N° 3399

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2020.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2021 (n° 3360),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 23
 

 

ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L’ÉTAT

 

 

 

Rapporteure spéciale : Mme BÉnÉdicte PEYROL

 

Députée

____

 

 


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SOMMAIRE

___

Pages

PRINCIPALES ANALYSES DE la RAPPORTEURE SPÉCIALe

DONNÉes Clés

LES CRÉDITS DE LA MISSION ENGAGEMENTS FINANCIERS  DE L’ÉTAT : un redressement après des années de diminution

I. Les dÉpenses engendrées par la CHARGE DE LA DETTE ET LA GESTION DE LA TRÉSORERIE DE L’ÉTAT restent contenuES malgré le besoin de financement rÉsultant de la crise

A. L’encours de la dette négociable de l’État progresse à un rythme accru

1. Le besoin de financement de l’État se creuse sous l’effet de la crise économique et sanitaire

2. Un niveau de primes à l’émission à nouveau en hausse

3. Le débat sur le cantonnement de la dette

B. L’évolution des caractéristiques de la dette négociable de l’État

1. Le nouveau record de la durée de vie de la dette négociable de l’État

2. La part de la dette négociable de l’État détenue par des non-résidents

C. Une progression modérée de la charge de la dette

1. Une charge de la dette attendue en hausse en 2021

2. Des conditions de financement très favorables

a. Des taux d’intérêt à un niveau historiquement bas

b. La poursuite de la baisse de l’inflation

D. La stabilité de la charge budgétaire liée à la gestion de la trésorerie de l’État

II. Les dispositIfs de garantie de l’État ont été Fortement mis à contribution au gré de la crise

A. La Contribution du programme 114 APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT Au soutien des entreprises face à la crise

1. Les dispositifs de garantie de l’État introduits en 2020 pour soutenir la trésorerie des entreprises

a. Les prêts garantis par l’État (PGE)

b. La mise en œuvre d’un Fonds de garantie paneuropéen de la Banque européenne d’investissement

c. Le renforcement du dispositif de réassurance publique des risques d’assurance-crédit.

2. Les dépenses prévisionnelles liées aux appels en garantie des autres actions du programme

B. Le suivi des engagements hors bilan et des garanties de l’État

1. Le suivi des engagements hors bilan de l’État

2. Le suivi des garanties octroyées par l’État

III. Les crÉdits du programme 145 Épargne

A. Les dÉpenses liÉes aux primes d’Épargne logement

1. Le ralentissement programmé de l’encours des PEL et CEL

2. Une forte baisse des dépenses liées aux primes épargne logement depuis 2010

B. L’importance des dépenses fiscales associées au programme

IV. Un effort de sincérité budgétaire au titre de la dotation du mÉcanisme europÉen de stabilitÉ

A. La dÉpense constatÉe entre 2017 et 2019

B. Une débudgétisation critiquée

C. Une dotation initiale enfin portée sur le programme 336

V. Le fonds de soutien relatif aux prÊts et contrats financiers structurÉs À risque

A. L’organisation du fonds et ses modalités d’intervention

1. L’historique et l’organisation du fonds

2. Les modalités d’intervention du fonds

B. Les engagements du fonds et le montant des crédits de paiement pour 2021

1. Les engagements du fonds de soutien

2. Les crédits de paiement ouverts au titre de l’exercice 2021

VI. Vers un verdissement de la mission

A. LA PROgression de l’OAT VErte

B. LE BUDGET VERT, une avancée importante mais une Évaluation encore embryonnaire pour la mission

Examen en commission

Liste des personnes auditionnées  par la rapporteure spéciale

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, la date limite pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires était fixée au 10 octobre 2020.

À cette date, 100 % des réponses étaient parvenues aux rapporteures spéciales de la mission Engagements financiers de l’État.

 


—  1  —

   PRINCIPALES ANALYSES DE la RAPPORTEURE SPÉCIALe

Les crédits de la mission Engagements financiers de l’État affichent une diminution de 1,7 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2020. Ils s’établiraient ainsi à 39 milliards d’euros. Ces crédits étant évaluatifs, ils dépendent fortement de l’évolution du contexte macro-économique, qui se caractérise par une « incertitude radicale » selon la formule de l’économiste Jezabel Coupey-Soubeyran. Par ailleurs, les hypothèses retenues pour déterminer les montants des crédits de la mission n’intègrent pas les dernières modifications qui interviendront en fin d’année avec la quatrième loi de finances rectificative.

Malgré une hausse du besoin de financement de l’État qui atteint 282 milliards d’euros en 2021, après 345 milliards d’euros en 2020, l’augmentation de la charge de la dette est modeste. En 2021, elle ne s’accroîtrait que de 700 millions d’euros par rapport à la prévision actualisée pour 2020, s’établissant à 35,2 milliards d’euros.

La qualité de la gestion de la dette par l’Agence France Trésor (AFT) a permis de garantir la continuité du financement de l’État et d’assurer la permanence d’une demande solide. La maturité moyenne des émissions de dette atteint un nouveau record et s’établit à 11,1 ans ce qui permet une certaine résilience en cas de remontée soudaine des taux. Par ailleurs, la détention de la dette par des nationaux reste stable à 46,4 % tandis que 50 % des investisseurs non-résidents sont européens fin 2019.

La hausse substantielle de l’encours de la dette, qui augmenterait de 303 milliards d’euros en 2020 et 2021 pour atteindre 2 126 milliards d’euros, pose la question d’un cantonnement de la dette dite « covid ». En première analyse, la rapporteure estime que cette mesure aurait un intérêt politique indéniable : assurer une transparence de la trajectoire des finances publiques tout en imprimant un retour à l’équilibre qui ne pèserait pas, à court terme, sur l’économie. Les modalités de financement de cette dette, ainsi cantonnée, restent à préciser. Il conviendra de s’assurer que le coût de son financement est similaire à celui du reste de la dette négociable de l’État ; de même, une recette devra lui être affectée si ce cantonnement s’apparente à celui mis en place pour la dette sociale.

Les crédits du programme Appels en garantie de l’État connaissent une augmentation sans précédent en 2021, atteignant 2,5 milliards d’euros. Cette hausse est imputable aux mécanismes de garantie mis en place au cours de l’année 2020 : prêts garantis par l’État, réassurance publique des risques d’assurance-crédit et fonds de garantie paneuropéen de la Banque européenne d’investissement.

Les crédits du programme Épargne s’établissent à 62 millions d’euros en 2021, au lieu de 85 millions d’euros en loi de finances pour 2020.

Dans un effort de sincérité budgétaire, salué par la rapporteure, une dotation de 79 millions d’euros est enfin inscrite au titre du programme 336 Dotation du mécanisme européen de stabilité.

Enfin, les crédits du programme Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque sont attendus à 189,5 millions d’euros en 2021 après 174,9 millions d’euros en loi de finances pour 2020.

Le succès de l’« OAT verte » se confirme, avec un encours qui atteint 27,4 milliards d’euros trois ans seulement après la première émission. La concurrence sur ce marché s’accentue : 5 autres pays européens ont émis leur propre obligation verte dont l’Allemagne avec une émission inaugurale en septembre 2020 de 6,5 milliards d’euros.

L’évaluation de la mission à l’aune d’un prisme écologique est désormais possible grâce au budget vert. Pour l’instant, l’essentiel des crédits de la mission ont été considérés comme neutres.

 

   DONNÉes Clés

Évolution des crédits de la mission
Engagements financiers de l’État

(en crédits de paiement, en milliards d’euros)

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

 

Répartition des crédits de la mission par programme

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

 

 


—  1  —

   LES CRÉDITS DE LA MISSION ENGAGEMENTS FINANCIERS
DE L’ÉTAT : un redressement après des années
de diminution

Les crédits de paiement de la mission Engagements financiers de l’État augmenteraient pour la première fois en 2021, après trois années de baisse consécutives. Ils atteindraient ainsi 39 milliards d’euros d’autorisations d’engagement (AE) et 39,2 milliards d’euros de crédits de paiement (CP).

Évolution des crédits de la mission Engagements financiers de l’État


(en crédits de paiement, en milliards d’euros)

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

Il est signalé que la loi du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 ([1]) (LFR 2) a d’ores et déjà prévu l’annulation de 2 milliards d’euros en AE/CP sur le programme 117 Charge de la dette et la trésorerie de l’État pour tenir compte de la révision de la prévision d’inflation sur la charge des titres indexés.

Écart entre l’exécution et la prévision des crédits de la mission

(crédits de paiement en milliards d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020 (LFI)

2020 (LFR)

2021

(PLF)

Prévision

46,0

44,2

46,9

49,9

56,1

50,9

45,2

45,2

42,1

41,8

42,5

38,5

36,8

39,2

Exécution

39,2

42,2

47,7

56,4

53,9

47,1

42,7

41,9

42,4

42,1

40,6

 

 

 

Écart

 6,8

 2,0

+ 0,8

 6,4

 2,3

 3,8

 2,5

 3,3

+ 0,3

+ 0,3

 1,9

 

 

 

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

 

L’évolution de la dépense résulte des effets :

– du programme 117 Charge de la dette et trésorerie de l’État, qui représente 93 % des crédits de paiement de la mission. Ils s’inscriraient en baisse de 1,7 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2020. Toutefois, par rapport aux prévisions pour 2020 telles que résultant de la LFR 2, la charge de la dette et la trésorerie de l’État progresserait de 262 millions d’euros ;

– du programme 114 Appels en garantie de l’État, qui connaît une hausse exceptionnelle de 2,4 milliards d’euros par rapport à la LFI 2020 et de 2,2 milliards d’euros par rapport à la prévision pour 2020 résultant des LFR. Les appels de garantie s’établiraient à 2,5 milliards d’euros et représenteraient 6 % des crédits de la mission contre 0,2 % en 2020.

Les trois autres programmes, même s’ils ne représentent que 0,8 % des crédits de la mission, connaissent des évolutions notables :

– les crédits du programme 145 Épargne diminuent de 27,2 % pour s’établir à 62,4 millions d’euros du fait de la désaffection croissante des épargnants pour les produits d’épargne-logement. Toutefois, des dépenses fiscales conséquentes, estimées à 4,4 milliards d’euros pour 2021, sont rattachées au programme ;

– pour la première fois, le programme 366 Dotation du mécanisme européen de stabilité fait l’objet d’un financement sur la mission. En LFR puis en PLF 2021, 98 millions d’euros puis 79 millions d’euros sont inscrits au titre de ce mécanisme. De 2017 à 2020, le programme était resté vide, soulevant des critiques de la part de la Cour des comptes et de la rapporteure spéciale. Des crédits étaient effectivement ouverts sur la dotation pour dépenses imprévisibles (DDAI) de la mission Crédits non répartis ;

 les crédits du programme 344 Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque connaissent une hausse de 8 % pour atteindre 189,5 millions d’euros.

Évolution des crédits de la mission par rapport à la LFI 2020

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programmes de la mission

LFI 2020

LFR 2020

PLF 2021

Évolution (en %)

LFI 2020

LFR 2020

PLF 2021

Évolution (en %)

117 - Charge de la dette et trésorerie de l’État

38 149,0

– 2 000,0

36 411,0

– 1 738,0
– 4,6%

38 149,0

– 2 000,0

36 411,0

 – 1 738,0
– 4,6%

114 - Appels en garantie de l’État

94,1

+182,0

2 504,8

+ 2 410,7
+2 561,8%

94,1

+182,0

2 504,8

 + 2 410,7
+2 561,8%

145 - Épargne

85,7

62,4

– 23,3
– 27,2%

85,7

62,4

– 23,3
– 27,2%

366 - Dotation du Mécanisme européen de stabilité

+98,0

79,0

+98,0

79,0

338 – Augmentation du capital de la Banque européenne d’investissement

 

 

344 - Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

174,9

189,5

+ 14,6
+8,3%

Totaux

38 328,8

– 1 720,0

39 057,2

+ 728,4
+1,9%

38 503,7

 – 1 720,0

39 246,6

+ 743,0
+1,9%

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

I.   Les dÉpenses engendrées par la CHARGE DE LA DETTE ET LA GESTION DE LA TRÉSORERIE DE L’ÉTAT restent contenuES malgré le besoin de financement rÉsultant de la crise

Principaux éléments du programme

En 2021, la charge de la dette augmenterait de 700 millions d’euros par rapport à la prévision actualisée pour 2020, s’établissant à 35,2 milliards d’euros.

Les facteurs explicatifs de la hausse de la prévision pour 2021 par rapport à l’estimation révisée pour 2020 sont les suivants :

– un effet volume lié à l’augmentation de l’encours de la dette (+ 0,8 milliard d’euros) ;

– un effet taux de – 1,3 milliard d’euros du fait de gains de refinancement des titres à moyen et long terme amortis en 2020 ;

– un effet inflation de + 0,9 milliard d’euros du fait du relèvement de l’inflation ;

– une variation de charge due à des effets calendaires (+ 0,3 milliard d’euros).

La charge de la trésorerie se stabilise pour s’établir à 1,25 milliard d’euros en 2021. Les taux de court terme plus faibles qu’anticipé en loi de finances initiale réduisent, en effet, la rentabilité des opérations de placement pour une perte d’environ 200 millions d’euros en 2020. La charge nette de la trésorerie pour 2020 s’établirait à 1,33 milliard d’euros contre une prévision en LFI de 1,13 milliard d’euros.

Au total, 36,4 milliards d’euros sont demandés en AE et CP au titre du programme 117, au lieu de 38,1 milliards d’euros en LFI 2020.

A.   L’encours de la dette négociable de l’État progresse à un rythme accru

À la fin de l’année 2021, l’encours total de la dette s’établirait à 2 126 milliards d’euros, en augmentation de 96 milliards d’euros par rapport à la prévision actualisée pour 2020. Entre 2019 et 2020, il s’accroîtrait déjà de 207 milliards d’euros supplémentaires. Entre fin 2007 et fin 2019, la progression annuelle moyenne de l’encours de dette s’établirait ainsi à 77 milliards d’euros. En deux années, une rupture majeure serait donc marquée dans l’évolution du volume de dette du pays.

Évolution de l’encours de la dette nÉgociable de l’État

(en milliards d’euros)

À la fin de l‘année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020 (p)

2021 (p)

Encours de la dette de l‘État, valeur actualisée

921

1 017

1 148

1 229

1 313

1 386

1 457

1 528

1 576

1 621

1 686

1 756

1 823

2 030

2 126

Augmentation annuelle de l‘encours

+ 96

+ 131

+ 81

+ 84

+ 73

+ 70

+ 71

+ 49

+ 44

+ 66

+ 70

+ 67

+ 207

+ 96

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

1.   Le besoin de financement de l’État se creuse sous l’effet de la crise économique et sanitaire

L’encours de la dette négociable et le besoin de financement de l’État sont directement liés, puisque les émissions de titres de dette permettent de répondre au besoin de financement.

En 2020, le besoin de financement de l’État serait de 114 milliards d’euros supérieur aux prévisions de la loi de finances initiale. Il s’établirait à 345 milliards d’euros au lieu de 231 milliards d’euros prévus en LFI. Cette hausse résulte d’un déficit de l’État plus important que prévu du fait de la crise, avec un impact total de 113 milliards d’euros. Le déficit de l’État serait en effet de 206 milliards d’euros au lieu de 93 milliards d’euros prévus par la loi de finances initiale.

En 2021, le besoin de financement serait principalement constitué d’un déficit à financer de 153 milliards d’euros et d’amortissements de titres moyen/long terme de 128 milliards d’euros, dont 127 milliards d’euros hors supplément d’indexation, versé aux détenteurs de l’OAT qui sera remboursé en 2021. Compte tenu de ces deux effets, le besoin de financement de l’État atteindrait 282 milliards d’euros. En période de crise, la nécessité de continuer de rembourser les dettes passées pèse significativement dans le besoin de financement.

Évolution du besoin de financement

(en milliards d’euros)

 

Exécution

2014

Exécution

2015

Exécution

2016

Exécution 2017

Exécution

2018

LFI 2020

2020

Révisé

PLF

2021

Besoin de financement

179,1

189,1

194,1

183,1

191,9

220,5

344,7

282,3

Amortissement de titres d’État à moyen et long terme

103,8

116,4

124,9

115,2

116,6

130,2

136,1

128,1

Valeur nominale

103,8

114,1

124,5

112,8

115,9

128,9

130,5

127,3

Suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés)

2,3

0,4

2,4

0,7

1,3

5,6

0,8

Amortissement des autres dettes

0,2

0,1

2,2

1,3

Dont déficit budgétaire

85,6

70,5

69,1

67,7

76,0

92,7

206,0

152,8

Autres besoins de trésorerie*

+ 1,5

+ 2,0

+ 0,1

+ 0,2

– 0,6

– 2,4

+ 0,4

+ 0,1

Ressources de financement

179,1

189,1

194,1

183,1

191,9

220,5

344,7

282,3

Émission de dette à moyen et long terme, nette des rachats

172,0

187,0

187,0

185,0

195,0

200,0

260,0

260,0

Ressources affectées à la CDP et consacrées au désendettement

1,5

0,8

Variation nette de l’encours des titres à court terme

+ 1,4

– 22,6

– 18,7

– 7,5

– 13,6

– 6,0

+ 42,8

+ 18,8

Variation des dépôts des correspondants

– 1,3

+ 6,7

+ 1,6

+ 4,7

+ 9,8

+ 11,5

+ 10,9

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État

– 1,4

– 5,2

+ 4,6

– 9,2

– 11,1

– 5,7

+ 11,0

Autres ressources de trésorerie (dont primes à l’émission)

+ 6,9

+ 22,4

+ 19,7

+ 10,0

+ 11,8

+ 20,6

+ 20,0

+ 3,5

*Neutralisation des opérations budgétaires sans impact en trésorerie ; décaissements opérés à partir des comptes consacrés aux investissements d’avenir, nets des intérêts versés ; passage de l’exercice budgétaire à l’année civile.

Source : projets annuels de performances.

2.   Un niveau de primes à l’émission à nouveau en hausse

Les émissions de titres de dette de l’État donnent lieu à l’existence de primes ou de décotes, lorsque le taux facial de l’obligation (ou taux de coupon) est différent du taux issu de l’adjudication ([2]). Ainsi, les souscripteurs versent une prime si le taux facial est supérieur au taux d’adjudication. À l’inverse, ils bénéficient d’une décote si le taux facial est inférieur au taux d’adjudication.

Exemple : taux facial de l’obligation (3 %), taux issu de l’adjudication (1 %). Dans ce cas, l’émission du titre donnera lieu au versement d’une prime par les souscripteurs.

Les primes et décotes sont sensibles aux paramètres sous-jacents suivants :

– variation des taux d’intérêt de marché, correspondant aux taux issus des adjudications ;

– et choix des titres émis en fonction de la demande adressée à l’agence France Trésor (les émissions de titres dits « sur souches anciennes », c’est-à-dire avec des caractéristiques identiques à des obligations plus anciennes, présentent actuellement des taux d’intérêt supérieurs aux taux de marché).

Ainsi, les primes nettes des décotes se sont élevées à 22,7 milliards d’euros en 2015 et 20,8 milliards d’euros en 2016, du fait de taux de marché très faibles voire négatifs et une émission de titres présentant des taux d’intérêt plus élevés. En 2017 et en 2018, le niveau des primes à l’émission a sensiblement baissé : il était de 10,5 milliards d’euros en 2017 et de 11,3 milliards d’euros en 2018. En 2019, le niveau de primes nettes a presque doublé, atteignant 21,2 milliards d’euros en raison de la forte baisse des taux d’intérêt intervenue depuis le début de l’année 2019 et l’orientation accommodante de la politique monétaire.

primes et décotes à l’émission de titres de moyen et long terme

(en milliards d’euros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Primes à l’émission

0,769

5,120

8,985

5,711

9,543

7,981

8,041

24,200

21,247

12,091

12,179

21,394

Décotes à l’émission

3,038

0,756

0,749

3,256

0,322

1,964

0,646

1,462

0,472

1,561

0,846

0,241

Primes nettes des décotes

 2,269

4,364

8,236

2,455

9,221

6,017

7,395

22,738

20,775

10,530

11,333

21,153

Source : Gouvernement.

Compte tenu de la grande sensibilité des primes et décotes à la variation des taux d’intérêt et des caractéristiques de la demande des investisseurs pour les titres français, les prévisions relatives au niveau des primes d’émission sont à prendre avec précaution. Selon les éléments transmis à la rapporteure par le Gouvernement, il avait été fait l’hypothèse, en loi de finances pour 2020, que les émissions de dette à moyen/long terme engendreraient 3 milliards d’euros de primes nettes de décotes. Le maintien des taux d’intérêt à un niveau très bas en 2020, amenant une partie importante de la courbe de taux en-deçà de 0 %, et l’orientation toujours accommodante des politiques monétaires, incitent de nouveau à anticiper la réception de primes nettes d’ici fin 2020 et en 2021.


Le niveau des primes à l’émission est lié à la part de l’émission de titres « sur souches anciennes ». On observe que la part des émissions « sur souches anciennes » a été relativement faible en 2016 et 2017, mais qu’elle s’est depuis relevée en 2018 pour atteindre un niveau supérieur à celui de 2014.

part des souches anciennes sur les Émissions

(en milliards d’euros)

Année

Volumes émis sur souches de référence

Volumes émis sur souches anciennes

Part des souches anciennes sur les émissions

(hors titres indexés)

2008

88,343

30,833

25,9 %

2009

102,259

64,000

38,5 %

2010

127,768

62,482

32,8 %

2011

111,602

76,110

40,5 %

2012

124,173

60,216

32,7 %

2013

127,016

48,155

27,5 %

2014

137,220

48,138

26,0 %

2015

133,635

68,578

33,9 %

2016

156,766

37,048

19,1 %

2017

160,423

32,755

17,0 %

2018

148,696

54,311

26,8 %

2019

173,287

55,036

24,1 %

À fin juillet 2020

121,300

56,790

31,9 %

Source : Gouvernement.

Au sens comptable, les primes à l’émission représentent une ressource de trésorerie de l’État ([3]). Elles constituent une ressource de financement, qui permet de limiter le recours à l’endettement. Ainsi, il peut apparaître un décalage temporaire entre le besoin de financement de l’État et le recours à l’endettement en année N.

Toutefois, en comptabilité nationale et en comptabilité générale, les primes et les décotes sont amorties sur la durée de vie du titre. Ainsi, en additionnant les coupons faciaux payés et l’amortissement des primes et décotes à l’émission, la charge financière mesurée dans ces deux référentiels comptables correspond au taux d’intérêt demandé par le marché au moment de l’émission des titres (généralement différent du coupon des titres). En revanche, la charge financière en comptabilité budgétaire correspond aux décaissements liés aux intérêts servis, conformément au taux de coupon.

Le tableau ci-dessous présente l’effet de l’étalement des primes et décotes sur la mesure de la charge de la dette en comptabilités générale de l’État et nationale.

Étalement des primes et dÉcotes

(en milliards d’euros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Amortissement des primes

1,109

1,362

2,404

3,149

3,771

4,423

4,747

6,173

7,658

8,166

8,571

9,288

Amortissement des décotes

1,417

1,457

1,234

1,372

1,491

1,400

1,530

1,621

1,474

1,389

1,288

1,274

Effet net sur la dépense annuelle mesurée en comptabilité générale

0,308

0,095

– 1,170

– 1,777

– 2,280

– 3,023

– 3,217

– 4,552

– 6,184

– 6,777

– 7,283

– 8,014

Source : Gouvernement.

3.   Le débat sur le cantonnement de la dette

Le ministre des finances, de l’économie et de la relance, M. Bruno Le Maire, lors de la discussion du projet de la troisième loi de finances rectificative lors de la séance du lundi 29 juin 2020 a déclaré : « la « dette covid », nous devrons la rembourser. Nous la rembourserons par la croissance et non par les impôts. Nous la rembourserons en la cantonnant et en la séparant des 100 points de dette initiale. Nous adopterons ainsi la même stratégie que pour la dette sociale, qui a été cantonnée dans la CADES – caisse d’amortissement de la dette sociale – et qui sera remboursée d’ici à 2033 (…) Nous proposons donc de cantonner cette dette et, pour la rembourser, de fixer un échéancier qui pourrait courir, par exemple, une vingtaine d’années, jusqu’en 2042. De la sorte, nous assurons que cette dette, mise à part parce que liée à des circonstances exceptionnelles, sera bien remboursée ».

Le cantonnement d’environ 150 milliards de dette d’État amortie à compter de 2034 permettrait d’isoler l’effet « covid » dans le suivi de la trajectoire des finances publiques. Un dispositif d’amortissement de cette dette, qui résulte du surcroît de dépenses au titre de l’action des stabilisateurs automatiques et au titre des mesures d’urgence de 2020 voire de 2021, pourrait s’inspirer du mécanisme de remboursement de la dette sociale par la CADES.

D’après les personnes interrogées par la rapporteure spéciale, un tel cantonnement n’aurait pas d’intérêt financier particulier. Les investisseurs s’intéressent plutôt à l’efficacité des mesures budgétaires et sanitaires prises pour affronter la crise. En revanche, il pourrait avoir un intérêt politique triple :

– ne pas peser sur l’activité économique à court terme en baissant les dépenses ou en augmentant les impôts ;

– répondre à une demande de transparence sur l’évolution des dépenses publiques en isolant les effets de la crise ;

– dessiner une perspective de retour claire à un équilibre budgétaire par exemple en affectant une ressource pérenne au désendettement de la dette liée à la crise.

La perspective du remboursement de la dette ne doit pas être perdue de vue malgré un contexte économique et sanitaire marqué par ce que Mme Jezabel Coupey-Soubeyran, économiste interrogée par la rapporteure spéciale, qualifie d’« incertitude radicale ». L’effet d’un choc de 1 % sur les taux représenterait un surcroît de dépenses de 2,5 milliards d’euros la 1ère année et 15 milliards d’euros la 5ème année, d’après la documentation budgétaire.

B.   L’évolution des caractéristiques de la dette négociable de l’État

L’Agence France Trésor (AFT), service à compétence nationale, a pour mission de gérer la dette négociable et la trésorerie de l’État. La dette non négociable, qui correspond aux dépôts de certains organismes publics, comme les établissements publics ou les collectivités territoriales, est gérée par la direction générale des finances publiques (DGFiP).

1.   Le nouveau record de la durée de vie de la dette négociable de l’État

La durée de vie moyenne de la dette négociable de l’État continue de s’allonger et s’établit à 8 ans et 63 jours fin 2019, un niveau record depuis la création de l’AFT. Le maintien d’une durée moyenne élevée de la dette rend sa charge plus résiliente à une éventuelle remontée des taux d’intérêt.

Évolution de la durÉe de vie de la dette nÉgociable de l’État

Année

fin 2011

fin 2012

fin 2013

fin 2014

fin 2015

fin 2016

fin 2017

fin 2018

fin 2019

Durée de vie moyenne de la dette négociable (après swaps)

7 ans et 52 jours

7 ans et 34 jours

7 ans et

5 jours

6 ans et 362 jours

7 ans et 47 jours

7 ans et 195 jours

7 ans et 296 jours

7 ans et 336 jours

8 ans et 63 jours

Source : rapports annuels de l’Agence France Trésor.

Selon le rapport annuel de l’AFT de juillet 2020 ([4]), à la légère hausse de la maturité moyenne à l’émission se sont ajoutés des rachats d’OAT plus importants en 2019 (45,6 milliards d’euros après 30,4 milliards d’euros en 2020) et surtout la réduction de l’encours des BTF.

La baisse de la maturité moyenne des émissions en 2018 reflète le début de repositionnement des investisseurs dans un contexte qui était alors perçu comme favorable à la hausse des taux. Ainsi, les émissions de maturité inférieure ou égale à 5 ans ont représenté 40 % du programme d’émission de l’AFT en 2018 au lieu de 33 % en 2017. Les émissions de maturité supérieure à 8 ans représentent plus de 50 % du programme d’émission hors titres indexés en 2019.

 

En 2019, l’intérêt des investisseurs est toujours prononcé pour les maturités longues :

– la part des émissions obligataires nominales de l’AFT sur le segment long terme, correspondant à des titres de maturité résiduelle supérieure à 8 ans, s’établit à 55 % de l’ensemble des émissions de l’année ;

– la maturité moyenne à l’émission des obligations émises demeure élevée, s’établissant à 11,1 ans après 10,4 ans en 2018. Ce niveau est sensiblement plus élevé que la moyenne de 8,8 ans observée entre 2008 et 2015.

répartition des émissions brutes de l’AFT par maturité en 2019

(en milliards d’euros)

Source : rapport annuel 2019 de l’Agence France Trésor, p 44.

L’évolution des émissions de titres a des effets sur la composition de la dette négociable de l’État. Ainsi, la part des titres de court terme diminuerait de 7 points sur la période 2011-2021. Symétriquement, les titres de moyen et long terme progresseraient à due concurrence sur la même période.

Évolution de la composition de la dette nÉgociable de l’État

(en milliards d’euros)

 

fin 2011

fin 2012

fin 2013

fin 2014

fin 2015

fin 2016

fin 2017

fin 2018

fin 2019

fin

2020 (p)

fin

2021 (p)

Part 2011

Part 2021

OAT & BTAN

1 116

1 199

1 264

1 332

1 405

1 467

1 540

1 619

1 690

1 820

1 954

85 %

92 %

BTF

178

167

174

175

153

133,9

127

113

107

190

150

14 %

7 %

Supplément d’indexation à la date considérée

19

21

20

20

19

19

20

24

26

21

22

1 %

1 %

Ensemble de la dette - valeur actualisée

1 313

1 386

1 457

1 528

1 576

1 621

1 686

1 762

1 823

2 030

2 126

100 %

100 %

OAT : obligations assimilables du Trésor ; BTAN : bons du Trésor à intérêts annuels ; BTF : bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté.

Source : projets annuels de performances.

Au total, les titres de moyen et long terme représenteraient 92 % de l’encours de la dette négociable de l’État à la fin de l’année 2021. Cela résulte également de la poursuite de la politique de rachats de titres menée par l’AFT. La rapporteure spéciale souligne la qualité de la gestion de l’émission de titres de dette de l’État. Cette dernière contribue à la qualité de la signature de la France et explique en partie l’attractivité de la dette française sur les marchés.

2.   La part de la dette négociable de l’État détenue par des non-résidents

Alors que la part de la dette négociable détenue par des non-résidents a suivi une tendance baissière depuis 2014, l’année 2019 marque un infléchissement, voire une rupture. Elle a diminué de 11,3 points de pourcentage entre 2014 et 2018 pour s’établir à la fin de cette année à 52,3 %. En 2019, elle serait toutefois de 53,6 % ; un ratio stable début 2020.

Le renforcement de la part de la dette détenue par les résidents s’explique principalement par les achats de la Banque de France dans le cadre du programme d’achats de titres de l’Eurosystème. En raison des interventions de l’Eurosystème décidées dans le contexte de la crise sanitaire en mars-avril 2020 (lancement d’un nouveau programme d’achats), il est probable que la proportion d’investisseurs résidents augmente encore en conséquence des interventions de la Banque de France en 2020.

dÉtention par les non-RÉSIDENTS de la dette nÉgociable de l’État

Date

Total dette négociable

12/2009

67,8 %

12/2010

67 %

12/2011

64 %

12/2012

61,9 %

12/2013

63,5 %

12/2014

63,6 %

12/2015

61,9 %

12/2016

58,3 %

12/2017

54,5 %

12/2018

52,3 %

12/2019

53,6 %

03/2020

53,6 %

Source : Banque de France.

Les résidents français représentent donc environ 46 % des détenteurs de la dette d’État en 2019.

 

 

 

Selon les réponses au questionnaire de la rapporteure spéciale, au 30 juin 2020, d’après une enquête semi-annuelle réalisée par le Fonds monétaire international (FMI) réalisée auprès des pays actionnaires sur la base du volontariat ([5]) :

– plus de 50 % des investisseurs non-résidents en titres français publics et privés sont européens ;

– 13 % sont investisseurs sont asiatiques ;

– environ 8 % sont des investisseurs américains.

Enfin, selon une comparaison établie au niveau européen par Eurostat (enquête annuelle sur la structure de la dette publique), la proportion de dette publique détenue par les non-résidents est similaire en France et en Allemagne (de l’ordre de 50 % en 2019, d’après des données Eurostat de juin 2020). Parmi les émetteurs d’une taille comparable à celle de la France, l’Italie et le Royaume-Uni présentent une proportion plus faible (environ 30 % de détenteurs non-résidents). Au Royaume-Uni, la détention par la banque centrale est proportionnellement un peu plus importante qu’en zone euro, et le système de retraite organisé autour des fonds de pensions est un acquéreur important de dette publique domestique.

Une répartition diversifiée en termes géographiques et de profils d’investisseurs présente deux avantages pour la gestion de la dette de l’État :

– d’une part, elle permet un coût de financement plus faible : en effet, plus la demande est large pour les OAT, plus le taux est intéressant pour le contribuable ;

– d’autre part, elle contribue à la résilience du marché de la dette : la diversification de la base d’investisseurs permet de ne pas dépendre d’une catégorie spécifique d’investisseurs tant en termes géographiques que de type d’investisseurs (assureurs, fonds de pension, banques centrales, etc.). Les investisseurs ont en effet des préférences distinctes quant à la composition de leur portefeuille de titres obligataires souverains, une demande variée à laquelle s’adaptent et répondent les caractéristiques (obligation nominale ou indexée à l’inflation, maturité) des titres de dette français afin d’attirer le plus grand nombre d’investisseurs possibles.

Les modalités de suivi de la détention de la dette de l’État

Selon les éléments transmis à la rapporteure spéciale, l’AFT suit la détention de la dette de l’État via trois sources de données externes issues :

– la Banque de France qui fournit les données concernant la détention du stock de dette française par les non-résidents, sous forme d’une enquête réalisée chaque trimestre sur « les placements en valeurs mobilières des agents économiques » ;

– le FMI qui réalise un sondage auprès des investisseurs internationaux (coordinated portfolio investment survey – CPIS), qui permet de déterminer notamment la nationalité de ceux qui détiennent le stock des titres financiers privés et publics ;

– et les spécialistes en valeur du Trésor (SVT), qui transmettent les transactions qui sont réalisées chaque mois dans un format harmonisé au niveau européen (HRF). Bien que ces échanges ne permettent pas d’inférer directement la détention en stock de la dette d’État française, ils permettent à l’AFT de suivre finement les mouvements intervenant sur son marché de dette.

De ce fait, la liquidité des titres français sur l’ensemble de la courbe des taux offre de multiples points d’entrée pour les différents types d’investisseurs (banques centrales, ou fonds de pension).

Ainsi, en cas de remontée durable des taux, et à mesure que les rachats nets et les réinvestissements des tombées de titres de la banque centrale européenne (BCE) s’amenuiseront, différents acteurs de marché pourront prendre le relais de la BCE sur les différents segments de la courbe des taux française. Certains investisseurs, qui s’étaient tenus en retrait compte tenu de l’environnement de taux bas, pourraient décider de rentrer sur le marché français et limiter ainsi les pressions à la hausse sur les taux.

C.   Une progression modérée de la charge de la dette

Le programme 117 comporte deux actions : l’action 1 Dette qui porte les moyens alloués au remboursement de la dette négociable de l’État et l’action 2 Trésorerie qui centralise la quasi-totalité des trésoreries des entités publiques sur un compte unique du Trésor qui est géré par l’AFT de façon active.

1.   Une charge de la dette attendue en hausse en 2021

En 2021, la charge de la dette de l’État portée par le programme 117 s’élèverait à 35,2 milliards d’euros, soit un niveau en augmentation de 0,67 milliard d’euros par rapport à la prévision révisée de 2020 (34,5 milliards d’euros). Ce montant s’inscrit en baisse de 1,9 milliard d’euros par rapport à la prévision initiale 2020 et surtout en diminution de 3,9 milliards par rapport à l’exécution 2019.

 

La révision finale de la charge de la dette pour l’exercice 2020 sera précisée lors de la loi de finances rectificative de fin d’année. Signalons que la loi du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 ([6]) (LFR 2) a d’ores et déjà prévu l’annulation de 2 milliards d’euros en AE/CP sur le programme 117 pour tenir compte d’une prévision d’inflation à la baisse sur la charge des titres indexés.

Évolution de la charge de la dette


(en milliards d’euros, en crédits de paiement)

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires et la loi de finances initiale pour 2021.

Les facteurs explicatifs de la hausse de la prévision pour 2021 par rapport à l’estimation révisée pour 2020 sont les suivants :

– un effet volume lié à l’augmentation de l’encours de la dette (+ 0,8 milliard d’euros) ;

– un effet taux de – 1,3 milliard d’euros du fait de gains de refinancement des titres à moyen et long terme amortis en 2020 ;

– un effet inflation de + 0,9 milliard d’euros du fait du relèvement de l’inflation ;

– et la variation de charge due à des effets calendaires (+ 0,3 milliard d’euros).

2.   Des conditions de financement très favorables

a.   Des taux d’intérêt à un niveau historiquement bas

En 2020, les taux d’intérêt sont restés à très bas niveau, malgré la forte hausse des besoins de financement des États liée à la crise sanitaire et aux mesures de confinement. Les banques centrales sont intervenues massivement pour rassurer les investisseurs et stabiliser les marchés.

La BCE a ainsi décidé dès le mois de mars d’un programme d'urgence face à la pandémie (PEPP : Pandemic Emergency Purchase Programme), consistant à acheter des titres de créances pour un volume total actuellement prévu à 1 350 milliards d’euros.

Ce programme s’ajoute aux dispositifs quantitatifs déjà existants, le programme d’achat d’actifs (APP : Asset Purchase Programme) initié en 2015 et les facilités de refinancement bancaire (TLTRO : Targeted Longer-Term Refinancing Operations). L'écart de taux à 10 ans avec l'Allemagne s'écartait à 50 points de base entre le mois de mars et le mois de mai 2020, puis retrouvait le niveau moyen des années précédentes, aux alentours de 30 points de base à partir du mois de juin.

À moyen-long terme, les conditions de financement restent très favorables. Au mois de mars, le taux à 10 ans se redressait brusquement de 60 points de base. Depuis le mois de juin, il évolue entre – 0,2 % et – 0,1 %. Au 7 septembre 2020, le taux à lémission de titres à 10 ans est de – 0,08 % en moyenne pour 2020, après 0,23 % en 2019.

Le scénario retenu pour la fin 2020 et pour 2021 retient l'hypothèse, prudente, que les taux longs sont susceptibles de remonter. Les niveaux actuels extrêmement bas reflètent un fort pessimisme et l'anticipation de mesures monétaires accommodantes prolongées, de sorte que tout évènement favorable à l'activité économique et/ou une réaction de la BCE en-deçà des attentes de marché sont susceptibles d'entraîner une remontée des taux d'intérêt. L’ensemble des personnes interrogées par la rapporteure à l’occasion de la préparation de ce rapport comptait, en effet, sur la prolongation durant plusieurs années d’une politique monétaire accommodante.

Le taux à 10 ans est attendu en moyenne à 0,2 % fin 2020 et 0,7 % fin 2021, soit des conditions de financement qui resteraient très favorables.

S’agissant des taux à court terme, le taux des BTF à 3 mois serait stable toute l’année 2020, entre – 0,50 % et – 0,40 %.

L’environnement de taux pourrait évoluer sous l’effet d’une inflexion des cibles d’inflation des grandes banques centrales. La réserve fédérale américaine (FED), lors de son comité fédéral des marchés ouverts (FOMC – Federal Open Market Committee) du 16 septembre, a en effet indiqué qu’elle viserait à l’avenir une inflation « modérément supérieure à 2 % » pour compenser les effets d’une inflation qui est longtemps restée en–deçà de cette même cible. Lors d’un discours du 30 septembre 2020, la présidente de la Banque centrale européenne, Mme Christine Lagarde a ouvert le débat sur l’objectif d’inflation de la BCE ([7]).

Le gouverneur de la Banque de France y a répondu en indiquant que « nous pourrions par conséquent être disposés à accepter une inflation supérieure à 2 % pendant un certain temps, sans pour cela procéder mécaniquement à un resserrement de notre orientation monétaire. » ([8]). Les effets de ces changements de paradigme sur le marché de la dette souveraine devront être suivis attentivement.

Évolution d e la moyenne annuelle des taux à l’émission des titres de dette

(en pourcentage)

Source : projets de lois de finances.

b.   La poursuite de la baisse de l’inflation

La charge de la dette de l’État est liée au niveau d’inflation à double titre :

– un encours de dette d’un peu plus de 200 milliards d’euros est indexé sur l’inflation ;

– le mandat des banques centrales est lié à l’inflation. En particulier, la Banque centrale européenne doit viser un taux annuel d’inflation « inférieur à, mais proche de 2 % à moyen terme ».

La variation de la charge annuelle d’indexation est actuellement de l’ordre de plus ou moins 0,2 milliard d’euros pour une variation de plus ou moins 0,1 % de l’inflation en France et en zone euro.

Après la progression continue du taux d’inflation entre 2015 (0 %) et 2018 (1,8 %), le taux d’inflation s’est replié en 2019 (+ 1,1 %). Le contexte économique très dégradé pèse sur le niveau des prix. Le niveau d’inflation attendu en 2020 devrait chuter à + 0,5 % (contre un taux de + 1,2 % attendu en loi de finances initiale) en raison de la baisse des prix énergétiques. En 2021, la prévision retenue par le Gouvernement est de + 0,6 %.

Évolution d e L’inflation depuis 2002

(en pourcentage)

Source : INSEE et projets de lois de finances.

Le marché des titres indexés sur l’inflation est important pour le financement de l’État. L’AFT émet environ 10 % de son programme annuel de financement en obligations indexées sur l’inflation (OATi et OAT€i). Jusqu’en 2007, la proportion d’OAT indexées sur l’inflation dans l’ensemble des émissions brutes s’est située autour de 15 %. L’AFT s’est ensuite engagée à maintenir une proportion se situant autour de 10 % pour à la fois garantir la liquidité de ce segment et adapter l’offre en fonction de la demande exprimée par les investisseurs.

En 2020, cette proportion est néanmoins plus faible à 7,7 % (à fin juillet). Cette baisse s’explique par une augmentation sensible des volumes émis en OAT nominales face à la hausse des besoins de financement de l’État, mais également en raison d’une demande moins dynamique de la part des investisseurs pour cette catégorie de titres, en particulier durant le deuxième trimestre. Les anticipations d’inflation à moyen terme des investisseurs avaient alors fortement baissé, rendant moins nécessaire la nécessité de couvrir le risque lié à l’inflation.

Le rétablissement progressif de la liquidité de marché et la publication de données d’inflation meilleures qu’anticipées initialement par les participants de marché ont contribué à un rebond des valorisations sur ce marché à compter du mois de mai 2020. Cette hausse des anticipations d’inflation a permis un ressaut de la demande et le lancement par syndication d’une nouvelle OATi de maturité 2036 pour un montant de 3 milliards d’euros à un taux réel de – 0,63 %, dont l’allocation reflète le biais domestique de ce produit (59 % du montant émis auprès d’investisseurs résidents).

D.   La stabilité de la charge budgétaire liée à la gestion de la trésorerie de l’État

Aux termes de l’article 123 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), la Banque de France a l’interdiction d’accorder des avances à l’État. Ainsi, l’AFT s’assure que le compte unique du Trésor à la Banque de France présente chaque soir un solde créditeur. Par ailleurs, elle mène une politique active de gestion de la trésorerie, en plaçant les excédents journaliers auprès de contreparties bancaires. Ces opérations sont réalisées sous forme de dépôts ou de prises en pension de titres d’État.

Le solde de la trésorerie correspond à la différence entre la rémunération reçue au titre des placements et à celle versée sur les fonds déposés au Trésor. Cependant, la trésorerie a désormais structurellement un impact budgétaire, en raison de la rémunération des fonds non consommables destinés au financement des investissements d’avenir.

Les dotations non consommables

Les dotations non consommables ont été mises en place lors des programmes d’investissement d’avenir (PIA) 1 et 2, respectivement à hauteur de 15 milliards d’euros et 3,3 milliards d’euros. Il s’agit de dotations bloquées sur des comptes dédiés au Trésor, ne pouvant pas faire l’objet de décaissements. Seuls les intérêts générés par ces dotations sont directement utilisables pour financer des projets.

Le niveau de rémunération des fonds relevant des PIA a fait l’objet d’un arrêté conjoint des ministres en charge des finances et du budget. Pour le PIA 1, le taux de rémunération a été fixé à 3,413 % et le taux pour le PIA 2 a été fixé à 4,03238 %.

La rémunération au titre des fonds non consommables s’élèverait à 712 millions d’euros en 2021 au lieu de 752 millions d’euros en 2020, soit environ 63 % du coût budgétaire de la trésorerie de l’État, évaluée à 1,132 milliard d’euros au titre de l’exercice 2020.

impact budgÉtaire de la gestion de la trÉsorerie de l’État

(en millions d’euros)

Exercices

Exécution 2014

Exécution 2015

Exécution

2016

Exécution

2017

Exécution

2018

Exécution

2019

LFI 2020

2020

Révisé

PLF

2021

Trésorerie

(charge nette)

869

955

1 036

1 046

1 068

1 161

1 132

1 332

1 249

Rémunération des fonds non consommables déposés au Trésor *

688

751

754

752

752

752

712

752

712

Dépôts des correspondants (rémunérations versées)

192

145

146

126

128

177

250

193

232

Pensions, placements et trésorerie (dépenses – recettes)

– 11

59

136

171

188

232

170

387

305

* fonds destinés au financement des investissements d’avenir.

Source : projets annuels de performances.

Selon le projet annuel de performances, la loi de finances rectificative pour 2020 de fin d’année devrait réviser à la hausse la charge budgétaire associée à la trésorerie de l’État, comme en 2018 et 2019. Cette révision résulte de taux de court terme plus faibles qu’anticipé en loi de finances initiale, ce qui a pour effet de réduire la rentabilité des opérations de placement. Cela représente un effet mécanique de perte de rendement pour les placements de l’État.

Objectifs et indicateurs de performance du programme

La qualité de la gestion de la dette et de la trésorerie de l’État est évaluée via quatre objectifs (déclinés en sept indicateurs de performance) :

– couverture des émissions dans les meilleures conditions d’efficience et de sécurité ;

– optimisation de la gestion de la trésorerie en fonction des conditions de marché ;

– amélioration de l’information préalable par les correspondants du Trésor de leurs opérations financières affectant le compte du Trésor ;

– obtention d’un niveau de contrôle des risques de qualité constante et qui minimise la survenance d’incidents.

La rapporteure spéciale n’est pas convaincue de la pleine pertinence des indicateurs retenus, même si la qualité de la gestion de la dette et de la trésorerie de l’État est totalement reconnue.

Le maintien du montant de la charge de la dette de l’État et la croissance des autres dépenses du budget général réduisent la part consacrée par l’État au remboursement de la charge de la dette et au titre de la trésorerie de l’État. Elle permet, mécaniquement, de réduire la part des dépenses de charge d’intérêt dans le budget général de l’État. Elle s’établirait à 9,6 % en 2021, au niveau le plus faible dans la période récente.

Part de la charge de la dette dans le budget gÉnÉral de l’État

(en pourcentage, hors mission Remboursements et dégrèvements)

Source : commission des finances, d’après les lois de règlement et le présent projet de loi de finances.


II.   Les dispositIfs de garantie de l’État ont été Fortement mis à contribution au gré de la crise

Principaux éléments du programme

En 2021, les crédits du programme Appels en garantie de l’État connaissent une augmentation substantielle, atteignant 2,5 milliards d’euros. En LFI 2020, seuls 94 millions d’euros avaient été demandés.

L’augmentation des crédits demandés en 2021 au titre du programme 114 s’explique :

– pour 1,3 milliard d’euros par des décaissements d’appels en garantie des prêts garantis par l’État (PGE) ;

– pour 300 millions d’euros par la réassurance des risques d’assurance-crédit domestique ;

– pour 60 millions d’euros par la réassurance des risques d’assurance-crédit à l’international ;

– pour 731 millions d’euros par la contribution française au fonds de garantie paneuropéen de la BEI.

A.   La Contribution du programme 114 APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT Au soutien des entreprises face à la crise

Le programme 114 Appels en garantie de l’État porte les crédits budgétaires évaluatifs qui découlent de la mise en jeu de garanties octroyées par l’État. Les garanties sont des dispositifs d’engagements hors bilan, qui exposent l’État à un risque financier à plus ou moins long terme. Celles-ci prennent plusieurs formes, telles que les garanties de passifs, les opérations d’assurance, ou les garanties d’achèvement.

Le programme connaît une progression spectaculaire de l’ordre de 2 562 % pour atteindre 2,5 milliards d’euros en AE et CP. En LFI 2020, 94 millions d’euros avaient été prévus et ce montant avait été rehaussé de 182 millions d’euros en LFR.

Pour faire face à la crise, les lois de finances rectificatives ont mis en place de nouveaux dispositifs massifs de garantie de l’État qui expliquent la hausse de 2,4 milliards d’euros des crédits du programme :

– pour 1,3 milliard d’euros par des décaissements d’appels en garantie des prêts garantis par l’État (PGE) ;

– pour 300 millions d’euros par la réassurance des risques d’assurance-crédit domestique ;

– pour 60 millions d’euros par la réassurance des risques d’assurance-crédit à l’international ;

– pour 731 millions d’euros par la contribution française au fonds de garantie paneuropéen de la BEI.

Les dispositifs de garanties antérieurs à la crise sont maintenus. Ils connaissent tous une stabilisation ou une hausse.

RÉpartition des crÉdits du programme 114

(en millions d’euros)

Intitulé de l’action ou sousaction

LFI 2020

PLF 2021

Écart 2020/2021

AE/CP

AE/CP

AE/CP

Action 1 Agriculture et environnement

0,9

1,1

+ 0,2

Action 2 Soutien au domaine social, logement, santé

43,0

57,0

+ 14,0

Action 3 Financement des entreprises et industrie

1,2

1 602,2

+ 1 601,0

Prêt garantie par l'État (nouveau)

1 266,0

+ 1 266,0

Réassurance des risques d'assurance-crédit domestique (nouveau)

278,0

+ 278,0

Affacturage à la commande (nouveau)

57,0

+ 57,0

Garantie à l'industrie de passifs environnementaux

1,2

1,2

Action 4 Développement international de l’économie française

48,5

113,0

+ 64,5

Sous action 4.1 Assurance-crédit

 –

Sous action 4.2 Assurance-prospection

41,5

107,0

+ 65,5

Sous action 4.3 Garantie de change

1,0

1,0

Sous action 4.4 Garantie du risque économique

 –

Sous action 4.5 Garanties de taux d’intérêt Natixis

 –

Sous action 4.6 Garantie du risque exportateur

6,0

5,0

– 1,0

Sous action 4.7 Cap Francexport et Cap Francexport+ (nouveau)

 –

Action 5 Autres garanties

0,5

731,5

+ 731,0

Fonds de garantie paneuropéen

731,0

+ 731,0

Garantie BEI au titre des conventions de Lomé Cotonou

0,5

0,5

Total

94,1

2 504,8

+ 2 410,7

Source : projet annuel de performance.

1.   Les dispositifs de garantie de l’État introduits en 2020 pour soutenir la trésorerie des entreprises

Trois dispositifs de garantie ont été mobilisés pour soutenir les entreprises par l’octroi de prêts garantis.

a.   Les prêts garantis par l’État (PGE)

Le premier dispositif est le programme de prêts garantis par l’État (PGE), prévu à l’article 6 de la loi de finances rectificatives du 23 mars 2020, pour un plafond total autorisé de 300 milliards d’euros.

Sur la base d’un montant de PGE octroyé à fin d’année de 140 milliards d’euros et d’une modélisation réalisée par la Banque de France, les pertes brutes sont à ce stade estimées à 6,4 milliards d’euros sur l’ensemble de la période 2020-2026 (soit 4,6 % de l’encours total garanti). Le montant total de primes associé est de 2,9 milliards d’euros, soit une sinistralité nette de 3,6 milliards d’euros.

Le montant inscrit sur le programme 114 à l’action 3 Financement des entreprises et de l’industrie de 1,3 milliard d’euros pour 2021 correspond aux avances sur indemnisations versées par l’État en 2021 aux établissements prêteurs lorsque se manifeste un événement de crédit (entrée en procédure collective, restructuration de prêt, non-paiement).

Ces hypothèses ne tiennent pas compte des annonces du ministre de l’Économie le 29 octobre 2020 ([9]) et notamment de :

● la possibilité pour les entreprises de contracter un prêt jusqu’au 30 juin 2021 au lieu du 31 décembre 2020 ;

● la possibilité pour les entreprises qui le souhaitent de demander un différé de remboursement d’un an supplémentaire. Au lieu de commencer en mars 2021, celui-ci pourrait débuter en mars 2022.

Le PGE a été complété par une garantie d’affacturage à la commande, permettant aux sociétés d’affacturage de bénéficier de la garantie de l’État en contrepartie de la mise à disposition des lignes de financement garanties, dès la prise de commande par les entreprises clientes. Son impact budgétaire en 2021 est estimé à 57 millions d’euros, inscrits sur l’action 3 Financements des entreprises et industrie du programme 114.

b.   La mise en œuvre d’un Fonds de garantie paneuropéen de la Banque européenne d’investissement

L’article 33 de la loi de finances rectificatives du 30 juillet 2020 autorise la garantie de l’État pour le fonds pan-européen de garantie ([10]) permettant, par effet de levier, de déployer 200 milliards d’euros d’instruments divers de partage de risques, qui complètent les dispositifs nationaux. Ce fonds, géré par la Banque européenne d’investissement (BEI), est garanti à hauteur de 25 milliards d’euros par les États membres, soit un plafond de garantie de 4,7 milliards d’euros pour la France. La sinistralité moyenne attendue par la BEI est de l’ordre de 20 % compte tenu de la vulnérabilité des entreprises ciblées : l’impact attendu à ce stade en 2021 pour la France est de 0,7 milliard d’euros. Ces crédits sont imputés sur l’action 5 Autres garanties du programme 114.

c.   Le renforcement du dispositif de réassurance publique des risques d’assurance-crédit.

Quatre produits de réassurance publique ont été mis en place en 2020 (CAP, CAP+, CAP Francexport et CAP Francexport +) pour permettre aux entreprises de continuer à bénéficier des couvertures assurantielles indispensables à la poursuite de leurs activités commerciales domestique et à l’international.

Dans ce cadre, ce seraient ainsi 8 milliards d’euros d’encours d’assurance-crédit domestique (par Cap, Cap+) qui seront couverts et 5 milliards d’euros d’encours de crédits export (par Cap Francexport et Cap Francexport +). Afin de renforcer l’efficacité de ces premières mesures, un programme complémentaire de réassurance publique des encours d’assurance-crédit, dit CAP Relais, a également été créé. Ce programme portait dans un premier temps sur les risques PME et ETI avant d’être élargi, par l’article 34 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020, aux grandes entreprises ainsi qu’à l’ensemble des opérations à l’export.

La sinistralité attendue serait faible pour la majorité des dispositifs, avec des recettes et des dépenses globalement équilibrées pour Cap, et Cap Francexport, et une perte nette de l’ordre de quelques millions d’euros sur Cap + et Cap Francexport + qui ont des profils de risque plus importants. Cependant, des pertes plus importantes sont attendues sur le dispositif de réassurance de portefeuilles Cap Relais, à hauteur d’environ 0,5 milliard d’euros au total.

Le coût budgétaire est imputé sur l’action 3 Financement des entreprises et industrie du programme 114 pour les dispositifs CAP, CAP + et CAP relais à hauteur de 278 millions d’euros.

Aucun décaissement n’est prévu pour Cap Francexport et Cap Francexport +. Le dispositif est tout de même retracé dans l’action 4 Développement international de l’économie française du programme 114.

2.   Les dépenses prévisionnelles liées aux appels en garantie des autres actions du programme

L’action 1 Agriculture et environnement concerne notamment le désendettement des exploitants agricoles installés en Corse, pour un encours de 3,9 millions d’euros à fin 2019. Une provision forfaitaire de 1,1 million d’euros est retenue pour cette action. Sur les 900 000 euros inscrits en LFI 2019, aucun appel de garantie n’a été observé cette année-là.

L’action 2 Soutien au domaine social, logement et santé soutient l’encours garanti en capital le plus important du programme, soit 601 milliards d’euros en 2019 (capital et intérêts).

 

Elle recouvre principalement :

– la garantie accordée aux épargnants pour les sommes déposées sur leurs livrets d’épargne réglementés (451 milliards d’euros capital et intérêts confondus) ;

– la garantie octroyée aux dispositifs de prêts à l’accession sociale à la propriété (PAS), de prêts à taux zéro, notamment le prêt à taux zéro +, et d’éco‑prêts à taux zéro (56 milliards d’euros). À ce titre, 39 millions d’euros ont été appelés en garantie en 2019 et 57 millions d’euros sont inscrits en 2021. L’augmentation des montants de prêts garantis a entraîné une hausse du montant des sinistres pris en charge par l’État ;

Évolution de la sinistralitÉ des prêts garantis ar l’État
dans le cadre de son action en faveur du logement

(montants en millions d’euros)

Source : projet annuel de performance.

– la garantie octroyée à l’UNEDIC (30 milliards d’euros).

L’action 3 Financement des entreprises et industrie représente désormais 66 % des crédits du programme en raison de l’inscription de la sinistralité prévue au titre des principaux dispositifs de garantie résultant de la crise. Elle s’élève à 1,6 milliard d’euros en AE et CP. Hors impact de la crise, elle financera à hauteur de 1,2 million d’euros des travaux de dépollution dans le cadre d’une garantie accordée à la société nationale des poudres et explosifs cédée à Safran ([11]). L’encours garanti fin 2019 était de 67 milliards d’euros. 

L’action 4 Développement international de l’économie française connaît une augmentation de ses crédits de 64,5 millions d’euros pour atteindre 113 millions d’euros. L’évolution des crédits de cette action s’explique par la forte progression des crédits évalués au titre de la garantie du risque exportateur. L’encours garanti, à la fin de l’année 2019, s’établit à 55 milliards d’euros.

L’action 5 Autres garanties retrace les dépenses relatives à la garantie de l’État des prêts accordés à l’Agence française de développement pour un encours de 4,5 milliards d’euros au 31 décembre 2019, la garantie de l’État au titre de la quote-part de la France dans le dispositif de stabilisation dans la limite d’un plafond de 159 milliards d’euros et la garantie de l’État aux emprunts et cautions de l’Agence nationale des établissements français à l’étranger (ANEFE) dans la limite d’un plafond de 2,4 milliards d’euros. Elle comporte désormais également le financement du fonds de garantie paneuropéen de la Banque européenne d’investissement pour un plafond de 4,7 milliards d’euros.

B.   Le suivi des engagements hors bilan et des garanties de l’État

Les engagements hors bilan correspondent aux « obligations qui, sans réunir les critères d’inscription hors bilan, sont susceptibles d’avoir un impact significatif sur la soutenabilité de sa situation financière » ([12]). Il s’agit d’obligations potentielles à l’égard de tiers dont l’existence ne sera confirmée que par la survenance ou non d’événements futurs incertains et hors du contrôle de l’État. Ils se distinguent des provisions pour risques par leur caractère plus incertain. Comparer de façon brute les engagements hors bilan et la dette passée n’a donc aucun sens.

1.   Le suivi des engagements hors bilan de l’État

Les principaux engagements hors bilan de l’État sont retracés dans le compte général de l’État : ils s’élèvent à 4 495 milliards d’euros fin 2019.

L’engagement relatif à la retraite des fonctionnaires civils de l’État et des militaires s’élève à 2 264 milliards d’euros et représente environ la moitié du total des principaux engagements hors bilan de l’État.

principaux engagements hors bilan de l’état À fin 2019

(en millions d’euros)

Engagements hors bilan

Fin 2018

Fin 2019

Variation

Engagement de retraite des fonctionnaires civils de l’État et militaires

2 080 353

2 264 669

+ 184 316

Garanties de protection des épargnants - Livrets d’épargne réglementés

434 842

450 431

+ 15 589

Régimes sociaux et de retraite

376 241

437 461

+ 61 220

Dette garantie par l’État

206 715

205 408

– 1 307

Fonctionnaires de La Poste

135 900

139 883

+ 3 983

Engagement au titre du capital appelable du Mécanisme européen de stabilité (MES)

126 393

126 324

– 69

Service public de l’énergie

104 995

108 021

+ 3 026

Déficits reportables en avant - Impôt sur les sociétés

80 000

61 000

– 19 000

Aide à l’accès au logement

73 341

73 281

– 60

Engagements budgétaires relatifs à des opérations pour lesquelles le service fait n’est pas intervenu

63 382

70 700

+ 7 318

Soutien financier au commerce extérieur – Garanties publiques à l’export gérées par Bpifrance Assurance Export

61 538

55 216

– 6 322

Engagements au titre du capital appelable vis-à-vis des banques multilatérales de développement (BMD) et des institutions de l’Union européenne de financement

58 368

58 674

+ 306

Engagements de prêts donnés par l’État et non tirés

46 408

46 427

+ 19

Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État (FSPOEIE)

44 910

47 296

+ 2 386

Handicap et dépendance

36 786

44 711

+ 7 925

Autres

258 294

305 879

+ 47 585

Total des engagements hors bilan recensés

dans le compte général de l’État 2018

4 188 466

4 495 381

+ 306 915

Source : compte général de l’État 2019, pages 7 et 8.

Le suivi et la transparence des engagements hors bilan de l’État se sont progressivement améliorés. On trouve ces informations utiles dans le compte général de l’État présenté chaque année à l’occasion de l’examen du projet de loi de règlement.

 

 

 

 

2.   Le suivi des garanties octroyées par l’État

Le total cumulé de toutes les garanties actives octroyées par l’État s’élevait à 735 milliards d’euros en capital et à 18 milliards d’euros en intérêts au 31 décembre 2019. La rapporteure n’a pas pu obtenir les données pour 2020 car la campagne de recensement des garanties octroyées par l’État s’achève en avril de l’année N+1. L’ensemble de ces garanties figurent au tableau d’inventaire des garanties recensées de l’État (TIGRE).

principales garanties actives du capital octroyées par l’État
au 31 décembre 2019

(en milliards d’euros)

Garanties

Montant

Garantie accordée aux épargnants pour les sommes déposées sur leurs livrets d’épargne réglementés

411

Garantie accordée au fonds européen de stabilité financière (FESF)

76

Garantie octroyée pour l’ensemble des prêts à taux zéro (PTZ, NPTZ, PTZ+) et des prêts à l’accession sociale à la propriété

57

Garantie accordée à la BPI Assurance export

55,2

Garantie accordée à Dexia

28

Garantie accordée à l’UNEDIC

30

Source : Gouvernement.

Conformément à l’article 24 de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2018 à 2022 ([13]), le Gouvernement a remis au Parlement un rapport sur l’exécution des autorisations de garanties accordées en loi de finances en 2017, 2018 et 2019.

Objectifs et indicateurs de performance du programme

Le présent programme est évalué via quatre objectifs, déclinés en cinq indicateurs de performance. Ceux-ci concernent l’action 4 Développement international de l’économie française, dotée du niveau le plus élevé de crédits.

Toutefois, la rapporteure spéciale réitère sa demande d’une extension des objectifs et indicateurs de performance à l’action 2 Soutien au domaine social, logement, santé, dont les crédits progressent plus rapidement et atteignent un niveau proche de celui de l’action 4. Il convient de mettre en place une évaluation et un suivi de la performance des crédits budgétaires liés à cette action.


III.   Les crÉdits du programme 145 Épargne

Principaux éléments du programme

La loi de finances pour 2018 a supprimé la prime d’État associée aux plans d’épargne‑logement (PEL) et comptes épargne-logement (CEL) pour les contrats souscrits à compter du 1er janvier 2018. Les premières données relatives aux PEL et CEL exploitables montrent une diminution significative du nombre d’ouvertures depuis le 1er semestre 2018.

La dépense budgétaire du programme Épargne associée aux PEL et CEL est liée au versement de la prime d’État, dont la gestion de l’extinction prendra encore plusieurs années.

Compte tenu de la désaffection des épargnants pour les prêts épargne‑logement, dont les taux sont supérieurs aux taux de marché, le niveau des primes d’État a considérablement baissé entraînant une diminution significative de la dépense budgétaire. Celle-ci est passée de 1,3 milliard d’euros en 2010 à 85 millions d’euros en 2020.

Pour l’année 2021, le niveau prévisionnel des dépenses budgétaires du programme est fixé à 62 millions d’euros.

A.   Les dÉpenses liÉes aux primes d’Épargne logement

1.   Le ralentissement programmé de l’encours des PEL et CEL

Les produits d’épargne‑logement recouvrent le compte épargne‑logement (CEL) et le plan d’épargne-logement (PEL), qui donnent à leur détenteur le droit à l’octroi d’un prêt épargne-logement, selon des taux d’intérêt définis par arrêté ministériel.

Tous les contrats souscrits avant le 12 décembre 2002 donnent lieu au versement d’une prime d’État au moment de la clôture du compte. Pour les contrats souscrits à compter de cette date, le versement de la prime d’État est soumis à deux conditions : la souscription du contrat avant le 1er janvier 2018 et la souscription d’un prêt épargne‑logement.

Le montant maximal de la prime est de 1 144 euros pour les CEL et de 1 000 euros pour les PEL, ce plafond pouvant être porté à 1 525 euros lorsque le PEL contribue à la construction ou à l’acquisition d’un logement performant énergétiquement.

Cette prime a été supprimée pour les PEL ou les CEL souscrits à compter du 1er janvier 2018, dans un contexte de perte d’attractivité de ces produits sous les effets conjugués de la baisse de leur taux de rémunération et de taux de prêts épargne-logement supérieurs aux taux de marché.

 

En outre, la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU) par la loi de finances initiale pour 2018 avait pour objet de progresser vers la neutralité fiscale et budgétaire entre les différents produits d’épargne. Les intérêts des nouveaux PEL et CEL ouverts à compter du 1er janvier 2018 sont donc imposés dans les conditions de droit commun.

L’encours des PEL et des CEL s’élevait à 312 milliards d’euros à la fin de l’année 2019, en augmentation de 6 milliards d’euros par rapport à 2018.

encours DES COMPTES ET PLANS D’ÉPARGNE LOGEMENT

(en milliards d’euros)

Encours à la fin de l’année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Comptes épargne-logement (CEL)

36,4

36,4

35,5

33,7

31,5

30,3

29,4

29,7

29,3

29,6

Plans d’épargne-logement (PEL)

185,3

189,5

191,5

201,5

220,2

245

262,3

275,1

276,4

282,5

Total

221,7

225,9

227,0

235,3

251,6

275,3

291,7

304,8

305,7

312,1

Source : projets annuels de performance.

Les données constatées laissent apparaître une diminution du nombre d’ouvertures des CEL et PEL en 2019 par rapport à 2018. La collecte sur ces deux produits est toutefois en hausse. Les encours des plans d’épargne logement (PEL) sont en hausse de 2,2 % à 282,5 milliards d’euros malgré un nombre de comptes en baisse en 2019 de 6,1 %.

2.   Une forte baisse des dépenses liées aux primes épargne logement depuis 2010

La dépense budgétaire du programme Épargne associée aux PEL et CEL est liée au versement de la prime d’État. Compte tenu de la désaffection des épargnants pour les prêts épargne‑logement, le niveau des primes d’État a considérablement baissé, entraînant une diminution significative de la dépense budgétaire.

Pour l’année 2021, le niveau prévisionnel des dépenses budgétaires au titre des primes PEL et CEL est fixé à 60,7 millions d’euros, en repli de 27,7 % par rapport au montant inscrit dans le projet de loi de finances pour 2020.

dÉpense budgÉtaire affÉRENTE AUX PRIMES D’ÉPARGNE LOGEMENT

(en millions d’euros)

Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

LFI 2020

PLF 2021

Dépenses au titre des primes PEL et CEL

1 332

692

650

572

382

250

120

94

98

71

84

61

Évolution

– 48 %

– 6 %

– 12 %

– 33 %

– 35 %

– 52 %

– 21 %

+ 4%

+ 2%

– 14%

–28%

Source : rapports annuels de performances, projet annuel de performances.

Le montant de cette dépense diminuera progressivement compte tenu de sa suppression pour les contrats souscrits à compter du 1er janvier 2018. Selon le projet annuel de performance, « la gestion extinctive des primes d’épargne‑logement prendra encore quelques années », compte tenu de l’encours des PEL et des CEL. Il précise que le montant des charges pour provisions inscrit dans le compte général de l’État, au titre du stock des primes PEL souscrits avant 2002, s’élève à 1,3 milliard d’euros fin 2019.

Comme l’a souligné la Banque de France dans son dernier rapport annuel sur l’épargne réglementée, les PEL souscrits avant 2011 font l’objet, en tendance, de moins de fermetures que les PEL souscrits après 2011 ; par exemple, sur le second semestre 2019, 4 % des PEL souscrits avant 2011 ont été fermés, contre 8 % de ceux souscrits après 2011. Si l’ensemble des PEL souscrits avant 2011 voyaient leur rémunération fixée à 1,0 % – taux applicable depuis 2016 – le gain en termes de ressources finançant l’économie serait de l’ordre de 4 milliards d’euros ([14]) .

Objectifs et indicateurs de performance du programme

La performance du présent programme est évaluée par le biais de deux objectifs et quatre indicateurs. La rapporteure spéciale estime que les indicateurs relatifs aux dépenses fiscales associées au présent programme pourraient être utilement développés, compte tenu de la gestion extinctive des dépenses budgétaires associées aux primes d’État.

B.   L’importance des dépenses fiscales associées au programme

Les dépenses fiscales associées au programme Épargne s’élèveraient à 4,5 milliards d’euros au titre de l’année 2021. L’exécution de 2019 s’élevait à 5,6 milliards d’euros. Il s’agit d’une baisse largement en trompe l’œil puisque trois dépenses fiscales chiffrées à 916 millions d’euros en 2019 ne sont pas chiffrées pour 2020. Ces dépenses fiscales, d’un niveau élevé, ont pour objet d’orienter l’épargne des ménages. Elles résultent pour plus de la moitié :

– de l’exonération relative aux sommes versées au titre de la participation, de l’intéressement et de l’abondement aux plans d’épargne salariale, représentant 2,2 milliards d’euros ;

– et de l’exonération ou de l’imposition réduite aux produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie, représentant 1,1 milliard d’euros.

Évolution du niveau de dÉpenses fiscales associÉes au programme

(en millions d’euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

6 024

3 474

3 501

5 011

5 420

5 825

5 714

5 663

5 619

6 116

5 634

Source : rapports annuels de performances.

La rapporteure spéciale constate que 12 dépenses fiscales sur 28 ne sont pas chiffrées dans les documents budgétaires ou présentent une incidence nulle. Pour plusieurs dépenses fiscales, il n’existe pas de chiffrage de l’impact budgétaire de la mesure ni du nombre de bénéficiaires.

La rapporteure spéciale avait déjà demandé de passer en revue la pertinence de ces dépenses fiscales lors des prochaines conférences fiscales. En l’absence d’éléments nouveaux, elle déposera plusieurs amendements d’appel à l’occasion de l’examen des articles non rattachés du projet de loi de finances pour 2021, afin de donner au Gouvernement l’occasion de justifier le maintien de dépenses fiscales dont le chiffrage n’est pas fourni.

Estimation du CoÛt des principales dÉpenses fiscales associÉes
au programme Épargne

(en millions d’euros)

Dépenses fiscales

2015

2016

2017

2018

2019

Exonération des sommes versées au titre de la participation, de l’intéressement et de l’abondement aux plans d’épargne salariale

1 400

1 440

1 620

1 740

2050

Exonération ou imposition réduite des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie

1 573

1 530

1 486

1 596

1426

Exonération des intérêts et primes versées dans le cadre de l’épargne logement

696

714

709

854

428

Exonération des revenus provenant de l’épargne salariale

290

320

325

300

290

Exonération des intérêts des livrets A

435

324

266

277

150

Exonération des produits des plans d’épargne populaire

319

272

203

252

83

Exonération des intérêts des livrets de développement durable

194

148

124

127

68

Exonération des intérêts des livrets d’épargne populaire

53

37

31

30

15

Total

5 714

5 663

5 619

6 116

5 634

N.B. : la ligne « total » est destinée à donner un ordre de grandeur du niveau des dépenses fiscales associées à ce programme, elle n’a pas de vocation exhaustive.

Source : rapport annuel de performance Engagements financiers de l’État pour 2015 et 2016 et projet annuel de performances pour 2017 et les années suivantes.

IV.   Un effort de sincérité budgétaire au titre de la dotation du mÉcanisme europÉen de stabilitÉ

Principaux éléments du programme

Après plusieurs critiques de la part de la Cour des comptes et de la rapporteure spéciale, des crédits sont enfin inscrits sur le programme 366 au titre de la dotation du mécanisme européen de stabilité.

Après 98 millions d’euros prévus en 2020 par la troisième loi de finances rectificative pour 2020, 79 millions d’euros sont prévus en 2021 pour ce programme.

Celle dotation vise à rétrocéder les intérêts perçus par la Banque de France sur le capital placé par le MES auprès de celle-ci, du fait de taux négatifs appliqués à la facilité de dépôt placée auprès de l’Eurosystème (– 0,4 %, puis – 0,5 % à compter de septembre 2019). Le Gouvernement avait indiqué que cet engagement serait poursuivi tant que le taux de la facilité de dépôt serait négatif. Toutefois, aucune dotation n’avait été prévue à ce titre en loi de finances pour 2018, ni en loi de finances pour 2019, ni en loi de finances initiale pour 2020. Les crédits correspondants ont été régulièrement ouverts sur la dotation pour dépenses accidentelles de la mission Crédits non répartis.

A.   La dÉpense constatÉe entre 2017 et 2019

La souscription de la France aux parts libérées du capital du Mécanisme européen de stabilité (MES) a fait l’objet de cinq versements échelonnés entre octobre 2012 et avril 2014. En conséquence, le présent programme n’était plus doté de crédits budgétaires depuis cette date.

Toutefois, la loi de finances rectificative pour 2017 a procédé à l’ouverture de 86,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au titre du MES ([15]). Cela visait à rétrocéder les intérêts perçus par la Banque de France sur le capital placé par le MES auprès de celle-ci, du fait d’un taux négatif appliqué à la facilité de dépôt placée auprès de l’Eurosystème (‑ 0,4 %) ([16]).

Cette dotation résultait d’un engagement du ministre en charge de l’économie et des finances, formalisé dans une lettre signée en mai 2017, sous réserve d’un engagement similaire d’un autre État membre. Le ministre allemand a adressé une lettre fin septembre 2017 au MES, prenant le même engagement de rétrocession des intérêts perçus. L’Allemagne a ainsi rétrocédé :

– 128,9 millions d’euros en 2018 au titre de 2017 ;

– 135,4 millions d’euros en 2019 au titre de 2018 ;

– 131,7 millions d’euros en 2020 au titre de 2019.

À l’occasion de la loi de finances rectificative pour 2017, le programme a été renommé Dotation au mécanisme européen de stabilité, dans la mesure où les versements ne concernent pas une dotation en capital du MES (qui était l’ancien intitulé).

Le Gouvernement a indiqué que cet engagement se poursuivrait tant que le taux de la facilité de dépôt serait négatif. Un décret du 26 décembre 2018 a ouvert 100 millions d’euros sur le présent programme et annulé un montant équivalent sur la dotation Dépenses accidentelles et imprévisibles de la mission Crédits non répartis ([17]). Aucun crédit n’avait été prévu ni en loi de finances initiale ni en loi de finances rectificative au motif « qu’aucun engagement de rétrocession n’avait été pris par l’Allemagne au moment de l’élaboration de ces projets de loi » ([18]).

Par une lettre du 30 septembre 2019, le MES a informé le ministre de l’économie que de nouveaux États membres devraient participer à ce mécanisme, ce que l’Italie et les Pays-Bas ont fait, respectivement fin 2019 et début 2020.

B.   Une débudgétisation critiquée

Dans son rapport sur le budget de l’État en 2018 ([19]), la Cour des comptes a critiqué l’usage qui a été fait de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles par le décret du 24 décembre 2018, qualifiant de « sous‑budgétisation » la dotation du MES. La Cour a relevé que « la dépense de 100 millions d’euros, bien qu’incertaine quant à sa date de réalisation, n’en était pas moins prévisible et son montant connu ».

La rapporteure spéciale avait donc recommandé ([20]) d’inscrire les ouvertures de crédits nécessaires en loi de finances initiale sur le programme 336 Dotation du Mécanisme européen de stabilité.

C.   Une dotation initiale enfin portée sur le programme 336

La troisième loi de finances rectificative pour 2020 ([21]) a mis en œuvre cette recommandation et ouvert 98 millions d’euros pour la rétrocession des intérêts négatifs payés par le mécanisme européen de stabilité au titre de l’année 2019.

Pour l’année 2021, 79 millions d’euros sont prévus pour couvrir les rétrocessions au MES au titre de l’année 2020. Comme le reste des crédits de la mission, ces crédits sont évaluatifs car le montant définitif ne sera notifié qu’à la fin de l’année 2020.

Par ailleurs, le plan adopté par l’Eurogroupe le 8 mai dernier prévoit la mise à disposition par le Mécanisme européen de stabilité (MES) d’une ligne de crédit pouvant aller jusqu’à 2 % du PIB de chaque État membre, soit environ 240 milliards d’euros dans l’hypothèse où tous les États membres y auraient recours, ligne de crédit qui s’appuie sur un instrument existant. Cette facilité doit avoir pour destination le financement national des coûts directs et indirects liés aux soins de santé, à la guérison et à la prévention en raison de la covid-19.

Le capital autorisé du MES est actuellement fixé à 704,8 milliards d’euros, dont 80,5 milliards d’euros de capital appelé. Ce montant est suffisant pour que le MES puisse faire face à d’éventuelles pertes sur le programme de prêts proposé.

La mesure prévue par l’Eurogroupe n’aura donc pas d’impact pour les finances publiques compte tenu du montant du capital déjà appelé.


V.   Le fonds de soutien relatif aux prÊts et contrats financiers structurÉs À risque

Principaux éléments du programme

Les crédits de paiement ouverts pour l’exercice 2021 s’élèvent à 189,5 millions d’euros, complétés par 11,5 millions d’euros au titre des fonds de concours associés au présent programme.

A.   L’organisation du fonds et ses modalités d’intervention

1.   L’historique et l’organisation du fonds

Le fonds de soutien en faveur des collectivités territoriales a été créé par la loi de finances pour 2014 ([22]) pour aider les collectivités territoriales ayant souscrit, avant l’entrée en vigueur de la loi, des emprunts structurés et des instruments financiers à risque. Son objet est de faciliter le remboursement de ces emprunts par anticipation ou à alléger leur charge d’intérêt.

Le fonds était initialement doté de 1,5 milliard d’euros ; la loi de finances pour 2015 a doublé sa capacité financière pour la porter à 3 milliards d’euros afin de faire face aux conséquences financières et au renchérissement de nombreux emprunts souscrits par les collectivités après la décision de la Banque nationale suisse, le 15 janvier 2015, de laisser s’apprécier la devise helvétique par rapport à l’euro ([23]).

Le fonds de soutien a été créé pour une durée maximale de 15 ans et prendra fin en 2028. Un comité national d’orientation et de suivi (CNOS) a été chargé d’émettre des recommandations sur les modalités d’intervention du fonds. Il est composé de représentants de l’État, des collectivités territoriales, de parlementaires et de personnalités qualifiées.

Par ailleurs, un service à compétence national dénommé « Service de pilotage du dispositif de sortie des emprunts à risque » a été créé afin de conclure les conventions d’aide avec les collectivités et les établissements intéressées ([24]).

En novembre 2017 ([25]), le pilotage et la gestion opérationnelle du fonds ont été transférés à la direction générale des finances publiques (DGFiP), compte tenu du recentrage de ses activités sur l’exécution des conventions d’aides conclues entre l’État et les bénéficiaires. En outre, l’Agence de services et de paiement (ASP) est en charge de l’exécution des versements aux entités bénéficiaires ainsi que de leur suivi.

Selon le projet annuel de performance, la DGFiP assure notamment :

 la gestion et le pilotage budgétaire des crédits alloués au programme 344 ;

– la gestion des prêts qui bénéficient d’un soutien au titre du dispositif dérogatoire : notification annuelle des aides attribuées au titre des éventuels intérêts dégradés, accompagnement des collectivités dans le cadre des campagnes de renouvellement du dispositif dérogatoire, liquidation et notification des aides définitives en cas de sortie du régime dérogatoire ;

– le suivi du paiement des aides dues jusqu’en 2028 aux collectivités ayant remboursé leurs prêts par anticipation, en lien avec l’ASP.

2.   Les modalités d’intervention du fonds

Les aides versées par le fonds prennent trois formes :

– une aide pour le remboursement anticipé de l’emprunt à risque, calculée par référence aux indemnités de remboursement anticipées dues dans la limite de 75 % de ces indemnités ;

– une prise en charge partielle des intérêts dus au titre de l’emprunt à risque, à titre dérogatoire par période de trois ans reconductible jusqu’au terme des contrats ;

– et une aide à la gestion de l’encours, réservée aux collectivités territoriales dont la population est inférieure à 10 000 habitants et certains établissements publics, ayant souscrit des emprunts à risque, dans la limite de 2,5 millions d’euros par an et de 50 % de la totalité des frais engagés.

Les sources de financement du fonds sont de quatre ordres :

– environ 100 millions d’euros au titre de la taxe additionnelle à la taxe systémique des banques créée par la loi de finances rectificative pour 2014 ([26]) ;

– 63 millions d’euros au titre de crédits budgétaires ;

– 10 millions d’euros sous forme de fonds de concours, au titre de la contribution annuelle de la Société de financement local (SFIL) et de sa filiale la Caisse française de financement local (CAFFIL) ;

– et 1,5 million d’euros sous forme de fonds de concours, au titre de la contribution annuelle de DEXIA.

B.   Les engagements du fonds et le montant des crédits de paiement pour 2021

1.   Les engagements du fonds de soutien

Au 30 avril 2015, 676 collectivités avaient déposé un dossier de demande d’aide au fonds, correspondant à 1 164 prêts déposés. Le fonds s’est engagé à aider 580 collectivités, soit 85 % des collectivités ayant déposé un dossier ([27]). L’ensemble des conventions d’aide avec les collectivités et les établissements concernés a été signé au cours de l’année 2016.

Au total, 858 prêts sur les 996 prêts pour lesquels les collectivités ont accepté le bénéfice de l’aide donnent lieu à une aide au titre du remboursement anticipé du prêt.

Seules 89 collectivités, pour un total de 138 prêts, bénéficient du dispositif dérogatoire de prise en charge partielle des intérêts dus au titre de l’emprunt à risque, pour un montant d’aide plafond de 151,7 millions d’euros.

Au 31 décembre 2019, l’ensemble des conventions d’aide représentait un montant total de 2,53 milliards d’euros.

Au 31 décembre 2020, le niveau des engagements à honorer devrait s’élever à 1,69 milliard d’euros, compte tenu des versements déjà réalisés depuis la création du fonds.

2.   Les crédits de paiement ouverts au titre de l’exercice 2021

Les crédits de paiement ouverts pour 2021 s’élèvent à 189,5 millions d’euros complétés par 11,5 millions d’euros de fonds de concours.

Le niveau des ressources prévu pour 2020 était de 174,9 millions d’euros de crédits, complétés par des fonds de concours à hauteur de 11,5 millions d’euros.

En 2022 et en 2023, les crédits de paiement devraient s’élever à 214,3 millions d’euros chaque année. Il est supposé que les crédits de paiement s’établissent à un niveau stable chaque année jusqu’à extinction du fonds en 2028. Au-delà de 2022, le montant des crédits de paiement devrait être de 1,26 milliard d’euros.

Objectifs et indicateurs de performance du programme

La performance du présent programme est évaluée par le biais d’un indicateur, qui recense le pourcentage de rejets de virement lors de la mise en paiement par l’ASP de l’ensemble des aides. Le pourcentage est nul en exécution en 2017 et en 2018. Il est fixé à ce même niveau pour les années 2019, 2020 et 2021.

La rapporteure spéciale considère que cet indicateur de performance relève plus de l’impératif que de l’objectif.


VI.   Vers un verdissement de la mission

Principaux éléments

Le succès de l’OAT verte se confirme avec un encours qui atteint 27,4 milliards d’euros, trois ans seulement après la première émission.

L’évaluation de la mission à l’aune d’un prisme écologique est désormais possible grâce au budget vert. Pour l’instant, l’essentiel des crédits de la mission ont été considérés comme neutres.

A.   LA PROgression de l’OAT VErte

Le 24 janvier 2017, la France a lancé sa première obligation souveraine « verte », l’OAT verte 1,75 % 25 juin 2039, pour un montant initial de 7 milliards d’euros. Cette obligation est dédiée à des dépenses s’inscrivant dans la continuité des engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris sur le climat.

Depuis lors, afin d’assurer sa liquidité, l’OAT verte a fait l’objet de 10 réémissions postérieures à l’émission inaugurale, portant l’encours total de l’OAT verte au 2 juillet 2020 à 27,4 milliards d’euros.

Historique des abondements de l’OAT verte

(en milliards d’euros)

 

Date d'émission

Rendement à l’émission (%)

Montant émis

Encours

24 janvier 2017

1,74

7,0

7,0

1er juin 2017

1,51

1,6

8,6

7 décembre 2017

1,27

1,1

9,7

5 avril 2018

1,34

1,1

10,8

25 juin 2018

1,46

4,0

14,8

7 février 2019

1,25

1,7

16,5

2 mai 2019

1,04

2,5

19,0

5 septembre 2019

0,19

1,7

20,7

6 février 2020

0,38

2,0

22,7

2 avril 2020

0.51

2,6

25,3

2 juillet 2020

0,31

2,1

27,4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : Agence France Trésor.

Ce succès auprès des investisseurs s’explique notamment par l’adoption des meilleures pratiques existantes en matière de finance environnementale. La création de l’OAT verte s’est accompagnée de l’engagement de la France à l’endroit de ses investisseurs de fournir un rapport annuel d’allocation et de performance des dépenses – les deux premiers rapports d’allocation ont été publiés en juillet 2018 et en juillet 2019 ([28]) . L’élaboration des rapports sur les impacts environnementaux des dépenses est supervisée par un Conseil d’évaluation composé d’experts indépendants.

L’AFT a publié le troisième rapport d’allocation et de performance, rendant compte de l’utilisation des fonds levés en 2019 ([29]). Sur les 5,9 milliards d’euros d’OAT verte émis l’an dernier, 54 % ont ainsi été alloués à des projets visant à atténuer le changement climatique, 23 % ont été consacrés à l’adaptation au changement climatique, 15 % ont servi à financer la préservation de la biodiversité, et 8 % ont permis de soutenir les efforts de réduction de la pollution, de l’eau, de l’air et du sol.

L’émission de l’OAT verte a permis au marché français des obligations vertes d’acquérir une taille critique et contribué à faire de la France l’un des principaux pays émetteurs. L’OAT verte a aussi contribué à la création d’un standard pour les titres souverains dans un marché en structuration et exercé un effet d’entraînement. À ce titre, l’OAT verte contribue à l’expansion du marché des obligations vertes et, plus généralement, au développement de la finance verte. La concurrence s’accentue toutefois sur ce segment ce qui force la France à rester compétitive sur ce marché notamment en augmentant les dépenses éligibles à un financement vert. L’Allemagne a ainsi levé avec succès 6,5 milliards d’euros pour sa première émission d’OAT verte en septembre 2020 suivant le pas de cinq autres pays européens.

Pays europÉen ayant Émis une OAT verte

(en milliards d’euros)

Date d'émission

Pays

Montant

mars 2018

Belgique

4,5

octobre 2018

Irlande

3,0

mai 2019

Pays-Bas

6,0

septembre 2020

Suède

2,0

septembre 2020

Allemagne

6,5

 

 

 

 

 

 

Source : Agence France Trésor.

Comme souligné par le directeur général de l’Agence France Trésor, M. Anthony Requin, dans le cadre d’un entretien avec la rapporteure, les dépenses éligibles à l’OAT verte augmentent cette année grâce à des efforts de lisibilité et de sincérité budgétaire :

– conformément à une disposition votée par le Parlement en loi de finances pour 2020 à l’initiative de la rapporteure spéciale ([30]) les dépenses du CAS Transition énergétique sont rebudgétisées à compter de 2021 ;

– de même, la rebudgétisation du compte d’affectation spéciale Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs, qui porte jusqu’à présent la subvention annuelle d’équilibre des trains Intercités conventionnés par l’État, opère une modernisation du circuit budgétaire ;

– enfin, le fonds de prévention des risques naturels majeurs, qui était auparavant un fonds sans personnalité est également rebudgétisé.

Les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables passent ainsi de 11,9 milliards d’euros en LFI 2020 à 18,7 milliards d’euros en PLF 2021 au format constant. L’extension du champ des dépenses éligibles participe de l’accroissement de la liquidité de l’OAT verte.

B.   LE BUDGET VERT, une avancée importante mais une Évaluation encore embryonnaire pour la mission

L’information publique sur les dépenses publiques s’enrichit cette année du budget vert. Le présent projet de loi de finances intègre pour la première fois une cotation intégrale des dépenses selon leur impact environnemental, suivant une démarche de budgétisation verte ou de « budget vert ». La France est ainsi le premier pays au monde à réaliser une évaluation environnementale à l’échelle de tout un budget national ([31]) .

Ce rapport prend la suite d’une disposition législative adoptée à l’initiative de la rapporteure spéciale ([32]). En 2020 le Gouvernement avait remis au Parlement une annexe générale portant sur le financement de la transition écologique. La méthode a été développée par une mission commune du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et de l’Inspection générale des finances (IGF) ([33]).

Ce premier exercice a jugé que l’impact sur l’environnement des dépenses rattachées à la mission était très majoritairement neutre. Seuls 114 millions d’euros ont été jugés comme favorables à l’environnement :

– l’ensemble des 62,2 millions d’euros liés à l’épargne-logement de l’action 1 du programme 145 Épargne ont été cotés comme favorables sur l’axe « atténuation climat », du fait de la modulation des bonifications des plans épargne logement (PEL) en fonction du diagnostic énergétique du logement ;

– l’exonération des intérêts des livrets de développement durable, estimée à 52 millions d’euros en PLF 2021, est également cotée comme favorable sur l’axe « atténuation climat ».

L’évaluation de la mission pourrait progresser :

– au titre du programme 117, la charge d’intérêt liée à l’OAT verte pourrait être inscrite comme ayant un impact favorable sur plusieurs axes de la cotation. On peut considérer que la charge d’intérêt d’un emprunt fait partie du coût total du financement d’un projet ;

– au titre des dispositifs de garanties et d’assurance export du programme 114, certaines dépenses, par exemple celles venant en soutien aux exportations de biens et services utilisés à des fins de production d’énergie à partir de ressources fossiles doivent être considérées comme ayant un impact défavorable à l’environnement (l’inverse étant évidemment possible). Le gouvernement précise que des efforts pour « verdir » les dispositifs de garanties et d’assurance export ont été engagés, avec notamment la suppression de l’octroi de garanties à des projets ayant recours à du charbon ou encore la fracturation hydraulique en LFI 2020.


—  1  —

   Examen en commission

Au cours de sa réunion du jeudi 22 octobre 2020, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Engagements financiers de l’État.

Suivant les recommandations de la rapporteure spéciale, la commission a adopté les crédits de la mission.

Le compte rendu de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

 

 

 


—  1  —

   Liste des personnes auditionnées
par la rapporteure spéciale

 

Agence France Trésor

– M. Anthony Requin, directeur général

– M. Philippe Guyonnet-Duperat, chef de bureau, cellule trésorerie

 

Crédit Agricole Corporate and Investment Bank*

– M. Pierre Blandin, managing director, Global Head of SSA Debt Capital Market

 

Centre d’études prospectives et d'informations internationales (CEPII)

– Mme Jézabel Couppey-Soubeyran, économiste

 

Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)

– M. Henri Sterdyniak, économiste

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 


([1])  Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

([2]) L’adjudication est depuis 1985 la voie privilégiée d’émission des valeurs du Trésor, elle désigne la technique d’émission « au prix demandé ». Cela consiste à servir les titres au prix ou au taux effectif de soumission. Ainsi, les offres dont les prix sont les plus élevés sont servies en premier. Celles de niveau inférieur le sont ensuite, jusqu’à hauteur du montant d’émission souhaité par l’AFT. Les participants, dont les offres ont été retenues, paient des prix différents, correspondant exactement au prix qu’ils ont demandé.

([3]) Article 25 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([4]) AFT, Rapport annuel d’activité 2019, juillet 2020 (lien).  

([5]) Enquête Coordinated Portfolio Investment Survey.

([6])  Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

([7]) The monetary policy strategy review: some preliminary considerations, Discours de Christine Lagarde, Présidente de la BCE, lors de la conférence « ECB and Its Watchers XXI », 30 septembre 2020 (lien).

([8]) Conférence en ligne, 14 octobre 2020, La réponse des banques centrales à la « tragédie à l’horizon », Discours de M. François Villeroy de Galhau (lien).

([9]) Conférence de presse de M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la relance, jeudi 29 octobre 2020 (lien).

([10]) Le 26 mai 2020, le Conseil dadministration de la BEI a approuvé la structure et la documentation juridique du nouveau Fonds de garantie paneuropéen pour faire face aux conséquences économiques de la pandémie de covid-19, mis en place au bénéfice du Groupe BEI. La création du fonds avait préalablement été approuvée dans son principe par le Conseil européen du 23 avril dans le cadre du programme global prévu par lUE face à la pandémie de la covid-19.

([11]) Dans le cadre d’une garantie de passif, l’État s’est engagé, par l’article 98 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 à prendre en charge dans la limite de 216 millions d’euros une partie du coût de la dépollution des terrains des filiales de la société nationale des poudres et explosifs (SNPE) cédées a Safran et transférées depuis juin 2016 dans la jointventure Ariane Group (anciennement appelée Airbus Safran Launchers).

([12]) Cour des comptes, Communication à la commission des finances du Sénat, Le recensement et la comptabilisation des engagements hors bilan de l’État, 30 mai 2013.

([13]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([14]) Rapport annuel sur l’épargne réglementée, Banque de France, Octobre 2020 (lien).

([15]) Loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

([16]) Le Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) a décidé que le MES ne serait plus exempté du paiement des intérêts au titre de la facilité de dépôt de l’Eurosystème à compter du 1er février 2017.

([17]) Décret n° 2018-1241 du 26 décembre 2018 portant ouverture et annulations de crédits, pris sur le fondement de l’article 11 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

([18]) Rapport relatif au décret n° 2018-1241 du 26 décembre 2018 portant ouverture et annulations de crédits.

([19]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2018 : Résultats et gestion, p. 120, mai 2019.

([20]) Mme Bénédicte Peyrol, Rapport annexé n° 23 sur la mission Engagements financiers de l’État au rapport n° 1990 sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2018, juin 2019.

Mme Bénédicte Peyrol, Rapport annexé n° 23 sur la mission Engagements financiers de l’État au rapport n° 3011 sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019, juin 2020.

([21]) Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

([22]) Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, article 92.

([23]) Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, article 8 et État B.

([24]) Décret n° 2014-810 du 16 juillet 2014 relatif au service à compétence nationale dénommé « Service de pilotage du dispositif de sortie des emprunts à risque ».

([25]) Délégation de gestion signée le 13 novembre 2017 entre le ministre de l’économie et des finances et le ministre de l’action et des comptes publics.

([26]) Loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014, article 26.

([27]) Les 15 % restants résultent soit d’un refus de la collectivité de bénéficier du fonds, soit du caractère inéligible du dossier après instruction.

([28])  AFT, OAT verte, rapport d’allocation et de performance 2017 (lien).

AFT, OAT verte, rapport d’allocation et de performance 2018 (lien).

([29])  AFT, OAT verte, rapport d’allocation et de performance 2019 (lien).

([30]) Amendement n° I-1812 à l’article 32 du projet de loi de finances pour 2020 (N° 2272).

([31]) Rapport sur l’impact environnemental du budget de l’État, septembre 2020 (lien).

([32]) Article 206 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([33]) Conseil général de l’environnement et du développement durable, Inspection générale des finances, Green Budgeting : proposition de méthode pour une budgétisation environnementale, septembre 2019.