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N° 3399

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2020.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2021 (n° 3360),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

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ANNEXE N° 28
 

 

IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

 

 

 

 

 

Rapporteurs spéciaux : Mme Stella DUPONT et M. Jean-Noël BARROT

 

Députés

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

DONNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. ANALYSE GÉNÉRALE DES CRÉDITS DE LA MISSION ET DE LA MAQUETTE BUDGÉTAIRE

A. DES CRÉDITS EN PROGRESSION DANS UN CONTEXTE INCERTAIN

1. Des crédits en progression

2. La structuration des crédits

a. Le périmètre, la répartition et la nature des crédits

b. Les fonds de concours européens : une contribution élevée, des questions en suspens

3. Une construction budgétaire éclaircie mais rendue incertaine par le contexte sanitaire

a. Une construction budgétaire éclaircie

b. Une construction budgétaire crédible mais fragile

B. UNE MAQUETTE ET DES INDICATEURS BUDGÉTAIRES STABLES

II. L’ANALYSE DES CRÉDITS PAR PROGRAMME

A. LE PROGRAMME 303 : UNE PROGRESSION DES DÉPENSES MARQUÉE PAR LA CRÉATION DE 4 000 PLACES SUPPLÉMENTAIRES D’HÉBERGEMENT ET UN EFFORT SOUTENU DE LUTTE CONTRE L’IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE

1. L’action  2 Garantie de l’exercice du droit d’asile : des dépenses en progression et toujours sous tension

a. Un effort important accompli en faveur de l’accueil et de l’hébergement des demandeurs d’asile

b. L’allocation pour demandeurs d’asile : une hypothèse de dépenses crédible

c. L’OFPRA : une stabilisation des dépenses à un niveau élevé

2. L’action  3 Lutte contre l’immigration irrégulière : des crédits en progression

a. La rétention administrative : la poursuite de l’accroissement des capacités

b. Les autres dépenses soutenant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière : des crédits en hausse

c. La crise sanitaire a réduit, sans l’interrompre, le nombre d’éloignement d’étrangers en situation irrégulière

3. Les actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien : des crédits limités

B. PROGRAMME 104 : DES CRÉDITS PROLONGEANT LA POLITIQUE ENGAGÉE EN 2018

1. Le financement de l’OFII (action n° 11 Accueil des étrangers primo- arrivants)

2. Les autres crédits du programme 104

a. L’action n° 15 Accompagnement des réfugiés : le financement des centres provisoires d’hébergement et d’un ensemble composite d’actions en faveur de l’accompagnement des réfugiés

b. Les autres actions financées : les actions n° 12 Actions d’intégration des primo-arrivants, n° 14 Accès à la nationalité française et n° 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

3. Le programme 104 : l’enjeu de l’exécution budgétaire

III. LES CRÉDITS DU PLAN DE RELANCE QUI AURAIENT PU ÊTRE RATTACHÉS AU PROGRAMME 303 : UN EFFORT TEMPORAIRE COMPLÉMENTAIRE D’HÉBERGEMENT ET D’AIDE AU RETOUR DES ÉTRANGERS EN SITUATION IRRÉGULIÈRE

1. La création de 500 places d’hébergement en CAES

2. La création de 1 500 places dans les dispositifs de préparation au retour

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX, DÉPLACEMENTS ET CONTRIBUTIONS ÉCRITES

 

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 41,5 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances.

 


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   PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Les crédits demandés dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2021 au titre de la mission Immigration, asile et intégration représentent 1 757,8 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 1 848,9 millions d’euros en crédits de paiement (CP). Ces montants, accordés au ministère de l’intérieur et à ses opérateurs, sont en retrait de 170 millions d’euros en AE (– 8,8 %) et en progression de près de 37 millions d’euros en CP (+ 2 %) par rapport à ceux figurant dans la loi de finances initiale (LFI) pour 2020.

Les crédits de cette mission reposent sur les programmes 104 Intégration et accès à la nationalité (433,3 millions d’euros en AE et en CP) et 303 Immigration et asile (1 324,5 millions d’euros en AE et 1 415,6 millions d’euros en CP).

Ces crédits s’inscrivent dans un contexte profondément affecté par la crise sanitaire. Pour la première fois depuis 2015, le nombre de demandes d’asile introduites en France est en net retrait (environ 100 000 demandes d’asile devraient être introduites auprès de l’OFPRA en 2020 contre 132 800 en 2019) et les perspectives pour 2021 anticipent une demande d’asile équivalente à celle de 2019.

Les crédits du programme 303 se caractérisent par la création de 4 000 nouvelles places d’hébergement en faveur des demandeurs d’asile et par un financement de l’allocation pour demandeurs d’asile plus sincère que celui observé précédemment. Les crédits soumis en matière de lutte contre l’immigration irrégulière se distinguent par la poursuite d’une hausse soutenue. Les crédits du programme 104 en matière d’intégration se stabilisent à un niveau élevé et confortent l’effort engagé depuis 2018.

Les rapporteurs spéciaux approuvent les orientations mises en œuvre et sont favorables à l’adoption des crédits proposés. Ils seront cependant attentifs à l’exécution budgétaire du programme 104 et souhaitent que ce programme ne serve plus de variable d’ajustement budgétaire des besoins de financement du programme 303.

La mission Plan de relance complète les crédits de la mission à hauteur de 37 millions d’euros en AE et 18,5 millions d’euros en CP. Le plan de relance prévoit effectivement le financement de 2 000 places complémentaires d’hébergement sous la forme de 500 places en centres d’accueil et d’examen des situations et de 1 500 places dans les dispositifs de préparation au retour favorisant l’éloignement aidé d’étrangers en situation irrégulière.

Enfin, les rapporteurs spéciaux regrettent le faible taux de réponse du ministère de l’intérieur au questionnaire budgétaire lui ayant été transmis le 9 juillet 2020. Alors que l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances prévoit que le Gouvernement répond aux questions posées « par écrit, au plus tard le 10 octobre », à peine 41,5 % des réponses ont été apportées dans ce délai. Si, à la date de publication de ce rapport ce taux s’est élevé à 82,7 %, il est regrettable que le ministère n’ait pas respecté ses obligations.


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   DONNÉES CLÉS

Évolution en 2021 DES CRÉDITS DE LA MISSION par rapport À 2020

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programmes de la mission

LFI 2020

LFR 2020

PLF 2021

Évolution (en %)

LFI 2020

LFR 2020

PLF 2021

Évolution (en %)

104 - Intégration et accès à la nationalité française

431,4

 

433,3

+ 0,5 %

431,4

 

433,3

+ 0,5 %

303 - Immigration et asile

1 496,5

 

1 324,5

 11,5 %

1 380,9

 

1 415,6

+ 2,5 %

Totaux

1 927,9

 

1 757,8

 8,8 %

1 812,3

 

1 848,9

+ 2 %

Source : projet annuel de performances.

Le plan de relance comprend 37 millions d’euros en AE et 18,5 millions d’euros en CP intéressant la mission et servant au financement de places d’hébergement temporaires supplémentaires.

Opérateurs dans le périmètre du rapport spécial (2) :

● Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA, établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l’intérieur) : 929,8 millions d’euros (programme 303) ;

● Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII, établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l’intérieur) : 259,6 millions d’euros (programme 104) et 459,4 millions d’euros (programme 303).

Mesures de périmètre et de transfert (2) :

● Le programme 104 organise le transfert au programme 129 Coordination du programme gouvernemental de la mission Direction de l’action du Gouvernement d’un crédit de 0,1 million d’euros dédié au financement de la fondation du camp des Milles ([1]) ;

● Le programme 303 prévoit le transfert (pour un montant de 0,1 million d’euros) de 2 ETPT de l’OFPRA au Service national des enquêtes administratives et de sécurité relevant du programme 176 Police nationale de la mission Sécurités.

Nombre d’équivalents temps plein travaillé (ETPT) sur les programmes 104 et 303 : 2 171 emplois sous plafond (2 173 en 2020, – 2 ETPT) :

● OFPRA : 1 003 (1 005 en 2020, – 2) ;

● OFII : 1 168 (1 168 en 2020, inchangé).

Prévision de rattachement des fonds de concours européens : 53,76 millions d’euros.

Dépense fiscale : aucune dépense fiscale n’est rattachée à la mission.

 

 

 


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   INTRODUCTION

Le nombre d’étrangers résidant en situation régulière en France est estimé, selon le ministère de l’intérieur, à près de 4,76 millions en 2018 ([2]). En 2019, 132 826 demandes d’asile ont été introduites auprès de l’OFPRA et le bénéfice d’une protection internationale a été accordé à 45 988 personnes dont 9 849 mineurs accompagnants ([3]).

Le budget de la mission Immigration, asile et intégration participe au financement des politiques publiques en matière de gestion des flux migratoires, de garantie du droit d’asile, de lutte contre l’immigration irrégulière et d’intégration des personnes étrangères résidant régulièrement sur notre territoire. Les crédits de cette mission ne recouvrent cependant pas la totalité des dépenses engagées par l’État en ce domaine. Le financement des préfectures ne relève ainsi pas de cette mission alors que ces administrations occupent une place centrale dans les relations entretenues avec les étrangers en situation régulière ou irrégulière. Le document transversal Politique française de l’immigration et de l’intégration indique ainsi qu’en complément des programmes 104 et 303, dix-sept autres programmes répartis entre onze missions ([4]) soutiennent les actions engagées par l’État en ce domaine pour un montant cumulé de 6 653 millions d’euros en AE et 6 693 millions d’euros en CP.

Le budget de la mission Immigration, asile et intégration constitue cependant la clé de voûte du financement des politiques publiques intéressant les étrangers.

L’examen des crédits inscrits dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2021 reposera sur une analyse générale des crédits proposés (I), sur une analyse par programme (II) et sur un examen des crédits du plan de relance soutenant ces politiques publiques (III).

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I.   ANALYSE GÉNÉRALE DES CRÉDITS DE LA MISSION ET DE LA MAQUETTE BUDGÉTAIRE

A.   DES CRÉDITS EN PROGRESSION DANS UN CONTEXTE INCERTAIN

Les crédits de la mission Immigration, asile et intégration poursuivent leur croissance engagée en 2015.

1.   Des crédits en progression

Pour la sixième année consécutive, les crédits de paiement de la mission Immigration, asile et intégration sont en hausse. Ces crédits s’élèvent à 1 848,9 millions d’euros en CP en croissance de 2 % par rapport à la loi de finances initiales (LFI) pour 2020.

Évolution des crÉdits de paiement de la mission Immigration, asile et intÉgration ExÉcution budgÉtaire 2013-2019, LFI 2020 et PLF 2021

(en millions d’euros)

Source : notes d’exécution budgétaire 2013-2019, LFI 2020 et projet annuel de performances 2021.

Comme en 2020, la croissance des CP de la mission est moins marquée qu’entre 2016 et 2019 ce qui suggère une stabilisation progressive de ces crédits :

2016-2021 : croissance des CP de la mission par rapport à l’année N-1

2016

(par rapport
à 2015)

2017

(par rapport
à 2016)

2018

(par rapport
à 2017)

2019

(par rapport
à 2018)

2020

(par rapport
à 2019)

2021

(par rapport
à 2020)

+ 48,9 %

+ 26,3 %

+ 22,2 %

+ 14,5 %

+ 1,8 %

+ 2 %

Source : commission des finances.

Le PLF 2021 se caractérise également, de manière nouvelle, par une dissociation de l’évolution des CP de celle des AE. Si les CP poursuivent leur croissance, les AE connaissent en revanche une baisse significative proche de 9 % (– 8,8 %). Cette situation tient à la forte réduction des AE observée en matière d’hébergement d’urgence des demandeurs d’asile. Si, en 2020 la LFI a prévu 488,8 millions d’euros d’AE en faveur de ces structures, ce montant s’établit à 222,7 millions d’euros dans le PLF 2021.

Selon le ministère de l’intérieur, cette évolution, qui ne concerne pas les autres formes d’hébergement des demandeurs d’asile, est la conséquence du nouveau mode de financement pluriannuel de ces établissements expérimentés en 2019 et généralisé en 2020 (cf. infra).

2.   La structuration des crédits

Les crédits de la mission se caractérisent par le maintien de leur périmètre, la prépondérance du programme 303, la prédominance des dépenses d’intervention et la contribution significative des fonds de concours.

a.   Le périmètre, la répartition et la nature des crédits

Le périmètre des crédits de la mission Immigration, asile et intégration est quasiment stable. Seules deux mesures mineures de périmètre sont relevées. La première concerne le programme 104 et organise le transfert au programme 129 Coordination du programme gouvernemental de la mission Direction de l’action du Gouvernement d’un crédit de 0,1 million d’euros dédié au financement de la fondation du camp des Milles. La seconde intéresse le programme 303 et prévoit le transfert (pour un montant de 0,1 million d’euros) de 2 ETPT de l’OFPRA au service national des enquêtes administratives et de sécurité relevant du programme 176 Police nationale de la mission Sécurités.

La répartition des crédits au sein de la mission est marquée par la prépondérance du programme 303 qui représente, en AE comme en CP, plus de 75 % des crédits octroyés.

Les crédits de la mission sont essentiellement structurés autour des dépenses d’intervention qui représentent les trois-quarts des AE (73,9 %) et des CP (75,5 %) en raison de la part représentée par le financement de l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA) et des dispositifs d’hébergement. Les crédits de fonctionnement représentent 24,7 % des AE et 23,2 % des CP et financent les missions de l’OFPRA, les centres et locaux de rétention administrative, les frais d’éloignement des étrangers en situation irrégulière et les actions d’intégration. Les dépenses d’investissement sont résiduelles et financent très majoritairement des travaux dans les centres et locaux de rétention administrative relevant du programme 303. Ces crédits n’intègrent cependant pas les dépenses d’investissement de l’OFPRA et de l’OFII incluses dans les subventions pour charges de service public octroyées à ces deux établissements.

b.   Les fonds de concours européens : une contribution élevée, des questions en suspens

La prévision de rattachement (hors reports) des fonds de concours au financement de la mission s’établit, selon l’état récapitulatif des crédits de fonds de concours et attributions de produits joint au PLF, à 62,2 millions d’euros en 2021 répartis entre les programmes 104 (43 millions d’euros) et 303 (19,2 millions d’euros).

Les actions financées au titre du programme 104 sont des mesures d’aide à l’intégration en faveur notamment des personnes réinstallées et des réfugiés. Ces fonds de concours sont d’origine européenne et s’inscrivent dans la nouvelle programmation de la période 2021-2027.

Les actions financées au titre du programme 303 concernent des mesures d’accueil et d’accompagnement des demandeurs d’asile (par l’OFII et l’OFPRA), la réalisation de vols retours et l’assistance juridique aux personnes retenues dans les centres de rétention administrative. Le projet annuel de performance mentionne uniquement des fonds de concours d’origine européenne. Aucun fonds de concours d’origine britannique n’est précisé alors qu’en 2019 ces derniers se sont élevés à 14,5 millions d’euros et que 0,8 million d’euros sont en cours de rattachement en 2020. Interrogée sur ce sujet, la DGEF a indiqué que les versements britanniques se faisaient dorénavant hors fonds de concours sous la forme de remboursements sur factures alimentant directement les programmes 152 Gendarmerie nationale et 176 Police nationale de la mission Sécurités.

L’attribution et la gestion des fonds de concours soulèvent plusieurs interrogations.

Lors de l’examen du PLF 2020, les rapporteurs avaient souligné « la lourdeur des procédures et les délais importants de versement des fonds gérés par le ministère de l’intérieur » et indiquaient avoir été « surpris de constater que parmi les contrôles réalisés en 2019 certains portaient encore sur les exercices 2014, 2015 et 2016 » ([5]). Un constat similaire est établi cette année puisque, de nouveau, des associations ont regretté le contrôle tardif des fonds européens (le contrôle des fonds exécutés en 2017 a commencé en 2020) et les différences de pratiques entre les auditeurs sélectionnés par le ministère de l’intérieur (certains acceptant par exemple les provisions pour congés payés alors que d’autres les rejettent).

Lors de l’examen du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019, les rapporteurs avaient également relevé qu’à la suite d’un litige avec la Commission européenne, le ministère de l’intérieur avait dû renoncer début 2020 à 48,4 millions d’euros de versements contestés et que la DGEF s’interrogeait sur l’opportunité de faire participer les prestataires (notamment associatifs) à la prise en charge de ce coût.

Le ministère de l’intérieur a précisé que « seules les corrections liées à un dossier précis, soit un maximum de 5,1 millions d’euros sur les corrections totales sont susceptibles d’être supportés par les bénéficiaires, qu’ils soient institutionnels (soit un maximum de 4,7 millions d’euros) ou du secteur associatif et privé (soit un maximum de 0,4 million d’euros). »

La gestion des fonds de concours européens pose donc certaines questions. Pour ce motif, les rapporteurs notent avec satisfaction que le Premier ministre a diligenté en février 2020 quatre corps d’inspection (l’inspection générale de l’administration, l’inspection générale des affaires sociales, l’inspection générale des finances et le conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces verts) pour établir un rapport sur la simplification de la gestion des fonds européens dans plusieurs secteurs dont l’immigration et l’intégration. Les rapporteurs prendront connaissance de ce rapport une fois que celui-ci sera rendu public ou, dans l’hypothèse où il ne serait pas publié, après en avoir sollicité la communication au titre des pouvoirs spéciaux qui leur sont reconnus par l’article 57 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

3.   Une construction budgétaire éclaircie mais rendue incertaine par le contexte sanitaire

Les éléments recueillis par les rapporteurs permettent d’éclaircir les modalités de construction budgétaire de la mission sans toutefois lever l’ensemble des incertitudes l’entourant.

a.   Une construction budgétaire éclaircie

Les crédits de la mission Immigration, asile et intégration dépendent fortement de l’évolution attendue de la demande d’asile et des délais de traitement de ces demandes par l’OFPRA ([6]). Le PLF anticipe pour 2021 une demande d’asile équivalente à celle observée en 2019 et assigne à l’OFPRA un objectif de délai de traitement de 112 jours ([7]).

Les erreurs de prévision observées au cours des derniers exercices ont conduit les rapporteurs à solliciter des précisions sur les modalités d’établissement de ces hypothèses.

i.   Des erreurs régulières de prévision

Des erreurs régulières de prévision ont affecté les précédentes hypothèses d’évolution de la demande d’asile et de traitement de la demande d’asile par l’OFPRA.

De 2015 à 2020, les six hypothèses d’évolution de la demande d’asile retenues dans le PLF ont été infirmées par les faits, parfois de manière importante. Si, sur cette période, certaines évolutions ne pouvaient légitimement pas être anticipées (comme le choc migratoire en 2015 et la crise sanitaire en 2020), d’autres étaient plus prévisibles :

2015-2020 - Comparaison de l’hypothÈse d’Évolution de la demande d’asile retenue dans le PLF et de l’évolution de la demande d’asile enregistrÉe à l’OFPRA

Année

Hypothèse d’évolution retenue dans les documents budgétaires

Nombre et évolution du nombre de demandes d’asile (OFPRA ([8]))

Écart entre la prévision budgétaire et les flux constatés

2015

+ 7,5 %

80 075

+ 23,5 %

16 points par rapport aux flux constatés

2016

+ 10 %

85 726

+ 7 %

3 points par rapport aux flux constatés

2017

+ 10 %

100 755

+ 17,5 %

7,5 points par rapport aux flux constatés

2018

+ 10 %

123 625

+ 22,7 %

12,7 points par rapport aux flux constatés

2019

+ 0 %

132 614

+ 7,3 %

7,3 points par rapport aux flux constatés

2020

+ 0 %

100 000

(prévision)

- 30 % environ

Environ 30 points par rapport aux flux constatés

Sources : Cour des comptes et auditions des rapporteurs.

De la même façon, de 2015 à 2020, les objectifs de délais de traitement des demandes d’asile assignés à l’OFPRA n’ont pas été respectés :

Année

Hypothèse de délai d’examen de délai moyen de traitement d’un dossier par l’OFPRA figurant dans les documents budgétaires

Délais constatés

Écart entre la prévision budgétaire et les délais constatés

2015

151 jours

216 jours

65 jours

2016

140 jours

183 jours

43 jours

2017

90 jours

185 jours

95 jours

2018

60 jours

150 jours

90 jours

2019

60 jours

161 jours

101 jours

2020

150 jours

241 (OFPRA) ou
275 jours (PAP)

125 jours

Sources : projets annuels de performances.

Un constat similaire pourrait être fait pour les délais de jugement des affaires devant la Cour nationale du droit d’asile mais cette donnée ne relève pas stricto sensu de la mission ([9]).

Ces difficultés récurrentes de prévision expliquent le déséquilibre financier persistant de la mission. Comme les rapporteurs l’ont observé lors de l’examen du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019, l’exercice 2019 a été le « onzième exercice consécutif de dépassement des crédits initiaux. Depuis la création de la mission Immigration, asile et intégration en 2008 le niveau des crédits inscrits en loi de finances initiale n’a couvert qu’une seule fois (en 2008) les besoins réels de financement » ([10]). Pour ce motif, les rapporteurs ont souhaité disposer d’éléments précis sur les modalités de détermination des hypothèses retenues lors de la construction budgétaire de la mission.

ii.   Les hypothèses retenues lors de la construction budgétaire de la mission

En réponse aux interrogations des rapporteurs, le ministère de l’intérieur a précisé que :

– l’hypothèse d’évolution de la demande d’asile retenue repose sur une stabilisation du flux entrant au niveau constaté en 2019 (132 800 demandes d’asile introduites à l’OFPRA) ;

– l’hypothèse retenue en matière de délai de traitement des demandes d’asile par l’OFPRA (112 jours) se fonde sur la montée en puissance attendue des 200 personnels supplémentaires (150 officiers de protection et 50 agents occupant des fonctions support) recrutés dans le prolongement de la loi de finances pour 2020. Le ministère de l’intérieur considère que, sauf événement imprévu, l’OFPRA devrait être en capacité de rendre 170 800 décisions en 2021 ([11]) contre 115 094 en 2018, 132 826 décisions en 2019 et 101 600 attendues en 2020 ;

– la CNDA devrait, selon le ministère de l’intérieur, rendre entre 80 000 et 90 000 décisions en 2021 contre 66 500 en 2019 et de 40 à 45 000 attendues en 2020 ([12]).

b.   Une construction budgétaire crédible mais fragile

Les rapporteurs considèrent que les hypothèses retenues sont à la fois crédibles et fragiles.

S’agissant de l’hypothèse d’évolution de la demande d’asile, ils notent que le contexte actuel rend particulièrement ardu tout exercice d’anticipation. Cependant, au regard des données disponibles et des flux constatés, la prévision retenue leur semble plausible. Ainsi, le nombre de demandes d’asile introduites auprès de l’OFPRA n’a pas encore retrouvé son niveau antérieur à la crise sanitaire. En septembre 2020, 8 000 demandes d’asile ont été enregistrées par l’OFPRA contre près de 11 000 en janvier 2020. De ce fait, anticiper, en 2021, une demande d’asile équivalente à ce qu’elle fut en 2019 constitue une hypothèse raisonnable, voire prudente.

Les rapporteurs considèrent également que les hypothèses de nombre de décisions rendues par l’OFPRA et la CNDA sont optimistes même si, de nouveau, le contexte sanitaire rend difficile toute anticipation.

La construction du PLF 2021 est, sur ces points, plus satisfaisante que celle observée les années précédentes. La sincérité de la mission s’en trouve renforcée. Les rapporteurs seront cependant attentifs aux conditions d’exécution budgétaire des crédits et invitent l’OFPRA et le ministère de l’intérieur à publier régulièrement des données sur les flux de l’asile.

À l’heure actuelle, seul l’OFII publie chaque mois sur son compte twitter des données relatives au nombre de bénéficiaires de l’allocation pour demandeurs d’asile et au nombre de demandeurs d’asile reçus en guichet unique. L’OFPRA transmet des chiffres mensuellement et trimestriellement à Eurostat conformément aux obligations européennes de la France ([13]) mais l’accès à ces données est malaisé. Ces éléments sont utiles mais insuffisants et mériteraient d’être complétés afin d’aligner la pratique française sur les pratiques allemande ou belge ([14]).

En réponse aux interrogations des rapporteurs, le directeur général de l’OFPRA a indiqué être « favorable, sur le principe, à la mise à disposition du public de données plus accessibles, selon une périodicité infra-annuelle, afin notamment d’alimenter le débat public avec des données fiables et vérifiées ».

Une récente déclaration du ministre de l’intérieur et de la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté, laisse supposer une évolution favorable en ce domaine ([15]).

B.    UNE MAQUETTE ET DES INDICATEURS BUDGÉTAIRES STABLES

La structuration générale de la maquette de la mission repose, comme pour les exercices précédents, sur deux programmes décomposés en neuf actions.

Le programme 104 Intégration et accès à la nationalité française comprend cinq actions et le programme 303 Immigration et asile en comporte quatre ([16]). Ces actions sont appréciées au moyen de neuf indicateurs (trois pour le programme 104 et six pour le programme 303 ([17])). Deux modifications sont à signaler. L’intitulé de l’action n° 12 du programme 104 est modifié (l’« accompagnement des étrangers en situation régulière » est transformé en « actions d’intégration des primo-arrivants ») et, pour le programme 303, un indicateur relatif au « taux de transfert des demandeurs d’asile placés sous procédure Dublin » est institué. Sur ce dernier point, Mme Stella Dupont s’interroge sur l’opportunité de mesurer la performance d’un des aspects du règlement Dublin III ([18]) au moment où l’absence d’efficacité de ce texte est largement reconnue.

Les rapporteurs prennent acte de ces ajustements et considèrent que la maquette budgétaire est globalement satisfaisante. Ils renouvellent cependant leur souhait de suppression de l’action n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas du programme 303 dont le montant est très limité (0,52 million d’euros) et qui n’a fait l’objet d’aucune consommation budgétaire en 2019.

Par ailleurs, ils soutiennent la recommandation de la Cour des comptes de disposer, au sein du programme 104, d’un indicateur rendant compte de l’activité des centres provisoires d’hébergement compte tenu des montants significatifs engagés en faveur de ces structures (81,9 millions d’euros). Interrogée sur ce sujet, la DGEF a indiqué réfléchir à une évolution des indicateurs de performance de la mission.

II.   L’ANALYSE DES CRÉDITS PAR PROGRAMME

Le programme 104 finance principalement l’accueil des étrangers primo-arrivants, les actions d’intégration et les procédures de naturalisation tandis que le programme 303 est dédié, pour l’essentiel, à la garantie de l’exercice du droit d’asile, à la politique des visas et à la lutte contre l’immigration irrégulière.

Ces programmes seront analysés par ordre d’importance financière.

A.   LE PROGRAMME 303 : UNE PROGRESSION DES DÉPENSES MARQUÉE PAR LA CRÉATION DE 4 000 PLACES SUPPLÉMENTAIRES D’HÉBERGEMENT ET UN EFFORT SOUTENU DE LUTTE CONTRE L’IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE

Les crédits du programme 303 s’établissent à 1 324,5 millions d’euros en AE et 1 415,6 millions d’euros en CP en retrait de 11,5 % pour les AE et en croissance de 2,5 % pour les CP par rapport à la LFI 2020. Ces montants sont ainsi répartis.

Ventilation des crÉdits du programme 303 par actions

(en millions d’euros)

 

LFI 2020

PLF 2021

Évolution en valeur absolue

Évolution 2020-2021

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

303 Immigration et asile

1 496,5

1 380,9

1 324,5

1 415,6

– 172

+34,7

– 11,5 %

+ 2,5 %

1 Circulation des étrangers et politique des visas

0,52

0,52

0,52

0,52

-

-

-

-

2 Garantie de l’exercice du droit d’asile

1 377,1

1 251,8

1 187,1

1 281,5

– 190

+ 29,7

– 13,8 %

+ 2,4 %

3 Lutte contre l’immigration irrégulière

113,1

122,9

131,2

127,9

+ 18,1

+ 5

+ 15,9 %

+ 4,1 %

4 Soutien

5,7

5,7

5,7

5,7

-

-

-

-

Source : projet annuel de performances.

Depuis 2017, les CP de ce programme évoluent ainsi :

2017–2021 : évolution des crédits de paiement du programme 303 par actions

(en millions d’euros)

 

Action 1 Circulation des étrangers et politique des visas

Action 2 Garantie de l’exercice du droit d’asile

Action 3 Lutte contre l’immigration irrégulière

Action 4 Soutien

Total des crédits examinés

2017 (exécutés)

0,6

1 136

76,1

25,4

1 238

2018 (exécutés)

0

1 109,5

100,9

41,4

1 252

2019 (exécutés)

0

1 287,9

109,3

29,9

1 427

LFI 2020

0,52

1 251,8

122,9

5,7

1 381

PLF 2021

0,52

1 281,5

127,9

5,7

1 415,6

Variation 2017-2021

13,3 %

+ 12,8 %

+ 68,1 %

77,6 %

+ 14,4 %

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

En 2021, les crédits proposés se distinguent par la création de 4 000 places supplémentaires d’hébergement et par la poursuite d’un effort soutenu de lutte contre l’immigration irrégulière.

1.   L’action n° 2 Garantie de l’exercice du droit d’asile : des dépenses en progression et toujours sous tension

L’action n° 2, d’un montant de 1 187,1 millions d’euros en AE et 1 281,5 millions d’euros en CP, constitue – très nettement – le premier poste budgétaire de la mission et finance les dépenses d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile, l’ADA et l’OFPRA. Par rapport à la LFI 2020, ces montants sont en retrait de 189,9 millions d’euros en AE et en hausse de 30 millions d’euros en CP. Ces dépenses sont marquées par un effort important accompli en faveur de l’accueil et de l’hébergement des demandeurs d’asile, une hypothèse de dépense relativement crédible pour l’allocation pour demandeurs d’asile et le maintien de moyens importants en faveur de l’OFPRA.

a.   Un effort important accompli en faveur de l’accueil et de l’hébergement des demandeurs d’asile

La différence constatée dans l’allocation des crédits entre les CP et les AE en matière d’hébergement des demandeurs d’asile ne compromet pas l’effort accompli en faveur de l’accueil de ces populations.

i.   Des crédits importants se caractérisant par d’importantes différences entre les CP et les AE

Le PLF prévoit 634,81 millions d’euros en AE et 729,31 millions d’euros en CP au titre du financement de l’accueil et de l’hébergement des demandeurs d’asile.

Les CP prévus (729,31 millions d’euros) sont en progression de 17 millions d’euros par rapport à la LFI 2020 et poursuivent l’important effort financier engagé depuis plusieurs années en faveur de l’accueil et de l’hébergement des demandeurs d’asile.

2015-2021 : Évolution des Crédits de paiement dédiés à l’accueil
et à l’hébergement des demandeurs d’asile

(en millions d’euros)

Source : commission des finances d’après les données de la Cour des comptes et les documents budgétaires.

Le PLF se caractérise également par une différence significative (94,5 millions d’euros) entre les CP et les AE finançant l’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile. Cet écart s’explique par le poids plus important des CP observé dans le financement des structures d’hébergement d’urgence des demandeurs d’asile (HUDA) :

2021 – différence entre les Crédits de paiement et les autorisations d’engagement des DIFFÉRENTES STRUCTURES d’hébergement des demandeurs d’asile

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

L’écart entre les AE et les CP des HUDA résulte du nouveau mode de financement pluriannuel de ces établissements expérimenté en 2019 et généralisé en 2020. En 2019 et 2020, des AE ont été ouverts pour financer des HUDA sur une durée de trois ans à hauteur de 1 031 millions d’euros. Sur la même période, ces AE ont été partiellement couvertes par des CP d’un montant de 760,5 millions d’euros. En 2021, les CP prévus pour le financement des HUDA (355 millions d’euros) sont très supérieurs au montant des AE (222,7 millions d’euros) puisqu’il correspond à la dernière annuité du conventionnement pluriannuel 2019-2021 de certaines structures HUDA et au fonctionnement courant d’autres structures HUDA non encore couvertes par des engagements pluriannuels (hébergement en hôtels).

L’évolution depuis 2017 des AE ouverts en LFI relatifs aux différentes structures d’hébergement des demandeurs d’asile témoigne du caractère récent de ce phénomène qui ne s’était plus produit depuis 2018.

2017-2021 – autorisations d’engagement des DIFFÉRENTES STRUCTURES d’hébergement des demandeurs d’asile

(en millions d’euros)

 

LFI 2017

LFI 2018

LFI 2019

LFI 2020

PLF 2021

CADA

AE : 280

CP : 280

AE : 296,2

CP : 296,2

AE : 309,2

CP : 309,2

AE : 317,2

CP : 317,2

AE : 332,7

CP : 332,7

HUDA

AE : 245,8

CP : 118

AE : 268,3

CP : 300,7

AE : 542,5

CP : 397

AE : 488,8

CP : 363,6

AE : 222,8

CP : 355,5

CAES

Non encore créé

Non encore créé

Inclus dans HUDA

AE : 30,9

CP : 30,9

AE : 76,5

CP : 38,3

Total :

AE : 525,8

CP : 398

AE : 596,9

CP : 596,9

AE : 851,7

CP : 706,2

AE : 836,6

CP : 711,7

AE : 632

CP : 726,5

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

Ce conventionnement pluriannuel sera étendu en 2021 aux CAES.

ii.   Des crédits soutenant la création de 4 000 nouvelles places d’hébergement

Les dépenses prévues doivent soutenir la création de 4 000 places d’hébergement supplémentaires dans le dispositif national d’accueil (DNA) géré par l’OFII.

Les places ainsi créées seront réparties entre les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) (3 000 places) dédiés à l’hébergement et à l’accompagnement dans la durée des intéressés (hors demandeurs d’asile placés sous procédure Dublin) et les centres d’accueil et d’examen des situations (CAES) (1 000 places) dédiés à la mise à l’abri sur de courtes durées et à l’évaluation des situations des personnes accueillies. La mission Plan de relance prévoit par ailleurs la création temporaire, jusqu’en 2023, de 500 places supplémentaires en CAES ([19]).

Les 4 500 places supplémentaires ainsi créées (4 000 par la mission Immigration, asile et intégration et 500 par la mission Plan de relance) porteront, fin 2021, la capacité du DNA à près de 103 000 places.

Le DNA durant la crise sanitaire

Lors de son audition, M. Didier Leschi, directeur général de l’OFII, a souligné que « le covid n’a pas cassé la chaîne d’hébergement ». De mars à août 2020, 19 204 personnes sont entrées dans le DNA et 17 567 en sont sorties. À titre de comparaison, de mars à août 2019, 41 739 personnes étaient entrées dans le DNA et 33 245 en étaient sorties. Si, durant les premiers mois de la crise sanitaire, le volume des entrées est resté inférieur à celui d’une période « normale », il est néanmoins demeuré significatif.

Durant cette période, le taux d’occupation des places au sein du DNA s’est accru et a atteint 97,6 % en août 2020, soit un taux en nette progression par rapport au taux de 93,1 % observé en septembre 2019. La hausse de ce taux s’explique par la réduction du flux, par la suspension de la notification des décisions de sortie d’hébergement pendant la période d’état d’urgence sanitaire et par une gestion du DNA plus déconcentrée (le contingent de places habituellement réservées au niveau national a été abandonné).

Ces places devraient être ainsi réparties :

Type d’hébergement

Nombre de places en 2020

Nombre de places en 2021

Centres d’accueil de demandeurs d’asile (CADA)

43 602

46 632

Centres d’accueil et d’examen des situations (CAES)

3 136

4 136

Hébergement d’urgence de demandeurs d’asile (HUDA)

51 826

51 796

Total :

98 564

102 564

CAES Plan de relance

-

500

Total :

 

103 064

Source : commission des finances d’après les données du ministère de l’intérieur.

Les rapporteurs approuvent la création de ces places supplémentaires et soulignent que l’effort financier accompli en faveur de l’hébergement de ces populations ne se limite pas aux crédits de l’action n° 2. En dehors du programme 303, deux autres supports budgétaires participent à l’hébergement des demandeurs d’asile et des bénéficiaires de la protection internationale :

– le programme 104 finance à hauteur de 81,9 millions d’euros 8 710 autres places d’hébergement en faveur des réfugiés dans des centres provisoires d’hébergement (CPH) ainsi que, pour un montant non déterminé, 200 places dans un Centre d’accueil et d’intégration des réfugiés situé en Île-de-France ;

– le programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables de la mission Cohésion des territoires finance les centres d’hébergement d’urgence de droit commun (disposant de 154 000 places au 31 décembre 2019) qui sont ouverts à tous les publics et peuvent, à ce titre, recevoir des demandeurs d’asile. À l’été 2020, près de 5 000 demandeurs d’asile étaient hébergés dans ces centres de droit commun ([20]).

L’existence de ces dispositifs et l’augmentation des capacités d’accueil doivent permettre de réduire les tensions pesant sur le DNA tout en prenant en compte certaines vulnérabilités particulières.

La réservation de places du DNA en faveur de demandeuses d’asile et de réfugiées victimes de violences ou de traite des êtres humains : une avancée à saluer

Les rapporteurs saluent la mise en œuvre progressive de places du DNA réservées aux demandeuses d’asile et réfugiées victimes de violences ou de traite des êtres humains.

Décidée dans le cadre du comité interministériel à l’intégration du 5 juin 2018, cette mesure figure également dans la feuille de route nationale de prévention et de lutte contre les violences sexuelles et sexistes et dans le second plan d’action national contre la traite des êtres humains.

Expérimenté dès 2018 dans deux régions (Ile-de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur), ce dispositif a concerné 300 places en 2020 réparties entre 4 régions (Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Auvergne-Rhône-Alpes et Nouvelle Aquitaine).

L’orientation des femmes en danger vers ces places spécialisées est gérée par l’OFII.

Le coût de ces places est supérieur de 13 euros par jour et par place au coût moyen d’une place dans le DNA.

Source : ministère de l’intérieur (DGEF).

iii.   Des tensions susceptibles de se réduire

En dépit des efforts accomplis, seule la moitié des demandeurs d’asile (51 % selon la prévision actualisée figurant dans le projet annuel de performance ([21])) est hébergée dans le DNA.

L’engorgement de ce dispositif nuit à la qualité de l’accueil, participe à la constitution de campements insalubres ([22]) et a conduit, en 2020, à de récentes condamnations de l’État ([23]). La saturation du DNA résulte du manque de places disponibles mais également des difficultés observées dans la sortie des occupants. Ainsi, alors que l’article L744-12 du CESEDA autorise un réfugié à rester pour une durée maximale de trois mois (exceptionnellement renouvelable une fois) après l’attribution d’une protection internationale, celui-ci demeure en moyenne 258 jours dans ce dispositif après avoir obtenu son statut. Au 30 juin 2020, 10 081 bénéficiaires de la protection internationale étaient ainsi présents dans le DNA dont 6 709 en situation de « présence indue » ([24]).

Le difficile accès au logement des réfugiés participe à la saturation du DNA. En dépit d’une politique volontariste, les objectifs de relogement des bénéficiaires de la protection internationale fixés par les pouvoirs publics n’ont, pour l’heure, pas été atteints. Sur les 36 000 logements devant être mis à disposition des réfugiés pour les années 2018 – 2019 (20 000 logements en 2018 et 16 000 en 2019), seuls un peu plus de 18 000 l’ont été. En 2020, un objectif de 10 000 logements à attribuer a été arrêté ([25]).

Les rapporteurs appellent au renouvellement de ces efforts et souhaitent également que ces derniers soient coordonnés avec les dispositions du prochain schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés appelé à être publié à la fin du premier trimestre 2021. Prévu par l’article L744-2 du CESEDA, ce texte fixera la part des demandeurs d’asile accueillis dans chaque région (en renforçant le principe d’orientation directive), la répartition des lieux d’hébergement qui leur sont destinés et définira les actions en faveur de l’intégration des réfugiés. La répartition régionale des demandeurs d’asile devrait être améliorée afin notamment de soulager durablement l’Ile-de-France qui concentre plus de 40 % de la demande d’asile nationale alors qu’elle ne dispose que de 21 % des places d’hébergement.

La publication de ce schéma, le développement de l’orientation directive des demandeurs d’asile, la réaffirmation des objectifs de relogement des réfugiés, la création de nouvelles places d’hébergement, l’accroissement du taux d’occupation des places dans le DNA, le ralentissement attendu du flux de nouvelles demandes d’asile, le renforcement de l’éloignement des demandeurs d’asile déboutés et la probable réduction des délais de traitement des demandes d’asile doivent réduire les tensions pesant sur le DNA et permettre, selon le projet annuel de performance, de porter la part des demandeurs d’asile hébergés de 51 % en 2020 à 65 % en 2021.

Les rapporteurs soutiennent cette perspective qu’ils jugent néanmoins optimiste.

b.   L’allocation pour demandeurs d’asile : une hypothèse de dépenses crédible

i.   Un financement de l’ADA à hauteur des besoins attendus

Le PLF prévoit un crédit de 452 millions d’euros (en AE et en CP) au titre de l’ADA et de 7,3 millions d’euros à l’OFII au titre des frais de gestion, soit 459,3 millions d’euros au total. Les crédits prévus au titre du versement de l’ADA sont en croissance de 11,5 millions d’euros (frais de gestion inclus) par rapport à la LFI pour 2020 et incluent une augmentation sensible des frais de gestion (qui passent de 4,1 à 7,3 millions d’euros, cf. infra).

Gérée par l’OFII, l’ADA vise à répondre aux besoins de subsistance des demandeurs d’asile durant l’instruction de leur dossier. Cette allocation est ouverte sous conditions d’âge et de ressources aux demandeurs d’asile ayant accepté les conditions matérielles d’accueil leur ayant été proposées. Le montant de l’ADA s’établit à 6,80 euros par jour pour une personne seule et à 17 euros par jour pour un couple avec deux enfants. En complément, un montant additionnel de 7,40 euros par jour (couramment appelé le « pécule ») est versé à l’allocataire n’ayant pas accès gratuitement à un hébergement ou un logement ([26]). En août 2020, le nombre de personnes percevant cette allocation s’élevait à 141 331 (dont 47 % percevaient le pécule) en retrait de 10 000 bénéficiaires sur un an.

Août 2019-août 2020 - Évolution du nombre de bénéficiaires de l’ADA

Source : commission des finances d’après le compte twitter de l’OFII.

À première vue, la croissance attendue de la dépense (+ 11,5 millions d’euros) peut sembler paradoxale puisque, en 2021, la demande d’asile devrait se stabiliser au niveau de 2019. La progression des crédits proposés se justifie pourtant au regard des besoins réels de financement de cette allocation constatés ces dernières années. Les montants consommés au titre de l’ADA se sont ainsi établis à 424,2 millions d’euros en 2018 et 492,5 millions d’euros en 2019 et la projection de dépenses fin 2020 est estimée aux environs de 500 millions d’euros.

Dans le contexte actuel, un financement de l’ADA à hauteur de 459,3 millions d’euros en 2021 constitue une hypothèse relativement crédible en phase avec l’évolution attendue de la demande d’asile et l’effet des politiques engagées. Selon le ministère de l’intérieur, la budgétisation d’un montant équivalent à celui exécuté en 2019 (492,5 millions) n’est pas pertinente puisque :

● la dépense mensuelle moyenne d’ADA connaît une trajectoire descendante (passant de 42,4 millions d’euros en août 2019 à 38,9 millions d’euros en août 2020) ([27]) ;

● la durée de traitement des demandes d’asile devrait être plus courte en 2021 qu’en 2019 ce qui réduira d’autant la durée de versement de l’allocation ;

● le nombre de places dans le DNA sera plus élevé en 2021 qu’en 2019 ce qui conduira l’OFII à réduire les versements du montant additionnel de l’ADA pour défaut d’hébergement (7,40 euros par jour). En septembre 2020, 47 % des bénéficiaires percevaient ce montant additionnel contre 53 % en janvier 2020. Cette tendance devrait se confirmer ;

● les mesures de gestion et de contrôle de l’ADA (qui, selon l’OFII, ont permis des économies représentant 14,8 millions d’euros sur les huit premiers mois de l’année 2020) se poursuivront en 2021 et devraient pouvoir s’appuyer sur un renforcement de la coopération entre cet établissement et les services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO intervenant dans la gestion des places d’hébergement d’urgence). Ces échanges accrus doivent limiter les versements indus du montant additionnel de l’ADA aux demandeurs d’asile accueillis dans les centres d’hébergement. Pour l’heure, les SIAO de 39 départements transmettent (de manière hétérogène) leurs données à l’OFII. Une élévation de ce nombre est attendue en 2021 ;

● le nombre de transferts Dublin réalisés devrait reprendre la progression constatée avant la pandémie (le taux de transfert était passé de 12 % en 2018 à 19 % en 2019) ce qui réduirait le montant de l’ADA versée aux demandeurs d’asile concernés. Le ministère de l’intérieur a également indiqué que « les mesures de retrait systématique de l’ADA aux personnes qui ne coopèrent pas à la mise en œuvre de leur transfert [seront] appliquées de manière résolue » ([28]). Sur ce point, les rapporteurs regrettent la volonté de s’appuyer toujours plus sur un règlement européen marqué par sa désuétude.

En dépit des incertitudes inhérentes au contexte sanitaire, les rapporteurs considèrent donc que le montant des dépenses prévu dans le PLF au titre de l’ADA est relativement crédible. Ils maintiennent cependant leur vigilance sur ce point spécifique.

 

 

ii.   De possibles ajustements en matière de gestion de l’ADA

La gestion de l’ADA pourrait, selon les rapporteurs, faire l’objet de trois ajustements dont deux supposeraient une modification législative.

Comme M. Barrot et Mme Dupont l’ont recommandé dans leur récent rapport d’information sur l’intégration professionnelle des demandeurs d’asile et des réfugiés ([29]), les demandeurs d’asile devraient pouvoir cumuler partiellement l’ADA avec un revenu d’activité. À l’heure actuelle, un demandeur d’asile autorisé à travailler est tenu de déclarer son revenu d’activité auprès de l’OFII qui diminue alors à due proportion le montant de l’ADA versé. Si un demandeur d’asile perçoit 360 euros d’ADA et gagne 100 euros en travaillant de manière régulière, son ADA sera réduite de 100 euros. Les rapporteurs suggèrent d’autoriser un cumul partiel du revenu d’activité avec l’ADA. Cependant, l’application des règles de recevabilité financière des amendements parlementaires (liées à l’application de l’article 40 de la Constitution) ne leur permet pas de proposer un amendement en ce sens.

Le deuxième ajustement, proposé par M. Jean-Noël Barrot, vise à permettre à l’OFII de recevoir (ou de solliciter) certains signalements de l’autorité judiciaire en cas de recueil par celle-ci d’éléments de nature à faire suspecter le caractère frauduleux d’une demande d’asile. À l’heure actuelle, l’article L713-6 du CESEDA prévoit que « l’autorité judiciaire communique au directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et au président de la Cour nationale du droit d’asile, sur demande ou d’office, tout élément recueilli au cours d’une instance civile ou d’une information criminelle ou correctionnelle, y compris lorsque celle-ci s’est terminée par un non-lieu, de nature à faire suspecter le caractère frauduleux d’une demande d’asile ou du statut d’apatride ». En 2019, l’OFPRA a sollicité l’autorité judiciaire à plus de 200 reprises dans ce cadre.

Dans sa rédaction actuelle, cet article ne rend cependant pas l’OFII destinataire de ces informations alors même que cet opérateur peut être indûment conduit à verser l’ADA à des demandeurs d’asile suspectés de fraude (par exemple pour avoir présenté plusieurs demandes d’asile sous différentes identités). M. Jean-Noël Barrot proposera de remédier à cette situation en déposant un amendement rendant le directeur général de l’OFII destinataire des signalements adressés par l’autorité judiciaire à l’OFPRA et à la CNDA et lui permettant de saisir l’autorité judiciaire dans le même but.

Cet aménagement permettrait à l’OFII d’engager des démarches de récupération de sommes indûment versées au titre de l’ADA.

 

Le troisième ajustement, proposé par les deux rapporteurs, concerne les fonctionnalités de la carte ADA. En novembre 2019, les modalités de versement de cette allocation ont évolué. Précédemment versée sous la forme d’une carte de retrait, l’ADA est depuis cette date versée sous la forme d’une carte de paiement à débit immédiat ne permettant pas d’effectuer de paiement sur internet, ni de transférer de l’argent vers l’étranger. Un demandeur d’asile peut effectuer, dans la limite du solde disponible, un nombre illimité de paiements par carte sur le territoire français mais ne peut pas retirer d’argent en espèces.

Un an après, le bilan de cette mesure est contrasté et un assouplissement du dispositif est souhaitable.

Lors de son audition, le directeur général de l’OFII a souligné plusieurs aspects positifs de la transformation de la carte ADA en carte de paiement. Il a ainsi indiqué que :

– le taux de consommation globale de l’ADA versée sous forme d’une carte de paiement était supérieur au taux de consommation de l’ADA versée sous forme de carte de retrait ;

– les demandeurs d’asile peuvent utiliser la totalité du solde présent sur leur carte alors que la précédente carte de retrait ne permettait pas de retirer des sommes inférieures à 10 euros ;

– la carte a montré son utilité durant la période d’état d’urgence sanitaire où les demandeurs d’asile ont pu procéder à des paiements dématérialisés alors que le retrait et l’utilisation d’argent liquide étaient parfois difficiles.

Les rapporteurs conviennent de ces éléments mais regrettent l’impossibilité offerte aux demandeurs d’asile de retirer une fraction de leur allocation sous forme d’argent liquide autrement que par le recours, peu développé, au « cashback » ([30]). Certaines dépenses (payer un cycle de lavage dans une laverie, acheter des produits dans une brocante, participer aux frais d’hébergement chez des particuliers, etc.) ne peuvent effectivement pas être réglées par carte bancaire.

Les rapporteurs plaident donc pour que la carte de paiement soit transformée en une carte mixte permettant des paiements dématérialisés et un ou plusieurs retraits dans la limite d’un plafond mensuel à déterminer. Le montant de 50 euros semble adapté afin de permettre les diverses transactions précitées. Lors de son audition, l’OFII a confirmé que cet aménagement était techniquement possible sous réserve d’une décision politique favorable et de développements informatiques d’une durée d’environ six mois. L’accroissement du montant des frais de gestion de la carte ADA semble anticiper une possible évolution en ce sens.

Les rapporteurs ont fait usage de leurs pouvoirs spéciaux pour consulter l’offre du groupe Up, titulaire du marché de la carte ADA

À l’été 2020, plusieurs articles de presse et associations ont fait savoir que des commerçants refusaient la carte ADA en raison de l’importante commission prélevée sur chaque transaction par le groupe UP, titulaire du marché de « prestations de fourniture et gestion de supports de paiement » passé par l’Agence de service et de paiement en lien avec l’OFII.

Le 23 juillet 2020, en application des pouvoirs spéciaux leur étant reconnus par l’article 57 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, les rapporteurs ont demandé à l’ASP la communication des pièces composant l’offre du groupe Up (incluant le mémoire technique), le rapport d’analyse des offres du marché et le compte rendu d’une réunion du 25 juin 2020 entre le groupe Up, l’ASP et l’OFII. Ces éléments leur ont été communiqués en août.

Selon les documents réunis, et notamment selon le compte rendu précité, il apparaît que ce « n’est qu’à compter du 11 juin 2020, suite à un signalement de l’OFII, que l’Agence [ASP] a été alertée sur des facturations adressées par Up aux commerçants se rapportant à des transactions effectuées au cours du premier trimestre 2020 ». Si la gratuité des transactions pour les commerçants ne figurait pas dans les clauses du marché, le mémoire technique remis par le groupe Up à l’appui de son offre ne mentionnait pas l’application d’une commission. Sur cette base ce prestataire a été rappelé à ses obligations par l’ASP, a annulé les factures indûment émises à l’encontre de commerçants, a remboursé les sommes indûment perçues et s’est engagé à cesser ce type de pratique. Aucune pénalité n’a été infligée au groupe Up puisque le cahier des charges du marché ne prévoyait pas ce cas de figure.

Si les rapporteurs se félicitent de la réactivité de l’OFII et de l’ASP, ils invitent l’ASP à modifier son prochain cahier des charges en vue, d’une part, d’inscrire l’obligation de gratuité de transactions dans les clauses contractuelles et, d’autre part, de prévoir des pénalités permettant de sanctionner tout comportement inadapté du titulaire du marché.

c.   L’OFPRA : une stabilisation des dépenses à un niveau élevé

Le PLF prévoit d’accorder à l’OFPRA une subvention pour charges de service public d’un montant de 92,8 millions d’euros en AE et en CP, soit un montant proche de celui ouvert en 2020 (91,6 millions d’euros). Cette subvention couvre la quasi-totalité des recettes de l’établissement.

Après plusieurs années de forte croissance, la dotation accordée à l’OFRRA se stabiliserait à un niveau élevé.

2015 – 2021, évolution de la subvention pour charges de service public de l’Ofpra

(en millions d’euros)

Source : Cour des comptes et documents budgétaires.

Le PLF prévoit également une quasi-stabilisation du plafond d’emplois de cet opérateur (1 003 ETPT contre 1 005 en 2020). La réduction de 2 ETPT rattachés à la mission tient au transfert du financement de ces deux postes au service national des enquêtes administratives de sécurité dépendant du programme 176 Police nationale de la mission Sécurités et vise à compenser le volume d’activité consacré par ce service aux demandes d’enquêtes de l’OFPRA ([31]).

Cette stabilisation des effectifs fait suite à la forte élévation du plafond d’emplois de l’OFPRA (+ 200 ETPT) autorisée par la LFI 2020. La crise sanitaire a cependant retardé l’organisation de ces recrutements. Ainsi, si les 150 personnels chargés de l’instruction des dossiers ont bien été recrutés (sous des contrats d’une durée de trois ans renouvelable), la sélection des 50 « personnels supports » n’est pas encore achevée.

Le maintien à un niveau élevé de la subvention pour charges de service public de l’OFPRA, l’effet attendu des récents recrutements et la stabilisation en 2021 de la demande d’asile à son niveau 2019 devraient avoir des effets favorables sur l’activité de l’OFPRA.

Comme indiqué précédemment, en 2021 l’OFPRA devrait enregistrer 132 800 demandes d’asile (contre 100 000 attendues en 2020), rendre 170 800 décisions en 2021 (contre 101 600 attendues en 2020) et se prononcer sur les demandes dans un délai moyen de 112 jours (contre 275 jours attendus en 2020).

L’amélioration des performances de l’OFPRA est également liée aux nouvelles modalités de traitement de certains dossiers. En 2019 et 2020, l’OFPRA a engagé une démarche de priorisation du traitement des demandes d’asile provenant des pays dont le taux d’admission se situe autour de 6 % au maximum (par exemple l’Albanie, la Géorgie ou la Moldavie) qui a permis d’accroître sensiblement le nombre de décisions rendues sur les nationalités concernées ([32]). En 2020, un « espace personnel numérique sécurisé » a été ouvert à destination des demandeurs d’asile résidant dans certaines régions.

L’ouverture d’un « espace personnel numérique sécurisé » par l’OFPRA

L’article 6 de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie prévoit que l’OFPRA communique ses décisions par tout moyen garantissant la confidentialité et la réception personnelle par le demandeur ([33]). L’application de cette disposition a été précisée par le décret n° 2018-1159 du 14 décembre 2018 puis par deux arrêtés du 8 juillet 2020 ([34]).

L’OFPRA a ouvert un « espace personnel numérique sécurisé » à l’été 2020 à destination des demandeurs d’asile résidant dans certains territoires. Dans un premier temps, et avant d’être généralisé sur le reste du territoire à une date ultérieure, cet espace ne fonctionne que pour les demandeurs d’asile résidant en Bretagne et en Nouvelle-Aquitaine. Dans les départements de la Gironde, de la Haute-Vienne, de l’Ille-et-Vilaine et de la Vienne, cet espace personnel numérique sécurisé est dédié aux demandes d’asile relevant de la compétence de la France enregistrées en GUDA depuis le 15 juillet 2020. Dans l’ensemble des départements des régions Bretagne et Nouvelle-Aquitaine, cet espace est en revanche dédié aux demandes d’asile initialement placées en procédure Dublin et dont la France a été finalement désignée responsable depuis le 15 juillet 2020. Trois types de documents feront l’objet d’une transmission numérique : la lettre d’introduction de la demande d’asile, la convocation à l’entretien personnel à l’Ofpra et la décision du directeur général de l’OFPRA statuant sur la demande d’asile.

L’utilisation de cet espace numérique est obligatoire sauf lorsque le demandeur d’asile établit qu’il n’est pas en mesure d’y accéder ou lorsque l’OFPRA estime qu’en raison de la situation personnelle du demandeur d’asile ou de sa vulnérabilité, il est préférable de ne pas recourir à ce dispositif.

L’amélioration des performances de l’OFPRA suppose cependant de réduire le taux de rotation des personnels. Ce taux, qui atteignait déjà 15 % en 2018 (soit, une proportion déjà importante) s’est élevé à 19 % en 2019 et concerne essentiellement des personnels de catégorie A (dont des officiers de protection). Ce turn-over très significatif représente un coût administratif et financier important, nécessite des recrutements complémentaires (s’ajoutant aux renforts autorisés par la LFI 2020) et est susceptible de compromettre l’amélioration durable des performances de l’établissement. En réponse, le directeur général de l’OFPRA a fait part de la « mise en œuvre de diverses mesures portant à la fois sur l’optimisation des procédures de recrutement, la pérennisation des emplois, et le développement d’actions en matière de qualité de vie au travail ».

2.   L’action n° 3 Lutte contre l’immigration irrégulière : des crédits en progression

L’action n° 3, d’un montant de 131,2 millions d’euros en AE et 127,9 millions d’euros en CP prend en charge différentes dépenses engagées en matière de lutte contre l’immigration irrégulière. Ce budget assure le financement des zones d’attente ([35]) et des centres et locaux de rétention administrative et finance les frais logistiques d’éloignement des étrangers en situation irrégulière.

Les crédits de l’action n° 3 sont en nette progression par rapport à ceux ouverts en 2020 (+ 4 % en AE [+ 18,1 millions d’euros] et + 16 % en CP [+ 5 millions d’euros]). Ces crédits bénéficieront par ailleurs d’un double abondement imputable, d’une part, au report de 8 millions d’euros de crédits ouverts en 2020 mais non encore consommés et, d’autre part, de la création de 1 500 places en dispositif de préparation au retour prévu par la mission Plan de relance.

La hausse des moyens dédiés à l’action n° 3 de lutte contre l’immigration irrégulière s’inscrit dans une tendance prononcée depuis 2017.

2009-2021 - Évolution des crédits de paiements de L’action n° 3 de Lutte
contre l’immigration irrégulière

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

L’exécution des dépenses dépendra cependant étroitement du contexte sanitaire et des possibilités matérielles de réaliser les éloignements. En dépit de ces incertitudes, le PLF accentue l’effort financier en faveur de l’action n° 3 de lutte contre l’immigration irrégulière.

a.   La rétention administrative : la poursuite de l’accroissement des capacités

Au 30 juin 2020, le parc des centres de rétention administrative est constitué de 25 centres (21 en métropole et 4 outre-mer) représentant une capacité immobilière de 1 891 places (1 664 places en métropole et 227 outre-mer). En 2019, les CRA ont reçu 50 486 personnes pour une durée moyenne de rétention de 17,5 jours en métropole et 2,4 jours outre-mer. Durant le premier semestre 2020, sur les 46 378 étrangers interpellés en situation irrégulière ([36]), 12 911 ont été placés en CRA.

En complément des CRA, 20 locaux de rétention administrative (LRA) sont en service et disposent d’une capacité de 125 places (94 en métropole et 31 en outre-mer). En 2019, 2 426 personnes ont été retenues en ces lieux.

Ce parc est également complété par la zone d’attente des personnes en instance (ZAPI) de Roissy.

Le PLF prévoit des crédits de 40,5 millions d’euros en AE et 38,2 millions d’euros en CP pour le fonctionnement (hors dépenses de personnel) de ces différents sites (dépenses de restauration, de blanchisserie, de maintenance, d’entretien, d’interprétariat, etc.) et des dépenses complémentaires en matière sanitaire (16,6 millions d’euros) et d’accompagnement social (8,4 millions d’euros). Ces dépenses se situent dans le prolongement de celles inscrites dans la LFI 2020 ([37]).

Le PLF prévoit également des crédits d’investissement de 22,4 millions d’euros en AE et 21,4 millions d’euros en CP, soit un montant en légère croissance en AE (+ 1,7 million d’euros) et en forte hausse en CP (+ 15,2 millions d’euros). En 2021, le montant des CP d’investissement sera plus de six fois supérieur à ce qu’il était en 2017 (3,3 millions d’euros) et permettra la poursuite de la politique d’accroissement du nombre de places en CRA.

Engagé en 2019, le plan de rénovation des bâtiments et de construction de nouveaux locaux avait pour objectif d’aménager 480 nouvelles places d’ici l’été 2020 en vue d’accroître de 35 % la capacité existante par rapport à 2017. Au 31 décembre 2020, 450 places supplémentaires devraient être ouvertes.

Le retard observé (30 places) est imputable, selon le ministère de l’intérieur, aux effets de la crise sanitaire et devrait être rattrapé en mars 2021 avec la livraison de l’extension du CRA de Lille. Les effectifs des forces de sécurité intervenant en ces lieux ont été accrus : entre janvier 2018 et septembre 2020, 622 agents supplémentaires ont été affectés en CRA.

L’exécution de ce premier plan sera prolongée par un second programme de création de 370 nouvelles autres places d’ici 2023. Plus de 2 000 places en CRA seront alors disponibles. Lors de son audition, la DGEF a également fait part de son intention de relever le nombre de places disponibles dans les LRA (notamment pour accueillir des familles) sans pour autant déterminer d’objectif précis d’ouverture de places.

En 2020, l’activité des CRA a été perturbée par le contexte sanitaire. Les tensions au sein des CRA se sont accrues, des cas de Covid-19 ont dû être gérés (du 17 mars au 14 septembre 2020, 22 retenus ont été testés positifs), onze CRA métropolitains ont suspendu temporairement leur activité et les nombres de placements et d’éloignements ont été fortement réduits. Ainsi, si plus de 2 000 éloignements ont été réalisés depuis les CRA entre le 1er janvier et le 17 mars 2020, seuls 539 l’ont été entre le 17 mars et le 31 juillet 2020. Parmi l’ensemble des éloignements effectués durant le premier semestre 2020, 138 ont été réalisés entre le 61e jour et le 90e jour de rétention. En métropole, les CRA restent cependant au cœur du processus d’éloignement puisque, depuis le début de l’année 2020, près de 7 éloignements forcés réalisés sur 10 sont précédés du placement en rétention de la personne concernée.

Nombre d’admissions en CRA (métropolitains) et nombre d’éloignements depuis les CRA (métropolitains) avant le confinement, jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire et après l’état d’urgence sanitaire

Source : commission des finances, d’après les données du ministère de l’intérieur.

Le nombre d’aides au retour accordées en CRA est resté limité.

L’aide au retour dans les CRA : une faculté à développer

En application de l’article 25 de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, une aide au retour (d’un montant compris entre 300 et 650 euros) peut être proposée aux étrangers placés en centres de rétention administrative.

Proposé depuis l’été 2019, ce dispositif connaît des résultats limités. Selon le ministère de l’intérieur, de juillet 2019 à l’été 2020, 185 personnes retenues ont été éloignées par ce biais (94 de juillet à décembre 2019 et 91 de janvier à l’été 2020) dont 181 étaient des ressortissants de pays soumis à visa. Ce chiffre est très inférieur aux objectifs initiaux (3 000 retours aidés par an) en raison notamment, mais pas seulement, des difficultés d’éloignement observées durant la crise sanitaire.

Les rapporteurs considèrent que ce dispositif devrait être relancé dès que le contexte sanitaire le permettra. Pour cela, ils invitent les autorités à assouplir ses conditions de fonctionnement en autorisant une personne retenue en CRA à bénéficier d’une aide au retour et également d’une aide à la réinsertion dans son pays d’origine.

Cette aide à la réinsertion prend la forme d’un concours financier versé à un prestataire de l’OFII dans le pays accueillant la personne éloignée. Pour l’heure, seule l’aide au retour peut être versée en CRA alors que les articles L512-5 et R 512-1-2 du CESEDA n’interdisent pas le versement d’une aide à la réinsertion. La crainte de la DGEF d’un « effet d’aubaine » semble excessive et une expérimentation mériterait d’être engagée.

Pour mémoire, il est rappelé que le coût d’un éloignement aidé a été estimé, en 2019, entre 2 500 euros et 4 000 euros contre près de 14 000 euros (13 794 euros) pour un éloignement forcé ([38]).

b.   Les autres dépenses soutenant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière : des crédits en hausse

L’action n° 3 comporte deux autres dépenses soutenant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière : les frais d’éloignement et les dispositifs de préparation au retour.

Les crédits inscrits au titre des frais d’éloignement des étrangers en situation irrégulière s’établissent à 34,6 millions d’euros en AE et en CP et financent les frais logistiques d’éloignement par voie aérienne et maritime (frais de billetterie, frais de fonctionnement des aéronefs placés sous l’autorité du ministère de l’intérieur, frais de déplacement des services). Ce montant est en croissance de 1,8 million d’euros par rapport à la LFI 2020.

 

Les dispositifs de préparation au retour sont financés à hauteur de 8,6 millions d’euros, soit un montant en hausse de 0,7 million d’euros par rapport à 2020. Le projet annuel de performances précise que « près de 1 100 places ont été ouvertes depuis l’expérimentation de ce dispositif en 2015, dispositif qui a montré son efficacité : en 2019, 93 % des personnes hébergées dans un centre de province ont été éloignées, dont 92 % au titre du retour volontaire » ([39]). Selon le ministère de l’intérieur, ces dispositifs sont sollicités pour encadrer les retours aidés et les éloignements concernant notamment des familles. En 2019, la durée moyenne d’hébergement était de 46 jours. De janvier à avril 2020, sous l’effet notamment de la crise sanitaire, cette durée s’est élevée à 63 jours.

Le plan de relance prévoit par ailleurs le financement de 1 500 autres places de ce type sur la période 2021-2022.

c.   La crise sanitaire a réduit, sans l’interrompre, le nombre d’éloignement d’étrangers en situation irrégulière

En 2020, le contexte sanitaire a pesé sur l’exécution des éloignements forcés et aidés.

Le nombre total d’éloignements forcés réalisés de janvier à juillet 2020 (incluant les éloignements effectués depuis les CRA, cf. supra) s’établit à 6 831 en métropole dont 1 333 transferts Dublin réalisés par la France vers des États européens ([40]). Durant l’état d’urgence sanitaire, le nombre d’éloignements réalisés a fortement ralenti sans jamais s’interrompre et, durant cette période, l’accent a été mis sur l’éloignement de certains publics (notamment les sortants de prison) en tenant compte des possibilités matérielles de déplacement. De la mi-mars au 10 juillet 2020, un ou plusieurs éloignements ont ainsi été réalisés à destination de 69 pays différents.

La mise en œuvre des éloignements aidés a également pâti du contexte sanitaire. De janvier au 31 août 2020, 2 690 retours aidés ont été exécutés (dont 699 en faveur de ressortissants de pays soumis à visa) contre 5 119 sur la même période de 2019. L’objectif de 6 800 départs aidés fixé pour 2020 ne sera pas atteint.

Depuis la fin du confinement les éloignements reprennent progressivement dans les conditions définies par une instruction du 31 juillet 2020 ([41]).

En juillet 2020, 698 éloignements forcés ont été effectués.

 

En matière de retours aidés, l’instruction précitée note que l’OFII « estime à plus de 1 000 le nombre de personnes déboutées de l’asile originaire de pays d’origine sûrs qui ont candidaté à une aide au retour qui n’a pas pu encore être exécutée ». « Pour pallier l’absence de vols commerciaux à destination des principaux pays de destination, l’OFII envisage l’affrètement d’avions ».

L’OFII a également renforcé sa coopération avec l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes. Le 2 septembre 2020, pour la première fois, un vol franco-allemand à destination de l’Irak a été diligenté et financé par Frontex afin de permettre le retour aidé de 51 Irakiens dont 15 demandeurs d’asile déboutés en France. Le recours à un vol Frontex pour l’organisation de départs aidés satisfait une des recommandations du rapport présenté en 2019 par MM. Jean-Noël Barrot et Alexandre Holroyd. Un objectif révisé de 5 200 retours aidés est déterminé pour 2020 par le projet annuel de performances et ce document mentionne une cible de 7 000 départs aidés en 2021.

3.   Les actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien : des crédits limités

Les crédits inscrits au PLF au titre des actions n° 1 Circulation des étrangers et politique des visas et n° 4 Soutien du programme 303 sont limités.

L’action n° 1 (0,52 million d’euros en AE et en CP) finance certaines dépenses de fonctionnement des postes diplomatiques et consulaires (notamment l’utilisation des réseaux de communication de données) en matière de visas. Ce montant est inchangé par rapport à 2020. Compte tenu des faibles sommes en jeu, les rapporteurs souhaitent la suppression de cette action et la réaffectation de ces dépenses sur une autre ligne du programme (cf. supra).

L’action n° 4 (5,7 millions d’euros en AE et en CP) finance une partie des dépenses de fonctionnement, d’investissement et d’intervention de la DGEF. Ce montant est inchangé par rapport à 2020


B.   PROGRAMME 104 : DES CRÉDITS PROLONGEANT LA POLITIQUE ENGAGÉE EN 2018

Les crédits du programme 104 s’établissent à 433,3 millions d’euros en AE et en CP, soit un niveau en progression de 0,4 % par rapport à celui observé en LFI 2020 (431 millions d’euros). Après deux années de forte progression (408,6 millions d’euros ouverts en 2019 et 431 millions d’euros ouverts en 2020), ces montants se stabilisent à un niveau élevé et confirment le renforcement de la politique d’intégration engagé en 2017.

L’évolution financière du programme 104 attendue en 2021 n’est cependant pas linéaire et diffère selon les actions, comme l’atteste le tableau suivant.

Ventilation des crÉdits du programme 303 par actions

(en millions d’euros)

 

LFI 2020

PLF 2021

Évolution en valeur absolue

Évolution 2020-2021

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

104 Intégration et accès à la nationalité française

431,4

431,4

433,3

433,3

+ 1,9

+ 1,9

+ 0,4 %

+ 0,4 %

11 Accueil des étrangers primo-arrivants

255,4

255,4

251,4

251,4

– 4

– 4

– 1,6 %

– 1,6 %

12 Actions d’intégration des primo-arrivants

53,2

53,2

58

58

+ 4,8

+ 4,8

+ 9 %

+ 9 %

14 Accès à la nationalité française

0,9

1

0,9

1

-

-

-

-

15 Accompagnement des réfugiés

113,6

113,7

114,8

114,8

+ 1,1

+ 1,1

+ 1 %

+ 1 %

16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

8,1

8,1

8,1

8,1

-

-

-

-

Source : projet annuel de performances.

Depuis 2017, les CP de ce programme évoluent ainsi.

2017-2021, évolution des crédits de paiement du programme 104 par actions

(en millions d’euros)

 

Action 11 Accueil des étrangers primo-arrivants

Action 12 Actions d’intégration des primo-arrivants

Action 14 Accès à la nationalité française

Action 15 Accompagnement des réfugiés

Action 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

Total des crédits examinés

2017 (exécutés)

124,3

24,2

1

25,6

4,8

179,9

2018 (exécutés)

190,7

45,7

1

57,8

7,9

303,1

2019 (exécutés)

206,3

43,4

1

94,1

8,1

352,9

LFI 2020

255,4

53,2

1

113,7

8,1

431,4

PLF 2021

251,4

58

1

114,8

8,1

433,3

Variation 2017-2021

+ 102,3 %

+ 139,7 %

-

+ 348,4 %

+ 68,8 %

+ 140,9 %

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

Les actions du PLF 2021 seront présentées par ordre de grandeur financière.

1.   Le financement de l’OFII (action n° 11 Accueil des étrangers primo- arrivants)

L’action n° 11 participe au financement de l’ensemble des dépenses de fonctionnement courant et de personnel de l’OFII et prévoit d’accorder à cet établissement un financement de 251,4 millions d’euros en AE et en CP composé d’une subvention pour charges de service public (240,4 millions d’euros) et de transferts d’autres fonds du programme 104. Ce montant est en retrait de 7,4 millions d’euros par rapport à 2020 (258,9 millions d’euros) afin, selon le projet annuel de performances, de « tenir compte des marges d’efficience et du niveau de trésorerie élevé de l’opérateur ».

L’OFII dispose par ailleurs d’autres ressources mentionnées par le projet annuel de performances et provenant du programme 303 (459,4 millions d’euros au titre de l’ADA dont 7,3 millions d’euros de frais de gestion ([42])) ou de fonds de concours (8,57 millions d’euros attendus). Par ailleurs, cet opérateur dispose de certaines recettes (4 millions d’euros en 2020) dont la redevance acquittée par les bénéficiaires du regroupement familial.

Si le financement accordé à l’OFII au titre du programme 104 en 2021 est en retrait par rapport à 2020, le PLF maintient en revanche le plafond d’emplois de cet opérateur à son niveau 2020 (1 168 ETPT).

Les rapporteurs rappellent que les missions de l’OFII sont plurielles au point que la Cour des comptes a qualifié cet établissement de « « couteau suisse » du ministère de l’intérieur dans l’appui aux politiques d’immigration et d’asile » ([43]). Les compétences de cet opérateur, déterminées par l’article L. 5223-1 du code du travail, incluent ainsi la gestion du regroupement familial, de la procédure d’admission au séjour pour soins, des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile, de l’allocation pour demandeurs d’asile, du contrat d’intégration républicaine et de certains aspects de la lutte contre l’immigration irrégulière.

L’OFII continue également d’assurer la constatation, la liquidation et le recouvrement pour le compte de l’État de la taxe due par les employeurs de main-d’œuvre étrangère permanente, temporaire ou saisonnière alors que, depuis 2018, il ne perçoit plus le produit de cette taxe. Sur ce dernier point, les rapporteurs déposeront un amendement proposant de confier cette tâche à la Direction générale des finances publiques.

Placé au centre des politiques d’immigration et d’intégration, l’OFII constitue la cheville ouvrière du contrat d’intégration républicaine et de l’intégration professionnelle des demandeurs d’asile et des réfugiés. À ce titre, les rapporteurs renouvellent leur souhait, exprimé dans leur récent rapport d’information, que les caractéristiques des formations linguistiques prescrites par l’OFII dans le cadre du contrat d’intégration républicaine soient adaptées et que les missions de l’OFII soient officiellement étendues aux actions de repérage des réfugiés candidats aux actions d’intégration professionnelle afin d’avaliser la situation actuelle et de doter l’OFII des moyens correspondants ([44]).

 

Les conséquences financières de la réforme mal maîtrisée de la « taxe employeur »

Dans leur rapport sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019, les rapporteurs ont souligné l’absence de maîtrise de la réforme de la taxe employeur opérée entre 2017 et 2018 et la méconnaissance de la perte de recettes qui s’en est suivie ([45]).

À la suite d’un imbroglio législatif, la taxe employeur n’a pas été collectée de janvier 2017 à juin 2018 et la Cour des comptes, dans un rapport (non rendu public) sur la gestion de l’OFII (exercices 2011-2018) ([46]) a indiqué que, si l’OFII avait mis en place une équipe dédiée au recouvrement rétroactif de cette taxe, ce sont « 40 159 titres qui ont été mis en attente pour un montant de 37,54 millions d’euros, dont 17 241 ont pu faire l’objet d’une saisie manuelle et d’une prise en charge comptable au 1er juin 2019 pour un montant recouvré estimé à 19,41 millions d’euros ». Cependant, la Cour a considéré qu’il était « improbable que le produit non recouvré en 2017 le soit totalement en 2018, ne serait-ce qu’à cause des défaillances d’entreprises intervenues dans l’intervalle ».

La Cour des comptes a recommandé que le rapport annuel de performance du programme 104 comporte un bilan complet de la budgétisation des taxes prévues par le CESEDA. Ce bilan ne figurait toutefois pas dans le document publié en mai 2020. En réponse au questionnaire des rapporteurs, le ministère de l’intérieur a précisé que l’OFII a recouvré un total de 20,4 millions d’euros sur les 37,1 millions d’euros précités soit un taux de 55 % de titres recouvrés, correspondant à 24 323 titres sur les 40 059 titres émis en 2018 et 2019.

Si les rapporteurs saluent l’important travail de recouvrement accompli par l’OFII, ils constatent que la perte de recettes imputable à cette réforme mal préparée s’élève à 17,14 millions d’euros.

Les rapporteurs notent que le bon exercice de certaines des compétences de l’OFII dépend d’autres acteurs. Ainsi, si l’OFII gère une plateforme téléphonique multilingue de pré-accueil en Île-de-France, l’efficacité de cet outil dépend du nombre de rendez-vous ouverts dans les structures de premier accueil des demandeurs d’asile (SPADA) et les guichets uniques pour demandeurs d’asile (GUDA). Si lors de son audition, M. Baptiste MANDARD, adjoint à la directrice de l’asile, a considéré que le nombre de rendez-vous SPADA proposés à la plate-forme téléphonique de l’OFII « permet de satisfaire l’ensemble des demandes de rendez-vous en premier accueil », les rapporteurs sont nettement plus circonspects au regard des remontées de terrain dont ils ont eu connaissance et des observations formulées par différentes associations.

Les échanges entre l’OFII et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) en vue de la gratuité de la plateforme téléphonique multilingue de pré-accueil

Après avoir été un temps gratuit (au moyen d’un numéro vert), l’accès à la plateforme de l’OFII est payant depuis août 2018.

L’ordonnance n° 1924867/9 du 25 novembre 2019 du tribunal administratif de Paris a cependant enjoint à l’OFII de « reprendre la négociation avec l’ARCEP […] afin de mettre en place une gratuité effective des appels vers sa plateforme téléphonique ». Sur cette base, l’OFII a indiqué avoir sollicité une réunion de travail auprès de l’ARCEP dès le 26 novembre 2019. En retour, l’ARCEP a invité l’OFII à adresser une demande d’attribution de numéro d’urgence gratuit à la commission interministérielle de la coordination des réseaux et des services de communication électronique pour la défense et la sécurité publique compétente pour apprécier l’éligibilité d’un service à l’obtention d’un numéro d’urgence sur le fondement des articles L.44 et D.98-8 du code des postes et télécommunications électroniques.

La demande présentée par l’OFII a été rejetée le 18 juin 2020. La CICRESCE a indiqué ne pas être favorable à la création d’un 14e numéro d’urgence en France en raison de la position de la Commission européenne demandant régulièrement à la France de réduire le nombre de numéros d’urgence gratuits.

La gratuité de l’accès à la plate-forme supposerait donc que l’OFII prenne à sa charge la dépense nécessitée par la création d’un numéro vert. Entre mai et juillet 2018, ce coût s’était élevé à 100 413 euros et l’OFII évalue désormais cette charge aux environs de 1,6 million d’euros par an.

Source : OFII

Enfin, les rapporteurs rappellent que, comme l’OFPRA, l’OFII est confronté à une problématique d’instabilité de ses effectifs. Du 1er janvier au 31 décembre 2019, 86 agents ont ainsi mis fin de manière anticipée à leur contrat de travail, par voie de démission ou de rupture de leur période d’essai. Pour la période du 1er janvier au 30 septembre 2020, ce chiffre s’élève à 47 départs anticipés. Ce turn-over se concentre dans la filière « asile » majoritairement composée de personnels en contrat à durée déterminée d’une durée d’un an. Même si ce phénomène s’est ralenti depuis le début de la crise sanitaire, il demeure préoccupant en raison de son coût et de son effet sur les performances de l’établissement.

Soulignée par les rapporteurs dans leurs précédents rapports, cette difficulté s’expliquait en premier lieu par l’impossibilité de recruter des personnels non titulaires en contrat de travail à durée indéterminée ou à durée déterminée de longue durée (3 ans). La loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique autorise cependant de nouveau l’OFII (comme d’autres établissements publics) à procéder à des recrutements d’agents non titulaires en contrat à durée indéterminée ou en CDD de longue durée. L’OFII a indiqué que « l’établissement travaille, en lien avec la DRH du ministère de l’intérieur, à la mise en place de recrutements par voie de CDI ». Une évolution favorable est attendue par les rapporteurs sur ce point.

2.   Les autres crédits du programme 104

a.   L’action n° 15 Accompagnement des réfugiés : le financement des centres provisoires d’hébergement et d’un ensemble composite d’actions en faveur de l’accompagnement des réfugiés

Le PLF prévoit un crédit de 114,7 millions d’euros en AE et en CP en faveur de l’action n° 15 Accompagnement des réfugiés, soit un montant en croissance d’un peu plus d’un million d’euros par rapport à celui ouvert en 2020.

Ces crédits soutiennent deux types de mesures : d’une part, des actions en faveur de l’hébergement de réfugiés vulnérables et, d’autre part, des initiatives diverses visant à favoriser l’intégration sociale et professionnelle des réfugiés. Ces mesures s’adressent à des personnes s’étant vues reconnaître la qualité de réfugié, d’apatride ou de bénéficiaire de la protection subsidiaire et non à des demandeurs d’asile.

Une première dotation, d’un montant de 81,9 millions d’euros finance 138 centres provisoires d’hébergement (CPH) proposant 8 710 places. Ces structures, relevant du statut des centres d’hébergement et de réinsertion sociale spécialisée, sont destinées à accueillir pendant une durée maximale de neuf mois des réfugiés présentant des vulnérabilités particulières.

L’action n° 15 finance également à hauteur de 32,8 millions d’euros un ensemble composite d’actions engagées en faveur de l’accompagnement des réfugiés. Ces initiatives concernent notamment :

● la poursuite des programmes « HOPE » (hébergement, orientation, et parcours vers l’emploi) et Accelair dont les résultats sont favorables ([47]) ;

● la poursuite de l’appui aux territoires dans la mise en œuvre de programmes d’intégration des réfugiés dans le cadre d’un appel à projets national ;

● la poursuite des partenariats avec les collectivités locales pour l’intégration des réfugiés ;

● le déploiement du service civique « réfugiés » Volont’R pour permettre l’engagement de jeunes réfugiés en service civique avec un accompagnement renforcé.

b.   Les autres actions financées : les actions n° 12 Actions d’intégration des primo-arrivants, 14 Accès à la nationalité française et  16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants

Le PLF prévoit un crédit de 58 millions d’euros en AE et en CP en faveur de l’action n° 12 Actions d’intégration des primo-arrivants, soit un montant en progression de 4,9 millions d’euros par rapport à celui ouvert en 2020. Ces crédits soutiendront essentiellement :

– les politiques d’accompagnement vers l’emploi notamment par le financement de procédures de reconnaissance des acquis professionnels ;

– l’approfondissement du premier apprentissage linguistique en vue d’atteindre le niveau A2/B1 ([48]) ou B1 ([49]) du cadre européen commun de référence pour les langues.

Ces actions sont gérées au niveau déconcentré par les services de l’État en partenariat avec des collectivités territoriales. Un crédit de 5,9 millions d’euros est dédié aux projets de ce type. Sur ce sujet, les rapporteurs notent cependant que les crédits précédemment ouverts n’ont pas toujours été consommés en totalité. Ainsi, en 2019, seuls 3,3 des 5,5 millions d’euros inscrits ont été exécutés.

L’action n° 16 Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants finance, à hauteur de 8,1 millions d’euros en AE et en CP, la participation du ministère de l’intérieur à la poursuite de l’exécution d’un plan de transformation des foyers de travailleurs migrants en résidences sociales. Ce montant est stable par rapport à celui ouvert en 2020. Engagé en 1997, ce plan vise à améliorer les conditions d’hébergement des 90 000 occupants de ces centres.

L’action n° 14 Accès à la nationalité française regroupe des crédits modestes et stables (1 million d’euros en AE et en CP) supportant les moyens de fonctionnement de la sous-direction de l’accès à la nationalité française de la DGEF. En 2019, 74 933 personnes ont acquis la nationalité française à leur demande (49 671) ou par mariage avec une Française ou un Français (25 262). Depuis le 1er avril 2020, et en application du décret n ° 2019-1507 du 30 décembre 2019, le niveau de langue exigé pour les personnes souhaitant acquérir la nationalité française par naturalisation, réintégration ou par déclaration de nationalité à raison de leur mariage avec un conjoint français a été relevé.

3.   Le programme 104 : l’enjeu de l’exécution budgétaire

Au cours des derniers exercices budgétaires, les crédits exécutés du programme 104 ont été très inférieurs au montant des crédits ouverts en LFI en raison des prélèvements effectués sur ce programme pour financer une partie des besoins de financement récurrents du programme 303. De 2017 à 2019, plus de 140 millions d’euros de crédits ont été ouverts sans être consommés sur le programme 104.

2017-2019, comparaison du solde des CP ouverts en LFI
et des CP exécutés du programme 104

Source : commission des finances.

Pour le programme 104, l’enjeu principal se situe donc autant au niveau de l’ouverture des crédits que de leur exécution.

Les rapporteurs considèrent que ce programme ne doit plus servir de variable d’ajustement budgétaire aux besoins de financement du programme 303. Dans ce cadre, la sincérité renforcée de la programmation budgétaire des crédits du programme 303 dans le PLF (cf. supra) laisse espérer une consommation des crédits du programme 104 en 2021 plus fidèle aux crédits ouverts que celle constatée de 2017 à 2019.


III.   LES CRÉDITS DU PLAN DE RELANCE QUI AURAIENT PU ÊTRE RATTACHÉS AU PROGRAMME 303 : UN EFFORT TEMPORAIRE COMPLÉMENTAIRE D’HÉBERGEMENT ET D’AIDE AU RETOUR DES ÉTRANGERS EN SITUATION IRRÉGULIÈRE

Sur la période 2020 – 2021, le plan de relance prévoit le financement de 2 000 places supplémentaires d’hébergement réparties entre 500 places en CAES et 1 500 places en dispositif de préparation au retour. Le PLF prévoit à cet effet, dans les crédits de la mission Plan de relance 37 millions d’euros en AE et 18,5 millions d’euros en CP.

1.   La création de 500 places d’hébergement en CAES

Les centres d’accueil et d’examen des situations sont des structures dédiées à la mise à l’abri des personnes migrantes sur de courtes durées et à l’évaluation de leur situation. En 2020, les CAES comportaient 3 100 places et ont été régulièrement sollicitées à la suite d’évacuations de campements. Les crédits de l’action n° 2 du programme 303 prévoient d’accroître ce volume de 1 000 places supplémentaires.

Le financement de ces 500 places complémentaires par la mission Plan de relance portera la capacité de ces centres à 4 600 places.

La dépense prévue en 2021 s’établit à 4,5 millions d’euros.

2.   La création de 1 500 places dans les dispositifs de préparation au retour

Les dispositifs de préparation au retour visent à favoriser le retour aidé des étrangers en situation irrégulière dans leur pays d’origine. Expérimenté en 2016, ce dispositif croît progressivement et comprend aujourd’hui 1 100 places destinées, notamment, aux demandeurs d’asile déboutés.

Le financement de ces 1 500 places complémentaires par le plan de relance portera la capacité de ces centres à 2 600 places.

La dépense prévue en 2021 s’établit à 14 millions d’euros.

Les rapporteurs approuvent ces mesures mais s’étonnent que celles-ci figurent dans le plan de relance (qui plus est dans son volet « compétitivité ») et non dans les crédits de la mission Immigration, asile et intégration. Interrogé sur ce sujet, le ministère de l’intérieur a indiqué que ces crédits sont en lien avec la crise sanitaire puisqu’ils visent à favoriser un hébergement rendu plus compliqué par la pandémie. Par ailleurs, les moyens de la mission ont été cristallisés par les lettres plafond établies fin juillet 2020 et la création de places supplémentaires d’hébergement au-delà de cette date ne pouvait figurer que dans le plan de relance.

Les rapporteurs ne souscrivent pas à cette analyse dans la mesure où l’intégration de ces places dans les crédits de la mission Immigration, asile et intégration aurait pu faire l’objet d’un amendement du Gouvernement durant les débats parlementaires. L’intérêt attaché à la création de ces places pour une durée de deux ans l’emporte néanmoins sur ces questions de technique budgétaire.


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 21 octobre 2021, la commission des finances a examiné et, conformément à la recommandation de rapporteurs, a adopté les crédits de la mission Immigration, asile et intégration.

Un amendement (n° CF 213), portant article additionnel, a été adopté. Cet amendement modifie l’article L713-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dans le but de permettre à l’Office français de l’immigration et de l’intégration de recevoir (ou de solliciter) des informations de l’autorité judiciaire recueillies au cours d’une instance civile ou d’une information criminelle ou correctionnelle de nature à faire suspecter le caractère frauduleux d’une demande d’asile.

Le compte rendu de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

 

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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX, DÉPLACEMENTS ET CONTRIBUTIONS ÉCRITES

 

Ministère de l’intérieur, direction générale des étrangers en France (DGEF) : MM. Ludovic PACAUD, sous-directeur pilotage et systèmes d’information et Baptiste MANDARD, adjoint à la directrice de l’asile.

Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) : M. Didier LESCHI, directeur général.

Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) : M. Julien BOUCHER, directeur général.

Table ronde sur l’hébergement des demandeurs d’asile et des réfugiés :

– Forum réfugiés Cosi : MM. Jean-François PLOQUIN, directeur général et M. Laurent DELBOS, chef de mission Plaidoyer ;

– Coallia : MM. Jean-François CARENCO, président, et Arnaud RICHARD, directeur.

 

Déplacements

22 juillet 2020, déplacement de Mme Stella DUPONT sur des sites de campement insalubres à Aubervilliers en présence de M. Bastien LACHAUD, député, et en compagnie de M. Louis BARDA, coordonnateur général de médecins du monde (Paris)

22 juillet 2020, déplacement dans un centre d’hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile, en présence de Mme Céline CALVEZ, députée. Déplacement effectué en présence d’Alteralia (gestionnaire du site), de la préfecture des Hauts-de-Seine et de la direction générale des étrangers en France :

– Alteralia représentée par MM. Olivier DUBAUT, Président, Christophe AUGER, directeur général, Sylvain VAN WASSENHOVE, Xavier CORTÈS, responsable de site ;

– préfecture des Hauts-de-Seine représentée par M. Mathieu DUHAMEL, directeur de cabinet du préfet ;

– direction générale des étrangers en France représentée par Mme Natacha HILAIRE, cheffe de département de l’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés au sein de la direction de l’asile.

 


([1]) Le camp des Milles est un ancien camp d’internement et de déportation français situé à Aix-en-Provence dans lequel furent internées plus de 10 000 personnes entre 1939 et 1942 et à partir duquel plus de 2 000 hommes, femmes et enfants juifs furent conduits en déportation vers le camp d’extermination d’Auschwitz, via Drancy et Rivesaltes. Le camp des Milles est un site mémorial depuis 2012. Source : http://www.campdesmilles.org.

([2]) Ministère de l’intérieur, les étrangers en France, seizième rapport établi en application de l’article L.111-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, page. 9.

([3]) Les 132 826 demandes d’asile introduites auprès de l’OFPRA représentent une partie des 177 822 demandes d’asile déposées en France en 2019. L’écart entre ces deux chiffres résulte, pour l’essentiel, de l’absence d’enregistrement immédiat à l’OFPRA des demandes d’asile déposées dans les guichets uniques de demandes d’asile (GUDA) par des demandeurs placés sous procédure Dublin. Sur ce point, voir L’essentiel de l’immigration, chiffres clefs, Les demandes d’asile, n° 2020-52, ministère de l’intérieur, 12 juin 2020, page 3.

([4]) Il s’agit en plus de la mission Immigration, asile et intégration (2 programmes, n°s104 et 303), des missions Action extérieure de l’État (programme n° 151), Administration générale et territoriale de l’État (programmes ns 216 et 354), Enseignement scolaire (3 programmes, nos 140, 141 et 230), Recherche et enseignement supérieur (programme n° 150), Conseil et contrôle de l’État (programme n° 165), Justice (programme n° 101), Sécurités (2 programmes, nos 152 et 176), Santé (programme n° 183), Solidarité, insertion et égalité des chances (programme n° 124), Cohésion des territoires (programme nos 147 et 177) et Travail et emploi (2 programmes, nos 111 et 155).

([5]) Assemblée nationale, commission des finances, rapport n° 2301, annexe n° 28 sur le projet de loi de finances pour 2020, MM. Jean-Noël Barrot et Alexandre Holroyd, octobre 2019, page 14.

([6]) Il est rappelé qu’une demande d’asile est examinée par l’OFPRA qui l’accepte ou la rejette. En cas de rejet, le demandeur concerné peut saisir la CNDA dont le financement relève de la mission Conseil et contrôle de l’État.

([7]) Le délai de 112 jours constituerait un délai moyen sur l’ensemble de l’année 2021. Ce délai est censé s’améliorer au fil des mois afin d’atteindre un délai de traitement de deux mois fin 2021.

([8]) Premières demandes d’asile, mineurs accompagnants inclus, réexamens, réouverture dossiers clos.

([9]) Le projet annuel de performances de la mission Conseil et contrôle de l’État mentionne, en 2019, un objectif de délai de jugement initial de 5 mois pour les procédures ordinaires et de 5 semaines pour les procédures accélérées. Selon le rapport d’activité 2019 de la CNDA, les délais observés ont été de 9 mois et 20 jours pour les procédures ordinaires et de 3 mois et 29 jours (soit environ 17 semaines) pour les procédures accélérées.

([10]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire rapport sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019, n° 3011, annexe 28, M. Jean-Noël Barrot et Mme Stella Dupont, pp. 10-11.

([11]) Lors de son audition, M. Julien Boucher, directeur général de l’OFPRA, a évoqué un nombre de décisions compris entre 160 et 170 000.

([12]) À la date du 30 septembre 2020, cette juridiction a rendu 24 240 décisions.

([13]) Règlement CE n° 862/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 relatif aux statistiques communautaires sur la migration et la protection internationale, et abrogeant le règlement (CEE) n° 311/76 du Conseil relatif à l’établissement de statistiques concernant les travailleurs étrangers.

([14]) En Allemagne, l’Office fédéral des migrations et des réfugiés (Bundesamt für migration und flüchtlinge) publie chaque mois des données synthétiques tandis qu’en Belgique le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides communique chaque mois des données très détaillées.

([15]) Entretien de M. Gérard Darmanin, ministre de l’intérieur, et de Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté au Parisien, 6 septembre 2020.

([16]) Actions du programme 104 : accueil des étrangers primo-arrivants (action n° 11), actions d’intégration des primo-arrivants (action n° 12), accès à la nationalité française (action n° 14), accompagnement des réfugiés (action n° 15) et accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants (action n° 16). Actions du programme 303 : circulation des étrangers et politique des visas (action n° 1), garantie de l’exercice du droit d’asile (action n° 2), lutte contre l’immigration irrégulière (action n° 3) et soutien (action n° 4).

([17]) Indicateurs du programme 104 : efficience de la formation linguistique dans le cadre du CIR (contrat d’intégration républicaine), part des personnes ayant bénéficié d’une orientation vers le service public de l’emploi qui s’y sont inscrites pendant la durée du CIR, efficacité de la procédure d’instruction d’un dossier de naturalisation. Indicateurs du programme 303 : part des demandeurs d’asile hébergés, part des places occupées par des demandeurs d’asile et autres personnes autorisées, délai de l’examen d’une demande d’asile par l’OFPRA, taux de transfert des demandeurs d’asile placés sous procédure Dublin, nombre de retours forcés exécutés et nombre d’éloignements et de départs aidés exécutés.

([18]) Règlement (UE) n 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride.

([19]) Le Plan de relance prévoit également la création de 1 500 places dans le Dispositif de préparation au retour mais ces places ne sont pas comptabilisées dans la capacité d’accueil du DNA.

([20]) Selon une enquête flash DGEF / DGCS citée par la note du 24 août 2020 de la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté sur l’accès au logement des bénéficiaires de la protection internationale, 4 926 réfugiés étaient présents dans les structures d’hébergement généraliste.

([21]) Projet annuel de performance, page 22.

([22]) Sur l’ensemble du territoire métropolitain, le ministère de l’intérieur évalue à plus de 20 000 personnes la population occupant des campements, bidonvilles et squats (de plus de 10 personnes). La part des demandeurs d’asile dans cette population n’est pas connue. Ce ministère souligne également que l’ouverture de plus de 30 000 places exceptionnelles dans l’hébergement d’urgence généraliste (hors places spécialisées pour malades COVID-19) pendant la crise sanitaire s’est accompagnée d’une résorption sans précédent depuis 4 ans des campements parisiens.

([23]) Le 2 juillet 2020, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour « traitement dégradant » envers des demandeurs d’asile ayant été contraints, en 2013-2014, de vivre dans la rue pendant plusieurs mois en raison des lenteurs administratives les empêchant d’accéder aux conditions d’accueil (CEDH, 2 juillet 2020, affaire N.H. et autres c. France, requête n° 28820/13). Des indemnités ont été versées à certains requérants. Par ailleurs, le 8 juillet 2020, le Conseil d’État a reconnu la responsabilité pour faute de l’État pour l’absence d’hébergement, en 2014, d’une demandeure d’asile nigériane pendant une période d’environ deux mois alors que l’intéressée était enceinte et mère d’un jeune enfant. L’État a été condamné à indemniser la requérante (CE 8 juillet 2020, n° 425310).

([24]) Note du 24 août 2020 de la ministre déléguée chargée du logement et de la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté sur l’accès au logement des bénéficiaires de la protection internationale, page 2.

([25]) L’objectif 2018 a été fixé par l’instruction n° INTK1721273J du 12 décembre 2017. L’objectif 2019 a été déterminé par l’instruction n°INTV1904604J du 4 mars 2019. L’objectif 2020 a été arrêté par la note n° INTV2020737J du 24 août 2020.

([26]) Ces montants sont applicables sur tout le territoire à l’exception, d’une part, de la Guyane et de Saint-Martin où des montants minorés sont en vigueur (3,80 euros pour l’allocation de base et 4,70 euros par jour pour le pécule) et, d’autre part, de Mayotte, où l’ADA n’est pas proposée.

([27]) Cette trajectoire n’est pas linéaire (41,3 millions d’euros ont par exemple été dépensés en juillet 2020) mais suit la tendance de réduction du nombre d’allocataires.

([28]) Réponse au questionnaire des rapporteurs.

([29]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire rapport d’information n° 3357 sur l’intégration professionnelle des demandeurs d’asile et des réfugiés, M. Jean-Noël Barrot et Mme Stella Dupont, septembre 2020, recommandation n° 8.

([30]) Le cashback permet de retirer des espèces dans le cadre d’une opération de paiement. Cette pratique est autorisée depuis le décret n° 2018-1224 du 24 décembre 2018 relatif à la fourniture d’espèces dans le cadre d’une opération de paiement.

([31]) Sur ce sujet, l’OFPRA a indiqué aux rapporteurs qu’« à cette date, l’OFPRA n’ayant pas encore effectué tous les recrutements que la loi de finances 2020 lui avait consentis, ces deux personnes n’ont jamais été physiquement identifiables. En d’autres termes, ces ETPT ne seront pas recrutés au sein de l’effectif réel et actuel de l’OFPRA ».

([32]) En 2019 :

– 7 731 décisions ont été rendues concernant des Albanais contre 6 336 en 2018,

– 7 378 décisions ont été rendues concernant des Géorgiens contre 3 810 en 2018,

– 468 décisions ont été rendues concernant des Moldaves contre 103 en 2018.

([33])- Cette disposition concerne les convocations de l’OFPRA (article L723-6 du Ceseda), les décisions prises par cet établissement sur la demande d’asile (article L723-8 du Ceseda), les décisions d’irrecevabilité (article L723-11), les décisions de clôture (article L723-13) et les décisions mettant fin au statut de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire (article L724-3 du Ceseda) et les décisions sur le statut d’apatride (article L812-3).

([34])- Arrêté du 8 juillet 2020 pris en application de l’article 13 du décret no 2018-1159 du 14 décembre 2018 pris pour l’application de la loi no 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie et portant diverses dispositions relatives à la lutte contre l’immigration irrégulière et au traitement de la demande d’asile et arrêté du 8 juillet 2020 relatif aux caractéristiques et exigences techniques du procédé électronique mentionné à l’article R. 723-19 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

([35]) Un étranger arrivant en France par la voie ferroviaire, maritime ou aérienne et qui n’est pas autorisé à entrer sur le territoire, peut – sous certaines conditions – être placé en zone d’attente avant d’être reconduit hors de France ou d’y entrer provisoirement. Ce régime est défini aux articles L. 221-1 et suivants du Ceseda.

([36]) Les cinq nationalités les plus représentées sont les nationalités algérienne (6 338), érythréenne (6 074), irakienne (4 552), marocaine (3 529) et afghane (1 926).

([37]) Projet annuel de performance 2020 :

– dépenses de fonctionnement : 41,2 millions d’euros en AE et 36,4 millions d’euros en CP,

– dépenses en matière sanitaire : 16,5 millions d’euros (en AE et CP),

– dépenses d’accompagnement social : 8,1 millions d’euros (en AE et CP).

([38]) Assemblée nationale, commission des finances, rapport n° 1990, annexe n° 28 sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2018, MM. Jean-Noël Barrot et Alexandre Holroyd, mai 2019.

([39]) Projet annuel de performance, page 43.

([40]) Sur la même période, la France a enregistré 744 transferts Dublin « entrants » réalisés par la France depuis d’autres États européens.

([41]) Instruction n° INTV2017993J du 31 juillet du ministre de l’intérieur et de la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté.

([42]) Les crédits finançant l’ADA constituent une dépense de transfert gérée par l’OFII mais versée (hors frais de gestion de 7,3 millions d’euros) par l’Agence de services et de paiement dans le cadre d’une convention de mandat conclue entre ces deux établissements.

([43]) Cour des comptes, L’entrée, le séjour et le premier accueil des personnes étrangères, 2020, page 66.

([44]) Voir sur ce point : Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire rapport d’information n° 3357 sur l’intégration professionnelle des demandeurs d’asile et des réfugiés, M. Jean-Noël Barrot et Mme Stella Dupont, septembre 2020. En matière de formations linguistiques (en français), il est notamment proposé d’étendre la prescription des modules de 600 heures à certains bénéficiaires des forfaits actuels de 400 heures et de proposer, comme en Allemagne, un nouveau module de 900 heures en faveur de certains bénéficiaires des forfaits actuels de 600 heures.

([45]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire rapport sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019, n° 3011, annexe XXVIII, M. Jean-Noël Barrot et Mme Stella Dupont, pp.27-28.

([46]) Cour des comptes, L’Office français de l’immigration et de l’intégration (exercices 2011-2018), observations définitives n° S2009-1676 (document non publié), pages 33-34.

([47]) Voir sur ce point : Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire rapport d’information n° 3357 sur l’intégration professionnelle des demandeurs d’asile et des réfugiés, M. Jean-Noël Barrot et Mme Stella Dupont, septembre 2020.

([48]) Le niveau A2 est celui d’un utilisateur pouvant « communiquer lors de tâches simples et habituelles ne demandant qu’un échange d’informations simple et direct sur des sujets familiers et habituels ». La maîtrise de ce niveau est une des conditions de délivrance de la carte de résident.

([49]) Le niveau B1 est celui d’un utilisateur indépendant sachant « comprendre les points essentiels quand un langage clair et standard est utilisé et s’il s’agit de choses familières dans le travail, à l’école, dans les loisirs ». La maîtrise de ce niveau est une des conditions pour acquérir de la nationalité française.