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N° 2340

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 octobre 2019.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de financement de la sécurité sociale pour 2020,

 

 

TOME II

COMMENTAIRES DARTICLES

ET ANNEXES

 

Par MOlivier VÉRAN,

 

Rapporteur général.

 

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro :

 Assemblée nationale :  2296.

 

 

 


 

 

 


–  1  –

SOMMAIRE

___

Pages

commentaires darticles

Première partie : DISPOSITIONS RELATIVES À LEXERCICE 2018

Article 1er Approbation des tableaux déquilibre relatifs à lexercice 2018

Article 2 Approbation du rapport annexé sur le tableau patrimonial et la couverture des déficits de lexercice 2018 (annexe A)

deuxième partie : dispositions relatives à lexercice 2019

Article 3 Correction des affectations de recettes à la sécurité sociale pour lexercice en cours

Article 4 Modification du montant M applicable à la clause de sauvegarde des médicaments remboursables

Article 5 Rectification des prévisions et objectifs relatifs à 2019

Article 6 Rectification de lONDAM et des sous ONDAM 2019

troisième partie : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET à LéQUILIBRE DE LA SéCURITÉ SOCIALE POUR LEXERCICE 2020

titre ier DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET à LA TRéSORERIE

Chapitre Ier Favoriser le soutien à lactivité économique et aux actifs

Article 7 Reconduction du versement dune prime exceptionnelle exonérée de contributions et cotisations sociales

Article 8 Ajustement du calcul des allégements généraux

Article 9 Non-assujettissement aux cotisations et contributions sociales des indemnités spécifiques de rupture conventionnelle dans la fonction publique

Chapitre II Simplifier et moderniser les relations avec ladministration

Article 10 Unification du recouvrement dans la sphère sociale

Article 11 Simplification des démarches des travailleurs indépendants

Article 12 Simplifier et créer un cadre de prise en compte contemporaine des aides en faveur des particuliers employeurs dans le cadre des services à la personne

Article 13 Simplification des démarches pour les redevables et renforcement de la sécurité juridique

Article 14 Mesures de lutte contre la fraude

Chapitre III Réguler le secteur des produits de santé

Article 15 Clause de sauvegarde des dispositifs médicaux

Article 16 Fixation du taux M pour 2020

titre II CONDITIONS GéNéRALES DE LéQUILIBRE FINANCIER DE LA SéCURITE SOCIALE

Article 17 Transfert de recettes entre la sécurité sociale et lÉtat et entre régimes de sécurité sociale

Article 18 Approbation du montant de la compensation des exonérations mentionnées à lannexe 5

Articles 19 et 20 Approbation des tableaux déquilibre de lensemble des régimes obligatoires, du régime général et du FSV pour 2020

Article 21 Approbation de lannexe C, de lobjectif damortissement de la dette sociale et des prévisions de recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites et mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse

Article 22 Habilitation des régimes de base et des organismes concourant à leur financement à recourir à lemprunt

Article 23 Approbation du rapport sur lévolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale (annexe B)

QUATRIÈME PARTIE : DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR LEXERCICE 2020

TITRE IER POURSUIVRE LA TRANSFORMATION DU SYSTÈME DE SOINS

Chapitre Ier Réformer le financement de notre système de santé

Article 24 Réforme du financement des hôpitaux de proximité

Article 25 Réforme du financement de la psychiatrie et évolution du modèle cible de financement des soins de suite et de réadaptation

Article 26 Réforme du ticket modérateur à lhôpital

Article 27 Réforme du financement : nomenclatures de ville

Article 28 Prise en charge des dispositifs médicaux : sécurisation des dépenses, négociation des prix en cas de concurrence

Article 29 Prise en charge de médicaments particuliers

Article 30 Sécurisation et imputation (pluriannuelle) des mesures de paiement des remises ATU/post ATU

Article 31 Transfert du financement de lAgence nationale de sécurité du médicament et de lAgence nationale de santé publique à lassurance maladie

Chapitre 2 Améliorer laccès aux soins

Article 32 Lissage de la fin de droit à la protection complémentaire en matière de santé

Article 33 Prise en charge intégrale des frais liés à la contraception pour lensemble des mineures

Article 34 Renforcement du dispositif en matière de prévention et de lutte contre les ruptures de stock de médicaments

Article 35 Bilan de santé obligatoire pour les entrées dans laide sociale à lenfance

Article 36 Mesures en faveur de linstallation des jeunes médecins

Article 37 Faciliter laccès aux soins pour les femmes enceintes les plus éloignées des maternités

Article 38 Financement par la Caisse nationale de solidarité pour lautonomie des établissements à létranger accueillant des adultes handicapés français

Article 39 Recentralisation des centres de lutte contre la tuberculose et des centres de lutte contre la lèpre

CHAPITRE 3 Renforcer la qualité, la pertinence et lefficience des soins

Article 40 Mise en place dun parcours de soins global après le traitement dun cancer

Article 41 Simplification des règles applicables à la présentation de certificats médicaux dabsence de contre-indication à la pratique sportive

Article 42 Évolution du contrat damélioration de la qualité et de lefficience des soins et adaptation du dispositif de financement à la qualité

Article 43 Favoriser la pertinence des prescriptions de médicaments

Article 44 Mesures diverses pour le secteur des transports de patients et extension des dérogations prévues à larticle 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018

titre II promouvoir la justice sociale

chapitre 1er Protéger les Français contre les nouveaux risques

Article 45 Indemnisation du congé de proche aidant

Article 46 Création dun fonds dindemnisation des victimes de pesticides

Article 47 Élargissement des missions du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés au secteur médico-social pour la modernisation des structures de réadaptation des accidentés de la route

Chapitre II Lutter contre la reproduction des inégalités sociales et territoriales

Article 48 Création du service public de versement des pensions alimentaires

Article 49 Améliorer linformation sur laccès aux modes daccueil des jeunes enfants

Article 50 Mesures de convergence des prestations familiales à Mayotte

Article 51 Faciliter la création de caisses communes de sécurité sociale

Chapitre III Prendre en compte les parcours, les situations et les transitions

Article 52 Revalorisation différenciée des prestations sociales

Article 53 Simplification de la transition vers la retraite des bénéfices de minima sociaux

Article 54 Suppression du dispositif de rachat de rente daccident du travail (AT) ou de maladie professionnelle (MP) et simplification de la notification du taux ATMP aux employeurs

Article 55 Rénovation des politiques dindemnisation de lincapacité de travail de longue durée

Article 56 Assouplissement des conditions de recours au travail aménagé ou à temps partiel et évolution des modalités de versement des indemnités journalières

titre III DOTATIONS ET OBJECTIFS DE DEPENSE DES BRANCHES ET DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES

Article 57 Dotation de lassurance-maladie au Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés, à lOffice national dindemnisation des accidents médicaux, et de la Caisse nationale de solidarité pour lautonomie aux agences régionales de santé

Article 58 Objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès

Article 59 ONDAM et sous-ONDAM

Article 60 Dotations au Fonds dindemnisation des victimes de lamiante et au Fonds de cessation anticipée dactivité des travailleurs de lamiante et transfert au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles

Article 61 Objectifs de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles

Article 62 Objectifs de dépenses de la branche vieillesse

Article 63 Objectif de dépenses de la branche famille

Article 64 Prévision des charges des organismes concourant au financement des régimes obligatoires en 2019

ANNEXES

annexe 1 : Liste des personnes auditionnées par le rapporteur général

ANNEXE N° 2 : Liste des textes susceptibles dêtre abrogés ou modifiés à loccasion de lexamen du projet de loi

ANNEXE N° 3 : Liste des liens vidéos relatifs à lexamen du projet de loi

 


–  1  –

   commentaires d’articles

Première partie :
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2018

Article 1er
Approbation des tableaux déquilibre relatifs à lexercice 2018

Adopté par la commission sans modification

L’article 1er porte approbation des comptes du dernier exercice clos, retracés notamment dans des tableaux d’équilibre consolidés.

L’exercice 2018 se conclut ainsi définitivement par un résultat déficitaire de 1,4 milliard d’euros pour les régimes obligatoires de sécurité sociale, en incluant le Fonds de solidarité vieillesse. Le déficit des seuls régime général et Fonds de solidarité vieillesse est arrêté à 1,2 milliard d’euros.

Ces montants, identiques aux dernières prévisions rectifiées, sont en nette amélioration par rapport à l’exercice 2017 et traduisent un important effort de redressement des comptes sociaux, en recettes comme en dépenses.

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer en loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), en application des dispositions organiques en définissant le contenu.

A du I de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale ([1])

« dans sa partie comprenant les dispositions relatives au dernier exercice clos [c’est-à-dire sa première partie], la loi de financement de la sécurité sociale :

«  Approuve les tableaux déquilibre par branche du dernier exercice clos des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, du régime général et des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que les dépenses relevant du champ de lobjectif national de dépenses dassurance maladie constatées lors de cet exercice ;

«  Approuve, pour ce même exercice, les montants correspondant aux recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de recettes au profit des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et ceux correspondant à lamortissement de leur dette ».

Le Parlement est ainsi mis en mesure par les dispositions organiques de voter l’arrêt des comptes pour le dernier exercice clos, en l’occurrence l’année 2018, dans un exercice qui pourrait être rapproché de l’adoption d’une « loi de règlement ». L’article arrêtant, outre les tableaux d’équilibre, un certain nombre d’autres montants, chaque élément appellera dans le présent commentaire un développement spécifique.

I.   La clôture d’un exercice budgétaire 2018 tout près de l’Équilibre budgétaire

Comme prévu par le législateur organique depuis 2006 ([2]), les tableaux d’équilibre de la loi de financement distinguent désormais la présentation des comptes du régime général et celle de l’ensemble des régimes obligatoires de base, appelant quelques remarques sur la « clef de passage » entre ces deux notions.

Régime général, régimes intégrés et régimes obligatoires de sécurité sociale

Le régime général, pierre angulaire de la sécurité sociale. Régime central créé en 1945, le régime général couvre historiquement tous les employés du secteur privé qui ne relèvent pas d’un régime spécifique.

Au terme d’une longue évolution de sa structure et de ses règles d’affiliation, le régime général est devenu :

– le principal régime de sécurité sociale, couvrant 80 % ([3]) des dépenses de l’ensemble des régimes obligatoires ;

– un régime prépondérant pour la branche « vieillesse » (50 % des dépenses totales de l’ensemble des régimes obligatoires) et « accidents du travail-maladies professionnelles » (AT‑MP) (90 %) ;

– quasiment le seul régime pour les branches « maladie » depuis la mise en place de la protection universelle maladie (PUMA) (99 % des dépenses totales de l’ensemble des régimes obligatoires) ([4]) ;

– le seul régime pour la branche « famille ».

À la fois incontournable par son poids financier et faisant l’objet d’une documentation plus régulière et plus fournie que les autres régimes, le régime général concentre souvent sur lui une grande partie des débats sur les comptes sociaux, bien qu’il ne représente qu’une partie du champ des lois de financement.

Ce statut central conduit le régime général à entretenir de nombreuses relations financières avec les autres régimes obligatoires de base.

Le régime général entretient ainsi d’étroites relations avec les régimes intégrés, par deux principaux types de lien :

– des mécanismes de compensation ([5]) peuvent créer une certaine intégration financière avec les autres régimes de base : la « compensation démographique généralisée » prévue à l’article L. 134-1 du code de la sécurité sociale entraîne une dotation de la branche vieillesse du régime général vers les autres régimes obligatoires intégrés déficitaires tandis que des « compensations spécifiques » prévues aux articles L. 134-3 et suivants couvrent d’autres risques (maladie ou AT-MP) pour des régimes identifiés (notamment le régime des salariés des mines) ;

– l’intégration financière ([6]) des branches maladie et vieillesse d’autres régimes obligatoires (Régime social des indépendants jusqu’en 2018, cultes, régimes agricoles) : les déficits ou excédents de ces régimes sont alors pleinement consolidés avec ceux du régime général.

Le régime général contribue ainsi à la réduction des déficits de nombreux autres régimes, et prend en charge l’intégralité des déficits des régimes financièrement intégrés ([7]).

Le champ des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (ROBSS) constitue quant à lui le plus vaste périmètre puisqu’il couvre l’ensemble des régimes, qu’ils soient financièrement intégrés ou non. Il est défini conformément à l’article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale tous les trois ans par le Gouvernement lui-même par la voie d’une liste transmise au Parlement au moment lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).

À l’aune de la liste transmise à l’occasion du PLFSS pour 2018 ([8]), on comptait encore en 2016 dans le champ des régimes obligatoires de base le régime général, dix-huit régimes spéciaux ([9]), un régime des salariés agricoles et quatre régimes de non-salariés ainsi que des régimes et fonds « fermés » qui n’accueillent plus de nouveaux assurés tout en continuant à distribuer quelques prestations. Certains régimes ne dérogent au régime général que pour une seule branche (vieillesse généralement) ([10]). Depuis la LFSS pour 2018 ([11]), le Régime social des indépendants, qui comptait en 2016 3,5 millions de bénéficiaires, a rejoint le régime général.

Moins scruté que le champ du régime général, notamment en raison des difficultés de consolidation ([12]), le périmètre des ROBSS est pourtant le plus pertinent pour analyser les comptes sociaux, combinant à la fois :

– une plus grande exhaustivité puisqu’il constitue le champ actuel des lois de financement de la sécurité sociale ;

– une logique vertueuse de consolidation ; en intégrant les soldes de nombreux régimes ou autres organismes de financement traitant le même risque, les ROBSS permettent de prendre en compte l’ensemble des mouvements financiers qui seraient occultés par la seule considération du régime général.

Le rapporteur général se propose donc, dans la mesure où la documentation disponible le permet, de placer l’essentiel de son analyse financière à l’échelle de l’ensemble des régimes de base. Cette démarche est d’autant plus essentielle que la réforme à venir du système de retraite pourrait conduire à un nouveau rapprochement des périmètres du régime général et des régimes obligatoires de sécurité sociale.

Enfin, si le Fonds de solidarité vieillesse ne constitue pas une branche, il fait pleinement partie des comptes de la sécurité sociale, par :

– son mode de financement qui fait appel à des ressources « partagées » chaque année par les articles « de tuyauterie » ;

– sa mission de prise en charge de dépenses relevant de la branche « vieillesse ».

Ainsi, son déficit récurrent est régulièrement, et à juste titre, consolidé dans le « trou de la sécurité sociale ».

1.   Le tableau d’équilibre de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (ROBSS) témoigne d’un nouveau recul important de leurs déficits consolidés en 2018

a.   Le tableau d’équilibre des ROBSS

● Le de cet article porte approbation du tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base.

Afin de le mettre en perspective, le tableau suivant rapproche les montants que larticle 1er soumet à lapprobation du Parlement de ceux des prévisions initiales (article 31 de la LFSS pour 2018 ([13])) ou révisées (article 5 de la LFSS pour 2019 ([14])).

TABLEAUX D’ÉQUILIBRE 2018 DE L’ENSEMBLE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE

(en milliards d’euros)

Prévisions initiales

(LFSS 2018)

Prévisions révisées

(LFSS 2019)

Réalisé

(PLFSS 2020)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Vieillesse

211,0

211,7

– 0,7

211,9

212,8

– 0,9

236,4

236,5

– 0,1

Maladie

236,6

236,4

0,2

236,9

236,6

0,4

212,3

213,1

– 0,8

Famille

51,0

49,7

1,3

50,5

50,1

0,4

50,4

49,9

0,5

AT-MP

14,0

13,5

0,5

14,2

13,3

0,9

14,1

13,4

0,7

Total*

498,9

497,7

1,3

499,9

499,2

0,7

499,7

499,3

0,3

Total incluant le FSV*

496,1

498,3

– 2,2

498,2

499,6

– 1,4

498,4

499,8

– 1,4

(*) Hors transferts entre branches.

Sources : LFSS 2018, LFSS 2019 et PLFSS 2020

Le résultat définitif, incluant le Fonds de solidarité vieillesse, pour 2018 fait apparaître un solde négatif de 1,4 milliard d’euros, qui doit être apprécié tant à l’aune de l’exercice 2017, d’une part, que des différentes prévisions dont il a fait l’objet avant la clôture des comptes, d’autre part.

b.   Une amélioration très nette des soldes par rapport à 2017

● S’agissant de l’évolution par rapport à l’exercice 2017, les « comptes 2018 » font état d’une nette amélioration du solde.

Comparaison du solde des régimes obligatoires en 2018 par rapport à 2017

(en milliards d’euros)

Réalisé 2017

(LFSS 2019)

Réalisé 2018

(PLFSS 2020)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Vieillesse

232,7

230,7

2,0

236,4

236,5

– 0,1

Maladie

203,1

208,0

– 4,9

212,3

213,1

– 0,8

Famille

49,8

50,0

– 0,2

50,4

49,9

0,5

AT-MP

14,4

13,2

1,2

14,1

13,4

0,7

Total*

486,2

488,1

– 1,9

499,7

499,3

0,3

Total incluant le FSV*

483,7

488,6

– 4,8

498,4

499,8

– 1,4

(*) Hors transferts entre branches.

Sources : LFSS 2019 et PLFSS 2020.

Cette amélioration de plus de 3,4 milliards deuros résulte dune évolution contrastée des soldes de chaque branche.

Contrairement à lexercice 2017, cest la branche maladie qui a connu la principale amélioration, résultant de la très forte hausse des recettes de CSG qui lui ont été affectées en répercussion de la « bascule » en faveur du pouvoir dachat prévue par larticle 7 de la LFSS pour 2019. La situation du FSV, intégrée au total, sest également améliorée en raison dune hausse du produit des prélèvements sur le capital dont il est affectataire, ainsi que par une baisse des dépenses liées à la prise en charge des cotisations des chômeurs, dans un contexte favorable à lemploi. La maîtrise des dépenses de la branche famille ainsi que la relative stabilité de ses recettes ont permis une légère amélioration de son solde.

À linverse, la branche vieillesse et, dans une moindre mesure, la branche accidents du travail-maladies professionnelles ont connu une certaine dégradation de leurs comptes. Cette évolution est dautant plus notable que la branche vieillesse avait connu une amélioration continue de son solde depuis 2010, largement liée au report de lâge de départ à la retraite.

La décomposition de l’amÉlioration du solde DES ROBSS en 2018
par rapport À 2017 (par ordre dÉcroissant)

Maladie

+ 4,2

FSV

+ 0,9

Famille

+ 0,8

AT-MP

– 0,4

Vieillesse

– 1,6

Total avec FSV

+ 3,4 ([15])

● Cette analyse par les soldes étant particulièrement tributaire des choix faits en matière d’affectation des recettes entre les différentes branches, comme en témoigne la situation de la branche maladie après la réaffectation du surplus de CSG, elle doit être croisée avec une analyse en recettes et plus encore en dépenses.

Cette réduction significative du solde est ainsi le total d’une hausse très solide des recettes (+ 3,0 %) – 1 point au-dessus de la croissance nominale – par rapport aux dépenses (+ 2,3 %) ([16]).

S’agissant de cette hausse en recettes, un paradoxe veut que la mesure nouvelle ayant eu la plus grande ampleur financière, l’augmentation de 1,7 point des taux normaux de contribution sociale généralisée (+ 22,6 milliards d’euros), n’y a joué qu’un rôle mineur. Celle-ci a en effet été entièrement absorbée par les mesures de compensation prises par ailleurs :

– baisse de cotisations salariales (– 4,9 milliards d’euros) ;

– mesures de compensations pour les travailleurs indépendants et les fonctionnaires (– 2,8 milliards d’euros) ;

– rétrocession d’une fraction importante de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) affectée à la sécurité sociale et au FSV, ainsi que d’autres prélèvements à l’État (– 12,8 milliards d’euros).

Conçue pour garantir une certaine neutralité financière entre État et sécurité sociale, cette dernière opération s’est même révélée légèrement négative pour les comptes sociaux : l’imputation en 2017 plutôt qu’en 2018, non prévue dans les tableaux d’équilibre votés par le Parlement, d’un mois de produits de la fraction de TVA transférée (– 1,2 milliard d’euros en 2018), a fini par supplanter la légère surcompensation qu’impliquait le schéma d’ensemble de la « bascule » (+ 0,5 milliard d’euros).

Les recettes supplémentaires sont donc principalement issues du contexte macro-économique : le rapport remis à la Commission des comptes de la sécurité sociale le 30 septembre dernier estime ainsi que la hausse de la masse salariale et la dynamique des autres assiettes expliquent ainsi 2,7 points sur les 3 points de hausse. Le résidu s’explique par quelques bonnes surprises, notamment sur la hausse du prix du tabac.

En dépenses, le principal déterminant a été l’évolution des prestations d’assurance vieillesse, qui ont augmenté beaucoup plus vite qu’en 2017 (+ 2,9 % contre + 1,6 %), du fait d’éléments conjoncturels (revalorisation au niveau de l’inflation pour + 0,6 %), mais aussi structurels (hausse des pensions perçues, croissance des effectifs pour + 1,3 %, fin des effets du report de l’âge légal de 60 à 62 ans). Pour l’assurance maladie, la croissance des dépenses a été contenue dans des proportions assez proches de celles de l’ONDAM (2,4 % contre 2,3 %). Dans la branche famille, la stabilité des dépenses résulte très largement de celle des prestations légales, notamment la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE).

Pour des éléments plus précis sur chacune de ces branches, et notamment les mesures nouvelles, on pourra utilement se reporter aux commentaires du rapporteur général sur les objectifs de dépenses lors des deux derniers exercices.

c.   L’écart aux prévisions initiales et rectifiées ([17])

Ce déficit est par ailleurs sensiblement plus élevé que celui qui était prévu en LFSS pour 2018 (– 2,2 milliards d’euros), mais en ligne avec les prévisions révisées en LFSS 2019.

● Les prévisions pour 2018 avaient été révisées une première fois par la LFSS 2019 pour tenir compte de plusieurs éléments nouveaux :

– parmi les « bonnes surprises », la révision de la croissance de la masse salariale de 3,1 % à 3,5 %, de laquelle les recettes de la sécurité sociale, malgré leur fiscalisation croissante, demeurent très dépendantes ; celle-ci a conduit à une amélioration du solde de 0,9 milliard d’euros ; de même, les prélèvements sur le capital, singulièrement volatiles, ont eu un rendement supérieur de 0,5 milliard d’euros aux prévisions initiales ; et enfin, les « bonnes surprises » de 2017 ont eu un effet positif en base permettant de réviser à la hausse les prévisions de recettes de 0,6 milliard d’euros sur les comptes ([18]);

– à l’inverse, la suppression de la cotisation maladie des étudiants, issue de la loi du 8 mars 2018 ([19]), a été enregistrée en cours d’année à hauteur de 0,2 milliard d’euros ; ainsi qu’une croissance plus forte que prévue des prestations sociales à hauteur de 0,6 milliard d’euros, en raison d’un regain d’inflation.

Au total, l’effet se révélait donc positif de 0,8 point au moment de l’examen de la LFSS 2019, ramenant le déficit à 1,4 milliard d’euros.

 Le solde définitivement constaté dans le présent article, indiscutablement proche des prévisions révisées en LFSS pour 2018, masque néanmoins de significatifs mouvements contraires :

– la révision des prévisions de cotisations pour 900 millions d’euros, en raison d’une masse salariale plus faible qu’attendu, ainsi que de plus faibles rentrées de la cotisation maladie subsidiaire dont s’acquittent les travailleurs frontaliers en Suisse, et enfin à un effet de base négatif 2017 ; par ailleurs, la taxe sur les salaires a également eu un rendement plus faible qu’attendu à hauteur de 400 millions d’euros, soit au total une dégradation de 1,3 milliard d’euros ;

– à l’inverse, une nouvelle révision à la hausse des prélèvements sur le capital de 400 millions d’euros, des droits tabacs de 300 millions d’euros et des remises conventionnelles de 400 millions d’euros ; l’ensemble de ces mesures, comptant pour 1,1 milliard d’euros, a en partie neutralisé ces « mauvaises nouvelles ».

Au total, l’effet consolidé de ces mesures a conduit à une détérioration du solde de 200 millions d’euros, soit un solde de 1,2 milliard d’euros.

2.   Le régime général atteint l’équilibre hors FSV, malgré une dégradation par rapport aux prévisions

Le porte approbation du tableau d’équilibre du seul régime général ; comme pour l’ensemble des régimes obligatoires, le tableau suivant rapproche les montants que l’article 1er soumet à l’approbation du Parlement de ceux des prévisions initiales de la loi de financement pour 2018 ou rectifiées par la loi de financement pour 2019, aux articles déjà cités.

TABLEAUX D’ÉQUILIBRE 2018 DU RÉGIME GéNéRAL DE LA SÉCURITé SOCIALE

(en milliards d’euros)

Prévisions initiales

(LFSS 2018)

Prévisions révisées

(LFSS 2019)

Réalisé

(PLFSS 2020)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

209,9

210,6

– 0,7

210,4

211,3

– 0,9

210,8

211,5

– 0,7

Vieillesse

133,9

133,6

0,2

134,5

133,7

0,8

133,8

133,6

0,2

Famille

51

49,7

1,3

50,5

50,1

0,4

50,4

50,2

0,2

AT-MP

12,6

12,2

0,4

12,8

12,0

0,8

12,7

12,0

0,7

Total*

394,3

393

1,2

395,2

394,1

1,1

394,6

394,1

0,5

Total incluant le FSV*

392,5

394,8

– 2,2

394,6

395,7

– 1,0

394,6

395,8

– 1,2

(*) Hors transferts entre branches.

Source : LFSS 2018, LFSS 2019 et PLFSS 2020.

Compte tenu de son poids et de l’intégration financière croissante, le solde du régime général est souvent très proche de celui de l’ensemble des régimes obligatoires, sous réserve de quelques écarts liés généralement à la branche vieillesse. Le résultat définitif pour 2018 fait apparaître un déficit, incluant le Fonds de solidarité vieillesse, de – 1,2 milliard d’euros, à comparer avec le résultat 2017, ainsi qu’avec les précédentes prévisions, en insistant sur les différences notables par rapport aux constats faits sur l’ensemble des régimes obligatoires.

Les branches maladie et famille étant très bien intégrées dans le régime général, et compte tenu du poids financier plus limité de la branche AT-MP, les écarts aux prévisions pour l’ensemble des régimes obligatoires tiennent principalement à une dégradation moins nette des comptes de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), par rapport à celle de l’ensemble des régimes obligatoires.

Le solde constaté s’éloigne des prévisions initiales, telles qu’elles ont été présentées dans la LFSS 2018 en raison de plusieurs éléments nouveaux :

Il est en revanche identique à la prévision rectifiée dans la dernière loi de financement, malgré quelques ajustements entre branches, reprenant très largement les évolutions déjà décrites pour l’ensemble des régimes de base.

3.   Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base retrace exclusivement le recul du déficit du FSV

● Le porte approbation du tableau d’équilibre du seul organisme de cette catégorie, à savoir le Fonds de solidarité vieillesse ([20]).

Ce fonds, prévu aux articles L. 135-1 et suivants du code de la sécurité sociale, est doté de 17,2 milliards de recettes en 2018 et finance des prestations non contributives servies par les régimes de base d’assurance vieillesse, notamment :

– la prise en charge du financement des droits pour les périodes pendant lesquelles les assurés n’ont pas pu cotiser, par exemple en cas de chômage (11,5 milliards d’euros en 2018) ou d’arrêts maladie (1,8 milliard d’euros en 2017) ;

– l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) pour 3,2 milliards d’euros en 2018 – prestation « socle » différentielle ouverte à tous les pensionnés qui s’est substituée au « minimum vieillesse » – ainsi que le minimum contributif (MICO) pour 1,7 milliard d’euros en 2018 – prestation « socle » en principe plus élevée que l’ASPA, ouverte à tous les pensionnés ayant tous leurs trimestres.

TABLEAU D’ÉQUILIBRE 2018 DES ORGANISMES CONCOURANT
AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE (FsV)

(en milliards d’euros)

Prévisions initiales

(LFSS 2018)

Prévisions révisées

(LFSS 2019)

Réalisé

(PLFSS 2020)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

FSV

15,8

19,3

– 3,5

16,8

18,9

– 2,1

17,2

19,0

– 1,8

Source : LFSS 2018, LFSS 2019 et PLFSS 2020.

● Le solde du FSV est donc en nette amélioration par rapport à 2017
(– 2,9 millions d’euros) grâce :

– à la fin progressive du financement du minimum contributif, transféré par étapes à la CNAV, permettant ainsi une diminution des dépenses
(– 0,8 milliard d’euros), qui a surcompensé les effets des premières hausses de l’ASPA (+ 0,2 milliard d’euros) ;

– au dynamisme des recettes, qui depuis les réaffectations rendues nécessaires par le contentieux De Ruyter en 2016, sont fortement assises sur le capital et ont ainsi vraisemblablement bénéficié de l’effet du prélèvement forfaitaire unique, mis en place par la loi de finances pour 2018 ([21]).

● Comme en 2017, ce résultat est également nettement meilleur que les prévisions initiales et rectifiées qui annonçaient une moindre amélioration du solde. La perte d’une fraction du prélèvement social sur les revenus du capital au profit de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie a été surcompensée par le dynamisme des autres produits (la CSG notamment), dans un contexte économique meilleur que prévu.

4.   Un objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) tenu

Créé en 1996, l’ONDAM est un plafond indicatif de la quasi-totalité des dépenses d’assurance maladie voté par le Parlement pour l’année à venir, et dont le niveau est définitivement arrêté dans la première partie de la LFSS pour l’exercice N–2.

Ainsi, le arrête un montant de 195,2 milliards d’euros en 2018, en ligne avec les prévisions de la LFSS pour 2018, soit + 2,2 % par rapport à 2017, et en légère diminution par rapport aux prévisions rectifiées par la LFSS 2019. La Cour des comptes relève que cet écart est pour la troisième année consécutive inférieur à 100 millions d’euros ([22]).

Cette progression est équivalente à celle qui avait été arrêtée en 2017 et son exécution est marquée comme pour les précédents exercices par un important ajustement, y compris au regard des prévisions rectifiées en 2018 : au nouveau dépassement du sous-objectif lié aux dépenses de soins de ville de 560 millions d’euros a répondu, notamment :

– une nouvelle sous-exécution de celui lié aux dépenses des établissements de santé de 304 millions d’euros ;

– une diminution du « sous-ONDAM » relatif aux établissements médico-sociaux de 200 millions d’euros ([23]) ;

– une diminution de l’enveloppe dédiée au fonds d’intervention régional de 45 millions d’euros.

La pilotabilité infra-annuelle de ces deux sous-objectifs demeure en effet structurellement asymétrique : le dépassement du sous-objectif « ville » est le produit d’une hausse de la consommation de médicaments, des indemnités journalières, des dépenses de transports et des honoraires médicaux, partiellement compensée par la baisse des honoraires paramédicaux et les effets de la nouvelle convention conclue avec les chirurgiens-dentistes ; le sous-objectif « hôpital » a quant à lui été ajusté par des annulations de dépenses d’établissements sociaux et médico-sociaux, qui ont complété les effets d’une baisse imprévue de leur activité.

Deux « originalités » méritent toutefois d’être soulignées :

– une plus grande sincérité dans la construction, grâce à la suppression rétroactive par la LFSS pour 2019 du fonds pour le financement de l’innovation pharmaceutique (FFIP), et la réintégration de ses dépenses dans le champ de l’ONDAM, conformément à la charte comptable annexée à la loi de programmation des finances publiques 2018-2022 ;

– un dégel, tardif mais total, des mises en réserves initiales (405 millions d’euros, dont 302 millions pour les établissements soumis à la tarification à l’activité), résultant d’une activité hospitalière bien moindre qu’attendu (+ 1,4 % contre + 2,1 % en 2017).

Ce second point a permis une réduction du déficit des hôpitaux
(– 660 millions d’euros en 2018, contre – 865 millions en 2017), témoignant une fois encore de l’interaction très directe entre les résultats hospitaliers et l’ONDAM « établissements de santé ».

5.   Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites (FRR) et au Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

● Le porte approbation du montant de la dotation au FRR, constamment nul depuis 2011. Il constitue une donnée obligatoire en application de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale précité qui fait obligation au législateur de mentionner dans la première partie de la LFSS le montant des recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de recettes au profit des régimes obligatoires, catégorie comprenant le seul FRR dans le droit positif.

En effet, en application de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, le Fonds a été mis en extinction : aucune recette ne lui est plus affectée, tandis qu’il décaisse chaque année 2,1 milliards d’euros au profit de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), afin de participer au financement des déficits des organismes chargés d’assurer les prestations du régime de base de l’assurance vieillesse pour les exercices 2011 à 2018, en application de la LFSS 2011 ([24]).

Créé en 1999 ([25]), le FRR était chargé de mettre en réserve et de faire fructifier des ressources qui lui étaient affectées afin de maintenir voire d’améliorer le niveau des pensions à horizon 2020, dans la perspective d’une dégradation prévisible des équilibres financiers. Compte tenu de la forte dégradation des régimes d’assurance vieillesse à la suite de la crise financière des années 2008-2009, il a été décidé de mettre à contribution le Fonds avant l’horizon initialement prévu, pour « alimenter » la CADES.

Cette absence de mise en réserve n’est pas synonyme d’absence de produits pour le FRR : comme rappelé à l’annexe 8 au présent projet de loi, au 31 décembre 2018, la valeur des actifs du FRR était de 32,6 milliards d’euros, contre 36,4 milliards d’euros à la même date en 2017, dont 45 % sont placés de manière très sûre (poche dite « de couverture ») afin de permettre de poursuivre les versements à la CADES jusqu’à l’extinction de cette dernière, et 55 % sont placés de manière plus dynamique afin de produire du rendement (poche dite « de performance »).

Ces placements permettent de dégager en 2018 un résultat financier de 1 milliard d’euros, en baisse par rapport aux 2,5 milliards enregistrés en 2017. Ces performances plus modestes sont à imputer à deux épisodes de baisse des actifs de performance sur les marchés en février, puis en fin d’année.

● Dans la même logique, le prévoit que le FSV ne met aucune somme en réserve, comme chaque année depuis 2011 ([26]).

6.   La dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES)

La CADES a été créée par lordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 portant mesures relatives au remboursement de la dette sociale pour amortir et éteindre la dette du régime général de la sécurité sociale. Elle est historiquement affectataire :

– depuis sa création d’une ressource exclusive, la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) ;

– depuis la LFSS pour 2008 ([27]), d’une fraction de contribution sociale généralisée (CSG) ;

– depuis 2011, du versement annuel du FRR précité ([28]).

Ces ressources lui permettent chaque année d’assurer l’amortissement d’une partie de la dette sociale reprise et financée par des opérations d’emprunt sur les marchés ([29]). L’amortissement est égal à la différence entre le produit des ressources affectées et le montant des charges financières nettes de la Caisse (déduction faite, donc, des produits financiers qu’elle peut percevoir).

Le 7° porte ainsi approbation du montant de la dette amortie par la CADES en 2018, à savoir 15,4 milliards d’euros.

Ce chiffre, légèrement supérieur à l’objectif fixé en LFSS pour 2018 (15,2 milliards d’euros), s’explique à la fois par la dynamique des recettes et par des conditions d’emprunt toujours très favorables.

II.   Ces comptes sont validés par la COUR des comptes qui formule nÉanmoins certaines réserves

En application de l’article L.O. 132-3 du code des juridictions financières, la Cour des comptes est chargée de produire, dans le cadre de sa mission constitutionnelle d’assistance du Parlement et du Gouvernement, un avis sur la cohérence des tableaux d’équilibre par branche du dernier exercice clos ainsi qu’un rapport de certification de la régularité, de la sincérité et de la fidélité des comptes des organismes nationaux du régime général et des comptes combinés de chaque branche et de l’activité de recouvrement du régime général, relatifs au dernier exercice clos ([30]).

1.   Une cohérence des tableaux d’équilibre confirmée, sous quelques réserves

L’avis sur la cohérence des tableaux d’équilibre figure dans le rapport sur l’application des LFSS (RALFSS), produit annuellement par la Cour en application du 1° du VIII de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. Les principales conclusions de l’avis rendu dans le RALFSS 2018 sont reproduites dans l’encadré suivant.

Avis de la Cour des comptes sur la cohérence des tableaux d’équilibre pour 2017

« À lissue de ces vérifications et sur le fondement des éléments dinformation qui lui ont été communiqués par la direction de la sécurité sociale, la Cour estime que les tableaux déquilibre précités fournissent une représentation cohérente des recettes, des dépenses et du solde qui en découle. Elle formule néanmoins les [trois] observations suivantes :

« 1. à la date de ses constats, la Cour na pas été rendue destinataire du projet dannexe 4 au projet de loi de financement qui contient des informations intéressant les tableaux déquilibre (modalités détablissement, détail des recettes et des dépenses, analyse des évolutions par rapport à 2017 et par rapport aux prévisions 2018) ;

« 2. les tableaux déquilibre sont établis en procédant à des contractions de produits et de charges non conformes au cadre normatif fixé par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale pour létablissement des comptes sociaux ;

« 3. les réserves formulées par la Cour dans le rapport de certification des comptes de 2018 du régime général de sécurité sociale et les opinions émises par les commissaires aux comptes soulignent les limites qui continuent daffecter la fiabilité des comptes des régimes de sécurité sociale intégrés aux tableaux déquilibre pour lexercice 2018, sous leffet, notamment, de faiblesses persistantes des dispositifs de contrôle interne et de difficultés comptables. »

Source : Cour des comptes, Rapport sur lapplication des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2019 ([31]), disponible ici : https://www.ccomptes.fr/system/files/2019-10/20191008-rapport-securite-sociale-2019.pdf

● La première observation fait référence à l’annexe 4 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui présente en détail les recettes, dépenses et solde des régimes par catégorie et par branche, dont la Cour n’aurait pas disposé pour porter une appréciation éclairée sur les tableaux d’équilibre ; interrogée sur ce point par le rapporteur général, la direction de la sécurité sociale a confirmé qu’il lui était impossible de transmettre à l’été des documents qu’elle ne finalisait qu’entre la fin du mois de septembre et le début du mois d’octobre, afin de consolider les données de certains petits régimes ; par ailleurs, lui-même destinataire très tardivement de ce précieux document, comme ses collègues, le rapporteur général se contenterait pour la bonne information de la représentation nationale de l’avoir quelques jours plus tôt.

● La deuxième observation, récurrente, reproche au Gouvernement sa méthode de contractions de produits et de charges, en méconnaissance du cadre normatif organique. Ces consolidations sont retracées dans l’annexe 4 précitée et répondent à une double préoccupation de neutralisation :

– la première consiste à neutraliser les transferts entre régimes de sécurité sociale et permet d’éviter une double comptabilisation de recettes ou de produits qui correspondraient en réalité aux relations financières entre deux régimes, ou entre des branches d’un même régime ; l’utilité de cette neutralisation est entièrement reconnue ;

 la seconde consiste à neutraliser les écritures dinventaire et cest elle qui fait lobjet des critiques renouvelées de la Cour ; interrogée lors de lexamen de la LFSS 2018 sur ce même point, la direction de la sécurité sociale a fait savoir au rapporteur général que ce retraitement des données répondait à la préoccupation assumée de « neutraliser lhétérogénéité des modes de comptabilisation dun petit nombre décritures entre régimes et dans le temps pour un même régime » ; en effet, les régimes appliquent des règles de comptabilité différentes et les modifient parfois entre deux exercices ; cest pourquoi il est procédé à une harmonisation des présentations comptables des différents régimes, dune part, et dans le temps, dautre part ; par ailleurs, la direction de la sécurité sociale se réserve la possibilité de ne pas faire figurer des écritures comptables nayant aucune contrepartie économique ou de conséquence sur le solde.

Au regard de ces explications, le rapporteur général se satisfait de cette présentation comptable, dont la méthodologie est présentée de manière détaillée et illustrée dans l’annexe 7, et sous réserve :

– que ces règles soient suffisamment constantes pour rendre les chiffres comparables d’une année sur l’autre ;

– qu’elles n’aient jamais pour incidence de modifier artificiellement le solde ou d’occulter une réalité économique ou financière.

● La troisième observation reproduit synthétiquement les réserves émises par la Cour à l’occasion de son rapport sur la certification des comptes du régime général, s’agissant notamment des dispositifs de contrôle interne.

Au total, le rapporteur général se félicite du nombre réduit de ces réserves, par rapport à l’exercice précédent.

2.   Des comptes du régime général certifiés avec un nombre en légère hausse des réserves

Conformément à l’article L.O. 132-2-1 du code des juridictions financières, la Cour des comptes certifie les comptes du régime général ([32]), au même titre que les comptes de l’État.

Article L.O. 132-2-1 du code des juridictions financières ([33])

« Chaque année, la Cour des comptes établit un rapport présentant le compte rendu des vérifications quelle a opérées en vue de certifier la régularité, la sincérité et la fidélité des comptes des organismes nationaux du régime général et des comptes combinés de chaque branche et de lactivité de recouvrement du régime général, relatifs au dernier exercice clos, établis conformément aux dispositions du livre Ier du code de la sécurité sociale. Ce rapport est remis au Parlement et au Gouvernement sitôt son arrêt par la Cour des comptes, et au plus tard le 30 juin de lannée suivant celle afférente aux comptes concernés. »

Dans son rapport remis en mai 2019 ([34]), la Cour a certifié les comptes du régime général avec vingt-neuf réserves, à comparer avec les vingt-huit réserves émises pour les comptes de lannée 2017.

Sans prétendre rappeler lensemble des inquiétudes formulées par la Cour, on peut retenir que celle-ci maintient notamment ses recommandations récurrentes visant à mettre en place un contrôle interne plus approfondi dans lensemble des branches, qui seraient à lorigine de « taux derreurs élevés affectant la correcte liquidation des prestations ». Ainsi, « une pension de retraite liquidée sur sept et un dossier dindemnités journalières sur dix serait entaché derreurs à incidence financière » en 2018. La Cour insiste également sur les « marges de progression en matière de lutte contre la fraude » ([35]).

Tout en étant particulièrement attentif aux réserves de la Cour, le rapporteur général se félicite de la « banalisation » de cet exercice de certification, qui na plus entraîné de refus ou dimpossibilité de certifier depuis 2012.

*

*     *

Article 2
Approbation du rapport annexé sur le tableau patrimonial et la couverture des déficits de lexercice 2018 (annexe A)

Adopté par la commission sans modification

L’article 2 porte approbation du tableau patrimonial qui retrace la situation financière dans le champ des LFSS au 31 décembre du dernier exercice clos (2018) ainsi que l’affectation des excédents et des déficits constatés au terme de cet exercice.

Ce tableau reflète l’amélioration des comptes de la sécurité sociale en 2018.

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer en loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), en application des dispositions organiques en définissant le contenu.

3° du A du I de l’article L.O. 111-3 et II de l’article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale.

La loi de financement « 3° Approuve le rapport mentionné au II de larticle L.O. 111-4 et, le cas échéant, détermine, dans le respect de léquilibre financier de chaque branche de la sécurité sociale, les mesures législatives relatives aux modalités demploi des excédents ou de couverture des déficits du dernier exercice clos, tels que ces excédents ou ces déficits éventuels sont constatés dans les tableaux déquilibre prévus au 1° ».

Le II de l’article L.O. 111-14 précise qu’il s’agit d’« un rapport décrivant les mesures prévues pour laffectation des excédents ou la couverture des déficits constatés à loccasion de lapprobation des tableaux déquilibre relatifs au dernier exercice clos [, qui] présente également un tableau, établi au 31 décembre du dernier exercice clos, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement ([36]), à lamortissement de leur dette ([37]) ou à la mise en réserve de recettes à leur profit ([38]) ».

Il s’agit d’assurer l’information du Parlement sur l’état de la situation patrimoniale d’une partie des régimes faisant partie du champ des lois de financement de la sécurité sociale ([39]). Celui-ci permet, au-delà du solde qui peut s’analyser comme un « flux » à un moment donné, d’apprécier la situation financière nette consolidée, en y intégrant l’ensemble de l’actif et du passif du champ des lois de financement. Les « stocks » sont ainsi présentés (réserves, dettes) ainsi que la manière dont les déficits sont finalement pris en charge concrètement.

1.   Le tableau présentant la situation patrimoniale de la sécurité sociale reflète une amélioration de la situation des comptes sociaux en 2018

● L’annexe A reflète à plusieurs égards une accélération de l’amélioration du solde des régimes de sécurité sociale de plusieurs manières au passif.

La première partie du tableau, qui témoigne d’une variation des capitaux propres, est positive de 11,6 milliards par rapport à 2017, ce qui résulte de la consolidation de deux « pôles » comptables :

Un « pôle positif » d’actifs comprenant :

– des dotations et réserves, notamment grâce au Fonds de réserve pour les retraites (FRR), qui dispose de 15,5 milliards d’euros de dotations et de 10,1 milliards d’euros de réserves, ainsi qu’aux réserves du régime général et des autres régimes (11,5 milliards d’euros) ;

– un résultat globalement positif en 2018 (+ 14,9 milliards d’euros), en hausse par rapport à 2017 de 2,3 milliards d’euros, qui résulte des excédents des régimes obligatoires (+ 0,3 milliard d’euros) et des ressources de la CADES (15,4 milliards d’euros), le tout minoré du déficit du Fonds de solidarité vieillesse, lui aussi en baisse.

Ce « pôle positif » doit être consolidé notamment avec le report à nouveau négatif lié aux déficits des ROBSS et du FSV des années précédentes (15,9 milliards d’euros), ainsi que de la dette restant à amortir à la CADES (121 milliards d’euros). Ces montants sont toutefois en baisse par rapport à 2017, en raison de l’amortissement de la dette sociale par la Caisse.

Au total, c’est donc bien l’amortissement de la dette sociale qui est, assez logiquement, le principal facteur de réduction du besoin de capitaux propres de la sécurité sociale.

La deuxième partie du tableau présente la différence entre l’actif et le passif financier de la sécurité sociale. À la stabilité des actifs, constitués très largement des réserves placées (55,8 milliards d’euros en 2018, contre 55,6 milliards d’euros en 2017), répond un important passif (142,6 milliards d’euros en 2018). Ce dernier est toutefois en diminution par rapport à 2017 (158,5 milliards d’euros) grâce à la diminution des dettes portées par l’ACOSS et la CADES (– 21 milliards d’euros). L’amortissement de la dette portée par la CADES, l’amélioration des conditions d’emprunt et celle du solde de la sécurité sociale permettent d’expliquer cette évolution.

La troisième partie du tableau, qui présente l’actif et le passif circulant, permet d’observer les besoins de financement à court terme de la sécurité sociale (fonds de roulement). Ils témoignent d’une relative stabilité par rapport à 2017, puisque l’actif circulant représentait au 31 décembre 77,3 milliards d’euros, contre 82,1 milliards d’euros l’année précédente, et le passif circulant 57,4 milliards d’euros, contre 57,9 milliards durant le précédent exercice. La différence négative entre ces deux éléments peut s’interpréter comme l’absence de difficulté de la sécurité sociale à se financer à court terme.

● Conformément à l’article L.O. 132-3 du code des juridictions financières, la Cour des comptes produit un avis sur la cohérence du tableau patrimonial.

Dans son Rapport sur lapplication des lois de financement de la sécurité sociale d’octobre 2019, la Cour des comptes juge que le tableau patrimonial figurant à l’annexe A du présent projet « fournit une représentation cohérente de la situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2018 » ([40]).

En revanche, elle maintient une observation, déjà évoquée par ailleurs ainsi que les années précédentes, tenant à l’insuffisance des dispositifs de contrôle interne et la persistance de difficultés comptables.

2.   La description des mesures prévues pour la couverture des déficits constatés et l’affectation des excédents illustrent l’hétérogénéité des situations financières de chaque régime

S’il est difficile de résumer en quelques grandes lignes directrices des opérations propres à la situation financière de chaque régime, certaines mesures méritent d’être soulignées dans le cadre du présent commentaire.

● Le régime général et le FSV étaient en déficit de 1,2 milliard d’euros en 2018, et celui-ci s’est ainsi ajouté à la dette gérée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), le plafond de reprise de la dette prévu pour 2011-2018 par la CADES ayant été saturé dès 2016.

● La plupart des autres régimes de base sont à l’équilibre ou en excédent en 2018 grâce à l’intégration financière (maladie pour tous les régimes, salariés agricoles et régime social des indépendants), par des subventions d’équilibre de l’État comme garant de l’équilibre financier de ces régimes (SNCF, RATP, mines, marins) ou par des subventions de l’État en tant qu’employeur (FPE, industries électriques et gazières).

● Les excédents du régime de retraite des professions libérales (0,3 milliard), du régime de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaire (0,09 milliard) et de la Caisse nationale des barreaux français (0,06 milliard) sont affectés aux réserves des régimes concernés.

● La Caisse nationale de retraite des agents des collectivités
locales (– 0,6 milliard) a enregistré un premier déficit en 2018, en raison de la forte dégradation de ses recettes, dans un contexte de « gel » des rémunérations et de forte hausse de ses prestations, l’effet du report de l’âge légal ayant pris fin.

● Les déficits passés accumulés par le régime des mines avant qu’il ne bénéficie de la subvention d’équilibre ont été transférés à la CNAMTS à hauteur de 0,7 milliard d’euros en 2016.

● Le déficit du régime de retraite des exploitants agricoles est géré comme les années précédentes par la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA) et financé par des avances rémunérées de l’ACOSS conformément aux nouvelles dispositions adoptées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. Ces déficits cumulés ont atteint 3,7 milliards d’euros en 2018.

*

*     *


deuxième partie :
dispositions relatives à l’exercice 2019

Article 3
Correction des affectations de recettes à la sécurité sociale
pour lexercice en cours

Adopté par la commission avec modifications

L’article 3 acte la non-compensation des mesures issues de la loi du 24 décembre dernier portant mesures d’urgence économiques et sociales (« MUES »), et réaffecte en conséquence les recettes impactées afin d’assurer une répartition homogène des pertes liées sur l’ensemble des branches.

Il assure par ailleurs la rectification d’un certain nombre de mesures de coordination, ainsi que la sécurisation juridique des modalités transitoires des juridictions sociales.

1.   Les mesures issues de la loi « MUES » sont compensées en l’état du droit

● Adoptée dans des conditions exceptionnelles pour faire face à une demande très forte des Français en matière de pouvoir d’achat, la loi du 24 décembre 2018 ([41]) a prévu trois mesures affectant la sécurité sociale, dont deux pouvaient avoir une influence directe sur les comptes de cette dernière :

– le rétablissement d’un taux intermédiaire de contribution sociale généralisée sur les revenus de remplacement à 6,6 % pour les pensionnés dont le revenu fiscal de référence de l’année 2017 était compris entre 14 548 euros et 22 579 euros par an ; le coût de la mesure est estimé pour l’année en cours à 1,5 milliard d’euros ;

– l’anticipation de l’exonération de cotisations sociales salariales pour les heures supplémentaires et complémentaires du 1er septembre au 1er janvier pour un montant de 1,25 milliard d’euros.

La mesure relative à la mise en place d’une prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, reconduite par l’article 7 du présent projet de loi dans des modalités adaptées, n’avait quant à elle en principe aucun effet budgétaire puisqu’elle devait s’ajouter aux rémunérations existantes.

● En application de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, ces mesures, respectivement de réduction de contribution et d’exonération de cotisations, « donnent lieu à compensation intégrale aux régimes concernés par le budget de lÉtat pendant toute la durée de [leur] application ».

Faute de disposition contraire, qui ne peut être prise qu’en loi de financement, les mesures issues de la loi « MUES » devaient donc être considérées comme compensées par des crédits budgétaires.

En pratique, il restait donc aux prochaines lois de finances et loi de financement de la sécurité sociale à tirer les conséquences de cette situation, en retenant une des trois possibilités suivantes :

– inscrire les crédits afférents dans une mission budgétaire en loi de finances ;

– assurer la compensation de ces mesures par d’autres moyens : transferts de dépenses ou, de manière plus vraisemblable compte tenu des montants, affectation d’une recette à due concurrence à la sécurité sociale ;

– prévoir une pure et simple non-compensation de ces mesures dans la loi de financement, qui a le monopole organique de ce type de mesure, et acter dans les tableaux d’équilibre pour l’année 2019 ces « pertes sèches » pour la sécurité sociale.

C’est cette troisième possibilité qui est proposée par le présent article.

2.   L’article 3 propose la non-compensation de pertes de recettes, notamment issues de la loi « MUES », et procède à une réaffectation entre branches en conséquence

a.   Les non-compensations nouvelles

● Le III prévoit, dans des dispositions non codifiées, la non-compensation dès l’exercice 2019 de quatre mesures, deux étant issues de la loi « MUES », et deux de la dernière loi de financement ([42]) :

– le rétablissement du taux intermédiaire de CSG précité, issu de la loi « MUES », pour un montant de 1,5 milliard d’euros en 2019, ainsi que la mesure de lissage de franchissement des seuils en matière de contribution sociale généralisée « remplacement », issue de l’article 14 de la LFSS 2019 ;

– la diminution du forfait social (article L. 137-15 du code de la sécurité sociale), prévu par la LFSS 2019 pour un montant de 600 millions d’euros ;

– l’anticipation de l’exonération de cotisations sociales salariales sur les heures supplémentaires prévues par la loi « MUES » ;

S’agissant des mesures relatives au lissage et du forfait social, l’opération ressemble à une rectification, la non-compensation ayant été actée dans les tableaux d’équilibre 2019, sans être dûment inscrite dans la LFSS 2019. Le rapporteur général regrette bien évidemment cet oubli, imputable à une application variable de l’article L. 131-7, malgré sa grande clarté. Il souhaite que ces non‑compensations soient systématiquement explicites, afin que le Parlement puisse se prononcer explicitement sur ces questions.

 Au total, ces différentes non-compensations semblent procéder a posteriori à une stricte application des principes dégagés par le rapport remis au Parlement sur les relations entre lÉtat et la sécurité sociale, en application de larticle 27 de la loi de programmation des finances publiques 2018-2022 ([43]). Ce dernier ([44]) préconisait en effet, alors dans la perspective contrastée dexcédents en faveur de la sécurité sociale et dun déficit croissant de lÉtat, une distinction entre :

– les « allégements ciblés », qui devaient être pris en charge par les ministères concernés sur leurs crédits budgétaires ;

– les « allégements généraux », qui devaient être assumés, sans effet rétroactif sur ceux qui étaient déjà compensés, par la sécurité sociale.

Cette distinction, claire en apparence, méritait néanmoins quelques précisions, puisque :

– les allégements généraux étaient entendus de manière large comme tout allégement non spécifique ;

– les allégements spécifiques relevaient nécessairement pour le rapport de trois catégories : ceux à destination des « publics fragiles », ceux à destination des « zones géographiques en difficultés » et ceux en faveur des « secteurs économiques à encourager ».

Au regard de cette typologie, et en supposant que les pages 27 à 33 du rapport constituent bien la nouvelle doctrine en la matière, celle-ci a été rigoureusement appliquée à la CSG de manière générale (franchissement de seuil), à la CSG remplacement (nouveau taux intermédiaire), au forfait social pour l’ensemble des mesures d’épargne visées et aux heures supplémentaires pour tous les salariés.

Force est de constater que ces non-compensations auront un impact important sur les comptes de la sécurité sociale en 2019, puisqu’au total c’est 2,8 milliards d’euros de recettes dont sera privée la sécurité sociale en 2019, et 1,5 milliard d’euros en année pleine à compter de 2020.

L’effet sur le solde est étudié de manière plus complète dans le commentaire de l’article 5.

b.   En conséquence, une réaffectation des recettes entre les branches qui dépasse la stricte neutralisation des non-compensations

Le I prévoit principalement de neutraliser les effets de la noncompensation entre ces différentes entités, donnant ainsi loccasion rare au rapporteur général de commenter non pas un mais deux articles de « tuyauterie » dans le cadre du présent projet de loi. Comme il est désormais dusage, cette neutralisation sexerce à larticle L. 131-8 du code de la sécurité sociale, qui prévoit laffectation des principales ressources fiscales des régimes obligatoires de base.

Enfin, le 3° du I augmente de 0,26 point la fraction de CSG « remplacement » au taux normal de 8,3 % en faveur du FSV (1,98 point au lieu de 1,72) et lui attribue par ailleurs 1,98 point de CSG « remplacement » au taux intermédiaire de 6,6 %.

Le du I modifie les fractions de recettes fiscales affectées à la branche assurance maladie, en :

– diminuant de 0,26 point la fraction de CSG « remplacement » au taux normal de 8,3 % ;

– augmentant de 0,95 point la fraction de CSG au taux réduit de 3,8 % ;

– diminuant de 1,98 point la fraction de CSG « remplacement » au taux intermédiaire de 6,6 %.

Le du I supprime l’affectation de la CSG à taux réduit en faveur de la Caisse nationale des allocations familiales, qui s’était vue attribuer à tort une fraction de 0,95 point de cette ressource, pour un montant de 300 millions d’euros, en raison d’une « sur-affectation » de cette ressource, par rapport à son taux global (3,8 %, dont 0,6 point est attribué à la CADES, et 2,25 points à la CNAM).

Ainsi, trois mouvements distincts peuvent être distingués :

– un premier transfert, le plus important en volume, de lassurance maladie vers le FSV vise à neutraliser les effets de la création par la loi « MUES » dun taux intermédiaire de CSG « remplacement » sur le Fonds ; celui‑ci avait en effet perdu une part importante de ses ressources, liées aux pensions de retraite qui auraient dû être soumises au taux normal, et qui ont été soumises au taux réduit, affecté par la CNAM au moment de « MUES » ; il procède à l’attribution de 1,98 point de cette recette au FSV, au détriment de la CNAM, pour un total de 1,5 milliard d’euros ;

– un deuxième transfert de lassurance maladie vers le FSV de 0,26 point de la CSG « remplacement » au taux normal pour un montant de 700 millions d’euros ; lors de la rétrocession des prélèvements sur le capital affectés au FSV vers l’État, l’affectation compensatrice de la « CSG » à taux réduit, avait été sous-estimée pour ce dernier, au profit de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) ;

 enfin, un transfert entre la branche famille et la branche maladie dune fraction de 0,95 point de la CSG à taux réduit vise à corriger le fait que ce produit ait été « indûment affecté », selon le Gouvernement dans son étude dimpact, à la CNAF, à la suite de plusieurs mouvements de réaffectations de cette ressource.

3.   Les autres mesures proposées par l’article 3

a.   Une coordination des ressources de la CNSA

Le II modifie quant à lui, à l’article L. 14-10-5 du code de l’action sociale et des familles, les recettes de la CNSA, pour tirer les conséquences de la suppression de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA).

Il prévoit ainsi que le montant des « ressources destinées aux personnes handicapées » correspondra, non plus à 40 % du produit de la contribution solidarité autonomie (CSA), prélevée sur les entreprises, et de la contribution additionnelle au prélèvement social, prélevée sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, mais à 24 % de la CASA et la CSG perçue par la CNSA, telle qu’elle a été fixée par l’arrêté du 25 juillet dernier ([45]).

 

Sommes en milliards

Contributions additionnelles au prélèvement social *

CSA « activité »

CSG affectée à la CASA

Total

0,42

2,1

2,24 **

40 %

0,17 (1)

0,84 (2)

0,90

24 %

0,10

0,50 (3)

0,54 (4)

Droit existant = (1) + (2) = 1,00

Droit proposé = (3) + (4) = 1,04

* Ces contributions ayant disparu en 2019, les chiffres présentés sont une approximation réalisée à partir des rendements 2018, à savoir respectivement 194,2 millions d’euros et 233 millions d’euros pour les contributions additionnelles sur les revenus du patrimoine et sur les revenus de placement.

** La fraction de CSG affectée à la CNSA étant fixée par arrêté ministériel en application du 3° de l’article L. 14-10-4, on prendra ici l’hypothèse, très probable, que cette fraction ne sera pas modifiée d’ici la fin de l’année.

Sources : annexe 4 du PLFSS 2020 et annexe Voies et moyens du PLF 2020.

Compte tenu du caractère approximatif du rendement de ces contributions, cette nouvelle rédaction ne modifie pas substantiellement le montant en euros alloué à ces actions en direction du handicap, et pourrait même l’augmenter légèrement.

Elle constitue par conséquent essentiellement une mesure de coordination permettant de tenir compte d’un changement important de financement de la CNSA, issu de la « tuyauterie » de l’exercice 2019.

b.   Une sécurisation juridique des dépenses transitionnelles liées aux personnels des anciennes juridictions sociales

La loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle a prévu le transfert des juridictions sociales spécialisées (tribunaux des affaires de sécurité sociale – TASS, tribunaux du contentieux de l’incapacité
– TCI – et commission départementale d’aide sociale – CDAS) vers des tribunaux de grande instance dédiés. La mesure est entrée en vigueur au 1er janvier 2019 mais un étalement progressif des transferts d’agents est prévu sur la période 2019‑2022, pour leur permettre notamment d’exercer leur droit d’option s’ils sont fonctionnaires ou de demander leur recrutement par le ministère de la justice pour les salariés de droit privé.

Dans ce délai, certains agents mis à disposition pourraient continuer à relever du budget de la sécurité sociale jusqu’au 31 décembre 2020 comme le prévoient les lois de finances pour 2019 et pour 2020 ainsi que l’ordonnance du 16 mai 2018 ([46]).

Le IV, par des dispositions non codifiées, assure le maintien du financement par la sécurité sociale des personnels ayant vocation à être transférés vers l’État dans le cadre de la réforme, en donnant à ce financement une base législative qui semblait lui manquer.

Ces personnels continueraient de se voir appliquer l’article L. 144-5 abrogé du code de la sécurité sociale, qui prévoit la prise en charge des dépenses liées au contentieux social par la caisse nationale compétente.

Sont ainsi concernés :

– les fonctionnaires de l’État exerçant dans des TASS ;

– les agents contractuels exerçant dans les TASS et les TCI ;

– les salariés de droit privé des organismes de sécurité sociale mis à disposition.

*

*     *

Article 4
Modification du montant M applicable à la clause de sauvegarde des médicaments remboursables

Adopté par la commission sans modification

L’article 4 ajuste rétroactivement le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde applicable aux médicaments remboursables (dit « taux M ») afin de tenir compte d’un « effet de base » 2018 caractérisée par une forte baisse de ce chiffre d’affaires. Ce taux M 2019 serait ainsi fixé à 1,01 fois le chiffre d’affaires 2018, au lieu de 1,005.

1.   La clause de sauvegarde en matière de médicaments remboursables, un mécanisme profondément réformé par la LFSS pour 2019

Sans reproduire ici dans le détail l’analyse que le rapporteur général avait faite de l’ancien et du nouveau dispositif de la clause de sauvegarde dans son précédent rapport ([47]), il convient ici d’en rappeler les éléments essentiels.

● Créé en 1999, le mécanisme de la clause de sauvegarde, prévu à l’article L. 138-10 du code de la sécurité sociale, constitue un outil fiscal de régulation de la dépense de médicaments. La clause fonctionne comme un prélèvement sur le chiffre d’affaires des entreprises pharmaceutiques, déclenché lorsque celui-ci dépasse les objectifs d’évolution fixés par le législateur.

Si le déclenchement de la clause est calculé sur une base agrégée, le paiement de celle-ci, une fois déclenchée, est réparti entre les entreprises concernées en fonction de leur part dans le chiffre d’affaires global. Le seuil de déclenchement correspond à un seuil d’évolution du chiffre d’affaires, net des remises dont la sécurité sociale a pu bénéficier auprès du fabricant.

● Entre 2015 et 2018, le législateur avait souhaité distinguer les clauses applicables aux dépenses réalisées en « ville » et à l’hôpital, et avait ainsi substitué au taux K deux taux dits « Lv » et « Lh ».

La LFSS pour 2017 a par ailleurs procédé à une modification des règles de calcul en retirant la déductibilité des remises dans le calcul de l’assiette.

● Dans le sillage des engagements pris devant le Conseil stratégique des industries de santé (CSIS), la LFSS pour 2019 avait considérablement simplifié le mécanisme :

– en rétablissant une clause de sauvegarde unique pour l’ensemble du secteur, supprimant ainsi les taux « Lv » et « Lh » ;

– en remplaçant le principe d’un seuil de déclenchement calculé à partir d’un taux d’évolution, trop dépendant de la réalisation de l’année précédente, par un montant en euros, plus lisible ;

– en réintégrant les remises dans le calcul de l’assiette, afin d’avoir une assiette plus réaliste du coût réellement supporté par la sécurité sociale ;

– en supprimant les exemptions d’assiette liées aux génériques et aux médicaments sur les maladies orphelines.

Les taux de prélèvement, une fois la clause déclenchée, n’ont quant à eux pas été modifiés :

 

Droit applicable jusqu’à l’exercice 2018 (taux T par rapport aux taux Lv ou Lh)

Droit applicable depuis l’exercice 2019 (chiffre d’affaires CA par rapport au montant M)

Taux applicable au chiffre d’affaires

T supérieur à L et inférieur ou égal à L + 0,5 point

CA supérieur à M et inférieur ou égal à M multiplié par 1,005

50 %

T supérieur à L + 0,5 point et inférieur ou égal à L + 1 point

CA supérieur à M multiplié par 1,005 et inférieur ou égal à M multiplié par 1,01

60 %

T supérieur à L + 1 point

CA supérieur à M multiplié par 1,01

70 %

Commission des affaires sociales, à partir de l’étude d’impact annexée à la LFSS pour 2019.

Pour la première année d’application du nouveau mécanisme, soit 2019, le législateur avait retenu un montant M défini en fonction du chiffre d’affaires réalisé en 2018, majoré de 0,5 %.

● L’opportunité de ces modifications demeure intacte pour le rapporteur général, qui souhaite qu’elles puissent s’inscrire dans le temps, notamment compte tenu des multiples « allers-retours » intervenus ces dernières années à ce sujet. Par ailleurs, sa construction n’exclut pas la nécessité d’un ajustement s’agissant notamment de l’exercice 2019, très dépendant des résultats de l’année 2018.

2.   L’article 4 ajuste le montant M applicable en 2019 et fixe ce même montant M pour 2020

● L’étude d’impact rappelle que les ventes de médicaments remboursables ont connu pour la première fois une baisse après plusieurs années de croissance, d’environ 1,1 point en 2018, alors que la loi de financement pour 2018 avait initialement prévu un « plafond » de 0 % pour la ville et de 2 % à l’hôpital. Cette situation résulterait de négociations fructueuses sur les prix, ainsi que d’un effet moindre des arrivées de médicaments onéreux qui étaient attendus.

2019 constituant l’année de transition vers le nouveau mécanisme de la clause de sauvegarde fixée en euros et non en taux d’évolution du chiffre d’affaires, le montant M pour 2019 était calculé, pour la dernière fois, par rapport au chiffre d’affaires constaté en 2018. Ce dernier s’étant révélé plus faible que prévu, à droit inchangé, le montant M pour 2019 aurait été logiquement plus faible et plus facilement déclenché. Afin que les entreprises pharmaceutiques ne soient pas doublement sanctionnées – par la baisse de chiffre d’affaires en 2018 et sa rétroaction sur le seuil du déclenchement de la clause de sauvegarde en 2019, le présent article procède à l’ajustement du mode de calcul du montant M pour l’année en cours.

Ce montant correspond ainsi, dans le droit proposé, au chiffre d’affaires de l’année 2018 augmenté de 1 % au lieu de 0,5 %.

Rétroactive sur les plans juridique et financier, la mesure devrait coûter 60 millions d’euros en 2019. Ce chiffrage est un peu surprenant, car d’après les échanges entre le rapporteur général et la direction de la sécurité sociale, le déclenchement de cette clause n’était qu’éventuel, des incertitudes pesant encore sur la fin de l’exercice 2019, avec d’importantes négociations en cours avec le Comité économique des produits de santé (CEPS).

Cette situation témoigne par ailleurs des limites du nouveau dispositif, qui continue à être fortement dépendant de sa base. Pour la direction de la sécurité sociale, ce mode de construction par référence à l’année précédente était inévitable dans un premier temps, même si le montant M a vocation à devenir, dès que les services auront un peu de recul, un objectif en euros.

Elle ne devrait pas poser de difficultés particulières dans sa mise en œuvre car les entreprises n’ont pas encore effectué leur calcul de leur chiffre d’affaires annuel, qui sera transmis aux URSSAF en début d’année 2020.

*

*     *


Article 5
Rectification des prévisions et objectifs relatifs à 2019

Adopté par la commission sans modification

L’article 5 porte la rectification des prévisions de recettes et de soldes ainsi que des objectifs de dépenses relatifs à l’année en cours, afin de tenir compte des données disponibles les plus récentes, ainsi que des mesures rectificatives.

La rectification pour l’année 2019 est singulièrement significative, puisque le déficit des régimes de base et du Fonds de solidarité vieillesse serait ainsi en 2019 de 5,5 milliards d’euros, contre un quasi-équilibre (– 0,2 milliard) attendu l’année dernière.

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer en loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), en application des dispositions organiques définissant son contenu.

B du I de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale

« B.- Dans sa partie comprenant les dispositions relatives à lannée en cours, la loi de financement de la sécurité sociale :

« 1° Rectifie les prévisions de recettes et les tableaux déquilibre des régimes obligatoires de base et du régime général par branche, ainsi que des organismes concourant au financement de ces régimes ;

[...]

« 3° Rectifie lobjectif assigné aux organismes chargés de lamortissement de la dette des régimes obligatoires de base et les prévisions de recettes affectées aux fins de mise en réserve à leur profit. »

Il sagit dassurer linformation du Parlement quant aux perspectives financières pour les différents régimes ainsi que le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) pour lannée en cours, soit 2019, en utilisant notamment les données fournies par la direction de la sécurité sociale à la Commission des comptes de la sécurité sociale lors de sa réunion du 30 septembre dernier, et en intégrant déventuelles mesures rétroactives prises dans la présente deuxième partie.

● Au titre des prévisions de recettes et des tableaux d’équilibre, le présent article rectifie les prévisions issues de trois articles de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2019 ([48]) :

– l’article 32, approuvant les prévisions de recettes et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base ;

– l’article 33, approuvant les prévisions de recettes et le tableau d’équilibre, par branche, du régime général ;

– l’article 34, approuvant les prévisions de recettes et le tableau d’équilibre du FSV.

● S’agissant des objectifs de dépenses, sont juridiquement modifiés, outre les articles 32 et 33 pour les tableaux d’équilibre :

– l’article 81 pour la branche maladie, maternité, invalidité et décès ;

– l’article 83 pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles – AT-MP ;

– l’article 86 pour la branche vieillesse ;

– l’article 87 pour la branche famille.

Concernant l’objectif d’amortissement de la CADES et les prévisions de recettes mises en réserve par le FRR et le FSV, cet article rectifie les montants prévus par l’article 34.

1.   Une dégradation significative des comptes sociaux en 2019, loin de l’équilibre attendu

Le de cet article arrête, pour l’ensemble des régimes obligatoires de base, les nouvelles prévisions de recettes, les objectifs de dépenses afférents et le tableau d’équilibre, fixant ainsi provisoirement le déficit de ce périmètre à 5,5 milliards d’euros.

Comme pour les tableaux d’équilibre pour le dernier exercice clos, l’analyse du solde suppose de le comparer, d’une part, avec ce qui était attendu et avec l’exercice précédent, d’autre part.

a.   La rectification des prévisions : la combinaison d’un contexte dégradé et de la non-compensation de la loi « MUES »

En vue de procéder à cette première comparaison, les données rectificatives sont mises en regard, dans le tableau ci‑après, des prévisions et objectifs initiaux de la LFSS pour 2018.

TABLEAU D’ÉQUILIBRE 2019 DE L’ENSEMBLE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE

(en milliards d’euros)

Prévisions initiales

(LFSS 2019)

Prévisions révisées

(PLFSS 2020)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Vieillesse

241,4

241,2

0,2

239,5

241,5

– 2,3

Maladie

217,3

218,0

– 0,7

215,8

218,8

– 3,0

Famille

51,4

50,3

1,1

51,1

50,2

0,8

AT-MP

14,7

13,5

1,2

14,6

13,5

1,2

Total *

510,9

509,2

1,8

507,0

510,3

– 3,3

Total incluant le FSV*

509,4

509,6

– 0,2

505,2

510,7

– 5,5

* Hors transferts entre branches.

Sources : LFSS 2019 et PLFSS 2020.

Au total, lécart à la prévision est donc de 5,3 milliards deuros ([49]). Deux branches font lobjet dune rectification très importante : ainsi les soldes des branches maladie et vieillesse sont dégradés respectivement de 2,5 et 2,3 milliards deuros. Dans une moindre mesure, la branche famille connaît un léger recul de ses recettes pour 300 millions deuros ; la branche AT-MP est exactement au niveau attendu.

Cette évolution différenciée provient directement de la nature des rectifications apportées en recettes et en dépenses pour l’exercice 2019, qui a impacté de manière asymétrique les différentes branches.

Hors mesures nouvelles, le rapport remis à la Commission des comptes de la sécurité sociale fait état d’un déficit de 2,5 milliards d’euros en 2019, résultant de plusieurs écarts à la prévision :

– un « effet de base » globalement négatif puisque les recettes en 2018 ont été plus faibles que prévu, ce qui nécessite de rectifier de 300 millions d’euros à la baisse les calculs réalisés sur cette base ;

– une révision drastique des hypothèses macroéconomiques en plusieurs temps ; d’abord, dans le programme de stabilité transmis à la Commission européenne en avril, puis dans les « prévisions d’automne » qui servent de fondement à la construction des textes financiers, pour un total de 1 milliard d’euros ;

Les nouvelles hypothèses macro-économiques pour 2019

Les prévisions de croissance du produit intérieur brut (PIB) (+ 1,7 %), de la masse salariale (+ 3,5 %) et de l’inflation hors tabac (1,3 %) sur lesquelles était fondée la construction des deux textes financiers lautomne dernier ont été profondément revues au cours de l’exercice.

Le programme de stabilité a révisé la prévision de croissance du PIB (+ 1,4 %) et de croissance de la masse salariale (+ 3,1 %) à la baisse, avec des effets négatifs sur les comptes sociaux, dont les ressources sont très sensibles notamment à la seconde variable. Les hypothèses de prix ont elles aussi été révisées à la baisse par le programme de stabilité (+ 1,1 %).

Les dernières prévisions, dites « prévisions dautomne », réalisées par la direction générale du Trésor pour ce nouvel exercice, maintiennent les prévisions du taux de croissance du PIB et réévaluent à la hausse les prévisions de croissance de la masse salariale (+ 3,3 %) et à la baisse les prévisions d’inflation (+ 1,0 %).

Ces hypothèses ont été jugées « cohérentes avec les informations disponibles » par le Haut Conseil des finances publiques dans son dernier avis, qui a néanmoins relevé l’importance des aléas géopolitiques et commerciaux sur ces hypothèses ([50]).

Cette dernière révision, globalement positive par rapport aux hypothèses d’avril, ne s’est cependant pas entièrement répercutée dans les comptes sociaux, qui ont en réalité été largement « desensibilisés » à ces indicateurs par deux mesures :

– d’abord, la création de la prime exceptionnelle de pouvoir dachat a permis une hausse de la masse salariale, décorrélée de la hausse de la masse salariale soumise à prélèvements sociaux (cf. infra) ; le rapport remis à la Commission des comptes de la sécurité sociale estime ainsi que la croissance salariale soumise à cotisations est quasiment la même qu’en avril (+ 3,0 contre + 2,9 en avril) ;

– par ailleurs, les dépenses de prestations ont été en partie décorrélées de l’inflation en raison de la mesure de revalorisation maîtrisée prévue par l’article 68 de la LFSS pour 2019.

C’est la raison pour laquelle le montant de 1 milliard d’euros ne correspond pas du tout à la stricte application des hypothèses de sensibilité habituellement utilisées à cette baisse de 0,2 point du taux de croissance de la masse salariale et 0,3 point de l’inflation par rapport aux prévisions initiales([51]).

– indépendamment des seules prévisions macroéconomiques, des erreurs de prévision directement liées aux charges des régimes ont dû être prises en compte pour un total de 1,2 milliard d’euros, dont la moitié correspond à un fort dynamisme des prestations vieillesse, malgré la revalorisation maîtrisée, et l’autre à la conjonction à parts égales d’une hausse des charges de gestion administrative, de compensation démographique du régime général et des autres charges (non-recouvrement, transferts, recours contre tiers).

Parti dun léger déficit en 2019, le solde des ROBSS et du FSV sest donc dégradé de la manière suivante :

Évolution du solde robss + fsv 2019 par rapport aux prévisions initiales

(en milliards deuros)

Solde LFSS 2019

– 0,1

Effet « base » 2018

– 0,3

Impact des nouvelles prévisions

– 1,0

Hausse des prestations vieillesse

– 0,6

Gestion administrative

– 0,2

Compensation démographique

– 0,2

Autres

– 0,2

Solde CCSS septembre 2019

– 2,6

L’article 3 du présent projet de loi prévoit la non-compensation des mesures issues de la loi portant mesures d’urgence économiques et sociales (« MUES »), pour un total de 2,8 milliards d’euros. Pour le détail de cette mesure, on pourra utilement se référer, dans ce rapport, au commentaire de cet article 3.

La prime exceptionnelle de pouvoir d’achat en 2019 : un effet de substitution ?

Parmi les quatre mesures adoptées dans le cadre de la loi « MUES », deux mesures n’avaient pas d’impact financier : la remise d’un rapport sur la revalorisation de la prime d’activité (article 4), mais aussi la création d’une prime exceptionnelle entièrement exonérée de cotisations et contributions sociales, ainsi que d’impôt sur le revenu (article 1er([52]) .

Dans son étude d’impact, le Gouvernement avait estimé que le coût de cette dernière mesure était nul, dans la mesure où la prime n’aurait pas été versée sans ce dispositif d’exonération et ne constituerait par conséquent une perte de recettes ni pour les organismes de sécurité sociale, ni pour l’État. Sur le plan juridique, l’article 1er avait donné force légale à ce principe de « non-substituabilité » en prévoyant qu’« elle ne peut se substituer à des augmentations de rémunération ni à des primes prévues par un accord salarial, le contrat de travail ou les usages en vigueur dans lentreprise. Elle ne peut non plus se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens de larticle L. 242-1 du code de la sécurité sociale, versés par lemployeur ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales, contractuelles ou dusage. »

Cette absence de coût de la prime explique notamment qu’elle ne se voit pas appliquer l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, qui prévoit une compensation budgétaire vers la sécurité sociale pour toute exonération de cotisations ou contributions sociales, en l’absence de disposition législative contraire.

L’exonération de la prime ayant pris fin au 31 mars 2019, le recul semble avoir eu raison de la « pureté » juridique de cette analyse.

Ainsi, le rapport remis à la Commission des comptes de la sécurité sociale en juin estime qu’« on ne peut exclure que cette prime exceptionnelle ait pris, pour une partie difficilement quantifiable, la place de primes de fin dannée qui auraient été versées indépendamment de la mesure dexonération ». Le rapporteur général souscrit pleinement au constat du rapport, qui poursuit en rappelant que « lenjeu est loin dêtre négligeable. En effet la direction du Trésor estime à 3,1 % la progression de la masse salariale en 2019, soit 0,2 point imputable à cette prime. Si cette prime était soumise à prélèvements sociaux, elle générerait 400 M € de recettes supplémentaires. »

Cette longue citation témoigne du double risque que comporte la mesure :

– un usage opportuniste de certaines entreprises qui auraient profité de la prime exceptionnelle pour octroyer des rémunérations qui auraient pu être versées par ailleurs, sans s’acquitter des prélèvements sociaux et fiscaux dus ;

– l’absence de compensation pour la sécurité sociale des pertes de recettes résultant de ces pratiques, puisque l’exonération sociale est réputée ne pas avoir de coût en droit, tout en constituant une perte de recettes conséquente en pratique.

Naturellement, lampleur du problème dépend largement de celle de cette substitution. Or, de nombreux acteurs auditionnés par le rapporteur général estiment que cette dernière est extrêmement forte, et quelle le serait davantage en cas de reconduction, sur une période plus longue de six mois, contre trois dans le dispositif appliqué en 2019 Ainsi, les services de lACOSS ont rappelé, sur la base des statistiques publiées le 10 septembre dernier sur la masse salariale, que le salaire moyen par tête a augmenté de 1,1 % au premier trimestre 2019, durant lequel la prime pouvait encore être versée, avant de plonger de 0,7 % au deuxième trimestre, durant lequel la prime ne pouvait plus lêtre.

Si corrélation n’est pas nécessairement causalité, trop d’indices concordent pour que le rapporteur général souhaite réfléchir à la mise en place d’un mécanisme de compensation plus équitable pour la sécurité sociale, qui subit de facto les contournements du dispositif, et à des investigations plus poussées, par exemple dans le cadre du « Printemps social de l’évaluation ».

Combinée à la rectification des prévisions (– 2,6 milliards d’euros), cette non-compensation permet donc d’expliquer la totalité de la dégradation des comptes des régimes obligatoires et du FSV d’un léger excédent vers un important déficit.

Sans effet sur le solde global, l’article 3 a procédé à une réaffectation des recettes, dont le détail est présenté dans le commentaire de cet article. On peut toutefois relever que l’impact « spontané » de ces deux facteurs de dégradation a été redistribué :

– la branche famille subit ainsi une réaffectation de ses recettes vers la branche maladie, pour 300 millions d’euros, correspondant à la CSG à taux réduit qu’elle a indûment perçu, selon le Gouvernement ;

– la branche maladie est globalement perdante, à hauteur du coût de la création du taux intermédiaire de CSG soit 1,5 milliard d’euros, afin de préserver les ressources du FSV, lequel aurait subi la totalité de ces « pertes » en l’absence de mesures correctives ;

– la branche vieillesse subit très largement l’anticipation de l’exonération de cotisations sociales salariales des heures supplémentaires (1,25 milliards d’euros), qui se répercute également sur les autres régimes de base (par exemple, à hauteur de 39 millions d’euros pour la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locale – CNRACL).

b.   En conséquence, une situation très dégradée par rapport à 2018

● Ces prévisions rectifiées pour 2019 mettent ainsi fin à une série continue de réduction du déficit de la sécurité sociale depuis 2010.

La comparaison avec le résultat arrêté en 2018 témoigne d’une situation très dégradée par rapport à l’exercice précédent :

comparaison du tableau d’Équilibre des rÉgimes obligatoires de base
avec l’Exercice prÉcÉdent

En milliards d’euros

 

Réalisé (2018)

(LFSS 2019)

Prévisions révisées (2019)

(PLFSS 2020)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Vieillesse

236,4

236,5

– 0,1

239,5

241,5

– 2,3

Maladie

212,3

213,1

– 0,8

215,8

218,8

– 3,0

Famille

50,4

49,9

0,5

51,1

50,2

0,8

AT-MP

14,1

13,4

0,7

14,6

13,5

1,2

Total*

499,7

499,3

0,3

507,0

510,3

– 3,3

Total incluant le FSV*

498,4

499,8

– 1,4

505,2

510,7

– 5,5

Sources : LFSS 2019, PLFSS 2020.

Globalement, cette dégradation par rapport à l’exercice précédent est principalement due à une décélération très forte des recettes, en raison des mesures précédemment citées (+ 1,3 % au lieu de + 3,1 % en 2018), plutôt qu’à l’évolution des dépenses plus maîtrisée que l’année précédente (+ 2,1 % au lieu de 2,3 %).

Le solde définitif résulte très largement, en recettes, des mesures nouvelles et des rectifications précitées et, en dépenses, de la revalorisation maîtrisée induite par l’article 68 de la LFSS pour 2019.

● La hausse de 4,1 milliards du déficit se décline assez logiquement par une forte dégradation des comptes des branches les plus importantes sur un plan financier, à savoir les branches vieillesse (– 2,2 milliards d’euros) et maladie
(– 2,2 milliards d’euros), ainsi que ceux du FSV (– 500 millions d’euros).

L’amélioration des comptes des branches famille (+ 300 millions d’euros) et AT-MP (+ 500 millions d’euros) ne permet pas de compenser cette dégradation.

2.   Une tendance très similaire pour le régime général

Le porte rectification, pour le régime général, des prévisions de recettes fixées par la loi de financement pour 2019, des objectifs de dépenses afférents et du tableau d’équilibre, ces données étant mises en regard, dans le tableau ci-après, des corrections que propose d’y apporter cet article.

tableauX d’équilibre 2019 du régime général

(en milliards d’euros)

 

Prévisions initiales

(LFSS 2019)

Prévisions révisées

(PLFSS 2020)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

Vieillesse

137,5

136,9

0,6

135,5

137,5

– 2,1

Maladie

215,7

216,4

– 0,7

214,3

217,2

– 3,0

Famille

51,4

50,3

1,1

51,1

50,2

0,8

AT-MP

13,3

12,2

1,1

13,2

12,1

1,1

Total *

404,8

402,7

2,1

400,9

403,9

– 3,1

Total (avec FSV)

404,4

404,2

0,1

400,2

405,6

– 5,4

* Hors transferts entre branches.

Sources : LFSS 2019 et PLFSS 2020.

Le régime général représentant lessentiel du volume financier des régimes obligatoires, et lintégralité ou de la quasi-intégralité dans deux des quatre branches (famille et maladie depuis la mise en place de la PUMA), et assurant lintégration financière de nombreux autres régimes, sa situation financière commande très largement celle de lensemble du champ couvert par les lois de financement.

Sur le solde global, les tendances pour le régime général sont ainsi sensiblement les mêmes que pour l’ensemble des régimes de base, à 100 millions d’euros près liés au caractère légèrement déficitaire de l’ensemble des autres régimes que le régime général.

Au niveau des branches, on peut relever toutefois que la branche vieillesse du régime général subit une dégradation moindre, par rapport aux prévisions, que celle de l’ensemble des régimes obligatoires de base (– 1,5 milliard d’euros au lieu de – 2,3 milliards).

3.   Le Fonds de solidarité vieillesse, la Caisse d’amortissement de la dette sociale et le Fonds de réserve pour les retraites en 2019

a.   Le Fonds de solidarité vieillesse

Le porte rectification, pour les organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base, cest-à-dire le seul FSV, du tableau déquilibre, tel quapprouvé par larticle 33 de la loi de financement pour 2019, ces données étant mises en regard, dans le tableau ci-après, des corrections quil est proposé dy apporter.

TABLEAUx D’ÉQUILIBRE 2019 DES ORGANISMES CONCOURANT
AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE

(en milliards d’euros)

Prévisions initiales

(LFSS 2019)

Prévisions révisées

(PLFSS 2020)

Recettes

Dépenses

Solde

Recettes

Dépenses

Solde

FSV

16,5

18,4

– 2,0

16,6

18,9

– 2,3

Sources : LFSS 2019 et PLFSS 2020.

● La situation du fonds serait légèrement dégradée par rapport aux prévisions initiales.

Côté recettes, les effets des mesures « MUES » ayant été neutralisés par l’article 3 du présent projet de loi, les recettes prévues seraient quasiment identiques aux prévisions.

En dépenses, en revanche, un écart de 500 millions d’euros est à constater par rapport aux prévisions, et résulterait du dynamisme plus important des prises en charge de cotisations au titre du chômage (+ 2,8 % contre 0,3 % attendu) ainsi que de la revalorisation du minimum vieillesse à 903 euros (+ 5 % contre + 4 %).

● Par rapport à 2018, la situation du Fonds serait dégradée de 500 millions d’euros, notamment en raison des importantes pertes de recettes issues de la rétrocession à l’État des prélèvements sociaux, autres que la CSG et la CRDS, sur le capital.

b.   Le Fonds de réserve pour les retraites

Depuis que la loi du 9 novembre 2010 ([53]) a transformé le FRR en fonds fermé, aucune recette ne lui est affectée, ce que confirme le .

La mission du FRR est désormais de verser à la CADES, en avril de chaque année, 2,1 milliards d’euros, de 2011 à 2024, soit un total de 29,4 milliards d’euros.

Au 30 juin 2018, soit après déduction du versement annuel de 2,1 milliards d’euros, la valeur de marché du portefeuille du FRR s’élevait à 32,7 milliards d’euros, soit environ 1,5 milliard de moins que l’année précédente.

Lexercice 2019 sannonce meilleur que lexercice 2018, la performance moyenne en juin sélevant à 7,1 % contre – 5,16 % sur lensemble de lannée 2018.

c.   La Caisse d’amortissement de la dette sociale

L’amortissement cumulé s’élèverait, fin 2019, à 171,2 milliards d’euros, soit près de 65 % de la dette reprise. L’ensemble des dettes sociales reprises par la CADES depuis sa création en 1996 s’élèveraient à la même date à 260,5 milliards d’euros ; 90 milliards d’euros resteraient donc à amortir.

En 2019, la CADES n’a pas repris de dette, le plafond prévu en PLFSS pour 2011 pour la période 2011-2018 ayant été saturé dès 2016. Au 30 juin 2019, la CADES se refinançait au taux de 2,14 % sur dix ans, en légère hausse par rapport à la fin de l’année 2018 (2,02 %).

Les dernières simulations de la CADES prévoient toujours le remboursement de l’intégralité de la dette transférée pour 2024, comme prévu par l’article 4 bis de la loi organique du 2 août 2005 relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.

*

*     *


Article 6
Rectification de lONDAM et des sous ONDAM 2019

Adopté par la commission sans modification

L’article 6 rectifie les prévisions de l’ONDAM pour l’année en cours, à partir desquelles se construit l’ONDAM pour 2020. Cette évolution devrait être conforme à l’objectif initial.

● Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer en loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), en application des dispositions organiques définissant leur contenu.

B du I de larticle L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale ([54])

« B.-Dans sa partie comprenant les dispositions relatives à lannée en cours, la loi de financement de la sécurité sociale :

[...]

« 2° Rectifie les objectifs de dépenses par branche de ces régimes, lobjectif national de dépenses dassurance maladie de lensemble des régimes obligatoires de base, ainsi que leurs sous-objectifs ayant été approuvés dans la précédente loi de financement de la sécurité sociale. »

● En s’appuyant sur les prévisions de dépenses présentées à la Commission des comptes de la sécurité sociale du 30 septembre dernier, il confirme l’horizon d’un ONDAM pour 2018 conforme à celui voté en PLFSS pour 2018, sous réserve d’ajustements au sein des sous-objectifs :

comparaison de l’ONDAM avec l’Exercice prÉcÉdent

(en milliards deuros)

 

Prévisions PLFSS 2019

Prévisions révisées PLFSS 2020

Dépenses de soins de ville

91,5

91,4

Dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l’activité

82,7

82,6

Établissements et services médico-sociaux

 

 

Contribution de lassurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées

9,4

9,6

Contribution de lassurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées

11,3

11,4

Dépenses relatives au fonds d’intervention régional

3,5

3,5

Autres prises en charge

1,9

2

Total

200,3

200,4

Source : annexes 7 de la LFSS 2019 et du PLFSS 2020.

● Selon le rapport à la Commission des comptes, la dépense globale avant rectification s’élèverait à 200,2 milliards d’euros, soit une sous-exécution spontanée de 130 millions d’euros par rapport à l’objectif de la LFSS 2019 après prise en compte des opérations de fongibilité et des changements de périmètre.

Cette sous-exécution porte principalement sur les soins de ville, à hauteur denviron 125 millions deuros. Elle est en grande partie due à la sous-exécution constatée fin 2018 sur les soins de ville, qui se reporte mécaniquement sur les prévisions de 2019, à hauteur de 30 millions deuros environ. Toujours pour les soins de ville, elle tiendrait également à un effet moins important que prévu de certaines revalorisations – les revalorisations des soins infirmiers issues de la nouvelle convention, notamment, ne produisant leurs effets quà partir de 2020 contrairement à ce qui avait été prévu lors de la construction de lONDAM (60 millions deuros).

En revanche, la dynamique de la dépense en soins de ville s’avère plus forte que prévu de 190 millions d’euros, en particulier du fait de l’augmentation des dépenses en médicaments, indemnités journalières et transports sanitaires.

Pour les établissements de santé, cette sous-exécution est due à une dynamique moins forte que prévue des dépenses de la liste en sus et des médicaments disposant d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) (environ 45 millions d’euros). Les dépenses liées à la tarification à l’activité devraient en revanche être conformes aux prévisions.

● À l’inverse, la contribution de l’assurance maladie au financement des établissements médico-sociaux est augmentée de 130 millions d’euros, qui seront consacrés à la modernisation de ces établissements.

● La sous-exécution spontanée et cet apport supplémentaire aux établissements médicaux sociaux se compensant, à champ constant ([55]), l’ONDAM 2019 devrait donc être tenu.

*

*     *


troisième partie :
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET à L’éQUILIBRE DE LA SéCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2020

titre ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET à LA TRéSORERIE

Chapitre Ier
Favoriser le soutien à lactivité économique et aux actifs

Article 7
Reconduction du versement dune prime exceptionnelle exonérée de contributions et cotisations sociales

Adopté par la commission avec modifications

L’article 7 instaure un régime d’exonération sociale sur le versement d’une prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, sur le modèle de la prime inscrite dans la loi portant mesures d’urgence économiques et sociales, à la fin de l’année 2018.

Le bénéfice de l’exonération est conditionné au versement de la prime à des salariés rémunérés sous un plafond annuel équivalent à 3 SMIC, liés à l’entreprise par un contrat de travail au moment de son versement et ne doit se substituer à aucun élément de rémunération.

Ce bénéfice est en outre conditionné à la signature d’un accord d’intéressement, qui peut, par dérogation, porter sur une durée inférieure à trois ans, sans que celle-ci ne puisse être inférieure à un an. La prime devra être versée entre le 1er janvier et le 30 juin 2020.

L’article clarifie enfin les modalités de versement de la prime en cas de recours à une entreprise intérimaire et précise l’application de l’exonération aux établissements ou services d’aide par le travail, pour les travailleurs handicapés.

I.   un effort inédit en faveur de la consommation

1.   La prime exceptionnelle de pouvoir d’achat a été instaurée dans le cadre des mesures d’urgence à caractère économique et social

● La « prime exceptionnelle de pouvoir d’achat » s’inscrit dans le cadre de la loi portant mesures d’urgence économiques et sociales, votée à la fin de l’année 2018 ([56]). Elle s’est accompagnée d’une exonération fiscale sur les heures supplémentaires à partir du 1er janvier 2019 et d’une baisse concomitante du taux de CSG de 8,3 % à 6,6 %, applicable aux personnes retraitées dont les revenus de pension, pour une personne seule sans autre source de revenus, sont inférieurs à 2 000 € nets mensuels en 2019.

Cet effort inédit en faveur du pouvoir d’achat des Français a été estimé à plus de 10 milliards d’euros.

L’ouverture par le Gouvernement de la possibilité pour les employeurs de verser une prime exonérée de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu, en faveur du pouvoir d’achat des travailleurs, s’est faite sous des conditions précises d’application. Afin de garantir un gain de pouvoir d’achat rapide au plus grand nombre de travailleurs, l’exonération s’appliquait aux primes versées :

– aux salariés liés à l’entreprise par un contrat de travail au 31 décembre 2018 ou à la date de versement si celle-ci était antérieure ;

– entre le 11 décembre 2018 et le 31 mars 2019 ;

– aux salariés dont la rémunération est inférieure à 3 SMIC annuels, soit environ 3 600 euros par mois. Ce ciblage permettait à 90 % des salariés de bénéficier potentiellement de la prime.

 La prime ainsi versée était exonérée, dans la limite de 1 000 euros, de lensemble des cotisations et des contributions dues par lemployeur, de lensemble des contributions prévues en matière de formation professionnelle et dapprentissage, ainsi que de toute imposition des salariés au titre de limpôt sur le revenu (IR).

Pour assurer un gain substantiel de pouvoir d’achat, le législateur a prévu que cette prime exonérée ne pouvait se substituer à aucun élément de rémunération, ni à aucune augmentation de rémunération, prime prévue antérieurement par un accord salarial, par un contrat de travail ou les usages en vigueur au sein de l’entreprise concernée. Le rapporteur général observe toutefois que le succès de la prime a conduit mécaniquement à un impact certain sur l’évolution de la masse salariale, dont il lui a également été fait part au cours des auditions qu’il a menées afin de préparer de l’examen du présent projet de loi. Celle-ci n’a augmenté que de 3 % en 2019, alors que les prévisions communes aux projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2019 avaient prévu une augmentation de 3,5 %. Selon les éléments d’information fournis au rapporteur général, l’application de la prime exceptionnelle en 2019 aurait eu pour effet de contracter les salaires au premier trimestre de 2019 et aurait eu un impact négatif de 0,3 % sur l’évolution de la masse salariale de l’année.

● Le versement de la prime lui-même a fait l’objet d’un certain nombre d’éléments de souplesse permettant à chaque entreprise d’en adapter le champ :

– la prime pouvait ainsi être attribuée par l’employeur à l’ensemble de ses salariés ou à ceux dont la rémunération ne dépassait pas un plafond fixé au sein de l’entreprise. Ce plafond pouvait donc être différent de celui de l’exonération proprement dite, qui était de 3 SMIC. La prime pouvait également être versée aux salariés dont la rémunération dépassait ce dernier plafond, sans bénéficier pour autant de l’exonération ;

– la prime pouvait également être modulée. Afin d’assurer le respect du principe d’égalité, les critères présidant à cette modulation ont été précisés dans la loi : il s’agissait du niveau de rémunération, de la durée de présence effective pendant l’année 2018 ou de la durée de travail prévue au contrat de travail pour les salariés qui ne sont pas employés à temps plein ou qui ne sont pas employés sur toute l’année ;

 le montant de la prime et léventuel plafond pour les bénéficiaires devaient faire lobjet dun accord dentreprise. Toutefois, ces critères pouvaient également être fixés par une décision unilatérale de lemployeur prise avant le 31 janvier 2019, sous réserve dune information du comité social et économique, ou, le cas échéant, du comité dentreprise, des délégués du personnel ou de la délégation unique du personnel, avant le 31 mars 2019, date de fin du bénéfice de lexonération.

Cette prime était exceptionnelle à plusieurs égards :

– le champ des travailleurs qui pouvaient potentiellement en bénéficier était particulièrement large, puisque, outre le fait que le plafond des 3 SMIC permettait d’englober la grande majorité des travailleurs dans le secteur privé, la prime exonérée a également pu être versée aux salariés des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) ;

– le champ strictement social de l’exonération s’étendait lui-même bien au-delà du seul champ des cotisations de financement de la sécurité sociale, comme le montre le tableau ci‑après.

Contributions et cotisations sur lesquelles porte l’exonération

- cotisations (parts employeur et salariale) de sécurité sociale y compris, le cas échéant la cotisation complémentaire au régime local d’Alsace-Moselle ;

- cotisations (employeurs et salariés) aux régimes de retraite complémentaire, y compris l’AGFF et l’APEC ;

- cotisations (employeurs et salariés) aux régimes dassurance chômage y compris AGS ;

- contribution solidarité autonomie ;

- contribution de versement transport ;

- contribution au dialogue social ;

- contributions dues au FNAL ;

- CSG et CRDS ;

- taxe sur les salaires ;

- taxe d’apprentissage et contribution supplémentaire à l’apprentissage, contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance ;

- participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue ;

- contribution dédiée au financement du compte personnel de formation ;

- contribution patronale au titre de la formation professionnelle en alternance ;

- participations des employeurs (agricoles et non agricoles) à l’effort de construction ;

- le cas échéant, les contributions résultant d’accords conventionnels de branche.

2.   La prime a permis d’augmenter le pouvoir d’achat d’un grand nombre de travailleurs

● Après une première mise en œuvre du 11 décembre 2018 au 31 mars 2019, le dispositif a été jugé concluant. C’est dans ce sens que le Président de la République, lors de la conférence de presse du 25 avril 2019 qui a clos le « Grand débat », a déclaré : « Il nous faut aller plus loin [...] une meilleure association des salariés aux résultats de lentreprise par la réforme de lintéressement et de la participation [...], par la répétition cette année de la prime exceptionnelle sans charges ni impôts décidée lannée dernière dans le cadre de lintéressement des entreprises si elle décide dapporter 1 000 euros de plus. »

 La distribution de la prime a permis à près de 5 millions de salariés ([57]), soit un quart des salariés du secteur privé, travaillant dans 408 000 établissements, de recevoir une prime dun montant moyen de 401 euros. Par ailleurs, 11 % des salariés ont reçu le montant maximal de 1 000 euros, profitant ainsi dune augmentation approchant un mois de salaire pour les salariés payés au SMIC, tandis que les primes dun montant inférieur à 100 euros ne représentaient que moins de 1 % du total.

La répartition s’est faite selon la distribution suivante :

Distribution des primes versées en fonction de la taille de l’entreprise
en 2019

(euros)

Taille de lentreprise

Montant moyen de prime versé

Moins de 10 salariés

560

Moins de 50 salariés

497

Moins de 250 salariés

440

Plus de 250 salariés

369

Plus de 2000 salariés

377

Source : Données fournies au rapporteur général par le Gouvernement

Le montant des cotisations qui auraient été payées sur ces primes n’est pas connu précisément, compte tenu des effets qu’aurait eus cet assujettissement sur l’assiette. Il est toutefois possible, à partir des données fournies par la Commission des comptes de la sécurité sociale ([58]), d’estimer que la diminution de 0,3 % de masse salariale équivaut à une perte de recettes de l’ordre de 600 millions d’euros pour la sécurité sociale.

La prime exonérée a bénéficié en outre à de nombreuses PME et TPE, puisque 40 % du montant total versé par l’ensemble des entreprises – 2,2 milliards d’euros – l’a été par des entreprises dont l’effectif était inférieur à 50 salariés.

II.   L’encouragement à mieux répartir la valeur créée par les entreprises

La généralisation des plans d’intéressement traduit la volonté du Gouvernement de renforcer la participation des salariés à la réalisation des objectifs de leur entreprise. Cette volonté s’est notamment traduite dans la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi « PACTE ».

Le dispositif de l’intéressement dans les entreprises

L’intéressement est un dispositif facultatif, par lequel il est loisible à toute entreprise d’associer les salariés aux résultats, dans un objectif d’encouragement et de partage de la valeur créée. Un accord d’intéressement, qui peut être conclu par les employeurs de droit privé tout comme les EPIC et les établissements publics administratifs employant des travailleurs de droit privé, doit suivre des caractéristiques obligatoires. Il doit :

– associer collectivement les salariés aux résultats ou aux performances de l’entreprise ;

– présenter un caractère aléatoire et résulter d’une formule de calcul lié aux résultats et performances de l’entreprise. Ces critères peuvent suivre, le plus souvent, quatre types d’indicateurs :

● les résultats de lentreprise (liés aux résultats nets, à la marge, à la valeur ajoutée) ;

● lactivité (coûts de production, seuil de rentabilité, absentéisme, prix de vente, stock moyen...) ;

● la qualité (satisfaction clients, réclamations, ratio de qualité, propreté ou rangement, respect de lenvironnement) ;

● la sécurité (accidents du travail, respect des normes de sécurité) ([59]) ;

– être conclu pour une durée minimale de trois ans, par le biais d’une convention ou un accord collectif de travail, un accord entre l’employeur et les représentants d’organisations syndicales représentatives dans l’entreprise, un accord conclu au sein du comité d’entreprise ou, à défaut, par la ratification d’un projet d’accord proposé par l’employeur à la majorité des deux tiers du personnel.

Le calcul de la répartition de l’intéressement peut se faire sur la base de critères objectifs tels que la présence dans l’entreprise ou le montant des salaires. Il peut bien évidemment également être uniforme entre tous les salariés.

Enfin, le montant des primes ne doit pas constituer une forme de substitution aux éléments ordinaires de rémunération. Le montant global distribué ne peut donc dépasser annuellement 20 % du total des salaires bruts. Par ailleurs, un même bénéficiaire ne peut toucher, au cours d’un seul exercice, une prime supérieure aux trois quarts du montant du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), soit 40 524 euros en 2019 ([60]).

● Les dispositifs d’intéressement demeurent toutefois notoirement sous-utilisés. Selon une étude d’août 2018 de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du travail (Dares), seuls 56 % des salariés du secteur marchand non agricole, soit 8,9 millions de salariés, avaient accès à au moins un dispositif de participation, d’intéressement ou d’épargne salariale en 2016 ([61]). Cette faiblesse du recours aux dispositifs de participation, d’épargne salariale et d’intéressement se double d’une inégalité sensible entre les entreprises en fonction de leur taille. Ainsi, en 2016, 93,5 % des salariés dans des entreprises de plus de 1 000 personnes avaient accès à l’un de ces dispositifs, contre 13 % pour les entreprises de moins de 10 salariés.

Le dispositif résultant de la loi « PACTE » vise à favoriser les plans d’intéressement par trois biais principaux :

– la mise en place d’un régime d’intéressement, de participation ou d’épargne salariale doit être menée au sein de chaque branche avant le 31 décembre 2020. À défaut d’initiative de la partie patronale au plus tard le 31 décembre 2019, la négociation s’engage dans les quinze jours suivant la demande d’une organisation de salariés représentative dans la branche

– la suppression du forfait social sur les sommes versées au titre de l’intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés ;

– la mise en place d’accord-types d’intéressement et de participation, qui reprennent l’ensemble des clauses obligatoires devant figurer dans un accord de participation et d’intéressement.

III.   Le DISPOSITIF proposé : reconduire la prime exceptionnelle et encourager l’intéressement

1.   Prolonger les effets positifs de la prime sur la consommation et le pouvoir d’achat des salariés

Le dispositif proposé par le Gouvernement vise à reproduire les effets positifs de la prime exonérée pour les salariés, afin de poursuivre le redressement du pouvoir d’achat des travailleurs.

● Pour ce faire, la prime exonérée reprend au II les principales caractéristiques de la prime décrite supra, complétées par les extensions du champ suivantes :

– le bénéfice de la prime exonérée est étendu, au , aux agents contractuels de droit privé relevant d’un établissement public au moment du versement de la prime ;

– le délai de versement n’est plus de trois mois et vingt jours, mais de six mois. Il expire au 30 juin 2020, en vertu du du I ;

Surtout, à la différence de la prime exonérée pour l’année 2019, le D du I précise que les conditions dans lesquelles la prime comprend les salariés mis temporairement à disposition d’une entreprise utilisatrice, au sens de l’article L. 1251-1 du code du travail. L’entreprise utilisatrice doit informer l’entreprise de travail temporaire aux services de laquelle elle a recours qu’elle attribue la prime à ses salariés, y compris potentiellement aux travailleurs temporaires mis à disposition. L’entreprise de travail temporaire verse la prime sir cette base et en prend compte, le cas échéant, dans son propre plan de versement de la prime, afin d’éviter les doublons.

● Il convient de saluer par ailleurs, dans la lignée de l’amendement adopté par la commission des affaires sociales à l’initiative du rapporteur général lors de l’examen du projet de loi portant mesures d’urgence, que le du II prévoit que l’ensemble des congés maternité, paternité, adoption et éducation des enfants mentionnés dans le code du travail, sont assimilés à des périodes de présence effective.

Les critères de modulation, de choix du plafond ainsi que d’autorité décisionnaire – accord d’entreprise, accord de groupe ou décision unilatérale de l’employeur – font l’objet de modifications à la marge par rapport aux dispositions applicables à la prime pour 2019. L’exonération porte par ailleurs sur les mêmes cotisations, contributions sociales, participations et taxes que la prime pour 2019, à la différence près que l’article L. 6331-9 du code du travail a été abrogé au 1er janvier 2019 ([62]).

 La principale innovation apportée par le dispositif proposé vient du conditionnement de lexonération à la mise en place dun plan dintéressement.

2.   Encourager la généralisation des plans d’intéressement

Dès lors que les primes dintéressement nont pas le caractère délément de rémunération ou de revenu professionnel, elles ne sont pas soumises aux cotisations « de sécurité sociale ». La suppression quasiment complète du forfait social sur lintéressement dans les entreprises constitue en outre un réel encouragement à sa généralisation, notamment dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Changement du régime social de l’intéressement au 1er janvier 2019

Dispositif

Taux de forfait social avant le 1er janvier 2019

Taux de forfait social après le 1er janvier 2019

Intéressement dans les entreprises dau moins 50 salariés

20 %

0 % jusqu’à 249 salariés

20 % à partir de 250 salariés

Intéressement dans les entreprises de moins de 50 salariés

8 % si conclusion d’un accord d’intéressement à compter du 1er janvier 2016

0 %

Source : Ministère du travail.

● Le droit proposé ici vise à conditionner le versement de la prime exonérée à la conclusion d’un plan d’intéressement. Le A du I prévoit ainsi que seules peuvent bénéficier de l’exonération les entreprises qui, à la date de versement de la prime, auront conclu un accord d’intéressement. Une certaine souplesse est toutefois introduite, puisque, à titre dérogatoire, les accords d’intéressement conclus pendant la période d’application théorique de l’exonération – du 1er janvier 2020 au 30 juin 2020 – peuvent porter sur une durée inférieure à trois ans, mais toujours supérieure à un an. Par ailleurs, cette condition s’apprécie au niveau de l’entreprise utilisatrice lorsque le salarié intérimaire bénéficie de la prime exceptionnelle mise en place par cette dernière et versée par l’entreprise de travail temporaire.

● Les entreprises pourront bénéficier, pour faciliter leurs démarches, de l’accord-type opposable mis à leur disposition par l’administration. L’article 155 de la loi « PACTE » ([63]) permet également de mieux sécuriser, du point de vue des entreprises, la mise en place d’un nouvel accord d’intéressement, puisque l’administration dispose désormais d’un délai de quatre mois à compter du dépôt de l’accord pour en demander le retrait ou la modification. À défaut d’une telle demande, le plan d’intéressement et les exonérations fiscales afférentes sont réputés validés, pour la durée de l’accord. Ce délai est étendu à six mois pour la modification de dispositions contraires à des dispositions légales.

● Ce conditionnement est adapté, au E du même I, aux établissements ou services d’aide par le travail (ESAT) dédiés aux travailleurs handicapés qui ne peuvent pas travailler dans des entreprises adaptées. L’ouverture à exonération ne peut s’effectuer que si ces établissements ou services ont versé, dans les douze mois précédant le versement, une prime d’intéressement. Ce dispositif dérogatoire se justifie par le fait que les ESAT ne peuvent mettre en place des accords d’intéressement.

Par ailleurs, la prime doit bénéficier à l’ensemble des travailleurs handicapés, ce critère l’emportant sur les critères alternatifs d’attribution de la prime qui ne peuvent pas entraîner, en tout état de cause, l’exclusion d’un travailleur handicapé de son bénéfice.

*

*     *


Article 8
Ajustement du calcul des allégements généraux

Adopté par la commission sans modification

L’article 8 vise à neutraliser les effets des allégements généraux sur le nouveau dispositif de modulation du taux de contribution à l’assurance chômage, issu de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

Les employeurs des entreprises de plus de onze salariés dont le taux de séparation est supérieur à la moyenne de leur secteur d’activité, et qui ont donc un recours supérieur aux contrats courts, se voient désormais appliquer un malus qui peut aller jusqu’à une augmentation d’un point de leur taux de contribution à l’assurance chômage. Ce système a pour but de contraindre les entreprises à internaliser le coût que représente l’abus de contrats courts pour les finances de l’assurance chômage. A contrario, une entreprise plus vertueuse que la moyenne de son secteur bénéficiera d’un bonus équivalent.

L’intégration des contributions d’assurance chômage dans le champ des allégements généraux sur les rémunérations entre 1 et 1,6 SMIC pourrait aboutir à une suppression de l’effet du « bonus-malus » au voisinage du SMIC.

L’article 8 assure donc une neutralisation des deux dispositifs l’un par rapport à l’autre, qui seront donc cumulés.

Il étend cette neutralisation aux secteurs de l’aide à domicile et des gens de mer, qui bénéficient d’exonérations spécifiques.

Il simplifie par ailleurs la rédaction des dispositions assurant le maintien d’une « cotisation socle » pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), et donc d’une limitation de la réduction de cotisations qui s’y applique.

I.   Le dispositif du « bonus-malus » mis en place dans la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel pourrait être neutralisé par lapplication des allégements généraux

A.   Le dispositif du « bonus-malus » destiné à limiter le recours aux contrats courts, est entré récemment en vigueur

1.   Le recours aux contrats courts pèse excessivement sur l’équilibre de l’assurance chômage

L’évolution des contrats de travail suit actuellement une évolution contrastée entre le stock et le flux, entre la structure de l’emploi et celle de l’embauche. Tandis que le contrat à durée indéterminée (CDI) demeure le contrat largement majoritaire – représentant près de 80 % de l’emploi total – le nombre d’embauches est très majoritairement dominé par le recours aux contrats à durée déterminée (CDD) très courts.

Ceux-ci ont été multipliés par 2,5 en vingt ans, selon l’Unédic. Ils ne représentent toutefois que 3 % du volume du travail du secteur privé et 16 % de la masse salariale totale des CDD. Les évolutions annuelles récentes renforcent ce phénomène. Alors que le nombre de CDI n’a augmenté que de 1 % entre 2000 et 2016, le nombre de CDD d’un mois ou moins a connu une augmentation sensible de 157 %, expliquant presque intégralement la hausse de l’ensemble des CDD.

 

 

Ces dispositifs s’inscrivent paradoxalement majoritairement dans des « relations de travail suivies » et relient souvent le même employeur et le même salarié. Ce sont ainsi 400 000 personnes qui ont connu au moins quatre périodes d’emploi pendant au moins six mois chez le même employeur.

Ces contrats se sont particulièrement développés dans certains secteurs liés à la tertiarisation de l’économie tout comme au recours croissant aux « contrats de mission ». Parmi les secteurs les plus consommateurs de ce type de contrats se retrouvent les arts et spectacles, l’édition ou encore l’hébergement médico-social.

Le recours à ce type de contrats a un coût non négligeable pour l’assurance chômage, calculé en fonction de l’écart entre les contributions associées à ces emplois et les dépenses d’allocations qui y sont associées. Selon l’Unédic, hors intermittents du spectacle, ces dépenses s’élèvent à 900 millions d’euros pour les CDD d’un mois ou moins, et à 2 milliards d’euros pour les contrats d’intérim de moins d’un mois.

Alors que l’Unédic a estimé le montant total des dépenses de l’assurance chômage à 40,1 milliards pour l’année 2018, les contrats courts (CDD et intérim) représentent 5 % des dépenses, soit un niveau supérieur à celui du déficit actuel de l’assurance chômage, estimé à 1,7 milliard d’euros au 31 décembre 2018 ([64]).

2.   Le dispositif de « bonus-malus » vise à encourager les pratiques vertueuses

Pour limiter les effets néfastes du recours aux contrats courts, le législateur s’est emparé d’un sujet sur lequel les partenaires sociaux s’étaient engagés auparavant par le biais d’un accord national interprofessionnel (ANI) ([65]).

Dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, un dispositif de « bonus-malus » a été institué pour inciter les employeurs à internaliser dans leurs décisions les coûts qu’ils font peser sur l’assurance chômage.

Pour ce faire, un système de modulation du taux de contribution des employeurs a été mis en place. Cette modulation est fonction de cinq paramètres : la nature du contrat de travail, l’âge du salarié, la taille de l’entreprise, le secteur d’activité de l’entreprise et, enfin, le nombre de fins de contrat de travail et de contrats de mise à disposition, à l’exclusion des démissions et des contrats de mission et sous réserve de l’inscription des personnes concernées par ces fins de contrat sur la liste des demandeurs d’emploi.

Le taux de cotisation patronale « chômage » est fixé à 4,05 % sur une assiette identique à celle des cotisations de sécurité sociale. Le montant de cette assiette est plafonné à quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale. C’est donc ce taux qui est soumis à modulation, en fonction du taux de recours aux contrats courts, selon des conditions qui ont été récemment précisées par décret ([66]).

3.   Le dispositif de « bonus-malus » va s’appliquer à des secteurs ciblés

Les modalités d’application concrètes du dispositif de « bonus-malus » ont été ainsi définies en fonction du champ, du seuil et des bornes suivants :

– le dispositif s’applique uniquement aux entreprises de plus de onze salariés, selon la définition issue de l’article L 130-1 du code de la sécurité sociale, applicable à partir du 1er janvier 2020. Ce seuil est donc calculé comme la moyenne du nombre de personnes employées chaque mois de l’année civile précédente, sauf franchissement d’un seuil d’effectif salarié, pour lequel ce sont cinq années civiles consécutives qui sont prises en compte dans le calcul ;

– les secteurs concernés sont ceux dans lesquels le taux de séparation médian, défini comme la moyenne des médianes des taux de séparation de l’ensemble des entreprises d’un secteur, pondéré par un taux de masse salariale, est supérieur à un seuil fixé par arrêté du ministre en charge de l’emploi, pour une période de trois ans ;

– le ratio de l’entreprise concernée correspond à la moyenne du nombre de séparations imputées à l’entreprise par rapport à l’effectif de l’entreprise rapporté au taux de séparation moyen du secteur concerné ;

– le taux se calcule selon la formule suivante :

ratio de l’entreprise * 1,46 + 2,59

Cette formule conduit à appliquer le taux « classique » de 4,05 % de cotisation patronale dassurance-chômage si le ratio de lentreprise lui-même est de 1 ;

– la modulation est encadrée par un plancher à 3 % et un plafond à 5,05 %.

B.   L’extension des allégements généraux aux contributions d’assurance chômage pourrait priver d’effet le « bonus-malus »

1.   L’intégration des contributions d’assurance chômage dans les allégements généraux de cotisation

À des fins de diminution du coût du travail et pour faciliter les embauches, de nombreux dispositifs dallégement des cotisations et contributions sociales ont été mis en place depuis le début des années 1990. Sil nest pas nécessaire, pour les besoins de ce commentaire, de remonter à lorigine de ces dispositifs, ceux-ci ont été rationalisés et fusionnés en 2003, au sein dune réduction générale dite « Fillon ».

Désormais codifié à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, le système de réduction dégressive se décline comme suit :

– les employeurs privés, qui paient des cotisations de sécurité sociale, sont par définition, éligibles à l’allégement ;

– la réduction, qui suit une formule déterminée au niveau réglementaire, s’opère par l’application d’un coefficient à un salaire donné. Elle est maximale au niveau du SMIC ([67]) et s’annule à 1,6 SMIC. La valeur de ce coefficient est donc entièrement déterminée par décret. Elle doit toutefois demeurer inférieure à la somme des taux de cotisation et des contributions sur lesquelles la réduction est imputée ;

– le montant de cette réduction est calculé chaque année, par salarié et par contrat de travail.

Le champ de l’allégement s’est progressivement élargi au fil des récentes lois de financement. D’abord limité aux cotisations de sécurité sociale (maladie, maternité, invalidité et décès ; famille ; vieillesse), la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 ([68]), mettant en œuvre les dispositions du Pacte de responsabilité et de solidarité, a inclus dans le champ :

– les cotisations AT-MP, dans les limites propres à cette branche. En effet, afin de garantir une forme de responsabilisation des employeurs, l’allégement appliqué à ces cotisations ne peut dépasser 0,84 % de la rémunération. Ce taux correspond en effet à une contribution minimale des employeurs n’ayant constaté aucun sinistre, une contribution « socle ». Celle-ci est ensuite une fonction croissante de la sinistralité du secteur dans lequel l’entreprise concernée mène ses activités ;

– la contribution des employeurs au Fonds national d’aide au logement (FNAL), dont le taux est fixé à 0,5 % pour les entreprises de plus de 20 salariés et de 0,1 % pour celles qui comprennent moins de 20 salariés, pour l’essentiel des exploitants agricoles et les coopératives agricoles. Dans ce dernier cas, l’assiette est elle-même limitée au plafond annuel de la sécurité sociale ;

– la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA), fixée à un taux de 0,3 % et affectée à la CNSA (Caisse nationale pour la solidarité et l’autonomie).

Pour accentuer l’effort en faveur des actifs, le législateur a encore élargi le champ de l’allégement général bien au-delà du secteur « traditionnel » de la sécurité sociale, en intégrant les contributions des employeurs pour les régimes de retraite complémentaire et pour l’assurance chômage. L’intégration de ces deux types de cotisation aboutit à une réduction du coût du travail de 10,06 % au niveau du SMIC, dont 4,05 % pour les seules cotisations destinées à l’assurance chômage.

Ce dernier allégement a été décalé au 1er octobre 2019 en LFSS 2019 ([69]). À cette date, le coefficient maximal au niveau du SMIC, qui était de 28,55 % à partir du 1er janvier 2019, augmente à 32,6 %.

2.   Le risque de réduire l’efficacité des dispositifs de bonus et de malus pour les entreprises bénéficiaires de la réduction

L’intégration des cotisations patronales d’assurance chômage dans le champ de l’allégement général, qui répond à une logique générale de favoriser les embauches des personnes ayant des niveaux de rémunération parmi les plus faibles, pourrait toutefois entraîner involontairement des conséquences néfastes sur la bonne application du dispositif de « bonus-malus ».

Le coefficient de réduction se déduit en effet de la somme des taux des contributions et cotisations concernées par l’allégement général. Ce coefficient, défini par décret et codifié à l’article D. 241-7 du code de la sécurité sociale, se calcule de la façon suivante :

Coefficient = (T/0,6) × (1,6 × SMIC calculé pour un an/ rémunération annuelle brute - 1)

T constitue la valeur maximale du coefficient issu de la somme des taux des contributions sociales. Celle-ci est fixée actuellement à 0,3214 pour les entreprises de moins de vingt salariés et de 0,3254 pour les autres entreprises, cette différence étant due à la différence du taux de cotisation pour le financement du FNAL. La valeur de T varie en fonction du taux de chacune des cotisations effectivement payées par les employeurs. L’application du « bonus-malus » à ce coefficient aurait donc comme conséquence de faire varier la valeur de l’allégement général en fonction de chacune des entreprises, nuisant ainsi à la cohérence et à la lisibilité de l’ensemble du dispositif.

Les conséquences du dispositif de « bonus-malus » à mesure inchangée sont résumées dans le tableau suivant :

 

Source : données fournies par le Gouvernement au rapporteur général.

L’application du bonus à disposition inchangée entraîne donc, pour un salarié dont la rémunération brute est égale au SMIC, une perte sèche en recettes de 15,97 euros de cotisation chômage.

Ce risque est donc d’autant plus grand que la part des salariés rémunérés au voisinage du SMIC est plus importante parmi les travailleurs embauchés dans le cadre dun contrat court. Alors que les intérimaires représentent 4 % de la population salariée, ils représentent 10 % des personnes touchant le SMIC. Ces taux, concernant les personnes en CDD, sont respectivement de 11 % et de 29 % ([70]).

II.   Un ajustement destiné à préserver l’effet du dispositif de « bonus-malus » sur les cotisations d’assurance chômage

A.   Neutraliser l’effet des réductions sur les cotisations d’assurance chômage

Assurer le plein effet du dispositif de « bonus-malus » pour responsabiliser les entreprises quant aux coûts qu’elles peuvent engendrer pour l’assurance chômage nécessite d’adapter les dispositifs de réduction sur les cotisations chômage votés en LFSS 2019. Cette adaptation doit intervenir à la fois dans le cas d’un bonus, étant donnée l’existence d’un plafond de taux de réduction. Dans les deux cas, la neutralisation passe par une modification afférente du taux de cotisations.

Les modifications apportées aux modalités de calcul de la réduction générale, ainsi qu’aux autres dispositifs d’exonérations de cotisations intégrant les l’assurance chômage dans leur champ, visent à permettre leur calcul sans tenir compte de la modulation éventuelle du taux de la cotisation d’assurance chômage. Cette modulation va donc s’appliquer, dans les conditions prévues à l’article L. 5422-12 du code du travail et aux articles 50-1 à 50-15 du règlement général annexé au décret du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage, et réduire ou augmenter le montant des contributions d’assurance chômage dues par les employeurs.

Ensuite sera calculée la réduction générale des cotisations et contributions patronales (ou un autre dispositif d’exonération), mais sur la base du taux de droit commun de la contribution d’assurance chômage, soit 4,05 %.

Une entreprise sanctionnée d’un malus verra ses cotisations à l’assurance chômage augmenter en proportion du coût que l’utilisation abusive des contrats courts aura entraîné pour l’assurance chômage. À l’inverse, une entreprise qui bénéficiera d’un bonus en raison de la stabilité de ses emplois bénéficiera d’une réduction appliquée à ses cotisations chômage, cumulée à la réduction générale.

Selon le même exemple qu’exposé plus haut, l’entreprise devient créancière de 15,97 euros pour un salarié au SMIC et de 13,17 euros pour un salarié dont la rémunération est proche du SMIC.

Source : données fournies par le Gouvernement au rapporteur général La partie soulignée en vert correspond au montant touché par l’entreprise vertueuse pour la seule réduction générale, équivalente grâce à la neutralisation des effets du bonus sur la réduction générale.

Cette neutralisation est assurée au c du par la modification de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. Le même alinéa prévoit également les cas d’un « trop-perçu » qu’impliquerait la superposition des allégements généraux et d’une réduction d’un point des contributions à l’assurance chômage. Si le champ de ces contributions n’épuise pas la réduction due à l’employeur, elle peut être imputée, selon des conditions qui doivent encore être déterminées par décret, aux cotisations d’assurance chômage au titre des autres salariés, voire aux autres cotisations et contributions dues par l’employeur. Environ 63 000([71]) entreprises pourraient se trouver dans cette situation.

Les cas extrêmes, dans lesquels l’employeur bénéficierait, grâce aux exonérations de cotisations, d’un « reste à verser » inférieur au montant de la réduction due au titre de son faible taux de recours aux contrats courts, estimés à environ 400 entreprises pourraient aboutir à la création d’un « crédit de charge ». Les informations fournies au rapporteur général n’ont pas permis d’identifier clairement les modalités concrètes de versement des réductions de cotisations dans de tels cas.

Le IV du présent article prévoit une application de la neutralisation au 1er janvier 2021, en cohérence avec l’entrée en vigueur du dispositif de « bonus‑malus ».

B.   Adapter le dispositif à des secteurs spécifiques

1.   Les aides à domicile

Le du I duplique le dispositif exposé supra pour les organismes d’aide à domicile, qui emploient des salariés intervenant notamment auprès d’une population en situation de handicap ou de dépendance.

L’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale prévoit, en son III, un dispositif d’exonération spécifique de cotisations patronales de sécurité sociale appliquées aux rémunérations versées aux aides à domicile par :

– les associations et entreprises déclarées pour l’exercice des activités concernant la garde d’enfant ou l’assistance aux personnes âgées ou handicapées ;

– les centres communaux ou intercommunaux d’action sociale (CCAS et CIAS) ;

– les organismes habilités au titre de l’aide sociale ou ayant passé convention avec un organisme de sécurité sociale.

Le Gouvernement et la majorité ont élargi, dans le cadre de la LFSS 2019 ([72]), le champ de l’exonération des cotisations de sécurité sociale, à l’exception des CCAS et des CIAS, à l’ensemble des cotisations exonérées au titre de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ([73]). Toutefois, à la différence de la réduction dégressive de droit commun, l’exonération est totale pour les rémunérations comprises entre 1 et 1,2 SMIC, avant de suivre une pente dégressive et de s’annuler à hauteur de 1,6 SMIC.

Afin là-aussi de préserver l’efficacité des dispositifs des allégements généraux et du « bonus-malus », le présent article prévoit une neutralisation des effets de minoration ou de majoration des contributions d’assurance chômage sur l’exonération de cotisation.

2.   Les gens de mer

Le II prévoit le même dispositif de neutralisation des effets du « bonus‑malus » pour le régime spécial des marins embarqués à bord de navires de commerce battant pavillon français ou d’un État membre de l’Union européenne, affectés à des activités de transport maritime soumises à titre principal à une concurrence internationale. Cette exonération, codifiée à l’article L. 5553-11 du code des transports, porte sur la contribution patronale d’assurance vieillesse, les cotisations d’allocations familiales et la contribution des employeurs contre le risque de privation d’emploi.

C.   Un ajustement rédactionnel concernant la branche AtMP

Le présent article opère au b du des ajustements rédactionnels destinés à faciliter la lisibilité des conditions spécifiques propres aux cotisations accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP).

Ces cotisations, qui entrent dans le champ de la réduction générale, diffèrent toutefois des autres cotisations de sécurité sociale par l’existence d’un seuil minimal, la « cotisation-socle ». Son existence se justifie par la dimension assurantielle de cette branche, les employeurs étant réputés responsables de la santé et de la sécurité des salariés au travail.

La limitation de la réduction se traduit par :

– une valeur maximale du coefficient de réduction, fixée par décret, selon l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ;

– une limite à la réduction imputable à ces cotisations, inscrite à l’article L. 241-5 du même code et égale à un taux applicable à une entreprise au taux de sinistralité nul.

Le décret n° 2018-1356 du 28 décembre 2018 fixe ainsi un taux maximal de réduction générale à 0,78 %.

Le présent article prévoit un renvoi exprès au taux fixé par arrêté ministériel, mentionné à l’article L. 241-5.

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*     *


Article 9
Non-assujettissement aux cotisations et contributions sociales des indemnités spécifiques de rupture conventionnelle dans la fonction publique

Adopté par la commission sans modification

L’article 9 prévoit l’application d’une exonération de cotisations sociales sur les indemnités spécifiques de rupture conventionnelle pour la fonction publique alignée sur celle qui s’applique au secteur privé. La possibilité pour les fonctionnaires, les agents contractuels et les ouvriers d’État de recourir à un dispositif de rupture conventionnelle a été instituée par la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

Cette exonération portera donc à la fois sur les cotisations de sécurité sociale et sur les CSG et CRDS, elle sera totale dans la limite de deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), tandis que les indemnités d’un montant supérieur à dix fois le même plafond seront intégralement assujetties.

L’article précise enfin que, par dérogation au principe de compensation inscrit à l’article L 131-7 du code de la sécurité sociale, les pertes de recette induites par cette exonération ne seront pas remboursées à la sécurité sociale par l’État.

I.   L’État du droit : LE DISPOTIF DES RUPTURES CONVENTIONNELLES, LARGEMENT UTILISÉ DANS LE SECTEUR PRIVÉ, DOIT ÊTRE PROGRESSIVEMENT ÉTENDU AU SECTEUR PUBLIC

A.   Les ruptures conventionnelles ont fait l’objet d’un recours croissant depuis leur création

La création du dispositif des ruptures conventionnelles en 2008 ([74]) répondait à un objectif de sécurisation juridique de la rupture d’un commun accord du contrat de travail. Cette idée, d’abord portée dans le cadre d’un accord national interprofessionnel (ANI) signé le 11 janvier 2008, a donc été codifiée à l’article L. 1237-11 du code du travail.

● La rupture conventionnelle suppose :

– un accord de l’employeur et du salarié. À ce titre, elle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties au contrat ;

– une convention qui en définit les modalités, et notamment le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle (ISRC). Celui-ci est proportionnel au revenu et ne peut être inférieur au montant de l’indemnité de licenciement ;

● Elle bénéficie d’un régime d’exonérations sociales et fiscales identique à celui qui s’applique aux indemnités de licenciement ([75]). Elle est donc exonérée de cotisations sociales pour la fraction qui correspond à deux fois le PASS en vigueur à la date du versement, soit 81 048 euros en 2019.

Elle est par ailleurs soumise à la contribution sociale généralisée (CSG) uniquement pour la part dont le montant excède celui de l’indemnité légale ou conventionnelle. Les bénéficiaires de cette indemnité peuvent prétendre en outre à une exonération partielle de l’impôt sur le revenu.

● La souplesse propre aux ruptures conventionnelles explique le recours croissant à cette modalité de rupture du contrat de travail. De plus, elle permet au salarié de prétendre à l’allocation de retour à l’emploi, contrairement à la démission, même si cette dernière possibilité a toutefois été ouverte, sous conditions, depuis le 1er janvier 2019 ([76]).

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● Le ministère du travail a ainsi recensé 38 500 ruptures conventionnelles homologuées en août 2019, soit une augmentation de 5,9 % en glissement annuel d’août 2018 à août 2019. L’indemnité médiane diffère en fonction des catégories socioprofessionnelles, mais la Dares a estimé son montant en 2018 à 5 900 euros pour les cadres contre 1 000 euros pour les employés ([77]). À rémunération et ancienneté constantes, ce sont les cadres qui obtiennent, les indemnités de rupture proportionnellement les plus élevées : 0,31 mois de salaire par année d’ancienneté, contre 0,25 pour les ouvriers et les employés (soit l’indemnité légale).

Aujourd’hui, les ruptures conventionnelles comptent pour environ 10 % des modes de rupture d’un CDI, soit une proportion inférieure aux licenciements non économiques (12 %) et, a fortiori, aux démissions (40 %) ([78]).

B.   L’extension du dispositif à la fonction publique a pour but de faciliter la mobilité des agents publics

● Les modalités de cessation définitive des fonctions qui entraîne radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire sont limitativement énumérées à l’article 24 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Ce sont :

– l’admission à la retraite ;

– la démission régulièrement acceptée ;

– le licenciement ;

– la révocation.

Afin de faciliter la mobilité et les possibilités de reconversion des agents publics, la loi portée par ce Gouvernement en vue de moderniser la fonction publique ([79]) a prévu, pour les fonctionnaires à titre expérimental et pour les agents publics contractuels et ouvriers d’État la possibilité de recourir à une rupture conventionnelle. Ces derniers pourront donc prétendre à l’allocation de retour à l’emploi, dès le 1er janvier 2020.

L’ISRC pour les agents publics, en l’état, ne bénéficie toutefois pas du régime d’exonération sociale appliqué au secteur privé. Pour rappel, le traitement mensuel brut des fonctionnaires fait l’objet des prélèvements suivants :

Cotisations et contributions recouvrées par les Urssaf au titre des rémunérations versées aux fonctionnaires

(pourcentages)

Type de cotisation et de contribution

Fonction publique dÉtat

Fonction publique hospitalière

Fonction publique territoriale

Maladie, maternité, invalidité, décès sur le traitement soumis à retenue pour pension*

9,7

9,88

9,88

Contribution solidarité autonomie

0,3

0,3

0,3

Allocations familiales

5,25

5,25

5,25

Contribution Fonds national daction pour le logement (Fnal)**

0,10 ou 0,5

0,10 ou 0,5

0,10 ou 0,5

CSG***

9,2

9,2

9,2

CRDS***

0,5

0,5

0,5

Versement transport****

X

X

X

Source : Commission des affaires sociales à partir de données fournies au rapporteur général.

* Les agents des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière sont affiliés à une caisse spécifique, la CNRACL.

** La contribution Fnal est appliquée au taux de 0,1 % pour les employeurs de moins de 20 salariés et de 0,50 % pour les employeurs de 20 salariés et plus.

*** L’assiette de la CSG et de la CRDS est amputée par l’application d’un abattement pour frais professionnels de 1,75 % dans la limite de quatre fois le plafond annuel de sécurité sociale (PASS).

**** Versement dû par les administrations d’au moins onze salariés dans le périmètre d’une autorité organisatrice de la mobilité.

II.   Le dispositif proposé : aligner les conditions d’exonération sociale sur celles qui s’appliquent dans le secteur privé

Le présent article instaure donc un dispositif d’exonération de l’IRSC versée au personnel de la fonction publique de la CSG et des cotisations et contributions sociales.

● Le I intègre ainsi cette indemnité spécifique dans la catégorie des revenus exclus de la CSG et de la CRDS portant sur les revenus d’activité et sur les revenus de remplacement. Ces indemnités sont :

 versées aux fonctionnaires, aux ouvriers des établissements industriels de l’État ainsi qu’aux agents contractuels de droit public ;

– encadrées par deux plafonds :

● le premier fixe une limite supérieure au montant versé au titre de l’IRSC, à hauteur de deux fois le montant du PASS, qui est fixé pour 2019 à une valeur de 40 524 euros ;

● le second établit une limite à hauteur de dix fois le PASS, soit 405 240 euros, au-delà de laquelle l’IRSC est intégralement assujettie à la CSG et à la CRDS.

● Le II, par parallélisme, exclut également les IRSC de l’assiette de l’ensemble des cotisations sociales, à la charge des employeurs publics, dans les mêmes limites que pour l’exonération de CSG et de CRDS.

En dépit de la difficulté d’évaluer précisément le taux de recours à ces indemnités, l’étude d’impact évalue à 13 millions d’euros le coût de ce dispositif en année pleine, soit 2022. Cette estimation s’appuie sur un taux de recours à la rupture conventionnelle par environ 2 000 personnes par an, ce qui semble, en comparaison avec l’effectif total de la fonction publique, supérieur à 5 millions de personnes, être une hypothèse particulièrement prudente.

● Le III, enfin, prévoit que cette exonération déroge au principe inscrit à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, selon lequel toute exonération de cotisations sociales est compensée par le budget de l’État. La perte de recettes induite par la présente exonération sera donc intégralement portée par les organismes de sécurité sociale.

*

*     *


Chapitre II
Simplifier et moderniser les relations avec ladministration

Article 10
Unification du recouvrement dans la sphère sociale

Adopté par la commission sans modification

L’article 10 instaure des mesures d’unification du recouvrement des cotisations, d’extension des missions des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) et de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), de simplification des relations de ces organismes avec les employeurs et les attrributaires et d’amélioration de l’information.

L’unification du recouvrement dans le champ social se traduit par une extension des compétences de recouvrement par les URSSAF et les caisses générales de sécurité sociale (CGSS) aux cotisations :

– de retraite complémentaire, actuellement recouvrées par le réseau de l’AGIRC-ARRCO ;

– de régimes spéciaux, que sont ceux des gens de mer, des ministres des cultes, des professions libérales, des agents contractuels de la fonction publique, des personnels des industries électriques et gazières ainsi que les cotisations de retraite des agents des fonctions publiques territoriales et hospitalières.

L’extension du recouvrement se fera en plusieurs temps, selon un calendrier fixé dans l’article et échelonné entre 2020 et 2023. Ce calendrier pourra par ailleurs faire l’objet d’une anticipation ou d’un report, par décret, dans la limite d’un an. Ce décalage peut également s’appliquer à la collecte des ressources de la formation professionnelle et de l’apprentissage, dont le transfert a été instauré par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

L’article tire les conséquences de cette extension du recouvrement en confiant à l’avenir aux URSSAF toute autre activité de recouvrement de cotisations et de contributions prévue par la loi.

Larticle confie également à lACOSS une mission de prise en charge de la réduction dégressive sur les cotisations et contributions sociales, dite « allégement Fillon ». Il revient aux branches de la sécurité sociale dassurer la couverture des pertes engendrées pour lACOSS.

Il contribue à la simplification des relations entre les organismes collecteurs et les employeurs, en renforçant les obligations dinformation des premiers envers les seconds dans le cadre de la déclaration sociale nominative (DSN). Les organismes collecteurs pourront également, en cas de carence avérée de lemployeur, procéder eux-mêmes doffice aux corrections nécessaires pour assurer la sécurité juridique de la collecte des cotisations.

Par ailleurs, il autorise l’ACOSS à appliquer aux versements un taux forfaitaire reflétant le risque de non-recouvrement, ainsi que des frais de gersion. Les organismes collecteurs des cotisations pourront par ailleurs admettre le caractère irrécouvrable de certaines créances de manière plus souple.

Il permet enfin à la Cour des comptes de bénéficier dune vision plus sincère des comptes sociaux et de lensemble des entités dont lactivité a un impact sur ces derniers.

I.   L’État du droit

A.   Un foisonnement de dispositifs de recouvrement dans la sphère sociale

L’hétérogénéité des modalités de recouvrement des ressources au sein de la sphère sociale – ressources qui se présentent principalement sous la forme de cotisations et de contributions – tient à l’existence même de nombreux régimes différents.

● La plus grande part du recouvrement est assurée par l’Agence centrale des caisses de sécurité sociale (ACOSS), mais il existe de nombreux régimes alternatifs assurant leur propre recouvrement. Il s’agit notamment, pour citer les plus importants, des régimes de retraite complémentaire (AGIRC-ARRCO) ou de prise en charge des contractuels de droit public (IRCANTEC).

Cette multiplicité d’acteurs et de régimes est source de complexité, qui se traduit, notamment pour les cotisants, par :

– l’absence d’interlocuteur unique pour la déclaration des informations nécessaires au recouvrement des cotisations ;

– la multiplication de démarches similaires, augmentant les possibilités d’erreur et donc fragilisant la sécurité juridique autant des cotisants que des affectataires.

Cela ne doit toutefois pas oblitérer la complexité que représente la mise en place d’un recouvrement unique, tel que mis en place par le présent article. Ainsi, le recouvrement des cotisations recouvrées actuellement par l’AGIRC-ARRCO représente 75 milliards d’euros de cotisations annuelles acquittées par 1,6 million d’entreprises.

Le rapprochement se fondra sur des dispositifs de coordination préexistants entre les URSSAF et l’AGIRC-ARRCO, à savoir :

– l’ouverture du portail partenaire ACOSS aux agents de l’AGIRC-ARRCO ;

– l’existence d’une convention financière pour le reversement des fonds issus de la compensation des allégements généraux assis sur les cotisations de retraite complémentaire ;

– la fiabilisation des allégements généraux en DSN.

B.   Une réflexion en cours sur la mise en place d’un recouvrement unique

La simplification du champ du recouvrement a connu une première avancée significative avec l’application de la loi du 13 février 2008 ([80]) et l’anticipation prévue en loi de financement pour 2009 ([81]). Le recouvrement des cotisations et contributions finançant l’assurance chômage a ainsi été transféré de l’Unédic à l’ACOSS, à compter du 1er janvier 2011. Ce transfert a permis de simplifier les démarches des employeurs et s’est traduit par une amélioration significative du taux de recouvrement.

Dans le cadre d’un processus de simplification en faveur des entreprises dans leurs relations avec l’administration, auquel a participé la loi sur le « droit à l’erreur » ([82]), le Gouvernement a souhaité initier des réflexions sur un recouvrement unique dans les sphères sociale et fiscale.

● Pour mettre en place les futures modalités des recouvrements fiscal et social, une mission interministérielle, récemment lancée, placée auprès des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale, doit réfléchir au pilotage et à la coordination des travaux liés à la réforme du recouvrement fiscal et social, en lien notamment avec l’ensemble des acteurs concernés par le recouvrement de recettes publiques ([83]).

Le rapport de M. Alexandre Gardette, remis aux ministres des solidarités et de la santé et de l’action et des comptes publics le 31 juillet 2019, explore quant à lui les pistes relatives à l’unification du recouvrement pour l’ensemble des sphères fiscale et sociale, mais convient que, en dehors du recouvrement forcé, cette unification constitue un objectif lointain.

● Il demeure toutefois important de progresser en matière d’unification du recouvrement au sein de la sphère sociale.

Le présent article s’inscrit dans ce sens, auquel le Gouvernement et la majorité ont déjà largement contribué, via l’intégration du Régime social des indépendants au sein du régime général, en application de la LFSS 2018 ([84]), et les mesures en faveur de la dématérialisation au sein de la LFSS 2019 ([85]).

II.   Le dispositif proposé : unifier, simplifier et faciliter le recouvrement

A.   Unifier : le transfert du recouvrement de nouvelles cotisations vers l’acoss

L’unification du recouvrement s’inscrit dans la lignée des précédents transferts évoqués supra, et notamment le transfert du recouvrement des cotisations d’assurance chômage depuis le 1er janvier 2011 ou l’intégration des cotisations issues du précédent régime des indépendants.

● Le du I confie ainsi aux URSSAF et aux CGSS un nouveau champ de recouvrement des contributions et des cotisations. Celui-ci s’étend désormais « à lensemble des cotisations et contributions finançant les régimes de base ou complémentaires de sécurité sociale » obligatoires, à l’exception de celles qui relèvent du régime agricole et du régime des gens de mer. Concrètement, les contributions et cotisations transférées concernent donc, outre les salariés privés déjà inclus dans le champ :

– des cotisations de retraite complémentaire obligatoire (AGIRC-ARRCO) ;

– des cotisations de retraite des agents des fonctions publiques territoriales et hospitalières recouvrées à ce jour par la caisse des dépôts et consignations (CNRACL) ;

– des cotisations de retraite des agents non titulaires de la fonction publique également recouvrées par la caisse des dépôts et consignation (IRCANTEC) ;

– des cotisations de retraite additionnelle des agents de la fonction publique, actuellement recouvrées par la Caisse des dépôts et consignations ;

– des cotisations dues au titre de régimes spéciaux, dont notamment :

À ce champ étendu du recouvrement s’ajoutent, selon le nouveau du I de l’article L. 213-1, les cotisations pour le fonds pour l’emploi hospitalier, mis en place depuis 1994 ([86]). Celles-ci sont assises sur les rémunérations soumises à retenue pour pension.

● L’intégration de l’ensemble de ces cotisations et contributions dans le champ de compétence des URSSAF entraîne, par coordination, la suppression du recouvrement spécifique opéré au sein des régimes sectoriels. Cette suppression est assurée, pour ce qui est des relations entre les URSSAF et l’AGIRC-ARRCO, aux 12° et 13° du I. La fin des missions de recouvrement est assurée :

– pour la CAVIMAC, au 14° du I ;

– pour l’IRCANTEC, au 15° du I. Dans ce cas précis, la fin des modalités actuelles de recouvrement entraîne la suppression du régime de sûretés qui était appliqué jusque-là au paiement des cotisations et des majorations et pénalités de retard, inscrit aux articles L. 243-4 et L. 243-5 du code de la sécurité sociale ;

– pour la CRCPEN, au du V.

Afin d’assurer le bon fonctionnement de ce dispositif, la branche recouvrement du régime général portera la responsabilité finale de la cohérence générale et individuelle de l’ensemble du processus des conditions de sa mise en œuvre opérationnelle et de ses résultats.

● Par mesure de coordination, le présent article tire les conséquences de l’extension du recouvrement au IV pour la gestion des pensions de gens de mer, au VI pour les cotisations recouvrées au sein des fonctions publiques territoriale et hospitalière et au VII pour les cotisations assises sur la rémunération des salariés des industries électriques et gazières. Le V du présent article modifie enfin la loi du 12 juillet 1937 relative à la caisse de retraite et d’assistance des clercs de notaires afin de tirer les conséquences du transfert du recouvrement d’une partie des cotisations de retraite et de prévoyance.

● La nécessité, relevée par de nombreux interlocuteurs du rapporteur général, d’assurer une transition en douceur du recouvrement pour éviter toute rupture dans le processus, a entraîné la mise en place d’un calendrier différencié, défini au IX.

L’ensemble des dispositions du présent article doivent entrer en vigueur, selon le IX, au 1er janvier 2020. Échappe toutefois à ce terme une grande partie des transferts, qui s’échelonneront selon le calendrier suivant :

– au 1er janvier 2020, selon le a du du IX, les CGSS et les URSSAF pourront recouvrer les cotisations maladies des personnels des IEG ainsi que les cotisations dues au titre des rémunérations versées aux marins et déclarées via la DSN ;

– au 1er janvier 2021, les CGSS et les URSSAF pourront recouvrer les cotisations dues au titre des rémunérations versées aux marins et déclarées via la DSN, selon le b du même  ;

– au 1er janvier 2022, les CGSS et les URSSAF, disposant de l’ensemble des compétences définies au du I, ainsi que de la possibilité de mettre en place un taux forfaitaire de couverture du risque de non‑recouvrement des créances décrit infra, pourront recouvrer les cotisations assurant le financement des régimes de retraite complémentaire et les cotisations d’assurance vieillesse des IEG dans les nouvelles modalités de l’article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale ;

– au 1er janvier 2023, selon le c du du IX, les CGSS et les URSSAF pourront recouvrer les cotisations anciennement recouvrées par la Caisse des dépôts et consignations, la CRPCEN et la CAVIMAC, la caisse du régime des clercs et employés de notaires ainsi que les contributions au fonds pour l’emploi hospitalier.

 Cet échelonnement, déjà subtil, pourra de plus, en vertu du du IX, être modifié par le Gouvernement par décret sur une période qui nexcède pas un an. Cette possibilité est étendue aux dates dentrée en vigueur des nouvelles modalités de collecte des contributions au titre de lobligation demploi des travailleurs handicapés (OETH), des contributions pour la formation professionnelle (CFP) et de la taxe dapprentissage. Le Gouvernement devra remettre préalablement un rapport au Parlement pour justifier les raisons dun tel décalage.

Le rapporteur général souscrit à la nécessité d’une certaine souplesse pour que l’unification du recouvrement, qui constitue une lourde opération logistique pour les URSSAF et l’ACOSS, ne perturbe pas excessivement les opérations de recouvrement elles-mêmes et les rapports avec les employeurs et les attributaires. Il souhaite toutefois rappeler que la dérogation à des dispositions législatives par un mécanisme de simple décret et de remise d’un rapport au Parlement n’est pas de nature à éclairer les parlementaires et les citoyens sur la lisibilité de la loi.

● Ce transfert permet donc l’intégration d’un certain nombre de régimes spéciaux dans le champ du recouvrement assuré par les URSSAF, à l’exclusion toutefois de ceux qui sont inscrits au nouvel article L. 213-1-1 du code de la sécurité sociale, créé au du I :

– les cotisations fixées en pourcentage des émoluments et honoraires, dues par les notaires pour alimenter la caisse de retraite et d’assistance des clercs de notaires. Il s’agit de la dernière catégorie de cotisation recouvrée en propre par la caisse de retraite et de prévoyance ;

– les cotisations d’assurance vieillesse dont l’ensemble des assurés relève d’un seul employeur (RATP, SNCF, Banque de France, Comédie-Française, Opéra national de Paris, Port autonome de Strasbourg, Conseil économique, social et environnemental, service de retraites de l’État, régime d’assurance maladie des militaires) ;

– les cotisations d’assurance vieillesse dans des « petits » régimes qui satisfont à la double condition d’un nombre d’employeurs redevables inférieur à 500 et du versement de moins de 500 millions d’euros par an.

● Une mention particulière doit être faite au sujet du régime des marins, dont la spécificité en matière de recouvrement est supprimée au II du présent article. La convention d’objectifs et de gestion 2016-2020 signée entre l’État et l’Établissement national des invalides de la marine (ENIM) prévoyait déjà comme objectif l’unification du recouvrement sous l’égide du régime général. Le régime spécial des marins entre dans la catégorie des régimes spéciaux au sens de l’article L. 711‑1 du code de la sécurité sociale. Depuis le 1er janvier 2016, la gestion du recouvrement des cotisations d’allocations familiales et d’autres contributions dues par les marins (CSG-CRDS, contribution FNAL, versement transport, formation professionnelle, forfait social...) est confiée à l’URSSAF Poitou-Charentes. Ce rapprochement avec l’ENIM permet d’anticiper le recouvrement unique à terme et la modification effectuée au du I du présent article permet de compléter le transfert aux autres cotisations.

Par mesure de coordination, le II supprime la majoration de 2 % du montant des cotisations et contributions sociales dues par les employeurs propriétaires ou affréteurs d’un navire en cas de défaut d’assurance pendant la durée d’armement, qui n’a pas vocation à être gérée par les URSSAF, ainsi que la dispense de déclaration préalable à l’embauche (DPAE) dont bénéficient les marins, afin d’améliorer l’identification des cotisants/assurés, dans les conditions de droit commun.

Enfin, le Gouvernement sollicite, au X, l’habilitation du Parlement à prendre par voie d’ordonnance, en application de l’article 38 de la Constitution, des mesures instituant une offre de service simplifié au bénéfice des personnes relevant du régime spécial de sécurité sociale des marins. Cette ordonnance aurait vocation à s’intégrer dans les dispositions législatives relatives aux autres titres simplifiés de la branche (Tese, Cea, Cesu, Pajemploi).

B.   Simplifier les procédures de déclaration et les relations avec les cotisants comme avec les attributaires

L’amélioration de la DSN passe à la fois par une simplification et une fiabilisation du procédé.

1.   La simplification...

a.   Avec les employeurs

 Au titre de cette simplification, le du I complète larticle L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale pour que les organismes de recouvrement mettent à la disposition des employeurs un dispositif unifié, par lequel ces derniers pourront trouver les informations nécessaires à la fois au bon renseignement de leurs déclarations sociales et à la vérification de leur conformité avec la législation sociale. Les caractéristiques de ces informations doivent être déterminées par décret.

Selon l’étude d’impact, cette mesure vise à éviter les erreurs faites de bonne foi par les employeurs lorsqu’ils remplissent leurs déclarations. L’objectif est donc, notamment pour le taux des cotisations AT-MP qui sont notifiées aux employeurs mais qui ne sont pas pré-renseignées, de les intégrer préalablement dans la déclaration.

b.   Avec les attributaires

Les relations entre l’ACOSS et les attributaires ont également vocation à être simplifiées grâce à une clarification des missions qui incombent aux URSSAF et un nouvel outil de garantie du versement des sommes par l’agence.

● En premier lieu, le b du du I prévoit que l’ACOSS centralise l’ensemble des sommes recouvrées par les URSSAF et les CGSS, mais aussi qu’elle ait la charge de la notification et du versement des sommes dues aux affectataires.

● Par ailleurs, sur le modèle de ce que pratique déjà la DGFiP avec les collectivités territoriales ([87]), le même b du du I prévoit qu’un taux forfaitaire pour frais de non-recouvrement s’applique aux sommes que doit verser l’ACOSS. L’assiette à laquelle ce taux s’applique se compose de :

– l’ensemble des cotisations et contributions, à l’exception de celles qui sont affectées aux quatre branches du régime général ;

– les cotisations dues au titre des OETH, la contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance, la contribution supplémentaire à l’apprentissage, la contribution dédiée au financement du compte personnel de formation pour les titulaires d’un contrat à durée déterminée ainsi que les contributions des travailleurs indépendants à la formation professionnelle.

Sont donc également exclus les contributions, versements et cotisations assurant le financement de l’assurance chômage pour les salariés comme pour les travailleurs indépendants.

Ce taux est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget dans la limite de 3,6 %, soit un plafond équivalent à celui qui est appliqué aux mêmes mécanismes dans la sphère fiscale. Pour ce qui est des contributions et cotisations qui sont entrées dans le champ du recouvrement des URSSAF après le 1er janvier 2020, le plafond est déterminé en fonction du taux moyen de non-recouvrement constaté pendant l’année antérieure au transfert, si ce taux est inférieur à 3,6 %.

Ce prélèvement forfaitaire représentatif de l’existence de sommes inévitablement non recouvrées permettra d’éviter de pénaliser les salariés à raison de l’absence de versement des cotisations par les employeurs. Son entrée en vigueur sera déterminée par un calendrier fixé par décret en Conseil d’État.

Outre ce prélèvement forfaitaire, l’ACOSS pourra également appliquer des frais de gestion sur les sommes recouvrées par les URSSAF, pour compenser la charge nouvelle que représente cette extension du recouvrement.

2.   La fiabilisation

Le du I insère dans le code de la sécurité sociale un nouvel article L. 133-5-3-1 instaurant, dans son premier alinéa, une procédure de substitution des organismes de recouvrement aux employeurs lorsque ces derniers ne corrigent pas de manière diligente les erreurs commises lors du remplissage de leurs DSN. Cette procédure est précédée par :

– une information issue des organismes à destination des employeurs pour leur signifier les résultats des vérifications d’exhaustivité, de conformité et de cohérence réalisées à partir des données inscrites dans la DSN ;

– une demande, le cas échéant, de corriger les anomalies constatées.

Les manquements à ces obligations, outre cette procédure de substitution, peuvent aboutir à des sanctions appliquées dans les conditions de droit commun prévues à l’article L. 133-5-4, soit une pénalité inférieure à une limite de 1,5 % du plafond mensuel de sécurité sociale en vigueur, arrondi à l’euro supérieur, au titre de chaque personne pour laquelle est constaté le défaut de déclaration, l’omission ou l’inexactitude.

● Cette possibilité de substitution, tout comme l’amélioration de l’information entre employeurs et organismes collecteurs, visent également à limiter les risques d’erreurs dans les attributions des droits des salariés. Il est toutefois prévu qu’un décret en Conseil d’État détermine les conditions et modalités d’application de cette procédure, pour garantir notamment le respect du contradictoire préalable à la correction d’office, ainsi que la simplicité de la procédure pour l’employeur.

C.   Faciliter le recouvrement : des missions consolidées et une information améliorée

1.   Une consolidation des missions

La nouvelle définition des missions des organismes de recouvrement traduit l’extension des compétences du réseau de recouvrement.

● En premier lieu, le 2° du I modifié de l’article L. 213-1 tire les conséquences de l’intégration du Régime social des indépendants (RSI) au sein du régime général. Cependant, le même alinéa préserve l’exclusion du champ des organismes de recouvrement, les cotisations d’assurance maladie et d’assurance vieillesse des professions libérales, y compris les cotisations dues au titre de la caisse nationale du barreau français.

● Ensuite, le 4° du même article modifié englobe l’ensemble des nouvelles missions de recouvrement confiées aux URSSAF par des lois antérieures. À cet égard, il revient aux URSSAF de collecter :

– la contribution due au titre de l’OETH, dont le transfert a été prévu par l’article 67 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ;

– la contribution de formation professionnelle et d’apprentissage, visée à l’article L. 6131-1 du code du travail, dont le transfert a été prévu par l’article 37 de la loi n° 2018-771 précitée ;

– la contribution pour la formation professionnelle des travailleurs indépendants visée à l’article L. 6331-48 du code du travail.

● Enfin, la formalisation de ces transferts est assurée au nouveau 5° du même article, qui pose le principe selon lequel il revient aux URSSAF de recouvrer toute cotisation ou contribution qui leur est attribuée par la loi. De la même manière, au nouveau 6° du même article, et sauf disposition contraire, les missions de contrôle de ces organismes sont étendues à l’ensemble du recouvrement des cotisations prévu par la loi.

2.   Une vision globale de l’emploi des cotisations

● Le du I du présent article confie à l’ACOSS :

– une mission de réception du produit global de l’ensemble des impôts et taxes mentionnés à l’article L. 131-8 pour le compte des régimes et des fonds concernés, mais également la charge de répartir, en application du même article, ce produit entre les différents régimes et fonds concernés ;

– la charge de l’extension du dispositif dit « Fillon » de réduction dégressive des cotisations sociales sur les salariés entre 1 et 1,6 SMIC aux cotisations et contributions d’assurance chômage, insérée au 7° bis de l’article L. 225-1-1. Cette extension, prévue en LFSS 2019 ([88]), pèsera donc sur l’organisme collecteur.

● Les organismes de sécurité sociale bénéficieront par ailleurs d’une plus grande souplesse, issue de la simplification des modalités d’admission en non‑valeur des créances irrécouvrables, au et au 11° du I. L’admission en non‑valeur des cotisations sociales est une mesure d’ordre interne qui permet aux organismes de sécurité sociale de ne pas poursuivre le recouvrement de certaines créances considérées comme irrécouvrables. En 2018, les admissions en non‑valeur se sont élevées à 2,1 milliards d’euros, sur un total de produits de près de 470 milliards d’euros (soit 0,45 %).

Actuellement prononcée par le conseil ou le conseil d’administration des organismes de sécurité sociale, cette procédure jugée inutilement lourde et chronophage est supprimée, au profit d’une détermination des modalités d’admission des créances en non-valeur par décret. Désormais, les directeurs et agents comptables d’organisme de gestion pourront procéder à l’examen des admissions en non-valeur des créances irrécouvrables.

Cette disposition entrera en vigueur, selon le du IX du présent article, au 1er janvier 2022, et entraîne par voie de conséquence, au VIII du présent article, la suppression du X de l’article 26 de la LFSS pour 2019, qui prévoyait une disposition analogue devenue redondante.

Enfin, comme le prévoit le nouvel article L. 225-1-5 du code de la sécurité sociale introduit par le du I du présent article, l’ACOSS aura à sa charge :

– le versement, aux régimes de retraite complémentaire, des montants correspondant à la prise en charge de la perte de cotisations afférentes à ces régimes en vertu de dispositif de réduction progressive « Fillon », étendu en LFSS 2019 ([89]) à ces cotisations ;

– le versement à l’Unédic, sur le même modèle, des contributions encaissées sans tenir compte de la part de la réduction imputée sur celles-ci. La prise en charge de la part exonérée des cotisations recouvrées est donc centralisée par l’ACOSS, sur la base des informations issues des organismes en charge du recouvrement. L’Agence reverse ensuite les montants et notifie les produits correspondants à l’Unédic.

● En cohérence avec la place nouvelle prise par l’ACOSS dans le champ du recouvrement des régimes obligatoires, le 10° du I confie aux quatre branches de la sécurité sociale, définies à l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale, la mission de couvrir à la fois les charges de gestion administrative qui incombent désormais à l’ACOSS, par arrêté interministériel, mais aussi la prise en charge des allégements généraux sur les cotisations à l’assurance chômage, assises sur les rémunérations entre 1 et 1,6 SMIC. La répartition de l’effort est fixée par arrêté des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale en fonction des soldes prévisionnels de ces branches.

Par exception, il revient à la branche « vieillesse-veuvage » de couvrir les sommes mises à la charge de lACOSS, issues de lextension de la même réduction dégressive « Fillon », aux cotisations finançant les régimes de retraite complémentaire.

3.   Une meilleure information

● L’accroissement de l’interdépendance entre les différents régimes par le biais d’une extension du recouvrement suppose également que l’information relative à la sincérité des comptes soit renforcée. C’est le sens du III du présent article, qui entraîne une modification des échanges d’informations entre la Cour des comptes et les commissaires aux comptes.

Il complète les obligations inscrites à larticle L. 141-10 du code des juridictions financières – qui prévoit que les membres de la Cour peuvent communiquer des informations aux commissaires aux comptes dorganismes en dehors du périmètre des régimes de base lorsquune partie des opérations de ces organismes est gérée par des organismes du régime général – en donnant aux membres de la Cour la possibilité de demander aux commissaires aux comptes de ces mêmes organismes tout élément nécessaire pour assurer un examen sincère, régulier et fidèle des comptes sociaux. Cette nouvelle faculté pourrait notamment aboutir à :

– la possibilité pour la Cour d’effectuer des vérifications sur les sommes facturées à l’ACOSS au titre de la compensation de la réduction générale ;

– l’instauration, pour la certification des comptes combinés de la branche maladie du régime général, d’une faculté pour la Cour de demander des éléments d’assurance sur la qualité du dispositif de maîtrise des risques attaché à la chaîne de la recette dans les établissements de santé.

Le du IX prévoit l’entrée en vigueur de cet échange d’informations à compter du 1er octobre 2020.

*

*     *

Article 11
Simplification des démarches des travailleurs indépendants

Adopté par la commission sans modification

L’article 11 propose plusieurs mesures de simplification des démarches des travailleurs indépendants, afin notamment de mieux articuler les déclarations fiscales et sociales.

Il met fin à la déclaration sociale des travailleurs indépendants, au profit d’une meilleure coopération entre les services de recouvrement sociaux et fiscaux, qui devrait permettre d’obtenir les mêmes informations, avec moins de formalités à réaliser.

Par ailleurs, s’agissant plus particulièrement du département de Mayotte, il ouvre la possibilité de recourir au statut de micro-entrepreneur et aligne les modalités de recouvrement sur les règles de droit commun.

1.   Les spécificités du statut de travailleur indépendant entraînent toujours, malgré d’incontestables progrès, d’importantes redondances administratives

● Les travailleurs indépendants, définis en creux comme tout travailleur qui n’est pas salarié, ont pour spécificité d’être souvent, dans la sphère sociale, doublement cotisants (pour eux-mêmes et pour leurs éventuels salariés), et dans la sphère fiscale doublement redevable (de l’impôt dû au titre de leur société, mais aussi de l’impôt sur le revenu applicable aux revenus issus de cette société).

Il s’ensuit que les travailleurs indépendants, dont les entreprises sont soumises au régime réel d’imposition ([90]), sont structurellement conduits à réaliser de nombreuses formalités déclaratives récurrentes, parmi lesquelles :

– une déclaration de résultats accompagnée de tableaux annexes faisant état de la comptabilité de l’entreprise pour l’exercice concerné (la « liasse »), en application de l’article 53 A du code général des impôts ;

– une déclaration sociale des indépendants (DSI) dont le caractère obligatoire est prévu à l’article L. 613-5 du code de la sécurité sociale et qui doit permettre le calcul des cotisations et contributions sociales ;

– la déclaration de l’impôt sur le revenu, prévue à l’article 170 du code général des impôts, comme tout particulier redevable.

De nombreuses dispositions adoptées ces dernières années ont permis de simplifier la réalisation de chacune de ces opérations, qui sont désormais entièrement dématérialisées, au point d’ailleurs que le législateur a imposé aux entreprises de réaliser l’ensemble de leurs démarches déclaratives de manière dématérialisée, tant sur le plan fiscal que social ([91]).

Par ailleurs, d’autres régimes comme le régime de la microentreprise créé par l’article 9 de la loi du 4 août 2008 dite « TEPA » ([92]) ont conduit à simplifier ces démarches pour des entreprises dont le chiffre d’affaires est situé en dessous d’un certain seuil ([93]). Ainsi, les contribuables ayant choisi le régime de la microentreprise sont dispensés de la déclaration de résultat et bénéficient, s’ils choisissent le régime « microsocial » prévu aux articles L. 613-7 et suivants du code de la sécurité sociale, de taux simplifiés et plus avantageux dans le calcul de leurs cotisations sociales.

● Au-delà de la question de la simplification de chacune d’entre elles, c’est la question du maintien de l’ensemble de ces trois déclarations qui se pose alors que de nombreuses informations que les cotisants doivent renseigner dans la déclaration sociale des indépendants se retrouvent dans les deux autres déclarations fiscales, remplies à quelques semaines d’intervalle.

Tableau présentant les informations nécessaires au calcul des cotisations et contributions sociales présentes dans les déclarationS d’impôt prévues à l’article 170 du code génÉral des impôts (CGI)

Informations de la 2042 et 2042 C PRO dont les organismes sociaux ont besoin pour le calcul de lassiette sociale du travailleur indépendant et qui sont donc demandées à la fois par ladministration fiscale et par ladministration sociale*

Nature

Rubrique de la déclaration fiscale 2042 et 2042 PRO

2042

 

État civil et adresses

X

Revenus des associés et gérants, art. 62 CGI

1GB, 1HB

Agents généraux d’assurance

1GF, 1HF

2042 C PRO

 

Micro-entrepreneur ayant opté pour le versement libératoire de l’impôt sur le revenu**

Ventes de marchandises et assimilés

5TA, 5UA

Prestations de services et locations meublées

5TB, 5UB

Recettes brutes des revenus non commerciaux

5TE, 5UE

Activité agricole non salariée

Régime micro BA

Revenus imposables

5XB, 5YB

Revenu forfaitaire provenant des coupes de bois

5HD, 5ID

Plus-values court terme (PVCT)

5HW, 5IW

Moins-values court terme (MVCT)

5XO, 5YO

Revenus exonérés

5XA, 5YA

Régime réel

Revenus imposables

5HC, 5HI, 5IC, 5II

Revenus de source étrangère avec crédit d’impôt égal à l’impôt français

5AK, 5AL, 5BK, 5BL

Déficits

5HF, 5HL, 5IF, 5IL

Revenus taux marginal

5XT, 5XV, 5XU, 5XW

Revenus exonérés

5HB, 5HH, 5IB, 5IH

Abattement jeunes agriculteurs