N° 3741

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 janvier 2021

 

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française, la région flamande et la région wallonne relative à l’aménagement de la Lys mitoyenne entre Deûlémont en France et Menin en Belgique,

 

PAR M. Jean-Paul LECOQ

Député

——

 

 

ET

 

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION
DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

 

 

 Voir les numéros :

Assemblée nationale : 3244.

Sénat : 222, 639, 640 et T.A. 126 (20192020).


 


—  1  —

SOMMAIRE

___

 Pages

introduction

I. Un amÉnagement emblÉmatique du projet de liaison fluviale À grand gabarit entre la Seine et L’escaut

A. la constitution d’un rÉseau de voies navigables À grand gabarit dans lE nord-ouest de l’Europe

1. Les enjeux du réseau transeuropéen de transports

2. Le projet Seine-Escaut, un projet prioritaire du corridor « Mer du Nord – Méditerranée »

B. L’augmentation nÉcessaire du gabarit de la Lys mitoyenne

1. La Lys mitoyenne, point de passage stratégique et principal goulet d’étranglement de l’axe Seine-Escaut

2. Une augmentation justifiée par des considérations économiques et environnementales

3. Un montant important de cofinancements européens

C. Face À la concurrence croissante des pays du Benelux, l’impÉratif renforcement de la compÉTITIVITÉ du secteur fluvial français

1. La profonde évolution des échanges maritimes et fluviaux engendrée par le projet Seine-Escaut impose une réflexion stratégique sur la relance du secteur fluvial français

a. Des investissements européens importants, dont la France doit savoir tirer profit

b. Un renforcement des filières du transport fluvial est nécessaire pour affronter la concurrence des pays du Benelux

2. Un renforcement de la position géostratégique des ports du nord de la France dans le cadre du Brexit

II. la prÉsente convention fixe un cadre au financement et à la rÉalisation du projet d’amÉnagement de la Lys mitoyenne

A. Une coopÉration franco-belge exemplaire

1. La densité de la coopération franco-belge en matière de transport fluvial

2. L’aménagement de la Lys mitoyenne, fruit de cette coopération transfrontalière

B. Une ingÉnierie complexe

1. L’organisation et l’objet des travaux de mise au grand gabarit

2. Le financement

a. Les travaux cofinancés par les parties et la clé de répartition

b. Les travaux financés exclusivement par chacune des parties

3. Le calendrier envisagé

4. L’exploitation et l’entretien

C. un soin particulier apporté À la compensation de l’impact environnemental du projet

CONCLUSION

EXAMEN en commission

Annexe n°  1 : texte adopté par la commission

annexe n° 2 : Liste des personnes auditionnÉes

 


 

   introduction

 

L’Assemblée nationale est saisie du projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le gouvernement de la République française, la région flamande et la région wallonne relative à l’aménagement de la Lys mitoyenne entre Deûlémont, en France, et Menin, en Belgique.

Son principal objet est l’élargissement du gabarit de cette voie d’eau de 16,5 kilomètres, afin qu’il ne constitue plus un goulet d’étranglement dans ce passage stratégique entre la France et la Belgique, et qu’il permette la circulation de bateaux capables de transporter jusqu’à 4 400 tonnes de marchandises, contre un maximum de 1 500 tonnes actuellement.

Au niveau local, l’intérêt du projet est indéniable, tant sur le plan économique qu’écologique. D’abord, le projet vise à décongestionner la métropole de Lille en favorisant le report modal de la route vers le fluvial. Ensuite, l’adaptation du chenal de navigation à l’augmentation attendue du trafic se justifie sur le plan économique, et la rentabilité du projet semble garantie indépendamment même de son inscription dans le projet européen de liaison Seine-Escaut.

Au niveau européen, le projet revêt un caractère stratégique prioritaire : il est emblématique du projet de liaison entre le bassin de la Seine et celui de l’Escaut, qui vise à construire un réseau de voies navigables à grand gabarit intégrant la Seine à la « Banane bleue », le cœur battant de l’Europe fluviale situé dans les pays du Benelux, lui-même connecté au bassin du Rhin. Le Pacte vert européen accentue encore le caractère prioritaire du projet Seine-Escaut pour la Commission européenne, comme en témoignent les niveaux élevés de co-financements européens pour tous les maillons de cette grande région navigable intégrée du nord-ouest de l’Europe.

En faisant converger intérêts économiques et environnementaux, le développement du fret fluvial constitue, en effet, un axe privilégié de la relance « résiliente et durable » souhaitée par la Commission. Le transport fluvial est le mode de transport le plus capacitaire : un convoi fluvial de 5 000 tonnes, c’est-à-dire de 150 mètres de long, équivaut à 250 camions ou à quatre trains. C’est également le transport le plus économique à la tonne transportée, avec un prix trois ou quatre fois moindre que le transport routier, et le moins polluant : il est cinq fois moins émetteur de CO2 que le transport routier.

Votre rapporteur est donc favorable à l’adoption du présent projet de loi, qui s’inscrit dans le cadre de la relance du secteur fluvial au niveau européen et encouragera le développement d’un mode de transport moins polluant que le transport routier.

Cependant, au niveau national, l’examen de cette convention doit être l’occasion de s’interroger sur l’impact du projet Seine-Escaut sur le secteur fluvial et maritime français. Si la Seine fait l’objet de nombreux investissements européens visant à favoriser le fret fluvial, il n’en reste pas moins que l’intégration des bassins de la Seine et de l’Escaut risque de renforcer la position dominante des ports du Benelux, notamment Anvers et Rotterdam, comme principales portes d’entrée et de transformation des marchandises en Europe.

Il est donc impératif de renforcer le secteur fluvial français et de structurer ses filières, afin qu’ils puissent tirer profit de ces investissements et de ces nouvelles voies navigables et qu’ils ne subissent pas de plein fouet la concurrence croissante des pays du Benelux. À l’heure où la crise de la Covid-19 a révélé le caractère stratégique de notre sécurité d’approvisionnement et légitimé les politiques de relocalisations industrielles, ce débat, qui dépasse largement le champ de la présente convention, mérite d’être engagé au sein de la commission des affaires étrangères.

 

 

 


—  1  —

 

I.   Un amÉnagement emblÉmatique du projet de liaison fluviale À grand gabarit entre la Seine et L’escaut

A.   la constitution d’un rÉseau de voies navigables À grand gabarit dans lE nord-ouest de l’Europe

1.   Les enjeux du réseau transeuropéen de transports

Le réseau transeuropéen de transport (RTE-T) est l’un des principaux programmes de l’Union européenne en matière d’infrastructures de transports. Il vise à améliorer la mobilité des biens et des personnes au sein de l’Union, renforcer l’intégration des réseaux de transports et développer les modes de transports les moins polluants, en encourageant le report modal. Le réseau est structuré autour de trois axes, distingués selon leur niveau de priorité :

-       le réseau global représente l’ensemble du réseau, constitué des infrastructures multimodales d’importance nationale et européenne qui devront être mises en conformité d’ici à 2050 ;

-       le réseau central représente une partie du réseau global, composée des infrastructures les plus structurantes devant être modernisées d’ici à 2030, afin de réduire les engorgements et d’éliminer les barrières entre les réseaux de transports des États membres ;

-       au sein du réseau central, neuf corridors supportant les principaux flux de transports au sein de l’Union ont été définis et font l’objet d’investissements prioritaires destinés à favoriser l’intégration modale, l’interopérabilité, le développement des infrastructures pour les tronçons transfrontaliers, et la réduction des goulets d’étranglement. Cinq de ces neuf corridors traversent la France.

Les investissements concernés sont soutenus par les subventions européennes du volet transport du mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE), dont le taux de cofinancement varie de 20 % à 50 % des coûts éligibles pour les travaux et études.

Une révision du règlement relatif au RTE-T doit être proposée début 2021. Elle modifiera la cartographie du réseau central et du réseau global, afin notamment de tenir compte du Brexit.


        Carte réalisée avant le Brexit

2.   Le projet Seine-Escaut, un projet prioritaire du corridor « Mer du Nord – Méditerranée »

Le projet de réalisation de la liaison fluviale transfrontalière Seine-Escaut, longue de 1 100 kilomètres, vise à créer un réseau de voies navigables à grand gabarit entre la Belgique et les Hauts-de-France, en reliant la Seine au bassin de l’Escaut, ainsi qu’à d’autres grands bassins fluviaux européens tels que ceux du Rhin et de la Meuse. 

L’objectif est tant économique qu’écologique : d’une part, le projet permettra de connecter les principaux centres logistiques, industriels et commerciaux, les grandes agglomérations, les ports de la mer du Nord et de la Manche (Gand, Anvers, Dunkerque, Rouen, Le Havre) et leur arrière-pays, ce qui favorisera les échanges ; de l’autre, l’amélioration du réseau favorisera le report d’une partie des flux de la route vers la voie d’eau, tout en développant la multimodalité avec les autres modes de transports, notamment le rail.

Pour toutes ces raisons, la liaison Seine-Escaut est le principal projet européen de développement dans le domaine du transport fluvial et bénéficie, à ce titre, d’un soutien financier de l’Union européenne de 634 millions d’euros dans le cadre du mécanisme d’interconnexion pour l’Europe 2014-2020. La liaison Seine-Escaut est, depuis 2004, l’un des trente projets prioritaires du réseau transeuropéen de transports. La consistance des opérations d’aménagement est fixée dans la décision d’exécution de la Commission européenne du 27 juin 2019, qui fixe un échéancier précis des opérations requises d’ici à décembre 2030. L’essentiel des voies navigables concernées étant déjà en exploitation, la réalisation du projet est graduelle. De nombreux travaux sont déjà en cours, tant côté belge que français, comme la traversée de Tournai en Wallonie, ou la rénovation et l’allongement du second sas des écluses de Méricourt, sur la Seine.

C:\Users\cdollone\AppData\Local\Microsoft\Windows\INetCache\Content.Outlook\0WARUE4Z\carte seine Escaut.jpg
Carte du réseau Seine-Escaut

Source : Voies navigables de France

B.   L’augmentation nÉcessaire du gabarit de la Lys mitoyenne

1.   La Lys mitoyenne, point de passage stratégique et principal goulet d’étranglement de l’axe Seine-Escaut

Entre la France et la Belgique, les principaux axes transfrontaliers pour le transport fluvial de marchandises sont aujourd’hui la Lys et l’Escaut. L’aménagement de la Lys est un projet prioritaire de la liaison Seine-Escaut, car elle devra assurer la liaison entre le canal Seine-Nord-Europe et les ports de la mer du Nord. Elle permettra notamment de connecter directement l’agglomération lilloise avec l’agglomération de Gand, tout en offrant une alternative à l’Escaut permettant le contournement de la ville de Gand.

Le caractère stratégique de la navigation sur la Lys impose l’augmentation du gabarit de cette dernière. Cette voie fluviale constitue en effet aujourd’hui l’un des principaux goulets d’étranglement du trafic de l’axe Seine-Escaut, en raison de la présence de sections de plus grand gabarit à l’amont comme à l’aval. Ainsi, la présente convention vise à augmenter le gabarit de la Lys, de manière à permettre le passage de convois fluviaux de classe Va à double sens et Vb en alternat (bateaux de 4 400 tonnes), au lieu de convois de classe IV dans la configuration actuelle (bateaux de 1 500 tonnes).

Classification européenne normalisée des bateaux

Classe
CEMT

Longueur
(m)

Largeur
(m)

Tirant d’eau (m)

Tonnage
(t)

I

38,5

5,05

1,80 – 2,20

250 – 400

II

50 – 55

6,60

2,50

400 – 650

II

67 – 80

9,50

2,50

650 – 1000

IV

80 – 85

9,50

2,50

1000 – 1500

Va

95 – 110

11,40

2,50 – 4,50

1500 – 3000

Vb

172 – 185

11,40

2,50 – 4,50

3200 – 6000

2.   Une augmentation justifiée par des considérations économiques et environnementales

Les acteurs du secteur fluvial et les autorités françaises, flamandes et wallonnes s’accordent sur le besoin d’améliorer la capacité du réseau, afin d’absorber l’accroissement du trafic dans la région Hauts-de-France. Selon les données recueillies par Voies navigables de France dans le cadre de la préparation du dossier d’enquête publique relatif à l’aménagement de la Lys mitoyenne, le trafic fluvial sur la Lys mitoyenne était de 5 millions de tonnes en 2014 (dont 25 % de produits agricoles et 20 % de matériaux de construction), soit l’équivalent de 330 000 camions, sur la base d’un chargement moyen de 15 tonnes. Sur la période 2004-2013, le trafic fluvial dans le périmètre du Nord–Pas-de-Calais avait crû de 33 %. La capacité théorique de cet axe est de 8 millions de tonnes par an, mais les variations saisonnières du trafic conduisent, dix jours par an, à des situations de saturation, lorsque le trafic moyen passe de 35 bateaux à 80 bateaux par jour.

Selon les études socio-économiques menées dans le cadre de l’enquête publique, le recalibrage de la Lys mitoyenne, combiné à l’aménagement du site de Quesnoy-sur-Deûle, qui appartient au même itinéraire et constitue également un goulet d’étranglement pour le passage des bateaux à grand gabarit, affiche une rentabilité de 7,5 % : il a donc une pertinence en lui-même, indépendamment du projet de canal Seine-Nord Europe. Avec l’intégration de la réalisation du canal Seine-Nord Europe dans le scénario de référence, cette rentabilité passe à 10 %, avec une valeur actualisée nette de 913 millions d’euros.

En outre, le report modal escompté vers la voie d’eau permettra de réduire la congestion, le bruit, les émissions de gaz à effet de serre et les polluants. Selon les estimations, la congestion routière devrait être réduite de 31 600 camions en 2030 et 90 500 camions en 2060.

3.   Un montant important de cofinancements européens

Le coût total de la mise à grand gabarit est de 140 millions d’euros.

La répartition financière entre les maîtrises d’ouvrage découle de l’application des principes exposés dans la convention. Ainsi, certains travaux sont confiés exclusivement à une partie (notamment les travaux avec un fort enjeu environnemental, dont les coûts dépendent de la réglementation applicable selon les territoires, ainsi que certains aménagements fonciers).

D’autres travaux sont cofinancés par les parties : dans ce cas, chaque partie contribue au financement du projet à hauteur de la part du kilomètre-linéaire de berges de la Lys mitoyenne incluses dans son territoire. La France finance ainsi 48 % des travaux cofinancés.

Compte tenu des cofinancements croisés sur les trois sections, le coût pour la France est de 59 millions d’euros TTC, soit un total de 46 millions d’euros de dépenses de maîtrise d’ouvrage et de 25 millions d’euros de participation aux dépenses de maîtrise d’ouvrage belge, dont il faut soustraire 12 millions d’euros de participations belges aux dépenses de maîtrise d’ouvrage française.

Les montants estimés des parties wallonne et flamande s’élèvent respectivement à 36 millions d’euros TTC et à 45 millions d’euros TTC. Il est prévu d’inscrire ces montants dans une convention entre Voies navigables de France, De Vlaamse Waterveg (Flandre) et le service public de Wallonie.

Les cofinancements européens acquis s’établissent à 5 millions d’euros. La région Haut-de-France soutient, quant à elle, ce projet inscrit au contrat de plan État-région 2015-2020 à hauteur de 20,25 millions d’euros.

Dans ce contexte, et sans prendre en compte les estimations de cofinancement au-delà de 2022, le reste à charge pour l’État serait de 33 millions d’euros.

À cet égard, il convient de préciser que les cofinancements européens au-delà de 2022 ne pourront être engagés que dans le cadre des appels à projets portant sur la période 2021-2027, soit au mieux en 2021. Sur la période 2021-2027 du cadre financier pluriannuel, le projet transfrontalier Seine-Escaut, incluant la Lys mitoyenne, pourrait être éligible à un taux maximal de 50 % du montant des travaux. La décision d’exécution de la Commission européenne du 27 juin 2019 relative au projet Seine-Escaut, approuvée par le Gouvernement, confirme le soutien de l’Europe au projet et le rend éligible au taux de cofinancement maximal sur la prochaine période. Cet acte, qui détaille les actions nécessaires jusqu’en décembre 2030, confirme le caractère prioritaire du projet pour l’Europe et garantit un soutien européen de long terme.

De même, ce n’est que dans le cadre des discussions sur la future contractualisation État-Région en matière de mobilités, applicable à compter de 2023, que pourront être précisés les éventuels engagements futurs de la région Hauts-de-France. Dans l’hypothèse d’un prolongement des taux de soutien actuels de ces acteurs, le reste à charge pour l’État serait de 12 millions d’euros.

La participation de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France est assurée, puisque, selon les informations transmises par le Gouvernement, celle-ci a inscrit un montant d’autorisations d’engagement de 12 millions d’euros pour l’opération de la Lys mitoyenne dans son budget initial pour 2020, et a adopté, lors de son conseil d’administration du 31 janvier 2020, une convention de financement en faveur de Voies navigables de France.

C.   Face À la concurrence croissante des pays du Benelux, l’impÉratif renforcement de la compÉTITIVITÉ du secteur fluvial français

1.   La profonde évolution des échanges maritimes et fluviaux engendrée par le projet Seine-Escaut impose une réflexion stratégique sur la relance du secteur fluvial français

a.   Des investissements européens importants, dont la France doit savoir tirer profit

D’après les informations fournies par le Gouvernement ([1]), les études socio-économiques menées dans le cadre du projet Seine-Escaut mettent en évidence des retombées très positives pour la compétitivité du secteur fluvial en France, qui bénéficieront également aux grands ports maritimes français (Dunkerque, mais également Rouen et Le Havre), d’autant que des investissements importants sont prévus sur l’axe Seine. De fait, la connexion du bassin de la Seine au cœur battant de l’Europe fluviale que constitue le bassin de l’Escaut et, au-delà, sa connexion au bassin du Rhin, ouvrent de nouvelles opportunités pour le transport de marchandises.

Ainsi, ces mêmes études montrent que les ports français bénéficieront de l’augmentation du trafic fluvial de conteneurs de 3 % sur le périmètre Seine-Escaut, et de 9 % pour les grands ports maritimes de Dunkerque, Rouen et Le Havre. À titre de comparaison, les mêmes études économiques prévoient une baisse relative (par rapport à la situation sans projet) du trafic de conteneurs de 6 % des ports d’Anvers, Zeebrugge, Rotterdam et Amsterdam.


Plus largement, la France s’est très bien positionnée sur les différents appels à propositions de 2014 du mécanisme pour l’interconnexion « transports » en Europe : à ce jour, 125 projets ont été financés pour un peu plus de 2 milliards d’euros de subventions européennes, sur un budget d’environ 8 milliards d’euros, ce qui en fait le premier bénéficiaire dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020. La deuxième et la troisième vague d’appels à propositions lancés en 2015 puis en 2016 ont également profité à la France, qui s’est vue attribuer respectivement 141 millions d’euros (sur une enveloppe de 1,07 milliard d’euros) et 92 millions d’euros (sur une enveloppe de 840 millions d’euros). Comme en témoignent les exemples ci-dessous, les ports et axes français ont su tirer profit de cet instrument.

b.   Un renforcement des filières du transport fluvial est nécessaire pour affronter la concurrence des pays du Benelux

Malgré ces investissements importants, l’accès au bassin de la Seine risque de renforcer l’attractivité des ports du Benelux et la position hégémonique d’Anvers et de Rotterdam comme porte d’entrée et de transformation des flux de marchandises en Europe, mouvement dont il importe de mesurer les conséquences sur la sécurité et la transparence des approvisionnements et la capacité de la France à maintenir son activité industrielle.

Les filières du transport fluvial des Pays-Bas et de la Belgique disposent, pour l’heure, d’avantages compétitifs indéniables, qui laissent craindre notamment une concentration des plateformes logistiques dans les ports du bassin de l’Escaut. Dans la perspective de l’ouverture du canal Seine-Nord, attendu en 2028, l’État doit, dans le cadre du plan de relance, joindre ses efforts à ceux des régions Hauts-de-France, Normandie et Île-de-France, pour investir dans la filière, afin notamment de développer la formation, les services de batellerie et de garantir le contrôle du foncier.

La filière du transport fluvial manque d’investissements structurels permettant d’améliorer la compétitivité hors-prix. À ce titre, l’État, les régions Haut-de-France, Île-de-France et Normandie, en s’alliant sur cet enjeu, pourraient devenir les acteurs de premier ordre et contribuer à structurer la filière privée et publique du transport fluvial et de la batellerie. La question des services à la navigation, comme le nettoyage industriel des cales permettant de mieux gérer la « cale retour » est par exemple fondamental. La question de la connaissance et de l’organisation des hinterlands est également cruciale pour être plus compétitifs.

Tout cela nécessite d’être planifié, et les acteurs publics en ont à la fois les compétences, et la légitimité. Le secteur du transport routier a su se constituer très rapidement en filière face aux menaces d’ordre économique et écologique qui pesaient sur elle. Le secteur du transport fluvial devrait faire de même afin de ne pas rater le virage écologique européen.

2.   Un renforcement de la position géostratégique des ports du nord de la France dans le cadre du Brexit

La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne a conduit à la révision du maillage le reliant aux autres États membres, en intégrant les ports et axes français du nord-ouest de la France au réseau fluvial intégré Seine-Escaut. Dans le cadre du projet de révision du règlement relatif au MIE en cours de négociation, la Commission prévoit en effet un nouveau tracé du corridor Mer du Nord – Méditerranée, qui a vocation à se substituer à la partie terrestre britannique. Dans ce cadre, les ports de Dunkerque, de Calais et Le Havre ont été intégrés au corridor Mer du Nord-Méditerranée, afin de maintenir une liaison avec l’Irlande. L’axe Seine (Paris-Rouen-Le Havre) a été également intégré au corridor Mer du Nord-Méditerranée, qui fait déjà partie du corridor Atlantique. Cela permet de renforcer la place de l’axe Seine et de ses ports dans le réseau RTE-T, et donc leur légitimité à solliciter des cofinancements au titre du MIE 2.

Il conviendra également de veiller à la bonne intégration des autres ports bretons et normands, qui pour l’heure relèvent, non de ce corridor, mais du réseau global du RTE-T. Or ils ont un positionnement stratégique dans le cadre du renforcement de la connexion maritime entre la France et l’Irlande. La révision du règlement relatif au MIE doit être l’occasion de reconnaître leur rôle dans la fluidité des échanges, le contrôle des flux de marchandises et des personnes, en les intégrant dans le réseau central, voire dans un corridor, comme l’ont proposé nos collègues Jean-Pierre Pont et Pierre-Henri Dumont dans leur résolution européenne sur les corridors maritimes, adoptée en 2019 par l’Assemblée nationale.

Plus globalement, les politiques publiques françaises de gestion maritime et fluviale se doivent d’être plus concernées par les problématiques nationales. Les responsables politiques de la France doivent prendre conscience des enjeux économiques français, depuis la pêche artisanale jusqu’aux opérateurs de transport maritime mondial en passant par le fluvial.

 

II.   la prÉsente convention fixe un cadre au financement et à la rÉalisation du projet d’amÉnagement de la Lys mitoyenne

A.   Une coopÉration franco-belge exemplaire

1.   La densité de la coopération franco-belge en matière de transport fluvial

La coopération franco-belge en matière de transport fluvial s’organise autour de deux instances :

-       au niveau institutionnel, et plus spécifiquement dans le contexte du projet de liaison Seine-Escaut, la coopération se fait dans le cadre d’une Conférence intergouvernementale (« CIG Seine Escaut »), instituée par l’accord international de 2009 réunissant la France, la Wallonie et la Flandre, le transport fluvial et l’exploitation des voies navigables étant, en Belgique, des compétences décentralisées ;

-       au niveau des gestionnaires d’infrastructures et des maîtres d’ouvrage, la coordination effective de la préparation et de la réalisation du projet sont assurées par Voies navigables de France et la Société du Canal Seine-Nord Europe pour la France, le service public de Wallonie et les voies navigables flamandes (De Vlaamse Waterweg), via le Groupement européen d’intérêt économique (GEIE) « Seine-Escaut », créé le 26 mars 2010.

La préparation et le suivi des appels à projets européens constituent en effet l’une des missions principales du GEIE Seine-Escaut, sous la supervision de la CIG. Ainsi, en 2015, ces organes ont préparé la candidature commune de la France, de la Wallonie et de la Flandre du projet Seine-Escaut, qui a été retenu par l’Europe pour un montant de subventions total de 980 millions d’euros sur la période 2014-2020. Le GEIE doit également coordonner l’élaboration du bilan très précis des dépenses effectuées dans le cadre du projet.  

Outre la coordination du programme d’investissements lié au projet Seine-Escaut, les compétences de ces structures européennes s’étendent aux questions d’harmonisation de la tarification et de la gestion du trafic.

Selon les informations transmises par les services du ministère de l’Europe et des affaires étrangères en vue de l’examen de la présente convention par le Parlement, la CIG Seine-Escaut se réunit généralement quatre fois par an, en alternance entre la Belgique et la France. La délégation française est composée de quatre membres représentant les ministères chargés des transports, des affaires européennes et du budget. Les deux gouvernements des régions flamande et wallonne sont chacun représentés par trois membres La présidence est assurée à tour de rôle par chaque délégation pour une durée d’un an. Les gestionnaires d’infrastructures et maîtres d’ouvrage sont systématiquement présents aux réunions, dont le GEIE Seine-Escaut assure le secrétariat. Celui-ci se réunit, quant à lui, une dizaine de fois par an.

2.   L’aménagement de la Lys mitoyenne, fruit de cette coopération transfrontalière

La préparation de l’opération d’aménagement de la Lys mitoyenne est une illustration de la coopération transfrontalière des différents organes susmentionnés, puisque la répartition des procédures, des travaux et de l’exploitation future a fait l’objet d’un travail très précis dans ce cadre.

La présente convention internationale étend les missions de la CIG Seine-Escaut au suivi de la réalisation de l’opération de la Lys mitoyenne (article 17). La CIG est en effet l’organe de référence pour la coopération entre les trois territoires intéressés en matière d’infrastructures de voies navigables. Parallèlement à cette mission de supervision, les échanges directs et opérationnels entre les gestionnaires d’infrastructures se tiendront, tout au long de l’opération, dans le cadre qui sera défini par les conventions d’exécution prévues à l’article 15 de la présente convention.


 

B.   Une ingÉnierie complexe

Le caractère exemplaire de cette coopération tient également à la complexité du projet : sur 16,5 kilomètres interviennent trois maîtres d’ouvrage sur un tracé qui ne correspond pas aux frontières des parties, avec deux langues de travail et des financements croisés.

1.   L’organisation et l’objet des travaux de mise au grand gabarit

La convention franco-belge de 1982 avait notamment permis de mettre la Lys mitoyenne au gabarit actuel, c’est-à-dire la classe de voie d’eau IV, qui permet une navigation dans les deux sens de bateaux pesant jusqu’à 1 500 tonnes. La présente convention, signée le 19 novembre 2018 à Bruxelles par Mme Nathalie Loiseau, ministre chargée des affaires européennes, au nom du Gouvernement français, qui se substitue à la précédente, vise à augmenter le gabarit de manière à permettre le passage de convois fluviaux de classe Va à double sens et Vb en alternat (bateaux de 4 400 tonnes).

Cette augmentation du gabarit implique des travaux d’approfondissement du cours d’eau à 4,5 mètres et d’élargissement du chenal de navigation. La convention prévoit de diviser le projet d’aménagement en trois sections qui, pour des raisons pratiques, ne correspondent pas exactement aux frontières des territoires des parties, si bien que chacun des trois gestionnaires d’infrastructures est compétent sur un périmètre qui dépasse son périmètre national :

-         la section 1 entre la confluence Deûle-Lys à l’amont de l’écluse de Comines est confiée à Voies navigables de France ;

-         la section 2 de l’aval de l’écluse de Comines, y compris cette écluse, à la limite entre les communes de Comines et Wervik est confiée au Service public de Wallonie ;

-         la section 3 de la limite entre les communes de Comines et Wervik jusqu’à pont de Menin est confiée à De Vlaamse Waterweg NV.

C:\Users\cdollone\AppData\Local\Microsoft\Windows\INetCache\Content.Outlook\0WARUE4Z\Carte perimetre opération.jpg

Source : Voies navigables de France

Il s’agit essentiellement de travaux de terrassement, de dragage et de reconstitution des berges ([2]) :

-       travaux de terrassement et de dragage : environ 1,35 million de mètres cubes extraits ;

-       travaux de défense de berges : environ 19 kilomètres de berges reconstitués.

Le projet prévoit également la création d’un bassin de virement, ainsi que la création d’une zone de stationnement pour la gestion des alternats des grands navires et deux zones d’attente pour alternat total, pour le passage du pont de Comines.

Parmi les retombées négatives, comme pour tout projet d’aménagement, figurent les nuisances liées aux chantiers, même si elles font l’objet de mesures de réduction. Aux termes des articles 9 et 10, les procédures réglementaires et les acquisitions des emprises nécessaires au projet à l’amiable ou par voie d’expropriation sont menées par chaque partie sur son territoire, au bénéfice des parties qui y réalisent des travaux. La remise des biens immobiliers à la partie concernée doit permettre à celle-ci d’éviter tout retard dans l’exécution des travaux.

S’agissant de la gestion des déchets résultant des travaux, l’article 18 prévoit que chaque partie traite les déchets résultant des travaux dont elle a la charge suivant la réglementation applicable sur son territoire.

La présente convention sera complétée par une convention d’exécution qui précisera les modalités de mise en œuvre de la présente convention entre les trois maîtres d’ouvrages, en ce qui concerne les travaux d’aménagement.

2.   Le financement

a.   Les travaux cofinancés par les parties et la clé de répartition

L’article 3 décrit de façon détaillée les travaux de la mise à grand gabarit qui font l’objet d’un cofinancement des parties. Outre les travaux, sont également mentionnés la gestion des matériaux excédentaires issus des travaux, notamment le transport, le traitement, le dépotage, l’élimination ou la revalorisation ainsi que l’aménagement technique des sites de stockage nécessaire au dépôt des matériaux excédentaires issus des travaux.

Aux termes de l’article 13, le cofinancement des travaux repose sur une clé de répartition propre à chaque section, qui s’applique pour toutes les dépenses :

-       la section 1 est cofinancée à 50 % par la France et à 50 % par la région wallonne ;

-       la section 2 est cofinancée à 44 % par la France et à 56 % par la région wallonne ;

-       la section 3 est cofinancée à 48 % par la France et à 52 % par la région flamande.

L’estimation du coût de l’opération à terminaison ainsi que les montants plafonds des participations financières des parties seront précisés dans une convention d’exécution qui sera signée par les trois maîtres d’ouvrage, dans un délai de six mois après l’entrée en vigueur de la convention.

b.   Les travaux financés exclusivement par chacune des parties

Les travaux d’aménagements dont le financement incombe à chacune des parties sont définis aux articles 4, 5 et 6. Il s’agit notamment des travaux présentant un fort enjeu environnemental, dont les coûts dépendent de la réglementation applicable selon les territoires, ainsi que des aménagements fonciers.

Outre les travaux, chaque partie doit financer les mesures compensatoires et d’accompagnement de l’aménagement de la Lys mitoyenne retenues en application des réglementations environnementales nationales et européennes, ou qu’elle décide elle-même.

3.   Le calendrier envisagé

La convention ne fait pas mention d’un calendrier de réalisation, mais la planification du projet envisagé par les maîtres d’ouvrage est la suivante :

-       s’agissant de la section 1, sous maîtrise d’ouvrage de Voies navigables de France, le recalibrage et les mesures environnementales pourraient être réalisés entre septembre 2019 et fin 2022, tandis que les travaux de dragage pourraient être prévus entre 2022 et 2025 ;

-       s’agissant de la section 2, sous maîtrise d’ouvrage du Service public de Wallonie, l’achèvement des travaux – un nouveau chenal, un chemin de service et les mesures environnementales – est prévu mi-2022 ;

-       s’agissant de la section 3, sous maîtrise d’ouvrage de De Vlaamse Waterweg, l’aménagement de la traversée de Wervik devait être réalisé entre 2020 et 2021, l’échelle à poissons de Menin entre 2022 et 2023, et le recalibrage et le bassin de virement de Bousbecque entre 2024 et 2027.

Selon le calendrier figurant dans la décision d’exécution Seine-Escaut précitée, la mise au gabarit de la Lys CEMT Vb (sens unique) et Va (double sens) doit être achevée d’ici à décembre 2027.

4.   L’exploitation et l’entretien

Au titre de l’article 11, l’entretien et l’exploitation de la Lys mitoyenne sont répartis entre les trois parties. La charge du curage est distribuée selon les sections de rivière. En revanche, les rives sont entretenues en cohérence avec les territoires des parties. À l’exclusion des pouvoirs de police, les règles d’exploitation sur la Lys mitoyenne sont également réparties entre les parties.

Au titre de l’article 12, les missions d’entretien et d’exploitation sont confiées par chacune des parties à leurs gestionnaires d’infrastructures : Voies navigables de France pour la partie française, le service public de Wallonie pour la région wallonne, et De Vlaamse Waterweg NV pour la région flamande. Chaque partie prend à sa charge les frais d’entretien et d’exploitation qu’elle encourt (article 14).

L’article 16 renvoie à une convention le soin de fixer les modalités d’entretien et d’exploitation de la Lys mitoyenne entre les trois exploitants, qui sont aussi les maîtres d’ouvrage des travaux d’aménagement par délégation.

C.   un soin particulier apporté À la compensation de l’impact environnemental du projet

Le projet est conduit dans le respect du principe de développement durable « éviter, réduire, compenser ». Contrairement au projet de canal « Seine-Nord », il ne s’agit pas de créer une nouvelle voie d’eau, ce qui réduit l’impact environnemental. De fait, l’enquête publique ne comporte pas de réelles contestations fondées sur des critères environnementaux, hormis des plaintes de riverains liées au démarrage des travaux.

Parmi les mesures compensatoires et d’accompagnement du projet figurent notamment l’aménagement des sites de Comines et Menin, afin de permettre les franchissements piscicoles, et les aménagements urbains sur le bord du canal à Comines et Wervik, avec la restauration du chemin de halage. Il convient également de mentionner la création de 8 000 m² de zone humide sur un ancien site de gestion de sédiment à Deûlémont, la restauration d’une zone humide (prairie de fauche ou prairie permanente) sur plus de deux hectares à partir d’une zone humide historiquement propice, mais dégradée, ou la création d’habitats terrestres pour les amphibiens ou pour le hérisson d’Europe. Le suivi de ces mesures environnementales est prescrit pour une durée de 30 ans, afin de démontrer la pérennité écologique des mesures.

Sur le plan environnemental, le projet est également l’occasion de souligner quelques divergences dans l’application du droit européen. Ainsi, la réutilisation des sédiments, que les maîtres d’ouvrage s’emploient, dans une logique vertueuse, à pousser à leur maximum est plus développée en Belgique, en raison d’un cadre réglementaire plus souple.


    

   CONCLUSION

 

Votre rapporteur est favorable à l’adoption du projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le gouvernement de la République française, la région flamande et la région wallonne relative à l’aménagement de la Lys mitoyenne entre Deûlémont, en France, et Menin, en Belgique. La mise à grand gabarit de la Lys mitoyenne permettra de fluidifier les échanges, de renforcer la compétitivité de la navigation fluviale du nord-ouest de l’Europe, et de favoriser le transfert modal de la route vers la voie d’eau, plus vertueuse sur le plan environnemental.

Le projet d’aménagement de la Lys mitoyenne est un projet véritablement européen, à plusieurs titres. D’abord, il est l’illustration d’une coopération franco-belge exemplaire, reposant sur une ingénierie complexe. Surtout, il contribue à la relance du transport fluvial au niveau européen, conformément aux objectifs du Pacte vert. Ainsi, il est emblématique du projet de liaison fluviale à grand gabarit entre le bassin de la Seine et celui de l’Escaut.

Plus largement, il convient cependant de s’interroger sur les conséquences du projet Seine-Escaut sur la carte des ports européens et le secteur fluvial français. La concurrence croissante des ports du Benelux, notamment Anvers et Rotterdam, doit être prise en compte dans les débats actuels sur la sécurité des approvisionnements et les relocalisations industrielles, que la crise sanitaire a remis au centre du jeu politique. Dans ce contexte, il importe de faire du renforcement du secteur fluvial français et de ses filières l’une des priorités du plan de relance.

 

 


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   EXAMEN en commission

Le mercredi 13 janvier 2021, la commission examine, sur le rapport de M. Jean-Paul Lecoq, le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française, la région flamande et la région wallonne relative à l’aménagement de la Lys mitoyenne entre Deûlémont en France et Menin en Belgique (n° 3244).

M. Rodrigue Kokouendo, président. Notre commission est saisie d’un type d’accord international peu courant, conclu non pas avec le gouvernement d’un État, mais avec deux gouvernements provinciaux.

Notre rapporteur Jean-Paul Lecoq a parfaitement mesuré les enjeux multiples et européens de cette convention, signée le 19 novembre 2018, qui vise à gérer l’aménagement, l’entretien et l’exploitation d’un cours d’eau mitoyen entre la France et la Belgique dans le but de réaliser la liaison fluviale à grand gabarit reliant la Seine à l’Escaut. Elle matérialise une coopération exemplaire entre la France et la Belgique, y compris en matière environnementale. Elle nous invite aussi à réfléchir au soutien que la puissance publique doit apporter au transport fluvial, ainsi qu’aux enjeux économiques, pour les ports et entreprises des Hauts-de-France et de Normandie, de la réalisation de cette liaison à grand gabarit qui les mettra en concurrence directe avec les grands ports et entreprises fluviales belges et néerlandais. La convention dont nous sommes saisis est donc loin d’être anecdotique.

M. Jean-Paul Lecoq, rapporteur. Je vous présente, à mon tour, mes meilleurs vœux pour l’année à venir. J’espère qu’elle nous permettra de continuer à travailler avec cette belle liberté de ton et ce respect qui caractérisent notre commission, et de tenir toutes nos réunions à effectif complet, sur place. J’espère évidemment qu’elle permettra aussi à Marielle de Sarnez de revenir présider nos réunions.

Je tiens tout d’abord à remercier chaleureusement notre administratrice, Camille d’Ollone, qui a réalisé un excellent travail, organisé nos auditions et notre déplacement, et m’a aidé à rédiger ce rapport dans un délai très contraint afin que tout un chacun en dispose bien en amont de notre réunion – j’ai vu que notre président s’y était plongé et en avait retenu l’essence.

Le projet de loi que je vous propose d’adopter vise à approuver la convention entre le Gouvernement de la République française, la région flamande et la région wallonne relative à l’aménagement de la Lys mitoyenne entre Deûlémont en France et Menin en Belgique. La Lys mitoyenne est une voie d’eau partagée entre la France et la Belgique, essentielle au réseau fluvial Seine-Escaut. Mais ce canal empêche les plus grands gabarits de barges fluviales de passer du réseau de Dunkerque-Escaut, en France, à celui de la Lys, en Belgique. Vous pouvez le constater sur la carte figurant à la page 9 de mon rapport. Identifié par l’Union européenne comme chantier nécessaire à l’amélioration du maillage fluvial européen, l’aménagement du canal de la Lys mitoyenne permettra à des barges de 180 mètres de long, transportant jusqu’à 4 400 tonnes de fret, de naviguer entre ces deux réseaux. Aujourd’hui, seules les barges n’excédant pas 110 mètres de long et transportant 1 500 tonnes de fret au maximum peuvent passer de l’un à l’autre. Il s’agit donc d’une opération importante pour la dynamique fluviale en France et en Europe.

Cette dynamique converge tout à fait avec la transition écologique. Connaissez-vous un autre mode de transport qui permette d’accueillir une faune et une flore complètes, de déplacer des volumes considérables de marchandises sans affecter les autres usagers, d’avoir un stock flottant sans recourir à des hangars de stockage gigantesques, de limiter les crues, de stocker de l’eau douce et même de produire de l’hydroélectricité, grâce à plusieurs écluses dont certaines fonctionnent déjà ? Le transport fluvial est un véritable instrument écologique, malgré des interrogations et des réserves quant aux dégâts occasionnés par le creusement de certains canaux – c’est ici le député du Havre qui parle et qui pense évidemment au canal Seine-Nord.

D’un point de vue environnemental, l’aménagement du canal de la Lys mitoyenne permettra de réduire sensiblement les émissions de gaz à effet de serre, puisque le transport fluvial est cinq fois moins émetteur que le transport routier. Il permettra aussi de décongestionner la métropole de Lille. En outre, un soin particulier a été apporté à la compensation de l’impact environnemental du projet, avec par exemple la construction, quasiment terminée, de franchissements piscicoles, la restauration du chemin de halage et la création d’une vaste zone humide sur un site de gestion des sédiments. J’en profite pour rappeler que tous les États européens ne sont pas soumis à la même réglementation concernant les sédiments, et je me réjouis que les Belges aient parfois pu gérer ceux-ci avec un peu plus d’efficacité et un peu moins de contraintes que nous !

Les travaux d’élargissement du canal de la Lys mitoyenne illustrent donc la convergence des intérêts écologiques et économiques propre au fret fluvial. D’un point de vue économique, le gabarit du canal n’est, pour l’heure, pas adapté à la croissance du trafic sur ce point de réseau. Selon l’étude d’impact, le projet affiche une rentabilité économique intrinsèque indépendamment même de son inscription dans le projet Seine-Escaut.

En outre, il s’agit d’un projet véritablement européen, piloté par l’État français et deux régions – la région flamande et la région wallonne –, les régions belges étant compétentes en matière de transport. Trois maîtres d’ouvrage interviennent donc sur ce canal de 16,5 kilomètres, dont le tracé qui ne correspond pas exactement aux frontières entre les différentes parties, avec deux langues de travail et des financements croisés des trois parties, auxquels s’ajoutent d’importants financements provenant de l’Union européenne et de la région Hauts-de-France. Malgré cette ingénierie complexe, le projet témoigne d’une coopération franco-belge exemplaire en matière fluviale et montre le visage d’une Europe de projets concrets, qui fonctionnent. C’est l’Europe comme je l’aime !

Il s’agit aussi d’un projet utile, dont nous avons besoin pour affronter le monde de demain. La crise sanitaire actuelle nous démontre de manière particulièrement vive que notre économie mondialisée repose sur des flux très précaires et que la moindre perturbation peut mettre à mal des chaînes logistiques et entraîner des pénuries de produits parfois vitaux. Demain, notre dépendance à l’extérieur, par exemple pour nos médicaments, ne sera plus tolérée ni tolérable. Les États doivent donc se préparer au plus vite à ce changement de mentalité. J’entendais ce matin certaines personnes parler de « démondialisation ». Une mutation est en train de s’opérer à l’échelle mondiale : nous ne devons pas la subir mais l’accompagner en adaptant notre mode de vie.

Pour que le secteur fluvial prenne la place qui lui revient dans la chaîne logistique européenne, deux conditions sont nécessaires : nous devons connaître les besoins en fret, et avoir une infrastructure et des services adaptés. Le premier point peut paraître trivial, mais il nous renvoie à un double enjeu.

D’une part, le secteur fluvial permet un transport capacitaire de masse extrêmement utile pour l’industrie – une barge de 150 mètres transporte autant de fret que quatre trains de 750 mètres ou 250 camions. Mais le fluvial est tellement lié à l’industrie que lorsque cette dernière souffre, il rencontre des problèmes de viabilité. Il est donc très important d’envisager ce réseau de canaux comme une possibilité, pour l’Europe, de renforcer son autonomie stratégique au sein de l’économie mondialisée ; il nous permettra de disposer d’un outil d’échanges au cœur de l’Union européenne et d’amorcer une réindustrialisation tant à l’échelle européenne qu’à l’échelle nationale, comme les députés communistes le proposent depuis toujours.

D’autre part, connaître les besoins en fret nécessite de connaître les zones d’influence économique des ports maritimes, à savoir leur hinterland. Je souhaite appeler votre attention toute particulière sur ce point. Le réseau Seine-Escaut est un réseau européen, mais en tant qu’élu du peuple français, je ne vous cache pas mon inquiétude, que je formule également s’agissant du canal Seine-Nord, au vu d’une orientation de la politique de l’Union européenne très favorable aux ports des Pays-Bas et de la Belgique, notamment à ceux d’Anvers et de Rotterdam, au détriment des ports français de Calais, de Dunkerque et du Havre. Rappelez-vous que le gouvernement d’Édouard Philippe avait oublié de faire inscrire le port du Havre, par exemple, dans la liste des corridors maritimes entre l’Irlande et l’Europe, et qu’il a fallu rattraper les choses au Parlement européen. Face au manque d’ambition française pour son secteur fluvial, le réseau Seine-Escaut étend de fait l’hinterland des ports du Benelux jusqu’à Paris, ce qui les rend plus compétitifs que les ports français – c’est justement la raison pour laquelle de nombreux élus du Havre ont combattu le canal Seine-Nord. Il ne faut pas négliger l’impact de cette dynamique sur notre économie nationale et notre balance commerciale.

Je nuancerai néanmoins mon propos car j’ai rencontré des gens qui m’ont permis d’affiner mon analyse. Cette situation est loin d’être une fatalité. De nombreuses choses peuvent être faites pour améliorer le trafic fluvial français et accroître, de ce fait, l’attractivité des ports français face à la concurrence européenne. Ce chantier est aujourd’hui trop négligé par les pouvoirs publics, mais de belles choses peuvent être réalisées en France.

Tout d’abord, il faudrait mieux organiser les hinterlands français à partir de Dunkerque, de Calais, du Havre et des autres ports maritimes connectés à ce réseau. Ce travail n’est presque pas effectué en France car les opérateurs n’intègrent pas encore ce schéma. Il convient de changer les mentalités, et les élus que nous sommes doivent prendre toute leur part dans ce travail. La fusion des ports du Havre, de Rouen et de Paris peut être une étape intéressante.

Par ailleurs, il faut mieux identifier tous les goulets d’étranglement et les ruptures de charges. Ce travail est mené par Voies navigables de France (VNF). Il est important de pouvoir aller d’un point à un autre sans encombre, et si des investissements sont nécessaires, VNF doit disposer de moyens pour les réaliser au plus vite. Là encore, nous avons un rôle à jouer : ce chantier doit être soutenu au maximum par les pouvoirs publics.

Enfin, la batellerie française est d’une grande qualité, mais il lui manque beaucoup de services pour être tout à fait compétitive. La France dispose par exemple de très peu de services de nettoyage de cale après déchargement, ce qui pose le problème de ce que l’on appelle le « retour de cale » : les bateaux rentrent à vide. C’est un gâchis économique et écologique complet. Beaucoup d’autres services sont indispensables, mais je n’ai pas le temps de tout développer ici.

J’appelle également votre attention, et plus particulièrement celle des députés de Normandie, des Hauts-de-France et d’Île-de-France, sur la nécessité de constituer une alliance entre nos trois régions pour construire et réparer des barges et former davantage de bateliers. Cela permettrait d’organiser et de renforcer ce secteur. Franck Dhersin, vice-président de la région Hauts-de-France chargé des transports et des infrastructures de transport, que j’ai auditionné, a souligné cet enjeu, auquel je souscris. Vous l’aurez compris, il est urgent de créer un écosystème et une véritable politique économique autour du secteur fluvial.

Enfin, la plus grande vigilance doit être de mise s’agissant des plateformes multimodales. Les pays du nord de l’Europe disposent d’un écosystème très puissant et rachètent des plateformes afin d’organiser au mieux l’hinterland des ports du Benelux, qui s’étend jusqu’à la France. Nous ne devons pas perdre ces véritables clés de voûte logistiques. C’est tout le sens de l’action positive menée par la région Hauts-de-France. Il faut maîtriser le foncier et disposer d’opérateurs de réseau multimodaux puissants ; ce n’est pas encore le cas, mais j’espère que cela s’améliorera.

Pour résumer, un travail de planification associant les acteurs publics et privés, des élus et des professionnels de ce secteur doit être mené au niveau de l’État – je m’adresse ici au Mouvement démocrate, puisque son président est haut-commissaire au plan. Notre mobilisation autour de ce chantier d’avenir doit être à la hauteur des enjeux.

Mes chers collègues, il m’a semblé très important de mettre ce sujet en évidence pour que vous connaissiez les enjeux qui se cachent derrière un petit canal de 16,5 kilomètres entre la France, la Wallonie et la Flandre. Je vous propose d’approuver cette convention.

Mme Brigitte Liso. Je partage en grande partie les positions de notre rapporteur sur la capacité de la France à marquer son territoire, si j’ose dire.

La convention relative à l’aménagement d’une portion de la Lys entre Menin, en Belgique, et Deûlémont, en France – une commune située dans ma circonscription –, m’intéresse évidemment au plus haut point. Elle complète une première convention franco-belge, conclue en 1982, qui avait établi le gabarit actuel de la Lys mitoyenne. Il s’agit aujourd’hui d’un gabarit de catégorie 4. La voie navigable de cette portion de la Lys entre Menin et Deûlémont est longue d’environ 16,5 kilomètres ; elle permet actuellement la circulation, dans les deux sens, de bateaux de 1 500 tonnes. Demain, la Lys mitoyenne pourra accueillir des bateaux de 3 000 tonnes en double sens ou de 6 000 tonnes en navigation alternée. Pour ce faire, il est nécessaire de mener des travaux importants, à savoir l’approfondissement du cours d’eau à 4,5 mètres, l’élargissement du canal et l’aménagement des territoires avoisinants.

Compte tenu de la hausse de la circulation sur la Lys mitoyenne, les travaux permis par cette convention sont absolument essentiels. Comme l’a indiqué M. le rapporteur, un convoi fluvial de 5 000 tonnes équivaut à 250 camions ou quatre trains. Le transport fluvial est par ailleurs le transport le plus économique à la tonne transportée, avec un prix jusqu’à quatre fois inférieur à celui du camion.

Cette opération, dont la réalisation doit s’achever en 2027, représente un coût total de 140 millions d’euros. Les différents aménagements sont cofinancés par trois régions – les Hauts-de-France, la Wallonie et la Flandre – et par l’Union européenne, selon une répartition se rapportant aux kilomètres inclus dans chaque territoire. Le reste à charge pour l’État français est estimé à 33 millions d’euros. Les bénéfices attendus sont inestimables, compte tenu de la convergence des intérêts économiques, écologiques et européens.

Cette convention intervient à l’heure du Brexit, à un moment clé pour l’avenir du projet européen. L’exploitation du canal transformé permettra en effet d’accroître la compétitivité du secteur fluvial, au bénéfice de l’Europe. La présente convention va dans le sens de l’objectif gouvernemental d’une gouvernance communautaire renforcée.

Compte tenu de tous ces éléments, le groupe La République en Marche votera ce projet de loi.

Néanmoins, je tiens à exprimer un regret, à titre personnel. Des élus locaux m’ont indiqué que la plateforme logistique bimodale prévue par la convention serait située du côté belge et non du côté français. Nous aurions bien sûr préféré que les accords conclus il y a quelques années aient favorisé la France, en particulier la belle commune de Deûlémont que vous avez eu le plaisir de visiter, monsieur le rapporteur.

Pour terminer, je poserai deux questions qui me semblent essentielles. Dans quelle mesure les acteurs locaux et associatifs seront-ils associés à la finalisation de ce projet, côté français ? D’après mes renseignements, seules des entreprises néerlandaises ont été retenues à ce jour pour les travaux déjà engagés. En outre, la transparence des informations sera-t-elle assurée sur le terrain ?

M. Michel Fanget. Je remercie M. le rapporteur pour son excellent travail, qui nous apporte un éclairage à la fois technique et stratégique sur la concrétisation de ce projet qui n’est pas sans difficulté et revêt un caractère stratégique de première importance. Dans le contexte du Brexit, il est vital que nous renforcions la position de nos ports continentaux pour assurer leur prédominance en Europe. Cette convention n’est pas sans poser de question sur la place des ports français. Leur intégration croissante dans un réseau où les ports sont reliés entre eux, non seulement par leur façade maritime, mais également par leur arrière-pays grâce à l’émergence d’un réseau fluvial fort, nous semble de nature à garantir leur avenir, dont nous devons absolument nous soucier. C’est d’ailleurs le sens des travaux menés par ailleurs, notamment dans le cadre de la réalisation du canal Seine-Nord.

M. le rapporteur insiste également sur les difficultés techniques posées par ce projet, qui démontre bien la qualité de la coopération franco-belge en la matière, dont nous ne pouvons que nous féliciter. Cette dimension européenne nous paraît pleinement profitable. L’investissement financier de l’Union européenne nous semble aussi devoir être souligné. Si le coût est substantiel au regard de l’importance des travaux à mener, il nous paraît essentiel de souligner que ce projet peut également être un exemple de bonne gestion environnementale lors de la réalisation de grands projets d’infrastructures.

Pour toutes ces raisons, le groupe du Mouvement démocrate (MoDem) et démocrates apparentés soutiendra ce projet de loi.

M. Jean-Claude Bouchet. Je présente à chacun mes meilleurs vœux de santé, avec une pensée toute particulière pour la présidente de notre commission.

Nous allons donc enfin commencer à suivre une stratégie globale en matière d’environnement. J’ai travaillé dans le secteur des transports et je me souviens de l’abandon du projet de canal Rhin-Rhône, le 1er novembre 1997, alors que M. Gayssot était ministre des transports et Mme Voynet ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement. Depuis cette décision, la France subit un retard considérable en matière de politique multimodale de transport de fret. Aujourd’hui, quand des containers en provenance de Chine doivent être livrés à Lyon, il peut être plus économique de les envoyer à Rotterdam et de leur faire prendre la route jusqu’à leur destination finale que de faire appel aux ports français. Tout cela est déplorable. Notre vision de l’environnement est à courte vue. Je me réjouis de cette convention car il me semble utile d’aménager un canal de 16,5 kilomètres pour augmenter le gabarit de la Lys et favoriser le transport multimodal, mais la France et l’Europe doivent adopter une stratégie globale en la matière. Le transport fluvial doit être associé au fret ferroviaire et au transport routier. Dès lors que le multimodal n’existait pas, un grand volume de fret a été transféré à la SNCF et au transport routier, ce qui est catastrophique.

Le groupe Les Républicains soutiendra cette convention conclue entre la France et les régions wallonne et flamande, mais je réitère mon appel en faveur d’une stratégie globale en matière d’environnement et de transport, que celui-ci soit routier, ferroviaire, fluvial ou aérien. Lorsqu’un projet est réalisé, c’est pour vingt ou trente ans. Celui dont nous parlons a été élaboré pour décongestionner la métropole de Lille, mais nous avions déjà vingt ans de retard.

M. Alain David. Nous prenons bonne note, monsieur le rapporteur, de votre avis favorable à cette convention, qui permet d’élargir le gabarit de cette voie d’eau maritime mitoyenne et d’adapter ce chenal de navigation, rendant possible une augmentation du trafic sur le vaste ensemble des bassins de la Seine et de l’Escaut. Nous prenons également bonne note des intérêts économiques et environnementaux de ce projet, largement encouragé par la Commission européenne pour rendre l’économie française plus résiliente et durable dans le cadre du budget pluriannuel 2021-2027. Nous avons en particulier relevé qu’un convoi fluvial pouvait remplacer 250 camions – ce chiffre est impressionnant – et que ce mode de transport était le plus économique et le plus écologique à la tonne transportée, puisqu’il émet cinq fois moins de CO2 que le transport routier.

Nous notons cependant votre vigilance quant au risque de concurrence accrue des ports du Benelux, notamment Anvers et Rotterdam, vis-à-vis des ports français lorsque la connexion entre la Seine et l’Escaut sera renforcée. Parallèlement aux travaux réalisés sur la Lys mitoyenne, vous appelez à une consolidation et à une structuration du secteur fluvial français. Quelles pistes de travail préconisez-vous ?

M. Jean-Michel Clément. Le titre de cette convention est, à lui seul, une invitation au voyage. Puisque je connais moins bien la partie nord de notre pays, c’est avec grand plaisir que j’irai voir ce que cache cette Lys.

Notre groupe partage l’avis du rapporteur : nous saluons ce projet, qui s’avère bénéfique tant pour l’intégration régionale que pour nos territoires. L’aménagement de la Lys mitoyenne permettra de fluidifier les échanges, d’accroître la compétitivité de la navigation fluviale au Nord-Ouest de l’Europe et de favoriser le transfert modal de la route vers la voie d’eau, plus vertueuse d’un point de vue environnemental.

Cet aménagement ne consiste pas à créer une voie d’eau, mais à agrandir un canal existant, ce qui limite les nuisances occasionnées. On sait bien que nos concitoyens sont très sensibles aux sujets de cette nature. Nous saluons à cet effet les mesures compensatoires mises en place.

Nous souhaitons aussi souligner le caractère positif du développement des projets de voies navigables en Europe au service de l’intégration européenne. La coopération frontalière franco-belge a été exemplaire dans ce domaine. Ce projet permet aussi de relancer le transport fluvial au niveau européen, en accord avec le Pacte vert pour l’Europe.

Nous partageons par ailleurs la vision du rapporteur, qui nous invite à profiter de ce texte pour entamer une réflexion sur le secteur fluvial et maritime français. Comme lui, nous pensons que ce secteur est stratégique pour notre pays : il est nécessaire de le renforcer et de structurer ses filières afin que notre pays tire profit des investissements et de la création de nouvelles voies navigables face à la concurrence du Benelux et alors que le Brexit offrira de nouvelles opportunités.

Enfin, le développement de l’intermodalité est un prérequis indispensable à la création de toute taxe carbone sur les transports routiers, afin que celle-ci ne soit pas perçue comme une taxe sur l’éloignement des centres de consommation. Souvenons-nous du mouvement des bonnets rouges, qui trouvait notamment sa source dans l’impossibilité d’un report modal en Bretagne : le produit de la taxe destinée à le développer aurait échappé à la région puisqu’il devait être centralisé au niveau de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) pour des projets nationaux. Travaillons demain dans une direction différente !

Nous soutiendrons évidemment cette convention.

M. Jean-Louis Bourlanges. Je ne répéterai pas ce qu’a dit excellemment le porte-parole de mon groupe, Michel Fanget, qui a souligné le triple intérêt économique, écologique et européen de ce projet.

J’adresse toutes mes félicitations à notre rapporteur, Jean-Paul Lecoq, qui a fait preuve d’un double désintéressement eu égard à ses options fondamentales.

Je veux d’abord parler de ses options géopolitiques, car il faut un certain courage à un élu du Havre pour soutenir ce projet, qui contribue à la construction d’un réseau de voies navigables intégrant la Seine à la banane bleue, c’est-à-dire au cœur battant de l’Europe fluviale situé au Benelux. Toute amélioration de ces voies de communication étend l’hinterland des ports du Nord, c’est-à-dire de Dunkerque, mais surtout d’Anvers et de Rotterdam, au détriment de ceux de l’axe séquanien, c’est-à-dire du Havre, de Rouen et de Paris. Bien que député des Hauts-de-Seine et ancien élu de Seine-Maritime, j’approuve ce projet nécessaire, cette œuvre d’intérêt général, mais cela ne m’empêche pas de saluer le courage de M. Lecoq et son effort de dépassement des intérêts de clocher.

Le second éloge que je veux adresser à notre rapporteur concerne ses options idéologiques. L’entreprise de désengorgement que permet cette convention améliore en effet les échanges entre les pays de l’Union européenne et constitue une contribution importante au libéralisme commercial. Je salue donc les efforts de M. Lecoq pour se rapprocher des positions du Mouvement démocrate : quand il voudra franchir une étape supplémentaire, notre porte lui sera ouverte. (Sourires.)

M. Christian Hutin. Il serait difficile au député de Dunkerque de ne pas intervenir sur un tel sujet. Tout cela apparaît très équilibré, très écologique et très européen, mais en réalité, ce n’est pas tout à fait lisse ! (Sourires.)

Comme Jean-Louis Bourlanges, je tiens à vous féliciter, monsieur Lecoq. Rares sont les rapports confiés aux députés du groupe GDR ; le vôtre est remarquable, et vous l’avez rédigé avec une objectivité exceptionnelle.

Les ports du Havre et de Dunkerque ont toujours été concurrents. C’est une concurrence nationale, mais fraternelle. Vous venez d’ailleurs de nous piquer le meilleur directeur du port de Dunkerque, qui vient d’arriver au Havre aujourd’hui – mais je tiens à préciser qu’il habite encore Dunkerque ! Cependant, nous ne sommes pas tout à fait rivaux car nous nous situons sur deux marchés différents.

Les investissements français que nous allons réaliser apporteront-ils du trafic supplémentaire au port de Dunkerque ? Je le souhaite de tout cœur, mais je ne le pense pas. Les ponts enjambant le canal à grand gabarit ont une hauteur de six mètres ; ils auraient dû être hauts de douze mètres pour permettre le passage des péniches. L’État n’a pas investi dans ce domaine et nous allons être coincés. À mon sens, l’ensemble des investissements profiteront très rapidement à Anvers et Rotterdam. Nous sommes donc en train de financer une fuite du trafic vers ces deux ports – nous n’en gagnerons qu’un peu, un tout petit peu. N’oublions pas non plus que le port de Dunkerque est particulièrement touché par le Brexit : il subit une baisse régulière du trafic et n’assurera plus certaines activités. J’espère que les choses s’arrangeront.

Cette convention vise-t-elle à aider le port de Dunkerque et les ports français en général ou à créer une autoroute fluviale vers les ports d’Anvers et de Rotterdam, contre lesquels nous sommes en guerre permanente ? J’ai un énorme doute. Je ne peux donc pas voter ce texte, qui obère les perspectives du Dunkerquois, de notre littoral et des Hauts-de-France en général. Je déplore que certaines grosses entreprises des Hauts-de-France continuent sans vergogne à travailler avec Anvers et Rotterdam, refusant de passer par le port de Dunkerque, pourtant situé à 70 kilomètres de la ville de Lille, à laquelle il est relié par une autoroute gratuite.

Cela me fait beaucoup de peine. Tout le monde pense que ce projet est merveilleux, car il est écologique et européen, alors que l’investissement réalisé par notre pays n’aura probablement pas de retombées pour le port de Dunkerque. Je suis très inquiet et je lance l’alerte. Que l’État ne soit pas capable de rehausser quelques ponts pour permettre à l’élargissement d’un canal d’apporter du trafic au port de Dunkerque, je ne trouve pas cela raisonnable ni équitable.

M. Jean-Paul Lecoq, rapporteur. En tant que membre du plus petit groupe de notre commission, je suis souvent le dernier à choisir les rapports. Il restait le rapport sur cette convention : je l’ai pris. Je pouvais aborder le sujet de deux manières : soit je m’opposais au texte, en tant que député du Havre, et j’en faisais un outil de combat contre la politique européenne et la domination des ports du range nord-européen, c’est-à-dire du Benelux ; soit je faisais abstraction de ces combats et je considérais qu’il s’agissait d’un beau chantier, d’un bel investissement utile pour les générations à venir. J’ai choisi cette seconde approche, mais je ne pouvais pas faire totalement abstraction de mon opinion sur l’Europe – Jean-Louis Bourlanges a sans doute bien noté que j’ai évoqué ma prédilection pour l’Europe des projets – et sur la façon dont la France s’inscrit dans la gouvernance européenne – à ce sujet, je partage tout à fait les propos de Christian Hutin.

Avant de lutter contre le canal Seine-Nord, j’ai mené de nombreux combats en faveur de certains projets. Quand Mme Voynet était ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement, nous avons discuté non seulement du canal Rhin-Rhône, mais également du canal Seine-Est. Je suis alors allé voir la ministre dans son bureau, avec des acteurs du Havre, pour défendre ce projet. Mme Voynet considérait que ce dernier nécessitait la construction d’un trop grand nombre d’écluses par rapport au canal Seine-Nord, ce qui m’a choqué – ce critère n’est pas suffisant, d’autant que les écluses peuvent aussi s’avérer utiles.

Aujourd’hui, le chantier de la Lys mitoyenne est bien engagé et le canal est même quasiment terminé – la députée de la circonscription le sait bien car elle le voit régulièrement. Je vous invite à vous rendre sur place, monsieur Clément, comme je l’ai fait moi-même. Ce doit être le déplacement qui a coûté le moins cher à la commission des affaires étrangères, et cela a fait plaisir aux gens qui travaillent sur ce chantier : tant les ouvriers que les maîtres d’œuvre de Voies navigables de France ont été flattés de voir débarquer un rapporteur de la commission des affaires étrangères et ont senti que leur travail était valorisé. En me rendant sur place, j’ai aussi compris beaucoup de choses s’agissant du système hydraulique des canaux.

Ce déplacement m’a également fait prendre conscience d’un défi que nous devons tous relever – et je vous invite, monsieur Hutin, à me rejoindre dans ce combat, comme le font les élus des Hauts-de-France, qui ne sont pas mes amis politiques. On relie donc la Seine à l’Escaut. On peut y voir un risque, celui d’offrir la Seine aux ports du Benelux dont nous étendrions l’hinterland à l’Île-de-France. On peut aussi considérer, à l’inverse, qu’on relie la Seine et HAROPA, l’alliance des ports du Havre, de Rouen et de Paris, dont le potentiel est immense, aux pays du Benelux. On peut circuler sur une voie d’eau dans les deux sens ! Il faut soutenir tous les investissements possibles et imaginables pour mettre les infrastructures françaises au niveau – cela passe aussi par un rehaussement des ponts – et connecter les ports français à l’hinterland européen par cette voie d’eau.

Il est urgent et important de le faire car, demain, la question de la facture carbone par conteneur sera posée – tous ceux qui suivent les questions européennes le savent, notamment Jean-Louis Bourlanges car il a déjà eu l’occasion d’en discuter. Il faudra donc se demander à quel endroit il vaudra mieux débarquer les conteneurs, pour que la taxe carbone ne s’applique pas.

Souvent, les bateaux chinois qui arrivent dans la zone font un peu de cabotage, s’arrêtent au Havre – peu de temps –, avant de gagner Rotterdam ou Anvers. La facture carbone des conteneurs qui s’arrêtent au Havre et utilisent la voie d’eau, y compris pour aller vers le cœur de l’Europe, peut-elle concurrencer celle des « bouettes » qui débarquent à Rotterdam ou à Anvers ? Gageons que oui, et agissons pour qu’elle le soit.

De toute manière, nous n’avons pas le choix, sauf à faire exploser tout le système, ce que je propose parfois, sur des questions nationales. La question de la facture carbone, du climat, de l’environnement continuera d’être posée, de manière quasi universelle. C'est pourquoi il vaut mieux investir, tout de suite, fortement, pour lever les ponts sur le canal et développer le transport fluvial.

Vous posiez la question des services : il y en a une multitude à créer. Vous demandiez comment faire pour que le fluvial ait un sens, en France. La préfiguratrice du port d’HAROPA, Mme Rivoallon, lorsqu’elle était acheteuse pour de grands magasins parisiens, avait imposé la livraison par transport fluvial comme critère d’achat. Les acheteurs peuvent, eux aussi, adopter une démarche écologique volontariste. Les logisticiens et les armateurs disent toujours que c'est le client final qui décide. Le jour où il aura en tête d’être totalement écologique dans la livraison de ses produits, il choisira les conteneurs dont la facture carbone sera la moins élevée. Faisons en sorte que les ports français puissent présenter une telle facture. Si les ponts sont levés à partir de Dunkerque, le canal de la Lys mitoyenne devient pleinement crédible, pour décharger à Dunkerque et livrer à Lille, avec une facture carbone la plus basse possible. Si l’on fait le calcul à ce moment, ce sera non pas Le Havre qui aura la facture carbone la plus basse, mais Dunkerque et son secteur, qui peut être large, compte tenu du réseau fluvial considéré.

J’avais donc la possibilité de le prendre mal, de m’opposer au projet. Ma première réaction en débutant le travail sur ce rapport a d’ailleurs été de chercher à rencontrer tous ceux qui étaient contre le projet, par exemple les associations environnementales. Cela a été compliqué : ils n’étaient pas si nombreux, parce qu’il y a eu l’enquête publique, les gens se sont exprimés. Certains projets sont plutôt mieux présentés, y compris au débat public, que d’autres. C'était le cas de celui-ci, qui, bien que compliqué à mettre en œuvre, était bien amené dans le territoire, avec responsabilité et attention. Quand on voit les différents aménagements qui seront réalisés, on sent que les responsables du projet ont été à l’écoute des voisins, des maires, des gens du territoire. Cela se ressent et se vit sur le terrain.

Quant au pilotage de la section française, je connaissais déjà Voies navigables de France. Dans un appel d’offres, surtout pour un projet européen, il n'est pas simple de faire de la préférence locale, si j’ose dire. Il y en a pourtant un peu, ne serait-ce que dans la main d’œuvre qui a été prise en supplément pour faire cette activité. Cela reste limité, mais on sent un projet soutenu par le territoire.

Pour ce qui concerne les vingt ans de retard qu’a évoqués Jean-Claude Bouchet, la France a trop joué la carte des poids lourds. Un lobby a imposé sa politique au détriment du ferroviaire et du fluvial. Aujourd'hui, il est plus compliqué sinon de faire marche arrière, du moins de réorienter l’activité. Les vingt ans de retard sont une réalité. Toutefois, je suis communiste, donc optimiste pour changer les choses. Il faut rester optimiste et se dire que l’avenir nous appartient, ce sont nos décisions qui feront que ce projet et d’autres amélioreront la vie des générations à venir, celles de nos enfants et petits-enfants.

Je vous invite donc à voter pour. J’ai longtemps hésité à vous appeler à un tel vote et à le pratiquer moi-même, mais je le fais quand même au regard d’un tel projet.

M. Rodrigue Kokouendo, président. Alain David avait demandé quelles sont les pistes de travail pour renforcer le transport fluvial.

M. Jean-Paul Lecoq, rapporteur. Je l’ai évoqué avec l’exemple de Mme Rivoallon. Renforcer le fluvial, c'est faire en sorte que les clients demandent que leurs marchandises, arrivées dans nos ports, soient transportées par le fleuve. Ils peuvent le demander : le client est roi, comme on dit en République. Nous devons l’inciter à le faire.

Nous avons rencontré Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité, au Havre, il y a quelques jours. Nous discutons de tout cela, car, dans ce domaine, il faut certainement accompagner les entreprises françaises faisant du commerce extérieur. S’agissant d’abord du positionnement géographique, nous les encourageons à se mettre plutôt du côté des voies d’eau. Les représentants de Voies navigables de France nous expliquaient qu’ils ne comprenaient pas pourquoi toutes les villes traversées par des fleuves navigables ne conservaient pas des plateformes logistiques en centre-ville, afin d’y décharger les marchandises et de parcourir le dernier kilomètre à partir d’elle. Plus on favorisera ces plateformes, plus on accompagnera les maires qui voudront instaurer cette dynamique dans leur centre-ville, et plus il y aura de chances que le fluvial soit utilisé. Nous devons encourager ces démarches ; c'est toute une politique d’ensemble qu’il faut mener. Nous commençons ce matin, avec l’aménagement de la Lys mitoyenne et, tous ensemble, nous défendrons des idées peut-être novatrices, ou anciennes, mais qui reviennent à l’ordre du jour, pour l’utilisation du fleuve comme voie principale de transport des marchandises.

Enfin, je voudrais remercier tous ceux qui ont répondu à notre invitation, que nous avons auditionnés, qui nous ont reçus sur place et qui, culturellement, m'ont fait progresser. Le Nord est toujours aussi accueillant.

M. Christian Hutin. Mon vote n’a rien à voir avec la qualité du rapport de Jean-Paul Lecoq, son objectivité et l’ouverture qu’il nous propose pour travailler ensemble, avec mon ami Franck Dhersin. Que nous puissions travailler ensemble, avec les deux ports majeurs et l’hinterland du Nord, est exceptionnel.

Toutefois, je m’abstiendrai sur le projet de loi car j’attends que l’État investisse très clairement, comme il le fait sur le canal Seine Nord ou le dossier qui nous intéresse aujourd'hui, pour permettre au port de Dunkerque d’être le point d’arrivée de l’ensemble des marchandises, afin que ce ne soit pas Rotterdam ou Anvers qui en profite. Pour le moment, l’État français n’a pas investi suffisamment d’argent pour que le Dunkerquois soit le troisième port de France et que les Hauts-de-France en profitent.

À l’issue de la discussion générale, la commission adopte l’article unique sans modification.

 

 


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   Annexe n°  1 : texte adopté par la commission

 

Article unique

Est autorisée l’approbation de la convention entre la République française, la région flamande et la région wallonne relative à l’aménagement de la Lys mitoyenne entre Deûlémont en France et Menin en Belgique (ensemble deux annexes) signée à Bruxelles le 19 novembre 2018, et dont le texte est annexé à la présente loi.

 

 


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   annexe n° 2 : Liste des personnes auditionnÉes

 

— M. Thierry Guimbaud, directeur général

— Mme Muriel Mournetas, chargée des relations institutionnelles

— Mme Marie-Céline Masson, directrice territoriale Nord–Pas-de-Calais

— M. William Diers, chef de l’unité opérationnelle de Lille

— M. Vincent Rousseau, chef de projet des travaux sous maîtrise d’ouvrage VnF

 

 

— M. Laurent Tapadinhas, directeur

 

 

— M. Thomas Doublic, chef du bureau des voies navigables

 

 

    M. Éric Fisse, directeur départemental

    M. Lionel Stanislave, chargé de la mission stratégique de l’eau, service Eau Nature et Territoires (SENT)

    M. Thierry Dutilleul, animateur Mission Inter-Services de l’Eau et de la Nature (MISEN)

 

 

— M. Franck Dhersin, vice-président chargé des transports et des infrastructures de transports, de la région Hauts-de-France

 

 

— M. Carl Delhaye, chef de projet des travaux de la traversée de Comines

 

 


([1]) Réponses du ministère de l’Europe et des affaires étrangères au questionnaire de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale.

([2])  Rapport sur le projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française, la région flamande et la région wallonne relative à l’aménagement de la Lys mitoyenne entre Deûlémont en France et Ménin en Belgique, fait par M. Jean-Noël Guérini au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat.