N° 3399

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2020.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2021 (n° 3360),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 9
 

 

COHÉSION DES TERRITOIRES :

 

POLITIQUE DES TERRITOIRES

 

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Mohamed LAQHILA

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPAUX CONSTATS du rapporteur spécial

DONNÉES CLÉS

Introduction

I. une baisse en trompe l’œil des crÉdits du programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’amÉnagement du territoire

A. une nouvelle gÉnÉration des cper-Cpier en prÉparatioN

1. Une baisse apparente des crédits des CPER qui ne reflète pas l’engagement de l’État vis-à-vis des régions

2. La nouvelle génération des CPER et CPIER 2021-2027

3. La baisse importante des crédits alloués aux contrats territoriaux

B. La montÉe en puissance des maisons France services

1. La montée en puissance des maisons France Services

2. Des objectifs ambitieux concernant les maisons France Services

3. Une légère baisse des crédits sur les autres dispositifs

C. un rôle crucial À jouer durant la relance pour l’agence nationale de la cohÉsion des territoires

1. Des moyens renforcés dans le PLF 2021

2. Un rôle crucial à jouer dans le contexte de la relance

II. Le programme 162 des interventions territoriales de l’État s’enrichit en 2021 d’une nouvelle action

A. deux Évaluations du Plan de lutte contre les algues vertes attendues prochainement

B. le plan exceptionnel d’investissement pour la corse (PEI corse) appelÉ À laisser la place au plan de transformation et d’investissement pour la Corse (PTIC)

C. un nouveau plan ChlordÉcone

D. la montÉe en charge du Plan littoral 21

E. La poursuite du contrat de convergence et de transformation pour la Guyane 2019-2022

F. des financements pour la reconquÊte de la qualitÉ des cours d’eau en Pays de la Loire qui se font attendre

G. La nouvelle action du service d’incendie et de secours À Wallis-et-Futuna

III. Une nouvelle augmentation des crédits allouÉs à la politique de la ville en 2021

A. une action particuliÈre pour les quartiers prioritaires enclenchÉe dÈs le printemps 2020

1. Le plan d’urgence pour les jeunes des quartiers

2. Le dispositif « Vacances apprenantes »

3. Le plan « Quartiers solidaires »

B. une augmentation des crÉdits du programme 147 qui accompagne un plan de relance dont profiteront les quartiers prioritaires

1. De nombreuses mesures du plan de relance concernent les habitants des quartiers prioritaires

a. Les dispositifs fléchés

b. Les dispositifs non fléchés

2. Un soutien renforcé à l’éducation, la formation et la cohésion sociale sur le programme 147

a. La montée en puissance des cités éducatives

b. L’augmentation de 1 514 postes d’adultes-relais

c. L’augmentation de 4 millions d’euros du budget de l’EPIDE

C. Une accÉlÉration attendue du nouveau programme national de renouvellement urbain (npnru)

1. Une trajectoire de financement du NPNRU qui diverge fortement des engagements pris par l’État en 2018

2. Un nouvel objectif de performance bienvenu

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES  PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 82 % des réponses étaient parvenues au rapporteur spécial.

 


—  1  —

   PRINCIPAUX CONSTATS du rapporteur spécial

Pour accélérer les investissements structurants des collectivités territoriales, soutenir les territoires et les populations les plus fragilisés des zones rurales et urbaines et favoriser la relocalisation productive de nos entreprises, le développement des territoires doit constituer une priorité de l’action publique, particulièrement dans le contexte actuel.

Les trois programmes du rapport Politique des territoires de la mission Cohésion des territoires participent de cet objectif de façon limitée (786,6 millions d’euros prévus en crédits de paiement dans le PLF 2021), alors que 1,29 milliard d’euros en AE et 413 millions d’euros en CP sont prévus dans le plan de relance pour l’action 7 Cohésion territoriale (programme 364 Cohésion de la mission).

1.   Le programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

Le programme 112 connaît une baisse significative de ses crédits de – 15,5 % de ses autorisations d’engagement (AE) et de – 5,4 % de ses crédits de paiement qui atteignent respectivement 175,9 millions d’euros et 230,8 millions d’euros dans le PLF 2021. Le rapporteur n’est pas persuadé de la pertinence d’inscrire dans le plan de relance 155 millions d’euros en AE et 20 millions d’euros en CP relatifs aux nouveaux contrats de plan État-région 2021-2027, aux contrats de plan interrégionaux (CPIER) ainsi qu’au plan de transformation et d’investissement pour la Corse (PTIC), ce qui minore d’autant les crédits du programme 112.

Le rapporteur attend beaucoup de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), dont les moyens en ingénierie ont été renforcés, et de l’action des services déconcentrés de l’État pour accélérer le déploiement des programmes fortement soutenus dans le cadre du plan de relance (Territoires d’industrie, Action cœur de ville, Petites villes de demain, etc.). Les lenteurs administratives trop souvent constatées dans le passé doivent disparaître.

2.   Le programme 162 Programme des interventions territoriales de l’État

Le programme 162 Interventions territoriales de l’État est faiblement doté : ses crédits atteignent en 2021 41 millions d’euros en AE (– 4,4 millions d’euros par rapport à la LFI 2020) et 40,5 millions d’euros en CP (+1,9 million d’euros par rapport à la LFI 2020). Il s’enrichit en 2021 d’une nouvelle action consacrée au service d’incendie et de secours à Wallis-et-Futuna.

Le rapporteur regrette la lourdeur des procédures concernant le dépistage du chlordécone financé à hauteur de 2 millions d’euros en 2020. Le nouveau plan chlordécone doit en faire une priorité. Il remarque également que l’action relative à la reconquête de la qualité des cours d’eau en Pays de la Loire ne décolle pas.

3.   Le programme 147 Politique de la ville

Le rapporteur salue la forte augmentation des crédits du programme 147 de 9,8 % en AE et 4,2 % en CP. La dotation s’élève à 515,3 millions d’euros en AE/CP dans le PLF 2021. Un effort important est consenti pour financer l’ouverture de 1 514 postes supplémentaires d’adultes‑relais : le rapporteur sera attentif à ce que ces postes soient pourvus, le dispositif ayant été systématiquement sous-exécuté par le passé. La montée en puissance des cités éducatives doit être évaluée. Le plan de relance, qui fait de l’emploi des jeunes une priorité, profitera tout particulièrement à ceux des quartiers prioritaires.

Par ailleurs, tout doit être fait pour combler les retards du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU). Le rapporteur attend qu’un nouvel échéancier des financements de l’État à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) soit présenté rapidement, l’écart entre la trajectoire fixée en 2018 et le financement réel dévolu à l’opérateur en 2021 étant très significatif.

 


—  1  —

   DONNÉES CLÉS

Évolution LFI 2020/ PLF 2021 des autorisations d’engagement
de la mission politique des territoires

(en millions d’euros)

Source : documents budgétaires, Commission des finances.

 

Évolution LFI 2020/ PLF 2021 des crédits de paiement
de la mission politique des territoires

(en millions d’euros)

Source : documents budgétaires, Commission des finances.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Écart entre l’engagement de l’État pour le financement du npnru sur la période 2018-2022 et la trajectoire rÉellement constatÉe

(en millions d’euros)

Source : documents budgétaires, Commission des finances.

 

 

 

 

 


—  1  —

   Introduction

Le rapport spécial Politique des territoires étudie les crédits des trois derniers programmes de la mission Cohésion des territoires : le programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire, le programme 162 Interventions territoriales de l’État et le programme 147 Politique de la ville.

Ces trois programmes financent des politiques publiques visant à réduire les inégalités territoriales et renforcer l’action de l’État dans les territoires fragiles. Ils ne portent qu’une partie limitée des crédits de l’État en faveur de la politique d’aménagement du territoire, les différentes dotations d’investissement octroyées aux collectivités territoriales (DSIL, DETR, DPV, etc.) étant inscrites dans la mission Relation avec les collectivités territoriales.

Les crédits du rapport Politique des territoires s’élèvent en 2021 à 732,2 millions d’euros en AE et 786,6 millions d’euros en CP, en légère hausse de 1,3 % en AE et 1,2 % en CP. À titre de comparaison, le document de politique transversale Aménagement du territoire évalue à 8,44 milliards d’euros en CP et 7,93 milliards d’euros en AE le montant total des crédits accordés à la politique publique éponyme.

La hausse des crédits est portée par le programme 147 (+ 20,9 millions d’euros en CP) pour accompagner la montée en puissance des cités éducatives et le financement de 1 514 postes supplémentaires d’adultes-relais. Inversement, le programme 112 est en forte baisse (- 15,5 % en AE). Cela s’explique notamment par la création de la mission Plan de relance qui intègre une part des crédits des contrats de plan État-région (CPER) et des contrats de plan interrégionaux
État-région (CPIER).


ÉVOLUTION DES CRÉDITS 2019-2020 du rapport spécial politique des territoires

(en millions d’euros)

 

 

 

 

LFI 2020

LFR 3 2020

LFI + LFR 3

PLF 2021

Évolution 2020-2021 en valeur absolue

Évolution 2020‑2021 en %

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

208,1

244,1

-

-

208,1

244,1

175,9

230,8

–32,2

-13,3

-15,5 %

-5,4 %

Programme 162 Interventions de l’État

45,4

38,6

-

-

45,4

38,6

41

40,5

-4,4

+1,9

-9,7 %

+4,9 %

Programme 147 Politique de la ville

469,4

494,4

86,5

86,5

555,9

580,9

515,3

515,3

+45,9

+20,9

+9,8 %

+4,2%

Total

722,9

777,1

86,5

86,5

809,4

863,6

732,2

786,6

+9,3

+9,5

+1,3 %

+1,2%

Source : Commission des finances d’après le PAP.

Malgré les incertitudes sanitaires qui planent sur notre pays, l’année 2021 doit être l’année de la reconquête pour les territoires : le plan de relance investit ainsi 1,29 milliard d’euros en AE et 413 millions d’euros en CP pour l’action 7 Cohésion territoriale du programme 364 Cohésion de la mission Plan de relance. Le programme « Territoires d’industrie » bénéficie également de 205 millions d’euros en CP dans le programme 363 Compétitivité. Tout un ensemble de programmes doivent être ainsi développés et accélérés.

Les dépenses fiscales des trois programmes pourraient atteindre près de 2 milliards d’euros soit presque le triple des crédits inscrits en 2021 : il est dans ce contexte tout à fait regrettable de constater une fois de plus l’absence d’estimation a priori et d’évaluation d’une dépense fiscale représentant en 2019 plus de 1 milliard d’euros ([1]).

En outre, un certain nombre de dispositifs zonés de soutien aux territoires en difficulté ou confrontés à des contraintes spécifiques (zones de revitalisation rurale (ZRR), zones d’aide à finalité régionale (AFR), zones franches urbaines-territoires entrepreneurs (ZFU-TE), etc.) arrivent à échéance le 31 décembre 2020. Le rapport inter-inspection (IGF-IGA-IGAS-CGEDD) rendu en 2020 montre que ces exonérations fiscales et sociales ne sont pas pleinement efficaces en matière de création d’entreprises et d’emplois dans les territoires.

 

Pour autant, elles sont perçues par les entreprises et les collectivités concernées comme un signal positif et une reconnaissance de la vulnérabilité de leur territoire. En l’attente d’une réflexion plus poussée sur les éventuelles transformations à apporter, le rapporteur spécial souhaite voir proroger de deux ou trois ans l’ensemble de ces dispositifs zonés.

I.   une baisse en trompe l’œil des crÉdits du programme 112 Impulsion et coordination de la politique d’amÉnagement du territoire

La dotation budgétaire inscrite dans le PLF 2021 pour le programme 112 s’établit à 175,9 millions d’euros en AE et 230,8 millions d’euros en CP, soit une baisse significative par rapport à 2020 de – 32,2 millions d’euros en AE et  13,3 millions d’euros en CP. Cette baisse est due en grande partie à l’inscription d’une partie des crédits de la nouvelle génération 2021-2027 des contrats de plan État-région (CPER), des contrats de plan interrégionaux Étatrégion (CPIER) et du plan de transformation et d’investissement pour la Corse (PTIC) dans le programme 364 de la mission Plan de relance à hauteur de 155 millions d’euros en AE et 20 millions d’euros en CP. Si l’on intégrait ces crédits au programme 112 dont relèvent normalement ces crédits, ce programme serait en augmentation de 187,2 millions d’euros en AE et 6,7 millions d’euros en CP par rapport à la LFI 2020.

Au-delà de la question de périmètre, le programme connaît une baisse naturelle des CP des contrats de ruralité et des pactes État-métropole engagés en 2017 tandis que l’extinction de la prime d’aménagement du territoire se poursuit en 2021. A contrario, il convient de noter l’augmentation des moyens en ingénierie de l’ANCT (+ 9,3 millions d’euros) et la montée en puissance des maisons France Services (+ 9,8 millions d’euros).

 

 

ÉVOLUTION DES CRÉDITS 2020-2021 du programme 112
Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

(en millions d’euros)

 

Exécution 2019

LFI 2020

PLF 2021

Évolution LFI 2020-PLF 2021 en valeur absolue

Évolution LFI 2020-PLF 2021
en %

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action n° 11 : section locale du FNADT

120,3

108,6

123,7

111,2

75,7

103,4

-48

-7,8

-38,8 %

-7,0 %

dont CPER

96,1

96,9

107,9

100,6

66,8

102,1

-41,1

1,5

-38,1 %

+1,5 %

dont contrats de convergence et de transformation

4,7

0,6

4,5

4,2

5,5

0,8

+1

-3,4

+22,2 %

-81,0 %

dont pactes territoriaux

19,5

11,1

11,2

6,4

3,4

0,5

-7,8

-5,9

-69,6 %

-92,2 %

Action n° 12 : section générale du FNADT

35,8

40,1

24,9

32,6

34,4

39,1

+9,5

+6,5

+38,2 %

+19,9 %

dont Maisons France Services ou MSAP

29,1

29,7

18,5

18,5

28,3

28,3

+9,8

+9,8

+53,0 %

+53,0 %

Dont fermeture des installations militaires

2,8

4,5

2,9

6,3

1,8

4,8

-1,1

-1,5

-37,9 %

-23,8 %

Autres (soutien aux associations, revitalisation centre bourgs, autres décisions du Gouvernement)

3,9

5,9

3,5

7,8

4,3

6

+0,8

-1,8

22,9 %

-23,1 %

Action n° 13 : soutien aux opérateurs

36,9

34,2

56,5

56,5

65,8

65,8

+9,3

+9,3

+16,5 %

+16,5 %

dont ANCT

31,7

29

51,7

51,7

61

61

+9,3

+9,3

+18,0 %

+18,0 %

dont Business France

5,2

5,2

4,8

4,8

4,8

4,8

0

0

0 %

0 %

Action n° 14 : PAT, contrats de ruralité et pacte État métropole

9,7

46,4

3

43,9

0

22,5

-3

-21,4

-100,0 %

-48,7 %

dont PAT

9,7

7,8

3

15,1

0

11

-3

-4,1

-100,0 %

-27,2 %

dont contrats de ruralité

0

35,9

0

26,6

0

10

0

-16,6

 

-62,4%

dont pacte État-métropole

0

2,7

0

2,2

0

1,5

0

-0,7

 

-31,8%

Total programme 112

202,7

229,3

208,1

244,2

175,9

230,8

-32,2

-13,3

-15,5 %

-5,4%

Source : documents budgétaires, Commission des finances.

A.   une nouvelle gÉnÉration des cper-Cpier en prÉparatioN

1.   Une baisse apparente des crédits des CPER qui ne reflète pas l’engagement de l’État vis-à-vis des régions

Les crédits dévolus aux CPER dans le programme 112 atteignent 102,1 millions d’euros en CP et 66,8 millions d’euros en AE. 155 millions d’euros en AE et 20 millions d’euros en CP ont en outre été inscrits dans le plan de relance. Sur l’enveloppe prévue dans le programme 112, 89,5 millions d’euros doivent permettre de couvrir les engagements des CPER/CPIER 2015-2020. Il restera donc encore 127 millions d’euros de crédits engagés sur les CPER 2015-2020 à couvrir en 2022. L’enveloppe en CP consacrée à la nouvelle génération des CPIER/CPER est donc de 12,6 millions pour le programme 112.

Malgré ses échanges avec le responsable de programme, le rapporteur est très sceptique quant à l’intérêt d’inscrire des crédits CPER dans le plan de relance. En effet, ce ne sont pas des crédits exceptionnels. Ils s’inscrivent dans une perspective de moyen-long terme définie par les régions et l’État. Enfin, le rapporteur regrette l’effet d’affichage négatif pour le programme 112.

Le responsable de programme indique que l’inscription de ces crédits dans le plan de relance est à analyser dans le cadre du recensement mené au courant de l’année 2020 des différents projets prêts à démarrer et pouvant être financés au titre de ces contrats. Le plan de relance doit ainsi permettre un engagement rapide des crédits sous le pilotage des sous-préfets à la relance, chargés de la mise en œuvre territoriale du plan de relance.

2.   La nouvelle génération des CPER et CPIER 2021-2027

La nouvelle génération des CPER et CPIER 2021-2027 est en voie de finalisation. L’accord de partenariat État-régions du 28 septembre 2020 prévoit un montant investi, par les régions d’un côté et par l’État de l’autre au moins égal à 20 milliards d’euros, soit un montant sensiblement supérieur à celui contractualisé par l’État pour les CPER 2015-2020 (12,6 milliards d’euros) qui ne couvraient cependant que six années au lieu de sept.

Le Premier ministre a adressé fin octobre les mandats de négociation aux préfets de région, préparés depuis février 2020 avec les présidents des conseils régionaux. Ils ont été revus pour tenir compte des nouvelles priorités régionales, intégrer des crédits régionalisés du plan de relance et renforcer les priorités de résilience des territoires et de souveraineté industrielle. Les accords de relance 2021-2022 et les projets de maquettes budgétaires des CPER 2021-2027 feront l’objet d’un accord et d’une signature État-région avant la fin de l’année 2020. Les projets de CPER définitifs feront l’objet d’une signature formelle courant 2021.

Concernant l’élaboration de la nouvelle génération de CPER pour la période 2021-2027, la direction générale des collectivités territoriales (DGCL) indique avoir poursuivi son action autour de quatre axes :

– une démarche ascendante qui part des attentes et des besoins des régions ;

– un élargissement du périmètre de contractualisation avec de nouvelles thématiques au-delà des six thématiques déjà présentes dans les CPER 2015-2020 (santé, agriculture, mer, littoral, éducation et jeunesse) ;

– la mise en œuvre de la différenciation territoriale avec des contenus et maquettes différents en fonction des enjeux régionaux ;

– une articulation avec les fonds européens 2021-2027 et le plan de relance 2021-2022.

Aux priorités stratégiques partagées par l’État et les régions identifiées dans les projets de CPER avant la crise (transitions écologiques, recherche-innovation-enseignement supérieur, cohésion sociale et territoriale) s’ajoutent celles liées à la santé, à la formation professionnelle, au développement économique, à l’inclusion numérique, aux infrastructures de mobilité, au tourisme, à la culture et au sport.

Le rapporteur sera attentif à la déclinaison concrète des différents CPER dans les régions et à l’attention portée aux priorités des conseils régionaux. Le bilan des CPER 2015-2020 devra être tiré : le rapporteur constate un taux d’engagement fin 2020 de 75 % tout volet confondu soit un niveau inférieur à la précédente génération des CPER 2007-2014 (87 %). Le volet mobilité multimodale aurait connu des difficultés particulières liées au retrait de la taxe carbone, la diminution des recettes de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et le redimensionnement de certaines opérations (exécution de 65 %). Ce volet a ainsi été prolongé jusqu’en 2022 et abondé dans le plan de relance pour permettre la réalisation de l’ensemble des projets inscrits dans les contrats.

Dans sa note d’exécution de l’analyse budgétaire de 2017, la Cour des comptes regrettait l’absence d’indicateur de performance relatif aux CPER qui représentent presque la moitié des crédits de paiement du programme. Si ces CPER intègrent de nombreux périmètres et se déclinent différemment selon les régions, un indicateur de performance pourrait a minima prévoir une trajectoire d’engagement et de décaissement de crédits pour la nouvelle génération 2021-2027.

3.   La baisse importante des crédits alloués aux contrats territoriaux

Les pactes de développement territorial bénéficient aux territoires particulièrement fragiles pour relancer l’attractivité. Le programme 112 porte les crédits spécifiques de certains contrats (Calaisis, Châlons-en-Champagne, Strasbourg, engagement pour le renouveau du bassin minier, etc.).

La baisse des crédits alloués aux contrats territoriaux est de 7,8 millions en AE et 5,9 millions en CP dans le PLF 2021. Elle s’explique notamment par la fin des engagements au titre du contrat de développement territorial pour Calais et le Calaisis (4,5 millions d’euros en LFI 2020).

B.   La montÉe en puissance des maisons France services

Les maisons France Service sont des structures ayant vocation à apporter un soutien direct aux usagers dans leur accès aux services publics de proximité. Elles réunissent ou en constituent un point relais pour les neuf partenaires suivants : CNAV, MSA, CAF, CNAM, Pôle Emploi, La Poste, ministère de l’Intérieur, ministère de la justice, DGFiP. Elles peuvent également accueillir d’autres acteurs selon le contexte local.

1.   La montée en puissance des maisons France Services

Au 31 décembre 2019, on comptait près de 1 350 maisons de service au public (MSAP). Au 13 octobre 2020, 676 MSAP ont obtenu le label France Services sur 856 France Services labellisées (soit 180 créations de France Services). Les crédits dévolus aux maisons France Service atteignent 28,3 millions d’euros en AE/CP en 2021 en augmentation de plus de 50 % par rapport à la LFI 2020.

La dotation supplémentaire inscrite dans le PLF 2021 doit permettre de soutenir les MSAP qui en ont le plus besoin : les « têtes de réseaux » assurant un rôle d’animation mais également les structures qui accueillent davantage de public et nécessitent la présence d’agents supplémentaires.

Les engagements du fonds interopérateurs pour le développement des France Services, inscrits dans la convention cadre 2019-2022, sont pour l’instant respectés. Ils nécessiteront un apport par voie de fonds de concours de 17,5 millions d’euros en 2021. La montée en gamme du dispositif et l’augmentation du nombre de structures ont entraîné la signature en septembre 2020 d’un avenant à cette convention qui modifie le plan de financement des opérateurs.

rÉpartition de la participation au fonds interopÉrateur en 2020

(en millions d’euros)

 

Participation en valeur absolue

Participation en %

Ministère de l'intérieur

2,5

14,5 %

DGFiP

2,5

14,5 %

CNAV

1

6,0 %

MSA

1

6,0 %

CAF

2,2

12,5 %

CNAM

2,5

14,5 %

Pôle Emploi

2,5

14,5 %

La Poste

2,5

14,5 %

Ministère de la justice

0

0 %

AGIRC-ARRCO

0,3

1,5 %

TOTAL

17,3

100 %

Source : ANCT.

2.   Des objectifs ambitieux concernant les maisons France Services

L’objectif fixé par la circulaire du 8 juin 2020 est de créer 2 534 structures de telle sorte que chaque Français ait accès à une maison France Services à moins de 30 minutes. Les maisons France Services présentent une qualité de service supérieure aux MSAP. Pour mieux l’évaluer, un nouvel indicateur de performance est intégré au PAP du programme 112 : il permet de mesurer le taux des démarches que les agents des France Services sont en capacité de réaliser sans que l’usager n’ait à revenir dans une France Services ou à prendre un rendez-vous avec un opérateur.

Cet indicateur est très pertinent et permet d’évaluer ce que doit être une maison France Services : un endroit où l’usager est entièrement satisfait dès sa première visite et n’a pas à être redirigé. Le taux de réalisation des démarches sans redirection est fixé à 90 % en 2021.

Les MSAP qui n’auraient pas obtenu le label France services au 1er janvier 2022 ne pourront plus prétendre aux financements du programme 112.

3.   Une légère baisse des crédits sur les autres dispositifs

Hors maisons France Service, les crédits de l’action 12 sont en baisse de 3,3 millions d’euros en CP.

La crise sanitaire a perturbé le déroulement des actions inscrites dans les contrats de redynamisation des sites de défense (CRSD). Il a été décidé de prolonger les CRSD de 12 mois supplémentaires. En dehors du nouveau CRSD de Châteaudun, signé le 30 décembre 2019 pour une durée de 4 ans, sept CRSD resteront encore actifs pendant les années 2021 et 2022. La baisse constatée des crédits de 1,1 million d’euros en AE et 1,5 million d’euros en CP s’explique par le rythme naturel de déploiement des contrats.

C.   un rôle crucial À jouer durant la relance pour l’agence nationale de la cohÉsion des territoires

L’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) a été créée le 1er janvier 2020 en reprenant les missions du Commissariat général à l’égalité du territoire (CGET), de l’Agence du numérique et de l’Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA). Cette nouvelle agence est aujourd’hui pleinement opérationnelle, l’ensemble des postes d’encadrement de l’ANCT ayant été pourvus.

L’ANCT se veut pleinement au service des collectivités territoriales, pleinement à l’écoute de leurs projets d’aménagement. Elle se veut capable d’apporter un soutien sur mesure que ce soit dans le cadre des grands programmes nationaux pilotés par l’agence ou en dehors de ce cadre : 81 dossiers ont fait l’objet d’une sollicitation de l’Agence hors des programmes nationaux 2020 concernant notamment les restructurations commerciales.

1.   Des moyens renforcés dans le PLF 2021

La subvention pour charges de service public (SCSP) de l’ANCT s’établit à 61 millions d’euros en 2021, en hausse de presque 10 millions d’euros. Cette enveloppe supplémentaire doit permettre de renforcer ses moyens en ingénierie auprès des collectivités territoriales. La SCSP représente un peu moins de 70 % des recettes de l’ANCT, elle est complétée par les financements européens et les recettes commerciales liées à la reprise des activités de l’EPARECA.

Il faut noter que l’action 13 inclut une autre subvention pour charges de service public à destination de Business France. Elle est stable en 2021 à hauteur de 4,8 millions d’euros et représente 5 % des financements publics de l’opérateur pour sa contribution à la politique d’attractivité du territoire et au maintien de l’emploi.

Le schéma d’emploi de l’ANCT est de – 6 ETPT dans le PLF 2021. Cela constitue un rééquilibrage par rapport à 2020 où, à périmètre constant, l’ANCT avait un schéma d’emploi de + 3 ETPT pour accompagner sa création. Le rapporteur espère que cette baisse n’empêchera pas l’agence de renforcer les moyens pour accompagner le déploiement de ses nouveaux programmes (montagne, ruralités, petites villes demain) et la mise en œuvre du plan de relance.

Les contrats de partenariats avec les partenaires identifiés par la loi n° 2019‑753 du 22 juillet 2019 (ADEME, CEREMA, ANRU, ANAH) ont été présentés au conseil d’administration de l’ANCT et devraient être signés prochainement.

2.   Un rôle crucial à jouer dans le contexte de la relance

Le rôle de l’Agence, en coordination étroite avec les préfets qui en sont les délégués territoriaux dans les départements, sera crucial pour une accélération des projets des collectivités territoriales dans une perspective de relance.

Il n’y a pas de temps à perdre pour les différents programmes qu’ils soient en voie de lancement ou déjà déployés. Le rapporteur pense notamment à deux programmes fortement soutenus dans le cadre du plan de relance :

– Action cœur de ville dont 1,375 milliard d’euros ont déjà été engagés dans les 222 villes sélectionnées pour le programme au deuxième trimestre 2020. L’année 2021 sera l’occasion de faire un premier bilan d’étape. Son positionnement sur les différentes lignes du plan de relance doit permettre une consolidation de son déploiement : rénovation énergétique des bâtiments privés (2 milliards d’euros sur deux ans inscrits sur l’action 1 du programme 362 Écologie), densification et renouvellement urbain (fonds de 300 millions euros sur l’action 2 du programme 362), rénovation des commerces de centre-ville (150 millions d’euros en AE/CP sur action 7 du programme 364 Cohésion), etc.

– Territoires d’industrie, qui doit bénéficier d’un financement de 1,3 milliard d’euros d’ici 2022, connaît un soutien exceptionnel avec un fonds de 400 millions d’euros prévu pour la période 2020-2022. Ce soutien doit donner un coup d’accélération à des investissements industriels de tout secteur et de toute taille dans les 148 zones identifiées pour leur potentiel de reconquête industrielle. Début octobre, 107 projets ont fait l’objet d’une présélection par l’État et les régions pour bénéficier de financements supplémentaires.

 

Le rapporteur sera attentif à ce que la priorité donnée à la relocalisation productive ne soit pas un vain mot. Les projets prêts à être engagés doivent être rapidement déployés. L’indicateur de performance « Nombre d’emplois créés ou maintenus grâce aux dispositifs de relocalisation sectorielle ou territoriale » du programme 363 prévoit le maintien ou la création de 13 000 emplois en 2021. Le rapporteur n’est pas certain qu’un simple sondage auprès des entreprises bénéficiaires du fonds permette d’évaluer le nombre d’emplois créés ou maintenus.

L’année 2021 sera également l’année du déploiement de nouvelles initiatives comme le programme Petites Villes de Demain, qui vient d’être lancé le 1er octobre 2020 et cible les communes fragilisées de moins de 20 000 habitants dans les territoires ruraux. La priorité est d’assurer la réussite du lancement du programme, à savoir la sélection des 1 000 territoires concernés, d’être en capacité de financer les postes de chef de projet qui agiront dans le cadre du programme ainsi que d’animer le réseau. Le lancement des projets passe par les premières études d’assistance à maîtrise d’ouvrage, l’élaboration de l’opération de revitalisation de territoire. Après cette phase d’initialisation débutera la phase de contractualisation du projet de revitalisation. Le budget prévisionnel du programme s’élève à 3 milliards d’euros pour les six années à venir au moyen des financements des différents partenaires nationaux (ministères de la cohésion des territoires et de la transition écologique, Banque des territoires, ANCT, Cerema et Anah).

II.   Le programme 162 des interventions territoriales de l’État s’enrichit en 2021 d’une nouvelle action

Le programme des interventions territoriales de l’État (PITE), rattaché au ministère de l’intérieur, est un outil budgétaire susceptible d’être mobilisé pour toute action régionale ou interrégionale territorialisée, caractérisée par la nécessité d’une action rapide de l’État ou d’une accélération d’un plan complexe. Pour ce faire, les préfets de régions disposent d’enveloppes fongibilisées de crédits en provenance de plusieurs ministères.

Les interventions territoriales bénéficient ainsi de la neutralité de la direction de la modernisation et de l’administration territoriale (DMAT) qui n’est pas directement partie prenante dans les politiques publiques mises en œuvre et ne dispose pas de crédits en propre susceptibles d’interférer dans les arbitrages budgétaires. D’un point de vue politique, la visibilité et la lisibilité de ces actions sont renforcées par rapport à ce que serait un portage éclaté en de multiples programmes.

Ce qui n’est pas nécessairement satisfaisant d’un point de vue budgétaire
 le programme 162 porte un niveau trop faible de crédits pour être significatif (41 millions d’euros en AE en baisse de 4,4 millions d’euros et 40,5 millions d’euros en CP en hausse de 1,9 million d’euros dans le PLF 2021) – peut l’être du point de vue de l’efficacité des politiques publiques. Le rapporteur regrette cependant que cinq des sept actions du programme ne soient pas couvertes par un indicateur de performance.

L’action en faveur du marais poitevin est clôturée en 2021.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS du programme 162
Interventions territoriales de l’État

(en millions d’euros)

 

Exécution 2019

LFI 2020

PLF 2021

Évolution LFI 2020-PLF 2021 en valeur absolue

Évolution LFI 2020-PLF 2021 en %

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 02 : Eau-Agriculture en Bretagne

7

7,5

2

1,8

2

2

0

0,2

0 %

+11,1 %

Action 04 – Programme exceptionnel d’investissements en faveur de la Corse

25,4

33,8

16,8

17,8

16,8

17,8

0

0

0 %

0 %

Action 06 – Plan gouvernemental sur le marais poitevin

0

1,5

0

1,4

0

0

0

-1,4

0 %

-100,0 %

Action 08 – Plan chlordécone en Martinique et en Guadeloupe

2,2

2,3

5

5

3

3

-2

-2

-40,0 %

-40,0 %

Action 09 – Plan littoral 21

3,9

2,3

4,8

4,4

5,9

4,4

1,1

0

+22,9 %

0,0 %

Action 10 –Fonds interministériel de transformation de la Guyane

-

-

16,8

7,4

12

11,4

-4,8

4

-28,6 %

+54,1 %

Action 11 – Reconquête de la qualité des cours d’eau en pays de Loire

-

-

0,1

0,7

0,1

0,7

0

0

0 %

0 %

Action 12 – Service d’incendie et de secours à Wallis-et-Futuna

-

-

0

0

1,3

1,3

1,3

1,3

-

-

Total programme 162

38,5

47,4

45,4

38,6

41

40,5

-4,4

1,9

-9,7 %

+4,9 %

Source : documents budgétaires, commission des finances.

A.   deux Évaluations du Plan de lutte contre les algues vertes attendues prochainement

Cette action, mise en place dès 2006 en réponse aux diverses condamnations de la France au niveau européen pour le non-respect des règles communautaires, vise à retrouver un haut niveau de qualité de l’eau en Bretagne.

 

 

Cette action repose sur quatre axes :

– inciter les agriculteurs à supprimer les atteintes à l’environnement ;

– mesurer l’évolution de la situation environnementale ;

– améliorer l’évaluation des résultats et la gestion prospective ;

– lutter contre la prolifération des algues vertes dans le cadre du plan de lutte contre la prolifération des algues vertes (PLAV) prolongé de deux années supplémentaires jusqu’en 2023.

Le PLAV, financé par un transfert de gestion en provenance du ministère de l’agriculture de 5 millions d’euros, concerne les bassins versants des huit baies bretonnes les plus concernées par le phénomène. Deux évaluations conduites par des bureaux d’études (concernant les moyens déployés) et la Cour des comptes (concernant les actions mises en œuvre depuis 2010) pour l’autre doivent rendre leurs résultats très prochainement.

Les crédits alloués à cette action s’établissent à 2 millions d’euros en AE et 2 millions d’euros en CP dans le PLF 2021 (+0,2 million d’euros en CP par rapport à la LFI pour 2020).

B.   le plan exceptionnel d’investissement pour la corse (PEI corse) appelÉ À laisser la place au plan de transformation et d’investissement pour la Corse (PTIC)

Le PEI Corse constitue depuis plusieurs années la principale action du programme. Il est financé cette année comme l’année dernière à hauteur de 16,8 millions d’euros en AE et 17,8 millions d’euros en CP. Le PEI Corse doit achever sa programmation au 31 décembre 2020 pour un engagement de toutes les opérations au plus tard le 31 décembre 2022 et une exécution des paiements jusqu’en 2026. 197,9 millions d’euros d’engagements ne sont pas couverts au 31 décembre 2020.

Le PEI Corse laisse place au PTIC à partir de 2021 : dans le cadre de ce nouveau plan, il s’agit de maintenir un niveau d’engagement financier équivalent à celui du PEI en poursuivant la politique de rattrapage des infrastructures insulaires. D’une durée de 5 ans, il se concentrera sur un nombre limité de projets d’intérêt public majeur, qui feront l’objet d’une contractualisation spécifique entre l’État et chacun des maîtres d’ouvrage concernés. Les crédits du PTIC ne seront pas inscrits sur le programme 162. Le plan de relance contient 42 millions d’euros en AE et 3 millions d’euros en CP sur le programme 364 Cohésion, ce qui ne paraît pas nécessairement pertinent pour le rapporteur.

C.   un nouveau plan ChlordÉcone

Les crédits au titre du plan chlordécone III sont de 3 millions d’euros en AE/CP dans le PLF 2021 conformément aux engagements du Président de la République. Ces crédits ne contiennent pas ceux du quatrième plan chlordécone (plan IV) qui doit couvrir la période 2021-2027. Son budget présenté le 19 octobre 2020 s’élève à 92,3 millions d’euros dont 31,3 millions d’euros portés par l’action 8 du PITE. Les contributions des différents ministères concernés au plan IV interviendront en gestion en 2021.

Le plan chlordécone IV 2021-2027 est structuré autour de six stratégies : la stratégie communication, la stratégie formation et éducation, la stratégie recherche, la stratégie santé-environnement-alimentation, la stratégie socio-économique et la stratégie santé-travail. Pour lutter contre l’éclatement des compétences, un directeur de projet spécifique est nommé pour s’assurer de la bonne exécution des mesures du plan.

Les crédits en 2021 sont en retrait de 2 millions d’euros par rapport à la LFI pour 2020 (5 millions en AE/CP). Ces deux millions d’euros correspondent à l’enveloppe supplémentaire accordée à l’automne 2020 pour développer le dosage de chlordéconémie et favoriser le dépistage de la population touchée par l’utilisation de ce pesticide de 1972 à 1993. Il est très important pour le rapporteur que soit objectivée l’exposition des habitants de Guadeloupe et de Martinique au chlordécone.

Le ministère chargé de la santé attend les conclusions de la Haute autorité de santé au sujet de la pertinence de ce dépistage et des modalités de son remboursement, conclusions qui dépendent elles-mêmes des travaux de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) concernant la révision des valeurs toxicologiques et la définition d’une valeur critique d’imprégnation. Le rapporteur regrette la lourdeur des procédures alors que des agences mettent en œuvre les premiers dosages. Il note cependant avec satisfaction l’engagement pris que les crédits non consommés seront reportés sur 2021 afin d’en permettre l’exécution totale.

D.   la montÉe en charge du Plan littoral 21

Le plan littoral 21 a été lancé par accord entre l’État, la Région Occitanie et la Caisse des dépôts le 30 mars 2017 afin de développer le territoire littoral de l’Occitanie autour de trois axes (la résilience écologique, le développement économique et l’innovation, l’attractivité et la cohésion sociale) pour une durée de 10 ans.

Les crédits de l’action atteignent 5,9 millions d’euros en AE (+ 23 %) et 4,4 millions d’euros en CP (niveau stable) en 2021. Malheureusement, la crise sanitaire a considérablement ralenti le déploiement des projets. Le niveau de consommation au 1er septembre 2020, 40 % des AE et 12 % des CP disponibles, reflète les difficultés rencontrées sur le littoral.

E.   La poursuite du contrat de convergence et de transformation pour la Guyane 2019-2022

Le fonds interministériel pour la transformation de la Guyane traduit les engagements de l’État dans le cadre de l’application des accords de Cayenne du 21 avril 2017 et de l’adoption du contrat de convergence et de transformation (CCT) pour la Guyane signé le 8 juillet 2019. Un des axes majeurs est de répondre au retard concernant les aménagements structurants avec un financement par voie de concours de l’AFITF (Agence de financement des infrastructures de transport de France) de 94 millions d’euros en AE et 9 millions d’euros en CP pour 2021 pour l’axe 2 (« mobilité multimodale »).

Le rapporteur sera vigilant : l’AFITF connait des difficultés à honorer ses engagements en raison d’une baisse de ses recettes. Les crédits du PITE sont quant à eux fléchés à 75 % vers l’axe 1 (« cohésion des territoires : aménagement durable, structuration et dynamiques territoriales, accès aux services »).

En 2021, Il est doté de 12 millions d’euros en AE (– 4,8 millions d’euros par rapport à la LFI 2020) et 11,4 millions d’euros en CP (+ 3,9 millions d’euros par rapport à la LFI 2020). La baisse en AE s’explique par un redéploiement des crédits initialement destinés au plan d’investissement dans les compétences vers le plan illettrisme. La progression des CP est conforme au tendanciel pluriannuel établi avec les ministères contributeurs pour le paiement des mesures du CCT.

F.   des financements pour la reconquÊte de la qualitÉ des cours d’eau en Pays de la Loire qui se font attendre

Le plan de reconquête de la qualité des cours d’eau en Pays de la Loire s’inscrit dans le contrat d’avenir des Pays de la Loire, signé en février 2019 par le Premier ministre et la Présidente du conseil régional.

Comme en 2020, l’action ne porte que 60 000 euros d’autorisations d’engagement et 700 000 euros de crédits de paiement en provenance du ministère en charge de l’agriculture. De toute évidence, la logique interministérielle du PITE n’arrive pas à se concrétiser en l’absence d’engagement du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Une contribution de l’Agence de l’eau de Loire Bretagne est aussi attendue.

G.   La nouvelle action du service d’incendie et de secours À Wallis-et-Futuna

Le programme 162 s’enrichit d’une nouvelle action en 2021 consacrée au service d’incendie et de secours à Wallis-et-Futuna. La situation financière des trois circonscriptions territoriales des deux îles (Uvea pour Wallis, Sigave et Alo pour Futuna) ne leur permet pas de répondre aux besoins croissants pour les missions de sécurité civile de secours et de gestion de crises. La dotation de 1,3 million d’euros en AE/CP est inscrite dans le programme 162 à titre provisoire en l’attente d’une révision du statut qui attribuera la compétence à l’assemblée territoriale.

III.   Une nouvelle augmentation des crédits allouÉs à la politique de la ville en 2021

Le programme 147 Politique de la ville mobilise des crédits spécifiques, dans l’objectif de réduire les fractures socio-économiques qui touchent les 1 514 quartiers prioritaires de la ville (QPV) situés dans 859 communes urbaines dont la liste a été fixée par le décret n° 2014-1751 du 30 décembre 2014. Le programme 147 est peu représentatif de l’ensemble des efforts déployés pour les quartiers prioritaires par les différentes politiques publiques concernées. Le tableau ci-après retrace l’évolution des crédits du programme entre 2019 et 2021.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS 2019-2021 du programme 147 Politique de la ville

(en millions d’euros)

 

Exécution 2019

LFI 2020

PLF 2021

Évolution LFI 2020-PLF 2021 en valeur absolue

Évolution LFI 2020-PLF 2021

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action n° 1 : Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville

318,8

318,8

417,6

417,6

444,6

444,6

+27

+27

+6,5 %

+6,5 %

Action n° 2 : Revitalisation économique et emploi

80,7

80,7

32,9

32,9

36,8

36,8

+3,9

+3,9

+11,9 %

+11,9 %

Action n° 3 : Stratégie, ressources et évaluation

47,9

49,6

18,9

18,9

18,9

18,9

0

0

0 %

0 %

Action n° 4 : Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie

24,3

24,3

0

25

15

15

+15

-10

-

-40,0 %

Total programme 147

471,6

473,3

469,4

494,4

515,3

515,3

+45,9

+20,9

+9,8 %

+4,2%

Source : documents budgétaires, Commission des finances.

Après une augmentation de 81,1 millions d’euros en LFI 2019 par rapport à la LFI 2018 au titre des engagements pour la Mobilisation nationale pour les habitants des quartiers stabilisée en LFI 2020, les crédits du programme 147 augmentent à nouveau dans le PLF 2021 de 45,9 millions d’euros en AE (+ 9,8 %) et de 20,9 millions d’euros en CP (+ 4,2 %).

Cette augmentation est expliquée par les évolutions spontanées et mesures nouvelles suivantes :

 la montée en puissance des cités éducatives (+ 17 millions d’euros en CP) ;

 le financement de 1 514 adultes-relais supplémentaires en 2021 pour un nombre total de postes pouvant être pourvus de 6 514 (+ 10 millions d’euros en CP) ;

 le renforcement du soutien à l’établissement pour l’insertion dans l’emploi (+ 4 millions d’euros en CP) ;

 la diminution du coût de la compensation des exonérations de charges sociales en zones franches urbaines (– 4,1 millions d’euros en CP) ;

 la baisse des financements de l’État à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) pour sa contribution au Nouveau programme national de renouvellement urbain (– 10 millions d’euros).

A.   une action particuliÈre pour les quartiers prioritaires enclenchÉe dÈs le printemps 2020

Les populations des quartiers prioritaires ont particulièrement souffert de la crise sanitaire et des mesures de confinement. Les inégalités économiques, sociales et surtout scolaires se sont creusées à cette occasion. Une action pendant le confinement et durant l’été a été menée notamment pour les plus jeunes qui n’ont pas pu aller à l’école durant cette période.

1.   Le plan d’urgence pour les jeunes des quartiers

Un plan d’urgence de 15 millions d’euros financé à partir de redéploiements de crédits en gestion a permis de parer à la fermeture des établissements scolaires :

 environ 10 millions d’euros ont été dégagés pour acheter du matériel numérique et équiper les jeunes qui en avaient besoin pour pouvoir suivre l’enseignement à distance ;

 le plan « 1 000 livres dans les cités éducatives » a été doublé pour les quartiers prioritaires concernés par le dispositif ;

 les initiatives des collectifs associatifs spécialisés pour renforcer le programme de mentorat ont été soutenues.

2.   Le dispositif « Vacances apprenantes »

86,5 millions d’euros ont été ouverts en LFR 3 sur le programme 147, soit 17 % des crédits de la LFI pour 2020, dévolus au dispositif « vacances apprenantes » destiné en grande partie aux jeunes des quartiers prioritaires.

Le dispositif comprend trois volets dont un ciblé qui concerne plus particulièrement les jeunes des quartiers prioritaires : le volet « colonies de vacances apprenantes » devait permettre de financer le séjour de 250 000 enfants issus de familles défavorisées dont 200 000 résidants en QPV. Il paraissait a priori difficile de faire connaître en un temps si limité le dispositif aux familles des quartiers. Les résultats le confirment : sur les 108 654 places de colos apprenantes labellisées à l’échelon national, 35 811 enfants venant des QPV ont pu bénéficier du dispositif.

 

Englobant le dispositif « Vacances apprenantes », l’opération « Quartiers d’été 2020 » a été dotée de 110 millions d’euros (crédits de la LFR 3 non utilisés, dégels de la réserve de précaution, redéploiement de crédits) et complète le volet « vacances apprenantes » par un ensemble de mesures :

– création de 1 514 postes adultes-relais supplémentaires ;

– création de 30 France Services itinérantes pour renforcer la présence des services publics dans les quartiers prioritaires ;

– soutien aux actions civiques et de tranquillité publique ;

– développement des activités culturelles et sportives,

– mobilisation pour l’emploi (apprentissage, lancement de 20 cités de l’emploi).

Sur l’ensemble des opérations, 500 000 jeunes auraient bénéficié des actions du dispositif « Quartiers d’été ». Il était difficile d’agir dans des délais si contraints et les chiffres annoncés sont honorables. Cependant, la multiplication des actions et des opérations menées dans le cadre de « Quartiers d’été » rend complexe leur lisibilité et leur évaluation par le rapporteur.

Le rapporteur salue la poursuite à l’automne de l’action engagé à l’été (« Quartiers d’automne ») pour qu’au moins 150 000 jeunes des quartiers puissent bénéficier d’activités à la fois pédagogiques et ludiques durant les vacances de la Toussaint.

3.   Le plan « Quartiers solidaires »

20 millions d’euros non consommés sur l’enveloppe « Quartiers d’été » ont permis de lancer l’opération « Quartiers solidaires » en septembre dernier. Cette enveloppe soutient l’action des petites associations de proximité dont le rôle durant la crise sanitaire a été unanimement salué. Quatre domaines sont plus particulièrement visés : l’éducation et la lutte contre la fracture numérique dans la continuité de l’action initiée au printemps, la santé et l’aide alimentaire malmenées dans les quartiers à l’occasion du confinement, l’insertion professionnelle et la culture.

« La relance doit être solidaire » selon les mots de la ministre Nadia Hai. Si la somme de 20 millions d’euros est significative, le rapporteur craint un saupoudrage des crédits qui ne permette pas de mener des actions structurantes dans ces quartiers. Il faut également être plus vigilant à ce que les crédits octroyés par les préfets bénéficient à des structures suffisamment robustes pour poursuivre une action dans la durée.

B.   une augmentation des crÉdits du programme 147 qui accompagne un plan de relance dont profiteront les quartiers prioritaires

Le soutien aux quartiers prioritaires est une priorité de ce Gouvernement. La nécessité de lutter contre les séparatismes, l’extrémisme et la ghettoïsation passe par un renforcement de l’instruction et de l’éducation : c’est à ce prix que nos jeunes pourront goûter à la promesse d’émancipation de la République. Mais cela passe aussi par la formation, l’emploi et le renforcement de la cohésion sociale dans nos quartiers.

1.   De nombreuses mesures du plan de relance concernent les habitants des quartiers prioritaires

Le plan de relance ne contient pas d’action dédiée et séparée pour les habitants des quartiers prioritaires. On peut le regretter mais de nombreuses mesures leur bénéficieront directement ou indirectement.

a.   Les dispositifs fléchés

Alors que le taux de chômage est deux fois et demie plus élevé dans les QPV que dans le reste du territoire, la lutte pour l’emploi et la formation constitue un axe majeur du plan de relance. Un certain nombre de mesures sont directement ciblées en direction des jeunes habitants des QPV dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution » (l’action 2 Jeunes du programme 364 Cohésion) :

– l’accompagnement à la création d’activité : 15 millions d’euros doivent permettre de compléter le programme « entrepreneuriat pour tous » financé par le Plan d’investissement dans les compétences (PIC) pour aider les structures d’aide à la création d’activité des résidents des QPV ;

– le doublement du nombre de jeunes des QPV et des zones de revitalisation rurale les plus défavorisés accompagnés vers les métiers du sport et de l’animation ;

– la création des emplois francs « plus » qui permet de majorer l’aide du dispositif emplois francs par l’aide à l’embauche prévue pour le recrutement de tout jeune de moins de 26 ans jusqu’en janvier 2021 ;

– la montée en puissance des cordées de la réussite (établissements d’enseignement supérieur implantés dans les QPV et les ZRR) qui vise à atteindre 200 000 élèves bénéficiaires contre 90 000 actuellement pour un coût de 10 millions d’euros supplémentaires ;

– la revitalisation des internats d’excellence (50 millions d’euros en AE et 20 millions d’euros en CP) pour réhabiliter et créer de nouvelles places.

Au-delà des dispositifs pour les jeunes, l’action 7 Cohésion territoriale du programme 364 prévoit l’implantation de 150 Fabriques de territoires dans les QPV pour résorber la fracture numérique et créer des tiers lieux qui favorisent la rencontre et les échanges : 33 millions d’euros en AE et 16,5 millions d’euros en CP sont partagés à égalité entre les QPV et les territoires ruraux.

10 millions d’euros sont dévolus pour développer le projet d’agriculture urbaine dans les zones du NPNRU dans le cadre du programme « quartiers fertiles ».

Enfin, dans le cadre du plan de soutien à l’export (action 3 du programme 363 Compétitivité), Business France devra déployer plusieurs centaines de jeunes issus des QPV en VIE (volontariat international en entreprise) à l’étranger.

b.   Les dispositifs non fléchés

Les mesures à destination de l’emploi et de la formation des jeunes non dédiées (création de 60 000 parcours emplois compétences, augmentation de 50 % des places en garantie jeune, etc.) profiteront tout particulièrement aux jeunes des quartiers prioritaires. Le rapporteur rappelle l’importance de la politique de l’emploi pour les QPV.

Zoom sur la politique de l’emploi pour les QPV

L’objectif de réduire les écarts de moyens dédiés à l’accès à l’emploi entre les QPV et le reste du territoire national à conduit à la signature d’une convention entre les ministères en charge de l’emploi, de la ville et le service public de l’emploi pour la période 2016‑2020. Celle-ci est structurée autour des trois axes suivants :

– assurer la présence dans les quartiers et l’adaptation des services publics de l’emploi aux besoins de leurs habitants ;

– renforcer le pilotage et l’animation du volet emploi et développement économique des contrats de ville ;

– mobiliser les politiques de l’emploi en faveur des habitants des quartiers, en particulier les jeunes, à travers la fixation de parts cibles de résidents des QPV dans les principaux dispositifs de l’emploi :

– contrats aides - Parcours emploi compétences (objectif de 15 % en 2019, taux réalisé de 14 %) ;

– Garantie jeunes (objectif de 20 % en 2019, taux réalisé de 23 %) ;

– parcours d’accompagnement adapté vers l’emploi et l’autonomie (objectif de 13 % en 2019, taux réalisé de 18 %) ;

– EPIDE (objectif de 35 % en 2019, taux réalisé de 29 %) ;

– école de la 2ème chance (objectif de 40 % en 2019, taux réalisé de 30 %).

En outre, la Mobilisation nationale pour les habitants des quartiers a conduit à renforcer l’action pour l’emploi dans les quartiers au moyen de différents dispositifs :

– la création du dispositif emplois francs en 2018 généralisé à l’ensemble du territoire depuis le 1er janvier 2020 qui consiste à accorder une aide à un employeur pour le recrutement d’un demandeur d’emploi résidant en QPV ;

– le fléchage de 2 milliards d’euros du plan d’investissement dans les compétences qui vise à former 150 000 jeunes sans qualification et 150 000 chômeurs résidant dans les quartiers prioritaires d’ici 2022 ;

– la lutte contre l’illettrisme ;

– le Pacte avec les quartiers pour toutes les entreprises.

D’autres mesures transversales bénéficieront particulièrement aux quartiers prioritaires en raison de leurs caractéristiques :

– l’enveloppe de 500 millions d’euros pour la réhabilitation lourde et la rénovation énergétique des logements sociaux profitera aux QPV qui concentrent une part importante des logements sociaux de notre pays ;

– l’enveloppe de 3,7 milliards d’euros en AE pour 2021 à destination de la rénovation thermique des bâtiments publics pourra profiter aux équipements publics en QPV des collectivités territoriales. Le responsable de programme a assuré que les services déconcentrés de l’État seront attentifs aux territoires les moins bien dotés, notamment les QPV dont les équipements publics sont parfois inadaptés ou vétustes.

2.   Un soutien renforcé à l’éducation, la formation et la cohésion sociale sur le programme 147

Outre la consolidation des crédits supplémentaires accordés au programme 147 en LFI 2019 au titre de la Mobilisation nationale pour les habitants des quartiers, le PLF 2021 propose une augmentation substantielle des crédits des cités éducatives, une augmentation du budget de l’EPIDE et le financement des nouveaux postes ouverts d’adultes-relais.

a.   La montée en puissance des cités éducatives

Les moyens alloués aux cités éducatives passent de 31 millions d’euros en LFI 2020 à 48 millions d’euros dans le PLF 2021, soit une hausse de plus de 50 %. Mises en place de façon expérimentale depuis la rentrée 2019, les cités éducatives ont pour mission d’assurer et d’améliorer la continuité éducative pendant, à côté et en dehors du temps scolaire. Le projet est animé par une coordination nationale désignée par les ministres de la cohésion des territoires, de la ville et de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Il soutient financièrement les stratégies locales d'alliance éducative sélectionnées et labellisées.

En septembre 2019, 80 cités éducatives ont été labellisées pour environ 500 000 élèves concernés, avec des moyens devant atteindre 100 millions d’euros sur la période 2019-2022 en provenance du programme 147. Le ministère en charge de l’éducation nationale met également à disposition des moyens humains : un principal de collège chef de file et un chef de projet opérationnel mobilisés dans chaque cité éducative. L’expérimentation est appuyée et suivie par le comité national d’orientation et d’évaluation des cités éducatives, présidé par Sylvie Charrière, députée de la 8ème circonscription de Seine-Saint Denis.

Suite à la notification des enveloppes de crédits pour chaque cité éducative en février 2020 (en moyenne 1 million d’euros par cité éducative pour les 3 ans de l’expérimentation), les acteurs locaux ont élaboré des conventions-cadres triennales pour la période 2020 à 2022.

La dotation supplémentaire en 2021 devra permettre notamment :

– d’étendre le dispositif à 40 nouvelles structures pour atteindre le nombre de 120 cités éducatives ;

– de concentrer les moyens sur les quartiers les plus en difficultés et qui nécessitent des moyens humains particuliers de médiation, d’encadrement, d’animation, de prévention et de formation ;

– de soutenir de nouvelles actions pédagogiques nationales.

Le rapporteur regrette l’absence d’indicateur de performance pour ce dispositif appelé à monter en puissance, d’autant qu’il n’est pas toujours facile d’appréhender les actions concrètes mises en œuvre dans le cadre du dispositif. Un indicateur relatif aux cités éducatives pourrait remplacer l’indicateur 2.1 existant « Évolution des chances de réussite scolaire des élèves scolarisés en collège REP+ dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) » qui est beaucoup trop général et ne permet pas d’évaluer les politiques publiques financées par le programme 147. Cela pourrait être le cas selon le responsable de programme qui évoque un indicateur afférent au « taux d'entrée en seconde générale et technique des collégiens des cités éducatives comparé à la moyenne nationale » dans le PLF 2022, ce que le rapporteur juge très positivement.

b.   L’augmentation de 1 514 postes d’adultes-relais

Dans le cadre du plan « Quartiers d’été » 1514 postes supplémentaires d’adultes-relais ont été créés : le nombre de postes ouverts est passé de 4 000 à 6 514 postes de 2018 à 2021 pour un financement qui atteint cette année 93 millions d’euros, en augmentation de 10 millions d’euros par rapport à la LFI 2020.

Le rapporteur a pu constater dans sa circonscription l’utilité du dispositif pour la population, les structures bénéficiaires (les associations constituant environ trois quarts des employeurs) et les adultes qui occupent ces postes.

Créé en 1999, le dispositif est encadré par les articles D. 5134-145 et suivants du code du travail ; une convention de trois ans renouvelable doit être signée entre l’organisme bénéficiaire, le préfet et le délégué départemental de l’ANCT pour l’ouverture et le financement du poste. Les postes adultes-relais sont réservés aux personnes âgées d’au moins 30 ans, sans emploi et résidant dans un QPV pour des activités permettant de renforcer la cohésion et le lien social :

– la régulation et la prévention des conflits ;

– le développement de la vie de quartier et de la cohésion sociale ;

– la mise en relation des usagers avec les services publics.

Le rapporteur note cependant une sous-exécution budgétaire chronique et significative du dispositif depuis plusieurs années, le nombre effectif d’ETPT réalisés par an étant largement inférieur au nombre de postes ouverts. Le rapporteur espère donc que cette hausse budgétaire ne soit pas un simple effet d’affichage politique et que les crédits seront ainsi consommés en 2021.

Conscient de cette difficulté, le responsable de programme indique que la sous-exécution est due à plusieurs raisons :

– la vacance frictionnelle (l’aide n’est pas versée lorsque le poste n’est pas occupé) ;

– les délais d’identification des associations et des cofinanceurs pour la création d’un poste ;

– les délais de recrutement de l’adulte après signature de la convention et la création du poste ;

– le faible vivier de la main-d’œuvre, les postes de médiation sociale demandant des compétences particulières.

Face à ce constat, une mobilisation forte des préfets de département pour un déploiement rapide a été demandée. L’environnement économique moins favorable pourrait également permettre un recrutement plus rapide. Enfin, une réflexion visant à assouplir les critères d’éligibilité relatifs à l’âge est en cours.

c.   L’augmentation de 4 millions d’euros du budget de l’EPIDE

L’établissement pour l’insertion dans l’emploi (EPIDE) est financé à hauteur de 31,9 millions d’euros dans le PLF 2021, en augmentation de 4 millions d’euros par rapport à 2020. Avec la baisse des compensations des exonérations de charges sociales en ZFU, la dotation de l’action 2 est maintenue à son niveau de 2020 (36,8 millions d’euros).

L’EPIDE organise des formations et des actions d’insertion au profit de jeunes sans diplôme, sans titre professionnel ou en voie de marginalisation sociale, ayant souscrit un contrat dit de « volontariat pour l’insertion ». Il leur offre une remise à niveau scolaire ainsi qu’un accompagnement social et professionnel et les héberge dans le cadre d’un internat de semaine. L’offre de service de l’EPIDE repose sur l’articulation d’une vie collective dans un cadre structurant d’inspiration militaire.

L’établissement dispose de 19 centres implantés en France métropolitaine et propose 2 805 places, soit une progression de 35 % de ses capacités d’accueil par rapport à 2014. En 2019, 29 % des jeunes intégrés provenaient des quartiers prioritaires de la politique de la ville : l’augmentation du financement du programme 147 doit permettre de se rapprocher de la cible de 45 % des élèves provenant des quartiers prioritaires en 2021. L’ouverture d’un centre en Seine‑Saint-Denis devrait permettre d’augmenter ce taux.

Le taux de sortie positive (emploi ou formation) est de 52 %, ce qui n’est pas négligeable compte tenu de la nature du public. Le taux d’occupation atteint 71 %, un niveau relativement faible expliqué par l’abandon de certains jeunes en cours d’année.

La rapporteure spéciale de la mission Emploi et Travail, Marie-Christine Verdier-Jouclas, a confié à la Cour des comptes une mission d’enquête qui porte sur l’EPIDE sur la base du 2° de l’article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. Le rapporteur spécial sera attentif aux conclusions de cette mission, attendues en 2021.

C.   Une accÉlÉration attendue du nouveau programme national de renouvellement urbain (npnru)

L’action n° 4 Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie porte la contribution de l’État au financement de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) dans le cadre de la mise en œuvre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), instauré par la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

1.   Une trajectoire de financement du NPNRU qui diverge fortement des engagements pris par l’État en 2018

Le budget du financement de l’ANRU pour la mise en œuvre du NPNRU est passé de 5 milliards d’euros prévus dans la loi de 2014 à 10 milliards d’euros, après l’engagement de l’État, inscrit à l’article 132 de la loi de finances pour 2018, de contribuer à hauteur de 1 milliard d’euros. Sur la période 2018-2022, l’État a prévu un engagement de 200 millions d’euros.

Après une inscription de 15 millions d’euros en CP en 2018 et de 25 millions d’euros en 2019 conformément à la trajectoire dessinée, le Gouvernement maintient l’effort à 25 millions d’euros en 2020 contre 35 millions d’euros prévus. L’écart s’accélère cette année puisque 15 millions d’euros en CP sont inscrits contre 50 millions d’euros prévus par la trajectoire de 2018.

Écart entre l’engagement de l’État pour le financement du npnru
de 2018 à 2022 et la trajectoire réelle constatée

(en millions d’euros)

Source : documents budgétaires, commission des finances.

Cet écart s’explique principalement par le niveau élevé de trésorerie de l’ANRU qui atteint au 1er octobre 2020 835 millions d’euros. Ce niveau témoigne du retard pris dans le déploiement du programme malheureusement amplifié par la crise sanitaire et le report des élections municipales. 85 % des projets sont cependant aujourd’hui validés pour 10,3 milliards de concours financiers attribués.

Évidemment, un financement supérieur de l’État ne paraît pas utile dans ce contexte. Il n’en reste pas moins nécessaire de disposer d’un nouvel échéancier des paiements de l’État : plus les financements de l’État seront retardés, plus la marche à franchir sera élevée pour tenir les engagements de l’État alors qu’un pic dans les décaissements est attendu en 2025-2026.

Le rapporteur note que le NPNRU ne fait pas l’objet d’un abondement particulier dans le cadre du plan de relance, ce qui avait été pourtant demandé par plusieurs acteurs. L’enveloppe dédiée à la rénovation thermique des bâtiments publics pourrait permettre de réintégrer la rénovation d’équipements publics dans certains projets, exclus au préalable faute de moyens.

Le rapporteur s’interroge également sur les conséquences d’une nouvelle ponction de 1 milliard d’euros de la trésorerie d’Action logement adoptée en première partie de la LFI 2021 et les projets évoqués de refonte des ressources du groupe pour le financement du NPNRU.

 

 

2.   Un nouvel objectif de performance bienvenu

Le NPNRU fait pour la première fois l’objet de deux indicateurs de performance dans le PAP :

– l’indicateur 4.1 qui suit la reconstitution de l’offre de logements locatifs sociaux dans le cadre du NPNRU ;

– l’indicateur 4.2 qui suit l’amélioration des logements locatifs sociaux dans le cadre du NPNRU.

Le rapporteur salue la création de ces deux indicateurs, d’autant plus que l’évaluation des programmes de rénovation urbaine concernant ses différents aspects (mixité sociale, dynamisation économique, sécurité, etc.) est largement insuffisante selon la Cour des comptes ([2]). Ils permettent de constater l’action efficace de l’ANRU pour la mixité sociale puisque l’objectif de reconstitution des logements sociaux à 80 % hors QPV est respecté.


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   EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa première réunion du vendredi 23 octobre 2020, la commission a examiné les crédits de la mission Cohésion des territoires.

Le compte rendu de cette réunion sera bientôt disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

Suivant les recommandations des deux rapporteurs, la commission a adopté les crédits de la mission, après avoir adopté l’amendement de crédit N°II-CF1124 qui transfère 10 millions d’euros en AE et en CP du programme Politique de la ville vers le programme Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat. L’objectif est de financer un dispositif de soutien aux propriétaires dont les logements ont subi des dommages causés par les mouvements de terrain différentiels.

 

 


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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

– Mme Catherine Lacaze, secrétaire générale

– M. Xavier Giguet, directeur délégué

Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU)

– M. Nicolas Grivel, directeur

– M. Damien Ranger, directeur des relations institutionnelles

Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

– Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre, chargée de la Ville

Direction générale des collectivités locales (DGCL)

– M. Stanislas Bourron, directeur général

– M. Olivier Benoist, sous-directeur à la cohésion et l'aménagement du territoire

Direction de la modernisation et de l'administration territoriale (DMAT)

– Préfet Olivier Jacob, directeur

– M. Jean-Gabriel Delacroy, sous-directeur de l’administration territoriale

 

 

 


([1]) Taux de 5,5 % de TVA pour certaines opérations relatives à l’accession sociale à la propriété à usage de résidence principale.

([2]) Cour des comptes, avril 2020, L’agence nationale de rénovation urbaine (ANRU) et la mise en œuvre des programmes de renouvellement urbain (PNRU et NPNRU).