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N° 2401

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 7 novembre 2019

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION
ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI,
ADOPTÉ PAR LE SÉNAT APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE,

relatif à lengagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique ( 2357)

PAR M. Bruno Questel

Député

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AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

PAR M. Alain Perea

Député

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TOME II

COMPTES RENDUS DES TRAVAUX

Voir les numéros :

  Sénat : 677 rect. (2018-2019), 12, 13 et T.A. 8 (2019-2020).

Assemblée nationale : 2357.


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SOMMAIRE

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Pages

audition de Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et de M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires chargé des collectivités territoriales, et discussion générale

Réunion du mardi 5 novembre à 21 heures

COMPTES RENDUS DES DÉBATS SUR LES ARTICLES DU PROJET DE LOI

1. Première réunion du mercredi 6 novembre 2019 à 9 heures 30 (article premier à article 5)

Avant l’article 1er

Article 1er  (art. L. 5211-11-1 et L. 5211-11-2 [nouveaux], art. L. 5219-2 et L. 5832-2 du code général des collectivités territoriales) Pacte de gouvernance  Conférence des maires

Article 1er bis (art. L. 3633-2 du code général des collectivités territoriales)  Renforcement des prérogatives de la conférence métropolitaine rassemblant les maires des communes situées sur le territoire de la métropole de Lyon

Après l’article 1er bis

Article 1er ter A  (art. L. 3633-3 du code général des collectivités territoriales)  Allongement à neuf mois du délai d’élaboration du pacte de cohérence métropolitain de la métropole de Lyon

Article 1er ter B  (art. L. 3631-5 du code général des collectivités territoriales) Modalités d’élection des membres de la commission permanente de la métropole de Lyon

Article 1er ter  (art. L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales) Modalités de désignation des vice-présidents des bureaux des EPCI

Article 2  (art. L. 273-3, L. 273-9, L. 273-11 et L. 273-12 du code électoral et art. L. 5211-6 du code général des collectivités territoriales) Renouvellement des conseillers communautaires des communes de moins de 1 000 habitants en cas de cessation des fonctions du maire

Article 2 bis A  (art. L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales) Élection d’un nouveau suppléant au conseil de communauté d’un EPCI

Article 2 ter  (art. 54 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles) Abrogation des dispositions prévoyant l’élection des conseillers métropolitains au suffrage universel direct

Article 3  (art. L. 5211-40-1 du code général des collectivités territoriales) Remplacement d’un conseiller communautaire par un autre conseiller municipal de la même commune au sein des commissions

Article 3 bis  (art. L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales)  Accords locaux de répartition des sièges au sein des conseils communautaires

Article 4  (art. L. 5211-40-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Information des conseillers municipaux sur les affaires de leur établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre

Après l’article 4

Article 4 bis A  (art. L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales Envoi des convocations aux conseils municipaux par voie dématérialisée

Après l’article 4 bis A

Article 4 bis  (art. L. 3633-5 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Information des conseillers municipaux des communes situées sur le territoire de la métropole de Lyon

Après l’article 4 bis

Avant l’article 5 A

Article 5 B  (art. L. 5211-17-2 [nouveau] et L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, art. 85 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006) Procédure de restitution de compétences par un établissement public de coopération intercommunale à ses communes membres

Article 5 D  (art. L. 5211-41-3, L. 5214-1, L. 5214-16, L. 5214-16-2, L. 5216-5, L. 5216-7, L. 5812-1, L. 5814-1 et L. 5842-22 du code général des collectivités territoriales) Suppression de la catégorie des compétences optionnelles dans les communautés de communes et les communautés d’agglomération

Article 5  (art. 64 et 66 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, art. 1er de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes) Suppression du transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes et d’agglomération

2. Seconde réunion du mercredi 6 novembre 2019 à 21 heures (après l’article 5 à article 11)

Après l’article 5

Article 5 bis  (art. L. 2224-12-1-1 [nouveau], art. L. 2224-12-3-1 et art. L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales) Généralisation de la tarification sociale de l’eau

Après l’article 5 bis

Article 6  (art. L. 4424-32, L. 5214-16, L. 5215-20, L. 5215-20-1, L. 5216-5, L. 5217-2 et L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales, art. L. 133-15, L. 134-2 et L. 151-3 du code du tourisme) Favoriser l’exercice de la compétence de promotion du tourisme par les stations classées de tourisme

Après l’article 6

Article 7  (art. L. 151-3, L. 153-15, L. 153-21, L. 153-27, L. 153-45, et L. 153-47 du code de l’urbanisme)  Renforcement du rôle des communes dans l’élaboration du plan local d’urbanisme intercommunal.

Après l’article 7

Article 7 bis A  (art. L. 174-5 du code de l’urbanisme)  Report de la date de caducité des plans d’occupation des sols pour les communes membres d’une intercommunalité qui n’aurait pas achevé son plan local d’urbanisme intercommunal

Après l’article 7 bis A

Article 7 bis B  (art. L. 423-2 du code de l’urbanisme) Création d’un droit de timbre en matière d’autorisations et de déclaration d’urbanisme

Article 7 bis C  (art. L. 5219-5 du code général des collectivités territoriales et art. L. 134-2 du code de l’urbanisme)  Possibilité pour les communes de la métropole de Paris de conserver la compétence en matière d’urbanisme

Article 7 bis D  (art. L. 5214-16 et L. 5216-15 du code général des collectivités territoriales) Rétablissement de l’intérêt communautaire de la compétence en matière de zones d’activité économique

Article 7 bis  (art. L. 5215-20 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales) Limitation à la voirie d’intérêt communautaire ou métropolitain du transfert des compétences afférentes dans les communautés urbaines et les métropoles

Article 7 ter  (art. L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales) Report du transfert à la métropole d’Aix-Marseille-Provence du transfert de la voirie communale

Article 7 quater  (art. L. 154-1 du code de l’urbanisme)  Abaissement du seuil à partir duquel un grand établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut réaliser plusieurs plans locaux d’urbanisme infracommunautaires sur son territoire

Article 7 quinquies  (art. L. 5214-16, L. 5215-20, L. 5216-5 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales) Conditions de majorité pour la définition de l’intérêt communautaire

Article 7 sexies  (art. L. 581-14-1, L. 581-14-3 et L. 581-43 du code de l’environnement, art. 112 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine) Modalités d’élaboration des règlements locaux de publicité

Article 7 septies  (art. L. 581-14-3 du code de l’environnement) Compétences des établissements publics de coopération intercommunale en matière de règlements locaux de publicité

Avant l’article 8

Article 8  (art. L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales) Suppression de l’obligation de révision sexennale du schéma départemental de la coopération intercommunale

Après l’article 8

Article 9  (art. L. 5216-11 du code général des collectivités territoriales) Extension de la procédure de retrait dérogatoire aux communes membres d’une communauté d’agglomération

Après l’article 9

Article 9 bis  (art. L. 5211-19 du code général des collectivités territoriales) Extension de la procédure de retrait de droit commun aux communes membres d’une communauté urbaine

Article 10  (art. L. 5211-5-1 A [nouveau] et L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales) Scission de communautés de communes et de communautés d’agglomération

Article 11  (art. L. 5211-39-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Information des communes sur les conséquences financières d’une modification du périmètre

3. Première réunion du jeudi 7 novembre 2019 à 9 heures 30 (après l’article 11 à après l’article 12 A)

Après l’article 11

Avant l’article 11 bis A

Article 11 bis A  (art. 2122-7-2 du code général des collectivités territoriales) Élection paritaire des adjoints dans les communes de plus de 1 000 habitants

Article 11 bis B  (art. L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales) Suppression de la priorité donnée aux adjoints dans l’attribution de délégations par le maire

Article 11 bis C  (art. L. 247-1 [nouveau] du code électoral  Possibilité pour les candidats de se présenter aux élections municipales avec la nuance « sans étiquette » dans les communes de moins de 3 500 habitants

Article 11 bis  (art. 43 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République) Possibilité pour tout citoyen de représenter les communes, les établissements publics de coopération intercommunale, les départements et les régions au sein des comités syndicaux

Article 11 ter  (art. 1609 nonies C du code général des impôts)  Mission prospective de la commission locale d’évaluation des charges transférées (CLECT)

Article 11 quater  (art. L. 5211-43 du code général des collectivités territoriales) Composition de la commission départementale  de la coopération intercommunale

Après l’article 11 quater

Article 11 quinquies  (art. L. 2113-4 du code général des collectivités territoriales)  Assouplissement de la procédure de création de communes nouvelles dont le territoire est situé sur deux départements ou régions

Après l’article 11 quinquies

Article 11 sexies  (art. L. 5711-6 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Institution d’une faculté de retrait d’un syndicat mixte après une fusion

Avant l’article 11 septies

Article 11 septies  (art. 2121-2-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales et art. L. 258  du code électoral) Réduction du nombre de sièges à pourvoir dans les conseils municipaux des communes de moins de 500 habitants pour être réputés complets

Article 11 octies  (art. L. 2122-8 du code général des collectivités territoriales) Facilitation de l’élection du maire et de ses adjoints en cas d’incomplétude du conseil municipal

Article 11 nonies  (art. L. 2122-8 du code général des collectivités territoriales, art. L. 258, L. 224-30, L. 270, L. 360, L. 380, L. 885-32, L. 272-6, L. 428, L. 436 et L. 437 du code électoral et art. L. 122-5 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie) Assouplissement des conditions obligeant l’organisation d’élections municipales partielles en cas d’incomplétude du conseil municipal

Après l’article 11 nonies

Avant l’article 12 A

Article 12 A (art. L. 2121-41 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Présentation de l’action de l’État en matière de sécurité  devant le conseil municipal

Après l’article 12 A

4. Seconde réunion du jeudi 7 novembre 2019 à 14 heures 30 (article 12 à article 37)

Article 12  (art. L. 123-4 et L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation) Renforcement des prérogatives de police spéciale du maire en matière de fermeture des établissements recevant du public et des immeubles menaçant ruine

Article 13  (art. L. 3332-15 du code de la santé publique, art. L. 332-1 et L. 333-1 du code de la sécurité intérieure, art. L. 2213-34 [nouveau] du code général des collectivités territoriales et art. 95 [abrogé] de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009) Faculté de transfert de compétences du préfet au maire en matière de fermeture des débits de boissons

Après l’article 13

Article 14  (art. L. 481-1, L. 481-2 et L. 481-3 [nouveaux] du code de l’urbanisme)  Mesures administratives renforçant l’application du droit de l’urbanisme

Article 14 bis  (art. L. 332-6 et L. 331-15 du code de l’urbanisme) Cession de terrains à titre gratuit en faveur des communes

Article 14 ter  (art. L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales)  Extension des pouvoirs du maire en matière d’exécution forcée des travaux d’élagage sur les abords des voiries relevant de sa compétence

Article 14 quater  (art. L. 341-4 du code forestier) Information du maire en matière de défrichement de terrains situés sur le territoire de sa commune

Après l’article 14 quater

Article 15  (art. L. 2212-2-1 et L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales) Pouvoir du maire de prononcer des amendes administratives en matière de protection du domaine public

Après l’article 15

Article 15 bis A  (art. L. 581-27, L. 581-28 et L. 581-30 du code de l’environnement)  Réduction des délais d’exécution des arrêtés d’exécution relatifs à l’affichage illicite de publicité

Article 15 bis B (nouveau)  (art. L. 324-1-1 du code de tourisme) Faculté pour les communes de fixer la limitation de la durée des locations non professionnelles entre 60 et 120 jours par an

Article 15 bis C  (art. L. 774-2 du code de justice administrative)  Attribution au président de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement d’un pouvoir de police de conservation du domaine public fluvial

Article 15 bis  (art. L. 541-21-3 et L. 541-21-4 du code de l’environnement) Renforcement du pouvoir de police du maire à l’encontre des épaves de véhicules

Après l’article 15 bis

Article 15 ter A  (art. L. 583-3-1 [nouveau] du code de l’environnement)  Extinction partielle ou totale de l’éclairage public afin de limiter les consommations d’énergie

Article 15 ter  (art. L. 512-4, L. 512-5 et L. 512-6 du code de la sécurité intérieure) Consolidation du régime des conventions de coordination

Article 15 quater  (art. L. 132-3 du code de la sécurité intérieure) Renforcement de l’information du maire sur les suites judiciaires données aux infractions signalées par lui ou constatées par les agents de la police municipale

Après l’article 15 quater

Article 15 quinquies  (art. L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales) Mise à disposition du président de l’EPCI d’agents de police municipale des communes membres

Article 15 sexies  (art. L. 511-5, L. 512-2, L. 512-4 et L. 512-5 du code général des collectivités territoriales)  Simplification des régimes de mutualisation des polices municipales au niveau intercommunal

Article 15 septies A  (art. L. 541-44 du code de l’environnement) Compétence des gardes champêtres afin de constater des infractions en matière de déchets

Article 15 septies  (art. L. 522-2 du code de la sécurité intérieure) Possibilités de mutualisation de gardes champêtres entre EPCI

Article 15 octies  Dissolution du syndicat mixte de la baie du Mont-Saint-Michel et création d’un établissement public de l’État

Après l’article 15 octies

Article 16  (art. L. 1410-3, L. 1411-5-1 [nouveau], L. 5111-1, L. 5211-4-4 [nouveau] et L. 5721-9 du code général des collectivités territoriales) Assouplissement de certaines règles en matière de conventions de prestations de services et de commande publique

Article 16 bis  (art. L. 1611-3-2 du code général des collectivités territoriales) Élargissement des catégories de personnes morales pouvant adhérer à l’Agence France Locale aux groupements de collectivités territoriales et établissements publics locaux

Article 17  (art. L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales)  Assouplissement des mécanismes de délégation de compétences entre les collectivités territoriales

Article 17 bis  (art. 4 de la loi n° 2017-1838 du 30 décembre 2017)  Extension au 31 décembre 2020 de la faculté de déléguer la compétence GEMAPI à des syndicats de communes ou mixtes

Après l’article 17 bis

Article 18  (art. L. 1111-10, L. 3231-2, L. 3232-1-2 et L. 3231-3 du code général des collectivités territoriales) Compétence du département en matière économique

Article 19  (art. L. 2113-11 du code général des collectivités territoriales et art. 10 et 12 de la loi n° 2019-809  du 1er août 2019)  Simplification des règles d’état civil applicables au sein d’une commune nouvelle

Article 19 bis  (art. L. 1427-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Transparence des contenus promotionnels des collectivités territoriales sur Internet

Article 19 ter  (art. L. 2113-2 et L. 2113-5 du code général des collectivités territoriales) Consultation obligatoire des comités techniques des communes préalablement à la délibération des conseils municipaux relative à la création d’une commune nouvelle

Article 19 quater  (art. L. 2121-30-1 du code général des collectivités territoriales) Faculté pour le maire de célébrer un mariage dans tout bâtiment communal sur le territoire de la commune

Avant l’article 20

Article 20  (chapitre VI [nouveau] du titre unique du livre premier de la première partie du code général des collectivités territoriales) : « rescrit » du préfet

Article 20 bis A Transmission d’information du préfet aux maires concernés en cas d’activation du système d’alerte et d’information aux populations

Article 20 bis  (titre II [nouveau] du livre Ier de la première partie du code général des collectivités territoriales)  Conférence de dialogue entre les collectivités territoriales et l’État

Article 21  (art. L. 102-13 du code de l’urbanisme) Correction d’une erreur de coordination de la loi ELAN

Article 21 bis  (art. L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime)  Composition des commissions départementales de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers

Article 22 Habilitation à légiférer par ordonnance sur la publicité des actes des collectivités territoriales

Article 22 bis  (art. L. 1212-1 du code général des collectivités territoriales) Modalités d’élection du président et des vice-présidents du Conseil national d’évaluation des normes

Article 22 ter  (article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales) Élargir les compétences du Conseil national d’évaluation des normes

Article 22 quater  (art. L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales) Effet des avis du Conseil national d’évaluation des normes

Article 23  (art. L. 141-1, L. 141-2 du code de l’action sociale et des familles [abrogés], art. 375-9-2 du code civil, art. L. 1111-2, L. 2144-2, L. 2511-1-1, L. 5211-10-1, L. 5211-39-1, L. 5217-9, L. 5218-10, L. 5219-1, L. 5219-7, L. 5741-1, L. 5741-2 du code général des collectivités territoriales, art. L. 2112-4 du code des transports et art. L. 223-3 du code forestier) Suppression de l’obligation de créer diverses instances et d’établir divers documents

Après l’article 23

Article 23 bis  (chapitre II bis du titre unique du livre Ier et chapitre III du titre II du livre VIII [nouveaux] de la première partie du code général des collectivités territoriales) Création d’un cadre juridique propre à la médiation territoriale

Article 24  (art. L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales) Extension à toutes les opérations d’investissement du bloc communal de la faculté pour le préfet d’accorder une dérogation à la participation financière minimale du maître d’ouvrage

Article 25  (art. L. 1111-11 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Publication du plan de financement des opérations d’investissement

Article 25 bis  (art. L. 2122-22, L. 3211-2 et L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales) Délégation à l’exécutif des mises à disposition à titre gratuit

Article 26  (art. L. 3142-79 du code du travail, art. L. 5214-8 et L. 5842-21 du code général  des collectivités territoriales)  Extension du congé électif aux communes de moins de 1 000 habitants

Après l’article 26

Article 26 bis  (art. L. 2123-9, L. 3123-7 et L. 4135-7 du code général des collectivités territoriales)  Statut de salarié protégé des élus locaux

Article 26 ter  (art. L. 2123-2 du code général des collectivités territoriales) Augmentation du crédit d’heures à la disposition des élus locaux

Après l’article 26 ter

Article 26 quater  (art. L. 2123-9 et L. 2123-11-1 du code général des collectivités territoriales) Renforcement des droits des adjoints au maire dans les communes de moins de 10 000 habitants

Article 26 quinquies  (art. L. 2123-1-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Télétravail des conseillers municipaux

Après l’article 26 quinquies

Article 27  (art. L. 2123-18-2, L. 2123-18-4, L. 2573-7, L. 3123-19-1, L. 4135-19-1, L. 6434-4, L. 7125-23 et L. 7227-24 du code général des collectivités territoriales) Prise en charge des frais de garde et d’assistance des élus locaux

Article 28  (art. L. 2123-22, L. 2123-23, L. 2123-24, L. 2123-24-1 et L. 5211-12-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Régime indemnitaire des maires, des adjoints au maire et des conseillers communautaires

Après l’article 28

Avant l’article 28 bis

Article 28 bis  (art. L. 2123-24-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) Modulation des indemnités de fonction des conseillers municipaux des communes de plus de 100 000 habitants

Article 28 ter  (art. L. 5211-12-2 du code général des collectivités territoriales) Modulation des indemnités de fonction des conseillers communautaires des EPCI de plus de 100 000 habitants

Article 28 quater  (art. L. 5211-12 du code général des collectivités territoriales et article 2 de la loi n° 2016-341 du 23 mars 2016 visant à permettre l’application aux élus locaux des dispositions relatives au droit individuel à la formation et relative aux conditions d’exercice des mandats des membres des syndicats de communes et des syndicats mixtes) Régime indemnitaire des présidents et des vice-présidents des syndicats de communes et des syndicats mixtes

Article 28 quinquies  (art. L. 821-3 du code de la sécurité sociale) Faciliter l’accès des personnes en situation de handicap aux fonctions électives

Après l’article 28 quinquies

Article 29  (art. L. 5211-13 et L. 5842-5 du code général des collectivités territoriales) Remboursement des frais de déplacement des conseillers communautaires

Article 29 bis A  (art. 13 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives  à la fonction publique territoriale) Indemnité des membres d’un centre de gestion de la fonction publique ayant reçu une délégation

Article 29 bis  (art. L. 2123-18 du code général des collectivités territoriales) Modalités de remboursement des frais de déplacement pour l’exécution de mandats spéciaux dans les conseils municipaux

Article 29 ter A  (art. L. 2123-18-1 du code général des collectivités territoriales) Modalités de remboursement des frais de déplacement des membres du conseil municipal

Article 29 ter  (art. L. 2122-22, L. 3211-2 et L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales) Possibilité de déléguer au président de l’assemblée délibérante les autorisations de mandat spécial

Article 29 quater A  (art. 14 de la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriales) Coordination en lien avec la création de délégations régionales du centre national de la fonction publique territoriale

Article 29 quater  (art. L. 323-6 du code de la sécurité sociale) Arrêt maladie des élus locaux

Article 30  (art. L. 2123-34 et L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales) Modification du régime de prise en charge de la protection fonctionnelle des maires

Après l’article 30

Article 30 bis  (art. L. 2123-12, L. 3123-10 et L. 4135-10 du code général des collectivités territoriales)  Favoriser la réinsertion professionnelle des élus par le droit à la formation

Article 31  (art. 12-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. L. 613-5 du code de l’éducation)  Habilitation à légiférer par ordonnances  pour réformer la formation des élus locaux

Après l’article 31

Article 31 bis A  (art. L. 2123-12 du code général des collectivités territoriales) Suppression du seuil d’habitants conditionnant la formation des élus d’une commune au cours de la première année de leur mandat

Article 31 bis B  (art. L. 952-1 du code de l’éducation) Accès des chargés d’enseignement aux fonctions électives

Article 31 bis  (art. L. 2121-19, L. 3121-20 et L. 4132-20 du code général des collectivités territoriales)  Séances réservées aux questions orales posées par l’opposition

Après l’article 31 bis

Article 31 ter  (art. L. 6111-1 du code du travail) Validation des acquis de l’expérience

Après l’article 31 ter

Article 32 (supprimé)

Article 33  (art. L. 12-1 et L. 18-1 [nouveaux], L. 71, L. 72, L. 79 à L. 82 [nouveaux], L. 387, L. 388 et L. 388-1 [nouveau] du code électoral et art. 30 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire)  Droit de vote des personnes détenues

Article 34 Habilitation à légiférer par ordonnance pour l’adaptation et l’extension du projet de loi dans les outre-mer

Article 35  (art. L. 2573-19 et L. 2573-50 du code général des collectivités territoriales) Règles applicables au stationnement payant en Polynésie française

Article 36  (art. L. 2573-25 du code général des collectivités territoriales) Extension des dispositions relatives aux crématoriums aux communes de la Polynésie française

Article 37 (art. L. 2224-7 du code général des collectivités territoriales) Compétence des services de l’eau en matière de préservation de la ressource

COMPTE RENDU DES Débats  DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE  ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Article 5 (art. 64 et 66 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République et art. 1er de la loi n° 2018 702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes) Suppression du transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes et d’agglomération

Article 7  (art. L. 151-3, L. 153-15, L. 153-21, L. 153-27, L. 153-45, L. 153-47, L. 211-2 et L. 212-1 du code de l’urbanisme) Renforcement de la place des communes dans la procédure d'élaboration des plans locaux d'urbanisme intercommunal

Article 8  (art. L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales) Suppression de l’obligation de révision, tous les six ans, du schéma départemental de la coopération intercommunale

Article 11  (art. L. 5211-39-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Information des communes sur les conséquences financières d'une modification du périmètre d'un EPCI

Article 20 bis  (titre II [nouveau] du livre Ier de la première partie du code général des collectivités territoriales, section 6 du chapitre II du titre III du livre Ier et art. L. 14321 du code de l’urbanisme)  Création de la conférence de dialogue  entre les collectivités territoriales et l'État


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   audition de Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et de M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires chargé des collectivités territoriales,
et discussion générale

Réunion du mardi 5 novembre à 21 heures

Lors de sa réunion du mardi 5 novembre 2019, la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République auditionne Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires chargé des collectivités territoriales, et procède à une discussion générale sur le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique (n° 2357).

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.8373196_5dc1d37779347.commission-des-lois--engagement-dans-la-vie-locale-et-a-la-proximite-de-l-action-publique--5-novembre-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous débutons l’examen du projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique. Ce texte est défendu par Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et par M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires chargé des collectivités territoriales. Nous procédons ce soir à une discussion générale et nous aborderons demain matin l’examen des articles et des amendements, il y en a un peu moins de mille à examiner.

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. En guise d’introduction, je rappelle que Sébastien Lecornu et moi-même travaillons en permanence avec les élus locaux, au premier rang desquels les maires. L’État et les collectivités territoriales ont la République en partage : le projet de loi relatif à l’engagement et à la proximité doit bien évidemment s’entendre dans ce cadre. Au cours des différents déplacements que j’effectue en France – hier encore à l’assemblée générale annuelle de l’union amicale des maires du Calvados –, j’ai vu combien les maires sont animés par leur action et par une profonde fierté. De nombreux maires ont d’ailleurs exprimé leur intention de se représenter aux prochaines élections. Cette information positive va à l’encontre de certaines litanies trop souvent entendues.

Le projet de loi, qui est particulièrement défendu par Sébastien Lecornu, a fait l’objet d’une large concertation avant même sa rédaction. Son premier objectif consiste à accompagner les élus dans l’exercice de leur mandat. Le second vise à apporter de la souplesse dans le bloc communal, et notamment dans les mécanismes de fonctionnement et de gouvernance entre les municipalités et leur intercommunalité ; en effet, les mêmes élus siègent dans ces deux instances. Le texte a été enrichi par le Sénat, passant de 33 à 123 articles ; à cette occasion, plusieurs points ont été ajoutés.

Je l’ai fait savoir à plusieurs reprises : les relations entre les communes et les intercommunalités me tiennent particulièrement à cœur. Le Gouvernement a été sensible aux sujets évoqués à l’occasion du grand débat. Néanmoins, il ne saurait être question de « détricoter » l’intercommunalité, à laquelle nous sommes très attachés. Le premier ministre et moi-même avons eu l’occasion de le répéter lors du congrès de l’assemblée des communautés de France (AdCF) : nous sommes favorables à la diffusion d’un modèle d’intercommunalité heureuse. C’est pourquoi nous avons introduit des mesures visant à assouplir le fonctionnement de l’intercommunalité et à remettre davantage le maire au cœur des systèmes de gouvernance.

Tel est le sens de notre démarche dans ce projet de loi, qui s’inscrit plus largement dans le cadre de l’action du Gouvernement concernant les territoires. Cette action prend différentes formes : FranceConnect, qui facilite l’accès aux services publics ; le plan action cœur de ville, qui vise à revitaliser les centres-villes ; l’agenda rural, qui s’accompagne d’un plan d’action interministériel en faveur des ruralités.

Dans un esprit semblable, la loi dite 3D – décentralisation, différenciation et déconcentration – interviendra ultérieurement. Elle permettra de revenir sur les relations entre collectivités territoriales, mais aussi sur les relations entre ces dernières et l’État. En effet, il est nécessaire de travailler de manière horizontale entre les différents niveaux des collectivités. Ce travail devra s’inscrire dans une triple logique de lisibilité, de contractualisation et de reconnaissance des différences et des spécificités des territoires.

En tout état de cause, ce projet de loi s’insère dans un ensemble plus vaste et s’adresse aux territoires comme à ceux qui les animent, c’est-à-dire les élus, tout particulièrement les maires.

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires chargé des collectivités territoriales. Nous avons pris le temps nécessaire pour bâtir le projet de loi initial. Une forme de coconstruction a été observée, d’une part avec les deux chambres, en consacrant du temps à chacun des présidents de groupe et des chefs de file des groupes politiques pour le texte – je les en remercie –, d’autre part avec l’ensemble des associations d’élus. Nous sommes repartis des quatre-vingt-seize heures du grand débat entre le Président de la République et les maires, qui, outre les nombreux retours du terrain, constituent pour nous la base de travail sur laquelle avancer.

En effet, le Sénat a enrichi le texte, à tout le moins du point de vue quantitatif. En matière de qualité, l’esprit du texte initialement présenté par le Gouvernement est toujours présent. Les lois territoriales appellent parfois de nombreux amendements ; en l’occurrence, plus de 1 000 ont été déposés pour la présente commission. Nous prendrons donc le temps de les examiner avec beaucoup d’attention.

Le projet de loi, dont Jacqueline Gourault vous a présenté les grandes lignes, traite de trois idées centrales.

En premier lieu, de l’idée de complexité, dans laquelle de nombreux élus locaux se trouvent ; ils ont en effet le sentiment qu’il est plus compliqué d’être maire ou adjoint au maire aujourd’hui qu’il y a vingt ou trente ans. De la même manière, il est désormais plus compliqué d’être chef d’entreprise ou président d’une association. J’ai pu le mesurer à l’occasion des quinze jours de débats au Sénat et de l’examen des 1 000 amendements, mais aussi lors des nombreuses consultations menées en amont : la simplification, en France, est quelque chose de compliqué. En effet, il est beaucoup question de liberté et d’assouplissement dans les textes et les discours à la tribune, et pourtant la plupart des amendements visent à rendre des mesures obligatoires. On parle de liberté, mais en définitive, on aime profondément l’égalité. Il est question de faire confiance au terrain, à la proximité, aux élus locaux et à l’intelligence territoriale – telle sera notre grille de lecture lors de l’examen des amendements –, mais l’on s’aperçoit très vite que cette confiance affichée n’empêche en rien de tout rendre obligatoire depuis Paris. Ce mouvement n’est pas issu du texte initial défendu par le Gouvernement, mais résulte bel et bien des amendements. Si nous voulons faire vivre la liberté territoriale locale et nous revendiquer véritablement comme Girondins, nous devons arbitrer entre la liberté locale et l’égalité territoriale : les situations ne seront peut-être pas toutes identiques dans l’ensemble du territoire, mais tel est le corollaire de la liberté.

En matière de simplification, déplacer des seuils n’a pas été évident, pas plus que rendre facultatives des choses obligatoires ou imaginer des procédures nouvelles, telles que le rescrit normatif. Simplifier, dans notre pays, est un combat difficile. Aujourd’hui, le texte ne va pas assez loin en matière de simplification. Il sort du Sénat avec plus d’obligations que dans la version initialement proposée par le Gouvernement, puisque celle-ci n’en comportait aucune. Avec Jacqueline Gourault, nous nous rangerons bien évidemment à la sagesse du Parlement, mais il n’est pas inintéressant de constater que malgré les discours prônant la confiance envers les élus locaux, tenus jusque devant le congrès de l’association des maires de France, le résultat est une augmentation du nombre de normes. Ce caractère normatif s’explique aussi par la pression sociétale très forte en la matière. Ainsi, si le règlement général sur la protection des données (RGPD) s’applique désormais dans les communes, même les plus petites, c’est parce que les citoyens demandent des garanties s’agissant de l’utilisation de fichiers, tels que les listes électorales ou celles des bénéficiaires des cantines.

Quoi qu’il en soit, la promesse initiale de ce projet consiste à redonner de la confiance et de la liberté. Or un certain nombre d’amendements nous montreront que la liberté est un combat qui n’est pas simple, mais que nous devrons mener.

La deuxième idée que traite le projet de loi est le sentiment de dépossession des maires. Ces derniers sont tout à fait disposés à assumer leurs erreurs, mais pas s’il s’agit de décisions ne relevant pas de leur responsabilité, ou dont ils ont été écartés. Cette problématique concerne deux types de relations : celle du maire et de la commune avec l’État, abordée par de nombreux amendements, et celle entre la commune et l’intercommunalité, modifiée par la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe. Nous fêtons cette année le vingtième anniversaire de la loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, dite loi Chevènement ; pendant des années, l’intercommunalité a été vécue comme une occasion de mutualiser les bonnes comme les mauvaises nouvelles, d’être plus intelligents à plusieurs, de réaliser en commun des investissements qui n’auraient pu être effectués seuls, et d’imaginer à plusieurs des compétences stratégiques telles que le développement économique ou le tourisme. La loi NOTRe a pu donner le sentiment d’abîmer le bloc communal, en laissant penser que l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) devenait une collectivité territoriale à part entière, une sorte de super-commune mettant sous tutelle les communes adhérentes. Le projet de loi vise à remettre la commune au cœur de l’intercommunalité et les maires au centre de la gouvernance, sans pour autant mener une opération de déstabilisation.

La génération des élus municipaux issue de la dernière élection a connu de nombreuses difficultés : baisse des dotations de l’État, loi NOTRe, loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles dite loi MAPTAM, etc. Elle a également montré un goût prononcé pour les grandes intercommunalités et les vastes régions, que j’ai personnellement combattu. Il n’est pas aujourd’hui question de promettre à la prochaine génération un énième grand soir territorial. Avec ce texte, il s’agit de corriger l’existant, sans donner l’impression que la prochaine génération d’élus locaux devra consacrer sa première année de travail à régler des problèmes de tuyauterie, pardonnez-moi l’expression, ou de gouvernance. Bien au contraire, ils devront être en mesure d’exercer leurs compétences et de réaliser leurs projets.

Le texte initial permettait cet équilibre ; le Sénat a certes amélioré certains points, mais en a déstructuré d’autres, notamment concernant les compétences en matière d’intercommunalité. Nous devrons y revenir par le biais des amendements, en particulier s’agissant du triptyque des intercommunalités : les compétences, la gouvernance et le périmètre. Concernant ce dernier, nous sommes proches du but. De nombreux amendements ont trait à la gouvernance, car nous avons du mal à arrêter une doctrine entre la liberté et les obligations. S’agissant des compétences, je m’attacherai à ce que le volet budgétaire et financier fasse l’objet d’une attention particulière. En effet, si le Parlement avait été davantage éclairé sur les conséquences de la loi NOTRe au sujet des dotations de l’État, certains choix institutionnels n’auraient peut-être pas été effectués. De même, des regroupements d’intercommunalités et des choix en matière de compétences n’auraient pas été opérés par les élus locaux si ces derniers avaient eu une connaissance approfondie de leurs conséquences financières et budgétaires.

Le projet de loi traite enfin d’une troisième idée, celle de la protection du maire, dans son engagement et dans son autorité politique, juridique et morale. Notre société traverse une crise de l’engagement inédite, qui n’épargne aucun secteur : ainsi, il est désormais plus compliqué de trouver des colistiers, des sapeurs-pompiers volontaires, des réservistes dans l’armée ou la gendarmerie, ou encore des syndicalistes. Or, depuis 1789, notre modèle de démocratie locale repose sur la commune, plus précisément sur les paroisses qui ont été transformées en communes dès le mois de novembre 1789 et par le biais des décrets du mois suivant. La crise de l’engagement dans la vie municipale peut avoir un impact particulièrement important sur l’organisation des pouvoirs publics à la française tels que nous les connaissons. Les mesures que nous vous proposons pour y remédier n’ont rien de révolutionnaires ; toutefois, depuis quinze ans, aucun texte n’avait été consacré uniquement au bloc communal. En effet, la loi NOTRe ne le concernait pas exclusivement ; de plus, ses résultats ne sont pas tous satisfaisants.

Le projet de loi vient ainsi baliser l’engagement et proposer aux élus locaux des outils d’accompagnement pour le faciliter. Ce faisant, il marque un virage déterminant dans l’action que nous souhaitons mener. En matière de protection de l’autorité du maire, des dispositions existaient avant l’été, concernant notamment la police administrative et l’accompagnement juridique. Dans le cadre de cette discussion générale, comment ne pas penser au maire de Signes, qui a tragiquement perdu la vie ? La ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales lui a remis la légion d’honneur à titre posthume. Ce décès a remis la lumière sur une fonction assumée par les maires : ce sont des agents de l’État. À ce titre, non seulement ils ont le droit de revêtir l’écharpe tricolore, mais ils sont également officiers de police judiciaire et officiers d’état-civil. Nous sommes très attachés à ce modèle français. Les maires ne rejettent pas l’exercice de ces fonctions d’agents de l’État ; en revanche, ils demandent que leur soient donnés les moyens de les exercer correctement. Ainsi, depuis que je suis ministre, je n’ai jamais rencontré de maire qui déclare ne plus vouloir exercer ces fonctions, qui sont anciennes au sein de la République. Parmi ces moyens, certains sont attendus depuis longtemps : l’équité, l’assurance juridictionnelle et l’accompagnement psychologique, dont certains se sont moqués à tort, car il répond à une demande concrète. Nous avons reçu des maires, victimes d’agressions au cours des six derniers mois, qui se sont présentés au tribunal correctionnel sans avocat, afin de ne pas faire peser cette charge financière sur leur commune ; dans le même temps, leurs agresseurs étaient eux défendus par un avocat. Nous souhaitons que de telles situations ne se présentent plus. L’assurance juridictionnelle apportera une équité importante, permettant à tous les élus de la République de bénéficier d’un socle minimal d’accompagnement juridique.

D’autres mesures permettront également de redonner de la force à l’autorité municipale : il s’agit de transférer des responsabilités en matière de police administrative, relevant jusqu’à présent des préfets, au niveau du maire, l’autorisant à prononcer des sanctions, notamment concernant le dépôt des déchets, les débits de boissons, l’élagage ou encore le droit de l’urbanisme. Ces sujets très divers ne sont sans doute guère spectaculaires, mais pour quiconque connait la vie municipale dans les collectivités, ils sont concrets et quotidiens.

Nous avons opéré trois choix méthodologiques. Dans le statut de l’élu, nous avons pris la peine de réformer la formation par voie d’ordonnance. Nous ne souhaitons bien évidemment pas déposséder le Parlement de ses prérogatives ; toutefois, connecter la formation des élus au compte personnel de formation (CPF) et au droit individuel à la formation (DIF) – cher à Jacqueline Gourault qui en est la créatrice – demande beaucoup de technicité. De plus, je ne souhaite pas réformer la formation des élus sans prendre le soin de rencontrer les présidents de chaque formation politique. En effet, ces dernières, tout comme les grandes associations d’élus, disposent de leurs propres organismes de formation. Cette question mérite une négociation ad hoc.

Nous avons choisi de ne pas traiter des questions des métropoles et des communautés urbaines. Le très grand nombre d’amendements déposés, alors même que ces questions ne sont pas traitées dans le projet de loi, conforte ce choix. Je rappelle par ailleurs que lors du précédent quinquennat, les lois MAPTAM et NOTRe avaient déjà été dissociées. Nous vous proposons donc de réserver, dans un titre du projet de loi dédié aux questions métropolitaines et de communautés urbaines, l’ensemble de ces questions. Par conséquent et pour des raisons évidentes de méthodologie, nous repousserons tous les amendements qui les concerneraient.

Enfin, nous avons fait le choix d’adapter les dispositions du projet de loi à l’outre-mer par voie d’ordonnance. En effet, le statut de la commune fait parfois l’objet d’adaptations à des droits plus locaux ou à des organisations différentes, notamment dans la zone de l’océan Pacifique. Ainsi, le Haut-Commissaire en Nouvelle-Calédonie ou en Polynésie française n’a pas exactement les mêmes prérogatives qu’un préfet en territoire métropolitain. Le code général des collectivités territoriales (CGCT) ne s’applique pas toujours de la même manière. C’est pourquoi, pour des questions de lecture du droit, nous procèderons par ordonnance. Néanmoins, je ne souhaite aucunement priver les parlementaires de leur droit de regard, qui est essentiel. Par conséquent, nous constituerons un groupe de travail ad hoc, constitué de parlementaires ultra-marins ou non, afin d’élaborer l’ordonnance d’adaptation du projet de loi à l’outre-mer.

Enfin, je tiens à remercier les députés qui ont joué le jeu de la coproduction et du travail mené en amont, ce qui nous a permis de tracer des lignes directrices assez claires et de réaliser un travail pragmatique et utile au service de nos collectivités territoriales.

M. Bruno Questel, rapporteur. Ce projet est très attendu par les maires de France et, plus largement, par les élus locaux. Il est le résultat d’un long processus de concertation engagé dans le cadre du grand débat avec le Président de la République, riche de plus de quatre-vingt-seize heures d’échanges. Ce débat a permis de formaliser des attentes fortes, celles des élus locaux, notamment ceux des petites communes, face aux enjeux auxquels ils sont confrontés au quotidien. Il a également permis de formaliser une demande plus générale et de redonner un sens à l’engagement politique et citoyen, en leur permettant véritablement d’agir et de répondre aux demandes concrètes et quotidiennes de leurs habitants. Il en est de même de l’enjeu qui dépasse les seuls élus, celui de l’engagement dans la vie démocratique locale, afin de faire vivre la République, pas seulement comme un concept lointain et inatteignable, mais comme une réalité quotidienne et concrète, qui fait de chacun d’entre nous un citoyen actif.

Or cet engagement politique que l’on constate encore dans tous les territoires – partout, des citoyens et des élus se mobilisent – se heurte à des obstacles qu’il nous faut lever pour ne pas décourager les vocations éventuelles et l’envie de servir l’intérêt général. En ce sens, ce texte est plus qu’une réponse, c’est un premier acte concret et fondateur pour redonner aux élus la possibilité d’agir sur le quotidien des citoyens et ainsi de mettre en œuvre leurs engagements.

Parmi les objectifs les plus importants de ce projet de loi figure la suppression de l’essentiel des irritants de la loi NOTRe, notamment au sein du bloc communal, pour rétablir la place de la commune au sein de l’intercommunalité et la voix des maires dans le processus de décision. Cela signifie plus de coopération, de dialogue et de reconnaissance des compétences des uns et des autres. En revanche, nous ne rouvrirons pas tous les débats de la loi NOTRe, car les élus locaux expriment fortement une autre demande, celle de la stabilité. Supprimer ce qui entrave et ce qui gêne, oui, mais faire le grand soir, non : cette méthode a déjà donné les résultats que l’on connaît.

Le renforcement des moyens d’action du maire, notamment au titre de ses pouvoirs de police, est un autre objectif important. Le maire doit en effet pouvoir intervenir pour mettre un terme à un désordre, notamment sur la voie publique, le cas échéant par le biais d’amendes administratives.

Enfin, le soutien à l’engagement politique en reconnaissant le rôle des élus locaux et en améliorant les conditions d’exercice de leur mandat est un troisième objectif d’importance. Plusieurs mesures proposées constituent un marqueur fort de ce soutien : la revalorisation des indemnités, la protection fonctionnelle et la prise en charge de certains frais qui pèsent sur nos élus, comme les frais de déplacement et les frais de garde.

Je n’entrerai pas dans le détail de chacune des dispositions que contient le texte, tel qu’il nous est arrivé du Sénat. Je soulignerai simplement que de 28 articles initiaux, il a plus que quadruplé de volume à l’issue de son examen au Sénat, dépassant désormais les 120 articles. Ces ajouts, aussi nombreux soient-ils, sont davantage des compléments aux mesures proposées que des nouveautés. Certains articles sont parfois problématiques en termes juridiques, d’opportunité, ou encore de rédaction ; nous en proposerons donc la suppression.

Je rappelle que ce texte est une première étape importante, puisque la revalorisation et la reconnaissance des élus locaux sont des priorités de notre majorité et du Gouvernement. Au printemps prochain, le projet de loi dit 3D viendra compléter l’ouvrage de la refondation de notre République décentralisée et déconcentrée.

Je tiens par ailleurs à remercier nos collègues Alain Péréa, rapporteur pour avis de la commission du développement durable, Anne Blanc et Stéphane Baudu, qui représentent la délégation aux collectivités territoriales. Tous trois ont participé aux auditions et contribueront à enrichir nos débats. Je remercie également Sacha Houlié, responsable du texte pour la République en marche, avec lequel nous avons travaillé de concert. Enfin, je souhaite saluer la présence du président de la délégation aux collectivités territoriales, M. Jean-René Cazeneuve.

Au-delà de nos divergences, légitimes dans une démocratie comme la nôtre, vous aurez tous à cœur d’être les acteurs du travail que nous entamons ce soir.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La délégation aux collectivités territoriales s’est saisie de l’ensemble du texte et a désigné deux rapporteurs qui présentent en son nom un rapport d'information. Il s’agit de Mme Anne Blanc et de M. Stéphane Baudu à qui je vais donner la parole successivement.

Mme Anne Blanc, rapporteure pour avis. La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation (DCTD) a décidé de se saisir pour avis de l’intégralité du projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique. C’est l’essence même de cette nouvelle et jeune délégation au sein de notre assemblée de contribuer à l’élaboration de ce texte, en apportant son expertise et une vision pragmatique des communes et de leur fonctionnement.

Nous avons mené des auditions spécifiques au titre de la DCTD, avec des associations d’élus pour travailler sur la parité, et avec des représentants d’entreprises de différentes tailles, afin de déterminer de quelle manière améliorer l’engagement des élus.

Comme cela a été rappelé, le projet comprend désormais 133 articles, soit 90 de plus, de portée très variable.

L’un des objectifs est de faciliter et d’accompagner l’engagement de tous les citoyens dans un mandat électif local. Pour les élus locaux, notamment les nouveaux maires et conseillers municipaux qui seront élus au mois de mars prochain, il convient d’apporter davantage de visibilité dans leurs rapports avec leur intercommunalité, davantage d’efficience dans l’exercice de leurs pouvoirs de police, une protection juridique pour conforter leur action et l’accès à la formation dès le début de leur mandat.

Nous partageons l’idée selon laquelle cette loi doit être une loi d’ajustement et d’assouplissement et non de démantèlement. Il est souhaitable de corriger la brutalité de certaines réformes, sans remettre en cause les progrès apportés par l’intercommunalité. C’est pourquoi nous avons déposé une série d’amendements de suppression concernant des ajouts effectués par le Sénat en matière de répartition des compétences au sein du bloc communal ; ces ajouts nous paraissent soit aller à l’encontre de la réussite de l’intercommunalité, soit anticiper des débats qui pourront trouver leur place dans le cadre du projet de loi 3D.

J’en viens à deux des sujets les plus sensibles de ce texte, qui figuraient dans le projet initial, mais qui ont été profondément modifiés lors de l’examen au Sénat : l’exercice des compétences en matière d’eau et d’assainissement et la revalorisation des indemnités des élus des communes de moins de 3 500 habitants. Concernant le premier sujet, la remise en question par le Sénat du compromis trouvé sur ces transferts ne peut être acceptée. Nous sommes favorables à la réécriture de cet article, conformément à l’amendement déposé par le Gouvernement au Sénat ; celui-ci reprend les dispositifs initiaux et y ajoute la possibilité de déléguer au profit d’un syndicat de communes existant au 1er janvier 2019 et inclus en totalité dans le périmètre de la communauté de communes. S’agissant de la revalorisation des indemnités des élus, le Sénat a proposé un dispositif alternatif à celui du projet de loi initial, à la fois plus large, puisqu’il concerne aussi les communes de 1 000 à 3 499 habitants, et potentiellement moins coûteux. Nous considérons que ce dispositif est plus réaliste et répond mieux à la situation des maires des petites communes.

M. Stéphane Baudu, rapporteur pour avis. Concernant les aspects du texte qui peuvent être enrichis, nous pensons tout d’abord qu’en matière de statut de l’élu, il est absolument nécessaire de renforcer le faire-savoir, aussi bien à l’intention des élus qu’en direction des entreprises, qui ignorent très souvent l’existence de dispositions dans le CGCT renvoyant au code du travail.

L’État, les associations d’élus et les organisations professionnelles devront prendre en main cet effort indispensable d’information dès la promulgation de la loi. Nous proposons la diffusion d’un manuel recensant et présentant l’ensemble des formations auxquelles les élus locaux peuvent accéder dans le cadre de leur mandat. Il s’agit donc pour le nouvel élu d’avoir la possibilité d’être formé dès le début de son mandat, à travers l’anticipation du droit individuel à formation DIF ou du compte personnel de formation, le CPF.

À l’article premier, nous proposons une série de dix amendements concernant le pacte de gouvernance, qui doit être l’acte fédérateur de l’intercommunalité en début de mandat. Il s’agit de déterminer les règles du jeu qui régiront l’intercommunalité. De la place des communes au sein de la gouvernance à la validation des objectifs du projet de territoire en passant par les efforts de mutualisation et le pacte financier et fiscal, nous proposons ici un contrat indispensable, donc obligatoire, à vocation également pédagogique pour les nouveaux élus qui découvriront le fait communautaire.

Nous souhaitons appeler l’attention sur l’article 1er ter, qui prévoit l’élection des vice-présidents des EPCI au scrutin de liste majoritaire, ainsi que le respect de la même proportion de femmes au sein du conseil communautaire et du bureau. La première disposition peut en effet avoir des « effets de bord », tels que la surreprésentation des grandes communes au détriment des petites, ce qui irait à l’encontre des objectifs du texte.

Au sujet de la parité dans les conseils municipaux en vue des élections de 2026, nous avons constaté lors des auditions et des déplacements qu’il existe un consensus très large pour avancer vers un scrutin de liste paritaire au premier habitant ; nous soutiendrons cette position.

À ce stade, nous avons une interrogation sur les effets de l’assimilation des maires et adjoints ayant cessé d’exercer leur activité professionnelle à des salariés protégés au sens du livre IV de la deuxième partie du code du travail. Nous avons constaté lors des auditions que cette situation était méconnue par les employeurs et que ce statut ne semblait pas particulièrement recherché par les élus, surtout lorsqu’ils reviennent à la vie professionnelle.

En ce qui concerne l’article 31, qui habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour réformer le système de formation des élus, nous appelons l’attention sur plusieurs aspects de cette importante réforme. Tout d’abord, il nous semble nécessaire de s’assurer que les nouveaux élus disposeront dès leur entrée en fonction d’un crédit permettant d’accéder à une première formation. Nous considérons ensuite que l’inclusion du centre national de la formation professionnelle territoriale (CNFPT) dans le schéma du nouveau compte personnel de formation n’est pas pertinente. Enfin, j’ajoute qu’en l’état, le refus du Sénat de mutualiser le financement des formations entre les collectivités territoriales obère considérablement la viabilité du dispositif.

Enfin, il nous apparaît indispensable que les députés soient étroitement associés à la rédaction des futures ordonnances, mais aussi aux orientations nouvelles en matière de retraite pour les élus, même s’il s’agit d’un autre texte.

Mme Anne Blanc, rapporteure pour avis. La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, sous la houlette de son président, sera très engagée sur ce texte. Nous devons veiller à atteindre les objectifs initiaux mais aussi à les renforcer pour faire en sorte qu’il y ait une adéquation totale avec les réalités du terrain au plan municipal et intercommunal.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous allons entendre les porte-parole des groupes.

M. Sacha Houlié. Le Gouvernement n’a pas fait mystère du fait que le point de départ de ce projet de loi est la loi NOTRe du 7 août 2015, qui a eu pour conséquence de redessiner la carte de France et de faire évoluer durablement et significativement le fonctionnement de l’intercommunalité. Ce texte a conduit à des crispations indépassables ou, en tout cas, à des difficultés majeures que les élus ont fait remonter. On a choisi d’axer l’organisation territoriale de notre pays sur l’intercommunalité et les régions mais en oubliant de convaincre les élus des bienfaits de cette évolution, de leur donner le mode d’emploi et même de les consulter. Vous semblez vouloir y remédier, puisque vous avez fait allusion aux 96 heures du grand débat qui ont eu lieu en présence du Président de la République.

Il y a le projet de loi et ce qui n’y figure pas. On l’a dit avant moi : ce texte ne concerne pas les structures les plus intégrées – les métropoles, les communautés urbaines, mais aussi les départements et les régions. Ce sera probablement l’objet du projet de loi annoncé pour septembre 2020.

Nous voulons traiter du quotidien, celui des communes et des intercommunalités, notamment la façon dont on doit faire fonctionner ces dernières. Il faut simplifier les règles pour libérer les élus, leur donner du temps pour penser et pour faire.

La première ambition du projet de loi est de faire fonctionner convenablement les EPCI. Ils consistent, comme le soulignent les maires, à faire à plusieurs ce que l’on ne peut pas faire seul. Vous avez évoqué, monsieur le ministre, un compromis un peu impossible entre la liberté et l’égalité : nous pourrons vous proposer une voie à suivre en la matière.

Il y aura de la liberté dans le cadre du pacte de gouvernance et, peut-être, de l’obligation dans celui de la conférence des maires, qui vise à donner une place à chaque maire au sein des intercommunalités. En revanche, il ne doit pas être question, à notre sens, de faire un « grand soir » de la compétence. Certains s’y sont essayés, mais ce n’est pas ce que demandent les maires, à notre avis. Pourriez-vous confirmer l’intention du Gouvernement de ne pas remettre en cause des compétences qui ont vocation à s’exercer en commun, comme l’eau et l’assainissement ? Je rappelle que c’est un sujet dont nous avons déjà eu l’occasion de délibérer.

La seconde ambition du texte est de redonner du pouvoir aux maires et de rendre efficientes les décisions qu’ils prennent. De nouveaux pouvoirs de police administrative seront confiés aux maires, les préfets pourront leur donner une délégation en ce qui concerne la fermeture des débits de boisson, et il pourra y avoir des astreintes journalières dans le cadre des autorisations d’urbanisme, en cas de défaut d’entretien des végétaux ou d’occupation illégale de la voie publique.

On doit définir les limites dès qu’il est question de police administrative. Celle-ci doit être nécessaire et proportionnée compte tenu des faits, et c’est au législateur d’y veiller. Je défendrai un amendement visant à assurer le non-cumul des sanctions administratives et judiciaires pour des faits réprimés successivement par deux autorités différentes.

La troisième ambition du texte est de simplifier l’existant. La volonté du groupe La République en Marche est de revenir à l’esprit initial du texte, qui a parfois été remis en cause par nos collègues du Sénat, notamment en ce qui concerne la démocratie locale. Nous avons ainsi déposé un amendement relatif aux conseils de développement.

Le quatrième domaine dans lequel ce texte va permettre de réaliser des avancées est le statut des élus.

Le statut de salarié protégé va trop loin, de notre point de vue : il serait préférable d’inscrire dans le code du travail un principe de non-discrimination en raison de l’exercice d’un mandat électoral.

Nous saluons, en revanche, les dispositions relatives à la prise en charge des frais de garde – il faut relever qu’un effort financier sera réalisé par l’État dans ce domaine –, à la protection fonctionnelle, dont vous avez rappelé l’absolue nécessité, monsieur le ministre, et à la rénovation profonde du droit à la formation, qui nécessitera une consultation des associations d’élus et des partis politiques.

Par ailleurs, nous souhaitons confirmer ce qu’a prévu le Sénat en ce qui concerne le droit des élus à bénéficier de l’allocation aux adultes handicapés.

S’agissant de l’épineuse question des indemnités, le projet de loi donnait initialement beaucoup de liberté aux élus, en leur permettant de décider seuls. Le Sénat, les écoutant, a préféré graver des règles dans le marbre. Mon groupe voudrait émettre une réserve en la matière : si un effort doit être réalisé pour financer les indemnités, cela ne doit pas se faire au détriment des dotations prévues pour les investissements. Par ailleurs, nous souhaitons que les modalités adoptées au Parlement soient dupliquées dans les collectivités, sous la forme d’une modulation des indemnités en fonction de la participation effective des élus aux réunions.

Nous pensons, de même, que les droits de l’opposition – qui ont été reconnus à l’Assemblée nationale – peuvent être étendus aux collectivités territoriales : on pourrait reconnaître le droit de poser des questions au début du conseil municipal au moins tous les six mois.

S’agissant du droit de vote des détenus, nous souhaitons introduire, là encore et dans le droit fil des engagements pris par le Président de la République, une simplification.

Je ne peux terminer mon intervention sans aborder la parité : le Sénat a fait évoluer le projet de loi pour garantir qu’elle existe au niveau des adjoints au maire dans les communes d’au moins 1 000 habitants. Nous nous sommes posé la question du seuil. La difficulté de constituer des listes mais aussi les avis du Conseil d’État et la jurisprudence du Conseil constitutionnel doivent conduire à faire preuve de la plus grande prudence en matière. Nous défendrons un amendement visant seulement à ramener le seuil à 500 habitants.

Nous nous réjouissons, vous l’aurez compris, de l’examen de ce texte. Nous souhaitons envoyer un message sans équivoque aux élus locaux : après la loi NOTRe, le temps est venu de construire une loi « vôtre ».

Le sérieux avec lequel nous avons travaillé sur ce sujet est le reflet de notre ancrage territorial. Nous souhaitons que ce projet de loi apporte des solutions faisant l’objet d’un consensus entre les deux chambres du Parlement.

M. Arnaud Viala. Je voudrais vous remercier, monsieur le ministre, pour les échanges que nous avons pu avoir en amont de l’examen du texte. Le travail que nous sommes en train de réaliser doit permettre d’adresser aux élus locaux, et plus largement aux Français, un message positif au sujet de l’exercice de la démocratie locale et de proximité.

S’agissant du premier volet du texte, relatif aux mandats municipaux et aux conditions d’exercice de la fonction de maire, nous avons le devoir de nous adresser aux élus. Ils ont besoin de reconnaissance, de réconfort et de marges de manœuvre, en particulier à la veille d’un scrutin municipal qui s’annonce relativement complexe, même si je rejoins la ministre sur le fait qu’il y a des évolutions chez les élus, à mesure que les semaines passent, sur le point de savoir s’ils vont se représenter ou non. Dans un contexte marqué par la défiance de nos concitoyens envers les élus en général – mais c’est peut-être moins vrai en ce qui concerne les élus locaux –, il est absolument nécessaire que le Parlement restaure la confiance dans la démocratie, notamment participative. Au-delà de certains aspects très techniques qui ne concernent que les élus, nous avons collectivement le devoir d’adresser un message à nos concitoyens.

Pour ce qui est des EPCI et des intercommunalités, j’observe que certaines dispositions qui devaient initialement permettre de réaliser des ouvertures ou d’offrir des marges de manœuvre sont devenues très normées ou présentent même, désormais, un caractère obligatoire, ce que je déplore. Il me semble que l’intercommunalité n’a de vertu que lorsqu’elle se vit librement et qu’elle permet à des élus d’administrer un territoire d’une manière absolument responsable, adulte, en vertu du mandat qui leur a été confié par leurs concitoyens. En encadrant trop on court le risque non pas d’affaiblir les communes – c’était la crainte exprimée par les sénateurs – mais de rigidifier les EPCI et de rendre les projets territoriaux trop technocratiques. J’appelle la commission à faire preuve de responsabilité : il faut permettre à chaque territoire de vivre pleinement son projet. Quand on a été ou qu’on est un élu local, je crois qu’on comprend bien ce que je veux dire.

Pour ce qui est du volet relatif au statut des élus, le souhait du groupe Les Républicains est de faire en sorte que les évolutions apportées dans le cadre de ce texte ne soient pas vécues comme des reproches adressés à une caste qui voudrait conserver certains privilèges.

M. Raphaël Schellenberger. Dans le droit fil de ce qui vient d’être dit par Arnaud Viala, je voudrais souligner que nous aurons une attitude positive à l’égard de ce texte : il apporte des modifications bienvenues du point de vue des élus locaux, même si ce n’est pas, évidemment, le « grand soir » – vous l’avez dit à plusieurs reprises. Nous pensons qu’il faudrait aller plus loin pour beaucoup de territoires – mais nous verrons ce qu’il y aura dans la loi 3D.

Nous sommes attachés à un certain nombre d’apports qui viennent du Sénat et, globalement, aux équilibres actuels du texte, même si nous exprimerons par moments des points de vue un peu différents. La suppression des compétences optionnelles, dans le cadre d’une approche plus volontariste des intercommunalités, nous semble une évolution importante. Nous souhaitons également que l’on ne contraigne pas davantage les élus locaux, que l’on n’ajoute pas des normes aux normes ou des schémas aux schémas existants. Un article du texte vise à supprimer un certain nombre d’obligations : nous serons très vigilants face aux tentatives d’affaiblir cette disposition – nous agirons même en tant que force de proposition pour l’élargir.

Nous ne comprenons pas pourquoi on cherche à modifier le mode de scrutin à six mois des élections locales, alors que l’évolution proposée ne s’appliquerait qu’en 2026. Si ce n’est pas le « grand soir », si ce ne sont que des adaptations techniques, alors il n’y a pas de raisons de toucher au mode de scrutin dans ce texte : gardons cette question pour des discussions ultérieures.

S’agissant des compétences en matière d’eau et d’assainissement, ce ne sera que la troisième ou quatrième fois que l’on en discute au sein de cette commission : c’est quasiment du comique de répétition !

En ce qui concerne les indemnités, nous serons très attentifs aux amendements – nous avons entendu ce qui vient d’être dit au nom de la majorité. Il ne faut pas pointer du doigt les élus locaux. Ce sont des gens qui donnent du temps et de l’énergie à la collectivité, qui font preuve d’engagement. C’est donc à juste titre qu’ils sont indemnisés.

M. Vincent Bru. Ce projet de loi, qui concerne exclusivement le « bloc communal », suscite un vif intérêt : c’est un texte attendu à l’aube du renouvellement des conseils municipaux et communautaires, qui aura lieu en 2020.

Je voudrais vous remercier, monsieur le ministre, pour le dialogue très constructif que nous avons eu avec vous et l’ensemble de vos services.

Le groupe du Mouvement démocrate et apparentés se réjouit que nous examinions ce projet de loi qui tend à renforcer l’engagement dans la vie locale et la proximité dans l’action publique. Nous sommes évidemment favorables aux objectifs : corriger les irritants de la loi NOTRe, améliorer la gouvernance des intercommunalités, conforter la place des maires en leur sein, faciliter leur quotidien et permettre une meilleure reconnaissance de leur engagement auprès de nos concitoyens.

Nous avons créé depuis plusieurs mois, avec Stéphane Baudu, un groupe de travail visant à recueillir l’avis des élus locaux dans nos circonscriptions. Nous avons constaté qu’ils se réjouissent de ce texte proposé par la majorité. Notre travail préparatoire nous a également permis de réfléchir à des propositions très concrètes, qui sont issues du terrain.

J’ai ainsi déposé, au nom de mon groupe, un amendement concernant les indemnités liées à la fonction de maire : elles devraient être, selon nous, fixées automatiquement au début de chaque mandat. On sait que les maires des petites communes n’osent pas demander, malgré leur engagement, une indemnité ou une majoration de ce qu’ils perçoivent lorsque le maire précédent ne touchait pas d’indemnité ou peu. Les maires se trouvent dans une situation difficile lorsqu’ils doivent justifier leur demande et ils s’exposent au regard critique de leurs administrés.

Je voudrais également appeler l’attention sur plusieurs autres dispositions que nous défendrons lors de l’examen des amendements.

Nous souhaitons que l’élaboration d’un pacte de gouvernance soit rendue obligatoire au sein des EPCI à fiscalité propre, et nous pensons qu’il faudrait inscrire dans ce pacte les modalités de fonctionnement des conseils de développement.

Nous ferons aussi des propositions en ce qui concerne la parité, sujet sur lequel Élodie Jacquier-Laforge interviendra en particulier, et les conditions dans lesquelles les conférences des maires peuvent être librement créées.

Par ailleurs, nous souhaitons étendre le scrutin de liste aux communes de plus de 500 habitants.

Enfin, nous voulons revenir sur les mesures adoptées par le Sénat en matière d’intercommunalité : nous ne cautionnons pas la volonté de détricoter ce qui existe. Des intercommunalités sont en place, et on ne peut pas modifier en profondeur leurs compétences, voire les rendre à la carte. Les élus locaux réclament de la stabilité, et non un grand chambardement en ce qui concerne la répartition des compétences. Nous défendrons des amendements de suppression refusant clairement la remise en cause du fait intercommunal.

Nos amendements visent simplement à améliorer le texte et à revenir sur certaines dispositions issues du Sénat. Nous saluons globalement le projet de loi. Il est le fruit du travail réalisé par le Gouvernement et la majorité en concertation étroite avec les élus locaux. C’est un premier pas qui sera complété par le futur projet de loi 3D, que nous attendons avec impatience.

Mme Cécile Untermaier. Je voudrais commencer par quelques éléments de contexte.

Il a été question des irritants de la loi NOTRe : c’était sans doute à juste titre, mais il faut aussi rappeler que la croissance était nulle en 2012 et que l’on parlait beaucoup du millefeuille administratif, alors que c’est curieusement beaucoup moins le cas aujourd’hui. On considérait à l’époque que le millefeuille coûtait cher et qu’il fallait réduire les dépenses de fonctionnement, en particulier celles des intercommunalités. Nous avons tenté de le faire dans le cadre d’une réorganisation ambitieuse du territoire – avec la loi relative aux régions, la loi dite MAPTAM, pour les métropoles, et la loi NOTRe en ce qui concerne l’intercommunalité. Il est vrai que la commune a été oubliée. Je dirais même qu’elle a été fustigée, non pas depuis 2012 mais depuis des années : on n’arrêtait pas de dire qu’il y avait trop de communes – 36 000 – et que la situation était impossible à gérer.

J’ajoute qu’il y a eu des hésitations, au début de cette législature, sur le chemin à suivre en matière de réorganisation territoriale. Vous poursuivez finalement dans la voie que nous avons empruntée. Il y a des hésitations pendant toutes les législatures. Il y en a eu précédemment, et il y en aura d’autres, hélas – c’est la vie politique –, mais on fait des choses...

S’agissant du texte proprement dit, Pierre-Paul Royer-Collard, qui était à la fois homme politique et écrivain, disait que la commune est comme la famille : l’État ne la crée pas, mais il la trouve. C’est une conception à laquelle le groupe Socialistes et apparentés adhère. Ce projet de loi remet la commune là où elle doit être : c’est l’échelon de départ, celui de la vie, et l’intercommunalité change ainsi de sens. Elle est un outil au service des communes : elle n’a pas à se servir de ces dernières. Nous sommes tout à fait d’accord avec l’idée que la commune doit être au cœur de l’intercommunalité : il est utile de la repositionner.

Nous sommes également très intéressés par une amélioration de la gouvernance. Il aurait fallu un pacte dans certaines intercommunalités qui ont été agrandies jusqu’à compter 20 000 habitants. Il faut inciter les maires à réfléchir à la nouvelle organisation que cela implique : on ne peut pas gérer une intercommunalité de 20 000 habitants ou plus comme on le fait quand il y en a 10 000. Cela nous paraît tellement essentiel que nous considérons que cela ne devrait pas être optionnel.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier les citoyens. Je trouve qu’il est curieux, après le grand débat et la convention citoyenne pour le climat, de ne rien prévoir à leur sujet. Je ne cherche pas à donner des leçons : nous avons oublié la commune. Pour votre part, vous oubliez peut-être le citoyen.

La proximité des maires est appréciée, mais ils nous parlent du sentiment de solitude qu’ils éprouvent. Ils ont l’impression que la population n’est pas rassemblée à leurs côtés pour les soutenir dans leur action. Il faut aider les maires : donnons leur des pistes – sans édicter des obligations – pour associer les habitants, comme nous essayons maintenant de le faire au niveau national.

La formation est également un enjeu majeur. J’ai un regret, qui est le recours à des ordonnances. Malgré les efforts que vous pourrez faire, cela nous privera, comme toujours, d’un débat utile. On l’a bien vu en ce qui concerne la justice des mineurs.

Les maires doivent avoir accès à une formation dans les six mois qui suivent leur élection. Un maire qui n’a pas les connaissances nécessaires, qui manque de formation, est dans la main du conseil municipal. Nous souhaitons que la formation soit possible dès les six premiers mois d’exercice du mandat, en particulier pour les primo-élus.

Nous défendrons aussi des amendements relatifs à la parité.

La déontologie est un autre thème qui compte. Il s’agit de protéger et de donner du sens au travail des élus, qui sont demandeurs dans ce domaine – ce n’est pas nous qui leur demandons quelque chose, mais eux.

Je pense qu’il faut de la transparence du côté des élus locaux, comme c’est désormais le cas pour les élus nationaux.

Par ailleurs, je voudrais souligner que ce n’est pas un texte relatif au statut des élus locaux, et que les maires ne demandent pas des indemnités supplémentaires – ce n’est pas leur première préoccupation : ils veulent être considérés.

Sous les réserves que je viens d’indiquer et dans l’espoir qu’il y aura des efforts permettant d’avancer encore plus, mon groupe est favorable au projet de loi.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. J’associe Pascal Brindeau à mon intervention.

Nous abordons un texte qui intéresse les élus locaux mais aussi l’ensemble de nos concitoyens. Ce projet de loi nous est proposé après la crise des gilets jaunes et le grand débat qui a eu lieu. Les attentes sont fortes après les lois MAPTAM et NOTRe qui ont bouleversé notre organisation institutionnelle et créé un vrai désordre en instaurant des collectivités XXL, c’est-à-dire de grands cantons, de grandes intercommunalités et de grandes régions – le ministre l’a souligné lui-même.

Votre objectif est double : gommer les aspérités des lois précédentes, pour ne pas dire leurs erreurs, et favoriser une réponse de proximité, qui est demandée par de nombreux élus et citoyens. Ce n’est pas une tâche facile : toutes les associations d’élus ont des revendications légitimes mais elles restent corporatistes, ce qui complique la situation. Les réformes sont difficiles dans ce pays, tout particulièrement en matière institutionnelle.

On sait également que vous préparez un nouvel acte de décentralisation, sans chercher à provoquer, néanmoins, un « grand soir » dans ce domaine.

C’est dans ce contexte que nos débats s’inscrivent. Je dois saluer, par ailleurs, votre volonté de dialogue – nous avons pu la constater ces dernières semaines. Vous nous avez consacré du temps.

Je ne sais pas si ce projet de loi, avec les apports du Sénat et de l’Assemblée nationale, permettra de satisfaire les attentes des élus locaux et la revendication permanente, du côté des citoyens, d’une proximité plus grande.

Nous assistons depuis plusieurs décennies à la création de grandes intercommunalités, au sein desquelles les élus locaux ont senti peu à peu que leurs propres fonctions leur échappaient. La commune s’est retrouvée diluée au sein de grands ensembles et d’une organisation territoriale de plus en plus complexe. Les maires se sentent dépossédés de leurs compétences et ils rencontrent des difficultés pratiques. Dans certains cas, ils doivent parcourir plusieurs centaines de kilomètres pour se rendre à une réunion : dans mon département, la Lozère, on peut mettre deux heures pour se rendre au chef-lieu d’une intercommunalité.

Il y a une contradiction : on se défie des intercommunalités, mais on comprend aussi la nécessité de se regrouper, parfois. Il est temps de redonner du sens à ce qui devait, à l’origine, assurer une meilleure coopération. On doit faciliter les échanges, encourager les accords et renforcer le dialogue afin que chaque décision soit prise dans l’intérêt de tous. Le projet de loi s’efforce de répondre à ce besoin, et nous essaierons de l’enrichir.

Je tiens également à revenir sur la notion d’engagement. Nos collectivités vivent grâce à des élus locaux dévoués qui ne réclament rien d’autre que les moyens de remplir leurs missions au service de l’intérêt général. Il ne faut pas perdre le sens de cet engagement. C’est pourquoi des mesures de soutien sont indispensables. Les aides prévues dans le cadre de ce texte, notamment en matière de garde d’enfants, sont bienvenues, et les actions de formation seront également très utiles. Par ailleurs, les maires doivent sentir que leur action n’est pas vaine. Ils doivent avoir les moyens nécessaires pour faire respecter leurs décisions. Nous souscrivons donc aux modifications concernant le pouvoir de police des maires. L’idée générale est de redonner des bases solides et un cadre pragmatique aux fonctions des élus locaux.

Je souhaite cependant émettre quelques petits bémols.

Nous saluons, bien sûr, la volonté d’augmenter les indemnités des élus locaux, mais nous restons perplexes compte tenu des moyens financiers de certaines communes.

Tel qu’il nous a été transmis par le Sénat, ce texte semble avoir pour effet de déstabiliser, une fois de plus, la répartition des compétences, ce qui ne nous paraît pas opportun.

Autre point essentiel, il faut aider les élus dans leurs fonctions. Le rescrit administratif constituera une avancée, mais je relève que la demande devra être précise et complète et qu’elle devra indiquer la ou les questions de droit évoquées. Or beaucoup de petites communes ne disposent pas d’un service juridique approprié. Je crois, par conséquent, qu’il faudrait réfléchir à d’autres possibilités afin de soutenir les élus face à l’inflation des normes, dans le cadre d’un meilleur dialogue avec l’administration. Je propose que l’on sorte du tout-contrôle administratif pour aller vers une administration d’accompagnement. C’est une révolution intellectuelle qui est loin d’être gagnée dans notre État de droit.

Je regrette, enfin, que certains de nos amendements aient été déclarés irrecevables alors qu’ils relevaient d’une vision pragmatique et pratique de la décentralisation. Nous demandions qu’il y ait une information préalable, et obligatoire, avant toute création d’une commune nouvelle, que d’anciens élus puissent servir en tant que personnalités qualifiées dans les syndicats de communes, que l’on puisse accéder à l’honorariat après seulement douze ans de mandat et que l’on améliore la procédure de communication des documents administratifs, qui est un parcours du combattant. On nous répond qu’il s’agit de cavaliers législatifs, mais où est alors la coproduction ?

Il y a aussi la question du cumul entre un mandat parlementaire et un mandat exécutif local, qui n’est pas non plus traitée dans ce texte.

Tout cela pourrait sembler assez désespérant, mais je souhaite rester positif : je salue votre volonté de corriger certaines erreurs du passé, de redonner un sens aux mandats locaux et de rendre de la liberté aux communes. Ce texte permettra de réaliser des avancées. Nous l’aborderons donc avec bienveillance tout en faisant des propositions pour l’enrichir.

M. Jean-Félix Acquaviva. Nous sommes tous d’accord pour replacer les maires au cœur du fonctionnement de notre démocratie. Il est, cependant, navrant qu’il ait fallu la crise des gilets jaunes et le grand débat national pour que l’exécutif prenne conscience que les maires sont le cœur battant de notre démocratie et que nous prenions tous la mesure de leur dévouement mais aussi de leur découragement. Celui-ci est en partie lié aux dernières grandes réformes relatives aux territoires, qui ont conduit à des dysfonctionnements majeurs. Il y a eu, notamment, la loi NOTRe. Face à l’agrandissement inconsidéré des périmètres intercommunaux et aux transferts de compétences obligatoires, toujours plus nombreux, vers les EPCI à fiscalité propre, mais aussi face à un État centralisateur et à un Gouvernement jusque-là frileux en matière de décentralisation – mais nous attendons la suite –, les élus locaux se sentent dépossédés, impuissants et déconsidérés.

Nous regrettons aussi que le débat soit escamoté : des amendements ont été déclarés irrecevables alors qu’ils avaient, selon nous, un lien avec des dispositions figurant dans le projet de loi. Le groupe Libertés et Territoires a déjà appelé l’attention à plusieurs reprises sur ce point. Il serait très problématique que cela devienne une question d’interprétation ou d’opportunité politique.

Il n’y a pas d’amour, mais seulement des preuves d’amour. Votre volonté de redonner toute leur place aux maires et aux équipes municipales sera jugée à l’aune du débat que nous pourrons avoir dans cette commission puis en séance publique. Les Français, nous le savons, sont très attachés aux maires. Ces derniers restent largement en tête du classement des élus préférés de nos concitoyens. Cependant, le pouvoir d’action des élus diminue année après année et, en corollaire, la confiance et la considération accordées par les citoyens sont de plus en plus remplacées par la méfiance, la défiance, voire la violence, comme on a pu le voir ces derniers mois. Je pense notamment à la mort du maire de Signes, qui s’opposait simplement à un dépôt sauvage de gravats, en août dernier.

Si les maires sont à la portée des remerciements, ils sont aussi à la portée des engueulades. Par ailleurs, leur engagement est souvent chronophage et stressant. Il y a également une incertitude en matière de reclassement à la fin du mandat.

Mon groupe ne cesse d’appeler à prendre en considération les corps intermédiaires et les élus locaux. C’est le sujet de ce projet de loi – le premier que vous nous présentez dans ce domaine. Ces acteurs ne sont pas des freins au changement mais des relais essentiels et des atouts pour construire notre pays.

Ce texte a été profondément modifié lors de son passage au Sénat, qui a été très ambitieux – d’aucuns diraient trop – puisque le projet de loi a changé de nature. De nombreuses mesures ont été ajoutées, mais il reste aussi beaucoup d’interrogations, notamment en matière de formation. Mon groupe n’est pas rassuré, pour l’heure, par les dispositifs visant à permettre aux élus de se reconvertir à la fin, choisie ou non, de leur mandat.

Plus globalement, nous nous interrogeons sur l’existence d’une véritable stratégie pour les collectivités territoriales. Il y a d’abord ce projet de loi, dont vous souhaitez que nous ne modifiions pas les grands équilibres – vous n’acceptez, pour l’instant, que des retouches – et vous nous appelez parallèlement à faire preuve de patience, car vous annoncez un projet de loi « 3D » – différenciation, décentralisation et déconcentration. Nous espérons qu’il n’y aura pas un quatrième « D », pour découragement s’il n’y a pas de nouvel acte fort de décentralisation.

Les maires ont besoin que l’État et les citoyens leur fassent confiance. Il faut, pour cela, un véritable choc de décentralisation et de véritables capacités de différenciation, simplifiées, clarifiées et opérationnelles. Vous ne serez pas surpris si nous disons qu’il faut un nouveau choc de décentralisation, une véritable décentralisation, qui ne doit pas être un « grand soir » mais une clarification permettant de ne pas rester au milieu du gué – c’est, en effet, la conséquence des réformes précédentes, qui ne sont pas allées jusqu’au bout. On pourrait organiser un brainstorming sur cette question si vous le souhaitez.

Au-delà de ce qui figure dans ce projet de loi, qui ne constitue pas encore un vrai statut des élus locaux, que souhaitent ces derniers ? Ils veulent avoir la capacité d’agir en toute sérénité grâce à des moyens juridiques et financiers renforcés. Mon groupe a fait cinquante propositions pour rendre les territoires plus forts et plus autonomes, notamment en ce qui concerne le statut de l’élu local. Nous pensons qu’une responsabilisation est nécessaire : il faut donner aux élus locaux des compétences enfin pleines et entières en ce qui concerne la prise de décision, la réalisation et le financement des projets. Par ailleurs, pourquoi ne pas aller vers l’autonomie fiscale ? Elle est nécessaire pour les collectivités. On pourrait aussi parler de la révision de la gouvernance des intercommunalités, qui est un aspect important de ce texte : il faut assurer une représentativité suffisante de l’ensemble des communes.

Mon groupe, vous l’avez compris, sera très présent lors de l’examen de ce texte en commission puis en séance. Nous nous prononcerons en fonction de l’évolution des débats.

Mme Bénédicte Taurine. À l’heure actuelle, 36 % des maires expliquent avoir des difficultés croissantes à satisfaire les demandes de leurs administrés ; plus de la moitié ne souhaite pas se représenter aux prochaines élections.

Ce projet de loi cherche à améliorer le statut des maires en leur donnant une plus grande marge de décision et d’action – en leur octroyant de nouveaux pouvoirs, en améliorant leur formation, en simplifiant le quotidien, en sécurisant leurs actions. Nous sommes favorables à ces avancées. Mais le principal problème n’est pas là : il réside dans le fait que les élus rencontrent des difficultés à financer leurs actions, en raison notamment du désengagement de l’État. Suite à la réduction de 11 milliards d’euros de la part forfaitaire de la dotation globale de fonctionnement (DGF) entre 2014 et 2017, les collectivités locales doivent faire face à une pression budgétaire extrêmement forte. En 2018, 67 % des petites villes ont connu des baisses de dotation forfaitaire. En outre, la loi du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 entérine une diminution des dépenses de toutes les administrations publiques locales par rapport au produit intérieur brut.

Si on souhaite redonner du pouvoir aux collectivités locales, il faut commencer par leur donner les moyens de fonctionner. Quel est le quotidien de nos concitoyens dans les communes de banlieue, comme dans les communes rurales ? C’est la fermeture des services publics, des problèmes d’accès aux services de santé ou aux transports, la fermeture des écoles au détriment des familles et des enfants. Les collectivités locales n’ont pas les moyens d’assurer le financement des structures dont les administrés ont besoin.

Le projet de loi répond partiellement aux problèmes rencontrés par les élus et les collectivités locales, mais rate le virage écologique et démocratique, alors même qu’il est issu du grand débat et censé répondre à la crise des gilets jaunes. On oublie souvent que, derrière le terme générique de « gilets jaunes », il y a des familles et des personnes qui sont toujours dans la même situation que l’an dernier, et toujours mobilisés. Tous les jours, ils font le même constat : leurs conditions de vie ne se sont pas améliorées.

Ce n’est donc pas le contenu du projet de loi qui est problématique, mais les sujets qu’il n’aborde pas et les blocages qu’il ne résout pas : rien sur la transition écologique, rien sur la démocratie directe locale, rien sur la participation citoyenne. Nous avions déposé plusieurs amendements visant à renforcer le pouvoir des citoyens afin d’encourager leur investissement, mais aussi de donner les moyens aux élus d’amorcer un virage écologique plus que nécessaire. Nous avions proposé un amendement sur la votation citoyenne. Tous ces amendement ont été déclarés irrecevables. Le référendum révocatoire : irrecevable. Le renforcement du droit de préemption urbain des communes pour lutter contre l’artificialisation des sols : irrecevable. Le droit pour les conseils municipaux de s’opposer à l’aménagement de surfaces commerciales de plus de 1 000 m² : irrecevable. Madame la ministre, comment pouvez-vous ensuite venir nous expliquer qu’il faut lutter contre la désertification des centres-villes ? Nous souhaitions pouvoir réviser les plans de prévention des risques pour intégrer les effets attendus du réchauffement climatique ; l’amendement est irrecevable. Nous voulions réglementer l’usage des pesticides ; cela a été déclaré irrecevable au motif que cela crée une charge nouvelle. Pourtant, certains maires voudraient bien faire cesser les pollutions qui mettent en danger la santé humaine et le projet de loi aurait dû se saisir du sujet, tout comme il aurait dû renforcer les pouvoirs des citoyens et leur engagement dans la vie de leur commune.

M. André Chassaigne. En venant assister à cette commission, je pensais que mon collègue Stéphane Peu était présent et je n’avais donc pas préparé d’intervention. J’espère que vous voudrez bien m’excuser si elle n’est pas parfaite !

Commençons par des sigles : RCT – pour relations avec les collectivités territoriales, MAPTAM, NOTRe. Ces acronymes sont synonymes de réformes trop rapides, mal ficelées.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Vous avez oublié GDR ! (Sourires.)

M. André Chassaigne. Ces réformes avaient malgré tout un objectif politique : la révision complète de l’organisation territoriale de notre pays. On parle de millefeuille. Mais un millefeuille, ce n’est pas seulement le nappage, c’est aussi la crème entre les feuilles. Les réformes se sont avant tout intéressées à la construction des grandes métropoles, qui devaient être « rentables » au niveau européen, dans le cadre d’une compétition mondiale. Il ne faut pas l’oublier !

Ces réformes ont créé de la colère, du désespoir. Nous étions plusieurs – sur différents bancs – à alerter sur leurs conséquences, même Mme la ministre, qui était sénatrice à l’époque. Nous nous en méfiions car nous savions qu’elles auraient des conséquences négatives, qu’elles affaibliraient la démocratie locale, qu’elles allaient abîmer les communes, fragiliser la citoyenneté, étouffer les besoins qui peuvent remonter des territoires.

Votre projet de loi est donc attendu. Apportera-t-il des réponses à la hauteur des enjeux ? Dans sa rédaction issue du Sénat, il procède à des ajustements techniques indispensables et ouvre aussi des perspectives, sans doute insuffisantes. Mais nous sommes là pour l’améliorer !

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine et les députés communistes seront fidèles à leur pratique : nous ne serons pas dans la posture. Notre ADN, c’est de travailler à l’amélioration des textes, en faisant preuve de bon sens, grâce aux expériences des uns et des autres, et aux témoignages que nous pouvons recueillir.

Il faudra améliorer certains mécanismes. je ne peux m’empêcher de citer Trotski : le cylindre, il faut l’améliorer ; le piston, il faut le renforcer ; mais aussi il faut de la vapeur. Nous allons essayer d’en injecter davantage.

Certes, il n’y aura pas de grand soir – vous l’avez dit. Nous nous en méfions beaucoup car, souvent, les grands soirs sont crépusculaires. Nous souhaitons des petits matins pour rendre la vie de nos communes plus lumineuse. Nous espérons qu’ils émergeront des débats. C’est l’objet des amendements que nous avons déposés et que nous défendrons.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. D’autres orateurs souhaitent intervenir.

M. Pascal Brindeau. L’une des ambitions de ce projet de loi est de corriger les irritants – notamment ceux de la loi NOTRe. Ma question porte sur la compétence en matière d’eau et d’assainissement. Ne devrait-on pas la scinder en deux : d’un côté, la compétence de l’eau potable dont les enjeux, liés à la sécheresse et au dérèglement climatique, sont majeurs, de l’autre, l’assainissement ?

Le Sénat est revenu sur l’équilibre initial du texte, dans lequel les intercommunalités étaient compétentes. C’était pourtant une bonne idée, même si l’inscription dans la loi NOTRe d’une compétence obligatoire des agglomérations a beaucoup crispé les élus locaux à l’époque. Ils se sont sentis dessaisis d’une compétence qu’ils considéraient comme identitaire.

Jusqu’où sera-t-il possible de déléguer cette compétence, soit à un syndicat intercommunal préexistant, soit à une commune préalablement compétente ? Si l’intercommunalité récupère la compétence, mais s’en dessaisit aussitôt, cela n’aura que peu de sens. Doit-on en conséquence borner la délégation, afin notamment que les investissements ou la détermination du prix payé par l’usager restent de la compétence intercommunale ? Ma question en appellera d’autres en séance car de cet équilibre dépend l’acceptabilité du transfert de compétence aux intercommunalités. Personnellement, je suis favorable à ce que ce soit obligatoire pour les agglomérations et les communautés de communes.

M. Dimitri Houbron. Ma question concerne les nouveaux articles 15 quinquies et 15 sexies, adoptés en commission des lois du Sénat avec l’avis favorable du Gouvernement.

L’article 15 quinquies met à disposition du président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) des agents de police municipale des communes membres. Concrètement, des présidents d’EPCI pourront exercer certains pouvoirs de police administrative spéciale dont l’objet correspond aux compétences exercées par l’intercommunalité, sauf opposition exprimée par les maires.

Cette mesure sera de nature à sécuriser l’application des politiques intercommunales. Mais je m’interroge sur un point, comme probablement d’autres élus qui suivent nos débats : quelle sera la forme juridique de cette mise à disposition ? S’agira-t-il d’un transfert de compétence permanent ou temporaire ? Ne sera-t-il effectif que dans certaines situations mettant en jeu une compétence exercée par le président de l’intercommunalité ? De quelles garanties juridiques disposeront les maires pour récupérer ces forces de police après les avoir mises à disposition du président de l’EPCI, afin de les remettre en activité sur le territoire communal ?

L’article 15 sexies simplifie les régimes de mutualisation des polices municipales : les conditions de recrutement d’agents de police municipale au niveau intercommunal seront assouplies. Le président de l’EPCI disposera d’un pouvoir d’initiative partagée avec les maires sur ce mode spécifique de recrutement. Je salue la volonté, louable, d’impulser une logique de mutualisation, en ne la conditionnant pas uniquement à une initiative des maires. Mais je souhaite être pleinement rassuré sur un point, comme les élus de mon territoire : cet article donne-t-il bien le pouvoir d’initiative au président de l’EPCI, du fait de la mutualisation des pouvoirs de police spéciale transférés par les communes ?

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Le projet de loi qui nous est présenté comprend des mesures visant à favoriser l’engagement dans la vie locale. Il est nécessaire d’associer toutes celles et tous ceux qui souhaitent participer au premier lieu de la démocratie, celui que tout le monde connaît : la commune. Comment attirer des jeunes, des femmes, des chefs d’entreprise, des artisans, des commerçants – tous ceux qui forment la société ? Mon collègue Stéphane Baudu l’a rappelé, les associations d’élus sont unanimes : elles souhaitent supprimer le seuil de 1 000 habitants pour l’application du scrutin de liste lors des élections municipales. Cela impliquerait son extension à toutes les communes.

Pourquoi est-ce une bonne chose ? Pour amplifier la parité, bien sûr, mais également pour développer un projet d’équipe, où chacun peut trouver sa place en fonction de ses compétences. Cela permettra également que plus personne ne soit barré sur une liste pour des raisons « personnelles ».

Le groupe MODEM et apparentés soutient cette suppression, qui constituera aussi un appel à la participation de toutes les femmes. Vous le savez, nous sommes en campagne, et elles doivent toutes se sentir légitimes et compétentes pour participer à ce beau projet qu’est le projet municipal. (M. Erwan Balanant applaudit.)

M. Rémy Rebeyrotte. Les intercommunalités et leur association estiment que le projet de loi, dans sa rédaction issue du Sénat, pourrait fragiliser leurs compétences – notamment les compétences optionnelles – ou la stabilité des périmètres. Elles souhaitent que l’Assemblée nationale retrouve un équilibre favorable aux communes et aux intercommunalités – et revienne donc à l’équilibre initial, le projet de loi visant à les renforcer et à les stabiliser toutes les deux. Qu’en pensez-vous ?

Dans le droit fil du rapport que nous avons rendu avec Arnaud Viala concernant la commune dans la nouvelle organisation territoriale, le projet de loi prévoit d’envoyer aux conseillers municipaux les ordres du jour, mais aussi les comptes rendus des séances, des conseils communautaires afin de faire mieux vivre le lien entre les deux collectivités. Je souhaiterais qu’en outre, à chaque séance de conseil municipal, un point de l’actualité communautaire soit réalisé par le maire ou les délégués communautaires. Il faut faire passer les informations afin que l’intercommunalité ne soit pas la porte d’à côté, le lieu que l’on ne fréquente pas, mais plutôt un élément de la construction du bloc communal. Qu’en pensez-vous ?

M. Robin Reda. Il était temps de parler des maires ! Cette discussion apaisée et très enrichissante est salutaire. Le mandat d’élu municipal est un beau mandat. Nous avions eu la tentation d’en parler il y a un an et demi à l’occasion de l’examen du projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dit ELAN. La compétence en matière d’urbanisme est toujours très discutée, les maires en attendent beaucoup pour conserver la maîtrise du visage de leur ville ou de leur village.

Comme d’autres collègues, je regrette que certains amendements aient été déclarés irrecevables. Ce projet de loi était la première occasion de mettre nos questions sur la table, à mi-mandat et à l’approche des élections municipales. Certes, vous me répondrez qu’ils sont passés sous les fourches caudines du nouveau règlement de l’Assemblée, mais nous aurions pu évoquer des sujets très intéressants, comme celui des métropoles. Le ministre l’a balayé et j’ai compris que le Président de la République, traumatisé par les événements récents, ne voulait plus en entendre parler. Mais les inégalités sont puissantes en leur sein, et certains maires souffrent, écrasés par des conférences métropolitaines ubuesques – je pense notamment au Grand Paris. Vous ne pouvez pas vouloir régler la question des intercommunalités géantes en région sans traiter celles déjà créées dans la métropole du Grand Paris. Certes, l’échelle est différente, mais la nécessité est la même : c’est celle du respect des maires, de leur parole et de celle des citoyens.

Lors des prochaines élections municipales, les seules intercommunalités dans lesquelles les élus ne le seront pas au suffrage universel direct sont les établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris !

Je partage les propos de mon collègue Pierre Morel-À-L’Huissier, on aurait également pu engager une réflexion sur le statut d’ancien maire. Un exemple : il faut actuellement dix-huit ans de mandat pour prétendre à l’honorariat – qui ne donne droit à aucun avantage. Je ne suis pas sûr que cela corresponde à notre idéal de renouvellement démocratique !

En outre, le mandat pourrait être valorisé dans une carrière. Malheureusement, notre amendement a été déclaré irrecevable.

Pour conclure, s’agissant des pouvoirs de police du maire, les hospitalisations d’office sont des procédures chronophages et complexes à appliquer. Elles contribuent à la difficulté de concilier vie personnelle, vie professionnelle et engagement local.

Mme Nicole Dubré-Chirat. Ma première question porte sur les conseils de développement. L’article 23 du projet de loi met fin à certaines obligations pesant sur les conseils municipaux et communautaires. Il rend notamment facultatif la création d’un conseil de développement. Or de nombreux maires et élus rencontrés pendant les réunions préparatoires m’ont répété leur attachement à cette institution.

Expression de la société civile organisée, il concourt à la démocratie territoriale en favorisant les échanges et la transversalité entre acteurs locaux d’horizons divers. Il développe une éthique et une expérience du débat, en veillant à la liberté d’expression, à l’indépendance et au croisement des points de vue, avec la volonté d’aboutir à des propositions concrètes. Il contribue aussi à la qualité des politiques publiques conduites pour répondre aux besoins des habitants et exerce son rôle de façon différente selon les territoires. Est-il donc vraiment nécessaire de le rendre facultatif ?

Ma deuxième question porte sur la parité. Le sujet a déjà été évoqué, mais je suis très attachée à ce principe, garant d’une société égalitaire et équilibrée. Il est temps que les femmes soient mieux représentées en politique. Nous sommes sur la bonne voie, mais beaucoup de chemin reste à parcourir. En outre, le principe se heurte parfois à la réalité des petites communes : elles ont du mal à constituer ces fameuses listes paritaires. En l’état actuel du droit, l’obligation s’adresse aux communes de plus de 1 000 habitants. Ma collègue Jacquier-Laforge l’a évoqué, une réflexion plus globale ne devrait-elle pas être engagée, afin de lier parité et scrutin de liste ?

Ma dernière question porte sur le médiateur territorial. L’article 23 bis, issu d’un amendement de la sénatrice Nathalie Delattre, crée un médiateur territorial. Il s’agit d’un mode alternatif de règlement des litiges entre communes et administrés. Le médiateur territorial est nommé par le conseil municipal de la commune qui l’institue pour une durée de cinq ans. Son mandat est renouvelable chaque année. Il transmet au conseil municipal qui l’a nommé un rapport d’activité, rédigé dans le respect du principe de confidentialité de la médiation. Le rapport peut contenir des propositions visant à améliorer le fonctionnement de la commune.

Le Gouvernement était favorable à cet amendement – ce dont je me réjouis –, sous réserve de réécriture. Des modifications substantielles vont-elles être apportées ?

M. Philippe Gosselin. C’est avec un réel plaisir que nous sommes présents ce soir pour vous entendre et débattre du statut des élus locaux, mais également de la coordination entre communes et établissements publics de coopération intercommunale. J’ai l’impression de revenir quelques années en arrière, en 2013. Avec Philippe Doucet, nous avions rédigé un rapport sur le statut de l’élu, présenté fort opportunément par la majorité de l’époque avant les élections municipales de 2014…

Cela ne vous aura pas échappé, nous sommes à la veille du congrès des maires et d’une échéance électorale municipale ! Je me réjouis que nous reconnaissions enfin les élus locaux – en particulier les maires – car, pour citer Tocqueville, « c’est dans la commune que réside la force des peuples libres ». Selon lui, sans institution communale, il n’y a point de gouvernement et point de liberté. C’est la réalité : les élus locaux sont à portée d’engueulade. Il faut donc les respecter et les mettre en avant. Cela signifie également que leurs compétences doivent être claires, d’où la demande de clarification des compétences respectives des intercommunalités et des communes.

Je fais partie de ceux qui considèrent que les intercommunalités ont toute leur raison d’être – l’union fait la force. Mais les communes doivent rester la porte d’entrée pour l’élection, comme pour informer les citoyens, coordonner et désigner.

Le statut des élus locaux que vous nous proposez prévoit des avancées, dont certaines s’inspirent de la proposition de loi « Gourault-Sueur » – je rends hommage à l’ancienne sénatrice, qui avait vu juste ! – devenue loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat. Nous verrons ce qu’il en est de la ministre, mais nous sommes encore très loin d’un statut des élus locaux. Nous nous interrogeons sur l’indemnisation des élus et beaucoup de sujets, pourtant sur la table, n’ont pas été tranchés.

Enfin, je m’interroge également sur la suppression du seuil de 1 000 habitants. Il est déjà très compliqué d’établir des listes dans certaines villes de plus de 1 000 habitants. N’aura-t-on pas encore plus de mal à trouver des candidats dans les petites communes ? Au lieu de favoriser la démocratie, on risque de l’affaiblir avec des listes uniques qui ne satisferont pas nos concitoyens.

M. Charles de Courson. Ne soyons pas trop directifs et faisons confiance aux élus locaux ! Évitons de leur expliquer ce qu’ils doivent faire et privilégions le principe de l’accord.

Le projet de loi est peu disert sur l’égalité d’accès aux charges publiques, ce qui va contribuer au maintien des inégalités entre les personnels des trois fonctions publiques et les salariés du privé, qui est une spécificité française : les uns bénéficient d’un statut extrêmement protecteur ; les autres pas…

Le projet contient quelques dispositions sur le statut des élus locaux. Mais, monsieur le ministre, nous en avions parlé lorsque nous nous étions rencontrés, on ne trouve nulle trace d’un fonds de conversion pour ceux qui sont battus ou qui veulent arrêter : une aide de six mois, couplée à la possibilité de bénéficier d’une formation pour se reconvertir, serait une bonne idée.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je ne vous cache pas ma grande émotion d’avoir entendu que le président Chassaigne ne croyait absolument pas au grand soir. L’information est importante : le président du groupe communiste tourne la page de l’espérance du grand soir pour se concentrer sur les petits matins !

M. André Chassaigne. C’est l’histoire qui a tranché !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Monsieur Chassaigne, je vous remercie pour cette prise de parole sincère et poétique !

Je prendrai le temps de donner l’avis détaillé du Gouvernement sur les amendements. Eh oui, monsieur Gosselin, le Normand n’est pas toujours taiseux, il est parfois bavard... Le président Bas l’a été : nous allons tenter de marcher dans ses pas pour corriger ce qui a été introduit nuitamment au Sénat !

Concernant l’eau et l’assainissement, monsieur Brindeau, j’ai commencé à répondre à vos questions devant votre groupe ce matin, mais d’autres députés sont également intervenus sur ce sujet, qui passionne les foules pour des raisons compréhensibles. Les difficultés locales sont certes liées à la raideur de la loi NOTRe, mais ce n’est pas une compétence comme les autres : l’enjeu écologique est important. Ainsi, entre un litre sur deux et un litre sur quatre d’eau potable est perdu pour cause de fuites. Je ne montre personne du doigt. Il s’agit des conclusions des Assises de l’eau, monsieur Gosselin, auxquelles votre collègue M. Saddier a participé. Vous pouvez l’interroger, il est légitime sur ces questions et s’est beaucoup investi. Interrogez également vos collègues des départements dont les ressources en eau sont mises à rude épreuve chaque été – les professionnels du monde agricole sont confrontés à des difficultés importantes d’irrigation. Je ne veux pas jouer les Cassandre, mais l’accès à l’eau potable va poser des difficultés importantes dans les années à venir.

La compétence doit donc être examinée en fonction de la qualité du service public rendu à nos concitoyens. Je le répète, je ne cherche à montrer personne du doigt mais force est de constater que, depuis trente ans, pour de bonnes raisons d’ailleurs, nous avons concentré les investissements sur les eaux grises et noires, grâce au système de subventions des agences de l’eau et aux primes épuratoires. Lorsqu’ils accompagnaient les projets, les départements et les régions ont aussi mis beaucoup d’argent dans les stations d’épuration ou les réseaux d’assainissement individuels ou collectifs.

Désormais, il faut massivement investir dans l’eau potable – le président de l’AMF François Baroin partage ce constat. Or les nappes phréatiques ne s’arrêtent pas aux limites communales ou intercommunales. Il faut donc organiser la solidarité entre les communes qui ont la chance d’avoir de l’eau et celles qui n’auront peut-être pas cette chance demain. Le sujet est très préoccupant. Lorsqu’avec Jacqueline Gourault, nous nous rendons aux congrès des maires, les élus sont partagés : ceux qui ont une source de production d’eau sur leur commune considèrent que le transfert obligatoire de la compétence de l’eau et de l’assainissement à l’intercommunalité est une contrainte, alors que ceux qui ne bénéficient pas de ressources en eau l’attendent.

Certains ont sans doute voulu politiser le sujet, mais soyons pragmatiques. Pour répondre à votre question, faut-il abîmer ce qui fonctionne bien – une régie qui fait le boulot depuis un siècle ou un syndicat d’eau, regroupant trois ou quatre communes, qui fonctionne bien depuis cinquante ans ? Je ne le pense pas. C’est pourquoi le projet de loi contient une novation juridique importante : la délégation. Une strate territoriale – l’intercommunalité – sera « propriétaire » de la compétence. C’est la maille raisonnable, nous semble-t-il.

Mais, dans certains départements, il n’est pas exclu que la compétence remonte par délégation à l’échelon départemental, en raison de l’importance des investissements. Vous verrez que certains parlementaires le réclameront. À l’inverse, notamment en montagne, la différenciation infracommunautaire peut être intéressante. C’est d’ailleurs ce qui a largement inspiré notre dispositif. Ainsi, la régie d’eau d’une commune située dans un col peut parfaitement fonctionner en autonomie. Dans la même intercommunalité, trois ou quatre communes de la vallée peuvent avoir besoin du syndicat qui fonctionne bien, alors que les autres communes ont besoin de la solidarité intercommunale. Même si la compétence est exercée au niveau de l’EPCI, le dispositif de délégation permet de déléguer tout ce que l’EPCI souhaite déléguer, par le biais d’une convention.

L’EPCI n’abandonnera ni ne transfèrera sa compétence, aucune compensation ne sera attribuée et la commission locale d’évaluation des charges transférées (CLECT) ne sera pas concernée. De manière pragmatique, l’EPCI pourra décider de conventionner. La convention comportera les éléments que l’on souhaitera y trouver : prix de l’eau – ou pas –, montant des investissements à prévoir, qualité du service, etc. Le président de l’EPCI et le conseil communautaire restent aux commandes, mais ce nouveau dispositif juridique permettra de s’adapter à l’ensemble des situations sur le territoire.

Au Sénat, avec la ministre, nous avons levé le gage concernant les indemnités des syndicats. Ce n’est pas anecdotique car certains syndicats qui fonctionnaient avaient d’importantes responsabilités. Il fallait donc pouvoir rétablir ces indemnités. Nous y reviendrons à l’occasion de l’examen des amendements.

Je l’ai dit très clairement au Sénat : certains veulent en faire un totem politique, mais je suis persuadé que nous aurons rendez-vous avec nos concitoyens dans dix ou quinze ans concernant l’accès à l’eau. Nous devons donc trouver une solution qui concilie libertés locales et exigence écologique, pour répondre à l’interpellation de Mme Taurine. L’eau et l’assainissement sont intrinsèquement liés à notre politique publique de l’eau, qui est l’un des plus grands défis de la transition écologique.

Monsieur Houbron, rassurez-vous, les services de police pourront être mutualisés mais on continuera de distinguer autorité de police et autorité de recrutement. La police municipale agit pour le compte du maire, officier de police judiciaire. Si un EPCI embauche des policiers, de statut municipal, ceux-ci ne pourront agir que pour la police intercommunale. Si un EPCI « emprunte » des policiers municipaux, par le biais d’une convention de mise à disposition, l’autorité d’emploi demeurera l’autorité périmétrique du pouvoir de police concerné – celui du maire ou celui de l’intercommunalité. On dissocie donc l’autorité d’emploi de l’autorité de police.

Mme Jacquier Laforge a consacré son intervention à la parité, question sur laquelle Mme la présidente de la commission souhaite avancer. Depuis les mesures prises sous le gouvernement de Lionel Jospin, les majorités successives ont chacune ajouté de nouvelles dispositions. Je dois reconnaître que la loi NOTRe, sur ce point, a marqué un progrès avec le système des binômes dans les cantons. Jusqu’où peut se faire la parité ? C’est la question qui se pose avec les communes de moins de 1 000 habitants.

Je m’accorde un détour par les intercommunalités. Le Sénat a imaginé un scrutin de listes pour l’élection des vice-présidents. Pendant plus d’une heure et demie, j’ai combattu cette disposition ; j’ai réussi à convaincre les sénateurs présents, mais le président Philippe Bas ayant sollicité un scrutin public, la mesure a été adoptée grâce aux suffrages des sénateurs Les Républicains absents. C’est pour le moins curieux puisqu’elle n’est pas bonne pour la ruralité.

Je m’explique : vous savez que le président de l’intercommunalité, une fois élu, fait appel aux candidatures pour les postes de vice-président. Chaque conseiller communautaire peut être candidat et tout maire peut tenter sa chance, de la manière la plus démocratique qui soit, en levant la main. L’élection, vice-président par vice-président, peut prendre plusieurs heures, un maire peut l’emporter sur un autre, ou sur l’adjoint au maire de la commune principale. Comme disent les Normands, « Au plus fort, la pouque » ! C’est un grand principe de démocratie locale qui permet, mine de rien, que chaque commune ait la représentation la plus spontanée.

Le scrutin de liste modifie considérablement l’exercice, puisqu’il instaure un filtre. Pour être vice-président, le conseiller communautaire doit aller voir le président et lui demander à figurer sur sa liste ; à défaut, il peut présenter une liste alternative. Vous parlez d’un assouplissement, d’une façon de faire régner le calme et le consensus ! Cela conduit aussi, et de façon mécanique, à une surreprésentation des élus des communes les plus importantes. Alors que nous allons prendre mille mesures, comme le pacte de gouvernance, pour créer des équilibres, permettre aux maires des communes rurales de s’exprimer et, pourquoi pas, aux oppositions municipales d’accéder aux conseils communautaires, ce scrutin de liste serait très dangereux. En en modifiant la substance et le fonctionnement, il transformerait peu à peu les intercommunalités en collectivités territoriales. Je vous proposerai de supprimer cette disposition qui va à l’opposé de ce que nous nous efforçons de faire dans ce projet de loi.

Pour revenir à la parité dans les communes de moins de 1 000 habitants, la commission des Lois, puis l’Assemblée, puis les parlementaires réunis en CMP devront, dans leur sagesse, trancher un certain nombre de questions. Il ne fait aucun doute que nous voulons tous avancer, politiquement, vers la parité ; le Président de la République s’est exprimé à maintes reprises sur ce sujet qui fait consensus. Mais l’objectif de pluralisme est lui aussi constitutionnel et tout aussi contraignant, voire davantage. Or dans les communes les plus petites, le scrutin à la proportionnelle peut conduire à ce qu’il n’y ait qu’une liste. Lors de l’examen des articles, nous devrons nous interroger : à partir de quel seuil le pluralisme n’est-il plus assuré ? Mme la présidente de la commission répondra que l’on peut prendre un risque ; il faut alors le mesurer, et l’assumer. Si nous nous contentons de manier les concepts à Paris, les élus locaux se demanderont ce que nous avons bien voulu faire. Si nous choisissons d’avancer, faisons-le en connaissance de cause, sur le terrain du droit.

M. Philippe Gosselin. Sur le terrain tout court !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Mais le droit, c’est le terrain ! Le pluralisme, cela compte en politique ! Si le prix de la parité, c’est de n’avoir qu’une liste, je comprends qu’il y ait débat. Je me réjouis que les parlementaires des différents groupes veuillent avancer sur la parité. Mais nous devons bâtir quelque chose de robuste qui permette de lever les obstacles, sur le terrain, et dans la Constitution. Rien n’est insurmontable, dès lors que nous débattons calmement.

S’agissant de l’intercommunalité, monsieur le député Rémy Rebeyrotte, ce sont surtout les compétences qui posent problème. Nous croyons, non par dogmatisme mais pour des raisons écologiques et de responsabilité, que le transfert des compétences eau et assainissement doit être obligatoire. Le Sénat a supprimé cette disposition, nous vous proposons de la rétablir, moyennant l’introduction de la délégation. Elle permet, madame la députée Cécile Untermaier, de lever les irritants de la loi NOTRe.

La commission des Lois du Sénat a inventé une chose assez curieuse, que les sénateurs, dans leur sagesse, ont repoussée : la course au CIF inversé. Lorsqu’une intercommunalité abandonne des compétences, le CIF est figé et redistribué aux communes, en sus des compensations ; de ce fait, les intercommunalités qui continuent d’intégrer des compétences voient leur CIF augmenter, tandis que celles qui ne bougent pas – la majorité d’entre elles – voient leur CIF diminuer. Mieux encore, une intercommunalité peut faire redescendre toutes ses compétences au bloc communal, tout en conservant le bénéfice du CIF. Cela s’appelle donc la course au CIF inversé. Je remercie le Sénat d’avoir repoussé cette idée de sa commission des Lois et d’avoir voté l’amendement de suppression du Gouvernement !

Qu’entend-on par « intercommunalité à la carte » ? Il y a plusieurs clés d’entrée, notamment les questions liées au tourisme, à l’urbanisme. Des solutions ont été trouvées, mais nous pouvons apporter d’autres modifications durant la navette.

Nous souhaitons également corriger quelque chose d’important. Comme vous le savez, les intercommunalités doivent exercer trois compétences optionnelles. Dès lors que l’eau et l’assainissement deviennent des compétences obligatoires, il faudrait, à droit constant, que les intercommunalités reprennent des compétences. Nous vous proposerons de gommer cet effet de bord involontaire de la loi NOTRe, car je ne pense pas qu’il faille poursuivre l’intégration. La stabilité, cela ne signifie pas moins de compétences, mais pas davantage non plus.

J’apprécie la formule de Charles de Courson, « l’accord plutôt que la loi ». Faut-il prévoir dans la loi l’inscription d’un point sur l’intercommunalité à l’ordre du jour du conseil municipal ? Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. Rémy Rebeyrotte. Elle sera sage !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Votre intention est bonne, mais je vois, chemin faisant, le CGCT s’épaissir, alors que l’intention était d’en supprimer des pages !

Je reste sur ma ligne tocquevillienne initiale : liberté, liberté, liberté. Il faut faire confiance aux élus locaux : un maire a-t-il besoin d’une disposition légale pour parler de l’intercommunalité au conseil municipal ? Et s’il ne le fait pas, quelle sanction pénale convient-il de prévoir ? Attachons-nous à mesurer ce que nous faisons en droit positif. En tout état de cause, je ne m’opposerai pas à la décision que l’Assemblée prendra. Il vous revient d’en discuter et de bâtir un consensus.

En revanche, je trouve fort de café que M. le député Robin Réda attribue au Président de la République la responsabilité de la panne institutionnelle et politique de la métropole du Grand Paris. Pour suivre ce dossier depuis de nombreux mois, je peux vous dire que si Mme Valérie Pécresse, MM. Pierre Bedier, Patrick Devedjian, Patrick Ollier et Mme Anne Hidalgo étaient d’accord, ou à défaut, s’ils pouvaient s’asseoir autour d’une même table, les choses seraient déjà plus simples ! Il est facile, et expéditif, d’expliquer que c’est la faute d’Emmanuel Macron, élu depuis deux ans et demi.

Si les désaccords devaient persister au lendemain des élections municipales, faudra-t-il que le Gouvernement, et le Parlement, prennent leurs responsabilités ? Ce ne sera pas simple, et les amendements seront légion. Nous devons tous faire preuve d’humilité. Les problèmes que rencontre la métropole du Grand Paris sont liés à des questions institutionnelles mal fagotées, mais aussi – cela va mieux en le disant – à des problèmes de personnes.

Lorsque nous entamerons demain l’examen des articles, la présidente de la commission des Lois vous donnera les explications que vous demandez sur l’application de l’article 45 qui l’a conduite à déclarer irrecevables un certain nombre d’amendements, notamment sur l’honorariat, monsieur Morel-À-L’Huissier. 

Madame Nicole Dubré-Chirat, une bonne cinquantaine de lettres, sur le même modèle, m’ont été adressées sur les conseils de développement. Elles étaient bien mal inspirées car elles laissaient entendre que nous avions l’intention de supprimer ces instances. L’idée est plutôt de laisser aux conseils communautaires la liberté de les activer et de les organiser comme bon leur semble, en se détachant de la base légale. Là encore, faisons confiance aux élus locaux. Je suis persuadé qu’un EPCI qui ne créerait pas une instance de dialogue, quelle qu’elle soit, se retrouverait vite avec le monde économique et social sur le dos.

De fait, certains outils, instaurés par la loi, ont trouvé leur place. Je pense aux conseils de quartier pour les communes de plus de 100 000 habitants : si l’obligation légale devait être supprimée, je ne connais aucune grande ville qui déciderait de se passer de ces instances. Il faut créer des obligations pour instaurer les bonnes pratiques, mais passer ensuite au toilettage.

Je m’en remettrai, là encore, à la sagesse de l’Assemblée nationale. Cela illustre bien la difficulté de la tâche : soit on décide de faire confiance aux conseillers communautaires de tel ou tel EPCI, soit on les soupçonne de malmener le monde économique et social et d’être capables de ne pas créer une telle instance. Dans ce cas, il faut le dire, et ne pas se retrancher derrière les beaux discours. Il est toujours difficile de donner des preuves de confiance !

Le médiateur territorial est une bonne idée, je l’ai dit à la sénatrice de Gironde, Nathalie Delattre, auteure d’une proposition de loi et d’un certain nombre d’amendements à ce projet de loi. Je ne veux pas décourager cette initiative, mais vous avez raison, il y a encore trop d’obligations. Bordeaux est une grande ville qui peut s’offrir ce que d’autres communes n’ont pas. Mettons-nous à la place d’une collectivité de taille moyenne : combien de temps d’un ETP peut-elle libérer pour cette fonction ? Si l’on veut que les collectivités instituent tranquillement l’usage des médiateurs territoriaux, il ne faut pas que cela soit le fruit d’une trop grande contrainte. Donnons une base légale à ce dispositif afin qu’il puisse ensuite voler de ses propres ailes. Je vous invite à trouver, d’ici la séance, une rédaction intéressante.

Monsieur Gosselin, dans la mesure où le congrès des maires se tient chaque année, il était difficile de présenter ce texte à une date qui soit éloignée de cette échéance…

M. Philippe Gosselin. Cela ne tombe pas très loin – le hasard, sans doute…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Ce texte tombe surtout au lendemain du grand débat national, et répond à un engagement du Président de la République. Si nous ne l’avions pas fait, vous auriez accusé Emmanuel Macron de s’être servi des maires pour faire le grand débat et de ne pas tenir ses promesses. Entre nous, je ne vois pas en quoi ce texte constitue un avantage pour certains candidats aux élections municipales. Et si les sénateurs s’emparent de ce texte pour sillonner les campagnes, ils ont bien raison. Il faut se réjouir qu’ils soient parfois porteurs de bonnes nouvelles. Sinon, ne nous étonnons pas que la mésentente persiste entre les élus locaux et l’État.

Vous avez raison de rappeler les écrits de Tocqueville. Encore faut-il que sa pensée se traduise en actes – nous le verrons en examinant les amendements.

Certes, nous sommes encore loin du statut de l’élu. Mais l’essentiel des propositions qui ont pu être commises à ce sujet ont été reprises dans ce texte. Disons-le clairement : aller plus loin supposerait que l’on change complètement de modèle et que l’on se rapproche d’un modèle à l’allemande, où les maires sont des agents de l’État. La belle loi républicaine de 1884 dispose que les fonctions locales sont gratuites, ce qui signifie que l’élu n’est pas un salarié de sa commune – il est, dans la République, autre chose. Parler chômage, retraite ou salariat, implique une modification radicale de notre vision. Avec Jacqueline Gourault, nous pensons être allés au maximum, ou presque, de ce que nous pouvions faire dans le cadre du modèle actuel, celui de la libre administration des collectivités territoriales et de leur autonomie financière.

Monsieur de Courson, on peut toujours dire, pour des raisons de rhétorique, que cela ne va pas assez loin, mais concrètement, avancer suppose de changer de logique et de philosophie. Je suis ouvert à tout, mais je ne suis pas certain qu’il existe un consensus sur ce point ; en tout cas, personne, parmi les associations d’élus que j’ai entendues, ne le réclame !

Je dois reconnaître que certaines de vos propositions sont courageuses. Vous prônez l’égalité devant la charge, soulignant qu’un salarié du secteur privé qui souhaite s’engager dans un mandat local sera toujours placé dans une situation d’inégalité de fait face à un agent de la fonction publique.

Une réponse consisterait à protéger le salarié du secteur privé ; j’ai été défavorable aux amendements allant dans ce sens au Sénat. Pour en avoir parlé avec les syndicats, je pense que faire de l’élu local un salarié protégé serait prendre un très mauvais virage. En effet, un salarié est protégé parce qu’il participe au dialogue social, donc au bien-être de l’entreprise, à son objet social. Si vous protégez les salariés parce qu’ils sont élus locaux, alors les élus locaux deviendront inemployables – sans compter le fait qu’ils travaillent souvent dans les petites entreprises locales.

Pour votre part, vous suggérez, et cela ne manque pas d’audace, que le fonctionnaire élu perde ses avantages de fonctionnaire. Cela pique un peu les yeux, mais je livre cette proposition à votre réflexion.

M. Charles de Courson. Cela fait juste vingt-cinq ans que j’essaie…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Mine de rien, les choses avancent, notamment sur le fonds de conversion pour la fin de mandat. Le Sénat, nous y reviendrons, a adopté une disposition sur l’utilisation des enveloppes d’indemnités. Dans l’ordonnance sur la formation, je ferai en sorte que l’argent qui sera levé dans le cadre du droit individuel à la formation, cher à Jacqueline Gourault, la formation prise en charge par les collectivités territoriales, les crédits consacrés aux agents de la fonction publique et aux salariés du secteur privé convergent vers le compte personnel de formation. L’élu local pourra s’en servir comme il le souhaite pour se former à la vie locale, par exemple, ou se reconvertir. C’est un premier pas, il est inédit car il n’existe rien, ou pas grand-chose, en la matière.

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. J’ai entendu qu’il avait fallu la crise des gilets jaunes pour que nous prenions conscience de l’importance du rôle des maires. Je ne peux pas ne pas réagir à ces propos. J’ai été maire durant vingt-cinq ans, et j’ai toujours considéré ce rôle comme essentiel. C’est le mandat de maire que j’ai choisi à chaque fois que je me suis retrouvée en situation de cumul, car c’est là que la démocratie s’exprime de la façon la plus vive qui soit. On peut être un maire bâtisseur, avoir une vision pour sa commune et entretenir des liens très étroits avec ses concitoyens. Il est à la fois très riche et très gratifiant d’exercer cette fonction.

Bien sûr, la crise des gilets jaunes a pu amplifier la vision qui manquait à certains. Dans le cadre du grand débat national a surgi l’idée d’un projet de loi ; elle a rejoint celle, formulée par Sébastien Lecornu au début de la législature, de revenir sur les irritants de la loi NOTRe. Je voulais apporter ces précisions car on refait parfois l’histoire à sa façon.

Pour moi, Monsieur Acquaviva, s’il doit y avoir un quatrième D, c’est celui de « détermination ».

S’agissant des compétences, je vous demande de ne rien détricoter. Cela serait néfaste à l’équilibre, aujourd’hui fragile, des intercommunalités. Je l’entends sur le terrain, dans les associations d’élus : il existe des personnes tout aussi passionnées par la fonction de maire que par celle de conseiller communautaire. Et, comme le disait le Premier ministre au congrès de l’assemblée des communautés de France, ce sont les mêmes qui siègent dans les mairies et dans les intercommunalités ! Il importe de conserver cet équilibre : je vous demande donc de revenir au texte initial du Gouvernement.

Le scrutin de liste pour les exécutifs dans les intercommunalités n’est pas un truc pour 2026, le dispositif sera applicable au prochain renouvellement, soit en 2020 ! Je me permets d’ajouter cette précision aux arguments avancés par Sébastien Lecornu, car je suis certaine que nous ne pourrons pas appliquer ce mécanisme tant qu’il n’y aura pas un mode de scrutin paritaire dans l’ensemble des communes. Cela mettrait en difficulté beaucoup de communes rurales.

Ce n’est pas moi qui dirai le contraire : il n’est pas idéal que la parité ne soit pas assurée dans toutes les élections. Mais il nous faut veiller aussi au respect de l’objectif de pluralisme, notamment dans les communes les plus petites. Nous devons avoir ce débat sans entrer dans un affrontement pour ou contre : nous voulons tous la parité, mais nous devons nous entourer d’avis de juristes pour trouver un mécanisme applicable, dans lequel nous puissions tous trouver notre compte.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous en avons fini avec la discussion générale. Nous aborderons demain matin l’examen des articles.


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   COMPTES RENDUS DES DÉBATS
SUR LES ARTICLES DU PROJET DE LOI

Lors de ses réunions des mercredis 6 et jeudi 7 novembre 2019, la Commission examine les articles du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique (n° 2357).

1.   Première réunion du mercredi 6 novembre 2019 à 9 heures 30 (article premier à article 5)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.8376523_5dc283518f672.commission-des-lois--engagement-dans-la-vie-locale-et-a-la-proximite-de-l-action-publique-6-novembre-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Après avoir procédé, hier, à une discussion générale sur le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, en présence de Mme Jacqueline Gourault et de M. Sébastien Lecornu, nous en venons à l’examen des articles.

Je rappelle que ce texte, qui comptait initialement une trentaine d’articles, en comprend désormais plus de 120 après son examen au Sénat. C’est à l’aune des cinq thématiques auxquelles se rapporte le projet de loi initial – répartition des compétences entre les différents échelons de collectivités sous l’angle unique de la gouvernance ; certains pouvoirs de police administrative du maire ; conditions d’exercice des mandats locaux, sous l’angle des mesures à prendre pour favoriser l’engagement ; modalités de collaboration entre les collectivités territoriales et entre les collectivités territoriales et l’État ; vote par procuration et vote des personnes détenues – que j’ai apprécié le lien direct ou indirect des amendements avec le texte.

Tous ceux qui l’ont souhaité ont obtenu des explications sur les décisions que j’ai prises en matière de recevabilité et il m’est d’ailleurs arrivé de revenir sur certaines d’entre elles. Il me semble que sur cette question, le débat est donc clos, je demande aux députés de ne pas y revenir lorsque nous examinerons les dispositions auxquelles se rapportaient les amendements jugés irrecevables.

M. Raphaël Schellenberger. Pour que nous n’abordions pas ce sujet tout au long de l’examen du texte, il faut que nous en parlions sérieusement maintenant. Cette question ne manquera pas de se reposer dans les années à venir. Mais je veux d’abord souligner la diligence avec laquelle vous avez étudié nos réclamations, n’hésitant pas à reprendre certains des amendements qui avaient été écartés.

Pour autant, la règle qui veut que l’on étudie la recevabilité des amendements au regard du texte initial et non du texte voté par le Sénat – et alors même que la jurisprudence appliquée en matière de recevabilité n’est pas la même au Sénat – est incohérente. Elle nous empêche de discuter et d’amender certaines mesures adoptées par le Sénat et compromet l’équilibre entre les deux chambres souhaité par le constituant.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. C’est effectivement la règle à laquelle nous devrions en principe nous astreindre. Toutefois, compte tenu du fait que le texte s’est déjà considérablement épaissi en première lecture, j’ai fait le choix, précisément pour ne pas créer d’inégalités entre les deux assemblées, de juger recevables les amendements qui modifient les dispositions ajoutées par le Sénat.

M. François Pupponi. Sur le principe, vous avez raison, mais sur le fond, ce n’est pas ce qui s’est passé. À l’article 1er, le Sénat a ajouté un 6° concernant le pacte financier et fiscal. Trois de mes quatre amendements s’y rapportant ont été jugés irrecevables. Je ne comprends pas la logique de ces décisions.

M. Xavier Breton. La jurisprudence devra s’élaborer progressivement, mais si l’on ajoute l’article 45 à l’article 40, qui posait déjà problème, cela va créer de nouveaux contentieux. Nous souhaitons que soient instaurées de bonnes pratiques, nourries de nos échanges.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. L’article 45 n’est pas nouveau, et il est appliqué de façon rigoureuse depuis le début de la législature.

Mme Emmanuelle Ménard. J’ai la même impression que certains de mes collègues. Il ne me semble pas qu’il soit disproportionné, sur un texte tel que celui-ci, de déposer des amendements visant à étendre les pouvoirs de police du maire. Or certains de nos amendements ont été déclarés irrecevables. J’aimerais pouvoir évoquer leur contenu lors de la discussion sur l’article.

Mme Bénédicte Taurine. Nous sommes passés à côté de l’occasion d’impliquer davantage les citoyens dans la vie locale. C’est dommage !

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Je regrette que l’on puisse a priori refuser des amendements sur l’honorariat au motif qu’il s’agit de cavaliers législatifs.

M. Dino Cinieri. Je voudrais connaître les critères qui vous ont conduite à déclarer irrecevables trois de mes quatre amendements.

Mme Laetitia Avia. Le groupe La République en Marche est également concerné par ces décisions puisque la moitié des amendements déposés par Pacôme Rupin, par exemple, ont été déclarés irrecevables sans que nous ne comprenions forcément pourquoi.

M. André Chassaigne. Lors de l’élaboration du règlement de l’Assemblée, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine avait proposé que l’examen de la recevabilité soit collégial. Cela aurait permis d’éviter ce type de difficultés.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Ceux qui sont membres de cette commission savent que j’applique l’article 45 depuis le début de la législature, n’hésitant pas à déclarer irrecevables des amendements du Gouvernement sans lien direct ou indirect avec le texte. Le président de l’Assemblée nationale, lors de la Conférence des Présidents hier, a appelé les présidents de groupe et les présidents des commissions à être très vigilants sur le respect de la Constitution et du règlement. Je m’y tiens.

Je suis restée néanmoins à l’écoute des contestations sur le bien-fondé de mes décisions. J’ai examiné longuement et scrupuleusement chacun des 200 amendements qui m’ont été soumis sur le millier qui avait été déposé. Lorsque la décision était tangente, j’ai toujours conclu à la recevabilité de l’amendement.

Nous en venons donc à l’examen des articles. Je remercie le ministre chargé des collectivités territoriales d’être présent.

TITRE Ier 
LIBERTÉS LOCALES : CONFORTER CHAQUE MAIRE DANS SON INTERCOMMUNALITÉ

Chapitre Ier
Le pacte de gouvernance : permettre aux élus locaux de s’accorder sur le fonctionnement quotidien de leur EPCI

Avant l’article 1er

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL1001 du rapporteur portant sur l’intitulé du chapitre IER qui est ainsi rédigé.

Article 1er
(art. L. 5211-11-1 et L. 5211-11-2 [nouveaux], art. L. 5219-2 et L. 5832-2 du code général des collectivités territoriales)
Pacte de gouvernance  Conférence des maires

La Commission est saisie de l’amendement CL1073 de M. Sacha Houlié, qui fait l’objet d’un sous-amendement CL1225 du rapporteur.

M. Sacha Houlié. Sans flagornerie ni esprit polémiste, cet amendement vise à rétablir le texte dans sa version tocquevillienne. Le pacte de gouvernance, qui peut être conclu dans un délai de neuf mois après l’élection municipale et la constitution de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), doit être facultatif. Je n’anticipe pas sur la suite, mais je précise qu’il y aura un « en même temps », puisque nous proposons, pour assurer aux maires une véritable place dans l’intercommunalité, de rendre obligatoire la conférence des maires.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je propose de compléter la première phrase de l’alinéa 5 par les mots : « ainsi que sur les conditions et modalités de consultation du conseil de développement et d’association de la population à la conception ou à l’élaboration des politiques de l’établissement ». Il s’agit de prendre en compte l’aspiration de nos concitoyens, que vous êtes nombreux à avoir relayée, à voir les conseils de développement, et plus largement la population, associés à la définition des politiques publiques.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je précise que cet amendement réécrivant les alinéas 1 à 17, son adoption ferait tomber les amendements CL855 à CL207 inclus.

M. Arnaud Viala. Tout en déplorant le fait que l’adoption de cet amendement nous privera de l’occasion d’échanger sur les amendements suivants, je veux indiquer que nous sommes favorables au retour à la rédaction initiale. Le pacte de gouvernance doit rester facultatif et à la main des élus qui composent l’EPCI. Dans nombre de cas, son caractère obligatoire rendrait le pacte strictement administratif et lui ôterait son principal intérêt, celui de permettre de réfléchir à un projet de territoire.

M. François Pupponi. Les intercommunalités qui comprennent des communes éligibles à la politique de la ville ont l’obligation d’adopter un pacte financier. Avec ce texte, la réalisation d’un pacte financier devient facultative. Or l’intérêt de cette disposition, issue de la loi de 2014, est qu’elle oblige les intercommunalités à être solidaires avec les communes les plus pauvres. Le texte initial supprime cette obligation, puisque l’article 1609 nonies C du code général des impôts, le CGI, ne s’appliquerait plus.

Mme Cécile Untermaier. Le groupe Socialistes et apparentés souhaite que l’élaboration du pacte de gouvernance demeure obligatoire. Il ne s’agit pas de dire si on est pour l’accord ou pour la loi : nous sommes législateurs, et nous devons offrir une vision partagée de la façon dont doit fonctionner une intercommunalité.

Pour avoir organisé un atelier législatif citoyen, je peux vous dire que le pacte de gouvernance est très bien accepté et que son manque est ressenti dans le dispositif précédent. Dans les grandes intercommunalités de plus de 20 000 habitants, il est inconcevable qu’il n’y ait pas de réflexion sur la façon dont s’organisent le pouvoir et la mutualisation.

Il ne faut pas avoir peur et se cacher derrière son petit doigt. On n’écrit pas à la place des maires, on leur indique qu’il y a une page à remplir. Nos concitoyens attendent une clarification sur la façon dont on travaille dans les intercommunalités. Je pense que les élus locaux ne seraient pas du tout opposés à un pacte de gouvernance obligatoire ; au contraire, cela les aiderait à convaincre les conseillers communautaires de sa nécessité, ce qui n’est pas toujours chose facile.

M. André Chassaigne. Cet amendement montre une méconnaissance de la réalité de terrain. En effet, certaines de nos intercommunalités, notamment en milieu rural, sont dominées par des potentats locaux. Je pèse mes mots, ils figureront au compte rendu. Beaucoup de maires considèrent qu’ils n’ont plus droit à l’expression, qu’ils sont écrabouillés, que leur parole n’est jamais prise en compte. Si l’élaboration d’un pacte de gouvernance n’est pas obligatoire, ceux qui dominent les intercommunalités feront en sorte qu’il n’y ait pas de pacte. Revenir au texte initial serait une erreur grave. Cela reviendrait à créer une fracture entre les élus des petites communes et les élus des plus grosses collectivités, qui écrasent les premiers de leur poids.

M. Vincent Bru. Le groupe Mouvement Démocrate et apparentés pense que l’élaboration du pacte de gouvernance doit être obligatoire. On doit se mettre d’accord en début de mandat sur la place des communes dans le fonctionnement de l’EPCI. Il est important aussi de prévoir la réalisation d’un pacte financier et fiscal.

M. Erwan Balanant. Les intercommunalités qui fonctionnent sont celles qui font suite à un projet de territoire, sur lequel les élus ont travaillé, élaborant, de facto, un pacte de gouvernance. L’intercommunalité, parfois critiquée, est un outil très important pour nos territoires, qui permet de structurer les politiques. Mais cela ne marchera que si nous emportons avec nous les citoyens, si nous construisons des projets politiques – et non partisans – de territoire, que les maires, les élus, peuvent partager.

J’ai déposé un amendement, qui tombera si celui-ci est adopté, visant à raccourcir le délai dans lequel le pacte de gouvernance doit être adopté. L’idée est que les élus ont déjà travaillé en amont de l’élection à l’élaboration du projet politique, exprimant ainsi leur envie de profiter de cet outil extraordinairement bénéfique aux territoires ruraux et aux territoires périurbains qu’est l’intercommunalité.

Revenir au texte initial serait une erreur, surtout si cela revient à supprimer le pacte financier, évoqué par François Pupponi, qui permet des projets solidaires, des projets d’équilibre dans les territoires.

M. Raphaël Schellenberger. Pourquoi y aurait-il forcément des problèmes de gouvernance dans les intercommunalités de plus de 20 000 habitants ? Certaines peuvent être plus importantes encore, rassembler peu de communes, et ne rencontrer aucun souci, à l’image de celle où je siège, qui compte pas loin de 40 000 habitants et seulement 17 communes – tous les maires sont au bureau. Le pacte de gouvernance peut s’avérer très utile, parce qu’il suscite une discussion sur la façon dont on va travailler ensemble, mais il peut devenir ailleurs un « machin », superflu et source de crispations inutiles.

Monsieur Chassaigne, lorsque je vous entends dire que des personnes dominent les intercommunalités, je constate que vous espérez toujours le grand soir, attaché à un schéma de société où les uns et les autres sont poussés à l’affrontement. Eh bien non, il existe des intercommunalités où cela se passe bien. Nous ne réglerons pas par la loi les problèmes de personnes. Il faut laisser un maximum de liberté aux élus locaux : ils doivent choisir la façon dont ils veulent travailler ensemble. Cela peut passer par l’adoption d’un pacte de gouvernance qui comprenne l’élaboration d’un pacte financier et fiscal, ou par l’adoption d’un pacte financier, sans pacte de gouvernance. Pourquoi tout réglementer ?

M. Stéphane Baudu. L’élaboration du pacte de gouvernance doit être obligatoire, car elle est structurante, permettant à tous, en début de mandature, de définir les règles du jeu. Cela sera utile aux maires des plus petites communes, aux nouveaux élus dont certains découvriront le fait communautaire. Ils participeront ainsi à ce temps d’échange sur les objectifs, mais aussi sur les moyens, financiers, techniques, humains de les réaliser. Ce serait une erreur de rendre facultatif ce rendez-vous qui définit l’appartenance à l’intercommunalité et son appropriation par l’ensemble des élus.

M. Sacha Houlié. Monsieur Chassaigne, personne ne peut se prévaloir de mieux connaître qu’un autre les collectivités. Trois éléments justifient de rendre le pacte de gouvernance facultatif et la conférence des maires obligatoire. D’abord, l’administration des collectivités territoriales est libre et le rôle de l’État n’est pas de dire si un pacte de gouvernance doit être ou non adopté. Notons, d’ailleurs, que ce caractère obligatoire ne mettrait pas fin à la présence de potentats locaux – elle tient au suffrage des citoyens, c’est là la principale difficulté.

Lorsqu’il n’y a pas de projet de territoire, obliger les élus à adopter un pacte de gouvernance ne réglera pas la question : le pacte sera alors minimal, sinon inutile et factice.

Enfin, la question centrale de ce texte est la place des maires dans les intercommunalités, la façon dont ils sont entendus, la faculté qu’ils ont de s’exprimer. En rendant obligatoire la conférence des maires, c’est-à-dire leur participation aux travaux de l’intercommunalité, quels qu’ils soient, nous apportons une réponse à la crise de confiance des maires, dans le cadre des EPCI.

Mme Anne Blanc. Rendre la conférence des maires obligatoire est une fausse bonne idée : cet organe permettra, bien sûr, la discussion et la négociation entre les élus, mais n’aura aucun pouvoir de décision. Au contraire, le pacte de gouvernance sera le contrat de la mandature, qui liera l’ensemble des élus sur leurs projets, leur manière de fonctionner, la présence d’un conseil de développement, ou d’un schéma de mutualisation. C’est l’essence même de l’esprit de l’intercommunalité qui infuserait ce pacte de gouvernance, et c’est la raison pour laquelle nous souhaitons qu’il soit obligatoire.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je constate d’abord qu’aucun d’entre vous n’a souhaité commenter mon sous-amendement sur les conseils de développement. J’y vois une approbation par anticipation, ce dont je vous remercie.

Monsieur Pupponi, le pacte financier et fiscal n’est obligatoire que lorsque les communes sont soumises à un contrat de ville. L’article 1609 nonies C du CGI n’est en rien modifié par les dispositions de l’article 1er et demeure applicable. Je tenais à vous rassurer sur ce point.

Certains d’entre vous ont mentionné le fait majoritaire dans les intercommunalités ; c’est le même qui conduirait à l’adoption d’un pacte proche de ce que souhaite la majorité, dans le cas où le pacte serait obligatoire. Si la mise en place de l’EPCI se fait rapidement, l’intercommunalité se trouvera enfermée dans un carcan de fonctionnement, et tout le monde s’en mordra les doigts a posteriori. Il faut laisser aux élus une liberté totale, pour qu’ils appréhendent le territoire, les prérogatives, les compétences, les éventuels projets et qu’ils s’entendent en fin de compte sur un projet porté par le plus grand nombre.

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Cette question a mobilisé le Sénat trois heures durant. L’intention du Gouvernement était de ne pas imposer d’obligation. On ne peut pas répéter à l’envi « liberté locale », ne cesser de dire que l’on fait confiance aux élus locaux, et organiser progressivement un système obligatoire. Cela ne coule pas de source et d’ailleurs, les lignes politiques traditionnelles ont bougé au Sénat, les parlementaires prenant position par rapport aux situations locales ou à l’AMRF, l’Association des maires ruraux de France, qui demande que la conférence des maires soit obligatoire.

Monsieur Chassaigne, figurez-vous que je connais moi aussi des potentats locaux – cela figurera également au compte rendu. Il se trouve que c’est le charme de la décentralisation. Il nous faut être cohérent : soit on donne du pouvoir local et on prend le risque que les choses se passent comme elles doivent se passer ; soit on recentralise et on redevient jacobin et alors, on sera certain que localement, plus personne ne pourra abuser du pouvoir. Une fois de plus, on ne peut pas dire que l’on croit aux libertés locales et chercher à les organiser depuis Paris de façon rigide.

Cet amendement, sous-amendé par le rapporteur, dessine une convergence pour la commission mixte paritaire . La conférence des maires était facultative, le Sénat, pressé par un certain nombre d’associations, a souhaité qu’elle soit rendue obligatoire. Je reste persuadé que si le débat sur le pacte de gouvernance doit être obligatoire, l’adopter doit rester une liberté. Sans quoi nous savons bien comment cela se passera : on prendra une délibération, que l’on appellera « pacte de gouvernance ». Or il faut un peu d’affectio societatis et de volonté politique pour que cette chose-là fonctionne. Mais toutes les mesures de la terre ne compenseront jamais les problèmes d’organisation locale.

S’agissant des délais, je suis favorable à leur harmonisation, en séance. Le délai est de six mois pour voter un règlement intérieur dans une collectivité territoriale, quelle qu’elle soit. Certains amendements visent à le porter à neuf mois. Je n’ai pas de religion sur la question, mais je souhaite que le délai soit le même pour le règlement intérieur et pour le pacte de gouvernance – cela simplifiera la tâche des directeurs généraux des services des petites communautés de communes rurales.

Le pacte de gouvernance, faut-il le rappeler, n’est ni le règlement intérieur ni le code général des collectivités territoriales, le CGCT. La loi encadre déjà les relations entre la commune et l’intercommunalité – nous allons d’ailleurs passer notre journée à examiner des amendements qui viseront à les préciser encore davantage. Nous cherchons à donner une base légale à un pacte, lequel ne pourra jamais déroger à la loi ou au règlement – cela va mieux en le disant –, mais permettra de préciser la relation entre les communes et surtout entre les communes et l’intercommunalité.

Monsieur Pupponi, l’article 1609 nonies C ne figure pas dans le code général des collectivités territoriales (CGCT), mais dans le CGI. Levons dès ce matin cette confusion qui pourrait naître de notre débat : il y a d’un côté le pacte de gouvernance, qui peut prévoir un pacte financier et fiscal, et de l’autre un pacte financier obligatoire pour les métropoles, les communautés urbaines et les EPCI signataires d’un contrat de ville.

M. François Pupponi. Mais l’article 1609 nonies C ne s’applique pas.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Mes services m’assurent du contraire. Mais si vous pensez qu’un doute peut naître de la confusion entre les deux pactes, nous pouvons tout simplement en séance modifier l’appellation du pacte contenu dans le pacte de gouvernance. En tout état de cause, le Gouvernement ne souhaite pas supprimer l’obligation du pacte financier pour les contrats de ville.

M. François Pupponi. Le contrat de ville pour 2014-2020, visé par l’article 1609 nonies C du CGI, a été prolongé, mais pas l’obligation du pacte financier. L’un de mes amendements visait à en tenir compte, mais il a été déclaré irrecevable. Un autre tendait à préciser que l’article 1er du présent projet de loi ne concernait pas l’article 1609 nonies C, mais il va tomber. Il est devenu impossible d’écrire la loi !

M. Paul Molac. Une question à notre rapporteur à propos de son sous-amendement concernant les conseils de développement. Lors des réunions auxquelles nous avons participé, tous les conseillers ont insisté sur le maintien du caractère obligatoire craignant, dans le cas contraire, que certains présidents d’EPCI passent par pertes et profits l’existence même de ces conseils : votre sous-amendement, monsieur le rapporteur, rétablit-il l’obligation de disposer d’un tel conseil ?

M. Erwan Balanant. M. Molac m’a volé ma question, non sans virtuosité. (Sourires.)

M. Bruno Questel, rapporteur. La réponse est non. En revanche, un débat est obligatoire de même qu’un vote après la discussion initiale sur la création de l’intercommunalité.

J’ajoute que, sur le plan national, près de 50 % des conseils de développement qui auraient dû être installés ne l’ont pas été. Rendre obligatoire un dispositif qui, sur le terrain, n’est pas appliqué, ne relève pas de notre façon de voir ni de faire.

Mme Cécile Untermaier. Je souscris aux propos du ministre sur l’harmonisation de la durée. Nous proposons quant à nous qu’elle soit de six mois – les élus locaux peuvent le faire et l’urgence est bien réelle.

Je remercie en outre le rapporteur pour son sous-amendement incluant les conditions de l’association des citoyens. C’est là un message important alors que des demandes de proximité et d’écoute se sont fortement fait entendre dans notre pays. Il est donc important que les modalités de prise en compte de la parole citoyenne figurent dans ce texte.

Néanmoins, je regrette que ce dispositif puisse ne jamais voir le jour dès lors que le pacte de gouvernance est facultatif.

M. Thierry Benoit. Le sous-amendement de M. Questel est de bonne politique : il faut laisser la possibilité, pour les élus, d’organiser la démocratie dite participative à chaque échelon, communal ou intercommunal. C’est à eux de formuler des propositions organisationnelles afin d’impliquer la société dite civile.

La possibilité d’intégrer ou non les conseils de développement, sous une forme ou sous une autre, constitue une bonne proposition, simple, pragmatique, souple, respectueuse de la liberté des élus locaux.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je m’engage, monsieur le député Pupponi, à ce que la question que vous soulevez soit traitée en séance publique. J’ajoute que ce n’est pas la disposition du projet de loi qui est invalidante mais son caractère incomplet.

Avis favorable au sous-amendement du rapporteur. Nous questionnons la responsabilité des élus locaux tout en leur faisant confiance. Telles sont la voie et la philosophie de ce texte.

Une fois de plus : vous pouvez rendre tout obligatoire mais ce n’est pas pour cela que la démocratie locale en sera vivifiée. Imaginez que le règlement intérieur de l’Assemblée nationale dispose que vous êtes obligés de produire des comptes rendus de mandat ! Dans la famille de la démocratie représentative, ne soumettons pas les élus locaux à des obligations dont s’exonèrent les élus nationaux.

Avis également favorable à l’amendement de récapitulation et de synthèse CL1073 de M. Houlié.

La Commission adopte le sous-amendement CL1225.

Puis, elle adopte l’amendement CL1073 ainsi sous-amendé.

En conséquence, les amendements CL855 et CL856 de M. Jean-François Cesarini, CL721 de M. Vincent Bru, CL1122 de M. Stéphane Baudu, CL719 de M. Vincent Rolland, CL914 de M. Arnaud Viala, CL942 de M. Jean-Philippe Ardouin, CL144 de M. Didier Le Gac, CL459 de Mme Cécile Untermaier, CL590 de M. Robin Reda, CL1123 de Mme Anne Blanc, CL145 de M. Didier Le Gac,CL476 de Mme Cécile Untermaier, CL943 de M. Jean-Philippe Ardoui, CL307 de M. Erwan Balanant, CL729 de Mme Sabine Thillaye, CL873 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier, CL659 de M. Vincent Bru, CL1098 de M. Stéphane Baudu, CL1004 de Mme Sophie Mette, CL660 de M. Vincent Bru, CL1099 de Mme Anne Blanc, CL857 et CL858 de M. Jean-François Cesarini, CL591 de M. Robin Reda, CL661 de M. Vincent Bru, CL1100 de M. Stéphane Baudu, CL1092 de Mme Pascale Fontenel-Personne, CL874 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier, CL592 de M. Robin Reda, CL409 de M. Stéphane Buchou, CL184 de M. François Pupponi, CL189 de Mme Marie-France Lorho, CL311 de Mme Marie-Pierre Rixain, CL319 de M. André Chassaigne, CL520 de Mme Valérie Bazin-Malgras, CL547 de Mme Emmanuelle Anthoine, CL565 de M. Xavier Breton, CL723 de M. Vincent Rolland, CL762 de Mme Agnès Thill, CL475 de Mme Cécile Untermaier, CL662 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, CL741 de M. Rémy Rebeyrotte, CL859 de M. Jean-François Cesarini, CL 959 de M. Stéphane Baudu, CL1101 de Mme Anne Blanc, CL518 de M. Charles de Courson, CL1102 de M. Stéphane Baudu, CL860 de M. Jean-François Cesarini, CL1103 de Mme Anne Blanc, CL1104 de M. Stéphane Baudu, CL663 de M. Vincent Bru et CL207 de M. Alain Perea tombent. 

La Commission examine ensuite l’amendement CL1151 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. Il vise à rendre obligatoire la conférence des maires.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Comme avec le précédent amendement, l’éventuelle adoption de celui-ci fera tomber un grand nombre des suivants.

M. Raphaël Schellenberger. En travaillant de la sorte et avec un tel rythme, nous aurons terminé l’examen du texte ce soir… Si l’adoption d’un amendement en fait tomber trente…

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Initialement, il n’y avait qu’un amendement, qui réécrivait intégralement l’article et dont l’adoption aurait fait tomber non pas quarante amendements mais plus du double. Comme je veille à ce que les débats aient lieu, j’ai tenu à ce qu’il y ait deux amendements.

M. Raphaël Schellenberger. Sur le fond, nous mettons le doigt sur une incohérence de la majorité qui, d’ailleurs, se répètera.

Il est toujours possible de citer Tocqueville et d’évoquer les libertés locales mais il n'en reste pas moins qu’il faut plier sous un joug : bâtir un compromis ou un consensus politique au sein du groupe majoritaire.

Vous êtes d’accord pour conférer des libertés locales en matière de gouvernance mais la conférence des maires, elle, doit être obligatoire, fonctionner d’une seule manière, à partir d’un format unique et rigide.

Je pense quant à moi que, en l’occurrence et comme avec le pacte de gouvernance, un régime de liberté s’impose, par exemple à travers un assouplissement des conditions de constitution d’une majorité. Pourquoi ne pas imaginer qu’une minorité puisse demander l’institution d’une conférence des maires ? En aucun cas celle-ci ne doit être obligatoire alors qu’elle serait inutile dans un certain nombre de territoires.

Je regrette également que mon amendement CL220 ne soit pas discuté : plutôt que de faire de la conférence des maires un outil rigide, j’aurais souhaité que les EPCI puissent vraiment se l’approprier en permettant à ceux qui en feraient le choix de confier à celle-ci de véritables compétences, notamment si l’EPCI devait être constitué à partir du transfert de certaines compétences sensibles. Les élus décideraient ainsi de s’organiser d’une façon particulière en lui confiant qui un pouvoir de blocage, qui un pouvoir d’initiative, qui un pouvoir de pilotage. Malheureusement, cet amendement tombera. La conférence des maires sera certes obligatoire mais elle sera aussi et surtout une coquille vide.

M. Arnaud Viala. Parmi nos amendements qui s’apprêtent à tomber, certains visaient au contraire à maintenir le caractère facultatif de la conférence des maires.

La question se pose en raison, d’une part, de l’agrandissement des périmètres intercommunautaires depuis le vote d’un certain nombre de lois, sur lequel nous ne reviendrons pas – il est ainsi devenu quasiment impossible d’avoir un bureau composé de tous les maires, comme telle était à peu près partout la règle – et, d’autre part, de la rigidification des règles locales d’accords alors qu’elles permettaient une représentation assez souple des communes avec des représentants de chaque partie du territoire.

N’ajoutons donc pas des rigidités supplémentaires alors qu’il s’agit de restituer aux élus locaux leur liberté d’organisation et de gouvernance !

L’intercommunalité française arrive à un stade de maturité permettant que chaque EPCI détermine librement la manière dont il incarne les identités, les singularités, les particularités communales au sein de ces instances et à travers son travail.

Nous sommes absolument opposés au caractère obligatoire de la conférence des maires.

M. Erwan Balanant. Comme mes collègues, madame la présidente, je pense que nous devons prendre le temps de débattre. Deux amendements qui en font tomber quatre-vingts, c’est quelque peu gênant alors que les enjeux sont importants, le ministre Lecornu doit l’admettre, tant les citoyens et les maires attendent ce texte. S’il n’est pas possible d’avoir ce débat au sein de la commission des Lois, c’est problématique. Je vous demande donc de faire preuve de bienveillance, madame la présidente…

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. C’est le cas !

M. Erwan Balanant. …certes, mais il en faut peut-être encore un peu plus !

L’argument selon lequel l’obligation ne s’impose pas faute d’un bon fonctionnement est surprenant : ce n’est pas parce que quelque chose ne fonctionne pas qu’une suppression s’impose !

M. Bruno Questel, rapporteur. Ce n’est pas ce que nous faisons.

M. Erwan Balanant. Dans ces conditions, la loi sur la parité n’aurait jamais vu le jour puisque la parité n’était pas effective avant que la loi ne l’impose !

Sur le plan de la démocratie locale, un certain nombre d’outils doivent être obligatoires, dont le conseil de développement et la conférence des maires. Ce sont là de beaux outils comme en atteste, chez moi, le « bureau des maires », qui ressemble fort à cette dernière. Rien ne dit, puisque son existence est facultative, qu’il ne sera d’ailleurs pas supprimé par un autre président d’EPCI à l’occasion d’une alternance politique, ce qui serait dommageable.

Nous avons besoin de cadres, qui sont en l’occurrence suffisamment souples : il n’y a rien de coercitif à faire en sorte que les maires se rencontrent régulièrement au sein d’un EPCI ! Une telle obligation est de bonne politique.

M. Jean-Félix Acquaviva. Comme mes collègues, je tiens à souligner le caractère problématique de cette obligation, notamment sur des territoires ruraux de faible densité démographique, où il est déjà très compliqué de réunir le quorum pour la première réunion budgétaire.

L’obligation d’instaurer une conférence des maires revient à créer une usine à gaz dont le fonctionnement risque d’être très compliqué. De plus, et c’est le plus problématique, la conférence des maires peut être psychologiquement perçue comme une opposition, une concurrence à l’EPCI. C’est le contraire même des conséquences qui auraient dû être tirées de la loi NOTRe avec un mauvais regroupement intercommunal. Cela ne facilitera en rien le fonctionnement des intercommunalités telles qu’elles sont aujourd’hui. Sur le terrain, notamment en milieu rural, les casus belli se multiplieront et les problèmes de fonctionnement seront très lourds. On ne mesure pas assez les conséquences d’une telle obligation. Je nous exhorte tous à bien réfléchir sur ses impacts avant le débat en séance publique.

M. Paul Molac. Je tiens à rassurer mes collègues. Comme l’a dit M. Balanant, nos EPCI comprennent des conseils des maires sans que la loi y soit pour quelque chose. Que ce soit à Redon ou à Ploërmel, ils fonctionnent bien.

Je fais partie d’une école qui prône l’équilibre, lequel naît de l’harmonie, ce qui implique la discussion, où les rapports de force finissent par s’annuler au profit de l’intérêt général.

Cette mesure me paraît plutôt intéressante.

M. Jérôme Nury. La conférence des maires doit être à mon sens facultative : il faut en effet faire confiance à ces derniers, de même qu’à tous les élus locaux. Au sein des intercommunalités, c’est tout de même la gestion consensuelle qui domine et non les rapports de force.

L’organisation de la conférence des maires doit être libre, au point qu’il soit possible de lui adjoindre d’autres acteurs car elle est très fermée, très autocentrée. Si elle doit permettre la définition d’une stratégie territoriale, il serait intelligent d’y adjoindre notamment les vice-présidents de l’intercommunalité qui, en l’état, n’y siègent pas. De surcroît, il serait possible d’y adjoindre les présidents des syndicats intercommunaux gérant l’eau, l’assainissement, les écoles mais, aussi, les conseillers départementaux. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai déposé un amendement – qui ne sera donc pas discuté – pour parler plutôt de la « conférences des territoires ».

M. Rémy Rebeyrotte. Dans le rapport qu’Arnaud Viala et moi-même avons présenté, nous soulignons que les territoires où des conférences de maires sont organisées – c’est le cas de 75 % d’entre eux – fonctionnent mieux que ceux qui ne disposent pas d’une telle instance.

La conférence ou le conseil des maires permet de disposer d’un véritable conseil d’orientation. Il ne s’agit pas de se réunir tous les jours mais d’avoir un outil qui permette aux maires d’affirmer leur rôle originel en matière d’intercommunalités – l’intercommunalité, ce n’est pas la supra-communalité – et où les orientations choisies fondent l’esprit, le territoire et les compétences de l’intercommunalité.

Un tel travail d’orientation n’existe pas au sein des bureaux ni au sein des conseils communautaires, où l’on délibère à partir d’un ordre du jour très précis qui emporte des conséquences juridiques. En l’occurrence, je suis très attaché au caractère obligatoire de ce conseil des territoires, de ce conseil d’orientation piloté par les maires au service du territoire.

Pourquoi sommes-nous amenés à délibérer ? Parce que tout ne fonctionne pas très bien partout et que, dans certains cas, l’esprit communautaire doit être rappelé en faisant en sorte que les communes s’y retrouvent.

M. Pascal Brindeau. La conférence ou le conseil des maires, appelons-le comme on veut, vise à essayer de régler la question de la place des maires qui ne sont pas membres d’un exécutif au sein d’un EPCI. Les situations diffèrent bien entendu grandement selon que ce dernier comprend un nombre réduit de communes ou qu’il est de taille XXL, avec plus de cinquante communes. Cette affaire-là est donc très compliquée à traiter.

Lorsque le nombre de communes est important, une telle conférence voit très naturellement le jour. Aujourd’hui, la plupart des communautés dites XXL disposent de ce type d’instance où les maires se réunissent intuitu personae, abstraction faite de leurs éventuelles fonctions exécutives dans l’EPCI. Dans le même esprit, ces communautés installent des logiques de pôles territoriaux pour essayer de maintenir des équilibres.

Le caractère obligatoire ne correspond pas vraiment à l’esprit de la loi. Même si je sais que le ministre n’y est pas très attaché, l’idée d’un seuil me semblerait utile pour que ce caractère soit affirmé. La multiplication des instances ne me semble en effet pas très opportune dans un EPCI d’une vingtaine de communes. De toute façon, de telles réunions ont lieu, d’une manière souvent plus informelle.

M. Vincent Bru. Nous étions favorables au caractère obligatoire du pacte de gouvernance. Cela n’a pas été retenu mais nous reprenons l’argument du ministre : au nom de la liberté, nous pensons que la conférence des maires doit être, elle, facultative, 20 % des communes pouvant selon nous en demander la création.

Mon intercommunalité, « XXXL », compte 158 communes et il est très difficile de réunir l’ensemble des maires. Ils ne siègent évidemment pas au bureau et ils ne sont pas vice-présidents, tant s’en faut ! Nous pensons qu’un tel outil doit être mis à la disposition des élus sans qu’il soit pour autant obligatoire. Il faudrait que 20 % des maires puissent demander la création d’une telle conférence.

M. André Chassaigne. D’aucuns penseront que je suis un adepte des soviets : je pense que le caractère obligatoire de la conférence des maires est une bonne chose.

J’ai écouté les arguments des uns et des autres et je ne considère pas que les relations avec l’EPCI en seraient complexifiées. Argument supplémentaire en faveur de ce caractère obligatoire : c’est un lieu où la parole pourrait se libérer car bien souvent les réunions du conseil communautaire ne favorisent pas la libre expression.

Nous avons ainsi déposé un amendement proposant une coprésidence alternée de la conférence des maires de manière que le lien soit effectif entre le président de l’EPCI et une personne qui pourrait être désignée parmi les maires, en alternance, pour présider les réunions.

M. Thierry Benoit. Je suis toujours étonné lorsque l’on veut contraindre les élus locaux à créer une organisation pour qu’ils discutent et se comprennent. Par nature, la démocratie responsabilise les élus sur le plan local, communal donc intercommunal, notamment le premier d’entre eux, qui est le maire, et dont la première qualité est de pouvoir se tourner vers l’autre pour travailler avec lui. C’est en tout cas ainsi que j’ai été politiquement éduqué : il faut savoir travailler avec l’autre, quelle que soit sa sensibilité politique. Dans ma circonscription, aux Marches de Bretagne, cela fait trente ans que les élus font preuve d’une volonté commune pour travailler ensemble. Nous essayons, même si cela ne va pas sans difficulté, de faire abstraction des étiquettes et des sensibilités.

Les électeurs remercient vite un élu qui ne saurait se tourner vers les autres. Que ces organisations locales soient facultatives, c’est le meilleur service que l’on puisse rendre aux élus locaux et aux premiers d’entre eux, les maires !

M. Bruno Questel, rapporteur. Ce texte vise initialement à replacer le maire et la commune au cœur du dispositif.

Lors du Grand Débat, le Président de la République a échangé pendant 96 heures avec les maires de France et de Navarre. Il les a écoutés et il connaît les difficultés d’exercice d’un tel mandat, notamment au sein des intercommunalités.

Suite à la loi NOTRe, la capacité d’action des maires s’est distendue au sein des territoires intercommunaux tels qu’ils existaient ou préexistaient. Qu’est-ce que l’intercommunalité sinon un outil au service des municipalités et des maires ? Rien d’autre ! Ce n’est pas une collectivité locale et nous ne souhaitons pas qu’il en soit autrement.

Replacer les maires au cœur de la gouvernance des EPCI, c’est replacer les communes au coeur de l’administration de notre République.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Cet amendement a lui aussi le mérite d’esquisser une synthèse avec les travaux du Sénat. M. le député Schellenberger se montre taquin lorsqu’il assure qu’il s’agit de trouver un compromis au sein du groupe majoritaire. Non, il s’agit surtout de parvenir à une synthèse avec le groupe LR du Sénat, notamment avec la commission présidée par Philippe Bas, qui a souhaité que la conférence des maires ait un caractère obligatoire. Il faut donc commencer à réfléchir à une convergence afin d’éviter une opposition inutile. Vous conviendrez, monsieur le député Schellenberger, qu’il serait bien dommage de s’opposer au président Bas…

Je suis tocquevillien. Initialement, le caractère obligatoire ne figurait pas dans le texte du Gouvernement, je n’y reviens pas. Le député Houlié et quelques autres ont proposé des avancées après les débats sénatoriaux mais, aussi, après les contributions de l’Association des maires de France – laquelle est présidée, monsieur Schellenberger, par M. Baroin. L’Association des maires ruraux de France, quant à elle, demande un tel caractère obligatoire. Il faut donc le savoir et l’entendre.

Au-delà de la doctrine, interrogeons-nous sur la nature d’une telle obligation. L’amendement dispose que la conférence se réunit « dans la limite de deux réunions par an », ce qui me semble raisonnable. De plus, entre nous, si un maire ne souhaite pas y assister, nous ne lui enverrons pas les gendarmes ! L’amendement de M. Houlié a le mérite d’œuvrer à un consensus que certains attendent.

J’entends bien vos propos, notamment ceux des députés bretons : ces dispositions ne sont pas destinées aux territoires où tout fonctionne bien mais à ceux où le fonctionnement est plus problématique. Nous devons tous prendre un stylo pour écrire la loi et, par définition, nous devons proposer un cadre général afin de régler des situations locales. Nous aurons encore l’occasion de voir combien cela n’est pas évident.

Enfin, monsieur le député Nury, cette conférence des maires peut accueillir qui les maires et présidents d’intercommunalités souhaitent accueillir. Faut-il prévoir dans la loi les présidents de syndicats, les conseillers départementaux, etc. ? Je ne le crois pas. La conférence des maires intéresse ces derniers et, à mon avis, ils peuvent recevoir n’importe qui, y compris un membre du corps préfectoral, ils peuvent ouvrir ou non la conférence à la presse, bref, les acteurs locaux ont la faculté de s’organiser.

Avis favorable à cet amendement.

Mme Emmanuelle Ménard. Vous dites, monsieur le ministre, que la conférence se réunira deux fois par an.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Au minimum.

Mme Emmanuelle Ménard. Tel que l’amendement est rédigé, ce n’est pas le cas : « Elle se réunit, sur un ordre du jour déterminé, à l’initiative du président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou, dans la limite de deux réunions par an, à la demande d’un tiers des maires ».

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Deux réunions, au minimum, sont obligatoires.

Mme Emmanuelle Ménard. Cela peut être beaucoup plus.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Mais cela n’est pas obligatoire.

La Commission adopte l’amendement CL1151.

En conséquence, les amendements CL288 de M. Jérôme Nury, CL220 de M. Raphaël Schellenberger, CL915 de M. Arnaud Viala, CL221 de M. Raphaël Schellenberger, CL664 de M. Vincent Bru, CL413 de Mme Martine Wonner, CL1105 de Mme Anne Blanc, CL1124 de M. Stéphane Baudu, CL136 de M. Christophe di Pompeo, CL778 de Mme Agnès Thill, CL320 de M. Stéphane Peu, CL533 de Mme Annaïg Le Meur, CL1 de M. Martial Saddier, CL779 de Mme Agnès Thill, CL918 de M. Arnaud Viala, CL940 de M. Jean-Philippe Ardouin, CL665 de M. Vincent Bru, CL354 de M. Fabien Lainé, CL882 de Mme Christine Pires Beaune, CL916 de M. Arnaud Viala et CL146 de M. Didier Le Gac tombent.

Puis, la Commission adopte l’article 1er modifié.

Article 1er bis
(art. L. 3633-2 du code général des collectivités territoriales)
Renforcement des prérogatives de la conférence métropolitaine rassemblant les maires des communes situées sur le territoire de la métropole de Lyon

La Commission adopte l’article 1er bis sans modification.

Après l’article 1er bis

La Commission examine l’amendement CL895 de M. Éric Diard.

M. Éric Diard. À des fins d'équité entre la métropole de Lyon et celle d'Aix-Marseille Provence, cet amendement vise à renforcer les prérogatives de la conférence métropolitaine des maires de la seconde de la même manière que l'article 1er bis, introduit au Sénat, renforce les prérogatives de la conférence métropolitaine des maires de la première.

Par cet amendement, qui est presque de cohérence, il s'agit de mieux intégrer les maires aux processus de décision de la métropole.

M. Bruno Questel, rapporteur. Vous oubliez la quelque vingtaine d’autres métropoles qui est soumise aux mêmes réglementations que celle de Marseille – ce qui n’est pas le cas de celle de Lyon, établissement public à part.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, sinon, avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Comme je l’ai dit hier soir en préambule à l’examen du texte, nous n’ouvrons pas la question des métropoles et des communautés urbaines. Les aménagements prévus dans le texte concernent la métropole de Lyon qui, précisément, n’est pas un établissement public mais une collectivité territoriale sui generis. Nous sommes contraints d’en passer par la loi car si les adaptations générales concernant les EPCI s’appliquent également à la métropole de Marseille, ce n’est pas le cas pour celles qui concernent la métropole de Lyon où, expressis verbis, il faut une inscription particulière.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

Article 1er ter A
(art. L. 3633-3 du code général des collectivités territoriales)
Allongement à neuf mois du délai d’élaboration du pacte de cohérence métropolitain de la métropole de Lyon

La Commission adopte l’article 1er ter A sans modification.

Article 1er ter B
(art. L. 3631-5 du code général des collectivités territoriales)
Modalités d’élection des membres de la commission permanente de la métropole de Lyon

La Commission adopte l’article 1er ter B sans modification.

Article 1er ter
(art. L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales)
Modalités de désignation des vice-présidents des bureaux des EPCI

La Commission examine les amendements identiques CL1152 du rapporteur, CL169 de M. Pascal Lavergne, CL208 de M. Alain Perea, CL222 de M. Raphaël Schellenberger, CL321 de M. Stéphane Peu, CL811 de M. Vincent Bru, CL919 de M. Arnaud Viala, CL1041 de M. Sacha Houlié et CL1130 de M. Stéphane Baudu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de revenir sur un dispositif adopté au Sénat en premier lecture visant à élire les vice-présidents du bureau d’intercommunalité au scrutin de liste à la majorité absolue sans panachage, ni vote préférentiel.

D'une part, l'établissement de la liste peut s'avérer complexe dans certains EPCI, d'autre part, le scrutin de liste pourrait avoir pour conséquence une sous-représentation des communes membres de plus petite taille, les communes centres étant par définition plus représentées par des femmes en raison de la parité.

En conséquence je vous demande de bien vouloir supprimer l’article 1er ter.

M. Pascal Lavergne. L’élection des vice-présidents au scrutin uninominal permet en effet de maintenir un certain équilibre territorial et de préserver le contexte historique du territoire. Les élus doivent être libres du choix des critères retenus pour constituer l’organe exécutif de leur intercommunalité.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. L’amendement identique CL208 est défendu.

M. Raphaël Schellenberger. L’organisation d’un scrutin majoritaire pour la désignation de l’exécutif intercommunal serait absolument contraire aux objectifs de l’article 1er créant un pacte de gouvernance. Nous sommes donc défavorables au scrutin de liste.

M. André Chassaigne. Je suis également très opposé aux scrutins de liste car ils conduiront les élus qui veulent être vice-présidents à aller manger dans la main du président élu. C’est ainsi que cela se passera.

Certes, aujourd’hui, la procédure est très longue car on vote pour les vice-présidents les uns après les autres mais cela permet de faire émerger des individualités, des élus, des maires très motivés pour travailler sur le plan de l’intercommunalité. Cette vie démocratique est riche, même si elle peut prendre des heures.

J’ajoute que dans les intercommunalités des territoires ruraux, où l’on ignore les postures partisanes, un travail collectif est élaboré. Il ne faut pas y introduire des blocages dont les conséquences seront négatives.

M. Vincent Bru. Nous sommes d’accord avec l’amendement du rapporteur. Le scrutin de liste aboutirait à mettre à l’écart les élus des petites communes. Laissons-les tenter leur chance et être candidats s’ils le souhaitent ! Pour les bureaux des intercommunalités, c’est un enrichissement.

M. Arnaud Viala. Je souscris entièrement aux propos du rapporteur. La sous-représentation des communes les plus petites, a fortiori dans les EPCI où deux scrutins coexistent pour la désignation des élus intercommunaux suite aux élections municipales, serait dramatique.

M. Sacha Houlié. Pourquoi le Sénat a-t-il voté une disposition qui paraît aussi inepte ? Il s’est avisé que la désignation des vice-présidents prend un temps considérable dans le cadre de la première réunion, celle des EPCI, et il a cherché à simplifier les procédures. La solution proposée étant pire que le mal, nous sommes je crois unanimes à vouloir supprimer ce dispositif.

M. Stéphane Baudu. La Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation est favorable à la suppression de cet article qui ne permet pas le pluralisme des expressions, notamment, de celles des petites communes.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je me suis exprimé hier soir à ce sujet et je ne comprends toujours pas pourquoi le Sénat a souhaité un tel dispositif. Sa suppression montrera que l’Assemblée nationale a mieux défendu la ruralité que ce dernier.

Avis très favorable à l’ensemble de ces amendements.

Mme Cécile Untermaier. Cet argument est en effet très important.

Je ne pense pas qu’il soit néanmoins possible de parler d’ineptie, le terme étant un peu fort. Derrière cette proposition, c’est en effet la question de la parité qui est posée, à laquelle je suis très sensible.

Toutefois, il faut être pragmatique. Les communautés de commune et les communes travaillent différemment de ce que l’on peut imaginer depuis Paris. Le groupe Socialistes et apparentés soutiendra l’amendement du rapporteur.

Mme Émilie Chalas. Je soutiens aussi très fortement cet amendement car dans les territoires, y compris métropolitains, les équilibres de gouvernance entre les grandes et les plus petites communes méritent que les exécutifs soient repensés de façon à travailler différemment.

M. Jean-Félix Acquaviva. Le groupe Libertés et Territoires est très favorable à l’amendement du rapporteur.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 1er ter est supprimé et les amendements CL559 de Mme Laurence Gayte, CL150 de Mme Albane Gaillot, CL149 de M. Didier Le Gac, CL534 de Mme Annaïg Le Meur, CL 945 de Mme Laurence Trastour-Isnart et CL981 de M. Sébastien Huyghe tombent. 

Article 2
(art. L. 273-3, L. 273-9, L. 273-11 et L. 273-12 du code électoral et art. L. 5211-6 du code général des collectivités territoriales)
Renouvellement des conseillers communautaires des communes de moins de 1 000 habitants en cas de cessation des fonctions du maire

La Commission est saisie de l’amendement CL1153 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Le dispositif adopté par le Sénat en première lecture aurait pour conséquence que le conseiller communautaire ne serait pas forcément conseiller municipal ou conseiller d’arrondissement, ce qui est tout simplement contraire au droit électoral et ne saurait donc être accepté.

Je vous demande de supprimer l’alinéa 2.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Comme je l’ai dit à la sénatrice Primas en séance, avec une telle rédaction, des conseillers communautaires pourraient ne pas être conseillers municipaux, ce qui paraît impensable.

Avis favorable à cette suppression.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements CL982 et CL983 de M. Sébastien Huyghe.

M. Sébastien Huyghe. Depuis 2014, les électeurs des communes de plus de 1 000 habitants désignent conjointement, par le même bulletin de vote, leurs représentants au conseil municipal et au sein de l’EPCI.

La législation actuelle conduit à ce que la tête de liste pour l’élection municipale, qui a vocation à devenir maire, soit également celle de l’élection pour l’assemblée communautaire. Or, certains maires ne souhaitent pas nécessairement siéger au sein de l’EPCI, notamment dans les petites communes parties prenantes d’importantes intercommunalités. L’activité d’un élu peut être en effet particulièrement chronophage et certaines équipes municipales peuvent choisir de répartir les rôles et les tâches.

Dans plusieurs communes de ma circonscription, les futures équipes municipales ont ainsi placé en tête de liste la personne qui allait représenter la commune dans les métropoles et, en deuxième position, celle qui avait vocation à devenir maire, afin de contourner cette obligation.

Je vous propose donc que les têtes de liste aux élections municipales puissent ne pas figurer en tête de liste pour l’élection au sein de l’EPCI dans les communes représentées par un seul délégué.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable à ces deux amendements car la philosophie de ce projet consiste à replacer le maire au cœur des acteurs de l’intercommunalité pour le compte de sa commune.

Nous avons tous connu le scénario que vous décrivez sur nos territoires mais le droit commun permet aux acteurs locaux et aux élus municipaux de s’arranger sans qu’il soit nécessaire d’institutionnaliser cette forme de dérogation.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis que le rapporteur. Je sais ce qu’il en est de ces situations locales mais une modification du droit nuirait plus à la philosophie de ce texte qu’elle ne l’améliorerait. Je vous renvoie à notre discussion d’hier soir.

M. Sébastien Huyghe. Je suis très surpris car il me paraissait intéressant de faire coïncider le droit et la volonté des équipes municipales en assouplissant les règles. La répartition des tâches au sein des futures équipes municipales aurait été de bonne politique, de même qu’une approche au plus près de la réalité des choses.

Dans ces petites communes, des personnes s’engagent tout en exerçant parallèlement une profession. Ce ne sont pas des professionnels de la politique.

La Commission rejette successivement les deux amendements.

Elle examine ensuite l’amendement CL896 de M. Éric Diard.

M. Éric Diard. Cet amendement rédactionnel vise à ajouter « de la commune concernée » après les mots « les conseillers communautaires ».

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

La Commission examine l’amendement CL984 de M. Sébastien Huyghe.

M. Sébastien Huyghe. Il importe de proposer de la flexibilité aux communes rurales et à leurs élus, en leur permettant notamment de répartir entre eux la charge de travail. Loin de faciliter leur mission, la loi actuelle contraint nombre de conseils municipaux à procéder à de multiples démissions, afin de permettre à l’élu désigné d’accéder aux fonctions de conseiller communautaire. Il est donc proposé de laisser aux élus des communes de moins de 1 000 habitants la possibilité de choisir ce dernier par un vote.

Dans la lignée des deux amendements que j’ai défendus précédemment, le présent amendement est issu de la réalité du terrain.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je ne peux qu’émettre un avis défavorable à cette proposition qui met à mal le principe de l’avancement à l’aune de l’ordre du tableau et des résultats des élections.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. C’est une des avancées auxquelles nous sommes parvenus au terme de discussions et de coproductions, sur le texte puis au Sénat. Si nous remettons le maire au cœur de l’intercommunalité, nous repartons de l’ordre du tableau. Le maire est alors automatiquement conseiller communautaire. S’il ne le souhaite pas, il démissionne et est remplacé par son premier adjoint, qui peut également démissionner et être remplacé par son adjoint.

Le dispositif vaut ce qu’il vaut, mais il a le mérite de la clarté. Simple à comprendre, il acte bien que c’est la commune qui délègue son conseiller communautaire. Certes, on peut considérer le vote au sein du conseil municipal comme une véritable souplesse, mais nous souhaitions précisément revenir sur ce dispositif car il ne fonctionnait pas bien.

Je vous propose donc de retirer votre amendement, pour garder le principe d’un avancement en fonction de l’ordre du tableau.

M. Sébastien Huyghe. Je maintiens l’amendement. Le projet de loi oblige les conseils municipaux à recourir à des subterfuges pour arriver au résultat final, alors que le vote au sein du conseil municipal présente davantage de souplesse.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL1014 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL1154 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer le II de l’article 2, introduit par le Sénat, qui semble déjà satisfait par le droit existant.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Article 2 bis A
(art. L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales)
Élection d’un nouveau suppléant au conseil de communauté d’un EPCI

La Commission examine l’amendement de suppression CL1155 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet article est inutile car la loi pourvoit déjà au cas où il n’y a plus de suivant de liste pour remplacer un conseiller communautaire.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 2 bis A est supprimé et l’amendement CL513 de M. Francis Vercamer tombe.

Article 2 ter
(art. 54 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles)
Abrogation des dispositions prévoyant l’élection des conseillers métropolitains au suffrage universel direct

La Commission adopte l’article 2 ter sans modification.

Article 3
(art. L. 5211-40-1 du code général des collectivités territoriales)
Remplacement d’un conseiller communautaire par un autre conseiller municipal de la même commune au sein des commissions

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL1015 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL495 de M. Lionel Causse.

M. Lionel Causse. Cet amendement permet au conseiller municipal de choisir lui-même son remplaçant, à la place du maire. Ce dispositif me semble plus respectueux des conseillers municipaux, notamment d’opposition.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit là d’exercer une responsabilité de la fonction de maire. Rien n’interdit d’ailleurs au maire de choisir un élu municipal dans l’opposition. Je parle d’expérience, puisque j’ai fait un tel choix en 2001.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Dans l’esprit initial du texte, le « verrou du maire » vaut pour les communes de moins de 1 000 habitants. Des difficultés peuvent certes apparaître dans les communes de plus de 1 000 habitants s’agissant des conseillers municipaux d’opposition. Il est toutefois nécessaire de maintenir un verrou car si tous les conseillers municipaux participent aux commissions communautaires, celles-ci seront pléthoriques.

Le code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit la désignation d’un titulaire et d’un suppléant. S’ils sont tous deux empêchés, le projet de loi introduit une souplesse, en autorisant une autre personne à suivre les débats de la commission, sans participer au vote. Il s’agit non pas de doubler la représentation institutionnelle de la commune dans l’EPCI, mais de proposer un dispositif qui aide à faire circuler l’information. On voit mal comment cela serait possible avec un conseiller municipal que le maire n’aurait pas choisi.

Je vous suggère donc, monsieur Causse, de retirer votre amendement, même si je comprends votre interrogation pour les communes de plus de 1 000 habitants. Le présent dispositif vise cependant les communes rurales.

M. Lionel Causse. Ayant entendu les explications de M. le ministre, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL965 de M. Stéphane Baudu.

M. Stéphane Baudu. Le présent amendement vise à supprimer les alinéas 5 et 6 de l’article 3.

Le fait d’autoriser la présence lors des commissions communautaires d’autres conseillers municipaux, au motif qu’ils sont titulaires d’une délégation du maire d’une des communes membres tend à compliquer, voire à déstabiliser le fonctionnement de ces commissions. Même si les votes sont peu fréquents dans ces commissions et que le conseiller municipal n’a qu’une voix délibérative, les commissions communautaires peuvent devenir pléthoriques, M. le ministre l’a dit. À la fin de la mandature, elles pourraient comprendre davantage de conseillers municipaux que de conseillers communautaires, désignés par leurs communes pour siéger.

M. Bruno Questel, rapporteur. Les conseillers municipaux n’auront pas voix délibérative. Il faut laisser cette faculté, qui existe déjà dans nombre de territoires, s’opérer de manière paisible et structurée. Je suis donc désolé de devoir donner un avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Il s’agit en effet de donner une base légale à une bonne pratique, que l’on rencontre dans certaines intercommunalités. Une commune rurale, qui a désigné un titulaire et un suppléant, ne peut être représentée aux cinq ou six commissions, voire davantage, de l’EPCI. Le projet de loi permet simplement à l’adjoint au maire de la commune en charge des travaux de participer à la commission travaux de l’intercommunalité, si le maire en est d’accord. Il facilite ainsi la circulation de l’information.

Dans le règlement intérieur comme dans le pacte de gouvernance, les élus pourront toujours organiser les modalités de cette participation. Du moins aurons-nous donné une base légale au dispositif pour faire en sorte que, si un contentieux intervient, la présence d’un conseiller municipal dans la commission ne soit pas sanctionnée. Aujourd’hui, celle-ci se pratique déjà : il s’agit donc de sécuriser les pratiques qui existent et de remédier à une faiblesse juridique.

M. Erwan Balanant. Contrairement à mon collègue Stéphane Baudu, je considère que le dispositif est intéressant, puisqu’il régularise une pratique fréquente dans les territoires. Dans l’une des deux intercommunalités que compte ma circonscription, il y a eu un contentieux sur ce sujet, en raison d’un flou juridique. Autoriser la présence de conseillers municipaux me semble être une bonne idée.

De plus, c’est un élément qui permet de rétablir un peu de parité dans les commissions ainsi que de la diversité parmi les conseillers municipaux. Dans certains endroits, ce n’est pas la majorité qui siège, car un accord a été trouvé au sein du conseil afin d’assurer les équilibres. Parce que l’article 3 sécurise des pratiques qui existent déjà, il nous faut voter contre cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL1016 du rapporteur.

La Commission est saisie de l’amendement CL190 de Mme Marie-France Lorho.

Mme Marie-France Lorho. Le projet de loi vise à légitimer la place et le rôle de représentativité que jouent les élus locaux dans leur commune.

Cet amendement prévoit le remplacement d’un membre d’une commission par un conseiller municipal. Si celui-ci ne pourra pas voter lors des commissions de travail mises en place par les EPCI, sa présence est déterminante pour tisser des liens entre les collectivités et ces superstructures. Pour témoigner de ma considération pour le rôle des élus locaux, je propose que le maire puisse lui-même choisir quel conseiller municipal sera le plus à même de représenter la collectivité à l’occasion de ces commissions. L’instauration d’une telle personnalité, représentative de la ville, constitue une mesure cohérente attestant de la volonté de créer une véritable subsidiarité au sein de notre territoire.

M. Bruno Questel, rapporteur. Madame Lorho, par votre amendement, vous remplacez le maître mot de ce projet de loi, « liberté », par « rigidité ». Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Nous ne devons pas tout mélanger.

Il existe, d’un côté, les conseillers communautaires, qui représentent les communes au sein de l’EPCI. Une fois élus, soit par l’ordre du tableau, soit par fléchage, ils représentent l’intercommunalité et l’intérêt général communautaire. C’est pourquoi un vice-président en charge d’un domaine en devient responsable pour toute l’intercommunalité, non pour son seul territoire. Nous ne pouvons y déroger. Un conseiller communautaire ne se rend à une commission que si sa participation correspond à un principe de proportionnalité, par exemple en fonction du poids démographique des différentes communes.

De l’autre côté, nous introduisons une disposition selon laquelle les conseillers municipaux, sur décision du maire, peuvent se rendre en commission sans voix délibérative pour se tenir au courant des débats qui s’y déroulent. On organise en quelque sorte le public de la commission car il est essentiel de rapprocher la population des décisions. Dans les villages ruraux, les conseillers municipaux sont la représentation immédiate de la population.

On ne peut pas mélanger les deux, et faire en sorte que le maire commence à composer lui-même les commissions communautaires et choisir qui aura voix délibérative. De plus, ce dispositif ne serait pas constitutionnel, car il méconnaîtrait les principes de proportionnalité et de représentation de toutes les communes.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

Article 3 bis
(art. L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales)
Accords locaux de répartition des sièges au sein des conseils communautaires

La Commission est saisie des amendements identiques CL1156 du rapporteur et CL1043 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. Les dispositions que le Sénat a adoptées prévoient qu’un accord local de répartition des sièges au sein d’un conseil exécutif peut compenser la règle des 20 % d’écart entre la démographie de la commune et le nombre de sièges, qui fait l’objet d’une jurisprudence constante et intangible du Conseil constitutionnel.

L’adoption définitive de ces dispositions ne passerait pas la barre du juge constitutionnel. L’amendement CL1156 vise donc à supprimer l’article 3 bis.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Sur le fond, les réflexions pour les accords locaux avec ces fameux tunnels retiennent notre attention. De toute évidence, ces dispositions ne sont pas constitutionnelles : toutes les décisions valident la règle des 20 % d’écart, notamment la décision Commune de Salbris qui avait conduit nombre d’intercommunalités à délibérer à nouveau sur leurs accords locaux, lesquels n’étaient pas constitutionnels.

J’ai éclairé le Sénat sur ce point, qui a cependant souhaité se lancer dans une aventure juridique, actant que les dispositions n’étaient pas constitutionnelles mais les intégrant au projet de loi.

Nous ne pouvons pas prendre le risque de voter des dispositions inconstitutionnelles, qui conduiraient les élus locaux à passer certains accords en avril 2020, pour découvrir à la fin de l’année prochaine ou en 2021 qu’ils étaient illégaux. Il faudrait alors que tous les EPCI de France organisent de nouvelles élections, dans toutes les intercommunalités. Nous souhaitons au contraire baliser, stabiliser, sécuriser les dispositions. C’est pourquoi je suis favorable à la suppression de l’article 3 bis.

M. Guillaume Larrivé. Monsieur le ministre, dans l’hypothèse où le projet de loi constitutionnel déposé par le Gouvernement prospérerait, le Gouvernement serait-il favorable à introduire dans la Constitution une disposition permettant aux conseils communautaires d’obtenir la souplesse que de très nombreux élus, depuis très longtemps, réclament ? Comme, hélas, sur bien des sujets, nous tournons malheureusement en rond sur cette question.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Vous avez raison de parler de ces deux aspects, que le Sénat prend d’ailleurs en compte. Il s’agit d’une part de déroger en permanence aux 20 % et d’autre part, d’y déroger en cas d’accord local. Au moment où nous nous parlons, si nous devions imaginer des amendements à une loi constitutionnelle, je serais favorable à ce que nous puissions avancer jusqu’à déroger à la règle des 20 % sur les accords locaux. Je ne considère pas qu’en faire un principe est une bonne chose. En tant que magistrat, vous savez que le principe est la proportionnalité. Néanmoins, je crois qu’il faudrait y déroger pour les accords locaux.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 3 bis est supprimé et les amendements CL191 de Mme Marie-France Lorho, CL322 de M. André Chassaigne, CL567 de M. Xavier Breton et CL593 de M. Robin Reda tombent.

Article 4
(art. L. 5211-40-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Information des conseillers municipaux sur les affaires de leur établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre

La Commission examine l’amendement CL1082 de M. Daniel Labaronne.

M. Daniel Labaronne. Cet amendement vise à favoriser la diffusion des comptes rendus des conseils communautaires à tous les conseillers municipaux des communes par voie dématérialisée. C’était l’une des propositions figurant dans le rapport Ruralités : une ambition à partager, que j’ai remis cet été au Gouvernement.

M. Bruno Questel, rapporteur. Vous posez la question du délai de transmission des comptes rendus, qui sera traitée ultérieurement dans le projet de loi. Je vous suggère donc de retirer cet amendement.

M. Daniel Labaronne. Je le retire, tout en m’interrogeant sur le dispositif qui sera acté.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL825 de M. Jean-Félix Acquaviva.

M. Jean-Félix Acquaviva. Cet amendement vise à préciser que les conseillers municipaux des communes membres d’un EPCI qui ne sont pas membres de son organe délibérant doivent être informés de manière systématique des affaires de l’établissement qui font l’objet d’une délibération.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable, pour permettre une meilleure diffusion des informations au sein des intercommunalités.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. J’y suis également favorable, moyennant la précision, pour le compte rendu, qu’il ne s’agit pas du droit d’être informé de « tout », mais uniquement de ce que nous mettrons dans le texte. Je le dis pour parer à d’éventuels contentieux à l’avenir : nous ne pouvons pas donner un droit d’information sur toute décision.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL667 de M. Vincent Bru.

M. Vincent Bru. Alors que nous venons de rendre obligatoire la conférence des maires, l’amendement prévoit que les avis, qui ne sont ni des décisions ni des délibérations, formulés par les maires sur certaines questions soient rendus publics, et qu’ils soient notamment portés à la connaissance des conseils communautaires et des membres des conseils municipaux. Il s’agit là de donner davantage de poids aux maires que l’on réunit et qui donnent un avis.

M. Bruno Questel, rapporteur. La notion d’avis ne figure pas dans les dispositions du projet de loi que nous avons précédemment examinées. Étant confiant et positif par nature, je n’imagine pas qu’un maire qui participerait à une conférence des maires masque quoi que ce soit à sa propre municipalité – mais je peux me tromper. J’émettrai donc un avis de sagesse, en attendant que le Gouvernement s’exprime.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je suis favorable à l’amendement à condition de le reprendre sur deux points.

Il faut tout d’abord préciser qu’il n’est pas obligatoire de rendre ou d’écrire un avis après une conférence des maires. Dans le cas contraire, nous allons créer une obligation de produire un rapport écrit après la conférence des maires, pour tous les EPCI. Or dans nombre d’entre eux, la pratique est beaucoup plus souple. Lorsqu’un avis écrit est rendu, celui-ci peut être communiqué aux conseillers municipaux.

Ensuite, si l’on rend obligatoire la communication de l’avis aux conseillers municipaux, on pourrait ajouter que, de facto, le conseil communautaire doit être destinataire du même avis. Certes, les conseillers communautaires sont aussi conseillers municipaux, mais cela va encore mieux en le disant.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Monsieur Bru, vous pouvez soit rectifier l’amendement dès à présent, soit le retravailler pour la séance.

M. Vincent Bru. Un conseiller communautaire a envie de connaître le contenu des délibérations et de se forger une opinion sur le plan pluriannuel d’investissement ou tout autre sujet, qui concernent l’ensemble des maires. Si les maires se réunissent pour en discuter, il est normal que les conseillers communautaires soient au courant des avis rendus.

M. Bruno Questel, rapporteur. Sauf erreur de ma part, un conseiller communautaire est également conseiller municipal. Il a donc accès à l’information. La liberté et la souplesse doivent être appliquées dans ce cadre.

M. Erwan Balanant. Afin de gagner du temps, je propose que nous rectifiions immédiatement l’amendement en intégrant les points très pertinents soulevés par le ministre.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Avec l’aide de nos services, nous pouvons rectifier l’amendement selon les lignes directrices indiquées par le ministre.

M. Thierry Benoit. Une telle proposition risque de complexifier la vie des intercommunalités. Il y a le conseil communautaire, le bureau de la communauté, les commissions, et la conférence des maires, à présent. L’amendement ne dit pas si l’avis recouvre un relevé de décisions ou un relevé d’informations, qui viendrait s’opposer au compte rendu du conseil municipal, traduit par des délibérations. Bien que je ne sois pas membre de la commission des Lois – je remercie d’ailleurs Mme la présidente de m’y accueillir -, j’aimerais donc que M. le ministre m’éclaire sur le fond de sa pensée.

C’est important car le projet de loi vise à mettre de l’ordre dans le désordre créé par la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République et les lois territoriales votées sous le quinquennat du président Hollande.

Si M. le ministre veut apporter simplification et pragmatisme au dispositif, il doit exprimer le fond de sa pensée sur la façon dont il interprète cet amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Deux aspects doivent être notés.

Premièrement, il ne s’agit pas, incidemment, de voter un amendement rendant obligatoire la production d’un avis à la fin de la conférence des maires. Si les maires se mettent d’accord oralement, nous ne leur demanderons pas d’écrire des comptes rendus. Tant mieux s’ils le font, mais cela n’a rien d’obligatoire. Je l’ai dit, il faut prévoir que lorsque des avis formels sont rédigés et émis à la fin de la conférence des maires, ils peuvent ou doivent – cette seconde option ne me pose pas de problème car, dès lors que l’avis est écrit, il devient communicable, sinon public – être transmis à l’ensemble des conseillers municipaux.

Deuxièmement, l’alinéa 2 de l’article 4 du projet de loi prévoit que « les conseillers municipaux des communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale qui ne sont pas membres de son organe délibérant ont le droit, dans le cadre de leur fonction, d’être informés des affaires de l’établissement qui font l’objet d’une délibération ». La rectification doit donc veiller à ne pas créer un dispositif « shadokien » faisant que le conseiller municipal a davantage de droits lorsqu’il n’est pas conseiller communautaire que lorsqu’il l’est.

Je vous propose de bien corriger ces deux aspects de l’amendement.

M. Vincent Bru. On pourrait prévoir que les documents sont envoyés aux conseillers municipaux, y compris ceux de l’opposition, et aux conseillers communautaires et seraient transmis s’il y a avis. Lorsque la conférence des maires a formulé un avis, il importe que les élus municipaux en connaissent la teneur et les arguments qui ont été avancés.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La rédaction de l’amendement ne semblant pas aboutie, je vous invite à la travailler avec les services du Gouvernement, afin de déposer l’amendement à nouveau.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL1157 rectifié du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de revenir à la rédaction initiale du projet de loi. Deux semaines constituent un délai raisonnable pour que les conseillers municipaux soient informés.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. J’avais indiqué au Sénat que, sans l’indication d’un délai, il ne se passerait rien. Il faut compléter le dispositif par un délai. Je suis donc favorable à l’amendement.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission examine l’amendement CL261 de Mme Fadila Khattabi.

Mme Fadila Khattabi. Dans un souci de transparence de la démocratie locale, cet amendement vise à transmettre aux conseillers municipaux des communes membres d’un EPCI l’ordre du jour et les documents correspondant aux délibérations. Les conseillers pourraient ainsi s’organiser pour assister aux conseils intercommunaux.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous demanderai, chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement car, lorsque les conseillers communaux membres d’un EPCI reçoivent la convocation, elle est généralement assortie de l’ordre du jour, ainsi que du compte rendu de la séance précédente.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. En effet, l’ordre du jour figure avec la convocation. L’amendement étant déjà satisfait, je vous suggère également de le retirer.

Mme Fadila Khattabi. Pour ce qui me concerne, conseillère municipale mais pas conseillère communautaire, je n’ai jamais reçu d’ordre du jour ou les délibérations.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. C’est pourquoi nous introduisons cet article dans le projet de loi. Il vous permettra de recevoir ces documents. L’article coule de source : dès lors que l’on rend la circulation de l’information obligatoire, celle-ci comprend de facto l’ordre du jour.

L’amendement est donc déjà satisfait, non par les dispositions actuellement en vigueur, mais par celles que nous introduisons.

L’amendement est retiré.

Puis, la Commission examine l’amendement CL875 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier. 

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Cet amendement vise à garantir la bonne et complète information de l’ensemble des élus municipaux sur les affaires intercommunales, en leur permettant d’avoir connaissance des décisions prises par le bureau communautaire, un des trois organes de l’établissement public de coopération intercommunale, qui peut voir des délégations très larges.

M. Bruno Questel, rapporteur. À mon grand désespoir, je ne peux qu’émettre un avis défavorable à cet amendement qui, après la conférence des maires et anticipant sur le conseil communautaire, contraindrait le bureau à un formalisme déraisonnable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. La vraie question est de définir ce qu’est un « compte rendu des décisions ». Je vous propose donc de retirer cet amendement, pour le retravailler d’ici à la séance.

Au lendemain du bureau communautaire, vous obtenez la liasse des délibérations de toute nature, qui ont été prises. On peut permettre d’envoyer ces documents, même si les conseillers municipaux, de sous-informés, deviendront surinformés. Chacun fera son tri dans la boîte mail…

La notion de « compte rendu des décisions » ne traduit pas le fait que, dans de nombreux bureaux communautaires, on n’écrit pas de relevé, mais on se contente d’adopter ou de rejeter les délibérations. Là non plus, il ne faut pas créer d’obligation pour le bureau de rédiger un compte rendu, si celui-ci n’existe pas aujourd’hui.

Pour les mêmes raisons que précédemment, je propose donc de retirer l’amendement, et de cibler les délibérations du bureau ou celles qui retiennent votre attention – comme les décisions individuelles ou l’octroi de subventions. Vous pouvez aussi assumer l’idée que les bureaux communautaires, y compris dans les communes ne disposant pas de beaucoup de moyens, devront écrire un compte rendu.

En tout cas, la rédaction doit être précisée. J’insiste auprès du Parlement sur le fait que la qualité légistique du projet de loi déterminera le contentieux de demain devant le juge administratif. Ceux d’entre vous qui sont avocats le savent, on pourra, en invoquant un vice de forme, casser des dizaines de délibérations car nous n’aurons pas suffisamment encadré le degré d’obligation de moyens ou de résultats de l’EPCI dans la communication de l’information.

Je vous propose donc de retirer l’amendement et de le retravailler avec le rapporteur.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL921 de M. Arnaud Viala.

M. Arnaud Viala. Cet amendement poursuit la logique des amendements CL920, que je n’ai pu défendre, et CL922, en supprimant les alinéas 3, 4 et 5 de l’article 4. Comme le ministre l’a dit, imposer par la loi de diffuser l’ordre du jour et les comptes rendus de l’EPCI à tous les conseillers municipaux ouvre la voie à des contentieux dont on n’imagine pas la portée.

De surcroît, une diffusion dématérialisée suscitera un ensemble de difficultés lorsqu’il s’agira de vérifier que les envois ont été effectués et les documents reçus dans les délais.

Sur le fond, cette diffusion contrevient à l’idée que des élus sont désignés au sein de leur conseil municipal pour représenter la commune dans l’EPCI et qu’ils sont amenés à part entière à prendre les décisions et à suivre les travaux de la structure dans laquelle ils représentent leur commune.

Ces trois amendements, que je réfléchirai à rédiger en un seul lors de la séance, visent donc à supprimer les alinéas 3, 4 et 5 de l’article 4.

M. Bruno Questel, rapporteur. Comme vous n’avez pas pu défendre l’amendement précédent, dont vous souligniez la cohérence d’ensemble, j’ai cru que vous comptiez retirer celui-ci. Je suis désolé d’émettre un avis défavorable car les règles établies sont claires et correspondent à de bonnes pratiques, qu’il convient de conserver, sinon d’encourager.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Si nous ne donnons pas une base légale à la transmission des informations, nous sommes à peu près certains qu’il ne se passera rien nulle part. Je ne connais pas de communes où l’on crée spontanément un extranet afin que tout conseiller municipal puisse y déposer des documents. L’EPCI étant la famille du bloc communal, on part du principe que, désormais, le conseiller municipal non conseiller communautaire ne doit pas en connaître moins que le conseiller communautaire. C’est l’esprit de ce que nous souhaitons faire, qui n’est pas celui qui prévaut actuellement : on part en effet du principe qu’un conseiller municipal qui est conseiller communautaire a un second mandat.

Nous souhaitons, petit à petit, une convergence vers une forme d’égalité dans l’accès à l’information.

Par ailleurs, comme vous le soulignez, il existe une obligation de moyens de l’EPCI, non de résultats, par exemple un envoi avec accusé de réception. Il s’agit de montrer sa bonne foi. En cas de contentieux, l’EPCI n’aurait qu’à montrer qu’il a bien procédé à des envois par mail.

Je vous demande donc de retirer l’amendement. À défaut, j’y serai défavorable.

M. Arnaud Viala. Je suis d’accord avec ce que vous dites, monsieur le ministre. Imposons alors non pas l’envoi de documents, mais la création d’un intranet territorial, qui permette à chacun d’accéder aux éléments, sans contrevenir à l’idée qu’il existe des représentants. N’affaiblissons pas le conseiller communautaire au sein de son conseil municipal ; il est de son ressort de faire un rapport, aussi régulier que possible au conseil municipal, après une réunion du conseil communautaire.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Dans notre esprit, rendre les conseillers destinataires d’une information consiste à leur envoyer l’information, par mail ou courrier ou de leur envoyer des codes pour accéder à l’espace dédié. Mais nous pouvons expertiser ce point avec la direction générale des collectivités territoriales car notre objectif, vous vous en doutez bien, n’est pas de créer du contentieux, bien au contraire.

M. Arnaud Viala. Dans ces conditions, je retire cet amendement ainsi que le CL922.

Les amendements CL 921 et CL922 sont retirés.

Puis la Commission en vient à l’amendement CL107 de Mme Fannette Charvier. 

Mme Fannette Charvier. L’article 4 permet, par dérogation, aux communes qui en font la demande, de procéder elles-mêmes à l’envoi des documents liés aux délibérations de l’EPCI. Nous proposons de supprimer cette dérogation, de manière que la procédure soit claire et simple, et que l’information sur les délibérations de l’EPCI soit bien une prérogative de ce dernier.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il faut laisser les communes et les EPCI s’organiser comme ils l’entendent, parce qu’il est parfois plus facile de laisser telle ou telle commune gérer elle-même les envois à ses élus. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Le Sénat a introduit cette disposition, partant du principe qu’elle offrait de la souplesse aux exécutifs locaux. Elle peut néanmoins introduire, selon vous, de la confusion dans l’attribution de certaines prérogatives. Pour ma part, je me demande si on peut priver de base légale cette possibilité offerte aux communes, en particulier dans les très gros EPCI. Je m’en remets donc à la sagesse de la commission.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL986 de M. Sébastien Huyghe.

M. Sébastien Huyghe. L’objectif de ce texte est notamment de renforcer le caractère démocratique des EPCI. Dans la mesure où les délégations de compétences des communes aux EPCI se multiplient, je propose que les convocations, comptes rendus et autres documents émanant de l’EPCI soient adressés par courrier électronique à l’ensemble des électeurs de la commune, ce qui correspondrait à une version modernisée du principe de l’affichage.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement est déjà largement satisfait. Les sites Internet des communes et des intercommunalités ou l’abonnement à leurs lettres périodiques permettent de répondre à cette demande légitime d’information. Dans les faits, cela se pratique déjà beaucoup.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable. Je suis d’accord avec vous sur le fait qu’il faut remplacer l’affichage papier par une forme de mise à disposition plus moderne. Mais l’envoi par mail peut très vite provoquer un engorgement dans les collectivités les plus petites.

Cela étant, vous pourriez réfléchir pour la séance à l’idée d’une mise en ligne de ces documents ou à la possibilité de les consulter en mairie.

M. Thierry Benoit. Les présidents de communauté et les maires ont à cœur d’utiliser la dématérialisation pour vulgariser l’information, mais cet amendement ne ferait que compliquer la vie des élus locaux et de leur administration.

Nous devons être des acteurs de la simplification. Les élus locaux ont été traumatisés par les lois territoriales du dernier quinquennat, conçues en dépit du bon sens et qui n’ont fait que créer du désordre territorial. Je compte donc sur vous, monsieur le ministre, sur la majorité et sur l’ensemble des députés, pour remettre de l’ordre, du pragmatisme et de la simplification dans tout ça.

M. Erwan Balanant. Bien que je sois extrêmement favorable à ce que l’accès aux délibérations de l’EPCI soit simplifié, il ne me paraît pas pertinent de décider qu’un électeur doive se rendre en mairie pour y faire une demande d’envoi dématérialisé, comme le propose cet amendement. Il me semble que quasiment tous les EPCI ont désormais un site Internet et que l’on pourrait imaginer qu’il suffise de rendre obligatoire la publication sur ce site des décisions de l’ECPI.

M. Bruno Questel, rapporteur. C’est déjà le cas !

M. Sébastien Huyghe. Ainsi que me l’a suggéré le ministre, je vais retravailler cet amendement pour la séance, puisqu’il nous a plus ou moins fait la promesse d’un avis favorable sur le nouvel amendement.

Les amendements CL986 et CL985 sont retirés.

La Commission adopte l’article 4 modifié.

Après l’article 4

La Commission examine l’amendement CL826 de M. Jean-Félix Acquaviva.

M. Jean-Félix Acquaviva. Cet amendement vise à rendre systématique le compte rendu que les représentants de la commune à l’organe délibérant de l’EPCI font au conseil municipal.

M. Bruno Questel, rapporteur. Rien n’interdit aujourd’hui que le maire sollicite un conseiller communautaire pour qu’il fasse un compte rendu au conseil municipal. Au-delà d’un certain seuil, les communes ont même des obligations calendaires en la matière. Votre proposition imposerait trop de rigidité aux collectivités locales, dont nous souhaitons au contraire accroître la liberté. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour les mêmes raisons que le rapporteur. Il est très compliqué pour le législateur de définir ce qu’est la nature des débats au sein du conseil municipal. Il est toujours possible d’imposer quelques points à l’ordre du jour, et le juge a fini par établir quel était le minimum requis pour un débat d’orientation budgétaire, mais les élus restent libres d’organiser leurs débats comme ils l’entendent ; vous n’obligerez pas des élus à parler s’ils n’ont pas envie de parler.

M. Jean-Félix Acquaviva. Il ne s’agit pas de les obliger à parler, mais il y a là, selon moi, un impératif démocratique. Les représentants en question ont été élus par la commune, et le fait qu’ils aient été mandatés pour la représenter au sein de l’organe délibérant de l’EPCI leur confère un devoir de restitution. Cela devrait donc être le cas pour chaque réunion, et non de manière aléatoire.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Au risque de paraître un peu provocant, c’est comme si vous écriviez dans une loi organique que les députés s’engagent à se concerter avec leur suppléant et à leur rendre compte de leurs actions. Il faut admettre que la démocratie représentative passe aussi par l’autonomie et la responsabilité avec lesquelles chaque élu conduit son mandat.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL827 de M. Jean-Félix Acquaviva.

M. Jean-Félix Acquaviva. Dans le même esprit, nous proposons que ce compte rendu puisse être suivi d’un débat, le cas échéant.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Cet amendement est déjà satisfait. C’est donc une demande de retrait.

L’amendement est retiré.

Article 4 bis A
(art. L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales
Envoi des convocations aux conseils municipaux par voie dématérialisée

La Commission est saisie de l’amendement CL923 de M. Arnaud Viala.

M. Arnaud Viala. L’article 4 bis A, introduit par le Sénat, prévoit l’obligation de diffuser la convocation aux réunions de l’EPCI à l’ensemble des conseillers municipaux. Cette disposition ne va pas dans le sens de la libre administration des collectivités territoriales. Je propose donc la suppression de cet article. En effet, si on impose cette obligation aux EPCI, il faut l’imposer à tous les syndicats intercommunaux dans lesquels les communes sont représentées, ainsi qu’à toutes les structures où siègent des élus municipaux pour représenter les communes. Je ne vois pas ce que cela apporte en termes de démocratie locale.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit d’inverser la logique en faisant de l’envoi dématérialisé la norme et l’envoi par courrier l’exception, sans interférer dans la libre administration des collectivités territoriales. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. L’équilibre trouvé par le Sénat est un bon équilibre. Cette inversion entre le papier et le numérique est un principe de bon sens, et permet de répondre à nos exigences écologiques. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL1018 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 4 bis A modifié.

Après l’article 4 bis A

La Commission est saisie de l’amendement CL966 de M. Stéphane Baudu.

M. Stéphane Baudu. Il s’agit ici de renforcer l’information des conseillers municipaux qui ne sont pas conseillers communautaires. Se contenter d’envoyer sur les boîtes mail ou de stocker sur des plateformes accessibles grâce à un code les documents communautaires, souvent rédigés dans un jargon administratif, ne me paraît pas suffisant. Il me semble beaucoup plus efficace que les conseillers communautaires en fassent une restitution orale lors du conseil municipal, dans un esprit de synthèse et de pédagogie.

M. Bruno Questel, rapporteur. Systématiser le compte rendu oral à chaque réunion du conseil municipal risque de rigidifier les débats. Je vous rappelle que l’article L. 5211-39 du code général des collectivités territoriales oblige l’intercommunalité à produire un rapport annuel à destination de chaque commune.

Il n’est par ailleurs interdit nulle part dans ce même code d’aborder, lors de chaque conseil municipal, les questions liées à l’intercommunalité, qui peuvent être présentées par un adjoint délégué à l’intercommunalité, par exemple. Cela se passe déjà ainsi dans de nombreuses communes. Ce que vous proposez introduit de la complexité et de la rigidité dans le système. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Votre amendement fait état de chaque séance obligatoire du conseil municipal, ce qui est impropre. Par ailleurs, je partage l’avis du rapporteur selon lequel cet amendement rigidifie l’organisation au lieu de la simplifier. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Ménard. Les conseils communautaires sont publics ; rien n’empêche donc un conseiller municipal qui ne siège pas au conseil communautaire, s’il est intéressé par certains dossiers qui y sont traités, d’assister à une séance du conseil.

M. Thierry Benoit. J’ai siégé de 1989 à 2014 dans le conseil municipal d’une commune de 3 000 habitants, et j’ai toujours vu le maire organiser, lorsque cela était nécessaire, l’information des conseillers municipaux, proposant même des débats, le cas échéant. Un bon maire n’a pas besoin que le législateur l’inscrive dans la loi. Soyons des acteurs de la simplification, les mauvais élus qui n’ont pas compris le rôle de la commune ou celui de l’intercommunalité se feront naturellement remercier par la population. Il n’y a pas besoin de complexifier le droit.

M. Rémy Rebeyrotte. Cet amendement, qu’il faut sans doute rédiger autrement, me paraît intéressant. En effet, au-delà de l’information individuelle de chaque conseiller municipal par la transmission de l’ordre du jour et du compte rendu des séances du conseil communautaire, il me paraît utile de prévoir un débat sur l’actualité communautaire. En effet, nombre de problèmes que nous rencontrons dans les collectivités locales viennent du fait que l’étanchéité est complète entre la commune et l’intercommunalité. Cela débouche sur des malentendus, qui peuvent alimenter la rancœur des acteurs communaux vis-à-vis d’une intercommunalité dont on dénonce l’opacité dans les décisions.

Tout ce qui peut faciliter l’information et l’échange sera donc le bienvenu, et je ne parle pas ici de rapports, car les élus municipaux sont déjà destinataires d’une quinzaine de rapports par an, que personne ne lit jamais. Il faut, au contraire, faire vivre le débat interne sur les orientations et les enjeux de l’intercommunalité.

La Commission rejette l’amendement.

Article 4 bis
(art. L. 3633-5 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Information des conseillers municipaux des communes situées sur le territoire de la métropole de Lyon

La Commission est saisie de l’amendement CL219 de Thomas Rudigoz.

M. Thomas Rudigoz. L’article 4 bis a été ajouté par le Sénat, sous l’impulsion de l’ensemble des sénateurs du Rhône. La métropole de Lyon est désormais une collectivité à part entière, mais son cas n’avait pas été prévu dans le texte originel. Il a donc été précisé que, par parallélisme des formes, les conseillers municipaux des communes situées sur le territoire de la métropole de Lyon bénéficieraient du même régime d’information que les élus municipaux des autres intercommunalités. J’irai cependant encore plus loin qu’eux et souhaite que les conseillers municipaux des communes de la métropole n’aient pas à demander mais soient systématiquement destinataires d’une copie des convocations, comme cela a été décidé, à l’article 4 pour les conseillers municipaux des communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale.

M. Bruno Questel, rapporteur. C’est cohérent Avis favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je ne peux, pour ma part, être favorable à cet amendement, pour une raison qui tient à la spécificité lyonnaise, puisque la métropole est une collectivité territoriale : or il est constitutionnellement impossible qu’une collectivité territoriale exerce sa tutelle sur une autre, ce qui avait peut-être échappé à ceux qui ont créé la métropole. Dès lors, donc, que la métropole a son identité propre, qu’elle n’est pas un établissement public, les communes du territoire métropolitain lyonnais ne sont pas adhérentes à la métropole ; cela justifie la rédaction proposée par les sénateurs, laquelle évite l’injonction – inconstitutionnelle – que vous proposez. C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de votre amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL1019 et CL1020 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 4 bis modifié.

Après l’article 4 bis

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL303 de M. Yannick Haury, CL1080 de M. Daniel Labaronne, CL876 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier et CL1071 de M. Sacha Houlié.

M. Yannick Haury. Cet amendement reprend une demande des maires de territoires ruraux, qui souhaiteraient avoir la possibilité d’organiser des réunions par visioconférence, dans des intercommunalités qui sont de plus en plus étendues. Lors de son audition en commission du développement durable, la ministre Jacqueline Gourault s’est déclarée favorable à cette disposition, qui existe déjà en Polynésie française. Elle mériterait néanmoins d’être encadrée. Aussi proposons-nous d’exclure l’usage de la visioconférence pour la discussion du budget.

M. Daniel Labaronne. Cet amendement vise à donner un cadre légal à la participation aux instances communautaires par visioconférence, pour permettre aux élus les plus éloignés des centres de participer aux réunions intercommunales, tout en rendant obligatoire le quorum en présentiel.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. L’amendement CL876 a pour objet de permettre l’organisation de conseils communautaires par téléconférence dans les communautés de communes et les communautés d’agglomération. La réunion d’organes délibérants de collectivités locales ou de groupements par téléconférence est aujourd’hui uniquement possible pour certaines communes de la Polynésie française, en application de l’article L. 2573-5 du code général des collectivités territoriales. Or, les distances parfois importantes et les intempéries, notamment en période hivernale, peuvent rendre difficile, pour les élus, l’accès au lieu de réunion du conseil communautaire. La possibilité de recours à la téléconférence évitera donc aux conseillers communautaires des déplacements parfois longs et facilitera l’exercice de leur mandat. De même que pour les communes de la Polynésie française, l’amendement entoure de garanties la possibilité de recours à la téléconférence. Ses modalités d’application devront être précisées par un décret en Conseil d’État, à l’instar du décret du 21 août 2018 s’agissant des communes de la Polynésie française. À titre d’exemple, en Lozère, il faut deux heures pour se rendre du Collet-de-Dèze à Florac, ce qui a fini par dissuader les conseillers communautaires de se rendre aux réunions. C’est l’un des effets malheureux de la loi NOTRe, qui n’a pas tenu compte des bassins d’emploi et de la géographie des vallées cévenoles.

M. Sacha Houlié. Il s’agit de permettre l’organisation des conseils communautaires par téléconférence, au nom des arguments qui viennent d’être présentés. Cet amendement est le fruit de discussions avec des élus locaux et des travaux de l’association La République ensemble, rattachée à la République en Marche. Il diffère des précédents par sa rédaction, à laquelle je vous invite à vous rallier.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable sur l’amendement CL1071, car sa rédaction me semble en effet la plus aboutie.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis. Cette disposition, déjà expérimentée en Polynésie française, doit être étendue tout en étant encadrée et exclue pour les procédures dont M. Houlié dresse la liste dans son amendement. Si cela fonctionne, rien n’empêchera de généraliser la mesure par la suite.

Les amendements CL303, CL1080 et CL876 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CL1071.

Elle en vient ensuite à l’amendement CL897 de M. Éric Diard.

M. Éric Diard. À des fins d’équité entre la métropole de Lyon et celle d’Aix-Marseille Provence, cet amendement propose de donner la possibilité à tous les conseillers municipaux des communes de la métropole d’Aix-Marseille Provence de recevoir sous forme dématérialisée, au même titre que les conseillers métropolitains, les convocations, l’ordre du jour et les rapports concernant les affaires qui seront discutées au conseil de métropole.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous invite à retirer cet amendement et à vous rapprocher du Gouvernement pour travailler sur un vrai statut des métropoles, en vue de la future loi « 3D » – décentralisation, différenciation, déconcentration.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. On ne peut pas faire l’analogie entre la métropole de Lyon, qui est une collectivité territoriale, et Aix-Marseille, qui n’en est pas une. En revanche, il faudra évidemment traiter cette question dans le titre métropolitain du projet de loi proposé l’année prochaine. C’est donc également une demande de retrait.

L’amendement est retiré.

Chapitre II
Le pacte des compétences : permettre aux élus locaux de s’accorder sur ce que doit faire ou non leur EPCI

Avant l’article 5 A

La Commission est saisie de l’amendement CL668 de M. Vincent Bru.

M. Vincent Bru. Il s’agit d’un amendement rédactionnel qui vise à améliorer l’intitulé du chapitre II, que je propose de rédiger ainsi : « Le pacte des compétences : permettre aux élus locaux de s’accorder sur les compétences de leur EPCI ».

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. L’intitulé du chapitre II est ainsi rédigé.

Article 5 A (art. L. 5211-17-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales, art. 1636 B octies du code général des impôts) : Transfert « à la carte » de compétences facultatives à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre

La Commission examine les amendements identiques CL669 de M. Vincent Bru, CL743 de M. Rémy Rebeyrotte, CL828 de M. Charles de Courson, CL880 de M. Pascal Brindeau, CL1051 de M. Sacha Houlié, CL1106 de M. Stéphane Baudu.

M. Vincent Bru. Par notre amendement, nous souhaitons supprimer le transfert à la carte des compétences facultatives aux EPCI. C’est une chose qui était admissible dans le cadre, par exemple, des syndicats intercommunaux à vocations multiples (SIVOM), mais nous estimons que, dans les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, il n’y a pas de place pour des compétences facultatives. Le fait qu’un EPIC à fiscalité propre lève l’impôt de manière uniforme sur le territoire alors qu’il n’exerce pas les mêmes compétences d’un bout à l’autre de ce territoire poserait d’ailleurs un problème juridique. Cela pourrait également remettre en cause l’esprit de solidarité communautaire. Nous souhaitons donc la suppression de l’article 5 A.

M. Charles de Courson. Nous avions inventé les syndicats à la carte, les sénateurs, eux, viennent d’inventer les intercommunalités à fiscalité propre à la carte ! Reste à comprendre comment ils résolvent le problème de l’égalité des citoyens devant les compétences de l’intercommunalité. Si on pousse leur logique jusqu’au bout, il faudrait mettre en place une modulation des taux selon les communes… Sans parler de la possibilité de rétrocéder ces compétences à certaines communes : c’est le bazar institutionnalisé ; à croire que nos collègues du Sénat avaient fumé la moquette la nuit où ils ont adopté cet article ! C’est un article indéfendable constitutionnellement, et nous y sommes évidemment opposés.

M. Pascal Brindeau. Depuis la loi Chevènement, le cadre des compétences de l’intercommunalité a eu le temps de se préciser. La logique intégratrice de l’intercommunalité s’est approfondie pour atteindre le meilleur équilibre possible entre les compétences stratégiques pour le développement économique du territoire et les compétences optionnelles ou facultatives, qui permettent, selon le principe de subsidiarité, à une intercommunalité de conduire des politiques publiques ou d’organiser des services à la population plus efficacement que ne le feraient les seules communes. Si on commence à déstructurer cette logique là, on va encourager, par réaction identitaire, le retour de certaines compétences aux communes, ce qui est incohérent.

M. Sacha Houlié. La construction qu’on tenté les sénateurs avec les articles 5 A à 5 D est incomplète et bancale. Ils ont en effet voulu introduire dans le texte un transfert à la carte des compétences facultatives, puis une procédure de restitution des compétences ainsi qu’une procédure de suppression des compétences optionnelles. Mais les sénateurs se sont autocensurés en revenant sur la création de l’article 5 C qui concernait la neutralité financière, ce qui fait qu’au bout du compte la nouvelle architecture des compétences qu’ils ont imaginé pose un grave problème : en effet, avec leur système, les communes qui étaient parvenues à un équilibre entre les compétences qu’elles conservaient et celles qu’elles avaient transférées auraient vu leurs dotation baisser, tandis que celles qui modifiaient leur position, soit en récupérant des compétences, soit en en abandonnant, y gagnaient progressivement.

Tout cela est incohérent, et c’est la raison pour laquelle, à ce stade, nous proposons la suppression de ces articles. Cela étant, il ne faut pas écarter l’idée de la différenciation intracommunautaire. Je pense en particulier à la mise en place de la réforme des rythmes scolaires, puisque, dans certains EPCI, chaque commune possédait son école, tandis que d’autres fonctionnaient avec des regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI), et que les temps d’activités périscolaires (TAP) pouvaient relever de la compétence communale ou intercommunale, ce qui a entraîné un certain nombre de crispations. Il me semble donc que d’ici à la séance, nous pourrions réfléchir à un moyen d’organiser cette différenciation intracommunautaire.

M. Stéphane Baudu. Nous souhaitons la suppression de l’article 5 A, qui remet en cause le principe même de l’intercommunalité.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je n’ai pas souhaité déposer moi-même d’amendement de suppression sur cet article pour qu’il soit clair aux yeux de nos collègues sénateurs que c’était une démarche de la majorité des groupes de l’Assemblée nationale, soucieux de préserver la philosophie originelle de l’intercommunalité, telle que l’avait imaginée Jean-Pierre Chevènement en 1992. J’y suis néanmoins évidemment favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. J’étais au Sénat lors des débats, et j’ai le sentiment que les sénateurs, lorsqu’ils ont voté ces dispositions, ont assumé une forme d’aventure, qui procédait surtout du désir d’en finir avec l’intercommunalité telle que nous la connaissons depuis la loi NOTRe, ce qui, en soi, peut légitimement s’entendre et justifier la mise en place d’outils de correction.

Une question se pose sur le plan de l’égalité constitutionnelle – vous l’avez dit – et il y a aussi le grand chambardement potentiel en ce qui concerne le coefficient d’intégration fiscale (CIF), les attributions de compensation et le calcul des dotations d’intercommunalité. L’idée est sympathique, comme tout ce qui donne de la liberté, de prime abord, et le concept est bien « marketé », mais quand on regarde quel est l’atterrissage sur le plan juridique et financier, on voit qu’on va faire pire qu’avant, en réalité, malgré de bonnes intentions. Il faut traiter la question de l’eau et de l’assainissement pour des raisons écologiques, mais je ne reviens pas sur ce sujet car nous en avons déjà parlé hier soir.

Par ailleurs, nous avons arrêté la course au CIF inversé : il y a finalement eu au Sénat ce que M. Houlié a appelé une autocensure.

Le troisième acte a été l’introduction d’une délégation en matière d’eau et d’assainissement. Il y a aussi des questions sur les « délégations ascendantes », mais nous y pourrons y revenir plus tard.

On peut ensuite s’interroger sur le nombre des compétences optionnelles dès lors que l’eau et l’assainissement passent du côté des compétences obligatoires : c’est un autre point sur lequel on peut travailler – des amendements ont été déposés sur ce sujet.

Au-delà, il peut être sympathique de dire que l’intercommunalité doit être à la carte quand on fait un discours devant le Congrès des maires, mais il faut finir ses phrases en ce qui concerne les aspects juridiques et financiers. À ce moment-là, les applaudissements seront plus rares, à mon avis : on va commencer à comprendre de quoi il retourne.

J’émets un avis favorable aux amendements de suppression. Le dispositif d’intercommunalité à la carte, tel qu’il a été adopté par le Sénat, n’est pas opérationnel sur le plan juridique.

M. Raphaël Schellenberger. Je peux entendre l’idée que cet article du projet de loi est une tentative d’expérimentation dont le Sénat n’a pas nécessairement mesuré toutes les implications techniques, notamment en matière fiscale ou budgétaire.

Attention, tout de même, à ne pas utiliser des arguments qui entrent en contradiction avec la réalité des compétences facultatives à l’heure actuelle : la notion d’intérêt communautaire permet, grosso modo, de transférer à la carte à peu près n’importe quoi, y compris d’une façon segmentée sur le plan territorial – c’est le cas, par exemple, en matière d’équipement. On peut faire beaucoup de choses.

L’innovation qui nous est proposée concerne l’accompagnement financier : on pourra utiliser des fractions d’impôts locaux. Je pense notamment aux EPCI qui ont depuis longtemps instauré une fiscalité professionnelle unique (FPU) et qui ont des systèmes d’attribution de compensation.

Je peux comprendre que ces dispositions soient considérées comme aventureuses, mais il n’y a pas d’innovation complète par rapport à la manière dont on a construit l’intercommunalité jusqu’à présent. Ce n’est pas disruptif : on reste dans le même esprit. Il existera simplement une possibilité de plus pour l’accompagnement financier du transfert de compétence.

Mme Émilie Chalas. Je crois que nos collègues du Sénat, malgré tout le respect que j’ai pour eux, ont sérieusement manqué de lucidité. Il faut regarder la marche de l’histoire en ce qui concerne l’organisation des territoires et la mise en œuvre des politiques publiques à leur service mais aussi, et surtout, au service des habitants. Ce que les sénateurs ont prévu nous dérange tous – je me réjouis de l’unanimité au sein de notre commission sur ce point – et à tous les niveaux, qu’il s’agisse des métropoles, des agglomérations ou des communautés de communes.

Oui, il est difficile de définir l’intérêt communautaire, monsieur Schellenberger, et de trouver des ententes transpartisanes au bénéfice des habitants. Je crois vraiment que le pacte de gouvernance, même s’il n’est pas obligatoire aujourd’hui – et il ne le deviendra probablement pas demain – est un outil de gouvernance au service des territoires et des habitants. Il faut réaliser, dans un esprit de responsabilité politique, des efforts transpartisans, on doit nouer des alliances et prendre des décisions collectives dans l’intérêt des administrés et des territoires.

Je me réjouis que nous corrigions ensemble ce qui était un égarement de la part des sénateurs.

M. Rémy Rebeyrotte. Mme Gourault a parlé hier de la nécessité d’un équilibre. Je crois que nous sommes précisément en train de le rétablir, et je voudrais en remercier le rapporteur et le ministre.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 5 A est supprimé et l’amendement CL594 de M. Robin Reda tombe.

Article 5 B
(art. L. 5211-17-2 [nouveau] et L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, art. 85 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006)
Procédure de restitution de compétences par un établissement public de coopération intercommunale à ses communes membres

La Commission examine les amendements identiques CL1158 du rapporteur et CL1052 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. Mon amendement tend à supprimer l’alinéa 5. Il n’est pas souhaitable qu’un EPCI détermine seul le coût, sans débat avec les communes qui reprendront les compétences et sans avis de la CLECT – commission locale d’évaluation des charges transférées. En cas de restitution de compétences, il convient également de laisser les communes et les EPCI à fiscalité additionnelle décider eux-mêmes quelle sera l’évolution des taux de la fiscalité directe locale. On ne doit pas prévoir une correction automatique – elle serait difficile à appliquer.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’article 5 B modifié.

Article 5 D
(art. L. 5211-41-3, L. 5214-1, L. 5214-16, L. 5214-16-2, L. 5216-5, L. 5216-7, L. 5812-1, L. 5814-1 et L. 5842-22 du code général des collectivités territoriales)
Suppression de la catégorie des compétences optionnelles dans les communautés de communes et les communautés d’agglomération

La Commission examine les amendements identiques CL1159 du rapporteur, CL670 de M. Vincent Bru, CL871 de M. Pascal Brindeau, CL1044 de M. Sacha Houlié et CL1107 de Mme Anne Blanc.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vais laisser mes collègues défendre ces amendements identiques.

M. Vincent Bru. L’amendement CL670 vise à rétablir les compétences optionnelles des EPCI à fiscalité propre qui ont été supprimées en première lecture par le Sénat, ce qui permettra d’assurer la stabilité de la construction intercommunale.

Par ailleurs, lorsque la loi rend obligatoire une compétence qui était jusque-là optionnelle, je pense qu’il serait opportun de supprimer l’obligation de transférer à l’EPCI une nouvelle compétence afin de respecter le nombre minimal de compétences optionnelles qui est imposé. Il faudra introduire un peu plus de souplesse.

M. Pascal Brindeau. L’amendement CL871 a pour objet de préserver l’équilibre que nous avons adopté depuis la loi Chevènement. Les compétences optionnelles permettent de mener des politiques et de fournir des services à la population. Il serait dommage d’encourager, en supprimant ces compétences, un retour à un niveau infracommunautaire.

M. Sacha Houlié. Je considère que l’amendement CL1044 est défendu compte tenu de la présentation globale que j’ai faite précédemment.

Mme Anne Blanc. J’ai déposé l’amendement CL1107 pour les mêmes raisons.

Il pouvait sembler intéressant, dans une logique de simplification, de supprimer les compétences optionnelles, mais il faut aussi prendre en compte l’enjeu des services rendus à la population.

D’autre part, il va falloir trouver une solution pour ne pas rendre obligatoire l’intégration de nouvelles compétences compte tenu des évolutions qui auront lieu en matière d’eau et d’assainissement – ces compétences deviendront obligatoires au niveau intercommunal.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. J’émets un avis favorable à ces amendements.

M. Raphaël Schellenberger. Si on est un peu de bonne foi, on ne peut qu’être favorable à la suppression de l’article 5 D, car il n’est pas opérationnel à ce stade. Il aurait un impact sur la construction de la DGF et sur l’idée même que l’on peut avoir du soutien financier qu’il faut apporter aux intercommunalités.

La réflexion qui a été engagée dans le cadre de cet article est néanmoins essentielle. L’intercommunalité est devenue beaucoup trop complexe en matière de compétences et sur le plan financier. Sans faire de « grand soir », on doit faciliter la compréhension des aspects techniques et juridiques de la situation. Je suis donc très favorable à une simplification des catégories de compétences et à l’attribution d’une plus grande liberté aux maires et aux exécutifs intercommunaux pour définir l’objet des intercommunalités, c’est-à-dire les compétences exercées dans ce cadre.

Les dispositions adoptées par le Sénat ne sont pas suffisamment abouties : nous ne pouvons donc pas les conserver. J’espère néanmoins que nous pourrons supprimer la distinction, inutile, entre les différentes catégories de compétences dans le cadre du projet de loi « 3D » et de nos prochaines discussions sur l’évolution de l’intercommunalité.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 5 D est supprimé et les amendements CL497 de M. Lionel Causse, CL1000 et CL1007 de M. Stéphane Baudu tombent.

Article 5
(art. 64 et 66 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, art. 1er de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes)
Suppression du transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes et d’agglomération

La Commission examine en discussion commune les amendements identiques CL170 de la commission du développement durable, CL671 de M. Erwan Balanant et CL1042 de M. Sacha Houlié, ainsi que les amendements CL1114 de M. Stéphane Baudu, CL280, CL281, CL282 et CL286 de M. Joël Giraud.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. L’article 5 est important et symbolique. Si la commission du développement durable a souhaité se saisir pour avis des dispositions relatives aux compétences en matière d’eau et d’assainissement c’est parce qu’elles présentent des enjeux environnementaux majeurs.

Deux questions se posent. Peut-on, aujourd’hui, prétendre avoir une bonne gestion de l’eau à l’échelle d’une commune ? D’un autre côté, peut-on imposer un mode de fonctionnement intercommunal alors qu’il existe des solutions locales permettant de fournir des services de qualité ? Jusqu’à présent, les réponses qui ont été apportées sur le plan législatif me paraissent un peu binaires : elles tendent, malgré quelques éléments de souplesse, à tout donner à l’intercommunalité ou à la commune.

Le projet de loi, dans sa rédaction initiale, suivait une approche beaucoup plus en phase avec les réalités de terrain. La question de l’eau et de l’assainissement ne peut être gérée que dans le cadre d’une vision intercommunale. La question n’est pas seulement politique mais aussi technique : nous savons tous que les enjeux de l’eau et de l’assainissement dépassent les limites communales. Cependant, comment prendre en compte les cas où la gestion de l’eau et de l’assainissement peut avoir lieu d’une manière mieux adaptée, permettant de répondre plus rapidement aux besoins, au niveau des communes ?

L’amendement CL170 permettra de déléguer la compétence à une commune ou à des syndicats préexistants dans le cadre d’une convention. Nous pourrons ainsi trouver des solutions localement. Les communes pourront agir quand c’est possible et nécessaire, mais les intercommunalités disposeront d’un pouvoir de régulation.

M. Erwan Balanant. Notre amendement CL671, identique au précédent, est issu d’un travail mené avec les élus locaux. Comme le ministre l’a dit hier, on voit dans beaucoup de territoires que l’eau et l’assainissement sont des enjeux extrêmement importants pour les années à venir. Dans certains cas, c’est même une condition du développement économique.

Notre idée est assez simple : on laissera à l’intercommunalité la vision d’ensemble et le projet politique, mais en introduisant dans le dispositif un élément de souplesse qui est demandé par les élus, par exemple au sujet des eaux pluviales – c’est le cas dans mon territoire. Il y a souvent un lien dans ce domaine avec les travaux de voirie. Or il est extrêmement compliqué pour les intercommunalités de gérer des travaux de proximité.

La possibilité de déléguer les compétences permettra de répondre aux deux enjeux auquel nous sommes confrontés : celui de l’opérationnalité et celui de la vision stratégique dont les territoires doivent se doter pour avancer.

Mme Émilie Chalas. Cela fait plus de vingt ans que la dynamique de transfert de compétences des communes vers les intercommunalités s’est enclenchée et que l’on se déchire à propos de la question des échelons qui sont pertinents.

Je suis convaincue, pour avoir été la rapporteure de la proposition de loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes, en 2018, que cette dynamique est légitime et nécessaire : elle permet de répondre à des défis techniques et budgétaires que l’on ne peut plus ignorer compte tenu des taux de fuite, et donc de perte, d’eau potable et des défauts d’investissement – la question concerne surtout les engagements pour demain.

Sans reprendre tous les débats que nous avons eus en 2018, je voudrais rappeler que nous avons mené un travail riche et très intéressant qui a déjà permis d’assouplir le dispositif prévu par la loi NOTRe. L’amendement CL1042 vise à assouplir encore la situation, mais nous serons évidemment les gardiens de l’ambition initiale, qui est de transférer la gestion de l’eau et de l’assainissement aux intercommunalités.

J’entends bien ce qu’a dit le rapporteur pour avis, avec qui j’ai eu beaucoup d’échanges l’année dernière. Je respecte tout à fait le regard qu’il porte sur cette question, qui est très technique, et son expérience de terrain. L’histoire montrera, à mon avis, que la seule réponse possible à terme, financièrement et techniquement, est à l’échelle intercommunale. Je suis heureuse que nous puissions nous rejoindre autour d’une proposition de compromis.

Mme Anne Blanc. J’ose espérer qu’il n’y a plus un élu qui ne considère pas l’eau comme un enjeu majeur pour l’avenir de notre société. Le souhait de transférer les compétences en matière d’eau et d’assainissement aux intercommunalités va tout à fait dans ce sens. C’est une question de cohérence en matière de gestion. Même si certaines communes gèrent correctement ces compétences, nous devons avoir une démarche beaucoup plus large, compte tenu des enjeux, notamment sanitaires et quantitatifs, qui existent.

L’amendement CL1114 va dans le même sens que les dispositions proposées par le Gouvernement au Sénat. Nous donnerons la possibilité de déléguer à un syndicat de communes – il arrive que ces questions soient traitées dans ce cadre à l’heure actuelle – la gestion des compétences en matière d’eau et d’assainissement pour le compte de l’intercommunalité.

Mme Frédérique Lardet. L’amendement CL280 permettra de reporter au 1er janvier 2026 le transfert des compétences en matière d’eau et d’assainissement pour les communes appartenant à des communautés d’agglomération de petite taille dont une grande partie des communes sont dites rurales.

L’amendement CL281 est identique au précédent à une nuance près : il concerne les communes faiblement peuplées.

À titre de repli, l’amendement CL282 permettra seulement un report de la compétence en matière d’eau pour les communes appartenant à des communautés d’agglomération de petite taille.

L’amendement CL286 vise à consacrer sur le plan législatif le droit à la différenciation intraterritoriale dans l’exercice d’une compétence par un EPCI : il s’agit de permettre des modes de gestion distincts dans un même périmètre communautaire.

M. Bruno Questel, rapporteur. J’émets un avis favorable aux amendements CL170, CL671 et CL1042, qui visent à rétablir deux assouplissements prévus par le projet de loi initial.

Tout d’abord, ces amendements faciliteront la mise en œuvre de la minorité de blocage qui permet de décaler, au plus tard au 1er janvier 2026, le transfert des compétences relatives à l’eau et l’assainissement aux communautés de communes.

Ils rétablissent également un mécanisme de délégation de tout ou partie des compétences en matière d’eau et d’assainissement au profit de communes membres d’une communauté de communes ou d’une communauté d’agglomération, par dérogation au droit commun des délégations de compétences prévu par le code général des collectivités territoriales.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je me suis déjà longuement exprimé sur les questions d’eau et d’assainissement hier soir, lors de la discussion générale. J’émets un avis favorable aux amendements CL170, CL671 et CL1042. Je demande le retrait des autres amendements en discussion commune.

M. Jean-Félix Acquaviva. Vous ne serez pas surpris que je soutienne, en tant qu’élu de montagne, les amendements CL280, CL281, CL282 et CL286.

Au-delà des questions spécifiquement liées à la ruralité, à la montagne et aux zones faiblement peuplées, il y a un problème de fond : j’ai l’impression que l’on mélange la définition de la politique de l’eau et les investissements ou la gestion de la ressource.

Je suis tenté de dire que la définition stratégique de la politique de l’eau, notamment les règlements relatifs aux aides destinées aux communes et aux intercommunalités pour favoriser les investissements, n’est pas du niveau communal ou intercommunal, mais départemental voire régional, et qu’on doit faire le lien avec le futur projet de loi 3D. Dans ma circonscription, la politique de l’eau est définie par la collectivité territoriale de Corse. Les maîtres d’ouvrage doivent s’inscrire dans les schémas élaborés dans ce cadre.

Quand on parle de la gestion de la ressource, il faut faire le lien avec le bassin hydrographique, et non avec le bassin de vie. C’est aux contraintes topographiques, aux liens sociologiques et au potentiel en matière de ressource qu’on doit penser. Cela signifie que l’on doit avoir une vision différenciée, ou territorialisée, et qu’il ne faut pas chercher à normaliser. Systématiser le transfert de compétence aux intercommunalités, en laissant la possibilité d’une délégation aux communes, reviendrait à faire fi des différences territoriales.

On peut approfondir cette question dans le cadre des amendements de M. Giraud, en guise de pis-aller, mais je pense que tout cela relève surtout du projet de loi 3D. Nous sommes très déterminés à ne pas nous arrêter au milieu du gué, par exemple au nom du compromis qu’il faudrait trouver avec le Sénat. Évitons les situations de terrain totalement ingérables.

Mme Émilie Chalas. Je voudrais revenir sur les amendements déposés par M. Giraud. Nous avons déjà eu de nombreux échanges sur cette question l’année dernière. Si nous n’avons pas prévu de dispositif de minorité de blocage dans le cadre des communautés d’agglomération, c’est pour deux raisons. Tout d’abord, il y a la question du seuil : qu’est-ce qu’une petite agglomération ? Ce n’est pas défini aujourd’hui en droit. Ensuite, les « petites agglomérations » ont demandé à avoir leur statut actuel en raison des avantages et des responsabilités que cela leur permettait d’obtenir, et elles doivent aujourd’hui assumer intégralement ce que cela implique.

M. Raphaël Schellenberger. Il y a une forme de comique de répétition dans cette affaire : on discute maintenant chaque année de ces compétences.

J’ajoute que tout cela résulte d’un amendement introduit nuitamment lors des débats relatifs à la loi NOTRe, sans aucune évaluation d’impact, alors qu’il en résulte un bouleversement pour la construction de l’intercommunalité dans notre pays.

La solution qui nous est proposée est meilleure que celle que nous avons examinée la dernière fois, je le reconnais. Néanmoins, vous ne vous inscrivez pas dans le principe de liberté qui est prôné au début du texte. J’entends bien que la liberté peut souffrir d’un certain nombre de restrictions, plus ou moins importantes, et qu’il faut prendre en compte la question de l’écologie. Néanmoins, je voudrais appeler l’attention sur le fait que l’on considère de plus en plus souvent que cela justifie de remettre en cause des libertés : c’est tout à fait compréhensible en matière de collectivités territoriales, mais il y a aussi un discours de plus en plus véhément qui concerne d’autres libertés, individuelles, auxquelles nous sommes particulièrement attachés.

Je pense que ce dispositif est meilleur que celui que la majorité a adopté il y a quelques mois, je l’ai dit, mais qu’il n’est pas aussi bon que pourrait l’être un régime de liberté. Celui-ci se traduit par un mode d’organisation qui est départemental dans certains cas, notamment dans le Bas-Rhin, communal ailleurs – et cela marche très bien – ou intercommunal, par exemple dans le territoire dont je suis issu. Parfois, l’eau est même la compétence autour de laquelle l’intercommunalité s’est construite. Le régime de liberté a démontré son efficacité, et je pense qu’on peut aussi faire confiance à l’esprit de responsabilité des élus en ce qui concerne l’eau.

 M. Pascal Brindeau. Je souscris globalement à l’idée que les politiques de l’eau et de l’assainissement – je pense surtout à celle de l’eau potable – doivent être menées à l’échelle intercommunale pour des raisons de solidarité et d’efficacité. Je partage aussi l’idée, parce que c’est un sujet qui a suscité beaucoup de crispations chez les élus locaux, qu’il faut adopter un dispositif plus souple qui doit permettre de redéléguer éventuellement une partie de la compétence à une commune ou à un syndicat de communes.

Cependant, je voudrais qu’on soit clair et qu’on sache bien de quoi on parle quand il est question de conventions de délégation – je serais heureux d’entendre les auteurs des amendements et le ministre sur ce sujet. Est-on bien d’accord sur le fait que c’est l’intercommunalité qui garde la main en matière stratégique et politique ? Par ailleurs, si on doit créer un budget annexe au niveau d’une commune ou d’un syndicat de communes, est-on dans une logique de délégation de service public selon laquelle l’EPCI donne une rémunération à la commune ou au syndicat de communes pour gérer la compétence comme il l’a déterminé ou, au contraire, dans une logique beaucoup plus délégative ou redélégante, si je puis dire, qui consisterait à confier la maîtrise totale de la politique de l’eau à l’échelon infracommunautaire ? Ce serait alors l’antithèse de ce qu’on essaie de construire. J’aimerais avoir quelques précisions.

M. Rémy Rebeyrotte. Je comprends ce qu’a dit M. Schellenberger mais il faut aussi rappeler ce qui était prévu au préalable, à savoir un transfert obligatoire et automatique au 1er janvier 2020.

Il y a eu une première étape au cours de laquelle on a essayé de desserrer la contrainte afin d’apporter une réponse aux maires. Il est vrai ce que ce n’était pas satisfaisant : le report du transfert à 2026 signifie concrètement que l’on prend le risque qu’il n’y ait pas, ou peu, d’investissement au cours du prochain mandat.

La solution qui est proposée aujourd’hui permettra enfin d’avancer : on pourra réaliser des travaux et investir d’une manière pragmatique, soit directement dans un cadre intercommunal, soit dans les structures préexistantes, grâce à des dérogations, soit éventuellement dans des structures plus importantes. Il y aura donc vraiment de la souplesse et de la liberté en ce qui concerne les modes d’organisation.

Il faut également retrouver de l’efficacité. Le ministre a rappelé qu’il y a urgence à agir et à investir afin de corriger la situation, notamment en ce qui concerne l’eau potable mais aussi en matière d’assainissement. On doit améliorer la qualité et éviter de gaspiller des ressources rares comme c’est le cas aujourd’hui.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. J’ai terminé ma présentation en disant que l’intercommunalité doit garder un pouvoir de régulation. Elle doit avoir, dans tous les cas, une vision globale, et c’est pourquoi une convention est prévue. Elle devra faire l’objet d’un suivi.

Je voudrais également dire, à l’attention des élus intercommunaux qui nous regardent ou qui liront le compte rendu, qu’ils auront une part de responsabilité dans la façon dont la délégation sera mise en œuvre dans les communes. On a l’impression que certaines délégations de service public sont en réalité des abandons. Il y aura une responsabilité partagée, et l’intercommunalité devra jouer un rôle important.

Je tiens vraiment à m’inscrire en faux contre l’idée que l’écologie conduirait à une privation de liberté. Comme M. Rebeyrotte l’a bien expliqué, nous allons donner plus de liberté tout en permettant d’avoir une vision globale.

Lorsqu’il y a une opposition au transfert de compétences, les raisons ne sont pas écologiques, dans la majorité des cas, mais politiques ou financières. Aucun maire ne m’a dit que sa gestion en matière d’eau et d’investissement, à l’échelle de sa commune, est forcément meilleure qu’au niveau intercommunal. Les raisons de l’opposition sont autres.

M. Erwan Balanant. Je voudrais revenir sur un sujet dont on parle moins : celui des eaux pluviales. Cela permettra peut-être de répondre, en partie, aux interrogations ou aux suspicions de M. Schellenberger.

La question des eaux pluviales est extrêmement importante dans certains territoires et certains bassins-versants qui peuvent être soumis à des inondations. Il est nécessaire d’avoir une vision globale au niveau de l’intercommunalité ou du bassin-versant. Des schémas ou des cahiers des charges sont adoptés pour essayer de ralentir l’arrivée de l’eau à la rivière, par exemple, mais la situation est extrêmement compliquée pour les intercommunalités car elles n’ont pas nécessairement de compétence en matière de voirie – elles ne peuvent pas mettre la main dans le bitume, si je puis dire, pour réaliser des équipements.

L’amendement que je vous propose permettra d’avoir des schémas directeurs ou des cahiers des charges que les communes devront appliquer dans l’exercice de leurs compétences en matière de voirie. Nous aboutirons ainsi à davantage d’opérationnalité. Dans la situation actuelle, certains territoires vont continuer à avoir du mal à mettre en place des schémas de gestion des eaux pluviales.

Mme Anne Blanc. J’aimerais savoir, monsieur le ministre, pourquoi vous demandez le retrait de l’amendement CL1114 : il me semble qu’il va tout à fait dans le sens que nous souhaitons majoritairement. Il comporte notamment des précisions au sujet des syndicats de communes.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vous propose simplement de retirer cet amendement au profit des autres. Ce n’est pas parce que je le trouve, sur le fond, inopportun.

La Commission adopte les amendements identiques CL170, CL671 et CL1042.

L’article 5 est ainsi rédigé.

En conséquence, les amendements CL1114, CL280, CL281, CL282 et CL286 tombent, de même que les amendements CL172 de la commission du développement durable, CL524, CL525, CL527 et CL530 de Mme Pascale Boyer, CL414 de Mme Martine Wonner, CL852 de M. Jérôme Nury, CL415 de Mme Martine Wonner, CL290, CL648 et CL854 de M. Jérôme Nury, CL872 de M Pascal Brindeau, CL323 de M. Stéphane Peu et CL849 de M. Jérôme Nury.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Comme le bureau de la commission des Lois l’a décidé à l’unanimité lors de sa dernière réunion, par respect pour l’outre-mer dont les crédits budgétaires vont être examinés en séance publique cet après-midi, nous reprendrons nos travaux ce soir à vingt et une heures.


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2.   Seconde réunion du mercredi 6 novembre 2019 à 21 heures (après l’article 5 à article 11)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.8390109_5dc324028f528.commission-des-lois--engagement-dans-la-vie-locale-et-a-la-proximite-de-l-action-publique-suite-6-novembre-2019

Après l’article 5

La Commission est saisie de l’amendement CL733 de Mme Sabine Thillaye.

Mme Sabine Thillaye. Afin de renforcer l’information des élus des collectivités territoriales concernées par un transfert de compétences, la commission consultative sur l’évaluation des charges devrait faire connaître son avis à ce sujet. Tel est le sens de cet amendement.

M. Bruno Questel, rapporteur. Votre amendement est satisfait, puisque cette commission réunit déjà, pour chaque transfert de compétences, la catégorie de collectivités concernée. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Même avis.

Mme Sabine Thillaye. La commission met en ligne ses comptes rendus, mais seulement plusieurs mois après sa réunion, sans notification. Toutefois, compte tenu des avis défavorables, je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

Article 5 bis
(art. L. 2224-12-1-1 [nouveau], art. L. 2224-12-3-1 et art. L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales)
Généralisation de la tarification sociale de l’eau

La Commission adopte successivement l’amendement de cohérence CL1021 et l’amendement rédactionnel CL1022 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CL752 de M. Paul-André Colombani.

M. Paul-André Colombani. Cet amendement a pour objet de permettre à des maires de moduler de 10 % les tarifs de l’eau appliqués aux abonnés assujettis à la taxe sur les résidences secondaires. Cette disposition concernerait les communes dont la population double ou triple au cours de l’été, et dont les infrastructures sont souvent sous-dimensionnées. Pendant une période saisonnière, déterminée par arrêté préfectoral, les maires seraient autorisés à moduler le prix de l’eau, notamment afin de sensibiliser le public à son bon usage et de rétablir l’équité entre les résidents permanents et occasionnels.

M. Bruno Questel, rapporteur. J’ai conscience de l’acuité de ce problème, dans toutes ses dimensions, pour les villages de Corse. Pour qui connaît bien le terrain, le dispositif que vous proposez peut paraître justifié, mais il est difficile à concevoir d’un point de vue juridique et légistique. Je rappelle qu’une mission d’évaluation de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) est en cours. Par ailleurs, j’ai entamé mon cycle d’auditions des acteurs corses, qui nous permettra, le cas échéant, de modifier l’ordonnance concernant les institutions de la Corse. Je vous propose de nous remettre à l’ouvrage et de formuler les propositions qui nous paraîtraient nécessaires dans le cadre de la mission d’évaluation de la loi NOTRe. Demande de retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Vous soulevez une question intéressante, même si la disposition que vous proposez s’écarte un peu de la tarification sociale établie par le projet de loi. C’est l’éternelle question de l’assiette du financement des investissements considérables qui s’imposent dans le domaine de l’eau potable. La facturation d’eau d’une commune touristique est, par nature, plus importante, car elle accueille un plus grand nombre de consommateurs. Il n’en demeure pas moins que la population locale assume une partie du financement des usines de production d’eau, des infrastructures mises en place en amont.

Des mécanismes d’accompagnement financier, en particulier une majoration de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour les communes touristiques, existent déjà. En outre, il paraît difficile d’introduire dans la législation cette disposition telle que vous la proposez, mais je ne la refuse pas par principe car elle a un intérêt.

Pour les mêmes raisons qu’avancées par le rapporteur, je vous demande de retirer votre amendement, le Gouvernement s’engageant à examiner très précisément cette question pour parvenir à une disposition applicable partout. Outre la Corse, toutes les communes touristiques peuvent être concernées, et pas seulement pour le problème de l’eau. Il faut donc appréhender la question de manière globale et concertée.

M. Paul-André Colombani. Dans la mesure où notre demande est prise en compte par le Gouvernement et le rapporteur, nous retirons l’amendement. C’est un sujet essentiel qui, effectivement, ne concerne pas seulement la Corse. Certaines communes ne peuvent plus faire face à ce problème.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 5 bis modifié.

Après l’article 5 bis

La Commission est saisie de l’amendement CL360 de M. Alexis Corbière.

Mme Bénédicte Taurine. Cet amendement vise à exonérer de TVA les 14,6 premiers mètres cubes d’eau consommés par les particuliers ou les établissements publics. Cette quantité représente environ 20 litres d’eau par jour, soit l’usage minimal quotidien préconisé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). À terme, il serait souhaitable que ce volume d’eau soit gratuit.

M. Bruno Questel, rapporteur. Nous comprenons votre préoccupation, mais les Assises de l’eau ont montré que les collectivités avaient institué de nombreux dispositifs sociaux locaux. L’article 5 bis définit le cadre légal qui manquait pour développer certaines initiatives. En outre, à bien y regarder, le champ de votre dispositif pourrait se révéler plus réduit que celui qui est proposé. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

Mme Bénédicte Taurine. D’après ce que vous dites, ce sont les communes qui financent des dispositifs sociaux réduisant le coût d’accès à l’eau. Pour notre part, nous considérons que c’est la TVA, impôt national et injuste, qu’il conviendrait de modifier. Si les communes financent elles-mêmes les aides sociales, les bénéficiaires seront, in fine, les payeurs, tandis qu’un financement national répartirait la charge sur l’ensemble de la population. Liberté, égalité, fraternité !

La Commission rejette l’amendement.

Article 6
(art. L. 4424-32, L. 5214-16, L. 5215-20, L. 5215-20-1, L. 5216-5, L. 5217-2 et L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales, art. L. 133-15, L. 134-2 et L. 151-3 du code du tourisme)
Favoriser l’exercice de la compétence de promotion du tourisme par les stations classées de tourisme

La Commission examine l’amendement CL326 de M. André Chassaigne.

M. Stéphane Peu. Par cet amendement, nous proposons à toutes les communes de retrouver l’exercice de la compétence relative à la promotion du tourisme, y compris la création d’offices de tourisme. Nous ne souhaitons pas, en effet, la réserver aux seules communes touristiques ni, à plus forte raison, à celles d’entre elles classées « stations de tourisme », selon la dénomination du projet de loi. Nous sommes opposés à la différenciation entre communes et proposons que toutes celles qui le souhaitent puissent valoriser leur patrimoine local, en créant un office de tourisme.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’avis est défavorable, car nous considérons que c’est à l’échelle de l’intercommunalité que se définissent les stratégies de territoire, en matière touristique comme dans d’autres domaines.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Nous simplifions l’exercice de la compétence en matière de tourisme, en permettant aux communes classées « station de tourisme » de récupérer leurs offices de tourisme. Je sais maintenant que dès lors qu’on fait œuvre de simplification, certains trouveront que cela va trop loin et d’autres pas assez. Aussi proposé-je d’en rester à la ligne du Gouvernement.

Premièrement, nous avons discuté hier soir de la bonne intelligence intercommunale. Comme en matière de développement économique, dans le domaine touristique, on est plus intelligent à plusieurs, ne serait-ce que pour éviter la compétition territoriale. Deuxièmement, les stations classées, notamment sur le littoral et en montagne, présentent de telles spécificités qu’elles sont fondées à récupérer leur point d’accueil touristique, leur office de tourisme. Troisièmement, le Sénat a modifié le niveau de décision du classement : il ne serait plus prononcé par décret mais par arrêté préfectoral. Je crois beaucoup à la déconcentration, à la proximité, et je me suis engagé auprès de vos collègues ultramarins sur ce retour à la signature préfectorale. Quatrièmement, je souhaite que cette possibilité offerte aux stations classées de tourisme demeure circonscrite à celles qui appartiennent à des communautés de communes et à des communautés d’agglomération, à l’exclusion des communautés urbaines et des métropoles. Si on allait plus loin, on commencerait à détricoter l’intercommunalité au lieu de stabiliser le droit. Je vous propose de préserver cet équilibre, négocié avec l’ensemble des associations d’élus et adopté par le Sénat. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Stéphane Peu. J’entends vos arguments, mais ils ne me convainquent pas. Nous avons élaboré cet amendement après avoir recueilli plusieurs témoignages, mais je prendrai l’exemple que je connais le mieux. Cela peut paraître surprenant, notre communauté d’agglomération de Plaine Commune, en Seine-Saint-Denis, compte de nombreux sites touristiques, parmi lesquels les puces de Saint-Ouen, la basilique de Saint-Denis ou encore le stade de France – ce n’est pas rien au regard du patrimoine national. D’avoir dû tout fusionner dans un office intercommunal a engendré une forte déperdition pour tous les joyaux de notre territoire, qui se sont retrouvés noyés dans le patrimoine de l’ensemble de l’agglomération. Ils mériteraient d’être mieux valorisés par des offices centrés sur le patrimoine communal.

M. Vincent Bru. Les stations de montagne qui existaient avant l’entrée en vigueur de la loi dite « Montagne » ont pu garder leur office de tourisme. Nous nous félicitons que le projet de loi prolonge cette exception pour les communes qui, depuis cette loi, ont été classées « stations de tourisme ». Nous présenterons un amendement relatif à la compétence de classement déconcentrée.

M. Erwan Balanant. Je comprends les préoccupations qui s’expriment au sein des territoires de montagne, dans lesquels des stations peuvent être en concurrence, exprimer des visions différentes, au sein de la même intercommunalité. Peut-être faudrait-il porter sur ce sujet, comme nous l’avons fait pour l’eau et l’assainissement, un regard global, stratégique et déléguer des compétences par conventionnement, afin que des offices de tourisme puissent promouvoir les spécificités locales. À cet égard, l’exemple de Stéphane Peu est éclairant.

J’irai dans le sens du ministre : il faut avoir une vision stratégique de territoire. Chez moi, en Bretagne, on a réussi à faire du tourisme à partir du moment où on a fusionné les intercommunalités, en ayant une vision de pays. Il est vrai cependant que des villages, dont les petits offices de tourisme ont disparu, ressentent une certaine frustration, car ils ne peuvent promouvoir des spécificités locales. La délégation de compétence par conventionnement pourrait être une solution.

Mme Cécile Untermaier. Je soutiens pleinement l’amendement de M. Peu. À bien y regarder, on apporte peu de modifications à la loi NOTRe. J’avais adressé une demande à Olivier Dussopt, qui en était le rapporteur, au sujet de la conférence des maires, mais il n’en a pas voulu. Je souhaitais la création d’un dispositif optionnel pour l’eau et l’assainissement. Désormais, j’entends dire les choses clairement.

Comme l’a illustré M. Peu, il y a, dans la loi NOTRe, des « irritants » en matière de tourisme. Il serait intéressant de redonner de la liberté aux communes et de bâtir un dispositif favorable aux territoires. Vous développez une réflexion qui demeure enserrée dans le cadre intercommunal. Au vu de l’expérience passée, qui n’a pas toujours été positive, on pourrait imaginer un mécanisme différent. La liberté régulée n’est pas une véritable liberté. On risque de créer des insatisfactions, au regard des espoirs d’ouverture que vous avez suscités. Je suis très favorable à cet amendement et je regrette qu’on ne puisse pas aller beaucoup plus loin que ce que vous proposez.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Le dispositif qui a été retenu dans le domaine de l’eau est une vraie usine à gaz. Dans la mesure où la compétence a été transférée aux intercommunalités assortie de la possibilité de la redéléguer, certaines intercommunalités, pour peu que toutes les communes les composant choisiraient de faire usage de la dérogation, pourraient être conduites à redéléguer cette attribution et à conclure des conventionnements avec chacune d’entre elles. L’équilibre trouvé sur la compétence eau ne me paraît donc pas satisfaisant.

Certes, l’application de ce modèle au tourisme sera peut-être un peu plus simple car, pour un certain nombre de collectivités, l’intercommunalité constitue un cadre adapté. Le moindre nombre de cas particuliers vaudrait peut-être de réfléchir à la possibilité de redéléguer dans ce domaine. En tout état de cause, il faut trouver une solution. Si je ne m’abuse, nous sommes bien là pour améliorer et simplifier les dispositions complexes et difficilement acceptées de la loi NOTRe !

Mme Emmanuelle Ménard. Je partage cette vision des choses. Certaines villes touristiques peuvent avoir des problématiques communes tout en appartenant à des intercommunalités différentes. Par exemple, chez moi, les communes touristiques du littoral appartiennent à plusieurs agglomérations : Agde, Vias et Portiragnes dans l’une, Valras et Sérignan dans une autre, et Vendres dans une autre encore. Ces villes ont des enjeux touristiques similaires et pourraient mener un travail commun. De son côté, Béziers, qui n’est pas sur le littoral, a des caractéristiques touristiques communes avec Pézenas, qui appartient à une agglomération distincte. Si on redonnait aux communes la compétence tourisme et la possibilité d’avoir des offices de tourisme, elles pourraient, non pas faire ce qu’elles veulent dans leur coin, mais s’allier avec d’autres communes et intercommunalités pour traiter de sujets communs. Cette faculté ne leur est aujourd’hui pas ouverte, compte tenu de la définition des compétences.

M. Stéphane Peu. Là où l’intercommunalité constitue la bonne échelle, pour des raisons de cohérence territoriale ou patrimoniale, aucune ville ne souhaitera revenir en arrière, je n’ai aucun doute à ce sujet. En revanche, comme cela vient d’être dit, une commune pourrait demander à retrouver ses compétences lorsque des particularités le justifient – selon qu’elle se trouve sur le littoral ou dans les terres, ou qu’elle ait une tradition tauromachique. Dans mon territoire, j’ai cité deux exemples emblématiques, qui en plus revêtent un intérêt national, dont l’intercommunalité contrainte a contribué à affaiblir la valorisation. Redonner un peu de marge de manœuvre aux communes irait dans le sens d’une meilleure valorisation du patrimoine, dans sa singularité. En revanche, partout où l’intercommunalité est la bonne échelle, elle le demeurera.

Mme Cécile Untermaier. Exactement !

Mme Émilie Bonnivard. Le débat montre bien qu’il faut assouplir les règles relatives à la compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme ». On l’a dit, elles constituent des « irritants » parce que, dans les territoires, on se heurte à des problèmes concrets très compliqués qui, faute de solutions, deviennent des apories. La communauté de communes n’est pas nécessairement la bonne échelle pour traiter de la promotion touristique. À titre d’exemple, la communauté de communes Cœur de Maurienne Arvan, basée à Saint-Jean de Maurienne, regroupe des communes industrielles, dans la vallée, et des communes de montagne, qui sont des stations de ski. Deux logiques complètement différentes coexistent. Dans la mesure où la population réside essentiellement dans la vallée, la communauté de communes n’a pas pour préoccupation principale d’assurer la promotion touristique des stations de ski.

Nous avons dû traiter, dans mon territoire, le cas de quatre « stations de tourisme », qui comportent un domaine skiable intégré. L’une d’entre elles a perdu son classement parce qu’elle n’a plus d’hôtel – on perd des hôtels familiaux, dans notre pays ; elle a donc vu sa compétence de promotion touristique gérée par la communauté de communes de la vallée. Nous avons dû recréer un syndicat intercommunal pour assurer la promotion touristique à l’échelle de l’ensemble des stations. Cela ne correspond en rien à l’objectif de la loi NOTRe ! Si les communes touristiques bénéficiaient d’un peu plus de souplesse, on parviendrait à résoudre des difficultés que nous ne savons pas traiter aujourd’hui.

M. Vincent Bru. Les stations classées de tourisme ont accompli de très gros efforts, afin, notamment, que les offices de tourisme de première catégorie répondent à un certain nombre de critères et puissent satisfaire une clientèle particulière. Les stations de sport d’hiver, les stations d’altitude, les stations balnéaires, les stations climatiques et thermales présentent, de fait, certaines spécificités.

Cela étant, même si une station classée dispose d’un office de tourisme communal, la communauté de communes ou d’agglomération conserve la compétence relative à la promotion du tourisme : elle est compétente sur l’ensemble du territoire, y compris sur celui des stations classées de tourisme. Par ailleurs, il est toujours possible de conclure des conventions – non d’accorder des délégations – pour mener des actions communes s’inscrivant entre le niveau intercommunal et celui des stations.

M. Erwan Balanant. Les intercommunalités ont toujours intérêt à développer une vision globale des territoires et à en faire la promotion. Mis à part, peut-être, le tourisme d’hiver en montagne, on constate qu’aujourd’hui – aussi bien pour ma région Bretagne que pour la montagne en été –, la consommation touristique a évolué. Les touristes recherchent un ensemble d’animations, d’activités. L’intercommunalité permet d’assurer la promotion globale d’un territoire.

Madame Battistel, on ne peut pas dire qu’avec notre amendement sur l’eau et l’assainissement, on a détricoté les règles régissant l’intercommunalité. On a gardé la vision stratégique au niveau de l’intercommunalité tout en accordant la possibilité de traiter des questions opérationnelles au niveau communal. Il faut insister sur le fait que beaucoup d’intercommunalités ne feront pas 1 centimètre en arrière, car elles fonctionnent parfaitement bien.

M. Bruno Questel, rapporteur. Comme l’a rappelé M. Bru, les communes conservent de nombreuses marges de manœuvre. Mme Ménard soulignait la nécessité, pour les communes, de travailler ensemble ; Mme Bonnivard, pour sa part, dénonçait l’obligation de créer des syndicats pour le faire. Cela montre que la réflexion n’est pas mûre et que cette compétence doit demeurer du niveau intercommunal. Des filtres, des possibilités de transfert ascendant et descendant ont été institués pour permettre une application sereine des politiques publiques. Mon avis demeure défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient aux amendements CL829 et CL830 de M. Philippe Vigier.

M. Paul Molac. L’amendement CL829 vise à ce que les communes dites touristiques au sens des articles L. 133-11 et L. 133-12 du code du tourisme, soit environ 1 300 collectivités, puissent retrouver la compétence promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme, au même titre que les quelque 400 communes touristiques érigées en stations classées de tourisme par le projet de loi.

L’amendement CL830 a pour objet d’élargir cette possibilité aux communes détentrices d’un label touristique officiel, tel que « ville et pays d’art et d’histoire » – 200 communes se sont vu décerner ce label par le ministère de la culture – ou « village étape », label que soixante-deux communes ont reçu du ministère de la transition écologique et solidaire.

Ces amendements visent à conférer une plus grande autonomie à des communes présentant une spécificité, afin de contribuer à leur attractivité. Cela se justifie d’autant plus que la compétence en matière de tourisme est très mal prise en compte par certains EPCI, simplement parce qu’ils estiment ne pas appartenir à une région touristique. Or il peut arriver qu’au sein de l’EPCI, une commune ait investi dans le tourisme. M. Vigier, qui a déposé cet amendement, connaît des communes d’Eure-et-Loir qui se trouvent dans ce cas de figure. Parfois, la région organise la politique touristique, et son action est complémentaire de celle des EPCI et des communes. D’autres régions, moins touristiques, mériteraient de bénéficier d’une telle conjugaison de compétences.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je regrette de ne pouvoir être agréable au président Vigier. Je dois émettre un avis défavorable sur les deux amendements, car la dérogation envisagée se limite aux seules « stations de tourisme ».

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l’amendement de cohérence CL1023 du rapporteur.

Elle est saisie de l’amendement CL980 de M. Stéphane Baudu.

M. Stéphane Baudu. Cet amendement a pour objet de substituer de nouvelles règles aux modalités actuelles d’attribution de la compétence relative au tourisme, en tirant parti de la possibilité de délégation offerte par le pacte de gouvernance. Toutefois, au vu des débats précédents, je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL325 de M. Stéphane Peu, les amendements identiques CL34 de M. Martial Saddier, CL69 de M. Xavier Roseren, CL82 de Mme Émilie Bonnivard, ainsi que les amendements identiques CL35 de M. Martial Saddier et CL53 de Mme Émilie Bonnivard.

M. Stéphane Peu. Je proposais, par mon amendement précédent, que la compétence en matière de tourisme puisse être rendue aux communes. Dans l’amendement CL325, cette compétence reste aux intercommunalités, mais peut être redonnée aux communes de manière facultative.

M. Martial Saddier. La loi NOTRe a soulevé trois grands « irritants », pour reprendre votre expression, monsieur le ministre : la taille des intercommunalités, l’eau et l’assainissement et, notamment dans les zones touristiques de montagne ou d’ailleurs, le tourisme. La révision de la loi montagne qui a suivi a de nouveau fait du tourisme, et au plus haut point, un « irritant » dénoncé par des parlementaires de tous les groupes et de toutes les sensibilités. Si l’on en juge par le nombre d’amendements déposés sur votre texte, qui émanent de députés de quasiment toutes les sensibilités, on peut en déduire, monsieur le ministre, que l’irritation demeure.

Deux difficultés coexistent : d’une part, la reconnaissance des spécificités locales, que mes collègues ont très bien évoquée ; d’autre part, ce dont personne n’a parlé, le financement des animations touristiques dans les communes et les EPCI, et l’interprétation à géométrie variable de la loi et des contrôles de légalité assurés par les préfets.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Tout à fait !

M. Martial Saddier. Je formule le vœu qu’à l’issue de la navette, on ait résolu l’ensemble de ces difficultés.

Le sujet est aussi sensible en zone de montagne et dans les communes balnéaires parce que les offices de tourisme, qui emploient plusieurs dizaines de salariés et disposent de budgets considérables, sont de véritables entreprises sur lesquelles repose toute l’activité économique des communes. Dans une station touristique balnéaire ou de montagne, l’office de tourisme constitue une zone d’activité majeure, si ce n’est la principale, à l’échelle de l’agglomération. D’où l’attention particulière que lui portent les élus locaux.

Il ne s’agit pas d’organiser la concurrence entre collectivités, mais d’assurer, au sein d’un EPCI, la complémentarité entre des stations qui font de la France la première destination touristique au monde. À l’intérieur d’un EPCI, des stations peuvent être complémentaires, car les unes s’adressent aux familles, les autres aux sportifs de haut niveau, tandis que d’autres encore tablent sur le ski d’hiver ou le tourisme d’été. Aussi, je vous prie instamment, monsieur le ministre, de laisser des marges de manœuvre aux collectivités, afin qu’elles puissent résoudre leurs difficultés. Tel est l’objet de l’amendement CL34, et l’amendement CL35 est également défendu.

M. Xavier Roseren. Le projet de loi ouvre une dérogation à la règle de transfert de compétences aux EPCI, en permettant aux « stations de tourisme » d’exercer elles-mêmes la compétence relative au tourisme. L’amendement CL69 vise à étendre cette faculté à l’ensemble des communes touristiques.

Mme Émilie Bonnivard. Les amendements CL82 et CL53 sont défendus. Monsieur le ministre, vous avez indiqué que ce sujet devrait être étudié de plus près et que des adaptations pourraient être envisagées, notamment dans les territoires de montagne. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ?

M. Bruno Questel, rapporteur. Depuis la loi NOTRe, les intercommunalités se sont emparées de la compétence tourisme et ont réalisé de nombreux investissements. On ne peut aujourd’hui répondre à la carte aux sollicitations locales dont vous avez été l’objet, qui sont toutes légitimes ou qui vous apparaissent comme telles. Je souhaite que nous en restions à la dérogation limitée formulée par le projet de loi. Avis défavorable sur l’ensemble des amendements.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Si le Gouvernement a ouvert une dérogation en faveur des « stations de tourisme », c’est parce qu’il a la conviction qu’il faut offrir des solutions aux territoires présentant une spécificité – à tout le moins, les territoires de montagne, littoraux et insulaires. J’ai émis un avis défavorable à un amendement qui, à travers l’extension de la dérogation à d’autres communes, prétendait introduire un « assouplissement ». En réalité, cela revenait à changer de catégorie une compétence qui d’obligatoire devenait facultative, ce qui ne correspond pas à ce que nous avons entendu faire hier soir. Il n’en reste pas moins qu’il faut trouver une solution pour les territoires présentant une certaine spécificité. Au passage, madame Battistel, il me semble qu’avec celle que nous avons trouvée pour l’eau et l’assainissement, nous avons emprunté le bon chemin, compte tenu de l’exigence d’assouplissement et des enjeux écologiques.

Dans vos amendements, je vois surtout le reflet de réalités géographiques ; je les perçois comme des initiatives territoriales plus que politiques. Tout en vous demandant de retirer ces amendements, je m’engage formellement à ce que vous soyez reçus, d’ici à la séance publique, au sein de mon ministère, par moi-même ou par mon cabinet, avec les associations d’élus concernées – car je ne veux pas les enjamber, même si le Parlement est libre de faire ce qu’il veut. Je note, d’ailleurs, que vous êtes vous-mêmes souvent très engagés dans les associations touristiques ou de montagne, telle l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM). L’enjeu est de trouver une voie qui évite de bouleverser le système de répartition des compétences en matière de tourisme. De fait, compte tenu de leur rédaction, vos amendements s’appliqueraient à tout le territoire français.

Mon département de l’Eure abrite le village de Giverny qui, quoiqu’étant extrêmement touristique, ne fait pas partie des « stations de tourisme ». Je pensais que la dérogation accordée à ces dernières était suffisante ; vous me dites que non. N’étant pas d’un tempérament buté, je vous propose de refaire un tour d’horizon en vue d’une réécriture, mais faisons attention à préserver la stabilité de notre droit et à ne pas le détricoter. Je vous demande donc de retirer vos amendements et invite tous les députés qui en ont déposé sur ce sujet à une réunion de travail, pour essayer de définir une position commune en séance publique.

M. Stéphane Peu. Je suis toujours prêt à travailler avec le Gouvernement, mais je ne suis pas certain que nous fassions partie du périmètre auquel a fait référence M. le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. La montagne de Seine-Saint-Denis est la bienvenue !

M. Stéphane Peu. Justement, on parle plutôt de la Plaine Saint-Denis, c’est pourquoi je ne suis pas certain que nous soyons dans le périmètre…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Tous ceux qui ont déposé un amendement y sont.

Les amendements sont retirés.

La Commission examine les amendements identiques CL54 de Mme Émilie Bonnivard, CL70 de M. Xavier Roseren et CL270 de Mme Frédérique Lardet.

Mme Émilie Bonnivard. L’amendement CL54 vise à supprimer une disposition adoptée par le Sénat, consistant à rendre obligatoire l’avis de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale lorsqu’une commune décide de conserver ou retrouver l’exercice de la compétence promotion du tourisme, dont la création d’offices du tourisme.

Ce dispositif risque de crisper inutilement les territoires, auxquels nous devons faire confiance. Dans le domaine de la promotion touristique, où les compétences sont partagées, on va instaurer une hiérarchie entre deux types de collectivités, et je ne suis pas sûre qu’une mesure de ce type soit de nature à faciliter le travail en coopération entre les différentes strates de collectivités.

M. Xavier Roseren. Comme cela vient d’être dit, le Sénat a ajouté l’obligation de recueillir l’avis de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale. L’objectif de l’amendement CL70 est de permettre aux communes de conserver leur compétence en matière de promotion touristique, en supprimant la délibération de la communauté de communes.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’avis rendu par l’EPCI sera un avis simple, c’est-à-dire non contraignant. Je souhaite donc le retrait de ces amendements, et émettrai à défaut un avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je commencerai par rappeler aux auteurs de ces amendements que le dispositif ici visé est complètement dérogatoire. C’est la seule compétence où une commune pourra décider unilatéralement de partir avec son office de tourisme : il n’y a pas d’autre exemple en matière d’intercommunalité. Ce que le Sénat a voulu faire, c’est de dire que dans un cas de figure où la commune peut partir seule, c’est la moindre des choses que de permettre qu’ait lieu un débat au conseil communautaire, qui ne saurait en aucun cas bloquer le processus, mais aurait simplement vocation à ce qu’un avis favorable ou défavorable soit émis au sujet d’une décision comportant d’importants enjeux financiers.

J’ajoute que si vous pensez à l’intérêt des maires qui vont partir, il faut également penser à celui des maires qui restent… Il ne serait pas normal qu’une commune et son maire puissent partir sans la moindre information, et en tout état de cause cela irait à l’encontre de tout ce que nous avons fait ce matin.

Pour ma part, j’estime que le dispositif imaginé par le Sénat – un avis simple, non bloquant – est plutôt équilibré, avec une application limitée à un cas de figure unique. Il me paraît, en outre, cohérent avec les amendements précédents. C’est pourquoi je demande le retrait de ces trois amendements identiques, et émettrai à défaut un avis défavorable.

Mme Émilie Bonnivard. Si, à l’issue de sa délibération, le conseil communautaire est opposé au départ de la commune, cela n’empêche donc pas celle-ci de partir ?

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Absolument pas.

Les amendements sont retirés.

La Commission est saisie de l’amendement CL209 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. L’amendement CL209 vise à corriger une difficulté résultant de la loi NOTRe sur le transfert et la gestion de la compétence promotion du tourisme, dont la création d’offices du tourisme. Le choix de la commune va dépendre étroitement de son classement touristique ou de son déclassement. Il s’agit donc de poser un cadre afin d’éviter qu’un classement ou un déclassement puisse venir perturber une stratégie intercommunale qui peut faire plaisir à un maire, mais peut aussi mettre en difficulté l’ensemble d’un territoire.

M. Bruno Questel, rapporteur. J’estime que cette proposition ne répondrait pas au souhait des stations de tourisme. Que ferait-on des communes classées après 2027 ? Il y aurait une vraie différence de traitement entre celles classées avant et celles classées après, qui ne me paraît pas justifiable.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL153 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. L’amendement CL153 vise à substituer, à la seconde phrase de l’alinéa 5, au mot : « conserve », les mots : « peut conserver ». L’alinéa 5 s’achèverait donc par cette phrase : « La communauté de communes peut conserver, concurremment à ladite commune et sur son territoire, l’exercice de cette même compétence, à l’exclusion de la création d’offices de tourisme. » Je pense notamment au cas où une seule commune de l’EPCI, classée touristique, souhaite retrouver la compétence correspondante.

M. Bruno Questel, rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposées précédemment.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis. J’ajoute qu’avec la formule « peut conserver », vous créez de facto une compétence partagée en droit.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL1161 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1161 a pour objet d’éviter la remise en cause des grands équilibres de la loi NOTRe : il vise à conserver l’assouplissement introduit par la loi montagne de 2016 au profit des seules stations de tourisme des communautés de communes et d’agglomération, et non des communautés urbaines.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je suis favorable à cette proposition consistant à revenir au texte initial, pour deux raisons.

Premièrement, les questions relatives aux métropoles et aux communautés urbaines sont suffisamment complexes et spécifiques pour justifier qu’elles soient traitées à part. Deuxièmement, la commission des Lois ne peut ignorer ce que la commission des finances a fait durant des années : pendant longtemps, les métropoles et les communautés urbaines ont bénéficié d’accompagnements financiers du fait qu’elles étaient très intégrées. Vouloir commencer à modifier le niveau d’intégration des métropoles et des communautés urbaines ne peut se faire aujourd’hui sans tenir compte de la manière dont on a bâti un certain nombre de mécanismes financiers : isoler les métropoles et les communautés urbaines permet de mieux se concentrer sur les communautés de communes et les communautés d’agglomération.

Le fait d’avoir deux textes séparés n’est pas une simple question de méthodologie pour le Gouvernement, mais il faut tout de même un peu de méthode si l’on veut mettre toutes les chances de son côté – en leur temps, les lois NOTRe et MAPTAM (de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles) avaient d’ailleurs également traité ces sujets délicats de manière séparée. Je suis donc favorable à cet amendement.

M. Raphaël Schellenberger. Puisque les communes concernées sont en nombre déterminé, serait-il possible d’en avoir la liste d’ici à la séance publique ?

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CL900, CL901, CL902, CL903, CL904 et CL905 tombent.

La Commission examine l’amendement CL1162 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, je considère que l’amendement CL1162 est défendu. Il concerne cette fois les métropoles.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Est-ce cet amendement qui vise à rétablir la compétence du préfet dans la décision de classement d’une station de tourisme ?

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Non, ce n’est pas celui-ci. Il y en a un pour les métropoles et un autre pour les communautés urbaines.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CL906 et CL907 tombent.

La Commission est saisie de l’amendement CL278 de Mme Frédérique Lardet.

Mme Frédérique Lardet. Selon l’alinéa 3 de l’article L. 133-3 du code du tourisme, l’office du tourisme peut être chargé par le conseil municipal de tout ou partie de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique locale du tourisme. Dans la mesure où ce sont les EPCI qui exercent la compétence en matière de promotion du tourisme, notamment la création d’offices de tourisme, l’amendement CL278 vise à préciser que l’office du tourisme peut être chargé par le conseil municipal, mais aussi le conseil communautaire ou le comité syndical, de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique locale du tourisme.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je comprends la préoccupation exprimée par cet amendement, mais celui-ci est satisfait par le droit actuel. J’y suis donc défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je précise que c’est l’article L. 134-5 du code du tourisme qui fait que votre proposition est déjà satisfaite, madame la députée. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL1163 du rapporteur et l’amendement CL672 de M. Vincent Bru.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avec l’amendement CL1163, nous abordons les compétences du préfet, évoquées tout à l’heure. Cet amendement rétablit l’écriture initiale du projet de loi en ce qui concerne la déconcentration de l’attribution du classement en « station de tourisme ».

Ladite déconcentration est une mesure bénéfique à la fois pour les collectivités locales et l’État. Elle rapproche la décision au plus près des bénéficiaires, et elle réduit les délais d’instruction des demandes de classement, qui sont actuellement d’une année entière à trois mois, en évitant ainsi la mobilisation des échelons administratifs régionaux et nationaux.

M. Vincent Bru. Actuellement, la décision d’intégrer une commune touristique dans les stations classées de tourisme est prise par décret. Alors que le Sénat prévoit que cette décision soit prise par arrêté du ministre chargé du tourisme, l’amendement CL672 propose de déconcentrer cette compétence au niveau des préfets de région. La procédure est extrêmement longue – j’ai moi-même eu l’occasion de la mettre en œuvre, et je me souviens que nous avons dû défendre notre dossier à Bercy –, et il me semble que les décisions seraient plus adaptées si elles étaient prises à un niveau déconcentré.

Je suis ô combien d’accord avec notre collègue Émilie Bonnivard s’agissant des critères extrêmement exigeants pour les stations de sports d’hiver, où la présence d’hôtels est exigée. Nous en avons parlé au sein de l’ANEM et je le redis devant M. le ministre, effectivement, il y a des stations d’altitude dotées d’équipements touristiques importants mais qui, faute d’avoir des hôtels, ne peuvent pas être classées en stations de tourisme. C’est ce qui est ennuyeux et qui nécessiterait, à mon sens, un assouplissement des critères, même si le niveau d’exigence global doit être maintenu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avec le dispositif que vous proposez, vous venez concurrencer mon amendement, monsieur Bru, en élevant à l’échelon régional ce que j’ai proposé à l’échelon départemental. N’y voyez rien de personnel, mais je vous invite à retirer votre amendement, et émettrai, à défaut, un avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. N’oublions pas que le présent projet de loi est relatif « à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique » et que la proximité, ce n’est pas que la décentralisation, mais aussi la déconcentration. La signature de l’État peut aussi bien être donnée par un ministre que par un préfet. Je tiens à appeler votre attention sur le fait que l’ensemble des sénateurs ultramarins, tous groupes confondus, s’était mobilisé pour revenir à la signature préfectorale, considérant que, dans bien des cas, il était tout de même plus facile de négocier avec son préfet de département qu’avec un ministre parisien – ce qui me paraît assez justifié.

Je souhaite le retrait de votre amendement pour deux raisons, monsieur Bru. Premièrement, d’un point de vue historique, l’autorité administrative compétente est le préfet de département ; deuxièmement, votre amendement comporte un problème de rédaction puisque vous faites référence au « préfet de région », qui n’a pas d’existence légale – il aurait fallu écrire : « le représentant de l’État dans la région ».

J’ajoute que, dans le découpage actuel, le rapport à la région est très variable selon chaque région. Les préfets de département ont montré par le passé qu’ils savaient faire ce qu’il est ici envisagé de leur demander, même s’ils doivent éventuellement s’appuyer pour cela sur les équipes du secrétariat général pour les affaires régionales (SGAR).

Je suis donc favorable à l’amendement CL1163 du rapporteur, et je vous demande le retrait de votre amendement CL672, monsieur Bru, tout en m’engageant à examiner, avec le ministre du tourisme, ce qui constituait la seconde partie de votre intervention.

L’amendement CL672 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL1163.

Elle adopte l’amendement CL1024, de cohérence, du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 6 modifié.

Après l’article 6

La Commission est saisie de l’amendement CL908 de Mme Marguerite Deprez-Audebert.

Mme Marguerite Deprez-Audebert. Je précise, s’agissant de cet amendement CL908, qu’un problème d’organisation fait qu’il ne comporte que ma signature, et non celle de mes collègues de la commission des Affaires économiques.

Je souhaite vous sensibiliser à un problème d’équité touchant les communes touristiques, et les échanges qui ont précédé m’ont confirmé la pertinence de ma proposition. Celle-ci vise à reconnaître le rôle moteur des communes touristiques et à mettre en cohérence leur poids économique et leur représentation au sein de l’EPCI, d’autant plus que le développement économique est la compétence première des EPCI.

La vocation touristique d’une commune recèle un potentiel de recettes économiques dont les bénéfices s’étendent à l’ensemble du territoire. Néanmoins, le tourisme implique des dépenses de fonctionnement significativement plus élevées que pour la moyenne des autres communes, cette différence étant particulièrement marquée pour les plus petites d’entre elles.

Afin de prendre en compte ces spécificités, le calcul de la DGF repose sur la population fiscale – entre d’autres termes, la population permanente, et non touristique. En application de cette disposition, les communes sont identifiées comme touristiques, non pas au sens du code du tourisme, mais en fonction de l’importance des résidences secondaires situées sur leur territoire.

M. Bruno Questel, rapporteur. Depuis les origines de la coopération intercommunale, les critères démographiques priment sur tout autre en matière de représentation des communes membres desdites instances. De ce point de vue, le dispositif que vous proposez m’apparaît inéquitable en termes de justice territoriale, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Cet amendement, déjà déposé au Sénat, expose une demande assez ancienne, qui n’est pas permise sur le plan constitutionnel en ce qu’elle contrevient au principe de la représentation démographique – nous en avons parlé ce matin au sujet du « tunnel » de plus ou moins 20 % figurant dans la proposition de loi Sueur.

En matière financière, on peut imaginer un certain nombre d’aménagements complémentaires – ainsi avez-vous voté, l’année dernière, dans le cadre de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » du budget, des bonifications supplémentaires pour certains territoires situés dans des zones touristiques, afin de compenser des charges financières parfois difficiles à absorber. Quant à imaginer qu’une commune touristique ait plus de délégués au sein d’un conseil communautaire précisément à ce titre, cela me semble poser quelques difficultés. Si je devais comparer ce système à celui de la représentation nationale, je dirais que chacun de vous représente la nation dans son ensemble, et que vous êtes désignés au sein de circonscriptions définies en fonction de critères démographiques, indépendamment de la richesse de vos circonscriptions respectives. La circonscription la plus pauvre de France envoie un député à l’Assemblée nationale, la plus riche en fait de même, et ces deux députés disposent chacun d’une voix de même valeur : au sein de notre République, c’est la représentation démographique qui prime sur tous les autres critères. Il ne s’agit pas ici seulement des fondements de l’intercommunalité, mais de ceux de notre démocratie.

On peut donc améliorer l’accompagnement financier des communes touristiques, mais je ne pense pas qu’il soit opportun de modifier le mode de désignation des conseillers communautaires dans les zones touristiques. Si une telle disposition était appliquée, des élus urbains des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) pourraient très bien dire que, quand on a un QPV très fragile, les questions de la politique de la ville passent au second plan au sein du conseil communautaire, et dès lors exiger que les communes ayant conclu un contrat de ville bénéficient d’une majoration du nombre de leurs délégués communautaires… Cela pourrait être sans fin.

En tout état de cause, cette mesure serait censurée par le Conseil constitutionnel du fait qu’elle méconnaît les principes fondamentaux de représentation au sein de la République. Je vous invite donc, madame la députée, à retirer ce que je vois comme un amendement d’appel ayant vocation à appeler l’attention sur le fait que les élus des communes touristiques rurales et intermédiaires peuvent se sentir un peu isolés au sein des conseils communautaires.

L’amendement est retiré.

Article 7
(art. L. 151-3, L. 153-15, L. 153-21, L. 153-27, L. 153-45, et L. 153-47 du code de l’urbanisme)
Renforcement du rôle des communes dans l’élaboration du plan local d’urbanisme intercommunal.

La Commission examine l’amendement CL251 de M. Xavier Breton.

M. Xavier Breton. L’amendement CL251 a pour objet de revenir sur l’article 136 de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), qui prévoit le transfert automatique de la compétence PLU aux intercommunalités.

L’urbanisme est une compétence importante, qui revêt très souvent une dimension intercommunale, et toute la question est de savoir si on doit faire application du principe de subsidiarité en laissant d’abord aux communes le soin de choisir elles-mêmes quel est le meilleur échelon pour traiter de l’urbanisme.

En posant le principe selon lequel cet échelon est forcément celui de l’intercommunalité, la loi ALUR est contraire à la liberté communale et au principe de subsidiarité. C’est pourquoi il vous est proposé, avec cet amendement, d’abroger l’article 136 de la loi ALUR.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’intercommunalité, avec les aménagements que propose l’article 7 en matière d’urbanisme intercommunal, est la bonne échelle pour conduire des politiques publiques locales d’aménagement. Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Julien Denormandie et moi-même avons mené des concertations en amont sur cette question, et je pense que le mode de fonctionnement actuel de la prise de compétence, ou plutôt de la capacité à repousser la prise de compétence, est satisfaisant. Il peut toujours y avoir des irritations pour ceux qui ont déjà pris cette compétence – certains amendements qui suivent visent à y remédier –, mais je ne pense vraiment pas opportun de remettre en cause une méthodologie qui fonctionne plutôt bien.

Quand on se rend sur le terrain, on entend des choses sur le tourisme ; pour ce qui est de l’urbanisme, j’ai le sentiment que cela va beaucoup mieux, et que les problèmes qui subsistent proviennent davantage de la méthode employée pour l’établissement du document que de la prise de décision elle-même – va-t-on à l’intercommunalité sur un document d’urbanisme, ou en reste-t-on au bloc communal ? J’ai le sentiment que nous en sommes à l’étape suivante, celle où il est nécessaire de fluidifier un peu les processus, et c’est justement l’un des objectifs du projet de loi. Je vous invite par conséquent à retirer cet amendement, monsieur le député.

M. Raphaël Schellenberger. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous, monsieur le ministre. Les questions relatives au PLU obéissent à un mécanisme atypique : on considère qu’il s’agit d’une compétence intercommunale de droit, mais on permet tout de même de repousser – temporairement – cette compétence sur le plan local, au sein des territoires où il apparaît qu’il existe un intérêt à ce que cette compétence ne soit pas intercommunale. Nous aurons sans doute à en reparler quand nous devrons faire face au constat de l’incapacité de nombreux territoires à développer des documents d’urbanisme intercommunaux, qui sont d’une invraisemblable complexité – je pense non seulement à leur élaboration, mais au contentieux qu’ils risquent d’engendrer. Ce contentieux risque d’être extrêmement dangereux, en ce qu’il pourra faire tomber des pans colossaux de documents d’aménagement en raison d’erreurs matérielles ne concernant qu’une partie du territoire intercommunal.

Nous ne pouvons que regretter un forcing qui ne semble pas avoir beaucoup de sens, d’autant plus qu’il existe de nombreux documents d’urbanisme à l’échelle supra-communale – je pense notamment au schéma de cohérence territoriale (SCOT) – qui, avec des règles très contraignantes, laissent peu d’espace à ce que peut être un PLU et coordonnent largement les stratégies d’aménagement à l’échelle d’un territoire.

L’article 7 introduit certaines souplesses dans la construction, la gestion et l’adoption d’un plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi), mais je pense que ce n’est pas suffisant, car on ne va pas au bout de la logique qui devrait nous mener à la conclusion qu’il y a un schéma de trop, et qu’il faudrait clarifier le dispositif afin que l’on comprenne mieux quelle compétence revient à chaque échelon – commune, intercommunalité et territoire d’aménagement. Parfois c’est le SCOT porté par l’intercommunalité qui correspond, mais ce n’est pas toujours le cas, et il n’y a alors pas forcément d’intérêt à multiplier par trois le nombre d’échelons concernés.

Je soutiens donc l’amendement CL251 de notre collègue Xavier Breton, et je présenterai moi-même un peu plus tard, après l’article 7, un amendement ayant le même objet.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Monsieur Schellenberger, il faut que nous soyons cohérents, sinon nous n’allons pas nous en sortir. Le Parlement et le Gouvernement ont pris des mesures de souplesse et de simplification en matière de prise de compétence, ce que vous ne sauriez leur reprocher aujourd’hui en formulant toutes sortes de critiques à l’égard de ces mesures.

M. Raphaël Schellenberger. Ce n’est pas vraiment ce que j’ai dit, monsieur le ministre !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. C’est pourtant ce que j’ai cru vous entendre dire au début de votre intervention.

Pour notre part, nous considérons que, si l’urbanisme est une affaire délicate et que le niveau intercommunal est celui qui permet des réalisations stratégiques dans le domaine des projets de territoire, des blocages peuvent parfois survenir au niveau local, ce qui justifie qu’on puisse repousser la compétence. Il me semble qu’il n’y a pas plus souple et bienveillant que ce dispositif ! Exiger 25 % des communes et 20 % de la population pour constituer un blocage, c’est franchement assez peu, et en tout état de cause accessible.

Par ailleurs, contrairement à ce que vous avez dit, la compétence n’est pas repoussée de façon temporaire. Il ne s’agit pas, comme cela a été le cas pour l’eau et l’assainissement, de gagner du temps pour se mettre en conformité : à chaque renouvellement des exécutifs – ce sera le cas dès le lendemain de l’élection communautaire, en avril 2020 –, l’EPCI pourra de nouveau repousser la prise de compétence sur le document d’urbanisme. En matière de bienveillance, de construction d’une liberté locale basée sur la possibilité de déroger à un principe – grâce à une majorité significative mais pas impossible à atteindre –, on peut difficilement trouver un équilibre plus satisfaisant, un meilleur chemin de crête.

Je vous invite, par conséquent, à ne pas remettre en cause un dispositif qui fonctionne bien et, si cela peut vous convaincre, je vais vous donner un chiffre de Normand : aujourd’hui, vous avez une prise de compétence dans un cas sur deux, ce qui me semble avoir une certaine signification. On ne peut pas parler sans cesse de différenciation, et ne pas la permettre sur le territoire quand l’occasion s’en présente : avec la capacité à prendre la compétence, la différenciation s’opère de fait.

M. Rémy Rebeyrotte. Que ce soit en matière de tourisme ou d’urbanisme, nous débattons ici des équilibres internes au bloc communal. Cela dit, le bloc communal fonctionne dans un ensemble plus vaste, à savoir les lois de la République. Dans le domaine de l’urbanisme, de nombreuses difficultés proviennent de la loi ALUR qui, si elle présente des avantages et des inconvénients, contraint plus fortement les communes rurales en termes d’urbanisme. Les mécontentements qui s’expriment ne proviennent pas du fait que les projets d’urbanisme se font à l’échelle intercommunale : cela aurait été la même chose à l’échelle communale, et on évolue dans le cadre des lois de la République.

Il en est de même pour le tourisme, où la région est un acteur essentiel, c’est pourquoi vous avez eu raison de souligner que l’intercommunalité doit rester l’élément clé en la matière – on sait que le couple région-intercommunalité est extrêmement important sur le plan économique, mais aussi sur le plan touristique. Encore faut-il que les régions pratiquent une politique très proche des intercommunalités, donc très proche du bloc communal. On ne pourra pas tout corriger, et il s’agit d’abord, à l’intérieur du bloc communal, de rechercher à la fois l’efficacité et le travail en commun.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie des amendements identiques CL252 de M. Xavier Breton, CL706 de Mme Annie Genevard, CL786 de Mme Agnès Thill et CL911 de Mme Frédérique Lardet.

M. Xavier Breton. L’amendement CL252 vise à garantir aux communes qui font l’objet d’un plan de secteur que leur vision de la planification urbaine sur leur territoire sera effectivement prise en compte. Cet amendement introduit l’obligation pour le président de l’EPCI de justifier auprès de la commune concernée toute décision ne respectant pas son avis.

Mme Agnès Thill. L’amendement de précision CL786 vise à garantir aux communes qui font l’objet d’un plan de secteur que leur vision de la planification urbaine sur leur territoire sera effectivement prise en compte. En effet, donner, sans plus de précision, la possibilité aux communes de rendre un avis sur un projet de secteur les concernant, ne garantit en rien la prise en considération qui lui sera accordée, et peut se réduire à une consultation purement formelle. Le présent amendement introduit l’obligation pour le président de l’EPCI de justifier, de façon précise, auprès de la commune ou des communes concernées, toute décision ne respectant pas leurs avis.

M. Bruno Questel, rapporteur. Le dispositif qui est ici proposé créerait un alourdissement des procédures et serait redondant avec la demande d’avis de l’ensemble des communes dans le cadre de l’élaboration d’un PLU. Je suis donc défavorable à ces amendements.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je rappelle qu’il existe déjà un verrou des deux tiers, qui oblige déjà à la convergence politique au sein du conseil communautaire pour avoir un dispositif qui fonctionne bien : pour passer outre ces deux tiers, il faut vraiment qu’il y ait une difficulté ! La bonne intention de ces amendements m’apparaît clairement – obliger à répondre, obliger à un débat contradictoire, etc. – mais, dès lors qu’on sort du droit et qu’on se penche sur ce qui se passe dans la réalité, il faut bien reconnaître que, si une telle proposition ne risque pas vraiment de rendre le document infaisable – ce serait la version pessimiste –, on n’est pas non plus dans une logique d’assouplissement…

C’est toujours un peu la même chose, et on en revient ici à nos discussions d’hier soir : en croyant protéger une commune ou un maire, on peut très bien rigidifier le système pour les quarante autres communes de l’intercommunalité – ce qui, vous en conviendrez, n’est pas vraiment l’objectif d’un texte ayant vocation à introduire davantage de facilité et de simplification !

Je vous invite par conséquent à retirer ces amendements, et émettrai à défaut un avis défavorable.

M. Raphaël Schellenberger. Nous avons affaire à un amendement intéressant en ce qu’il pose la question – entrant en résonance avec l’article 1er – de la gouvernance à l’échelle intercommunale de certaines compétences particulièrement sensibles, au nombre desquelles figure l’urbanisme. La solution prévue par le texte est-elle la meilleure, et est-elle adaptée à tous les territoires ? Si on peut penser qu’elle constitue une protection pour la plupart des territoires, pour respecter l’esprit de liberté auquel je me réfère depuis le début de l’examen de ce texte – on a beaucoup parlé de Tocqueville –, j’imagine qu’on peut permettre aux EPCI à fiscalité propre de se doter de ce genre de règles, sans que celles-ci deviennent contraignantes au niveau national.

J’avais déposé à l’article 1er un amendement qui est malheureusement tombé, mais je le redéposerai en vue de la séance publique. Il s’agit d’une mesure qui permettrait, dans le cadre du pacte de gouvernance ou de la constitution du conseil des maires, de confier localement des prérogatives contraignantes prévues aux termes d’un contrat conclu pour le transfert d’une compétence, et d’accompagner ce contrat des outils de la gouvernance en raison du caractère particulièrement sensible d’une compétence.

Une telle proposition constitue une position intermédiaire, à laquelle nous pourrions travailler d’ici à la séance publique.

M. Xavier Breton. M. le rapporteur et M. le ministre évoquent un alourdissement des procédures. Or les communes dont il est ici question sont uniquement celles concernées directement par un plan de secteur – et non des quarante et une communes d’une intercommunalité, pour reprendre l’exemple que vous avez donné, monsieur le ministre. On ne devrait même pas avoir à inscrire cela dans la loi, car les choses sont censées bien se passer. Cependant, ce n’est pas toujours le cas, ce qui justifie de prévoir une procédure pour y remédier.

C’est tout simplement du bon sens, et je ne vois pas pourquoi le dialogue entre l’intercommunalité et les communes devrait être considéré comme un alourdissement : au contraire, dans les quelques cas où les choses ne se passent pas comme elles le devraient, il est de notre responsabilité d’imposer ce dialogue.

M. Bruno Questel, rapporteur. Si l’on se réfère à votre raisonnement, monsieur Breton, on pourrait croire que les communes et les intercommunalités sont dans l’incapacité de se parler si on ne les dote pas du dispositif que vous proposez, ce qui paraît curieux. Il y a de nombreux échanges entre communes et intercommunalité dans le cadre de l’élaboration d’un plan local d’urbanisme intercommunal et, qu’il s’agisse du territoire global de l’intercommunalité ou d’un plan de secteur, les élus se parlent. Je rappelle d’ailleurs que les élus municipaux siègent bien souvent au sein de l’intercommunalité à laquelle ils appartiennent, et ont toute latitude pour intervenir au cours des séances de ladite intercommunalité. Je confirme qu’à mon sens, votre proposition se traduirait par un alourdissement du dispositif existant, et je maintiens donc mon avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je comprends votre argument, monsieur Breton : si une commune est plus particulièrement concernée par un plan de secteur, il semble qu’elle serait fondée à mieux faire valoir son avis. Mais il pourrait en aller de même pour toute opération d’aménagement programmée. Lorsqu’on ouvre ce chemin-là, on se doit d’être vigilant…

Monsieur Schellenberger, j’aime la philosophie qui sous-tend votre position, à savoir qu’une loi ne serait pas nécessaire si les choses fonctionnaient bien. C’est précisément la préoccupation à laquelle répond l’instauration du pacte de gouvernance, qui régit les relations entre l’intercommunalité et la commune, notamment dans le domaine de l’urbanisme, domaine d’élection de la coopération entre elles.

En vue de la séance publique, nous pouvons donc rechercher un libellé qui permettrait aux intercommunalités qui le souhaitent d’adapter de manière ad hoc le pacte de gouvernance. Cela pourrait se faire sans modifier le principe inscrit dans la loi. Car, du fait de sa généralité, une certaine rigidité se ferait sinon jour, contre laquelle le rapporteur nous prévient.

Le pacte ne saurait déroger à une norme législative ou réglementaire. Mais on peut codifier une bonne pratique, prévoyant que, lorsqu’un EPCI élabore un plan de secteur ou en prévoit la modification, il se doit d’apporter certaines garanties. C’est tout à fait possible, dans le cadre d’un schéma que je n’hésiterai pas à qualifier de « tocquevillien ».

Je propose donc le retrait des amendements, en invitant le député Schellenberger à travailler avec mes équipes pour arriver, en vue de la séance publique, à une formulation satisfaisante, explorant le mode du possible plutôt que le mode de la norme obligatoire.

Les amendements sont retirés.

La Commission examine l’amendement CL366 de M. Alexis Corbière.

Mme Bénédicte Taurine. Nous proposons de redonner aux communes – et aux maires – un réel pouvoir concernant l’élaboration du plan local d’urbanisme intercommunal. Nous considérons que l’avis de chaque commune doit être pris en compte. Nous voulons, par exemple, éviter qu’une commune puisse se voir imposer l’implantation d’un centre commercial. Cela permettrait de lutter, d’une part, contre l’artificialisation des sols et, d’autre part, contre la désertification des centres-villes.

M. Bruno Questel, rapporteur. Sans le dire, vous proposez de supprimer en fait la compétence de l’intercommunalité en matière de plans locaux d’urbanisme intercommunaux. Au demeurant, ce n’est pas en adoptant les documents d’urbanisme que l’on décide de l’implantation de tel ou tel équipement commercial.

Mon avis ne peut donc être que défavorable ; sinon, demande de retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. L’intention qui anime l’amendement paraît généreuse, mais il propose en réalité un grand chambardement. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine les amendements identiques CL327 de M. André Chassaigne, CL568 de M. Xavier Breton et CL765 de Mme Agnès Thill.

M. Stéphane Peu. L’amendement CL327 reprend une préconisation de l’Association des maires ruraux de France (AMRF). Il tend à permettre d’instituer des règles spécifiques aux communes membres des EPCI à fiscalité propre compétents en matière d’urbanisme, sans avoir à recourir au dispositif des plans de secteur, afin de tenir compte de l’identité de chacune des communes.

Mme Agnès Thill. L’amendement CL765 vise à mieux prendre en compte l’identité de chacune des communes. Il tend en effet à permettre d’instituer, au sein du règlement, des règles spécifiques aux communes membres des EPCI à fiscalité propre compétents en matière d’urbanisme, sans avoir à recourir au dispositif des plans de secteur, afin de tenir compte de l’identité de chacune d’entre elles.

M. Bruno Questel, rapporteur. Nous suivons souvent, mais pas toujours, les préconisations de l’AMRF. En l’occurrence, les suivre mettrait à mal l’ensemble de la procédure relative à l’établissement des plans de secteur, lesquels obligent les communes à travailler avec l’intercommunalité, de manière à préserver la cohérence d’ensemble des territoires concernés. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. J’ai déjà entendu l’AMRF sur ce sujet. Quand elle propose cette rédaction, elle exprime ce faisant les difficultés que peuvent éprouver les communes rurales à se faire entendre au sein du conseil communautaire, notamment quand il s’agit d’y modifier les documents d’urbanisme.

Sur le plan juridique, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) a pourtant apporté une réponse à leur préoccupation, puisqu’elle permet d’établir une différenciation entre les documents. Certes, souvent, on cherche à étendre au maximum le zonage pour des raisons de facilité. Car, plus vous contrastez les situations, plus cela demande de travail pour bâtir cette dentelle. Mais, sur le plan légal, il n’y a cependant pas, ou plus, d’obstacle à le faire.

Je demande donc le retrait de ces amendements, qui ne produisent pas l’effet escompté puisque cette liberté existe déjà.

L’amendement CL765 est retiré.

La Commission rejette successivement les amendements CL327 et CL568.

Elle examine l’amendement CL173 de la commission du développement durable.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Je voudrais reprendre l’exemple du maire d’une petite commune ne disposant que d’un secrétariat de mairie pourvu à temps partiel. Admettons qu’au sein de son intercommunalité, un PLUi soit en préparation, qui concerne 100 ou 150 communes. Ce maire devra alors présenter au conseil municipal un avis éclairé sur le PLUi en préparation, sur ses enjeux et sur son impact pour la commune.

Ceux qui connaissent l’exercice savent que le maire reçoit alors un lien électronique, proposé sur une plateforme numérique. En cliquant sur ce lien, il accède à toute une série de documents, plus ou moins bien faits, mais surtout très complexes à identifier. La nouvelle génération d’élus locaux ne saura pas, de surcroît, dans quel esprit ont été établis les documents.

Cet amendement vise donc seulement à ce que, en sus des documents transmis aux communes, une note non technique leur soit envoyée, qui mette leur maire en mesure de présenter l’ensemble à son conseil municipal, de manière claire et simplifiée.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je suis défavorable à l’établissement d’une nouvelle forme de procédure de ce type. Rien n’empêche aujourd’hui une intercommunalité forte de 100 ou 150 communes de venir en appui des plus petites communes qui en sont membres ; elle peut les accompagner en leur apportant un soutien en personnel ou en leur fournissant des avis éclairés. Il faut, conformément à l’esprit de cette loi, laisser aux intercommunalités et aux élus communaux la liberté de s’organiser.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je ne vois pas quelle différence il y aurait entre cette note non technique et le plan d’aménagement et de développement durable (PADD). Document populaire qui permet à tout le monde de se mettre au travail, il laisse aussi à la société civile la possibilité d’enrichir la réflexion collective. Lors de son processus d’adoption, le conseil municipal doit exprimer des orientations politiques, à plusieurs reprises, et en particulier sur la question de la transition écologique.

En outre, le conseil municipal est libre de rédiger comme il l’entend la délibération qu’il doit prendre au sujet du PLU. Non seulement le maire en établit le projet comme il le souhaite, mais les conseillers municipaux peuvent aussi l’amender. La trace mémorielle de l’intention politique est donc conservée.

Entre le PADD et cette délibération, les documents sont déjà assez nombreux, me semble-t-il. Demande de retrait.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. J’ai dû mal m’exprimer. Le PADD préparatoire à l’établissement d’un PLUi doit faire 200 pages. Comment le maire d’une commune de 50 habitants, qui exerce par ailleurs une fonction professionnelle, peut-il trouver le temps de se préparer à expliquer aux membres du conseil municipal quels sont les enjeux du PLUi à l’échelle de la région, du département, de l’intercommunalité et de la commune ? Il se heurtera rapidement aux objections très concrètes des membres du conseil municipal, qui pourront aussi bien le mettre au défi de savoir combien ledit plan peut faire gagner d’habitants à la commune dans les dix ou vingt ans à venir.

Or le maire, qui peut de surcroît se trouver en présence de conseillers municipaux d’opposition, doit disposer de réponses. Pour aider les maires, il faut donc que nous fassions en sorte qu’ils puissent s’appuyer sur des éléments très simples, tels que les perspectives d’évolution démographique dans la commune, selon les secteurs d’habitation, ou encore l’étendue des surfaces ouvertes à l’urbanisation sur le territoire de la commune. Si le maire ne sait pas lire les plans contenus dans les documents d’urbanisme, il ne peut pas répondre.

Le besoin d’une note récapitulant les éléments-clés se fait donc sentir. Loin de rigidifier la discussion, elle permettra d’aider les maires à alimenter utilement le débat public.

M. Arnaud Viala. Pour travailler en ce moment, dans ma circonscription, à l’élaboration de PLUi et de SCOT, je comprends tout à fait la situation que vous décrivez. En revanche, je ne pense pas du tout qu’on puisse, par la loi, encadrer la manière dont sont fournis aux maires certains éléments.

Le prévoir témoignerait même d’une forme de condescendance vis-à-vis d’élus qui appréhendent très souvent de manière complète les enjeux de la discussion. Non contents d’y participer, ils sont à même d’en expliquer avec leurs propres mots les tenants et les aboutissants et, surtout, d’en présenter la synthèse. D’ailleurs, il n’est pas question d’exposer un PADD de 200 à 500 pages devant un conseil municipal, qu’il s’agisse de celui d’une grande commune ou d’une petite commune.

En outre, ce serait entraver la liberté des élus communaux que de ne pas leur laisser la latitude nécessaire pour s’approprier les documents. Souvent, des bureaux d’études parfaitement compétents peuvent entendre les communes sur leurs attentes ; ils seront aussi capables de leur fournir ces documents de synthèse. La question ne saurait se régler ici par la loi. Pour ma part, en tout cas, j’y suis vraiment opposé.

M. Lionel Causse. L’urbanisme constitue la base du projet communal. Je comprends donc l’objectif de notre collègue Alain Perea. Car, en donnant à l’intercommunalité la compétence d’élaboration des PLUi, on peut mettre les élus aux prises avec des difficultés, en particulier les élus des petites communes, qui n’ont pas forcément la compétence technique pour expliquer, défendre et mettre en œuvre leurs projets.

Il serait important d’établir une obligation d’information sur la manière dont le maire peut faire le lien entre son projet municipal et le contenu du PLUi, que ce soit en matière d’habitat, de déplacement, de mobilité ou d’urbanisation.

Mme Cécile Untermaier. Même si je n’approuve pas l’amendement qui vient d’être défendu, j’en mesure tout l’intérêt et toute l’intelligence. Il témoigne d’une réelle attention envers les élus. Une note technique peut cependant exposer à des recours contentieux. Ne vaut-il pas mieux préférer l’original à la copie ? Car personne n’aura la garantie de recevoir un document qui ne soit pas orienté.

La note technique n’est donc pas le bon outil. Comme vous l’avez dit à juste titre, monsieur le ministre, c’est le pacte de gouvernance qui me semble plutôt l’être. Il peut prévoir un accompagnement des petites communes en matière d’explications à donner sur les questions d’urbanisme. À cet égard, il faudrait aussi poser le problème de la formation des élus, qui ne sauraient se retrouver dans la main des experts.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je voulais en effet vous renvoyer à l’article qui traitera de la formation des élus. Les maires peuvent bénéficier de nombreux dispositifs de formation. Il faut, par ailleurs, prendre garde de ne pas laisser les élus dans la main des gros cabinets qui travaillent pour les intercommunalités. Ceux-ci auraient beau jeu de réutiliser les mêmes modèles d’explication pour les différentes communes, ce qui serait particulièrement frustrant pour les élus.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Je tiens d’abord à préciser qu’il s’agissait d’une note non technique. Ensuite, je ne saurais retirer un amendement qui a été adopté par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, dont je suis le rapporteur pour avis. Quant aux bureaux d’études, il me semble qu’on peut leur faire confiance pour élaborer des notes non techniques.

Quoi qu’il en soit, le nom même du plan local et intercommunal devrait attirer notre attention sur les difficultés inhérentes à l’approche actuelle de la compétence urbanistique. Les documents d’urbanisme sont conçus pour être élaborés par une équipe municipale, à une échelle communale. Or on a transféré cette compétence à l’échelle intercommunale…

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL253 de M. Xavier Breton.

M. Xavier Breton. Cet amendement propose d’obliger, en cas d’avis défavorable de la commune sur le projet de PLU intercommunal, l’organe délibérant de l’EPCI à se prononcer sur un projet modifié à la majorité des deux tiers. Il a donc pour objet d’obliger l’EPCI à tenir compte de l’avis défavorable de la commune et à proposer des modifications tenant compte de cette opposition.

M. Bruno Questel, rapporteur. La procédure que vous créez reviendrait à exiger quasiment un avis conforme de la commune concernée. Le dispositif du projet de loi me semble plus équilibré : avis de la commune, majorité qualifiée de l’EPCI en cas d’avis défavorable de la commune et délai de deux mois pour éviter les situations de blocage. Laissons les gens se parler sur le terrain et trouver les solutions conformes à l’intelligence collective. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. En marquant tout à l’heure mon opposition à votre amendement CL252, je mettais en garde contre la tentation de s’engager, en révisant la procédure d’adoption des plans de secteur, sur une pente qui pourrait nous mener loin… Il me semble que votre amendement relatif à l’adoption du plan local d’urbanisme confirme maintenant mes vues. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL832 de M. Paul Molac. 

M. Paul Molac. Cet amendement tend à ce que, lorsqu’un plan local d’urbanisme est recalé, la communauté de communes en propose un qui soit modifié. En effet, rien ne l’empêche aujourd’hui, malgré un premier avis défavorable, de proposer à nouveau le même plan que celui qui a été recalé.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL600 de M. Robin Reda. 

M. Robin Reda. Cet amendement vise à allonger le délai pendant lequel la commune peut émettre un avis sur le PLUi modifié, par simple cohérence avec la règle qui oblige les conseils municipaux à se réunir au moins une fois par trimestre. De cette manière, si une commune est saisie d’un PLUi au début de son cycle de réunions, elle est sûre de pouvoir néanmoins rendre un avis dans les trois mois.

M. Bruno Questel, rapporteur. Votre amendement pourrait se comprendre si toutes les communes étaient saisies le 1er juillet de chaque année calendaire. Mais ce n’est pas le cas. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL254 de M. Xavier Breton. 

M. Xavier Breton. Cet amendement tend à prévoir la présence des maires délégués au sein de la conférence intercommunale au cours de laquelle sont présentés les avis, les observations et le rapport. Il s’agit d’une modification du huitième alinéa de l’article.

M. Bruno Questel, rapporteur. Les maires délégués n’ayant aucune compétence en matière d’urbanisme, cela ferait beaucoup de monde au sein de cette conférence intercommunale. Au surplus, on peut penser que maires délégués et maires de communes nouvelles se parlent. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Il ne faudrait pas que nous inventions une autre catégorie de communes, celle des communes nouvelles. Je réaffirme que les communes nouvelles sont des communes comme les autres. Ce n’est plus le cas si on commence à imaginer des situations spécifiques pour les maires délégués.

L’accord initial relatif aux communes nouvelles a fait l’objet d’un consensus entre l’Assemblée et le Sénat, qui se sont retrouvés sur la proposition de loi de la sénatrice Françoise Gatel, adoptée à l’unanimité dans les deux chambres. Cette proposition repose sur le principe de mesures de transition visant à aider à la création de communes nouvelles. Mais il ne faudrait pas créer de droit dérogatoire ad vitam aeternam dans le domaine des communes nouvelles.

Comme le dirait le président Mélenchon, on abîmerait alors la commune et, ce faisant, on abîmerait la République. C’est ce qu’il a dit à la tribune de l’Assemblée nationale, madame Taurine, lorsque votre assemblée a examiné la proposition de loi de Mme Gatel.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement de cohérence CL1025 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CL509 de M. Lionel Causse. 

M. Lionel Causse. Cet amendement de portée mineure vise à supprimer un « irritant » mineur, en permettant aux communes, dès lors qu’un PLUi n’a pas encore été approuvé du fait d’un avis défavorable d’une commune membre, et qu’un schéma de cohérence territoriale est en vigueur, d’opérer une révision du PLU.

Il s’agit en fait d’éviter des blocages sur des territoires et de permettre à des communes, en cohérence avec les orientations qui sont données à travers les SCOT, d’avancer s’il y a un blocage politique. Car la règle des deux tiers des conseillers communautaires à rallier pour pouvoir poursuivre et approuver le PLUi est souvent compliquée à mettre en œuvre lorsqu’il y a un problème politique.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il n’existe pas de toute petite procédure de révision des PLU. On risquerait de voir deux procédures se télescoper. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. En effet, ce n’est pas une petite procédure. Mais je vois surtout dans votre amendement un appel à poursuivre les travaux que vous menez actuellement avec Julien Denormandie pour résoudre un certain nombre de situations. Votre proposition ne ferait, quant à elle, que compliquer les choses. Avis défavorable.

M. Lionel Causse. Il s’agit de pouvoir débloquer la situation sur une commune. Puisque les PLUi doivent être conformes aux PLU, lorsqu’ils sont prêts mais qu’une commune bloque, cela ne doit pas empêcher d’en reprendre une partie communale pour débloquer la situation, s’il y a des enjeux en matière de développement, d’habitat, de services…

Depuis deux ans, je travaille ainsi sur un projet de territoire aux prises avec de grosses difficultés. Il faut qu’on trouve une solution. À partir du moment où le SCOT fixe un cadre, pourquoi ne pas débloquer une partie de PLU ? Il ne s’agit pas d’en faire la révision totale, puisque les documents sont déjà réalisés pour l’élaboration du PLUi ; il s’agit simplement de l’en sortir. Aujourd’hui, on peut modifier un PLU mais pas le réviser – c’est tout de même très limité en matière de développement territorial.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine les amendements identiques CL226 de M. Raphaël Schellenberger et CL787 de Mme Agnès Thill. 

M. Raphaël Schellenberger. Cet amendement de bon sens tend seulement à créer un délai de réponse pour les personnes publiques associées (PPA), lorsqu’elles sont sollicitées dans le cadre de la modification ou de la modification simplifiée d’un PLU. Ce délai existe dans le cadre de l’élaboration d’un PLU, mais il n’existe pas dans le cadre de sa modification simplifiée. En matière de sécurisation de la procédure, cela me semble important.

Mme Agnès Thill. En effet, dans le cadre des procédures de modification ou de modification simplifiée des PLU, aucun délai n’encadre la réception des avis des personnes publiques associées après que le dossier leur a été notifié. De ce fait, les avis des PPA peuvent arriver tardivement lors de l’enquête publique. Ces avis doivent être joints au dossier d’enquête publique. Ce défaut d’encadrement des délais de réponse des PPA est régulièrement un moyen soulevé lors des recours sur les procédures de PLU, les requérants estimant que les avis doivent être mis à disposition dès le démarrage de l’enquête.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable. Les personnes publiques concernées par les avis dans le cadre des enquêtes ne sont pas les mêmes. Elles sont trop nombreuses pour qu’on leur impose un délai uniforme : régions, départements, communes limitrophes, syndicats… Ce serait inéquitable. En outre, aucun mécanisme de sanction pour non-respect des délais n’est prévu. Le dispositif est donc inopérant.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable ou demande de retrait, mais pour des motifs différents de ceux évoqués par le rapporteur.

Aujourd’hui, sur une modification simplifiée du PLU, l’avis des PPA n’est pas obligatoire. Mais si vous instaurez un délai pour « clarifier » ou « sécuriser », comme vous l’avez dit, vous rendez leur avis de facto obligatoire. Je veux m’assurer que vous en avez conscience, car vous ne l’avez pas dit dans votre présentation.

Pour ma part, je ne pense pas qu’il soit utile de rendre obligatoire la consultation des PPA, parce que cela revient à ajouter une contrainte supplémentaire. S’il n’y pas d’indication de délai, jusqu’à présent, c’est tout simplement que l’obligation de rendre un avis n’existe pas. Je suis hostile à l’idée d’instaurer une obligation supplémentaire.

M. Raphaël Schellenberger. Je ne comprends pas les arguments du rapporteur. Au moment de l’élaboration d’un PLU, le délai imposé pour rendre un avis est le même pour toutes les PPA. Cela n’instaure pas de distorsion entre un département et d’autres collectivités. Il n’y a donc pas de raison que les collectivités ne soient pas capables de faire, lorsqu’il s’agit de la modification ou de la modification simplifiée d’un PLU, ce qu’elles font lors de l’élaboration de ce même PLU.

Je comprends mieux les arguments du ministre. Je vais donc retravailler à cet amendement d’ici à la séance publique. Toutefois, son raisonnement souffre aussi d’une carence. Car, si l’avis n’est pas obligatoire, il peut tout de même être sollicité. Si une PPA voulait répondre dans le cadre de cette sollicitation, même si son avis n’est pas obligatoire, dans quelles conditions le fait-elle ? Dispose-t-elle de deux semaines, d’un mois ou de six mois ?

Même si l’avis n’est pas obligatoire, il me semble important que le délai soit précisé, sous peine de faire courir un risque contentieux.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. S’il devait être écrit, dans un amendement examiné en séance publique, que le délai de consultation de la PPA court jusqu’à la fin de l’enquête publique, cela répondrait à votre objectif de sécurisation. Voilà comment il faudrait libeller l’amendement. Autrement, on crée une obligation supplémentaire, et ce n’est pas souhaitable.

Mme Marie-Noëlle Battistel. J’entends les arguments relatifs à la création d’une obligation supplémentaire, qui n’est pas souhaitable. Par contre, les réponses des PPA traînent vraiment longtemps. Fixer une date butoir, comme vous venez de le proposer, peut être la solution. Il s’agit en tout cas d’une préoccupation réelle, car on rencontre régulièrement des difficultés sur le terrain.

Les amendements sont retirés.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL1026 et CL1027 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CL1164 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 19 à 21 de l’article 7, qui tendaient à restituer à la commune le droit de préemption urbain (DPU). Je voudrais revenir sur la modification introduite par le Sénat, qui dissocie le PLU de la DPU, car ces deux compétences sont des leviers complémentaires pour maîtriser et organiser l’utilisation du foncier et ne peuvent, de ce fait, être dissociées.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. L’amendement CL890 de Mme Pires Beaune, qui n’a pas pu être défendu, était plein de bon sens. S’il avait été défendu, j’aurais émis un avis favorable à son endroit. À bon entendeur…

Avis favorable pour les deux amendements du rapporteur.

M. Raphaël Schellenberger. Je trouve dommage de revenir sur cette dissociation. Il s’agit d’une question de gouvernance. Dissocier les documents d’urbanisme peut aussi permettre d’arriver à un point d’équilibre localement. Imaginons, par exemple, que, dans le PLU, ou même dans le PLUi, on définisse un emplacement stratégique destiné à un aménagement communal, l’intercommunalité n’aura pas forcément le réflexe d’exercer son droit de préemption. Il me semble qu’il faut introduire plus de souplesse localement, pour coller aux réalités des projets d’aménagement et d’infrastructure locaux.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements identiques CL124 de M. Jean-Louis Touraine, CL673 de M. Vincent Bru et CL755 de M. Rémy Rebeyrotte, ainsi que les amendements CL91 de Mme Catherine Kamowski et CL125 de M. Jean-Louis Touraine tombent.

La Commission adopte l’article 7 modifié.

Après l’article 7

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL225 de M. Raphaël Schellenberger. 

Article 7 bis A
(art. L. 174-5 du code de l’urbanisme)
Report de la date de caducité des plans d’occupation des sols pour les communes membres d’une intercommunalité qui n’aurait pas achevé son plan local d’urbanisme intercommunal

La Commission examine l’amendement CL601 de M. Robin Reda.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Le sénateur Reichardt a déjà lui-même demandé un report jusqu’à 2021 de la caducité des plans d’occupation des sols. Le 31 décembre 2020 me semble être la bonne date pour un tel report, par respect pour les équipes municipales qui vont être élues en mars 2020. Elles pourront ainsi, entre mars et décembre 2020, prendre leurs dispositions.

En fixant cette date, l’Assemblée nationale, le Sénat et le Gouvernement marquent le respect qu’il convient aux élus locaux. Accorder encore un temps supplémentaire, en allant jusqu’au 31 décembre 2021, ne me semble en revanche pas souhaitable, alors qu’on doit aussi en finir. Après avoir entendu le sénateur Reichardt sur ce sujet au Sénat, je vous propose de retirer votre amendement pour maintenir le consensus qui s’est dégagé au cours de la navette.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 bis A sans modification.

Après l’article 7 bis A

La Commission est saisie des amendements CL227 et CL228 de M. Raphaël Schellenberger.

M. Raphaël Schellenberger. Ces deux amendements ont trait à un enjeu important, appelé à monter en puissance dans les mois à venir : l’adhésion aux établissements publics fonciers (EPF). Le projet de loi ne semble pas rendre cette adhésion obligatoire mais certains décrets en préparation pourraient remettre en cause ce principe, ce qui engendrerait un double problème.

Premièrement, l’adhésion des EPCI aux EPF deviendrait automatique, ce qui générerait une fiscalité locale subie, alors même que le besoin ne s’en fait pas sentir. Avec l’émergence d’EPCI de taille importante encouragée par la loi NOTRe sont en effet apparus des outils susceptibles d’aider à la gestion de la maîtrise foncière, des acquisitions foncières et de l’aménagement.

Deuxièmement, il serait impossible à un EPCI d’adhérer à un autre EPF que l’EPF de l’État. Prenons un exemple : si demain un décret venait obliger les EPCI du Grand Est à adhérer à l’EPF de l’État, ils n’auraient d’autre choix que l’EPF de Lorraine alors qu’il existe depuis plusieurs années un EPF d’Alsace pour lequel le coût d’adhésion supporté par le contribuable serait deux fois moindre.

Il s’agit d’un point sensible, car ces adhésions tendent à augmenter la fiscalité. À quoi bon supprimer la taxe d’habitation si l’on maintient cette parafiscalité locale, au demeurant inutile pour les EPCI de taille suffisamment grande ?

Nous voulons donc réaffirmer la liberté pour les EPCI d’adhérer ou non à un EPF et de choisir le type d’EPF auxquels ils veulent adhérer.

Bruno Questel, rapporteur. Si je vous ai bien compris, monsieur Schellenberger, vous proposez de faire figurer dans la loi des dispositions qui répondent à une réglementation qui n’existe pas encore puisque vous avez évoqué des « décrets en cours de préparation ». Je vous demanderai de bien vouloir retirer vos amendements que j’estime satisfaits.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

M. Raphaël Schellenberger. Il me semble important que la loi encadre la réglementation pour que celle-ci n’aille pas à l’encontre des deux principes que j’entends défendre : l’adhésion facultative à un EPF et la liberté de choix dans l’adhésion

La Commission rejette successivement les amendements.

Article 7 bis B
(art. L. 423-2 du code de l’urbanisme)
Création d’un droit de timbre en matière d’autorisations et de déclaration d’urbanisme

La Commission examine les amendements de suppression CL1165 du rapporteur et CL1045 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avec mon amendement CL1165, je vous propose de supprimer l’article 7 bis B qui instaure une taxe supplémentaire qui pèserait sans distinction sur les promoteurs mais aussi sur les ménages.

M. Sacha Houlié. Cet article fait partie des enrichissements superflus du Sénat que nous évoquions.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Cet article a été ajouté à la suite d’un amendement défendu nuitamment par Mme la sénatrice Delattre, de Gironde. Il me paraît bon que votre assemblée supprime cette nouvelle taxe.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 7 bis B est supprimé.

Article 7 bis C
(art. L. 5219-5 du code général des collectivités territoriales et art. L. 134-2 du code de l’urbanisme)
Possibilité pour les communes de la métropole de Paris de conserver la compétence en matière d’urbanisme

La Commission est saisie des amendements de suppression CL1166 du rapporteur, CL754 de M. Rémy Rebeyrotte et CL1040 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. Nous souhaitons par l’amendement CL1166 supprimer cet article introduit par le Sénat – j’ignore si c’était nuitamment ou pas –, car il revient à octroyer uniquement aux communes du bassin parisien des compétences en matière de PLU.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. C’était toujours la nuit au Sénat que cet article a été introduit. Pour des raisons que je vous ai déjà exposées, toutes les questions relatives à la Métropole du Grand Paris seront traitées de manière approfondie dans le cadre du projet de loi que présentera Mme Gourault. Toucher aux relations avec les établissements publics territoriaux (EPT) et au fonctionnement métropolitain dans le présent projet de loi n’est pas la bonne méthode pour avancer. Avis favorable à ces amendements de suppression.

M. Robin Reda. Si nous pouvions nous attarder une petite minute sur la question de l’élaboration des PLUi et de la Métropole du Grand Paris, cela me ferait grand plaisir et cela éclairerait les maires dépourvus de la compétence en matière d’urbanisme dans ce qui est le plus grand imbroglio intercommunal de France. Je rappelle que les EPT sont des créations sui generis, distinctes des EPCI et des métropoles. Ces ensembles intercommunaux, aujourd’hui assimilés à des syndicats de communes, ont chapardé la compétence en matière d’urbanisme, sans doute à une heure très tardive lors de la discussion de la loi NOTRe, il y a quatre ans. Contrairement aux membres des EPCI, les élus territoriaux des syndicats de communes et des EPT d’Ile-de-France ne sont pas élus au suffrage universel direct. Ils n’ont donc pas le même degré de légitimité. Je considère que les communes de 10 000 à 100 000 habitants de la Métropole du Grand Paris sont tout à fait capables d’assurer la réalisation de plans locaux d’urbanisme et de se conformer au schéma directeur de la région Ile-de-France, au schéma de cohérence territorial de la Métropole du Grand Paris et à certaines obligations nationales.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 7 bis C est supprimé et l’amendement CL599 de M. Robin Reda n’a plus d’objet.

Article 7 bis D
(art. L. 5214-16 et L. 5216-15 du code général des collectivités territoriales)
Rétablissement de l’intérêt communautaire de la compétence en matière de zones d’activité économique

La Commission est saisie des amendements de suppression CL1167 du rapporteur, CL756 M. Rémy Rebeyrotte, CL835 de M. Charles de Courson, CL1046 de M. Sacha Houlié et CL1108 de M. Stéphane Baudu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Le présent amendement supprime l’article 7 bis D qui a pour objet de rétablir l’intérêt communautaire de la compétence en matière de zones d’activité économique. En l'état actuel du droit, cette dernière est attribuée de plein droit aux intercommunalités sans qu’il soit besoin de reconnaître au préalable un intérêt communautaire. Cet article aurait pour effet de transférer uniquement les zones d’activité économique reconnues d'intérêt communautaire aux EPCI et de conserver la compétence des communes sur les autres.

M. Charles de Courson. Nous voilà encore à devoir revenir sur le bazar mis par le Sénat ! Si cet article était maintenu, il y aurait d’un côté des zones d’activité économique communales, et de l’autre, des zones d’activité d’intérêt communautaire relevant des EPCI. Ce serait impossible à gérer. Si la notion d’intérêt communautaire a été mobilisée, c’est pour éviter la surenchère qui conduit à la constitution de stocks représentant quarante années de consommation. Supprimons cet article complètement déraisonnable qui conduirait à une gabegie !

M. Stéphane Baudu. Cet article aboutirait à une régression néfaste par rapport à l’équilibre établi par la loi NOTRe. Il ne faut pas mettre à mal la première compétence de l’intercommunalité qui est le développement économique.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Le Sénat a été un peu rapide dans sa manière de faire. Avis favorable à ces amendements de suppression. Revenons à l’état du droit actuel : une zone d’activité peut être soit communale soit intercommunale et c’est au conseil communautaire d’en décider grâce à l’outil que constitue l’intérêt communautaire, qui fonctionne très bien.

M. Arnaud Viala. Monsieur le ministre, je crains que l’avis que vous venez de donner n’aille à l’encontre de ce que voulez défendre. L’état actuel du droit n’est pas celui que vous indiquez : la compétence économique ayant été transférée aux intercommunalités, la notion d’intérêt communautaire a été supprimée en matière de zone d’activité économique. Moyennant quoi, l’exercice de style auquel nous nous livrons dans les territoires, notamment au moment de l’élaboration des PLUi, consiste à définir des zones mixtes un peu indifférenciées regroupant deux ou trois maisons et des artisans qui ne souhaitent pas ou qui ne peuvent pas aller dans les zones d’intérêt communautaire, en priant pour que le préfet n’y voie pas trop clair.

Le Sénat veut redonner aux élus communautaires la capacité de définir, en recourant à l’intérêt communautaire, ce qui relève de l’intercommunalité ou de la commune pour les zones d’activité économique. Je suis favorable à cette modification qui permet de revenir sur une disposition trop stricte de la loi NOTRe, qui prive les communes, non de la compétence économique puisqu’elles ne la revendiquent pas, mais de la possibilité de disposer de foncier pour l’employer au desserrement local. Je prends un exemple que tous les élus de communes rurales connaissent. Quand un plombier qui se servait du garage de sa maison veut disposer d’une surface plus grande dans sa commune, en l’état actuel du droit issu de la loi NOTRe, la commune n’a pas de solution à lui apporter : il doit partir dans la zone d’intérêt communautaire distante parfois de vingt ou trente kilomètres.

Mme Anne Blanc. Dans l’état actuel du droit, monsieur Viala, le PLU permet l’installation d’un artisan dans la mesure où son activité ne génère pas de nuisances comme une scierie.

M. Raphaël Schellenberger. Nous parlons de deux choses différentes. Le droit actuel n’empêche nullement la libre installation d’activités économiques, et fort heureusement, car il a été suffisamment porté atteinte aux libertés dans notre pays comme cela. Ce qu’il empêche, c’est toute action d’aménagement économique, artisanal, touristique, industriel de la part de la commune. Autant j’ai du mal à concevoir qu’une commune mène des opérations d’aménagement dans le domaine industriel, autant je ne vois nul inconvénient à ce qu’elle le fasse pour des activités de nature commerciale ou économique. C’est la raison pour laquelle il me semble important de maintenir l’article introduit par nos collègues du Sénat.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 7 bis D est supprimé.

Article 7 bis
(art. L. 5215-20 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales)
Limitation à la voirie d’intérêt communautaire ou métropolitain du transfert des compétences afférentes dans les communautés urbaines et les métropoles

La Commission est saisie des amendements de suppression CL1168 du rapporteur, CL757 M. Rémy Rebeyrotte, CL836 de M. Charles de Courson, CL1047 de M. Sacha Houlié et CL1109 de Mme Anne Blanc.

M. Charles de Courson. L’amendement CL836 propose de supprimer l’article 7 bis qui introduit un critère d'intérêt communautaire pour le transfert aux communautés urbaines et métropoles des compétences liées à la voirie. Il s’agit de compétences transférées depuis quarante ans aux communautés urbaines. Cette répartition des compétences fonctionne bien et il n’y a pas lieu de la modifier.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable à ces amendements identiques.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 7 bis est supprimé.

Article 7 ter
(art. L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales)
Report du transfert à la métropole d’Aix-Marseille-Provence du transfert de la voirie communale

La Commission adopte l’article 7 ter sans modification.

Article 7 quater
(art. L. 154-1 du code de l’urbanisme)
Abaissement du seuil à partir duquel un grand établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut réaliser plusieurs plans locaux d’urbanisme infracommunautaires sur son territoire

La Commission examine l’amendement CL210 de la commission du Développement durable.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Le présent amendement propose d’abaisser à 50 le seuil du nombre de communes membres à partir duquel un EPCI peut élaborer un PLU intercommunal sur un périmètre infracommunautaire.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable pour cet amendement de bon sens.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. C’est en effet un bon amendement : avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 quater modifié.

Article 7 quinquies
(art. L. 5214-16, L. 5215-20, L. 5216-5 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales)
Conditions de majorité pour la définition de l’intérêt communautaire

La Commission est saisie de l’amendement CL1227 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement vise à s'assurer que la détermination de l'intérêt communautaire sera effectuée par une majorité de membres présents représentant la majorité des communes membres de l'EPCI concerné.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 quinquies modifié.

Article 7 sexies
(art. L. 581-14-1, L. 581-14-3 et L. 581-43 du code de l’environnement, art. 112 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine)
Modalités d’élaboration des règlements locaux de publicité

La Commission adopte successivement les amendements de cohérence CL1028 et CL1029 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 7 sexies modifié.

Article 7 septies
(art. L. 581-14-3 du code de l’environnement)
Compétences des établissements publics de coopération intercommunale en matière de règlements locaux de publicité

La Commission adopte l’amendement de précision CL1030 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 7 septies modifié.

Chapitre III
Le périmètre des EPCI

Avant l’article 8

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL1231 du rapporteur modifiant l’intitulé du chapitre III, qui est ainsi rédigé.

Article 8
(art. L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales)
Suppression de l’obligation de révision sexennale du schéma départemental de la coopération intercommunale

La Commission est saisie de l’amendement CL758 de M. Rémy Rebeyrotte.

M. Rémy Rebeyrotte. Le Sénat a introduit une disposition visant à supprimer l’objectif légal de réduction du nombre de syndicats lors de l’élaboration des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI).

Lorsque, dans un département donné, l’organisation des syndicats est déjà cohérente, le caractère facultatif de la révision des SDCI inscrit dans le projet de loi apporte d’ores et déjà un assouplissement au droit en vigueur. Supprimer l’objectif de réduction du nombre de syndicats est donc superflu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable à cet amendement de bon sens et de bonne intelligence.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine l’amendement CL25 de M. Martial Saddier.

M. Bruno Questel, rapporteur. Défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement, qui est déjà satisfait par les mesures du projet de loi. Ce que vous visez ne relève pas des pouvoirs dits exorbitants reconnus au préfet en vertu desquels il peut passer outre.

L’amendement CL25 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL174 de la commission du Développement durable.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Vous ne serez pas étonné d’apprendre qu’il s’agit d’une proposition de l’un de nos collègues corses puisque cet amendement vise à permettre à la chambre des territoires de Corse, équivalent de la conférence territoriale de l’action publique dans les régions du continent, de donner son avis sur les révisions du schéma départemental de coopération intercommunale.

Il a semblé important à la commission du développement durable qu’une structure supra-territoriale, disposant d’une vision globale, émette un avis sur les divers documents en cours d’élaboration.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable. Je vous renvoie aux conclusions de la mission d’évaluation de la loi NOTRe.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Comme il s’agit d’un amendement de la commission du développement durable, je ne peux le retirer.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL602 de M. Robin Reda.

M. Robin Reda. Cet amendement vise à faciliter la convocation d’une commission départementale de coopération intercommunale pour une révision du schéma à la demande de 15 % de ses membres.

M. Bruno Questel, rapporteur. Entre 20 % et 15 %, la différence est ténue. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable. La proportion de 20 % paraît suffisante. S’il y a une situation spécifique à laquelle vous pensez, nous pourrons l’évoquer en dehors de la réunion.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL603 de M. Robin Reda.

M. Robin Reda. Cet amendement a pour objectif de réduire le délai dont dispose le représentant de l’État pour présenter à la CDCI un nouveau schéma. Le coup de ciseau sera plus spontané.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL175 de la commission du Développement durable.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Nous avons cherché à avoir une vision dynamique de ces diverses instances et de leurs relations avec les services de l’État. Cet amendement propose de revaloriser la commission départementale de coopération intercommunale en demandant au préfet d’établir auprès d’elle un rapport annuel sur la mise en œuvre du schéma de coopération intercommunale.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je ne suis pas sûr qu'il faille créer une nouvelle obligation. C’est un espace de liberté que nous voulons privilégier.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable. Nous prendrons soin d’appeler l’attention des préfets sur cet enjeu afin qu’ils travaillent avec l’ensemble des élus, y compris les élus nationaux.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. J’entends vos arguments mais, à nouveau, je ne puis retirer cet amendement de la commission du développement durable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 8 modifié.

Après l’article 8

La Commission est saisie de l’amendement CL837 de M. Philippe Vigier.

M. Paul Molac. Cet amendement a pour objet d’instituer dans les commissions départementales de la coopération intercommunale une co-présidence entre le préfet et le président du conseil départemental.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je ne crois pas que cela soit une bonne idée d’instaurer une telle dualité. Le représentant de l’État est le seul garant de l’équilibre départemental, au nom de l’État.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable.

M. Paul Molac. Monsieur le rapporteur, est-ce à dire que les élus ne peuvent être garants de l’équilibre départemental ? Je crois que nous avons une divergence de fond sur ce point.

La Commission rejette l’amendement.

Article 9
(art. L. 5216-11 du code général des collectivités territoriales)
Extension de la procédure de retrait dérogatoire aux communes membres d’une communauté d’agglomération

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL649 de M. Jérôme Nury.

Elle en vient à l’amendement CL780 de Mme Agnès Thill.

Mme Agnès Thill. Le retrait d’une commune a des conséquences importantes sur l'exercice des compétences d'une intercommunalité. Cette décision doit être prise par l'ensemble des parties prenantes.

M. Bruno Questel, rapporteur. Amendement inopérant : par définition, la commune concernée serait encore membre du conseil communautaire et ne pourrait voter contre une demande qu’elle formulerait elle-même. Retrait ou avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. La question de l’unanimité revient dans toutes les lois concernant les intercommunalités. Il s’agit d’une condition très rigide. Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, madame Thill.

L’amendement CL780 est retiré.

La Commission adopte l’article 9 sans modification.

Après l’article 9

La Commission est saisie de l’amendement CL738 de Mme Laure de La Raudière.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Cet amendement vise à stabiliser les schémas intercommunaux afin de permettre aux conseillers communautaires de construire des projets sur les six ans que dure leur mandat. Les négociations pour le changement du périmètre communal peuvent déstabiliser les travaux des EPCI et il convient de geler leur composition jusqu’aux prochaines élections municipales afin d’éviter que des retraits ou des entrées de communes n’interviennent à des moments inopportuns.

Nous proposons que la révision du schéma se fasse sous la houlette du représentant de l’État dans un délai de dix-huit mois après les élections municipales générales. Une fois établi, il sera valable jusqu’aux prochaines élections. Si les discussions n’ont lieu qu’une seule fois, il n’y aura plus de chantages intempestifs pour récupérer des communes dans des communautés de communes ou des communautés d’agglomération.

M. Bruno Questel, rapporteur. Défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. La révision générale des SDCI prévue dans la loi NOTRe a été supprimée et les communes sont libres de demander la révision de ces schémas. L’amendement tel qu’il est rédigé empêcherait que quoi que ce soit bouge pendant une période de dix-huit mois. Avis défavorable.

L’amendement CL738 est retiré.

Article 9 bis
(art. L. 5211-19 du code général des collectivités territoriales)
Extension de la procédure de retrait de droit commun aux communes membres d’une communauté urbaine

La Commission est saisie des amendements de suppression CL1169 du rapporteur et CL967 de M. Stéphane Baudu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Le présent amendement supprime l’article 9 bis introduit par le Sénat en première lecture, qui ouvre la possibilité pour une commune de se retirer d’une communauté urbaine.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 9 bis est supprimé et l’amendement CL604 de M. Robin Reda n’a plus d’objet.

Article 10
(art. L. 5211-5-1 A [nouveau] et L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales)
Scission de communautés de communes et de communautés d’agglomération

La Commission examine l’amendement CL605 de M. Robin Reda.

M. Robin Reda. Je continue avec mes cavaliers parisiens mais je vous demande de vraiment m’écouter, monsieur le ministre. Dans la discussion générale, vous avez avancé un argument intéressant : la loi MAPTAM et la loi NOTRe auraient contribué à séparer la question des métropoles de la question plus générale de l’intercommunalité. C’est la loi MAPTAM qui a créé la Métropole du Grand Paris et la loi NOTRe qui a défini les contours des établissements publics territoriaux du Grand Paris. Ces derniers sont des syndicats de communes qui ne sont ni des EPCI, ni des métropoles. Ils relèvent à la fois du projet de loi que nous examinons, qui sera, nous l’espérons, rapidement adopté car nous devons obtenir une clarification avant les élections municipales, et du projet de loi dit 3D décentralisation, différenciation et déconcentration – qui permettra de préciser leurs compétences.

Les EPT devaient regrouper au moins 350 000 habitants ; or aujourd’hui, certains atteignent 500 000 à 700 000 habitants, bien loin de la réalité des bassins de vie d’Ile-de-France. Par cet amendement, nous proposons que les EPT XXL puissent se retirer de la Métropole du Grand Paris. Cela ne changerait en rien l’architecture du Grand Paris, qui continuerait d’être composé d’EPT. Je vous implore d’accepter cette modification minimale.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je ne peux qu’émettre un avis défavorable en cohérence avec les positions que j’ai défendues précédemment, mais je tiens à vous féliciter pour la constance dont vous faites preuve.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Demande de retrait ou avis défavorable. Sur le fond, quand nous rouvrirons les questions relatives à la Métropole du Grand Paris, il est évident que ces mesures de simplification et de souplesse pourront être examinées avec bienveillance.

M. Robin Reda. C’est avec bienveillance que je retire mon amendement.

L’amendement CL605 est retiré.

La Commission adopte successivement l’amendement rédactionnel CL1032 et l’amendement de précision CL1033 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement CL11170 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 10 du projet de loi permet à une communauté de communes ou à une communauté d'agglomération de se scinder en deux ou plusieurs EPCI dès lors qu'une majorité qualifiée de communes s’accorde sur le périmètre de chacun des nouveaux EPCI, dans le respect des seuils fixés par le code général des collectivités territoriales. Le présent amendement vient préciser les modalités de mise en œuvre de cette scission.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 10 modifié.

Article 11
(art. L. 5211-39-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Information des communes sur les conséquences financières d’une modification du périmètre

La Commission est saisie de l’amendement CL838 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec celui que j’ai défendu tout à l’heure. J’estime que les élus sont autant les garants de l’intérêt général que l’administration, à ceci près que leur légitimité vient de leur élection au suffrage universel. Je ne parle pas au nom de l’État comme le fait le préfet. Je suis un élu du peuple et je parle pour le peuple. Il nous paraît important que les CDCI soient présidées à la fois par le préfet et par le président du conseil départemental.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cette proposition a déjà été rejetée. Quant à la précision que vous demandez dans le présent amendement, elle figure déjà dans le texte de l’article 11. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

L’amendement CL838 est retiré.

La Commission examine l’amendement CL1115 de Mme Anne Blanc.

Mme Anne Blanc. L’article 11 prévoit l’élaboration d’un document d’orientation présentant les incidences financières de la modification du périmètre d’un EPCI. Il nous semble important de préciser qu’une expertise indépendante extérieure peut aussi être réalisée.

M. Bruno Questel, rapporteur. Tout ce qui n’est pas écrit dans la loi n’est pas interdit. Le dispositif que vous proposez est sans objet : rien n’empêche aujourd’hui une intercommunalité de faire appel à un organisme extérieur. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

Mme Anne Blanc. La rédaction de l’article laisse plutôt entendre qu’il s’agirait d’une expertise interne. Cela dit, j’entends vos arguments et je retire mon amendement.

L’amendement CL1115 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL176 de la commission du Développement durable.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Nous proposons d’ajouter un volet social à l’évaluation financière. Le retrait d’une commune d’une intercommunalité peut avoir des incidences non négligeables sur un ou plusieurs agents. Je ne comprends d’ailleurs pas que cet aspect n’ait pas été pris en compte.

M. Bruno Questel, rapporteur. Nous ne pouvons pas dresser une liste sans fin de ce tout ce que devrait comporter ce document. Ces questions sont déjà examinées en cas de modification du périmètre intercommunal.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Je suis étonné de ces avis défavorables et je les regrette, car bien souvent, les intercommunalités ont du mal à régler ce volet social.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL177 de la commission du développement durable.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Nous proposons que les impacts sur les syndicats mixtes et les syndicats de communes dont les communes ou l’EPCI sont membres soient pris en compte dans le document d’orientation. Cela permettrait d’avoir une vision globale.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable pour les raisons que j’évoquais tout à l’heure.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Dans les faits, je pense que ces incidences sont toujours évaluées. Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement mais si vous estimez que ces aspects sont insuffisamment pris en compte, nous pourrons retravailler à cet amendement d’ici à la séance.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Monsieur le rapporteur, si vous estimez que toutes les incidences des modifications de périmètre intercommunal sont discutées en amont, autant supprimer l’évaluation financière.

Je considère que les conséquences sur les autres structures ne sont pas toutes prises en compte. Pensons aux parcs naturels régionaux ou aux syndicats d’eau. Il me semble intéressant d’apporter une telle précision.

La Commission rejette l’amendement.

À la demande du rapporteur, l’amendement CL839 de M. Paul Molac est retiré.

La Commission examine l’amendement CL178 de la commission du Développement durable.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Comme dit l’adage, on sait ce que l’on perd, mais on ne sait pas ce que l’on gagne. Cet amendement vise à informer les élus qui délibèrent, mais aussi les populations concernées, de l’incidence d’une modification des périmètres intercommunaux. Il s’agirait, par exemple, d’évaluer l’évolution du prix de l’eau ou des transports, afin que chacun sache clairement ce qu’il gagne et ce qu’il perd.

M. Bruno Questel, rapporteur. Pour les mêmes raisons, avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL991 de M. Sébastien Huyghe.

M. Sébastien Huyghe. Un amendement adopté au Sénat prévoit que le document présentant les conséquences du retrait d’un EPCI soit mis en ligne. Or nombre de nos concitoyens n’ont pas le réflexe d’aller sur le site de leur commune et préfèrent lire, lorsqu’il existe, le bulletin municipal qui paraît en format papier. Cet amendement propose que, lorsqu’un bulletin municipal existe, il y soit fait mention de la mise en ligne de ce document.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je comprends que la numérisation des rapports entre les collectivités et les administrés puisse vous préoccuper, et vous avez déjà beaucoup échangé avec le ministre sur cette question. Mais on peut penser que l’adresse du site internet de la mairie figure déjà sur le bulletin municipal. Parce qu’il nous éloigne un peu du domaine de la loi, je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 11 sans modification.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, il est 23 heures 45. Nous devrions à présent aborder les amendements portant article additionnel avant l’article 11 bis A, qui font l’objet d’une importante discussion commune, puis l’article 11 bis A lui-même. L’ensemble de ces amendements concerne la parité et je m’étais engagée auprès de la délégation aux droits des femmes, qui travaille sur ces questions, à ne pas les aborder ce soir. Je vous propose, si vous en êtes tous d’accord, de réserver ces amendements pour les examiner demain à 9 heures 30 et de poursuivre ce soir l’examen du texte à partir de l’article 11 bis B.

M. Raphaël Schellenberger. Nous ne sommes pas d’accord et je pense que nous ne serons pas les seuls. Depuis le début, nous sommes très nombreux à participer à l’examen de ce texte et les choses se passent sereinement. Nous avons un bon rythme et il n’y a aucune raison de sauter cet article. Il est certes possible d’aménager l’examen d’un texte en fonction de la présence des uns ou des autres, mais cela doit être annoncé à l’avance. Vous ne pouvez pas l’annoncer au dernier moment et nous mettre devant le fait accompli.

Compte tenu de l’ambiance dans laquelle nous travaillons et du rythme auquel nous avançons, nous aurions intérêt à poursuivre au maximum ce soir, si nous ne voulons pas que l’examen de ce texte se prolonge jusqu’à vendredi, où nous aurons déjà à examiner, dans l’hémicycle, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Je n’aurais d’ailleurs rien contre l’idée de poursuivre nos travaux jusqu’à 1 heure ce soir, parce que l’ambiance de travail est bonne, décontractée et sérieuse.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. L’ambiance de travail en commission des Lois est toujours bonne, décontractée et sérieuse. Le Règlement de l’Assemblée nationale prévoit désormais que les séances publiques ne dépassent pas minuit et il n’y a pas de raison que nous dérogions à cette règle.

M. Raphaël Schellenberger. Dans l’hémicycle, cela fait trois semaines que les séances se prolongent jusqu’à 3 heures du matin !

M. Arnaud Viala. Madame la présidente, nous avons, pour ce qui nous concerne, indiqué dès le début de l’examen de ce texte que nous souhaitions qu’il ait lieu dans une ambiance positive et constructive, et nous nous y sommes tenus. J’ai pris soin de vous interroger en début de séance sur l’organisation de nos travaux et vous m’avez répondu d’une façon très lapidaire, en me disant que nous terminerions à minuit. Si vous nous aviez alors indiqué que vous réserveriez pour une autre séance de travail les articles sur la parité, certains d’entre nous auraient peut-être fait un arbitrage un peu différent sur leur temps de travail. Nous venons, en effet, de passer de longs moments sur des articles de moindre importance.

Il eut été de bon ton d’informer de votre décision, en priorité, les membres de la commission des Lois, qui sont saisis au fond et qui sont présents, ainsi que ceux de nos collègues qui ont fait l’effort d’être là jusqu’à minuit. Je trouve votre explication déplacée et pense que votre but, au fond, est d’influencer la décision sur des sujets dont on sait qu’ils sont difficiles à trancher. Je ne vois pas pourquoi nous cautionnerions cela.

M. Sacha Houlié. Je souhaite, au nom du groupe La République en Marche, appuyer la demande du groupe Les Républicains, en ajoutant trois arguments à ceux qui ont été développés. D’abord, notre rythme nous permet effectivement d’examiner ces amendements ce soir. Ensuite, nous avons eu une longue journée dans l’hémicycle, avec l’examen des crédits de la mission « Outre-mer », et nous aurons également une longue journée demain : il semble donc préférable d’examiner sereinement ces amendements ce soir. Enfin, la délégation aux droits des femmes ne s’est pas saisie pour avis de ce projet de loi. Elle avait probablement des amendements à défendre, mais la commission des Lois n’a pas à établir son calendrier en fonction d’elle.

Mme Bénédicte Taurine. Sur les questions de parité, la délégation aux droits des femmes, dont je fais partie, a son mot à dire. Nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet avec notre présidente et il est extrêmement important que nous soyons entendus. Par ailleurs, je ne vois pas l’intérêt d’aborder ce soir une question aussi importante, alors qu’il ne nous reste que dix minutes avant de terminer la réunion.

M. Raphaël Schellenberger. Le Règlement concerne la séance publique !

Mme Bénédicte Taurine. Inutile de hurler ! Moi, je ne vous ai pas interrompu.

M. Raphaël Schellenberger. Vous dites des âneries !

Mme Bénédicte Taurine. Restez correct, je vous prie !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Monsieur Schellenberger, je vous demande de respecter vos collègues et de présenter des excuses à Mme Taurine.

M. Raphaël Schellenberger. Elle interprète à sa façon le Règlement de l’Assemblée nationale !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La moindre des choses, c’est de respecter vos collègues.

Mme Bénédicte Taurine. Monsieur Schellenberger, votre ton et votre arrogance sont très désagréables.

M. Erwan Balanant. J’avoue ne pas comprendre l’émoi de certains collègues. La présidente propose de reporter à demain matin l’examen d’une série d’amendements extrêmement importants…

M. Sacha Houlié. La commission est au complet !

M. Erwan Balanant. J’ai bien compris que certains de nos collègues ne sont pas très favorables à ces amendements. Il me semblerait plus judicieux de débattre de ces questions importantes demain, après une bonne nuit : ce serait la garantie d’un débat serein et apaisé. Ces sujets ne semblent peut-être pas fondamentaux à certains d’entre vous, mais ils le sont pour d’autres.

Nous n’aurions pas perdu de temps si vous aviez accepté de poursuivre l’examen des articles à partir de l’article 11 bis B, comme la présidente le proposait. Je pense que nous devrions accepter sa proposition et poursuivre demain matin l’examen des amendements relatifs à la parité. Je suis membre de la délégation aux droits des femmes et il est vrai que ce sont des sujets sur lesquels nous travaillons depuis longtemps. J’apprécie que la présidente respecte l’engagement qu’elle a pris vis-à-vis de notre délégation ; c’est la moindre des politesses.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vais parler sans détour. Pour que le climat qui prévaut depuis le début de nos travaux soit préservé demain, j’aurais préféré que l’engagement pris vis-à-vis de la présidente de la délégation aux droits des femmes nous soit annoncé au début de notre réunion, voire ce matin, s’il avait déjà été pris à ce moment-là. C’est une simple question de courtoisie. Cela n’a pas été le cas et je le regrette. Mais je suis totalement rassuré : puisque la présidente de la commission des Lois ne s’intéresse pas du tout à la question de la parité, nous pourrons travailler demain sur ces questions en toute tranquillité et tout ira très bien.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Tout cela est bien dommage. Je vous proposais seulement de réserver pour demain les amendements portant article additionnel avant l’article 11 bis A, qui font l’objet d’une longue discussion commune, et de poursuivre l’examen du texte. Cela n’aurait rien changé au rythme de nos travaux.

Vous pouvez continuer à polémiquer autant que vous le souhaitez, mais je vous rappelle qu’en tant que présidente, c’est moi qui organise les travaux de cette commission. Compte tenu de l’heure, j’interromps nos travaux. Nous les reprendrons demain matin à 9 heures 30.

 


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3.   Première réunion du jeudi 7 novembre 2019 à 9 heures 30 (après l’article 11 à après l’article 12 A)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.8394177_5dc3d3ccca0c0.commission-des-lois--engagement-dans-la-vie-locale-et-a-la-proximite-de-l-action-publique-suite-7-novembre-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, hier soir, nous nous sommes arrêtés à l’article 11. Nous reprenons donc nos travaux ce matin par l’examen des amendements après l’article 11.

M. Sacha Houlié. Madame la présidente, trois réunions sont prévues aujourd’hui. Vous paraît-il possible de terminer l’examen du texte dans ce délai ? En effet, nous devons être demain dans l’hémicycle pour examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales (RCT) ». Il risque d’être compliqué de reprendre nos travaux sur le présent projet de loi ensuite… Nous n’avons pas encore reçu de convocation rectificative. Peut-être pouvons-nous terminer ce soir ? Nous avons besoin d’en savoir plus pour nous organiser.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je n’ai pas envoyé de convocation rectificative car j’espère en effet que nous allons terminer l’examen du texte aujourd’hui. En accord avec les responsables des groupes, nous pourrons éventuellement prolonger nos débats ce soir.

Après l’article 11

La Commission examine l’amendement CL71 de M. Xavier Roseren.

M. Xavier Roseren. L’octroi des sièges au conseil communautaire tient compte de la population municipale. De ce fait, les stations touristiques, dont la contribution financière aux instances communautaires est pourtant importante, sont souvent sous-représentées car leur population à l’année est faible. L’amendement vise à tenir compte de la population telle que prise en compte dans le calcul de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour la représentation de ces communes au sein de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI).

M. Bruno Questel, rapporteur. Nous avons eu ce débat sur un autre amendement hier. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, mon avis est défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Mon avis sera également défavorable. En outre, cette disposition ne serait pas conforme à la Constitution. Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL739 de Mme Laure de La Raudière.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Cet amendement vise à traiter le problème des charges engendrées, pour un EPCI, par le retrait d’une commune. Par exemple, lorsqu’une commune n’a pas financé l’actif de l’EPCI sur ses ressources budgétaires, elle ne devrait pas pouvoir récupérer une part d’actif proportionnelle à son nombre d’habitants.

M. Bruno Questel, rapporteur. Votre amendement vise à supprimer les modalités de transfert de biens et immeubles entre EPCI et communes en cas de transfert de compétences. Mais je vous demanderai de le retirer car son objet me semble beaucoup plus large que ce que vous nous avez présenté.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Mon cabinet travaille avec Mme de La Raudière sur le sujet. Contrairement à ce qu’indique l’exposé sommaire, en supprimant l’alinéa, l’amendement supprime également une petite marge de manœuvre afin que l’EPCI puisse négocier les aspects financiers du retrait avec la commune. Je pense que ce n’est pas l’objectif de Mme de La Raudière. Je vous invite donc à retirer l’amendement.

L’amendement est retiré.

Avant l’article 11 bis A

La Commission examine en discussion commune les amendements identiques CL1076 de Mme la présidente Yaël Braun-Pivet, CL978 de Mme Bérangère Couillard, CL1079 de Mme Marie-Pierre Rixain et CL1128 de Mme Anne Blanc, ainsi que les amendements CL469 de Mme Cécile Untermaier, CL690, CL692 et CL693 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, CL560 de Mme Laurence Gayte, les amendements identiques CL1172 du rapporteur, CL674 de M. Vincent Bru et CL1048 de M. Sacha Houlié, ainsi que l’amendement CL840 de M. Paul Molac.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. L’amendement CL1076 a pour objet de supprimer le seuil de 1 000 habitants pour l’application du scrutin de liste paritaire aux élections municipales.

Mme Bérangère Couillard. L’amendement CL978 propose d’appliquer le scrutin de liste paritaire aux élections municipales pour toutes les communes. Cela permettra de renforcer la présence des femmes dans les exécutifs locaux. En l’état actuel du droit, seules les communes de moins de 1 000 habitants ne sont pas soumises à des règles paritaires. Il est donc nécessaire d’étendre cette obligation à l’ensemble des communes de notre pays.

Cette proposition a reçu le soutien de l’Association des maires de France (AMF), de l’Association des maires ruraux de France (AMRF), de différentes associations d’élus, du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes et, bien évidemment, de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes. Faut-il le rappeler, l’égalité entre les femmes et les hommes est la grande cause du quinquennat.

Au-delà de la parité, l’AMRF plaide pour le scrutin de liste afin que les conseils municipaux soient élus sur un projet, qu’on en finisse avec le panachage, la parité n’étant qu’une conséquence du scrutin de liste.

Mme Fiona Lazaar. L’amendement CL1079 est issu des recommandations de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes,

Depuis plus d’un an, nous avons procédé à un cycle d’auditions sur la parité à l’échelon local, partant du constat que des marges de progrès demeurent. Nous avons ainsi entendu l’Association des maires de France, l’Association des maires ruraux de France, l’Assemblée des communautés de France (AdCF) et l’association Elles aussi.

Pour porter nos propositions, nous nous étions saisis de la proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires et avions, en parallèle, déposé une proposition de loi rassemblant assez largement sur les bancs de notre assemblée. Nous nous accordons tous, je crois, à reconnaître la nécessité de généraliser le scrutin de liste paritaire dans toutes les communes.

Notre amendement propose donc de supprimer le seuil de 1 000 habitants. Nous avons néanmoins prévu des dispositifs dérogatoires pour les plus petites communes, afin de respecter les impératifs constitutionnels et de garantir un fonctionnement effectif des institutions locales. Nous avons parfaitement conscience, en effet, des difficultés à trouver des candidates et des candidats dans les petites communes. Je salue, à cet égard, l’engagement des élus, si déterminant pour nos territoires !

Certains disent que la généralisation du scrutin paritaire serait une contrainte de plus. Je m’inscris en faux contre cette idée reçue : ce n’est pas une contrainte, mais une opportunité, celle de mieux associer les femmes à la vie politique et de dépasser les stéréotypes de genre qui perdurent encore trop souvent. Certains candidats disent avoir du mal à trouver des colistiers. Mais on constate, hélas, trop souvent qu’ils n’ont pas ou peu sollicité les femmes.

L’égalité entre les femmes et les hommes est la grande cause de ce quinquennat. Nous devons envoyer un signal fort, mais aussi la traduire concrètement dans tous les secteurs. Nous avons engagé cet effort dans le monde du travail et dans la fonction publique ; faisons-le également dans nos instances électives locales.

Mme Anne Blanc. Dans le même esprit, l’amendement CL1128 propose d’appliquer le scrutin de liste paritaire aux élections municipales pour toutes les communes afin de renforcer la présence des femmes dans les exécutifs locaux.

En outre, ce mode de scrutin permettra à tous les candidats de porter un projet politique dans le cadre d’une liste, même s’ils se présentent dans une commune de moins de 1 000 habitants. C’est une autre avancée importante.

Afin de prévenir toute difficulté dans la composition des listes paritaires dans les plus petites communes, un dispositif dérogatoire est introduit : les listes pourront être composées d’autant de candidats que de conseillers municipaux nécessaires pour que le conseil municipal soit réputé complet au sens de l’article 11 septies introduit par le Sénat.

Par cet amendement, Stéphane Boudu et moi-même, co-rapporteurs pour avis au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, nous associons à l’initiative portée par la présidente de la commission des Lois et par la délégation aux droits des femmes.

Mme Cécile Untermaier. La parité est en effet la grande cause du quinquennat. Nous avons ici l’occasion de le montrer. Les communes de moins de 1 000 habitants représentent 74 % des communes de France. Mais les femmes y sont sous-représentées – moins de 35 % des conseillers municipaux et 17 % des maires. Monsieur le ministre, vous avez écarté la parité au sein des exécutifs locaux pour des motifs de nature constitutionnelle et de pragmatisme que vous nous avez expliqués hier. En revanche, après en avoir discuté longuement avec mon groupe, nous considérons que la parité lors de l’élection ne peut se voir opposer les mêmes motifs. C’est pourquoi l’amendement CL469 propose que le scrutin de liste paritaire soit étendu aux communes de moins de 1 000 habitants. Vous évoquez le principe de pluralisme des opinions. Nous vous avons entendu. Un amendement ultérieur proposera l’incomplétude des listes, qui peut constituer une réponse dans les petites communes. Cela a été dit, mais je le répète, l’Association des maires ruraux et l’AMF sont favorables à cet amendement.

Enfin, ce dispositif protège aussi davantage le maire qu’un scrutin plurinominal. Nous le défendrons avec beaucoup de conviction.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Les amendements CL690, CL692 et CL693 mettent en place le dispositif que mes collègues ont déjà présenté. L’amendement CL690 prévoit une application dès 2020, le CL692 après 2020, en cas d’élections partielles, et le troisième, le CL693, pour les élections de 2026. Cela étant, je soutiendrai, parmi tous les amendements en discussion commune, ceux introduisant une souplesse dans le nombre de candidats à présenter dans les petites communes.

Une telle évolution va dans le sens de l’histoire. Je ne vais pas revenir sur la place des femmes en politique, ni vous rappeler quand une femme a été nommée pour la première fois Premier ministre dans notre pays. Je ne reviendrai pas non plus sur l’incapacité des femmes ou sur la façon dont elles ont obtenu le droit de vote – ce n’est pas le Parlement qui le leur a donné… Les réformes constitutionnelles de 1999 et de 2008 ont conforté leur place en politique et dans le monde de l’entreprise. Je l’ai rappelé lors de la discussion générale, l’attente de nos concitoyens est forte. Nous avons besoin que des hommes et des femmes s’engagent. C’est tout l’objet de ce projet de loi : faciliter l’engagement.

Mme Laurence Gayte. L’amendement CL560 vise à instaurer le scrutin de liste applicable aux communes de plus de 1 000 habitants aux 74 % de communes françaises comptant moins de 1 000 habitants. Il s’agit d’améliorer la parité, avec une alternance obligatoire, et réduire le nombre de conseillers municipaux en fonction de la population de la commune, afin de respecter le principe de pluralisme.

M. Bruno Questel, rapporteur. La parité est bien sûr fondamentale. Elle doit être portée par toutes et tous, en dehors de considérations partisanes ou de conjonctures législatives ou politiques. Mais elle mérite aussi d’être sécurisée juridiquement. À la faculté, les professeurs de droit nous rappelaient souvent l’impérieuse nécessité d’être vigilant à la constitutionnalité des textes. En tant que rapporteur du projet de loi, je considère précisément que nous n’avons pas tous les éléments pour sécuriser juridiquement le dispositif prévoyant la suppression totale du seuil d’habitants pour l’application du scrutin de liste paritaire.

L’amendement CL1172 vise donc à rendre possible l’application de ce scrutin aux communes de 500 habitants et plus au lieu de 1000 actuellement. Cela permettra un progrès non négligeable en termes de parité.

J’appelle votre attention sur un fait important : en 2014, plus de soixante communes n’ont pas été en capacité d’élire des conseillers municipaux compte tenu des règles alors applicables. Avec la suppression du seuil, plusieurs centaines pourraient être dans ce cas. Or nous ne sommes pas élus pour fragiliser le droit en vigueur. Celui-ci mérite d’être encore travaillé. Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer vos amendements au profit de celui que je présente.

M. Vincent Bru. Notre groupe soutient les amendements d’Élodie Jacquier-Laforge, mais nous avons également déposé l’amendement de repli CL674, identique à celui du rapporteur.

Nous souhaitons que le projet municipal soit un projet commun, un projet d’équipe. Beaucoup de maires me l’ont dit lorsque je les ai rencontrés : lorsqu’un adjoint décède ou démissionne, celui qui a le plus de voix veut devenir adjoint or ce n’est pas forcément une bonne chose. La baisse du seuil à 500 habitants permettra de réaliser ce travail d’équipe sur la base d’un projet commun et de résoudre certains problèmes très concrets qui se posent aux toutes petites communes.

M. Sacha Houlié. Le 8 mars 2017, le Président de la République, alors en campagne, avait lancé un appel à l’engagement des femmes en politique et annoncé que, s’il était élu, l’égalité femmes-hommes serait déclarée grande cause du quinquennat. Cela s’est traduit dès les élections législatives : investitures paritaires de La République en Marche, puis parité des députés de la majorité à l’Assemblée nationale.

Désormais, la question se pose pour les élections municipales. Nous souhaitons, à cette occasion, faire un nouveau progrès. Il m’est particulièrement cher puisque j’ai succédé à Catherine Coutelle, ancienne présidente de la délégation aux droits des femmes, et que je viens d’un département où avait été élue Édith Cresson, première femme Premier ministre de France.

Mais nous voulons que ce droit soit réel, et non formel ou virtuel. C’est pourquoi nous souhaitons le sécuriser juridiquement, en tenant compte des avis du Conseil d’État et des décisions du Conseil constitutionnel et en évitant d’ajouter des dispositifs qui pourraient le déstabiliser. Les « bricolages électoraux » à la veille des élections sont toujours mal perçus...

C’est pourquoi, au nom du groupe La République en Marche, nous vous proposons de franchir un nouveau palier et d’appliquer le scrutin de liste paritaire pour les communes de 500 habitants et plus, soit à un nombre supplémentaire significatif de communes en France.

M. Paul Molac. L’amendement CL840 propose également d’abaisser le seuil à 500 habitants – ce n’est peut-être pas le meilleur mais il semble faire consensus. Dans ma circonscription, une commune de 190 habitants compte plus de femmes que d’hommes au conseil municipal et le maire est aussi une femme ! On pourrait donc peut-être abaisser encore ce seuil. En tout cas, la démarche est la bonne. Globalement, la conquête du suffrage universel n’a pas été un long fleuve tranquille pour l’humanité, c’est le moins qu’on puisse dire…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Nous débattons d’un projet de loi sur l’engagement. Celui de chaque citoyen et citoyenne est donc au cœur du texte. Au Sénat, en co-construction, nous avons d’ailleurs veillé à ce que nos concitoyens en situation de handicap ne soient plus confrontés à des discriminations dans leur engagement en tant qu’élus locaux. Nous devons rechercher tout ce qui concourt à améliorer l’égalité, afin de garantir à tous la possibilité de s’engager dans la vie publique.

Le projet de loi cherche aussi à répondre à la crise de l’engagement, inquiétante dans la perspective des prochaines élections. Dans les communes rurales, cette crise ne concerne malheureusement pas que les femmes. Je vous l’ai déjà dit, pour la première fois, nous redoutons de ne pas trouver suffisamment de citoyens volontaires pour s’engager de manière quasi bénévole dans les communes. Il est plus compliqué de trouver des sapeurs-pompiers volontaires aujourd’hui qu’il y a vingt ans, tout comme il est plus compliqué de trouver un salarié pour s’engager dans le syndicat de l’entreprise, des présidents d’associations bénévoles, etc. La démocratie locale n’échappe pas à cette crise de l’engagement.

Paradoxalement, le nombre de femmes qui s’engagent dans les conseils municipaux a plutôt tendance à augmenter – elles sont particulièrement volontaires pour s’investir dans la vie locale. Pour autant, ce n’est pas satisfaisant car nous n’avons pas atteint la parité.

En 2014, dans 40 % des communes de 1 000 à 3 500 habitants, strate de démarrage de la proportionnelle, une seule liste s’est présentée aux élections. Donc dans près d’une de ces communes sur deux, nos concitoyens n’ont pas eu de choix ! C’est aussi une des conséquences de la crise de l’engagement. Cela doit nous interpeller car, depuis la Révolution française, la démocratie locale passe par les communes. En outre, alors que l’on réfléchit à approfondir la décentralisation et à redonner beaucoup de pouvoirs aux communes, nous ne pouvons avoir de doute sur leur gouvernance. Voilà pour le contexte.

Parlons également de droit puisque nous sommes à la commission des Lois. Avec des seuils différents, vos amendements visent tous à modifier le mode de scrutin et à instaurer la proportionnelle pour aboutir à la parité. C’est bien parce qu’on change le mode de scrutin et qu’on instaure la proportionnelle qu’on pourra obtenir la parité.

Il y a donc deux sujets : le mode de scrutin et la parité. S’agissant de parité, dans l’absolu, j’y suis bien sûr très favorable dans toutes les communes. Mais il faut tenir compte des difficultés juridiques liées au mode de scrutin et à l’instauration de la proportionnelle dans toutes les communes de France.

Pour faire avancer la parité, il y a deux moyens : d’une part, la modification du mode de scrutin – ce fut le cas pour les conseils départementaux avec le binôme, pour les conseils régionaux avec les scrutins de liste et pour le Sénat dans la partie renouvelable à la proportionnelle – ; d’autre part, la sanction financière – les formations politiques qui ne présentent pas des candidatures paritaires pour les élections législatives au niveau national doivent s’acquitter d’une amende. Il suffit ensuite d’analyser les choix de chaque formation politique. Tout n’est pas dans la loi, c’est aussi politique. Ce choix, c’est aussi celui que font les formations politiques qui investissent actuellement des candidats pour les élections municipales dans les villes les plus importantes de notre pays… Je ferme cette parenthèse.

Ensuite, il faut avoir l’humilité de reconnaître que les majorités successives ont beaucoup fait pour la parité. Ainsi, le gouvernement de François Hollande a été courageux en faisant le choix du binôme paritaire dans les conseils départementaux. Cela impliquait de redécouper les cantons et d’en créer de plus importants. Nous avons un peu perdu en proximité, mais c’est une bonne réforme et les conseils départementaux sont désormais paritaires.

Il nous reste à parcourir le « dernier kilomètre ». Nous devons d’abord nous demander avec la même humilité pourquoi cela n’a pas été fait avant, nos prédécesseurs n’étant pas moins-disants. Pourquoi la commission mixte paritaire qui a examiné la dernière modification de la loi a-t-elle retenu ce seuil de 1 000 habitants ? Il s’agissait – et il s’agit toujours – de tenter de concilier deux principes constitutionnels, dont le Conseil constitutionnel tout comme les élus, les parlementaires et les ministres, sont les garants : la parité et le pluralisme.

Notre pays compte 18 300 communes de moins de 500 habitants et 3 300 communes de moins de 100 habitants. Ce n’est ni anecdotique, ni négligeable… Dans ces dernières, entre 85 et 90 % des habitants sont inscrits sur les listes électorales. Mesdames et messieurs les députés, membres de la commission des Lois, jusqu’à quel seuil garantit-on la pluralité des listes ? J’ai la faiblesse de penser que c’est le cas jusqu’à 500 habitants. C’est pourquoi je me rallierai à l’amendement du rapporteur. Dans les communes de moins de 500 habitants, et encore plus dans celles de moins de 100 habitants, il ne faut pas qu’au motif d’instaurer la parité en modifiant le mode de scrutin, on aboutisse à ce qu’il n’y ait plus qu’une liste qui se présente, sans même évoquer les risques de censure par le Conseil constitutionnel…

En outre, comment justifier que, dans ce texte visant à protéger les communes les plus rurales, on prenne une mesure qui conduise finalement à réduire le nombre d’élus au conseil municipal ? Je suis favorable aux mesures d’incomplétude du conseil municipal, je l’ai dit à la présidente de la commission des Lois, et j’ai commencé à accompagner leur intégration au projet de loi au Sénat. Mais je ne suis pas favorable à une diminution du nombre de conseillers municipaux dans les petites communes. En premier lieu parce qu’il n’y a pas eu de concertation. On ne peut parler à longueur de temps de coproduction et prendre une décision aussi lourde de conséquences sans dialogue avec les principaux intéressés. En second lieu, parce qu’aussi beau que soit ce combat politique, au sens noble du terme – celui de la parité –, la diminution du nombre d’élus dans les petites communes rurales serait mal perçu. Après la création des communes nouvelles, même si elles sont des instruments de liberté, la diminution du nombre d’élus ruraux apparaîtrait dans les campagnes comme le début d’un mouvement visant la disparition des communes. Certains ne manqueraient pas d’évoquer les baisses de DGF intervenues dans le passé… Soyons donc très attentifs : ce texte doit être une belle loi pour tous, toutes sensibilités politiques confondues. Il doit protéger les communes, surtout rurales. En outre, rien n’a été réclamé ouvertement en la matière. Au Sénat, il y a également eu quelques tentatives, mais aucun président groupe n’a pris position.

Autre ligne rouge : on ne modifie pas le mode de scrutin le 15 novembre pour le mois de mars 2020. Les dispositions électorales du projet de loi ne sauraient s’appliquer en 2020.

Le sujet étant sérieux, nous l’avons largement documenté sur le terrain constitutionnel. Comme je m’y étais engagé, je vous fais part des éléments de l’avis de la section de l’intérieur du Conseil d’État du 22 novembre 2012 : il rappelle que la parité est un objectif constitutionnel, mais que le pluralisme est un objectif constitutionnel « plus contraignant ». La décision du Conseil constitutionnel date quant à elle de mai 2013.

Le Conseil d’État avait transmis cet avis suite à la saisine du précédent gouvernement sur le projet de loi précité, qui a conduit à abaisser le seuil pour le scrutin de liste aux élections municipales de 3 500 habitants à 1 000 habitants. Lors des débats, l’Assemblée nationale souhaitait porter le seuil à 500 et le Sénat à 1 500. La CMP a tranché pour 1 000 habitants ! Déjà, à l’époque, l’Assemblée considérait qu’il y avait un risque à moins de 500 habitants. Le Sénat, quant à lui, ne voulait pas trop contrarier les communes !

Les différentes formes d’engagement ne doivent pas se concurrencer. On ne peut modifier un mode de scrutin jusqu’à pénaliser tout le monde dans son engagement – hommes et femmes. Les mesures de correction du scrutin à la proportionnelle proposées par les amendements supprimant le seuil actuel risquent en effet d’aboutir à des conseils municipaux de cinq personnes dans les communes de moins de 100 habitants. Nous aurions cependant politiquement tort de rester à 1 000 habitants. Je sais que l’abaissement du seuil ne fait déjà pas consensus mais, au nom du Gouvernement, je souhaite que nous avancions. En supprimant complètement le seuil, nous prenons un risque absolu de censure, avec tout ce que cela implique, car le pluralisme n’est plus garanti, mais à 500 habitants, on peut emprunter le chemin de crête.

Je suis donc favorable aux amendements de consensus CL1172, CL674 et CL1048. Je demande le retrait des autres.

Mme Yolaine de Courson. Sans la parité absolue voulue par le Président de la République, beaucoup d’entre nous ne seraient pas là. Personnellement, je ne serai sûrement pas là car de nombreux candidats masculins avaient demandé l’investiture pour les élections législatives. Il faut donc saluer cette formidable avancée.

Dans les années soixante-dix, au nom de mes convictions féministes, je me suis battue pour nos droits. C’est pourquoi je suis gênée de tenir les propos qui vont suivre. Avant d’être députée, j’étais maire d’un village de moins de 100 habitants, comptant alors sept conseillers municipaux. Je suis toujours conseillère municipale. Ma circonscription comprend trois cent quarante-trois communes, chacune comptant 180 habitants en moyenne. De nombreux territoires ruraux sont dans la même situation.

Comment avons-nous choisi nos colistiers ? Martine avait un tracteur, José aimait bien animer des fêtes, Françoise voulait s’occuper de l’administratif. Nous étions sans étiquette et ce sont nos compétences qui nous ont rassemblés, pour le bien commun de notre village. Dans les communes de moins de 200 habitants, c’est souvent comme cela.

Dans de telles conditions, appliquer la parité sur les listes risque d’être très compliqué. Le projet de loi nous est présenté comme un texte de simplification. Faisons en sorte qu’il le demeure. Dans les petites communes, nous sommes en effet submergés par les démarches administratives et nous avons bien du mal à nous en sortir. Nous avons les mêmes obligations que les plus grandes communes, mais pas les mêmes outils. Alors qu’un maire devrait être là pour animer son village, il passe des heures dans son bureau à comprendre comment les normes nationales s’appliqueront à sa commune… Quand vous êtes élu, vous ne connaissez pas toujours le métier. À cet égard, la formation, prévue par le projet de loi, est indispensable.

Personnellement, je suis donc favorable au seuil de 500 habitants, ainsi qu’à l’amendement de Mme Gayte qui prévoit que le premier adjoint ou le vice-président doit être du sexe opposé. Ce serait une belle avancée.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Je suis une femme, issue de la ruralité, très favorable à la parité, mais totalement opposée aux amendements visant à instaurer le scrutin de liste dans toutes les communes. Je partage pleinement les propos de Mme de Courson et de M. le ministre. Je ne suis pas contre la parité car, sans elle, je ne serai pas là. Mais le premier frein de la parité, c’est nous, les femmes, car nous nous interrogeons toujours sur nos capacités à nous engager. Or l’engagement est la clé. Introduire la parité à tous les niveaux dessert notre cause, d’autant que cela implique un scrutin de liste.

J’ai appelé toutes les communes rurales de mon département, le Tarn. Tout le monde est favorable à la parité, et elle est naturelle à chaque fois qu’elle est possible. Mais imposer un scrutin de liste est antidémocratique. Ainsi, je connais des maires élus, et réélus, alors qu’ils étaient seuls à se présenter. Le panachage actuellement autorisé est favorable à l’expression de la pluralité et de la diversité ! Dans nos territoires, les gens se choisissent autour d’un projet ! En imposant le scrutin de liste, on va faire rentrer l’appareil politique dans toutes les communes. Cela m’effraie, comme la plupart des maires !

M. Erwan Balanant. Monsieur le ministre, vous aimez nous dire que ce texte est issu du Grand débat et des quatre-vingt-seize heures d’échanges entre le Président de la République et les maires, autrement dit de la volonté de répondre aux questions qu’ils posent. Or je constate que les deux principales associations de maires de France, l’AMF et l’AMRF, sont favorables à la parité dans les conseils municipaux sans seuil. Alors écoutons-les !

S’agissant du Conseil constitutionnel, il a précisément rendu une décision sur une question de priorité constitutionnelle, selon laquelle le principe de parité permet « au législateur d’instaurer tout dispositif tendant à rendre effectif l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales […]. À cette fin, il est loisible au législateur d’adopter des dispositions revêtant soit un caractère incitatif, soit un caractère contraignant ».

Sur le pluralisme, il est fréquent qu’il n’y ait qu’un seul candidat dans un scrutin uninominal. Dans ce cas, il n’y a pas de pluralisme dans l’élection.

Enfin, et c’est le plus important pour moi, c’est une question sociétale. Nous législateurs, ne pouvons pas répéter sans cesse que nous voulons la parité et l’égalité entre les femmes et les hommes et ne pas aller au bout de la démarche, c’est-à-dire abaisser le seuil à zéro habitant.

Pour conclure, imaginez simplement qu’une femme vivant dans une commune de moins de 500 habitants pourra saisir le Conseil constitutionnel pour rupture d’égalité.

M. André Chassaigne. En ce petit matin, je voudrais rappeler un grand soir, celui du 21 avril 1944 où le député communiste Fernand Grenier a fait voter à l’Assemblée consultative provisoire, sous l’égide du général de Gaulle, un amendement accordant aux femmes le droit de vote et d’éligibilité. Cet amendement était ainsi rédigé : « Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes. » Il y a eu ensuite un cheminement législatif, mandat après mandat, et des avancées.

Je voudrais maintenant vous faire part de mon vécu. J’ai le privilège d’être élu municipal depuis 1977. J’ai été conseiller municipal, maire-adjoint, et maire pendant vingt-sept ans de mon village qui a tantôt compté moins de 500 habitants, tantôt davantage, parfois même juste 500 habitants. Au départ, le conseil municipal était constitué uniquement d’hommes. Aujourd’hui, grâce à une volonté politique, au sens noble du terme, la parité est respectée. Elle a permis un enrichissement extraordinaire du fait d’un regard différent sur les choses de la vie, d’une sensibilité spécifique, de la prise en compte de problèmes qui ne l’étaient pas auparavant de la même façon. La parité, j’en suis convaincu, est un apport dans notre fonctionnement démocratique.

Elle a aussi l’avantage d’intégrer dans les conseils municipaux de nos petites communes rurales les populations nouvelles…

M. Erwan Balanant. Tout à fait !

M. André Chassaigne. … de sortir de ce clivage entre les familles anciennes et ceux que l’on appelait il y a peu de temps encore les néoruraux. Cela oblige à avoir des listes avec une diversité hommes-femmes et une diversité d’origines.

M. Arnaud Viala. Je veux d’abord remercier M. le ministre d’avoir posé la question dans le bon sens. Effectivement, il s’agit de savoir ici si on veut un scrutin à la proportionnelle dès le premier habitant ou si on considère que l’exercice de la démocratie locale exige un scrutin de bon sens, pragmatique, correspondant aux réalités, jusqu’à un seuil qui reste à définir. À cette question, la réponse est claire : politiser inutilement et verrouiller en quelque sorte une liste qui sera, dans la quasi-totalité des cas, au mieux unique au pire inexistante et entre les deux incomplète, nous paraît être une erreur manifeste.

On ne peut pas opposer ceux qui seraient partisans de la parité et ceux qui y seraient réticents. La parité est un but que nous poursuivons tous, et nous souhaitons qu’elle se développe. Mais on peut faire confiance pour cela à celles et ceux qui composent des équipes pour faire en sorte que les femmes et les hommes y aient toute leur place, ce qui est déjà largement le cas.

S’agissant du seuil, je voudrais soumettre une réflexion à notre commission. Alors que 85 % des communes de l’Aveyron comptent moins de 500 habitants, je ne crois pas que le seuil de 500 habitants soit adapté. On note en revanche une différence dans l’écosystème communal entre zéro et 1 000 habitants. En effet, une commune de 1 000 habitants comprendra notamment davantage de commerces, de services, et la vie y est sensiblement différente que dans une plus petite commune. Cela peut donc justifier le seuil tel qu’il a été défini jusqu’à présent. On se fera plaisir en l’abaissant à 500 mais cela risque d’engendrer un effet de bord très préjudiciable à la démocratie locale.

Mme Coralie Dubost. Je suis très engagée sur la parité que j’ai beaucoup défendue dans les entreprises. En tant que rapporteure du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, j’ai ainsi fait adopter plusieurs amendements en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes, avec notamment un renforcement des sanctions dans les conseils d’administration qui n’appliquent pas les quotas. Je fais partie de ceux qui pensent qu’on n’avance pas si on n’impose pas un objectif quasi inatteignable. Mais ce serait une erreur de l’imposer dès 2026 dans les petites communes.

Il faut saluer la bonne dynamique défendue par le groupe La République en Marche et par le rapporteur qui consiste à abaisse le seuil à 500 habitants. Peut-être pourrait-on envisager une trajectoire pour l’avenir qui permettrait de prévenir et de former. Mais il ne faut pas qu’on se prive de l’occasion d’avoir de belles listes dans des communes. À cet égard, je voudrais vous parler de Buzignargues, une petite commune de ma circonscription que j’affectionne tout particulièrement. Je tiens à saluer sa maire, Agnès Rouvière-Esposito, qui n’a pas un conseil municipal paritaire puisqu’il est composé de moins de femmes que d’hommes mais dont les postes à responsabilité sont occupés par des femmes. En effet, la première adjointe est une femme, le deuxième adjoint est un homme, et la troisième adjointe est une femme. Si on adopte cet amendement, cette liste ne sera plus possible. Ce serait une erreur. On rencontre déjà beaucoup de difficultés à trouver des femmes qui s’engagent en politique, notamment en tête de liste. Or elles ne pourront pas aller jusqu’au bout car elles risquent de ne pas trouver suffisamment d’autres femmes pour pouvoir établir des listes dans les petites communes.

Sensibilisons, accompagnons, donnons une trajectoire. Mais il est trop tôt pour aller au-delà. Je ne voudrais pas priver Mme Rouvière-Esposito de son beau mandat et de son beau conseil municipal.

Mme Marie Guévenoux. Je suis réservée, moi aussi, sur la portée de ces amendements tant il est malheureusement difficile de composer des listes paritaires, en particulier dans les petites communes rurales. Comme l’a rappelé Coralie Dubost, cette difficulté s’impose y compris quand les têtes de liste sont des femmes. Telle est la réalité. Il convient donc de nous assurer que le mécanisme que l’on prévoit n’est pas trop contraignant, au point d’empêcher la constitution de listes dans des petites communes.

 Le projet de loi est très attendu parce qu’il doit répondre à une crise des vocations, les citoyens ayant du mal à s’engager à cause notamment de contraintes toujours plus nombreuses. Pourquoi en rajouter une ? D’autant qu’elle ne tient pas compte de la spécificité des petites communes et qu’elle risque d’entraîner des effets de bord dommageables, y compris pour la parité. Une femme peut avoir envie de faire une liste différente de celle de l’homme qui se présente dans votre petite commune. Si la difficulté à trouver d’autres candidates femmes s’impose à elle, le pluralisme politique ne sera pas respecté, puisqu’elle ne parviendra pas à constituer une liste paritaire. Vous conviendrez que cela sert peu la cause des femmes.

Je suis donc personnellement très réservée sur ces amendements, même sur ceux qui prévoient d’abaisser le seuil à 500 habitants, sauf à diminuer le nombre de conseillers municipaux – ce que vous ne souhaitez pas, monsieur le ministre.

Mme Hélène Zannier. Je ne peux que saluer toutes les initiatives allant dans le sens d’une meilleure représentation des femmes dans la politique. Cela étant, bien évidemment, et je vous rejoins monsieur le ministre, il ne s’agit pas d’opposer parité, élections municipales, représentation des femmes. C’est un combat que nous menons tous depuis un certain temps.

À mon tour, je souhaite apporter mon témoignage. Je suis élue d’une circonscription qui compte 107 communes. Pour avoir participé à plusieurs reprises à des assemblées générales d’associations de maires ruraux, je peux dire que ces maires craignent tous que l’abaissement du seuil à zéro ne soit trop contraignant, alors même qu’ils font des efforts depuis de nombreuses années pour attirer les femmes dans les conseils municipaux. Plusieurs communes pourraient même se retrouver sans exécutif.

Vous l’aurez compris, je ne suis pas favorable à la suppressiont du seuil. Pour être totalement franche celui de 500 habitants me paraît même très contraignant.

Mme Nadia Hai. Je suis arrivée trop tard pour défendre l’amendement CL747, mais suffisamment tôt pour me satisfaire de la réponse de M. le ministre sur les amendements identiques CL1172, CL674, CL1048 et CL1118. Je partage ce qui a été dit s’agissant des aspects juridiques et de la difficulté de constituer des listes dans les petites communes.

Je suis membre de la Délégation aux droits des femmes et j’accorde une importance particulière à l’égalité entre les femmes et les hommes et à la parité. Il me semble que ce combat doit être mené sur tous les fronts, notamment sur celui de la politique et de la constitution des listes. Mais imposer la parité à des communes de moins de 500 habitants paraît vraiment très risqué pour constituer des listes alors que nous incitons précisément nos concitoyens à participer à la vie politique. Ajouter une contrainte de cette nature serait vraiment contre-productif. Concentrons-nous sur l’essentiel, c’est-à-dire sur l’engagement des femmes en politique, quel qu’il soit, mais n’imposons pas. Ne soyons pas contre-productifs dans le combat que nous avons à mener tous ensemble.

Mme Catherine Kamowski. Je suis dans une position difficile dans la mesure où le groupe auquel j’appartiens souhaite soutenir les amendements visant à abaisser le seuil à 500 habitants tandis que la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation dont je suis secrétaire défend la parité à partir du premier habitant. Aussi vais-je vous donner ma position personnelle.

C’est en 2001 que la parité s’est appliquée dans les communes de plus de 3 500 habitants, et je ne serais peut-être pas là si je n’avais pas bénéficié de cet effet de parité qui m’a fait entrer en politique, comme c’est le cas de nombreuses femmes aujourd’hui députées. À cette époque, j’ai entendu exactement les mêmes débats, avec les mêmes craintes – sincères ou non – et les mêmes propositions. C’est pourquoi je suis plutôt favorable à la suppression du seuil, ce qui ne m’empêchera pas de voter les amendements présentés par mon groupe qui proposent un seuil de 500 habitants.

Certains considèrent qu’il sera difficile de trouver suffisamment de femmes dans les petites communes pour respecter la parité dans le conseil municipal. Dans une commune de 250 habitants qui compte une centaine de femmes, il faudra en trouver cinq !

Avec un seuil à 500 habitants, on risque d’aboutir à une égalité à deux vitesses : il y aura d’un côté les femmes qui habitent dans les communes de plus de 500 habitants et qui bénéficieront des mesures de parité, et de l’autre celles qui ont le malheur de vivre dans les communes de moins de 500 habitants où la parité ne pourra pas s’appliquer, ou en tout cas pas tout de suite. J’en appelle aux femmes de France : elles doivent toutes pouvoir bénéficier des mêmes mesures de parité.

M. Raphaël Schellenberger. J’entends que certaines causes nécessitent qu’on porte atteinte à certaines libertés. C’est précisément le propre de notre travail de législateur de définir la limite entre la contrainte et l’espace de liberté. Il s’agit ici de savoir si l’on fait confiance ou non aux élus locaux, aux candidats locaux, aux gestionnaires de collectivités ou potentiels gestionnaires de collectivités qui se présentent aux élections. J’avais cru comprendre que nous devions examiner un texte sur les libertés, sur la confiance à l’endroit des élus locaux. Or, sur la question de la parité, on est en train de leur dire qu’on ne leur fait pas confiance. Peut-être à juste titre.

Comme on est dans la litanie des exemples personnels…

M. André Chassaigne. C’est une liturgie !

M. Raphaël Schellenberger. … histoire de ne pas être rangé tout de suite dans la catégorie de l’homme blanc de moins de cinquante ans élu, et donc disqualifié pour parler des questions de diversité dans la vie politique, je vais vous raconter mon parcours personnel. Lorsque j’ai été élu maire de ma commune de Wattwiller en 2014, j’ai rencontré des problèmes pour constituer ma liste parce qu’il me manquait des hommes – je ne doute pas que la parité protégera aussi un jour les hommes. Je citerai aussi l’exemple de cette femme pour qui j’ai un profond respect et qui est devenue maire grâce au suffrage uninominal direct – avec un scrutin de liste, elle n’aurait jamais été élue maire – ou encore celui de cette autre femme, maire d’une commune de moins de 500 habitants alors que le conseil municipal compte trois femmes.

La contrainte sur la parité risque de poser un problème de démocratie. Alors que nous voulions soutenir l’engagement dans les territoires, je crains que ces mesures ne soient contre-productives.

Mme Laetitia Avia. Je crois que tout le monde ici partage ces objectifs d’égalité entre les femmes et les hommes et de parité. Il est important d’en prendre acte. Mais que faisons-nous concrètement pour avancer en la matière ?

Le Conseil constitutionnel indique que, lorsque nous devons conjuguer des valeurs cardinales, nous devons le faire avec responsabilité. En l’occurrence, nous devons conjuguer égalité et pragmatisme, parité et vitalité de notre vie démocratique.

Au-delà, à quoi sert le législateur, en quoi les lois qu’il élabore permettent-elles de faire vraiment évoluer la société ? Si des lois suffisaient à assurer l’égalité entre les femmes et les hommes, cela se saurait. Si tel était le cas, je ne crois pas que les députés du groupe Socialistes et apparentés auraient quitté l’hémicycle à seize heures quarante-sept mardi dernier. Il y a des lois qui prévoient l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. Or cette égalité salariale n’existe toujours pas. Il y a des lois qui assurent la parité dans les investitures. Or la parité n’existe toujours pas dans l’hémicycle de notre assemblée. La loi constitue un socle, et j’y suis attachée, mais il y a aussi d’autres éléments qui interviennent.

M. Chassaigne a parlé de volontarisme, en tout cas de volonté de terrain. Il nous appartient en effet d’agir, d’apporter des évolutions, mais pas en tant que législateurs : comme femmes et hommes politiques que nous sommes.

Raphaël Schellenberger a rappelé quel était l’objectif de ce texte. Prenons un peu de hauteur et souvenons-nous que si nous discutons aujourd’hui de ce projet de loi, c’est parce que nous voulons dire aux élus locaux que nous leur faisons confiance, que nous voulons leur donner plus de flexibilité, que nous essayons d’améliorer la façon dont ils travaillent en partant du terrain et de leur quotidien. Veillons, par notre vote sur ces amendements, à ne pas aller à l’encontre de cet objectif que nous défendons collectivement.

Mme Anne Blanc. Monsieur le ministre, vous avez rappelé que ces amendements pouvaient faire courir un risque constitutionnel. J’y suis sensible, bien sûr. Je m’interroge néanmoins sur la position du Conseil constitutionnel en matière de pluralisme. Peut-on vraiment parler de pluralisme, dans les petites communes lorsqu’on constate des candidatures isolées ou la présence de deux ou trois candidats seulement ? On sait qu’il s’agit bien souvent de règlements de comptes, d’histoires de famille, de village. Souvent, ce n’est pas l’intérêt général qui est mu au travers de ce pseudo-affichage de pluralisme.

Il y a, dans ma circonscription, des communes de plus de 2 000, 3 000 ou 4 000 habitants qui, lors des dernières élections municipales, n’ont présenté qu’une liste, tandis qu’une commune de 112 habitants avait trois listes complètes. Rejeter ces amendements reviendrait à considérer que les communes de moins de 500 habitants ne sont pas en mesure de s’organiser, de se fédérer, de présenter un projet communal, de parvenir à la parité.

Il faut interpeller les membres du Conseil constitutionnel sur l’égalité, car ce texte vise l’égalité et l’équité de traitement. Nous devons oser franchir un grand pas vers une égalité en matière de mode de scrutin dans l’ensemble des communes de notre pays.

M. Jean-René Cazeneuve. Je suis, moi aussi, dans une position assez inconfortable puisque la Délégation aux collectivités territoriales s’est en effet prononcée en faveur de la parité à partir de zéro habitant.

Je respecte bien évidemment tous ceux qui se battent pour la parité. J’appartiens à une génération qui mène le combat pour que l’égalité devienne une réalité de tous les jours dans le domaine professionnel, de l’éducation… Il n’y a pas d’un côté ceux qui sont pour la parité, et de l’autre ceux qui sont contre : nous sommes tous pour le pluralisme.

Cela étant, les maires ruraux, qui eux aussi se battent pour instaurer un maximum de parité sur leur liste, vivraient la mesure ici proposée comme une contrainte. Le dispositif est donc un peu orthogonal par rapport à notre projet de loi qui souhaite donner des libertés supplémentaires.

Par ailleurs, je ne crois pas qu’il faille prendre le risque de faire reculer le pluralisme : le coût serait trop important pour notre démocratie.

Enfin, abaisser le seuil à 500 habitants représente déjà un grand pas. Des milliers de femmes supplémentaires seront ainsi élues à partir de 2026. Cela aura une valeur d’exemplarité, de capillarité pour toutes les petites communes et favorisera l’engagement des femmes. Ce geste fort permettra de montrer la direction.

M. Guillaume Gouffier-Cha. J’ai hésité à prendre la parole, et je tiens à préciser que ma réflexion est personnelle.

Alors que nous partageons tous le même objectif, la question est effectivement de savoir comment faire pour parcourir le dernier kilomètre, pour reprendre l’expression employée par M. le ministre. Cela nous renvoie au nombre de communes que compte la France. Il est trop important selon moi mais c’est le fruit de notre histoire. Et la France, grand pays d’Europe, est peu peuplé, mais peuplé presque partout. Il reste que ce grand nombre de communes engendre des difficultés d’engagement politique, une crise locale qui contraint les élus et qui fait qu’il est difficile de répondre à toutes les demandes en matière de services publics, de politique publique sur l’ensemble du territoire. C’est pourquoi il importe, selon moi, d’entretenir, de pousser, d’accélérer le mouvement de rapprochement, de fusion, de création de communes. Ce n’est pas en accordant des exceptions aux plus petites communes que nous atteindrons nos objectifs, notamment en matière d’engagement politique et de représentativité politique.

Ce débat a déjà eu lieu lors de l’examen du projet de loi de transformation de la fonction publique au cours duquel des demandes d’exceptions dans le recrutement d’agents publics avaient été formulées, dérogeant ainsi aux règles de droit commun. Nous les avions rejetées au motif que les mêmes règles doivent s’appliquer partout sur l’ensemble du territoire.

Mme Cécile Untermaier. Je constate que c’est au travers d’amendements sur ce projet de loi que l’on s’interroge sur la parité. Je le regrette, car nous ne disposons pas d’une étude d’impact. Vous avez raison de vouloir remettre la commune au cœur de la vie démocratique, mais il aurait été utile de poser la question de la parité en amont. Les sénateurs socialistes ont présenté un amendement en ce sens que nous avons bien évidemment repris.

Dans ces conditions, il est difficile pour le Gouvernement d’aboutir à un atterrissage convenable. Nous voterons ces amendements qui visent à abaisser le seuil à 500 habitants car, comme on dit, c’est toujours mieux que rien. Mais on ne gouverne pas sans risque, monsieur le ministre. Les associations d’élus sont derrière vous, et ils sont favorables à la mesure de suppression du seuil, à moins qu’ils tiennent un double langage.

Vous souhaitez que le dispositif entre en vigueur en 2026, ce que je comprends. Je me range à votre avis. En revanche, je suis moins d’accord avec vous sur le pluralisme car je ne vois pas en quoi la constitution d’une liste paritaire y fait obstacle. C’est n’avoir qu’une seule liste qui fait obstacle au pluralisme. Or c’est de plus en plus souvent le cas, même pour les communes de plus de 1000 habitants, ce qui devrait nous interroger.

Sur le seuil, les communes de moins de 500 habitants, qui sont pourtant nombreuses, vont devenir une espèce rare dans laquelle la femme n’aura pas la même valeur que dans une commune de plus de 500 habitants. Les femmes de France pourront se sentir curieusement discriminées selon leur lieu d’habitation. En outre, quel message envoyons-nous depuis Paris en laissant entendre qu’une commune de moins de 500 habitants ne saura pas faire la parité et qu’il convient de lui laisser encore du temps ?

Enfin, et même si je vous suis sur le risque que représenterait une censure, je rappelle que c’est à l’article 1er de la Constitution qu’est inscrit le principe selon lequel la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. Il n’est question du pluralisme que plus loin dans le texte. L’article 1er de la Constitution, ce n’est pas rien !

Mme Fiona Lazaar. Je me réjouis d’entendre que la Délégation aux collectivités territoriales soutient l’idée d’une parité dès le premier habitant, ce qui est en phase avec les échanges que nous avons pu avoir au sein de la Délégation aux droits des femmes avec l’Association des maires de France, l’Association des maires ruraux de France ou l’Assemblée des communautés de France.

À quoi ce seuil de 500 habitants correspond-il dans les faits ?

Enfin, dans l’amendement que nous proposons au titre de la Délégation aux droits des femmes, nous avons levé le biais constitutionnel en prévoyant un dispositif de souplesse pour les petites communes. En outre, les mesures ne seraient applicables qu’en 2026, ce qui laisse le temps de s’organiser pour constituer ces listes.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Dans un communiqué de presse du 28 janvier 2019, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes et les associations nationales d’élus locaux appelaient à légiférer dans les plus brefs délais pour renforcer la parité dès 2020. Le constat était d’ores et déjà sans appel : en l’absence de contraintes paritaires, l’égalité n’advient pas. Je suis d’accord, la loi ne suffit pas, mais c’est un préalable.

Enfin, je rappelle à mon tour que l’article 1er de notre Constitution indique que : « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales. » Je vous invite donc, mes chers collègues, à être audacieux en franchissant ce pas, et à aller ainsi dans le sens de l’histoire.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Abaisser le seuil à 500 habitants n’est pas une bonne mesure parce que ceux qui sont pour la parité totale ne seront pas satisfaits et ceux qui sont contre continueront à dire qu’on a ajouté des contraintes supplémentaires. Au final, c’est une cote mal taillée qui ne satisfera personne.

Bien sûr, la parité totale fait courir un risque de constitutionnalité, mais les grandes avancées se sont faites en prenant des risques. Ayons le courage de faire ce dernier pas, ce dernier kilomètre. Ceux qui ont fait du sport savent que c’est souvent le kilomètre le plus difficile à parcourir.

On les connaît ces maires qui nous expliquent pourquoi ils ne parviennent pas à la parité. M. Chassaigne disait qu’elle permettrait en outre d’intégrer dans les conseils municipaux des néoruraux, des nouveaux arrivants et arrivantes. Au-delà, cela nous aidera également à avoir une nouvelle génération d’élus et à élire des femmes maires qui auront un nouvel état d’esprit, ce qui est très important.

Mme Laurence Gayte. Ne l’oublions pas, en abandonnant l’objectif de parité pour les communes de moins de 500 habitants, nous allons mettre de côté 52,3 % des communes et passer à côté de l’ambition que nous souhaitons porter. Comme Alain Péréa, je pense qu’il ne faut pas opposer parité et pluralisme, la parité fait partie du pluralisme. Lorsque nous aurons imposé l’idée, elle ne sera plus considérée comme une contrainte.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous remercie tous d’avoir contribué à cet échange serein, qui a d’ailleurs donné lieu, monsieur Chassaigne, à un rappel historique fondamental sur la place des femmes dans la vie politique.

Je ne reviendrai pas sur les raisons qui me conduisent à vous demander de retirer les amendements qui visent à abaisser le seuil à zéro habitant. Les contingences constitutionnelles ont été rappelées sans ambiguïté par le ministre. Je regrette que la délégation aux droits des femmes, à la différence de la délégation aux collectivités territoriales, ne se soit pas saisie du texte. Les amendements défendus aujourd’hui le sont donc à titre individuel.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je donne la parole à Mme Fiona Lazaar, vice-présidente de la délégation aux droits des femmes, pour répondre au rapporteur sur ce point.

Mme Fiona Lazaar. La délégation aux droits des femmes a déposé une proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires. Les travaux ont été menés, nous avons échangé avec les différents acteurs. C’est en ce sens qu’un amendement a été déposé, cosigné par plusieurs membres de la délégation, dont sa présidente, sa vice-présidente, et des députés n’appartenant pas au groupe de La République en Marche.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vous remercie pour la qualité et le sérieux de ce débat. Il se clôt sur la parité, mais la question de départ, qui importe sur le plan juridique, est celle de la proportionnelle. Et dans cette enceinte où l’on écrit la loi, c’est bien le débat juridique qui doit nous guider.

Je ne reviens pas sur l’opportunité de la parité, j’ai répété dix fois que j’y étais favorable. Certaines associations d’élus se sont engagées. L’AMF a pris position, non sans difficulté, et en l’absence de consensus, ainsi que me l’a rappelé François Baroin. Que sa proposition soit ou non constitutionnelle, il appartient au Parlement, au Gouvernement et au juge constitutionnel d’en juger. Mon esprit taquin me pousse à rappeler aussi aux députés de la majorité que l’AMF leur demande de renoncer à la réforme de la taxe d’habitation : il arrive donc que ses positions ne soient pas forcément les mêmes que les nôtres.

J’ai entendu beaucoup d’arguments en faveur de la parité, et c’est bien naturel, puisqu’elle fait consensus. Sur le pluralisme, en revanche, je ne suis pas d’accord avec tous les intervenants. Madame la députée Anne Blanc, malgré ses multiples imperfections – tir aux pigeons, bazar généralisé –, le mode de scrutin dans les communes de moins de 1 000 habitants demeure très libre, donc très démocratique. On perd toujours à organiser les candidatures et il est bon qu’il n’y ait pas de contrôle préalable. Ainsi, chaque citoyen, dès lors qu’il est éligible, qu’il n’est pas en situation d’incompatibilité et qu’il a un suppléant qui remplit les mêmes critères peut être candidat aux élections législatives. C’est tout le débat sur les listes communautaires. Le pluralisme est largement garanti par le mode de scrutin actuel.

Monsieur le député Erwan Balanant, la rupture d’égalité existe potentiellement dans les pratiques politiques, mais elle n’existe pas en droit. N’importe qui peut déclarer sa candidature aux élections municipales. Pendant longtemps, les listes à la proportionnelle étaient des freins à la parité, parce que l’obligation de parité n’existait pas : la formation politique ou la tête de liste pouvait composer la liste comme bon lui semblait, avec autant d’hommes que souhaité, et rarement des femmes. C’est ce que le législateur est venu corriger en imposant la stricte parité dans les listes.

Dans les communes de moins de 1 000 habitants, n’importe quel citoyen, homme ou femme, peut être candidat. En droit, il n’y a pas de rupture d’égalité. Après, c’est un problème de pratiques. Les noms des femmes sont-ils plus souvent rayés que ceux des hommes ? Je n’en suis pas certain. En revanche, je suis convaincu qu’il est plus difficile pour une femme de se porter candidate. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ce projet de loi comporte des mesures d’accompagnement. Il ne faut pas se raconter d’histoires, l’engagement des femmes, même lorsqu’il y a un scrutin de liste, tient à des détails comme l’heure des réunions de commissions, le jour du conseil municipal ou le délai de convocation – mille sujets qui ne relèvent pas de la loi.

Il n’y a pas de rupture d’égalité, et tous les arguments tendant à dire qu’il y aurait deux sortes de femmes, celles qui habitent dans les communes de plus de 500 habitants et les autres, ne sont pas fondés juridiquement. Ils sont valables sur le plan politique… comme tous les arguments d’ailleurs. Ce sur quoi nous devons trancher, et c’est la raison pour laquelle j’émets un avis très favorable sur les amendements du rapporteur, de MM. Bru, Houlié et Cazeneuve tendant à abaisser le seuil à 500 habitants, c’est le pluralisme. Le problème consiste à ne pas créer d’inégalité entre ceux qui peuvent avoir le choix entre plusieurs offres politiques, quand bien même il n’y en a qu’une, et ceux qui, quoiqu’il arrive, n’en ont qu’une. Ce n’est pas une moindre affaire, cela représente deux cents ans de combat.

Je n’essaie pas d’enjamber le Conseil constitutionnel, ou de le tutoyer sur la concurrence entre pluralisme et parité. J’appelle simplement de mes vœux un mécanisme qui fonctionne, qui ne risque pas d’être censuré. Une fois de plus, je ne pense pas que la parité soit secondaire, mais il faut concilier les objectifs constitutionnels. Le Conseil d’État et le juge constitutionnel se sont largement prononcés sur le sujet, grâce, d’ailleurs, à la majorité à laquelle vous apparteniez, madame la députée Cécile Untermaier. Il m’appartient donc de rappeler, en tant que ministre, que si un amendement abaissant le seuil à zéro habitant était adopté, ce serait certes une bonne nouvelle pour la parité, mais la disposition serait inconstitutionnelle.

M. Raphaël Schellenberger. Madame la présidente, je souhaiterais que vous exerciez une vigilance toute particulière au moment des votes. Nous sommes nombreux aujourd’hui, et cela n’a pas posé de problème jusqu’alors. Mais on sent bien que la majorité, notamment, est partagée sur le sujet. Or il y a dans cette salle beaucoup de députés qui, n’étant pas membres de la commission, n’ont pas le droit de voter.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Cela me semble évident. J’ai sous les yeux, et comme toujours, une liste des membres de la commission présents.

La Commission rejette les amendements identiques CL1076, CL978, CL1079 et CL1128, puis les amendements CL469, CL690, CL692, CL693 et CL560.

La Commission adopte les amendements identiques CL1172, CL674, CL1048, et CL1118.

En conséquence, l’amendement CL840 tombe.

La Commission examine les amendements CL694, CL695 et CL696 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Pour obtenir une alternance, nous proposons que la première personne de la liste, paritaire, soit d’un sexe différent de celui du maire.

Je ne referai pas le débat sur la place des femmes et la parité. Pour une meilleure représentation de la société, il faut que le taux de femmes élues soit élevé, mais il faut aussi qu’elles soient plus nombreuses dans les exécutifs et davantage investies dans l’intercommunalité. Je rappelle que 84 % des maires sont des hommes, et que ce sont les maires qui sont représentés dans les conseils communautaires.

À ce sujet, je regrette de ne pas avoir pu défendre un amendement visant à ce que le pacte de gouvernance prévoie que les équipes « tendent vers la parité ». Il aurait été très bénéfique d’inciter les équipes municipales à veiller à une meilleure représentation des femmes dans l’intercommunalité.

M. Bruno Questel, rapporteur. Coralie Dubost a parfaitement illustré dans son intervention combien cet amendement serait un frein aux initiatives locales visant une meilleure représentation des femmes dans les exécutifs communaux. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. S’agissant des EPCI, je ne suis pas opposé à une rédaction qui obligerait le conseil, lors de l’élaboration du pacte de gouvernance, à réfléchir à l’objectif de parité, non seulement pour les postes de vice-président, mais aussi pour les commissions. Ce serait, en quelque sorte, une obligation de moyens. Je reviens à la philosophie du texte : le respect des objectifs est important, mais il faut laisser une part de liberté aux élus locaux. Au passage, cela permettrait aux oppositions de constater que certains objectifs ne sont pas remplis – le combat politique se mène là aussi. Je ne serais pas défavorable à un tel amendement en séance, si toutefois vous en retravailliez la rédaction.

Sur le présent amendement, mon avis sera défavorable, pour une simple et bonne raison : il ne s’agit là que de protocole. Comme vous le savez, le tableau des adjoints est dissocié des fonctions réelles : le premier adjoint peut être chargé de bien peu de chose, quand le dixième adjoint aura reçu une très large délégation, comprenant l’urbanisme, la sécurité et les finances. Dans les toutes petites communes rurales, le maire, qui travaille, a souvent un premier adjoint retraité pour les réunions qui se font en journée. Ce sont des choses bien éloignées des grands combats, je dois l’avouer, mais qui font que l’organisation du bureau municipal est une pâte molle. Il y a autant de vérités que de villages.

Je reste persuadé que l’abaissement du seuil à 500 habitants, que vous venez d’adopter, entraînera mécaniquement une meilleure représentation des femmes dans les exécutifs locaux. D’ailleurs, le Sénat, suivant l’avis favorable du Gouvernement, a introduit des listes « chabada » pour les bureaux locaux. Il était encore possible, et fort inélégant, de placer cinq hommes en premier, puis cinq femmes ensuite dans un tableau d’adjoint. Désormais, la liste alternera les hommes et les femmes, et le tableau commencera par le premier adjoint, non par le maire. Votre amendement modifierait les choses, car le maire est élu d’un côté, les adjoints de l’autre.

M. Philippe Gosselin. Je ne reviendrai pas sur la parité, que tout le monde défend, au même titre que le pluralisme. Au-delà des aspects théoriques, il conviendrait de prendre en compte la réalité de la vie locale. Je m’étonne, et je ne suis pas le seul, de ce côté très intemporel, parfois hors sol, des questionnements. Je ne suis pas condescendant, je ne dis pas que nos collègues n’ont pas d’expérience, mais lorsque l’on connaît la vie locale, l’engagement dans une petite commune, on peut s’étonner de certains propos.

S’agissant du mode de scrutin, il faut savoir que la position de l’AMF sur la suppression du seuil pour l’application du scrutin de liste paritaire a été très contestée par les adhérents de base que sont les maires des communes rurales, toutes sensibilités confondues. Ceux-ci s’efforcent d’organiser des équipes municipales qui soient plurielles, composées d’actifs, de retraités, de jeunes, de moins jeunes, d’hommes et de femmes. Cela s’avère déjà très compliqué. Pourquoi vouloir normer à tout prix ? On passe à côté du bon sens, des pactes de gouvernance. La réalité est beaucoup plus simple : la libre administration des collectivités locales, cela commence par des conseils qui peuvent s’organiser à peu près librement, tout en respectant quelques grands principes.

M. Erwan Balanant. Vous avez raison de dire qu’il ne faut pas trop de règles mais, vous le savez aussi bien que moi, la démocratie s’organise autour de règles. J’ai eu la curiosité de relire les débats de 2001 : cela donne l’impression amusante d’un retour vers le futur ! La contrainte n’est pas antidémocratique, elle participe à l’organisation sociale, elle est le fruit d’un choix que la société a fait.

Je rappelle, et ne le prenez pas comme une provocation, que certains partis politiques paient des amendes tous les ans parce qu’ils ne sont pas parvenus à la parité. Si 38 % des députés sont des femmes – ce qui n’est pas encore la parité –, c’est tout simplement parce qu’un jour, un candidat à la présidentielle a tapé du poing sur la table et exigé qu’il y ait dans son parti autant de femmes que d’hommes éligibles aux législatives. Faut-il le rappeler, on est encore loin du compte. Jusque-là, seules les contraintes ont permis d’avancer. Laetitia Avia a dit : « Ce n’est pas la loi qui fait la parité » ; mais sans la loi, il n’y aurait pas eu la parité !

Mme Élodie Jacquier-Laforge. L’adoption de l’amendement de Sacha Houlier à l’article 1er ayant fait tomber de nombreux amendements, je n’ai pas pu défendre celui qui visait à introduire l’objectif de parité dans le pacte de gouvernance. Je retravaillerai volontiers sur cette proposition, monsieur le ministre.

Dans le règlement de l’Assemblée, nous avons aussi avancé sur la question de la parité au Bureau. Nos collègues Les Républicains ont objecté qu’ils manquaient de femmes. L’idée, et je pense que tout le monde est d’accord, est de « tendre vers » la parité.

J’ai bien entendu vos objections, monsieur le ministre, et les remarques de mes collègues. Je ne retirerai pas ces amendements car ils sont porteurs d’un message : oui, nous voulons que les femmes s’engagent et qu’elles soient présentes, à parité, dans les listes communautaires et municipales !

La Commission rejette successivement les amendements

Article 11 bis A
(art. 2122-7-2 du code général des collectivités territoriales)
Élection paritaire des adjoints dans les communes de plus de 1 000 habitants

La Commission examine l’amendement CL924 de M. Arnaud Viala.

M. Arnaud Viala. L’article 11 bis A impose la parité dans la liste des adjoints dans les communes de plus de 1 000 habitants. C’est une rigidité, qui plus est superflue, qu’il convient de supprimer.

Mes collègues et moi avons beaucoup de mal à supporter le procès qui est fait en permanence au groupe Les Républicains. Nous ne sommes pas du tout opposés à la parité, nous avons défendu calmement, avec des arguments étayés, une vision de l’exercice de la démocratie locale par rapport à la proportionnelle, qui n’a absolument rien à voir avec la parité. Nous adhérons au principe de parité, nous souhaitons que les femmes s’engagent en politique à tous les niveaux. Mais nos points de vue se nourrissent de notre expérience d’élus de terrain : nous faisons état des difficultés que rencontrent les petites collectivités à s’organiser lorsque les règles sont trop strictes. Je souhaite que l’on cesse de nous stigmatiser, notre famille politique n’est pas moins favorable à la parité, à la liberté ou à l’égalité que d’autres. C’est insupportable et je vous demande, madame la présidente, d’y veiller.

M. Erwan Balanant. Je ne stigmatise pas Les Républicains, je sais qu’il y a beaucoup d’hommes et de femmes impliqués sur ces questions et que l’on doit certaines des avancées, comme la loi Copé-Zimmerman, à votre famille politique.

J’aimerais rappeler quelques chiffres : dans les intercommunalités où, pour différentes raisons, n’existe aucune contrainte en la matière, 7,5 % des présidents sont des femmes, les exécutifs sont composés à 18 % de femmes et l’on dénombre 14 % de bureaux exclusivement masculins. Les conseillères communautaires occupent 31 % des sièges. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : quand il n’y a pas de contrainte, la parité ne progresse pas. La loi a toujours été le seul moyen de faire avancer la parité dans notre pays.

M. Bruno Questel. Je veux témoigner qu’en amont de l’examen de ce texte, nous avons échangé avec beaucoup de sérénité et dans un esprit constructif avec les députés Les Républicains. Je tiens à les en remercier.

Sur l’amendement, je rappelle que les listes pour l’élection des adjoints sont déjà paritaires. Je vous suggère donc de le retirer, monsieur Viala.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Pour le coup, cette disposition, qui impose d’alterner les candidats de chaque sexe, a été votée au Sénat. Comme je le disais à l’instant à Mme Élodie Jacquier-Laforge, il faut tenir un équilibre. Autant il est compliqué d’imaginer un binôme dans les petites communes rurales, autant il n’est pas difficile de parvenir à la parité parmi les adjoints dans les communes de plus de 1 000 habitants. Le conseil municipal est déjà paritaire, il n’y a donc pas de problème de disponibilité. La liste « chabada » est une présentation élégante, qui ne présage en rien de la répartition des fonctions, à laquelle le maire procède par voie d’arrêté. Cet article nouveau, adopté par la plupart des groupes au Sénat, donne une base légale à beaucoup de bonnes pratiques locales, comme à Vernon.

Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

M. Arnaud Viala. Je ne le ferai pas, car cette rigidité me semble excessive. Lorsque le scrutin est à la proportionnelle, la parité est atteinte d’emblée dans la constitution de la liste. On peut imaginer que le bureau reprendra, en gros, les premiers noms de la liste, et qu’il sera composé alternativement d’un homme et d’une femme. Mais imposer la parité par la loi empêchera que le bureau soit composé à majorité de femmes, si d’aventure elles sont plus nombreuses à être impliquées et désireuses de s’investir. Je ne vois pas ce que la loi apporte de plus, dans la mesure où le scrutin prédestine, en quelque sorte, les bureaux municipaux.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL1218 du rapporteur, CL302 de Mme Marie-Pierre Rixain, CL467 de Mme Cécile Untermaier, CL1223 de la présidente Yaël Braun-Pivet, CL888 de Mme Bérangère Couillard, CL746 de Mme Nadia Hai et CL557 de Mme Laurence Gayte.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination, eu égard à l’abaissement du seuil à 500 habitants.

Mme Nadia Hai. Je retire l’amendement CL746.

Mme Laurence Gayte. La répartition des postes au sein des exécutifs locaux reflète d’importantes inégalités. La part des femmes dans les conseils municipaux est de 40 %, mais plus on s’éloigne de la fonction de maire, plus les fonctions sont occupées par des femmes : elles sont 17 % parmi les maires, 29 % parmi les premiers adjoints, 38 % parmi les deuxièmes adjoints, 43 % parmi les autres adjoints et conseillers. L’amendement CL557, qui vise aussi les intercommunalités, propose que la liste des candidats aux fonctions d’adjoint soit composée alternativement d’un candidat de chaque sexe, le premier adjoint étant d’un sexe différent de celui du maire.

M. Bruno Questel, rapporteur. Trop de rigidité : avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable sur l’amendement de coordination du rapporteur.

Je demande le retrait des amendements suivants et émets un avis défavorable sur l’amendement CL557.

M. Arnaud Viala. Monsieur le rapporteur, vous présentez cet amendement comme un amendement de coordination. C’est juste sur le plan juridique, mais cela nous prive d’un débat. En effet, on pourrait imaginer que les communes entre 500 et 1 000 habitants puisse bénéficier d’une souplesse supplémentaire en ayant la capacité d’organiser leur bureau municipal comme elles l’entendent. Lorsque l’on regarde au cas par cas les situations sur lesquelles va déboucher l’instauration de la proportionnelle dans les communes de plus de 500 habitants, y compris dans le bureau municipal, on se dit que ces positions sont jusqu’au-boutistes.

L’amendement CL746 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL1218.

En conséquence, les amendements CL302, CL467, CL1223, CL888 et CL557 tombent.

La Commission adopte l’article 11 bis A modifié.

Article 11 bis B
(art. L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales)
Suppression de la priorité donnée aux adjoints dans l’attribution de délégations par le maire

La Commission adopte l’article 11 bis B sans modification.

Article 11 bis C
(art. L. 247-1 [nouveau] du code électoral
Possibilité pour les candidats de se présenter aux élections municipales avec la nuance « sans étiquette » dans les communes de moins de 3 500 habitants

La Commission est saisie de l’amendement CL1173 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’article 11 bis C. Je m’en remets aux explications du ministre, car nous sommes dans le domaine réglementaire.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. J’ai passé près d’une demi-heure au Sénat à réexpliquer la différence entre nuançage et étiquetage. Le nuançage est assuré par le préfet, c’est un travail réglementaire : il s’agit tout simplement de dire de quelle nuance politique est tel ou tel élu dans le conseil municipal. Cela existe depuis le début de la République.

L’étiquetage est ce que le candidat renseigne au moment de son dépôt de candidature. C’est une procédure déjà très libre : vous pouvez mettre tout ce que vous voulez, ou même rien. Je vous propose de ne pas changer la règle. Un candidat peut être fier de se réclamer de telle ou telle formation politique, mais il peut aussi se targuer d’être libre et indépendant.

Le problème porte sur le nuançage. Beaucoup de parlementaires ont pu comprendre que le préfet allait apposer lui-même une étiquette sur le candidat. Il n’en est rien. Le préfet procède au nuançage, par décret, une fois les personnes élues, afin de les placer sur l’échiquier politique.

Cet article créait une confusion importante et je suis favorable à sa suppression. Le ministre de l’intérieur, en charge des élections, prendra une instruction pour repréciser aux préfets comment doit fonctionner le nuançage auquel il sera procédé après les élections municipales. Cet exercice répond à des seuils, car il est inopérant sur les toutes petites communes rurales.

M. Raphaël Schellenberger. J’avais déposé un amendement permettant, justement, de nuancer la rédaction de cet article. Le plus simple est de le supprimer et nous voterons en faveur de cet amendement.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 11 bis C est supprimé.

Article 11 bis
(art. 43 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République)
Possibilité pour tout citoyen de représenter les communes, les établissements publics de coopération intercommunale, les départements et les régions au sein des comités syndicaux

La Commission est saisie de l’amendement CL968 de M. Stéphane Baudu.

M. Stéphane Baudu. Je vous propose de maintenir l’article 43 de la loi NOTRE, qui a mis fin à deux mécanismes compliqués. L’un permettait à tout citoyen non élu de représenter sa commune ou son EPCI au sein des syndicats mixtes ; l’autre à tout conseiller municipal de représenter son EPCI au sein d’un syndicat mixte.

Trop souvent, la politique de l’EPCI ou de la commune n’est pas complètement appliquée au sein des syndicats mixtes, il est donc nécessaire d’y maintenir un lien opérationnel et direct avec les EPCI et les communes, en évitant que les communes et les EPCI n’y soient représentés par un citoyen non élu, ou un conseiller municipal non-communautaire dans le cas des EPCI.

M. Bruno Questel, rapporteur. Monsieur Baudu, je vous demande de retirer votre amendement et de vous rallier à l’amendement CL1230 que je présente ensuite. Il supprime uniquement le premier alinéa de l’article, et non l’intégralité du dispositif adopté par le Sénat.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je suis très attaché à ce que des élus siègent au sein de ces instances. Je sais qu’il est pratique, face aux difficultés que l’on éprouve parfois à trouver des volontaires pour siéger dans les syndicats mixtes, de nommer un citoyen. Mais la remise en cause progressive de la démocratie représentative me préoccupe fortement. Or il est délicat que des citoyens non élus siègent au sein de syndicats aux compétences étendues et dont les budgets peuvent représenter plusieurs fois ceux des communes adhérentes. Pour le reste, que le représentant soit élu communautaire ou conseiller municipal, tant qu’il est élu, je m’en contente.

M. Raphaël Schellenberger. Nous sommes également attachés à ce principe : ce sont des élus qui doivent siéger dans les instances qui décident de l’utilisation de fonds publics. En revanche, supprimer l’article 11 bis serait contre-productif du point de vue de l’engagement et de la liberté d’organisation des institutions locales. Permettre à un conseiller municipal, qui n’est pas conseiller communautaire, de siéger dans un syndicat dont est membre le conseil de communauté, et non la seule commune, peut être intéressant.

Prenons un exemple concret : la compétence « eau et assainissement » exercée de droit par l’intercommunalité, mais déléguée à une commune. C’est l’intercommunalité qui est membre de droit du syndicat mixte, mais elle pourrait choisir de désigner des conseillers municipaux qui ne sont pas conseillers communautaires, puisque l’exercice de la compétence se situe au niveau municipal.

La suppression de l’article dans sa totalité me semble contraire à l’esprit de la loi.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte ensuite l’amendement du rapporteur CL1230.

Elle en vient aux amendements identiques CL710 de M. Vincent Thiébaut et CL816 de M. Patrick Hetzel.

M. Vincent Thiébaut. L’amendement CL710 proposé par le syndicat des eaux et de l’assainissement de l’Alsace a pour objet de permettre aux EPCI, avec ou sans fiscalité propre, ainsi qu’aux syndicats mixtes membres d’un syndicat mixte ouvert (SMO), de choisir, pour l’élection des délégués appelés à siéger au comité de ce SMO, des membres de leur organe délibérant ou bien des conseillers municipaux de leurs communes adhérentes, comme l’article L.5711-1 du CGCT, tel que modifié par l’article 11 bis du projet de loi, le prévoit pour les syndicats mixtes fermés.

M. Raphaël Schellenberger. Notre amendement CL816 est identique, il vient du même organisme alsacien. L’argument est le même qu’à l’amendement précédent, dans ce cas pour un syndicat supracommunautaire et non infracommunautaire. Il est cohérent avec les autres mesures de cet article.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable à ces amendements de bon sens.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable, mais il conviendra d’apporter quelques modifications rédactionnelles pour la séance afin de prendre en compte les différentes typologies de syndicats.

La Commission adopte ces amendements.

Puis elle adopte l’amendement de précision CL1035 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 11 bis modifié.

Article 11 ter
(art. 1609 nonies C du code général des impôts)
Mission prospective de la commission locale d’évaluation des charges transférées (CLECT)

La Commission est saisie de l’amendement CL969 de M. Stéphane Baudu.

M. Stéphane Baudu. Je propose la suppression de l’article 11 ter. Nous parlons beaucoup de simplifications et de liberté, mais, en l’occurrence, nous sommes loin du compte. La disposition ajoutée par le Sénat au code des impôts est obscure : l’estimation prospective qui y est mentionnée doit-elle être fournie avant la décision de transfert, ou bien après la décision de transfert, mais avant le rapport obligatoire de la commission locale d’évaluation des charges transférées (CLECT) ? Ne rendons pas plus complexe un dispositif qui l’est déjà suffisamment.

Supprimer cet article servirait l’objectif de simplification et de liberté, il faut faire confiance aux élus de l’EPCI pour mettre en œuvre les travaux prospectifs qu’ils jugent nécessaires à la prise de décision, sans les figer dans la loi.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je partage vos objectifs, mais il ne faut pas oublier les élus municipaux et les conseillers municipaux. Tous doivent débattre, notamment grâce aux travaux de la CLECT. Demande de retrait, sinon avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Le rapport de la CLECT n’est pas obligatoire. Cette dernière ne se réunit que si le président de l’EPCI ou un tiers des membres le demandent.

Cette disposition répond en outre à une forte demande de l’Association des maires ruraux de France et fait suite à certains travaux sénatoriaux en réponse au traumatisme causé par la loi NOTRE. Si des éléments sur les attributions de compensations avaient été disponibles avant les décisions de transfert, peut-être que certaines décisions auraient été différentes. Il est curieux de recevoir des informations après que tout a été décidé, et il semble logique d’interroger en amont l’instance amenée à évaluer et à éclairer le conseil communautaire.

Je comprendrais l’argument concernant la liberté à laisser aux élus si cette procédure était obligatoire, mais elle n’est pas automatique.

M. Stéphane Baudu. Je ne retire pas l’amendement, car je reste dans ligne que vous avez fixée, monsieur le ministre : simplification et liberté. Il est possible d’atteindre cet objectif si les élus comprennent que c’est un bon dispositif pour anticiper les transferts compliqués. Nous avons fait beaucoup d’efforts pour simplifier et ne pas tout écrire dans la loi, allons jusqu’au bout en supprimant cet article.

M. Raphaël Schellenberger. Ce n’est pas une question de liberté locale : la CLECT n’exerce pas de compétence locale, elle gère les conséquences des choix du conseil de communauté ou de la structuration de l’EPCI. Il n’y a ni contrainte supplémentaire, ni entrave à une liberté. Il s’agit au contraire d’éclairer l’élu local avant qu’il ne prenne sa décision.

Aujourd’hui, la CLECT n’intervient que pour gérer les conséquences d’une décision, et non pas en amont pour permettre au conseil de communauté de prendre une décision éclairée. Cet article permet de demander à la CLECT une étude d’impact financier du choix soumis à la communauté, il n’entrave pas sa liberté.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cette mission prospective permet d’informer l’ensemble des élus, qu’ils soient membres de la CLECT ou pas.

La Commission rejette l’amendement.

Puis la Commission adopte l’article 11 ter sans modification.

Article 11 quater
(art. L. 5211-43 du code général des collectivités territoriales)
Composition de la commission départementale
de la coopération intercommunale

La Commission est saisie de trois amendements identiques CL1174 du rapporteur, CL675 de M. Vincent Bru et CL1110 de M. Stéphane Baudu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je propose la suppression de l’article 11 quater. Les ratios introduits par le Sénat ne respectent pas, en effet, la répartition équitable des responsabilités au sein des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI).

M. Vincent Bru. Cet article manifeste une certaine méfiance à l’égard des intercommunalités, ce qui est contraire à l’esprit de cette loi.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 11 quater est supprimé.

Après l’article 11 quater

La Commission est saisie de l’amendement CL230 de M. Raphaël Schellenberger.

M. Raphaël Schellenberger. Cet amendement propose que les communes qui concluent une convention puissent en fixer librement les outils de gouvernance. Actuellement, la loi impose ces modalités de gouvernance de façon rigide.

J’ai plus particulièrement à l’esprit l’obligation de supprimer un maximum de syndicats de communes que la loi NOTRe impose aux CDCI. Des syndicats intercommunaux à vocation unique (SIVU) ont été dissous, et la création de nouveaux SIVU a été empêchée. Dans nombre de cas, il n’est pas nécessaire de créer un syndicat intercommunal pour que les communes exercent en commun les compétences qu’elles souhaitent, mais il faut leur permettre de décider des outils de gouvernance de cette compétence partagée.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je suis plutôt convaincu par cette approche, mais je n’émettrai pas d’avis et je m’en remets à celui du Gouvernement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je proposerai à la commission d’adopter l’amendement CL229, que nous examinerons ensuite, qui prévoit une adaptation du droit local.

Je vous invite, en revanche, à retirer l’amendement CL230, qui va créer plus de difficultés qu’il ne va en résoudre. La loi de 1996 prévoit déjà certaines dispositions, et nous n’avons pas connaissance de difficultés à ce sujet à l’exception du cas particulier qui fait l’objet de l’amendement suivant. Mon cabinet est à votre disposition pour plus de précisions.

M. Raphaël Schellenberger. Je retire l’amendement, je le déposerai peut-être en vue de la séance en fonction du résultat des échanges avec votre cabinet.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL229 de M. Raphaël Schellenberger.

M. Raphaël Schellenberger. Cet amendement propose la suppression d’une disposition du droit local d’Alsace Moselle – fait assez rare pour être souligné – qui interdit la conclusion de conventions entre les communes d’Alsace-Moselle.

Je le rappelle, le droit local d’Alsace-Moselle est un ensemble de normes maintenues en vigueur lors de son annexion par l’Allemagne, puis de son retour à la France. Il s’agit d’un certain nombre de règles hétéroclites qui étaient souvent en avance sur le droit français du moment.

En l’occurrence, après la Première Guerre mondiale, les communes d’Alsace-Moselle pouvaient conclure des conventions dans un nombre limité de domaines, notamment pour partager la construction de réseaux d’adduction d’eau. Aujourd’hui, le droit général permet de conclure des conventions dans un plus grand nombre de domaines que le droit local, qui n’offre plus d’avantage. Je propose donc de supprimer la disposition de droit local.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement. L’article 11 quinquies A est ainsi rédigé.

Article 11 quinquies
(art. L. 2113-4 du code général des collectivités territoriales)
Assouplissement de la procédure de création de communes nouvelles dont le territoire est situé sur deux départements ou régions

La Commission examine l’amendement CL716 de Mme Olga Givernet.

Mme Olga Givernet. L’article 11 quinquies est un ajout du Sénat. Il supprime le droit de véto dont disposent les départements et les régions pour s’opposer au redécoupage de leurs limites géographiques lorsque des communes veulent fusionner en communes nouvelles.

Or cette suppression du droit de veto crée un risque d’instabilité du découpage administratif et territorial français. Elle contrevient au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, et au fait qu’il est impossible pour une collectivité d’imposer une décision à une autre. Un projet de fusion de communes qui modifierait le territoire d’un département ou d’une région ne saurait aboutir sans l’accord de ces entités. Je propose donc de supprimer l’article 11 quinquies.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable à l’amendement de suppression. Le problème est de déterminer la solution alternative, et la question n’est pas anodine.

Les communes nouvelles sont un instrument de liberté, et c’est très bien. Elles peuvent s’associer comme elles le souhaitent, à deux, trois ou plus. Elles peuvent se constituer à cheval sur deux EPCI : la méthode pour régler ce cas est prévue. Elles peuvent également se constituer à cheval sur deux départements : les conseils départementaux doivent donner leur accord pour modifier les limites départementales, car il ne peut y avoir de tutelle d’une collectivité territoriale sur une autre. Il en va de même si la commune nouvelle se constitue à cheval sur deux régions.

Mais dans le cas – que Mme Givernet et d’autres connaissent bien – où les deux conseils départementaux ne sont pas d’accord, tandis que les conseils municipaux le sont, les limites départementales ne peuvent être modifiées que par la loi. Nous nous retrouvons alors dans la situation que vous avez connue lors du débat de la proposition de loi de Mme Gatel sur les communes nouvelles : des amendements concurrents proposent qu’une commune soit rattachée à l’un ou l’autre des départements. Je souhaite bien du courage aux députés qui ne connaissent pas les lieux pour décider ! Le Gouvernement lui-même a bien du mal à émettre un avis sur d’autres fondements que les liens d’amitié, ce qui est limité pour organiser la carte territoriale. La démocratie locale s’est exprimée pour mieux constater son désaccord et l’on demande à la représentation nationale de trancher. Ce n’est pas un sujet partisan, puisque l’on constate que les positions peuvent être très différentes au sein d’un même groupe politique. Et nous pouvons aboutir à la situation dans laquelle l’Assemblée ayant décidé de rattacher la commune nouvelle à un département, le Sénat à un autre, c’est à une commission mixte paritaire qu’il reviendra de trancher !

Afin de remédier à ce blocage, plusieurs solutions s’offrent à nous, et certaines sont très imparfaites.

La première consiste à ne rien faire, la commune nouvelle ne sera pas créée, et nous ne dirons « non » à personne. Ce n’est ni très élégant, ni très respectueux. Il est préférable de clairement décider que cette création sera impossible, plutôt que de laisser la procédure de fusion inaboutie car aucune loi n’autorise la modification des limites départementales.

La deuxième solution consiste à prévoir que la décision est prise par décret. C’est celle retenue par les sénateurs : partant du constat qu’une assemblée parlementaire n’est pas en mesure de prendre des décisions « individuelles », cette responsabilité est laissée au Gouvernement. Mais les limites départementales relèvent du domaine de la loi, pas du domaine réglementaire ! C’est d’ailleurs heureux car changer les limites départementales modifie en conséquence celles des cantons, et potentiellement des circonscriptions électorales. Pour permettre la création d’une commune nouvelle, on mettrait donc le doigt dans un engrenage aux nombreuses conséquences juridiques. En outre, un décret pris sur de telles bases juridiques serait cassé en Conseil d’État.

La troisième solution est un peu sévère : elle consiste à ne pas autoriser la création de communes nouvelles à cheval sur deux départements sans accord des deux conseils départementaux. Comment gérer de telles situations depuis Paris, en effet ? Nous avons pensé à des systèmes de consultation de la population, mais quelle population devrait être consultée ? Si les limites départementales sont modifiées, c’est toute la population des départements concernés qui devrait être consultée, ce qui implique d’organiser des référendums dans tous ces départements… Ce n’est pas réaliste.

Ma réflexion est en cours, rien n’est arrêté, mais à l’heure où je vous parle, il me semble que la sagesse commande qu’une commune nouvelle ne puisse se créer à cheval sur deux départements que si les deux conseils départementaux sont d’accord. En cas de désaccord, la liberté locale rend impossible la création de cette commune nouvelle. Telle est ma position personnelle – ce n’est pas encore celle du Gouvernement.

C’est un problème que nous n’avions pas envisagé et que nous devons trancher pour l’avenir, car les cas pourraient se multiplier après les élections municipales.

M. Raphaël Schellenberger. Je suis opposé à cet amendement de suppression, qui ne concerne qu’un cas d’espèce, que ma collègue Virginie Duby-Muller connaît bien. Il est dommage de brandir le risque de mise en cause de l’intégrité du découpage territorial de la République alors que cela ne relève que d’effets de bords. Il ne s’agit pas de troquer une commune avec un État étranger, mais de déterminer si elle doit être rattachée à un département ou un autre. Les arguments avancés me semblent excessifs.

Il est regrettable, dans un texte qui tend à soutenir l’engagement municipal des maires pour la construction de pactes de gouvernance locaux, d’empêcher deux communes qui veulent créer une commune nouvelle de mener ce projet à terme.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je ne suis pas d’accord avec vous, monsieur Schellenberger : les limites départementales ne sont pas une petite affaire. Effectivement, si l’on ne considère que la Savoie et la Haute-Savoie, ou la Charente et la Charente-Maritime, il peut sembler inutile de consacrer autant de temps à ces histoires de communes nouvelles. Mais nous créerions une base légale qui pourrait ensuite être utilisée par des centaines de communes. Or aux frontières entre départements plus riches et plus pauvres, par exemple, avec des communes de grande superficie, les effets sur la carte départementale pourraient ne pas être négligeables. En outre, il est difficile de concevoir que les élus municipaux puissent modifier la carte départementale sans l’accord des élus départementaux ou de l’État.

Je partage votre déception, monsieur Schellenberger, mais la « non-fusion » serait de la responsabilité les deux conseils départementaux, pas de celle du Parlement ou du Gouvernement. Il sera toujours possible de créer une commune nouvelle à cheval sur deux départements, mais la démocratie locale impose que les collectivités en question soient d’accord. Charge aux maires des communes concernées d’aller trouver une majorité favorable dans les conseils départementaux. Nous devons être cohérents : nous ne pouvons pas proclamer notre attachement à la liberté locale puis, si les décisions des conseils départementaux ne nous conviennent pas, modifier la loi pour les évincer.

Avis favorable à la suppression de l’article, pour trouver, d’ici à la séance, une rédaction qui s’approche de la proposition de Mme Givernet.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 11 quinquies est supprimé.

Après l’article 11 quinquies

La Commission est saisie des amendements CL718 et CL717 de Mme Olga Givernet.

Mme Olga Givernet. Je vous remercie, monsieur le ministre, nous devons effectivement faire preuve d’imagination pour réorganiser les collectivités territoriales avec plus de flexibilité, et je crois que vous avez très bien saisi les enjeux. Notre collègue a évoqué Mme Duby-Muller, qui est elle-même conseillère départementale. Je tiens à rappeler que les deux présidents de conseils départementaux concernés par le projet de fusion ne se sont jamais rencontrés sur le sujet. J’ai organisé de ma propre initiative une réunion il y a deux semaines, à laquelle ils ne sont pas venus. Elle aurait permis d’expliquer les points de négociation, car en cas de redécoupage des départements, il est évident que des compensations doivent être prévues pour permettre aux projets d’aller à leur terme.

Je vous soumets maintenant deux amendements, qui concernent les projets de fusion de ma commune de Seyssel dans l’Ain et de la commune de Seyssel en Haute-Savoie, et de deux autres communes en Charente et Charente-Maritime. Je propose d’expérimenter le fonctionnement de communes à cheval sur deux départements, sachant qu’il est déjà possible de faire fonctionner des communautés de communes sur deux départements. La répartition des compétences que je propose entre les départements est peut-être imparfaite, mais l’expérimentation doit permettre de surmonter les questions de découpage administratif et de compétences institutionnelles. Il s’agit d’une proposition dont nous aurons le temps de discuter d’ici à la séance publique.

M. Bruno Questel, rapporteur. Nous aurons effectivement le temps de travailler à ces amendements en vue de la séance, je vous propose de les retirer dans l’immédiat.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vous demande moi aussi de retirer ces deux amendements. J’ai donné un avis favorable à votre amendement précédent car je veux que nous aboutissions à une solution claire et nette.

Votre proposition aurait des impacts sur l’organisation de l’État : quel préfet serait compétent ? Vous suggérez de retenir celui qui est compétent sur le lieu où est située la mairie, mais cela revient à donner au conseil municipal le pouvoir de décider dans quel département la commune est située de facto. La commune sera réputée appartenir à ce département pour les questions d’ordre public et pour la dotation d’équipement des territoires ruraux…

Je comprends que vous avez fait au mieux pour résoudre une difficulté locale liée au manque de bonne volonté de certains, mais je pense plus clair de prévoir que sans accord entre les conseils départementaux, les communes ne peuvent pas fonctionner. Sinon, pourquoi certaines grandes régions ne pourraient-elles considérer qu’un département est à cheval sur leurs deux territoires ?

Nos concitoyens se plaignent du millefeuille administratif et veulent une clarification. Une commune dans un département, un département entier dans une seule région, cela ne fonctionne pas si mal.

Mme Olga Givernet. Le but est d’être imaginatif. Merci pour votre réponse. Je retire les amendements et poursuivrai la discussion avec vous d’ici à l’examen en séance publique.

Les amendements CL718 et CL719 sont retirés.

La Commission en vient aux amendements identiques CL55 de Mme Émilie Bonnivard, CL72 de M. Xavier Roseren et CL271 de Mme Frédérique Lardet.

M. Raphaël Schellenberger. L’amendement CL55 de ma collègue Émilie Bonnivard souligne que l’octroi des sièges au conseil communautaire et dans les instances intercommunales est fondé sur la population municipale, et ne prend pas en compte la population touristique. Sans revenir sur la question de la surreprésentation des communes dans lesquelles il n’y a pas d’électeurs, nous demandons un rapport détaillé sur ce point afin d’avoir une connaissance plus précise de ce phénomène.

M. Xavier Roseren. Il s’agit de la représentation des stations touristiques au sein des EPCI. J’ai compris quelles étaient les difficultés juridiques, mais il est important de disposer d’une évaluation de la situation et de définir des mesures pour l’améliorer. Cet amendement demande donc un rapport sur la représentativité des communes peu peuplées mais dont l’apport financier est important.

Mme Frédérique Lardet. Le rapport demandé permettrait d’éclaircir la situation une fois pour toutes et de prendre une position définitive.

M. Bruno Questel, rapporteur. À l’aune des convictions que nous lui connaissons, je salue la force que M. Schellenberger a mise dans son argumentation. (Sourires.)

Plus sérieusement, j’appelle votre attention sur la boîte de Pandore qui serait ouverte au regard des principes constitutionnels et juridiques si nous acquiescions à votre demande. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je rends un avis défavorable par principe à toute demande de rapport.

Ce sujet doit être traité par le pacte de gouvernance. Ce qui vaut pour le tourisme vaut également pour les grandes intercommunalités dans lesquelles il y a quelques gros pôles industriels, des zones d’activité ou de grands quartiers prioritaires de la politique de la ville. Lorsque de grands enjeux dépassent le ressort territorial de la collectivité, ils soulèvent des questions de répartition des fonds – traitée dans le PLF – et des questions de gouvernance.

Sans remettre en cause la proportionnalité de la représentation démographique, le pacte de gouvernance pourrait prévoir que lorsqu’une commune touristique est affectée par une décision, l’avis du maire de cette commune doit être demandé ; de même s’agissant des communes comprenant des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il est possible de le prévoir en respectant l’esprit de ce texte, mais ne rendons pas ces procédures obligatoires avec des dispositions qui ne seraient pas constitutionnelles, ou des demandes de rapport qui ne produisent pas de droit. Je demande le retrait de ces amendements.

M. Raphaël Schellenberger. Au-delà du sarcasme du rapporteur (Sourires), je remercie le ministre pour sa réponse, d’autant qu’il semble avoir retenu une proposition que j’ai formulée hier : la possibilité de créer des règles contraignantes pour les EPCI dans les pactes de gouvernance. Je pensais aux PLUI, mais les communes de montagnes peuvent également être concernées. Je ne retire pas l’amendement de ma collègue, mais je m’engage à travailler avec elle sur la proposition présentée hier.

M. François Pupponi. Je confirme les propos du ministre : nous avons de nombreux exemples de communes comprenant des quartiers prioritaires de la ville auxquelles les intercommunalités retirent leur solidarité. Il faut trouver des moyens pour que ces communes puissent s’exprimer et ne soient pas ainsi pénalisées – les égoïsmes locaux existent partout. La question est compliquée, mais nous pouvons trouver une solution acceptable pour tout le monde d’ici à la séance.

La Commission rejette ces amendements.

Article 11 sexies
(art. L. 5711-6 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Institution d’une faculté de retrait d’un syndicat mixte après une fusion

La Commission adopte l’amendement de coordination du rapporteur CL1175.

Puis elle adopte l’article 11 sexies modifié.

Avant l’article 11 septies

La Commission est saisie, en discussion commune, des amendements CL517 de M. Charles de Courson et CL470 de Mme Cécile Untermaier.

Mme George Pau-Langevin. L’amendement CL470 propose d’adapter le barème relatif au nombre de conseillers municipaux pour créer une nouvelle strate pour les communes entre 500 à 999 habitants.

Actuellement, la troisième strate rassemble l’ensemble des communes entre 500 et 1 499 habitants, et amalgame donc des communes dont la population varie du simple au triple.

Un barème plus progressif nous paraîtrait plus adapté, nous proposons donc que le conseil municipal des communes dont la population est comprise entre 500 et 999 habitants compte treize membres, et que celui des communes dont la population est comprise entre 1 000 et 1 499 habitants en compte quinze.

M. Charles de Courson. L’amendement CL517 correspond à une demande exprimée par de nombreux élus locaux, qui estiment que les conseils municipaux des petites communes comprennent un nombre trop important de conseillers. Il est donc proposé de passer de sept à cinq conseillers pour les communes de moins de 100 habitants, de onze à neuf conseillers pour les communes comprenant entre 100 et 499 habitants, de quinze à treize conseillers pour les communes comprenant entre 500 et 999 habitants, et de dix-neuf à dix-sept conseillers pour les communes comprenant entre 1 000 et 2 499 habitants.

Mes chers collègues, il est de plus en plus difficile de trouver des candidats aux élections municipales. Dans l’un de mes arrondissements, comprenant 48 000 habitants pour 113 communes, on comptait aux dernières élections 57 communes – la moitié, donc – où le nombre de candidats était inférieur ou égal au nombre de postes à pourvoir. Dans trois communes, il n’y avait même aucun candidat, et il a fallu que le sous-préfet se fâche et dise aux maires sortants que, s’ils ne trouvaient pas de candidats, il engagerait la procédure de fusion des communes. Finalement, trois candidats se sont présentés dans l’une des communes, et depuis ce temps ils font tourner la commune à trois… Dans ces circonstances, il me semble que réduire de deux le nombre de conseillers requis va dans la bonne direction.

M. Bruno Questel, rapporteur. Ce sujet a déjà été évoqué lors de la discussion générale et à l’occasion de l’examen de plusieurs amendements. Je répète que le présent projet de loi n’a pas vocation à traiter du nombre de conseillers municipaux, et je suis donc défavorable à ces amendements.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je me suis effectivement déjà exprimé à de nombreuses reprises sur ce thème. Les propositions qui sont faites à ce sujet ne sont pas forcément mauvaises, mais j’estime que nous devons nous donner encore une chance avant de devoir procéder ainsi.

Le Gouvernement a accompagné le Sénat dans l’adoption de mesures permettant à un conseil municipal de fonctionner correctement lorsqu’il n’est pas réputé complet. Comme vous le savez, aujourd’hui, en effet, lorsqu’un conseil municipal n’est pas complet, certaines choses ne sont pas possibles, notamment l’élection du maire. Ainsi, une démission peut entraîner des élections partielles importantes.

Après les auditions et réflexions que j’ai menées dans le cadre de la préparation de ce projet de loi j’ai considéré que l’idée consistant à diminuer immédiatement le nombre de conseillers municipaux n’était pas encore mature – je rappelle que le présent projet de loi a surtout vocation à essayer de refaire fonctionner le bloc communal dans de meilleures conditions.

Par ailleurs, quand certains se demandent si le nombre de conseillers municipaux n’est pas trop élevé, d’autres – je dis « d’autres », mais ce sont parfois les mêmes – redoutent qu’une telle diminution puisse être un premier pas vers la suppression des communes. Je comprends très bien cette réaction, car il me semble que c’est une question que je me poserais moi-même si le nombre de conseillers municipaux commençait à diminuer dans les communes rurales. On entend déjà la petite musique à propos des communes nouvelles – qui ne sont cependant constituées que de façon librement consentie –, qui contribue à entretenir le doute sur les intentions du pouvoir central parisien à l’égard des communes rurales.

Dans ce texte qui a essentiellement vocation à remettre un peu d’électricité dans l’engagement dans la vie locale, j’ai donc préféré opter pour deux séries de mesures. Les premières sont celles qui accompagnent l’engagement – nous allons y venir dans un instant. Les secondes partent du principe que, s’il peut arriver au cours d’un mandat qu’il n’y ait pas suffisamment de monde pour constituer un conseil municipal, ce n’est pas une raison pour réduire définitivement le nombre de conseillers, qui pourrait à nouveau être suffisant au cours du mandat suivant – nous avons déjà eu un débat similaire tout à l’heure à propos de la parité et de la proportionnelle.

Je comprends tout à fait que vous ayez envie d’avancer, et c’est tout à votre honneur, mais je souhaite plutôt que vous retiriez ces amendements. Il me semble en effet qu’il vaut mieux pour le moment laisser inchangé le nombre d’élus dans les conseils municipaux. Tentons d’abord de mettre quelques gouttes d’huile dans le fonctionnement du bloc communal, sous la forme d’éléments de simplification – pouvoir fonctionner au tiers, suppression des élections partielles en cas d’incomplétude – pour permettre au conseil municipal de fonctionner à effectifs réduits. Mon souci, c’est de ne prendre aucune mesure de réduction du nombre de conseillers municipaux qui soit irréversible, car il est évident que, si on diminue légalement ce nombre, on ne va pas faire une nouvelle loi quelques mois plus tard pour l’augmenter à nouveau.

Soyons prudents car l’enfer est pavé de bonnes intentions et, à vouloir bien faire en diminuant le nombre de conseillers municipaux, je crains qu’on n’envoie un message négatif aux communes. Laissons un peu de temps aux dispositifs que nous mettons en place dans le cadre de ce projet de loi afin qu’ils aient une chance de prospérer. Si, dans quelque temps, nos successeurs estiment qu’il est vraiment nécessaire de réduire le nombre de conseillers municipaux, il sera toujours temps de le faire.

J’ajoute, enfin, que certains des dispositifs que vous proposez seraient impossibles à mettre en œuvre, car ils ne sont pas compatibles avec d’autres, déjà adoptés. Je pense par exemple à la réduction du conseil municipal à cinq conseillers, qui ne peut s’accorder avec le système consistant à permettre au conseil de fonctionner au tiers de ses effectifs habituels : c’est non seulement compliqué du point de vue de l’arithmétique, mais également assez douteux au regard des règles constitutionnelles – et il faut bien dire qu’une collégialité limitée à deux ou trois conseillers, ce n’est pas vraiment l’esprit du texte.

J’espère vous avoir convaincus. En tout cas, j’y ai mis du cœur !

M. Charles de Courson. Votre réponse montre, monsieur le ministre, qu’on ne veut pas regarder la dure réalité, à savoir que les effectifs sont trop élevés pour les communes jusqu’à 500, voire 1 000 habitants, et qu’on se contente donc de proposer de petits aménagements comme si cela allait tout régler.

Croyez-moi, j’ai été maire durant trente-deux ans – en tout, cela fait trente-six ans que je suis conseiller municipal –, et je peux vous dire qu’on a de plus en plus de mal à trouver des conseillers ! Autrefois, les gens venaient spontanément se présenter et s’inscrire sur la liste ouverte que nous tenions. De nos jours, si vous n’allez pas les chercher, vous n’avez même pas le nombre de candidats requis, comme le montrent les chiffres des dernières élections municipales. Il faut ouvrir les yeux !

Beaucoup de maires disent qu’ils préfèrent être entourés de deux ou trois adjoints très investis que d’un conseil municipal au complet, mais dont les membres ne viennent plus assister aux réunions. Même dans certaines communes de 3 000 habitants, on commence à avoir des problèmes de présence – et je ne parle pas des syndicats intercommunaux –, qui impliquent d’appeler systématiquement les gens pour atteindre le quorum.

Ce texte ne va pas jusqu’au bout. Vous vous contentez de proposer des palliatifs quand le système ne fonctionne manifestement plus. Mon amendement, qui consiste à réduire de deux le nombre de conseillers municipaux, est très modéré. Mais cela vaut mieux que de se cacher derrière son petit doigt. Je suis sûr que ce qu’on a constaté il y a six ans n’est rien par rapport à ce qu’on va voir en mars prochain ! Demandez aux préfets de faire la synthèse des données recueillies sur le terrain. Peut-être prendrez-vous enfin conscience de l’ampleur de la crise – qui ne fera que s’accentuer si on ne réduit pas le nombre de conseillers municipaux.

Mme George Pau-Langevin. Je précise qu’avec notre amendement, nous n’avons pas la prétention de régler la grave question de la crise des vocations aux fonctions de conseiller municipal, mais simplement de rééquilibrer les strates.

M. Alexis Corbière. Je vous remercie de m’accueillir au sein de votre commission, madame la présidente. Avec tout le respect que j’ai pour nos collègues Charles de Courson et George Pau-Langevin, je dois dire que je partage certains des propos qu’a tenus M. le ministre, et que je suis radicalement en désaccord avec les amendements proposés quant à la teneur idéologique qu’ils véhiculent.

Certes, nous avons un problème politique de fond en raison du fait que nombre de nos concitoyens se tiennent désormais à distance des lieux de représentation politique, estimant que ceux-ci ont de moins en moins de pouvoir, et que la concentration des pouvoirs dans les mains du maire rend la fonction de conseiller municipal souvent peu intéressante. Cependant, j’estime que ce serait la pire des choses que de ne chercher qu’à faire disparaître les symptômes plutôt que la maladie elle-même : en agissant ainsi, nous finirons par accepter qu’une seule personne soit nommée, et nous n’aurons rien réglé…

La situation actuelle ne doit pas être niée, mais elle doit être considérée pour ce qu’elle est, à savoir un symptôme du fait que les communes, peut-être en raison des politiques de décentralisation qui ont été menées, se sentent désormais écrasées : les gens pensent qu’il est inutile d’aller siéger au conseil municipal, qu’on y perd son temps du fait de l’absence d’enjeux.

Pour remédier à cela, la solution consisterait sans doute à redonner un pouvoir de contrôle politique aux communes et aux citoyens. En tout état de cause, ce serait une démarche plus intéressante que celle consistant à diminuer le nombre de conseillers municipaux. Ne nous y trompons pas : quand les lieux de contre-pouvoir se réduisent – il est question que ce soit le cas pour le Parlement, puisqu’il est aujourd’hui proposé de réduire le nombre de députés et de sénateurs –, il en est un qui, lui, reste toujours aussi puissant, à savoir la Présidence de la République ! C’est une tendance à laquelle je suis pour ma part farouchement opposé : j’estime au contraire que notre pays devrait compter un plus grand nombre d’élus, et que le Président de la République devrait détenir beaucoup moins de pouvoir.

Toutes ces questions donnent lieu à un débat fertile et utile, mais pour ma part je suis défavorable aux amendements proposés et j’estime que nos collègues seraient bien avisés de les retirer – mais ce n’est pas à moi de le leur demander !

M. Raphaël Schellenberger. Je n’ai pas grand-chose à ajouter au brillant argumentaire que vient d’exposer notre collègue.

Certes, il n’est pas simple de trouver aujourd’hui des gens disposés à s’engager au sein d’une commune, mais n’oublions pas que la situation actuelle résulte des choix que nous avons faits pour le système politique local : des élus bénévoles qui s’engagent au service de leur commune. Nous savons tous qu’au moment des élections municipales, il existe toutes sortes de raisons d’aller chercher telle ou telle personne pour lui demander de s’inscrire sur la liste : l’un a des compétences administratives, l’autre possède un tracteur… Cela fait également partie de la réalité de la gestion de nos communes : on fait avec les moyens du bord, et c’est aussi ce qui permet une certaine efficacité dans la gestion de la dépense publique.

On peut critiquer cette situation au motif qu’elle serait marquée par une inégalité entre les territoires ruraux, qui auraient un service public bricolé par les élus locaux, et les territoires plus urbains, qui bénéficieraient de services professionnalisés. Toutefois, reconnaissons que cela n’empêche pas le système de fonctionner, même si c’est au prix d’un effort : cet effort, nous devons le souhaiter et même l’encourager plutôt que de chercher à le réduire, qui plus est en sa dimension la plus sensible : la démocratie, la collégialité, le débat.

Moi aussi, j’aurais aimé avoir moins d’élus dans mon conseil municipal, et surtout moins d’élus d’opposition (Sourires) car, en réduisant le nombre d’élus, on réduit la possibilité d’une expression diversifiée… Ce que je veux dire, c’est qu’avoir un nombre d’élus élevé, c’est évidemment un peu plus difficile à gérer, c’est plus exigeant, mais c’est aussi le gage de résultats plus satisfaisants pour nos concitoyens.

Il me paraît tout à fait antinomique de multiplier, comme on cherche à le faire actuellement, ces outils de démocratie participative ou consultative que sont les conseils de développement, la consultation citoyenne ou encore les référendums locaux, et d’affaiblir dans le même temps la démocratie participative, qui est pourtant aujourd’hui le système le plus équilibré pour la prise de décisions publiques.

Enfin, il me paraît tout à fait justifié d’établir, comme l’a fait avant moi notre collègue, un parallèle entre la réduction du nombre de conseillers municipaux et celle du nombre de parlementaires : cela me semble poser des questions essentielles en termes de pluralité et de démocratie.

M. Rémy Rebeyrotte. Je voudrais tout de même modérer un peu les propos de M. Corbière…

M. Alexis Corbière. Ce n’est pas facile ! (Sourires.)

M. Rémy Rebeyrotte. …si c’est possible, effectivement – je reconnais que c’est une gageure.

Il existe encore des communes dotées d’un mode de gouvernance qui fait que c’est un très grand honneur et un grand plaisir, pour ceux qui entrent au conseil municipal de ces communes, d’accéder ainsi à la possibilité de travailler et de s’engager au service de l’intérêt général. Chacun sait à quel point le réseau des élus est important dans notre pays, et que c’est une grande responsabilité que celle consistant à tenir la République au quotidien auprès de nos concitoyens.

Comme l’a dit M. le ministre, laissons aux mesures que nous adoptons le temps de produire leurs effets, voyons ce qu’elles vont donner, et profitons-en pour essayer de relancer auprès de nos concitoyens l’intérêt qu’il y a à faire partie d’un conseil municipal, à être en lien avec son intercommunalité, ainsi qu’avec des collègues de l’autre sexe. Sur ce dernier point, il me semble que si la parité est si difficile à mettre en œuvre, c’est notamment en raison de la difficulté qu’il y a à convaincre certaines femmes d’entrer dans les instances démocratiques. C’est un fait, il existe encore une différence culturelle dans ce domaine et je suis toujours frappé de constater, quand j’ai à établir une liste, qu’il est beaucoup plus difficile de persuader les femmes que les hommes de s’y joindre : certaines femmes, pourtant dotées de compétences rares, voire exceptionnelles, manquent de confiance en elles-mêmes, ce qui fait qu’elles n’osent pas franchir le pas. Si nous arrivions à remonter la pente dans ce domaine, peut-être n’aurions-nous même pas à nous poser la question du nombre de conseillers dans nos communes, car les choses pourraient s’améliorer de ce simple fait.

Je le répète, laissons passer un peu de temps afin de voir quels effets les mesures contenues dans le texte vont déjà pouvoir produire.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je suis assez d’accord avec M. Corbière, mais je ne le rejoins pas sur l’analogie qu’il établit avec le Parlement, car celui-ci ne connaît pas de crise de l’engagement – or, les amendements qui viennent d’être présentés ont bien pour objet d’apporter des solutions au fait qu’on trouve de moins en moins de gens pour assumer les fonctions de conseiller municipal.

Par ailleurs, quand vous me dites que votre amendement consistant à diminuer de deux le nombre de conseillers municipaux de chaque tranche n’est pas bien méchant, je ne suis pas tout à fait d’accord, monsieur de Courson. Peut-être n’avez-vous eu l’intention de rédiger qu’un amendement d’appel, ce qui expliquerait qu’il n’indique pas toutes les modifications que son adoption nécessiterait d’apporter au code général des collectivités territoriales : quoi qu’il en soit, la mise en œuvre des dispositions que vous proposez aurait de nombreuses conséquences, que ce soit sur la règle du tiers, sur le nombre d’adjoints, calculé en fonction du nombre de conseillers municipaux – et on sait que, dans les petites communes, ce sont souvent le maire et ses adjoints qui font tourner la boutique –, ou encore sur la désignation des grands électeurs…

M. Charles de Courson. Ça, c’est une réaction de sénateur !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Non, ce que je dis concerne tout le Parlement. Je vais refaire du Corbière : les schémas de représentation en disent long sur notre histoire républicaine…

M. Alexis Corbière. Restez modéré, monsieur le ministre !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Au contraire, j’essaie de battre un record sur l’échelle de Rebeyrotte ! (Sourires.)

Vous me reprochez de ne pas aller jusqu’au bout de la logique de ce texte, monsieur de Courson : or, il y en a qui le font en proposant de regrouper les communes, éventuellement de force. Pour ma part, je peux concevoir qu’il y ait un débat sur ce point, mais j’estime que le regroupement obligatoire constitue une solution extrême, à laquelle je suis très hostile. Entre le statu quo et cette solution, il ne peut y avoir que des propositions intermédiaires, qu’il s’agisse des nôtres ou des vôtres…

Le vrai sujet est sans doute celui-ci : devons-nous conserver le système actuel, en ne lui apportant que quelques mesures d’assouplissement pour faciliter son fonctionnement – en l’occurrence, celle que vous proposez me semble créer beaucoup plus de difficultés qu’elle n’en règle –, ou nous avouer sans fard qu’il y a trop de communes dans notre pays, et mettre en place des schémas de regroupement – une solution à laquelle je confirme être opposé ?

En l’état actuel des choses, nous vous soumettons un texte de loi ayant simplement vocation à redonner goût aux Français à l’engagement, ce qui pourrait déjà régler bien des problèmes.

La Commission rejette successivement les amendements.

TITRE IER BIS
SIMPLIFIER LE FONCTIONNEMENT DU CONSEIL MUNICIPAL

Article 11 septies
(art. 2121-2-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales et art. L. 258
du code électoral)
Réduction du nombre de sièges à pourvoir dans les conseils municipaux des communes de moins de 500 habitants pour être réputés complets

La Commission est saisie de l’amendement CL1176 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1176 clarifie la rédaction de l’article 11 septies adopté au Sénat.

Je rappelle que cet article a pour objet de réduire, en cas de besoin, le nombre de sièges à pourvoir dans les conseils municipaux des communes de moins de 500 habitants pour qu’ils soient réputés complets et qu’ils puissent procéder à l’élection du maire et des adjoints si besoin est.

Mon amendement précise toutefois que cette souplesse n’est possible qu’au terme du second tour de scrutin plurinominal. Portant sur les communes de moins de 100 habitants, il sera complété par un second amendement portant sur les communes de moins de 500 habitants : le CL1177.

Par ailleurs, il satisfait l’amendement CL108 de Mme Chavrier – mais je n’aurai pas à lui demander de le retirer, puisqu’elle ne semble pas présente pour le défendre…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. La disposition qui est ici présentée par M. le rapporteur fait partie des mesures réversibles, qui n’abîment pas ce que nous souhaitons préserver par ailleurs. J’y suis donc favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Les amendements CL1077, CL976 et CL1129 tombent.

La Commission examine l’amendement CL1177 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je viens de défendre cet amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement CL1179 de coordination du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 11 septies modifié.

Article 11 octies
(art. L. 2122-8 du code général des collectivités territoriales)
Facilitation de l’élection du maire et de ses adjoints en cas d’incomplétude du conseil municipal

La Commission examine l’amendement CL1180 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous propose de supprimer l’article 11 octies dont les dispositions me semble superflues.

En effet, le texte comprend déjà deux assouplissements substantiels pour l’élection des maires et de leurs adjoints, prévus par l’article 11 septies pour le début de mandature que nous venons d’examiner, et par l’article 11 nonies pour la fin de mandature.

L’article 11 octies va plus loin : l’élection du maire et des adjoints pourrait avoir lieu valablement à tout moment du mandat à condition que le conseil ait perdu moins d’un dixième de ses membres, arrondi à l’entier supérieur. Je considère pour ma part qu’il convient d’éviter qu’en cours de mandature, s’il y a lieu de procéder à l’élection d’un nouveau maire, le résultat issu des élections municipales ne soit faussé par des vacances de postes survenues dans l’intervalle.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 11 octies est supprimé.

Article 11 nonies
(art. L. 2122-8 du code général des collectivités territoriales, art. L. 258, L. 224-30, L. 270, L. 360, L. 380, L. 885-32, L. 272-6, L. 428, L. 436 et L. 437 du code électoral et art. L. 122-5 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie)
Assouplissement des conditions obligeant l’organisation d’élections municipales partielles en cas d’incomplétude du conseil municipal

La Commission est saisie de l’amendement CL1181 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1181 est une disposition de coordination avec les dispositions de l’article 11 septies.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

L’amendement CL1078 tombe.

La Commission adopte l’amendement CL1039, de correction d’une erreur de référence, du rapporteur.

Elle est saisie de l’amendement CL1182 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. J’émets sur cet amendement un avis de sagesse, car je tiens à ce que la question ultramarine soit traitée dans le cadre de l’ordonnance. En Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, la commune a un statut juridique très particulier, exigeant des consultations qui ne le sont pas moins. J’insiste sur ce point : toutes les questions ultramarines, notamment celles relatives au Pacifique, méritent de faire l’objet d’une ordonnance.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 11 nonies modifié.

Après l’article 11 nonies

La Commission examine l’amendement CL970 de M. Stéphane Baudu.

M. Stéphane Baudu. L’amendement CL970 vise à apporter un remède aux déboires vécus par les communes de moins de 1 000 habitants lorsque les démissions en cascade des conseillers municipaux sont dues à une incapacité du maire à animer le travail de son conseil municipal. En l’absence de démission du maire, ces situations conduisent à une immobilisation de la commune, les élections complémentaires ne permettant pas de résoudre l’origine de la difficulté.

Dès lors, la seule issue dans le droit actuel consiste en une décision de destitution du maire, prise en conseil des ministres, et qui n’intervient qu’après constitution d’un dossier devant prouver l’incapacité du maire ou des agissements manifestement contraires à l’intérêt de la commune. Ce dispositif est lourd et rarement mis en œuvre. Il est donc proposé d’intégrer au code électoral une disposition prévoyant qu’il est procédé à la réélection du maire et de ses adjoints après chaque élection complémentaire.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je comprends tout à fait la préoccupation que vous exprimez avec cet amendement. Toutefois, je crains que le dispositif que vous proposez ne puisse résoudre que quelques cas, sans doute très dommageables pour les communes concernées, mais restant très rares. Dès lors, j’estime qu’il vaut mieux laisser les élus locaux traiter de leurs propres affaires et s’en remettre à la démocratie locale, c’est pourquoi je vous invite à retirer cet amendement, et émettrai à défaut un avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Cet amendement est bien vu, mais il me semble que son application pourrait avoir des conséquences n’apparaissant pas forcément au premier abord. Dans une commune de plus de 1 000 habitants – de plus de 500 habitants en 2026 –, dès lors qu’il y aura eu plusieurs listes, en cas de démission, ce sont les suivants de liste qui montent et pourvoient. La question de la complétude ne se pose donc pratiquement jamais, et nous sommes par ailleurs en train d’introduire des règles permettant au conseil de fonctionner à effectif réduit en cas de besoin, c’est-à-dire quand la liste est épuisée.

Nous devons aussi nous projeter dans l’objectif de la stabilisation de l’édifice communal car, si la commune fonctionne bien et si elle est une institution populaire au sein de la République, c’est aussi parce qu’elle constitue un point de stabilité. Le maire n’est pas responsable devant le conseil municipal comme l’est le Gouvernement devant l’Assemblée nationale. Certes, il est l’émanation du conseil municipal qui a été élu, mais il ne connaît ni minorité de blocage, ni motion de censure – à juste titre, car tel n’est pas le sens de la démocratie locale. J’ajoute que le maire devient agent de l’État, et qu’il a donc d’autres prérogatives dont il doit assurer par ailleurs la pérennité.

Dans une commune de moins de 1 000 habitants, s’il y a beaucoup de démissions, il est démocratique de procéder à une élection complète, afin de tenir compte des changements importants qui ont pu avoir lieu dans le village et conduire à ce que la majorité change de camp – c’est ce qui me fait regarder l’amendement avec intérêt. Cependant, dans les faits, il suffit que quelques-uns quittent le conseil d’une petite commune pour provoquer systématiquement des élections municipales partielles de complétude – ce qui peut être un moyen délibéré de déstabiliser le maire.

M. Stéphane Baudu. Le maire reste en place !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Quand vous avez un conseil municipal composé de neuf personnes, dont trois ont décidé de démissionner, le départ d’une quatrième personne déclenche des élections complémentaires, ce qui a pour conséquence que le maire et des adjoints sont démissionnaires d’office, et qu’il faut tout recommencer – et si les choses ne vont pas mieux, il y a à nouveau des démissions, et ainsi de suite…

C’est parce qu’il y a toujours eu un verrou imaginé par le législateur que, globalement, on parvient à conserver une certaine stabilité. Quand il y a des démissions, elles sont tantôt le fait de personnes qui partent pour des raisons personnelles, tantôt le fait de personnes qui ont l’intention de solliciter les suffrages de leurs concitoyens ; or, si cette dernière pratique est tout à fait démocratique, le maire a tout de même été élu – je souligne au passage que, si les députés sont soumis au pouvoir de dissolution du Président de la République, les sénateurs ne le sont pas.

Comme vous le voyez, le maire s’inscrit dans cette notion de permanence que nous devons nous attacher à préserver – exception faite des cas très précis où le préfet peut le suspendre pour certains motifs, ou d’une révocation en conseil des ministres, qui ne peut avoir lieu que dans des cas également très précis et très encadrés, au moyen d’un décret pouvant, de par sa nature même, être contesté devant un magistrat.

La mise en œuvre de la proposition contenue dans l’amendement CL970 nous placerait face à quelque chose de tout à fait inédit, qui constituerait selon moi une importante source d’instabilité, c’est pourquoi je demande le retrait de cet amendement.

M. Alexis Corbière. Je suis plutôt favorable à l’amendement de M. Baudu, mais je veux surtout signaler mon désaccord avec la position exprimée par M. le ministre. Certes, le code général des collectivités territoriales donne ce pouvoir aux maires, mais j’estime qu’il faut défendre l’idée selon laquelle c’est une liste, un conseil municipal en son entier qui est élu. Celui qui est premier de la liste est en quelque sorte annoncé comme le prochain maire, mais c’est tout de même dans le cadre du conseil municipal qu’on décide vraiment qui sera le prochain maire.

Si un tiers du conseil municipal vient à démissionner, c’est qu’il y a un gros problème, et je ne vois pas pourquoi il faudrait que le maire reste en place en dépit de la crise : la solution à une telle situation passe forcément par l’élection d’un nouveau maire – soit le même qu’avant, soit un autre. Alors que le conseil municipal est en France l’un des rares lieux où le pouvoir s’exerce de façon un peu collective, je trouve pour le moins étrange que, pour repousser l’amendement de notre collègue, vous défendiez le fait que le maire a actuellement la possibilité de rester en place contre vents et marées – ce qui, d’un point de vue démocratique et républicain, n’est pas acceptable !

M. Rémy Rebeyrotte. Et si on prévoyait une élection chaque année ?

M. Alexis Corbière. Je vous remercie pour cette contribution enrichissante, cher collègue, qui me laisse penser que – par rapport à vous, du moins – je suis peut-être plus modéré qu’on ne l’imagine. Cependant, bien que m’appelant Corbière, je suis à consommer sans modération ! (Sourires.)

M. Charles de Courson. Pour ma part, j’ai tendance à penser que le ministre et le rapporteur ont partiellement raison tous les deux. J’ai été témoin, dans une commune, d’une situation où le maire avait complètement dérapé, ce qui avait entraîné la démission de tout le conseil municipal, tandis que lui était resté en place. À l’issue des élections qui avaient suivi, il s’était retrouvé avec un conseil composé de cinq ou sept conseillers municipaux d’une autre étiquette politique que la sienne. Quand il est venu me demander conseil, je lui ai dit qu’il n’avait guère à craindre d’être révoqué, puisqu’on ne comptait jusqu’à présent qu’un seul cas de révocation dans notre arrondissement qui remontait à 1914 : le maire de Vitry-le-François avait été révoqué pour avoir fui devant l’ennemi, et la ville fut ensuite administrée durant quatre ans par une délégation spéciale, avec à sa tête un président.

Pour en revenir à la commune dont j’évoquais le sort, elle s’est trouvée durant des mois dans une situation très délicate, avec un maire en désaccord avec ses conseillers. La seule solution pour en sortir a été que le conseil municipal vote contre le budget, afin d’aboutir à une situation de blocage qui incite le sous-préfet à saisir le ministre de l’intérieur, sur le constat du fait qu’il n’y avait plus de fonctionnement possible.

M. Bruno Questel, rapporteur. Exactement !

M. Charles de Courson. Pour éviter qu’une telle situation ne se reproduise, il faudrait modifier l’amendement et préciser que seule la majorité du conseil municipal fait l’objet des élections complémentaires éventuellement organisées. Dans ce cas, monsieur le ministre, je pense que vos objections – au demeurant parfaitement justifiées, car il y a des gens qui passent leur temps à démissionner pour se faire réélire – tomberaient.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je connais bien cette situation pour l’avoir vécue personnellement : j’ai été élu maire en 2002, sur la base du Meccano que vient de décrire M. de Courson, à savoir le blocage du vote du budget de la municipalité, et j’étais alors minoritaire. Ce qui me gêne dans l’amendement de notre collègue Baudu, c’est le mécanisme de démission automatique qu’il prévoit, qui me paraît situé hors des clous. En effet, on ne peut pas, à partir de tel ou tel événement jouant le rôle de couperet, considérer que le maire élu par son conseil municipal est réputé démissionnaire en raison du déclenchement d’un mécanisme auquel il est étranger : d’un point de vue juridique, cela pose un problème.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Si vous retirez votre amendement, monsieur Baudu, je m’engage à ce que nous examinions la possibilité de le réécrire ensemble. Il m’apparaît en effet que, dès lors qu’on a prévu la complétude, cela signifie que l’on pourrait tomber à un effectif très bas – par définition, les communes concernées sont celles comprenant moins de 500 habitants et, par ailleurs, nous avons prévu la règle des 10 %.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Baudu ?

M. Stéphane Baudu. Je retire mon amendement au bénéfice de la proposition que vient de faire M. le ministre de le retravailler ensemble.

L’amendement est retiré.

Avant l’article 12 A

La Commission est saisie de l’amendement CL1087 de Mme Sandrine Mörch.

Mme Sandrine Mörch. Cet été, le maire d’une toute petite commune située près de Toulouse a été agressé en défendant seul, et dans l’urgence, l’accès à un terrain municipal – à la suite de quoi M. le ministre est venu le soutenir, ce qui a évidemment été apprécié. Cet événement a été pour les maires l’occasion d’exprimer leur impuissance grandissante face à la lourdeur et à la complexité des procédures administratives, qui épuisent les élus et les éloignent de leurs missions premières.

Pour y remédier, l’amendement CL1087 vise à ce que le Gouvernement, conjointement avec les associations d’élus, propose, dans un rapport remis l’année prochaine à la représentation nationale, une réforme de simplification des normes relatives aux pouvoirs de police du maire.

M. Bruno Questel, rapporteur. Ce que vous proposez fait déjà l’objet du présent projet de loi, chère collègue, c’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement, et émettrai à défaut un avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vois cet amendement comme un amendement d’appel à toutes les dispositions dont nous allons débattre dans quelques instants. Certes, il faut rendre effective l’autorité du maire, mais je ne pense pas que la remise d’un rapport puisse y contribuer efficacement, c’est pourquoi je demande le retrait de cet amendement, avant que nous n’examinions les mesures destinées à assurer l’opérationnalité des pouvoirs de police du maire, ainsi que celles visant à leur fournir un accompagnement juridique et psychologique.

L’amendement est retiré.

TITRE II
LIBERTÉS LOCALES : RENFORCER LES POUVOIRS DE POLICE DU MAIRE

Article 12 A
(art. L. 2121-41 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Présentation de l’action de l’État en matière de sécurité
devant le conseil municipal

La Commission examine les amendements identiques CL676 de M. Vincent Bru et CL925 de M. Arnaud Viala.

M. Vincent Bru. L’amendement CL676 vise à supprimer la proposition du Sénat prévoyant que le chef de la circonscription de sécurité publique présente devant le conseil municipal de commune de sa circonscription l’action de l’État en matière de sécurité et de prévention de la délinquance.

D’une part, une telle mesure semble un peu compliquée à organiser sur le plan pratique ; d’autre part, le conseil municipal n’est pas compétent en matière de police.

Ce que j’ai constaté durant les vingt-deux années où j’ai été maire de ma commune, c’est qu’il y a des rencontres très fréquentes entre le maire et les responsables de la police ou de la gendarmerie, et que le maire a ensuite tout loisir d’évoquer ces questions devant son conseil municipal. Je ne suis pas sûr que la procédure assez lourde qui est ici proposée soit vraiment efficace.

M. Arnaud Viala. Dans mon département, qui compte près de 300 communes, on imagine mal comment les deux ou trois représentants de la sécurité publique vont se répartir pour pouvoir se rendre au moins une fois par an dans toutes les communes. Par ailleurs, dans l’immense majorité des cas, il existe déjà des modalités de concertation et de partage d’information sur les enjeux de sécurité, qu’il faut laisser vivre en évitant de les encadrer de façon trop rigide.

En revanche, M. le ministre m’ayant fait savoir « en off » que, s’il était favorable à une modification de l’article 12 A, il préférait que cela se fasse au moyen de l’amendement CL842, que nous allons examiner dans quelques instants, je retire mon amendement au profit de celui qui a ses faveurs.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous remercie d’avoir spontanément proposé de retirer votre amendement, monsieur Viala, et j’invite M. Bru à en faire de même. J’indique d’ores et déjà que je serai favorable à l’amendement CL842 que vous venez de citer, et qui sera présenté dans un instant par M. Molac.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je souhaite le retrait des amendements CL676 et CL925, et j’émettrai un avis favorable à l’amendement CL842. Le Gouvernement souhaite que les services de l’État puissent venir présenter une fois par an, devant chaque conseil municipal, l’action de l’État en matière de sécurité et de prévention de la délinquance pour la commune concernée. Je précise que l’État pourra être représenté par le préfet, le sous-préfet, un officier de gendarmerie ou encore un chef de circonscription de sécurité publique dans la police : ce n’est pas à la loi de dire qui va venir – il serait pour le moins curieux que le préfet ne puisse pas venir de lui-même s’il le souhaite, alors que le commandant de police local aurait cette possibilité.

M. Vincent Bru. Je retire mon amendement.

Les amendements CL676 et CL925 sont retirés.

La Commission est saisie de l’amendement CL842 de M. Yannick Favennec Becot.

M. Paul Molac. L’amendement CL842 a effectivement vocation à régler les problèmes que viennent d’évoquer nos deux collègues. Le préfet étant responsable de la bonne marche des services de l’État dans son département, il me paraît évident qu’il doit avoir la possibilité de se rendre auprès des conseils municipaux de son département, ou de déléguer cette mission s’il le souhaite. En outre, les gendarmes directement en contact avec les maires, pourront toujours venir devant le conseil pour expliquer comment fonctionne la sécurité et quels liens ils ont avec le maire ou un délégué désigné par celui-ci.

Enfin, certaines communes ont mis en place des commissions extra-municipales ayant une compétence particulière dans le domaine de la sécurité au sens large, c’est-à-dire aussi bien la prévention de la délinquance que les catastrophes naturelles. L’ensemble de ces dispositifs forme un système qui fonctionne plutôt bien.

M. Bruno Questel, rapporteur. Favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CL86 de Mme Catherine Kamovski, CL111 de Mme Fannette Charvier, CL102 de Mme Jacqueline Dubois et CL312 de Mme Marie-Pierre Rixain tombent.

La Commission adopte ensuite l’article 12 A modifié.

Après l’article 12 A

La Commission examine l’amendement CL477 de Mme Cécile Untermaier.

Mme George Pau-Langevin. Nos collègues maires nous ont alertés. Parfois, quand ils déposent plainte contre l’un de leurs administrés qui a commis un délit, ils le croisent régulièrement mais restent sans nouvelles de la plainte ! L’amendement obligerait le procureur de la République, ou son représentant, à procéder à l’audition du maire dans le mois suivant le dépôt de la plainte. Ainsi, ce dernier serait informé du sort réservé à sa plainte.

M. Bruno Questel, rapporteur. Chère collègue, je suis fermement défavorable au dispositif que vous proposez. Cela ne manquerait pas de générer des lourdeurs au sein des parquets. Vous évoquez une « audition » devant le procureur, impliquant donc l’application du code de procédure pénale. Ce serait à la fois lourd et fastidieux pour les procureurs.

En outre, j’ai été maire pendant quinze ans et j’ai déposé plainte plus souvent qu’à mon tour… Si cela avait impliqué une audition obligatoire devant le procureur, des kilomètres de voiture et des heures de perdues, je n’aurais pas fait la démarche…

Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement. L’idée est séduisante. Vous avez raison, le Sénat l’a également souligné, il est important de renforcer les liens entre les parquets et les municipalités, mais ce dispositif n’est pas le bon.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vous demanderai également de bien vouloir retirer votre amendement pour une autre raison. Suite à la disparition tragique du maire de Signes en août dernier, la garde des Sceaux devrait en effet signer, en début de semaine prochaine, une circulaire de politique pénale, à laquelle le ministère en charge des collectivités territoriales a contribué. Elle explicitera le devoir d’information des parquets envers les élus locaux dans différents cas de figure – qu’ils soient victimes ou parties prenantes lorsque l’événement s’est déroulé dans leur commune.

En procédure pénale, peu de dispositions fixent des délais aux procureurs. Le faire uniquement pour les élus serait original, mais relève à mon sens plus de la circulaire pénale. Vous avez l’engagement du Gouvernement : dans quelques jours, nous vous communiquerons la circulaire.

Mme George Pau-Langevin. Cette circulaire sera une bonne chose. L’actualité récente souligne en effet de manière dramatique que les élus ne sont pas toujours armés pour exercer en toute sécurité les pouvoirs importants qui leur sont confiés pour qu’ils fassent respecter l’ordre public dans leur commune. Nous attendons la circulaire avec impatience, mais je ne retire pas l’amendement car les élus y tiennent beaucoup.

M. Raphaël Schellenberger. Si la rédaction de l’amendement n’est pas opérante, le principe est essentiel et mériterait d’être retravaillé pour la séance publique.

Les attaques contre les maires se multiplient. Le cas dramatique de Signes est malheureusement l’arbre qui cache la forêt. Au quotidien, les maires sont agressés verbalement ou physiquement, pour l’institution qu’ils représentent ou du fait de la mission qu’ils exercent. Or le système pénal n’est pas armé et considère parfois ces dossiers un peu trop à la légère. Pourtant, on attaque un des piliers de la République ! Si nous ne réagissons pas, c’est toute la République qui risque d’être affaiblie ! Nous devons trouver les moyens légaux de protéger les maires. Nous devons leur permettre de se protéger, en tant que personne et dans leur fonction car ils sont l’incarnation territoriale la plus proche de nos concitoyens de cette République à laquelle nous tenons tous.

La Commission rejette l’amendement.


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4.   Seconde réunion du jeudi 7 novembre 2019 à 14 heures 30 (article 12 à article 37)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.8397614_5dc41a39f2448.commission-des-lois--engagement-dans-la-vie-locale-et-a-la-proximite-de-l-action-publique-suite-7-novembre-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous allons reprendre nos travaux : nous allons aborder l’article 12 et il nous reste 429 amendements à examiner.

Article 12
(art. L. 123-4 et L. 511-2 du code de la construction et de l’habitation)
Renforcement des prérogatives de police spéciale du maire en matière de fermeture des établissements recevant du public et des immeubles menaçant ruine

La Commission examine l’amendement CL862 de M. JeanFrançois Cesarini.

M. Christophe Blanchet. Amendement défendu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Je tiens à saluer tout le travail réalisé en amont avec M. Blanchet. S’agissant de la question de la police en général, deux objectifs devaient coïncider : redonner du pouvoir et de l’autorité aux maires ; imaginer des garde-fous en cas d’abus. La navette permet d’enrichir le texte en ce sens, ce dont je vous remercie. Cela étant, pour ce qui concerne les établissements recevant du public (ERP), mon avis sera également défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL1093, CL1094, CL1095, CL1096 et CL1097 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 12 modifié.

Article 13
(art. L. 3332-15 du code de la santé publique, art. L. 332-1 et L. 333-1 du code de la sécurité intérieure, art. L. 2213-34 [nouveau] du code général des collectivités territoriales et art. 95 [abrogé] de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009)
Faculté de transfert de compétences du préfet au maire en matière de fermeture des débits de boissons

La Commission examine l’amendement CL446 de M. Christophe Blanchet.

M. Christophe Blanchet. Aujourd’hui, c’est l’autorité préfectorale qui a le pouvoir de fermeture sur les débits de boissons, pour trois motifs : infraction aux lois ou aux règlements ; atteinte à l’ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publique ; actes criminels ou délictueux. Initialement, l’article 13 prévoyait d’octroyer aux maires cette compétence, uniquement pour les cas de troubles à l’ordre public. La fermeture, telle qu’elle est appliquée depuis toujours, n’est pas une sanction : c’est une mesure de police prise à titre préventif dans le but d’éviter la continuation ou la réitération de comportements illicites ou constitutifs de troubles à l’ordre public. Je demande la suppression de l’article 13 pour ouvrir le débat sur cette question, dans la mesure où la France fait figure d’exception en Europe : dans tous les autres pays, ce pouvoir relève de la justice, non de l’administration.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 13 est la traduction concrète de préconisations présentées par nos collègues Alice Thourot et Jean‑Michel Fauvergue, alors parlementaires en mission, il y a quelques mois. Si plusieurs dispositions adoptées au Sénat ont dû être supprimées, celle-ci a été complétée. Des amendements proposent d’autres modifications, mais, en tout état de cause, j’émets un avis défavorable à la suppression globale du dispositif initial du projet de loi.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Monsieur Blanchet, je vous suggère de retirer cet amendement d’appel, au bénéfice de la réécriture à venir de l’article. La cohabitation entre deux types de police, la police judiciaire et la police administrative, est en effet une spécificité française. Historiquement, la question des débits de boissons relevait d’une approche sanitaire, ce qui explique que cette compétence ait été confiée à la police administrative.

M. Christophe Blanchet. Je retire mon amendement et, si tout va bien, ne le représenterai pas en séance…

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie des amendements identiques CL1220 du rapporteur et CL1049 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. Ces deux amendements visent précisément à créer une commission municipale des débits de boissons, chargée de proposer à titre consultatif des avis motivés à l’autorité municipale. Je suis persuadé que nous répondons ainsi à l’essentiel de vos préoccupations, monsieur Blanchet.

M. Sacha Houlié. Lorsqu’elle a été instituée, la police administrative a nécessité d’importantes garanties, afin de limiter les prérogatives du préfet et d’éviter tout risque d’abus sachant que ces décisions sont toujours prises à titre préventif. Le groupe La République en marche propose à cet effet d’apporter quatre modifications à l’article réécrit par le Sénat. Premièrement, l’instauration d’une commission municipale de débits de boissons pour que le débat ait lieu de façon éclairée – objet de notre amendement CL1049 ; deuxièmement, la limitation de la délégation de pouvoir du préfet au maire à la seule prévention des troubles à l’ordre public ; troisièmement, l’obligation pour le maire d’aviser le préfet des mesures prises dans un délai de trois jours et non de quinze comme le prévoyait le Sénat ; quatrièmement, la codification de la disposition en cause dans le code de la santé publique, ce qui nous paraît un emplacement plus pertinent que le code général des collectivités territoriales.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable sur ces réécritures. La commission des débits de boissons est une idée de M. Blanchet, qui a échangé avec plusieurs représentants des professions. Des instances similaires existent d’ailleurs pour les taxis ou les marchés. On peut renforcer le pouvoir de police des maires, dès lors qu’il existe des espaces de dialogue et surtout de construction préalable d’une politique publique et de règles du jeu claires.

M. Christophe Blanchet. Cela fait vingt ans que des expérimentations de ce type ont été menées en France. Nantes a été la pionnière dans ce domaine, avec Jean‑Marc Ayrault, avant d’être suivie par Paris, Bordeaux ou Caen. Il existe tout un travail de prévention, avant d’en arriver à la sanction. Je tiens d’ailleurs à rappeler que la sanction administrative peut être soit un avertissement, soit une fermeture administrative. La commission a pour vocation d’anticiper les problèmes, en en prenant connaissance en amont. Il faudra aussi statuer sur sa composition, a minima cependant, afin de laisser au maire la possibilité de l’ouvrir, s’il le souhaite, à l’intercommunalité, comme je le suggérerai dans un amendement.

Il importe également de protéger le maire contre les recours. Si l’action du préfet n’est pas parfaite, elle a au moins l’avantage d’être neutre politiquement. Dès lors qu’il aura été accompagné par la commission, l’élu ne pourra se voir reprocher une décision personnelle. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, monsieur Houlié et monsieur le ministre, d’être allés dans ce sens.

Je rappelle enfin que la notion d’ordre public, qui sera au cœur des commissions des débits de boissons, n’apparaît qu’une seule fois dans notre bloc de constitutionnalité, à l’article X de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi. » De là à croire que les débits de boissons sont des centres religieux, il n’y a qu’un pas…

M. Raphaël Schellenberger. Restons-en au code de la santé publique… Jusque-là, le texte considérait le maire sous l’angle de l’élu, avec une doctrine qui semblait relativement claire, sur la liberté que l’on entend lui accorder dans l’exercice de son mandat populaire. Le maire y est appréhendé dans son rôle d’agent de l’État, ce qui est une spécificité bien française. Nos discussions sont intéressantes, parce qu’elles soulèvent aussi la question de la confiance que l’État peut avoir à l’égard de ses maires. S’il leur fait confiance pour mener librement leurs politiques, parce qu’ils ont été élus, en fait-il de même lorsqu’il s’agit d’appliquer ses prérogatives régaliennes en prenant des mesures de police administrative ? Nous sommes sur une ligne de crête : allons‑nous choisir le contrôle, l’accompagnement sous contrôle ? J’aurais tendance à dire que, dans l’exercice d’un certain nombre de pouvoirs de police, il faut autant de liberté pour le maire que pour le préfet, alors même qu’il y est moins bien préparé. Il nous faudrait mener une réflexion collective sur la façon de redonner une place à cette fonction, un peu oubliée, alors qu’elle est essentielle pour faire respecter l’ordre public, l’ordre républicain et la République dans les territoires. Si nous voulons qu’elle subsiste, il faut que les maires se la réapproprient ; nous devons les y aider.

M. André Chassaigne. Ces amendements vont dans le bon sens. Néanmoins, nous devons veiller à ne pas hypothéquer le rôle de médiateur et de conciliateur que peut avoir le maire, surtout dans les petites communes. Je n’étais a priori pas favorable à ce que l’on donne au maire trop de pouvoirs de police, ce qui pourrait se retourner contre lui et rompre parfois l’équilibre entre les différentes populations de nos communes. L’approche collégiale est une bonne chose. Cette commission municipale des débits de boissons sera-t-elle également concernée par les questions d’ouverture de débits temporaires, à l’occasion de fêtes ou autres manifestations ? Il faut conserver de la souplesse.

M. Bruno Questel, rapporteur. Rassurez-vous, monsieur Chassaigne, tout cela restera de la compétence du maire, comme les foires ou le comité des fêtes.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. J’ai bien aimé la façon dont M. Schellenberger a présenté les choses : la première partie du texte relève en effet de la décentralisation et la deuxième de la déconcentration. Mais, contrairement à la première partie dans laquelle il n’était pas question de protéger les maires qui, à mal s’organiser, risquaient seulement de se fâcher avec leurs collègues ou d’être battus – cela nous arrivera peut-être un jour –, il s’agit maintenant de trouver des moyens juridiques de protection, afin d’éviter une multiplication des recours pour excès de pouvoir ou des référés‑liberté.

Monsieur Blanchet, de nombreuses références à la liberté sont faites dans les textes constitutionnels : elle est bien souvent le corollaire d’un ordre républicain. Si, dans la première partie de nos travaux, à propos des fonctions d’élu local, il a beaucoup été question de la loi du 5 avril 1884, n’oublions pas que c’est également dans cette belle loi républicaine qu’a été définie la notion d’ordre public, avec ses composantes : la sécurité, la salubrité, la sûreté, la tranquillité. À l’exception de la parenthèse du régime de Vichy, c’est une loi républicaine qui a traversé les IIIe, IVe et Ve République sans être retouchée, moyennant quelques compléments apportés par le Conseil d’État – celles et ceux qui ont fait un peu de droit dans leur jeunesse se souviennent sans doute du lancer de nain et de l’arrêt Commune de Morsang‑sur‑Orge en 1995, lequel considère que le respect de la dignité de la personne humaine est une des composantes de l’ordre public.

Précisons, pour compléter la remarque du président Chassaigne, qu’un maire n’est jamais laissé seul face aux questions de police, dans la mesure où, pour certaines matières, le préfet peut se substituer à lui et, partant, le protéger.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, les amendements CL454, CL453 et CL697 tombent.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CL1219 du rapporteur et CL1150 de M. Sacha Houlié, ainsi que l’amendement CL447 de M. Christophe Blanchet.

M. Sacha Houlié. J’ai défendu les amendements CL1219 et CL1150 à l’occasion de ma présentation globale des quatre mesures de réécriture de l’article.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

M. Christophe Blanchet. Même s’ils sont tombés, je profite de la défense de l’amendement CL447 pour revenir sur mes amendements CL454 et CL453, où se posait la question de la durée de validité d’une sanction. Par exemple, si l’on perd un point sur son permis de conduire, après un an sans infraction, on le récupère ; si l’on en perd quatre, il faudra trois ans. On pourrait considérer que, s’il ne s’est rien passé pendant un an après un avertissement, celui-ci ne pourra pas être invoqué dans le cadre d’une sanction administrative ou d’une fermeture après trois ans. Il faudra réfléchir à ce point, afin de borner l’efficacité de la commission.

M. Raphaël Schellenberger. Après réflexion, il me semble que la commission municipale des débits de boissons n’est pas une lourdeur. En revanche, l’ouvrir à l’intercommunalité représenterait, à mon sens, un glissement incohérent, dans la mesure où le pouvoir de police relève du seul maire et non de l’intercommunalité. Dans quelques rares cas, le maire peut transférer ce pouvoir à l’intercommunalité ; mais pour les prérogatives relatives à l’ordre public, ce serait une mauvaise idée.

La Commission adopte les amendements CL1219 et CL1150.

En conséquence, les amendements CL447 et CL677 tombent.

La Commission est saisie de l’amendement CL448 de M. Christophe Blanchet.

M. Christophe Blanchet. Le principe de la charge et de la décharge doit être respecté, en permettant à celui qui aura été impliqué d’être au moins informé qu’une instruction est en cours, afin de commencer à organiser sa défense. Souvent, la défense des établissements se fonde sur la vidéosurveillance, alors que la loi impose un écrasement automatique des enregistrements dans un délai maximal d’un mois. Or c’est souvent plusieurs mois après les faits que les établissements sont convoqués. Je vous mets au défi, chers collègues, de me dire où vous étiez à vingt-deux heures trente le 22 février… Nous devons être cohérents. Pour pouvoir préparer sa défense et rechercher la vidéo, l’établissement doit être prévenu le plus tôt possible, afin d’être prêt le jour où il sera convoqué.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable ferme et non dissimulé : votre dispositif viendrait mettre à mal l’efficacité de celui qui a été prévu à l’article 13 afin justement de permettre au maire de traiter certaines situations dans l’urgence… Ce serait en totale contradiction avec l’intention initiale du législateur.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

M. Christophe Blanchet. Dans le domaine de l’ordre public, l’urgence n’est pas toujours avérée. Il faut agir dans l’urgence pour des actes criminels ou délictueux : dans ce cas, c’est le préfet qui reprend le pouvoir. Mais lorsqu’il s’agit d’ordre public, l’appréciation de l’urgence est très subjective. Le rôle de la commission est aussi d’établir le dialogue, afin que la sanction soit directement liée au fonctionnement de l’établissement et non pas avec ce qui se passe sur la voie publique, qui relève du rôle de l’État.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Monsieur Blanchet, vous partez d’une situation de fait à partir de laquelle il est compliqué de remonter vers le droit. Imaginons le cas d’une fermeture par le maire pour des raisons d’ordre public. Votre souci est de savoir comment permettre au propriétaire du débit de boissons de se défendre. Vous objectez le délai de destruction des images de vidéoprotection. Mais, dans la réalité, les fermetures interviennent rapidement ; et le propriétaire peut tout aussi rapidement déposer un référé‑liberté devant le juge, dans lequel il peut demander la saisie des images. Je comprends votre intention, mais cela complique les choses et modifie la structure du contradictoire dans la procédure adminstrative. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’examen des amendements identiques CL1183 du rapporteur et CL1149 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. Ces deux amendements visent à ramener à trois jours au lieu de quinze, comme le souhaitait le Sénat, le délai dans lequel le maire doit transmettre au préfet les décisions prises en matière de fermeture d’établissement. La durée maximale étant de deux mois, il convient de ne pas obérer le dispositif initial en en « consommant » un quart si la mesure devait être inappropriée.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte ces amendements.

Elle examine l’amendement CL451 de M. Christophe Blanchet.

M. Christophe Blanchet. Supposons une fermeture signifiée par l’État à un tenancier le vendredi à quinze heures pour vingt heures le soir même. Le recours devant le tribunal ne peut, au mieux, avoir lieu que la semaine suivante. Et si la fermeture n’a été ordonnée que pour quinze jours, le délai est passé et le juge n’a même pas le temps de se saisir du dossier. Ce n’est pas cohérent. Plus elle est préparée en amont, plus la sanction est comprise par l’établissement. Donnez­­-moi des exemples concrets justifiant une fermeture dans les vingt-quatre ou les quarante-huit heures, qui ne relèvent pas d’un crime ou d’un délit, ni d’une infraction réglementaire, lesquels restent de la compétence du préfet : nous parlons bien de troubles à l’ordre public.

M. Bruno Questel, rapporteur. Votre dispositif viendrait complexifier une innovation. Laissons le temps aux acteurs de terrain de l’appliquer avant de définir, s’il le fallait, des carcans qui me semblent trop rigides à l’heure actuelle.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vous suggère de retirer votre amendement, pour en rediscuter en séance. Je pensais que vous souhaitiez imposer un délai de carence d’une semaine pour tous les cas. Je pourrais vous citer des exemples dans lesquels il faut agir très rapidement. Mais ce n’est pas exactement ce que propose votre amendement, puisque vous y précisez que : « La fermeture prévue aux 1 et 2 ne s’exerce qu’une semaine après avoir été notifiée à l’établissement concerné si l’événement la prétextant est advenu plus de trente jours avant la signature de l’arrêté de fermeture. » Je m’engage à l’examiner plus attentivement d’ici à la séance ; mais je reste hostile à toute mesure contrariant l’urgence à agir. Quand il survient du bazar dans un débit de boissons, il est bien normal que le maire prenne ses responsabilités, d’autant plus que ses administrés le réclament.

M. François Pupponi. Les habitants ne supportent pas l’inaction face à des dégradations ou des débordements. Avant d’ordonner une fermeture, le maire est passé voir le propriétaire, la police également. Quand on ferme, c’est qu’il n’y a pas d’autre solution : le dialogue a déjà eu lieu. En revanche, comme le disait le ministre, quand il y a des problèmes de règlements de comptes entre bandes autour d’un débit de boissons, l’arrêté de fermeture doit être pris avant qu’un crime soit commis, sans quoi cela peut finir avec des morts. J’ai connu des cas où l’on savait qu’il pouvait y avoir des descentes dans un débit de boissons et qu’il valait mieux le faire fermer au plus vite.

M. Alexis Corbière. Même si je connais moins bien ces cas que M. Blanchet, je ne crois pas qu’une décision de fermeture administrative puisse être prise sans aucun dialogue préalable avec le propriétaire. Il y a sans doute eu des demandes de mise en ordre qui n’ont pas été suivies – des établissements qui n’ont pas de sortie incendie, par exemple. Dans certains cas, il faut pouvoir dire stop. Si un drame survenait dans la semaine suivant l’identification d’un problème qui justifiait une fermeture administrative, on imagine quelles en seraient les conséquences.

M. Stéphane Peu. Je suis assez hostile à tous ceux qui tergiversent avant de prendre ce genre de décision. Pour avoir été confronté à de tels cas, en tant qu’élu local à Saint‑Denis pendant vingt ans, je sais que tout atermoiement de ce genre est une prime aux délinquants et aux commerces qui dysfonctionnent.

Excusez-moi si je n’ai pas compris, mais je fais la navette entre la séance et la commission des Lois : l’amendement de M. Questel ne visait-il pas à revenir sur la possibilité ouverte par le Sénat que les préfets délèguent aux maires la capacité de fermer des établissements ?

M. Sacha Houlié. Non.

M. Stéphane Peu. J’avais donc mal compris, et je m’en réjouis !

M. Christophe Blanchet. Monsieur Corbière, l’article 13 ne change rien aux pouvoirs de police du maire pour ce qui touche à la sécurité incendie des ERP. Sur un simple constat, comme celui du blocage d’une porte de secours, le maire pourra toujours mettre en demeure de fermer l’établissement dans les vingt-quatre heures. Le maire doit disposer de cette prérogative. Aujourd’hui, un contrôle de visite de sécurité incendie est prévu pour tous les établissements, ERP et débits de boissons, sauf pour les ERP de cinquième catégorie. Peut-être faudrait-il invoquer la clause d’obligation pour garantir une sécurité incendie totale et éviter de revivre la tragédie du Cuba Libre à Rouen.

Monsieur le ministre, je vais retirer mon amendement, dont vous avez compris la philosophie, pour travailler ensemble sur la question. Si la fermeture a lieu un mois après le fait, le caractère d’urgence ne peut être retenu et il faut un protocole de négociation.

Enfin, pour ce qui est de l’exemple pris par M. Pupponi de deux bandes rivales qui s’affronteraient devant un établissement, si elles n’entrent pas dedans ou n’en sont pas clientes, l’établissement est-il considéré comme responsable ? Le trouble à l’ordre public n’est, dans ce cas, pas inhérent à l’activité principale de l’établissement. Si nous imposons de fermer un débit de boissons à chaque fois qu’il y a une manifestation devant, il faudra faire fermer l’Assemblée nationale tous les mercredis, sachant qu’il y a des débits de boissons à proximité !

M. Sacha Houlié. Monsieur Peu, le préfet dispose de la prérogative de fermeture des débits de boissons pour les crimes et délits consécutifs à des troubles à l’ordre public, à la santé, à la tranquillité et à la moralité publique. Dans son périmètre initial, le texte prévoyait une délégation pour les répressions concernant les seuls troubles à l’ordre public. Le Sénat ayant très largement élargi le champ d’application, en transférant toutes les facultés de fermeture de débits de boissons au maire ; l’amendement adopté par la commission des Lois visait à revenir au périmètre initial du texte.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Le Sénat était en effet allé un peu au-delà, ce qui conduisait, de façon problématique, à mélanger le judiciaire et l’administratif. Un trouble à l’ordre public, comme l’a dit M. Pupponi, se constate tout de suite. Le non­-respect du droit du travail dans un débit de boissons ou les problèmes sanitaires en cuisine, je ne suis pas certain que les maires aient envie d’en être responsables. La réécriture permet de revenir à ce qui intéresse le maire : l’ordre public.

Monsieur Blanchet, je suis prêt à ce que l’on fasse un tour de piste. Comme M. Peu, je crois beaucoup au principe action‑réaction. Il ne faut pas toucher à ce qui permet au maire d’intervenir vite. Pour l’exemple que vous avez cité, j’ai envie de dire qu’il faut définir ce que signifie « tard » et ce qu’est la semaine. Une semaine, c’est sûrement un peu long. Je peux vous proposer quarante-huit heures. Regardons aussi si le délai de trente jours ne pourrait pas être porté à quarante-cinq. S’il n’y a pas eu d’urgence à fermer immédiatement, il me semble de bon sens de laisser quarante-huit heures pour s’organiser. Je suis prêt à avancer sur ce sujet.

L’amendement est retiré.

Les amendements CL455, CL456, CL457 et CL449 de M. Christophe Blanchet sont également retirés.

La Commission examine l’amendement CL452 de M. Christophe Blanchet.

M. Christophe Blanchet. Pour aller dans le sens du bon sens que M. le ministre préconise, je propose de ménager un délai de prévenance d’une semaine, quand une fermeture administrative est prononcée un mois après le fait, pour laisser au tenancier le temps de s’organiser, ne serait-ce que vis-à-vis de ses salariés.

M. Bruno Questel, rapporteur. Retrait ou avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Après l’arrêt Commune de Morsang‑sur‑Orge, je vous renvoie à l’arrêt Benjamin de 1933, qui pose le principe de la proportionnalité de la sanction administrative : en réalité, votre amendement est déjà satisfait. La proportionnalité de la sanction s’évalue au regard des faits, mais aussi du moment où cela s’est passé. Je vous suggère de retirer votre amendement. J’entends bien votre argumentation, mais votre rédaction ne s’appliquerait pas qu’aux maires et pourrait avoir des conséquences sur l’ensemble de la police administrative. Or il faut laisser aux préfets des outils pour travailler. Vous défendez un métier qui est très important, notamment dans les zones rurales, mais il y a aussi tout un tas de gens qui se servent de cette belle profession pour faire autre chose. C’est donc normal que les préfets continuent de disposer de moyens pour faire régner la paix républicaine, si vous voyez ce que je veux dire…

M. Christophe Blanchet. Je retire l’amendement pour le redéposer en séance. Mais, comme je vous l’ai dit au début de l’examen de l’article, aujourd’hui seuls les préfets avaient ce pouvoir : ce n’était pas l’idéal, mais cela avait le mérite d’une relative neutralité dans l’appréciation. L’idée de mes amendements, c’est de définir un protocole identique sur tout le territoire national, étant donné qu’aujourd’hui, pour des cas identiques, en fonction des maires, la décision de fermeture interviendra en moins de vingt-quatre heures dans certains endroits, et dans d’autres jamais.

L’amendement est retiré.

Les amendements CL457, CL449 et CL452 de M. Christophe Blanchet sont successivement retirés.

La Commission examine l’amendement CL388 de Mme Bénédicte Taurine.

M. Alexis Corbière. Pour avoir échangé sur cette disposition avec Stéphane Peu, j’entends que tout cela se discute. Jusqu’à présent, le préfet pouvait faire fermer administrativement, pour une durée maximale de trois mois, un établissement diffusant de la musique, « dont l’activité cause un trouble à l’ordre, la sécurité ou la tranquillité publics ». L’article 13 vise à transférer cette prérogative au maire. Je respecterai toutes les opinions dans ce débat ; mais, selon nous, cet article fait courir un risque. Dans certaines communes, la mairie et des patrons d’établissements pourraient s’entendre pour faire fermer certains établissements et en privilégier d’autres. Afin de garantir l’intérêt général, il nous semble que, même si ce n’est pas parfait, la dimension préfectorale garantit que les décisions ne sont pas prises pour des raisons personnelles. Mais je peux aussi entendre que la préfecture met parfois du temps à agir, voire fait preuve d’une certaine légèreté à l’égard de ces problèmes, et que le maire se sent démuni vis-à-vis de ses concitoyens. Nous pensons cependant qu’il ne faudrait pas lui donner un tel pouvoir.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je comprends votre position, monsieur Corbière. Mais il nous semble important d’étendre le champ du dispositif aux établissements diffusant de la musique. Si M. Peu vous a convaincu à moitié, je pense qu’en discutant avec M. Pupponi, vous feriez le reste du chemin et vous admettriez combien cette mesure est adaptée aux besoins.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Quand le Sénat a introduit la mesure, monsieur Corbière, je me suis également interrogé, étant donné que l’on entrait dans un autre champ, celui de la culture. Mais, très rapidement, des parlementaires de territoires connaissant des difficultés m’ont fait remarquer qu’il y aurait un angle mort dans le dispositif si l’on n’y intégrait pas les établissements diffusant de la musique, sachant qu’il y aura toujours le préfet, le juge administratif, les référés‑liberté, la proportionnalité : les garde‑fous demeurent. J’ose même dire, en me fondant sur certaines jurisprudences, que le juge serait peut-être encore plus protecteur à l’égard d’un lieu de création de musique. Avis défavorable, en vous précisant de nouveau que la précision ne figurait pas dans le texte initial, mais que d’autres que M. Peu m’ont expliqué qu’elle était utile. Je fais confiance aux acteurs de terrain.

M. Pacôme Rupin. Je comprends l’inquiétude légitime de M. Corbière pour ce qui est des risques de favoritisme ou, au contraire, d’acharnement à l’endroit de tel ou tel gérant. Mais je veux le rassurer : je crois qu’il n’y a pas de fermeture administrative arbitraire. Le cas échéant, il existe des recours devant le tribunal administratif. Le constat actuel est plutôt celui d’une difficulté à faire fermer des établissements qui dérangent pourtant le voisinage nuit après nuit, semaine après semaine ; cela exige la mobilisation de beaucoup de moyens et de preuves. Les fermetures sont préparées avec un grand discernement. Parfois, la population – c’est le cas dans ma circonscription au centre de Paris – aimerait que des fermetures soient prononcées plus rapidement, quand autant de riverains viennent nous voir exténués, parce qu’ils n’arrivent plus à dormir la nuit.

M. Stéphane Peu. Je ne suis pas d’accord avec cet amendement. Ce que ne supportent plus les gens, c’est l’impuissance ou le manque de réactivité des pouvoirs publics. Dans ma ville, où vit une France qui se lève tôt et travaille dur, si les habitants doivent subir des nuisances sonores pendant des mois sans que le maire ni, encore moins, le préfet, qui est loin et a mille autres choses à faire, n’interviennent, ils vont vouloir régler les choses eux-mêmes, ce qui n’est jamais bon, ou vont développer à l’égard de la puissance publique un sentiment de déception.

Il faut donc faire quelque chose. Je crois au discernement des gens qui sont en charge de ces questions, et les recours contre les abus sont toujours possibles. En tout cas, il est indispensable que la puissance publique sache se montrer efficace et réactive pour répondre à la souffrance de nos concitoyens.

M. André Chassaigne. Ce que je vais dire va marquer un moment historique, qui restera dans les annales de notre assemblée : aujourd’hui, le communisme des champs n’est plus en accord avec le communisme des villes et aurait plutôt tendance – ce qui est très exceptionnel en ce qui me concerne – à rallier l’insoumission de la ville… (Sourires.)

Je me méfie beaucoup d’un excès de pouvoirs accordés aux maires, non qu’ils les utilisent nécessairement à mauvais escient, mais parce qu’ils peuvent être l’objet de pressions de la part de la population locale, particulièrement dans les petits villages. Je pense, d’expérience, à ces petites communes, tranquilles dix mois et demi sur douze, mais où, pendant la courte période estivale, l’auberge du coin a tendance à faire un peu plus de bruit : on y écoute de la musique ou on y mange en terrasse, ce qui peut créer des tensions parmi la population locale, laquelle sera tentée de faire pression sur son maire. Contrairement à Stéphane Peu – je le regrette d’ailleurs –, je soutiens l’amendement de notre collègue Corbière.

Mme Annaïg Le Meur. Je partage l’opinion d’André Chassaigne. Il est important de ne pas entraver les activités festives, fussent-elles nocturnes, qui ne sont d’ailleurs pas forcément l’apanage des débits de boissons mais peuvent également être liées à des festivals, des rencontres culturelles ou sportives. Ces activités amènent certes du mouvement et du bruit dans nos villages, mais elles sont essentielles à leur survie économique.

La Commission rejette l’amendement.

L’amendement CL450 de M. Christophe Blanchet est retiré.

La Commission en vient à l’examen des amendements identiques CL1184 du rapporteur et CL1148 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. Ce sont des amendements de coordination, qui visent à codifier l’article 95 de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. Cet emplacement au sein du code de la santé publique nous a paru plus opportun que dans le code général des collectivités territoriales.

La Commission adopte ces amendements, qui ont reçu un avis favorable du Gouvernement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL843 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Il s’agit de donner aux maires de nouveaux outils pour maintenir la tranquillité publique, mais qui concernent, cette fois-ci les horaires des débits de boissons, ce qui m’amène à dire qu’il faudrait mieux définir ce qu’est un débit de boissons. Dans certaines villes, en effet, des commerces alimentaires vendent de l’alcool toute la nuit. C’est une incitation à l’alcoolisme pour les jeunes, qui s’y procurent des alcools durs pour le boire dans la rue. Nous proposons donc de donner au maire le pouvoir de police de déterminer les horaires d’ouverture et de fermeture des débits de boissons, à l’exception des endroits où est aménagée une piste de danse, pour ne pas tomber dans les travers dénoncés tout à l’heure.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Si je comprends bien votre amendement, monsieur Pupponi, vous ne parlez pas du cas dans lequel le maire peut prendre un arrêté plus sévère que celui pris par le préfet, mais de celui où le préfet n’a pas pris d’arrêté. Je vous propose de le retirer afin que nous regardions cela de plus près. Il me semble qu’il faut garder le principe selon lequel le maire peut aller plus loin que le préfet, car cela fonctionne plutôt bien ; dans les cas où le préfet n’a pas agi, nous devons réfléchir aux décisions que peut prendre le maire a minima.

M. François Pupponi. À la réflexion, je pense qu’il faudrait que la mesure concerne également les commerces alimentaires.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Cela mérite un petit travail d’écriture, pour ne pas faire n’importe quoi.

M. Christophe Blanchet. François Pupponi met le doigt sur l’hétérogénéité des horaires d’ouverture des débits de boissons selon les territoires : chaque département a ses propres décrets, et il n’existe pas d’harmonisation nationale, sauf pour le cas spécifique des établissements de type P, c’est-à-dire des lieux de loisirs avec piste de danse, autorisés à rester ouverts jusqu’à sept heures du matin.

Il faudra que l’on se penche un jour sur l’harmonisation des autorisations d’ouverture au-delà d’une heure du matin : selon les départements, les débits de boissons peuvent être autorisés à rester ouverts jusqu’à une heure, deux heures, trois heures, voire cinq heures. Cela pose des questions de sécurité mais également de distorsion de concurrence : il faut savoir en effet que 15 % seulement de la vente d’alcool se réalisent dans les débits de boissons, contre 82 % dans les supermarchés et les supérettes ! Il faut par ailleurs être conscient que ce n’est pas dans les débits de boissons que se produisent les phénomènes d’alcoolisation massive, car ils sont gérés par des professionnels dotés d’un permis d’exploitation et qui savent encadrer la consommation d’alcool. En revanche, la personne qui va acheter sa bouteille et la consomme passivement chez elle, seule devant sa télé, est plus facilement exposée au danger.

M. Stéphane Peu. Je suis très favorable à cet amendement. Il n’est plus tant question ici de tranquillité que de sécurité publique. Il faut admettre que, dans certains endroits – c’est en tout cas le cas chez moi – jamais la police nationale ou les services préfectoraux ne se déplaceront pour ces nuisances sur la voie publique. Au regard de ce qu’ils ont par ailleurs à gérer en matière de sécurité publique, je n’oserais même pas les appeler et solliciter l’envoi d’une patrouille pour un problème de musique trop forte… Il me semble que cela relève davantage des compétences du maire, à qui il faut donner les pleins pouvoirs pour faire régner la tranquillité publique et répondre aux riverains dans des délais raisonnables.

L’amendement CL843 est retiré.

La Commission adopte l’article 13 modifié.

Après l’article 13

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL445 de M. Christophe Blanchet, CL526 et CL528 de Mme Annaïg Le Meur.

M. Christophe Blanchet. Mon amendement CL445 vise à autoriser les intercommunalités à mettre en place une commission des débits de boissons. Une commune de deux mille habitants n’aura pas nécessairement les moyens de mobiliser les représentants de l’État, de la police nationale ou municipale, des syndicats et des associations de riverains, ce qui sera plus facile pour un regroupement de communes. Je pense qu’il est de bon sens que les décisions que nous prenons puissent être mises en œuvre concrètement sur le terrain.

Mme Annaïg Le Meur. L’amendement CL526 propose de créer une commission des débits de boissons – qui existent déjà dans des villes comme Nantes – dans toutes les communes de plus de dix mille habitants.

L’amendement CL528 est un amendement de repli qui permet la création de ces commissions dans les villes où le maire a obtenu du préfet délégation pour fermer administrativement les débits de boissons pour une durée pouvant aller jusqu’à deux mois.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement de M. Blanchet propose de verser dans l’intercommunalité les compétences mentionnées. Toutefois, les pouvoirs de police seront toujours exercés par le maire, ce qui rend sa proposition compliquée en termes d’opérabilité sur le territoire. C’est donc un avis défavorable.

Quant aux amendements de Mme Le Meur, ils sont pour une grande part satisfaits par les modifications apportées tout à l’heure à l’article 13. J’en demande donc le retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

Les amendements CL445, CL526 et CL528 sont retirés.

La Commission est saisie de l’amendement CL700 de M. Pacôme Rupin.

M. Pacôme Rupin. Dans les grandes villes, on constate parfois une très forte concentration de débits de boissons dans des zones très densément peuplées. Cela provoque toute une série de nuisances sonores, liées à l’amplification de la musique mais surtout au comportement des clients sur la voie publique. Il est difficile dans ces conditions pour les riverains de passer une nuit tranquille, et je ne parle pas d’une nuit qui commencerait à vingt‑deux heures mais vers minuit, et non à deux ou trois heures du matin, sachant que la vie reprend souvent son cours dès six heures le lendemain.

Il est donc important que la puissance publique puisse davantage contrôler les octrois et transferts de licence, et que l’ensemble des pouvoirs de contrôle et de sanction des activités nocturnes restent concentrés dans le champ de compétences d’une même autorité. En pratique, l’immédiateté de la délivrance d’un récépissé d’installation permet difficilement aux services de l’administration de faire les vérifications nécessaires pour valider le bien-fondé de l’installation de l’établissement. Il me semble qu’il serait opportun que les pouvoirs publics puissent profiter de ces transferts de licence pour vérifier que le nouveau propriétaire de la licence se conforme aux règles de tranquillité publique.

C’est la raison pour laquelle nous proposons l’instauration d’un délai de vérification avant tout transfert de licence.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je ne pense pas qu’introduire un délai de remise du récépissé de la déclaration d’ouverture soit un moyen véritablement efficace d’atteindre l’objectif, louable, visé par votre amendement, dans la mesure où le dépôt de la déclaration d’ouverture n’est qu’une formalité administrative visant à informer la commune.

Je rappelle que la déclaration d’ouverture doit s’accompagner de la présentation du permis d’exploitation obtenu par le demandeur. Ce sont ensuite les services préfectoraux qui réceptionneront la déclaration d’ouverture transmise par la mairie, et qui procéderont le cas échéant aux vérifications d’usage. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

Mme Annaïg Le Meur. Il faut être vigilant avec cette notion de tranquillité, notamment lorsqu’il s’agit des activités nocturnes. Certes, il y a eu des abus chez certains professionnels, mais il arrive aussi que des riverains, après avoir emménagé au-dessus d’un café en toute connaissance de cause, se permettent ensuite de porter plainte pour nuisances ou tapage nocturne. Il faut donc être attentif à trouver le juste équilibre et à ne pas mettre en péril ces débits de boissons qui créent de l’animation et de l’activité économique dans nos villes.

M. Christophe Blanchet. Lorsque Pacôme Rupin parle de musique amplifiée et du comportement des clients sur la voie publique, il fait référence à deux choses distinctes. La diffusion de musique amplifiée répond en effet à un cahier des charges précis, qui inclut un rapport acoustique garantissant que l’émergence est conforme ; en cas de contravention à ces normes, l’établissement pourra être sanctionné.

Les nuisances émanant de personnes stationnant dans la rue sont beaucoup plus complexes à traiter, car il peut être difficile de déterminer s’il s’agit de clients de l’établissement. La notion de trouble à l’ordre public pourra alors être interprétée de façon plus subjective – et donc, politique – par la municipalité, ce qui peut conduire à certains excès.

M. Pacôme Rupin. Je ne suis absolument pas d’accord avec ce que je viens d’entendre, notamment pour ce qui concerne les rues avec une forte concentration d’établissements, qui ferment à deux heures du matin ou, pour certains, plus tard. Le commerce est par nature évolutif : vous pouvez fort bien avoir choisi un appartement dans une rue qui n’accueillait que deux ou trois établissements ouverts, sans savoir que d’autres viendraient ouvrir à côté. Et quand bien même il ne resterait que les établissements d’origine, cela ne doit pas vous empêcher de dormir, où alors il faut décréter que ces endroits sont inhabitables !

Je défends évidemment l’attractivité de nos villes et le développement des entreprises, à la condition toutefois que cela ne pose pas de problèmes – ce qui est d’ailleurs globalement le cas, dans ma circonscription. Pour que cela se passe bien, il faut que les gérants jouent le jeu, mais cela suppose aussi d’éviter une trop forte concentration. Et, quand je parle de trop forte concentration, je ne parle pas de quelques établissements, mais de rues entières qui n’accueillent que des bars alors que deux ou trois mille personnes y habitent. C’est totalement déraisonnable.

Je vais retirer mon amendement, mais il est nécessaire de mettre en place des outils qui permettent au maire d’éviter ces phénomènes de concentration, car M. Blanchet a raison : le principal problème n’est pas la musique amplifiée, mais les personnes qui sortent un peu avinées et se mettent à hurler ; plus il y a de bars, plus elles sont nombreuses, plus le bruit est important. Faire en sorte que certaines rues de Paris ou d’ailleurs ne soient pas invivables ne relève, en l’occurrence, pas de la responsabilité des gérants mais de celle de la collectivité.

M. Raphaël Schellenberger. Ce débat fort intéressant renvoie surtout à une problématique urbaine. Cela étant, il est centré sur la police des débits de boissons, alors qu’il s’agit en fait d’un problème d’aménagement urbain. Dispose-t-on des outils adéquats pour organiser la répartition et la qualification de l’offre commerciale, au sens large, sur un secteur ? N’étant pas spécialiste de la question, je n’en sais rien, mais je suis convaincu que la réponse ne passera pas par la police administrative.

M. François Pupponi. Nos jeunes collègues doivent encore sortir, comme nous l’avons fait, et nous avons tous fait du bruit ! Et quand on habite au-dessus, on a tous fait la gueule… Mais force est de constater que les gens supportent de moins en moins les nuisances sonores et le bruit fait par les autres, y compris à la campagne. On aime bien s’amuser, mais pas quand cela se passe devant chez soi, où on ne veut d’ailleurs ni banc ni cabine téléphonique…

Nous avons en outre un autre problème en banlieue : celui des « food trucks » qui s’installent partout, tous les jours, diffusent de la musique et font débit de boissons, sans autorisation. Qui est compétent pour faire évacuer un food truck ? Cela ne relève pas du préfet, et la police a souvent d’autres choses à faire.

M. Sacha Houlié. Monsieur Pupponi, aux termes de l’article 15, l’entrave et l’occupation illégale du domaine public par du mobilier ou par des véhicules – à l’exclusion des personnes – relèvent des pouvoirs de police du maire.

M. Pacôme Rupin. Je vais retirer mon amendement, et je ne veux surtout pas opposer ceux qui sortent et ceux qui dorment, et je défends évidemment ce qui produit de l’animation dans les villes, pourvu que le calme puisse régner entre minuit et six heures du matin. En revanche, j’insiste sur le problème de cette concentration excessive d’établissements dans des zones de peuplement dense, ce qui est en particulier le cas dans le 11e arrondissement de Paris. C’est lorsque l’offre est trop concentrée que naissent les tensions, et je reste persuadé que donner au maire les moyens de la réguler est une piste intéressante.

L’amendement CL700 est retiré.

Article 14
(art. L. 481-1, L. 481-2 et L. 481-3 [nouveaux] du code de l’urbanisme)
Mesures administratives renforçant l’application du droit de l’urbanisme

La Commission est saisie des amendements identiques CL1185 du rapporteur et CL1050 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. Ces deux amendements visent à supprimer une disposition introduite par le Sénat, qui prévoit de donner aux maires un pouvoir de police administrative en matière de suspension de travaux. Or, en matière pénale, le code de l’urbanisme prévoit déjà la possibilité pour le maire de prendre un arrêté interruptif de travaux. Ces amendements visent donc à éviter un doublon.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte, successivement, les amendements rédactionnels CL1132 et CL1133 du rapporteur

Elle adopte enfin l’article 14 modifié.

Article 14 bis
(art. L. 332-6 et L. 331-15 du code de l’urbanisme)
Cession de terrains à titre gratuit en faveur des communes

La Commission est saisie de l’amendement CL1053 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. Cet amendement supprime l’article 14 bis, introduit par le Sénat, qui permet la cession à titre gratuit de terrains pour les bénéficiaires d’autorisations de construire pour des usages publics. Cette possibilité est déjà offerte par le projet urbain partenarial (PUP). Par ailleurs, c’est une procédure qui nécessite d’être solidement encadrée pour éviter qu’un promoteur ne conclue un marché avec la collectivité, en dehors des règles en vigueur, avec les risques de contentieux qui s’ensuivent.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable. J’avais laissé prospérer cet amendement au Sénat, avec l’idée de l’expertiser. Or il s’avère que cette mesure est contraire au droit de propriété et par ce fait inconstitutionnelle.

M. Raphaël Schellenberger. Je trouve dommage de supprimer cette disposition, car il ne me semble pas que l’on soit exactement dans le cadre d’un projet urbain partenarial.

Il est évidemment normal que, dans le cadre d’un projet d’aménagement d’ensemble qui fait l’objet d’une transaction entre l’aménageur et la collectivité, le projet soit très encadré. Ce n’est pas le cas qui nous occupe ici, où il s’agit de délivrer un permis de construire, par exemple pour un logement particulier, en échange de la rétrocession d’une parcelle de terrain devant permettre à la commune d’aménager une desserte correcte de l’habitation du propriétaire et des habitations limitrophes. Cette situation se présente assez fréquemment dans les territoires ruraux, où les villages se construisent encore et où il faut aménager des chemins ruraux. Les communes n’ont pas nécessairement les moyens de mener de grands projets d’acquisition ou de remembrement ; une telle disposition leur serait utile, même si elle aurait mérité d’être affinée sur le plan juridique.

M. Sacha Houlié. Vous avez raison ; toutefois, par le remembrement ou le bornage, les particuliers et la commune arrivent assez facilement à s’entendre dans la plupart des cas.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 14 bis est supprimé.

Article 14 ter
(art. L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales)
Extension des pouvoirs du maire en matière d’exécution forcée des travaux d’élagage sur les abords des voiries relevant de sa compétence

La Commission adopte l’article 14 ter sans modification.

Article 14 quater
(art. L. 341-4 du code forestier)
Information du maire en matière de défrichement de terrains situés sur le territoire de sa commune

La Commission est saisie de l’amendement de suppression CL1186 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’information systématique des maires pour les demandes de défrichement, telle que prévue par le dispositif adopté au Sénat. Cette disposition alourdirait considérablement les procédures à charge des services de l’État. Par ailleurs, l’article L. 122-1 du code de l’environnement prévoit déjà la consultation des collectivités locales et de leurs groupements lorsque le projet est soumis à évaluation environnementale.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence l’article 14 quater est supprimé.

Après l’article 14 quater

La Commission examine l’amendement CL130 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Il s’agit de faire en sorte que, lorsque, dans le cadre de ses pouvoirs de police, le maire fait fermer un logement pour des raisons objectives, le bail du locataire soit immédiatement suspendu. Il arrive en effet que le logement soit interdit à la location, mais que le locataire doive continuer à payer le loyer d’un logement qu’il a été contraint d’évacuer.

M. Bruno Questel, rapporteur. Vous aviez déjà déposé cet amendement ainsi que l’amendement CL131 sur la loi ELAN. Il s’agit de dispositifs dont il avait été longuement discuté dans une loi promulguée il y a tout juste un an. Nous ne sommes pas dans le champ du texte, et je vous demande de le retirer.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. C’est également une demande de retrait : nous sommes ici dans le champ d’une ordonnance de la loi ELAN, sur laquelle Julien Denormandie est en train de lancer des concertations. Je vous renvoie vers lui pour ces questions ayant trait aux pouvoirs de police spéciale du maire, notamment pour ce qui touche à l’habitat insalubre.

L’amendement CL130 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL31 de M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Il est incompréhensible pour les Français qu’un maire puisse faire fermer un commerce ou un débit de boissons qui entraîne des nuisances mais qu’il ne puisse pas condamner un immeuble dangereux. Pour un immeuble qui risque de s’écrouler, il faut saisir la justice et, pour les marchands de sommeil, il faut saisir le procureur, qui va mettre huit mois à déclencher une procédure, tandis qu’entre-temps, on risque le drame – on a vu ce qui s’est passé à Marseille…

Il faut donner au maire un pouvoir de police lui permettant d’interdire la location de logements qu’il considère dangereux. Il en prend la responsabilité, à charge pour la justice de se prononcer ensuite sur le bien-fondé de sa décision.

Tant que la loi ne nous permettra pas d’être plus réactifs face aux marchands de sommeil et aux loueurs de logements insalubres, nous n’arriverons pas à éradiquer ce mal qui gangrène certains de nos territoires.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. La notion de protection d’un bien n’a pas la même valeur en droit commercial et en droit de la propriété, ce qui peut en partie expliquer que l’on intervienne plus rapidement dans les situations relevant du droit commercial.

Comme pour l’amendement précédent, je dois vous renvoyer à l’ordonnance de Julien Denormandie. Cela étant, si j’oublie ma position de ministre et que je me mets trente secondes dans la peau d’un député, je dois admettre que votre amendement est frappé au coin du bon sens et que, assis parmi vous, je le voterais…

La Commission adopte l’amendement. L’article 14 quinquies est ainsi rédigé.

M. François Pupponi. Merci au député Lecornu !

Article 15
(art. L. 2212-2-1 et L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales)
Pouvoir du maire de prononcer des amendes administratives en matière de protection du domaine public

La Commission est saisie des amendements identiques CL1187 du rapporteur et CL1054 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. Nous souhaitons, par cet amendement, revenir à la rédaction initiale de l’article 15 du projet de loi, qui donne la faculté au maire de prononcer des amendes administratives dans des cas limitativement énumérés. Le critère lié au caractère répétitif et continu des faits est nécessaire à l’équilibre général du dispositif, et il est, en outre, important que ce dispositif de sanction administrative ne réprime que des faits matériels et objectifs, sans considération de personne. Il n’est donc pas opportun que le montant de l’amende puisse être modulé en fonction de la personnalité ou de la situation personnelle de l’auteur des faits.

M. Sacha Houlié. Cet amendement rétablit en effet la version initiale du texte, à ceci près qu’il tire les conclusions des débats qui ont eu lieu au Sénat à la suite de l’interpellation du DAL. Le maire disposera donc d’un pouvoir de police administrative l’autorisant à décider d’une astreinte journalière de 500 euros dans la limite de 25 000 euros, pour manquement à l’élagage, pour occupation illégale du domaine public, ou pour entrave, le délit d’entrave ne s’appliquant qu’aux biens meubles. Il est par ailleurs précisé que cette amende ne pourra être appliquée aux personnes ayant installé sur la voie publique les objets nécessaires à la satisfaction de leur besoin élémentaires, lesquelles ne pourront donc en aucun cas faire l’objet d’un arrêté anti-mendicité.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis très favorable.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’article 15 modifié.

Après l’article 15

La Commission en vient à l’amendement CL1010 de M. Jean-Claude Leclabart.

M. Bruno Questel, rapporteur. M. Leclabart m’avait promis de le retirer !

M. Jean-Claude Leclabart. J’allais le dire !

L’amendement CL1010 est retiré.

La Commission examine l’amendement CL183 de Mme Monica Michel.

Mme Monica Michel. Défendu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL1055 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. La police administrative est une spécificité française, qui n’est pas étrangère à certaines dispositions prises dans le cadre de la loi dite anticasseurs ou de la proposition de loi de Laetitia Avia, l’une et l’autre inspirées par les mesures administratives mises en œuvre contre le hooliganisme. Il nous est dès lors apparu que les mesures de police administratives méritaient d’être encadrées et limitées dans le cas de mesures d’ordre judiciaire sanctionnant les mêmes faits, afin qu’on ne puisse se retrouver condamné deux fois pour des faits identiques.

C’est la raison de cet amendement d’appel, qui entend mettre en exergue la concurrence possible entre les différents pouvoirs de police.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable. Je saisis votre intention, mais le cumul des sanctions est déjà très largement encadré par la jurisprudence constitutionnelle. Par ailleurs, votre amendement, en l’état, induirait, pour aller vite, l’idée qu’il serait possible de choisir entre la sanction pénale et la sanction administrative.

L’amendement CL1055 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL485 de Mme Cécile Untermaier.

Mme George Pau Langevin. Cet amendement vise essentiellement à aligner les pouvoirs de police des agents de la Ville de Paris chargés d’un service de police, qui exercent actuellement les compétences de police municipale de la maire de Paris, sur le droit commun des agents de police municipale.

La maire de Paris dispose déjà dans les faits d’une police municipale. Toutefois, ses compétences en matière de police municipale sont limitatives, et les agents qui exercent ces compétences relèvent des dispositions statutaires des personnels des administrations parisiennes.

Le statut de ces agents relève du Conseil de Paris, mais nous souhaitons qu’ils soient soumis aux mêmes obligations que les agents de police municipale de droit commun. Cela leur permettrait d’avoir la qualité d’agent de police judiciaire adjoint, comme tout agent de police municipale et leur permettrait également d’adresser sans délai leurs rapports et procès-verbaux simultanément au maire et, par l’intermédiaire des officiers de police judiciaire, au procureur de la République.

Je vous rappelle que Conseil d’État a estimé que la répartition des compétences entre le préfet de police et le maire de Paris était satisfaisante.

M. Bruno Questel, rapporteur. Vous abordez là un sujet d’une telle importance qu’il ne peut être traité au détour d’un amendement sur un texte relatif à l’engagement et à la responsabilité des élus locaux. Nous devons réfléchir, nous concerter, et peut-être qu’au mois d’avril ces sujets pourront être débattus sereinement. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vais vous faire la même réponse qu’au Sénat, où Mme de La Gontrie et le groupe socialiste ont déposé un amendement similaire.

En premier lieu, le ministre de l’intérieur a souhaité initier un Livre blanc sur la sécurité, lequel ne traitera pas seulement de Paris mais aussi de la police en milieu rural, puisque nous souhaitons notamment redonner vie au corps des gardes champêtres.

Ensuite, créer ainsi une police municipale à Paris, par voie d’amendement, aurait des incidences qui, à mon avis, ne sont pas complètement contrôlées à ce stade.

Premièrement, inscrire la police municipale de Paris dans le droit commun est compliqué par le fait que l’organisation des pouvoirs de police à Paris est différente que dans le reste du pays, compte tenu du rôle joué par la préfecture de police de Paris. Si l’on repense le dispositif, il faut donc bien réfléchir à ce qu’il advient des services de l’État assurés par la préfecture.

Deuxièmement, votre proposition emporte un certain nombre de conséquences sur la formation, la nomination, l’agrément, la carrière, la carte professionnelle des agents, ainsi que sur les conventions de coordination entre les forces de sécurité intérieure de l’État et la police municipale, toutes choses que l’on ne saurait réformer du jour au lendemain sans une réflexion d’ensemble.

Enfin, je pense qu’il faut également tenir compte de la position des représentants syndicaux des forces de police municipale, soucieux de ne pas voir une réforme parisienne créer des effets de bord sur le statut des agents.

Tout cela mérite donc une méthodologie très rigoureuse, qui dépasse le simple cadre d’un amendement. Le Gouvernement, qui n’a aucun agenda politique en la matière, ne se risquerait pas, en tout cas, à procéder de la sorte. D’où ma demande de retrait, ou avis défavorable.

M. Pacôme Rupin. Pour des raisons historiques, du fait de son statut de capitale et de l’organisation de la préfecture de police, la question de savoir s’il fallait une police municipale à Paris ne s’est pas posée. Aujourd’hui, il me semble que ce débat concerne en premier lieu nos concitoyens parisiens et que, à quelques mois des élections municipales, c’est à eux de décider ce qu’ils souhaitent en termes de sécurité. Ce n’est donc pas au travers d’un amendement à ce projet de loi que la discussion doit être tranchée, a fortiori au travers d’un amendement qui ne va pas assez loin et qui laisse de côté bon nombre d’enjeux liés à la coordination entre cette police municipale, les forces de sécurité nationale, la préfecture de police et le ministère de l’intérieur.

Il est indispensable que cette question fasse l’objet d’un vrai débat démocratique. Cela étant, les événements dramatiques que la capitale a eu à affronter ces dernières années doivent nous conduire à nous pencher très sérieusement sur la problématique de la sécurité à Paris.

M. Pierre-Yves Bournazel. N’étant pas membre de cette commission, je ne pourrai pas voter cet amendement, mais j’avais soutenu dès 2013 l’idée – très contestée à l’époque – d’une police municipale parisienne, contre la maire de Paris qui, lors de sa campagne électorale, en 2014, s’était fermement engagée à ne pas aller dans cette direction.

Je me réjouis qu’on lui permette aujourd’hui de tenir ses engagements, car cet amendement me semble une initiative qui dépasse largement le cadre de la réforme proposée. La création d’une police municipale à Paris exige de passer par une proposition de loi ou un projet de loi, car elle recouvre des enjeux majeurs en termes de formation, notamment si cette police doit être armée et exercer un métier tout autre que celui d’une brigade anti-incivilités.

J’ajoute que la maire de Paris a souhaité et obtenu du gouvernement précédent sous la présidence de M. Hollande, la possibilité de modifier le statut de Paris ; elle aurait pu à cette occasion faire avancer l’idée d’une police municipale, puisque la majorité y était favorable. Elle s’y est clairement refusée. Nous sommes à quatre mois d’une élection, et chacun devrait peut-être avoir le sens de l’intérêt général et faire en sorte qu’on réussisse, quels que soient les résultats des élections municipales, à mettre en œuvre, au service des Parisiens, une véritable police municipale.

Mme George Pau-Langevin. Cet amendement s’inscrit dans le droit fil de la modification du statut de Paris que nous avons adoptée il y a quelques années. En effet, à cette occasion, des agents qui relevaient de l’État ont été transférés à la ville de Paris. Or, il s’agit ici de mettre en adéquation leur statut et leurs compétences. Certes, comme l’a indiqué M. le ministre, toutes les concertations nécessaires doivent avoir lieu. Mais force est de constater que si nous attendons le livre blanc et ses suites, nous en serons toujours au même stade dans quelques années. Il serait donc utile que nous avancions dès aujourd’hui sur le statut de ces agents.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Maintenez-vous votre amendement ?

Mme George Pau-Langevin. Oui.

M. Pacôme Rupin. Le problème de la réforme du statut de Paris tient précisément à la confusion qu’elle a créée s’agissant des responsabilités respectives de la préfecture de police, c’est-à-dire de la police nationale, et de la brigade installée après cette réforme, mais composée en grande partie d’agents qui travaillaient déjà à la ville de Paris et n’étaient donc pas forcément formés à l’exercice de ces nouvelles compétences. C’est la raison pour laquelle nous avons assisté à une explosion des incivilités à Paris, d’où le sentiment que l’ordre public n’y est plus respecté. Nous devons donc être très prudents lorsque nous touchons à la loi et, comme l’a dit M. Bournazel, prendre le temps de débattre pour élaborer un dispositif juridique et organisationnel solide.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je regrette que cet amendement ne soit pas retiré, car je ne voudrais que notre avis défavorable soit instrumentalisé dans la perspective des échéances futures. La préoccupation de la commission des Lois, dans le cadre de l’examen de ce projet de loi, n’est pas de régler cette question très importante, qui devra l’être dans le cadre d’un débat de fond, une fois que les électeurs se seront prononcés lors du prochain scrutin municipal.

La Commission rejette l’amendement.

Article 15 bis A
(art. L. 581-27, L. 581-28 et L. 581-30 du code de l’environnement)
Réduction des délais d’exécution des arrêtés d’exécution relatifs à l’affichage illicite de publicité

La Commission adopte l’article 15 bis A sans modification.

Article 15 bis B (nouveau)
(art. L. 324-1-1 du code de tourisme)
Faculté pour les communes de fixer la limitation de la durée des locations non professionnelles entre 60 et 120 jours par an

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL642 de M. Pierre-Yves Bournazel et les amendements identiques CL704 de M. Pacôme Rupin et CL812 de M. Vincent Bru.

M. Pierre-Yves Bournazel. L’amendement CL642 vise à donner aux communes la liberté de fixer le nombre des nuitées touristiques autorisées sur leur territoire afin qu’elles puissent s’adapter à l’évolution du marché du logement et limiter les effets néfastes que peut avoir un nombre trop important de nuitées touristiques sur la vie de certains quartiers.

Un maire devrait avoir la liberté de fixer à moins de 120 le nombre de jours autorisés à la location touristique de courtes durées. Cent vingt journées par an, cela fait quatre mois pleins : ce plafond ne correspond pas à une activité occasionnelle. Du reste, selon Airbnb, un Parisien loue son logement en moyenne trente-trois nuitées par an. Il s’agit donc ici de corriger les excès et de permettre aux communes de fixer un plafond qui corresponde davantage à la réalité et aux spécificités de son territoire.

En tant qu’élu de Paris, je le constate sur le terrain : des quartiers entiers – à Montmartre et au Marais, par exemple – pâtissent d’une surconcentration des locations touristiques et d’une suractivité dans ce domaine, qui ont un impact direct sur la physionomie des commerces, la qualité de la vie dans ces quartiers et les copropriétés. C’est, me semble-t-il, le rôle du maire que d’agir dans l’intérêt général.

J’ajoute que cet amendement tend à offrir également aux collectivités la capacité de vérifier a priori la régularité d’une offre d’hébergement touristique de courte durée à l’occasion de la délivrance d’un numéro d’enregistrement, délivrance qui est actuellement automatique. L’enjeu, pour les communes, est simple : il est de pouvoir contrôler la régularité des offres. Pour être efficace, ce contrôle doit être effectué par la commune en amont afin de responsabiliser l’hôte, et non être exercé a posteriori et dépendre du bon vouloir des plateformes.

C’est le meilleur moyen de vérifier qu’une location n’est pas une résidence secondaire mise illégalement sur le marché. C’est également un bon moyen de vérifier que le locataire est bien autorisé par son propriétaire à mettre son bien en location touristique. C’est enfin un moyen majeur de lutter contre la sous-location des logements sociaux. Cette mesure est pragmatique et d’intérêt général.

M. Pacôme Rupin. L’article 15 bis B a trait à une question fondamentale pour tous les territoires touristiques dans lesquels la demande de logements permanents est forte. La pratique sympathique qui consiste à louer son logement à des touristes a été dévoyée en une forme de business qui n’est pas acceptable dans les villes où le marché du logement est très tendu. Mais le développement de ce phénomène a favorisé une prise de conscience qui a conduit à amorcer une régulation, dès la loi pour une République numérique.

Celle-ci établit cependant une distinction, j’y insiste, entre les résidences principales et les logements ayant un autre statut. Ainsi, à Paris comme dans d’autres zones denses, le nombre de jours de location est limité pour les résidences principales, c’est-à-dire pour les personnes qui habitent dans leur logement. De fait, dans ce cas, la location touristique n’a pas de conséquences sur le marché du logement. Elle peut, certes, avoir d’autres conséquences ; c’est pourquoi la question de l’abaissement de ce plafond peut se poser. Mais il serait faux de prétendre que la diminution du nombre de nuitées autorisées permettrait de remettre des logements sur le marché dès lors qu’une résidence principale est par ce fait habitée.

Les résidences secondaires et les logements vacants sont également soumis, et je m’en réjouis, à une régulation très forte – puisque leur mise en location impose le dépôt d’une demande de changement d’usage, avec une compensation – qui a dissuadé un certain nombre de personnes qui le souhaitaient de faire de la location touristique un véritable business.

Mais il faut désormais donner – et c’est l’objet de l’amendement CL704 – davantage de moyens de contrôle aux communes. Celles-ci détiennent déjà, dans ce domaine, un réel pouvoir de contrôle, qui a été renforcé par la loi portant Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite ELAN. À cet égard, l’article 15 bis B pose le véritable problème, mais il n’y apporte pas une solution satisfaisante puisqu’il vise des personnes qui respectent la loi, c’est-à-dire celles qui louent leur résidence principale. Celles qu’il faut davantage contrôler sont celles qui ne la respectent pas. C’est pourquoi nous proposons, par l’amendement CL704, de contraindre les plateformes de communiquer un certain nombre d’informations de nature à faciliter les contrôles.

M. Vincent Bru. Je précise que ce problème touche particulièrement Paris, mais aussi d’autres communes. Comme celui de M. Rupin, l’amendement CL812 a pour objet de donner aux maires des outils complémentaires dans le cadre de l’application des principes définis dans la loi ELAN.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je suis désolé, monsieur Bournazel, mais je suis défavorable à l’amendement CL642. Dès lors que celui-ci tend à supprimer le seuil minimal fixé par la loi, il serait profondément déstabilisateur pour les marchés. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer. En revanche, je suis favorable aux amendements CL704 et CL812.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. L’amendement CL642 présente une difficulté d’ordre constitutionnel. Or, en la matière, des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) ne manqueront pas d’être soulevées : mieux vaut légiférer correctement. De fait, fixer une limite inférieure à 120 jours présenterait un risque constitutionnel évident. En tout cas, il est certain que le contrôle a priori porte clairement atteinte au droit de propriété. Rendez-vous compte : une autorité administrative autoriserait a priori la mise en location d’un bien… Je ne peux donc qu’être défavorable à cet amendement.

M. Bruno Questel, rapporteur. N’inscrivez pas cette mesure dans votre programme, monsieur Bournazel !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Les programmes ne peuvent pas faire l’objet de recours devant le Conseil constitutionnel, à la différence du projet de loi que je défends… D’où ma prudence !

Quant aux amendements de M. Rupin et de M. Bru, ils apportent au texte adopté par le Sénat des corrections bienvenues – c’est en tout cas l’avis de Julien Denormandie. Le Gouvernement y est donc favorable.

M. Pierre-Yves Bournazel. Je ne suis pas étonné par les réponses du rapporteur et du ministre. Certes, l’adoption de l’amendement de M. Rupin marquerait une avancée, dans la mesure où il reconnaît la nécessité d’un meilleur contrôle de la régularité des offres de location touristique de courtes durées. Mais ce contrôle demeurerait a posteriori, et c’est bien le problème : il dépend, de ce fait, de la transmission des données par les plateformes, qui ont un intérêt financier dans l’affaire. De surcroît, non seulement un contrôle de ce type intervient très tard et complique grandement le travail d’enquête des agents de la commune, mais un tel amendement n’envoie pas un message très fort aux personnes qui seraient tentées de louer irrégulièrement leur bien. Il me semble que, pour être réactif et efficace, c’est en amont que le contrôle doit pouvoir être exercé par la commune, qui peut ainsi vérifier, par exemple, que le locataire a bien l’autorisation du propriétaire de mettre son bien en location – et cela participe aussi du respect du droit de propriété.

Je ne crains pas que cette question soit tranchée à l’occasion d’une QPC ; je souhaite que l’on avance et que l’on protège un certain nombre de quartiers. Au demeurant, je ne crois pas que mon amendement porte une atteinte excessive au droit de propriété ; c’est plutôt le plafond de 120 jours qui peut paraître exagéré aux Parisiennes et aux Parisiens attachés à la qualité de la vie dans leur quartier. C’est pourquoi il convient, encore une fois, de limiter les excès et les problèmes auxquels sont confrontés ces citoyens, en permettant au maire de fixer une limite raisonnable qui concilie l’attractivité de sa ville et l’aspiration de ses habitants à vivre dans un environnement apaisé.

Lorsque le marché immobilier de quartiers tels que Montmartre et le Marais connaît des tensions excessives, qui se traduisent par des prix à la location supérieurs à 11 000 euros le mètre carré, la suractivité en matière de location touristique affecte le cadre et la qualité de la vie des habitants. Comment le maire de Paris ou d’une autre grande ville pourrait-il ne pas agir dans l’intérêt général ? À l’étranger, de grandes métropoles n’ont pas hésité à agir et à durcir leur réglementation.

M. Jean-Félix Acquaviva. Je ne résiste pas à la tentation d’exprimer le plein soutien de la Corse à la ville de Paris face aux tensions provoquées par la résidentialisation secondaire, la spéculation immobilière et la mise en location de résidences secondaires – car c’est bien de cela qu’il s’agit –, qui nuisent à l’accession sociale à la propriété et au logement social dans nos territoires. Même si je partage les inquiétudes qui ont été exprimées quant à la constitutionnalité de certaines mesures, qui ne pouvaient pas ne pas surgir lors de l’examen d’un projet de loi tel que celui-ci – du reste, un certain nombre d’amendements ont été déclarés irrecevables pour cette raison –, force est de constater que ce problème affecte plusieurs territoires et devient prégnant. Un certain nombre de solutions devront donc être proposées, si cela est possible, d’ici à la séance publique, et qui ne doivent pas exclure le recours à des mesures concernant la fiscalité ou les plans locaux d’urbanisme.

Mme George Pau-Langevin. Ce problème est, en effet, très lourd à Paris : alors que le manque de logements y est déjà criant, une grande partie du marché immobilier est asséchée par les locations Airbnb. Il est donc souhaitable de chercher des solutions à ce problème. La mairie de Paris, très engagée dans ce domaine, a pris un certain nombre d’initiatives. Quant aux propositions qui nous sont faites, elles sont intéressantes mais, en l’absence d’étude d’impact, il est difficile de se prononcer en l’état sur leur bien-fondé.

M. Pacôme Rupin. Une action résolue a été menée au plan législatif, puisque deux lois sont déjà intervenues dans ce domaine. La dissuasion est très forte, puisque les amendes encourues sont très élevées. L’enjeu réside donc moins dans la régulation par la loi que dans le contrôle, qui doit être effectif. En tout état de cause, ce n’est pas en ciblant les personnes qui louent leur résidence principale, dans la limite de 120 jours par an – limite, je le précise, qui ne s’applique qu’à elles –, que l’on réglera le problème. Mieux vaut viser ceux qui trichent. Or, pour ce faire, il faut améliorer le contrôle en renforçant les outils dont disposent les maires. Tel est l’objet de l’amendement CL704.

M. Pierre-Yves Bournazel. Je suis évidemment attaché au fait que les citoyens puissent louer leur bien : compte tenu du prix du mètre carré, il est normal qu’ils puissent disposer de ce complément de revenu pour rembourser leur emprunt. Mais je tiens à rappeler que, si le contrôle est effectué a posteriori, nous sommes obligés de faire confiance aux plateformes et nous n’empêcherons pas le contournement des règles. Or les copropriétés sont confrontées à de lourds problèmes, les logements se raréfient dans certains quartiers. Il faut examiner la situation avec lucidité et élaborer, avec rationalité, des solutions nouvelles et appropriées. J’ajoute que, dans un pays très attaché à la liberté et à la propriété tel que les États-Unis, les contrôles exercés dans les métropoles sont bien plus étroits et s’effectuent a priori. Enfin, il y a quelques heures, Airbnb a annoncé que les 7 millions de logements mis en location sur sa plateforme seraient contrôlés. C’est dire si nous avons un temps de retard.

La Commission rejette l’amendement CL642.

Puis elle adopte les amendements identiques CL704 et CL812.

Elle adopte enfin l’article 15 bis B modifié.

Article 15 bis C
(art. L. 774-2 du code de justice administrative)
Attribution au président de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement d’un pouvoir de police de conservation du domaine public fluvial

La Commission adopte l’article 15 bis C sans modification.

Article 15 bis
(art. L. 541-21-3 et L. 541-21-4 du code de l’environnement)
Renforcement du pouvoir de police du maire à l’encontre des épaves de véhicules

La Commission adopte l’article 15 bis sans modification.

Après l’article 15 bis

La Commission est saisie de l’amendement CL74 de M. Xavier Roseren.

M. Xavier Roseren. Voici un amendement qui vise à faciliter le travail des maires !

La procédure d’enregistrement prévue dans le code du tourisme permet aux maires d’identifier les meublés de tourisme loués sur le territoire de leur commune et de s’assurer que la limite de location, fixée à 120 jours par an, est bien respectée. Toutefois, pour que cette procédure s’applique, la commune doit mettre en œuvre la procédure d’autorisation préalable au changement d’usage des locaux. Or cette autorisation préalable, qui nécessite la constitution de dossiers importants, peut être très contraignante pour les petites communes, notamment les stations touristiques montagnardes. Cette complexité est d’autant plus dommageable qu’elle prive ces communes d’une bonne visibilité de l’offre en matière de meublés de tourisme sur leur territoire.

Une bonne connaissance de l’offre immobilière dans sa commune permettrait pourtant au maire, non seulement de faire respecter la limite des 120 jours, mais aussi d’adapter sa politique d’urbanisme aux besoins du terrain. Cet amendement vise donc à ouvrir la procédure d’enregistrement aux communes touristiques sans que celles-ci aient besoin d’avoir recours à l’autorisation préalable pour le changement d’usage.

M. Bruno Questel, rapporteur. Hélas, mon cher collègue, je suis contraint de vous demander de retirer votre amendement : il me paraît délicat de prévoir un dispositif dérogatoire pour les seules communes touristiques, d’autant plus que celles-ci sont trop diverses pour se voir appliquer un régime uniforme.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Demande de retrait ou avis défavorable. Votre amendement aurait en effet des incidences sur le changement de destination des lieux : l’autorisation préalable est un outil de protection.

M. Xavier Roseren. Monsieur le rapporteur, la définition de la commune touristique est précise. Mon amendement ne pose donc pas de problèmes à cet égard. Peut-être présente-t-il d’autres difficultés. En tout état de cause, il est certain que cette autorisation préalable au changement d’usage pénalise les maires.

J’accepte néanmoins de le retirer pour y retravailler. Toutefois, il me paraît important de trouver une solution simple pour les petites communes qui souhaitent pouvoir identifier les résidences secondaires ou principales qui sont mises en location sur leur territoire.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je suis prêt à examiner la question de l’identification des logements mis en location.

L’amendement est retiré.

Article 15 ter A
(art. L. 583-3-1 [nouveau] du code de l’environnement)
Extinction partielle ou totale de l’éclairage public afin de limiter les consommations d’énergie

La Commission est saisie des amendements identiques CL1188 du rapporteur, CL1056 de M. Sacha Houlié et CL1111 de Mme Anne Blanc.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’article 15 ter A, en ce qu’il prévoit que le maire peut procéder à l’extinction de l’éclairage public, ne me paraît pas cohérent avec le droit en vigueur et ne saurait avoir pour effet d’exonérer le maire de sa responsabilité au titre de ses pouvoirs de police. C’est pourquoi l’amendement CL1188 a pour objet de le supprimer.

M. Sacha Houlié. Cette disposition d’origine sénatoriale, qui tend à rendre le maire irresponsable lorsqu’il a reçu l’instruction d’éteindre l’éclairage public, n’est pas conforme au droit et doit donc être supprimée. Tel est l’objet de l’amendement CL1056.

Mme Anne Blanc. Par l’amendement CL1111, nous proposons de lutter contre la schizophrénie de nos amis sénateurs : ils demandent beaucoup de liberté pour les maires mais sitôt qu’on la leur accorde, en l’espèce en matière d’éclairage public, ils ont tôt fait de s’exonérer de leurs responsabilités.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je n’aurais pas dit mieux…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable à ces amendements de suppression.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 15 ter A est supprimé et les amendements CL367 de Mme Bénédicte Taurine, CL619 de M. Robin Reda et CL804 de M. Xavier Paluszkiewicz tombent.

Article 15 ter
(art. L. 512-4, L. 512-5 et L. 512-6 du code de la sécurité intérieure)
Consolidation du régime des conventions de coordination

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL1134 et CL1135, tous deux du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL821 de M. Philippe Dunoyer.

M. Philippe Dunoyer. Il s’agit de rendre applicables les dispositions de l’article 15 ter à la Nouvelle-Calédonie. Je sais que le Gouvernement s’est engagé à légiférer par ordonnance après avoir vérifié la manière dont les dispositions du texte peuvent s’articuler avec les compétences spécifiques de ce territoire. Un tel contrôle est en effet nécessaire ; il est, du reste, justifié pour nombre des articles de ce titre, dans la mesure où ceux-ci relèvent du code de la santé et du code de l’urbanisme et de l’environnement, qui régissent des domaines dans lesquels la Nouvelle-Calédonie est compétente. Mais, en l’espèce, il s’agit de la sécurité intérieure, qui est une compétence régalienne.

La disposition du code de la sécurité intérieure régissant les conventions de coordination est déjà applicable à la Nouvelle-Calédonie. Sur ce point, je souhaite donc que l’on n’attende pas que soit achevé le long travail qui sera nécessaire pour rendre l’ensemble du projet de loi applicable en Nouvelle-Calédonie, sur le territoire de laquelle des conventions ont été conclues entre les polices municipales et les forces de police ou de gendarmerie. On peut, me semble-t-il, sans crainte de bouleverser des équilibres institutionnels ou organiques, étendre l’application immédiate de l’article 15 ter à la Nouvelle-Calédonie.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous renvoie à l’article 34 du projet de loi, qui répond à vos attentes en autorisant le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour assurer l’ensemble des coordinations requises afin d’adapter les dispositions du texte à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française. Je vous suggère donc de retirer votre amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Sagesse.

M. Philippe Dunoyer. Monsieur le rapporteur, s’agissant de l’article 34, l’intention du Gouvernement est la bonne, dans la mesure où, je le répète, la quasi-totalité des dispositions de ce texte a trait à des domaines dans lesquels la Nouvelle-Calédonie est compétente. Néanmoins, d’autres dispositions entreront en vigueur en Nouvelle-Calédonie sans attendre la ratification de l’ordonnance. Je pense, par exemple, à celles de l’article 11 nonies ou de l’article 23 bis. Or, il me semble que l’article 15 ter, qui est relatif à une compétence régalienne – puisqu’il s’agit de la coordination entre les forces de sécurité de police et de gendarmerie, d’un côté, des polices municipales, de l’autre – peut, sans difficulté, être étendu de façon immédiate à la Nouvelle-Calédonie. Dans ce territoire, vous le savez, certaines parties du droit se sclérosent faute d’être mises en musique avec les dispositions votées par l’Assemblée nationale.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je comprends votre souhait. Dès lors que vous ne souhaitez pas retirer l’amendement, j’émets un avis favorable…

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 15 ter modifié.

Article 15 quater
(art. L. 132-3 du code de la sécurité intérieure)
Renforcement de l’information du maire sur les suites judiciaires données aux infractions signalées par lui ou constatées par les agents de la police municipale

La Commission est saisie de l’amendement CL1057 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. L’article 15 quater tend à obliger le procureur à informer le maire de manière automatique des suites judiciaires données aux infractions signalées par lui ou constatées par les agents de police municipale de sa commune. Cette sujétion nouvelle crée un rapport hiérarchique entre le procureur de la République et le maire qui n’est pas souhaitable. C’est pourquoi il est proposé de supprimer cette disposition.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis plus que favorable à l’adoption de cet amendement de bon sens.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 15 quater est supprimé.

Après l’article 15 quater

La Commission est saisie de l’amendement CL822 de M. Philippe Dunoyer.

M. Philippe Dunoyer. Je retire cet amendement, compte tenu de la discussion que nous venons d’avoir et de la suppression de l’article 15 quater.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL211 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea. Comme beaucoup d’entre nous, j’ai réuni les maires de mon département dans le cadre des travaux préparatoires du projet de loi. Cet amendement a trait à l’un des trois axes forts qui sont ressortis de nos discussions, même si je suis conscient qu’il n’apporte pas de solution au problème soulevé.

Si tous les maires que j’ai consultés sont très satisfaits du renforcement de leurs pouvoirs de police, ils s’interrogent – deux d’entre eux ont été agressés récemment – sur les moyens donnés aux édiles ruraux pour exercer ces pouvoirs concrètement. Il s’agit d’un angle mort du projet de loi. Je sais que d’autres textes sont à venir. C’est pourquoi cet amendement vise uniquement à susciter la réflexion, pour aller un peu plus loin. S’agissant de la police de la ruralité, par exemple – et je sais, monsieur le ministre, que vous vous êtes beaucoup impliqué dans ce domaine –, nous ne sommes pas allés, contrairement aux ambitions qui avaient été affichées, au bout de la démarche.

M. Bruno Questel, rapporteur. La commission des Lois est hostile, par principe, aux demandes de rapports. Avis défavorable, donc. Au demeurant, le dispositif proposé est peu normatif et contribuerait à complexifier les relations entre les maires et l’État.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable.

L’amendement est retiré.

Article 15 quinquies
(art. L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales)
Mise à disposition du président de l’EPCI d’agents de police municipale des communes membres

La Commission adopte l’article 15 quinquies sans modification.

Article 15 sexies
(art. L. 511-5, L. 512-2, L. 512-4 et L. 512-5 du code général des collectivités territoriales)
Simplification des régimes de mutualisation des polices municipales au niveau intercommunal

La Commission adopte l’amendement de précision CL1136 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 15 sexies modifié.

Article 15 septies A
(art. L. 541-44 du code de l’environnement)
Compétence des gardes champêtres afin de constater des infractions en matière de déchets

La Commission adopte l’article 15 septies A sans modification.

Article 15 septies
(art. L. 522-2 du code de la sécurité intérieure)
Possibilités de mutualisation de gardes champêtres entre EPCI

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL1137, CL1138, CL1139 et l’amendement de précision CL1140, tous du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL1189 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur la possibilité offerte à des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de mettre en commun des gardes champêtres et de les mettre à disposition, le cas échéant, de communes non-membres de ces établissements. Cette possibilité de mise en commun sur un périmètre dépassant celui de l’EPCI n’existe actuellement ni pour les gardes champêtres ni pour les policiers municipaux. En outre, les EPCI ont pour vocation, en raison de leur principe de spécialité, d’être au service des seules communes qui en sont membres.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 15 septies modifié.

Article 15 octies
Dissolution du syndicat mixte de la baie du Mont-Saint-Michel et création d’un établissement public de l’État

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL1147 rectifié du Gouvernement.

En conséquence, l’article 15 octies est ainsi rédigé.

Après l’article 15 octies

La Commission examine l’amendement CL868 de M. Philippe Dunoyer.

M. Philippe Dunoyer. Cet amendement a trait à une question déjà évoquée lors d’une réunion de la commission de Lois de mars 2018 : il s’agit d’aligner les dispositions du code des communes de la Nouvelle-Calédonie sur celles du code général des collectivités territoriales. Aux termes de celui-ci, les maires peuvent, dans des circonstances parfaitement encadrées, prendre des mesures pour réprimer des atteintes à la tranquillité publique. En Nouvelle-Calédonie, ce pouvoir est attribué, à Nouméa, au haut-commissaire et, dans les autres communes, aux commissaires délégués.

Nous proposons donc de confier aux maires de Nouvelle-Calédonie les mêmes pouvoirs que ceux qu’exercent leurs homologues de métropole, ni plus ni moins. Cette mesure suppose toutefois de revenir sur une disposition dont on ignorait si elle revêtait un caractère organique ou ordinaire. Cette question a été tranchée en Commission lorsque nous avons examiné le projet de loi organique relatif à l’organisation de la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie en mars 2018. Or, il me semble qu’une telle disposition a sa place dans le titre II du projet de loi, relatif au renforcement de pouvoirs de police du maire.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement vise à harmoniser les règles applicables en matière de police administrative entre la Nouvelle-Calédonie et l’Hexagone. À cette fin, vous proposez d’étendre les dispositions visées à l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Or, celles-ci ne sont pas modifiées par le projet de loi. Je vous demande donc, et j’en suis désolé, de retirer l’amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre des collectivités territoriales. Je renvoie cette question à la concertation organisée dans le cadre de la préparation de l’ordonnance. Demande de retrait également.

M. Philippe Dunoyer. Je me range à l’avis du rapporteur et du ministre et m’en remets à la concertation à venir. Je reconnais qu’en la matière, les équilibres sont plus subtils que ceux que j’ai évoqués en défendant l’amendement CL821.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. C’est bien dit !

L’amendement est retiré.

TITRE III
LIBERTÉS LOCALES : SIMPLIFIER LE QUOTIDIEN DU MAIRE

Chapitre IER
Favoriser le rapprochement entre collectivités territoriales

Article 16
(art. L. 1410-3, L. 1411-5-1 [nouveau], L. 5111-1, L. 5211-4-4 [nouveau] et L. 5721-9 du code général des collectivités territoriales)
Assouplissement de certaines règles en matière de conventions de prestations de services et de commande publique

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL678 de M. Erwan Balanant.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL1141, CL1142, CL1143, l’amendement de précision CL1144 et les amendements rédactionnels CL1145 et CL1146, tous du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL1190 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit d’étendre l’application de l’article 16 à la métropole de Lyon.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 16 modifié.

Article 16 bis
(art. L. 1611-3-2 du code général des collectivités territoriales)
Élargissement des catégories de personnes morales pouvant adhérer à l’Agence France Locale aux groupements de collectivités territoriales et établissements publics locaux

La Commission adopte l’article 16 bis sans modification.

Article 17
(art. L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales)
Assouplissement des mécanismes de délégation de compétences entre les collectivités territoriales

La Commission est saisie de l’amendement CL1191 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit de supprimer les dispositions, introduites au Sénat, relatives aux délégations ascendantes.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable, mais je m’engage à travailler, d’ici à la séance publique, avec les députés qui le souhaitent à des expérimentations portant sur des compétences spécifiques, particulièrement dans le domaine de l’eau. En l’état actuel des choses, la délégation générale, c’est-à-dire ascendante, permettrait de déléguer son schéma de cohérence territoriale, par exemple. Il faut donc l’encadrer pour que le dispositif soit opérant.

M. Raphaël Schellenberger. Il vaut la peine que nous prenions le temps de discuter de cette question, car la disposition adoptée par le Sénat constitue une véritable nouveauté au regard de la conception que nous avons de la décentralisation. Jusqu’à présent, cette conception était fondée sur une fiction : la clause de compétence générale. Or, celle-ci a été remise en cause par la loi NOTRe, au profit d’une conception plus proche de la déconcentration que de la décentralisation. En effet, on a confié aux différents niveaux de collectivités certains blocs de compétences en partant du principe que celles-ci seraient ainsi forcément exercées au niveau le plus pertinent. Or tel n’est pas toujours le cas.

Par ailleurs, la véritable logique de subsidiarité part de l’autonomie de l’individu, ce qui le laisse libre de décider de partager avec d’autres les compétences qu’il estime ne pas pouvoir exercer seul. Ainsi, l’innovation du Sénat, si elle s’inscrit dans une logique inverse de celle de la loi NOTRe, est beaucoup plus respectueuse du principe de subsidiarité, auquel je nous sais tous très attachés.

J’estime que cette démarche est intéressante. J’espère, monsieur le ministre, que votre engagement de réfléchir à des expérimentations portant sur des compétences précises sera tenu. Toutefois, je ne suis pas certain que l’eau soit le domaine le plus approprié, mais nous en discuterons peut-être d’ici à la séance publique. Par ailleurs, ce concept fait en quelque sorte l’objet d’une expérimentation territoriale, puisque la loi relative à la Collectivité européenne d’Alsace a commencé a amorcé une démarche de ce type. Quoi qu’il en soit, il s’agit là de l’une des voies qui nous permettront de faire évoluer, dans les années à venir, la liberté d’organisation des collectivités territoriales au profit d’une meilleure adaptation aux réalités locales.

Si je crois que la compétence de l’eau n’est pas forcément celle qui se prête le mieux à une expérimentation en la matière, c’est parce que le problème est souvent, en fait, déjà réglé par la création de syndicats à l’échelle départementale. Nous pourrions donc choisir de nouveaux terrains qui présentent des enjeux pour les compétences actuelles et à venir des collectivités.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CL926 de M. Arnaud Viala, CL621 de M. Robin Reda, CL863 de M. Jean-François Cesarini, CL194 de Mme Marie-France Lorho et CL571 de M. Xavier Breton tombent.

La Commission adopte l’article 17 modifié.

Article 17 bis
(art. 4 de la loi n° 2017-1838 du 30 décembre 2017)
Extension au 31 décembre 2020 de la faculté de déléguer la compétence GEMAPI à des syndicats de communes ou mixtes

La Commission adopte l’article 17 bis sans modification.

Après l’article 17 bis

La Commission est saisie des amendements identiques CL714 de M. Vincent Thiébaut et CL818 de M. Patrick Hetzel.

M. Vincent Thiébaut. La loi dite Fesneau du 30 décembre 2017 permet, à titre dérogatoire, l’adhésion d’un syndicat mixte ouvert à un autre syndicat mixte ouvert, afin de permettre aux territoires de s’organiser à une échelle hydrographique adaptée à l’exercice de tout ou partie de la compétence Gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI). Cette dérogation, limitée à cette compétence, n’est applicable que jusqu’au 31 décembre 2019. Après cette date, elle concernera les seuls syndicats mixtes ouverts reconnus Établissement public d’aménagement et de gestion des eaux (EPAGE) ou Établissement public territorial de bassin (EPTB).

Or le rapport remis au Gouvernement en application de l’article 3 de la loi Fesneau montre que les territoires n’ont pas pu réaliser l’évaluation nécessaire à l’application de cette dérogation. Aussi proposons-nous, par l’amendement CL714, de reporter de deux ans les dates butoir prévues dans la loi. Il s’agit de permettre aux territoires de bien appréhender toutes les problématiques liées à l’exercice de la compétence GEMAPI et d’éviter ainsi que ne soit remise en cause la gouvernance de cette compétence reconnue au niveau international.

M. Raphaël Schellenberger. L’amendement CL818 est inspiré, comme celui de M. Thiébaut, par le Syndicat des eaux et de l’assainissement d’Alsace-Moselle (SDEA). Davantage que la compétence de l’eau, la compétence GEMAPI pourrait, selon moi, monsieur le ministre, faire l’objet de la clause de compétence ascendante que nous évoquions à l’instant. En effet, certains départements, particulièrement le Haut-Rhin, qui se sont historiquement organisés autour de l’exercice de cette compétence et des bassins-versants, ne se retrouvent pas forcément dans la logique des EPTB et des EPAGE, alors qu’ils sont toujours largement en avance dans la gestion de ces compétences.

Dans le Bas-Rhin, par exemple, le syndicat départemental gère la compétence eau et assainissement pour presque tout le département. Ainsi, cette compétence est déjà remontée à l’échelle départementale, même si elle n’est pas exercée par le département lui-même. Ce syndicat pourrait également, le cas échéant, exercer la compétence GEMAPI, mais il est vrai que les délais sont un peu trop brefs.

Pour être parfaitement transparent, je précise que cet amendement est bas-rhinois alors que je suis moi-même haut-rhinois… Or les connaisseurs du dossier de la GEMAPI savent que nous avons une conception substantiellement différente de l’exercice de cette compétence en Alsace. Je me dois donc d’indiquer que, si je défends la possibilité pour le SDEA de prétendre à l’exercice de cette compétence à l’avenir, sur le terrain, je n’y suis pas forcément favorable.

M. Bruno Questel, rapporteur. Au fond, c’est une forme de « en même temps », monsieur Schellenberger. Vous voyez, vous y venez !

M. Raphaël Schellenberger. Vous êtes taquin, monsieur le rapporteur !

M. Bruno Questel, rapporteur. La prolongation d’un an, c’est-à-dire jusqu’au 31 décembre 2020, décidée par le Sénat, de la délégation à titre dérogatoire de la compétence à des syndicats de communes ou mixtes nous semble être un point d’équilibre adapté à la situation. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je crois que 2021, c’est trop tard. Je vous suggérerai donc de rectifier vos amendements, pour retenir la date du 31 décembre 2020. Ainsi, les équipes municipales qui seront élues en mars prochain auront le temps de prendre un certain nombre de décisions sans que la date limite soit reportée trop loin ; nous faisons preuve de la souplesse qui convient et nous nous alignons sur la position du Sénat – je préfère en effet que les dates soient les mêmes : c’est mon côté alsacien, organisé. Sous réserve de cette rectification, j’émets un avis favorable à ces amendements.

M. Raphaël Schellenberger. J’accepte votre proposition. Je rectifie donc l’amendement CL818, en y substituant « 2020 » à « 2021 » et « 2021 » à « 2022 ».

M. Vincent Thiébaut. J’accepte également. Du coup, le Bas-Rhin s’aligne sur le Haut-Rhin…

M. Bruno Questel, rapporteur. Archi-favorable à cette rectification !

La Commission adopte les amendements tels qu’ils viennent d’être rectifiés. L’article 17 ter est ainsi rédigé.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement CL1088 de Mme Stella Dupont.

Article 18
(art. L. 1111-10, L. 3231-2, L. 3232-1-2 et L. 3231-3 du code général des collectivités territoriales)
Compétence du département en matière économique

La Commission est saisie de l’amendement CL971 de M. Stéphane Baudu.

M. Stéphane Baudu. Il s’agit de revenir à l’esprit originel de cet article, qui tendait à offrir la possibilité aux conseils départementaux d’intervenir dans le champ économique en finançant les acteurs économiques dans des situations exceptionnelles liées à des catastrophes naturelles. Le Sénat a largement étendu cette possibilité aux domaines de l’agriculture et de la pêche. Or cette extension n’a pas fait l’objet d’une concertation suffisante avec les départements et, surtout, les régions. Une telle extension pourrait être envisagée, mais plutôt dans le cadre du futur projet de loi dit 3D (décentralisation, différenciation et déconcentration).

M. Bruno Questel, rapporteur. L’Association des départements, dont j’ai reçu les représentants dans le cadre de la mission d’évaluation de la loi NOTRe, ne s’est pas montrée franchement opposée au dispositif adopté par le Sénat. Il est donc préférable de ne pas perdre de temps. C’est pourquoi je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Demande de retrait ou avis défavorable, étant précisé que je vais me pencher, d’ici à la séance publique, sur la disposition adoptée par le Sénat afin d’examiner les minimes effets de bord qu’elle pourrait entraîner.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement de précision CL1192 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 18 modifié.

La réunion, suspendue à 17 heures, est reprise à 17 heures 10.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous reprenons nos travaux pour ce que j’espère être la dernière ligne droite. Trois cents amendements environ restent à examiner.

Article 19
(art. L. 2113-11 du code général des collectivités territoriales et art. 10 et 12 de la loi n° 2019-809
du 1er août 2019)
Simplification des règles d’état civil applicables au sein d’une commune nouvelle

La Commission adopte l’article 19 sans modification.

Article 19 bis
(art. L. 1427-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Transparence des contenus promotionnels des collectivités territoriales sur Internet

La Commission est saisie de l’amendement CL1193 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Amendement de suppression.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 19 bis est supprimé et l’amendement CL622 de M. Robin Reda tombe.

Article 19 ter
(art. L. 2113-2 et L. 2113-5 du code général des collectivités territoriales)
Consultation obligatoire des comités techniques des communes préalablement à la délibération des conseils municipaux relative à la création d’une commune nouvelle

La Commission examine l’amendement CL1224 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il est défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 19 ter modifié.

Article 19 quater
(art. L. 2121-30-1 du code général des collectivités territoriales)
Faculté pour le maire de célébrer un mariage dans tout bâtiment communal sur le territoire de la commune

La Commission est saisie des amendements identiques CL1194 du rapporteur, CL974 de M. Stéphane Baudu et CL1058 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1194 est défendu.

M. Stéphane Baudu. L’amendement CL974 également.

M. Sacha Houlié. De même que l’amendement CL1058.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 19 quater est supprimé.

Chapitre II
Fluidifier les relations entre l’État et les collectivités territoriales

Avant l’article 20

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL1228 du rapporteur modifiant l’intitulé du chapitre II, qui est ainsi rédigé.

Article 20
(chapitre VI [nouveau] du titre unique du livre premier de la première partie du code général des collectivités territoriales) : « rescrit » du préfet

La Commission adopte successivement l’amendement de précision CL1198 et l’amendement de cohérence CL1199 du rapporteur.

Elle examine ensuite les amendements identiques CL1195 du rapporteur et CL1059 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1195 est défendu.

M. Sacha Houlié. De même que l’amendement CL1059.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte ces amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL505 de M. Lionel Causse.

M. Lionel Causse. L’objectif de cet amendement est d’inclure un délai pour la prise de décision : si la prise de position formelle de l’État envers une collectivité ne lui est pas parvenue, l’avis sera considéré comme positif, ce qui me semble aller dans le bon sens pour les élus locaux, toujours en attente de réponses.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Cet amendement reviendrait à modifier la nature du rescrit. Bien souvent, la demande portera sur la façon de rédiger telle ou telle délibération et la réponse, à la différence de ce qui se passe pour le rescrit fiscal, ne sera pas « oui » ou « non ». En l’occurrence, dans le cadre de ce rescrit normatif que nous souhaitons créer, le silence ne vaut pas acceptation. Et combien même, cela n’empêcherait pas le préfet d’effectuer son contrôle de légalité et de déférer ou un tiers de porter la délibération devant le tribunal administratif. Si le silence vaut acceptation, j’imagine déjà le contrôle du juge sur la délibération ou l’acte en question ! Nous avons longuement débattu de cette question au Sénat et les réécritures auxquelles nous sommes parvenus sont satisfaisantes. D’où ma demande de retrait.

M. Lionel Causse. Je vous fais confiance, monsieur le ministre, et je retire l’amendement puisque le débat a eu lieu au Sénat.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Quelle valeur sera accordée à la réponse ministérielle au rescrit administratif, par comparaison avec le rescrit fiscal ?

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Elle s’imposera au contrôle de légalité, d’où la base légale que nous lui conférons. Soyons clairs : il s’agit d’une expérimentation, qui devra être évaluée au bout de quelques années.

Le niveau préfectoral implique également la consultation, notamment, des directions départementales des finances publiques, ce qui est plutôt une bonne chose. Seule limite : le rescrit fiscal relève de la relation entre l’administration et, par exemple, le citoyen Morel-À-L’Huissier ; avec le rescrit normatif, n’importe quel tiers pourra continuer d’attaquer une décision, un arrêté ou une délibération au tribunal administratif. La différence est tout de même notable, d’où l’écriture différente.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CL214 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea. Je le retire suite aux explications qui viennent d’être données.

L’amendement CL214 est retiré.

La Commission adopte l’article 20 modifié.

Article 20 bis A
Transmission d’information du préfet aux maires concernés en cas d’activation du système d’alerte et d’information aux populations

La Commission examine l’amendement CL239 de M. Raphaël Schellenberger.

M. Raphaël Schellenberger. Les présidents de conseils départementaux doivent être mis dans la boucle du système d’information lorsque les événements en cause concernent notamment les services départementaux d’incendie et de secours, qu’ils président souvent.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait. Le ministre le confirmera, mais je crois que le président du conseil départemental est toujours informé en cas de situation de crise.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je demande également le retrait : cet article est issu d’un amendement sénatorial suite à la séquence Lubrizol ; dans le cadre du premier retour d’expérience sur cette affaire, le ministère de l’intérieur travaille en ce moment sur la façon dont toutes les informations circulent.

De fait, les maires disposent d’une information plus précise que les présidents de conseils départementaux mais ceux-ci président souvent les conseils d’administration des SDIS, comme ce fut mon cas. Autrement dit, ils sont au courant.

En lien avec le ministère de l’intérieur, je vous proposerai pour la séance publique une rédaction satisfaisante.

M. Raphaël Schellenberger. L’essentiel, ce sont les maires, car la défaillance est patente : en début de mandat ou lors d’un changement, on a beau donner la liste des priorités en matière d’informations, les choses ne vont pas de soi. Pour les communes qui ont des liens particulièrement étroits avec la gendarmerie de secteur ou le SDIS, la situation est à peu près satisfaisante mais cela tient davantage à la bonne volonté des personnes qu’à un système organisationnel mettant en avant l’information du maire et de sa population. Mais comme il n’est pas question de faire de la politique politicienne, je retire l’amendement et j’ai hâte de connaître le résultat de vos travaux en séance publique.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL1200 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Les amendements rédactionnels et de précision ont leur charme mais, pour les mêmes raisons que pour l’amendement de M. Schellenberger, je vous demande de bien vouloir retirer celui-ci.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL440 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Cet amendement vise à rendre effective l’information des automobilistes concernant la décision du préfet de procéder à une circulation alternée en cas d’épisode de pollution, tant il est vrai que la communication actuelle est aléatoire et imparfaite. Le représentant de l’État dans le département est censé transmettre sans délai aux maires concernés les modalités de restriction ou de suspension de la circulation des véhicules les plus polluants ; le maire peut alors informer immédiatement les habitants de sa commune. Force est de constater qu’aujourd’hui les moyens d’information de la population sont insuffisants. Les mesures sont prises dans l’urgence, la veille pour le lendemain. Il n’est pas rare que les automobilistes soient informés de la restriction de la circulation sur les panneaux signalétiques des voies, alors qu’il est à l’évidence trop tard. La municipalité disposant de moyens de communication de proximité avec les usagers, nous vous proposons d’associer le maire à ce dispositif d’information.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je ne pense pas que l’inscription de cette obligation dans la loi soit nécessaire et de nature à améliorer le dispositif. Demande de retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 20 bis A sans modification.

Article 20 bis
(titre II [nouveau] du livre Ier de la première partie du code général des collectivités territoriales)
Conférence de dialogue entre les collectivités territoriales et l’État

La Commission examine les amendements identiques CL1196 du rapporteur, CL680 de M. Vincent Bru et CL1112 de M. Stéphane Baudu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous propose de supprimer la conférence de dialogue entre les collectivités territoriales et l’État, mise en place par le Sénat.

M. Vincent Bru. Même objectif.

M. Stéphane Baudu. L’amendement CL1112 est défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. C’était une bonne idée défendue au Sénat par le ministre et président Bockel ; toutefois, même après avoir beaucoup travaillé avec lui, nous avons bien du mal à lui donner une réelle consistance. Sa suppression me paraît préférable.

M. Alain Perea. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire ayant été saisie pour avis de cet article, je note que dans tous les débats – vous y avez souvent fait référence, monsieur le ministre – les maires se sont interrogés sur les relations concrètes, dans les territoires, avec les services de l’État.

La proposition du sénateur Bockel est peut-être trop complexe, comme il l’a lui-même reconnu, mais nous pensons – c’était le sens de notre amendement CL179, qui vraisemblablement tombera – que cette question doit être approfondie. Je suis certain que tous mes collègues ici présents ont reçu la visite d’un maire pour leur faire part des difficultés de relations avec les services de l’État, en particulier quand il s’agit d’obtenir des réponses. Peut-être la loi 3D ou un autre véhicule législatif nous fourniront l’occasion de creuser le problème.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. J’ai souhaité qu’un dialogue s’ouvre dans chaque département avec les délégués départementaux du Défenseur des droits : ils sont souvent à même de voir ce qui se passe. La relation avec l’administration n’est pas toujours facile : qui écoute qui au sein de l’administration départementale ? Ces délégués sont très utiles ; or, souvent, les préfets ne les considèrent pas. Il aurait été utile que ceux-ci soient obligés, chaque année, de faire le point avec ceux-là afin d’évaluer les difficultés et les dysfonctionnements de l’administration départementale.

M. Bruno Questel, rapporteur. M. Perea y a fait lui-même allusion : la déconcentration est un des trois D de la loi du même nom… Ce sera l’occasion d’y revenir.

Quant aux amendements que M. Morel-À-L’Huissier aurait pu défendre, ils s’apprêtent à tomber.

M. Raphaël Schellenberger. Je comprends la suppression d’un dispositif qui semble complexe. Je ne me permettrai pas de penser que la réflexion du ministre et président Bockel est compliquée…

M. Guillaume Vuilletet. Elle est subtile !

M. Raphaël Schellenberger.… mais elle a pointé un élément important au sein des territoires.

J’entends que la loi 3D pourrait présenter des réflexions plus structurées et mieux pensées en la matière, mais nous serons après les élections municipales ; une réflexion d’ordre managérial devrait être engagée par le corps préfectoral à cette occasion, ou juste après, sur la stratégie du renouvellement de la représentation des maires dans les différentes instances départementales. Souvent, des listes sont soutenues par l’association départementale des maires, je songe également à la CDCI, la commission départementale de coopération intercommunale, et les maires sont parfois désignés d’une façon qu’eux-mêmes jugent un peu opaque.

Après les municipales, les préfets pourraient s’engager dans une médiation afin d’expliquer le rôle de chacune des instances et solliciter des candidatures auxquelles les responsables d’une association départementale d’élus n’auraient pas pensé : il peut arriver, dans les mois qui suivent les élections, d’oublier de lister des élus qui pourraient être intéressés. Peut-être quelque chose devrait-il être fait, qui ne relève pas d’une disposition législative, peut-être ni même d’une circulaire, mais de la simple volonté politique.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 20 bis est supprimé et les amendements CL179 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, CL157 de M. Paul-André Colombani, CL845 de M. Paul Molac, CL870 et CL869 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier, CL651 de M. Jérôme Nury et CL243 de M. Paul-André Colombani tombent.

Article 21
(art. L. 102-13 du code de l’urbanisme)
Correction d’une erreur de coordination de la loi ELAN

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 21 bis
(art. L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime)
Composition des commissions départementales de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers

La Commission est saisie de l’amendement CL1197 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement de suppression est défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 21 bis est supprimé.

Article 22
Habilitation à légiférer par ordonnance sur la publicité des actes des collectivités territoriales

La Commission examine l’amendement CL795 du Gouvernement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Il est défendu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 22 modifié.

Article 22 bis
(art. L. 1212-1 du code général des collectivités territoriales)
Modalités d’élection du président et des vice-présidents du Conseil national d’évaluation des normes

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 22 ter
(article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales)
Élargir les compétences du Conseil national d’évaluation des normes

La Commission examine l’amendement CL1221 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il est défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 22 ter est supprimé.

Article 22 quater
(art. L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales)
Effet des avis du Conseil national d’évaluation des normes

La Commission examine l’amendement CL1202 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il est défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 22 quater est supprimé et l’amendement CL625 de M. Robin Reda tombe.

Chapitre III
Simplifier le droit applicable aux élus locaux

Article 23
(art. L. 141-1, L. 141-2 du code de l’action sociale et des familles [abrogés], art. 375-9-2 du code civil, art. L. 1111-2, L. 2144-2, L. 2511-1-1, L. 5211-10-1, L. 5211-39-1, L. 5217-9, L. 5218-10, L. 5219-1, L. 5219-7, L. 5741-1, L. 5741-2 du code général des collectivités territoriales, art. L. 2112-4 du code des transports et art. L. 223-3 du code forestier)
Suppression de l’obligation de créer diverses instances et d’établir divers documents

La Commission examine les amendements identiques CL1203 du rapporteur et CL681 de M. Stéphane Baudu.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1203 est défendu.

M. Stéphane Baudu. L’amendement CL681 également.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte ces amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL962 de Mme Sandrine Le Feur.

Mme Catherine Kamowski. Il est défendu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Retrait ou avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

Mme Catherine Kamowski. N’étant pas la première signataire, je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL96 de Mme Émilie Guerel.

Mme Émilie Guerel. Cet amendement vise à inscrire dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) les principes fondamentaux de la participation citoyenne au niveau local : garantir l’accessibilité aux informations, l’impartialité et la loyauté de l’organisateur, assurer le dépôt des observations de tous les participants et des délais raisonnables au public pour s’exprimer afin que chacun puisse prendre part au processus et donner des informations sur les suites projetées.

Situation paradoxale : alors que nous disposons d’un cadre législatif particulièrement riche, la plupart des innovations en matière de participations locales sont organisées hors de tout cadre légal. Cette situation n’est pas pleinement satisfaisante car malgré la sincérité et la qualité des démarches entreprises par les collectivités, elles ne peuvent faire l’objet d’aucun recours de la part des citoyens qui souhaiteraient en contester le déroulement ou le résultat.

Il semble désormais indispensable d’encadrer les différents processus de consultation, non pour brimer les collectivités mais au contraire pour les sécuriser sur le plan juridique et crédibiliser leurs démarches participatives tout en accordant dans le même temps des garanties réelles aux participants.

L’enjeu est que le législateur fixe un cadre, le droit de la démocratie participative pouvant être rattaché aux droits civiques et aux garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques, sans toutefois imposer de normes inutiles.

Je propose donc de définir ces principes fondamentaux et de laisser ensuite aux collectivités et aux élus locaux la liberté de choix des outils.

M. Bruno Questel, rapporteur. Votre amendement fait suite à votre rapport budgétaire pour avis et je vous remercie pour votre travail. Je ne saurai donc émettre un avis de retrait ni un avis défavorable…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Madame Guerel, vous avez en effet commis un rapport que vous nous aviez d’ailleurs présenté dans cette enceinte.

Je m’interroge simplement sur l’impact potentiel de votre proposition de rédaction de l’alinéa 5 : « Ils peuvent associer le public… ». Je vous propose un avis favorable à condition que nous réfléchissions d’ici la séance publique à une rédaction un peu différente. Le volet « démocratie participative » est très important, mais la définition d’un cadre légal n’est pas obligatoire : c’est comme si vous inscriviez dans une loi organique que les députés s’obligent à rendre des comptes rendus de mandat pendant leur mandat… Il n’en reste pas moins que certaines collectivités ont besoin que la loi soit prescriptrice. Toutefois, cela relève-t-il forcément de la loi ou d’autre chose ?

Je souhaite donc m’assurer de la rédaction – je serai honnête avec vous, je n’ai pas eu le temps de m’en aviser – mais j’imagine bien le chemin que vous proposez. Avis de sagesse ou favorable.

M. Raphaël Schellenberger. Nous sommes en train de dériver et d’oublier l’intérêt de cette loi et son objet même : il s’agit bien de simplifier les choses pour les élus et de rétablir la démocratie participative locale dans son environnement.

Nous comprenons bien que la démocratie nationale ou locale s’articule à partir de différents processus de décision : la démocratie directe – référendum local, consultations –, la démocratie d’association, consultative – conseils de développement, etc. – et la démocratie représentative à qui revient in fine la prise de décision, que les deux premières auront contribué à mûrir. Reste que quelqu’un doit en assumer la responsabilité, et c’est là le propre de l’élu : une décision, quand bien même elle aura été élaborée dans le cadre de la démocratie participative ou directe, ne satisfera jamais tout le monde.

Faire confiance aux élus, cela suppose aussi qu’ils puissent faire des erreurs. Si certains se risquent à ignorer la population, eh bien, tant pis pour eux, pour leur réélection et pour la réalisation de leur projet : s’ils ne jugent pas nécessaire d’associer la population, libre à eux, ils en paieront les conséquences !

Méfions-nous d’intentions sincères, louables, opportunes même – la demande de la population est réelle – qui iraient à l’encontre des principes de liberté auxquels nous tenons particulièrement, notamment, la liberté des élus. L’association de la population relève de leur responsabilité, de même que la définition des modalités de cette association.

M. Dominique Potier. Je ne vois rien dans l’amendement de notre collègue Guerel qui soit de nature à entraver la pleine responsabilité des élus de prendre la décision d’associer les citoyens, qui est le propre de la démocratie représentative.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. M. Schellenberger a tort de considérer que le débat dérive. Ma prudence s’explique par une seule raison, que tout un chacun peut comprendre : je ne veux pas que nous écrivions des choses qui, en droit, pourraient donner prise à du contentieux. L’élu de bonne foi commet une délibération sur tel ou tel sujet, nous prévoyons dans le texte toute une série de fondements légaux, parfaitement louables dans l’absolu, mais n’oublions pas que les empêcheurs de tourner en rond ne manqueront pas de s’en servir pour créer du contentieux.

Il n’y a pas de raison pour que l’on n’avance pas en la matière. Si la députée Guerel en est d’accord, je lui propose de retirer son amendement, comme nous l’avons fait sur d’autres sujets plus sensibles, puis de le retravailler avec le directeur général des collectivités locales ou les administrateurs afin de le sécuriser juridiquement afin de le proposer en séance publique. Ainsi, conformément à ce que souhaite le Gouvernement, nous n’écrirons rien qui soit susceptible d’entraîner des contentieux.

Enfin, monsieur Potier : pour ce qui est de la démocratie représentative, allons-nous inscrire dans une loi organique que les députés doivent dire bonjour à leurs électeurs et leur rendre des comptes ? Il faut influer sur la façon dont on rend des comptes aux électeurs sans que cela soit absolument normatif : que se passera-t-il lorsqu’un maire refusera de dire bonjour à ses électeurs ou de rendre des comptes ?

M. Bruno Questel, rapporteur. Je m’engage à accompagner la démarche de Mme Guerel auprès du directeur général des collectivités (sourires).

Mme Émilie Guerel. Je retire donc mon amendement et je m’engage à le retravailler d’ici à la séance publique afin de nous prémunir contre tout risque de contentieux.

L’amendement CL96 est retiré.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous prenons note de l’engagement du Gouvernement, du rapporteur et de Mme Guerel !

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL182 de Mme Monica Michel, CL802 de M. Dominique Potier, CL1089 de Mme Stella Dupont, CL963 de Mme Sandrine Le Feur, CL1204 du rapporteur et du sous-amendement CL1229 de M. Sacha Houlié.

Mme Catherine Kamowski. L’amendement CL182 propose de maintenir le caractère obligatoire des conseils de développement afin de permettre une plus large diffusion des projets de territoire et des documents de prospective et de planification.

Ces assemblées de citoyens bénévoles, consultées sur ces derniers ainsi que sur la conception et l’évaluation des politiques locales de promotion du développement durable, bénéficient d’un cadre souple, leurs modalités de fonctionnement étant définies localement. Dès lors, elles participent au développement du dialogue citoyen que nous appelons tous de nos vœux.

M. Dominique Potier. On dit pis que pendre de la loi NOTRe, mais elle contenait quelques pépites, notamment, l’amendement que j’avais défendu contre l’avis des rapporteurs visant à ce que la création des conseils de développement ne soit pas simplement une faculté mais une obligation dans les EPCI.

J’avais milité pour que ce soit le cas pour tous les EPCI mais nous avions finalement accepté un compromis sous la forme d’un seuil de 20 000 habitants, que mon amendement CL802 propose d’abaisser à 15 000. Je regrette profondément de ne pas avoir été plus combatif alors mais votre loi nous offre heureusement une deuxième chance, monsieur le ministre, pour disposer d’une véritable république des territoires, de tous les territoires, de façon égale.

Si la démocratie participative, à travers des conseils de développement, est bonne pour les agglomérations, les métropoles et les EPCI importants, elle l’est aussi pour ceux qui maillent notre espace rural, nous pouvons en témoigner. C’est une réussite, peu coûteuse, et alors que le Gouvernement organise, ici, un grand débat, là, une consultation citoyenne, il serait malvenu de comparer la démocratie participative à un exercice de politesse ou à un compte rendu de mandat à vocation électorale.

Substantiellement, la démocratie représentative a besoin de s’appuyer sur une société civile organisée, éclairante, qui ne se situe pas sur le même terrain mais qui peut contribuer à la bonne santé de notre vie politique.

Mme Catherine Kamowski. Les amendements CL1089 et CL963 visent à revenir sur la suppression des conseils de développement dans les EPCI de plus de 20 000 habitants.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je souhaite le retrait de ces amendements au bénéfice de mon amendement CL1204 qui rétablit un dispositif juridique cohérent pour les conseils de développement, le cas échéant sous-amendé par le sous-amendement CL1229 de M. Houlié.

M. Sacha Houlié. Il s’agit de rétablir le caractère obligatoire des conseils de développement pour les collectivités les plus peuplées, celles qui comptent plus de 50 000 habitants, afin de répondre à une forte demande de démocratie participative, comme l’a dit ma collègue Guerel, et de satisfaire ainsi la plupart des sollicitations.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vais vous parler très franchement et le Parlement décidera comme il le souhaitera.

Moi qui suis un élu local propulsé au Gouvernement pendant une période indéterminée, je remarque que l’on a bien du mal à faire confiance aux élus locaux. Je le répète : demande-t-on aux députés de s’assurer qu’ils ont bien consulté leurs administrés avant de voter un amendement ou une proposition de loi et qu’ils sont bien connectés à la société civile au sein de leur circonscription ? Évidemment non. On n’y songe pas pour les députés, mais il faudrait le faire pour les élus locaux ! Je vous le dis comme je le pense : je trouve cela plutôt curieux…

Néanmoins, le Sénat est allé trop loin en supprimant la base légale du conseil de développement et je comprends donc certains amendements. Je répète la position du Gouvernement : il n’est pas proposé de supprimer les conseils de développement, contrairement à ce que j’ai pu lire ici ou là dans des lettres que m’ont envoyées un grand nombre de députés et de sénateurs – lettres d’ailleurs identiques, à croire qu’un assistant parlementaire a dû beaucoup se partager –, mais simplement de les rendre facultatifs, en permettant aux conseils communautaires de les activer ou non, d’en définir la méthodologie, la composition, la fréquence de réunion. Certains les appelleront conseil économique et social local, d’autres choisiront un autre nom, d’autres encore ont décidé de conserver le périmètre du pays et n’en auront qu’un, mutualisé à l’échelle de plusieurs EPCI, certains conseils départementaux se sont aventurés à proposer une comitologie départementale : bref, globalement, tout se passe bien sans qu’il soit nécessaire d’intervenir.

Le Sénat, me semble-t-il, a tort de supprimer la base légale car, qu’il soit obligatoire ou non, lorsque les EPCI ont décidé d’activer le conseil de développement, il faut qu’une base légale le définisse a minima, ne serait-ce que pour engager des moyens financiers – frais de déplacement ou que sais-je : il n’est tout de même pas inutile de prévoir quelques modalités à cet effet dans le code général des collectivités territoriales si l’on veut engager un certain nombre de choses. Mais forcer le dialogue en rendant obligatoire l’institution de ces conseils relève du droit virtuel. Bon nombre d’EPCI ont un conseil de développement, parce que c’est obligatoire, mais seulement sur le papier. Certes, il y a bien une délibération qui le crée, mais qui peut s’en satisfaire ? Nous savons très bien qu’il faut y mettre un peu d’énergie : c’est cela, la vraie vie… C’est comme si l’on obligeait les députés à faire campagne pour être réélus… L’élu local que je suis trouve cela très étonnant.

Les conseils de développement occupent beaucoup de place dans les conversations et dans les amendements ; c’est donc qu’il y a une raison ; mais d’autres mesures de ce projet de loi, qui ont des impacts autrement plus lourds en termes financiers et de gouvernance, n’ont pas suscité autant d’amendements. C’est ainsi, j’entends rester humble, je ne me battrai pas, mais je garderai ma liberté de pensée, comme dirait l’autre : la simplification, dans notre pays, est compliquée. Tout le monde parle de liberté et de confiance à l’endroit des élus locaux, mais cela a bien du mal à se concrétiser dans les faits.

Avis favorable au seul amendement du rapporteur, qui revient à la rédaction initiale du texte du Gouvernement, laquelle a été caricaturée : il ne s’agit pas de supprimer les conseils de développement, comme je l’ai lu, comme si nous n’y croyions pas et qu’ils ne serviraient à rien. Cela m’agace beaucoup : nous n’avons jamais rien dit de tel. Nous disons simplement qu’il existe une base légale, et que le conseil communautaire aura toute latitude pour activer, ou pas, le conseil de développement. Mieux, essayons de faire en sorte que le jeudi après-midi n’ignore pas ce qui a été fait le mercredi matin, car c’est précisément le sens du pacte de gouvernance que vous avez voté hier : l’EPCI peut ou non activer le processus. Nous avons tellement confiance dans le pacte de gouvernance et dans les élus que nous sommes déjà en train de l’écrire ! Autant rédiger un pacte type qui deviendra un article du CGCT, et tout le monde pourra en faire un joyeux copier-coller, et nous serons sûrs que ce sera pareil partout…

Je l’ai dit dans mon propos liminaire : il y a la liberté, il y a l’égalité. Si vous voulez à tout prix une égalité territoriale, cela se fera fatalement au prix d’une certaine liberté. C’est un vrai choix. Je ne souhaite pas la suppression des conseils de développement, je veux seulement qu’il y ait un droit d’option. On a beau jeu de me reprocher au Congrès des maires de France que le Gouvernement multiplie les normes et les contraintes ; j’ai désormais toute l’histoire des conseils de développement à raconter… pour le coup, les élus se rendent bien compte que c’est un peu bizarre.

Effectivement, monsieur Potier, bon nombre d’instruments de démocratie participative ont été imaginés, il fut un temps, dans des lois prescriptives. Voyez l’exemple des conseils de quartier dans les villes, notamment les plus grandes. C’est la loi qui a permis de les mettre en place. À supposer qu’un amendement soit adopté pour les rendre non obligatoires, quelle grande ville les supprimerait ? Aucune ! Le vrai combat en la matière est culturel et non juridique. Je vous rejoins bien volontiers de ce point de vue, comme je rejoins Mme Guerel dans son rapport : le vrai combat, c’est la culture de la démocratie, du partage, etc. Aujourd’hui, vous pouvez supprimer la base légale des conseils de quartier, aucun maire ne se risquerait à les supprimer, car ils font désormais partie des pratiques. Bon courage au premier maire qui s’y hasarderait : cela se verra dans le journal du coin !

Je remercie M. Houlié pour sa patience : le rôle de responsable de texte est ingrat… Son sous-amendement s’emploie à faire converger un certain nombre de demandes, issues d’ailleurs de tous les groupes si j’en crois les lettres que j’ai reçues. Sagesse, en l’occurrence, mais nous avions l’occasion de montrer que les choses avançaient.

M. Guillaume Vuilletet. Vous faites une comparaison avec le statut de député, monsieur le ministre, mais il faut poser la question du périmètre. Si nous devions nous concerter avec tous ceux qui sont concernés par les décisions que nous prenons, ce serait sur le plan national qu’il faudrait le faire ; or, en l’occurrence, le périmètre est local.

Par ailleurs, s’agissant du climat ou de l’environnement, l’État invente lui-même un mode participatif.

Enfin, je suis d’accord avec vous : le pouvoir national qui voudra supprimer ces nouvelles instances aura bien du mal à le faire.

M. Dominique Potier. Sur la forme, monsieur le ministre, vous semblez mettre en cause le fait que des courriers et des amendements identiques aient été diffusés.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Il n’y a aucune mise en cause : c’est un constat.

M. Dominique Potier. Je n’entends pas la même indignation lorsqu’il s’agit d’un lobby économique, territorial ou communautaire. C’est d’une telle banalité…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Pour ce qui me concerne, si.

M. Dominique Potier. Quoi qu’il en soit, je ne me sens pas concerné. Je m’emploie à développer une prose singulière, mais il m’est arrivé de reprendre un plaidoyer existant et de le faire mien, ce qui est assez banal.

Il est d’autant moins bienvenu de s’en émouvoir que les émetteurs sont des bénévoles, des personnes qui croient dans la démocratie, qui l’expriment et qui font partager leur aspiration dans tous nos rangs. Vous avez d’ailleurs défendu cette qualité dans votre mouvement politique, qui n’est autre que le caractère transpartisan, et vous devriez vous en réjouir.

Sur le fond, à considérer à chaque fois la démocratie participative comme le bon exercice de consultation des citoyens dans une visée peu ou prou électorale, vous la caricaturez un peu. J’ajoute que la culture participative, cela se cultive : la Constitution, nos lois protègent la vie syndicale, nous avons un Conseil économique, social et environnemental, des chambres consulaires, autant de déclinaisons de la puissance des corps intermédiaires dans l’organisation des forces vives sur un territoire. Il ne s’agit pas de contredire la démocratie représentative, mais de la consolider et d’entraîner l’ensemble de la société face aux défis qui sont les nôtres.

M. Alain Perea. Je partage en tout point les propos de M. le ministre. Je tiens à insister sur le sous-amendement CL1229, que je soutiendrai, alors que certains se complaisent dans le rôle de gardiens des progrès passés : si les conseils de développement ont marqué en leur temps un réel progrès, la société a depuis évolué : avec les réseaux sociaux, les nouveaux modes de structuration, les gens sont désormais capables de se mobiliser à une vitesse incroyable sur une action collective, pour se disperser tout aussi soudainement sitôt que le sujet ne les intéresse plus. Ce sous-amendement invite les élus à s’interroger sur la manière de communiquer avec la société civile, sur la démocratie participative, et non à s’arc-bouter sur un outil qui a certes bien fonctionné – nous n’allons pas rouvrir le débat sur son utilité ou non –, mais qui a fait son temps et doit évoluer. Je suis intimement convaincu que dans les mois et années à venir, nous en récolteront les fruits et que nous en parlerons bien plus que des conseils de développement.

Mme Catherine Kamowski. Même si je souscris à ces propos, les conseils de développement sont aussi une des formes de l’expression citoyenne : ils visent plus à défendre le droit d’expression des citoyens que le droit des maires à ne pas être embêtés par l’expression citoyenne…

J’ai bien compris que la base légale de ces conseils était maintenue, libre ensuite aux maires et aux intercommunalités de les utiliser ou non, mais quid d’une intercommunalité où une majorité d’élus serait peu sensible à la démocratie tout court et encore moins à la démocratie citoyenne ? Je veux bien que ce soit de la politique-fiction, mais de tels cas doivent également pouvoir être envisagés : si la base légale n’est pas activée, les citoyens perdront une forme d’expression de leurs droits et de leurs volontés. Il en existe certes d’autres, qu’Alain Perea a rappelées, et elles seront d’autant plus utilisées dans le cas d’espèce.

Nous maintenons donc l’amendement CL182.

M. Raphaël Schellenberger. J’ai l’impression que la démocratie participative, c’est un peu comme M. Jourdain : tout le monde en fait sans le savoir, à sa façon. Il n’y a pas qu’une seule manière, en dehors des institutions, d’écouter les gens, leurs idées, leurs remarques sur le fonctionnement de ces dernières et les décisions qu’elles prennent. En quelque sorte, l’imposition d’un seul modèle de démocratie participative constituerait une contrainte inutile.

J’ai également beaucoup de mal, madame Kamowski, à considérer que les élus seraient peu sensibles à la question de la démocratie.

Mme Catherine Kamowski. Ce n’est pas ce que j’ai dit.

M. Raphaël Schellenberger. C’est pourtant ce que vous venez de dire textuellement !

Si tel est le cas alors même qu’ils en sont le fruit, libre à elle de s’occuper d’eux ! C’est aussi pour cette raison que le mandat est limité et qu’après six ans d’exercice, les élus locaux se confrontent à nouveau aux suffrages le cas échéant. Il faut leur faire confiance pour associer la population d’une façon ou d’une autre, inédite ou non, en leur laissant la liberté de s’organiser. C’est incontournable, mais il est difficile d’imaginer que l’on puisse contraindre l’imaginaire de la démocratie participative locale avec un modèle unique et uniforme.

M. Sacha Houlié. Sans prétendre vouloir réaliser une synthèse, les propos de M. Schellenberger sont intéressants. La démocratie participative est protéiforme et peut effectivement s’exprimer de différentes manières, à ceci près qu’elle s’organise, comme nous l’avons constaté, y compris sur le plan étatique : lorsque l’on décrète la Convention citoyenne pour le climat, c’est au CESE que l’on délègue l’organisation de la démocratie participative à travers des tirages au sort et la définition de panels représentatifs. La base légale implique l’organisation de la démocratie participative.

Son caractère obligatoire suscite toutefois des interrogations compte tenu de la simplification que nous devons promouvoir, notamment avec ce texte, et qui reste le fil conducteur de ce chapitre III. Avec ce sous-amendement, nous avons voulu circonscrire le caractère obligatoire aux plus grandes intercommunalités, précisément là où le citoyen a l’impression que la décision est la plus éloignée de lui. Le nombre de communes qui les compose y est élevé mais le maire, à travers la conférence des maires – que nous avons par ailleurs rendue obligatoire –, pourra se faire le porte-parole de ses mandants et rapporter le sentiment d’abandon de la population si elle estime ne plus avoir voix au chapitre. D’où le caractère obligatoire, dans les plus grandes intercommunalités, soit celles de plus de 50 000 habitants, des conseils de développement qui restent un des outils de la démocratie participative.

M. Vincent Bru. J’appartiens à un territoire qui possède depuis fort longtemps un conseil de développement et je peux témoigner du travail qui y a été réalisé, des propositions concrètes qui y ont été formulées et des rapports qui ont enrichi la réflexion et la prise de décision des élus.

Selon nous, le conseil de développement devrait être en effet obligatoire pour les grandes intercommunalités, les EPCI à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants. D’après mes calculs, 268 d’entre eux qui sont concernés. Pour les autres, environ 462 intercommunalités, la mise en place de cette instance resterait facultative et laissée à l’appréciation des élus. Mais à partir d’un certain seuil, il me semble normal de prévoir une représentation de la société civile afin d’éclairer la décision des élus, d’accroître leur crédibilité et de répondre à cette crise de confiance que l’on constate malheureusement aujourd’hui.

Mme Catherine Kamowski. Monsieur Schellenberger, je me suis seulement interrogée sur ce qu’il adviendrait si certains élus d’EPCI étaient peu sensibles à la notion de démocratie ; en aucun cas je n’ai dit que les élus en général étaient peu sensibles à la démocratie. Je suis d’ailleurs certaine, monsieur Schellenberger, que vous faites partie de ceux qui y sont le plus attachés.

La Commission rejette les amendements CL182, CL802, CL1089 et CL963.

Elle adopte le sous-amendement CL1229, puis l’amendement CL1204 ainsi sous-amendé.

En conséquence, les amendements CL471 de Mme Cécile Untermaier, CL216 de M. Alain Perea, CL562 de M. Yves Daniel, CL847 de M. Bertrand Pancher, CL698 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, CL846 de M. Paul Molac, CL972 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert, CL161 de M. Didier Le Gac, CL683 de M. Jean-Noël Barrot, CL42 de M. Matthieu Orphelin, CL277 de M. Frédéric Reiss, CL299 de Mme Valérie Bazin-Malgras, CL519 de M. Francis Vercamer, CL682 de M. Jean-Noël Barrot, CL1117 de Mme Anne Blanc, CL115, CL118 et CL117 de Mme Sandra Marsaud, CL27 et CL26 de Mme Cendra Motin, CL114 de Mme Sandra Marsaud, CL851 de Mme Sarah El Haïry, CL813 de M. Dominique Potier, CL421 de Mme Martine Wonner, CL960 de Mme Nicole Dubré-Chirat, CL166 de M. Didier Le Gac, CL1060 de M. Sacha Houlié, CL561 de M. Yves Daniel, CL308 de M. Erwan Balanant, CL961 de Mme Nicole Dubré-Chirat, CL865 de M. Jean-François Cesarini, CL165 de M. Didier Le Gac, CL217 de M. Alain Perea et CL807 de M. Dominique Potier tombent.

La Commission examine l’amendement CL215 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Loin de moi l’intention de remettre une pièce dans la machine, car nous avons eu de longs débats ce matin à propos de l’égalité hommes-femmes, mais j’ai demandé au directeur général de la communauté d’agglomération du Grand Narbonne si, d’après lui, certains des rapports qui doivent être rendus par l’intercommunalité sont inutiles ou redondants. Parmi ceux qu’il m’a cités, il y en a deux qui portent sur l’égalité hommes-femmes : l’un avant le débat d’orientation budgétaire, l’autre en vertu de la loi du 26 janvier 1984. L’objectif de l’amendement CL215 est d’en supprimer un. Il s’agit non pas de rouvrir le débat sur l’égalité hommes-femmes, mais d’apporter une simplification – en l’espèce, en supprimant un rapport inutile.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je demande moi aussi le retrait de cet amendement qui doit être retravaillé. D’un côté vous facilitez les choses, mais de l’autre vous proposez de créer un comité de suivi des rapports au sein de chaque intercommunalité. Je pense – j’en suis même sûr – qu’on peut tout à fait imaginer une simplification plus importante encore, par exemple en rendant un rapport facultatif sans être obligé de créer un comité de suivi des rapports qu’on a supprimés… (Sourires.)

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Je crois que je viens de défendre l’amendement CL216 à la place du CL215… que je retire ! (Sourires.)

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 23 modifié.

Après l’article 23

La Commission examine l’amendement CL482 de Mme Cécile Untermaier.

M. Dominique Potier. L’amendement CL482 vise à expliciter une possibilité qui mériterait d’être généralisée, à savoir le fait d’organiser des réunions publiques après l’adoption du budget de la ville. J’imagine déjà les réactions qu’il va susciter. Quoi qu’il en soit, je maintiens, une fois de plus, que les conseils de développement peuvent être gardiens du temps long et des indicateurs de développement humain : cela me paraît une véritable perspective, de nature à leur redonner du sens. Toutes les demandes que présentera le groupe Socialistes et apparentés viseront, contre vents et marées, à consolider la démocratie participative.

M. Bruno Questel, rapporteur. Monsieur Potier, j’ai reçu la Coordination nationale des conseils de développement, qui reconnaît elle-même que plus de 40 % des conseils n’ont pas été mis en place, alors que c’était obligatoire. En outre, elle est très satisfaite du seuil de 50 000, que nous venons d’adopter. Je pense donc que la disposition que nous venons d’adopter va dans le bon sens. Quant à votre amendement, je vous le dis en toute franchise, vous devriez le retirer : la libre administration des collectivités locales est une donnée cardinale – je n’en dirai pas plus.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Monsieur Potier, si nous venons sur le terrain des principes, celui dont procède votre amendement illustre clairement ce que je disais tout à l’heure : en réalité, on veut écrire dans la loi que les élus peuvent organiser des réunions avec leurs habitants.

M. Vincent Bru. Eh oui ! C’est ahurissant !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Comme je respecte le Parlement, je ne me moquerai jamais d’un amendement, quel qu’il soit, mais enfin… Je me mets à la place d’un maire qui lirait cela. Encore une fois, est-ce que, vous, vous accepteriez que l’on écrive dans une loi organique que les députés se doivent d’organiser des réunions avec leurs concitoyens pour rendre compte de leur mandat ? À ce compte-là, il faudrait prévoir un sous-amendement pour demander aux élus locaux de bien vouloir être aimables avec leurs concitoyens. (Sourires.)

M. Sacha Houlié. On y viendra, monsieur le ministre !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Bien sûr, j’exagère à dessein. Je comprends ce que vous dites à propos des conseils de développement, mais je vois bien aussi la logique qui est derrière et que cet amendement traduit parfaitement : d’une certaine manière, on se méfie des élus locaux. Sinon, on ne proposerait pas d’écrire de telles choses dans la loi. Je vous connais bien personnellement, monsieur Potier : je sais donc que ce n’est pas votre cas. D’ailleurs, vous n’êtes pas l’auteur de l’amendement en question ; vous l’avez simplement défendu au nom de l’un de vos collègues. J’en demande le retrait car, je vous le dis avec franchise, tout cela n’est pas raisonnable.

M. Bruno Questel, rapporteur. S’il vous plaît, cher collègue, retirez-le !

M. Dominique Potier. Je le retire.

L’amendement est retiré.

Article 23 bis
(chapitre II bis du titre unique du livre Ier et chapitre III du titre II du livre VIII [nouveaux] de la première partie du code général des collectivités territoriales)
Création d’un cadre juridique propre à la médiation territoriale

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL1205 du rapporteur et CL789 de M. Rémy Rebeyrotte.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1205 vise à réécrire l’article 23 bis, issu d’un amendement adopté au Sénat à l’initiative de notre collègue bordelaise Nathalie Delattre. Les modifications que je vous propose d’adopter permettent notamment de préciser que la médiation territoriale s’exerce sans préjudice des dispositifs de médiation existants, notamment ceux qui sont relatifs à la consommation. J’en profite pour dire à M. Rebeyrotte que son amendement CL789 sera satisfait par l’adoption du mien.

M. Rémy Rebeyrotte. L’amendement CL789 est défendu, en plus d’être satisfait ! (Sourires.)

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. C’est vraiment royal…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je suis satisfait de la satisfaction de M. Rebeyrotte. (Sourires.) Avis favorable à l’amendement du rapporteur, et je demande le retrait de l’autre, qui est effectivement satisfait par l’amendement CL1205.

M. Raphaël Schellenberger. Je n’ai pas eu le temps de lire l’intégralité de l’amendement du rapporteur, mais je relève, dans la rédaction issue du Sénat, une précision qui est tellement de bon sens qu’elle a certainement été reprise, du moins je le suppose, par le rapporteur : je veux parler de l’incompatibilité des fonctions de médiateur avec celles d’élu local.

J’en profite pour appeler votre attention sur quelque chose qui constitue un véritable trou dans la raquette ; j’espère d’ailleurs déposer un amendement qui ne sera pas retoqué en séance. Il se trouve qu’on peut être, par exemple, élu régional et en même temps commissaire enquêteur sur un important projet d’infrastructure qui doit être implanté dans la même région. Je trouve cela tout à fait anormal et j’espère que nous trouverons un moyen, en séance, d’introduire une correction sur ce point.

M. Bruno Questel, rapporteur. J’en suis d’accord !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Moi aussi !

La Commission adopte l’amendement CL1205.

En conséquence, l’article 23 bis est ainsi rédigé et l’amendement CL789 tombe, ainsi que l’amendement CL43 de M. Matthieu Orphelin.

Article 24
(art. L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales)
Extension à toutes les opérations d’investissement du bloc communal de la faculté pour le préfet d’accorder une dérogation à la participation financière minimale du maître d’ouvrage

La Commission examine l’amendement CL1206 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement rétablit l’article dans la version initiale proposée par le Gouvernement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 24 est ainsi rédigé et les amendements CL975 de M. Stéphane Baudu et CL481 de Mme Cécile Untermaier tombent.

Article 25
(art. L. 1111-11 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Publication du plan de financement des opérations d’investissement

La Commission examine l’amendement CL1062 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. L’amendement CL1062 est d’une importance fondamentale pour la République, puisqu’il s’agit de mentionner l’ensemble des financeurs sur les plaques inaugurales des bâtiments publics. (Sourires.) J’en ai assez d’entendre qu’untel ne finance pas, que tel autre n’a pas contribué et n’est donc pas amené à prendre la parole lors de l’inauguration. Je sais aussi de manière certaine, même si cela peut sembler caricatural, à quel point la cause des régions a progressé dès lors que le logo régional a été apposé sur la façade des lycées ; je l’ai constaté à propos de la région Poitou-Charentes. Mon amendement, qui peut paraître anodin, voire être pris sur le ton de la plaisanterie, revêt donc une véritable importance pour marquer la signification des investissements dans les territoires, y compris quand c’est l’État qui finance – et même l’Europe : beaucoup de collectivités touchent des subventions européennes sans même en faire mention, voire en cassant du sucre sur le dos de l’Union européenne. Mon amendement ne mange pas de pain, mais il est tout à fait utile.

M. Bruno Questel, rapporteur. J’ai tout à fait conscience de participer à un moment historique de l’histoire parlementaire. (Rires.) Comme je ne veux pas sortir par la fenêtre, j’émets un avis favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Vous avez tort de rigoler : à l’avenir, quand vous passerez devant n’importe quel gymnase ou n’importe quelle salle des fêtes sur le terrain, dans vos circonscriptions, le week-end, vous verrez ces panneaux et vous vous direz que leur apposition a été décidée à ce moment précis.

Plus sérieusement, je suis très attaché à la publicité, dans le cadre du consentement de nos concitoyens à l’impôt. Nous vivons dans un pays où l’on met sur les équipements des plaques portant le nom des personnalités qui les ont inaugurés, mais où les sommes versées par les collectivités ayant participé à leur réalisation – parfois l’État aussi a donné – n’apparaissent jamais, alors même que cela contribue très directement au compte rendu fait à la population sur l’utilisation de l’argent public.

Le problème, monsieur Houlié, tient aux mots « plaque inaugurale », qu’il n’est pas simple, sur le plan juridique, d’intégrer dans la loi. L’article 25 dispose : « Lorsqu’une opération d’investissement bénéficie de subventions, la collectivité territoriale ou le groupement maître d’ouvrage publie son plan de financement et l’affiche pendant la réalisation de l’opération et à son issue. » Il suffirait d’écrire qu’elle l’affiche « de manière permanente ». Après, il y a une obligation de moyens, mais pas de résultats ; au moins, on aura, sur l’équipement, la trace mémorielle de ce qu’il a coûté. Je vous propose de retravailler le texte dans cette direction, mais Mme la présidente nous dira ce qu’il est possible de faire. Je suis favorable à votre proposition dans son esprit, même s’il faut affiner la rédaction juridique du dispositif.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Monsieur le ministre, vous pouvez déposer un amendement en ce sens au nom du Gouvernement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. C’est entendu.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Le temps que vous le rédigiez, nous poursuivons la discussion.

M. Alexis Corbière. Puisqu’il s’agit d’un débat historique, nous aurions tort de nous priver d’y participer… Je ne suis pas d’accord, surtout quand M. Houlié mentionne, dans l’exposé sommaire de son amendement, « plusieurs acteurs publics ou privés ». De quoi s’agit-il ? Premièrement, il y aura le nom de tout le monde, mais la taille de la mention variera-t-elle en fonction de la somme qui aura été mise ? Deuxièmement, s’agit-il de développer une forme de publicité pour un partenaire privé au motif qu’il aura apporté son obole, je ne sais trop à quelle hauteur ? On verrait ainsi, sur des bâtiments publics, les noms de Conforama, Decathlon, ou que sais-je encore. Encore une fois, je ne suis pas du tout d’accord avec cela. Je vous dirai même, pour aller à l’essentiel, que toutes ces plaques inaugurales, dont le dévoilement donne lieu à des moments d’autosatisfaction des notables, ne sont pas toujours très intéressantes, en vérité. (Exclamations.)

M. Bruno Questel, rapporteur. Ce n’est pas de cela que nous parlons !

M. Alexis Corbière. Je le crois vraiment : ce n’est pas toujours intéressant. C’est même souvent une manière d’inventer une cérémonie à laquelle, M. Houlié en a témoigné, on invite certains mais pas d’autres, et qui donne lieu ensuite à des photos dans le journal municipal.

Au-delà même de l’appréciation que l’on porte sur ces plaques, je ne vois pas au nom de quoi il devrait être obligatoire de faire apparaître, sur une plaque apposée sur un bâtiment public, notamment une école, le nom d’un partenaire privé. Je suis même radicalement contre, du fait de ma conception de la République.

M. Raphaël Schellenberger. Je suis déçu par la nouvelle proposition de rédaction du ministre, car j’aurais volontiers proposé un sous-amendement concernant le ruban inaugural, ou quelque chose dans ce genre, pour s’assurer que la précision est bien présente partout… Au-delà de la boutade, je comprends l’intérêt que cela peut avoir, notamment pour favoriser le consentement à l’impôt. En même temps, c’est en contradiction avec l’esprit du texte, qui consiste à dire aux collectivités locales qu’elles doivent s’assumer. Par ailleurs, je connais des collectivités qui ne versent pas le moindre euro de subvention au projet d’une autre collectivité si elles n’ont pas reçu l’engagement que leur contribution sera clairement affichée. L’État, lui, ne le fait pas, et c’est sa faute. L’Europe fait cela très bien et exige systématiquement, pour les projets qu’elle cofinance, que cette information soit visible.

Je comprends donc l’intérêt de l’opération : il est important, pour la transparence de l’utilisation de l’argent public, que l’information soit rapidement accessible aux citoyens contribuables. Cela dit, on est en train d’encadrer une liberté locale, alors même qu’en définitive c’est aux élus de poser les conditions de leur participation lorsqu’ils décident de verser des subventions ou de participer à des plans de financement. Je vous assure que certaines collectivités sont très performantes quand il s’agit d’assurer la visibilité de leur participation financière aux opérations d’investissement dans les territoires.

M. Sacha Houlié. Au final, trois principaux griefs sont avancés ; je voudrais y répondre. Le premier est celui de la notabilité. Or il n’est pas question de défendre la personne d’un élu en particulier, en l’espèce le président de la collectivité ou le patron de l’exécutif, financeur du projet : nous demandons que soit apposé le nom de la collectivité, c’est-à-dire tantôt la région, tantôt le département, tantôt l’Union européenne.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Ou l’État !

M. Sacha Houlié. Ainsi, quand on se demande à quoi sert la collectivité en question, on a la réponse : elle a financé le gymnase ou le stade de football, l’argent a été réinvesti, rendu aux territoires. Cela participe pleinement de la dynamique de consentement à l’impôt.

Le deuxième grief concerne les acteurs privés. À cet égard, j’aimerais qu’on inaugure des équipements avec des acteurs privés. En réalité, quand certains apportent des fonds, c’est souvent parce que la CAF ou la MSA ont participé au financement, mais il n’y a quasiment jamais de financement privé des équipements publics, sauf dans le cadre des partenariats public-privé (PPP), et, quand c’est le cas, l’investissement privé est justifié par la complexité du montage. En outre, le partenaire privé est généralement assez malin pour prévoir, dans le contrat de partenariat, un « naming » de l’infrastructure, même s’il est vrai que cela se fait de moins en moins, car certains projets se sont révélés dispendieux, voire catastrophiques – la MMArena en est un exemple assez frappant.

Le dernier grief consiste à dire que l’on porte atteinte à une liberté locale. Je ne pense pas que ce soit le cas : en réalité, c’est plutôt une promotion de l’action de la collectivité. À tout seigneur tout honneur, en quelque sorte – on pourrait dire aussi qu’on rend à César ce qui est à César, et cela, encore une fois, sans honorer une personne en tant que telle : ce n’est pas M. Untel ou Mme Unetelle, mais bien la collectivité qui, dans son ensemble, a choisi d’investir. Et il me semble important de le préciser.

M. Vincent Bru. Je comprends l’idée, mais je ne suis pas sûr qu’il soit très utile d’apposer sur nos bâtiments de telles informations. Il me semble important de rendre compte de l’utilisation de l’argent public pendant la réalisation des travaux, au moment de l’inauguration et pendant un temps court après, mais je ne suis pas sûr qu’il soit adéquat de figer cela dans le temps, au risque de voir se poser la question du rapport entre la taille des lettres et la grandeur des chiffres se poserait, ce qui rendrait les choses un peu compliquées…

La Commission est saisie de l’amendement CL1246 du Gouvernement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vous le dis comme je le pense : la proposition est très utile. Il ressort de la restitution du grand débat – je suis bien placé pour en parler car je l’ai organisé –, qui nous a amenés à rédiger le projet de loi, qu’un nombre phénoménal de contributions de nos concitoyens et d’élus locaux ont porté sur les questions de financement et de répartition des compétences, de manière à savoir qui fait quoi.

Par ailleurs, monsieur Corbière, le Parlement vote chaque année 2 milliards d’euros de crédits d’investissement pour l’État et personne n’en parle jamais… Sur ce point, je rejoins plusieurs des interventions que nous avons entendues : l’apport de l’argent du contribuable, de la nation française, passe complètement inaperçu. Je dis cela non pas parce que je suis un militant de l’argent de l’État, mais parce que cela me paraît assez étrange.

Il ne s’agit pas, comme l’a souligné M. Houlié, de s’inscrire dans une logique de notabilisation. Il est vrai – et à cet égard, M. Corbière a raison – qu’on a parfois l’impression que c’est l’argent du président du conseil régional, du président du conseil départemental ou du maire.

M. Alexis Corbière. Eh oui !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Eh bien non : c’est l’argent de la collectivité régionale, de la collectivité départementale ou de la mairie qui lève l’impôt. Or on inscrit le nom des personnalités sur des plaques mais jamais les financements. Je trouve cela un peu bizarre.

Enfin, monsieur Corbière, dans l’amendement CL1246, je propose de cibler les opérations bénéficiant de subventions « publiques ». Si une collectivité veut rajouter les autres types de financement, c’est son problème ; dans le texte de loi, il faut viser le consentement à l’impôt, et donc faire mention des « subventions publiques ».

M. Rémy Rebeyrotte. Monsieur le ministre, une simple remarque : il serait bien que, dans les intitulés des fonds mis en œuvre par l’État, apparaisse le fait qu’il s’agit de fonds de l’État. Quand la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), par exemple, a financé un équipement, c’est écrit sur le panneau, ainsi que la somme engagée, mais il faudrait vraiment faire apparaître que c’est une dotation de l’État : il n’y a pas un seul conseil départemental qui ne fasse apparaître clairement le mot « département » quand il soutient une initiative, et il en va de même pour les fonds régionaux. Il doit en être de même quand il s’agit d’un fonds d’État. Prenons l’exemple du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) : on ne comprend pas immédiatement qu’il s’agit d’un fonds d’État destiné à aider la vie associative. Sans doute faudrait-il donc regarder de près la manière dont on pourrait revoir la communication de l’État pour que celle-ci soit plus efficace, à travers l’intitulé même de ses fonds, de manière à ce que chacun comprenne que c’est bien l’État qui finance.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Pour que les choses soient claires, l’amendement CL1246 proposera d’insérer, à l’alinéa 2 de l’article 25, après le mot « subventions », le mot « publiques » et, après le mot « affiche », les mots « de manière permanente ».

M. Sacha Houlié. Je retire mon amendement au profit de celui du Gouvernement.

L’amendement CL1062 est retiré.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL1246 du Gouvernement.

Puis elle adopte l’article 25 modifié.

Article 25 bis
(art. L. 2122-22, L. 3211-2 et L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales)
Délégation à l’exécutif des mises à disposition à titre gratuit

La Commission examine les amendements identiques CL1207 du rapporteur et CL1063 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1207 est défendu.

M. Sacha Houlié. L’amendement CL1063 également

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 25 bis est supprimé.

Article 25 ter (art. L. 3211-2 et L. 4133-6-1 du code général des collectivités territoriales) : Modification en cours de mandat des délégations à la commission permanente

La Commission adopte l’article 25 ter sans modification.

TITRE IV
RENFORCER ET RECONNAÎTRE LES DROITS DES ÉLUS

Article 26
(art. L. 3142-79 du code du travail, art. L. 5214-8 et L. 5842-21 du code général
des collectivités territoriales)
Extension du congé électif aux communes de moins de 1 000 habitants

La Commission examine l’amendement CL1208 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Il est défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 26 modifié.

Après l’article 26

La Commission examine l’amendement CL386 de Mme Bénédicte Taurine.

M. Alexis Corbière. Il est défendu.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable également.

La Commission rejette l’amendement.

Article 26 bis
(art. L. 2123-9, L. 3123-7 et L. 4135-7 du code général des collectivités territoriales)
Statut de salarié protégé des élus locaux

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL473 et CL474 de Mme Cécile Untermaier et l’amendement CL1064 de M. Sacha Houlié.

Mme George Pau-Langevin. Nous proposons de faire bénéficier les maires et les adjoints du statut de salarié protégé. Le dernier alinéa de l’article L. 2123-9 du code général des collectivités territoriales prévoit déjà que ces élus « sont considérés comme des salariés protégés au sens du livre IV de la deuxième partie du code du travail », mais ce renvoi global rend la protection inopérante : le livre en question comporte beaucoup de cas et de procédures, de sorte qu’on ne sait pas exactement à quoi cela peut s’appliquer. Par conséquent, nous pensons qu’il est indispensable d’intégrer dans le code du travail des divisions spécifiques concernant le cas des salariés titulaires de mandats électifs, et d’y préciser les procédures applicables. L’amendement CL473 prévoit que les licenciements de salariés titulaires de mandats électifs ne peuvent intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail ; celle-ci serait également requise durant les douze mois suivant l’expiration du mandat électif du salarié. Lorsque le ministre compétent annule, sur recours hiérarchique, la décision de l’inspecteur du travail autorisant le licenciement ou lorsque le juge administratif annule la décision d’autorisation de l’inspecteur du travail, le salarié a le droit d’être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent. Cette disposition est importante car nous savons bien que, même après la fin de leur mandat, les salariés peuvent être fragilisés, voire victimes de mesures de rétorsion de la part de leur entreprise.

L’amendement CL474 est de repli. À défaut d’introduire dans le code du travail une division spécifique propre aux titulaires d’un mandat électif pour garantir leur statut de salarié protégé, nous proposons ici de préciser les règles qui leur sont applicables – en l’occurrence, celles qui sont relatives aux délégués syndicaux ou aux anciens délégués syndicaux. Le renvoi au régime de protection des délégués syndicaux assure aux élus concernés le bénéfice de cette protection durant les douze mois suivant la date de cessation du mandat.

M. Sacha Houlié. Pour ma part, j’ai une difficulté avec le fait d’élargir aux élus le statut de salarié protégé. En effet, je suis attaché à la charte d’Amiens, qui marque une différence entre les syndicalistes et les politiques. Je ne souhaite donc pas que le nombre de salariés protégés double par l’effet de l’adoption de cet article. C’est la raison pour laquelle je préférerais que l’on crée, comme le propose mon amendement CL1064, un principe de non-discrimination au titre de l’exercice d’un mandat électif : chacun serait ainsi à sa place et protégé en tant que tel. Cela protégerait les élus, comme nous souhaitons le faire, de toute décision unilatérale de l’employeur qui conduirait à se séparer d’une personne au motif qu’elle exerce un mandat électif, mais cela protégerait également le statut de salarié protégé, ô combien précieux pour les personnes qui s’engagent dans le cadre d’un mandat syndical.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je suis tout à fait en phase avec les explications et justifications apportées par M. Houlié. Madame Pau-Langevin, s’il vous plaît, pour ne pas fragiliser le statut de salarié protégé dans l’exercice d’une activité syndicale et reconnaître aux élus un vrai droit à la non-discrimination, je vous demanderais de retirer vos amendements au profit de celui de M. Houlié.

Mme George Pau-Langevin. Mes amendements ne proposent pas du tout la même chose !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Effectivement, ce n’est pas la même chose. Je serai bref, mais j’espère vous convaincre, madame la ministre Pau-Langevin.

Premièrement, il existe un grand principe, celui selon lequel le salarié est protégé dans l’entreprise précisément parce qu’il défend l’intérêt social de cette dernière : un bon dialogue social participe à l’intérêt de l’entreprise. En commençant à imaginer des protections dans le droit du travail pour des causes extérieures à l’entreprise, on s’engage dans une voie complètement inédite. D’ailleurs, même si nous ne les avons pas consultés formellement, les contacts que nous avons eus avec les représentants des syndicats de salariés montrent qu’ils observent cette affaire avec beaucoup d’attention. Si une protection aussi forte est accordée aux représentants du personnel dans une entreprise, ce n’est pas pour rien ; du reste, les pompiers volontaires et les réservistes des armées, par exemple, n’en ont jamais bénéficié. Établir comme fait générateur de la protection dans l’entreprise la qualité d’élu local, alors même qu’il n’y a aucun lien entre les deux – car il s’agit d’un mandat politique, et non d’un mandat social, comme c’est le cas pour le représentant du personnel –, constituerait un véritable virage, auquel je suis défavorable.

La seconde raison est une raison de fait : dans la vraie vie, les élus sont souvent salariés de toutes petites entreprises – artisans, commerçants – de leur commune ou des environs, qu’il s’agisse de la communauté de communes ou du canton. Avec une telle disposition, on aurait vite fait d’en déstabiliser un certain nombre. Certains pourraient me répondre, à la rigueur, que cela importe peu, mais le problème essentiel est que l’on risque de rendre les élus locaux inemployables : à compétences équivalentes, quand on aura le choix entre quelqu’un qui est adjoint au maire et quelqu’un qui ne l’est pas, il y a fort à parier que c’est le second qui sera embauché.

Cela veut-il dire qu’il ne faut rien faire ? La réponse est non. À cet égard, je pense que l’amendement CL1064, présenté par M. Houlié et plusieurs de ses collègues, va dans le bon sens, parce qu’il permet de traduire pour la première fois en droit positif la sanction de la discrimination. En effet, ce qui serait scandaleux, c’est qu’un élu de la République, salarié dans une entreprise, se voie privé d’une promotion, soit victime d’une discrimination à l’embauche ou d’une sanction disciplinaire, que sais-je encore, précisément parce qu’il est élu. Or, actuellement, s’il va devant le conseil des prud’hommes, il ne peut pas opposer sa qualité d’élu local comme critère de discrimination. C’est absolument incroyable. Le cas est prévu dans le code général des collectivités territoriales, mais n’a jamais été traduit dans le code du travail. Il n’existe donc pas d’acte de droit positif permettant de protéger les élus.

Pour toutes ces raisons, je vous propose donc, madame la ministre George Pau-Langevin, de retirer vos amendements CL473 et CL474 et de soutenir l’amendement CL1064, de manière à ce que celui-ci soit adopté. En clair, si je devais résumer ma position en une phrase, je dirais que, plutôt que d’imaginer une protection en amont, qui crée de nombreuses difficultés, je propose une protection en aval ; ce serait déjà, me semble-t-il, une belle avancée.

Mme George Pau-Langevin. Effectivement, l’amendement CL1064 qui propose d’étendre les règles de la non-discrimination aux élus représente un pas en avant intéressant, mais ce n’est pas la même chose que ce que je propose. La plupart du temps, les procédures en matière de discrimination sont engagées bien après les faits, une fois que le salarié a constaté les dégâts. Par conséquent, il me semble que trouver un moyen permettant de protéger en amont les élus politiques serait positif : si les employeurs n’aiment pas les syndicalistes, ils n’aiment guère davantage les élus…

M. Alexis Corbière. Ce débat est intéressant, tout le monde en convient. Je ne crois pas que les amendements de nos collègues socialistes visent à dire qu’un élu c’est exactement la même chose qu’un représentant syndical.

M. Bruno Questel, rapporteur, et M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. En droit, si !

M. Alexis Corbière. En l’occurrence, ce n’est pas la manière dont l’article 26 bis aborde les choses. Les salariés bénéficient dans l’entreprise d’une protection au titre de leur engagement syndical, mais également, par exemple, de leur état de santé – sans oublier les femmes enceintes ; de la même façon, il ne me paraît pas inintéressant que, dans le cas d’un salarié élu menacé de licenciement, l’inspecteur du travail donne au préalable son autorisation, après avoir vérifié que son licenciement n’est pas dû à son engagement politique, mais à d’autres causes, notamment son incompétence ; on sait très bien qu’il n’est pas toujours évident de s’afficher comme élu local. Pour faire suite à la discussion que nous avions tout à l’heure s’agissant de la difficulté à trouver des gens pour animer la vie politique et se porter candidats aux élections, il me semble que l’absence de protection dans l’entreprise est une des choses qui dissuadent beaucoup de personnes de franchir le pas. Ce n’est pas la seule, mais cela en fait clairement partie.

La proposition qui nous est faite n’est donc pas inintéressante et, pour répondre à Sacha Houlié, elle ne me paraît pas du tout remettre en cause la charte d’Amiens. Les droits des salariés dans l’entreprise ont vocation à protéger les salariés, même s’ils ne sont pas syndiqués. La charte d’Amiens pose seulement le principe d’une indépendance entre les partis politiques et les syndicats. Il me semble donc qu’on peut y être fidèle tout en étant sensible aux amendements présentés par Mme Pau-Langevin.

M. Raphaël Schellenberger. Si le débat qui a été ouvert par le Sénat avec l’adoption de cet article est intéressant et important, le dispositif qu’il a retenu ne nous semble pas opérant. Il peut même être contre-productif, en ce qu’il risque d’organiser à la fois la réduction de l’attrait des fonctions électives locales et l’inemployabilité d’un certain nombre d’élus en rapprochant deux choses qui n’ont rien à voir. C’est d’autant plus grave que le dispositif concernerait tous les élus locaux, y compris le conseiller municipal bénévole de base – je le dis sans y mettre la moindre connotation péjorative. Autrement dit, cela représente un nombre de personnes colossal.

Nous ne sommes pas du tout favorables à l’extension du statut de salarié protégé aux élus locaux. En revanche, la voie ouverte par l’orateur du groupe La République en marche me semble intéressante. À titre personnel, je serai favorable à son amendement en commission. Nous regarderons de plus près le dispositif d’ici à la séance, pour s’assurer qu’il répond bien à cette idée.

M. Bruno Questel, rapporteur. Vous avez raison : faites attention à vous ! (Sourires.)

La Commission rejette successivement les amendements CL473 et CL474.

Puis elle adopte l’amendement CL1064.

En conséquence, l’article 26 bis est ainsi rédigé et les amendements CL977 de M. Stéphane Baudu et CL627 de M. Robin Reda tombent.

Article 26 ter
(art. L. 2123-2 du code général des collectivités territoriales)
Augmentation du crédit d’heures à la disposition des élus locaux

La Commission examine l’amendement CL462 de Mme Cécile Untermaier.

Mme George Pau-Langevin. L’amendement CL462 entend renforcer les droits des élus, notamment en matière de temps disponible pour l’exercice de leur mandat. En effet, on voit bien qu’il y a des périodes durant lesquelles ils ont besoin de temps, par exemple au moment de l’élaboration du budget de la collectivité. Nous proposons que les heures dont bénéficient les élus et qu’ils n’ont pas utilisées puissent être reportées sur les trimestres suivants.

M. Bruno Questel, rapporteur. Madame Pau-Langevin, il faut concilier vie professionnelle et vie politique, mais en évitant que l’une joue au détriment de l’autre. En l’occurrence, la disposition que vous proposez comporterait des risques pour l’équilibre du cadre professionnel dans lequel l’activité est exercée.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 26 ter sans modification.

Après l’article 26 ter

La Commission examine l’amendement CL463 de Mme Cécile Untermaier.

Mme George Pau-Langevin. Nous proposons que le temps d’absence de l’entreprise consacré à l’exercice d’un mandat soit pris en compte pour les cotisations ouvrant droit à la retraite.

M. Bruno Questel, rapporteur. Défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable également.

Mme George Pau-Langevin. Un jour, on y viendra !

La Commission rejette l’amendement.

Article 26 quater
(art. L. 2123-9 et L. 2123-11-1 du code général des collectivités territoriales)
Renforcement des droits des adjoints au maire dans les communes de moins de 10 000 habitants

La Commission examine l’amendement CL375 de Mme Bénédicte Taurine.

M. Alexis Corbière. L’objectif de cet amendement est, une nouvelle fois, de diminuer les risques de conflit d’intérêts pour les élus municipaux en fin de mandat ou de fonctions. À cette fin, nous voulons garantir que le droit à la réintégration pour des salariés de droit privé prenne en compte leur avancement. Si nous sommes favorables à l’article 26 quater, inséré par le Sénat, nous estimons qu’il doit être complété par cette prise en compte de l’avancement en cas de réintégration, et ce dans les mêmes conditions que les fonctionnaires. Sur le plan intellectuel, cela fait suite au débat que nous venons d’avoir.

M. Bruno Questel, rapporteur. Monsieur Corbière, imaginons que le salarié concerné fasse deux mandats, soit douze ans à l’extérieur de l’entreprise : ce que vous proposez est très difficile à rendre opérationnel… Défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable également.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission adopte l’article 26 quater sans modification.

Article 26 quinquies
(art. L. 2123-1-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Télétravail des conseillers municipaux

La Commission adopte l’article 26 quinquies sans modification.

Après l’article 26 quinquies

La Commission examine l’amendement CL684 de M. Vincent Bru.

M. Vincent Bru. Cet amendement propose, d’une part, d’instaurer en début de mandat, à la demande du salarié élu, un entretien avec son employeur pour fixer d’un commun accord les modalités pratiques d’exercice du mandat, et, d’autre part, de permettre au salarié et à l’employeur de conclure un accord pour faciliter la conciliation entre la vie professionnelle et les fonctions électives, notamment en définissant les heures de délégation et leur rémunération éventuelle. Il ne s’agit en aucune manière d’une obligation pour l’employeur : le dispositif est incitatif, de nature à apaiser les relations entre l’employeur et son salarié qui est par ailleurs élu, et de permettre à ce dernier d’exercer son mandat dans de meilleures conditions.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable, monsieur Bru, mais je préconise, si vous m’y autorisez, de continuer à travailler le texte pour que ces dispositions soient intégrées au code du travail, car cela me paraîtrait plus adapté.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Sagesse, pour les mêmes raisons.

La Commission adopte l’amendement. L’article 26 sexies est ainsi rédigé.

Article 27
(art. L. 2123-18-2, L. 2123-18-4, L. 2573-7, L. 3123-19-1, L. 4135-19-1, L. 6434-4, L. 7125-23 et L. 7227-24 du code général des collectivités territoriales)
Prise en charge des frais de garde et d’assistance des élus locaux

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL1232 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement CL1074 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. L’article 27 rend obligatoire le remboursement des frais de garde engagés par les élus locaux pour participer aux réunions obligatoires. C’est évidemment une belle avancée, que le Sénat a renforcé puisqu’il a adopté une compensation de cette dépense par l’État pour toutes les communes de moins de 3 500 habitants au lieu de 1 000 habitants dans le texte initial. En revanche, l’État n’a pas vocation à compenser les aides additionnelles fournies par les communes : si certaines sont mieux disantes, autrement dit apportent un peu plus que la garantie de l’État, celui-ci n’a pas à compenser cette charge supplémentaire. Nous vous proposons de rectifier le dispositif en ce sens.

M. Bruno Questel, rapporteur. Favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable également. Je précise, monsieur Houlié, que c’est le groupe La République en marche du Sénat qui a souhaité passer de 1 000 à 3 500 habitants, et que le Gouvernement a levé le gage.

M. Sacha Houlié. Je salue cette belle avancée collective !

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 27 modifié.

Article 28
(art. L. 2123-22, L. 2123-23, L. 2123-24, L. 2123-24-1 et L. 5211-12-1 [nouveau]
du code général des collectivités territoriales)
Régime indemnitaire des maires, des adjoints au maire et des conseillers communautaires

La Commission examine l’amendement CL374 de M. Alexis Corbière.

M. Alexis Corbière. Nous proposons d’instaurer un plafond aux indemnités de maire et de président d’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), de manière à ce qu’elles ne dépassent pas plus de trois fois le salaire de l’agent le moins bien payé de la collectivité. Un tel mécanisme permet de prévenir toute rémunération excessive du seul président de l’établissement public de coopération intercommunale ou du maire par rapport aux agents ou fonctionnaires employés par l’EPCI ou la commune. Peut-être me direz-vous que des indemnités aussi élevées sont tout à fait exceptionnelles ; certes, et tant mieux, mais il faut s’assurer que les indemnités sont vertueuses, pour éviter qu’elles soient perçues par les agents ou fonctionnaires comme choquantes.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable. Vous ne prenez pas en compte le cas des maires des petites communes, dont le montant des indemnités est largement inférieur au montant minimal du traitement d’un agent public dans une commune.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable.

M. Alexis Corbière. Je sais bien que l’art de la rhétorique autorise beaucoup de choses… Vous avez tout à fait le droit de rejeter cet amendement,…

M. Bruno Questel, rapporteur. Merci !

M. Alexis Corbière.… mais je ne vois pas du tout en quoi ce que vous avez dit fait sens. Je sais très bien la situation difficile de beaucoup de communes, où l’indemnité du maire se ramène souvent à peu de chose, mais je ne vois pas en quoi cela empêcherait de plafonner les indemnités, pour éviter que certaines ne choquent la population. De fait, le niveau des indemnités de certains présidents d’établissement heurte bel et bien, surtout au regard du fait que les agents, eux, voient leurs rémunérations plafonnées. Il faut s’éviter le coût politique de cette situation. Or je ne vois pas en quoi la réponse à cet argument pourrait être de me dire que certains touchent peu : c’est exact, certes, mais je parle de ceux qui touchent beaucoup.

M. Raphaël Schellenberger. Il est amusant de vous entendre parler de rhétorique, monsieur Corbière, car votre amendement lui-même n’est rien d’autre qu’un système rhétorique. En effet, la rémunération des agents, en tant qu’ils sont fonctionnaires, est définie dans des grilles indiciaires, avec des points revalorisés tous les ans, et l’indemnisation des élus fait elle aussi l’objet d’une définition dans une grille qui se réfère aux indices de la fonction publique.

M. Bruno Questel, rapporteur. Bien sûr !

M. Raphaël Schellenberger. Par conséquent, lorsque vous dites que vous voulez établir un rapport entre la rémunération des élus et celle des agents dans une collectivité, c’est juste de la rhétorique. Si vous vouliez aller au fond des choses, vous déposeriez des amendements portant sur les tableaux concernés, ce qui vous permettrait de modifier le montant des indemnités des élus et la rémunération des agents des collectivités.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL1233 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement CL353 de M. Fabien Lainé.

M. Fabien Lainé. Nous abordons ici un sujet souvent tabou, comme nous avons commencé à le faire à l’instant : les indemnités des élus, particulièrement ceux des communes des deux tranches de 3 500 à 10 000 habitants et de 10 000 à 20 000 habitants. Il s’agit de reconnaître l’engagement essentiel des maires, qui sont à la fois aménageurs du territoire, vu la taille des communes, et gestionnaires de services publics qui profitent au plus grand nombre, y compris aux petites communes alentour. Dans ces communes, ils gèrent des budgets allant de 5 millions d’euros à 50 millions d’euros consolidés, ils pilotent une administration allant de 30 agents à plus de 500. Ces communes sont donc structurantes pour le territoire. Aujourd’hui, 42 % des maires sont des retraités. Telle est la réalité. En fin de mandat, c’est même plus : on approche des 50 %. Il faut également savoir que seuls 3 % des maires ont moins de 40 ans.

Il convient donc de rendre ces fonctions beaucoup plus attractives et, pour ce faire, de revaloriser les indemnités de ces hommes et de ces femmes. Il y va de l’intérêt général. Pour mettre les choses en perspective, l’indemnité d’un conseiller départemental d’opposition sans aucune responsabilité exécutive est de 2 128 euros, tandis que le maire d’une commune de 9 000 habitants, qui gère une administration de 200 personnes environ est, comme vous le savez, de moins de 2 000 euros. Nous vous proposons donc, par cet amendement, sur lequel nous avons travaillé avec l’Association des petites villes de France – qui fédère les communes de 2 500 à 25 000 habitants –, de revaloriser les indemnités dans des proportions qui nous paraissent tout à fait raisonnables. En l’espèce, elles s’élèveraient désormais à 2 900 euros bruts par mois dans les communes de 3 500 à 20 000 habitants.

M. Bruno Questel, rapporteur. Mon cher collègue, on peut comprendre la dynamique et la philosophie qui vous animent. Toutefois, je ne voudrais pas que l’on vienne, par l’adoption de votre amendement, briser l’équilibre trouvé par les sénateurs dans la rédaction du dispositif dont nous discutons. Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement, dans un esprit de travail collectif avec nos collègues du Palais du Luxembourg.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

M. Fabien Lainé. Je le retire… pour l’instant. Nous en rediscuterons en séance.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL685 de M. Vincent Bru.

M. Vincent Bru. Les maires, notamment ceux des petites communes, hésitent souvent à proposer au conseil de fixer des indemnités, en particulier lorsqu’ils remplacent un maire faiblement ou non indemnisé : c’est pour eux un cas de conscience très délicat. Mon amendement prévoit que le montant de l’indemnité du maire sera de droit fixé par rapport au barème de référence, sachant que, à la demande du maire, le conseil municipal peut, par délibération, fixer une indemnité de fonction inférieure au barème.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement peut effectivement contribuer à apaiser la prise de fonction des maires. J’y suis favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission est saisie des amendements identiques CL1209 du rapporteur et CL1065 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1209 est défendu.

M. Sacha Houlié. L’amendement CL1065, identique, tend à supprimer la majoration de l’indemnité des maires en cas de cessation totale ou partielle d’activité. Nous avons fait nôtre la conception sénatoriale des indemnités : d’une libre fixation par les maires, nous sommes passés avec l’article 28 à une fixation établie par les textes de loi, ce qui sécurise les maires puisqu’ils n’ont pas à voter leurs propres indemnités.

Toutefois, la rédaction du Sénat comporte quelques excès : elle prévoit notamment une majoration pour les élus décidant d’arrêter leur activité, partiellement ou totalement. L’indemnité n’a pas à être fixée de manière subjective, au gré de la décision que prend le maire de suspendre ou pas son activité, d’autant qu’elle vient s’imputer sur une enveloppe globale, qui inclut celle de ses adjoints : majorer l’une pour des raisons personnelles, revient à diminuer les autres. C’est la raison pour laquelle il ne nous semble pas judicieux de maintenir l’ajout sénatorial.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable. La position initiale du Gouvernement, consistait en une mise de départ, afin de disposer d’une base de concertation avec les associations d’élus. Le Sénat est globalement resté dans une logique identique à celle du Gouvernement, tout en rétablissant un seuil destiné à servir de point de repère pour les élus locaux des communes dont la population n’excède pas 3 500 habitants. La question s’est posée de fixer automatiquement un maximum, quitte à l’abaisser ensuite.

D’ici à la séance, le Gouvernement pourrait faire une proposition qui préserverait l’esprit du texte initial, tout en conservant l’ajout du Sénat en introduisant une notion de pivot, laquelle, sans entrer dans les détails, permettrait de disposer d’un point de repère.

S’agissant des communes de plus de 3 500 habitants que vous avez évoquées, monsieur Lainé, j’entends vos propos. Toutes les associations de communes que nous avons rencontrées, sauf celle présidée par votre collègue, Christophe Bouillon, veulent concentrer les efforts sur les petites communes, celles de moins de 3 500 habitants – je dis cela pour vous informer, non pour lancer le débat.

Sur le dispositif, tel qu’il a été présenté par le rapporteur et par M. Houlié, avis favorable.

La Commission adopte ces amendements.

Puis la Commission examine l’amendement CL705 de M. Fabien Lainé.

M. Fabien Lainé. En cohérence avec l’amendement CL353 que j’ai défendu, cet amendement traite de la rémunération des adjoints au maire, qui est de 45 %, au plus, de l’indemnité du maire. Mais nous en rediscuterons en séance.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 28 modifié.

Après l’article 28

La Commission est saisie de l’amendement CL372 de M. Alexis Corbière.

M. Alexis Corbière. Cet amendement propose que soient rendues publiques les indemnités des élus qui siègent dans les organismes liés directement ou indirectement à la commune ou à l’établissement de coopération intercommunale concernée, ainsi que leurs rencontres avec des représentants d’intérêts privés.

La transparence des liens des élus avec ce type de structures ainsi que de leurs rémunérations doit être clairement améliorée. Que ce soit dans des organismes tels que des sociétés publiques locales, sociétés d’économie mixte, sociétés publiques locales d’aménagement, dans leurs filiales ou dans les entreprises où ces structures détiennent des participations, les conflits d’intérêts et les mélanges des genres peuvent être nombreux.

La seconde partie de cet amendement est inspirée par la réforme du Parlement européen en janvier 2019, qui a été unanimement saluée.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je comprends votre préoccupation, mais appliquer les réformes audacieuses et salutaires du Parlement européen dans les petites communes de France et de Navarre me paraît compliqué… Je me souviens, il y a quinze ans, avoir publié l’ensemble de mes rémunérations d’élu local dans la presse locale ; je ne me suis jamais fait autant réprimander par mes collègues ! Je vous rejoindrais donc assez facilement… Avis défavorable néanmoins.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. S’agissant de la transparence sur les indemnités, nous avons déjà réalisé un pas important avec ce projet de loi. Je considère pour ma part qu’il faut tout assumer, en toute transparence et avec toute la publicité possible.

Le troisième alinéa de votre amendement est loin d’être neutre puisqu’il prévoit la publication du « détail annuel et mensuel des rendez-vous tenus avec des représentants d’intérêts privés. » Étant militant sur ce sujet, je ne vous contredirai pas ; reste que, pour le maire d’une petite commune, ces « représentants d’intérêts privés » vont du boulanger de la place du village au responsable de la grande entreprise de BTP pendant une période d’appel d’offres… Je suppose que votre amendement visait davantage la seconde catégorie.

Je vous demande de retirer votre amendement, à défaut, j’émettrai un avis défavorable. La rédaction que vous proposez ne semble pas satisfaisante : à la différence du Parlement européen ou de l’Assemblée nationale, une commune rurale n’a pas les moyens de tenir un rapport annuel listant tous les rendez-vous du maire ou de ses adjoints.

M. Sacha Houlié. Le versement des indemnités est quasi-public, puisqu’il fait l’objet d’une grille indiciaire, dont nous avons discuté.

Dans l’amendement CL1066 que je vais vous présenter dans un instant, au-delà du dispositif du Sénat visant les EPCI, je proposerai d’exiger un tableau récapitulatif des indemnités versées pour toutes les collectivités, communicable au public. Il correspondra peu ou prou à ce que M. Corbière a demandé s’agissant des indemnités.

La Commission rejette l’amendement.

Avant l’article 28 bis

La Commission examine l’amendement CL1066 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. Je viens de le défendre.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable. Il est dommage que M. Corbière ait quitté la séance car cet amendement allait dans son sens.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement. L’article 28 bis A est ainsi rédigé.

Article 28 bis
(art. L. 2123-24-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Modulation des indemnités de fonction des conseillers municipaux des communes de plus de 100 000 habitants

La Commission est saisie de l’amendement CL87 de Mme Catherine Kamowski.

Mme Catherine Kamowski. Cet amendement vise à supprimer l’article 28 bis. Nous l’avons dit, nous travaillons en confiance avec les élus locaux. Faisons-leur aussi confiance pour choisir les formes d’incitation à l’engagement, si ce n’est au présentéisme, de leurs élus, si tant est que le besoin s’en fasse sentir. De nombreuses collectivités territoriales n’ont pas eu besoin d’une loi pour proposer des gradations des indemnités en fonction du nombre d’absences semestrielles ou annuelles des élus.

Ajoutons que la présence plus ou moins active aux réunions, soit du conseil délibérant, soit des commissions, ne reflète pas nécessairement la réalité du travail effectif des élus locaux. Si un élu ne fait que s’asseoir, signer, et repartir au bout d’une demi-heure, je ne suis pas certaine que sa présence soit plus productive que celle d’un collègue qui travaille et qui, pris par des obligations diverses et variées, n’a pas pu participer à la réunion.

M. Bruno Questel, rapporteur. Vous proposez de supprimer une simple faculté. J’y suis donc défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Actuellement, cette pratique existe, mais elle est illégale. Si jamais quelqu’un avait eu l’idée de contester cette modulation devant le tribunal administratif, il aurait gagné. Nous venons donc donner une base légale à certaines pratiques, sans pour autant les rendre obligatoires. Il suffira de les intégrer au règlement intérieur… Je vous suggère donc de retirer votre amendement.

L’amendement CL87 est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL1067 de M. Sacha Houlié et CL686 de M. Vincent Bru.

M. Sacha Houlié. L’amendement CL1067 vise à prolonger l’amendement de mes collègues de La République en marche au Sénat, qui ont prévu une faculté de moduler les indemnités pour les communes allant jusqu’à 100 000 habitants. Nous souhaitons abaisser ce seuil à 50 000 habitants.

M. Vincent Bru. L’amendement CL686 insiste sur l’importance de la présence aux réunions statutaires. De telles mesures sont souvent adoptées par les conseils régionaux ou départementaux. Si le seuil était abaissé de 100 000 à 50 000 habitants, le dispositif concernerait 126 communes, au lieu de 42 avec la rédaction du Sénat. Ce serait un réel progrès.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable, car il s’agit effectivement d’un progrès.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je suis favorable à l’amendement CL1067 de M. Sacha Houlié. Dans les communes de 100 000 habitants, le dispositif des indemnités obligatoires pour les conseillers municipaux se déclenche automatiquement. Dans celles de 50 000 à 100 000 habitants, ces indemnités sont possibles, mais elles ne sont pas de droit. L’amendement CL1067 présente de surcroît dans son II l’intérêt d’ouvrir cette possibilité aux conseils régionaux et départementaux, ce qui n’est pas totalement superflu au regard du taux d’absentéisme… (Sourires.) Je suggère à M. Bru de s’y rallier.

La Commission adopte l’amendement CL1067.

En conséquence, l’amendement CL686 tombe.

Puis la Commission adopte l’amendement de cohérence CL1241 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 28 bis modifié.

Article 28 ter
(art. L. 5211-12-2 du code général des collectivités territoriales)
Modulation des indemnités de fonction des conseillers communautaires des EPCI de plus de 100 000 habitants

La Commission examine l’amendement CL88 de Mme Catherine Kamowski.

Mme Catherine Kamowski. Cet amendement vise à supprimer l’article 28 ter.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait. Sinon, avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

L’amendement CL88 est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL1210 du rapporteur.

En conséquence, l’article 28 ter est ainsi rédigé et les amendements CL910 de Mme Marguerite Deprez-Audebert, CL790 de M. Rémy Rebeyrotte, CL135 de Mme Cendra Motin, CL687 de Mme Marguerite Deprez-Audebert, CL134 de Mme Cendra Motin, CL276 de Mme Frédérique Lardet et CL793 de M. Alexandre Freschi tombent.

Article 28 quater
(art. L. 5211-12 du code général des collectivités territoriales et article 2 de la loi n° 2016-341 du 23 mars 2016 visant à permettre l’application aux élus locaux des dispositions relatives au droit individuel à la formation et relative aux conditions d’exercice des mandats des membres des syndicats de communes et des syndicats mixtes)
Régime indemnitaire des présidents et des vice-présidents des syndicats de communes et des syndicats mixtes

La Commission examine l’amendement CL1011 de M. Jean-Claude Leclabart.

M. Jean-Claude Leclabart. Voici un amendement qui rend populaire ! (Sourires.) Il vise à supprimer les indemnités de fonction des présidents et vice-présidents des syndicats mixtes dont la taille est plus réduite que celle de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI).

La loi du 23 mars 2016 prévoit en effet des indemnités pour les syndicats d’une certaine taille. Au 1er janvier 2019, la France comptait environ 9 970 syndicats mixtes et établissements publics de coopération intercommunale sans fiscalité propre, dits syndicats. En 2019, 57 % des syndicats intercommunaux à vocation unique (SIVU) et à vocation multiple (SIVOM) ont moins de cinq communes membres. Près d’un quart d’entre eux – 23 % – ont entre cinq et neuf communes membres. Pour les deux années 2018 et 2019, le nombre de SIVOM, syndicats mixtes et autres syndicats augmente, alors que celui des SIVU diminue.

En maintenant les indemnités dans les syndicats dont la taille est inférieure à l’EPCI, le législateur encouragerait au maintien de SIVU ou SIVOM qui peuvent être repris par l’EPCI, quand elle n’inciterait pas certains à créer de nouveaux SIVU ou SIVOM.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait ou avis défavorable après cette déclaration de non-candidature aux prochaines élections sénatoriales… (Sourires.)

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable.

M. Raphaël Schellenberger. Je ne pense pas que le maintien des indemnités conduise à une inflation des SIVU et SIVOM dans la mesure où le couperet du préfet et des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI), voire des élus, demeure. La nécessité ou non de créer de telles structures s’inscrit toujours dans une vision stratégique départementale, l’État est de son côté clairement déterminé à ne pas les multiplier.

Cet amendement laisse par ailleurs à penser que les élus feraient la course à la présidence de ces syndicats pour accumuler des indemnités. La transparence, telle qu’elle a été mise en place dans les différents articles précédents est clairement de nature à refréner toute tentation de ce genre.

On ne peut pas nier que certains SIVU et SIVOM, y compris à l’échelon infracommunautaire, sont des lieux qui concentrent beaucoup de travail et d’engagement. Les élus présents y consacrent beaucoup de temps, remplacent souvent un chef ou un directeur de service et y exercent de nombreuses responsabilités. Dans le cas d’un syndicat des eaux notamment, la responsabilité en matière de qualité, particulièrement lourde, mérite indemnisation. Pour tout dire, cet amendement me semble donc un peu populiste.

M. Rémy Rebeyrotte. Je suis favorable à ce que l’on revienne à des indemnités lorsque le travail dans ces SIVU ou SIVOM est réellement fait, sachant que dans certaines structures très anciennes, les indemnités représentent parfois 70 à 80 % du budget. Les préfets doivent continuer le travail qu’ils ont engagé depuis quelques années, en regardant de près l’activité réelle de la structure, la part que représentent les indemnités dans le volume global de leur budget, la pertinence du maintien d’un tel outil par comparaison avec des formules plus légères, notamment contractuelles. Certaines situations à l’évidence abusives nuisent à l’image de certains syndicats. C’est pourquoi je suis partagé : je reste favorable au retour des indemnités, tout en s’assurant de l’utilité réelle de certaines structures qui, parfois, se sont petit à petit vidées de leur sens.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision rédactionnelle CL1211 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 28 quater modifié.

Article 28 quinquies
(art. L. 821-3 du code de la sécurité sociale)
Faciliter l’accès des personnes en situation de handicap aux fonctions électives

La Commission examine l’amendement CL245 de M. Philippe Gosselin.

M. Raphaël Schellenberger. L’examen du texte au Sénat a permis de clarifier l’articulation entre les indemnités de mandat des élus locaux, d’une part, et l’allocation adulte handicapée (AAH), d’autre part. L’amendement CL245 a pour but d’inciter les personnes en situation de handicap à s’engager localement, en réduisant l’impact financier que pourrait avoir la perception d’indemnités de fonction sur leur AAH. Cet amendement vise à sécuriser cette disposition, qui doit être inscrite non seulement dans le code de la sécurité sociale mais également dans le code de l’action sociale et des familles.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je salue l’avancée du Sénat sur cette question à l’initiative de Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées et de Sébastien Lecornu. L’insécurité juridique que vous craignez n’existe pas. C’est pourquoi, cher collègue, je vous demanderai de retirer votre amendement au bénéfice d’un vote conforme de cet article par nos deux assemblées.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Rassurez-vous, monsieur Schellenberger, le renvoi entre les codes est automatique. Votre amendement est donc déjà satisfait.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 28 quinquies sans modification.

Après l’article 28 quinquies

La Commission examine les amendements identiques CL709 de M. Vincent Thiébaut et CL815 de M. Patrick Hetzel et les amendements identiques CL715 de M. Vincent Thiébaut et CL814 de M. Patrick Hetzel.

M. Vincent Thiébaut. Je défendrai ensemble mes amendements CL709 et CL715 avant de laisser la parole à mon collègue bas-rhinois. Ces deux amendements, relatifs au Syndicat des eaux et de l’assainissement Alsace Moselle (SDEA), ont le même fondement.

La réforme territoriale issue de la loi portant nouvelle organisation de la République, dite loi NOTRe, a souvent conduit à transformer des syndicats intercommunaux en syndicats mixtes.

Dans le cas où un syndicat mixte devient membre d’un autre syndicat mixte, ce dernier se retrouve automatiquement écarté de l’application de certaines dispositions du code général des collectivités territoriales réservées aux syndicats mixtes ouverts, dits restreints, qui associent exclusivement des collectivités territoriales ou des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale. Or un syndicat mixte ne constitue ni une collectivité territoriale, ni un EPCI, mais un groupement de collectivités territoriales défini à l’article L. 5111-1 du code général des collectivités territoriales.

C’est le cas notamment à l’article L. 5721-8, qui n’est donc apparemment pas applicable aux syndicats mixtes définis à l’article L. 5711-4, compétents en matière de gestion de l’eau, entre autres. L’amendement CL709 a donc pour objet d’adapter la rédaction de cet article afin de rendre applicable aux syndicats mixtes définis à l’article L. 5711-4 les dispositions prévues aux articles L. 5211-12 à L. 5211-14, et leur permettre de verser des indemnités de fonction à leurs exécutifs en toute sécurité juridique.

L’amendement CL715 est quant à lui un amendement de coordination avec le IV de l’article 16 du présent projet de loi. Pour mettre fin au paradoxe constaté, ce paragraphe prévoit de modifier la rédaction de l’article L. 5721-9 du code général des collectivités territoriales afin d’intégrer les groupements de collectivités territoriales dans les syndicats mixtes ouverts restreints et ainsi de rendre applicables les dispositions de cet article aux syndicats mixtes ouverts restreints comptant parmi leurs membres un autre syndicat mixte.

Dans un souci de cohérence, l’amendement CL709 a pour objet de procéder à la même modification à l’article L. 5721-8 du CGCT.

M. Raphaël Schellenberger. C’est une affaire extrêmement technique. Ces amendements visent un cas d’espèce feu fréquent sur le territoire national. L’histoire fait que des syndicats mixtes ouverts se retrouvent membres d’un autre syndicat mixte ouvert. Une telle configuration est problématique au regard de la circulation des compétences et du contrôle démocratique que cela suppose.

Ces quatre amendements peuvent paraître un peu cavaliers, car ils ne concernent qu’un cas d’espèce, celui du SDEA dans le Bas-Rhin. Ils doivent toutefois nous conduire à réfléchir à ce dont nous discutions auparavant, c’est-à-dire à la possibilité de faire remonter des compétences. Dès lors que l’on dispose d’une administration d’une taille pertinente et si les collectivités peuvent plus facilement transférer les compétences, il doit être possible de trouver des solutions à un grand nombre de cas qui se posent, même si celui du SDEA ne serait pas pour autant forcément résolu.

Le SDEA produit un service intéressant pour sécuriser, sur le plan quantitatif comme sur le plan qualitatif, l’approvisionnement en eau des Bas-Rhinois. Il y a lieu de faire en sorte de préserver ce système, en cohérence avec les adaptations que ce texte apporte à la gestion de la compétence eau et assainissement.

M. Bruno Questel, rapporteur. N’ayant aucune origine alsacienne, je m’en remettrai à l’avis du ministre…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. N’étant pas Alsacien – nul n’est parfait – et ne connaissant pas la situation locale, je ne peux que constater à leur lecture que ces quatre amendements reviennent de facto à créer des indemnités nouvelles pour des personnes siégeant dans les dits syndicats, sans nécessairement être des élus locaux…

Je vous suggère donc, messieurs les députés, de retirer vos amendements et que nous examinions ensemble ce cas d’espèce, car il est légitime de traiter de manière spécifique une situation locale particulière. Faute de quoi, ces dispositions, si elles venaient à être généralisées, pourraient avoir des répercussions dans d’autres structures, telles que les organes de gouvernance des sociétés publiques, dont les représentants pourraient se trouver en droit de percevoir des indemnités alors qu’ils ne sont pas élus locaux. Ce qui n’est pas vraiment l’objet du projet de loi.

M. Vincent Thiébaut. Je suis tout à fait ouvert à un travail sur ce sujet. Pour l’heure, le SDEA n’est composé que d’élus locaux. Je comprends cependant la brèche que pourraient ouvrir ces amendements.

Je retire donc les amendements CL709 et CL715, afin de les retravailler d’ici à la séance, pour approfondir la question. Je précise que je ne suis pas membre d’un syndicat des eaux…

M. Raphaël Schellenberger. Cela serait d’ailleurs incompatible, monsieur le député !

Pour ce qui me concerne, j’ai conscience des conséquences non souhaitées que pourraient entraîner ces quatre amendements dans leur rédaction actuelle. Il importe surtout d’examiner ce cas d’espèce.

Aussi, bien que je n’aie pas déposé ces amendements, madame la présidente, je les retire.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous le notons, comme nous inscrivons l’engagement réciproque des parties de travailler.

Les amendements identiques CL709 et CL815 ainsi que les amendements identiques CL715 et CL814 sont retirés.

Article 29
(art. L. 5211-13 et L. 5842-5 du code général des collectivités territoriales)
Remboursement des frais de déplacement des conseillers communautaires

La Commission adopte l’amendement de précision rédactionnelle CL1234 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 29 modifié.

Article 29 bis A
(art. 13 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives
à la fonction publique territoriale)
Indemnité des membres d’un centre de gestion de la fonction publique ayant reçu une délégation

La Commission adopte l’article 29 bis A sans modification.

Article 29 bis
(art. L. 2123-18 du code général des collectivités territoriales)
Modalités de remboursement des frais de déplacement pour l’exécution de mandats spéciaux dans les conseils municipaux

La Commission adopte l’article 29 bis sans modification.

Article 29 ter A
(art. L. 2123-18-1 du code général des collectivités territoriales)
Modalités de remboursement des frais de déplacement des membres du conseil municipal

La Commission adopte l’article 29 ter A sans modification.

Article 29 ter
(art. L. 2122-22, L. 3211-2 et L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales)
Possibilité de déléguer au président de l’assemblée délibérante les autorisations de mandat spécial

La Commission est saisie des amendements identiques CL1212 du rapporteur et CL1012 de M. Jean-Claude Leclabart.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1212 se justifie par son dispositif.

M. Jean-Claude Leclabart. Défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

M. Raphaël Schellenberger. Cette suppression entraînera des complexités dans la gestion quotidienne de ces mandats spéciaux si une délibération est nécessaire pour chacun d’entre eux. Plutôt que de rendre impossible la délégation au président de l’exécutif de l’autorisation de prévoir des mandats spéciaux, qui s’apparente à une mesure de défiance a priori, on pourrait imaginer une mesure de publicité des mandats spéciaux, selon une logique de confiance a priori. Il serait intéressant de travailler sur une telle disposition d’ici à la séance publique, afin que la délibération sur les mandats spéciaux ne soit pas obligatoire.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je comprends votre point de vue car je me suis posé la même question lors de l’examen du texte au Sénat. Je me suis finalement aperçu que le mandat spécial constituait davantage une protection qu’une contrainte.

Dans le cas le plus répandu, celui du voyage pour jumelage – un grand classique –, le mandat spécial en amont, c’est la protection totale de l’élu qui part en mission. Si la mesure vaut a posteriori, elle introduit toujours un doute sur le remboursement des frais engagés.

Bien qu’étant assez ouvert sur la question, je suis parvenu à la conclusion que le mandat spécial ne fonctionne pas si mal, d’autant qu’il est bien rodé dans les collectivités. Je suis donc plutôt enclin à ne rien modifier, et je maintiens mon avis favorable.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’article 29 ter est supprimé.

Article 29 quater A
(art. 14 de la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriales)
Coordination en lien avec la création de délégations régionales du centre national de la fonction publique territoriale

La Commission adopte l’article 29 quater A sans modification.

Article 29 quater
(art. L. 323-6 du code de la sécurité sociale)
Arrêt maladie des élus locaux

La Commission examine les amendements CL1068 de M. Sacha Houlié et CL1213 du rapporteur.

M. Sacha Houlié. L’article 29 quater prévoit que, sauf avis contraire de leur médecin, les élus locaux peuvent poursuivre leur mandat lorsqu’ils sont en arrêt maladie. Cette inversion du principe semble en effet peu judicieuse. Lorsque les élus salariés sont en arrêt maladie, leur médecin doit rédiger une mention spéciale sur leur certificat médical, s’ils souhaitent poursuivre leurs fonctions. Je propose donc de supprimer cet article.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cette mention spéciale est précisément au fondement de l’amendement CL1213 que j’ai déposé. Je vous suggère donc de retirer votre amendement au profit de l’amendement CL1213, qui est défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis : demande de retrait pour l’amendement CL1068 et avis favorable à l’amendement CL1213.

L’amendement CL1068 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL1213.

Puis, elle adopte l’article 29 quater modifié.

Article 30
(art. L. 2123-34 et L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales)
Modification du régime de prise en charge de la protection fonctionnelle
des maires

La Commission est saisie de l’amendement CL1214 du rapporteur.

M. Bruno Questel, rapporteur. Le Sénat a introduit des compléments bienvenus, qui permettent notamment d’assurer la compensation de cette mesure pour les communes de moins de 3 500 habitants, au lieu de 1 000 habitants comme prévu initialement, et d’étendre le contrat aux élus suppléant le maire ou ayant reçu une délégation.

Je vous propose toutefois de revenir sur la mesure consistant à rendre automatique cette protection fonctionnelle à un élu victime de violences, lorsque le conseil municipal ne s’est pas prononcé contre cet octroi dans un délai de trois mois.

Le risque est en effet réel que l’assureur attende que ce délai soit écoulé pour couvrir l’élu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 30 est ainsi rédigé et les amendements CL574 de M. Xavier Breton, CL728 de M. Vincent Rolland, ainsi que les articles identiques CL342 de M. André Chassaigne, CL542 de Mme Valérie Bazin-Malgras, CL554 de Mme Emmanuelle Anthoine et CL776 de Mme Agnès Thill tombent.

Après l’article 30

La Commission examine l’amendement CL688 de M. Vincent Bru.

M. Vincent Bru. Cet amendement vise à encadrer la protection fonctionnelle en cas de litige au sein d’un organe délibérant. Lorsqu’un membre de l’exécutif est mis en cause, il peut se voir octroyer une protection fonctionnelle, sans qu’il en aille de même pour l’autre personne, notamment si elle appartient à l’opposition, à moins d’un vote favorable de l’organe délibérant. Afin d’assurer une égalité de traitement aux deux parties, mon amendement prévoit donc qu’aucune des deux ne bénéficiera d’une protection fonctionnelle.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait. Vous souhaitez préciser que la protection fonctionnelle ne pourra pas bénéficier aux maires dans le cadre d’un litige avec un autre élu, afin de ne pas déséquilibrer les moyens dont disposent les élus pour se défendre. Votre intention est déjà satisfaite par le fait que le conseil délibérera de toute façon pour accorder cette protection et qu’il appréciera de ce fait les circonstances.

Par ailleurs, je rappelle que ce dispositif a été essentiellement créé pour protéger les maires face aux violences et aux mises en cause émanant des tiers, non élus, qui entraveraient l’exercice de leur mandat. On peut tous penser et espérer que les élus ne se battent pas entre eux…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Même avis.

M. Vincent Bru. J’ai malheureusement à l’esprit des conflits, certes rares, mais bien réels ; L’un d’entre eux, qui opposait un maire à un membre de l’opposition, s’est conclu par un litige dans lequel le premier a bénéficié de la protection fonctionnelle, mais pas le second.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CL356 de M. Fabien Lainé.

M. Fabien Lainé. L’article 121-2 du code pénal dispose que les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l’exercice d’activités susceptibles de faire l’objet de conventions de délégation de service public.

Supprimer cette restriction, comme nous le proposons, aboutirait à une situation plus juste d’une part pour les élus car la faute de négligence de l’élu correspond en réalité, dans l’immense majorité des cas, non à une négligence délibérée d’une règle de sécurité ou de prudence, mais à un dysfonctionnement imputable à une structure qui, en tant que telle, a pu faillir, soit que l’apparition du risque n’ait pas été décelée à temps, soit que les mesures possibles n’aient pas été prises ou correctement relayées sur le terrain.

D’autre part, la situation serait plus juste pour les victimes, qui auraient ainsi la certitude de pouvoir mettre en cause la responsabilité de la collectivité locale sans avoir à craindre de fluctuations de jurisprudence sur la notion d’« activités susceptibles de faire l’objet de conventions de délégation de service public » et en ayant la certitude de disposer d’un débiteur solvable en ce qui concerne la réparation des intérêts civils.

Cette mesure de suppression des conditions posées par le code pénal à l’engagement de la responsabilité pénale des collectivités locales figurait déjà, elle aussi, dans le texte initial de la proposition de loi du sénateur Fauchon, dont le présent amendement aboutit à retrouver le savant équilibre.

Cet amendement a également été discuté avec les associations d’élus.

M. Bruno Questel, rapporteur. La loi du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non intentionnels, dite loi Fauchon, à laquelle vous venez de faire référence, pose que, si la causalité avec le dommage est indirecte, la responsabilité n’est engagée que si la faute est caractérisée.

L’article 121-3 du code pénal précise à ce titre que cette faute doit avoir exposé autrui à un risque d’une particulière gravité, qui ne pouvait être ignoré. Il me semble difficile de supprimer ces dispositions, comme vous le proposez.

Il serait toutefois utile de mener un travail plus approfondi sur cette question, de manière à en préciser les termes. À ce stade, toute réforme apparaît prématurée. Demande de retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je n’émettrai pas un avis défavorable : pour être honnête, je découvre en séance le détail de l’amendement. Comme j’aime parler en conscience et être sûr de ce que nous faisons, je vous demande de retirer l’amendement.

Quant aux dispositions prises pour les élus, elles concernent en réalité tous les agents publics. J’en mesure mal les impacts et leur étendue.

Je vous suggère donc, si vous en êtes d’accord, de retirer cet amendement pour l’examiner dans le cadre de la séance publique. Je me dois également de consulter la chancellerie sur ces sujets, sur lesquels je ne peux pas décider seul.

M. Fabien Lainé. Voilà qui me semble tout à fait constructif, et je m’en réjouis. Nous retravaillerons donc cet amendement ensemble.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL383 de M. Alexis Corbière.

Mme Danièle Obono. Cet amendement, tiré d’une proposition de loi de notre collègue, Loïc Prud’homme, vise à définir le nombre obligatoire d’agents formés à la langue des signes française (LSF) dans chaque mairie, en fonction de la taille des communes concernées.

La France compte environ 4 millions de personnes sourdes et malentendantes et près de 400 000 locuteurs de la langue des signes. Malgré la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, ces citoyens et citoyennes, porteurs et porteuses d’un handicap invisible, sont exclus de la plupart des pans de la citoyenneté.

Cet amendement vise à remédier en partie à cette situation et à permettre une accessibilité réelle des services municipaux aux personnes sourdes et malentendantes.

La contrainte ainsi posée est régulée en fonction de la capacité de la mairie à se doter ou à former des agents et des agentes bilingues. L’amendement semble un pas important pour l’accessibilité, dont nous aurions tort de nous priver à l’occasion de ce projet de loi.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vois mal comment ce sujet, très important, pourra être appliqué à l’ensemble des communes, notamment les plus petites. Nous pouvons toutefois y travailler avec le cabinet du ministre en vue de la séance publique.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Ce projet de loi concerne les élus locaux alors que la question de leur formation sera traitée par voie d’ordonnance.

Madame la députée, si votre amendement est entièrement opportun et ne pose aucune difficulté sur le fond, il traite des agents territoriaux. Or, depuis le début, nous sommes convenus de ne pas toucher à la formation des agents, qui renvoie à des outils législatifs liés à la fonction publique, sur lesquels je sais d’ailleurs que vous vous êtes très investie.

Si le projet concerne les élus locaux, on peut imaginer que ces formations fassent partie de celle dont ces derniers bénéficient. Dans les petites communes rurales, ce sont en effet les élus locaux qui rendent directement le service public. Il y a là une bonne opportunité de leur dispenser ces formations.

Je reprends donc bien volontiers les dispositions de l’amendement pour en faire mon miel, en vue de l’ordonnance.

S’agissant des agents territoriaux, d’autres codes et supports législatifs s’appliquent. Je vous propose donc de retirer votre amendement, dont nous reprendrons l’idée dans le cadre de l’ordonnance sur la formation des élus.

Mme Danièle Obono. Je maintiens l’amendement, tout en entendant ces réponses positives, que j’apprécie. Je ferai suivre votre proposition de travail en commun, afin qu’il puisse aboutir.

La Commission rejette l’amendement.

Article 30 bis
(art. L. 2123-12, L. 3123-10 et L. 4135-10 du code général des collectivités territoriales)
Favoriser la réinsertion professionnelle des élus par le droit à la formation

La Commission examine l’amendement CL796 du Gouvernement.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Cet amendement qui vise à supprimer l’article est défendu. Des réflexions supplémentaires pourront s’ajouter lors du débat en séance publique.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis favorable à la suppression de l’article 30 bis.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 30 bis est supprimé.

Article 31
(art. 12-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. L. 613-5 du code de l’éducation)
Habilitation à légiférer par ordonnances
pour réformer la formation des élus locaux

La Commission examine l’amendement CL797 du Gouvernement, avec les sous-amendements CL1244 de M. Stéphane Baudu et CL1243 du rapporteur.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. L’amendement CL797 du Gouvernement aura pour effet de faire tomber, s’il est adopté, tous les amendements sur l’article. M. le ministre défendra son amendement, suivi par les auteurs des deux sous-amendements, et je donnerai ensuite la parole aux auteurs des amendements susceptibles de tomber afin qu’ils puissent faire part de leurs remarques.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Comme je l’ai dit à de multiples reprises, la question de la formation est un bloc essentiel de ce que nous souhaitons faire quant au statut de l’élu. Il n’y a pas de doute à avoir sur ce point.

De plus, la mécanique d’écriture est redoutable : il s’agit de faire converger pour la première fois non seulement la formation des élus telle qu’elle existe dans les collectivités territoriales, mais également le droit individuel à la formation (DIF), avec tout le circuit, que vous connaissez, de la feuille d’indemnités de l’élu jusqu’à la Caisse des dépôts, sans oublier les organismes agréés, ainsi que le compte personnel de formation.

Nous ne ferons pas une bonne réforme de la formation sans mélanger les euros que l’élu local a levés avec son indemnité – ou sa non-indemnité, s’agissant du conseiller municipal – et ceux qu’il a gagnés comme agent de la fonction publique ou salarié du secteur privé. L’idée est d’avoir un compte unique de formation que l’élu local pourra utiliser comme bon lui semble. C’est le premier objectif de l’ordonnance, qui suppose beaucoup d’écritures, pas toujours simples.

Par ailleurs, comme je l’ai dit au Sénat, je veux une réforme de la formation qui nous permette de garantir la soutenabilité financière du modèle de formation interne. Si la soutenabilité en recettes paraît atteignable, la soutenabilité en dépenses semble plus difficile. J’aimerais que nous regardions dans le détail pourquoi le coût horaire de la formation augmente de manière tout à fait significative depuis maintenant quelques années. Sans être discriminant ou trop rigide, il faut commencer à mettre un peu d’ordre dans cette offre de formation, par exemple en commençant à plafonner certains frais fixes dans le cadre de la formation. Il faudra aussi étudier combien, dans le coût de la formation, revient au contenu pédagogique et combien à l’environnement de la formation – beau sujet !

Je me suis également engagé à consulter chaque président de formation politique dans la mesure où certains organismes de formation sont adossés soit aux formations politiques, soit aux associations d’élus.

Je vous propose donc, premièrement, de créer un groupe de travail spécifique avec les parlementaires passionnés par la question. Il ne se limitera certainement pas à ceux d’entre nous qui s’intéressent aux collectivités territoriales, car le sujet renvoie plus globalement aux enjeux liés à la formation.

Deuxièmement, je propose de mener une consultation précise avec les présidents des différentes formations politiques, afin d’éclairer les parlementaires, le moment venu.

Troisièmement, je voudrais entendre les représentants du monde de la formation, pour leur dire quelques mots du coût horaire car beaucoup d’argent est en jeu chaque année.

Enfin, il s’agira de ne pas fonctionner comme à l’habitude par ordonnance. Vous habilitez parfois le Gouvernement, puis rencontrez des difficultés à être associés à sa rédaction. Je vous propose de ne pas user de l’ordonnance pour en user. Comme vous le voyez, ce texte n’en comprend que deux, l’une sur l’outre-mer, l’autre sur la formation.

Nous travaillerons en coproduction avec le Parlement, l’Assemblée nationale et le Sénat, ainsi qu’avec les associations d’élus. Je vous propose de fonctionner ainsi, car nous n’aurions pas pu faire tout cela par voie d’amendement.

Je m’engage enfin à vous rendre compte régulièrement.

M. Stéphane Baudu. Le sous-amendement CL1244 vient préciser les attentes entourant la réforme par ordonnances, en insistant sur les points essentiels pour la délégation aux collectivités territoriales.

Tout d’abord, un crédit de formation devra être attribué aux nouveaux élus dès leur élection, leur permettant de recevoir une formation en début de mandat, sans subir une année blanche faute de cotisations antérieures.

Il est également demandé de renforcer le recours aux formations à distance, en complément de l’offre de formation présentielle.

Enfin, nous souhaitons réintroduire la notion de mutualisation, qui constitue une piste intéressante pour améliorer l’offre existante, tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif.

M. Bruno Questel, rapporteur. Mon sous-amendement CL1243 précise que les dispositions prises par ordonnance pourront traiter des formations délivrées par des organismes liés aux partis politiques.

Quand j’étais maire, je découvrais l’appartenance partisane d’un élu ou d’un adjoint lorsqu’il venait me faire signer des demandes de formation pour partir aux universités d’été du parti auquel il appartenait.

M. Raphaël Schellenberger. Ce projet d’ordonnances traduit une grande ambition, plutôt bienvenue, car nous constatons un glissement, ces dernières années, d’une logique de formation prise en charge par la collectivité à celle de droit individuel de l’élu. La conception d’ensemble de la formation de l’élu en est notablement transformée.

L’exposé des motifs accompagnant l’amendement du Gouvernement exclut la possibilité de faire appel à des formations dispensées par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), mettant fin à une confusion des genres. Il me semblait invraisemblable que l’organisme chargé de la formation des élus soit celui qui forme les fonctionnaires. En France, les élus ne sont pas des salariés de l’État ; il est normal qu’ils disposent d’organismes de formation particuliers, notamment les partis politiques ou les associations qui leur sont adossées. Il faut évidemment de la transparence, mais pour la vitalité démocratique, il faut que le système soit également opérationnel, ce qui soulève la question de la relation entre le DIF, le compte personnel de formation, et les formations dispensées par les organismes spécifiques aux élus locaux. Peut-être ces organismes de formation spécifiques aux élus locaux pourraient-ils s’intéresser, plus généralement, à la formation des citoyens, c’est-à-dire des futurs élus locaux. C’est en tout cas un débat que nous pouvons nous permettre dans la construction de la future ordonnance.

Quoi qu’il en soit, je souhaite bon courage à la ministre chargée du travail et de la formation professionnelle pour éclaircir les déterminants du coût horaire de la formation…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la commission s’agissant de l’amendement CL1243, et souhaite le retrait du sous-amendement CL1244.

La Commission rejette le sous-amendement CL1244.

Elle adopte le sous-amendement CL1243.

Elle adopte l’amendement CL797, sous-amendé.

En conséquence, l’article 31 est ainsi rédigé et l’ensemble des amendements sur cet article tombent.

Après l’article 31

La Commission est saisie de l’amendement CL1013 de M. Jean-Claude Leclabart.

M. Jean-Claude Leclabart. L’objet de cet amendement est de prévoir une formation à l’exercice des prérogatives d’officier de police judiciaire pour le maire et ses adjoints. Dans toutes les réunions que j’ai organisées, j’ai été surpris du manque d’information des maires sur leurs pouvoirs de police et les possibilités qui étaient les leurs. Je souhaite qu’une formation obligatoire soit dispensée sur le sujet.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je vous demande le retrait de cet amendement dans la mesure où ces dispositions seront prévues dans l’ordonnance.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je souhaite également le retrait de cet amendement.

De deux choses l’une : ou bien nous partons du principe qu’il s’agit d’une formation globale, et alors cette question sera traitée dans l’ordonnance dont l’un des objectifs est de définir le bon niveau de formation ; ou bien il s’agit d’une formation spécifique aux fonctions d’officier de police judiciaire, portant notamment sur l’assermentation, et c’est un sujet différent, qui pourrait faire l’objet d’un amendement en séance afin que la chancellerie se prononce.

Par ailleurs, tel qu’il est rédigé, votre amendement crée une dépense obligatoire sur le budget de formation de la commune. Je vous propose de le retirer, de mentionner la formation aux fonctions d’OPJ dans la définition prévue par l’ordonnance, et vous pourrez réfléchir d’ici à la séance sur le bagage minimum nécessaire pour être OPJ.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL1127 de Mme Anne Blanc.

Mme Anne Blanc. Les auditions conduites par les rapporteurs ont fait apparaître le besoin d’information sur l’offre de formations aux élus. Cet amendement propose qu’un manuel de formation dédié aux élus locaux, recensant l’ensemble des formations auxquelles ils peuvent accéder dans le cadre de leur mandat, soit communiqué à chacun d’entre eux.

M. Bruno Questel, rapporteur. Les amendements de la délégation aux collectivités territoriales pour faciliter le mandat des élus locaux permettent de mesurer le travail réalisé par leurs rapporteurs, notamment sur la formation. Je regrette de devoir vous demander de le retirer, car il n’est pas du domaine de la loi et peut être satisfait par les pratiques des associations d’élus, très dynamiques sur ces sujets.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. J’y vois un amendement d’appel. Nous prévoirons un devoir de publicité de l’offre pédagogique dans les grilles d’agrément des organismes de formation. Si ceux-ci ne s’y conforment pas, l’agrément leur sera retiré. Mais de toute évidence, nous ne pouvons prévoir cette disposition dans la loi.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL427 de Mme Paula Forteza.

Mme Paula Forteza. Je vais vous présenter lors de la discussion des prochains articles plusieurs amendements dressant un parallèle entre les élus locaux en métropole et les élus consulaires, qui sont les élus de terrain représentant les Français de l’étranger.

Mon amendement CL427 prévoit de leur donner accès à la même formation que les élus en métropole.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cet amendement est satisfait par les textes applicables ; je demande son retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je vous remercie, madame la députée, de votre engagement sur ces questions.

Vos amendements soulèvent deux aspects distincts. Pour commencer, celui de la mise en œuvre, pour les conseillers représentants les Français établis hors de France, des mesures sur l’engagement que ce projet prévoit pour les élus locaux métropolitains : il serait curieux que nos concitoyens à l’étranger ne bénéficient pas des mesures d’encouragement à l’engagement ; nous reviendrons sur ce point un peu plus tard.

Pour ce qui est de la formation, objet de l’amendement qui nous est soumis et que je vous propose de retirer, l’ordonnance traitera de cette question, mais il faut garder à l’esprit que les conseillers des Français à l’étranger ne cotisent pas à un certain nombre de dispositifs. Si nous étendons certains droits, les prélèvements sur les indemnités qui les accompagnent seront également étendus. Nous devons y être attentifs, mais je m’engage, au nom du Gouvernement à ce qu’en séance publique, une disposition soit proposée, à même de faciliter l’engagement des représentants des Français à l’étranger.

Mme Paula Forteza. Je vous remercie, et je me félicite que ce sujet soit traité dans ce texte. Je retire cet amendement, et j’y retravaillerai avec mes collègues députés des Français de l’étranger, le cabinet du secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères et le vôtre.

L’amendement est retiré.

Article 31 bis A
(art. L. 2123-12 du code général des collectivités territoriales)
Suppression du seuil d’habitants conditionnant la formation des élus d’une commune au cours de la première année de leur mandat

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CL798 du Gouvernement.

En conséquence, l’article est supprimé.

Article 31 bis B
(art. L. 952-1 du code de l’éducation)
Accès des chargés d’enseignement aux fonctions électives

La Commission adopte l’amendement de clarification rédactionnelle CL1215 du rapporteur.

En conséquence, l’article est ainsi rédigé.

Article 31 bis
(art. L. 2121-19, L. 3121-20 et L. 4132-20 du code général des collectivités territoriales)
Séances réservées aux questions orales posées par l’opposition

La Commission est saisie des amendements identiques CL89 de Mme Catherine Kamowski et CL1113 de Mme Anne Blanc.

Mme Catherine Kamowski. J’ai le plus grand respect pour les droits de l’opposition, et il est certain que chacun doit pouvoir s’exprimer dans le cadre d’un conseil municipal. Des règles sont d’ailleurs prévues pour permettre à l’opposition de s’exprimer dans les journaux municipaux. Je pense néanmoins que les dispositions introduites par le Sénat relèvent plutôt du règlement du conseil municipal que de la loi ; j’en propose donc la suppression.

Laissons aux maires le droit de décider ; le dialogue avec l’opposition sera plus ou moins constructif selon les situations dans chaque municipalité. Même si cet article est bien rédigé et que son objet est de donner à l’opposition l’assurance qu’elle pourra s’expliquer, je pense qu’il relève du règlement du conseil municipal, révisable à chaque début de mandat, d’organiser l’expression de l’opposition.

Mme Anne Blanc. L’amendement CL1113 a le même objet. Laissons aux conseils municipaux la liberté de s’organiser, en fonction de leurs objectifs, en laissant toujours une place aux oppositions.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

M. Sacha Houlié. Je suis défavorable à ces amendements de suppression de l’article car je propose un autre amendement portant sur les droits de l’opposition dans les conseils municipaux. Aujourd’hui, le maire est libre d’organiser les conseils, et il nous paraît utile de prévoir un droit d’expression de trente minutes en début de conseil municipal, tous les six mois. Ce sont des pratiques que nous connaissons à l’Assemblée nationale : l’opposition dispose d’un plus grand nombre de questions lors de la séance des questions au Gouvernement et la présidence de la commission des finances lui revient de droit.

Renforcer les droits de l’opposition dans les instances locales me semble une bonne idée, et je propose d’aller plus loin. Je vous invite donc à voter contre ces amendements pour adopter celui que je présenterai dans un instant.

Mme Anne Blanc. Ne laisser que trente minutes tous les six mois à l’opposition n’est pas de nature à garantir un fonctionnement très démocratique de nos assemblées délibérantes. Laissons-les décider du temps et de l’organisation de leurs débats.

Mme Catherine Kamowski. À l’inverse, quand le conseil municipal se réunit une fois par mois, si l’opposition bénéficie de trente minutes à chaque fois, cela lui fera un temps de parole très long, bien supérieur à ce dont bénéficieront certains conseillers municipaux de la majorité qui n’ont pas de délibération à présenter. L’opposition a toujours la possibilité de s’opposer à toutes les délibérations présentées en conseil municipal, et d’expliquer pourquoi et comment. C’est ainsi que cela fonctionne au jour le jour.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je suis favorable à ces amendements, car tout comme nous avons estimé que certains éléments du fonctionnement des EPCI relevaient du pacte de gouvernance, il me semble que le temps laissé à l’opposition dans les conseils municipaux relève de leur règlement intérieur, même si je n’ignore pas que certains maires se comportent de manière un peu autoritaire avec leurs oppositions et qu’il faut aménager les choses.

La comparaison avec le fonctionnement du Parlement a ses limites : les conseils municipaux ne connaissent pas le parlementarisme rationalisé. De plus, lorsque l’Assemblée a décidé de renforcer les droits de l’opposition, c’est le règlement qui a été modifié, pas la Constitution ou les lois organiques, et ce règlement s’impose aux membres de Gouvernement.

La proposition de M. Houlié part de bonnes intentions, mais je souhaite rester cohérent avec nos propos sur les pactes de gouvernance et le règlement intérieur.

M. Sacha Houlié. Je précise que notre amendement prévoit un droit d’expression de trente minutes tous les six mois, et non tous les mois. La disposition votée au Sénat prévoyait également trente minutes tous les six mois, mais sur demande d’un dixième des membres ; notre amendement supprime cette deuxième condition.

Au Parlement, l’opposition bénéficie d’une exposition médiatique qui n’existe pas toujours dans les communes. La vie communale n’intéresse pas toujours le grand public ou les médias, et il est donc moins facile pour l’opposition de faire valoir ses droits face à la majorité. Je veux bien reconnaître que la loi n’est pas le vecteur naturel pour ce type de dispositions, mais faute de l’y inscrire, ces dispositions risquent de rester lettre morte.

M. Raphaël Schellenberger. Il ne faut pas penser que les oppositions municipales ne disposent d’aucun droit : elles s’expriment lors des délibérations et jouissent d’un droit de publication dans les bulletins municipaux. Encore leur faut-il s’institutionnaliser pour en bénéficier ; or, dans nombre de communes, l’opposition est une notion très vague, voire fluctuante.

Les droits des oppositions dans les conseils municipaux ont été conçus de façon analogue aux droits de la majorité. Dans le bulletin municipal, les possibilités d’expression sont proportionnelles au score des listes. Cet article propose de créer un droit réservé à l’opposition ; or des conseillers municipaux de la majorité peuvent aussi souhaiter poser des questions ou inscrire des sujets à l’ordre du jour.

Ce sont des questions de gouvernance interne ; notre travail de législateur est de nous assurer qu’un minimum de droits est reconnu à l’opposition – à titre personnel, je suis plutôt partisan d’une démocratie locale très vive –, mais sans entrer pour autant dans le détail de l’exercice de ces droits au niveau local.

Mme Catherine Kamowski. Plutôt que de déterminer un temps fixe de trente minutes tous les six mois, qui relève du règlement intérieur, ne pourrait-on prévoir que les droits d’expression de l’opposition, aussi bien par écrit qu’à l’oral, sont définis dans le règlement intérieur de tous les conseils municipaux ?

M. Raphaël Schellenberger. C’est déjà le cas, c’est déjà écrit dans la loi.

Mme Catherine Kamowski. Peut-être est-il utile de le rappeler clairement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Heureusement, il n’est pas nécessaire de rappeler les droits de l’opposition, nous vivons dans un beau pays où ils sont largement garantis ! À tel point que, pour certaines délibérations telles que le budget ou les documents d’urbanisme, l’insuffisance des débats constitue d’ailleurs un motif d’annulation devant le juge. Il n’est donc pas nécessaire de rappeler les principes. Mais il arrive qu’un maire tienne de façon serrée son ordre du jour et la distribution de la parole, et la situation est alors compliquée pour l’opposition.

Je ne sais pas s’il s’agit d’une disposition écrite ou d’un usage, mais dans les conseils départementaux ou régionaux, au début de chaque séance plénière, un débat de politique départementale ou régionale est prévu. Un temps est réservé à l’opposition, réparti à la proportionnelle entre les différents groupes. C’est en tout cas la pratique du conseil général de l’Eure, que je connais bien, et au sein duquel Bruno Questel est président du groupe. Les groupes sont libres d’utiliser ce temps de parole s’ils le souhaitent – le groupe majoritaire ne s’en sert plus au conseil général de l’Eure.

Je pense préférable d’abandonner les logiques de temps de parole octroyé à la demande d’un dixième des membres, ou à raison de trente minutes tous les six mois : on peut faire plus clair en instaurant un débat de politique municipale, avec un temps de parole proportionnel. Nous pourrions inviter à l’inscrire dans le règlement intérieur, ou de manière plus contraignante. Il ne faut pas le rendre totalement obligatoire, car la pratique ne peut pas être identique dans un conseil municipal qui se réunit une fois par trimestre – auquel cas il est normal de prévoir un temps de débat – et dans un conseil qui se réunit tous les mois, où le maire ne souhaite peut-être pas se taper une heure de débat à chaque fois… Ajoutons que les dispositions que nous votons ont vocation à s’appliquer pour les communes de 400 habitants comme pour celles de 100 000, ce qui fait tout le charme de la chose !

La Commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 31 bis est supprimé et les amendements CL1069 de M. Sacha Houlié, CL90 de Mme Catherine Kamowski, CL345 de M. André Chassaigne, CL1237 et CL1238 du rapporteur tombent.

Après l’article 31 bis

La Commission est saisie de l’amendement CL384 de Mme Bénédicte Taurine.

Mme Danièle Obono. Nous proposons de restaurer et d’étendre la souveraineté communale, qui passe nécessairement par une cogestion citoyenne des biens communs.

Nous proposons donc d’ouvrir les commissions consultatives des services publics locaux (CCSPL) à toutes les associations et aux citoyens et citoyennes qui le souhaitent, en prévoyant la possibilité d’auditionner des experts et de demander tout document utile.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable… Je sais que toute suggestion de retrait serait peine perdue !

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL531 de Mme Annaïg Le Meur.

Mme Annaïg Le Meur. Cet amendement vise à étendre l’obligation de réserver un droit d’expression aux conseillers municipaux d’opposition dans le bulletin municipal aux communes de 1 000 habitants et plus. Actuellement, cette obligation n’existe que dans les communes de plus de 3 500 habitants. Suite à nos débats, je pense même que nous pourrions réduire ce seuil à 500 habitants, à partir duquel le scrutin de liste est applicable.

M. Bruno Questel, rapporteur. Demande de retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Cet amendement est satisfait par l’article 83 de la loi NOTRe.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL382 de Mme Bénédicte Taurine.

Mme Danièle Obono. Nous proposons d’ouvrir aux habitants et habitantes un temps de questions lors de chaque conseil municipal.

La commune, institution née de la Révolution de 1789, est de plus en plus affaiblie par les choix de l’État et la pression de l’Union européenne qui la privent de moyens d’action. Il faut renforcer la souveraineté des communes plutôt que de favoriser la spécialisation et la professionnalisation de la politique.

La vie communale doit favoriser une participation directe des citoyens et des citoyennes. Or si les conseils municipaux sont ouverts au public, mais celui-ci est condamné à y garder le silence. Nous estimons que les citoyens et citoyennes doivent pouvoir s’exprimer sur les affaires de la commune au moyen des questions orales que nous proposons d’instituer. Cela permettrait de répondre aux aspirations à un renouveau démocratique exprimées lors des mobilisations des « gilets jaunes ».

M. Bruno Questel, rapporteur. Il faut laisser aux communes la liberté de s’organiser. Les conseils municipaux des petites communes rassemblent souvent peu de personnes, et ce n’est pas lié aux phénomènes que vous décrivez, mais à la vraie vie : les enfants à garder, le programme télévisé du soir ou le match de football…

Dans ma pratique en tant que maire, le conseil commençait par des questions diverses et un tour de table complet pour les vingt-trois élus, et la parole était laissée au public une fois l’ordre du jour épuisé. Et le tout se passait très bien.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

Mme Danièle Obono. Dans les petites communes, prévoir la participation des citoyens aux débats permettrait de redonner vie aux conseils municipaux. Cet amendement permet de les faire bénéficier de l’expérience positive que vous décrivez ; il serait bon de le garantir par la loi.

M. Raphaël Schellenberger. Ce sont là des pratiques que bon nombre de communes connaissent ; pour ce qui me concerne, je les ai héritées de mon anté-prédécesseur et mon successeur les perpétue. Elles ne rencontrent pas forcément le succès que l’on imagine : cela fonctionne plutôt bien au premier conseil municipal, il y a un peu moins de monde au deuxième, et beaucoup, beaucoup moins au vingt-cinquième… C’est néanmoins un usage heureux qui contribue à la démocratie participative et consultative, et qui instaure un rapport très direct : les propos sont entendus par les conseillers municipaux autour de la table. Mais l’institutionnaliser aurait des conséquences faciles à imaginer dans les grandes communes, où les conseils municipaux peuvent durer des journées entières, et lors des périodes électorales, nous verrions des gens intervenir dans le seul but de se faire filmer pour alimenter les réseaux sociaux. Le système deviendrait rapidement intenable.

La Commission rejette l’amendement.

Article 31 ter
(art. L. 6111-1 du code du travail)
Validation des acquis de l’expérience

La Commission adopte l’article 31 ter sans modification.

Après l’article 31 ter

La Commission est saisie des amendements CL423, CL424, CL425 et CL422 de Mme Paula Forteza.

Mme Paula Forteza. Ces quatre amendements rapprochent les règles applicables aux élus des Français de l’étranger de celles des élus métropolitains.

Nous proposons par exemple que les élus consulaires président le conseil consulaire, qui constitue le pendant du conseil municipal pour les Français à l’étranger ; il est compétent sur les affaires culturelles, éducatives, économiques et sociales, notamment les bourses scolaires ou le dispositif de soutien au tissu associatif des Français à l’étranger, qui a remplacé la réserve parlementaire. Il fonctionnerait avec des binômes, les conseillers consulaires présideraient ce conseil et les postes diplomatiques et consulaires y seraient nommés rapporteurs généraux pour apporter l’expertise technique nécessaire.

Nous proposons aussi de changer le nom des conseillers consulaires, car de nombreux compatriotes à l’étranger les prennent pour des agents du consulat, alors qu’ils sont élus des citoyens. Nous proposons de les nommer : « élus locaux des Français de l’étranger ».

M. Bruno Questel, rapporteur. Vous soulevez une question d’importance sur la place des Français à l’étranger dans les processus démocratiques qui nous intéressent. Des questions se posent toutefois, non sur l’opportunité de ces mesures, mais sur les ajustements à y apporter. Je m’en remets à la sagesse de la commission, afin de permettre à chacun de se prononcer et d’y travailler dans la perspective de la séance.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Sans être un connaisseur de tous les mécanismes qui font l’objet des propositions de Mme Forteza, je propose d’adopter ces amendements. L’article posant le principe de l’existence des élus locaux des Français de l’étranger sera ainsi incorporé au texte et le secrétaire d’État chargé de l’Europe et des affaires étrangères pourra ensuite amender la rédaction en séance.

Mme Anne Blanc. Je m’éloigne du sujet, mais je souhaite évoquer deux thèmes qui ont été déclarés irrecevables.

La délégation aux collectivités territoriales a proposé d’intégrer à la notion de responsabilité sociale des entreprises (RSE) la thématique de l’engagement sous toutes ses formes, pas seulement politique mais aussi associatif. Il nous semble que l’engagement en politique des salariés des entreprises en serait facilité : les auditions ont montré que le lien est parfois tendu entre les salariés et leurs responsables.

Par ailleurs, il nous est apparu que les retraites des élus ne sont pas en adéquation avec l’implication et l’engagement des élus municipaux ou intercommunaux. Ce sujet sera traité dans la future loi sur les retraites, mais je souhaitais en faire état dès à présent.

La Commission adopte successivement les amendements CL423, CL424, CL425 et CL422. L’article 31 quater est ainsi rédigé.

Article 32 (supprimé)

La Commission maintient la suppression de l’article 32.

TITRE V
VOTE

Article 33
(art. L. 12-1 et L. 18-1 [nouveaux], L. 71, L. 72, L. 79 à L. 82 [nouveaux], L. 387, L. 388 et L. 388-1 [nouveau] du code électoral et art. 30 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire)
Droit de vote des personnes détenues

La Commission est saisie des amendements identiques CL1216 du rapporteur et CL1075 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. L’amendement CL1216 vise à rétablir l’automaticité de l’inscription sur les listes électorales des personnes détenues. Cette mesure se justifie par la fragilité particulière de ces personnes, qui entraîne souvent une abstention et un désintérêt à l’égard des élections.

Par ailleurs, cette inscription dès l’arrivée de la personne dans l’établissement pénitentiaire permettra de mettre en œuvre cette procédure de manière adaptée, plutôt que de répondre à de multiples demandes à l’occasion de chaque scrutin, et parfois dans la précipitation.

M. Sacha Houlié. L’amendement CL1075 est défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte les amendements.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement CL395 de M. Alexis Corbière.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, le groupe parlementaire de la France insoumise souhaite permettre de renforcer les campagnes d’inscription sur les listes électorales des personnes détenues.

Afin de renforcer l’inclusion et la protection des droits civiques des personnes incarcérées, l’exercice du droit de vote oblige l’administration pénitentiaire à une attention particulière au regard du public pris en charge.

Le manque d’information sur les questions relatives à l’exercice du droit de vote en détention est patent. Aussi l’amendement CL395 vise-t-il à permettre la mise en place de campagnes d’inscription sur les listes électorales.

Dans le même esprit, notre amendement CL394, que nous examinerons dans un instant, propose la distribution de la propagande électorale en milieu pénitentiaire.

M. Bruno Questel, rapporteur. Défavorable, d’autant plus que vous évoquez un éventuel refus d’appliquer la loi de la part de l’administration pénitentiaire… Nous sommes tout de même dans un cadre un peu spécial.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis défavorable.

Mme Danièle Obono. C’est ce que constatent de nombreuses associations. Le législateur se devrait de faciliter l’application de la loi dans ces établissements. Nous sommes parfaitement dans notre rôle.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission est saisie des amendements identiques CL1217 du rapporteur et CL1070 de M. Sacha Houlié.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je retire mon amendement au profit de celui de M. Houlié.

M. Sacha Houlié. L’amendement CL1070 est défendu.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision CL1239 du rapporteur.

Ensuite de quoi, elle examine l’amendement CL866 de M. Philippe Dunoyer.

M. Philippe Dunoyer. Ces deux amendements tirent les conséquences de l’avis rendu par le Congrès de Nouvelle-Calédonie lorsqu’il a été saisi du projet de loi.

L’amendement CL866 vise à préciser la notion d’élections générales, telle qu’elle figure à l’alinéa 36, pour tenir compte du régime électoral spécifique de la Nouvelle-Calédonie, avec des corps électoraux très particuliers – cela ne vous avait pas échappé, monsieur le ministre… Il s’agit avant tout d’un amendement de sécurité, pour éviter toute difficulté d’appréciation ; mais je suis prêt à le retirer s’il m'est précisé que cette notion s’entend à la fois des élections nationales et des élections des membres du Congrès et des assemblées de province.

M. Bruno Questel, rapporteur. Je m’en remets à la sagesse gouvernementale…

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. La difficulté tient à l’expression « élections générales » qui revient à de nombreuses reprises – j’ai dénombré trente-sept occurrences – sans avoir forcément toujours la même signification. Il n’est évidemment pas question de traiter légèrement cette question, d’autant que cela aura fatalement des implications sur la loi organique. Je vous suggère de retirer votre amendement, le temps d’examiner cette affaire avec le ministère de l’Intérieur pour mettre au point quelque chose qui tienne juridiquement la route.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL867 de M. Philippe Dunoyer.

M. Philippe Dunoyer. Cet amendement reprend également l’avis rendu par le Congrès. Il prévoit l’application en Nouvelle-Calédonie des dispositions relatives au vote aménagé pour les détenus un peu plus tôt que ce qui est prévu dans le cas général, soit dès l’entrée en vigueur de la loi. Je me devais de vous présenter cette proposition mais, pour être honnête, je ne me sens pas totalement à l’aise… La raison tient au fait que, dans la mesure où les nouvelles modalités de gestion et d’inscription sur les listes électorales, et notamment le répertoire électoral unique (REU), ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie, nous n’avons pas besoin d’attendre 2021 pour l’entrée en vigueur du dispositif.

M. Bruno Questel, rapporteur. Cette fois-ci, ce sera un avis défavorable, ou une demande de retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Je suis ennuyé d’émettre un avis défavorable, car j’ai toujours à cœur de tenir compte des avis du Congrès. Mais sur le plan légistique, créer du droit avant même que cela n’ait créé du droit, ce n’est pas simple…

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement de coordination CL1245 du rapporteur.

Puis elle rejette l’amendement CL394 de Mme Bénédicte Taurine.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement CL396 de Mme Bénédicte Taurine.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, nous proposons d’instaurer une expérimentation visant à mettre en place des bureaux de vote en détention afin de renforcer l’inclusion et la protection des droits civiques des personnes incarcérées.

La réinsertion des détenus prônée par l’autorité judiciaire et par les responsables politiques eux-mêmes passent aussi par une réinsertion civique. Si depuis la réforme du code pénal de 1994, les personnes détenues conservent le droit de vote, sauf si la justice a prononcé une peine d’incapacité électorale à leur encontre, dans la réalité de la détention, l’exercice de ce droit de vote est largement entravé. Les conditions d’éligibilité aux dispositifs existants du vote par procuration ou de la demande de permission de sortir, excluent de fait un grand nombre de personnes détenues ayant pourtant conservé leurs droits civiques. Le vote par procuration suppose de trouver un mandataire inscrit sur le même bureau de vote, et de donner une pleine confiance quant à la confidentialité de son choix de vote ; la permission de sortir quant à elle exclut un certain nombre de personnes détenues, en particulier celles et ceux qui sont en détention provisoire – plus globalement, les permissions de sortir sont, dans les faits, très rarement accordées.

Notre amendement tend donc à expérimenter la mise en place des bureaux de vote en détention, comme cela existe dans quelques autres pays européens dont le Danemark, afin d’offrir une possibilité supplémentaire et plus simple d’exercice du droit de vote.

M. Bruno Questel, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Défavorable également.

La Commission rejette l’amendement.

Enfin, elle adopte l’article 33 modifié.

TITRE VI
DISPOSITIONS RELATIVES AUX OUTRE-MER

Article 34
Habilitation à légiférer par ordonnance pour l’adaptation et l’extension du projet de loi dans les outre-mer

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 35
(art. L. 2573-19 et L. 2573-50 du code général des collectivités territoriales)
Règles applicables au stationnement payant en Polynésie française

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 36
(art. L. 2573-25 du code général des collectivités territoriales)
Extension des dispositions relatives aux crématoriums aux communes de la Polynésie française

La Commission adopte l’amendement de coordination CL1240 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article ainsi modifié.

Article 37
(art. L. 2224-7 du code général des collectivités territoriales)
Compétence des services de l’eau en matière de préservation de la ressource

La Commission est saisie de l’amendement CL820 de M. M. Patrick Hetzel.

M. Raphaël Schellenberger. Sans modifier le sens de cet article, qui permet de conforter l’assise juridique des actions engagées par les services d’eau potable pour gérer et préserver la ressource dans laquelle est effectué le prélèvement d’eau destinée à la consommation humaine, il est nécessaire de permettre à ces services, d’engager de telles actions tant au regard de ressources aujourd’hui exploitées qu’à celui d’autres ressources nécessaires à leur approvisionnement futur. Je reconnais que cet amendement, dans un titre consacré aux outre-mer, est relativement mal placé… (Sourires.)

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 37 sans modification.

Enfin, elle adopte l’ensemble du projet de loi, modifié.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous aurons passé dix-huit heures ensemble, pour un débat extrêmement intéressant. Je vous remercie. Le texte sera examiné à partir du 18 novembre en séance publique.

*

*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande dadopter le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique (n° 2357) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 


   COMPTE RENDU DES Débats
DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Lors de sa seconde réunion du mercredi 30 octobre 2019, la commission du développement durable et de laménagement du territoire examine, sur le rapport de M. Alain Perea, rapporteur pour avis, le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique.

Mme la présidente Barbara Pompili. Nous examinons pour avis le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique. Le champ de notre saisine pour avis porte sur les articles 5, 7, 8, 11 et 20 bis du projet de loi. Celui-ci sera examiné la semaine prochaine par la commission des lois.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Le projet de loi s’articule autour de quatre axes : la place du maire dans l’établissement public intercommunal (EPCI) ; le pouvoir de police du maire ; sa vie quotidienne d’élu local, notamment les relations qu’il peut entretenir avec les services de l’État ; le renforcement du droit des élus, incluant des droits à la formation, le projet de loi plaçant ces questions sous le vocable de l’ « engagement ».

Le fonctionnement de notre assemblée fait que c’est la commission des lois qui est naturellement saisie au fond de ce texte. Nous en sommes, quant à nous, saisis pour avis. J’en suis particulièrement satisfait, car notre commission, du fait même de ses attributions – le développement durable et l’aménagement du territoire –, a une approche différente de ce genre de texte. De fait, quand l’organisation territoriale bouge, cela peut avoir des conséquences sur la distribution des compétences en matière d’eau et d’assainissement, comme cela peut en avoir sur l’aménagement du territoire. J’espère que nous apporterons notre petite pierre à l’édifice.

Suite à l’application du nouveau Règlement de l’Assemblée nationale, nous devons, comme commission saisie pour avis, établir une annexe au rapport au fond de la commission des lois. Je tiens à vous entendre et à pouvoir tenir compte des propos que vous tiendrez, soit pour présenter la position de votre groupe, soit pour défendre vos amendements. Je précise que certains amendements ne seront pas défendus aujourd’hui parce qu’ils ne portent pas sur les articles dont nous sommes saisis.

Nos travaux préparatoires ont inclus la participation aux auditions organisées par le rapporteur de la commission des lois, M. Bruno Questel, qui a entendu différentes instances des associations représentatives des élus. De notre côté, nous avons entendu les représentants des agences de l’eau, notamment sur l’article 5, ainsi que le cabinet de Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et les services compétents du ministère de la transition écologique et solidaire.

Certains collègues ont suggéré que ce projet de loi avait pour objet de « détricoter » l’intercommunalité, dans une démarche qui serait à contre-courant de l’histoire. Je voudrais que nous sortions de l’opposition stérile entre les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les communes.

Dans notre pays, l’intercommunalité s’est construite sur une sorte de grand mensonge, qui voulait qu’elle fût un outil au service des communes. Or, à chaque nouveau texte, les élus communaux avaient l’impression que l’on voulait supprimer les communes et leur enlever leurs compétences : en fait d’outil au service des communes, on décidait surtout d’accroître la dimension intercommunale au détriment des communes.

Aujourd’hui, les élus, ruraux ou non, veulent se reconnaître dans une intercommunalité. Dans le cadre des cinq articles dont nous sommes saisis, j’ai essayé, au travers de quelques amendements que je défendrai tout à l’heure, de faire émerger un équilibre entre une vision globale allant dans l’intérêt des compétences eau et assainissement et celui de la commune. De telles questions ne peuvent pas être traitées à l’échelle de la commune ; il faut les traiter à l’échelle intercommunale, voire, selon les experts, au-delà. Si, donc, on ne peut pas dire que l’échelle communale soit celle qui convienne pour avoir une vision globale de l’eau, on peut néanmoins chercher à redonner aux communes les moyens d’agir concrètement sur leur territoire. Plutôt que de suivre une logique de confrontation entre communes et intercommunalités, réfléchissons plutôt aux objectifs à atteindre et aux niveaux de territoire pertinents pour fixer une stratégie et engager les actions correspondantes – tantôt au niveau communal, tantôt au niveau intercommunal.

J’en viens aux cinq articles dont nous sommes saisis. Je viens de parler des compétences eau et assainissement, qui figurent à l’article 5, et auxquelles il conviendrait, selon moi, d’ajouter les compétences en matière de gestion des eaux pluviales. Le projet de loi nous arrive du Sénat complètement « détricoté », au profit d’une vision qui fait davantage place à la commune, à chaque fois que cela est nécessaire. Vous l’aurez compris, ce n’est pas forcément dans cette direction que nous voulons aller.

L’article 7 concerne les plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUI) sur lesquels nous avions beaucoup travaillé dans le cadre de la loi relative à l’évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite « loi ELAN ». Nous voulons aujourd’hui poser clairement le principe que le PLUI est un outil intercommunal.

L’article 8 concerne la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI). Il vise à lui apporter à la fois stabilité et – ce qui peut paraître paradoxal – souplesse, puisqu’il supprime la révision du schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI) à date fixe et en donne l’initiative à la commission.

L’article 11 porte sur les conséquences financières du départ d’une commune d’une intercommunalité. Nous allons essayer, au travers de quelques amendements, de proposer des dispositions plus dynamiques, en nous appuyant sur le fameux adage qui veut qu’on sache ce que l’on quitte, mais pas ce que l’on va avoir. Nous proposerons donc plus de transparence sur ce point.

Enfin, l’article 20 bis porte sur la relation que peut avoir l’élu local avec les services de l’État.

M. Lionel Causse. Nous sommes nombreux, dans cette législature, et particulièrement dans cette commission, à avoir été élus locaux. C’est avant tout un engagement, une belle expérience au service des autres, mais c’est parfois un sacerdoce. J’ai moi-même été conseiller départemental, conseiller municipal, puis maire et vice-président d’intercommunalité. Je sais les difficultés qui peuvent décourager nos concitoyens à s’engager au niveau local.

C’est pourquoi le groupe LaREM soutient l’initiative du Gouvernement visant, à travers ce texte, à simplifier l’exercice des mandats locaux et à redonner de l’attractivité à ces fonctions. Nous proposerons des amendements pour enrichir le débat, car il s’agit de trouver le bon équilibre. C’est une bonne chose que notre commission ait été saisie pour avis. Elle pourrait apporter un regard sur l’ensemble du texte, mais ne s’est saisie que de cinq articles. Notre groupe fera d’autres propositions sur ce projet, en commission des lois, sur de nombreux points relatifs au développement durable et à l’aménagement du territoire.

Les articles dont nous sommes saisis sont principalement des mesures d’assouplissement et de simplification.

L’article 5 porte sur le transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes. Les travaux du Sénat sont allés, selon nous, trop loin pour atteindre l’équilibre dont je parlais précédemment. Nous proposerons donc une nouvelle écriture qui tend vers un juste compromis en répondant aux problématiques soulevées au Sénat.

L’article 7 renforce le rôle des communes dans l’élaboration des plans locaux d’urbanisme intercommunaux. L’article 8 est une mesure de simplification qui porte sur les schémas départementaux de coopération intercommunale. L’article 11 permet une meilleure information sur l’impact financier des changements de périmètre des EPCI.

Enfin, notre commission est saisie de l’article 20 bis, issu des travaux du Sénat. Même s’il poursuit un objectif louable, il présente également un risque de complexification. Là encore, nous ferons des propositions visant à trouver un équilibre et à permettre un dialogue efficace entre les élus locaux et les représentants de l’État. Si nous avons été saisis sur ce projet de loi, c’est pour donner une impulsion à l’aménagement du territoire, mais non pour complexifier les procédures existantes. L’objectif est de laisser de l’autonomie aux élus locaux, de ne pas les contraindre, mais de leur permettre de faire évoluer et de développer leurs territoires. En un mot, il faut faciliter la vie des élus.

Nous pourrons voir les résultats de ce texte très rapidement et très concrètement sur le terrain. Les meilleures intentions du législateur ont parfois abouti à des procédures complexes et absurdes pour les acteurs locaux. C’est avec cela en tête que notre groupe participera au débat dans la recherche d’un équilibre entre impulsion de l’aménagement du territoire et simplification du fonctionnement des collectivités.

M. Martial Saddier. Le groupe Les Républicains est très heureux de voir arriver ce texte de toilettage, pour répondre aux interrogations et blocages apparus au fil des années sur le terrain. Nous y sommes – ce n’est pas un secret – plutôt favorables à ce stade de nos discussions. Toutefois, prenons garde au danger inhérent à ce genre de texte que, pour débloquer quelques situations, on défasse ou on remette en cause les territoires qui se sont organisés. Il ne faudrait pas y rouvrir des débats clos.

S’agissant de l’eau et de l’assainissement, le rapporteur pour avis a bien résumé la situation. N’oublions jamais qu’il existe un décalage entre les zones qui produisent l’eau potable, la stockent et la protègent, et celles qui la consomment, c’est-à-dire les zones très urbaines. Autant ces dernières ont besoin des zones rurales pour les alimenter en eau préservée, autant pour protéger l’eau, les zones rurales ont besoin de l’effort financier des zones urbaines. C’est la solidarité entre l’amont et l’aval qui fait qu’on ne peut plus, effectivement, raisonner à la seule échelle communale en ce qui concerne l’eau et l’assainissement. Encore faut-il que les intercommunalités aient l’obligation de traiter l’eau et l’assainissement sur la totalité de leur territoire.

Attention aussi aux fausses bonnes idées ! Nous avons entendu parler de compétences éventuellement départementales en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI). Or cela pourrait remettre en cause les bassins versants et leur organisation. Soyons extrêmement vigilants sur ces aspects, car les remises en cause envisagées concerneraient aussi le financement de la GEMAPI. Du reste, l’efficacité serait-elle meilleure à l’échelle du département qu’à l’échelle du bassin versant ? Cela mérite d’être discuté.

Avec mon collègue M. Jean-Marie Sermier, nous pensons qu’il faut arrêter la course au gigantisme des schémas de cohérence territoriale (SCOT) ou des EPCI. Certains rêvent de découper les départements en trois ou quatre EPCI ? Au secours ! Ce n’est pas ainsi qu’on économise le plus d’argent public, alors qu’on s’éloigne, ce faisant, des citoyens.

Je regrette que, par voie réglementaire, on ait supprimé le vote final sur les schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI). Certes, une minorité de blocage peut se former pour que le préfet apporte des modifications aux dispositifs. Mais qu’on ait supprimé ce vote final prévu par la loi pour approuver le schéma est, à mon avis, la cause de beaucoup des maux actuels. Je déposerai un amendement pour le rétablir.

M. Jimmy Pahun. Le groupe MODEM et apparentés souhaite saluer un texte qui, en plus d’être très attendu, est très bien perçu localement. À notre avis, il contribuera à répondre à la dépossession ressentie par les élus municipaux du fait du développement des intercommunalités, et à simplifier l’exercice de leurs missions. Le groupe MODEM a pu prendre toute la mesure de ces attentes lors des différentes tables rondes organisées en circonscription, en préparation de ce texte, où nombre d’élus ont exprimé de tels besoins.

Nous accueillons avec beaucoup d’enthousiasme le renforcement du statut de l’élu et des pouvoirs de police du maire. Ce sera, notamment, une grande avancée dans la lutte contre les dépôts sauvages.

Nous craignons cependant que les nombreux ajouts des sénateurs fassent perdre de la lisibilité au texte. S’il était nécessaire de revenir sur les aspects irritants de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), l’objectif n’était pourtant pas de détricoter la loi. La suppression du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux intercommunalités revient une nouvelle fois sur la loi NOTRe, alors que la loi du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes repousse cette obligation à 2026. Était-il vraiment nécessaire de rouvrir ce débat ? S’ils appellent à davantage de considération, les élus locaux recherchent également davantage de stabilité.

À l’inverse, nous partageons l’avis du Sénat de maintenir obligatoire le rapport annuel sur les prix et la qualité du service public de prévention et de gestion des déchets. La prévention et la gestion des déchets comptent parmi les compétences les plus importantes aux yeux de nos concitoyens, et cette importance devrait se renforcer avec la prise de conscience actuelle des problématiques environnementales. Une politique cohérente et ambitieuse est indispensable pour tendre vers une meilleure prévention des déchets, plus de réemploi et une collecte, un tri et un recyclage plus performants. C’est également cette position que nous défendrons lors de la discussion du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, en réfléchissant notamment aux échelons les plus pertinents pour encourager l’écologie industrielle et territoriale.

Monsieur le rapporteur pour avis, que pensez-vous de la réflexion du ministre M. Sébastien Lecornu, telle qu’il l’exprimait hier soir ? A-t-on parfois oublié que les EPCI devaient être avant tout au service des communes ?

Mme Sophie Auconie. Ce projet de loi, qui contenait au départ trente articles et en contient aujourd’hui une centaine, change la donne en matière de gestion locale.

Au nom du groupe UDI, Agir et indépendants, je tiens à souligner combien il est important de ne pas tomber dans cette instabilité législative et réglementaire qui fait perdre leurs repères aux élus locaux, du fait de changements fréquents. En tant qu’élus législateurs, nous devons aborder cette question avec un grand esprit de responsabilité.

Trois sujets me semblent particulièrement intéresser notre commission.

Le premier sujet est la possibilité ouverte à toute collectivité de mettre en place une tarification sociale de l’eau, ou un dispositif de chèque eau sur le modèle du chèque énergie. À l’heure où la conjoncture économique et sociale est difficile pour un certain nombre de foyers, il faut que nous mesurions l’importance de l’accès à l’eau. Il y a une vie après l’énergie ou après le pétrole, mais il n’y a pas de vie après l’eau. L’eau doit donc être une ressource facile d’accès pour nos concitoyens.

Deuxième sujet, nous devons faciliter le fonctionnement des conseils municipaux dans les petites communes. Cela n’intéresse pas forcément la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, mais c’est très important. C’est ce que nous faisons en abaissant le seuil à partir duquel les conseils municipaux sont considérés comme complets dans les communes de moins de 500 habitants. Mais nous devons également nous montrer plus souples quant au nombre de listes et de membres les composant qui peuvent s’y présenter. Il y va de la démocratie.

Le troisième sujet concerne la problématique de l’eau et de l’assainissement. Je plaide pour un modèle de gestion de l’eau par bassins, gérés par des comités de bassin où les collectivités sont présentes, comme elles le sont au sein du Comité national de l’eau. Un tel modèle fonctionne dans de nombreux territoires européens et dans soixante-dix pays dans le monde, parce qu’il est excellent. Facilitons la gestion de l’eau par bassin au lieu de la modifier de façon importante !

M. Paul-André Colombani. Le Grand débat national a placé les maires dans la lumière, en mettant au jour des dysfonctionnements dans les territoires concernant, entre autres, l’intercommunalité. Entre des périmètres intercommunaux agrandis de manière inconsidérée et des transferts de compétences obligatoires toujours plus nombreux aux EPCI à fiscalité propre, les élus locaux se sentent plus que jamais dépossédés. Alors que les démissions d’élus locaux s’accélèrent, le groupe Libertés et territoires est favorable à un véritable statut de l’élu, pour les maires et leurs équipes municipales, dont la charge de travail est très importante et pas suffisamment valorisée.

Il est regrettable que le Président de la République ait semblé découvrir, à un an des élections municipales, que les maires sont le cœur battant de la démocratie locale. Il acte de ce fait ce que nous disons depuis le début du quinquennat : les corps intermédiaires et les élus locaux ne sont pas des freins au changement, mais des relais essentiels. Aussi est-il nécessaire de redonner une place centrale aux maires, et plus largement à l’ensemble des élus locaux, dans la vie publique. Il faut leur faire confiance, car ils sont le bon sens des territoires, et leur donner les moyens de concilier leur engagement public avec leur vie professionnelle et familiale.

Après son examen au Sénat, ce projet de loi a changé de nature. Le Sénat a été beaucoup plus ambitieux que le Gouvernement, mais sans doute a-t-il été un peu loin dans le rééquilibrage des relations entre communes et intercommunalité en proposant une « intercommunalité à la carte ». Ce texte comporte des avancées, mais les maires ont besoin qu’on leur fasse confiance et cela doit s’appuyer sur un choc de décentralisation et une véritable différenciation.

Au-delà d’une amélioration des conditions matérielles, ce qui est en jeu, c’est la capacité d’agir en toute sérénité et avec des moyens renforcés, qui ne pourront être accordés que dans la perspective d’un nouveau choc de décentralisation et de possibilités de différenciation. À ce titre, le groupe Libertés et territoires a formulé cinquante propositions pour rendre les territoires plus forts et plus autonomes, notamment concernant le statut de l’élu local. Il souligne la nécessité que le contrôle de légalité soit exercé a posteriori et harmonisé sur le territoire, afin de laisser de la souplesse dans l’action publique des collectivités locales. Il appelle à une responsabilisation des élus locaux, en leur donnant des compétences pleines et entières sur la décision, la réalisation et le financement des projets, ce qui passera nécessairement par la garantie d’une véritable autonomie fiscale des collectivités. Il veut enfin une révision de la gouvernance des intercommunalités, afin d’assurer une représentativité suffisante de l’ensemble des communes.

M. Loïc Prud’homme. Le texte contient des avancées pour le travail quotidien des élus locaux, dans un contexte où le Gouvernement a réussi, en deux ans, à rompre totalement le lien avec les collectivités territoriales, mairies et départements confondus. J’en veux pour preuve quelques discussions assez houleuses au dernier congrès des départements de France.

Lorsque l’on regarde les chiffres, on comprend la défiance des élus locaux. La pression budgétaire hors norme instaurée sur les collectivités territoriales, puisque 67 % des petites villes ont connu des baisses de dotation, a conduit à la fermeture de nombreux services publics de proximité. La première chose à faire pour ce Gouvernement est de redonner aux collectivités territoriales les moyens de mener leurs actions. Si la volonté de décentralisation affichée dans ce texte est louable, elle doit se traduire par le renforcement de l’autonomie budgétaire des collectivités.

Ce texte devrait, selon le groupe La France insoumise, contenir les moyens pour les maires de mener réellement la transition écologique dans leurs territoires, car nous savons que 50 % à 70 % des leviers d’action contre le changement climatique se situent au niveau local. Face à l’inaction climatique du Gouvernement, il convient de donner aux collectivités territoriales les outils pour mettre en œuvre la transition écologique.

Pour cela, il faut renforcer les pouvoirs de police du maire, pour lui donner la possibilité de jouer le rôle d’autorité environnementale dans l’intérêt des concitoyens. La réalité, c’est que lorsqu’un maire cherche à protéger sa population, c’est souvent l’État qu’il trouve en face pour lui barrer le chemin. Je pense notamment au maire de Langouët, M. Daniel Cueff, traîné devant le tribunal pour avoir émis un arrêté anti-pesticides visant à protéger sa population et ses concitoyens.

L’effondrement de la biodiversité rend urgent de permettre aux communes de lutter réellement contre l’artificialisation des sols, qui avale l’équivalent d’un département tous les sept ans, en leur donnant les outils pour sanctuariser les espaces forestiers et agricoles sur leur territoire. Ainsi, dans le cadre d’un PLUI, l’avis rendu par le conseil municipal doit être contraignant, pour défendre les intérêts des habitants directement concernés. Les logiques de métropolisation, en plus de porter atteinte à la démocratie locale, se font souvent au détriment de la protection de l’environnement.

Alors que la France s’est donné l’objectif d’atteindre zéro artificialisation des sols en 2030, le Gouvernement ne cesse de donner le feu vert à des grands projets inutiles et d’assouplir les normes environnementales, ouvrant la voie aux bétonneurs sur tout le territoire. Dans ma circonscription, chaque centimètre carré disponible est avalé par le béton au profit des promoteurs immobiliers ; des zones humides sont sacrifiées alors qu’il existe de vastes friches industrielles laissées à l’abandon. Le maire doit donc pouvoir bénéficier d’un droit de préemption, afin de résister à l’appétit des promoteurs et d’empêcher cette artificialisation des surfaces.

Si les dispositions contenues dans ce texte nous paraissent aller dans le bon sens, nous sommes très dubitatifs sur leur application concrète face au hold‑up financier que le Gouvernement exerce sur les collectivités locales. Enfin, il serait bien que, dans leur lutte pour protéger leur population et leur environnement, les élus locaux trouvent l’État à leur côté, et pas de l’autre côté de la barre, dans les tribunaux.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. J’ai entendu moins de questions que d’avis, qui vont nourrir mon rapport, même si je ne partage pas forcément tout ce qui a été dit.

Il ne faut certes pas détruire les grands principes qui soutiennent le bon fonctionnement actuel, notamment les bassins versants. Mais je ne pense pas qu’il faille aborder ce texte en y voyant seulement un texte de toilettage. D’abord, la notion de toilettage laisse entendre qu’on va corriger ce qui a été fait par le passé. Je préfère qu’on parle plutôt d’infléchir la direction prise antérieurement.

Ensuite, quel nouveau message envoyer aux élus locaux sur l’articulation entre communes et intercommunalités ? Les EPCI doivent-ils uniquement être au service des communes, notamment quand ils sont à fiscalité propre ? D’autres structures existent pour cela, tels les syndicats intercommunaux, qu’ils soient à vocation unique (SIVU) ou à vocation multiple (SIVOM).

La loi dite « Chevènement » avait présenté l’EPCI comme une structure de projets. Toute la question est de savoir si le projet va dans l’intérêt de chaque commune, individuellement. La réponse des sénateurs est l’intercommunalité à la carte. Pour ma part, je dis oui à une intercommunalité au service des communes, mais oui, également, à une intercommunalité au service d’un projet ou d’un territoire, quitte à ce que certaines communes aient du mal à s’y retrouver. De surcroît, je crois aussi que les EPCI doivent concourir à mettre en œuvre sur les territoires des politiques nationales, quand bien même, monsieur Loïc Prud’homme, elles ne leur font pas plaisir.

En matière d’écologie, nous devons pouvoir envoyer des signaux forts en affirmant l’intérêt national, même si ce dernier implique de passer outre l’opposition de tel ou tel maire dans nos circonscriptions. En tout état de cause, c’est en prenant en compte ces trois niveaux, communal, intercommunal et national, qu’il faut travailler à une nouvelle relation entre les élus locaux et les élus intercommunaux – qui bien souvent sont les mêmes.

Par ailleurs, j’adhère tout à fait à l’idée que « big is beautiful » n’est pas un principe immuable. Mieux vaut mettre en avant la coopération entre élus plutôt que de les voir dépenser leur énergie à ne pas travailler ensemble.

Enfin, nous sera bientôt présenté le projet de loi dit « 3D » – décentralisation, différenciation et déconcentration –, qui permettra plus de souplesse dans la définition des périmètres administratifs, comme nous y appelle régulièrement notre collègue M. Jean-François Cesarini. L’examen de ce texte permettra sans nul doute d’apporter des réponses aux questions qui n’en trouveraient pas aujourd’hui.

La Commission passe à l’examen des articles.

Article 5
(art. 64 et 66 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République et art. 1er de la loi n° 2018 702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes)
Suppression du transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes et d’agglomération

La Commission examine l’amendement CD33 de Mme Sandrine Le Feur.

Mme Sandrine Le Feur. Cet amendement vise à supprimer l’article 5, qui introduit de la flexibilité dans la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement, mais semble être également une source d’instabilité et d’illisibilité pour nos élus. J’ai pu m’en rendre compte au cours de réunions organisées avec les élus sur le territoire de ma circonscription. Ils voient d’un œil critique les allers-retours de compétences entre communes et intercommunalités, qui compliquent beaucoup les choses pour eux.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Nous partageons la nécessité de l’intercommunalité pour ces compétences, mais aussi d’une certaine stabilité. Lors de réunions que j’ai, moi aussi, organisées, des élus m’ont appelé à ne pas punir les « bons élèves », c’est-à-dire ceux qui sont déjà dans une dynamique intercommunale, en visant ceux qui ne voudraient pas travailler ensemble.

Je comprends donc votre argumentaire. Toutefois, à la suite d’un travail avec le Gouvernement, je vais proposer un amendement qui permet de répondre à vos inquiétudes légitimes, ainsi qu’à celles exprimées par M. Martial Saddier. Je vous propose donc de retirer le vôtre.

Mme Danielle Brulebois. Je partage l’avis de Mme Sandrine Le Feur. Des communautés de communes ont engagé des études coûteuses et embauché du personnel en vue d’exercer leurs nouvelles compétences. Puis, la loi a été assouplie en 2018, et elles ont dû revenir sur leurs orientations. N’ajoutons pas encore à l’illisibilité et à instabilité. Les élus locaux se posent déjà beaucoup de questions aujourd’hui.

Mme Sandrine Le Feur. Puisque vous avez bien compris mes inquiétudes, monsieur le rapporteur pour avis, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite les amendements CD42 du rapporteur pour avis, et CD25 et CD26 de M. Paul-André Colombani.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. L’article 5, dans sa rédaction initiale, maintenait l’eau et l’assainissement comme compétences des intercommunalités, communautés de communes et communautés d’agglomération. Cet amendement de rétablissement offre la possibilité de mise en œuvre jusqu’en 2026, c’est-à-dire jusqu’au prochain mandat, d’une minorité de blocage pour le transfert de ces compétences vers l’EPCI, ce qui garantit la stabilité au niveau de l’intercommunalité.

En outre, en accord avec le Gouvernement, nous inventons une nouvelle façon de mettre en œuvre une compétence de l’intercommunalité : la délégation de l’EPCI vers la commune. C’est un nouveau système, qui ne correspond en aucun cas au retour de la compétence pleine et entière à la commune, bien au contraire. Si la commune met en œuvre sur son territoire la compétence eau et assainissement, ce sera sous le contrôle de l’EPCI, en vertu d’une convention passée avec lui. Ainsi les aspects relevant de la réactivité et de l’action sur le terrain seront-ils assumés par la commune, mais toujours dans le cadre d’une vision développée à l’échelle de l’intercommunalité.

Cet amendement de consensus permet de répondre à la fois à la nécessité d’une stratégie intercommunale et aux exigences d’une gestion au quotidien par les élus. Madame Danielle Brulebois, les syndicats pré-existants pourront aussi continuer à gérer ce qui fonctionnait bien.

M. Paul-André Colombani. L’amendement CD25 vise à encourager la coordination et les échanges entre les intercommunalités insulaires et la collectivité de Corse qui définit le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux, la région et les départements ayant fusionné. Étant donné qu'il y a une commission locale de l'eau, je propose qu'en cas de transfert de la compétence eau des communes aux EPCI, le schéma de distribution d'eau potable lui soit aussi transmis, afin de lui donner les moyens de développer une vision stratégique.

L’amendement CD26 propose que les informations soient transmises à l’office d’équipement hydraulique de la Corse, organisme qui distribue l'eau potable dans certaines intercommunalités.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Comme je l’ai mentionné plus haut, nous examinerons bientôt un texte consacré à la différenciation. Vos amendements me paraissent devoir y trouver leur place plutôt que dans celui-ci. Cela dit, je suis plutôt favorable, à titre personnel, au premier de vos amendements, car on ne peut répéter que l’on défend les territoires et refuser systématiquement la différenciation. Dans la mesure, néanmoins, où il tomberait en cas d’adoption de mon amendement, je vous propose de le retirer.

Quant à votre second amendement, j’y suis défavorable car la structure dont il est question dépend de la structure précédente.

M. Paul-André Colombani. Je peux retirer l’amendement CD25 mais, en ce qui concerne l’amendement CD26, je rappelle que la différenciation a pour objet d’éviter les redondances et les doublons d'organismes. En l’occurrence, la loi que nous préparons n’est pas adaptée à la Corse et à son statut particulier, sachant qu’il y a, en Corse, deux commissions locales de l’eau (CLE), mais qui ne couvrent pas l'ensemble du territoire.

M. Pascal Lavergne. Ayant été vice-président d’une communauté de communes, je suis favorable à l’amendement de notre rapporteur pour avis. C’est une proposition pragmatique, qui permet la poursuite des projets intercommunaux sans créer de frustration chez les maires et les équipes municipales, même si cela doit légèrement ralentir les procédures.

M. Adrien Morenas. Je suis également favorable à l’amendement du rapporteur pour avis. En revanche, il me semble que l’amendement de M. Paul-André Colombani pourrait faire jurisprudence, et que rien n’empêcherait ensuite les autres régions de mettre en place des offices d’équipement hydraulique régionaux et de revendiquer une gestion différenciée de l’eau.

L’amendement CD25 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD42, exprimant ce faisant un avis favorable à l’adoption de l’article 5 ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement CD26 tombe.

Article additionnel après l’article 5 (article 1er de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de commune) : Extension de la minorité de blocage au transfert de la compétence de gestion des eaux pluviales urbaines

La Commission examine l’amendement CD43 du rapporteur pour avis.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Jusqu’à présent, on parlait de la compétence eau et assainissement sans jamais se poser la question des eaux pluviales. Or la cour administrative d'appel de Marseille a considéré, dans un arrêt faisant jurisprudence, que la gestion des eaux pluviales était liée à celle de l'assainissement, ce qui signifie qu’en cas de transfert de compétences, le transfert de l’assainissement s’accompagne du transfert de la gestion des eaux pluviales.

Afin de l’éviter, le législateur a prévu de séparer clairement pour les communautés d'agglomération ces deux compétences. Je propose de le préciser également dans le cas des communautés de communes, dans la mesure où certains élus qui se voient transférer la compétence assainissement n’ont pas forcément envie de devoir gérer les eaux pluviales.

L'idée est donc d’aligner les règles de transfert de la compétence de gestion des eaux pluviales sur celles de la compétence d’assainissement, à l'échelle des communautés d’agglomération comme à l'échelle des communautés de communes, afin que cela soit simple et clair pour tout le monde.

M. Lionel Causse. La proposition du rapporteur pour avis constitue un premier pas en matière de gestion des eaux pluviales, mais il faudra sans doute aller au-delà. Il y a plusieurs sortes d'eaux pluviales, selon qu’on considère les fossés, les réseaux collectifs ou les réseaux séparatifs. En outre, vont aussi se faire jour, à moyen terme, des problématiques liées à la pollution, puisque les eaux pluviales des réseaux séparatifs se déversent essentiellement dans la nature, dans des talwegs ou des cours d'eau. S’il faut traiter et analyser ces eaux, il sera difficile de savoir à qui en incombe la responsabilité s’il n’y a pas de cohérence entre la gestion des eaux usées et celle des eaux pluviales. Je pense donc que nous devons approfondir cette question dans les mois qui viennent.

Mme Danielle Brulebois. Je partage les interrogations de mon collègue, car les eaux pluviales recouvrent des réalités assez diverses. Par exemple, incluent-elles les inondations, qui relèvent de la GEMAPI, compétence qui a été redonnée au bloc communal en 2018 ?

Mme Sophie Auconie. Les positions du rapporteur pour avis me paraissent s’inscrire exactement dans la logique de l’acte II du quinquennat, qui consiste à se tourner vers les élus locaux et à faciliter l’organisation territoriale en leur offrant une certaine souplesse. Il faut des règles certes, mais les moins contraignantes possibles – c’est, en tout cas, ce qui ressort de la forme de « ras-le-bol » qu'ils expriment. Quant au problème spécifique de l’eau, doit-il être traité dans ce texte ou dans un autre ? On peut se poser la question, mais je soutiendrai cet amendement.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Je suis d’accord sur le fait que nous devons aller plus loin et que tout ceci n’est qu’un début. Il n’empêche que nous devons commencer par régler la question de la répartition des compétences, même si cela ne résout pas l’ensemble des problèmes que vous avez évoqués et qui se posent concrètement sur le terrain. Sans parler des inondations et du changement climatique, on sait qu’il existe encore des réseaux unitaires, alors qu’il n’est plus envisageable aujourd’hui que les eaux pluviales puissent se mélanger avec les eaux grises. On ne peut plus continuer à polluer les eaux pluviales en les utilisant comme eaux de nettoyage, sans se soucier de ce qu’elles deviennent ensuite.

Ces eaux pluviales doivent donc faire l’objet d’une vraie réflexion de notre part, en séparant bien la question des eaux pluviales dans les zones urbaines et ailleurs, pour mettre en œuvre des politiques publiques à la hauteur des enjeux. J’ajoute que c’est un des enjeux de l’objectif « zéro artificialisation nette », qui doit tenir compte de la gestion de ces différents flux.

La Commission adopte l’amendement.

Article 7
(art. L. 151-3, L. 153-15, L. 153-21, L. 153-27, L. 153-45, L. 153-47, L. 211-2 et L. 212-1 du code de l’urbanisme)
Renforcement de la place des communes dans la procédure d'élaboration des plans locaux d'urbanisme intercommunal

La Commission examine l’amendement CD20 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme. Il s’agit de redonner un pouvoir d’avis contraignant aux communes sur les questions d'urbanisme. C’est faire le choix de la coopération plutôt que celui – qui me semble être le vôtre, monsieur le rapporteur pour avis – de l'effacement des communes devant l’EPCI, dans la lignée de la loi de décembre 2010 et de la loi NOTRe. Selon moi, la force contraignante de cet avis serait de nature à renforcer la cohérence des projets d’urbanisme, par exemple dans le cas où l’EPCI décide d’implanter une grande surface sur son territoire mais où la commune qui doit accueillir l’implantation estime que c’est une mauvaise solution.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. J’ai dû mal m’exprimer car je n'ai jamais prôné l'effacement des communes.

Cela étant précisé, votre amendement permet aux communes de bloquer n’importe quel projet d’urbanisme, et donc de bloquer indéfiniment l’élaboration du PLUI. Cela revient à ne plus vouloir de PLUI et à en rester aux plans locaux d’urbanisme (PLU). Il nous semble, au contraire – et c’est dans ce sens que va l’article 7 –, que l’aménagement doit se faire à l’échelle intercommunale, tout en respectant un juste équilibre entre les communes et l’intercommunalité. Avis défavorable.

M. Lionel Causse. Cet amendement reviendrait à permettre à toutes les communes de constituer une minorité de blocage. Comme le rapporteur pour avis, je pense que cela va à l'encontre de la vision élargie de l'aménagement du territoire que nous défendons. Les PLUI sont d’autant plus indispensables qu’ils constituent une déclinaison parfaite des schémas de cohérence territoriale. Il convient donc d’accélérer leur mise en œuvre, d’autant qu’ils sont souvent plus respectueux des enjeux environnementaux et plus conformes aux exigences en termes d'urbanisation, de développement des services et de développement économique. Notre groupe ne soutiendra donc pas cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD34 du rapporteur pour avis.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Imaginez que vous êtes maire d'une commune de cinquante habitants, assisté d’une secrétaire de mairie qui travaille à temps partiel ; l’intercommunalité à laquelle vous appartenez, de plus ou moins bon gré, vient d'élaborer un PLUI et demande à votre conseil municipal d’émettre un avis. Malgré la quantité de documents qui vous ont été fournis, vous n’y retrouvez pas les enjeux du PLUI pour la commune, et vous vous demandez comment les expliquer clairement aux élus municipaux, de manière à ce qu’ils puissent émettre un avis pertinent. J’ajoute que, si les élus actuels ont tous une petite culture en matière de PLU ou de plans d’occupation des sols (POS), ce ne sera pas le cas de la future génération, qui risque de se perdre dans les différents zonages.

L'objet de cet amendement est donc de demander à l’EPCI de produire avec le PLUI une note de synthèse qui ne soit pas technique et en explique les enjeux pour chaque commune.

M. Lionel Causse. Si cet amendement peut paraître un peu contraignant dans sa mise en œuvre, il n'empêche qu'il renforce le dialogue et la communication entre les communes et les EPCI. Il va donc dans le bon sens.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD13 de M. Lionel Causse.

M. Lionel Causse. Il s’agit d’un amendement qui porte sur l'élaboration des PLUI et les difficultés induites par les minorités de blocage, mais je suis en train de le retravailler avec le cabinet de la ministre, et je vais donc le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 modifié.

Article 8 
(art. L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales)
Suppression de l’obligation de révision, tous les six ans, du schéma départemental de la coopération intercommunale

La Commission examine l’amendement CD30 de M. Paul-André Colombani.

M. Paul-André Colombani. Cet amendement vise à permettre à la chambre des territoires, équivalent de la conférence territoriale de l’action publique, de donner son avis sur les révisions du schéma départemental de coopération intercommunale.

La chambre des territoires est une institution originale née de la fusion des régions et des départements. Les dix-neuf intercommunalités y sont représentées, et il est donc légitime qu’un tel débat puisse s’y tenir.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. J’admets la spécificité corse et pense qu’il est toujours intéressant, en matière d’aménagement du territoire, d’avoir une vue surplombante des problèmes. Toutefois, comme précédemment, je dois vous renvoyer au projet de loi « 3D » déjà évoqué.

J’émets donc un avis de sagesse.

M. Paul-André Colombani. Vous m’opposez que mes amendements sont des cavaliers, mais les services de la commission ont pourtant estimé qu’ils pouvaient être déposés sur ce projet de loi. À moins qu’il y ait un problème pour étudier les demandes spécifiques à la Corse… La chambre des territoires est une nouvelle instance, qui a du mal à trouver sa place, et il s’agit de l’aider à fonctionner. On ne demande pas l’autonomie !

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Je ne dis en aucun cas qu’il s’agit d’un cavalier, bien au contraire, puisque je m’en remets à la sagesse des votants. Sur le fond, moi qui défends souvent les territoires, je suis plutôt favorable à cet amendement. Qu’il existe en Corse un organe permettant d’avoir une vision globale de l’aménagement du territoire est une bonne idée, mais pourquoi ne serait-ce pas la même chose en Occitanie ? C’est toute la question de la différenciation. D’où la suggestion que votre amendement pourrait trouver sa place, à côté de toutes les propositions ayant trait aux spécificités territoriales, dans le projet de loi « 3D ». Il n’y a aucun blocage de ma part.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD37 du rapporteur pour avis.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Cet amendement propose de valoriser la commission départementale de coopération intercommunale, en demandant au préfet d’établir auprès d’elle un rapport annuel sur la mise en œuvre du schéma départemental de coopération intercommunale. Beaucoup de temps est, en effet, consacré à la préparation de ce schéma, mais on est rarement informé par la suite de ce qui se passe sur l’ensemble du terrain.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 modifié.

Article 11
(art. L. 5211-39-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) :
Information des communes sur les conséquences financières d'une modification du périmètre d'un EPCI

La Commission est saisie de l’amendement CD38 du rapporteur pour avis.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Lorsque le périmètre d’une intercommunalité se modifie du fait du départ d’une des communes, il est prévu une évaluation des incidences financières de cette modification. Il nous semble important que cette évaluation porte également sur les incidences en termes d’effectifs. C’est l’objet de cet amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD39 du rapporteur pour avis.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Lorsqu’une commune se retire d’un EPCI, il se peut qu’elle se retire également des syndicats auxquels ont été déléguées un certain nombre de compétences. Nous proposons donc que, parmi les incidences évaluées lors du changement de périmètre d’un EPCI, figurent les incidences sur les syndicats.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD40 du rapporteur pour avis.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Lorsqu’une commune fait le choix de changer d’intercommunalité, le conseil municipal et la population doivent être informés avec précision de ce qu’ils quittent et de ce qu’ils vont trouver. Cet amendement propose donc, afin que le choix se fasse de la manière la plus transparente possible, que soient évaluées les conséquences de ce changement pour la commune.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD31 de M. Paul-André Colombani.

M. Paul-André Colombani. Nous proposons que les communes ou EPCI à l'origine d’un redécoupage intercommunal puissent saisir la chambre des territoires pour une demande d'avis.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Lorsqu’une commune décide de quitter un EPCI, il n’est pas nécessaire d’avoir l’avis d’une instance élargie comme la chambre des territoires sur cette décision. Je suis donc défavorable à votre amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD1 de M. Jean-Luc Fugit.

M. Jean-Luc Fugit. L’article 11 impose la rédaction d'un document précisant les impacts financiers de la modification du périmètre d’un EPCI, par extension ou par réduction ; il propose que ce document soit mis en ligne sur le site internet des EPCI et des communes concernées, lorsque ces derniers existent.

Notre amendement vise à ce que les citoyens soient également informés des éléments contenus dans ce document, directement au sein des locaux des EPCI ou de leur commune. Je sais que l’on va m’opposer qu’il faut réduire la quantité de papier utilisé, mais peut-être les communes et les EPCI pourraient-ils commencer par imprimer moins de magazines locaux pour penser davantage aux personnes qui n'ont pas accès à internet et qui sont encore un certain nombre.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. D’un point de vue strictement juridique, on peut considérer que cet amendement est satisfait par le fait que le public dispose dans chaque mairie d’un point de consultation par ordinateur, grâce auquel il a accès aux documents.

Ensuite, tel qu’il est rédigé, cet amendement pose problème, car il n’est pas précisé pendant combien de temps les documents doivent être consultables en version papier, ce qui ouvre la porte à des recours.

Cela étant, l’accès de tous à internet est un vrai débat, mais je ne suis pas sûr que des documents consultables en mairie soient plus consultés que sur internet, et votre proposition ne va pas dans le sens d’une simplification du travail des élus. Avis défavorable.

M. Jean-Luc Fugit. Le rapporteur pour avis m’a plus ou moins convaincu et, par souci de simplification, je vais retirer mon amendement. Je répète tout de même que, dans leur entreprise de numérisation, les services publics ont tendance à oublier certaines personnes, ce qui pose un vrai problème. Nous parlons d’engagement de proximité, et il ne faudrait pas les laisser sur le bord de la route.

L’amendement est retiré.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 modifié.

Article 20 bis
(titre II [nouveau] du livre Ier de la première partie du code général des collectivités territoriales, section 6 du chapitre II du titre III du livre Ier et art. L. 14321 du code de l’urbanisme)
Création de la conférence de dialogue
entre les collectivités territoriales et l'État

La Commission examine les amendements CD41 du rapporteur pour avis et CD32 de M. Paul-André Colombani.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. L’article 20 bis ajouté par le Sénat poursuit un double objectif. En créant, à l’échelle départementale, une structure présidée par le préfet, il entend, d’une part, mettre en place un organe susceptible de répondre aux interrogations des élus locaux sur l’application de la loi, notamment en matière d’urbanisme, et, d’autre part, installer sur le terrain une sorte de relais susceptible de nous aider dans l’évaluation de la mise en œuvre concrète des lois que nous votons.

Le problème est que, telle qu’elle est conçue, cette structure ressemble à une usine à gaz, dans la mesure où, en l’état actuel du texte, chaque maire désireux de saisir cette commission peut le faire et que le préfet a l’obligation de traiter sa demande et de lui répondre, ce qui risque de lui prendre une bonne partie de ses journées. Il est donc indispensable de retravailler cette proposition, sans renoncer à cette instance de concertation qui réunit, sous l’autorité du préfet, des représentants des élus locaux, des parlementaires et des administrations concernées, et où peuvent être abordées de manière concrète les questions ayant trait à l’aménagement du territoire. À titre d’exemple, pourrait être porté devant cette commission le fait que, dans l’Aude, qui est pourtant un département très venté, aucun permis de construire pour des éoliennes n’a été délivré depuis trois ans, en contradiction totale avec la politique de soutien aux énergies renouvelables conduite à l’échelle nationale. Le fait de réunir l’ensemble des acteurs concernés permettrait d’identifier la source du problème et, sans doute, de faire avancer les choses. L’idée qui sous-tend l’amendement CD41 est donc de conserver cette instance mais en l’allégeant.

M. Paul-André Colombani. L’amendement CD32 propose deux mesures distinctes. La première consiste à créer une instance de dialogue unique entre l'État et la collectivité de Corse, dans la mesure où, avec la fusion des conseils généraux, il n’y a plus lieu de maintenir une instance en Corse du Sud et une autre en Haute-Corse, d’autant que les problématiques ne sont guère différentes au Nord et au Sud. Il me semble donc que, pour une région de 360 000 habitants, un seul organisme suffit.

La seconde vise à ce que le rapport rédigé par le représentant de l'État pour préconiser des améliorations normatives soit aussi transmis aux parlementaires de la circonscription concernée. Ces améliorations peuvent, en effet, ne pas relever uniquement du domaine réglementaire et nécessiter des adaptations législatives. Or la séparation des pouvoirs fait que ce n’est pas le Gouvernement qui fait la loi mais les parlementaires. Il convient donc que nous soyons officiellement destinataires du rapport.

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Sans doute aurait-il fallu que vous déposiez deux amendements. Je suis, en effet, favorable à votre première proposition mais défavorable à la seconde : s’il fallait mentionner explicitement la transmission aux parlementaires de tous les documents – dont certains sont d’ailleurs publics – qu’ils réclament légitimement, nous n’en sortirions pas. Dès lors, avis défavorable.

M. Lionel Causse. L’amendement du rapporteur pour avis est intéressant, même si certains peuvent estimer qu’il complexifie l’organisation. Cette instance permettra de faire aboutir certains dossiers. C’est en particulier indispensable pour les petites communes, dont les élus ne savent pas toujours à quel interlocuteur s’adresser pour débloquer la situation. Il est donc positif que tous puissent se retrouver autour d’une table et que chacun prenne ses responsabilités. Qui plus est, il satisfait en partie l’amendement de M. Paul-André Colombani.

M. Paul-André Colombani. Je persiste à penser que les parlementaires doivent être destinataires du rapport, car ce sont eux qui font la loi, et il est essentiel que nous sachions ce qui fonctionne ou ne fonctionne pas.

Si cette disposition était appliquée, dans quelques mois, nous pourrions lire dans ce rapport que l’office d’équipement hydraulique connaît des dysfonctionnements…

M. Alain Perea, rapporteur pour avis. Mon amendement intègre des parlementaires parmi les membres de la commission. Votre demande est donc satisfaite.

La Commission adopte l’amendement CD41.

En conséquence, l’amendement CD32 tombe.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 20 bis modifié.


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