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N° 1629

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 31 janvier 2019.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI pour une école de la confiance,

 

 

TOME I

AVANT-PROPOS ET SYNTHÈSE

 

 

Par Mmes Fannette CHARVIER et Anne-Christine LANG,

 

 

Députées.

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale :  1481.

 


 


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SOMMAIRE

___

Pages

avant-propos

SYNThÈSE

I. prÉsentation du projet de loi

A. Titre ier : garantir les savoirs fondamentaux pour tous

1. Le lien de confiance au sein de l’école (article 1er)

2. L’obligation d’instruction à trois ans (articles 2 à 4)

3. Le renforcement du contrôle de l’instruction en famille (article 5)

B. titre ii : innover pour s’adapter aux besoins des territoires

1. La création des établissements publics locaux d’enseignement international (article 6)

2. Un rectorat pour Mayotte (article 7)

C. titre III : amÉliorer la gestion des ressources humaines

1. La réforme de la formation des professeurs (articles 10, 11, 12 et 14)

2. Diverses dispositions relatives aux personnels (articles 13, 15 et 16)

D. titre iv : simplifier le systÈme Éducatif

1. La réforme du cadre de l’expérimentation dans les établissements scolaires (article 8)

2. La création du Conseil d’évaluation de l’école (article 9)

E. titre v : dispositions diverses

II. les principaux apports de la commission

1. Préciser la portée de l’article 1er

2. Clarifier les modalités de l’obligation d’instruction à trois ans

3. Améliorer l’encadrement de l’instruction en famille

4. Changer de point de vue pour l’inclusion des personnes en situation de handicap et des élèves à besoins éducatifs particuliers

5. Favoriser l’ouverture des établissements publics locaux d’enseignement international

6. Permettre la création d’établissements publics des savoirs fondamentaux

7. Compléter le champ des expérimentations dans deux domaines

8. Étendre les compétences du Conseil d’évaluation de l’école et modifier sa composition


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   avant-propos

 

Dès la rentrée 2017, le Gouvernement s’est attaché à bâtir une école de la confiance à travers des mesures fortes, dont le dédoublement des classes de CP et de CE1 en réseaux d’éducation prioritaire constitue probablement la plus marquante. Il s’agit d’ « enclencher un cercle vertueux de confiance au sein du système éducatif, mais aussi dans la société grâce à l'école » car « nous ne sommes pas suffisamment une société de confiance », comme l’a indiqué le ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse lors de son audition par la Commission.

Ce projet de loi marque la poursuite et l’approfondissement de cette ambition. Son article 1er, qui en constitue le socle, inscrit dans l’une des toutes premières dispositions du code de l’éducation la nécessité du pacte de confiance qui doit unir l’ensemble des membres de la communauté éducative et régir leur relation à l’institution scolaire. Le malentendu qu’il a pu susciter en dit long sur l’état de défiance qui prévaut trop souvent, non seulement entre les différents acteurs du système éducatif, mais également vis-à-vis de l’institution et de tout ce qu’elle produit, au-delà même du cadre de l’éducation nationale. Certes, comme on l’entend souvent, la confiance ne se décrète pas. Mais il appartient au législateur et aux pouvoirs publics d’en réunir les conditions. C’est ce à quoi s’attache ce projet de loi, à travers un certain nombre de mesures structurantes et selon trois axes : la confiance des élèves et de leurs familles dans l’école ; la confiance de l’institution scolaire vis-à-vis de ses personnels ; et la confiance vis‑à‑vis des territoires et de leurs initiatives.

 

La volonté de favoriser la confiance des élèves et des familles dans l’école explique le projet de justice sociale que constitue l’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire à trois ans, figurant aux articles 2 à 4 du projet de loi. Dans son serment de 1870, Jules Ferry affirmait : « faire disparaître la dernière, la plus redoutable des inégalités qui viennent de la naissance : l’inégalité d’éducation. C’est le problème du siècle et nous devons nous y rattacher ». C’est cette même passion française pour l’égalité qui justifie cette mesure, cent trente‑sept ans après les lois Ferry de 1881 et 1882, qui rendaient l’école laïque, gratuite et obligatoire. De fait, le constat est aujourd’hui cruel : comme le montrent les enquêtes internationales, notre système éducatif reste très inégalitaire et les résultats des élèves sont étroitement corrélés à leur origine sociale. La raison en est claire : ces inégalités s’installent dès le plus jeune âge. À quatre ans, un élève pauvre maîtrise deux fois moins de mots qu’un enfant issu d’un milieu favorisé. Or les difficultés langagières précoces entraînent par la suite des retards dans les apprentissages qui, trop souvent, ne font que s’aggraver tout au long de la scolarité, si bien qu’avant même l’entrée à l’école, les chances de réussite de certains élèves sont déjà compromises.

Certes, près de 99 % des enfants de trois à cinq ans sont déjà scolarisés. Devrions-nous, pour autant, laisser de côté les 26 000 enfants de cette tranche d’âge qui ne le sont pas, et qui sont souvent les moins favorisés ? Ce n’est pas le choix de la majorité, qui a soutenu cette mesure en commission. À travers l’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire, c’est aussi l’école maternelle, celle de l’épanouissement et du langage, qui est valorisée et consacrée comme un fer de lance de la lutte contre les inégalités.

Parce qu’il vient parachever l’œuvre républicaine initiée par Jules Ferry en 1882, poursuivie par Jean Zay en 1936 et le Général de Gaulle en 1959, ce projet de loi pour une école de la confiance est bien une œuvre de justice sociale. Pourrions-nous, dans les prochaines années, approfondir encore cette œuvre d’égalité ? Sans doute. En effet, la France fait figure d’exception en Europe dans la prise en charge des très jeunes enfants. Il faudra un jour mettre fin à la rupture institutionnelle qui existe entre le monde de la petite enfance et celui de l’école. Ces deux mondes gagneraient à n’en former qu’un seul, comme c’est le cas dans de nombreux pays, pour permettre une prise en charge, globale et dans la durée, des enfants de moins de six ans, aussi bien sur le plan de l’éveil et du développement psycho-affectif que sur celui des apprentissages, du suivi médical et de l’accompagnement des familles. Ce chantier est encore largement devant nous.

 

Ensuite, la confiance dans l’école se construit également à travers la confiance envers l’ensemble de ses personnels. Ce projet de loi contient plusieurs mesures visant à témoigner de cette confiance et à ouvrir le champ des possibles pour les personnels du système éducatif, à commencer par les enseignants. Rappelons qu’avec plus d’un million de personnels, dont 880 000 enseignants, l’Éducation nationale est le premier employeur de France. En 2019, près de 24 000 enseignants seront recrutés par concours. Pourtant, ce métier attire de moins en moins : en l’espace de quinze ans, le nombre d’inscrits aux concours de recrutement du second degré a chuté de près de 30 %. La plupart des causes sont identifiées ; parmi celles les plus régulièrement citées par les syndicats, on trouve la dévalorisation et le manque de reconnaissance du métier, ainsi que la difficulté des conditions de travail, en particulier en début de carrière.

Le Gouvernement a pris à bras-le-corps la question de l’attractivité des métiers de l’enseignement à travers une série de mesures qui s’articulent autour de trois thèmes : les rémunérations, la formation (initiale mais aussi continue) et l’accompagnement des carrières. La plupart de ces mesures ne sont pas de nature législative mais réglementaire, c’est pourquoi elles ne se retrouvent pas toutes dans ce projet de loi, qui n’est que la « partie émergée » d’une réforme d’ampleur.

Le Gouvernement a entrepris la refonte de la formation des enseignants au sens large, avec un continuum entre formation initiale, formation « continuée » dans les premières années d’exercice et formation continue.

Le projet de loi, outre le changement de dénomination et de gouvernance des écoles qui assurent la formation initiale des enseignants, désormais appelés Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (INSPÉ), prévoit la création d’un référentiel national afin d’homogénéiser la formation des professeurs. Dans toutes les académies, le niveau d’exigence et le temps consacré aux différentes disciplines seront comparables. La priorité sera donnée aux savoirs fondamentaux, en particulier dans le premier degré. Cette réforme doit être l’occasion de renforcer et rééquilibrer les savoirs et les compétences d’étudiants dont le parcours antérieur est souvent monochrome – et en majorité peu scientifique, alors que les mathématiques sont une composante essentielle de ces savoirs fondamentaux.

Davantage de formations seront dispensées par des acteurs de terrain, c’est-à-dire des enseignants qui exercent en parallèle devant des classes. Dans le même temps, les INSPÉ devront assurer l’adossement des pratiques pédagogiques et des savoirs sur le meilleur de la recherche. C’est tout l’intérêt de la proximité avec l’enseignement supérieur. Chacun pourrait avoir la tentation de rajouter tel ou tel enseignement – qu’il juge fondamental – dans la formation initiale des professeurs. Mais on ne peut pas tout attendre d’une formation initiale. Un professeur n’a pas réellement fini sa formation au moment de sa titularisation, d’où la nécessité d’ouvrir à la fois le chantier de la formation « continuée » durant les trois premières années d’exercice et celui de la formation continue pour le reste de la carrière.

Le dispositif du prérecrutement, prévu à l’article 14, a pour but d’aller chercher des étudiants dès la deuxième année de licence pour leur permettre, en trois ans, de s’approprier progressivement l’environnement scolaire et l’exercice du métier, avec un salaire. Ce dispositif remplacera progressivement celui des étudiants apprentis professeurs, dont les bénéficiaires sont de moins en moins nombreux et qui présente un certain nombre de faiblesses, avec un changement d’établissement en cours de parcours et, surtout, l’impossibilité de cumuler le salaire avec une bourse universitaire. Le dispositif du prérecrutement sera plus attractif, notamment pour les jeunes issus de milieux modestes qui peuvent hésiter à se lancer dans cinq années d’études. L’idée est de sécuriser leur parcours étudiant jusqu’au concours, en levant l’incertitude financière.

La confiance se traduit aussi par la grande liberté qu’il est proposé de laisser aux enseignants pour expérimenter de nouvelles pratiques pédagogiques, dans un cadre juridique clarifié, tout en ouvrant de nouveaux domaines d’expérimentation. Cette mesure, prévue par l’article 8 du projet de loi, témoigne de la confiance que l’institution accorde aux enseignants et aux équipes pédagogiques, à leur expertise, à leur capacité à analyser les situations dans lesquelles se trouvent leurs élèves, pour y apporter les solutions les plus pertinentes et les plus adaptées localement.

C’est également au nom de la confiance renouvelée que l’article 9 du projet de loi crée le Conseil d’évaluation de l’école. Loin de l’évaluation-sanction, ce Conseil consacre le principe d’une évaluation constructive et bienveillante, précédée d’une autoévaluation réalisée par les établissements. Nous nous conformons ici à l’un des engagements pris pendant la campagne : évaluer régulièrement l’ensemble des établissements scolaires, de manière à les faire progresser en associant tous les acteurs de la communauté éducative, avec la participation active des élèves eux-mêmes.

 

Enfin, ce projet de loi marque la volonté de faire confiance aux acteurs territoriaux, comme en témoigne, tout d’abord, la création d’une nouvelle structure juridique, l’établissement public local d’enseignement international (EPLEI) à son article 6. Ce nouvel établissement public orienté vers l’international est largement inspiré des dispositions relatives à l’École européenne de Strasbourg, qui figurent déjà dans le code de l’éducation. Sa création permettra de sécuriser juridiquement les écoles existantes, mais également d’autres projets territoriaux, notamment ceux, déjà très aboutis, de Courbevoie et de Lille. Il s’agit de participer à l’attractivité de la France, dans le contexte du Brexit. Lille pourra renforcer son positionnement en tant que capitale européenne, et Paris devenir une évidence pour les familles des personnels de l’Autorité bancaire européenne, si on leur garantit que leurs enfants pourront bénéficier d’enseignements adaptés dans leur langue maternelle. Mais cette opportunité ne se limite pas aux seuls enfants d’expatriés de retour en France ou aux enfants de ressortissants étrangers dont la mobilité professionnelle les amène à résider temporairement ou définitivement sur le sol français. Les EPLEI devront être accessibles aux élèves français de tous les milieux pour autant qu’ils soient capables de suivre des enseignements en langue étrangère, au-delà des enseignements classiques de langue dispensés par les EPLE. Élever le niveau général des élèves en langues est une ambition déjà portée par le développement des classes bilingues et des sections binationales, internationales et européennes ; l’EPLEI se veut un outil au service de leur développement.

L’adoption par la commission d’un amendement permettant la création d’établissements publics des savoirs fondamentaux regroupant des écoles primaires avec un collège (article 6 quater) participe de cette volonté de permettre aux initiatives locales d’émerger et de leur offrir un cadre juridique pérenne. Créés sur proposition des communes et des départements, ces établissements pourront regrouper les écoles et le collège d’un même bassin de vie, sur un même site ou en réseau. Ils faciliteront le parcours et le suivi individuel des élèves et offriront la possibilité à de très petites écoles d’atteindre une taille critique rendant possibles certains projets pédagogiques. Ils pourront en particulier constituer une réponse aux problématiques auxquelles sont confrontées certaines zones rurales.

La création du rectorat de Mayotte, à l’article 7, s’inscrit dans la même logique d’adaptation aux territoires, et s’intègre dans la perspective plus vaste du plan d’action pour l’avenir des Mahorais, annoncé par la ministre des outre-mer en mai dernier.

Pour simplifier le fonctionnement du système éducatif, une ordonnance viendra tirer les conséquences de la réforme de l’organisation territoriale de l’éducation nationale, pour l’adapter à celle des nouvelles régions issues de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République de 2015 ([1]) ; une autre ordonnance portera sur l’organisation et le fonctionnement des CAEN – conseils académiques de l’Éducation nationale – et des CDEN – conseils départementaux de l’Éducation nationale. Cette dernière mesure a semblé recueillir le consensus lors de nos auditions, ce qui n’a pas été le cas pour le redécoupage des académies.

Partant du rapport dit « rapport Weil » ([2]) cité en référence par l’étude d’impact du projet de loi, la réforme proposée par l’article 17 n’en suit cependant pas toutes les recommandations. Le ministre de l’éducation nationale a ainsi pu en préciser les contours, en réaffirmant la nécessité du positionnement institutionnel renforcé d'un rectorat de région en coopération avec d'autres acteurs institutionnels tels que le préfet de région ou le directeur de l'agence régionale de santé. Cette réforme se décline aussi au niveau départemental, voire infra-départemental, par le renforcement de l'échelon de proximité, notamment des directeurs académiques des services de l’éducation nationale (DASEN).

Les exemples étrangers montrent qu’un système éducatif peut progresser très rapidement – en l’espace de cinq ou six ans – s’il actionne un certain nombre de leviers qui sont aujourd’hui bien identifiés : l’apprentissage des savoirs fondamentaux, la qualité de la formation des enseignants, l’évaluation régulière des élèves et des établissements et les relations établies entre l’école et les parents d’élèves. C’est dans cette ambition que se place le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui.

 


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   SYNThÈSE

 

I.   prÉsentation du projet de loi

A.   Titre ier : garantir les savoirs fondamentaux pour tous

1.   Le lien de confiance au sein de l’école (article 1er)

L’article 1er souligne la responsabilité des personnels de la communauté éducative, en disposant que par leur engagement et leur exemplarité, ils contribuent à l’établissement du lien de confiance qui doit unir les élèves et leur famille au service public de l’éducation ; ce lien implique également le respect des élèves et de leur famille à l’égard de l’institution scolaire et de l’ensemble de ses personnels.

2.   L’obligation d’instruction à trois ans (articles 2 à 4)

L’article 2 instaure une obligation d’instruction à partir de trois ans, au lieu de six ans actuellement. Il ne s’agit pas d’une obligation de scolarisation, l’instruction pouvant être dispensée dans la famille (cf. article 5).

L’article 3 procède à des modifications de coordination découlant de l’instauration d’une obligation d’instruction à trois ans.

L’article 4 prévoit une compensation des dépenses supplémentaires induites pour les communes par l’obligation d’instruction à trois ans.

3.   Le renforcement du contrôle de l’instruction en famille (article 5)

L’article 5 améliore l’information fournie aux familles instruisant leurs enfants à domicile, concernant l’objet et les modalités des contrôles pédagogiques dont elles font l’objet et les sanctions auxquelles elles s’exposent en cas de non‑respect des dispositions encadrant l’instruction en famille. Il renforce également les pouvoirs de l’inspecteur d’académie en lui permettant de mettre en demeure les familles contrevenantes d’inscrire leur enfant dans un établissement d’enseignement scolaire.

 

B.   titre ii : innover pour s’adapter aux besoins des territoires

1.   La création des établissements publics locaux d’enseignement international (article 6)

L’article 6 crée une nouvelle catégorie d’établissements publics locaux d’enseignement, les établissements publics locaux d’enseignement international (EPLEI), sur le modèle de l’École européenne de Strasbourg. Créés par convention entre les collectivités territoriales concernées, les EPLEI pourront dispenser un enseignement de la maternelle à la terminale, en vue de préparer au baccalauréat européen ou à l’option internationale du diplôme national du brevet et du baccalauréat et à la délivrance simultanée du baccalauréat général et du diplôme permettant l’accès à l’enseignement supérieur dans un État étranger.

2.   Un rectorat pour Mayotte (article 7)

L’article 7 dote le département de Mayotte d’un rectorat de plein exercice, au lieu d’un vice-rectorat actuellement.

C.   titre III : amÉliorer la gestion des ressources humaines

1.   La réforme de la formation des professeurs (articles 10, 11, 12 et 14)

Les articles 10 à 12 constituent le volet législatif de la réforme de la formation initiale et continue des professeurs et des personnels d’éducation. L’article 10 modifie le nom des écoles chargées de la formation des enseignants, les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPÉ) devenant les « instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation » (INSPÉ), et prévoit qu’il reviendra désormais aux ministres chargés de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale d’arrêter leur référentiel de formation. L’objectif est que la qualité de la formation soit la même sur tout le territoire.

L’article 12 modifie la gouvernance des INSPÉ afin d’élargir le recrutement de leurs directeurs et de rendre plus transparent le processus de sélection, en permettant aux ministres de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur d’avoir un pouvoir de nomination effectif.

L’article 14 modifie le dispositif relatif aux assistants d’éducation pour permettre à ceux qui se destinent aux concours de l’enseignement et de l’éducation d’exercer progressivement des fonctions d’enseignement, dans le but de développer le pré-recrutement des enseignants et des personnels d’éducation.

2.   Diverses dispositions relatives aux personnels (articles 13, 15 et 16)

L’article 13 met à jour le régime des incapacités de diriger ou d’être employé dans un établissement d’enseignement afin d’harmoniser les dispositions pour l’ensemble des personnels des établissements scolaires et d’étendre aux enseignants du second degré général les dispositions actuellement applicables au reste des employés de l’enseignement public et privé.

Les articles 15 et 16 sécurisent juridiquement des pratiques existantes. L’article 15 inscrit dans la loi des dérogations au statut général de la fonction publique qui étaient appliquées jusqu’à présent à certains personnels non enseignants de l’éducation nationale par assimilation au personnel enseignant. L’article 16 vise à permettre au président d’une université ou d’un établissement public d’enseignement supérieur de présider le conseil académique siégeant en formation restreinte aux enseignants-chercheurs.

D.   titre iv : simplifier le systÈme Éducatif

1.   La réforme du cadre de l’expérimentation dans les établissements scolaires (article 8)

L’article 8 clarifie et simplifie le cadre juridique de l’expérimentation dans les établissements scolaires, en supprimant des dispositions obsolètes et en réunissant les autres dispositions au sein d’un même chapitre. Il étend par ailleurs le champ des expérimentations à deux nouveaux domaines : la répartition des heures d’enseignement sur l’ensemble de l’année scolaire, tout en respectant les obligations réglementaires de service des enseignants, ainsi que les procédures d’orientation des élèves.  

2.   La création du Conseil d’évaluation de l’école (article 9)

L’article 9 crée un Conseil d’évaluation de l’école (CEE), qui se substitue au Conseil national d’évaluation du système scolaire (CNESCO) : le CEE a pour missions de définir le cadre méthodologique et les outils de l’évaluation des établissements scolaires, laquelle sera mise en œuvre dans un cadre national, ainsi que de coordonner les évaluations conduites par le ministère de l’éducation nationale, tout en enrichissant le débat public sur l’éducation.

Composé de douze membres, dont quatre parlementaires, quatre représentants du ministre de l’éducation et quatre personnalités nommées pour leurs compétences par ce dernier, le CEE est également chargé de donner un avis sur les méthodologies, les outils et les résultats des évaluations du système éducatif réalisées par le ministère de l’éducation ou dans le cadre de programmes internationaux.

E.   titre v : dispositions diverses

Les articles 17 et 18 habilitent le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures législatives qui seraient rendues nécessaires par la réforme de l’organisation des services déconcentrés de l’éducation nationale et par la simplification de l’organisation et du fonctionnement des conseils académiques et départementaux de l’éducation nationale.

L’article 19 précise les modalités de versement des bourses nationales de lycée, en introduisant dans la loi des dispositions jusqu’alors réglementaires sur la compensation réalisée par l’établissement entre la bourse et les frais de demi‑pension et de pension.

L’article 20 précise les conditions de création de la caisse des écoles du premier secteur de Paris, lequel résulte de la fusion des quatre premiers arrondissements parisiens à compter des élections municipales de 2020, tandis que l’article 21 supprime la liste d’aptitude pour accéder à l’emploi d’agent comptable d’un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel à compter de la rentrée scolaire de 2019.

L’article 22 habilite le Gouvernement à réviser et actualiser les dispositions du code de l’éducation applicables à l’outre-mer, pour tenir compte notamment des transferts de compétences intervenus au cours des dernières années et de l’évolution du statut de Mayotte. L’article 23 vise à étendre à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis-et-Futuna les nouvelles possibilités d’expérimentation pour l’accès aux études de santé, tout en procédant à des coordinations.

L’article 24 procède à la ratification de six ordonnances, en apportant des modifications à trois d’entre elles.

Enfin, l’article 25 définit les dates d’entrée en vigueur des différentes dispositions de la loi.

II.   les principaux apports de la commission

1.   Préciser la portée de l’article 1er

La Commission a précisé, à l’article 1er, que la contribution des personnels de la communauté éducative au lien de confiance devant unir les élèves et leurs familles au service public de l’éducation s’entend dans le respect de la loi n° 83-364 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

2.   Clarifier les modalités de l’obligation d’instruction à trois ans

La Commission a modifié l’article 2 afin de préciser que l’obligation d’instruction concerne les enfants de tout sexe, français et étrangers.

Elle a également modifié l’article 4 pour prévoir que les ressources supplémentaires qui seront attribuées par l’État aux communes en raison de l’instauration d’une obligation d’instruction à trois ans le seront de manière pérenne.

Enfin, elle a adopté un article 4 bis prévoyant que l’instruction obligatoire peut, au cours des années scolaires 2019-2020 et 2020-2021, être donnée aux enfants âgés de trois à six ans dans un établissement d’accueil collectif recevant exclusivement des enfants âgés de plus de deux ans dit « jardin d’enfants ».

3.   Améliorer l’encadrement de l’instruction en famille

La Commission a modifié l’article 5 pour prévoir que le contrôle de l’instruction en famille par les services de l’Éducation nationale est adapté aux besoins de l’enfant présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant. Elle a également adopté un article 5 bis prévoyant que le maire peut saisir le procureur de la République en cas d’infraction aux règles encadrant l’instruction en famille.

4.   Changer de point de vue pour l’inclusion des personnes en situation de handicap et des élèves à besoins éducatifs particuliers

Dans l’article 1er bis, la commission a remplacé, dans le contenu de l’enseignement moral et civique, la notion d’intégration des personnes en situation de handicap par celle de leur inclusion. En effet, c’est à la société de s’adapter pour que les personnes en situation de handicap aient accès à tous les champs de la vie sociale (santé, éducation, emploi, équipement, aménagement, transports, culture…). Dans le même esprit, la commission a adopté l’article 5 ter qui substitue, dans l’ensemble du code de l’éducation, l’expression d’élève « en situation de handicap » à celle d’élève handicapé. Le fait d’être « en situation de handicap » ne se rattache pas à une personne de façon définitive et traduit le fait que le handicap peut-être temporaire ou bien relatif à une situation donnée.

S’agissant des besoins éducatifs particuliers auxquels l’école doit aussi s’adapter, l’article 5 quater remplace la notion de précocité intellectuelle par celle de « haut potentiel ».

5.   Favoriser l’ouverture des établissements publics locaux d’enseignement international

La Commission a modifié l’article 6 afin de prévoir que les établissements publics locaux d’enseignement international (EPLEI) créés à cet article font partie de ceux scolarisant les enfants et adolescents présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant, si nécessaire au sein de dispositifs adaptés, lorsque ce mode de scolarisation répond aux besoins des élèves, et que le recteur veille à la mixité sociale au sein des EPLEI lorsqu’il décide de l’affectation des élèves en leur sein.

6.   Permettre la création d’établissements publics des savoirs fondamentaux

La commission a adopté un amendement créant un nouveau type d’établissement public local d’enseignement (article 6 quater). Il s’agit de permettre le regroupement d’écoles avec un collège au sein d’un même établissement public local d’enseignement, à l’initiative des collectivités territoriales de rattachement de ces écoles et de ce collège. Ce type d’établissement, qui peut être organisé avec plusieurs sites en réseau, se nommerait « établissement public des savoirs fondamentaux », traduisant le fait qu’y seraient proposés tous les niveaux de la scolarité obligatoire et donc des savoirs fondamentaux, de la petite section à la troisième.

7.   Compléter le champ des expérimentations dans deux domaines

La commission a modifié l’article 8 pour élargir le champ des expérimentations à deux nouveaux sujets :

– la liaison entre les différents niveaux d’enseignements, pour limiter les ruptures dans la scolarité des élèves, que ce soit à l’entrée à l’école primaire, au collège ou au lycée, et assurer un continuum ;

– la participation des parents d’élèves à la vie de l’établissement, pour favoriser toutes les initiatives permettant de favoriser un tel lien.

La commission a également modifié l’article 8 pour prévoir une concertation préalable avec les équipes pédagogiques avant la mise en œuvre d’une expérimentation, afin d’assurer que ces expérimentations recueillent l’adhésion des personnels concernés – c’est-à-dire, généralement, les enseignants.

8.   Étendre les compétences du Conseil d’évaluation de l’école et modifier sa composition

La commission a modifié l’article 9 pour étendre les compétences du CEE, tout d’abord afin de mieux prendre en compte les enjeux de l’école inclusive : il est précisé que parmi les dispositifs éducatifs pour lesquels le CEE veille à la cohérence des évaluations conduites par le ministère, figurent ceux en faveur de l’école inclusive ; par ailleurs, le CEE est chargé de veiller à ce que les évaluations qui sont conduites par le ministère fassent l’objet d’adaptations pour les élèves en situation de handicap.

S’agissant de l’évaluation des établissements, le rôle méthodologique du CEE est élargi aux outils utilisés pour les autoévaluations qui seront conduites par les établissements eux-mêmes, en amont des évaluations externes. Enfin, le CEE se voit confier la mission de définir des méthodologies de mesure des inégalités territoriales scolaires.

La commission a également modifié la composition du CEE, en portant de quatre à six le nombre de personnalités nommées pour leurs compétences par le ministre de l’éducation nationale, tout en précisant que les parlementaires membres du CEE sont désignés par les commissions permanentes compétentes des deux assemblées.

La commission a par ailleurs adopté un amendement créant un article 9 bis, qui introduit dans l’évaluation des élèves la valorisation de la progression dans l’acquisition des compétences, aussi bien dans l’enseignement primaire que secondaire, afin de favoriser une évaluation formative et positive.


([1]) Loi  2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.  

([2]) La réorganisation territoriale des services déconcentrés des ministères de léducation nationale et de lenseignement supérieur, de la recherche et de linnovation, rapport n° 2018-029 établi par MM. François Weil et Olivier Dugrip, Mme Marie-Pierre Luigi et M. Alain Perritaz, mars 2018.