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N° 2101

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 juillet 2019

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION
ET DE LADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE LOI,
APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE,

visant à homologuer des peines demprisonnement prévues en
Nouvelle-Calédonie ( 1959)

PAR M. Philippe DUNOYER

Député

——

 

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1959.


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SOMMAIRE

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Pages

AVANT-PROPOS............................................ 5

Commentaire des articles DE la proposition de loi

Article 1er Homologation de peines demprisonnement  prévues par le congrès de la Nouvelle-Calédonie

Article 2 Homologation de peines demprisonnement  prévues par la province Sud de la Nouvelle-Calédonie

Article 3 Homologation de peines demprisonnement prévues par la  loi du pays n° 20191 du 14 janvier 2019

Article 4 Homologation de la peine demprisonnement prévue par la  loi du pays n° 2019-9 du 2 avril 2019

Compte rendu des débats


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Mesdames, Messieurs,

La Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, collectivités d’outre-mer disposant d’une large autonomie interne dans le cadre des articles 74 et 76 de la Constitution, ont la possibilité de créer des infractions pénales et de les assortir de sanctions. Si elles sont pleinement compétentes en matière d’amendes et de peines complémentaires, les lois statutaires soumettent toutefois les peines d’emprisonnement à une homologation du Parlement.

Comme l’indiquait le rapporteur de l’Assemblée nationale dans son rapport sur la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, « il faut rappeler que lÉtat reste compétent en matière de droit pénal. Dès lors, il paraît légitime de maintenir lhomologation des dispositions de lois du pays qui prévoiraient des peines privatives de liberté, lesquelles ne relèvent pas des compétences propres reconnues à la Nouvelle-Calédonie » ([1]).

S’il est légitime que l’Assemblée nationale et le Sénat viennent homologuer les décisions des assemblées calédoniennes, les conditions dans lesquelles le Parlement se prononce sont, en revanche, peu satisfaisantes. Ainsi que le souligne l’exposé des motifs de la présente proposition de loi, « le plus souvent, lhomologation par le Parlement des peines créées par les assemblées délibérantes ultramarines est obtenue par voie damendement ou intégrée dans des projets de loi relatifs aux outre-mer ». C’est ainsi que, pour ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie, l’homologation de peines la plus récente découle d’un amendement présenté par notre collègue Philippe Gomès lors de l’examen en séance publique par l’Assemblée nationale, seconde chambre saisie, de la loi n° 2015‑1268 du 14 octobre 2015 d’actualisation du droit des outre-mer.

La rareté des véhicules législatifs permettant au Parlement de se prononcer a pour effet d’allonger les délais d’homologation. Or, en l’absence d’homologation des peines d’emprisonnement, les juridictions pénales ne peuvent les prononcer, maintenant en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française « un régime de sanctions anormalement léger » dénoncé par les rapporteurs successifs appelés à examiner des dispositions en ce sens ([2]).

La présente proposition de loi, déposée par votre rapporteur le 22 mai 2019, doit permettre de rattraper le retard accumulé depuis près de quatre ans pour l’homologation des peines prévues par la Nouvelle-Calédonie. À titre d’exemple, elle autorisera enfin les juridictions à prononcer les peines d’emprisonnement qui répriment le harcèlement sexuel et le harcèlement moral en Nouvelle-Calédonie, en attente d’homologation depuis 2014.

À la demande de la présidente de la commission des Lois, la Conférence des Présidents a décidé que l’examen de cette proposition de loi s’opèrerait selon la procédure d’examen simplifiée ([3]). Le dispositif qu’elle comporte est en effet circonscrit et son entrée en vigueur dans les meilleurs délais serait utile au droit calédonien.

Dans le même temps, la décision du Gouvernement d’engager la procédure accélérée, le 6 juin 2019, et d’inscrire ce texte à l’ordre du jour de la session extraordinaire constitue un signe positif dans la direction d’une institutionnalisation, à terme, d’un rendez-vous régulier en ce sens à l’Assemblée nationale et au Sénat.

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*     *

 

 


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   Commentaire des articles DE la proposition de loi

Article 1er
Homologation de peines demprisonnement
prévues par le congrès de la Nouvelle-Calédonie

Adopté par la Commission sans modification

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 1er de la proposition de loi procède à l’homologation de peines d’emprisonnement prévues par diverses lois de pays et délibérations du congrès de la Nouvelle-Calédonie, conformément à l’article 87 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

  Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d’actualisation du droit des outre-mer a procédé à l’homologation de diverses peines d’emprisonnement prévues par des lois du pays et par le code de l’environnement de la province Sud.

  Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté l’article 1er sans modification.

1.   L’état du droit

L’article 87 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie permet au congrès d’assortir les infractions à la réglementation qu’il édicte, qu’il s’agisse de lois du pays ou de règlements, de peines d’emprisonnement. L’article 157 du même texte confère une prérogative similaire aux assemblées des provinces ([4]).

Toutefois, l’application de ces peines est subordonnée à leur homologation par le Parlement. À défaut, les infractions visées ne donnent pas lieu au prononcé des peines d’emprisonnement, mais seulement des peines d’amende et des peines complémentaires prévues par la réglementation locale. Ce mécanisme a été déclaré conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel ([5]).

Saisi d’un article d’homologation, il revient au Parlement de s’assurer que les peines d’emprisonnement édictées localement respectent pleinement les trois règles organiques et constitutionnelles qui régissent leur homologation au niveau national :

– en premier lieu, l’édiction de peines d’emprisonnement par les autorités de la Nouvelle-Calédonie peut seulement intervenir dans un domaine relevant du champ de compétences du territoire ;

– en deuxième lieu, le quantum de la peine d’emprisonnement ne doit pas excéder celui prévu pour une infraction de même nature dans le droit commun ;

 – en dernier lieu, la classification des délits doit être respectée, une infraction ne pouvant localement être érigée en délit si elle relève du champ contraventionnel en droit commun.

Le Parlement dispose, en outre, du pouvoir d’apprécier lopportunité de cette sanction pénale. En revanche, il ne lui est possible que d’accepter ou de refuser l’homologation ; aucune modulation n’est envisageable.

2.   Les dispositions de la proposition de loi

L’article unique procède à l’homologation des peines d’emprisonnement prévues en référence à un grand nombre d’infractions.

Votre rapporteur s’est attaché à vérifier le respect des critères organiques et constitutionnels. À cette fin, il a établi un tableau de correspondance entre les infractions calédoniennes et leurs équivalents de droit commun. Il apparaît que les instances calédoniennes ont prévu des quantums de peine strictement équivalents à ceux des infractions réprimées en droit commun.

En revanche, une disposition édictée par la Nouvelle-Calédonie parmi les lois de pays concernées ne figure pas parmi celles que la présente proposition de loi soumet à l’homologation de l’Assemblée nationale. Il s’agit de l’article Lp. 5321‑1 de l’ancien code de la santé publique applicable en Nouvelle-Calédonie, conçu comme la transposition de l’article L. 5421‑1 du code de la santé publique. Si les deux infractions répriment d’un an d’emprisonnement la violation des bonnes pratiques en matière de commerce de médicaments, la législation nationale conditionne cette peine à l’existence d’un risque grave pour la santé publique, quand la rédaction calédonienne permettrait d’appliquer une telle sanction à de simples manquements administratifs.

Correspondance entre le droit calédonien et le droit commun

Nouvelle-Calédonie

Droit commun

Référence

Peine

Référence

Peine

Code agricole et pastoral de Nouvelle-Calédonie (lois du pays n° 201611 du 7 juillet 2016 et n° 2017-12 du 23 août 2017)

Code rural et de la pêche maritime

Lp. 243-5

2 ans

L. 243‑4

2 ans

Lp. 445

2 ans

L. 411-74

2 ans

 Code des assurances applicable en Nouvelle-Calédonie (loi du pays n° 20168 du 3 mai 2016)

Code des assurances

Lp. 325-2

3 ans

L. 310‑27

3 ans

Lp. 325-3

1 an

L. 310‑28

1 an

Lp. 331-22

3 ans

L. 328‑1

3 ans

Lp. 514-1

2 ans

L. 514‑1

2 ans

Lp. 514-2

6 mois

L. 514‑2

6 mois

Ancien code de la santé publique applicable en Nouvelle-Calédonie (loi du pays n° 201710 du 20 avril 2017)

Code de la santé publique

Lp. 5321-2

5 ans

L. 5421-2

5 ans

Lp. 5321-3

2 ans

L. 5421-3

2 ans

Lp. 5321-4

2 ans

L. 5421-6-1

2 ans

Lp. 5321-5

2 ans

L. 5421-6-2

2 ans

Lp. 5321-8

2 et 5 ans

L. 5421-9

2 et 5 ans

Lp. 5322-1

5 et 7 ans

L. 5438-4

5 et 7 ans

Lp. 5322-2

3 et 5 ans

L. 5438-5

3 et 5 ans

Lp. 5322-3

5 et 7 ans

L. 5438-6

5 et 7 ans

Lp. 5323-1

2 ans

L. 5451-1

2 ans

Lp. 5324-1

1 an

L. 5422-3

1 an

Lp. 5324-2

1 an

L. 5422-5

1 an

Lp. 5324-3

1 an

L. 5422-6

1 an

Lp. 5324-4

1 an

L. 5422-8

1 an

Lp. 5324-5

2 ans

L. 5422-9

2 ans

Lp. 5324-6

1 an

L. 5422-12

1 an

Lp. 5325-1

2 ans

L. 5423-1

2 ans

Lp. 5325-2

1 an

L. 5423-2

1 an

Lp. 5325-3

2 ans

L. 5423-3

2 ans

Lp. 5326-1

1 an

L. 5424-1

1 an

Lp. 5326-5

2 ans

L. 5424-6

2 ans

Lp. 5326-6

1 an

L. 5424-7

1 an

Lp. 5326-7

2 ans

L. 5424-10

2 ans

Lp. 5327-1

2 ans

L. 5425-1

2 ans

Lp. 5331-1

2 ans

L. 5431-2 (1°)

2 ans

Lp. 5331-4

1 an

L. 5431-6

1 an

Lp. 5331-6

2 ans

L. 5431-8

2 ans

Lp. 5331-7

1 an

L. 5431-9

1 an

Lp. 5332-1

5 et 7 ans

L. 5432-1

5 et 7 ans

Lp. 5332-2

5 et 7 ans

L. 5432-2

5 et 7 ans

Lp. 5332-3

5 et 7 ans

L. 5432-3

5 et 7 ans

Lp. 5333-1

1 an

L. 5434-1

1 an

Lp. 5333-2

6 mois

L. 5434-2

6 mois

Lp. 5334-1

2 ans

L. 5435-1

2 ans

Lp. 5335-1

2 ans

L. 5437-2

2 ans

Lp. 5342-1

2 ans

L. 5461-2

2 ans

Lp. 5342-2

5 et 7 ans

L. 5461-3

5 et 7 ans

Lp. 5342-4

1 an

L. 5461-4-1

1 an

Lp. 5342-5

2 ans

L. 5461-5

2 ans

Lp. 5342-6

1 an

L. 5461-6

1 an

Lp. 5343-1

2 ans

L. 5462-2

2 ans

Lp. 5343-2

2 ans

L. 5462-2-1

2 ans

Lp. 5343-3

5 et 7 ans

L. 5462-3

5 et 7 ans

Lp. 5343-4

1 an

L. 5462-4

1 an

Lp. 5343-5

1 an

L. 5462-5

1 an

Lp. 5344-1

2 ans

L. 5463-2

2 ans

Code de travail de la Nouvelle-Calédonie (lois du pays n° 20144 du 12 février 2014 et n° 2017-7 du 21 mars 2017)

Code pénal et code du travail

Lp. 116-2

2 ans

Art. 222-33-2 CP

2 ans

Lp. 116-3

2 et 3 ans

Art. 222-33 CP

2 et 3 ans

Lp. 544-25

5 ans

L. 6355-24 CT

5 ans

Lp. 545-31

2 ans

L. 6355‑23 CT

2 ans

Délibération n° 219 du 11 janvier 2017

relative à lamélioration de la qualité de lair ambiant

Code de lenvironnement

Art. 26

2 ans

L. 226‑9

2 ans

 Délibération n° 118/CP du 26 novembre 2018 portant réglementation des manifestations sportives terrestres

Code du sport

Art. 44

6 mois

L. 331‑12

6 mois

Loi du pays n° 2018-25 du 26 décembre 2018
relative à lefficacité énergétique des équipements, à linterdiction dimportation déquipements contenant des substances appauvrissant la couche dozone et à linterdiction dimportation des ampoules à incandescence ou à halogènes

Code de lénergie

Art. 17

6 mois

L. 135‑14

6 mois

Source : commission des Lois de l’Assemblée nationale.

3.   La position de la Commission

La Commission a adopté l’article 1er sans modification.

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*     *

Article 2
Homologation de peines demprisonnement
prévues par la province Sud de la Nouvelle-Calédonie

Introduit par la Commission

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 2 de la proposition de loi procède à l’homologation de peines d’emprisonnement prévues par la province Sud de la Nouvelle-Calédonie, conformément aux articles 87 et 157 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

  Modifications apportées par la Commission

L’article 2 résulte d’un amendement du rapporteur adopté par la commission des Lois.

Votre rapporteur a souhaité profiter de l’opportunité offerte par la présente proposition de loi pour solliciter les trois provinces de la Nouvelle-Calédonie quant aux peines d’emprisonnement qu’elles ont prévues et qui restent à soumettre à l’homologation du législateur. Les délais contraints dans lesquels se sont tenus les échanges n’ont permis de proposer d’homologuer que certaines dispositions propres à la province Sud ([6]).

Tel est l’objet de l’article 2, issu de l’adoption par votre Commission d’un amendement de votre rapporteur.

Comme à l’article précédent, votre rapporteur a établi un tableau de correspondance entre les infractions de la province Sud et leurs équivalents de droit commun.

Correspondance entre le droit de la province Sud et le droit commun

Province Sud

Droit commun

Référence

Peine

Référence

Peine

 Code de lurbanisme de la Nouvelle-Calédonie 

Code de lurbanisme

PS 221-66

6 mois

L. 480-4

6 mois

 Code de lenvironnement de la province Sud 

Code rural et de la pêche maritime, code de lenvironnement

Art. 341-41

6 mois

L. 945-3 CRPM

6 mois

Art. 416-16

6 mois

L. 173-4 CE

6 mois

Art. 424-9

2 et 7 ans

L. 541-46 CE
L. 173-4 CE

2 et 7 ans

6 mois

Source : commission des Lois de l’Assemblée nationale.

Pour les infractions concernées, la province Sud a prévu des quantums de peine strictement équivalents à ceux des infractions réprimées en droit commun. Leur définition est presque toujours apparue très proche de celle retenue par le législateur national, de sorte que lhomologation puisse être délivrée sans difficulté.

Toutefois, l’infraction prévue au 8° du I de l’article 424-9 du code de l’environnement de la province Sud (« mettre obstacle à laccomplissement des contrôles ou à lexercice des fonctions des fonctionnaires et agents assermentés et de tous autres agents habilités à rechercher et à constater les infractions au présent titre »), punie d’une peine de deux ans demprisonnement, ne remplit pas les conditions d’homologation posées par la loi organique statutaire. En effet, la disposition de l’article L. 541‑46 du code de l’environnement auquel elle fait écho, qui prévoyait l’infraction d’obstacle à fonction, a été abrogée en 2013 ([7]). Il convient dès lors de se rapporter à l’incrimination générale prévue à l’article L. 173-4 du code de l’environnement, qui est sanctionnée d’une peine de six mois demprisonnement seulement ([8]).

En conséquence de cette divergence entre les quantums de peine d’emprisonnement prévus par la province Sud et par le droit national en répression des mêmes faits, la Commission a estimé contraire à la loi organique l’homologation du 8° du I de l’article 424-9 du code de l’environnement de la province Sud. Elle s’est bornée à homologuer les peines d’emprisonnement prévues, audit article, aux 1° à 7° et au 9° du I ainsi qu’au V.

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Article 3
Homologation de peines demprisonnement prévues par la
loi du pays n° 20191 du 14 janvier 2019

Introduit par la Commission

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 3 de la proposition de loi procède à l’homologation de peines d’emprisonnement prévues par la loi du pays n° 2019‑1 du 14 janvier 2019, conformément à l’article 87 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

  Modifications apportées par la Commission

L’article 3 résulte d’un amendement du rapporteur adopté par la commission des Lois.

Le présent article, issu de l’adoption par votre Commission d’un amendement du rapporteur, procède à l’homologation de peines d’emprisonnement prévues par la loi du pays n° 2019‑1 du 14 janvier 2019 modifiant le livre IV de la partie législative de l’ancien code de la santé publique applicable en Nouvelle-Calédonie (professions de santé). Ce texte, publié postérieurement à la rédaction de la présente proposition de loi, comporte diverses dispositions pénales réprimées d’une peine d’emprisonnement dont l’homologation est souhaitable dans les meilleurs délais.

Votre rapporteur, comme aux articles précédents, a établi un tableau de correspondance entre les infractions prévues par ladite loi du pays et leurs équivalents de droit commun.

Correspondance entre les peines instituées par la loi du pays n° 2019‑1 du 14 janvier 2019 et le droit commun

Province Sud

Droit commun

Référence

Peine

Référence

Peine

Ancien code de la santé publique applicable en Nouvelle-Calédonie (loi du pays  20191 du 14 janvier 2019)

Code de la santé publique

Lp. 4212-2

3 mois

L. 4212-8

3 mois

Lp. 4223-1

2 ans

L. 4223-1

2 ans

Lp. 4243-3

1 an

L. 4243-3

1 an

Lp. 4423-1

2 ans

L. 4314-4

2 ans

Lp. 4423-5

6 mois

L. 4163-4

6 mois

Lp. 4484-1

1 an

L. 4363-2

1 an

Lp. 4493-1

1 an

L. 4372-1

1 an

Source : commission des Lois de l’Assemblée nationale.

Votre rapporteur n’a relevé aucune divergence entre le droit commun et la loi du pays précitée, qu’il s’agisse des peines d’emprisonnement prévues ou de la définition des infractions ainsi réprimées. Rien ne s’oppose donc à leur homologation.

Considérant que l’article 10 de la loi du pays précitée prévoit son entrée en vigueur au plus tard au 1er septembre 2019, la Commission a prévu que l’homologation prenne effet à cette date.

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Article 4
Homologation de la peine demprisonnement prévue par la
loi du pays n° 2019-9 du 2 avril 2019

Introduit par la Commission

  Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 4 de la proposition de loi procède à l’homologation de la peine d’emprisonnement prévue par la loi du pays n° 2019‑9 du 2 avril 2019, conformément à l’article 87 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

  Modifications apportées par la Commission

L’article 4 résulte d’un amendement du rapporteur adopté par la commission des Lois.

Le présent article, issu de l’adoption par votre Commission d’un amendement du rapporteur, procède à l’homologation de peines d’emprisonnement prévues par la loi du pays n° 2019-9 du 2 avril 2019 relative à la réglementation des établissements d’accueil petite enfance et périscolaire. Ce texte, publié postérieurement à la rédaction de la présente proposition de loi, comporte une disposition pénale réprimée d’une peine d’emprisonnement dont l’homologation est souhaitable dans les meilleurs délais.

L’article 8 de la loi du pays précitée punit de trois mois d’emprisonnement la création, l’extension ou la transformation d’un établissement d’accueil des enfants de moins de six ans sans autorisation administrative. Une infraction similaire est prévue en droit national, aux articles L. 2326‑4 du code de la santé publique et L. 214‑1 du code de l’action sociale et des familles, qui la répriment également d’un emprisonnement d’une durée de trois mois.

Considérant que l’article 15 de la loi du pays précitée prévoit son entrée en vigueur au 1er janvier 2020, la Commission a prévu que l’homologation prenne effet à cette date.

 

 

 


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   Compte rendu des débats

Lors de sa réunion du mercredi 3 juillet 2019, la Commission examine la proposition de loi visant à homologuer des peines demprisonnement prévues en Nouvelle-Calédonie (n° 1959) (M. Philippe Dunoyer, rapporteur).

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7910686_5d1c57779b2b5.commission-des-lois--peines-d-emprisonnement-en-nouvelle-caledonie--organisation-des-communes-nouv-3-juillet-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous sommes réunis ce matin pour examiner une proposition de loi visant à homologuer des peines d’emprisonnement prévues en Nouvelle-Calédonie ; son rapporteur est M. Philippe Dunoyer. Je vous rappelle que cette proposition de loi fait l’objet d’une procédure d’examen simplifiée.

M. Philippe Dunoyer, rapporteur. Sous des dehors techniques, la proposition de loi que je vous présente est un texte essentiel pour le droit calédonien. Il fait application d’une procédure commune à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie : la procédure d’homologation des peines d’emprisonnement.

En Nouvelle-Calédonie, le congrès et les trois assemblées provinciales peuvent créer des infractions pénales dans les domaines de compétences qui leur sont propres et les assortir de sanctions, cette capacité qui leur est accordée étant encadrée par la loi organique statutaire du 19 mars 1999. Cependant, si ces institutions sont pleinement compétentes pour instaurer des amendes et des peines complémentaires, toute peine d’emprisonnement requiert une homologation législative. Cette procédure se situe à la croisée, en quelque sorte, des compétences propres des institutions calédoniennes et de la prérogative régalienne en matière de justice pénale. Validée par le Conseil constitutionnel dans une décision du 28 juillet 2011, elle est nécessaire pour que les peines d’emprisonnement puissent être prononcées valablement par les juridictions répressives.

Notre proposition de loi concerne une cinquantaine de peines – donc d’infractions adoptées par la Nouvelle-Calédonie – qui, en l’état, ne sont pas effectives.

Pendant plusieurs mois, nous avons travaillé en lien étroit avec la Chancellerie afin de comparer les infractions calédoniennes avec celles qui existent dans le droit commun, afin de vérifier la satisfaction des trois conditions fixées par la loi organique. Il faut d’abord que nous soyons bien dans des domaines de compétence des institutions calédoniennes. Ensuite, la classification des délits doit être respectée. Enfin, ce qui est le plus compliqué peut-être, le quantum de la peine ne doit pas excéder celui qui est prévu pour une infraction de même nature dans le droit commun. Ces vérifications ont été réalisées avec le concours du ministère de la justice. Toutes les homologations peuvent donc être délivrées.

Si, comme je le signalais, cette proposition de loi est essentielle pour le droit calédonien, c’est qu’au-delà de la cinquantaine de peines en attente, il s’est déjà écoulé cinq ans depuis la plus ancienne de ces demandes d’homologation, émise par le congrès en 2014. Ce sont cinq années au cours desquelles cette peine d’emprisonnement n’est pas entrée dans le droit positif, n’a pas pu être appliquée par les juridictions. Ainsi, le harcèlement moral et sexuel au travail, passible en principe de peines d’emprisonnement prévues depuis février 2014, ne peut-il être réprimé, faute d’homologation. Il en va de même d’autres délits dans les domaines de la santé, des assurances et de l’environnement. Il y a donc urgence.

Je voudrais, pour conclure, me tourner vers l’avenir. Notre pratique de l’homologation n’est pas satisfaisante. Elle emprunte souvent des chemins de traverse, passant par des amendements présentés sur des projets de loi portant sur l’outre-mer, mais dont ce n’est pas l’objet. Il serait préférable, pour la Nouvelle-Calédonie et pour la Polynésie française, que nous puissions instaurer un rendez-vous annuel qui nous permettrait d’homologuer avec régularité ces dispositions pénales.

Je voudrais vous remercier, madame la présidente, d’avoir pris l’initiative d’engager pour cette proposition de loi la procédure d’examen simplifiée. Je crois que votre souhait d’aller au plus vite est partagé par votre homologue du Sénat, le président Philippe Bas. Je remercie également le Gouvernement d’avoir compris l’importance de ce texte en l’inscrivant à l’ordre du jour de la session extraordinaire et en engageant la procédure accélérée.

L’attente fut longue. Mais elle va être prochainement satisfaite, au terme de nos débats qui seront, je l’espère, consensuels.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mme Maina Sage m’avait précédemment fait part des rares opportunités de légiférer sur les sujets relatifs aux outre-mer, ce dont souffrent les territoires. Il me semble donc que la procédure d’examen simplifiée est parfaitement adaptée. Je souscris tout à fait à l’idée d’un rendez-vous régulier pour procéder à ce type d’examen.

Mme Catherine Kamowski. Nous pouvons nous féliciter de ce travail parlementaire et de l’examen de cette proposition de loi en procédure simplifiée, ce qui n’est pas si fréquent. C’est l’occasion pour moi d’appeler l’ensemble de nos collègues à une réflexion collective sur le contenu et le sens que nous voulons donner à notre activité législative, mais ce n’est pas le sujet du jour.

Ce qui nous intéresse aujourd’hui, c’est la mise en œuvre concrète du principe de différenciation. Il existe déjà dans notre Constitution, principalement pour les territoires, départements et collectivités d’outre-mer. Nous souhaitons son élargissement à l’ensemble du territoire de la République.

Il s’agit donc d’homologuer les normes définies en Nouvelle-Calédonie pour les rendre applicables. Notre intervention est nécessaire pour leur donner force de loi, et assurer ainsi l’unité dans la diversité de la République. Cette proposition de loi vient confirmer que la Nouvelle-Calédonie en est une composante reconnue et respectée.

Je tiens à saluer le travail du rapporteur. Nous partageons votre souhait d’un rendez-vous législatif annuel consacré aux outre-mer, afin que le Parlement soit en mesure de répondre aux demandes formulées par les territoires pour assumer convenablement les compétences qui leur ont été confiées, une partie de la réponse résidant sans doute dans un meilleur usage de notre temps en séance publique.

Sur le fond, cette proposition de loi est simple, claire et technique. Elle contient des dispositions attendues, pour certaines depuis 2014, sur des sujets importants. Elle respecte pleinement les règles organiques. Nous la soutiendrons donc pleinement.

M. Philippe Latombe. Le groupe MODEM soutient également cette proposition de loi qui répond à un besoin de la Nouvelle-Calédonie. En effet, depuis la loi organique du 19 mars 1999, les institutions calédoniennes peuvent assortir les infractions qu’elles créent de peines d’emprisonnement dans des matières qui relèvent de leur compétence. Cette possibilité est soumise à une double condition : que les peines respectent la classification des délits et qu’elles n’excèdent pas le maximum prévu pour les infractions de même nature en droit commun.

Le texte dont nous sommes saisis respecte ces conditions. L’homologation que nous nous apprêtons à voter donnera plein effet aux dispositions pénales adoptées en Nouvelle-Calédonie, dans des matières très variées et relevant de sa compétence.

Par ailleurs, le groupe MODEM est favorable à ce que ce type de véhicule législatif soit mis en place régulièrement afin d’assurer une homologation rapide, lorsque ces dispositions n’ont pas pu être insérées dans d’autres textes relatifs aux territoires concernés.

Nous voterons donc, bien évidemment, cette proposition de loi.

Mme George Pau-Langevin. Cette proposition de loi devrait être adoptée de manière consensuelle. Elle nous rappelle les compétences qui sont celles de la Nouvelle-Calédonie pour édicter des peines d’emprisonnement dans les domaines qui relèvent de sa compétence, sous réserve de respecter la classification des délits et de ne pas excéder le maximum prévu pour les infractions de même nature par les lois de la République.

Si l’examen de ce texte témoigne de l’importance des transferts de compétences au profit de la Nouvelle-Calédonie – ce qui est plutôt une bonne chose –, il démontre aussi que notre procédure d’homologation n’est pas totalement satisfaisante puisqu’elle n’intervient que de manière assez irrégulière. Nous voterons donc ce texte, tout en considérant qu’il serait bon de réfléchir à une procédure plus adaptée – par exemple une « loi-balai » qui permette chaque année d’homologuer les dispositions en attente de l’être.

M. Philippe Dunoyer, rapporteur. Je remercie l’ensemble des intervenants. L’importance de ce texte a été bien comprise.

La Commission en vient à l’examen de l’article unique de la proposition de loi.

Article unique : Homologation de peines d’emprisonnement prévues en Nouvelle-Calédonie

La Commission adopte l’article unique sans modification.

Après l’article unique

La Commission examine, en présentation commune, les amendements CL2, CL3 et CL4 du rapporteur.

M. Philippe Dunoyer, rapporteur. Nous complétons par ces amendements la liste des homologations nécessaires. Par ailleurs, ils précisent, pour deux d’entre eux, la date d’entrée en vigueur des dispositions adoptées.

La Commission adopte successivement les amendements.

Les articles 2, 3 et 4 sont ainsi rédigés.

La Commission en vient à l’amendement CL1 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Si nous pensons que cette proposition de loi va dans le bon sens, nous souhaitons attirer l’attention sur les conditions de détention et l’état des prisons en Nouvelle-Calédonie.

En 2015, la Ligue des droits de l’homme de Nouvelle-Calédonie alertait sur la situation sanitaire et sociale des détenus de l’unique prison du territoire, Camp-Est, située sur une presqu’île, surnommée à juste titre « l’île de l’oubli ». Les sous-effectifs dans l’équipe soignante menacent la santé des détenus. La pénurie de psychiatres empêche le développement des aménagements de peine.

Pourtant, en 2011, une procédure d’urgence du contrôleur général des lieux de privation de liberté avait été enclenchée. Le tableau brossé était peu glorieux : il était question de bagne post-colonial, de violation grave des droits fondamentaux, de cellules surpeuplées, d’insalubrité, de détournement de WC à la turque pour se laver…

La mission dite « Imbert-Quaretta », mandatée en 2012 par la Chancellerie, soulignait un taux d’incarcération près de deux fois plus élevé que sur l’ensemble du territoire français et le fait que les jeunes Kanak représentaient plus de 90 % des personnes détenues au Camp-Est.

C’est pourquoi nous demandons au Gouvernement un rapport établissant l’état actuel de la politique pénale, des conditions d’incarcération et des politiques de développement des peines alternatives et d’aménagement des peines en Nouvelle-Calédonie.

M. Philippe Dunoyer, rapporteur. Ce sujet, très important en effet, a fait l’objet de plusieurs rapports ces dix dernières années. Les conditions de détention au Camp-Est sont objectivement critiquables – c’est un euphémisme –, même si quelques progrès ont été accomplis dans les conditions de détention.

Cela étant, cette proposition de loi ne me paraît pas le véhicule approprié pour ce type de démarche : même si elle porte sur des peines d’emprisonnement, elle n’a pour seul objet que leur homologation.

Enfin, je rappelle que nous disposons déjà d’un rapport de très grande qualité sur la détention, remis l’an dernier par notre présidente, par Mme Laurence Vichnievsky et par MM. Philippe Gosselin et Stéphane Mazars. Il dressait un état des lieux assez complet.

Mme George Pau-Langevin. Notre collègue a raison de souligner les dysfonctionnements qui existent, notamment l’état déplorable de Camp-Est et la surreprésentation des jeunes Kanak parmi les détenus. Mme Christiane Taubira, alors garde des Sceaux, avait pris des mesures pour endiguer le phénomène. Mais je pense, en effet, que cette question n’a pas vocation à être abordée dans cette proposition de loi.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

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En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de ladministration générale de la République vous demande dadopter la proposition de loi visant à homologuer des peines demprisonnement prévues en Nouvelle-Calédonie (n° 1959) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.


([1]) Rapport au nom de la commission des Lois de l’Assemblée nationale de M. René Dosière (n° 1275) sur le projet de loi organique relatif à la Nouvelle-Calédonie et le projet de loi relatif à la Nouvelle-Calédonie, 16 décembre 1998.

([2]) Par exemple, avis au nom de la commission des Lois de l’Assemblée nationale de M. Bernard Lesterlin sur le projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives à l’outre-mer, 3 octobre 2012.

([3]) Articles 103 et suivants du règlement de l’Assemblée nationale. Conformément à l’article 103, la commission des Lois a été consultée lors de sa réunion du mercredi 12 juin 2019.

([4]) Le dispositif de l’homologation « met en œuvre les compétences de lÉtat en matière de droit pénal » comme l’a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2011‑637 DC du 28 juillet 2011, Loi organique relative au fonctionnement des institutions de la Polynésie française (cons. n° 23). Parmi les outre-mer, seules en disposent la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française depuis les premières lois statutaires (article 46 de la loi n° 77-772 du 12 juillet 1977 relative à l’organisation de la Polynésie française et article 50 de la loi n° 76-1222 du 28 décembre 1976 relative à l’organisation de la Nouvelle-Calédonie et Dépendances).

([5]) Décision n° 99-410 DC du 15 mars 1999, Loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie. Le Conseil constitutionnel n’a pas consacré de développement particulier à l’article 87 de la loi organique.

([6]) Vœux de l’assemblée de la province Sud sollicitant l’homologation législatives de peines d’emprisonnement n° 4‑2016/APS du 1er avril 2016 et n° 4‑2017/APS du 31 mars 2017.

([7]) Ordonnance n° 2012-34 du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l’environnement, entrée en vigueur le 1er juillet 2013.

([8]) « Le fait de faire obstacle aux fonctions exercées par les fonctionnaires et agents habilités à exercer des missions de contrôle administratif ou de recherche et de constatation des infractions en application du présent code est puni de six mois demprisonnement et de 15 000 euros damende. »