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N° 3822

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er février 2021

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE,
EN NOUVELLE LECTURE, SUR LE PROJET DE LOI modifié par le sénat, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE,


 

prorogeant l’état d’urgence sanitaire ( 3818)

PAR M. Jean-Pierre PONT

Député

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Voir les numéros :

Assemblée nationale :                                                                       1re lecture : 3733, 3739 et T.A. 542.

                              Commission mixte paritaire : 3820.

                 Nouvelle lecture : 3818.

 Sénat : 1re lecture : 296, 299, 300 et T.A. 49 (2020-2021).

                 Commission mixte paritaire : 321 et 322 (2020-2021).


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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION............................................ 5

examen deS ARTICLES

Article 1er (art. 7 de la loi n° 2020290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid19) Prorogation du cadre législatif de l’état d’urgence sanitaire

Article 2  (art. 1er de la loi n° 20201379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation  de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire) Prorogation de l’état d’urgence sanitaire

Article 4 (art. 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions) Prorogation des systèmes d’information mis en œuvre aux fins de lutter contre l’épidémie de Covid-19

Article 4 bis  Élaboration du pacte de gouvernance  des établissements publics de coopération intercommunale

Article 4 ter Délais de transfert de la compétence mobilité

Article 4 quater  Délai d’opposition au transfert de certaines compétences  en matière d’urbanisme

Article 5 (art. L. 382111 et L. 38412 du code de la santé publique) Application de la loi dans les collectivités d’outre-mer

COMPTE-RENDU DES DÉBATS


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Mesdames, Messieurs,

La commission mixte paritaire qui s’est réunie à l’Assemblée nationale le jeudi 28 janvier a permis d’acter la convergence de nos deux assemblées sur la nécessité de donner au Gouvernement les marges de manœuvre indispensables pour faire face à une situation désormais critique, sans toutefois s’accorder sur l’ensemble des dispositions restant en discussion.

Dans ce contexte grave et alors que les personnels soignants ont besoin d’un soutien total, tout doit en effet être mis en œuvre, dans les prochaines semaines, sous le contrôle du Parlement comme cela a été le cas jusqu’à présent, pour améliorer rapidement la situation sanitaire, limiter le nombre de décès et sortir au plus vite de la crise.

Votre rapporteur et la majorité de l’Assemblée nationale ont abordé cette commission mixte paritaire avec la volonté d’aboutir au nécessaire compromis qu’exigeait la situation. La suppression de l’article 3 dès l’examen du projet de loi par votre Commission en première lecture avait jeté les bases favorables d’un tel rapprochement.

Si des propositions complémentaires ont été formulées, en lien avec le Gouvernement, notamment sur la mise en place d’un dispositif de contrôle spécifique des mesures de confinement dans le temps, celles-ci n’ont malheureusement pas emporté la conviction des sénateurs. La commission mixte paritaire n’a pas été en mesure, dès lors, de proposer un texte commun.

L’Assemblée nationale est donc saisie, en nouvelle lecture, des dispositions restant en discussion du présent projet de loi.

 


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   examen deS ARTICLES

Article 1er
(art. 7 de la loi n° 2020290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid19)
Prorogation du cadre législatif de l’état d’urgence sanitaire

Adopté par la Commission avec modifications

Le présent article proroge jusqu’au 31 décembre 2021 l’application du chapitre Ier bis du titre III du livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique relatif à l’état d’urgence sanitaire.

1.   La position de l’Assemblée nationale en première lecture

Le cadre de l’état d’urgence sanitaire a été codifié au chapitre Ier bis du titre III du livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique, comprenant les articles L. 3131­‑12 à L. 3131‑20, par la loi du 23 mars 2020. Lors de la discussion de cette loi, le Sénat a souhaité fixer au 1er avril 2021 l’échéance du régime juridique de l’état d’urgence sanitaire.

Face à la persistance de la menace épidémique qui rend nécessaire le maintien d’un régime spécifique pour lutter contre la Covid‑19, l’Assemblée nationale a adopté le présent article qui repousse au 31 décembre 2021 la date de caducité du régime juridique de l’état d’urgence sanitaire.

2.   La position du Sénat en première lecture

Si le Sénat a validé, sans modification, la prorogation du régime juridique proposée par le présent article, il a néanmoins adopté différents amendements conduisant à altérer son contenu.

À l’initiative de son rapporteur, la commission des Lois du Sénat a tout d’abord apporté trois modifications au cadre du régime juridique de l’état d’urgence sanitaire, anticipant ainsi la discussion du projet de loi instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires qui aura vocation, à l’issue de la crise, à faire le bilan de ce régime et à le modifier, le cas échéant.

Sur le fondement des conclusions de la mission flash de l’Assemblée nationale sur le régime juridique de l’état d’urgence sanitaire, conduite par nos collègues Sacha Houlié et Philippe Gosselin, qui avait vocation à préparer la discussion du projet de loi précité, la commission des Lois du Sénat a adopté deux amendements relatifs au Conseil scientifique. Le premier, présenté par Mmes Valérie Boyer et Marie-Pierre de la Gonterie, permet aux commission parlementaires de consulter le Conseil. Le second, à l’initiative de Mme Boyer, précise qu’un décret détermine les règles en matière de déontologie, de conflits d’intérêts, de confidentialité, d’indépendance et d’impartialité applicables aux membres du Conseil.

À l’initiative de M. Michel Savin, le Sénat a également adopté, en séance publique, un amendement permettant aux personnes bénéficiant d’une prescription médicale d’activité physique adaptée sur ordonnance et aux personnes en situation de handicap, ainsi que l’encadrement nécessaire à leur pratique, de conserver l’accès à l’ensemble des équipements sportifs, qu’ils soient en plein air ou couverts, pendant l’état d’urgence sanitaire.

3.   La position de la Commission en nouvelle lecture

La Commission a rétabli la rédaction de l’article 1er adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture prorogeant, jusqu’au 31 décembre 2021, et confortant, en l’état, le cadre juridique de l’état d’urgence sanitaire.

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Article 2 
(art. 1er de la loi n° 20201379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation
de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire)
Prorogation de l’état d’urgence sanitaire

Adopté par la Commission avec modifications

Le présent article proroge, jusqu’au 1er juin 2021, l’état d’urgence sanitaire.

1.   La position de l’Assemblée nationale en première lecture

L’état d’urgence sanitaire a d’abord été en vigueur du 23 mars au 10 juillet 2020 pour faire face à la propagation du virus de la Covid‑19 en France. Face à la recrudescence de l’épidémie, le conseil des ministres du mercredi 14 octobre 2020 a adopté, conformément au premier alinéa de l’article L. 3131‑13 du code de la santé publique, un décret déclarant de nouveau l’état d’urgence sanitaire sur l’ensemble du territoire de la République à compter du samedi 17 octobre 2020. Conformément au dernier alinéa du même article L. 3131‑13, la prorogation de l’état d’urgence sanitaire au-delà d’un mois a été autorisée par la loi du 14 novembre 2020, jusqu’au 16 février 2021.

Compte-tenu du contexte sanitaire incertain et fragile et conformément aux préconisations du Conseil scientifique, la commission des Lois a approuvé, en première lecture, la prorogation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin 2021. Cette prorogation, de trois mois et demi au total, est apparue nécessaire, adaptée et proportionnée aux yeux de votre Commission.

2.   La position du Sénat en première lecture

Si la commission des Lois du Sénat a accepté le principe d’une prorogation de l’état d’urgence sanitaire, elle a néanmoins réduit, à l’initiative de son rapporteur, sa durée au 3 mai 2021.

Un deuxième amendement du rapporteur a excessivement contraint les mesures prises par l’exécutif, à compter du 26 janvier 2021, visant à interdire aux personnes de sortir de leur domicile, dont le confinement. Le dispositif adopté prévoit que la prorogation de ces mesures au-delà d’un mois ne peut être autorisée que par la loi après avis du Conseil scientifique.

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du rapporteur permettant au représentant de l’État dans le département d’autoriser, dans le cadre du confinement, l’ouverture des commerces de détail lorsque la mise en œuvre des mesures de nature à prévenir les risques de propagation du virus est garantie.

3.   La position de la Commission en nouvelle lecture

La Commission a rétabli la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale qui proroge, jusqu’au 1er juin 2021, l’état d’urgence sanitaire actuellement en vigueur sans altérer son dispositif compte tenu de la situation sanitaire.

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Article 4
(art. 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020
prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions)
Prorogation des systèmes d’information mis en œuvre aux fins de lutter contre l’épidémie de Covid-19

Adopté par la Commission avec modifications

Le présent article proroge, jusqu’au 31 décembre 2021, la mise en œuvre des systèmes d’information prévus par l’article 11 de la loi du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

1.   La position de l’Assemblée nationale en première lecture

Les systèmes d’information SI-DEP ([1]) et Contact Covid ([2]) introduits par l’article 11 de la loi du 11 mai 2020 étant indispensables à la lutte contre l’épidémie, l’Assemblée nationale a adopté sans modification la prorogation de ces systèmes jusqu’au 31 décembre 2021.

2.   La position du Sénat en première lecture

À l’initiative de son rapporteur, la commission des Lois n’a prorogé les systèmes d’information pour une durée limitée à trois mois après la date de prorogation de l’état d’urgence sanitaire actuellement en vigueur, soit jusqu’au 1er août 2021.

3.   La position de la Commission en nouvelle lecture

La Commission a rétabli la prolongation de la mise en œuvre des systèmes d’information au 31 décembre 2021 par cohérence avec sa position exprimée en première lecture du présent projet de loi.

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Article 4 bis
Élaboration du pacte de gouvernance
des établissements publics de coopération intercommunale

Adopté par la Commission sans modification

Introduit en commission des Lois à l’initiative de Mme Françoise Gatel avec l’avis favorable du rapporteur du Sénat, cet article a pour objet d’allonger le délai, fixé à neuf mois par l’article L. 5211-11-2 du code général des collectivités territoriales, pendant lequel les établissements publics de coopération intercommunale adoptent leur pacte de gouvernance. Ce délai est repoussé de trois mois, soit jusqu’au 28 juin 2021.

En nouvelle lecture, la Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 4 ter
Délais de transfert de la compétence mobilité

Supprimé par la Commission

Introduit en commission des Lois à l’initiative de Mme Françoise Gatel avec l’avis favorable du rapporteur du Sénat, cet article a pour objet de reporter de six mois les délais de transfert aux communautés de communes ou aux régions de la compétence d’organisation de la mobilité pour les communautés de communes qui ne l’exercent pas déjà.

Sur le fondement des explications formulées par le Gouvernement en séance publique au Sénat et conformément à la position qu’elle avait déjà adoptée sur le projet de loi autorisant la prorogation de l’état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire, la Commission a supprimé, en nouvelle lecture, cet article.  

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Article 4 quater
Délai d’opposition au transfert de certaines compétences
en matière d’urbanisme

Adopté par la Commission sans modification

Introduit en séance publique à l’initiative de M. Alain Richard avec l’avis favorable du rapporteur du Sénat et du Gouvernement, cet article a pour objet de sécuriser les délibérations d’opposition au transfert de la compétence en matière de plan local d’urbanisme, de documents d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale des communes aux communautés de communes ou aux communautés d’agglomération. À cette fin, il permet de faire courir le délai d’opposition à ce transfert à compter du 1er octobre 2020.

En nouvelle lecture, la Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 5
(art. L. 382111 et L. 38412 du code de la santé publique)
Application de la loi dans les collectivités d’outre-mer

Adopté par la Commission avec modifications

Le présent article rend applicable les dispositions de la présente loi qui le nécessitent dans les collectivités d’outre-mer.

1.   La position de l’Assemblée nationale en première lecture

Par coordination avec l’article 1er, le présent article proroge la clause de caducité du régime juridique de l’état d’urgence sanitaire au 31 décembre 2021 à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.

Par coordination avec la suppression de l’article 3, la Commission, à l’initiative de son rapporteur et de M. Paul Molac, a supprimé le I du présent article qui rendait applicable le régime de sortie de l’état d’urgence sanitaire prorogé par l’article 3 à l’ensemble du territoire de la République.

2.   La position du Sénat en première lecture

À l’initiative de son rapporteur, la commission des Lois du Sénat a adopté un amendement de coordination avec les modifications qu’elle a apportées à l’article 1er.

3.   La position de la Commission en nouvelle lecture

Par cohérence avec la suppression des modifications apportées par le Sénat à l’article 1er, l                            a Commission a rétabli la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.  

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COMPTE-RENDU DES DÉBATS

Lors de sa réunion du lundi 1er février 2021, la Commission examine, en nouvelle lecture, le projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire (n° 3818) (M. Jean-Pierre Pont, rapporteur).

Lien vidéo :               

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.10254285_6017f98ed98d2.commission-des-lois--projet-de-loi-prorogeant-l-etat-d-urgence-sanitaire--1-fevrier-2021

 

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous sommes réunis pour examiner en nouvelle lecture le projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire qui sera examiné demain en séance publique, la commission mixte paritaire, qui a eu lieu dans cette salle jeudi avec nos collègues sénateurs, ayant malheureusement échoué malgré nos efforts répétés.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. L’évolution de la situation sanitaire est de plus en plus incertaine depuis l’examen en première lecture du présent projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire. Vendredi soir, cette évolution a conduit le Gouvernement à prendre des mesures plus strictes visant à tenter d’éviter un nouveau confinement national de la population, en total accord avec le Président de la République.

Auparavant, la commission mixte paritaire, réunie à l’Assemblée nationale avait acté la convergence de nos deux assemblées sur la nécessité de donner au Gouvernement les marges de manœuvre indispensables pour faire face à une situation désormais critique, sans toutefois s’accorder sur l’ensemble des dispositions restant en discussion.

Dans ce contexte grave, et alors que les personnels soignants ont besoin d’un soutien total, tout doit être mis en œuvre pour améliorer rapidement la situation sanitaire, limiter le nombre de décès et sortir au plus vite de cette crise, dans les prochains jours et les prochains mois, sous le contrôle du Parlement, comme cela a toujours été le cas jusqu’à présent.

Avec la présidente de la commission et la majorité de l’Assemblée nationale, nous avons abordé cette commission mixte paritaire avec la volonté d’aboutir à l’accord qu’exige la situation. Je le dis avec beaucoup d’honnêteté, avec la présidente, nous nous sommes personnellement beaucoup impliqués pour nous donner toutes les chances de réussir.

La suppression de l’article 3, actée dès l’examen en première lecture du projet de loi, avait jeté les bases favorables d’un accord. Des propositions complémentaires ont été formulées pour poursuivre le rapprochement avec le Sénat, comme la possibilité d’un contrôle des mesures de confinement et de couvre-feu par l’instauration d’un débat sur la nécessité de leur prorogation après six semaines de mise en œuvre. Nous étions prêts à discuter de ses modalités. Cet egangement, inédit et formel, que l’exécutif était prêt à prendre, se serait ajouté à la déclaration et au débat, eux aussi suivis d’un vote, promis par le Premier ministre en amont d’un éventuel nouveau confinement.

Je regrette vivement que cette proposition de compromis n’ait pas été retenue et que la commission mixte paritaire ait échoué sur un dispositif proposé par le Sénat, qui visait à imposer le vote d’une loi dans un délai de quatre semaines. Cette mesure irréaliste, et inapplicable tant elle était contraignante, ne permettait pas, en effet, de disposer d’éléments nouveaux sur lesquels nous prononcer de manière sérieuse quant à la poursuite d’un éventuel confinement. Elle affectait la capacité de l’exécutif à agir avec réactivité face à l’évolution constante de l’épidémie.

Forts du travail de fond que nous avons engagé sur ce texte dès son dépôt, je vous propose donc de revenir à la rédaction équilibrée adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, qui, je le sais, en tant que rapporteur et en tant que médecin, permettra de poursuivre efficacement notre lutte.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Nous nous retrouvons suite à l’échec de la commission mixte paritaire. Nous le regrettons car des efforts importants avaient été réalisés afin de trouver un accord – et il paraissait si proche… Je salue à mon tour l’engagement de la présidente de la commission des Lois et du rapporteur. Jusqu’au bout, ils ont œuvré pour trouver cet accord.

La commission mixte paritaire a permis d’acter certains points de convergence : nous partageons le même constat, celui de la gravité de la situation actuelle et de la nécessité de proroger le régime de l’état d’urgence sanitaire, afin de permettre au Gouvernement de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour protéger la santé et la vie de nos concitoyens, ainsi que des personnels de santé.

Mais nous avons échoué à nous mettre d’accord sur les modalités de contrôle du Parlement en cas de confinement, et nous le regrettons. La proposition me semblait sincère et honnête puisqu’il s’agissait de déclencher l’article 50-1 de la Constitution, avec vote à l’issue du débat, si le confinement durait six semaines. Le Gouvernement s’y était engagé. La proposition a été refusée ; nous en prenons acte.

Pour conclure, le groupe La République en Marche est favorable à la prorogation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin 2021.

M. Philippe Latombe. Nous regrettons également que la commission mixte paritaire n’ait pu aboutir, car des efforts très importants ont été consentis au début de la commission mixte paritaire par nos collègues sénateurs. Mais lorsque nous avons voulu négocier, nous nous sommes malheureusement heurtés à un mur…

Il ne fallait pas, et il ne faut pas, se focaliser uniquement sur le confinement – et son éventuelle prolongation au-delà de six semaines. Son hypothèse, largement évoquée jeudi, a sans doute contribué à la crispation des débats lors de la commission mixte paritaire. Il a été acté qu’il interviendrait à l’issue du débat et du vote prévus par l’article 50-1 de la Constitution. Mais, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, le contrôle parlementaire est d’un tout autre ordre : il faut que nous disposions de réponses quand nous posons des questions à l’exécutif – et c’est le cas de façon beaucoup plus claire depuis quelques semaines. Le groupe du Mouvement Démocrate (MoDem) et Démoctates apparentés est également attaché à ce que toutes les décisions de l’exécutif qui relèvent du pouvoir législatif puissent être débattues au Parlement le plus rapidement possible. Je pense notamment aux ordonnances : dès leur publication, elles doivent être déposées sur le bureau de l’Assemblée et ratifiées par les parlementaires dans le cadre de leur mission de contrôle.

Le groupe MoDem et Démocrates apparentés reste sur sa position de première lecture et votera le texte dans sa version issue des débats à l’Assemblée nationale en première lecture.

M. Philippe Gosselin. À mon tour, je regrette l’échec de la commission mixte paritaire – j’y reviendrai.

Mais, alors que l’on parle beaucoup de contrôle parlementaire, qu’on s’en gargarise, la majorité décide de supprimer la commission d’enquête créée il y a quelques mois pour évaluer l’impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l’épidémie de covid-19. C’est un très mauvais signal : le Parlement serait au cœur du dispositif, mais la majorité vote la fin des travaux de cette commission d’enquête, ce qui a, à juste titre, fait réagir les oppositions.

On ne peut tenir deux discours : le Parlement serait le lieu de la concertation, du contrôle et de l’évaluation, mais on supprime les organes de contrôle de la crise ! Je tiens à prendre la commission à témoin de cette forme de schizophrénie !

J’en viens au projet de loi. La commission mixte paritaire a échoué, jeudi, dans un contexte très particulier – notre collègue Latombe l’a souligné. Cela faisait une dizaine de jours que les membres du Gouvernement préparaient les esprits à un nouveau confinement. Quelques heures encore avant que le deus ex machina n’apparaisse sur les écrans de télévision, le porte-parole du Gouvernement assurait à nos concitoyens qu’il y aurait un nouveau confinement très strict. Tout cela a pesé sur les débats de la commission mixte paritaire. Comment aurait-il pu en être autrement ? Voyez comment l’on considère le Parlement en ce moment : on nous malmène, on nous considère comme des pantins, on supprime les organes d’expression dont nous disposions grâce à la commission d’enquête, on présente certaines décisions comme inévitables compte tenu du contexte, puis, le lendemain, on change d’avis ! Il a même été question de nous réunir ce mardi pour une déclaration du Gouvernement suivie d’un vote, ce qui aurait amené à décaler l’examen de ce texte.

Je rends néanmoins hommage à la présidente de notre commission, qui a eu la bonne idée de décaler cette réunion, qui devait initialement se tenir quelques heures seulement après la commission mixte paritaire, afin de nous laisser le temps de travailler sur le texte et de déposer des amendements.

Tout cela montre bien la difficulté de banaliser l’état d’urgence sanitaire. Le Gouvernement déclare la main sur le cœur qu’il réunit le Parlement, mais il le fait contraint et forcé, en même temps que la majorité vote la suppression de la commission d’enquête. Quand comprendra-t-on que le cœur battant de la démocratie, c’est le Parlement ? Si je ne conteste pas que le Gouvernement doit pouvoir décider et qu’il tient ses pouvoirs de la Constitution, le bon fonctionnement de notre démocratie implique que l’on tienne compte des territoires et des institutions, à commencer par le Parlement. Il doit y avoir des clauses de revoyure ; il doit y avoir débat.

Voilà pourquoi le groupe Les Républicains ne pourra, pas plus que la fois précédente, apporter son soutien à ce mode de gestion de la crise. Tant que le Gouvernement jouera au yoyo, sans fixer de ligne directrice stable, nous resterons à l’écart, au lieu d’agir ensemble, dans l’intérêt collectif.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je précise – mais vous le savez parfaitement, Monsieur Gosselin – que notre démocratie est régie notamment par l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, dont l’article 6, cinquième alinéa indique que les commissions d’enquête ont un caractère temporaire et que leur mission prend fin par le dépôt de leur rapport – or le rapport de la commission d’enquête relative à l’épidémie de covid-19 a été déposé le 8 décembre 2020 – et, au plus tard, à l’expiration d’un délai de six mois à compter de la date de l’adoption de la résolution qui les a créées. Ce n’est donc pas la majorité qui a décidé de supprimer la commission d’enquête, c’est l’ordonnance de 1958 qui en avait prévu la fin – et je vous sais suffisamment attaché à nos institutions pour espérer que vous saurez le respecter.

M. Philippe Gosselin. Mais il n’y avait pas urgence, madame la présidente – d’autant que nous étions à la veille d’un nouveau confinement annoncé. Dans ce climat d’incertitude et de prises de paroles anxiogènes, il n’y avait aucune nécessité à envoyer un tel signal. L’ordonnance prévoit un délai maximum de six mois, ce qui laissait jusqu’au 8 juin.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Pourquoi le 8 juin ? Le rapport avait été adopté !

M. Philippe Gosselin. Nous aurions fort bien pu prolonger les travaux de la commission.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Ce n’est pas ce qui est écrit dans l’ordonnance.

Mme Marietta Karamanli. L’état d’urgence sanitaire a été déclaré de nouveau par décret du 14 octobre 2020. Une telle procédure ne peut valoir que pour une période courte ; au-delà, le recours à la loi s’impose.

Jeudi dernier, le Sénat et l’Assemblée nationale n’ont pas réussi à surmonter leurs points de désaccord, à savoir les échéances et les pouvoirs de contrôle du Parlement. Sur ce dernier point, nous avons été nombreux à souligner la nécessité d’un contrôle parlementaire strict. Plusieurs d’entre nous ont ainsi proposé non seulement de fixer une durée maximale pour la prorogation de l’état d’urgence sanitaire, mais aussi de renforcer les conditions de majorité dans ce cas de figure. Nous souhaiterions qu’un débat parlementaire soit organisé pour chaque nouvelle prolongation et pour toute mesure générale prise suite à une évolution notable des données médicales et scientifiques, ce qui suppose qu’une expertise publique, collégiale, transparente et contradictoire soit au cœur de la décision.

La commission mixte paritaire a constaté un désaccord sur l’exercice du contrôle du Gouvernement par le Parlement. Ce qui est en cause, ce n’est pas le périmètre respectif de chacun des organes, ce sont l’équilibre des pouvoirs, l’encadrement des mesures de limitation des libertés et l’élaboration et l’application des dispositions jugées nécessaires. Les amendements que le groupe Socialistes et apparentés a déposé ayant été jugés recevables, leur adoption permettrait peut-être d’aller un peu plus loin dans cette voie.

Je tiens à remercier notre présidente pour le débat contradictoire qu’elle favorise au sein de la commission.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mais que se passe-t-il aujourd’hui ? (Sourires.)

Mme Marietta Karamanli. J’insiste, madame la présidente. Nous vivons des moments difficiles. Si nous ne sommes pas d’accord sur tout, nous sommes néanmoins des hommes et des femmes responsables. Que nous essayions de trouver des solutions sans donner de leçon à qui que ce soit, ça grandit notre commission et le Parlement. Notre souhait est précisément d’aboutir à un travail mieux coordonné avec le Gouvernement, afin que les décisions ne proviennent pas uniquement de l’exécutif. Le Parlement a son mot à dire, et il est parfois nécessaire de passer par un vote.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. C’est pourquoi j’essaie dans la mesure du possible d’aboutir à un accord en commission mixte paritaire : je pense que cela ne peut qu’enrichir le Parlement et aller dans le sens de l’intérêt collectif. Quoi qu’il en soit, merci à tous deux pour vos propos, qui me touchent beaucoup.

La commission passe à l’examen des articles du projet de loi.

Article 1er

La commission adopte l’amendement CL13 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2

La commission est saisie des amendements identiques CL14 du rapporteur et CL12 de M. Guillaume Gouffier-Cha.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Il s’agit de rétablir au 1er juin 2021 la date du terme de l’état d’urgence sanitaire, que le Sénat a fixée au 3 mai.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Je précise que nous serions amenés à nous revoir avant le 1er juin s’il fallait proroger cet état d’urgence sanitaire ou mettre en place un dispositif transitoire, dans la mesure où nous avons décidé en première lecture de supprimer l’article 3.

M. Philippe Gosselin. M. Gouffier-Cha prend trop de précautions : dans tous les cas, nous devrons adopter un nouveau texte qui servira de fondement à un certain nombre de décisions – c’est le principe même de la légalité.

Je ne suis pas monté au créneau dès l’article 1er, mais ma remarque vaut pour les deux premiers articles : nous voyons bien que la majorité entend revenir au texte voté par l’Assemblée nationale en en évacuant les ajouts intéressants que le Sénat y avait apportés. Deux amendements adoptés par le Sénat sont notamment issus du rapport d’information sur le régime juridique de l’état d’urgence sanitaire que Sacha Houlié et moi avons rédigé : ils avaient réussi à passer sous les fourches caudines de la recevabilité et étaient forts utiles, mais M. le rapporteur vient de vous proposer de supprimer ces dispositions. Je comprends que les deux assemblées puissent être en désaccord, notamment parce que les majorités y sont différentes, mais sur un tel sujet, il est dommage de passer par pertes et profits les échanges intéressants et fructueux qui ont eu lieu au Sénat. Il est, paraît-il, possible de former des vœux jusqu’à la Chandeleur, donc jusqu’à demain : je souhaite donc que nous développions les passerelles entre les deux chambres. Je regrette que nous rétablissions le texte voté par l’Assemblée nationale en première lecture, sans faire preuve d’ouverture.

Je ne vous surprendrai pas en vous annonçant que le groupe Les Républicains ne votera pas ces deux amendements identiques.

M. Pacôme Rupin. Je partage le regret exprimé par M. Gosselin. Pour avoir participé à la commission mixte paritaire, je peux attester que nous n’étions pas très loin d’un accord – s’agissant de la date de fin de l’état d’urgence sanitaire, par exemple, nous aurions coupé la poire en deux. Si la commission mixte paritaire a échoué, c’est parce que le Sénat demandait qu’un éventuel confinement ne puisse être prolongé au-delà d’un mois sans être autorisé par la loi. Nous ne pouvions l’accepter.

Nous avons discuté d’une première prorogation de l’état d’urgence sanitaire en novembre dernier et avons commencé l’examen du présent projet de loi fin janvier, soit un peu plus de deux mois plus tard. Le rythme des débats relatifs à la prorogation de l’état d’urgence sanitaire me semble donc suffisamment soutenu. S’il fallait prendre de nouvelles mesures et proroger encore cet état d’urgence sanitaire, nous devrions en débattre bien avant le 1er juin et nous nous retrouverions certainement de nouveau dans deux mois et demi. La date du 3 mai paraît donc beaucoup trop précoce, tandis que celle du 1er juin nous permettra de débattre d’une éventuelle prorogation supplémentaire en temps et en heure.

M. Philippe Latombe. Très clairement, la date du 3 mai est trop précoce car les choses évoluent tous les jours ou tous les deux jours, notamment en matière de vaccination. Nous ne savons pas encore quand les laboratoires nous livreront les doses. Nous nous demandons toujours quel vaccin recevra quel type d’agrément, pour quel type de population. Nous avons besoin d’avoir un recul suffisant. Nous avions fait un effort, en commission mixte paritaire, en acceptant un compromis sur le 16 mai, qui n’était pourtant pas la date la plus adéquate compte tenu de certaines contraintes de calendrier – l’échéance intervenait après deux semaines d’interruption des travaux et une semaine de contrôle. Le 1er juin est une bonne date, qui nous laissera le temps de dresser un bilan des mesures prises jusque-là avant d’envisager la suite de façon sereine. Les débats contradictoires, que vous appelez de vos vœux, monsieur Gosselin, nécessitent des informations transparentes. Le rétablissement de la date du 1er juin, initialement votée par l’Assemblée nationale, ne traduit pas une volonté d’aller contre le Sénat, mais une volonté d’avancer dans la transparence, dans le cadre de débats sincères et contradictoires.

M. Philippe Gosselin. Je suis heureux d’entendre mes deux collègues regretter, d’une certaine façon, que nous n’ayons pas pu trouver un équilibre un peu différent en commission mixte paritaire jeudi dernier. Je leur en donne volontiers acte.

M. Rupin fait valoir que nous nous retrouvons régulièrement. Effectivement, nous avons débattu d’une première prorogation de l’état d’urgence sanitaire en novembre, et nous nous retrouvons maintenant par la force des choses, parce que le projet de loi instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires, présenté en conseil des ministres le 21 décembre, a été retiré de l’ordre du jour de notre assemblée le lendemain. De fait, nous nous retrouvons bien, d’une façon ou d’une autre, tous les deux mois ou tous les deux mois et demi. Pourquoi attendre, pour organiser ces débats, d’y être contraints et forcés ? Nous demandons que le Parlement soit clairement placé en position de débattre et de faire des propositions. Nous ressentons une forme d’exaspération et de ras-le-bol face au non-respect de nos pouvoirs collectifs – je ne parle pas de ceux de l’opposition.

Il y a quinze jours, le ministre des solidarités et de la santé a déclaré que ce projet de loi était un texte technique, d’ordre calendaire. Je proteste : la prorogation d’un état d’urgence n’est jamais un texte technique et calendaire. Nous sommes certes peu nombreux aujourd’hui, mais nous nous apprêtons à proroger un régime d’exception, qui crée du droit exorbitant du droit commun. Gardons bien cela en tête, car à force de nous retrouver, nous pouvons banaliser nos propos. Au sein de cette commission, nous nous respectons – même si le ton monte parfois, nous ne sommes pas anti-républicains ni opposés au principe de légalité – , mais rappelons-nous bien que le droit que nous créons ou prorogeons en ce moment est celui d’un état d’exception.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Nous avons pesé de tout notre poids pour que la commission mixte paritaire aboutisse. Au-delà de la date du 16 mai, qui a effectivement été évoquée, nous avons également mis sur la table la saisine du Conseil scientifique par les présidents des deux chambres.

La commission adopte ces amendements.

La commission examine l’amendement CL19 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Il tend à rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture.

Mme Marietta Karamanli. Je ne voterai pas l’amendement. Au-delà du désaccord sur la date, que Philippe Gosselin a évoqué, le texte du Sénat offrait au Parlement une possibilité de se positionner. C’était l’objet de la proposition faite lors de la commission mixte paritaire ainsi que de l’amendement du groupe Socialistes et apparentés, qui prévoyait que le Parlement se positionne par un vote, par exemple, sur la prorogation d’un confinement. Nous avons déjà montré que nous pouvons nous réunir rapidement.

Ces dispositions seront supprimées avec l’adoption de l’amendement du rapporteur, qui rétablit le texte initial de l’Assemblée, sans tenir compte des débats qui se sont tenus ni d’un éventuel nouveau confinement, lequel sera décidé sans que le Parlement ne puisse se positionner sur sa prorogation. Lorsqu’un confinement est décidé, le Parlement doit pouvoir se réunir pour un débat, engagé par le Premier ministre, pour ensuite se positionner par un vote. Une telle mesure, où chacun se positionne, est responsable. Je regrette que le rétablissement du texte de l’Assemblée ne prenne pas en compte ces avancées, qui ont été proposées par le Sénat en première lecture, et lors de la commission mixte paritaire.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Ce n’est pas le Sénat qui a proposé un débat du Parlement : il a refusé cette proposition faite par la majorité et le Gouvernement.

Mme Marietta Karamanli. Nous avions également fait cette suggestion !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. En effet, et certains l’ont également repris en commission mixte paritaire, mais c’est bien le Sénat qui a refusé le débat dans le cadre de l’article 50-1 de la Constitution. Il tenait à une loi, non à un débat.

Mme Marietta Karamanli. Je regrette que le rapporteur ne tienne pas compte de cette possibilité.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. D’une part nous ne pouvons pas l’inscrire dans la loi ; d’autre part, nous avions entamé une négociation en commission mixte paritaire où, vous le savez, chacun doit faire un pas vers l’autre. Philippe Gosselin l’a relevé, il est plutôt coutumier de revenir au texte initial, si la négociation échoue.

Mme Marietta Karamanli. Il faut changer la coutume !

M. Philippe Latombe. La commission mixte paritaire a en effet discuté d’un débat en application de l’article 50-1, suivi d’un vote. L’exécutif s’est engagé pour qu’un tel débat, avec vote, ait lieu quoi qu’il arrive, s’il décidait d’un confinement. Il l’a dit à l’ensemble des groupes politiques lors des réunions de la semaine dernière. Le confinement n’a pas été décidé, mais cet engagement est encore valable. Si une telle décision était prise, un débat dans les conditions prévues par l’article 50-1 de la Constitution, suivi d’un vote, aurait lieu. Il y a donc eu une avancée très significative de l’exécutif vers le Parlement sur ce sujet. L’ensemble des parlementaires l’avait d’ailleurs demandée.

En commission mixte paritaire, la négociation a porté sur la prorogation éventuelle d’un éventuel confinement. Nous n’en sommes pas là. La mesure, globale, doit comprendre des précisions sur sa date et sa forme. Le Parlement ne peut pas faire d’injonction au Gouvernement sur ce sujet. On ne peut donc pas inscrire dans la loi que l’on demande à l’exécutif d’organiser un débat en application de l’article 50-1 avec vote : cela n’est pas constitutionnel.

Une loi pour proroger un tel dispositif, qui est à la main du Gouvernement, paraît complexe et ne semblait pas être la solution adéquate. Étant donné l’engagement du Gouvernement sur un débat selon les modalités de l’article 50-1, avec vote, le Parlement sera consulté préalablement à tout confinement, quoi qu’on en dise.

M. Philippe Gosselin. À défaut d’injonction du Parlement, ce que, fort heureusement sans doute, la Constitution interdit – les institutions de la Ve République ne sont pas mal faites et je ne les jetterai pas avec l’eau du bain –, le Gouvernement avance sous la pression des événements. Il faut sans cesse que le Parlement, qui représente l’ensemble de nos concitoyens, arrache une petite mesure ou demande l’aumône d’un pouvoir supplémentaire. Philippe Latombe l’a dit à juste titre, nous aurons le débat fondé sur l’article 50-1 avec un vote, le cas échéant. Oui, mais il a fallu batailler pour arriver à cela.

Je regrette qu’il faille ainsi batailler, simplement pour permettre la reconnaissance des droits élémentaires du Parlement. Nous ne sommes pas dans une période de pouvoir ordinaire. Les institutions de la Ve République sont sans doute faites pour résister aux tempêtes – c’est ce qu’a permis l’application de l’article 16. Nous avons aussi des textes antérieurs, comme la loi de 1955 relative à l’état d’urgence. Il faut s’armer, je ne dis pas le contraire, mais pourquoi faut-il, à chaque fois, et depuis des mois, piailler, demander l’aumône de la reconnaissance des pouvoirs du Parlement. C’est usant, mais, comme vous pouvez le constater, nous ne lâchons rien, et nous n’avons pas l’intention de lâcher sur ce point.

Le confinement n’est pas l’élément le plus simple de l’état d’urgence sanitaire, puisqu’il s’agit d’une privation de liberté, d’une atteinte à des droits importants, comme la liberté de circulation, du travail ou d’entreprendre. Cela nécessite des contrôles particuliers. Alors que l’on avait un peu avancé, je regrette que l’on reparte en arrière, même si, effectivement, la tradition – elle n’a pas toujours du bon, Madame la présidente – veut que l’on revienne au texte initial. Ce n’est évidemment pas la première fois. Nous aurions pu être un peu plus « nouveau monde » qu’« ancien monde » cette fois-ci.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Je veux revenir sur la disposition imposant le vote d’une loi de prorogation du confinement au bout d’un mois. Certes, nous pouvons travailler très vite – nous l’avons montré.

M. Philippe Gosselin. On l’a fait !

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Pourtant, si un mois de confinement était décidé le 1er février, nous devrions nous réunir à partir du 15 février. Aurions-nous alors les éléments suffisants pour prendre une décision ? Je ne le crois pas.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CL18 tombe.

Puis la commission adopte l’article 2 modifié.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. L’article 3 a été supprimé par l’Assemblée nationale en première lecture. Le Sénat en a maintenu la suppression.

M. Philippe Gosselin. Le texte ne nous donne pas satisfaction sur l’ensemble, mais, sur ce point, les demandes répétées de l’opposition ont été entendues par la majorité. Il est bon que cette période floue, qui, selon la décision du Conseil constitutionnel du 9 juillet 2020, relève de l’état d’urgence sanitaire ait été supprimée. On peut au moins reconnaître cette petite avancée.

M. Pacôme Rupin. La majorité a décidé de supprimer l’article 3 dans l’espoir de trouver un accord avec le Sénat et que les groupes d’opposition, à l’Assemblée nationale, se rapprochent d’elle.

Je trouve dommage que, malgré un texte très équilibré, nous achoppions toujours sur la demande, à mes yeux abusive, d’avoir à voter un projet de loi pour prolonger le confinement.

Je me réjouis que vous saluiez le pas effectué en direction des oppositions et du Sénat mais nous aurions également aimé que vous en fassiez de même en direction de la majorité.

Article 4

La commission examine l’amendement CL15 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Il convient de rétablir la date du 31 décembre à la place de celle du 1er août.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 4 modifié.

Article 4 bis

La commission adopte l’article 4 bis sans modification.

Article 4 ter

La commission examine l’amendement de suppression CL16 du rapporteur.

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Il convient, là encore, de rétablir le texte initialement voté par l’Assemblée nationale.

M. Philippe Gosselin. Le Sénat a tout de même formulé des propositions intéressantes, par exemple, en permettant aux collectivités de prolonger ou d’adapter des mesures de gestion de crise. On ne peut que regretter que de telles améliorations concrètes ne soient pas retenues. Même si vous jugez, monsieur le rapporteur, que les remerciements ne sont pas à la hauteur de votre présent, vous n’êtes pas obligé de repartir avec lui ! Peut-être pourrez-vous le « re-présenter » en séance publique !

M. Jean-Pierre Pont, rapporteur. Si nous supprimons l’article 4 ter, nous reprenons le 4 bis et le 4 quater.

M. Philippe Gosselin. Fort heureusement !

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 4 ter est supprimé.

Article 4 quater

La commission adopte l’article 4 quater sans modification.

Article 5

La commission examine l’amendement CL17 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 5 modifié.

M. Philippe Gosselin. C’est ce que l’on appelle un prompt rétablissement, monsieur le rapporteur (Sourires) !

La commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Le texte sera examiné en séance publique demain, mardi 2 février, après la séance de questions au Gouvernement.

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*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire (n° 3818) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 

 


([1])              Le système d’information national de dépistage (SI-DEP) permet d’informer le patient et le professionnel de santé prescripteur sur les résultats du test et de regrouper l’ensemble des résultats obtenus pour les mettre à la disposition des autorités et personnels participant à la lutte contre l’épidémie (données individuelles) ou chargées du suivi épidémiologique et de la recherche sur le virus (données agrégées).

([2])              Élaboré par l’Assurance Maladie, Contact Covid assure le suivi des patients et de leurs cas contacts.