous donner des éclaircissements sur ce titre ?

Vous avez indiqué que les concertations en cours aboutiront dans les jours à venir. Pensez-vous que la loi peut supplanter des concertations, dont je sais qu’elles sont chères à notre groupe parlementaire et, je l’imagine, au vôtre, même si notre collègue Alexis Corbière estime que nous n’avons pas besoin de réunir les personnes concernées pour discuter de ce sujet ? Pour ma part, je pense que la concertation a toute sa place et qu’il est important de lui laisser le temps d’avoir lieu.

M. Maxime Minot. Je tiens tout d’abord à me joindre à l’appel qui a été lancé par de nombreux collègues sur les différents bancs de l’Assemblée. Alors que le nombre d’élèves porteurs d’un handicap a triplé, il est urgent de donner à l’école de la République les moyens de les intégrer au mieux afin qu’ils puissent révéler tous leurs talents car ils constituent une richesse pour notre pays. Dans le civil, comme disent les militaires, avant d’être élu, j’ai pu mesurer, par mon parcours professionnel, à quel point il nous fallait agir sans attendre.

La proposition de loi qui nous est présentée aujourd’hui poursuit les mêmes objectifs que celle de notre collègue Aurélien Pradié, présentée à l’automne dernier, et aborde un sujet majeur, celui des accompagnants des élèves en situation de handicap. Je constate effectivement que la position du groupe majoritaire a changé et c’est heureux, compte tenu des enjeux. J’invite donc notre commission à rechercher le consensus et à prendre le temps du travail législatif qui pourtant ne suffira pas à lui seul à répondre à toutes les problématiques. Aussi la tâche devra-t-elle être poursuivie. Il ne faut pas oublier que les parents de ces élèves nous regardent et que nous devons être dignes de leurs attentes.

Mme Marie-George Buffet. Je me félicite du contenu de cette proposition de loi, et notamment des avancées concernant le statut des accompagnants qui sont souvent des femmes qui travaillent dans une situation de très grande précarité.

Valoriser leur formation, reconnaître un emploi stable, un statut et une évolution de carrière me semblent être le minimum parce que la qualité du travail de ces hommes et de ces femmes, c’est le bien-être et la réussite de l’enfant qui est accompagné. Assurer un bon statut constitue donc une garantie pour les enfants et les familles.

Monsieur le rapporteur, quelle est votre position sur l’amendement du groupe GDR relatif à l’évolution vers le statut de fonctionnaire de l’éducation nationale, faisant ainsi de ces accompagnants des membres à part entière de l’équipe pédagogique ?

J’en viens à une question que je reposerai peut-être au ministre ce soir. Si par malheur cette proposition de loi n’était pas adoptée, le ministre prendra-t-il l’engagement que les propositions issues de la concertation en cours qui s’achèvera le 11 février soient reprises dans le projet de loi pour une école de la confiance ?

Mme Jacqueline Dubois. Monsieur le rapporteur, tout ce que vous avez dit est extrêmement intéressant. Nous sommes tous, bien sûr, très attachés au meilleur accompagnement possible des élèves dans nos écoles.

La personne en situation de handicap a droit à une compensation répondant à ses besoins, celle-ci étant fixée par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Elle peut concerner une aide humaine individuelle ou mutualisée. Lorsque l’élève a besoin d’un accompagnement individuel, le temps d’accompagnement est précisé. Dans le cas contraire, il est indiqué qu’il s’agit d’une aide mutualisée.

Dans votre rapport, vous citez la crainte de certains accompagnants de vie scolaire que l’accompagnement mutualisé ne réponde pas aux besoins des élèves, en particulier dans le cadre des pôles inclusifs d’accompagnement localisés, expérimentés actuellement. Or c’est l’intérêt des élèves que nous devons défendre avant tout. L’objectif de ces pôles est de mieux organiser les accompagnements pour qu’ils répondent aux besoins spécifiques des élèves au cours de la journée et de la semaine en fonction de leurs emplois du temps. Par exemple, il s’agit de déterminer si le besoin porte sur le temps des mathématiques, du français ou du sport.

Votre proposition de fixer une quotité horaire pour les aides mutualisées ne semble‑t‑elle pas aller à l’encontre de l’esprit même de l’aide mutualisée, qui est de permettre de la souplesse, et ne remet-elle pas en question la capacité de la CDAPH à distinguer quand l’élève a besoin d’un accompagnement individuel ou mutualisé ?

M. Pierre-Yves Bournazel. Monsieur Bouillon, je tiens à vous remercier pour la qualité de votre travail et de votre engagement.

Je souhaite aborder le cas des écoles qui proposent un enseignement adapté aux élèves en situation de handicap. Certains de ces établissements privés hors contrat souhaiteraient justement établir un contrat avec l’État, mais ils ne le peuvent pas, notamment parce qu’ils accueillent des élèves en âge d’être dans le second degré alors qu’on leur enseigne le programme du premier degré du fait de leur handicap cognitif ou mental. Je pense, par exemple, à l’école Tournesol dans le XIIe arrondissement de Paris. Cette adaptation de l’enseignement fait leur particularité, favorisant l’épanouissement et l’autonomie des élèves avec une adaptation aux besoins de chacun.

Avez-vous déjà été sensibilisé sur ce sujet lors de vos auditions ? Quelle solution législative pourrions-nous apporter à ces établissements qui œuvrent grandement à l’accompagnement de ces élèves en situation de handicap cognitif ou mental, afin de faciliter leur formidable travail et leur contractualisation ?

Mme Sylvie Tolmont. De trop nombreuses situations d’exclusion d’élèves en situation de handicap ont perduré à la rentrée de 2018. Ils étaient encore des milliers. À cet égard, nous ne pouvons que déplorer l’absence d’un bilan chiffré – et toujours attendu. En tout cas, le constat est partagé par l’ensemble des associations représentant les personnes handicapées et leurs familles, par les associations et collectifs des AESH, y compris par le Défenseur des droits qui, dans son rapport de fin 2018 sur les droits de l’enfant, préconise un certain nombre de mesures que nous retrouvons dans ce texte.

M. Jean-Michel Blanquer a déclaré, au mois de juin dernier, que sur cette question d’autres pays font mieux que nous sur le plan qualitatif avec des moyens comparables. Or depuis dix-huit mois, notre assemblée a eu l’occasion d’examiner à plusieurs reprises cette problématique de l’inclusion scolaire, mais depuis dix‑huit mois votre majorité a botté en touche au prétexte de multiples concertations dont la dernière, lancée en décembre, est destinée à recueillir les attentes et les propositions qui nous semblaient pourtant déjà largement posées au fil des mois. Les annonces faites par le Président de la République la semaine dernière sur le statut des AESH et d’une mutualisation avec le périscolaire font légitimement débat et sont très en deçà des attentes. Nous sommes, par ailleurs, particulièrement atterrés de constater que le projet de loi pour une école de la confiance ne comporte aucune mesure relative à l’inclusion.

Au regard de la priorité accordée au handicap affichée par votre majorité, il nous semble que l’adoption de ce texte, défendu par notre excellent collègue Christophe Bouillon, serait enfin un signal fort de volontarisme politique de votre part envoyé aux élèves et à leurs familles.

M. Stéphane Testé. Je souhaite revenir brièvement sur l’article 1er qui prévoit l’affectation d’un AESH dans un délai de quarante-cinq jours avant la rentrée scolaire et la tenue d’un entretien entre la famille de l’élève en situation de handicap et l’enseignant. De quelle manière avez-vous fixé ce délai qui paraît peu réaliste dans les faits ?

Mme Emmanuelle Anthoine. Le nombre d’enfants handicapés au sein de l’institution scolaire ne cesse de croître. Ils sont désormais 340 000, après une augmentation de 6 % en un an seulement.

Ces chiffres nous obligent, ils nous obligent à agir afin de donner tout son sens à l’école de la République. Celle-ci ne saurait, en effet, laisser ses enfants de côté. Il est de l’honneur de la République française d’avoir créé, par la loi du 11 février 2005, l’obligation de scolarité pour les enfants en situation de handicap. Mais pour donner corps à ce principe, il faut des accompagnants qui se dévouent chaque jour afin de permettre l’égalité des chances pour ces élèves. Ils sont au nombre de 100 000 et n’ont ni statut, ni reconnaissance, ni formation suffisante. Ils exercent un métier peu attractif et faiblement rémunéré. Nous ne pouvons continuer dans cette voie, d’autant qu’à chaque rentrée des enfants ne peuvent rejoindre l’école faute d’accompagnant.

Cette pénurie d’accompagnants n’est pas acceptable. Elle est à l’origine d’un véritable parcours du combattant pour les familles d’enfants handicapés. Je tiens au passage à rendre hommage devant vous au travail remarquable accompli par les associations et rappeler que la proposition de loi de mon collègue Aurélien Pradié permettait de répondre à toutes ces problématiques. La majorité présidentielle a choisi d’empêcher le débat sur ce texte en votant une motion de rejet préalable, choix qui reste incompréhensible pour moi. Aussi je me félicite que le sujet soit à nouveau abordé et j’espère que cette fois-ci nous ne serons pas privés de débat.

M. Bertrand Sorre. Monsieur le rapporteur, je pense que nous partageons tous ici la volonté de créer un statut pour les accompagnants. Ma question porte sur l’article 2 qui concerne le recrutement des AESH, et plus particulièrement sur le type de contrat que vous proposez, sur la quotité horaire, sur la nature de l’employeur, notamment la répartition qui pourrait être faite entre les collectivités locales, les collectivités territoriales et l’État. Avez‑vous des propositions plus précises à nous faire ?

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Madame Rilhac, vous avez employé, à plusieurs reprises, le mot « irréalisable ». Or je crois qu’on peut convenir que l’une des belles définitions de la politique, c’est de rendre possible ce qui est nécessaire. À cet égard, l’ensemble des intervenants s’accordent à dire qu’il est nécessaire d’agir aujourd’hui.

Vous évoquez la concertation en cours. Convenez que, dès lors, la question du véhicule législatif se pose, c’est-à-dire celle de la traduction législative de propositions qui peuvent déboucher de cette concertation. Il y a quatre mois, on nous avait indiqué qu’il serait possible, au travers du projet de loi pour une école de la confiance, de traduire en actes un ensemble de propositions qui pourraient être issues de cette concertation. Avouez qu’il y a un problème de calendrier ! Je propose en tout cas, avec ce texte, un véhicule législatif. Vous avez rappelé que la concertation s’achèvera le 11 février prochain et qu’une présentation des axes des différents groupes de travail aura lieu lors de la conférence nationale du handicap. On peut parfaitement imaginer que certains éléments puissent s’accrocher à ma proposition de loi en première lecture au Sénat ou en deuxième lecture.

Vous évoquez la question essentielle de la prise en compte des besoins particuliers de l’enfant. C’est le travail de l’équipe pluridisciplinaire d’évaluation, en lien avec l’équipe éducative. En ce qui concerne la fixation du calendrier, je vous renvoie au vade-mecum de la rentrée scolaire établi aujourd’hui par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), en lien avec les MDPH. L’ensemble des bonnes pratiques qui figurent dans ce document public montrent que ce point de fixation est de nature à permettre aux élèves en situation de handicap d’être scolarisés le jour de la rentrée et que cet objectif est réalisable, contrairement à ce que vous dites. D’ailleurs, lors des auditions, les représentants de la CNSA ou des MDPH ont rappelé qu’au tout début du processus de création, à la suite de l’entrée en vigueur de la loi de 2005, les délais d’examen des demandes étaient de deux mois.

S’il y a eu une augmentation du nombre d’élèves en situation de handicap, c’est d’abord parce qu’on a gravé dans le marbre le principe de l’école inclusive, et ensuite parce que l’on détecte plus largement certains types de handicap, ce dont il faut se féliciter. On n’échappera pas à la question des moyens, mais, et c’est la philosophie de ce texte, on ne peut pas faire la différence, le jour de la rentrée, entre les élèves en situation de handicap et les autres. Parvenir chaque année, le jour de la rentrée, à mettre un million d’enseignants face à 12 millions d’élèves, peut sembler un défi extraordinaire, et pourtant nous y parvenons… Aussi doit-on être capable de mettre en correspondance les 86 000 accompagnants avec les 150 000 élèves en situation de handicap bénéficiaires d’une aide humaine. C’est un défi, mais il est à portée de main, d’autant que la réflexion est en cours dans les MDPH pour simplifier, fluidifier, faire en sorte que l’ensemble des équipes se mobilisent pour atteindre l’objectif.

Je tiens à remercier M. Aurélien Pradié pour sa contribution. Le texte qu’il a présenté a eu le mérite d’engager une discussion, même si nous aurions souhaité, bien évidemment, ne pas avoir à revenir sur un sujet qui intéresse l’ensemble de nos collègues, beaucoup de parents d’enfants en situation de handicap venant chercher auprès d’eux un soutien, un accompagnement.

On évoque la nécessité d’être bien renseigné en la matière. J’ai eu l’occasion, dans le cadre de la préparation de ce texte, de lire l’ensemble des rapports qui ont été publiés depuis 2010. Je peux affirmer, vu l’épaisseur de la pile de documents, que l’on ne découvre pas le sujet, comme le prouvent d’ailleurs vos interventions et les témoignages. Nombre de parlementaires et d’inspections diverses et variées se sont en effet penchés sur cette question. On ne peut donc pas dire qu’on a encore besoin d’attendre pour avoir davantage d’informations. Il faut que des décisions soient prises aujourd’hui à partir d’un sujet qui est bien documenté. Je rejoins donc notre collègue quand il appelle à la mobilisation de tous.

Monsieur Philippe Berta, vous avez fait, vous aussi, allusion à la concertation en cours, mais je rappelle que l’Assemblée nationale n’est pas une chambre d’enregistrement. Nous sommes là pour légiférer, pour défendre des idées, pour débattre. On ne peut pas être fermé pour travaux ! Certes, on peut ouvrir de grands débats, mais on ne peut pas entrer dans une période de glaciation et attendre que tout cela aboutisse. Alors que nos concitoyens nous demandent à quoi nous servons et ce que nous faisons, des initiatives de cette nature peuvent permettre de valoriser l’action des parlementaires que nous sommes.

Je vous rappelle que la décision de transformer les postes d’AVS en AESH date de 2016 et que cette disposition a été suivie d’effets, et c’est tant mieux. La création du statut d’AESH est issue d’un certain nombre de rapports et elle répondait à une demande. Vous insistez, à juste titre, sur la confusion qui peut exister parfois entre le projet personnalisé de scolarisation et le guide d’évaluation des besoins pour permettre la scolarisation. Beaucoup de MDPH font en effet remonter cette difficulté. Là encore, l’action menée sous l’égide de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie est en train de produire des effets, à la fois en termes d’harmonisation, de fluidité et de bonne compréhension des outils qui sont à disposition.

Mme Laurence Dumont insiste, à juste titre, sur le fait que ce texte n’a pas vocation à embrasser l’ensemble des questions que soulève la notion d’école inclusive, et plus largement la prise en considération du handicap dans notre société : il se concentre sur la rentrée scolaire et vise à créer les conditions pour faire en sorte qu’elle se déroule bien pour les élèves en situation de handicap. Imaginez en effet ce que peut signifier pour un élève en situation de handicap de rejoindre l’école trois ou quatre semaines après la rentrée scolaire ou encore en cours d’année. Ce serait une difficulté à la fois pour les parents, les enseignants et les accompagnants qui sont souvent prévenus du jour au lendemain. Fixer un objectif permet la pleine réussite des élèves en situation de handicap, car il ne faut pas ignorer la dimension pédagogique.

C’est pourquoi le texte se concentre sur l’accompagnant, qui joue un rôle essentiel. Et qui dit rôle essentiel dit reconnaissance de ce rôle. Cela passe par la qualité du recrutement et par la sécurisation du parcours professionnel, d’où l’idée de formation continue et du CDI de droit public qui permettrait de répondre, comme cela a été dit en filigrane à travers plusieurs interventions, à la question du vivier, de la problématique de recrutement. Personne ne peut nier qu’il est difficile actuellement de recruter des accompagnants, ce qui explique les problèmes rencontrés le jour de la rentrée des classes. Pour autant, si l’on veut réussir la rentrée scolaire et permettre que l’enfant à qui l’on a prescrit un accompagnement humain puisse l’obtenir, il convient en effet de répondre à la problématique du recrutement.

Mme Béatrice Descamps a raison de dire qu’il reste encore beaucoup à faire, et c’est l’objet même de cette proposition de loi. Je ne m’inscris pas du tout dans la logique du « rien avant et tout après », car on voit bien que, depuis 2005, chacun a apporté sa contribution, sa pierre à l’édifice. Cela dit, il y a des constats que l’on ne peut pas ignorer, et les chiffres que l’on retrouve d’une rentrée scolaire à une autre, qui ne peuvent pas nous laisser indifférents, sont impressionnants puisqu’ils font état de 10 à 15 % d’élèves en situation de handicap qui ne peuvent pas être scolarisés faute d’accompagnant. Vous avez souligné, à juste titre, la qualité de la formation et vous évoquez, au travers de vos amendements, la question du diplôme. La création du diplôme d’État d’accompagnant éducatif et social en 2016 est déjà une première avancée. Je défends aussi l’idée d’une évolution de carrière pour les AESH. Il convient donc de créer un diplôme qui réponde aux missions qu’on souhaite accorder aux accompagnants, mais il faut aussi leur permettre d’évoluer peut-être vers le secteur médico‑social. C’est là une piste qu’il faut aborder sérieusement.

S’agissant des effectifs, je me suis inspiré des exemples étrangers, et notamment de celui, très bien documenté, de l’Italie. Certes, là-bas la pratique date des années soixante-dix, et il faut faire la différence entre l’Italie du nord et l’Italie du sud où la logique est totalement différente, mais on entre aujourd’hui dans le virage inclusif qui consiste à ramener les classes dépendant des établissements médico-sociaux au sein même de l’école. Dans les classes élémentaires, l’organisation pédagogique est aussi une organisation physique de la classe. C’est ainsi que procèdent les enseignants. L’idée sous-jacente, au travers de la question des effectifs, est de lui permettre de consacrer le temps qui convient à un élève en situation de handicap, en lien avec l’accompagnant, tout en organisant la classe de la meilleure façon. Je rappelle que l’effectif de vingt élèves n’est pas complètement farfelu au regard de ce qui existe dans certaines écoles. La moyenne étant de vingt-six à vingt-sept élèves par classe, ramener l’effectif à vingt élèves dès lors que l’on accueille un élève en situation de handicap correspond à des exemples étrangers et à une demande des enseignants. Ce n’est pas totalement irréalisable.

Je remercie M. Alexis Corbière pour le soutien qu’il apporte à ce texte. Il insiste lui aussi, à juste titre, sur le rôle essentiel des accompagnants, et sur la précarité de leur situation, qui explique les difficultés de recrutement. Il a déposé un amendement sur la scolarisation des sourds et malentendants. Comme je suis, à titre bénévole, président du Conseil national du bruit depuis 2011, j’ai eu l’occasion d’émettre des avis et des recommandations en la matière. La question de la surdité ou de la perte auditive n’est malheureusement pas suffisamment prise en compte. Un rapport du groupe de travail présidé par Mme Pénélope Komites soulignait déjà, en 2013, les difficultés pour mener des actions en la matière. Je comprends donc l’attention que notre collègue souhaite porter sur ce point.

M. Bertrand Pancher partage les constats en la matière, et je l’en remercie, et il rappelle, comme vous tous, les progrès qu’il reste à faire. Il évoque la question des coûts, qui est essentielle, mais on ne pourra pas faire l’économie de moyens financiers et humains. Il serait en effet illusoire de penser qu’on peut réussir l’école inclusive sans mobiliser des moyens. C’est d’ailleurs ce qui se passe depuis plusieurs années lorsque l’on crée des postes et que l’on accompagne certaines initiatives. Certes, le virage inclusif a un coût, mais je préfère parler d’investissement car cette évolution est bonne pour les élèves en situation de handicap ainsi que pour l’ensemble des élèves, comme le montrent des retours d’expériences ou des rapports. Faire évoluer le regard sur le handicap, ainsi que beaucoup le souhaitent ici, passe aussi par des coûts qui sont en réalité des investissements.

L’article 8 de la proposition de loi vise, comme le demandent de façon récurrente l’ensemble des acteurs, à coordonner les données statistiques qui existent mais qui sont pour le moins dispersées, pour avoir une meilleure évaluation des politiques publiques et des données transparentes reconnues qui permettent à l’ensemble des acteurs de juger de la pertinence des dispositifs mis en œuvre.

Monsieur Le Bohec, vous me dites que le terme « vraiment » qui figure dans le titre de la proposition de loi est quelque peu provocateur. En décembre 2017, le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse n’a-t-il pas porté un plan pour « permettre à l’école de la République d’être " pleinement " inclusive » ? Quelle différence faites-vous entre « vraiment » et « pleinement » ? Ce qui est important et qui correspond finalement aux préoccupations de beaucoup de nos collègues, c’est que des progrès restent à faire. Introduire dans le titre de la proposition de loi l’adverbe « vraiment » ne constitue pas une injure à l’égard de qui que ce soit. Dans mon propos liminaire, j’ai rappelé que ce texte ne faisait le procès de personne, mais qu’il convenait de réussir la rentrée scolaire et pour ce faire d’y consacrer des moyens. Croyez-moi, il ne s’agit aucunement de ma part d’une provocation, tout comme, je l’imagine, ne l’est l’intitulé du plan défendu par le ministre.

Je ne reviens pas sur la concertation en cours : nous voulons tous qu’elle réussisse, même si Mmes Marie-George Buffet et Elsa Faucillon ont raison de rappeler que des collectifs d’AESH ont parfois le sentiment de ne pas y être pleinement associés. Nous voulons tous la réussite de cette concertation, mais il serait dommage qu’elle ne débouche pas sur un véhicule législatif adapté. Or je pense que ce véhicule, c’est celui que je vous présente aujourd’hui.

Madame Faucillon, vous avez eu raison de souligner que de nombreux membres de notre commission nourrissent de fortes attentes depuis l’examen, il y a quatre mois, de la proposition de loi de M. Aurélien Pradié. Ils attendaient beaucoup du projet de loi sur l’école de la confiance, mais ils sont tombés de l’armoire lorsqu’ils se sont aperçus que le mot « handicap » n’y figurait même pas. J’entends bien qu’une concertation est en cours, mais il ne nous est pas interdit d’avoir des idées. Vous avez raison, par ailleurs, de rappeler le rôle essentiel des accompagnants, dont vous avez souligné à juste titre qu’ils sont les « invisibles » de l’éducation nationale. Notre responsabilité à tous, à partir du moment où nous considérons qu’ils jouent un rôle essentiel, c’est de leur offrir une visibilité.

Monsieur Minot, vous avez dit qu’il fallait agir sans attendre et je crois en effet que c’est notre responsabilité.

Madame Buffet, vous avez insisté sur le statut des accompagnants. Je crois que ce qui est bon pour les personnes – statut, évolution de carrière – est bon aussi pour le système. En effet, qu’est ce qui grippe aujourd’hui le système, si ce n’est la pénurie de candidats, la difficulté à recruter des gens pour renouveler le vivier d’accompagnants ? Si nous voulons avoir un vivier qui corresponde à la nature de nos besoins, il faut en effet rendre attractifs ce métier, cette profession, cette mission.

Vous avez déposé un amendement qui demande un rapport sur ce sujet : j’y suis parfaitement favorable, car cela permettra d’y voir plus clair. Je considère qu’il faudrait, dans un premier temps, faire le choix de la « cédéisation » en droit public. En effet, le statut de fonctionnaire implique un concours et je crains que l’instauration d’un concours n’assèche encore davantage le vivier. Je ne crois pas, du reste, que ce soit une demande des AESH. Un rapport nous permettrait de mesurer à la fois les conséquences financières d’une telle mesure et l’attractivité de cette fonction.

Madame Dubois, vous avez raison de poser la question de l’articulation entre l’aide individuelle et l’aide mutualisée. Pour ma part, je ne condamne nullement l’aide mutualisée et je trouve que l’expérience des pôles inclusifs d’accompagnement localisé (PIAL) est plutôt intéressante, dans la mesure où elle offre de la souplesse et favorise une adaptation aux besoins effectifs de l’enfant. Mais l’idée d’introduire une quotité horaire minimale d’aide mutualisée, c’est‑à‑dire un plancher, n’est pas seulement une demande des accompagnants : c’est aussi une demande des parents. C’est un moyen de créer de la confiance. Or la confiance est une condition nécessaire au succès de cette aide mutualisée. Il faut en effet que les parents puissent envisager cette aide, non pas comme une source d’économies, mais comme une manière de placer l’élève en situation de handicap au cœur de la démarche. C’est un plancher, et il ne faudrait pas que l’aide mutualisée entraîne un fractionnement de l’aide individualisée. Je pense que c’était le sens de votre question et je vous rejoins parfaitement.

Monsieur Bournazel, les écoles privées hors contrat posent un problème précis, celui du financement. Dans les établissements hors contrat, tout accompagnement sous forme d’aide humaine impliquerait une aide financière de la part de l’État, ce qui pose une question de principe. Vous évoquez des situations qui mériteraient d’être examinées, mais on ne peut pas déroger au principe de non-financement par l’État des établissements hors contrat.

Madame Tolmont, je vous remercie de votre soutien. Vous avez raison de dire que nous voulons envoyer un « signal fort ». Si nous terminons l’examen de ce texte en disant que, dorénavant, ce sera comme avant, ou qu’il faut attendre, nous ne serons pas à la hauteur de l’enjeu. La concertation est utile, à condition qu’elle soit suivie d’un véhicule législatif. Ce véhicule législatif existe : faisons preuve d’intelligence collective pour répondre à cette attente, qui est forte.

Monsieur Testé, vous m’avez interrogé sur la fixation du délai. Je tiens à votre disposition le Vade-mecum de la rentrée scolaire, qui date de mars 2018. Ce document est très intéressant, puisqu’il montre que la CNSA, en lien avec les MDPH, est en train de se mobiliser pour faire de la rentrée scolaire le cœur de son dispositif. Ce document contient un exemple de calendrier que je n’ai pas inventé, et qui explique pourquoi il convient d’intervenir quarante-cinq jours avant la rentrée scolaire. Les cas recensés émanent des MDPH : il s’agit donc de documents officiels. Ce document met également l’accent sur le lien qui doit exister, et qui n’existe pas toujours, entre l’éducation nationale et la MDPH : les relations ne sont pas toujours évidentes entre le prescripteur et celui qui doit mettre les moyens. Les acteurs de terrain estiment que le délai proposé est réaliste, et c’est aussi ce que souhaite la CNSA, puisqu’elle évoque même l’idée d’un calendrier harmonisé. La démarche est donc déjà bien engagée.

Madame Anthoine, vous avez souligné la pénurie d’accompagnants : c’est tout l’objet de ce texte que d’y remédier et vous avez raison d’y insister. Nous ne pourrons pas mettre fin à cette pénurie si nous ne commençons pas par reconnaître pleinement les missions et le statut des accompagnants. D’autres collègues ont souligné à juste titre que la scolarisation des élèves en situation de handicap nécessite non seulement un accompagnement humain, mais aussi un accompagnement matériel – de même que l’accompagnement individuel n’exclut pas un accompagnement mutualisé.

Monsieur Sorre, vous m’avez interrogé sur le recrutement des AESH. C’est évidemment l’État qui doit s’en charger, puisque leur mission relève de l’éducation nationale. Quelques amendements vont proposer un glissement vers la fonction publique territoriale, mais il me semble que si nous voulons reconnaître pleinement le rôle pédagogique des accompagnants – et tel est l’objet de cette proposition de loi –, alors c’est à l’État qu’il revient de financer leur recrutement. Il faudra également clarifier si ces dépenses budgétaires doivent relever, ou non, du titre 2 : un certain nombre de rapports de l’Inspection générale de l’éducation nationale se sont déjà penchés sur la question.

À mon sens, ce recrutement ne doit pas relever des collectivités territoriales, même si elles peuvent bénéficier de mises à disposition, par exemple en matière d’activités périscolaires – nous avions déjà eu cette discussion lors de l’examen de la proposition de loi de M. Aurélien Pradié.

 


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II.   Examen des articles

Article 1er
Amélioration de la préparation de la rentrée scolaire des élèves en situation de handicap

La commission est saisie de l’amendement AC9 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Cet amendement vise à insérer dans cet article la notion d’ « accompagnement matériel », lequel doit être adapté en fonction du type de handicap. Plus le dispositif sera adapté, meilleure sera l’inclusion de l’élève.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je suis pleinement favorable à cet amendement, car il est vrai que la scolarisation repose aussi, bien souvent, sur un accompagnement matériel. Votre amendement est tout à fait pertinent et c’est d’ailleurs l’une des réflexions que mène actuellement le Conseil national consultatif des personnes handicapées. Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AC10 de Mme Béatrice Descamps et AC31 de M. Vincent Rolland.

Mme Béatrice Descamps. Il me semble important de ne pas nous focaliser sur la rentrée scolaire, mais de prendre en compte la date de la notification – laquelle notification peut valoir pour plusieurs années. La difficulté, c’est souvent d’obtenir un AESH en cours d’année, au moment de la première notification. Il faut absolument faire mention de la date de la notification délivrée par la MDPH, pour ne pas perdre une année.

M. Vincent Rolland. Cet amendement vise à s’assurer que la personne chargée de l’aide individuelle ou mutualisée aura rencontré l’enfant avant la rentrée scolaire et aura personnellement pris connaissance de la situation de l’élève. Le cas échéant, elle pourra ainsi bénéficier d’un complément de formation et adapter la forme de l’accompagnement délivré.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. J’émettrai un avis défavorable sur l’amendement de Mme Descamps, même si je comprends son objet. En effet, je veux rappeler que cette proposition de loi porte essentiellement sur la rentrée scolaire. Cela n’empêche pas qu’il puisse y avoir une détection ou une première demande en cours d’année, mais il se trouve que le délai d’instruction des demandes par la MDPH, qui est théoriquement de quatre mois, mais de six mois dans les faits, nous fait toujours retomber sur la rentrée scolaire. Par ailleurs, vous savez bien que lorsque l’enfant ne bénéficie pas d’un accompagnement humain le jour de la rentrée scolaire, sa rentrée se fait beaucoup plus tard.

Je défends l’idée, car c’est elle qui consolide l’architecture de ce texte, que les élèves en situation de handicap doivent pouvoir faire leur rentrée scolaire dans de bonnes conditions, c’est-à-dire avec un accompagnement humain, lorsqu’il est prescrit par la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH).

S’agissant de votre amendement, monsieur Rolland, j’avoue ne pas bien comprendre sa pertinence, ou du moins sa plus-value. En effet, rien n’empêche que le rendez-vous prévu par cet article ait lieu bien en amont de la rentrée scolaire : il n’est pas écrit que ce rendez‑vous doit avoir lieu la veille de la rentrée scolaire mais, au plus tard, la veille de celle-ci. On peut parfaitement imaginer qu’il ait lieu bien avant, à partir du moment où l’affectation d’un accompagnement humain doit être notifiée quarante-cinq jour à l’avance. Convenez qu’on imagine mal un rendez-vous en plein mois d’août ! Dans la mesure où les enseignants font leur rentrée un peu avant la rentrée scolaire, on peut imaginer que le rendez-vous ait lieu à ce moment-là. Ce rendez-vous entre l’accompagnant, l’enseignant et les parents d’élève en situation de handicap me paraît tout à fait indispensable.

Mme Cécile Rilhac. Monsieur le rapporteur, vos explications sont limpides et nous sommes, comme vous, défavorables à ces deux amendements. Il nous semble en effet que les délais proposés seraient intenables, compte tenu des difficultés des AESH. Par ailleurs, la notification des AESH relève, comme vous l’avez très bien dit, des compétences de la CDAPH. Ces notifications se font tout au long de l’année, à flux constant. Les notifications transmises jusqu’en juin permettent de garantir une affectation à la rentrée scolaire, mais il n’est pas possible de respecter la préconisation de Mme Descamps.

M. Aurélien Pradié. Monsieur le rapporteur, il me semble important de distinguer deux questions. La première concerne la rentrée scolaire et l’application du droit obtenu en amont de la rentrée scolaire ; la seconde, qui sera traitée dans un autre de vos articles, et qui reprend à l’identique une disposition de notre proposition de loi – ce dont nous nous réjouissons – concerne le délai d’examen des dossiers déposés auprès de la MDPH.

Lorsque votre proposition de loi sera examinée en séance – je crois en effet que les députés de la majorité ont compris la leçon et que nous pourrons examiner ce texte en séance –, nous proposerons un amendement visant à associer non seulement les enseignants, les parents et les accompagnants, mais aussi les collectivités locales à la préparation de la rentrée scolaire. En effet, la rentrée scolaire est aussi l’affaire des collectivités locales, qui ont besoin de préparer matériellement l’organisation des classes et la répartition des bureaux.

Lorsque nous avons débattu de ma proposition de loi il y a quatre mois, les députés de la majorité nous ont expliqué que ce droit existait déjà et qu’il n'était pas nécessaire de le renforcer par la loi. Ils nous ont expliqué que la loi disait déjà qu’une notification devait être appliquée au premier jour de la rentrée scolaire. Il me semble important que la loi clarifie ce point-là, car ce n’est pas la réalité de la vie de nos concitoyens. Je suis navré, mais je ne me retiendrai pas de le dire pendant tout l’examen de cette proposition de loi : je suis heureux que vous ayez enfin compris ce que nous avons tenté de vous expliquer il y a quatre mois.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement AC30 de M. Vincent Rolland.

M. Vincent Rolland. Cet amendement vise à s’assurer que les parents ou le représentant légal de l’enfant ou de l’adolescent en situation de handicap bénéficieront d’entretiens réguliers au cours de l’année scolaire avec les enseignants et la personne chargée de l’aide individuelle ou mutualisée.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je m’interroge sur la portée juridique de l’expression « de manière régulière ». Je vous invite à retirer cet amendement, au profit de l’amendement AC16 de notre collègue Aurélien Pradié, sur lequel j’émettrai un avis favorable, et qui propose que les équipes de suivi de la scolarisation se réunissent trois fois dans l’année. Cet amendement me semble satisfaire votre souhait de voir se tenir des entretiens réguliers, mais il précise la chose et lui donne une vraie portée juridique.

M. Vincent Rolland. Compte tenu des propos du rapporteur, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La commission rejette l’article 1er.

Article 2
Recrutement des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) en contrat à durée indéterminée (CDI) et organisation de leur formation continue

La commission est saisie de l’amendent AC11 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Cet amendement proposait une formation en deux temps mais, compte tenu du propos liminaire de M. le rapporteur, je le retire, car mes propositions rejoignent les perspectives d’évolution qu’il a présentées.

L’amendement AC11 est retiré.

La commission est ensuite saisie de l’amendent AC13 de M. Aurélien Pradié.

M. Aurélien Pradié. Cet amendement vise à réintroduire une disposition qui était contenue dans notre proposition de loi, et qui nous paraît intéressante à deux égards.

Il s’agit d’abord de créer, au moins dans chaque département, un poste d’accompagnant dit « ressources », ou un référent, qui aurait une double vocation : faire profiter les accompagnants déjà présents sur le terrain de leur expertise, parce que certaines formes de handicap nécessitent une formation spécifique, parfois en urgence ; fournir un accompagnement physique sur le terrain, lorsqu’un accompagnant en situation difficile a lui‑même besoin d’être accompagné.

Notre amendement vise également à satisfaire un autre souhait des accompagnantes : elles veulent des perspectives de progression. Ce qu’elles nous disent – il est inutile d’organiser des consultations pendant des mois pour les entendre –, c’est qu’elles n’ont pas de perspective d’évolution. Et elles n’évoquent pas seulement leur salaire ou leur statut, mais aussi leurs compétences. Elles nous disent clairement qu’elles acquièrent, au fil des ans, un certain nombre de compétences, qu’elles voudraient mettre à la disposition de leurs collègues. J’ajoute que ce n’est pas une utopie, puisqu’il existe déjà à Paris deux accompagnants référents, qui assurent cette mission. Nous les avions auditionnés lors de l’examen de ma proposition de loi et ils nous avaient indiqué que ce dispositif fonctionnait très bien. C’est pourquoi nous proposons de compléter cet article en y ajoutant cette disposition.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je suis, comme vous, convaincu de l’intérêt de disposer d’AESH « ressources », et vous avez rappelé à juste titre l’expérience des AESH tuteurs dans l’académie de Paris. Nous avons tout intérêt à profiter de ce retour d’expérience, de cette expertise acquise. Cet accompagnement des accompagnants est très utile et je suis très favorable à votre amendement.

La commission adopte l’amendement.

Elle rejette ensuite l’article 2.

Après l’article 2

La commission examine les amendements identiques AC2 de Mme Valérie BazinMalgras, AC5 de Mme Emmanuelle Anthoine et AC15 de M. Aurélien Pradié.

Mme Valérie Bazin-Malgras. Cet amendement reprend une disposition de la proposition de loi relative à l’inclusion des élèves en situation de handicap de mon collègue Aurélien Pradié. C’est une mesure de bon sens, qui prévoit que les aidants aient la possibilité de passer le brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur (BAFA) pendant leur formation, afin de faciliter l’exercice dans les centres de loisirs, centres aérés, classes vertes, clubs sportifs. Si l’inclusion passe par l’école, elle se construit aussi dans l’ensemble de la vie sociale de l’enfant. Les clubs sportifs tiennent une place qui peut être centrale.

Mme Emmanuelle Anthoine. S’il importe de recruter des aidants, il importe aussi que la qualité de leur formation permette de favoriser l’inclusion de l’enfant. L’inclusion passe effectivement par l’école, mais elle passe aussi par la vie sociale, à laquelle l’enfant a droit. C’est la raison pour laquelle nous voulons offrir la possibilité aux aidants de passer le BAFA au cours de leur formation.

M. Aurélien Pradié. Lorsque nous avons débattu de cette question il y a quatre mois, certains de nos collègues ont exprimé la crainte que cette formation soit rendue obligatoire. Entendons-nous bien : cet amendement, comme la proposition de loi que j’avais déposée, propose seulement de donner la possibilité aux accompagnants de passer le BAFA.

Le BAFA sanctionne l’acquisition de compétences supplémentaires : c’est une formation qualifiante et son obtention n’est donc pas anecdotique. Par ailleurs, les accompagnants ont vocation à intervenir aussi bien durant le temps scolaire que durant le temps périscolaire et, plus marginalement, extrascolaire. Les interventions durant la pause du déjeuner, le temps de garderie de la pause méridienne et le temps d’activité périscolaire (TAP) ne nécessitent pas les mêmes compétences que l’accompagnement en milieu scolaire : le BAFA peut être un outil utile dans de telles situations.

J’insiste par ailleurs sur le fait qu’il ne s’agirait pas d’une obligation, mais d’une possibilité. À cet égard, je veux rappeler que le ministre de l’éducation nationale a indiqué, il y a quelques semaines, qu’il était très favorable à ce que les accompagnants interviennent à la fois sur le temps scolaire et périscolaire et qu’il réfléchissait à la question du portage salarial. Il a indiqué que cela impliquait qu’ils soient également formés au temps périscolaire. Je le dis pour ceux qui, il y a quelques mois, nous expliquaient que c’était une bêtise que d’imaginer que les accompagnants puissent intervenir sur le temps périscolaire.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Même si je comprends le sens de ces amendements, j’y suis assez défavorable, car je pense qu’ils risquent d’introduire une confusion entre le métier d’accompagnant, dont nous voulons garantir la reconnaissance pleine et entière, et le métier d’animateur. Je préfère que nous favorisions, dans les recrutements, les personnes dotées d’une formation diplômante, avec la possibilité de la compléter par une formation continue, plutôt que d’instaurer une confusion avec les métiers de l’animation. Ce qui serait souhaitable, en revanche, pour arriver à une vraie société inclusive, c’est que celles et ceux qui interviennent dans le monde de l’animation aient une formation relative à l’accueil des enfants en situation de handicap : c’est donc la démarche inverse que je propose.

Cette confusion existe déjà dans nombre d’établissements, où l’on ne sait pas comment occuper les accompagnants, ni quelle place leur donner. Pour notre part, nous considérons que c’est un métier à part entière, avec des missions bien établies et des formations bien précises. S’il doit y avoir des passerelles dans le futur, je suis beaucoup plus favorable à des passerelles vers le monde médico-social. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable sur ces amendements, même si vous avez raison de rappeler que le code de l’éducation autorise les accompagnants à intervenir dans le cadre des activités périscolaires.

Mme Laurence Dumont. Je ne veux pas répéter moins bien ce que le rapporteur vient de dire excellemment et je suis, moi aussi, défavorable à ces amendements.

Je voudrais profiter de cette intervention pour faire un point d’étape. Au début de l’examen de ce texte, l’attitude de la majorité pouvait nous rendre assez optimistes, mais mon optimisme est en train de faiblir. D’entrée de jeu, la majorité nous a dit qu’elle acceptait de débattre de notre texte : c’est la moindre des choses, et heureusement qu’il n’y a pas de motion de procédure en commission ! Mais l’article 1er et l’article 2 viennent d’être rejetés, alors qu’ils constituent, de mon point de vue, le cœur de cette proposition de loi. Il faudrait que la majorité clarifie sa position, car s’il s’agit d’arriver dans l’hémicycle avec une proposition de loi vidée de son sens, puis d’essuyer une motion de procédure, autant le savoir tout de suite : nous pourrons retourner à nos occupations ! Nous sommes en pleine mascarade – à l’image de la consultation qui est à l’œuvre au niveau national ! Je dénonce vivement ce comportement scandaleux.

Vous venez de refuser tout statut, toute « cédéisation » pour les AESH, alors que vous avez tenu des propos très amènes et très positifs en début de commission. Il est urgent, soit que la majorité se reprenne, soit que nous suspendions nos travaux et que nous passions à autre chose. Dites-nous une bonne fois pour toutes si vous voulez améliorer la situation des enfants en situation de handicap : nous demandons seulement qu’ils connaissent, un mois et demi à l’avance, l’identité de la personne qui va s’occuper d’eux. Dites-nous, deuxièmement, si vous voulez améliorer le sort des 80 000 à 100 000 accompagnants de ce pays, qui travaillent vingt heures par semaine pour 700 euros par mois.

Mme Cécile Rilhac. Comme Mme Dumont vient de le dire, les arguments du rapporteur sur l’amendement de M. Pradié sont imparables et nous sommes exactement dans la même logique que lui. Nous estimons que l’accompagnant en milieu scolaire a une compétence professionnelle d’un niveau supérieur à celle de l’animateur. Et je suis d’accord avec vous, monsieur le rapporteur, lorsque vous dites qu’il serait souhaitable que les candidats au BAFA soient sensibilisés à la question du handicap. De même, nous sommes tout à fait d’accord avec votre idée de créer des passerelles en direction du secteur médico-social.

Pour répondre à Mme Dumont, j’aimerais dire un mot de notre position sur l’article 2. Celui-ci comporte trois alinéas. Comme je l’ai dit dans la discussion générale, l’alinéa 1 nous dérange énormément, parce qu’il supprime la disposition qui permet aux assistants d’éducation de faire valoir leur temps de travail passé auprès d’enfants en situation de handicap pour être « cédéisés ». Je trouvais en revanche intéressant l’alinéa 3, relatif à la valorisation des diplômes et à la validation des acquis d’expérience des AESH. Il serait donc intéressant de réécrire cet article en vue de l’examen du texte en séance. J’espère, madame Dumont, avoir éclairci notre position. Je répète que nous avons voté contre l’article 2, parce que la « cédéisation » immédiate que vous préconisez à l’alinéa 2 ne correspond pas au droit commun. Nous pouvons avancer ensemble sur ce point.

M. Aurélien Pradié. Vos positions manquent de cohérence. Il y a quatre mois, nous avons collectivement vécu un épisode douloureux. Nous sommes là sur un deuxième « module de formation », si vous me permettez l’expression. Vous avez l’occasion de ne pas rater le coche une seconde fois ! Soyons clairs, vous ne vous en sortirez pas en faisant semblant d’écouter ce que nous avons à vous dire ! Vous ne vous en sortirez pas en faisant « moins pire » que la première fois !

Il va falloir examiner ce texte et adopter des dispositions concrètes. Si vous neutralisez tous les articles sans formuler la moindre proposition d’amendement, vous réitérerez l’erreur commise il y a quatre mois…

Concernant le BAFA, Monsieur le rapporteur, travaillons ensemble. Le temps périscolaire prendra de plus en plus de place dans l’accompagnement des enfants en situation de handicap. Ils doivent donc bénéficier d’un meilleur environnement. Cela passe-t-il par l’obtention du BAFA pour ces accompagnants ou par des formations spécifiques dispensées aux acteurs du temps périscolaire ? Je ne le sais pas. Nous pouvons y réfléchir d’ici à la séance.

C’est un sujet d’autant plus important que le ministre Blanquer – prophète en la matière ! – ne cesse de dire depuis quelques jours que ces accompagnants devront intervenir sur le temps périscolaire. C’est strictement l’inverse de vos propos en commission…

La commission rejette ces amendements.

Puis elle examine l’amendement AC21 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Nous souhaitons intégrer les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) à la fonction publique. Tout l’enjeu de la pérennisation de l’emploi d’accompagnant est de lutter contre les contrats courts – c’est l’objet de cette proposition de loi. Nous voulons aller plus loin : afin de faire reculer les emplois à temps partiel, la précarité, les salaires très faibles de ces personnes qui accompagnent les élèves en situation de handicap, il faut les intégrer dans la fonction publique territoriale et leur donner un statut.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je comprends parfaitement votre demande de rapport. Mais je ne suis pas sûr que le statut seul réglera le principal problème que nous rencontrons, celui du vivier.

Les difficultés de recrutement sont réelles ; pour autant, elles sont souvent liées aux conditions mêmes de travail et de rémunération. En outre, qui dit statut de fonctionnaire, dit concours. Je vous renvoie au récent rapport de la Cour des comptes qui souligne les difficultés de recrutement par voie de concours du ministère de l’éducation nationale… Nous devons le garder en mémoire. Il ne faudrait pas assécher davantage encore ce vivier et dissuader ou décourager celles et ceux qui souhaitent embrasser cette carrière. Les collectifs d’AESH que j’ai auditionnés attendent bien davantage un véritable CDI. Ils souhaiteraient par exemple pouvoir conserver leur emploi, même lorsqu’ils déménagent d’une académie à une autre pour rejoindre un conjoint.

Vous estimez que les AESH doivent être intégrés à la fonction publique territoriale. Pour ma part, je pense qu’ils doivent plutôt rejoindre la fonction publique d’État. La mission de ces personnels est avant tout éducative ; elle n’est pas similaire à celle des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM).

Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer votre amendement au bénéfice de celui d’Elsa Faucillon, qui poursuit le même objectif que le vôtre, mais en visant la fonction publique d’État. J’y serai favorable.

L’amendement est retiré.

Article 3
Association des accompagnants aux équipes de suivi de la scolarisation (ESS) et au projet personnalisé de scolarisation (PPS)

La commission examine l’amendement AC28 de M. Philippe Berta.

M. Philippe Berta. Cet amendement vise à étendre les missions des équipes de suivi de la scolarisation pour qu’elles jouent un rôle d’interface avec les parents.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je comprends l’objectif de votre amendement : vous souhaitez que l’école fasse un effort d’explication des décisions éducatives vis-à-vis des familles. Mais j’ai du mal à saisir la notion « d’accompagnement des familles ». En outre, je rappelle que ces dernières participent déjà à l’équipe de suivi et de scolarisation (ESS) de leur enfant. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement pour éviter toute confusion avec le dispositif existant.

Mme Cécile Rilhac. À la lecture de cet amendement, j’avais fait la même remarque à M. Berta. Il s’avère que son amendement vise bien l’article L. 112-2-1 et répond à une demande des collectifs d’AESH et des parents. Ces derniers souhaitent être associés à toutes les étapes de la discussion. Il s’agit d’un complément utile à votre article. Le groupe La République en Marche y est favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AC16 de M. Aurélien Pradié.

M. Aurélien Pradié. Nous souhaitons préciser que l’ESS se réunit au moins trois fois durant l’année scolaire – soit une fois par trimestre – pour deux raisons. En premier lieu, il ne s’agit pas seulement de préparer la rentrée scolaire, mais aussi de suivre toute l’année la scolarité de ces enfants différents. En second lieu, cela permettrait de s’adapter à leurs besoins, qui évoluent souvent très vite
– positivement ou négativement. Il serait parfois utile de desserrer l’étau d’accompagnement autour de ces enfants – ce que l’on fait trop peu. À l’inverse, ils peuvent avoir besoin d’un accompagnement plus poussé en cours d’année.

Plus généralement, je suis heureux d’être parmi vous ce matin : mes collègues de La République en Marche me laissent espérer en la nature humaine ! (Exclamations des députés La République en Marche.)

M. le président Bruno Studer. Monsieur Pradié, je vous prie de bien vouloir uniquement défendre votre amendement.

M. Aurélien Pradié. Monsieur le président, vous êtes chargé de la police des débats, non de celle de la pensée…

M. le président Bruno Studer. Ce n’est pas mon style…

M. Aurélien Pradié. Je vais donc dire très librement ce que j’ai à dire. Il s’agit d’un compliment : je vous remercie de nous faire espérer en la nature humaine car nous avons eu cette même discussion il y a quatre mois et votre porte-parole avait dit à cette occasion tout le mal qu’elle pensait d’une disposition similaire à celle que nous venons d’adopter. Le progrès est notable !

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Mon avis sera favorable à cet amendement, comme je l’ai indiqué en réponse à M. Rolland.

Mme Cécile Rilhac. Cet amendement rigidifie trop le cadre des équipes de suivi. Vous le savez, à cause du manque de référents départementaux en charge des différents handicaps, il est extrêmement difficile de tenir une réunion dans tous les établissements scolaires. Dans certains départements, chaque référent suit jusqu’à trois cents élèves. Monsieur Pradié, votre proposition est très intéressante – vous avez raison, le suivi des élèves devrait être plus régulier. Mais les départements n’en ont pas les moyens.

En outre, en l’état actuel du droit, les ESS doivent se réunir « au moins » une fois par an, ce qui signifie que cela peut être deux fois, ou autant que nécessaire. C’est la raison pour laquelle nous serons défavorables à votre amendement qui nous semble contre-productif : les réunions de suivi risqueraient d’être écourtées et les référents de ne pas avoir le temps d’étudier les dossiers.

Mme Aurore Bergé. Juste quelques mots pour répondre à notre collègue. Il ne lui aura pas échappé que nous n’examinons pas une deuxième fois la proposition de loi « Pradié », mais une nouvelle proposition de loi, qui peut donc conduire à des positions différentes de notre groupe. (Applaudissements des députés de La République en Marche). Je suis ravie que vous croyiez à nouveau en la nature humaine grâce à nous, mais je souhaiterais un peu moins de condescendance dans nos débats !

Mme Brigitte Kuster. Il y a deux poids deux mesures quand il s’agit des applaudissements, monsieur le président !

M. le président Bruno Studer. Pas du tout, madame Kuster ! Revenons à la discussion.

M. Aurélien Pradié. Mais sur ce sujet très précis, il s’agit du débat que nous avons eu il y a quelques mois, madame Bergé ! Votre mémoire va sans doute au-delà de ces quatre mois… Le sujet de l’adaptation des moyens aux situations avait précisément été évoqué à l’époque. Madame Rilhac, vous objectez que les départements n’ont pas les moyens de cette politique, mais les référents handicap sont des fonctionnaires de l’État, payés sur le budget de la nation. Si la France, ce grand pays, ne peut s’organiser pour qu’une fois par trimestre, une équipe éducative complète se réunisse afin d’accompagner ces enfants différents en milieu scolaire ordinaire, c’est à désespérer de l’action publique !

En tant que législateurs, nous devons trouver une solution à ce problème récurrent pour les élèves et les familles ; l’intendance suivra ! Tous les intervenants le soulignent : un suivi régulier est impératif. Si la loi ne dispose pas fermement qu’un suivi trimestriel est obligatoire, par facilité ou contingence, ce ne sera pas fait ! Or c’est mauvais pour ces élèves. Nous devons donc le corriger.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

La commission examine en discussion commune les amendements AC17 de M. Aurélien Pradié et les amendements identiques AC3 de Mme Valérie Bazin-Malgras et AC4 de Mme Emmanuelle Anthoine.

M. Aurélien Pradié. L’amendement AC17 reprend une disposition dont nous avions débattu il y a quatre mois : le parcours inclusif personnalisé. Quel est son objectif ? Il vise à pallier l’absence – invraisemblable – des accompagnants lors des réunions de suivi. En outre, comme vous, monsieur le rapporteur, nous souhaitions que les collectivités soient placées au cœur du dispositif, ce qui n’est pas le cas actuellement. Un article ultérieur de votre proposition de loi sur l’accessibilité des locaux est à cet égard particulièrement intéressant.

Dans le primaire, le rôle de la municipalité – ou de la collectivité gestionnaire – est majeur dans les Unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) par exemple : il faut aménager les locaux, créer une classe ou des lieux de vie, réaménager certains bureaux lorsqu’il s’agit de handicaps physiques. Pour réussir pleinement l’inclusion, tous les acteurs doivent s’asseoir autour de la table.

Mme Valérie Bazin-Malgras. L’amendement AC3 prévoit la création de parcours éducatifs spécialisés, dispositifs ambitieux qui s’inspirent du modèle des parcours éducatifs spécialisés, mais individualisés. Il prévoit également la façon dont les aidants accompagnent les enfants d’une structure à l’autre. Les pays qui ont mis en place cette approche transversale ont réussi.

Mme Emmanuelle Anthoine. L’amendement AC4 est identique. Créer un parcours éducatif spécialisé aurait du sens car il s’agit d’une approche transversale de prise en charge de l’enfant, en situation scolaire, extrascolaire, mais également périscolaire, au service de l’inclusion.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je suis sensible à vos arguments : les collectivités territoriales jouent un rôle essentiel et doivent être autour de la table. Pour autant, « trop de parcours tue le parcours » La création d’un nouveau parcours ne faciliterait pas l’appropriation et la bonne utilisation des nombreux outils existants : programme personnalisé de réussite éducative (PPRE), projet d’accueil individualisé (PAI), plan d’accompagnement personnalisé (PAP) et projet personnalisé de scolarisation (PPS). Ce dernier devrait être le document de référence. Malheureusement, il n’est pas utilisé dans certains départements. Dans d’autres, il est mal rempli. Il serait préférable de faire en sorte que ce PPS devienne l’outil central d’une scolarisation réussie pour tous les élèves en situation de handicap. Peut‑être serait-il préférable d’ajouter les collectivités à la liste des acteurs du PPS ? En l’état de la rédaction de votre amendement, mon avis sera donc défavorable.

Mme Cécile Rilhac. Je suis tout à fait d’accord : la création d’un parcours inclusif spécialisé ferait double emploi avec le projet personnalisé de scolarisation. Monsieur Pradié, nous avons déjà eu ce débat, en effet. Nous n’allons donc pas discuter de votre proposition de loi une seconde fois puisque c’est celle de M. Bouillon que nous examinons. Le PPS favorise déjà le travail pluridisciplinaire. Votre remarque sur les relations avec les collectivités territoriales et les intervenants des activités périscolaires et extrascolaires est intéressante, mais les dispositions relatives aux PPS sont de niveau réglementaire. Le législateur ne peut légiférer sur tout, même si cela ne vous plaît pas !

M. Aurélien Pradié. Si vous lisez bien l’amendement – j’imagine que vous l’avez fait –, je ne souhaite pas ajouter un nouveau dispositif, mais remplacer les méandres actuels ! C’est une mesure de simplification, effectivement identique à celle proposée il y a quatre mois. Nous allons réfléchir pour la séance publique à la meilleure façon d’associer les collectivités, pas seulement sur le périscolaire, mais également sur la question des locaux.

Enfin, nous ne débattons ni d’une proposition de loi « Pradié », ni d’une proposition de loi « Bouillon » : nous cherchons seulement à progresser sur ce point essentiel. Il est normal que je me rappelle régulièrement à votre bon souvenir ; nous n’avons pas perdu la mémoire en quatre mois et vous devez assumer toutes vos responsabilités.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 4
Formation des enseignants et personnels de l’éducation nationale à l’accueil et l’éducation des élèves en situation de handicap

Mme Cécile Rilhac. Même s’il n’y a pas d’amendements sur l’article 4, je souhaite expliquer pourquoi les députés de La République en Marche voteront contre cet article. Je partage votre avis, monsieur Bouillon, il est important de se pencher sur la formation des enseignants et, plus globalement, celle des personnels. Mais les dispositions visées à l’article 4 englobent tous les personnels de l’éducation – personnels enseignants, mais également techniques. Elles traitent à la fois de la formation initiale et continue. Enfin, vous êtes particulièrement exigeant puisque vous indiquez un volume horaire, en complément du cahier des charges. Ce carcan est trop rigide au regard des différents métiers concernés. Nous sommes donc défavorables à la rédaction actuelle de cet article et souhaitons travailler ensemble à sa réécriture afin de le centrer sur la formation initiale des acteurs de l’enseignement.

M. Aurélien Pradié. Ce débat a déjà eu lieu… Si mes souvenirs sont bons, il y a quatre mois, le groupe La France insoumise avait déposé un amendement sur ma proposition de loi pour intégrer un module relatif à la question du handicap à la formation des enseignants. Cet amendement ne précisait ni le volume horaire, ni le cahier des charges et, pourtant, vous aviez voté contre… Le « carcan » – terme épouvantable – dont vous parlez n’existait pourtant pas. Où est la cohérence ? La France insoumise aurait-elle eu raison avant les autres ?

En outre, plutôt que de voter contre un article, je vous rappelle que notre travail de parlementaire consiste précisément à l’amender et à l’améliorer ! Certains le font sans doute plus que d’autres…

Pour conclure, je n’entends pas que l’on puisse parler de carcan quand il s’agit de former à la question du handicap celles et ceux qui interviennent, de près ou de loin, auprès nos enfants. Cela devrait concerner les enseignants comme les autres intervenants : personnels qui servent les repas à la cantine scolaire, personnels en contact avec le handicap, etc. Notre société dans son ensemble doit percevoir et comprendre qu’il ne s’agit pas de mettre en place de nouvelles normes, mais plutôt d’un espoir collectif !

Mme Michèle Victory. Je partage les propos de M. Pradié. La formation doit concerner toute la communauté éducative. La formation initiale est essentielle, mais elle doit être régulièrement enrichie par la formation continue car l’environnement de travail évolue. Je ne vois donc pas en quoi cette proposition pose problème ou constitue un carcan ! Proposez des amendements mais ne votez pas contre cet article primordial.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Cet article n’est pas un carcan, madame Rilhac. C’est une demande des enseignants et de tous les personnels de l’Éducation nationale et un besoin souligné par tous les rapports récents des inspections : il s’agit de faire en sorte que l’enseignant, confronté à l’accueil d’un élève en situation de handicap, ait pu bénéficier en amont d’une véritable formation – et non d’une information.

Actuellement, les situations sont disparates dans les Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPÉ). Le législateur doit faire en sorte que des modules complets, répondant à l’exigence de réussite de l’école inclusive, soient proposés partout. La gestion du handicap ne relève pas que de l’enseignant spécialisé ou de certains enseignants. Au contraire, l’ensemble des enseignants doit être correctement et pleinement formé. C’est le sens de l’article 4.

La commission adopte l’article 4 sans modification.

Article 5
Effectif maximal d’élèves dans les classes où sont scolarisés des élèves en situation de handicap bénéficiaires d’un projet personnalisé de scolarisation (PPS)

La commission examine l’amendement AC12 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Même si vous avez tenté de me convaincre dans vos propos liminaires, je ne retirerai pas cet amendement. Vous le savez, ma position n’est pas une position d’opposition à l’inclusion scolaire. Mais je souhaite la suppression de la disposition limitant le nombre d’élèves à vingt par classe dès lors que cette classe compte un élève en situation de handicap car, en tant qu’enseignante puis directrice d’école pendant de longues années, je sais par expérience que cela ne pourra être appliqué… Il est donc inutile de l’inscrire dans la loi.

Lorsque vous avez évoqué l’organisation spatiale, vous parliez de classes de vingt‑six ou vingt‑sept élèves, et non de vingt ! Bien sûr, les enseignants savent le faire, c’est même leur rôle, mais le nombre d’élèves ne correspond pas aux dispositions de l’article 5. Peut-être faudrait-il revoir la rédaction, mais cela me semble compliqué, voire infaisable…

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Madame Descamps, je reconnais votre implication et vos convictions concernant l’école inclusive. Effectivement, l’accueil d’un élève en situation de handicap dans une classe doit être pris en considération lors de la composition des classes – l’effectif doit être moins important – et faire l’objet d’un accompagnement humain. Même si comparaison n’est pas raison, c’est le cas ailleurs en Europe, en Italie par exemple.

Vous êtes nombreux à avoir porté les dispositions concernant le dédoublement des classes en REP+. Le seuil de douze élèves n’empêche aucunement des inscriptions en cours d’année, faisant passer les classes à treize, voire quatorze enfants. Pourquoi cette forme de souplesse n’existerait-elle pas quand il s’agit de l’accueil d’un élève en situation de handicap ?

Mme Béatrice Descamps. Les dédoublements de classe concernent les CP et CE1. Or certains élèves porteurs de handicap sont en CE2 ou en cycle 3. N’adoptons pas une disposition inapplicable…

La commission adopte l’amendement.

Elle passe à l’amendement AC32 de M. Aurélien Pradié.

M. Aurélien Pradié. Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2019, j’avais attiré l’attention du ministre sur une équation impossible : le Gouvernement annonce l’ouverture de cinquante ULIS pour 2019, mais aucun poste supplémentaire d’accompagnants n’est prévu sur la même période au sein de ces unités, puisque l’on reste à 1 942 équivalents temps plein (ETP). Le ministre n’a pas contesté ces chiffres.

Est-ce à dire que les cinquante ULIS n’ouvriront pas et donc que l’engagement ne sera pas tenu ? Comme vous tenez tous vos engagements, il y aura bien cinquante ULIS supplémentaires mais avec le même nombre d’accompagnants, ce qui signifie que les effectifs des ULIS vont exploser !

Mon amendement vise à s’assurer que les effectifs des ULIS et des différents dispositifs que le législateur pourrait imaginer ne dépasseront jamais douze élèves. Madame Descamps, je suis d’accord avec vous, il est difficile de limiter les effectifs en classe ordinaire mais, dans ces unités, c’est hautement souhaitable, d’autant que je suis prêt à parier que dans quelques mois, le taux d’encadrement va largement se dégrader, au regard de cette impossible équitation…

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je comprends votre intention, mais votre amendement constitue un recul par rapport à l’état actuel du droit, qui fixe l’effectif maximal à dix élèves dans les Ulis du second degré. Il serait préférable de retirer l’amendement et de le réécrire pour la séance publique.

Je partage votre constat et l’ai rappelé dans mon propos liminaire : alors que les effectifs de ces unités devraient augmenter de 7 % entre 2018 et 2022, le plan de création d’ULIS prévu par le Gouvernement, qui prévoit d’atteindre 240 unités en 2022, ne répond pas à cette évolution.

M. Aurélien Pradié. Je maintiens mon amendement mais propose que nous en discutions d’ici à la séance. En l’état actuel du droit, ce n’est pas la loi qui fixe ces effectifs, que l’on soit à dix ou douze élèves.

Dans l’équation que j’évoquais, on ne serait de toute façon ni à dix, ni à douze élèves, mais plutôt à trente ! Nous devons sécuriser ces unités qui courent un grand danger – le ministre de l’Éducation nationale a d’ailleurs annoncé à demi-mot qu’il faudrait gérer la pénurie de personnels…

La commission rejette l’amendement.

Elle rejette ensuite l’article 5.

Article 6
Encadrement des quotités horaires de l’aide mutualisée et des délais d’examen des demandes d’aide humaine présentées aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH)

La commission examine l’amendement AC7 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Dans cet article, les mots « premier jour de scolarisation » me gênent : je crains que l’on refuse d’inscrire un élève dans une école s’il ne bénéficie pas d’accompagnement le premier jour de sa scolarisation.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Cela me gêne que cela vous gêne ! Mais il n’est indiqué nulle part que l’attribution d’une aide humaine est une condition de scolarisation de l’enfant. Si l’on développait une telle interprétation alors que l’article dispose que « la scolarisation de l’enfant ou de l’adolescent requiert » une aide humaine, il faudrait adresser le même reproche à la rédaction actuelle de l’article L. 351-3 du code de l’éducation qui prévoit que « lorsque la [CDAPH] constate que la scolarisation d’un enfant dans une classe de l’enseignement public ou [privé] requiert une aide individuelle », cette aide peut être apportée par une AESH. Or la scolarisation n’est absolument pas subordonnée à l’attribution d’une aide individuelle.

Mme Béatrice Descamps. Bien sûr, ce n’est pas votre intention, mais je préfère être prudente et éviter tout risque d’interprétation dans certains établissements scolaires.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AC18 de M. Aurélien Pradié.

M. Aurélien Pradié. Nous sommes favorables à l’article 6 pour deux raisons. En premier lieu, vous apportez des compléments qui nous satisfont. En second lieu, vous traitez du délai d’examen des dossiers par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) selon des modalités identiques à celle de notre proposition de loi. Je salue votre honnêteté intellectuelle et vous remercie d’avoir repris ces dispositions.

Le problème est réel : actuellement, parce que la réponse de la MDPH ou le recrutement d’un accompagnant tarde, des enfants ne sont pas scolarisés ! En pratique, alors même que la loi n’en dispose pas, l’école – parfois avec l’appui de l’inspection d’académie – refuse la scolarisation de ces enfants au motif que cela les mettrait en danger. Le Défenseur des droits dispose d’une littérature abondante en la matière et a rappelé l’État à l’ordre à de nombreuses reprises.

Il est capital de régler la question du délai d’examen des dossiers MDPH. Vous allez nous chanter le même refrain : c’est une question de moyens, on ne peut pas poser un cadre trop contraignant… Mais il va falloir s’organiser car il n’est pas acceptable qu’il faille plus de six mois pour examiner certains dossiers. Ce sont six mois de désespérance pour les familles et les enfants ; six mois durant lesquels ces derniers ne sont pas scolarisés, accumulant un retard considérable quand ils arrivent enfin en milieu scolaire en avril ou mai.

Cet article est cohérent et peut être appliqué : ne passons pas à côté !

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je remercie M. Pradié et ses collègues d’avoir fortement inspiré l’écriture de cet article qui s’articule avec l’article 1er de la proposition de loi : si le jour de la rentrée scolaire, nous souhaitons que les élèves en situation de handicap soient scolarisés, il faut bien évidemment se préoccuper de la question des délais d’examen des dossiers par les MDPH. Nous recevons régulièrement dans nos permanences des exemples de la volonté de repousser au maximum les délais d’examen des dossiers – de quatre mois actuellement – au motif de dossiers incomplets. Même lorsque les dossiers sont complets, la plupart du temps, les délais ne sont pas respectés.

Pour autant, il ne faudrait pas installer l’idée que l’aide individualisée doit être la règle et l’aide mutualisée l’exception. Le critère déterminant doit rester l’évaluation des besoins de l’élève, réalisée par l’équipe éducative et l’équipe pluridisciplinaire d’évaluation. Cette évaluation seule permet de déterminer la nature et le niveau de l’aide pour que l’élève en situation de handicap puisse être scolarisé. Elle peut aboutir soit à une aide individualisée, soit à une aide mutualisée.

L’introduction dans cet article d’un plancher horaire est aussi une façon de créer de la confiance pour les parents, qui peuvent parfois vivre l’aide mutualisée – vous l’avez dit, monsieur Pradié – comme un instrument de gestion de la pénurie de moyens d’accompagnement.

Je pense donc qu’il faut stabiliser tout cela au maximum. En tout état de cause, la rédaction de l’amendement laisse penser qu’il existerait un droit à une aide individualisée et que l’aide mutualisée serait l’exception. Je voudrais que l’on resitue le dispositif tel qu’il doit l’être : il s’agit d’abord de la question de l’évaluation, qui ne correspond pas forcément à une mesure d’accompagnement individualisé. C’est pourquoi je donne un avis défavorable à l’amendement, bien que j’entende l’intention.

Mme Cécile Rilhac. Complètement d’accord avec le rapporteur, nous voterons contre l’amendement.

M. Aurélien Pradié. Vous avez raison, l’aide individualisée n’est pas la règle, mais l’aide mutualisée ne doit pas le devenir. C’est l’objet de cet amendement que de s’assurer qu’une tendance que les acteurs de terrain commencent à dévoiler, que l’on commence à sentir dans les orientations nationales, à savoir l’aide mutualisée pour gérer la pénurie d’effectifs, ne devienne demain la règle.

Il existe plusieurs possibilités pour rassurer : rassurer sur les quotités horaires, vous avez raison de le faire, mais aussi rassurer quant à la possibilité de revenir sur la décision, ce qui est le principal objet de cet amendement. Il faut veiller à ce que, tout au long de la scolarité, les parents aient bien la possibilité de sortir rapidement d’une mesure d’accompagnement mutualisée pour revenir à de l’aide individualisée, qu’ils perçoivent bien dès la notification qu’il ne s’agit pas de quelque chose d’irrémédiable. Collectivement, nous aurons un vrai sujet sur l’aide mutualisée. Gardons-le à l’esprit car je crains que, derrière des intentions fort louables, on cherche en fait à cacher la misère.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle rejette l’article 6.

Après l’article 6

La commission est saisie de l’amendement AC19 de M. Aurélien Pradié.

M. Aurélien Pradié. Nous avons eu ce débat sur les établissements hors contrat lors de l’examen de la dernière proposition de loi. Il ne s’agit pas une seule seconde, dans mon esprit, de remettre en cause une des lois fondamentales de la République, les écoles hors contrat n’ont pas à percevoir de moyens publics, mais nous faisons face à la fuite de beaucoup d’élèves en situation de handicap vers ces établissements hors contrat parce que, à l’évidence, la République n’est pas totalement capable d’assurer sa mission.

Il y a deux manières de voir les choses : ou bien on en reste aux fondements des grandes lois républicaines et on ferme les yeux sur le fait que les effectifs d’élèves en situation de handicap ne cessent d’augmenter dans ces établissements, ou bien, et c’est notre position, une position pragmatique – un mot que vous employez souvent –, on ne laisse pas en dehors des radars de la République ces élèves.

Cet article additionnel vise ainsi à s’assurer que celles et ceux qui accompagneront les enfants en situation de handicap dans les écoles hors contrat disposeront des mêmes formations qu’au sein de l’école de la République. C’est indépendant de la question des financements puisque ces enseignants restent à la charge des établissements. Il s’agit d’une mesure de sécurité pour s’assurer que des élèves ne reçoivent pas, loin de notre regard, un traitement qui ne soit pas le même que les autres.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Cet amendement pose pourtant problème en termes de règles de financement pour les établissements hors contrat. Le risque existe en effet que cette aide puisse être considérée comme un moyen de financement détourné de ces établissements. Soit vous en revoyez l’écriture d’ici à la séance, soit l’avis est défavorable.

Mme Cécile Rilhac. Nous sommes d’accord avec M. Bouillon. Les établissements privés hors contrat recrutent et rémunèrent leurs enseignants et leur personnel administratif. Ils doivent, de par leur statut, également prendre en charge leur personnel accompagnant. Nous sommes en effet pragmatiques et nous défendons l’école de la République, qui est gratuite.

M. Aurélien Pradié. Nous maintenons l’amendement. Selon moi, la rédaction de l’amendement ne fait pas entorse aux règles de financement. Je le revérifierai avec attention d’ici à la séance.

La commission rejette l’amendement.

Article 7
Amélioration de l’accessibilité et des fonctionnalités du bâti des futurs établissements d’enseignement public

La commission est saisie de l’amendement AC36 du rapporteur.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Il s’agit de permettre que l’avis sur les bâtiments scolaires soit rendu aussi pour la reconstruction et la réhabilitation des bâtiments existants des établissements de l’enseignement public.

Mme Anne Brugnera. Cet article 7 nous interroge, s’agissant des collectivités locales et de leur investissement dans les établissements scolaires. Des amendements vont suivre à ce sujet, dont un qui propose que cet avis soit consultatif et que nous voterons. Nous travaillerons à des solutions pour que ces avis soient constructifs, à l’écoute, mais aussi pragmatiques pour les collectivités territoriales, et à ce stade nous nous abstiendrons donc sur le vote de l’article.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AC6 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Rendre l’avis consultatif, comme cela vient d’être évoqué, me paraît important.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AC27 de M. Philippe Berta.

M. Philippe Berta. Il s’agit de rappeler qu’il existe déjà deux instances à même de rendre un avis pertinent sur l’accessibilité du bâti des futurs établissements : le conseil départemental de la citoyenneté et de l’autonomie (CDCA), instance chargée d’assurer la participation des personnes handicapées à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques de l’autonomie dans le département, et le groupe technique départemental de suivi de la scolarisation des enfants, des adolescents ou des jeunes adultes handicapés, chargé du suivi, de la coordination et de l’amélioration de la scolarisation.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je suggère que ce ne soit pas une substitution mais un ajout car il serait dommage de se priver de l’avis des équipes des établissements médico-sociaux. Je suis favorable à ce qu’on puisse consulter ces deux instances « en plus de » et non « à la place de » comme cela ressort de la rédaction.

L’amendement est retiré.

La commission est saisie de l’amendement AC8 de Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Il me paraît important d’ajouter un membre au moins de l’équipe pédagogique. Certains me diront peut-être qu’il n’y a pas d’équipe en cas de nouvelle construction mais on sait très bien que les nouvelles constructions remplacent généralement des écoles existantes et que les équipes sont donc déjà en place. Et sont concernés tous les enfants, car il peut arriver que les équipes ne soient pas consultées pour une école alors que c’est important. J’ai également ajouté le référent à la scolarisation des élèves handicapés.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Avis favorable.

Mme Cécile Rilhac. Les enseignants référents et les équipes pédagogiques n’ont a priori pas de compétences pour ce type d’avis, et les spécialistes tels les ergothérapeutes des MDPH sont plus à même d’intervenir.

Mme Béatrice Descamps. Je suis d’accord à la rigueur pour l’enseignant référent mais certainement pas pour l’équipe pédagogique.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 modifié.

Après l’article 7

La commission est saisie de l’amendement AC24 de Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Certains handicaps, et notamment certaines formes d’autisme et certains troubles « dys », sont difficiles à détecter chez les enfants et font parfois l’objet de diagnostics très tardifs qui ralentissent la prise en charge correcte de ces élèves. C’est pour cette raison que nous souhaitons l’expérimentation d’une visite médicale obligatoire. En effet, il nous semble que la stratégie gouvernementale pour l’autisme au sein des troubles du neuro‑développement (TND) 2018-2022 ne s’axe pas suffisamment sur la nécessité d’opérer des dépistages précoces. Or ils ont des vertus essentielles : ils permettent d’accompagner les parents et les professeurs des écoles, de mettre en place des dispositifs adaptés pour l’enfant et de limiter les effets destructeurs que peuvent provoquer la scolarisation forcée et non adaptée aux pathologies de l’enfant.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Vous avez raison. Vous avez tellement raison que le code de la santé publique prévoit déjà des visites médicales obligatoires. Je vous suggère donc d’y retravailler d’ici à la séance, sinon cela risque d’être redondant avec les visites médicales obligatoires existantes.

Mme Caroline Fiat. Il y a en effet une visite obligatoire. Ayant accompagné mon enfant à cette visite, je sais que le médecin vérifie la vision, le poids, la taille, le langage, demande à l’enfant ce qu’il mange au petit-déjeuner, mais on ne parle pas avec le professeur du comportement de l’enfant en cours, de son temps de concentration… La visite médicale n’aborde pas du tout les sujets traités par l’amendement. C’est pourquoi nous demandons une telle expérimentation. Je maintiens l’amendement.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Des expérimentations existent, portées par des agences régionales de santé (ARS). Nous sommes assez documentés en la matière. À partir de ces expériences et de cette documentation, on pourrait sans doute corriger des choses mais cela ne relève pas, me semble-t-il, de la loi.

La commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AC26 de M. Alexis Corbière.

Mme Caroline Fiat. Nous souhaitons qu’une expérimentation soit mise en place concernant la création ou le maintien d’au moins une classe par département accueillant les enfants sourds ou malentendants, qui sont souvent oubliés dans ces classes de handicap. Nous considérons en effet qu’il n’est pas normal que des enfants n’aient le choix qu’entre une scolarisation à domicile, un éloignement de leur milieu familial ou encore un déménagement forcé pour les familles.

L’école élémentaire Georges Valbon de Bobigny, par exemple, a été fermée à la rentrée 2018. Ouverte à la rentrée 2014, la seule classe bilingue en langue des signes française/français écrit fermera ses portes en juin, sur décision de l’éducation nationale, faute d’effectifs. Même s’il n’y a qu’un seul élève concerné, il mérite d’avoir ses chances.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je suis très sensible à votre argumentation et très favorable à votre amendement.

Mme Cécile Rilhac. Je connais très bien la question les élèves sourds et malentendants puisqu’il y a, dans le département du Val-d’Oise, une école fabuleuse, l’école Danielle Casanova, qui rencontre exactement les problèmes que vous soulevez, madame Fiat.

Je rappelle qu’il existe plusieurs parcours de scolarisation des enfants sourds et malentendants. Une scolarisation en classe ordinaire peut se faire en pôle d’enseignement des jeunes sourds (PEJS), en langue des signes, dans un institut national pour les jeunes sourds ou encore dans une unité d’enseignement. J’ajoute que la scolarisation des jeunes sourds relève du choix des familles et d’une orientation de la CDAPH. Le PEJS est mis en place dans chaque académie afin de garantir une scolarisation de qualité aux élèves sourds. Mais leur faible effectif ne permet pas aujourd’hui de créer une classe pleine dans chaque département. Dans le Val-d’Oise par exemple, nous accueillons des enfants d’autres départements, des Yvelines ou de Seine-Saint-Denis.

Pour notre part, nous ne sommes pas favorables à votre amendement.

Mme Caroline Fiat. Je vais essayer de convaincre mes collègues du groupe La République en Marche. J’ai bien dit, à la fin de mon intervention, que le nombre n’était pas un motif pour ne pas créer de classes à destination des enfants sourds et malentendants. Si un enfant sourd et malentendant veut suivre une scolarisation, on ne peut pas l’en empêcher parce qu’il habite dans un département où il n’y a pas suffisamment d’enfants qui ont ce handicap. « Liberté, égalité, fraternité » : telle est la devise de notre République. On doit répondre au besoin de l’enfant sans attendre qu’il soit hélas accompagné d’autres camarades.

M. Aurélien Pradié. Cet amendement est intéressant, d’abord parce que le sujet est tout à fait prégnant et que les instituts qui accompagnent ces enfants sont situés généralement à Paris ou dans quelques grandes villes mais pas du tout en province ou très peu, trop peu en tout cas.

Cet amendement permet aussi à la loi de lancer les orientations d’expérimentation, car s’agissant des expérimentations récentes en matière scolaire et de handicap, le cap a été fixé non par le législateur, mais par le pouvoir réglementaire et en vérité par les ministres eux‑mêmes. Il y a donc là une démarche que je trouve très intéressante et qui permet aux législateurs que nous sommes de reprendre un rôle que nous avons un peu perdu depuis quelque temps.

L’amendement a un seul défaut : il prévoit des classes. Pour ma part, je parlerais plutôt d’unités puisque le défi n’est pas seulement de créer des classes pour sourds, malentendants, autistes ou génies, etc., mais des espaces dans lesquels ces enfants-là peuvent trouver la voie de la scolarité ordinaire. À l’exception de ce problème de vocabulaire, je trouve cet amendement intéressant, et j’y suis plutôt favorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AC22 de Mme Danièle Obono.

Mme Caroline Fiat. Nous demandons au Gouvernement un rapport sur la rénovation du parc des écoles. Il s’agit de les rendre toutes accessibles aux parents, aux enfants et aux personnels en situation de handicap. Il est essentiel que les écoles existantes qui ne permettent pas à toutes les personnes un accès normal soient aussi comptabilisées, et qu’un plan de rénovation massif des écoles non accessibles puisse être élaboré. Nous considérons en effet que, contrairement à ce que prévoit par exemple la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, dite loi ORE, ce n’est pas aux élèves de s’adapter à un monde essentiellement prévu pour les personnes dites valides, mais bien aux personnes valides de s’assurer que le monde qu’elles ont construit pour elles n’exclut personne. Il faut donc inverser notre façon de penser pour concevoir de façon proactive un monde adapté pour chacun et chacune. La première étape de cette démarche de rénovation des écoles consiste à disposer des données essentielles sur le bâti, puis de prévoir la planification contraignante d’un grand plan de rénovation.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Je considère que cette question relève de la responsabilité pleine et entière des collectivités territoriales, et que votre amendement risque de remettre en cause le principe de leur libre administration. J’émets donc un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement AC23 de M. Alexis Corbière.

Mme Caroline Fiat. La plupart des bâtiments et des activités proposées aux élèves ont été conçus par des personnes ne souffrant pas de handicap et se révèlent donc inadaptés pour les élèves en situation de handicap. Il est par conséquent essentiel de modifier nos pratiques pour s’assurer qu’elles n’excluent personne. C’est pourquoi nous proposons ici que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l’accessibilité des internats, des zones et activités périscolaires, ainsi que sur la mise à disposition d’un accompagnement adapté lorsque cela s’avère nécessaire.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Il existe, depuis 1995, un Observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement qui rend justement chaque année un rapport sur l’état des bâtiments et des équipements d’enseignement et sur leurs conditions de sécurité, d’hygiène et d’accessibilité. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Article 8
Rapport au Parlement sur les réalités du handicap, les besoins et l’inclusion sociale des jeunes en situation de handicap

La commission examine l’amendement AC33 de M. Aurélien Pradié.

M. Aurélien Pradié. Il s’agit de compléter la demande de statistiques pas uniquement sur le bâti car il en existe déjà en la matière, mais bien sûr la population, et de s’assurer que ce rapport est remis au Parlement trois fois par an.

Monsieur le rapporteur, vous vous êtes sûrement aperçu en élaborant votre proposition de loi que le Défenseur des droits avait indiqué, dans une décision – pas un avis – du 28 septembre 2017, que nous sommes l’un des rares pays européens, peut-être même le seul, à ne pas disposer de statistiques fiables sur le nombre d’enfants en situation de handicap, sur les typologies de handicap. Comment imaginer, dans ces conditions, que nous puissions collectivement prendre une décision publique, y compris lorsqu’on vote des budgets de la Nation à destination des élèves en situation de handicap, sans connaître l’état de leur scolarisation ? Il est donc absolument urgent de disposer de ces éléments fondamentaux pour prendre des décisions. Il a été fait allusion aux « invisibles » de l’éducation nationale. Les intervenantes et intervenants sont trop souvent des invisibles de l’éducation nationale, mais des élèves eux-mêmes, des enfants en situation de handicap sont eux aussi des invisibles de l’éducation nationale.

Que personne ne nous dise qu’il est impossible de remettre un tel rapport trois fois par an. Dès lors que l’ensemble de nos grands collectifs, comités, grandes directions auront fait au minimum leur travail, et que les MDPH auront fait remonter les informations, nous serons parfaitement en mesure de l’actualiser trois fois par an à des moments stratégiques, notamment avant chaque vote de budget afin de pouvoir prendre une décision éclairée.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Le rapport qui est demandé à l’article 8 vise à bâtir un véritable tableau de bord d’évaluation des politiques publiques en ce qui concerne la scolarisation des élèves en situation de handicap. Il ne s’agit pas d’un rapport à remettre trois fois par an. En effet, les statistiques et les chiffres plutôt bien documentés dont nous disposons ne font l’objet d’aucune coordination. Nous avons donc besoin d’un outil en la matière. Vous demandez qu’une fois créé, ce tableau de bord soit public et qu’il permette de la transparence.

Mme Cécile Rilhac. Monsieur Bouillon, nous partageons votre avis sur l’amendement et nous y serons donc défavorables. J’en profite pour dire que nous sommes favorables au rapport prévu à l’article 8 d’autant que cela faisait partie des préconisations de notre collègue Adrien Taquet concernant le volet des MDPH.

M. Aurélien Pradié. Je viens de relire avec attention l’article 8. Vous demandez que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur un ensemble de choses, et en particulier sur l’effectivité et les délais de la mise en œuvre des décisions d’attribution d’un accompagnement humain. Il s’agit non seulement de l’outil, mais des éléments statistiques, des moyens attribués et de l’effectivité des décisions.

Je veux bien rédiger à nouveau notre proposition pour faire en sorte que, une fois que notre haute administration aura créé le « machin », l’outil, nous puissions en venir aux faits, c’est-à-dire à la publication du rapport trois fois par an. À cet égard, je souhaite appeler l’attention des uns et des autres sur notre rôle de législateur qui consiste non seulement à créer des outils, mais aussi à produire de la matière pour prendre nos décisions. Si tel n’est pas le cas, mieux vaut assurer une autre mission que celle de parlementaire.

Je maintiens donc cet amendement, tout en prévoyant une rédaction complémentaire. Peut-être serait-il utile aussi que votre rédaction clarifie ce point.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 8 sans modification.

Après l’article 8

La commission examine l’amendement AC25 de Mme Danièle Obono.

Mme Caroline Fiat. Dans son rapport pour 2017, la médiatrice de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur tirait un signal d’alarme, en indiquant qu’ « un bon accueil des élèves nécessite un nombre suffisant de médecins de l’éducation nationale ». Elle recommandait notamment de renforcer l’attractivité des fonctions de médecin scolaire, en leur permettant d’intervenir auprès des étudiants en médecine, pour présenter leur métier et susciter des vocations. Actuellement, le nombre de médecins scolaires est de un pour 12 000 élèves, ce qui est largement insuffisant.

Dans la même optique, elle recommandait une actualisation de la carte des unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS), dans le but d’ouvrir une réflexion sur les disparités territoriales entre départements.

C’est pour accompagner ces observations de la médiatrice de l’éducation nationale que nous déposons cet amendement. Nous souhaiterions que la représentation nationale bénéficie des données relatives à la répartition des médecins scolaires et des ULIS et que le Gouvernement mette en œuvre la politique volontariste demandée par la médiatrice.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Les rapports sur le sujet sont déjà nombreux et le dernier paru date de septembre 2018 : les besoins en ULIS et en médecins scolaires sont donc bien identifiés. L’heure n’est plus aux rapports, mais aux prises décision. Je vous invite donc à retirer cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Article 9
Gage

La commission adopte l’article 9 sans modification.

Après l’article 9

La commission examine l’amendement AC1 de Mme Elsa Faucillon.

Mme Marie-George Buffet. Il a beaucoup été question, depuis le début de ce débat, du statut des accompagnants. Nous avons été nombreux à dire que la qualité de leur statut est une condition du bien-être des enfants et qu’il importe qu’ils soient intégrés à l’équipe pédagogique. Cela étant, M. le rapporteur a rappelé qu’il n’était pas évident de leur donner immédiatement le statut de fonctionnaires de l’éducation nationale, puisque se pose la question du concours. Il faut que nous prenions le temps d’examiner sérieusement, dans un délai d’un an, l’opportunité pour les accompagnants de bénéficier du statut de fonctionnaires de l’éducation nationale : tel est l’objet du rapport que nous demandons, avec cet amendement. Si nous voulons que l’accompagnant fasse partie de l’équipe pédagogique, il faut qu’il relève du ministère de l’éducation nationale, comme les autres personnels des écoles.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer, je suis très favorable à cet amendement, qui nous permettra d’y voir plus clair. Mon idée est de procéder, dans un premier temps, à la « cédéisation » des accompagnants, avant d’envisager de leur donner, plus tard, un statut de fonctionnaire – en connaissance de cause.

M. Aurélien Pradié. Nous abordons là une question extrêmement importante et il me semble utile de rappeler que, selon la Cour des comptes, la multiplicité des statuts d’accompagnant – contrats aidés, AVS, AESH – a un coût important pour l’État, parce qu’il faut beaucoup de personnel administratif pour gérer ces différents contrats. Si nous parvenions à un statut unique – et cela va au-delà de la question du CDI ou de la rémunération –, nous ferions déjà d’importantes économies en matière de gestion.

Je voulais évoquer cette question, même si elle est distincte de celle de la pérennisation des emplois à travers la généralisation du CDI, car la diversité des statuts et des situations, outre qu’elle coûte de l’argent à l’État, nuit à la lisibilité du système et à l’efficacité des personnels sur le terrain. N’oublions pas le diagnostic de la Cour des comptes ! On a tendance à penser que le fait d’accorder à ces personnels le statut de fonctionnaires va coûter beaucoup d’argent, mais il se peut en réalité que cela nous coûte moins cher que l’organisation actuelle : une étude d’impact précise nous permettrait de le vérifier.

Mme Cécile Rilhac. Nous examinerons bientôt un projet de loi portant réforme de la fonction publique : cette question pourrait y trouver sa place. Pour l’heure, plus qu’un statut de fonctionnaire de l’éducation nationale, les AESH demandent un CDI pour sortir de la précarité. Nous sommes donc plutôt défavorables à cet amendement, mais nous devons réfléchir à cette question.

Mme Marie-George Buffet. J’entends bien le raisonnement de notre collègue, mais je ne comprends pas son vote sur les articles qui préconisaient, justement, d’accorder aux accompagnants un CDI.

Mme Frédérique Meunier. Je souhaite partager un témoignage qui me tient à cœur, même s’il n’est pas directement lié à ce sujet. J’ai rencontré la semaine dernière une AESH qui m’a dit que l’indemnité compensatrice de la hausse de la CSG dont elle bénéficiait a été supprimée. Aujourd’hui, les AESH qui l’ont perçue d’avance doivent la rembourser. Je ne sais pas si vous aviez connaissance de ces faits, mais je pense que nous devons faire quelque chose pour les hommes et les femmes concernés. J’ai posé une question écrite au Gouvernement sur ce point.

La commission rejette l’amendement.

Titre

La commission examine l’amendement AC20 de M. Aurélien Pradié.

M. Aurélien Pradié. Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur, qu’avant cette proposition de loi sur l’école « vraiment » inclusive, le ministre de l’éducation nationale avait déjà plaidé pour une école « pleinement » inclusive. Je considère, pour ma part, que tous les adjectifs qui viennent s’accoler aux termes précieux d’ « école de la République » sont accessoires et qu’ils servent peut-être même à cacher une incapacité à agir. Je sais que ce n’est pas votre intention, mais je voulais rappeler, avec cet amendement, que la seule école que nous connaissons est l’école de la République, qui ne devrait pas avoir besoin de qualificatifs pour être inclusive. L’école de la République, par les valeurs qui sont les siennes, est, en soi, inclusive. Il faut faire attention aux mots que nous employons, surtout à l’époque actuelle : les mots « école » et « République » se suffisent à eux-mêmes.

M. Christophe Bouillon, rapporteur. Nous avons gravé dans le marbre, à l’article L.111-1 du code de l’éducation, le principe de l’école inclusive et je pense qu’il serait dommage de ne pas y faire référence ici. Pour que l’école inclusive soit une réalité, il faut que nous réussissions cette étape essentielle qu’est la rentrée scolaire. C’est pourquoi je tiens à conserver le titre de cette proposition de loi.

La commission rejette l’amendement.

M. Maxime Minot. Monsieur le Président, pour éclairer nos débats, j’aimerais savoir quels articles ont été adoptés.

M. Bruno Studer, président de la commission. Les articles 3, 4, 7, 8 et 9 ont été adoptés.

La commission adopte à l’unanimité l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

*     *

En conséquence, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

Texte adopté par la commission :
http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/ta-commission/r1598-a0.pdf

Texte comparatif
http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/rapports/r1598-aCOMPA.pdf

 


—  1  —

Annexe 1 :
Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur

(par ordre chronologique)

            Défenseur des droits – M. Patrick Gohet, adjoint du Défenseur des droits en charge de la lutte contre les discriminations et de la promotion de légalité, Mme Marie Lieberherr, cheffe du pôle Défense des droits de lenfant et Mme Candice Lequiller, attachée parlementaire

            Table ronde :

 Association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH)  M. JeanLouis Garcia, président, M. Jean-Claude Rouanet, vice-président délégué, et M. Ali Rabeh, directeur de cabinet

 Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (UNAPEI) (*)  M. Luc Gateau, président, Mme Clémence Vaugelade, chargée de plaidoyer, ou Mme Catherine Lafont, chargée de mission éducation

 Association des paralysés de France (APF) – France Handicap – Mme Bénédicte Kail, conseillère nationale éducation familles

            Direction de la recherche, des études, de lévaluation et des statistiques (DREES) – M. Patrick Aubert, directeur, et Mme Laurence Dauphine, cheffe du pôle handicap

            Mme Caroline Moreau-Fauvarque, M. Marc Rolland, et M. Pierre Naves, auteurs du rapport IGAS/IGEN/IGAENR sur « Lévaluation de laide humaine pour les élèves en situation de handicap », remis au Gouvernement en juin 2018

            Collectifs AESH-loi 2005 et AESH Île-de-France – Mme Virginie Cassand, animatrice du Collectif AESH-loi 2005 (AESH à lacadémie de Paris), et M. Jérôme Antoine, animateur du Collectif AESH Île-de-France (AESH à lacadémie de Créteil)

            Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) – Mme Anne Burstin, directrice, et M. Jean-Michel Lamiaux, responsable du pôle expertise et appui métier à la direction de la compensation de la perte d’autonomie

            Association nationale des directeurs de MDPH – Mme Marie du Bouetiez, directrice de la MDPH du Val de Marne.

(*) Ce représentant d’intérêts a procédé à son inscription sur le répertoire de la Haute Autorité de transparence pour la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


—  1  —

Annexe 2 :
Liste des textes susceptibles d’être abrogés
ou modifiés à l’occasion de l’examen
de la proposition de loi

 

Projet de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro darticle

1er

Code de l’éducation

L917-1

2

Code de l’éducation

L917-1-1 [nouveau]

3

Code de l’éducation

L917-1-2 [nouveau]

4

Code de l’éducation

L351-3

5

Code de l’éducation

L551-1-1 [nouveau]

6

Code de l’éducation

L351-3

 

 

 


([1]) Loi n° 2013-595.

([2]) En 1994, la déclaration de Salamanque, venant en conclusion d’une conférence mondiale sur l’éducation et les besoins éducatifs spéciaux placés sous l’égide de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), a consacré la notion d’« inclusion » qu’elle a définie comme le droit de toutes les personnes, indépendamment de leur différence, à être scolarisées dans les écoles communes.

([3]) Loi n° 75-534.

([4]) Loi n° 2005-102. L’article 11 de cette loi a reconnu à la personne en situation de handicap un « droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient lorigine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie », « cette compensation consist[ant] à répondre à ses besoins, quil sagisse de laccueil de la petite enfance, de la scolarité, de lenseignement, de léducation, de linsertion professionnelle, des aménagements du domicile ou du cadre de travail nécessaires au plein exercice de sa citoyenneté et de sa capacité dautonomie, du développement ou de laménagement de loffre de service, permettant notamment à lentourage de la personne handicapée de bénéficier de temps de répit, du développement de groupes dentraide mutuelle ou de places en établissements spécialisés, des aides de toute nature à la personne ou aux institutions pour vivre en milieu ordinaire ou adapté ». Aujourd’hui codifié à l’article L. 114-1-1 du code de l’action sociale et des familles, ce texte prévoit que les besoins de compensation sont inscrits dans un plan personnalisé de compensation du handicap élaboré en considération des besoins et des aspirations de la personne handicapée tels qu’ils sont exprimés dans son projet de vie, formulé par la personne elle-même ou, à défaut, avec ou pour elle par son représentant légal lorsqu’elle ne peut exprimer son avis.

([5]) Circulaires n° 82/2 et n° 82-048 du 29 janvier 1982.

([6])  Voir le compte-rendu intégral de la première séance du jeudi 11 octobre 2018 (Assemblée nationale, XVe législature, session ordinaire 2018-2019) qui est consultable au lien suivant : http://www.assemblee-nationale.fr/15/cri/2018-2019/20190014.asp#P1449371

([7]) D’après un rapport publié en juin 2018 par les inspections générales des Affaires sociales, de l’Éducation nationale et de l’administration de l’Éducation nationale et de la recherche (IGAS-IGEN-IGAENR), on dénombrait 156 000 élèves en situation de handicap bénéficiaires d’un accompagnement humain en juin 2017 (Évaluation de laide humaine pour les élèves en situation de handicap, juin 2018, p. 1).

([8])  Voir le lien suivant : https://informations.handicap.fr/art-toubon-droit-defenseur-enfant-993-9302.php

([9])  Voir le lien suivant :

https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CRC%2fC%2fFRA%2fCO%2f5&Lang=en

Ce constat a conduit le comité à « prier instamment » notre pays :

– « de reconnaître le droit de tous les enfants à léducation inclusive et de veiller à ce que léducation inclusive soit privilégiée, à tous les niveaux denseignement, par rapport au placement en institution spécialisée ou à la scolarisation en classe séparée » ;

– « de former tous les enseignants et les professionnels de léducation à léducation inclusive et au soutien individualisé, en créant des environnements inclusifs et accessibles et en en prêtant lattention voulue à la situation particulière de chaque enfant ».

([10]) France Soir, « Handicap: les maisons départementales sont " à bout de souffle " », 4 avril 2018.

Voir le lien suivant : http://www.francesoir.fr/actualites-politique/handicap-les-maisons-departementales-sont-bout-de-souffle

([11]) IGAS-IGEN-IGAENR, rapport précité, p. 40 ; Cour des comptes, Le recours croissant aux personnels contractuels : un enjeu désormais significatif pour léducation nationale, communication à la commission des Finances du Sénat, mars 2018, p. 35.

([12]) Il s’agit de l’association d’information et de soutien pour l’inclusion des personnes atteintes de handicap cognitif (« Tous pour l’inclusion ! » – TouPI) ainsi que des associations Autisme France, Egalited et Info Droit Handicap. Cette enquête est consultable au lien suivant :

http://www.autisme-france.fr/offres/doc_inline_src/577/Synthese-enquete-AVS-2018-09-20%5B0%5D.pdf

([13])  Les unités d’enseignement externalisées permettent à des enfants scolarisés en établissement médico-social de bénéficier de l’inclusion scolaire, dans la mesure où ces unités sont totalement ou partiellement externalisées en établissement scolaire ordinaire.

([14]) En vue de la rentrée scolaire de 2018, 38 nouvelles Ulis auraient été créées dans des lycées d’enseignement général, technologique et professionnel, en sus des 40 unités déjà créées en 2017.

([15]) Rapport précité, p. 61.

([16])  Proposition de loi n° 1230 relative à l’inclusion des élèves en situation de handicap de M. Aurélien Pradié et de plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains.

([17])  Articles L. 146-3 et suivants du code de l’action sociale et des familles.

([18]) Article L. 146-8 du code de l’action sociale et des familles.

([19])  Article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles.

([20]) Ce sont ainsi les CDAPH qui décident de l’orientation des personnes handicapées (enfant ou adulte) et des mesures propres à assurer leur insertion scolaire, professionnelle et sociale et qui désignent à cet effet les établissements ou services répondant aux besoins de l’enfant handicapé ou concourant à la rééducation, à l’éducation, au reclassement et à l’accueil de l’adulte handicapé.

Ce sont également les CDAPH qui attribuent l’ensemble des aides (allocation d’éducation de l’enfant handicapé, allocation aux adultes handicapés – AAH) et des prestations (carte d’invalidité, de priorité ou de stationnement), et notamment  la prestation de compensation du handicap (PCH) versée par le conseil départemental.

([21]) IGAS-IGEN-IGAENR, Évaluation de laide humaine pour les élèves en situation de handicap, juin 2018, p. 41.

L’attente de places dans des établissements spécialisés est si longue que certains enfants et adolescents français sont contraints de quitter le territoire national pour pouvoir bénéficier d’un accompagnement. Fin 2015, on dénombrait ainsi 1 230 enfants français en situation de handicap dans des établissements belges. Si la moitié d’entre eux étaient originaires de départements frontaliers ou proches de la Belgique, il n’en reste pas moins que 400 jeunes (soit près du tiers) étaient originaires d’Île-de-France (ibidem, pp. 72-73).

([22])  Ibidem, p. 40.

([23])  Cour des comptes, Le recours croissant aux personnels contractuels : un enjeu désormais significatif pour léducation nationale, communication à la commission des Finances du Sénat, mars 2018, p. 35.

([24]) Voir, par exemple, la décision du Défenseur des droits n° 2018-086, rendue au sujet du défaut d’accompagnement d’un enfant par un AVS en établissement privé d’enseignement sous contrat d’association avec l’État, alors même que cet enfant bénéficiait d’une décision de la CDAPH lui ayant ouvert des droits à un accompagnement individuel à hauteur de 12 heures par semaine.

On peut également citer la décision du Défenseur des droits n° 2018-046, rendue au sujet d’un enfant autiste âgé de douze ans, radié définitivement d’un établissement privé sous contrat d’association avec l’État trois jours après la rentrée scolaire au motif du défaut de présence d’un AESH à ses côtés.

([25]) Voir le lien suivant : https://www.francebleu.fr/infos/education/en-haute-garonne-plus-de-1-000-eleves-handicapes-etaient-sans-auxiliaire-a-la-rentree-scolaire-1541789571

Voir également : https://www.francetvinfo.fr/sante/enfant-ado/handicap-des-milliers-d-enfants-prives-de-rentree-scolaire_2923535.html

([26])  Cette enquête est consultable au lien suivant :

http://www.autisme-france.fr/offres/doc_inline_src/577/Synthese-enquete-AVS-2018-09-20%5B0%5D.pdf

([27])  Voir le lien suivant : https://toupi.fr/enquete-2018-avs-ou-pas-davs/

([28])  Autisme France, Egalited, Info Droit Handicap, TouPI, Rentrée 2018 : avec ou sans AVS ?, septembre 2018, pp. 7-8.

([29])  Ce document est consultable en ligne au lien suivant :

https://handicap.gouv.fr/IMG/pdf/vademecum_rentree_scolaire_vd.pdf

([30])  Cour des comptes, communication précitée, p. 38.

([31])  Cour des comptes, communication précitée, p. 43.

([32]) Rapport précité, pp. 32-33.

([33]) Cour des comptes, communication précitée, pp. 8-9.

([34])  Cour des comptes, communication précitée, pp. 36-37.

([35])  Cour des comptes, communication précitée, p. 9.

([36]) Réponse ministérielle à la question écrite n° 6152, JO AN, 17 avril 2018. Voir le lien suivant : http://questions.assemblee-nationale.fr/q15/15-6152QE.htm

([37]) Article L. 917-1, alinéa 6, du code de l’éducation.

([38]) IGAS-IGEN-IGAENR, Évaluation de laide humaine pour les élèves en situation de handicap, juin 2018, p. 7.

([39])  Cour des comptes, communication précitée, p. 13.

([40])  Rapport précité, p. 83.

([41]) Ibidem, p. 87.

([42]) Avis n° 3111, tome IV (XIVe législature), présenté, au nom de la commission des Affaires culturelles et de l’éducation sur le projet de loi de finances pour 2016, par Mme Barbara Pompili, p. 32.

([43]) Cour des comptes, communication précitée, p. 9.

([44]) Ibidem, p. 13.

([45])  CNCPH,  École inclusive : état des lieux, réflexions et recommandations, avril 2018, p. 20.

([46]) IGAS-IGEN-IGAENR, Évaluation de laide humaine pour les élèves en situation de handicap, juin 2018, p. 39.

([47]) IGAS-IGEN-IGAENR, Évaluation de laide humaine pour les élèves en situation de handicap, juin 2018, p. 36.

([48]) Ibidem, p. 38.

([49]) L’article D. 351-12 du code de l’éducation précise qu’« un enseignant titulaire de la fonction publique de lÉtat ou, dans lenseignement privé sous contrat, un enseignant agréé ou contractuel détenteur du certificat daptitude professionnelle pour les aides spécialisées, les enseignements adaptés et la scolarisation des élèves en situation de handicap ou du certificat complémentaire pour les enseignements adaptés et la scolarisation des élèves en situation de handicap ou de lun des diplômes délivrés par le ministère chargé des personnes handicapées, […] exerce les fonctions de référent auprès de chacun des élèves handicapés du département afin dassurer, sur lensemble du parcours de formation, la permanence des relations avec lélève, ses parents ou son représentant légal, sil est mineur. Cet enseignant est chargé de réunir léquipe de suivi de la scolarisation pour chacun des élèves handicapés dont il est le référent. Il favorise la continuité et la cohérence de la mise en œuvre du projet personnalisé de scolarisation ».

([50]) IGAS-IGEN-IGAENR, rapport précité, p. 39.

([51])  Rapport n° 1290 (XVe législature) fait, au nom de la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, sur la proposition de loi relative à l’inclusion des élèves en situation de handicap, par M. Aurélien Pradié, octobre 2018, p. 9.

([52])  La durée de la « formation » oscillerait entre 6 et 40 heures selon les ESPE.

([53])  Il s’agit de la troisième mesure de l’axe n° 1 (« Mieux informer, former et accompagner les enseignants ») de ce plan présenté en décembre 2017. Voir le lien suivant :

http://www.education.gouv.fr/cid123838/permettre-a-l-ecole-de-la-republique-d-etre-pleinement-inclusive.html

([54]) CNCPH, École inclusive : état des lieux, réflexions et recommandations du CNCPH, avril 2018, p. 11. 

([55])  IGAENR, Linclusion des élèves en situation de handicap en Italie, février 2018, pp. 14-15.

([56])  Ibidem, p. 15.

([57])  Après comparaison de leurs prévisions avec celles du chef d’établissement, les autorités académiques arrêtent une prévision officielle, au cours du premier trimestre, qui sert de base de calcul à la DHG. Les chiffres retenus par l’inspection académique ou le rectorat tiennent compte des taux de redoublement moyen et de changement d’établissement.

([58])  Article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles.

([59])  Ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse, «Ensemble pour l’école inclusive », 18 juillet 2018, p. 10. Le dossier de presse est consultable au lien suivant : http://cache.media.education.gouv.fr/file/07_-_Juillet/80/0/DP_Ensemble_pour_l_ecole_inclusive_complet_984800.pdf

Voir également le lien suivant : https://ecole-et-handicap.fr/poles-inclusifs-daccompagnement-localises/

([60]) Les troubles « dys » sont des troubles cognitifs  d’origine neurobiologique sans déficience intellectuelle globale. Il peut s’agir de dyscalculie, de dysgraphie, de dyslexie, de dysphasie, de dyspraxie ou encore de dysorthographie.

([61]) Cour des comptes, communication précitée, p. 34.

([62])  Le Parisien, « Saint-Ouen : le coup de gueule des parents denfants handicapés », 28 juin 2018. Voir le lien suivant : http://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/saint-ouen-le-coup-de-gueule-des-parents-d-enfants-handicapes-28-06-2018-7799289.php

([63])  Voir le lien suivant : https://place-handicap.fr/Les-delais-de-traitement-des-dossiers

([64])  Voir le lien suivant : http://www.mdph31.fr/508-nos-delais-actuels-de-traitement-des-dossiers.html

([65]) Le temps périscolaire correspond aux heures qui précèdent et suivent la classe, durant lesquelles un encadrement est proposé aux enfants scolarisés : période d’accueil du matin avant la classe ; période d’accueil du soir immédiatement après la classe (études surveillées, accompagnement à la scolarité, accueils de loisirs, activités culturelles ou sportives, garderie); journée du mercredi.

Le décret n° 2018-647 du 23 juillet 2018 modifiant des définitions et des règles applicables aux accueils de loisirs a en effet redéfini les accueils de loisirs périscolaires et extrascolaires pour tenir compte de la possibilité prévue par l’article D. 521-12 du code de l’éducation d’organiser la semaine scolaire sur quatre journées. Ce décret fait désormais de l’accueil de loisirs organisé le mercredi sans école un temps périscolaire.

Le temps extrascolaire correspond quant à lui à celui durant lequel un encadrement est proposé aux enfants soit en soirée après le retour de l’enfant à son domicile, soit le samedi toute la journée s’il n’y a pas d’école, soit le dimanche, les jours fériés et durant les vacances scolaires (article R. 227-1 du code de l’action sociale et des familles).

([66]) CNCPH, École inclusive : état des lieux, réflexions et recommandations du CNCPH, avril 2018, p. 7.

([67]Ibidem, p. 7. Adde, p. 8 : s’agissant plus particulièrement de la création des unités d’enseignements externalisées et des unités d’enseignements en maternelle autisme (UEMA), le CNCPH note que « ces créations nécessitent des salles disponibles dans les groupes scolaires, collèges et lycées concernés » et que « dans un contexte volontariste de dédoublement des classes de CP et CE1, il est nécessaire danticiper et dorganiser la concertation entre les différents acteurs des territoires (Éducation nationale, ARS [autorités régionales de santé], Collectivités Territoriales, associations gestionnaires concernées) pour programmer les besoins de nouveaux espaces et les éventuels aménagements ou constructions ».

([68]) Observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement, Rapport 2016, p. 24.

([69])  Mme Pénélope Komitès, Professionnaliser les accompagnants pour la réussite des enfants et adolescents en situation de handicap, avril 2013, p. 10.

([70])  Voir le lien suivant :

https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CRC%2fC%2fFRA%2fCO%2f5&Lang=en

([71])  Voir le lien suivant :

https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/171102_ddd_decision_statistiques_handicap_accessible.pdf

([72])  Rapport n° 1290 précité, p. 8.