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N° 3876

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 février 2021.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi relative à la création d’une aide individuelle à l’émancipation solidaire,

 

 

 

Par MMBoris VALLAUD et Hervé SAULIGNAC,

 

 

Députés.

 

——

 

 

 

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale :  3724.

 

 


 

 


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SOMMAIRE

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 Pages

Avant-propos

I. La crise sanitaire a aggravÉ un contexte social difficile et placÉ la jeunesse dans une prÉcarité inÉdite

1. La crise sanitaire vient accélérer le mouvement de renforcement des inégalités que la France subit depuis plusieurs décennies

2. Notre système de prestations sociales ne permet pas de protéger les premières victimes de la crise, les jeunes

3. Ce besoin de changement apporté par la crise doit également nous permettre de répondre aux failles de nos dispositifs sociaux, et tout particulièrement du RSA

II. Pour replacer justice et solidaritÉ au cœur de notre modÈle social, la prÉsente proposition de loi s’appuie sur un double dispositif : un revenu de base inconditionnel et une dotation en capital universelle sur le COMPTE PERSONNEL d’ACTIVITÉ

1. La présente proposition de loi résulte d’un long cheminement politique et citoyen

2. Le dispositif de revenu de base proposé repose sur les principes de simplification d’accès et d’ouverture à tous de la prestation

3. L’instauration d’une dotation universelle permettrait de créer un tremplin vers l’emploi chez les jeunes.

4. La présente proposition de loi repose sur un financement audacieux qui poursuit l’objectif de justice sociale par le système fiscal.

COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 1er Instaurer un revenu de base inconditionnel

Article 2 Instaurer une dotation tremplin universelle sur le compte professionnel d’activité

Article 3 Coordinations

Article 4 Entrée en vigueur

Article 5 Gage financier

EXAMEN EN COMMISSION

I. Discussion gÉnÉrale

II. examen des articles

Annexes

Annexe n° 1 : SynthÈse des rÉsultats de la consultation citoyenne

Annexe N° 2 : simulations

Annexe n° 3 : Liste des personnes auditionnÉes par les rapporteurs

Annexe N° 4 : LISTE DES TEXTES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE ABROGÉS OU MODIFIÉS À L’OCCASION DE L’EXAMEN DE LA PROPOSITION DE LOI


— 1 —

 

   Avant-propos

 

« Une fois émancipé, tout homme cherchera lui-même son chemin », Jean Jaurès.

Avec cette proposition de loi relative à l’aide individuelle à l’émancipation solidaire, les rapporteurs entendent proposer un chemin pour que beaucoup de nos concitoyens trouvent le leur.

Donner à chacun un revenu de base et une dotation en capital dès sa majorité, c’est d’abord aller vers un idéal d’égalité et de justice qui a été trop souvent oublié au profit d’une comptabilité cynique, d’une défense pavlovienne de l’existant ou encore d’une dévalorisation inconsciente et injustifiée de l’envie de la jeunesse de créer, de faire et d’être utile.

C’est aussi se montrer réaliste, car si rien ne justifie les frontières artificielles qui ont été créées aujourd’hui autour de l’âge de vingt-cinq ans, tout appelle au contraire dans le contexte dans lequel nous vivons à donner à la jeunesse les moyens de se construire un avenir.

I.   La crise sanitaire a aggravÉ un contexte social difficile et placÉ la jeunesse dans une prÉcarité inÉdite

1.   La crise sanitaire vient accélérer le mouvement de renforcement des inégalités que la France subit depuis plusieurs décennies

En 2020, si la crise sanitaire a fait basculer un million de Français dans la pauvreté, cette bascule s’est inscrite dans un environnement déjà très dégradé. L’INSEE estimait qu’en 2018, déjà, 14,8 % des ménages vivaient en dessous du seuil de pauvreté ([1]), soit 9,3 millions de personnes. Ces chiffres sont d’ailleurs corroborés par le récent rapport de l’Observatoire des inégalités ([2]) qui estime que parmi eux, 2 millions de personnes sont en situation de précarité extrême, vivant avec moins de 700 euros par mois. Entre 2002 et 2018, le taux de pauvreté a augmenté de 1,6 point en France. Cette augmentation soudaine se contente donc de prolonger et d’accélérer les tendances des dernières décennies : les inégalités, qui avaient reculé au début du XXème siècle, progressent à nouveau, jusqu’à l’insoutenable.

Depuis le début de l’année 2020, la crise de la covid-19 a mis en lumière le manque de respect et de cohérence dont fait preuve notre société à l’égard de ses principes républicains : d’une part, plus que jamais, les professions dont nous avons le plus besoin ne sont pas suffisamment soutenues et valorisées en dépit de leur utilité commune indéniable. D’autre part, la crise sanitaire que nous affrontons a poussé nombre de nos concitoyens vers la précarité, l’isolement et la détresse sociale. Nous ne pouvons pas continuer d’assister, indifférents, à l’érosion de notre socle social républicain.

En effet, si la pauvreté peut naître d’une conjoncture défavorable, les études comme l’expérience montrent qu’elle s’installe et renforce les inégalités de génération en génération, condamnant les individus dès leur naissance à un niveau de vie déterminé. Ces inégalités mettent en péril nos valeurs, et ne sont plus combattues suffisamment par l’action publique aujourd’hui. Augmentation des transmissions du patrimoine, fiscalité qui protège et favorise les plus riches, répartition toujours plus injuste des revenus, ce sont autant de facteurs qui viennent saper la cohésion de nos sociétés, ébranler nos modèles sociaux et disqualifier la promesse d’égalité que nous nous sommes faites.

2.   Notre système de prestations sociales ne permet pas de protéger les premières victimes de la crise, les jeunes

La jeunesse est, dans son ensemble et en son sein même, la population la plus marquée par ces inégalités. Les jeunes connaissent aujourd’hui en France un taux de chômage qui est plus du double de la moyenne nationale. Ils affrontent de plus un coût du logement qui ne cesse de croître dans leur budget total. Ils sont aussi la population qui possède le moins de patrimoine, et connaissent un taux de pauvreté trois fois supérieur à celui des plus de 60 ans. Le dernier rapport de l’Observatoire des inégalités ([3]) affirme ainsi que la moitié des pauvres en France ont moins de trente ans. Plus précisément, au sein de la tranche d’âge des 18-24 ans, le taux de pauvreté atteint 12,8 %, deux fois plus élevé que la moyenne nationale.

Dans cette crise, les jeunes de moins de vingt-cinq ans sont d’autant plus fragilisés qu’ils subissent une double peine : privés pour beaucoup de formation, d’emploi et d’opportunité de préparer leur avenir, ils ne sont pas soutenus au même titre que les autres citoyens par nos minimas sociaux. Non éligibles au revenu de solidarité active (RSA), ils ne peuvent compter que sur les mécanismes de solidarité familiale, catalyseurs des inégalités marquant notre société. Ainsi, l’entrée dans l’âge adulte se fait en France d’abord par la majorité pénale, ensuite par la majorité civique et, seulement dans un dernier temps, par une majorité sociale une fois atteint l’âge de vingt-cinq ans.

Incomplètes, partielles ou ponctuelles, nos prestations à destination des jeunes ne sont plus suffisantes : l’ouverture du RSA aux « jeunes actifs » dépend de critères si restrictifs que seuls 800 foyers bénéficient de ce dispositif ([4]). Ainsi, cette prestation qui se veut le socle de « solidarité active » de notre pays, prive de toute solidarité les citoyens les plus jeunes, particulièrement touchés par la précarité, au simple motif de leur âge qui serait prétendument celui de l’immaturité.

De même, le fonds d’aide aux jeunes (FAJ) permet en dernier recours de subvenir ponctuellement aux situations de grande difficulté sociale ou professionnelle connue par des jeunes de 18 à 25 ans. La « garantie jeunes », dispositif accompagnant des jeunes pour leur réinsertion dans l’emploi, ne s’adresse aujourd’hui qu’à un nombre encore trop faible de bénéficiaires. Ces dispositifs au nombre de places limité ancrent l’idée qu’en tant que jeune, être accompagné vers la réinsertion n’est pas un droit, mais un rare avantage réservé à quelques-uns.

Pourquoi ne sommes-nous pas davantage préoccupés par les risques que subit notre jeunesse ? La reconnaissance d’un « risque vieillesse » a, depuis des années, justifié l’existence d’un « minimum vieillesse » pour nos personnes âgées les plus démunies. Personne, aujourd’hui, ne saurait remettre en cause la nécessité de fournir aux retraités, et même aux individus de plus de vingt-cinq ans, un revenu minimum garanti.

Pourtant, notre jeunesse constate que la solidarité nationale ne fonctionne pas pour elle, comme si, selon une formule âpre mais juste, entendue par les rapporteurs au cours de leurs auditions, pour être jeune, il fallait « en baver ». En effet, commencer une vie professionnelle stable après des études supérieures financées par ses parents devient le privilège de quelques-uns. Il est grand temps d’oser mettre en place une prestation inconditionnelle à destination de tous, et surtout des plus jeunes, pour pallier la situation critique qui est bien trop souvent la leur. Il s’agit tant de leur redonner les moyens de faire face, au jour le jour, aux dépenses de première nécessité, que de leur assurer la possibilité de construire un futur stable, serein, en adéquation avec leurs projets professionnels.

La France, qui a toujours su développer un modèle social exigeant, doit retrouver ses ambitions et ses moyens d’agir en matière de lutte contre la pauvreté. La création du RMI en 1988, de la « garantie jeunes » en 2013 ou de la prime d’activité en 2015 ont constitué de précieuses étapes, mais il faut aller aujourd’hui au bout de la logique d’un continuum de protection des parcours et des individus tout au long de la vie. Aujourd’hui encore, et plus que jamais face à la nécessité de construire le « monde de demain », nous devons engager des réformes ambitieuses en matière d’égalité et de lutte contre la pauvreté.

3.   Ce besoin de changement apporté par la crise doit également nous permettre de répondre aux failles de nos dispositifs sociaux, et tout particulièrement du RSA

Notre système de protection sociale présente par ailleurs des failles certaines qui nuisent à l’action sociale de l’État.

Tout d’abord, le système prédominant de prestations quérables en France encourage le phénomène de non recours aux droits sociaux, particulièrement important s’agissant du RSA. Ainsi, les individus sont souvent mal informés sur leurs droits et ignorent les prestations auxquelles ils sont éligibles. Auditionné par les rapporteurs, le sociologue Benjamin Vial décrit très bien le parcours du combattant que peuvent représenter pour certains allocataires les procédures de demandes de prestation ([5]). En ce sens, instaurer un régime de versement automatique des prestations sociales, et plus particulièrement du revenu de base présenté à l’article 1er de la présente proposition de loi, permettrait de lutter contre le non-recours et d’inclure à nouveau les individus les plus éloignés de notre système social.

Le financement du RSA est également à repenser au regard des difficultés rapportées par les collectivités locales. Le financement du RSA est actuellement confié aux conseils départementaux, qui dénoncent les situations budgétaires insoutenables dans lesquelles ils sont plongés du fait de cette mission. Le nombre d’allocataires toujours croissant, et les financements de l’État, qui peinent à suivre, mettent en péril le bon versement de cette prestation indispensable pour les bénéficiaires.

Enfin, l’articulation et le fonctionnement de certaines prestations nuisent à l’effectivité de leur action. S’agissant des prestations en faveur des jeunes, la coexistence du dispositif, très peu sollicité, du « RSA jeune » ([6]), et de la « garantie jeunes » ([7]), limitée à un certain nombre de jeunes, ajoute à la confusion et diminue donc le potentiel recours des jeunes aux prestations sociales. On observe également cette confusion autour du fonctionnement de la prime d’activité, qui ne cesse de se complexifier avec l’instauration de bonifications individuelles qui rendent difficile l’estimation d’un montant perçu. La présente proposition de loi souhaiterait dès lors répondre à ces écueils par la simplification et l’unification de certains de nos dispositifs sociaux, sans sacrifier ni le montant ni la qualité d’accompagnement qu’ils présentent aujourd’hui.

II.   Pour replacer justice et solidaritÉ au cœur de notre modÈle social, la prÉsente proposition de loi s’appuie sur un double dispositif : un revenu de base inconditionnel et une dotation en capital universelle sur le COMPTE PERSONNEL d’ACTIVITÉ

Pour replacer justice et solidarité au cœur de notre modèle social, la présente proposition de loi s’appuie sur un double dispositif : un revenu de base inconditionnel et une dotation universelle sur le compte personnel d’activité (CPA). Le revenu de base inconditionnel, ouvert dès dix-huit ans, doit permettre à tous de pouvoir faire face aux dépenses de première nécessité, afin qu’aucun citoyen ne soit voué à la misère sociale. La dotation, accordée dès la majorité, doit servir de tremplin à chaque jeune, en lui donnant les moyens de construire son insertion professionnelle, quelle que soit sa situation sociale.

1.   La présente proposition de loi résulte d’un long cheminement politique et citoyen

Née d’une volonté de dix-huit départements d’expérimenter un dispositif innovant, une première proposition de loi, à l’initiative d’Hervé Saulignac, avait souhaité mettre en place une expérimentation d’un revenu de base inconditionnel en 2018. Par la suite, cette proposition a fait fleurir des dispositifs audacieux dans nos territoires. C’est le cas de la commune de Grande Synthe, dont le maire a été auditionné par les rapporteurs, qui depuis 2019 propose un minimum social garanti qui protège désormais 17 % de sa population, preuve s’il en est de la nécessité mais surtout de la faisabilité du projet porté par les rapporteurs.

Les rapporteurs ont souhaité nourrir leurs recherches par l’avis et le savoir-faire d’experts, en s’appuyant notamment sur un rapport de l’Institut des politiques publiques qui examine et chiffre les modalités de création du revenu de base, en présentant les différentes hypothèses qui structuraient leur réflexion.

Les rapporteurs tiennent par ailleurs à ce que cette proposition de loi ne soit pas construite uniquement par les chiffres et les experts, mais qu’elle soit le reflet d’une concertation plus large qui entendrait les besoins et aspirations réelles des citoyens. De cette volonté ressort une consultation citoyenne ambitieuse, rendue possible grâce à l’association Parlement et citoyens. Rassemblant plus de 6 500 interventions, cette consultation est essentielle pour garantir un projet construit dans un dialogue constant avec les citoyens qui souhaitent se saisir d’un sujet aussi important que celui-là.

La consultation a permis de démontrer la priorité pour les citoyens d’ouvrir le revenu de base dès 18 ans (81 % de votes favorables) et d’instaurer une dotation universelle dès 18 ans (73 % de votes favorables) ([8]). L’adhésion des participants a également pu être quantifiée pour la proposition de financement de la présente proposition de loi par la taxation des multinationales (95 % de votes favorables), ainsi que par la création d’une nouvelle tranche de l’impôt sur le revenu à 50 % pour les revenus supérieurs ou égaux à 250 000 euros (75 % de votes favorables).

Les rapporteurs entendent promouvoir un processus démocratique qui combine sérieux académique et parole citoyenne, permettant un débat apaisé entre des élus, représentants de la nation, et des citoyens. Par cette méthode ont ainsi été débattues les questions du montant de la dotation, de ses usages, du montant du revenu de base, de son inconditionnalité, de sa familialisation.

2.   Le dispositif de revenu de base proposé repose sur les principes de simplification d’accès et d’ouverture à tous de la prestation

Cette consultation a notamment permis de mettre en lumière les variations très fortes que peut revêtir le terme de « revenu de base ». Inspirés des idées de Thomas Paine dans son ouvrage La Justice agraire, de 1797, de nombreux socialistes et libéraux ont défendu au siècle dernier le revenu de base comme outil de justice sociale. Aujourd’hui encore, le Mouvement français pour un revenu de base (MFRB), le collectif Droit au revenu ou l’Association internationale pour un revenu d’existence, auditionnés par les rapporteurs, portent l’idée de la nécessité d’instaurer un tel dispositif. C’est également le cas du Conseil économique, social et environnemental ([9]), de multiples think tanks et fondations, et de nombreuses personnalités politiques. Pourtant, les déclinaisons de revenu de base sont presque aussi nombreuses que ceux qui les défendent.

La présente proposition de loi n’entend pas donner raison à tous les partisans du revenu de base : les rapporteurs ont souhaité développer une proposition s’opposant à la fois à l’approche traditionnelle des prestations spécifiques sous conditions de ressources et à la conception d’un revenu distribué à tous, sans aucune condition de revenu et pour solde de tout compte. La proposition de loi admet comme principes l’inconditionnalité de son versement ([10]), la simplification et la dégressivité de la prestation, le versement automatique et l’ouverture du droit à tous dès la majorité civile, soit dix-huit ans.

Ainsi, cette proposition se démarque en tous points du projet gouvernemental de revenu universel d’activité. Ce projet, qui prétend simplifier le système de prestations sociales, masque en réalité un flou technique incompréhensible. Voilà bientôt quatre ans que le Président Macron a évoqué cette réforme mystérieuse dont on ne sait toujours pas ce qu’elle comporte réellement. En janvier 2019, lors du débat en séance publique au sujet de la proposition de loi ([11]) portant sur l’instauration d’un revenu de base à titre expérimental, la secrétaire d’État, Christelle Dubos s’engageait à ce que ce revenu universel d’activité soit voté « au cours de l’année 2020 ». Le Gouvernement pense-t-il que la pauvreté puisse encore attendre ? Souhaite-il inclure l’allocation adulte handicapé (AAH), dans son nouveau dispositif, contre la volonté de toutes les associations de représentants de personnes en situation de handicap ? Souhaite-il continuer d’exclure les individus de moins de vingt-cinq ans, au risque d’omettre encore une fois la souffrance de nos jeunes concitoyens ? Aujourd’hui, l’heure n’est plus à l’attente ni à l’hésitation. D’ailleurs, le peu d’informations communiquées sur ce projet ne saurait rassurer les partisans d’un véritable revenu de base : le RUA viserait en effet à s’assurer que le « travail paye systématiquement » ([12]), invoquant insidieusement la fainéantise d’une frange de la population, et par une nouvelle prestation qui sera créée « en préservant l’enveloppe budgétaire » ([13]) actuellement consacrée au système de solidarité actuelle, soit à enveloppe constante.

Il n’y a pas de recette magique : mieux protéger les Français face à la précarité et l’isolement social qu’ils connaissent ne peut pas se faire sans nouveaux moyens pour accompagner les individus délaissés par nos politiques publiques depuis trop d’années. Un nouveau droit implique un nouveau financement, pour assurer sa pérennité, qui pourrait s’appuyer sur une ambitieuse réforme fiscale (cf. infra).

Face à la gravité de la situation sociale en France, les rapporteurs sont conscients de la nécessité d’accélérer ce combat en instaurant le dispositif à l’échelle nationale. Force est de constater que cette nécessité est perçue par un spectre politique de plus en plus large, comme le démontre l’adoption de la résolution relative au lancement d’un débat public sur la création d’un mécanisme de revenu universel le 26 novembre 2020 au sein de notre Assemblée, ou encore les prises de position qui se multiplient ces derniers mois, et qui émanent désormais de tous les horizons politiques, attestant d’une prise de conscience bienvenue et qui ne saurait rester sans une traduction politique à la hauteur des enjeux.

Les prises de position sur ce sujet se multiplient d’ailleurs depuis plusieurs mois. Ainsi, Esther Duflo, lauréate du prix Nobel d’économie en 2019, s’est positionnée en faveur d’un revenu de base pour les plus jeunes et les plus pauvres, tout en mettant en garde contre la tendance, pour les politiques publiques françaises à « essayer d’éviter les mauvais pauvres », car ces derniers, s’ils bénéficiaient d’une aide trop généreuse ou non soumise à des conditions strictes, « seraient tentés de se prélasser dans leur pauvreté » ([14]). Les travaux menés par ses collègues au sein du Poverty Lab démontrent au contraire la nécessité que ces aides bénéficient à tous ceux dans le besoin ([15]). De même, l’expérimentation menée par l’association Territoires zéro chômeur de longue durée ([16]), prouve que l’inaction contre la pauvreté coûte plus cher que les politiques permettant de la combattre.

3.   L’instauration d’une dotation universelle permettrait de créer un tremplin vers l’emploi chez les jeunes.

Les rapporteurs souhaitent compléter l’effet émancipateur d’un revenu de base inconditionnel par l’attribution d’une dotation universelle en capital sur le compte de formation des individus dès 18 ans, afin d’amplifier la défamilialisation de droits sociaux. Comme mentionné précédemment, la crise actuelle et, plus largement, le contexte social depuis quelques décennies, privent les jeunes des moyens matériels et techniques pour mettre en place leurs projets et avancer dans leur parcours professionnel. En dotant leur compte personnel d’activité de 5 000 euros dès leur dix-huit ans, les rapporteurs souhaitent réinstaurer une égalité intra-générationnelle qui sera un tremplin vers l’entrée dans la vie active. Ils souhaitent également répondre à la situation insoutenable des jeunes au cœur de la crise, qui subissent non seulement un chômage massif, mais aussi un grand risque de décrochage scolaire, et un manque de confiance en l’avenir.

4.   La présente proposition de loi repose sur un financement audacieux qui poursuit l’objectif de justice sociale par le système fiscal.

Conscients que la période actuelle entraîne une hausse des inégalités et une raréfaction des ressources publiques, les rapporteurs souhaitent financer le nouveau dispositif par une fiscalité plus juste et plus ambitieuse pour reconstruire une solidarité sociale. En effet, si le coût de cette réforme a été estimé à hauteur de 25 milliards d’euros, les rapporteurs sont convaincus que les ressources nécessaires sont accessibles, si nous avons le courage d’aller les chercher. Fiscalité des successions avantageuse depuis des années pour les plus riches, entreprises multinationales hors-sol qui se soustraient au devoir de l’impôt : il est nécessaire d’y mettre un terme pour enfin recréer une fiscalité redistributive et équitable au service de la justice sociale.

Bien que le présent texte de loi ne mentionne pas les propositions de financement, celles-ci sont détaillées dans le livret présentant notre projet et les rapporteurs se tiennent prêts à les inclure sous forme d’amendements à la demande de leurs collègues députés.

Si elle était adoptée, cette proposition de loi serait le symbole d’une avancée majeure pour la protection sociale française. L’instauration d’un revenu de base inconditionnel et d’une dotation universelle du CPA marquerait l’ouverture d’un paradigme nouveau, dans lequel chaque jeune citoyen entrerait dans la vie active avec les outils pour construire son insertion dans l’emploi et, plus généralement, dans la société.

Face à un projet de cette ampleur, il sera tentant pour certains d’opposer à l’idéal réaliste la caricature d’un « cadeau » fait à une jeunesse qui ne le mériterait pas, ne le demanderait pas ou ne saurait pas quoi en faire. Pour les rapporteurs, la vérité est non seulement toute autre mais elle est surtout tout le contraire.

Une telle évolution serait tout à la fois la juste contrepartie au mauvais sort que cette crise a contribué à faire à notre jeunesse, la véritable réponse à ses attentes en termes d’émancipation et d’égalité formulées depuis des années et le meilleur des investissements que notre pays pourrait faire dans son avenir.

AILE(S) : combat commun, diversité sémantique

Après de multiples auditions auprès de nombreux collectifs, chercheurs, associations, syndicats et en s’appuyant sur la consultation citoyenne, les rapporteurs ont constaté qu’au-delà d’une grande convergence sur le fond du dispositif, bien compris comme étant comme une avancée très importante pour les personnes concernées, le débat sur le meilleur terme pour le qualifier n’a pas été totalement épuisé.

Le choix d’une « aide individuelle à l’émancipation solidaire » qui constituerait la combinaison d’un « revenu de base » ouvert dès 18 ans et d’une « dotation-tremplin » ouverte dès 18 ans peut naturellement se discuter et il l’a été.

D’autres termes proposés ont pu interpeler les rapporteurs lors des auditions comme ceux de « revenu garanti », de « revenu universel », de « socle citoyen », de « minimum jeunesse » pour le premier dispositif, de « capital universel » pour le second.

Ils souhaitent donc très modestement maintenir leur proposition terminologique, tout en restant très ouverts à ce qu’un ou des termes mieux choisis ou plus rassembleurs puissent être trouvés. Mais ils constatent que cette évolution des « mots » supposerait au prélable une issue fructueuse pour la « chose » au cours des débats parlementaires.

 


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   COMMENTAIRE DES ARTICLES

Article 1er
Instaurer un revenu de base inconditionnel

Rejeté par la commission

L’article 1er propose la création d’un revenu de base inconditionnel.

Ouvert à tous dès dix-huit ans et versé automatiquement aux personnes qui y sont éligibles, il combinerait le caractère différentiel du revenu de solidarité active (RSA) et le soutien au pouvoir d’achat en cas de reprise d’activité de la prime d’activité. Ainsi, cette prestation unifiée doit permettre de répondre aux principaux écueils des prestations actuelles qui ont montré leurs limites pour lutter contre la pauvreté.

Dans le souci de soulager les conseils départementaux, afin qu’ils se concentrent davantage sur leurs compétences en matière d’accompagnement et d’insertion, le financement de l’allocation serait entièrement recentralisé.

I.   Des prestations sociales qui ne parviennent pas À protéger suffisamment contre la pauvreté, notamment chez les plus jeunes

1.   Des dispositifs parcellaires et fragmentés pour soutenir les citoyens les plus démunis et les accompagner vers le retour à l’emploi

La volonté d’instaurer une aide individuelle à l’émancipation solidaire fait suite au constat préoccupant qu’aujourd’hui, les prestations sociales soutenant le niveau de vie des ménages les plus précaires présentent de graves écueils qui ne permettent plus de remplir leur objectif de manière optimale.

a.   Le revenu de solidarité active (RSA)

Le revenu de solidarité active (RSA) est entré en vigueur le 1er juin 2009 en France métropolitaine, en application de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, et le 1er janvier 2011 dans les départements et les départements et collectivités d’outre-mer ([17]). Il a remplacé le revenu minimum d’insertion (RMI) ([18]), l’allocation de parent isolé (API) et les dispositifs d’intéressement à la reprise d’activité qui leur étaient associés. Fin juin 2020, 1,99 million de foyers sont couverts par le RSA, correspondant à une hausse de 6,2 % vis-à-vis de juin 2019, soit 120 000 allocataires supplémentaires ([19]).

Le montant du RSA, allocation « différentielle », varie en fonction des ressources du foyer. Le calcul des ressources du foyer prend en compte la moyenne mensuelle de l’intégralité des revenus d’activité ou assimilés perçue par l’ensemble des membres du foyer sur le trimestre précédent, de quelque nature qu’elles soient, notamment les avantages en nature ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux ([20]), certaines prestations familiales ([21]), les aides au logement ([22]), et l’allocation adulte handicapé.

Le montant du RSA correspond à la différence entre un montant forfaitaire défini par décret et réévalué périodiquement en fonction de l’inflation, d’une part, et le niveau de ressources du foyer ([23]), d’autre part. Depuis le 1er avril 2020, le montant forfaitaire pour une personne seule et sans enfant est de 497 euros et de 711,62 euros pour un couple sans enfant ([24]).

Le RSA peut être complété par l’aide personnalisée de retour à l’emploi mentionnée à l’article L. 5133-8 du code du travail, si cette dernière ne suffit pas à porter les ressources du foyer au niveau du montant forfaitaire.

Barème des montants mensuels forfaitaires du RSA, selon le type de foyer, au 1er avril 2020

(en euros)

 

 

Allocataire seul

Allocataire seul avec majoration

Allocataires en couple

Sans enfant

497

657,47 (en cas de grossesse)

711,62

Un enfant

779,40

899,22

881,05

Deux enfants

948,83

1 140,97

1 054,09

Source : décret n° 2020-490 du 29 avril 2020.

Comme illustré par le tableau ci-dessus, la taille du foyer détermine fortement le montant du revenu de base. L’article L. 262-5 du code de l’action sociale et des familles prévoit en effet que le conjoint, le concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité peut être pris en compte au titre des droits du bénéficiaire, s’il respecte les conditions mentionnées à l’article L. 262-4 relatives à la régularité du séjour sur le territoire et à sa recherche ou son occupation d’un emploi.

Le RSA s’adresse uniquement aux individus de plus de vingt-cinq ans ou à ceux de moins de vingt-cinq ans assumant la charge d’un enfant né ou à naître, résidant en France ([25]).

La prestation peut également être ouverte aux jeunes de moins de vingt-cinq ans dans les cas très rares dans lesquels l’individu a travaillé deux années au cours des trois dernières années, dans le cadre du « RSA jeune » ([26]) dont 800 foyers ont bénéficié en 2018 ([27]). Le nombre de bénéficiaires du « RSA jeune » n’a d’ailleurs cessé de diminuer depuis sa création, et plus particulièrement depuis 2016 avec la création d’un dispositif quasi-concurrent, la « garantie jeunes ».

En application de l’article L. 262-9 du code de l’action sociale et des familles, une majoration de la prestation peut être accordée si le bénéficiaire est isolé, c’est-à-dire veuf, séparé, divorcé ou célibataire, et assume la charge d’un enfant né ou à naître. La majoration porte actuellement le montant forfaitaire de la prestation à 658 euros, pour une personne seule assumant la charge d’un enfant, contre 497 euros sans majoration ([28]), soit 161 euros de plus.

Les étudiants ou individus en formation, sauf s’ils sont parents isolés, ne sont pas éligibles au RSA.

i.   Le RSA est versé par les organismes de sécurité sociale

Le RSA présente un mode de gestion atypique : créé par l’État, il est financé par les collectivités territoriales et versé par les organismes de sécurité sociale. L’article L. 262-16 du code de l’action sociale et des familles prévoit que le service de la prestation est assuré par les caisses d’allocations familiales (CAF) ou, pour les bénéficiaires concernés, par la mutualité sociale agricole (MSA).

ii.   Le financement du RSA est confié aux départements

L’article L. 262-24 du code de l’action sociale et des familles confie son financement aux conseils départementaux.

Afin d’aider ces derniers à remplir cette mission, l’État effectue des transferts financiers aux départements par le biais :

– de l’affectation d’une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, correspondant à un montant ouvert en loi de finances initiale pour 2019 de 5,782 milliards d’euros ([29]) ;

– du fonds de mobilisation départemental pour l’insertion (FDMI), correspondant à un montant ouvert en loi de finances initiale pour 2019 de 492 millions d’euros ([30]).

Par ailleurs, afin de faire suite aux revalorisations du montant du RSA opérées par décrets entre 2013 et 2017, la loi de finances pour 2014 ([31]) avait ouvert d’autres mécanismes de compensation, consistant en un dispositif de compensation péréquée ([32]) venant allouer des montants prélevés par l’État au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), un droit de relèvement ([33]) du taux applicable aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et en la création d’un fonds de solidarité en faveur des départements (FSD) ([34]).

Ces transferts de l’État aux collectivités territoriales laissent un montant de 4,8 milliards d’euros à la charge nette des départements au titre du financement du RSA pour 2019, pour un montant total des dépenses au titre du RSA de 9,9 milliards d’euros ([35]). Cette charge nette a donc connu une forte augmentation entre 2010 et 2019 (+ 183 %) ([36]) sans lien avec les transferts de l’État quasiment stables sur la même période.

Ce reste à charge conséquent a entraîné la création d’une dette envers la CAF de la part de certains départements, pour un montant estimé au 15 janvier 2018 à 409 millions d’euros ([37]).

iii.   Le financement du RSA pour certaines collectivités et pour le RSA « jeune actif » est d’ores et déjà centralisé

Depuis la loi de finances pour 2019 ([38]), le financement du RSA est recentralisé pour la collectivité de Guyane et le département de Mayotte. Afin de pouvoir financer la prestation pour ces territoires, l’État a procédé à la reprise des financements historiques et des ressources d’accompagnement au titre des dépenses pour ces territoires. L’article 25 de la loi de finances pour 2020 ([39]) prévoit une recentralisation du RSA à La Réunion à compter du 1er janvier 2020. Le rapport annuel de performance pour 2019 ([40]) fait état d’une dépense de 176,7 millions de la part de l’État à cet effet, dépassant de 5,9 millions d’euros la prévision établie en loi de finances initiale. L’écart provient essentiellement de la prise en charge par l’État du revenu de solidarité outre-mer (RSO), qui n’avait pas été budgétée.

Le RSA « jeune actif » est également financé par l’État depuis 2010, du fait de la loi de finances pour 2010 ([41]). Cette mission avait initialement été confiée au fonds national de solidarité active (FNSA), un fonds non doté de personnalité morale, créé par le décret n° 2009-30 du 9 janvier 2009 ([42]) et placé sous contrôle bancaire de la Caisse des dépôts et consignations, subventionné initialement par l’État et par une fraction du produit de la contribution exceptionnelle de solidarité des fonctionnaires. Le RSA « jeune actif » étant une prestation hybride, qui combinait à la fois le RSA socle, déjà financé par les départements, et le RSA « activité », dont le financement était à la charge du FNSA donc de l’État, a vu son financement confié au FNSA car « la montée en charge progressive du RSA jeunes ne permettrait pas l’identification stabilisée des dépenses relevant de la partie « socle » et de la partie « activité » » ([43]). L’article 63 de la loi de finances pour 2017 a supprimé le FNSA car celui-ci avait vu ses missions drastiquement réduites du fait de la création de la prime d’activité en 2016 ([44]). Les dépenses qu’il acquittait ont ainsi été transférées à l’action 11 du programme 304 de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances du budget de l’État.

En application de l’article L. 262-25 du code de l’action sociale et des familles, les organismes qui versent la prestation et les conseils départementaux échangent et déterminent les conditions de versement de la prestation, de neutralité des flux financiers des organismes, et les engagements de contrôle pris par les organismes payeurs au moyen de conventions entre les conseils départementaux, les organismes payeurs, l’État et les administrations centrales.

Le bénéficiaire du RSA peut être soumis à certaines obligations dans les cas où il est sans emploi, ou a perçu, en moyenne sur les trois derniers mois, moins de 500 euros mensuels ([45]). Il est premièrement tenu de chercher un emploi ou d’entreprendre les démarches nécessaires à la création d’entreprise ([46]). Il a par ailleurs le droit de suivre un programme d’insertion et un accompagnement pris en charge par un organisme avec lequel il définit son projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) ([47]) ou un contrat d’engagement réciproque ([48]).

Cet accompagnement est pris en charge par le conseil départemental, qui se doit d’orienter l’assuré vers les structures d’insertion vers l’emploi telles que Pôle emploi, les maisons de l’emploi, les gestionnaires d’un plan local pluriannuel au service public de l’emploi, les réseaux d’appui à la création et au développement d’entreprises ou les missions locales. En application de l’article L. 262-34 du code de l’action sociale et des familles, cette orientation aboutit à la définition du projet personnalisé d’accès à l’emploi mentionné à l’article L. 5411-6-1 du même code qui fixe les objectifs en matière d’accès à l’emploi des bénéficiaires du revenu de base et les moyens d’y parvenir. Celle-ci fait état des compétences, des qualifications et de la situation personnelle de l’assuré, et prévoit les modalités de financement par le département des actions d’accompagnement réalisées au profit du bénéficiaire du revenu de base.

L’article L. 262-37 prévoit que le versement du RSA est suspendu si le bénéficiaire n’établit pas dans les délais prévus le contrat d’engagement réciproque, s’il ne respecte pas les engagements mentionnés au sein du contrat, ou s’il refuse de se soumettre aux actions de contrôle.

L’article L. 262-19 du code de l’action sociale et des familles prévoit également que le versement du RSA peut être suspendu ou réduit si l’assuré entre dans un établissement de santé ou dans une structure pénitentiaire, pour de la durée de son séjour. Les modalités d’interruption ou de réduction du versement sont adaptées en fonction des charges et responsabilités familiales qui incombent à l’individu concerné.

L’article L. 262-45 du code de l’action sociale et des familles prévoit un délai de deux ans pour permettre la récupération ou le recours pour la perception du revenu de base, délai déjà en vigueur pour le RSA. Ce délai peut être interrompu à la suite de l’envoi d’une lettre recommandée ou en raison de l’impossibilité pour l’organisme en charge du service de répondre à la demande de l’individu.

L’article L. 262-46 du même code détermine les conditions selon lesquelles l’organisme débiteur peut récupérer les montants versés au titre du RSA en cas de versement indu, quand cette somme est supérieure à un certain seuil fixé par décret. Le paiement de l’indu par le bénéficiaire est prévu sur une période échelonnée, sauf en cas de souhait contraire de ce dernier. Sauf en cas de fraude avérée, la somme à rembourser peut faire l’objet d’un aménagement afin de reconnaître la situation précaire du débiteur.

Les réclamations contre une décision relative au RSA sont définies par l’article L. 262-47 du même code et rejoignent les dispositions de droit commun relatives aux décisions administratives. Ainsi, de telles réclamations doivent faire l’objet d’un recours administratif auprès de la commission de recours amiable de l’organisme chargé du service du RSA, c’est-à-dire auprès du président du conseil départemental, puis d’un recours contentieux, dans le cas où la première procédure n’aurait pas abouti.

Les articles L. 262-51 et L. 262-52 prévoient des sanctions en cas de fausse déclaration, d’omission délibérée ou de recours à un tiers visant à obtenir un RSA indu. Ces sanctions sont prescrites dans un délai de deux ans.

En application de l’article L. 262-49, le RSA est incessible et insaisissable.

Les articles L. 262-51 et L. 262-52 du code de l’action sociale et des familles prévoient la lutte contre la fraude et détaillent les sanctions encourues dans le cadre de la répression des fraudes au RSA.

La lutte contre la fraude est également prévue par le contrôle et l’échange d’informations entre les administrations. Ainsi, l’article L. 262-40 du code de l’action sociale et des familles prévoit que les responsables des différents organismes correspondent mensuellement avec le président du conseil départemental afin de confronter leurs données et de lui transmettre la liste nominative des allocataires dont la situation aurait été modifiée.

L’échange entre ces organismes doit permettre de s’assurer de l’instruction de la prestation. Il permet également de recenser mensuellement les foyers ayant fait l’objet d’un contrôle. Lorsqu’un écart entre le train de vie du ménage et les ressources déclarées est constaté, une évaluation forfaitaire du patrimoine mobilier ou immobilier, hors patrimoine professionnel, peut être effectuée.

De même, en application de l’article L. 262-42, Pôle emploi informe le président du conseil départemental de l’inscription des bénéficiaires du RSA sur la liste de demandeurs d’emploi ou de leur radiation, ainsi que d’un éventuel non-respect de la législation et des formalités prévues par le code du travail.

Enfin, les articles L. 262-54 et L. 262-55 prévoient les modalités nécessaires au suivi statistique, à l’évaluation et à l’observation du dispositif. Ainsi, les départements, la Caisse nationale des allocations familiales, la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, Pôle Emploi et les autres organismes chargés de la gestion du RSA transmettent à l’autorité étatique compétente les informations nécessaires à la constitution d’échantillons statistiquement représentatifs en vue de l’étude des situations et des parcours des bénéficiaires de la prestation.

b.   La prime d’activité

Avant 2016, le RSA comprenait un volet « activité » qui fut remplacé par la prime d’activité, créée par la loi no 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi. La création de la prime d’activité répondait au critère d’augmentation de son montant vis-à-vis de l’ancien « RSA activité », et simplifiait l’accès à l’ancienne prime pour l’emploi (PPE), et fut en ce sens une avancée certaine en matière de soutien au pouvoir d’achat et d’incitation au retour à l’emploi.

Cette prestation est un complément de revenus d’activité s’adressant aux travailleurs aux revenus modestes, dès 18 ans ([49]). 4,5 millions de foyers bénéficiaient de cette prestation à la fin de 2019, soit une hausse de 42,7 % par rapport à 2018 en raison de la revalorisation et de l’élargissement du dispositif prévu par le décret n° 2018-836 du 3 octobre 2018 portant revalorisation du montant forfaitaire de la prime d’activité et réduction de l’abattement appliqué aux revenus professionnel. Cette revalorisation faisait partie des réponses au mouvement social dit « des gilets jaunes ».

En décembre 2019, le montant moyen mensuel versé au titre de la prime d’activité était de 185 euros par mois ([50]). Le montant total des prestations versées pour l’année 2019 a atteint 9,43 milliards d’euros ([51]).

Sont éligibles à la prime d’activité les individus majeurs, non étudiants, résidant de manière stable et effective en France et percevant des revenus issus d’une activité professionnelle, sous conditions de ressources ([52]). Les étudiants de plus de dix-huit ans assumant la charge d’un enfant né ou à naître et percevant des revenus d’activité supérieurs à 932,39 euros, peuvent également bénéficier de la prime d’activité ([53]).

Depuis le 1er avril 2020, le décret n° 2020-491 a fixé le montant forfaitaire utilisé pour le calcul de la prime d’activité à 553,16 euros pour une personne seule sans enfant. Le montant de la prime correspond à 61 % des revenus d’activité des membres du foyer et de bonifications individuelles, d’une part, et les ressources du foyer, d’autre part, comme mentionné à l’article L. 842-3 du code de la sécurité sociale. Il varie selon la composition familiale et peut être majoré si le bénéficiaire est un parent isolé assumant la charge d’un ou plusieurs enfants. Par ailleurs, une bonification de la prime d’activité est accordée individuellement à tous les membres du foyer percevant des revenus d’activité. Le montant maximal de cette bonification est fixé à 160,49 euros par le décret n° 2018-1197 relatif à la revalorisation exceptionnelle de la prime d’activité. Cette bonification individuelle définie à l’article D. 843-2 du code de la sécurité sociale est versée à l’individu dont le revenu professionnel net est égal à 0,5 SMIC, et croît proportionnellement à ce revenu jusqu’à atteindre son plafond pour un SMIC net.

Un forfait logement vient par ailleurs compléter les ressources du foyer prises en compte pour le calcul de la prime d’activité, si le foyer est logé à titre gratuit, s’il est propriétaire sans remboursement d’emprunt ou s’il reçoit une aide au logement. Ce forfait logement s’élève à 66,38 euros pour une personne seule et à 132,76 euros pour un couple depuis le 1er avril 2020. Il est ajouté aux ressources du foyer prises en compte pour le calcul de la prime d’activité.

La prime d’activité est financée par l’État et versée par les caisses d’allocations familiales (CAF) et celles de la mutualité sociale agricole (MSA) pour les ressortissants des régimes agricoles en application de l’article L. 843-1 du code de la sécurité sociale.

c.   Les prestations sociales à destination des jeunes adultes

Les personnes non éligibles au RSA en raison de leur âge, c’est-à-dire ayant moins de vingt-cinq ans, peuvent bénéficier d’un accompagnement personnalisé pour l’accès à l’emploi dans le cadre d’un dispositif appelé « garantie jeunes », défini à l’article L. 5131-6 du code du travail. Celui-ci s’adresse aux jeunes de seize à vingt-cinq ans qui ne sont ni en études, ni en emploi, ni en formation, et qui se trouvent en situation de précarité. Elle leur offre, pendant douze mois, un accompagnement par une mission locale visant à les aider dans leur recherche d’emploi ainsi qu’une allocation, leur permettant de soutenir les dépenses de première nécessité. En 2019, ce dispositif bénéficiait à 89 900 personnes ([54]).

Sont considérés en situation de précarité les jeunes constituant un foyer fiscal autonome non imposable, ceux membres d’un foyer fiscal non imposable, les enfants de foyers bénéficiaires du RSA et les jeunes en rupture familiale, dont les revenus sur les trois mois précédant l’entrée dans le dispositif ne dépassent pas en moyenne le montant forfaitaire du RSA pour une personne seule, déduction faite du forfait logement, soit 497 euros actuellement ([55]).

Le jeune souhaitant entrer dans le dispositif doit signer un contrat d’engagement réciproque avec la mission locale qui lui proposera un accompagnement personnalisé de retour vers l’emploi. Cet accompagnement se compose d’une phase collective où le jeune assiste à des ateliers visant à développer des techniques de recherche d’emploi, puis d’une phase individuelle où le jeune travaille avec un conseiller de la mission locale.

L’article R. 5131-18 du code du travail définit que la suspension du paiement de l’allocation et du bénéfice de la garantie jeunes est prévue en cas de manquement du bénéficiaire à ses engagements contractuels, sur décision d’une commission locale ([56]).

L’allocation du dispositif « garantie jeunes » n’est cumulable ni avec l’indemnité d’un service civique, ni avec la prime d’activité, ni avec le revenu de solidarité active ([57]).

Le dispositif de « garantie jeunes » est financé par l’État et l’Union européenne via le fonds social européen (FSE) et le programme Initiative pour l’emploi des jeunes (IEJ). Le montant maximal de l’allocation est de 497 euros au 1er avril 2020, soit le RSA pour personne seule déduction faite du forfait logement.

Les étudiants en études ou en formation ne sont pas éligibles à la « garantie jeunes ». En revanche, les articles L. 821-1, L. 821-2 et L. 821-3 du code de l’éducation permettent l’attribution de bourses aux étudiants répondant à des critères de ressources et de mérite fixés par le ministre chargé de l’enseignement supérieur.

Ainsi, l’article L. 821-1 du code de l’éducation prévoit que l’État accorde aux étudiants des prestations, dites « bourses d’enseignement supérieur », selon des critères fixés par voie réglementaire. Ces prestations sont versées par les centres régionaux des œuvres universitaires (CROUS) afin de réduire les inégalités sociales. De même, l’article L. 821-2 du même code ouvre le bénéfice des bourses aux étudiants d’établissements d’enseignement supérieur privés, et l’article L. 821-3 aux établissements d’enseignement supérieur techniques, après avis favorable du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Le droit aux bourses mentionné à l’article L. 821-1 du code de l’éducation est aujourd’hui calculé sur la base des ressources du foyer fiscal auquel est rattaché l’individu, c’est-à-dire généralement celui de ses parents.

Durant l’année universitaire 2018-2019, 38 % des étudiants percevaient des bourses sur critères sociaux, soit plus de 700 000 personnes. Parmi ceux-ci, 45 % étaient rattachés à l’échelon 0 bis et 1 et touchaient donc entre 1 009 et 1 669 euros chaque année. 6,7 % d’entre eux étaient rattachés à l’échelon 7 et pouvaient donc recevoir 5 551 euros. Les bourses sont généralement distribuées sur une base de 10 mois, mais il est possible de demander une extension en cas de poursuite de la formation au cours des vacances d’été et de bénéficier de ce fait d’un versement pour 12 mois, portant la somme maximale pour les étudiants à l’échelon 7 à 6 815 euros par an.

Barème des montants annuels de bourses d’enseignement supérieur, selon l’échelon de l’étudiant, pour l’année universitaire 2020-2021

(en euros)

 

Montant annuel sur 10 mois

Montant annuel en cas de maintien de la bourse lors des grandes vacances universitaires

Échelon 0 bis

1 032

1 239

Échelon 1

1 707

2 048

Échelon 2

2 571

3 085

Échelon 3

3 292

3 950

Échelon 4

4 015

4 818

Échelon 5

4 610

5 532

Échelon 6

4 889

5 867

Échelon 7

5 679

6 815

Source : Arrêté du 20 juillet 2020 relatif aux taux des bourses de l’enseignement supérieur du Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation pour l’année universitaire 2020-2021.

Le versement des bourses universitaires est assuré par les centres régionaux des œuvres universitaires (CROUS) et leur financement est pris en charge par l’État.

2.   L’ensemble de ces dispositifs présente des écueils persistants en termes d’éligibilité, de recours, de gouvernance et même de montant.

Ces prestations sont indispensables pour permettre la protection des jeunes citoyens les plus défavorisés connaissant une période de baisse de revenus ponctuelle ou qui sont plus durablement éloignés de l’insertion. Si les rapporteurs sont convaincus que ces dispositifs ont constitué de précieux progrès en leur temps pour mieux soutenir ceux qui sont les plus en difficultés, ils souhaitent également mettre en lumière les failles et limites qui viennent éroder l’efficacité de ces prestations.

a.   Des prestations quérables qui entraînent un fort taux de non recours.

Premièrement, ces aides sont quérables, c’est-à-dire qu’il incombe à l’individu d’entamer les démarches lui permettant d’obtenir les sommes auxquelles il est éligible. Cette procédure instaure d’emblée une inégalité entre les citoyens. En effet, et en dépit du travail précieux fourni par les agents au sein des organismes de sécurité sociale, des missions locales, des conseils départementaux, des CROUS, les inégalités d’information, d’accès aux ressources numériques, de maîtrise de la langue voire même de temps disponible, ne permettent pas l’accès de tous aux prestations auxquelles ils sont pourtant éligibles. C’est également le caractère jugé stigmatisant de celles-ci et la volonté d’autonomie qui peuvent pousser certains individus à ne pas demander les aides dont ils pourraient bénéficier.

Le phénomène de non recours aux droits est très difficilement chiffrable, et ne fait malheureusement l’objet que de très peu d’études statistiques complètes à l’heure actuelle. La dernière enquête de la Dares et de la CNAF à ce sujet, datant de 2011, présentait un constat accablant : près de 36 % des assurés éligibles au « RSA socle », le RSA que nous connaissons actuellement, n’en étaient pas bénéficiaires, et 68 % des personnes éligibles au « RSA activité », l’actuelle prime d’activité, ne le percevaient pas. Ce taux de non recours concernait, au dernier trimestre de 2010, un montant de 432 millions d’euros. Plus récemment, une étude de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) ([58]) présente pour 2016 un taux de recours de 73 % pour la prime d’activité par rapport au nombre de personnes éligibles, signe que des progrès ont pu être apportés, grâce à la simplification du dispositif.

Dans une enquête relative aux relations entre usagers et les services publics ([59]), le Défenseur des droits souligne par ailleurs que 12 % des personnes qui rencontrent des difficultés dans leurs démarches administratives cessent complètement ces dernières, alors que ces personnes sont, une fois sur quatre, en situation de précarité financière.

Benjamin Vial, sociologue auditionné par les rapporteurs, membre du laboratoire PACTE/ODENORE, spécialiste des questions de non recours des jeunes aux dispositifs d’insertion, a consacré une thèse à ce sujet ([60]), et dégage trois causes principales du non recours :

– le phénomène dit de « non-connaissance », qui découle du manque d’information et de formation, notamment des plus jeunes, des droits auxquels ils sont éligibles et du fonctionnement de notre système de protection sociale ;

– la « non-réception » de la prestation, du fait de la multiplication de démarches à effectuer afin de percevoir l’allocation, qui transforme la demande de perception de ses droits en véritable « parcours du combattant » ;

– la « non-demande » de la prestation, en raison de la déception de l’individu vis-à-vis du système, notamment du montant des aides qu’il pourrait percevoir ou de la qualité de l’accompagnement qu’on lui offre.

Ces phénomènes sont particulièrement préoccupants en tant qu’ils privent les plus démunis de ressources primordiales. Ils peuvent par ailleurs créer un sentiment d’injustice, d’exclusion et d’isolement ainsi que de réelles situations de détresse.

La résolution de ce problème central pour notre cohésion sociale appelle l’instauration d’un revenu de base qui serait versé de manière automatique. Ainsi, les individus n’auraient plus la tâche d’entamer des démarches, souvent trop lourdes, pour percevoir les aides qui sont leur droit premier.

b.   Un financement décentralisé qui met en difficulté les départements.

Ces mêmes prestations sont prises en charge par différents acteurs publics, et la prise en charge du financement du RSA par les départements soulève de nombreuses inquiétudes.

Le financement du RSA a été confié aux départements dès sa création en 2009, puisque ces derniers détenaient déjà la charge du financement du RMI depuis la loi de décentralisation du 18 décembre 2003 ([61]). Les transferts de compétences de l’État vers les départements avaient alors été accompagnés de transferts de ressources ([62]), en application de l’article 72-2 de la Constitution ([63]) qui prévoyait que « toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi. ». C’est en vertu de ce principe qu’est créée une compensation financière de la décentralisation du RMI au niveau départemental, mécanisme qui échappe pourtant aux règles apportées par la promulgation de deux textes : la loi organique du 29 juillet 2004 sur l’autonomie financière des collectivités locales, et la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, fixant plusieurs principes tendant à assurer une neutralité financière pour les collectivités territoriales concernées par des transferts de compétences relevant précédemment de l’État. La compensation financière est alors calculée sur la base des dépenses constatées en 2003 et financée par un transfert d’une part de taxe intérieure de consommation des produits pétroliers (TIPP) ([64]). Dès 2004, ce transfert s’est révélé insuffisant pour couvrir le reste à charge des conseils généraux, et le différentiel a continué de croître après l’instauration du RSA au 1er juin 2009. En 2014, la Cour des comptes a d’ailleurs attiré l’attention sur cette situation particulièrement préoccupante de croissance des dépenses sociales des départements, notamment au titre du RSA ([65]), sans que les conseils départementaux n’aient de pouvoir de décision sur les montants et le nombre de prestations à verser.

Aujourd’hui, la charge du financement de la prestation portée par les départements semble présenter de nombreuses limites. Comme mentionné précédemment, la charge nette du financement du RSA pour les départements est chaque année plus conséquente, car les transferts financiers effectués par l’État ne permettent pas de compenser la totalité des dépenses au titre de la prestation.

Cette question du reste à charge est de plus amplifiée par l’augmentation continue du montant que représente le versement du RSA. En effet, entre 2010 et 2018, les dépenses de RSA augmentent en moyenne de 5 % par an, dû à une hausse du nombre d’allocataires et à la revalorisation du montant de la prestation. Ainsi, les départements ne disposent que de très peu de leviers de pilotage pour maîtriser cette dépense, dont les critères sont fixés au niveau national. Les départements subissent donc un réel « effet ciseaux » sur leur budget : une stagnation voire une diminution de la compensation financière de l’État et une augmentation du nombre de bénéficiaires ainsi que du montant de l’allocation.

Cette analyse est à l’évidence partagée jusque dans les rangs de la majorité puisque le rapport de Jean-René Cazeneuve ([66]), qui fait consensus, pointe la gravité de la situation en ces termes :

– « le panier de ressources des départements est fortement cyclique et sur-réagit aux fluctuations économiques » ;

– « les allocations individuelles de solidarité, en particulier du RSA, sont contra-cycliques et augmentent quand la croissance économique ralentit » ;

– « les poids respectifs des DMTO dans les ressources des départements et du RSA dans leurs dépenses ne sont pas corrélés ».

Sur la base de ces constats, le rapport se joint aux nombreuses prises de position en faveur d’une réforme du mode du financement du RSA.

Déjà en 2016, l’Assemblée des départements de France (ADF) avait engagé une négociation avec le Gouvernement pour repenser la répartition des compétences. Aujourd’hui, c’est la Seine-Saint-Denis qui demande publiquement à ce que l’État reprenne la charge du RSA, comme c’est déjà le cas pour Mayotte et la Guyane. Ce département avait déjà fait connaître son incapacité budgétaire à honorer le financement du RSA en 2016, en décidant symboliquement de ne pas inclure dans son budget l’augmentation des crédits affectés au RSA.

En réalité, nous assistons à des situations dans lesquelles les départements consacrent une part de leur budget toujours plus importante pour la prise en charge du RSA, les plaçant souvent en difficulté budgétaire. Le Premier ministre Jean Castex, lui-même, s’est indigné que l’on « continue de faire peser sur le contribuable local une dépense de solidarité nationale » ([67]), indignation légitime que les rapporteurs ont bien entendu traduit concrètement dans leur proposition de loi (cf. infra).

Une recentralisation de la gestion du dispositif permettrait d’assurer l’égalité des citoyens devant leurs droits aux prestations sociales, alors qu’ils subissent aujourd’hui des disparités en fonction de leur territoire, non sur le montant mais sur certaines modalités d’éligibilité ([68]). De plus, cela permettrait de retrouver une cohérence dans le paramétrage des dépenses, en permettant aux financeurs d’avoir la main sur les modalités, et donc l’évolution de la prestation.

Une telle recentralisation apparait d’autant plus cohérente que la prime d’activité tout comme la « garantie jeunes » sont aujourd’hui des dispositifs financés par l’État. Harmoniser le financement de ces prestations au niveau national devrait permettre de s’assurer d’une gestion et d’un pilotage des dépenses optimaux.

c.   Une articulation globale à redéfinir pour avoir un véritable continuum de protection sociale

On observe également un manque de coordination et de pertinence entre les différentes prestations, notamment en direction des jeunes. Le « RSA jeunes », aux conditions d’accès particulièrement strictes, est concurrencé par la « garantie jeunes », ce qui crée une interrogation sur la pertinence du maintien de ces deux dispositifs. Si la dureté des conditions d’accès au marché du travail s’agissant des jeunes peut justifier des dispositifs d’accompagnement personnalisé tels que la « garantie jeunes », il n’est pas compréhensible que les individus de moins de vingt-cinq ans doivent remplir des conditions plus strictes pour être éligibles au RSA, au simple motif de leur âge. En effet, comment expliquer que les jeunes obtiennent une majorité pénale et civile dès dixhuit ans mais n’obtiennent des droits sociaux équivalent aux autres individus majeurs seulement une fois atteints les vingt-cinq ans ?

Cette restriction d’âge pour l’accès au RSA marque d’ailleurs le retard de la France à l’égard de ses voisins européens, puisque la France fait partie des seuls quatre pays de l’Union européenne dans lesquels l’âge minimum pour accéder au revenu minimum est plus élevé que l’âge de la majorité ([69]).

Par ailleurs, aucune de ces deux prestations ne peut être versée aux étudiants qui sont pourtant susceptibles de connaître la même précarité que les autres jeunes, et qui souvent doivent cumuler emploi peu stable et études, tirant les conséquences de la faiblesse des bourses. Face à cette situation précaire, les jeunes sont soutenus par des bourses aux montants souvent marginaux, comparés au montant du RSA. Ainsi, 45 % des étudiants boursiers relèvent des échelons 0 bis et 1 et ne perçoivent par conséquent pas plus de 139 euros par mois au titre de leur bourse d’études. Quant à la « garantie jeunes », bien que répondant aux besoins des jeunes n’étant ni en emploi, ni en étude, ni en formation, elle présente de nombreuses limites, et tout d’abord celle de sa durée, puisqu’elle est ouverte au jeune pendant un an, prolongeable pour six mois, période au-delà de laquelle le jeune, s’il n’a pas trouvé d’emploi, se retrouve à nouveau sans allocation ni accompagnement.

Vivre dignement dans ces conditions est évidemment impossible, reste alors le soutien familial, inégal, renforçant tant la dépendance à titre individuel que les inégalités à l’échelle sociétale. Les étudiants français sont aujourd’hui en incapacité d’étudier dans de bonnes conditions, s’ils ne cumulent pas cours et emploi précaire ou aide familiale parfois instable ou insuffisante. Le constat est donc sans appel : les prestations actuelles à destination de la jeunesse ne sont pas à la hauteur de nos valeurs républicaines.

II.   plutÔt qu’un simple amÉnagement de l’existant, l’article 1er propose une nouvelle prestation unifiÉe, ouverte À 18 ans et automatiquement versÉe pour mieux lutter contre la pauvretÉ

1.   Un dispositif ambitieux qui propose de nouvelles avancées en termes de protection sociale pour surmonter les faiblesses des dispositifs actuels

Le revenu de base, tel qu’il est proposé à l’article 1er, est une allocation visant à assurer des moyens convenables d’existence à ses bénéficiaires et à accompagner les individus aux ressources précaires dans leur parcours de retour à l’emploi et à l’insertion.

Ce texte ambitieux entend apporter des avancées nettes en matière de protection des citoyens face aux risques sociaux, et propose pour ce faire des dispositions qui se démarquent très nettement du fonctionnement actuel du RSA et de la prime d’activité.

a.   Une prestation unifiée

Le dispositif proposé résulte de la fusion des dispositifs de revenu de solidarité active (RSA) et de la prime d’activité, fusion nécessitant la réécriture du chapitre II du titre VI du livre II du code de l’action sociale et des familles (I), et l’abrogation du titre IV du livre VIII du code de la sécurité sociale (III). La fusion de ces deux prestations permettrait la création de la prestation proposée : le revenu de base.

La fusion de ces deux prestations doit venir simplifier le système social et le rendre plus lisible, sans diminuer ni les montants, ni la qualité d’accompagnement qui entourent ces dispositifs. La fusion permettrait également d’harmoniser le système de calcul, de recours et de financement des prestations sociales, afin de lutter contre le non-recours et de renforcer la coordination entre les politiques de lutte contre la pauvreté et celles d’accompagnement vers la réinsertion.

b.   L’ouverture du droit aux moins de vingt-cinq ans

Dans le droit proposé par la proposition de loi, le revenu de base serait versé à l’ensemble de la population majeure répondant aux critères de ressources, incluant ainsi les individus de moins de vingt-cinq ans.

L’article L. 262-4 du code de l’action sociale et des familles prévoirait ainsi, dans sa nouvelle rédaction, que le revenu de base serait octroyé aux individus dès leurs dix-huit ans, contre vingt-cinq ans pour le versement du RSA jusqu’à présent. En emploi ou en formation, chaque individu de dix-huit ans au niveau de ressources inférieur au montant forfaitaire mentionné à l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles pourrait percevoir le revenu de base. Cet élargissement du droit au revenu de base aux individus dès leur majorité civile devrait permettre de lutter activement contre la précarité et l’isolement social des jeunes, sujets aux inégalités plus que n’importe quelle autre catégorie d’âge en France. Au 1er janvier 2020, l’Insee estimait à 5,2 millions le nombre d’individus ayant entre 18 et 24 ans révolus ([70]).

Concernant les personnes de moins de vingt-cinq ans rattachées au foyer fiscal de leurs parents, les ressources prises en compte seraient celles de ce foyer fiscal. Pour rappel, en application de l’article 6 du code général des impôts, dès dix-huit ans, un individu peut choisir de se détacher du foyer fiscal parental. La nouvelle rédaction de l’article L. 262-4 prévoirait ainsi logiquement que l’individu majeur de moins de vingt-cinq ans peut opter entre l’imposition de ses revenus dans les conditions de droit commun ou le rattachement au foyer fiscal dont il faisait partie avant sa majorité.

Du fait du plafonnement de la réduction d’impôt liée au quotient familial à 1 570 euros ([71]), le « manque à gagner » pour le foyer fiscal parental serait forcément moindre que le bénéfice du jeune au titre du revenu de base sur une année (environ 6 000 euros).

Dans le cas où l’individu choisirait de rester attaché au foyer fiscal de ses parents, les ressources prises en compte pour l’évaluation de l’éligibilité au revenu de base seraient celles du foyer fiscal parental.

L’ouverture du droit au revenu de base pour les jeunes de moins de vingt-cinq ans détachés du foyer fiscal des parents devrait par conséquent entraîner une forte désaffiliation des jeunes du foyer fiscal parental, ce qui participerait très largement à l’universalisation et à l’individualisation de la prestation. Ce phénomène s’inscrit dans la logique de défamilialisation des droits aux prestations sociales, afin que l’individu ne soit plus assujetti aux mécanismes de solidarité familiale qui, inévitablement, renforcent et reproduisent les inégalités existantes.

c.   Le versement automatique

L’article L. 262-11 du code de l’action sociale et des familles, dans sa nouvelle rédaction, assure le caractère automatique du versement du revenu de base. Il prévoit en effet que le revenu de base serait versé « y compris lorsque le foyer n’a pas fait valoir ses droits aux prestations sociales », c’est-à-dire s’il n’a pas entamé les démarches pour recevoir les prestations quérables auxquelles il est éligible. Cette notion d’automaticité du versement de la prestation serait une avancée majeure dans la lutte contre le non-recours aux droits, problématique qui touche un grand nombre d’assurés.

Ainsi, les services des caisses d’allocations familiales ou de la mutualité sociale agricole pour les ressortissants du régime agricole auraient l’obligation de verser le revenu de base à un individu, sans que ce dernier ait des démarches à engager pour toucher d’autres prestations venant compléter ses revenus. Par ailleurs, ces mêmes structures se devraient de lui signaler son éligibilité aux prestations complémentaires, sans pour autant cesser le versement du revenu de base tant que ses démarches n’ont pas abouti. Le revenu de base est donc une prestation « de premier rang », protectrice de toute situation de précarité, afin qu’un individu ne soit jamais laissé pour compte au sein de la société.

L’organisme qui a servi à titre d’avance la prestation à l’individu pendant ses démarches serait naturellement en droit, comme aujourd’hui, de se subroger dans les droits du foyer vis-à-vis des organismes sociaux ou de ses débiteurs, c’est-à-dire qu’il pourrait récupérer les montants versés auprès des organismes si les prestations avaient un caractère rétroactif. Sur un plan financier, l’État pourrait « récupérer » les sommes de pensions alimentaires et d’allocations familiales si celles-ci n’ont pas été réclamées par l’individu qui a touché à défaut un revenu de base. Il ne pourrait récupérer les pensions de vieillesse si l’individu n’a pas liquidé sa retraite au préalable, du fait de la non rétroactivité de cette dernière.

Le caractère inconditionnel et automatique du versement du revenu de base suppose une grande coordination entre les organismes étatiques, départementaux et de sécurité sociale. En ce sens, les articles L. 262-31 à L. 262-36 du code de l’action sociale et des familles dans la rédaction proposée prévoient le maintien des modalités d’échanges d’informations entre les organismes en charge du versement de la prestation, telles que déjà en vigueur pour le versement du RSA.

Par ailleurs, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoit, à son article 78, une modernisation de la délivrance des prestations sociales qui permettra de grandes avancées en termes d’automaticité de versement des prestations. En effet, il s’agirait de permettre à la déclaration mise en place à effet du 1er janvier 2019 pour le prélèvement à la source sur les revenus de remplacement (déclaration dite « PASRAU »), à l’instar de la déclaration sociale nominative (DSN) portant sur les revenus salariaux et sur le même modèle, de constituer une déclaration sociale nominative complémentaire pour les sommes entrant dans le champ des ressources prises en compte pour servir des prestations sociales. Cette disposition, qui doit permettre la modernisation du calcul des aides personnalisées au logement (APL) dès 2021, devrait ainsi permettre la construction d’une base de données mutualisée entre organismes délivrant des prestations sociales, outil qui permettrait d’évaluer les droits des assurés au revenu de base sans qu’ils n’aient à remplir de déclaration de revenus supplémentaire.

Comme mentionné à l’article L. 262-15 du code de l’action sociale et des familles dans la rédaction proposée, le service du revenu de base serait assuré par la caisse d’allocations familiales ou, pour les ressortissants concernés, par la caisse de mutualité sociale agricole du département de l’assuré, tel que déjà en place pour le versement du RSA. Lorsqu’il serait constaté que l’individu répond aux critères et conditions d’attribution du revenu de base, le directeur de l’organisme notifierait à l’assuré ses droits et lui verserait automatiquement la prestation, tout en l’informant de droits complémentaires qu’il pourrait détenir.

Rendre automatique l’accès aux droits et aux prestations est un projet qui fédère bien au-delà du seul groupe Socialistes, puisque déjà en 2018, dans leur rapport sur l’accompagnement des bénéficiaires du RSA ([72]), notre collègue Claire Pitollat et Mathieu Klein en faisaient leur première proposition pour renforcer les politiques d’accompagnement des bénéficiaires. L’harmonisation des bases « ressources » et les avancées en faveur de l’automaticité des droits étaient également jugés nécessaires par le rapport de notre collègue Christine Cloarec‑Le Nabour et Julien Damon ([73]) qui porte sur les ajustements à apporter aux prestation sociales et à l’accompagnement des bénéficiaires.

d.   Une prestation inconditionnelle

Dans le droit existant, le versement du RSA est conditionné par le respect des devoirs attachés au bénéficiaire, définis aux articles L. 262-28 à L. 262-38 du code de l’action sociale et des familles. Le bénéficiaire du RSA doit en effet effectuer des démarches de recherche d’emploi en définissant un projet personnalisé d’accès à l’emploi ou un contrat défini avec un organisme d’insertion professionnelle désigné par le conseil départemental.

Dans la rédaction proposée, le versement du revenu de base serait inconditionnel, ce qui signifie que le bénéficiaire resterait éligible aux actions d’accompagnement à la réinsertion professionnelle, mais le suivi de celles-ci ne conditionnerait plus le versement de la prestation. L’accompagnement, qui est actuellement un devoir, deviendrait ainsi un authentique droit.

Ainsi, la présente proposition de loi tire les leçons de l’expérimentation finlandaise qui a démontré que le caractère inconditionnel de l’accompagnement à la réinsertion ne désincite pas au retour vers l’emploi, puisque 70 % des bénéficiaires du revenu de base travaillant à mi-temps affirmaient souhaiter travailler à temps plein, même en percevant la prestation de manière inconditionnelle ([74]). De plus, la même étude montre un renforcement de la confiance dans la capacité à trouver un emploi de la part du groupe recevant le revenu de base en comparaison au groupe de contrôle qui ne le recevait pas.

Une autre expérimentation, qui a eu lieu à Londres en 2009, proposait d’attribuer 3 000 livres à des personnes sans domicile fixe, sans aucune restriction à l’usage. L’analyse des résultats de cette expérimentation ([75]) dément elle aussi l’idée préconçue selon laquelle les pauvres, s’ils n’étaient pas contraints et contrôlés dans l’utilisation des aides qu’ils reçoivent, gaspilleraient les sommes versées.

Afin de ne pas pénaliser les bénéficiaires du revenu de base, l’accompagnement mentionné aux articles L. 262-23 à L. 262-30 de la rédaction proposée conserve les mêmes modalités que l’accompagnement existant pour le RSA, exception faite du caractère obligatoire de celui-ci.

Cependant, les jeunes aujourd’hui éligibles à la « garantie jeunes », pourraient voir leur revenu de base majoré au titre de celle-ci dans la rédaction proposée. Cette majoration ne serait applicable qu’en cas d’engagement du jeune dans le parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie mentionné à l’article L. 5131-5 du code du travail, accompagnement pris en charge par les missions locales.

e.   Un mode de calcul simplifié

Comme mentionné dans l’avant-propos, la réflexion autour de la construction du dispositif s’est faite en s’appuyant sur les recherches et le rapport de l’Institut des politiques publiques (IPP) ([76]), relatifs à la création du revenu de base. Cette étude a été réalisée en 2018, dans le cadre d’une commande par treize conseils départementaux souhaitant disposer de simulations sur les différentes hypothèses imaginées pour le futur revenu de base.

Leur proposition se caractérise par un revenu de base calculé sur la base de la prise en compte exacte de l’évolution des ressources du foyer, selon un principe de dégressivité complète. Le mécanisme combine ainsi, dans une prestation unique, une logique différentielle dans laquelle un euro de ressources supplémentaires engendre un euro de perte de revenu de base (système de revenu garanti d’existence), tout en conservant une « valorisation » spécifique des revenus d’activité, afin d’apporter des incitations financières au retour à l’emploi.

Le revenu de base, dans la demande formulée par les départements et étudiée par l’IPP, doit garantir un montant de prestation toujours au moins égal à ce que touchaient les bénéficiaires auparavant (le mécanisme est donc globalement plus favorable, y compris pour ceux qui touchaient déjà la prime d’activité et/ou le RSA).

Le document de l’IPP ayant été publié en 2018, il ne tenait toutefois pas compte des hausses de prestations opérées depuis, notamment la hausse des bonifications individuelles de la prime d’activité accordée suite au mouvement social porté par les « gilets jaunes ».

Les calculs sous-jacents à l’actuelle proposition de loi ont donc repris les simulations entreprises par l’IPP, en prenant en compte le niveau actuel des prestations sociales, afin de déterminer un revenu de base bénéfique à tous ([77]).

 

La méthode de calcul retenue par l’IPP

L’étude menée par l’IPP repose sur une modélisation innovante, la microsimulation, qui permet de quantifier les impacts des réformes sur une population donnée. La microsimulation utilise une base de données représentative des paramètres sociétaux et fiscaux français afin d’analyser les évolutions de situation de chaque individu suite à une modification du système socio-fiscal. Cette méthode doit également permettre d’identifier les populations « perdantes » et « gagnantes » à la suite de la mise en application de la réforme étudiée.

Souhaitant parvenir à définir le montant d’un revenu de base qui consiste à remplacer le RSA et la prime d’activité par une prestation simplifiée, l’IPP a donc commencé par modéliser les calculs du montant des deux prestations actuelles.

La formule générale du RSA s’écrit alors de la manière suivante , où MRSA(f) désigne le montant forfaitaire dépendant de la composition familiale f, et Ress les ressources de la famille.

La formule générale de la prime d’activité s’écrit ; où Mpa désigne le montant forfaitaire, Ra les revenus d’activité du foyer et B(Rai) les bonifications perçues à titre individuel par les membres du foyer. Ainsi, le calcul du montant de la prime d’activité a une structure similaire à celui du RSA, auquel on ajoute une prise en compte partielle des revenus d’activité, puis l’intégralité de bonifications individuelles.

L’hypothèse proposée par l’IPP est donc de remplacer ces deux prestations par une prestation simplifiée, définie comme la différence entre un montant forfaitaire et les ressources de la famille, à laquelle on ajoute un pourcentage des revenus d’activité. La prise en compte partielle des revenus d’activité permet de ralentir la dégressivité de la prestation pour les travailleurs. En effet, les revenus perçus hors activité ont une dégressivité de 100 %, c’est-à-dire qu’un euro perçu par le foyer entraîne la baisse du montant du revenu de base d’un euro. Pour les revenus d’activité, l’IPP proposait un taux de dégressivité de 30 %, taux inférieur à celui qui s’applique implicitement dans le calcul actuel de la prime d’activité ([78]) permettant de ne pas entraîner de pertes de transferts monétaires au titre des revenus d’activité par rapport au système actuel.

Le taux de dégressivité retenu par l’IPP en 2018 pour ne pas créer de « perdants » ne permettait toutefois plus aujourd’hui de répondre à cet objectif, puisque la prime d’activité et ses bonifications ont fait l’objet d’une revalorisation. Les rapporteurs insistent donc sur la nécessité de lier la réforme à un mode de calcul reposant sur un taux de dégressivité de 25 % ([79]), inférieur encore au taux anciennement proposé, afin de s’assurer qu’aucun bénéficiaire ne perde en volume de prestation par la réforme ici présentée.

Source : commission des affaires sociales à partir du rapport de l’IPP précité.

 

 

simulation de calcul du revenu de base pour une personne seule, sans enfant et sans allocation logement

 

 

 

 

 

 

 

(en euros)

Part de SMIC

Montant forfaitaire RB

Revenus d’activité

Revenus hors activité

Ressources totales

Revenu de base

Total

Gain ou perte vis-à-vis de la situation avant réforme

0,05

497

61

0

61

482

543

9

0,10

497

122

0

122

467

588

17

0,15

497

183

0

183

451

634

26

0,20

497

244

0

244

436

680

34

0,25

497

305

0

305

421

726

43

0,30

497

366

0

366

406

771

51

0,35

497

427

0

427

390

817

60

0,40

497

488

0

488

375

863

68

0,45

497

549

0

549

360

908

77

0,50

497

610

0

610

345

954

82

0,55

497

670

0

670

329

1000

75

0,60

497

731

0

731

314

1046

68

0,65

497

792

0

792

299

1091

61

0,70

497

853

0

853

284

1137

53

0,75

497

914

0

914

268

1183

46

0,80

497

975

0

975

253

1228

39

0,85

497

1036

0

1036

238

1274

32

0,90

497

1097

0

1097

223

1320

24

0,95

497

1158

0

1158

207

1366

17

1,00

497

1219

0

1219

192

1411

11

1,05

497

1280

0

1280

177

1457

19

1,10

497

1341

0

1341

162

1503

28

1,15

497

1402

0

1402

147

1548

36

1,20

497

1463

0

1463

131

1594

45

1,25

497

1524

0

1524

116

1640

53

1,30

497

1585

0

1585

101

1686

62

1,35

497

1646

0

1646

86

1731

70

1,40

497

1707

0

1707

0

1707

0

1,45

497

1768

0

1768

0

1768

0

1,50

497

1829

0

1829

0

1829

0

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

Selon la simulation présentée ci-dessus et réalisée par les rapporteurs sur la base de l’actualisation des calculs présentés par le rapport de l’IPP, un individu seul, sans enfant, sans allocation logement, touchant 50 % du SMIC au titre de revenus d’activité, soit 610 euros, percevrait un revenu de base de 345 euros, soit 82 euros de plus que sous le système actuel.

Le forfait logement ne subirait aucune modification par la rédaction proposée. Le forfait logement est un montant forfaitaire qui est ajouté au montant des ressources de l’individu prises en compte pour le calcul du droit au RSA et à la prime d’activité, ou déduit du montant du RSA versé. Il représente une somme forfaitaire qui remplace les montants perçus au titre des aides au logement (aide personnalisée au logement, aide au logement familial et aide au logement social) et compense les avantages en nature que peut représenter l’accès à un logement gratuit. Son montant est fixé par un système de paliers, en fonction de la composition du foyer. Dans un souci de lisibilité, il n’est pas inclus dans le tableau ci-dessus, mais les rapporteurs souhaitent son maintien à l’identique lors de l’instauration de la prestation proposée.

Ressources totales de l’individu seul et sans enfant, avant et aprÈs l’instauration d’un revenu de base

Source : commission des affaires sociales sur données 2020.

Comme le démontre le graphique présentant les ressources totales à la disposition de l’individu avant et après l’instauration d’un revenu de base, la réforme augmenterait les ressources de chaque bénéficiaire, quel que soit son montant de revenus d’activité.

En effet, le calcul proposé par le rapport de l’IPP et actualisé par les rapporteurs s’est attaché à trouver la fonction linéaire permettant d’harmoniser les formules du RSA et de la prime d’activité ([80]), qui atteindrait le plus haut niveau de prestations actuellement percevable, afin de ne faire aucun perdant par la réforme ([81]).

Ce calcul actualisé du rapport de l’IPP, permettant de ne faire aucun perdant à la réforme, génèrerait un gain mensuel moyen de quarante-deux euros par bénéficiaire. Cela augmenterait le coût de la réforme d’environ trois milliards d’euros, venant s’ajouter au chiffrage initial de l’IPP de seize milliards d’euros.

i.   La mise en place de majorations

Le revenu de base tel qu’il est proposé serait accompagné de potentielles majorations qui viendraient assurer la continuité et l’harmonisation de la prestation avec d’autres aides que touchent les individus. Ainsi, les articles L. 262-8, L. 262‑9 et L. 262-10 du code de l’action sociale et des familles, dans leurs nouvelles rédactions respectives, prévoiraient des majorations du revenu de base qui répondent aux besoins et situations de chaque individu.

Le revenu de base pourrait tout d’abord être majoré dans le cas d’un parent isolé, comme aujourd’hui ; c’est-à-dire dans le cas d’une personne célibataire, séparée, divorcée ou veuve, qui assume la charge d’un ou plusieurs enfants nés ou à naître ([82]). Cette disposition doit permettre de soutenir l’individu dans les dépenses primaires de son foyer et de lui donner les moyens de construire un retour vers l’emploi ou l’insertion. Elle serait également ouverte aux individus de moins de dix-huit ans qui assument la charge d’un enfant.

La seconde majoration permettrait l’adaptation du revenu de base aux cas dans lesquels l’individu bénéficie du dispositif de « garantie jeunes ». Afin de ne pas défavoriser les personnes éligibles à la garantie jeunes de plus de dix-huit ans, l’ancienne allocation spécifique serait transformée en une majoration de revenu de base, et l’accompagnement vers l’emploi ne serait pas modifié. L’allocation « garantie jeunes » est aujourd’hui conditionnée par le suivi du parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie (PACEA) proposé par la mission locale.

Dans le dispositif proposé, bien que le revenu de base soit versé de manière automatique, cette majoration ne serait versée qu’en cas du respect de ce même parcours mentionné à l’article L. 5131-5 du code du travail, afin que la majoration ne détériore pas le travail mené actuellement par les missions locales dont l’utilité et l’efficacité ne sont plus à prouver. Ainsi, la présente majoration permet de maintenir une incitation à rentrer dans le PACEA.

Par ailleurs, le montant du revenu de base majoré serait nécessairement supérieur ou égal à ce que percevaient les individus anciennement bénéficiaires de l’allocation « garantie jeunes », le montant forfaitaire du dispositif « garantie jeunes » étant aujourd’hui équivalent au montant forfaitaire du RSA.

En conséquence, le IV modifie les dispositions du code du travail relatives à l’allocation dite « garantie jeunes », c’est-à-dire la section 3 du chapitre Ier du titre III du livre Ier de la cinquième partie du code du travail, qui ne s’appliqueraient désormais qu’aux bénéficiaires de moins de dix-huit ans. En effet, le bénéfice de l’allocation « garantie jeunes » est ouvert dès seize ans pour les individus répondant aux critères d’attribution et s’inscrivant dans le parcours d’accompagnement contractualisé vers l’emploi et la formation. Cette allocation serait remplacée par le revenu de base pour tous les individus éligibles à la prestation dès dix-huit ans, mais les plus jeunes resteraient bénéficiaires de l’allocation « garantie jeunes » telle qu’elle existait au préalable. Afin de ne pas défavoriser les individus entre seize et dix-huit ans inscrits dans le parcours « garantie jeunes », l’allocation prévue par ce programme serait maintenue pour cette population.

La troisième majoration, prévue à l’article L. 262-10 du code de l’action sociale et des familles, dans sa nouvelle rédaction, prévoit l’adaptation du système de bourses étudiantes au dispositif de revenu de base. La bourse serait également transformée en une majoration du revenu de base, avec comme double objectif que cette transformation :

– n’entraîne aucune perte pour les rares bourses qui sont supérieures au montant forfaitaire du revenu de base ;

– n’affaiblisse pas la « compensation relative » dont bénéficient aujourd’hui les boursiers sur critères sociaux.

Ainsi, tous les étudiants répondant aux critères d’études, d’âge, de diplôme, de nationalité, de ressources ou de mérite fixés par le ministre chargé de l’enseignement supérieur permettant actuellement l’obtention d’une bourse pour réduire les inégalités sociales seraient éligibles à la majoration, d’un montant égal ou supérieur à celui touché aujourd’hui. Pour l’année universitaire 2020-2021, les bourses les plus généreuses s’élèvent à 6 815 euros sur douze mois, soit 567 euros par mois. Pour un niveau de revenu de 0,00 euros, notre simulation prévoit un revenu de base de 497 euros ([83]). La majoration à prévoir devrait permettre l’alignement de ce montant forfaitaire au plus haut niveau de bourse (567 euros), soit une hausse de 70 euros environ.

Afin de prendre acte de la majoration du revenu de base créée par l’article L. 262-10, les dispositions relatives aux bourses étudiantes du premier alinéa de l’article L. 821-1 du code de l’éducation seraient supprimées, et les articles L. 821‑2 et L. 821-3 du même code seraient abrogés par le II. Cette suppression n’entraînerait aucune perte de ressources pour les étudiants puisque la majoration assurerait un apport de ressources égal ou supérieur à ce que touchent dans le format actuel les étudiants boursiers.

ii.   Le possible cumul de certaines majorations

La majoration de l’article L. 262-8 tel que proposée pourrait se cumuler avec les deux autres majorations séparément.

En effet, une personne isolée assumant la charge d’un ou de plusieurs enfants, ou une personne en état de grossesse, est en droit de demander une majoration de son revenu de base afin de faire face aux coûts induits par sa situation. Si la personne en question est également étudiante, elle pourra également bénéficier de la majoration prévue à l’article L. 262-10 de la rédaction proposée qui doit permettre aux étudiants d’assurer les dépenses nécessaires à la poursuite d’études supérieures dans des conditions de vie pérennes.

De même, une personne isolée assumant la charge d’un ou de plusieurs enfants, ou une personne en état de grossesse, et qui n’est ni en emploi, ni en étude, ni en formation, donc éligible au dispositif de « garantie jeunes », pourrait percevoir les deux majorations de revenu de base, afin de subvenir aux besoins des enfants à charge et de poursuivre sa recherche d’emploi et l’accompagnement des missions locales dans des conditions stables.

En revanche, puisque la « garantie jeunes » ne serait ouverte qu’aux individus de moins de vingt-cinq ans n’étant ni en étude, ni en formation, ni en emploi, sa majoration prévue par l’article L. 262-9 ne pourrait pas, par construction, se cumuler avec la majoration prévue à l’article L. 262-10 visant à soutenir les étudiants actuellement boursiers.

f.   La recentralisation du financement du dispositif

Le revenu de base serait une allocation financée par l’État, et non plus par les conseils départementaux, comme mentionné à l’article L. 262-21 du code de l’action et des familles de la rédaction proposée.

Actuellement confié aux départements, le financement du RSA représente un poids budgétaire difficilement gérable pour les départements et limite les conseils départementaux dans l’accompagnement effectif de leurs bénéficiaires vers la réinsertion.

La recentralisation de cette prestation permettrait l’uniformisation du financement des minimas sociaux puisque l’État finance également la « garantie jeunes » et les bourses d’éducation.

Par ailleurs, les flux financiers de l’État aux conseils départementaux au titre du RSA ne seraient pas interrompus, permettant aux départements de consacrer ces ressources au parcours de réinsertion et d’accompagnement des chômeurs bénéficiaires, parcours prévu par les articles L. 262-23 à L. 262-30 du code de l’action sociale et des familles dans la nouvelle rédaction proposée.

2.   Un dispositif qui conserve néanmoins une partie des principes encadrant les prestations sociales préexistantes

Parce que la présente proposition de loi porte déjà un grand nombre d’évolutions très structurantes, de nombreux paramètres sont délibérément demeurés inchangés entre le nouveau revenu de base et l’ancien RSA, tantôt parce qu’ils constituent des « invariants » techniques, tantôt pour ne pas multiplier les sujets de discussion qui doivent se focaliser sur l’essentiel. Les rapporteurs sont néanmoins bien conscients que des évolutions pourraient être apportées au cours de la discussion, si un accord pouvait être trouvé sur le principe de l’établissement d’un revenu de base.

a.   Critères d’éligibilité à la prestation

Les critères d’éligibilité en matière de nationalité et de régularité du séjour, mentionné à l’article L. 262-4 du code de l’action sociale et des familles dans la rédaction proposée, resteraient identiques à ce que prévoyait déjà le RSA, même si les rapporteurs ont bien conscience de leur caractère restrictif.

Les personnes isolées, c’est-à-dire célibataires, séparées, divorcées ou veuves, ayant des enfants nés ou à naître devraient également remplir les conditions de régularité de séjour afin de percevoir l’allocation.

b.   Calcul du montant de la prestation

Par ailleurs, le calcul du montant du revenu de base conserverait le principe de prestation différentielle, permettant de ne jamais pénaliser une hausse de revenus du foyer, comme pourrait le faire une allocation par palier, et de valoriser les revenus d’activité avec un taux de dégressivité amplifié. L’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles dans la rédaction proposée prévoit que le revenu de base serait versé à tout individu résidant en France dont les ressources du foyer n’atteindraient pas un montant forfaitaire. Ce montant serait fixé par décret et réévalué chaque année en fonction du niveau de l’inflation. Les rapporteurs regrettent par ailleurs que ce montant soit souvent insuffisant pour permettre d’assurer les dépenses nécessaires à des conditions de vie stables et pérennes, et ont bien conscience que cette indexation a largement contribué à en affaiblir le niveau relatif par rapport aux revenus d’activité. Ils souhaitent pouvoir avancer sur ce sujet, dès que le principe même d’un revenu de base sera largement accepté et acté.

Comme pour le RSA et la prime d’activité, la taille du foyer déterminerait le montant du revenu de base. Le nouvel article L. 262-5 du code de l’action sociale et des familles traite des conditions de reconnaissance des conjoints. Comme actuellement, pourraient être considérées comme conjoint concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité les personnes respectant les conditions mentionnées à l’article L. 262-4 en termes d’âge et de régularité de séjour sur le territoire français. Les associations et chercheurs auditionnés par les rapporteurs les ont interpellés sur le fait que la conjugalisation des prestations sociales, si elle permet d’assurer globalement une égalité entre deux foyers aux revenus très différents, présente également de nombreuses limites en termes d’émancipation des individus, et notamment des conséquences qui sont le plus souvent pénalisantes pour les femmes. Là encore, ils estiment que l’évolution de paramètres aussi centraux que l’ouverture à 18 ans ou l’automatisation du versement ne dispense en aucune façon d’aller plus loin sur ce sujet.

La proposition de loi ne revient pas non plus sur les modalités d’aménagement, d’interruption ou de réduction du montant de l’allocation, reprises de celles qui existent pour le RSA. Ainsi, le nouvel article L. 262-18 du code de l’action sociale et des familles définit que le versement du revenu de base pourrait être interrompu si l’assuré entrait dans un établissement de santé ou dans une structure pénitentiaire, pour la durée de son séjour. Les modalités d’interruption ou de réduction du versement seraient adaptées en fonction des charges et responsabilités familiales qui incombent à l’individu concerné. Déjà très ambitieux sur les réformes à mener, le présent texte de loi ne propose pas spontanément de revoir ces dispositions, mais conscients qu’elles ne sont pas optimales, les rapporteurs sont tout à fait prêts à ouvrir une plus ample discussion sur le sujet, si le principe d’un revenu de base trouve une large approbation.

Le montant de la prestation serait réévalué périodiquement afin de s’adapter à la situation de l’assuré, vraisemblablement par période trimestrielle. Ce rythme pose néanmoins la question, soulevée à très juste titre par la sociologue Nadia Okbani auditionnée par les rapporteurs, du versement lors du premier trimestre qui suit les 18 ans. Les rapporteurs souhaitent, en cas de mise en place de l’allocation, que les modalités règlementaires d’application permettent une « présomption d’éligibilité » pour ce premier trimestre parfois décisif, lorsqu’il s’agit par exemple de l’entrée dans les études supérieures.

Comme aujourd’hui, le décès d’un enfant mineur à la charge du foyer ne saurait entraîner une réduction du montant des droits de l’assuré, jusqu’au quatrième réexamen périodique. La périodicité de ces réexamens est déterminée par décret.

c.   La récupération, la prescription et la lutte contre la fraude au revenu de base inchangées

Les articles L. 262-37, L. 262-38 et L. 262-39 de la rédaction proposée garantissent des modalités de récupération, de prescription et de lutte contre la fraude, inchangées vis-à-vis du système actuel. De même, les articles L. 262-40 et L. 262-41 de la rédaction proposée prévoient la lutte contre la fraude et détaillent les sanctions encourues, sur le modèle déjà en vigueur pour la répression des fraudes au RSA. Cette « constance » dans les règles applicables devra s’accompagner, dans l’esprit des rapporteurs sensibilisés à cette question lors des auditions des associations de lutte contre la pauvreté, d’une interprétation réellement souple du « droit à l’erreur », qui lui-même devrait être réduit par un calcul largement automatisé et fiabilisé des droits (cf. supra).

d.   Des dispositions relatives au suivi statistique, à l’évaluation et à l’observation relatifs aux prestations sociales inchangées

En application des articles L. 262-44 et L. 262-45 du code de l’action sociale et des familles, les départements, dans la nouvelle codification retenue, la Caisse nationale des allocations familiales et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole transmettraient les données relatives aux bénéficiaires du revenu de base et à leur accompagnement, ainsi que celles relatives aux dépenses engendrées à cet effet, afin de permettre à l’État la production d’études statistiques de la population bénéficiant du dispositif, selon des modalités prévues par décret. La proposition de loi n’avait en effet pas vocation à modifier ces dispositions qui permettent déjà aujourd’hui un suivi statistique complet au niveau national, et que la recentralisation devrait d’ailleurs faciliter sur le plan financier.

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Article 2
Instaurer une dotation tremplin universelle sur le compte professionnel d’activité

Rejeté par la commission

L’article 2 propose la mise en place d’une dotation tremplin, qui prendrait la forme d’un compte personnel, adossé au compte personnel d’activité, crédité de 5 000 euros au dix-huitième anniversaire du bénéficiaire. Cette dotation permettrait de financer des actions liées à la formation, à la création d’entreprise, au passage du permis de conduire ou à l’achat d’un véhicule dans le souci d’améliorer les conditions d’accès à la formation professionnelle et à l’emploi des jeunes.

I.   le fonctionnement actuel du compte personnel de formation n’est pas adaptÉ aux jeunes et ne corrige pas les inégalitÉs d’accÈs À la formation professionnelle

1.   L’élargissement progressif des dispositifs permettant d’avoir recours à la formation au cours de son parcours professionnel

L’article 5 de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi a créé un compte personnel de formation (CPF), en même temps qu’était renforcée l’obligation nationale de formation professionnelle, afin de permettre à chaque personne d’acquérir et d’actualiser des connaissances et compétences favorisant son évolution professionnelle. Ce pas important dans l’évolution de la formation professionnelle, appuyé par les partenaires sociaux ([84]), permettait de concrétiser le projet d’un outil puissant de portabilité des droits à la formation du salarié.

Aux termes de l’article L. 6111-1 du code du travail, « chaque personne dispose dès son entrée sur le marché du travail et jusqu’à la retraite, indépendamment de son statut, d’un compte personnel de formation qui contribue à l’acquisition d’un premier niveau de qualification ou au développement de ses compétences et de ses qualifications en lui permettant, à son initiative, de bénéficier de formations ».

L’article 39 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, poursuivant cette logique, a procédé à la création d’un compte personnel d’activité qui intègre non seulement le CPF mais aussi le compte professionnel de prévention (C2P) et le compte d’engagement citoyen (CEC).

Le contenu du compte personnel d’activité

L’article L. 5151-5 du code du travail prévoit que le compte personnel d’activité est constitué d’un compte personnel de formation, tel qu’il existait depuis la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, d’un compte personnel de prévention de la pénibilité (C2P), et d’un compte d’engagement citoyen.

Pour rappel, le C2P permet à l’employeur de déclarer de façon dématérialisée les facteurs de risques professionnels mentionnés à l’article L. 4161-1 du code du travail auxquels sont exposés ses salariés. Les travailleurs peuvent ainsi acquérir des droits au titre de leur compte personnel de prévention, s’ils sont exposés au-delà d’un certain seuil ([85]).

Quant au CEC, il permet d’acquérir, en recensant les activités bénévoles de son titulaire, des heures inscrites sur le compte personnel de formation à raison de l’exercice de ses activités et des jours de congés destinés à l’exercice de ces activités ([86]).

Source : commission des affaires sociales

L’article L. 5151-1 du code du travail prévoit ainsi que le compte personnel d’activité (CPA) permet à son titulaire « de renforcer son autonomie et sa liberté d’action de son titulaire et de sécuriser son parcours professionnel en supprimant les obstacles à la mobilité ». Le CPA répond donc à une philosophie d’accès à un accompagnement global et personnalisé, qui doit permettre à son titulaire de concrétiser ses objectifs professionnels en mobilisant l’ensemble des comptes, et partant des droits, qu’il abrite.

Ce compte est ouvert pour toute personne âgée d’au moins seize ans, si elle occupe un emploi, est à la recherche d’un emploi, est à la retraite ou est accueillie dans un établissement et service d’aide par le travail ([87]). Un compte personnel d’activité est également ouvert aux individus âgés de quinze ans s’ils ont signé un contrat d’apprentissage, et aux individus d’au moins seize ans souhaitant bénéficier d’un compte d’engagement citoyen.

2.   Des dispositifs précieux mais qui restent majoritairement réservés aux personnes ayant déjà travaillé, excluant de fait les plus jeunes ayant besoin de formation

Le compte personnel de formation est comptabilisé en euros, depuis la loi « Avenir professionnel » ([88]), et mobilisé par la personne, salariée ou à la recherche d’un emploi, afin de suivre une formation ([89]). Les montants disponibles permettent à son titulaire de financer une formation éligible au compte au sens des articles L. 6323-6, L. 6323-16 et L. 6323-21 du code du travail, incluant notamment les actions permettant de faire valider les acquis de l’expérience, les bilans de compétences, la préparation au permis de conduire, les actions de formation d’accompagnement et de conseil pour la création d’entreprise, les actions de formation à destination des personnes réalisant des services civiques et les actions de formation des élus. Le large panel de formations permet donc bien de répondre à l’objectif de soutien aux individus dans le développement de leurs compétences, tel qu’il figure à l’article L. 5151-1 du code du travail.

Pour les individus en emploi, les heures consacrées à la formation pendant le temps de travail constituent un temps de travail effectif et donnent lieu au maintien par l’employeur de la rémunération du salarié ([90]) tout comme au maintien du bénéfice de leur régime de sécurité sociale ([91]).

Les demandeurs d’emploi doivent faire valider leur projet personnalisé d’accès à l’emploi en démontrant qu’ils disposent du montant nécessaire pour suivre une formation, tel que défini par l’article L. 6323-22 du code du travail.

Ainsi, les individus en emploi disposent de conditions pérennes pour leur permettre de se former et d’acquérir de nouvelles compétences.

De même, les individus demandeurs d’emploi ayant déjà comptabilisé un certain montant au titre de leur compte personnel de formation peuvent être accompagnés et soutenus dans leurs démarches.

Ce système repose donc sur une forme de « cotisation » ou de « capitalisation » d’euros acquis au cours de la carrière, qui permet d’ouvrir des droits à la formation. Valorisant l’exercice antérieur d’une activité professionnelle, ce système ne permet cependant pas aux nouveaux arrivants sur le marché du travail de se former pour atteindre leurs objectifs, puisqu’ils n’ont pas encore travaillé suffisamment pour s’ouvrir des droits. Ce constat est problématique quand on sait à quel point la formation est plus difficilement accessible lorsque l’individu est au chômage, ce qui est le cas statistiquement de plus de jeunes (voir infra). Une étude de l’Insee ([92]) démontre ainsi que 49 % des personnes en emploi ont suivi une formation à but professionnel au cours de l’année, contre 30 % de chômeurs et 4 % d’inactifs. Cette étude constate également que les chômeurs optent dans un tiers des cas pour une formation menant à une certification, particulièrement recherchée par les employeurs.

a.   Une conjoncture dégradée sur le marché du travail qui renforce les barrières d’accès au premier emploi pour les jeunes

Selon l’Insee, au troisième trimestre 2020, le taux de chômage au sens du BIT en France atteignait 9 % ([93]). Ce taux s’élevait à 21,8 % pour la tranche d’âge des 15-24 ans, soit 619 000 jeunes, en hausse de 2,8 points en un an. Ce chiffre n’inclut naturellement pas les étudiants précaires qui, dès lors qu’ils sont inscrits en étude, ne sont comptabilisés qu’au titre du « halo du chômage ». Ces jeunes doivent pourtant faire face et tenir le coup pour continuer à vivre dignement. Si les rapporteurs proposent, au premier article de leur proposition de loi, de leur attribuer un revenu de base leur permettant d’assurer leurs dépenses de première nécessité, ils sont conscients que beaucoup d’entre eux souhaitent vivre d’une activité professionnelle. Or, l’accès au marché du travail peut nécessiter la mobilisation d’un capital au préalable, notamment pour les jeunes souhaitant se former, se réorienter ou acquérir de nouvelles compétences.

Face à cette réalité, le gouvernement n’a pas su répondre à la hauteur des enjeux. Le plan « 1 jeune, 1 solution » propose en effet de soutenir la formation de 200 000 jeunes. Reste cependant une question centrale : que faire des 400 000 autres chômeurs de moins de 24 ans qui ne pourront pas recevoir une formation prévue par ce plan ? Et quelle réponse apporter aux étudiants qui, pénalisés par une formation initiale à distance, toujours plus sujets au décrochage scolaire, souhaitent réaliser une formation professionnelle pour parfaire leur projet professionnel ou se réorienter ? Il n’est pas possible d’admettre que parmi ces milliers de jeunes en besoin de formation, une sélection arbitraire et inégalitaire s’opère. Les jeunes forment un groupe social plus touché par la pauvreté que la moyenne, particulièrement dépendants de leur milieu social.

Comme le confirment les chiffres de l’Insee ([94]), les jeunes de moins de trente ans sont par construction les plus défavorisés en termes de patrimoine. Ainsi, au début de 2018, ils détenaient 9,3 % du patrimoine en France, avec un patrimoine net médian de 12 700 euros, soit dix fois moins que la catégorie des 60-69 ans qui ont un patrimoine net médian de 194 300 euros.

Ainsi, les dépenses nécessaires à la construction d’un projet professionnel, tel que les études, la formation, l’achat d’un moyen de locomotion, ne sont le plus souvent rendus possibles que grâce à une solidarité intergénérationnelle, qui renforce à son tour les inégalités sociales.

Les inégalités d’accès à la formation se matérialisent premièrement très concrètement dans l’étude des profils présents en études supérieures. Ainsi, parmi les jeunes de 25 à 29 ans, 61 % des enfants de cadres sont diplômés du supérieur, contre 31 % des enfants d’ouvriers ou d’employés ([95]). Les inégalités sont de plus cumulatives, puisqu’on observe que parmi les individus ayant recours à une formation professionnelle, 65 % sont titulaires d’un diplôme d’enseignement supérieur, et seulement 15 % n’ont aucun diplôme ([96]). Le parcours de formation de l’individu, qui lui-même conditionne son avenir professionnel, est donc particulièrement corrélé à son origine sociale et aux revenus de ses parents.

En 2017, une étude du ministère de l’éducation démontre que 13 % individus sortent de formation initiale sans diplôme si ce n’est le brevet des collèges ; ces mêmes personnes non ou très peu diplômées se retrouvent, quatre ans plus tard, au chômage dans 26,2 % des cas ([97]). Une étude de l’Insee ([98]) met également en lumière le caractère décisif que revêt aujourd’hui la formation initiale, car peu nombreux sont ceux qui auront l’occasion d’obtenir un nouveau diplôme plus tard dans leur parcours (seuls 14,2 % de la population, toutes catégories d’âge confondues, ont obtenu leur plus haut diplôme après l’interruption de leur formation initiale).

3.   La nécessité de mettre en place un dispositif vecteur d’égalité réelle en faveur des jeunes

Il est donc nécessaire d’agir en faveur de l’égalité réelle et concrète de tous, en donnant à chacun, dès ses dix-huit ans, le capital nécessaire à sa formation et à ses projets lui permettant de s’insérer dans le marché de l’emploi, indépendamment de son profil social.

La présente proposition de loi souhaite également mettre un terme à la logique actuelle qui voudrait « qu’on n’a rien sans rien » ou, selon une formule pleine de justesse entendue par les rapporteurs au cours des auditions, que les jeunes doivent « en baver » avant d’avoir accès à un accompagnement stable et professionnalisant. Au regard du contexte social particulièrement anxiogène et précarisant pour la jeunesse, la nécessité de redonner les moyens à chacun d’agir pour la construction de son avenir est plus urgente que jamais.

Il est injuste que l’accès à la formation ne s’acquière que par l’accumulation d’heures déjà travaillées, puisque ce système ne laisse, de facto, aucune chance aux nouveaux entrants sur le marché du travail, a fortiori dans un contexte de crise. Le présent article souhaite donc renverser cette logique en prenant en compte les besoins réels des personnes n’ayant jamais travaillé, et qui souhaitent accéder, notamment par la formation, à leurs objectifs professionnels.

II.   Instaurer une dotation tremplin universelle permettant de soutenir les jeunes dans leur entrÉe dans la vie active

1.   Une dotation ouverte à tous à la majorité, afin de permettre à chacun de construire sereinement son projet d’avenir

a.   Un nouveau volet au sein du compte personnel d’activité, permettant de dynamiser l’entrée dans la vie active des jeunes

L’article 1er de la proposition de loi vise à instaurer un revenu de base venant accompagner les individus dans leurs dépenses de première nécessité. Le présent article vient compléter cette première disposition par un dispositif « tremplin » qui permettrait aux jeunes de se projeter dans l’avenir plus sereinement.

Pour ce faire, la rédaction proposée pour l’article L. 5151-2 du code du travail devrait permettre l’ouverture d’un compte personnel d’activité pour les personnes bénéficiant de la dotation tremplin. Ce nouveau « motif » d’ouverture viendra donc compléter ceux qui existent actuellement et qui sont liés soit à l’activité (CPF, C2P), soit à un engagement citoyen. La dotation étant universelle (voir infra), le CPA deviendra donc automatique à 18 ans.

Cette dotation tremplin viendrait ajouter un nouveau volet au compte personnel d’activité, jusqu’alors composé d’un compte personnel de formation, d’un compte professionnel de prévention et d’un compte d’engagement citoyen.

Ainsi, le nouvel article L. 5151-13 du code du travail prévoit que la dotation tremplin serait ouverte au dix-huitième anniversaire de chaque individu qui résiderait en France de manière stable et effective à cette date. Dès son ouverture, le compte serait crédité de la somme de 5 000 euros. Ce montant pourrait être revalorisé chaque année en fonction de l’inflation hors tabacs.

Ce montant de 5 000 euros appliqué à 800 000 jeunes correspondrait :

– en termes de coût, à la réforme de la fiscalité du capital votée en loi de finances pour 2018 (un peu plus de 4 milliards d’euros) ([99]) ;

– en termes de justice, au même ordre de grandeur que le patrimoine financier médian des jeunes ([100]) ; chacun disposerait ainsi de l’équivalent du patrimoine moyen aujourd’hui ;

– en termes de montant exact, au plafond actuel du compte personnel de formation.

Ce montant n’est par ailleurs pas pour solde de tout compte. Ainsi, l’article L. 5151-15 du code du travail créé par la proposition de loi prévoit la possibilité pour la dotation tremplin d’être abondée de la part du fonds de dotation tremplin ([101]), si le titulaire répond à des critères sociaux, de formation, ou présente un projet d’utilisation retenu par le fonds. Cette modalité doit permettre de mettre en place un dispositif toujours plus orienté vers la réponse aux besoins des bénéficiaires, afin que l’égalité de traitement entre tous prenne en compte les disparités sociales et de compétences des individus. Il doit aussi permettre de soutenir les individus ayant un projet défini mais manquant de moyens pour le mettre en place.

b.   Des usages larges permettant de répondre aux besoins variés des individus en fonction de leur parcours de vie, de leur lieu de recherche d’emploi et de leurs aspirations

Le crédit de 5 000 euros pourrait être utilisé par son bénéficiaire à plusieurs fins, définies au nouvel article L. 5151-14 du code du travail.

La dotation pourrait être employée à des actions de formation initiale et professionnelle. La formation initiale concerne les jeunes sous statuts scolaire et universitaire ainsi que les apprentis. Elle se compose notamment de l’enseignement général et technologique ; de l’enseignement professionnel, offrant une formation qualifiée en lien avec un métier, pouvant prendre la forme d’un apprentissage ; et de l’enseignement supérieur. La formation initiale et professionnelle apparaît comme indispensable pour l’insertion dans l’emploi.

La dotation tremplin pourrait également être utilisée pour l’apprentissage de la conduite de véhicules à moteur. Selon le bilan des examens de permis de conduire publié chaque année par le ministère de l’intérieur ([102]), en 2019 1,2 million de candidats étaient enregistrés pour présenter l’examen du permis de conduire. Cet examen est particulièrement difficile, puisqu’il présente un taux de réussite de 50,5 %. 86,1 % des lauréats de l’examen en 2019 ont moins de 25 ans, chiffre qui met en exergue la motivation, mais également la nécessité pour les jeunes de détenir un permis de conduire.

Pourtant, passer son permis de conduire est avant tout un parcours long et coûteux qui s’étale généralement sur plus d’une année, pour un coût minimal d’environ 1 800 euros ([103]). L’obtention du permis est une étape cruciale pour l’insertion des jeunes puisqu’elle permet à la fois d’élargir la zone de recherche d’emploi et également le type d’emploi auquel le jeune peut postuler ([104]). Pourtant, tous les jeunes ne disposent pas des ressources nécessaires pour financer la préparation à l’examen.

De même, le financement d’un premier achat de véhicule, de vélo ou d’un abonnement aux réseaux de transports en commun peut être déterminant pour l’accès à l’emploi. S’agissant de l’achat d’un premier véhicule, une étude ([105]) affirme que les jeunes entre 18 et 24 ans dépensent, dans 69 % des cas, moins de 5 000 euros. Par ailleurs, pour le financement de cet achat, les jeunes, à 57 % choisissent de prendre le temps d’épargner, et 34 % d’entre eux bénéficient d’une aide financière parentale. Enfin, un jeune sur cinq réalise un crédit pour financer son premier achat.

Une fois encore, cette étape vers l’autonomie est conditionnée par le soutien financier ou non du foyer familial, condamnant les plus défavorisés à s’émanciper plus lentement et laborieusement que les autres.

La dotation tremplin pourrait également permettre de financer des actions de formation et d’accompagnement à la création d’entreprise ou à l’engagement associatif ou coopératif. Nous assistons aujourd’hui à une augmentation significative de l’appétence des jeunes pour l’entreprenariat. 36 % des jeunes de moins de 30 ans sont dans une dynamique entrepreneuriale selon l’indice entrepreneurial français ([106]). Le nombre de créations d’entreprises par les jeunes de moins de trente ans a plus que triplé entre 2006 et 2015, alors qu’il a doublé pour le reste de la population.

Pourtant, cette hausse est portée principalement par les jeunes diplômés, puisque la part de créateurs d’entreprise diplômés de 2ème ou 3ème cycle est passée de 27 % à 31 % de 2010 à 2014. Doit-on dès lors admettre que seuls les jeunes ayant fait des études ont une vocation entrepreneuriale ? En réalité, ces chiffres encourageants masquent un constat qui doit nous alerter : la création d’entreprise est de plus en plus réservée aux jeunes qui ont eu les moyens de faire des études, au cours desquelles ils ont acquis des compétences et des ressources indispensables à la création d’entreprise.

Les autres, par manque de capital, de formation ou même par autocensure, sont dissuadés de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. Le présent article est donc de nature à remettre de l’égalité dans le lancement de la vie professionnelle des jeunes en offrant à tous, y compris les plus précaires et éloignés du monde universitaire, la possibilité de se former, d’être accompagné et d’investir pour reprendre ou créer son entreprise.

c.   Cette dotation aux usages multiples est porteuse de l’égalité dans l’entrée de la vie professionnelle pour les jeunes

Ainsi, les différents usages de la dotation tremplin répondent tous à un objectif fondamental : redonner à chaque jeune la possibilité de construire sereinement son avenir, à sa convenance. Que ce soit par la formation, l’achat de matériel ou de véhicule, ou par un accompagnement à la création d’entreprise, la présente dotation doit allouer à chaque jeune les moyens nécessaires à la réalisation de ses projets, lui permettant de se lancer dans la vie adulte.

Cette dotation est inconditionnelle et universelle, puisqu’elle ne dépend pas du niveau de ressources de l’individu, ni de celui de sa famille. Ainsi, le dispositif part du postulat que tous les individus doivent se voir offrir une égalité réelle et concrète face au marché du travail toujours plus discriminant. Elle postule également que ce sont les jeunes concernés qui sont les mieux à même de déterminer ce qui sera leur meilleure utilisation, ouvrant par son caractère totalement « fongible » toutes les combinaisons possibles.

2.   Une dotation financée par un fonds de l’État, gérée par une association permettant une large représentation en son conseil d’administration

Le fonds de dotation tremplin est encadré par le nouvel article L. 5151-16 du code du travail. Il est chargé de régler au nom de l’État les frais résultant des actions éligibles engagées par le bénéficiaire, dans la limite du montant de sa dotation.

Le fonds de dotation tremplin est financé par l’État qui, comme pour le revenu de base à l’article 1er, est le mieux à même de financer ce dispositif universel et inconditionnel. Dans le souci d’élargir la gestion à l’ensemble des « parties prenantes », le fonds proprement dit serait néanmoins géré par une association relevant de la loi du 1er juillet 1901, elle-même administrée par un conseil d’administration composée de deux représentants de l’État, un représentant de chaque organisation syndicale des salariés et un représentant de chaque organisation professionnelle d’employeurs représentative au plan national et interprofessionnel, un représentant de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire, un représentant de Pôle emploi, deux parlementaires, un représentant des missions locales et huit titulaires de la dotation tremplin, siégeant tous à titre bénévole. Ce conseil d’administration a la possibilité de déléguer certaines compétences à son président ou au bureau de l’association.

Comme il est d’usage pour ce type d’organisme rattaché à l’État, un commissaire du gouvernement a vocation à être désigné auprès de cette association par le ministre compétent, soit celui chargé de l’emploi. Ce commissaire du gouvernement peut siéger de droit à tous les conseils de délibération et d’administration du fonds, et est en droit de s’opposer à toute décision qui lui semble contraire aux missions du fonds, s’il motive sa décision.

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Article 3
Coordinations

Rejeté par la commission

L’article 3 procède à des coordinations globales dans trois codes permettant de tirer les conséquences de la fusion du revenu de solidarité active et du revenu de base dans le « revenu de base ».

Indépendamment des dispositions du code de l’action sociale et des familles et du code de la sécurité sociale qui prévoyaient la prime d’activité, lesquelles font l’objet à l’article 1er de modifications pour les premières et d’une abrogation pour les secondes, le revenu de solidarité active et la prime d’activité faisaient l’objet de nombreuses mentions dans d’autres codes.

Le présent article, de portée strictement rédactionnelle, propose de les y remplacer par le « revenu de base » qui combinerait dans le droit proposé ces deux dispositifs.

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Article 4
Entrée en vigueur

Rejeté par la commission

L’article 4 prévoit une entrée en vigueur des dispositions de la proposition de loi au 1er janvier 2022.

L’entrée en vigueur du revenu de base, de la dotation-tremplin et des coordinations afférentes est prévue par le présent article au 1er janvier 2022.

Ce délai a été conçu pour permettre la mise en place des aspects les plus nouveaux sur un plan opérationnel (automatisation, recentralisation, création du fonds pour la dotation-tremplin, …).

Les rapporteurs demeurent préoccupés par l’urgence sociale dont procède la proposition et envisagent d’abord et avant tout cette date comme un butoir. La mise en œuvre d’un dispositif aussi ambitieux à cette date nécessiterait en tout état de cause une mobilisation très rapide après l’adoption définitive du texte.

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Article 5
Gage financier

Rejeté par la commission

L’article 5 prévoit un gage financier pour l’ensemble des sphères publiques qui pourraient être concernées par la réforme proposée.

Le présent article constitue un dispositif de « gage » permettant d’assurer la recevabilité financière de la proposition de loi lors de son examen devant le Bureau de l’Assemblée nationale au regard de l’article 40 de la Constitution.

La proposition de loi pouvant aggraver des charges pour l’État, la sécurité sociale et les collectivités territoriales par ses dispositions, cet article concerne logiquement l’ensemble de ces sphères.

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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa seconde réunion du mercredi 10 février 2021, la commission a examiné la proposition de loi relative à la création d’une aide individuelle à l’émancipation solidaire (n° 3724) ([107]).

I.   Discussion gÉnÉrale

M. Hervé Saulignac, rapporteur. En janvier 2019, nous vous présentions une proposition de loi d’expérimentation territoriale visant à instaurer un revenu de base dans les départements volontaires. Nous voulions débattre de la lutte contre la pauvreté, de la situation de la jeunesse, des injustices sociales qui minent le pays, parce que la crise sociale sévissait déjà. Le malaise de la jeunesse ne faisait que peu de doute pour qui voulait bien le voir. En adoptant une motion de rejet préalable, la majorité a répondu par une fin de non-recevoir.

Deux années se sont écoulées, aucune réponse n’a été apportée. Le plan pauvreté, qui aurait pu en constituer une, semble avoir disparu, comme dans un trou noir. La pire crise économique et sociale que notre pays a connue depuis 1945 s’est installée. La jeunesse est frappée de plein fouet, avec un niveau de vie qui recule, des emplois perdus pour les étudiants, moins de stages pour les apprentis, moins d’emplois à la sortie des études, des réponses tardives et partielles du Gouvernement. La crise que nous traversons projette une lumière crue sur la faillite d’une société, qui laisse pour compte ce qu’elle a de plus précieux, ses enfants. 18 ans, c’est en effet l’âge de la majorité, mais c’est aussi celui de la fragilité, de la vulnérabilité. Pourtant, la société accueille sa jeunesse par la petite porte : une majorité civique paraît bien dérisoire quand on a besoin d’une majorité sociale.

Des filets de protection, des accompagnements ont été pensés par les gouvernements successifs tout au long de l’existence, ou presque : de 18 à 25 ans, il vaut mieux compter sur la solidarité familiale lorsqu’elle peut s’exercer, que sur celle de l’État. C’est ce trou béant dans la raquette que la classe politique semble découvrir – d’une certaine manière, on peut s’en réjouir. Les congés payés, la sécurité sociale, le revenu minimum d’insertion (RMI), la couverture maladie universelle ont pour histoire commune d’être nés sur le terreau d’une crise. Qu’en sera-t-il de celle que nous traversons ? Peut-on fermer les yeux plus longtemps devant les files qui s’allongent à l’entrée des banques alimentaires, devant ceux qui concèdent n’avoir qu’un repas par jour, qui s’entassent dans des logements indignes ou qui renoncent à des soins ?

Plusieurs évidences s’imposent : la pauvreté n’a pas d’âge ; notre jeunesse vit cette épreuve comme un abandon des pouvoirs publics ; ce qui existe aujourd’hui pour elle est notoirement insuffisant. C’est pourquoi, avec mon collègue Boris Vallaud et d’autres du groupe Socialistes et apparentés, nous avons travaillé depuis deux ans à une nouvelle proposition de loi qui soit à la hauteur du défi social qui s’impose à nous. Le moment est venu de répondre de manière profonde et pérenne à une aspiration de justice et d’émancipation.

La proposition de loi s’appuie sur ce que nous dénommons le revenu de base. D’emblée, j’indique que le terme fait débat et que nous sommes ouverts à toute suggestion pour le renommer. Ce qui compte n’est pas tant le mot, que la chose. Celle-ci repose sur trois piliers.

Le premier est l’ouverture de ce droit dès 18 ans. Rien ne semble justifier la borne d’âge de 25 ans, qui n’existe que dans quelques pays européens. Elle fait des jeunes des citoyens de second rang. Contrairement à ce que l’on entend souvent, cette borne d’âge n’est pas non plus liée à un âge d’accès au travail puisque la plupart des jeunes trouvent leur premier emploi avant 25 ans – à 22 ans, en moyenne. Elle n’est pas non plus liée à l’existence de bourses puisque tant de jeunes n’en bénéficient pas ou en bénéficient peu. Dans la plupart des cas, leur niveau est bien moins élevé que le montant du revenu de solidarité active (RSA). Et puis, cette barrière d’âge est insupportable lorsqu’on la justifie par l’obligation parentale. Cela revient à répéter sans fin les inégalités de naissance, notamment pour les parents qui n’ont pas les moyens de subvenir dignement aux besoins de leurs enfants. Abolir cette frontière est donc une question de principe, d’égalité, de lutte contre un fait quasiment culturel, un rite initiatique, qui veut qu’un jeune doive en baver pour accéder à une vie émancipée.

Le deuxième pilier est l’inconditionnalité. Les logiques de contreparties, de droits et de devoirs masquent mal des réalités trop souvent méconnues ou des poncifs qui ont la vie dure. D’abord, l’emploi n’est pas une obligation mais un droit, consacré par le Préambule de la Constitution de 1946. Ensuite, il n’a jamais été démontré que le contrôle et les sanctions avaient un effet sur l’insertion professionnelle. Au contraire, certaines études montrent qu’ils aboutissent principalement à des non-recours ou à la construction de parcours professionnels chaotiques, avec des emplois mal adaptés. Enfin, les acteurs de l’accompagnement dénoncent presque unanimement les moyens administratifs qui sont destinés à rechercher d’hypothétiques fraudeurs chez les bénéficiaires, quand le vrai besoin serait d’abord de les aider à renouer avec l’emploi. Cette inconditionnalité n’est en rien un cadeau. Elle est encore moins un encouragement à l’oisiveté. Au contraire, c’est le rétablissement du sens profond d’un droit protecteur dû à ceux qui sont privés d’emplois, donc de ressources.

Nous avons parfaitement entendu les questions posées par l’articulation avec la garantie jeunes, organisée par les missions locales. Celle-ci restera la principale orientation possible proposée par les conseils départementaux, et ses bénéficiaires auront droit à une majoration du revenu de base tant qu’ils participeront à ce parcours de réinsertion intensif.

Troisième pilier : l’automatisation du versement. Le non-recours demeure considérable s’agissant des minima sociaux. Les prestations quérables n’ont plus aucun sens dans un pays qui dispose de tous les moyens techniques pour identifier les ayants droit. Nous souhaitons donc que le revenu de base soit versé automatiquement, en se fondant sur l’ensemble des informations dont dispose déjà l’État par le prélèvement à la source et la sécurité sociale, par la déclaration sociale nominative. Notre proposition consiste donc à appliquer la logique de l’« aller vers », en confiant le soin à la caisse d’allocations familiales de verser directement la prestation et aux conseils départementaux de proposer un accompagnement adapté. Le tout sera facilité par une prestation unique, qui combine le RSA et l’actuelle prime d’activité grâce à un mode de calcul simplifié et ajusté. La nouvelle prestation ne ferait aucun perdant et serait financée par l’État, sans préjudice des missions du conseil départemental en matière d’insertion et d’accompagnement.

Telles sont les dispositions de l’article 1er.

M. Boris Vallaud, rapporteur. Le revenu de base est complété par un droit complémentaire, conçu pour aider le jeune construire sa vie d’adulte. C’est un capital pour démarrer dans la vie et amorcer un projet de formation ou d’insertion, librement choisi et construit. Cette « dotation tremplin » constitue le second volet de l’aide individuelle à l’émancipation solidaire que nous proposons. Ensemble, l’un et l’autre forment ce que nous tenons pour un minimum jeunesse.

L’égalité de tous pour accéder à une formation, la possibilité de reprendre des études lorsque l’on a été contraint de les arrêter sont socialement déterminées, notamment par la dotation en capital de chacune et chacun. Comment payer ses frais de scolarité, une première formation qualifiante, son permis de conduire ou amorcer le financement d’un véhicule pour accéder à un premier travail ? Ces questions, qui peuvent sembler simples, sont de véritables obstacles pour de nombreux jeunes qui souhaitent se lancer, mais ne peuvent compter ni sur des bourses – insuffisantes, lorsqu’elles existent –, ni sur les solidarités familiales, qui sont le cœur des inégalités des jeunesses.

Des dispositifs d’accompagnement à la formation existent aujourd’hui, comme le compte personnel de formation, mais ils supposent d’avoir déjà acquis des droits en travaillant, ce qui n’est pas le cas lors d’une première formation ou d’un premier emploi. La situation des jeunes à cet égard est singulière.

Inspirée de l’idéal d’un capital universel parallèle au revenu de base, la dotation que nous avons imaginée viendrait compléter le compte personnel d’activité dans la logique d’un droit individuel portable tout au long de la vie. Une dotation de 5 000 euros serait versée sur le compte personnel d’activité à l’âge de 18 ans pour tous les jeunes ; elle pourrait financer des usages liés à l’enrichissement de son capital personnel – formations, mobilités, engagements associatifs ou projets entrepreneuriaux. Elle serait gérée par un fonds associatif, financé par l’État, qui associerait des représentants de la jeunesse, et pourrait venir compléter la dotation universelle pour les jeunes les plus en difficulté.

Forte d’un revenu de base et d’une dotation universelle, notre aide individuelle à l’émancipation solidaire constitue une puissante réponse à la vague de pauvreté qui déferle sur le pays. Nous voyons les rangs des banques alimentaires se grossir de nombreux jeunes, et nous ne pouvons rester indifférents à cette souffrance, qui paraît tout sauf irrémédiable dès lors que l’on en aurait la volonté politique.

Nous venons donc devant vous avec une proposition de loi très complète, à un moment où cette question semble assez mûre pour être abordée. Le débat est public, pluraliste ; les attentes, fortes. Le constat sur le terrain est fait depuis des années par les associations de lutte contre la pauvreté et celles qui représentent la jeunesse – nous les avons auditionnées. Un travail de fond a été conduit avec des chercheurs, des sociologues, des économistes, des collectifs associatifs, avec l’Institut d’études politiques de Paris et l’Institut des politiques publiques. La proposition de loi a également fait l’objet de plusieurs consultations, car elle résulte d’une longue histoire : le revenu de base était le projet de dix‑neuf départements socialistes, qui en avaient proposé l’expérimentation. Ils ont travaillé pendant près de trois ans sur le sujet et organisé des consultations publiques, qui ont donné lieu à 15 000 contributions. Malheureusement, nous n’avons pas eu le loisir d’en débattre.

Quant à la dotation en capital, elle a émergé d’une consultation de plusieurs dizaines de milliers de jeunes par la technologie citoyenne (civic tech) Make.org, durant la campagne présidentielle de 2017. La proposition avait été plébiscitée ; nous avions choisi de la reprendre à notre compte. Lors d’une mise en débat sur la plateforme Parlement & Citoyens pendant plus de deux mois, elle a recueilli 6 000 participations et 2 000 contributions, auxquelles nous ne pouvons pas rester indifférents.

La proposition de loi est désormais prête à être soumise au vote de la représentation nationale. Après la création du RMI en 1988, de la garantie jeunes en 2013, de la prime d’activité et du compte personnel d’activité en 2016, il est temps d’accomplir ce nouveau grand pas social qui peut changer la vie de millions de nos concitoyens, lesquels ne s’abîment pas dans l’oisiveté, mais s’enfoncent dans la pauvreté, l’âpreté de la vie. Comme républicains attachés à la République sociale, nous devons y prêter attention.

Il est temps aussi de renvoyer nos préjugés sur la jeunesse, la pauvreté, le travail et de faire confiance à la solidarité, pour renforcer notre socle républicain. Nous examinons en ce moment, dans l’hémicycle, un projet de loi confortant le respect des principes de la République. Or de nombreuses promesses sont démenties dès le plus jeune âge. La proposition de loi vise à y remédier en partie.

Nous ne prétendons pas avoir le monopole de cette haute conscience de l’urgence sociale. Les organisations syndicales étudiantes, les conseils départementaux, des communes, comme Grande-Synthe dont nous avons rencontré le maire, la partagent. À lire et à écouter ce qui s’écrit et se dit depuis quelques mois, cette ambition pour la jeunesse dépasse désormais les clivages et interroge les consciences au-delà des jeux de rôle habituels sur ces questions. Une sociologue que nous avons auditionnée a dit qu’en la matière, le terrain social était plus mûr que le terrain politique. Nous pouvons lui donner tort aujourd’hui.

Nous ne devons pas être dupes des contre-propositions qui fleurissent pour gagner du temps. Il y a deux ans, vous aviez repoussé notre proposition de loi d’expérimentation territoriale parce que le revenu universel d’activité devait voir le jour en 2020. Nous sommes en 2021 et avons vu ce qu’il en était. Durant la crise, nous avons été d’une prime à l’autre, comme si la pauvreté, qui nous sautait aux yeux, ne préexistait pas largement à cette brutale apparition, comme si la situation de la jeunesse, indépendamment de la crise, n’était pas déjà difficile. Avec cette proposition de loi, nous devons revenir de l’idée, trop souvent partagée, que la jeunesse est un rite initiatique, qu’elle doit être une épreuve, que chacune des difficultés, pour trouver un emploi, poursuivre des études, se soigner, se loger, se nourrir, formerait la jeunesse. Je crois surtout qu’elles l’abîment, de façon irrémédiable.

Aujourd’hui, nous serons vraisemblablement renvoyés à une hypothétique garantie jeunes universelle. Je vous demande de ne pas avoir cette bassesse. Nous ne connaissons aucun des paramètres de ce dispositif, y compris ce que le mot d’universalité signifiera en l’espèce. On nous renverra à des prêts garantis par l’État pour les jeunes, qui ont déjà bien des difficultés et ne demandent pas à s’endetter davantage.

Il faut donc engager sans plus tarder le nouveau grand chantier social de notre temps, celui qui n’oppose pas travail et solidarité, car je ne connais pas un jeune qui ne veuille pas travailler. Nous devons revenir de cette opposition entre émancipation et accompagnement, entre égalité et liberté. C’est pourquoi nous faisons nôtres les mots du grand Jean Jaurès : « Une fois émancipé, tout homme cherchera lui-même son chemin ». Ouvrons à la jeunesse le chemin de sa liberté et de son émancipation !

Mme Monique Iborra. Merci, messieurs les rapporteurs, d’avoir précisé clairement ce que vous souhaitiez à travers la proposition de loi. En moins de deux mois, c’est la troisième fois que nous discutons du concept de revenu de base ou revenu universel inconditionnel, qui n’est pas nouveau et peut être décliné sous différentes formes.

En novembre, sur une proposition du groupe Agir ensemble, notre majorité a voté en faveur d’un débat sur le sujet. La France, comme d’autres pays, est confrontée à une crise sanitaire, économique et sociale de grande ampleur, qui frappe les plus vulnérables d’entre nous. Il est donc légitime que les groupes politiques de l’Assemblée nationale cherchent à y répondre. Le débat ne peut faire passer au second plan notre ambition de transformer, d’agir sur les inégalités à la racine, de faire du travail et de la lutte contre le chômage les piliers de notre politique.

Votre proposition de loi a pour ambition et objectif de remplacer le RSA par un revenu de base sous condition de ressources, mais inconditionnel, c’est-à-dire sans obligation pour les bénéficiaires. Comme nous l’avons affirmé lorsque dix-huit départements socialistes ont proposé de l’expérimenter en 2019, une aide pécuniaire inconditionnelle ne suffit pas à lutter contre la pauvreté et les inégalités. L’accompagnement est essentiel et ne peut résulter que d’un contrat, qui est, non pas un contrôle, mais la mise en œuvre de la solidarité, permettant d’aider à sortir de la précarité. C’est ce qui nous sépare sur le fond.

D’ailleurs, il n’y a pas de consensus sur votre proposition, y compris dans votre famille politique, si j’en crois diverses déclarations récentes. Le consensus n’existe pas non plus parmi les associations, les organisations syndicales ou dans les associations représentant les étudiants. Leurs responsables ont affirmé dans la presse que le montant que vous consacrez à ce revenu est nettement insuffisant. La proposition de loi prévoit aussi une recentralisation du RSA sous la forme du revenu de base, recentralisation que la majorité des départements refuse – j’interrogerai l’Assemblée des départements de France à ce sujet. Au revenu de base, vous associez une prime d’activité, calculée en pourcentage du revenu d’activité, ce qui ne va pas dans le sens de la simplification requise pour la fusion des minima sociaux.

Dans la période de crise que nous vivons, le Gouvernement a montré sa détermination à traiter la situation des plus précaires, en particulier des jeunes, d’une manière différenciée, avec efficacité. L’accompagnement, associé à une aide monétaire pour ceux qui en ont le plus besoin, a d’ores et déjà été instauré. Le « quoi qu’il en coûte » a également fonctionné pour les jeunes, qu’ils bénéficient de la garantie jeunes ou qu’ils soient en formation, en insertion, en apprentissage. Il fonctionne aussi en faveur des étudiants, qui apprécient les mesures du Président de la République. Beaucoup reste à faire, et un projet de loi sur l’égalité des chances devrait nous permettre de débattre et d’aller plus loin.

S’agissant de la dotation de 5 000 euros, elle a le mérite d’ouvrir le débat que Stanislas Guerini a amorcé avec sa proposition de prêt remboursable – d’autres pourront l’alimenter.

En l’état, la proposition de loi nous paraît d’inspiration trop administrative et technocratique – elle n’a pas de quoi enthousiasmer les jeunes, à 18 ans. De même, le financement de la réforme, évalué à 21 milliards d’euros, est peu convaincant. D’inspiration très idéologique, il aboutirait surtout à augmenter les impôts.

Pour toutes ces raisons, nous n’approuverons pas votre proposition de loi.

M. Stéphane Viry. Le sujet est d’importance. C’est tout l’intérêt d’une niche parlementaire que de soumettre au débat des sujets de société, avec la volonté de les faire avancer. N’est-il pas nécessaire de trouver un consensus si l’on veut faire avancer des solutions pour les Français ? Jean Jaurès n’est pas ma référence, et j’ai l’humilité de ne pas me référer à ses belles valeurs. Nos valeurs sont de faire en sorte que chaque homme, chaque femme de ce pays trouve sa place dans la société, de lui donner les moyens, par une trajectoire individuelle et personnelle, de gagner le droit de vivre dignement, comme il ou elle le veut. Tout cela repose sur la communauté nationale. Il nous appartient de l’organiser.

Oui, il y a des difficultés sociales. Oui, l’augmentation de la pauvreté est très préoccupante. Ce matin, avec mes collègues du groupe Les Républicains, nous avons communiqué sur des mesures d’urgence, en particulier en faveur des jeunes, afin de lutter contre la pauvreté, notamment en raison de ce que subit notre pays depuis le début de la crise sanitaire. Vos travaux très denses, qui s’appuient sur de nombreuses auditions et beaucoup de doctrine, vous conduisent à proposer un chemin vers une solution. Si je les salue, je n’aboutis pas à la même réponse sociétale.

La jeunesse est la priorité, l’avenir d’une nation, son dynamisme. Elle représente des idées neuves, des conquêtes. La jeunesse de France aura à porter la dette de notre société. C’est dire s’il faut lui permettre d’être présente, et de trouver sa place dans une société qui lui propose, en amont, un système scolaire pas assez performant pour lui donner des armes et, en aval, un marché du travail pas assez sensible pour l’accueillir.

Dans la proposition de loi, la question du corpus me pose problème. Nous sommes attachés à la valeur travail, à l’entraide de la solidarité nationale. Est-ce qu’aider toutes celles et ceux qui en ont besoin passe automatiquement par l’octroi d’une aide universelle et sans contrepartie ? Je ne peux pas répondre favorablement à cette question.

Même si votre réponse permet de réfléchir et d’aller de l’avant, je m’interroge sur son financement. J’en trouve le système compliqué, inefficace, et probablement injuste. Les mesures financières qui vous permettraient de l’alimenter ne pénaliseront pas uniquement les plus riches, ce qui sous-tend peut-être votre pensée. Elles risquent d’être confiscatoires pour une partie de nos concitoyens et d’entraver encore plus la compétitivité de notre économie et de nos emplois. C’est la raison pour laquelle nous observerons les débats, aujourd’hui et dans l’hémicycle. Je vous remercie d’avoir travaillé cette question à laquelle, hélas ! personne au sein de cette assemblée n’échappera.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Nous ne partageons pas les modalités de la création d’une aide individuelle à l’émancipation solidaire telle que le groupe Socialistes et apparentés nous la propose, mais nous rejoignons nos collègues sur la nécessité d’apporter une réponse satisfaisante aux jeunes majeurs, qui sont les plus exposés à la précarité.

Les mesures prises par le Gouvernement pour faire face à cette précarité accrue en raison de l’épidémie de covid-19 sont nombreuses. Peu adaptées au départ, elles tendent aujourd’hui à répondre à l’ensemble des situations : jeunes en formation professionnelle, en accompagnement de projet, demandeurs d’emploi non indemnisés ainsi que, dans une moindre mesure, et bien tardivement, étudiants, par le projet de la garantie jeunes universelle.

Le groupe du Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés vous rejoindra volontiers sur la nécessité d’automatiser le versement des minima sociaux, car le non-recours demeure beaucoup trop fréquent. Pour ce faire, il est impératif que le Gouvernement active rapidement le déploiement du revenu universel d’activité, car tous les publics ont besoin de cette disposition.

Restent les points de divergence. Si un revenu universel devait être instauré, il devrait l’être pour tous, ce qui impose une vaste transformation de notre système de redistribution, qui ne peut être conduite dans le cadre d’une niche parlementaire. Il en va de même pour l’extension d’un revenu de base comme celui que vous proposez. Pour ce qui me concerne, je suis favorable à une défamilialisation des ressources, gage d’émancipation de la jeunesse, mais la réforme fiscale qu’elle entraînerait mérite un large débat.

S’agissant de la dotation tremplin, des dispositifs locaux tels que le Tremplin citoyen dans l’Essonne apportent, en échange de bénévolat, des aides individuelles aux projets des jeunes, qui favorisent leur autonomie tout en répondant à des besoins. Ce type d’initiative, qui valorise la citoyenneté et répond à l’objectif d’émancipation des jeunes, me paraît préférable.

En conséquence, notre groupe ne votera pas en faveur de ce texte.

M. Régis Juanico. Depuis trop longtemps, notre société inflige un parcours du combattant indigne aux jeunes générations avant l’entrée dans la vie adulte : quels que soient leurs diplômes, elle leur impose cinq à dix ans de galère, pendant lesquels se succèdent stages, petits boulots, contrats courts et précaires, avant d’accéder à un emploi durable.

Dans leur grande diversité, les jeunes aspirent à un droit à l’avenir, à un accès à l’autonomie, à un emploi stable, au logement, à la santé. Ils attendent une réponse qui va bien au-delà des mesures exceptionnelles proposées par le Gouvernement pendant cette crise sanitaire, sous forme d’aides ou de primes ponctuelles. Mobilisées depuis plus de quarante ans, ces aides ne suffisent plus, alors que le marché du travail fait subir aux jeunes, devenus une variable d’ajustement structurel, la précarité et la flexibilité. Pendant les confinements, 40 % des étudiants ont dû arrêter de travailler ; la perte de leur contrat de travail les a fait basculer nombreux dans la grande précarité. Les images d’étudiants dans les files d’attente d’épiceries solidaires sont révoltantes.

Outre les étudiants, des centaines de milliers de jeunes voient leur projet – études, concours, stages, entretiens d’embauche, mobilités, séjours à l’étranger – voler en éclats à cause de la pandémie de la covid-19. Le constat est là, les conditions d’entrée des jeunes dans la vie adulte s’en sont encore trouvées dégradées : le taux de chômage des 15 à 24 ans, qui était déjà le double de la moyenne nationale, bondit de 16 % ; les moins de 30 ans représentent plus de 50 % des pauvres, alors qu’ils ne sont que 35 % de la population. C’est pourquoi le refus obstiné du Gouvernement d’ouvrir le revenu de solidarité active aux moins de 25 ans est incompréhensible. Nous voulons aller plus loin. Le sort réservé à notre jeunesse est insupportable. C’est un scandale républicain, pour ces citoyens, qui aspirent à se projeter dans la vie.

En attendant l’expérimentation d’un revenu universel d’existence pour la jeunesse, la réponse publique doit être plus ambitieuse. Nous voulons l’élargissement du RSA aux moins de 25 ans, l’instauration d’un revenu de base et d’une dotation universelle, à 18 ans, qui n’a rien en voir avec les prêts garantis à rembourser que propose le groupe La République en Marche. Le groupe Socialistes et apparentés votera donc la proposition de loi de nos collègues Boris Vallaud et Hervé Saulignac.

Mme Valérie Petit. Je salue la qualité, y compris technique, du travail de nos collègues : la proposition de loi est à la hauteur du caractère dramatique de la situation et de l’urgence sociale. Vous avez cité les étudiants ; j’ajouterai les indépendants et tous ceux qui passent à travers les mailles du filet de notre protection sociale.

Ce revenu de base n’est pas une idée neuve. C’est même une très vieille idée, une idée libérale car, avant Benoît Hamon, Thomas Paine l’avait théorisée en 1795. Celui qui aimait passionnément notre Déclaration des droits de l’Homme disait qu’on ne peut être libre et exercer ses droits si l’on n’est pas libéré de la pauvreté. Il préconisait donc d’instaurer un droit au revenu universel. Je partage cette belle idée libérale, avec Thomas Paine et la famille socialiste.

Le revenu universel est aussi une idée macroniste. Je le dis sans faire d’humour, moi qui me suis engagée en 2017 pour un projet d’émancipation, dont le revenu universel est une pierre angulaire pour libérer chacun de la pauvreté. Il est aussi une réforme d’individualisation et d’universalisation des droits, qui est au cœur du projet macroniste de réforme.

Enfin, ma collègue Monique Iborra l’a rappelé, le revenu universel est une proposition du groupe Agir ensemble. Cette proposition se distingue de la vôtre par son mode de financement. Nous voulons une réforme socio-fiscale qui accompagne l’instauration d’un revenu universel, c’est-à-dire d’une aide versée automatiquement et de façon inconditionnelle, dès 18 ans.

Le groupe Agir ensemble, qui a défendu le socle citoyen inscrit dans cette grande famille du revenu universel, ne votera pas contre la proposition de loi ; moi‑même, je voterai pour. Un tel vote va dans le sens de l’histoire et de la responsabilité eu égard à l’urgence sociale. J’invite toutes les familles du revenu universel – la vôtre, la nôtre, la famille libérale – à ouvrir la porte pour laisser entrer l’espoir. Nous parlerons après de la « plomberie » et du financement. Soyons, s’il vous plaît, d’abord à la hauteur de l’enjeu et faisons preuve de la modernité nécessaire pour l’emporter. Nous pouvons réaliser ici quelque chose de l’ordre de ce qui a été accompli en 1945 avec la création de la sécurité sociale.

Mme Martine Wonner. Je félicite également les rapporteurs pour la qualité de leur travail. Le groupe Libertés et Territoires attache beaucoup d’importance à ce sujet et y réfléchit tout particulièrement.

La crise socio‑économique que nous traversons depuis près d’un an a été brutale et violente, exacerbant une précarité qui s’est développée depuis longtemps. Les jeunes sont concernés au premier chef ; or ils continuent d’être exclus de certaines prestations. Notre groupe fait partie de ceux qui, malgré le refus du Gouvernement, appellent à étendre le RSA aux jeunes de 18 à 25 ans, même si nous sommes conscients que cette réponse ne peut être qu’une solution d’urgence, insuffisante et temporaire. Cette aide ne doit pas être une fin en soi, et devra être réévaluée à la fin de la crise. Il s’agit de définir une véritable politique ambitieuse, qui doit accompagner les jeunes. Nous ne pouvons fermer les yeux plus longtemps sur les inégalités qui se creusent et sur un système qui favorise la reproduction sociale, économique et professionnelle, qu’il s’agisse de notre système fiscal, insuffisamment redistributif et progressif, ou de notre système social et éducatif, qui ne garantit plus la promesse républicaine de la méritocratie.

Agir sur le seul terrain de l’emploi et de l’insertion ne peut pas suffire. Il est urgent de repenser nos politiques de lutte contre la pauvreté. Aussi souscrivons-nous à l’idée d’un revenu de base, garantissant trois impératifs : l’automaticité, pour lutter contre le non-recours aux droits, bien trop fréquent dans notre pays ; l’absence de contrepartie, pour faire confiance et mettre l’accent sur l’accompagnement des personnes ; la progressivité dans la prise en compte des revenus, ce qui répond à un enjeu de justice sociale.

Par ailleurs, l’idée d’une dotation universelle utilisable dans un but de formation, de mobilité ou d’entrepreneuriat est intéressante. Un tel dispositif pourrait être utile pour casser les cycles de reproduction sociale, qui nourrissent toujours plus les inégalités. La dotation pourrait être un vrai tremplin pour démarrer dans la vie et assurer enfin une égalité réelle des chances. Doit-on, en revanche, l’attribuer à tous les jeunes, sans considération de revenus ? Je laisse la question ouverte.

Notre groupe aborde très favorablement cette proposition, non sans relever que son financement reste toutefois à déterminer. Il serait souhaitable de réorienter certains financements, notamment ceux accordés à des entreprises qui n’ont pas été vertueuses dans la gestion de leur personnel ou le reversement de leurs dividendes.

M. Pierre Dharréville. Je salue, à mon tour, le travail d’Hervé Saulignac et Boris Vallaud, qui cherchent depuis longtemps des dispositifs concrets et opérationnels à proposer pour faire face à certains défis.

L’urgence est grande, avec l’explosion de la pauvreté causée par la crise sanitaire. Mais la pauvreté existait déjà bien avant. Les inégalités sont massives en France, en Europe et dans le monde. La pauvreté n’est pas un choix ; elle est le résultat d’une organisation du monde, de décisions politiques. C’est à cela que nous devons nous attaquer en trouvant les moyens d’y faire face, avec celles et ceux qui en sont les victimes.

La jeunesse préoccupe particulièrement le groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Une commission d’enquête de notre assemblée a récemment pointé du doigt la situation particulière dans laquelle elle se trouve. J’espère que les débats qui se multiplient dans la période – cette proposition de loi y concourt – inspireront des décisions à la hauteur des difficultés auxquelles les jeunes, étudiants et non‑étudiants, ont à faire face.

La proposition de loi promeut l’idée d’un revenu dit de base – d’autres parlent d’un revenu universel qui serait mis en œuvre différemment. Nous sommes intéressés par l’automaticité que vous proposez, car il y a trop de renoncements aux droits. Nous attendons, d’ailleurs, un rapport sur le sujet, que le Gouvernement ne nous a pas encore rendu. Vous engagez une réflexion sur l’adaptation des aides sociales aux situations qu’il nous semble également intéressant de poursuivre. Enfin, vous proposez, avec la dotation universelle, un dispositif innovant sur lequel nous devons poser un regard positif. Les pistes de financement sont également intéressantes : il y a matière à prendre de bonnes décisions.

Nous abordons donc ce texte avec beaucoup d’intérêt.

M. Bernard Perrut. La pauvreté, déjà très importante, s’accentue dramatiquement avec les effets de la crise. Les files d’attente s’allongent devant les banques alimentaires ; les services sociaux sont débordés ; les demandes de RSA explosent. La précarité s’installe ; elle touche dorénavant massivement les jeunes. Notre famille politique de la droite et du centre a toujours répondu présent lorsqu’il a fallu combattre le fléau de la précarité, notamment avec la création du salaire minimum interprofessionnel garanti, du SAMU social de Paris ou de l’allocation aux adultes handicapés.

Si nous partageons avec vous la volonté de lutter contre l’augmentation préoccupante de la pauvreté, nous nous interrogeons sur votre méthode. Plutôt que de créer un revenu de base sans contrepartie, nous proposons de pallier le basculement dans la pauvreté par l’emploi, à travers la création de 300 000 emplois dédiés aux jeunes de 18 à 25 ans. Ces emplois seraient pris en charge par l’État, sur le modèle du chômage partiel tel qu’il est déployé par les collectivités territoriales, les associations d’utilité publique et les administrations. Parce qu’il est essentiel d’encourager les projets des jeunes plutôt que de leur faire attendre des aides financières, nous proposons de créer un prêt bancaire spécifique pour les jeunes, conditionné à un projet professionnel, qui serait garanti par l’État et qui leur permettrait de créer ou de poursuivre des activités. Enfin, je m’interroge sur les mesures financières de la proposition de loi, qui pénaliseront les plus riches et conduiront à un système confiscatoire, alors que l’adhésion à notre mode de répartition faiblit. Cela pourrait nuire à notre compétitivité.

Si nous partageons vos objectifs, il n’en est pas de même de la méthode et du projet que vous présentez.

M. Hervé Saulignac, rapporteur. Je suis partagé entre l’envie de vous remercier, car vous avez été nombreux à saluer le sérieux et la qualité de notre travail ainsi qu’à partager notre diagnostic, et l’incompréhension devant notre incapacité à nous mettre d’accord sur l’essentiel : chaque jour, des jeunes de ce pays n’arrivent plus à manger.

Nous avons fait le choix d’un travail sérieux, partagé, nourri de nombreux échanges et consultations, et dénué de toute ambition doctrinaire ou idéologique, comme certains l’ont laissé entendre. Si telle avait été notre optique, nous aurions soutenu l’idée d’un revenu universel de 1 500 euros, pour tous, pour toute la vie. On en est assez loin. Le dispositif cible les plus proches, et ne relègue pas au second plan la solidarité familiale, qui doit s’exercer quand elle le peut. Il limite le revenu de base à 564 euros, le montant du RSA. On n’encourage pas à l’oisiveté avec un tel montant : c’est un revenu de subsistance, juste pour ne pas crever, si j’ose dire. C’est à cela que nous nous sommes volontairement limités, pour que la proposition que nous faisons, pour la jeunesse mais pas seulement, paraisse crédible et acceptable par tous, au-delà de nos divergences de vue politiques.

Madame Iborra, je vous le dis avec respect, nous ne vivons pas dans le même monde. Vous semblez considérer que la jeunesse trouve des réponses dans toutes les actions que le Gouvernement entreprend à son intention. Je ne crois pas que ce soit vrai. Vous proposez un débat à l’Assemblée : cela tombe bien, nous l’avons en ce moment ! Ne reportons pas à plus tard ce qui relève de l’urgence, que presque tous ici ont constatée. Exiger un débat à l’Assemblée nationale sur ces questions me paraît un peu court.

Évitons aussi la caricature. Cette proposition de loi ne se limite pas à l’apport d’une aide pécuniaire. La question de l’accompagnement est centrale et il n’y aurait aucun sens à penser la lutte contre la pauvreté, notamment celle qui touche les plus jeunes, sans accompagner ces derniers sur le chemin de l’emploi. Mais tout de même... Lorsque l’on ne mange qu’une fois par jour, on a besoin d’un peu de dignité, ce qui passe par un minimum de subsides. Il n’est donc pas possible de faire comme si la question de l’aide pécuniaire était secondaire alors que, pour un certain nombre de jeunes, elle est urgente.

Je ne suis pas sûr, madame Iborra, que la majorité à laquelle vous appartenez ait attendu qu’un consensus se dégage pour mener certaines réformes. Je ne crois pas non plus que l’action politique consiste à l’attendre pour prendre des décisions. En tout cas, le consensus existe sur le diagnostic et ce n’est déjà pas si mal.

De plus, cette mesure n’a rien d’administratif ou de technocratique. Je ne crois pas qu’il soit possible de faire plus simple : un revenu de base automatique dès 18 ans, c’est simplement un droit nouveau qui se justifie de lui-même.

Cette proposition de loi, monsieur Viry, serait un peu doctrinaire ? Si combattre la pauvreté relève de la doctrine, alors, je veux bien être doctrinaire.

Je crois que chaque jeune aspire à l’émancipation d’abord par l’entrée dans le monde du travail qui lui procurera le revenu nécessaire. Notre proposition de loi ne heurte en rien la valeur travail. Le revenu de base n’a d’ailleurs aucun effet négatif sur le travail, l’exemple finlandais en atteste. De plus, en Europe, sur vingt-huit pays, quatre seulement accordent les minima sociaux uniquement à partir de 25 ans, dont la France. Si nous voulons que les conditions d’entrée dans le monde du travail soient les plus favorables possible, il n’est peut‑être pas utile que cette jeunesse endure un parcours du combattant pendant presque sept ans.

Madame de Vaucouleurs, à force de partager le diagnostic, nous finirons peut-être un jour par partager le remède ! Je regrette que vous n’en tiriez pas la conclusion que le moment est venu d’y aller ! Je vais m’y employer, mais je ne pense pas pouvoir vous faire changer d’avis.

Je n’ai jamais douté une seconde du soutien de mon collègue Juanico, qui ne m’en voudra pas de ne pas épiloguer sur son intervention, que j’ai particulièrement appréciée.

Je vous remercie, madame Petit, pour le retour historique, que je partage. Vous avez rappelé les enjeux avec des mots très justes mais je ne comprends pas pourquoi, selon vous, le revenu universel est un projet macroniste. Si tel est le cas, quand le proposerez-vous ? Le temps politique ne doit pas s’enliser dans les bonnes paroles car le temps social, lui, file très vite. Peut-être pourra-t-on dire encore pendant quelques semaines à cette jeunesse que le revenu universel est un projet macroniste, mais chaque jour qui passe jette le doute sur cette belle déclaration.

Je vous remercie pour votre avis favorable, madame Wonner. Vous avez soulevé la question centrale du financement, qui implique d’abord de savoir combien coûte la pauvreté dans notre pays : selon l’enquête d’ATD Quart Monde de 2015, plus cher, de toute façon, que ne coûterait à la société une dépense pour essayer de l’éradiquer.

Je suis d’accord avec Pierre Dharréville, qui a beaucoup insisté sur l’urgence de la situation. Si nous persistons à nous égarer dans de bonnes paroles en disant aux jeunes que nous comprenons leur souffrance mais qu’il est trop compliqué de nous mettre d’accord sur un dispositif essentiel et élémentaire pour leur venir en aide, nous leur enverrons un mauvais signal. Je ne sais pas ce que pourrait donner, dans les mois et les années à venir, une jeunesse qui ne croirait plus en la vertu d’un État protecteur... Cette idée me préoccupe à titre personnel et en tant que législateur. Si nous ne répondons pas très rapidement à cette urgence, nous devrons peut-être un jour en payer le prix fort.

M. Boris Vallaud, rapporteur. Que le Gouvernement s’efforce de trouver des solutions pour chaque jeune, tant mieux : il serait coupable de ne pas le faire. Les élus socialistes, chaque fois qu’ils le peuvent, s’engagent dans la voie offerte, mais cela ne suffit pas. Chaque soir, des jeunes, la tristesse au front, font la queue devant les banques alimentaires.

Nous pouvons tous convenir qu’il est temps d’agir. Que proposons-nous ? Un mécanisme dont l’automaticité permet de récupérer 30 % des gens qui n’exercent pas leurs droits, et dont certains s’abîment dans la grande pauvreté avec ce que cela implique comme conséquences sociales, médicales, psychologiques pour eux et leurs enfants.

Cette jeunesse a le désir ardent de s’inventer un avenir, d’avoir une place dans la société, de trouver un stage, une formation, un emploi. Nous défendons la valeur travail, la possibilité d’obtenir un travail digne, qui permette de vivre, d’être, de s’émanciper, car nous savons aussi que le travail peut abîmer et que la question de la vie et de la santé au travail est fondamentale. Mais cette jeunesse connaît une extrême pauvreté, éprouve une angoisse existentielle au cœur d’une crise sans précédent. Nous ne pouvons pas nous quitter cet après‑midi, après avoir partagé un diagnostic accablant pour un grand pays comme le nôtre, sans avoir dit à la jeunesse et aux plus précaires de nos concitoyens que nous mettons tout en œuvre pour que chacun puisse sortir la tête de l’eau.

Nous avons réfléchi à la question de la conditionnalité, avec les droits et les devoirs. Le premier des droits, c’est celui d’être accompagné. Le dispositif de la garantie jeunes est, de ce point de vue, un modèle. Nous attendons la concrétisation du service public de l’insertion annoncé par le Gouvernement, tout comme l’instauration du revenu universel d’activité, mais nous ne voyons rien venir.

Là où se sont déroulées les expérimentations, les bénéficiaires de ce filet de sécurité, de ce revenu d’existence se sont-ils abîmés dans l’oisiveté ? Ont-ils renoncé à chercher du travail ? En aucun cas, nulle part ! En Finlande, ceux qui cherchent le moins un emploi font partie du groupe témoin, celui qui ne perçoit aucune allocation. Lorsque votre horizon se limite à la fin de la journée, au mieux à la fin de la semaine, pour vous nourrir, vous et vos enfants, et pour vous loger ; lorsqu’un jeune est obligé de rendre son appartement pour revenir vivre chez ses parents, au lieu de déployer ses ailes pour entrer dans l’âge adulte, ce n’est pas la même chose que lorsque l’horizon s’ouvre : vous repartez à la recherche d’un emploi, vous vous saisissez à bras-le-corps de votre projet de formation, vous reconsidérez l’avenir, vous vous soignez. Et les résultats sont positifs pour tout le monde, car, comme l’a dit Hervé Saulignac, la pauvreté coûte plus cher que les politiques de lutte contre celle-ci.

Certains ont évoqué un contrat et non un contrôle. Or, à Pôle emploi, vous n’avez recruté que des contrôleurs.

Monsieur Viry, nous avons en partage ce que les gaullistes sociaux, les socialistes et les communistes ont su construire au fil de l’histoire, cet héritage commun qui a survécu aux alternances, ce socle qui permet de mener une vie digne, qui a un sens.

Nous n’avons pas soumis au débat la question des modalités de financement, mais pas par esprit de « y’a qu’à, faut qu’on » ; nous savons comment financer : plutôt que de voir un problème dans la dépense publique, il faut parfois considérer que c’est dans la recette publique qu’il se pose. Lorsque les multinationales ne paient pas leurs impôts, que 40 % de leurs résultats sont consolidés dans des paradis fiscaux, ce sont des milliards qui manquent aux États et aux services publics. Quand le taux d’effort est plus important dans les premiers déciles de l’impôt sur le revenu, il y a un problème de justice. Quand, avec la suppression de la dernière tranche de la taxe d’habitation, 20 % des Français vont capter 46 % des dépenses fiscales, on est en droit de se demander si tout cela est bien juste.

Nous avons proposé un financement du dispositif à travers la réforme des très grosses successions. Il n’est évidemment pas question de toucher à un héritage qui est le fruit d’une vie de travail. Mais lorsque l’on est né rentier, que l’on transmet une rente grossie par la spéculation, il est juste de participer mieux à la solidarité nationale. Dans notre proposition, 85 % des Français étaient, comme aujourd’hui, exonérés des frais de succession. En fait, ce que nous mettons en débat, c’est la justice de notre modèle fiscal et social, et son efficacité redistributive. Choisir l’universalité, c’est préférer des droits pour tous à des allocations pour certains.

Cette proposition de loi a été très travaillée et a fait l’objet d’une très large consultation, ce qui est assez inédit pour une proposition de loi de l’opposition, avec les moyens dont celle-ci dispose. Je remercie, à ce propos, les administrateurs de la commission, qui ont fait un travail considérable.

Nous avons un rendez-vous. Sommes-nous capables de proposer un progrès social supplémentaire pour ces jeunes de 18 ans qui n’ont droit à rien, qui sont majeurs à 16 ans sur le plan pénal, à 18 ans sur le plan civique, et qui ne le sont qu’à 25 ans sur le plan social, ce qui est une singularité française ? Nous pouvons changer les choses ; nous pouvons nous soucier de l’avenir en nous souciant de la jeunesse. C’est précisément le sens de ce texte.

II.   examen des articles

Article 1er Instaurer un revenu de base inconditionnel

La commission rejette l’article 1er.

Après l’article 1er

La commission examine l’amendement AS7 des rapporteurs.

M. Hervé Saulignac, rapporteur. Des femmes, en particulier, pourraient être pénalisées pour l’attribution de ce revenu dès lors que leur conjoint disposerait de ressources. Nous demandons donc au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi, afin d’examiner les effets de la prise en compte de la situation conjugale du bénéficiaire dans le calcul du montant du revenu de base. Une prestation individualisée pourrait être ainsi envisagée.

M. Loïc Prud’homme. Il a beaucoup été question de dignité, mais je me demande si une prestation individuelle de 564 euros mensuels est digne. La France insoumise plaide pour que le RSA jeune actif tende vers 800 ou 1 000 euros.

En matière d’insertion professionnelle, ne conviendrait-il pas de parler d’une garantie universelle de l’emploi plutôt que d’un revenu universel ? Le versement d’une allocation ne saurait en effet régler la question de l’accès à l’emploi. Nous avons proposé une conscription obligatoire pour que les jeunes qui participent à des travaux d’intérêt général soient payés au SMIC, ce qui serait un véritable tremplin vers l’autonomie et la dignité.

Puisque vous parlez de partage, cher collègue Vallaud, celui du temps de travail serait une piste plus évidente et plus facilement finançable, non seulement pour les jeunes mais pour tous, afin de mieux répartir les richesses créées dans notre pays.

M. Boris Vallaud, rapporteur. Aucune question que vous soulevez n’est exclusive des autres. Une autre piste de partage dans l’entreprise est celui de la valeur ajoutée, qui fait l’objet d’une captation entre très peu de mains ; il permettrait d’augmenter les salaires les plus bas. Nous devons évidemment réfléchir à la garantie universelle de l’emploi, notamment, mais cela n’interdit pas de réfléchir également au dispositif que nous proposons.

M. Loïc Prud’homme. Mécaniquement, les employeurs risquent de miser sur cette dotation de base qu’est le revenu universel pour réduire le salaire complémentaire qu’ils devront verser. Les salaires seront donc tirés vers le bas et la répartition de la valeur ajoutée au sein des entreprises n’en sera pas améliorée.

Mme Valérie Petit. L’individualisation est en effet importante et s’inscrit dans la logique du revenu de base ou universel visant à émanciper les jeunes vis‑à‑vis de leur famille et les femmes vis-à-vis de leur conjoint. Le revenu universel, monsieur Prud’homme, tend à éradiquer la pauvreté, pas le chômage. Pour cela, d’autres politiques publiques existent – nous proposons, par exemple, l’instauration d’un service public de l’activité. Ne mélangeons pas tout !

M. Boris Vallaud, rapporteur. Le revenu de base serait fondé sur la fusion du RSA et de la prime d’activité. Ceux qui ont droit au RSA et qui n’en bénéficient pas disposeraient ainsi automatiquement de ce revenu, ce qui permettrait de tirer 30 % des personnes privées d’emploi de la très grande pauvreté.

M. Loïc Prud’homme. Il faut lutter contre le non-recours !

M. Boris Vallaud, rapporteur. Précisément !

J’ajoute que la création du RMI et de la prime d’activité n’a entraîné aucune baisse de salaire. Nous aurons l’occasion d’en discuter lors de l’examen de la proposition de loi pour une limite décente des écarts de revenus.

La commission rejette l’amendement.

Article 2 : Instaurer une dotation tremplin universelle sur le compte professionnel d’activité

La commission rejette l’article 2.

Après l’article 2

La commission est saisie de l’amendement AS8 des rapporteurs.

M. Hervé Saulignac, rapporteur. Certains des 2 000 contributeurs à la consultation citoyenne se sont interrogés sur le montant de la dotation tremplin et sur les usages autorisés de cette dernière sur le compte personnel d’activité, dont nous avons souhaité qu’ils soient encadrés et limités à la formation, à la recherche d’un emploi et à la création d’une activité entrepreneuriale. Nombre de contributeurs auraient souhaité que nous allions au-delà, voire, qu’il n’y ait aucune limitation à ces usages.

Cet amendement prévoit donc que le Gouvernement remette un rapport au Parlement dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi examinant l’opportunité d’une évolution du dispositif sur ces deux points.

La commission rejette l’amendement.

Article 3 : Coordinations

La commission rejette l’article 3.

Après l’article 3

La commission examine l’amendement AS9 des rapporteurs.

M. Boris Vallaud, rapporteur. Notre proposition vient de loin ; elle ne relève pas d’un caprice personnel. Des collectivités locales, en première ligne dans l’application de la politique sociale et d’insertion, de nombreuses associations et organisations syndicales, des chercheurs s’y sont impliqués. C’est avec beaucoup de regret et de tristesse que je constate le sort que vous réservez à ce travail, qui a été longuement mûri. Vous avez l’art de balayer d’un revers de la main ce qui mérite, au contraire, une discussion approfondie.

Nous sommes au moins tous d’accord : la jeunesse souffre, ne mange pas à sa faim, et nous nous devons d’agir, mais peut-être pas en adoptant une réforme structurelle qui soulève un certain nombre de questions en matière de financement, d’accompagnement, d’automaticité. Dont acte. Je vous propose donc qu’à compter du 1er janvier 2022 et jusqu’au 31 décembre 2023 – mais le Gouvernement pourrait décider d’avancer la date puisque nous sommes empêchés par l’article 40 –, nous ouvrions le bénéfice du revenu de solidarité active aux bénéficiaires âgés de plus de 18 ans. Ce serait un compromis républicain par lequel nous nous montrerions à la hauteur de la situation et éviterions que nos réserves n’hypothèquent l’avenir de la jeunesse. Vous vous êtes fait élire sur la promesse d’écouter tout le monde : montrez-le un peu !

Mme Monique Iborra. Il n’est pas question de mettre en cause la qualité de votre travail mais, comme nous respectons vos convictions, respectez les nôtres ! Nous avons en effet des divergences, mais nous ne pensons pas pour autant que tout est parfait et qu’il n’y a rien à faire !

Ce que vous proposez ne correspond en rien à notre engagement lors de l’élection présidentielle et ne règlera pas le problème des inégalités, lequel doit être traité à la racine, ce que les précédents gouvernements n’ont jamais fait. Je regrette que les socialistes persistent sur cette trajectoire.

Mme Christine Cloarec-Le Nabour. Un jeune qui vous écouterait sombrerait dans la dépression ! Je vous assure que nous vivons dans le même monde. J’ai participé aux auditions, je suis élue depuis dix ans, je discute régulièrement avec des jeunes en visioconférence depuis trois semaines : je suis certaine que ce n’est pas de cela qu’ils ont besoin. Je ne nie pas les difficultés, mais l’enjeu est de savoir quelles en sont les causes et s’ils sont informés sur leurs droits. Il faut partir à la recherche des « invisibles » et les accompagner beaucoup mieux que nous ne le faisons.

Je veux bien que vous prévoyiez un accompagnement des jeunes par les conseils départementaux, mais ils sont d’ores et déjà très bien accompagnés par les missions locales. Le tableau n’est ni rose ni noir. La crise est même une opportunité pour remettre les politiques en direction de la jeunesse au cœur de nos préoccupations.

Encore une fois, nous n’avons pas la même méthode que vous. Nous partageons votre volonté d’accompagner les jeunes vers l’autonomie et l’émancipation, mais nous parions qu’elles passent par la formation et l’emploi, certainement pas par un RSA jeunes qui, de surcroît, est très stigmatisant. Les jeunes s’interrogent bien plutôt, par exemple, sur l’accès au logement et à l’information sur les aides, qui existent bel et bien.

De plus, vous semblez nier tout ce qui a été accompli depuis le lancement du plan jeunes et les résultats obtenus : 615 000 jeunes sont entrés dans des parcours d’insertion et 500 000 en apprentissage ; les entrées en garantie jeunes, dont les critères ont été assouplis, ont doublé. En 2021, les jeunes bénéficieront de 1 200 000 propositions. Sans doute faut-il aller plus loin, mais certainement pas avec le RSA jeunes.

Mme Valérie Petit. Nous partageons cet objectif de création d’un revenu universel, mais il y faut une réforme historique qui prendra du temps et qui ne relève pas d’une « niche » parlementaire. Le groupe Agir ensemble défend également une réforme fiscale qui, elle aussi, nécessite de prendre le temps.

Compte tenu de l’urgence pour la jeunesse, comment faire ? Votre proposition de loi s’inscrit dans ce contexte. J’ai, quant à moi, écrit récemment au Premier ministre afin de lui proposer une expérimentation de « notre » revenu universel, en urgence, pour les moins de 25 ans.

Je suis d’accord avec mes collègues du groupe La République en Marche, l’extension du RSA aux moins de 25 ans n’est pas la bonne solution, mais nous ne pouvons pas attendre plus longtemps. Je ne voterai pas, toutefois, cet amendement.

M. Pierre Dharréville. Ce débat s’impose. Je constate que nombre de jeunes sont en dehors des radars de l’aide sociale. On ne peut pas simplement prétendre que leur situation s’améliorera lorsqu’ils auront un emploi. Il convient donc d’agir, en particulier dans le contexte dégradé que nous connaissons.

Si, d’après une collègue de la majorité, cette proposition de loi ne permet pas de remédier aux inégalités, je crains que le projet de la majorité ne les aggrave. Toutes les enquêtes économiques produites dans la dernière période le montrent. Un changement de cap politique s’impose et il importe de revenir sur un certain nombre de mauvais choix.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Nous ne voulons pas du RSA jeunes. À titre personnel, je suis favorable à l’instauration d’un revenu universel, mais il ne me semble pas opportun de proposer un minimum social à partir de 18 ans, car cela pourrait réduire leur situation à celle d’assistés. Nous devons faire en sorte que chaque jeune dispose de ressources, notion qui me paraît essentielle. Leur dépendance financière vis-à-vis de leurs parents est dommageable alors qu’ils aspirent à l’autonomie.

Si je ne voterai pas cet amendement, je considère qu’il faut éliminer tous les trous dans la raquette, inacceptables, et poursuivre rapidement le débat. Le groupe MoDem et Démocrates apparentés a d’ailleurs voté la proposition de résolution relative au lancement d’un débat public sur la création d’un mécanisme de revenu universel appelé socle citoyen.

Mme Monique Iborra. Nous avons l’habitude d’entendre des propos comme ceux que vient de tenir M. Dharréville mais je lui rappelle que, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques, le taux de pauvreté a diminué en 2019 et que nous avons également élargi le nombre de bénéficiaires de la prime d’activité, dont nous avons aussi augmenté le montant.

M. Hervé Saulignac, rapporteur. Mme Cloarec-Le Nabour a parlé de dépression. Lorsque j’entends une autre représentante de la majorité affirmer qu’il n’est pas question d’aller plus loin que ce qui a déjà été déjà fait, il y a de quoi faire sombrer un député dans la dépression. Cela montre combien le décalage entre la réalité vécue par la jeunesse et certains parlementaires est immense : 22 % des jeunes sont en détresse psychologique, 50 % sont inquiets pour leur santé mentale, 36 % ont perdu le petit boulot qui leur permettait de financer leur budget d’étudiant, 25 % vivent sous le seuil de pauvreté. Nous avons le devoir impérieux de réagir urgemment à l’urgence !

La semaine prochaine, en séance publique, notre assemblée pourra émettre un signal à l’intention de cette jeunesse qui s’impatiente, en tout cas à ceux qui, parmi elle, croient encore que nous pouvons répondre à leur appel. Cet amendement est de repli de repli de repli, puisque nous proposons une mesure temporaire et pas d’ouvrir le RSA aux moins de 25 ans ad vitam æternam. Il s’agit d’une mesure réactive et massive. Si la formule de RSA jeunes vous dérange, Boris Vallaud et moi-même n’avons aucune vanité d’auteur. Mme de Vaucouleurs a évoqué les « ressources ». Pourquoi pas, dès lors que la réponse est efficace !

Nous proposons une extension du RSA parce qu’il existe, qu’il a fait ses preuves et qu’il est financé. Il n’est pas question de faire prendre à la nation un risque budgétaire immense : nous proposons simplement d’éteindre un incendie. Vous pouvez dire que ce n’est pas la bonne façon de le faire, mais si vous n’en proposez pas une autre, vous ne serez pas à la hauteur de vos responsabilités.

Mme Monique Iborra. M. Saulignac se campe en sauveur d’une jeunesse qui, du jour au lendemain, se retrouverait grâce à lui dans une situation enviable. L’Union nationale des étudiants de France, syndicat qui est proche de vous et, en tout cas, loin de nous, considère que les 564 euros que vous proposez sont nettement insuffisants et propose un doublement de cette somme. Je vous invite donc à faire preuve d’un peu plus de modestie.

Mme Christine Cloarec-Le Nabour. Le débat aura lieu dans l’hémicycle et c’est tant mieux. La souffrance psychique concerne principalement les étudiants mais elle ne s’explique pas par des raisons nécessairement financières : certains se sentent isolés et n’ont pas pu rentrer dans leur famille en raison de l’enseignement en distanciel et des confinements.

Vous ne pouvez pas dire que nous ne faisons rien avec le parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie, la garantie jeunes, l’accompagnement intensif des jeunes de Pôle emploi, l’objectif premier emploi de l’Association pour l’emploi des cadres, les écoles de la deuxième chance, les établissements pour l’insertion dans l’emploi, le dispositif prépa‑apprentissage ! Les jeunes diplômés boursiers pourront, quant à eux, conserver une partie de leur bourse pendant quatre mois supplémentaires. Nous essayons de trouver des solutions pour chaque profil et nous continuerons.

La commission rejette l’amendement.

Article 4 : Entrées en vigueur

La commission rejette l’article 4.

Article 5 : Gage financier

La commission rejette l’article 5.

L’ensemble des articles de la proposition de loi et des amendements portant articles additionnels ayant été rejeté, l’ensemble de la proposition de loi est considéré comme rejeté par la commission.

M. Boris Vallaud, rapporteur. Je remercie à nouveau nos administrateurs et tous ceux parmi vous qui ont soutenu ce texte, lequel ne tend pas à supprimer tout ce qui a été fait – nous sommes manifestement plus attentifs que ne l’est la majorité. Quoi qu’il en soit, nous venons de rater un rendez-vous et c’est bien dommage.

 

*

*     *

L’ensemble des articles de la proposition de loi et des amendements portant articles additionnels ayant été rejetés, le texte est considéré comme rejeté par la commission.

En conséquence, aux termes de l’article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique aura lieu sur le texte initial de cette proposition de loi.

 

 


— 1 —

   Annexes

Annexe n° 1 :
SynthÈse des rÉsultats de la consultation citoyenne

 


— 1 —


 






 


 



 







 









 


Annexe N° 2 : simulations

I.   Simulation pour un individu seul

1.   Situation actuelle, avant la mise en place de la réforme proposée

Situation par part de smic d’un individu seul, sans enfant, sans allocation logement, avant la rÉforme proposÉe
(donnÉes 2020)

(en euros)

 

Montant forfaitaire RSA

Montant forfaitaire PA

Part de SMIC

Revenus d’activité

Revenus hors activité

Ressources totales

RSA

Bonification individuelle*

Prime d’activité

Total

497

497

0,05

61

0

61

436

0

37

534

497

497

0,10

122

0

122

375

0

74

571

497

497

0,15

183

0

183

314

0

112

609

497

497

0,20

244

0

244

253

0

149

646

497

497

0,25

305

0

305

192

0

186

683

497

497

0,30

366

0

366

131

0

223

720

497

497

0,35

427

0

427

70

0

260

757

497

497

0,40

488

0

488

9

0

297

794

497

497

0,45

549

0

549

0

0

283

832

497

497

0,50

610

0

610

0

3

262

872

497

497

0,55

670

0

670

0

19

254

925

497

497

0,60

731

0

731

0

34

246

978

497

497

0,65

792

0

792

0

50

238

1031

497

497

0,70

853

0

853

0

66

230

1084

497

497

0,75

914

0

914

0

82

222

1136

497

497

0,80

975

0

975

0

98

214

1189

497

497

0,85

1036

0

1036

0

113

206

1242

497

497

0,90

1097

0

1097

0

129

198

1295

497

497

0,95

1158

0

1158

0

145

190

1348

497

497

1,00

1219

0

1219

0

160

182

1401

497

497

1,05

1280

0

1280

0

160

158

1438

497

497

1,10

1341

0

1341

0

160

134

1475

497

497

1,15

1402

0

1402

0

160

110

1512

497

497

1,20

1463

0

1463

0

160

87

1549

497

497

1,25

1524

0

1524

0

160

63

1586

497

497

1,30

1585

0

1585

0

160

39

1624

497

497

1,35

1646

0

1646

0

160

15

1661

497

497

1,40

1707

0

1707

0

160

0

1707

497

497

1,45

1768

0

1768

0

160

0

1768

497

497

1,50

1829

0

1829

0

160

0

1829

Selon les données 2020 : SMIC de 1 219 €, Bonification individuelle maximale de la prime d’activité de 160 euros entre 0,5 et 1 SMIC / Taxation 61 % sur revenus d’activité pour le calcul du montant de la prime d’activité.

* Bonification individuelle sur la base de la fonction (estimée) f(x) tel que f(x) = 0,256x-144, afin qu’elle soit comprise entre 2 et 160 €.

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, sur la base des calculs présentés par l’IPP.

 

 

 

 

 


2.   Situation après la mise en place de la réforme proposée

Situation par part de smic d’un individu seul, sans enfant, sans allocation logement, aprÈs la rÉforme proposÉe

(en euros)

Montant forfaitaire RB

Part de SMIC

Revenus d’activité

Revenus hors activité

Ressources totales

Revenu de base

Total

Gain ou perte vis-à-vis de la situation avant réforme

497

0,05

61

0

61

482

543

9

497

0,10

122

0

122

467

588

17

497

0,15

183

0

183

451

634

26

497

0,20

244

0

244

436

680

34

497

0,25

305

0

305

421

726

43

497

0,30

366

0

366

406

771

51

497

0,35

427

0

427

390

817

60

497

0,40

488

0

488

375

863

68

497

0,45

549

0

549

360

908

77

497

0,50

610

0

610

345

954

82

497

0,55

670

0

670

329

1000

75

497

0,60

731

0

731

314

1046

68

497

0,65

792

0

792

299

1091

61

497

0,70

853

0

853

284

1137

53

497

0,75

914

0

914

268

1183

46

497

0,80

975

0

975

253

1228

39

497

0,85

1036

0

1036

238

1274

32

497

0,90

1097

0

1097

223

1320

24

497

0,95

1158

0

1158

207

1366

17

497

1,00

1219

0

1219

192

1411

11

497

1,05

1280

0

1280

177

1457

19

497

1,10

1341

0

1341

162

1503

28

497

1,15

1402

0

1402

147

1548

36

497

1,20

1463

0

1463

131

1594

45

497

1,25

1524

0

1524

116

1640

53

497

1,30

1585

0

1585

101

1686

62

497

1,35

1646

0

1646

86

1731

70

497

1,40

1707

0

1707

0

1707

0

497

1,45

1768

0

1768

0

1768

0

497

1,50

1829

0

1829

0

1829

0

Le calcul du montant du revenu de base s’appuie sur une dégressivité de 25 % des revenus d’activité de l’individu. De ce fait, une augmentation de 1 euro des revenus d’activité entraîne une baisse de seulement 25 centimes sur le montant du revenu de base. Inversement, on peut dire que pour 1 euro de revenus d’activité supplémentaire, on obtient 75 centimes avec le revenu de base.

Données 2020.

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, sur la base des calculs présentés par l’IPP.

 

3.   Comparaison des gains avant et après réforme

Ressources totales de l’individu avant et aprÈs l’instauration d’un revenu de base en 2020, avec prise en compte de 75 % des revenus d’activitÉ (DonnÉes 2020)

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, sur la base des calculs présentés par l’IPP.

 

 

Gains grÂce À la rÉforme par part de smic

Données 2020.

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, sur la base des calculs présentés par l’IPP.

Le gain serait plus faible pour les individus touchant un SMIC, car ils sont avantagés par le système de bonification individuelle actuel, et que la réforme proposée va dans le sens d’une égalisation des situations en supprimant ces bonifications.

II.   Simulation pour un couple avec deux enfants, sans allocation logement

1.   Situation actuelle, avant la mise en place de la réforme proposée

Situation par part de smic d’un couple, avec deux enfants, sans allocation logement, avant la rÉforme proposÉe

 (en euros)

Montant forfaitaire RSA

Montant forfaitaire PA

Part de SMIC

Revenus d’activité

Revenus hors activité

Ressources totales

RSA

Bonification individuelle*

Prime d’activité

Total

1018

993

0,1

121,9

0

121,9

896,1

0

49

1067

1018

993

0,2

243,8

0

243,8

774,2

0

124

1142

1018

993

0,3

365,7

0

365,7

652,3

0

198

1216

1018

993

0,4

487,6

0

487,6

530,4

0

272

1290

1018

993

0,5

609,5

0

609,5

408,5

0

347

1365

1018

993

0,6

731,4

0

731,4

286,6

0

421

1439

1018

993

0,7

853,3

0

853,3

164,7

0

496

1514

1018

993

0,8

975,2

0

975,2

42,8

0

570

1588

1018

993

0,9

1097,1

0

1097,1

0

0

565

1662

1018

993

1

1219

0

1219

0

4

521

1740

1018

993

1,1

1340,9

0

1340,9

0

35

505

1846

1018

993

1,2

1462,8

0

1462,8

0

67

489

1952

1018

993

1,3

1584,7

0

1584,7

0

98

473

2058

1018

993

1,4

1706,6

0

1706,6

0

130

457

2164

1018

993

1,5

1828,5

0

1828,5

0

162

441

2270

1018

993

1,6

1950,4

0

1950,4

0

193

425

2376

1018

993

1,7

2072,3

0

2072,3

0

225

410

2482

1018

993

1,8

2194,2

0

2194,2

0

256

394

2588

1018

993

1,9

2316,1

0

2316,1

0

288

378

2694

1018

993

2

2438

0

2438

0

319

362

2800

1018

993

2,1

2559,9

0

2559,9

0

320

315

2875

1018

993

2,2

2681,8

0

2681,8

0

320

267

2949

1018

993

2,3

2803,7

0

2803,7

0

320

220

3023

1018

993

2,4

2925,6

0

2925,6

0

320

172

3098

1018

993

2,5

3047,5

0

3047,5

0

320

124

3172

1018

993

2,6

3169,4

0

3169,4

0

320

77

3246

1018

993

2,7

3291,3

0

3291,3

0

320

29

3321

1018

993

2,8

3413,2

0

3413,2

0

320

0

3413

1018

993

2,9

3535,1

0

3535,1

0

320

0

3535

1018

993

3

3657

0

3657

0

320

0

3657

La simulation présente un modèle où les deux parents touchent chacun le même montant de revenus d’activité.

Selon les données 2020 : SMIC de 1 219 €, bonification individuelle maximale de la prime d’activité de 320 € entre 1 et 2 SMIC, taxation 61 % sur revenus d’activité pour le calcul du montant de la prime d’activité.

* Bonification individuelle sur la base de la fonction (estimée) f(x) tel que f(x) = 0,256x-320, afin qu’elle soit comprise entre 2 et 320 €.

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, sur la base des calculs présentés par l’IPP.

 

 

 

 

 

 

 

2.   Situation après la mise en place de la réforme proposée

Situation par part de smic d’un couple, avec deux enfants, sans allocation logement, après la rÉforme proposÉe
(DONNÉES 2020)

(en euros)

Montant forfaitaire RB

Part de SMIC

Revenus d’activité

Revenus hors activité

Ressources totales

Revenu de base

Total

Gain ou perte vis-à-vis de la situation avant réforme

1018

0,1

122

0

122

988

1109

42

1018

0,2

244

0

244

957

1201

59

1018

0,3

366

0

366

927

1292

76

1018

0,4

488

0

488

896

1384

93

1018

0,5

610

0

610

866

1475

110

1018

0,6

731

0

731

835

1567

127

1018

0,7

853

0

853

805

1658

144

1018

0,8

975

0

975

774

1749

162

1018

0,9

1097

0

1097

744

1841

179

1018

1,0

1219

0

1219

713

1932

192

1018

1,1

1341

0

1341

683

2024

177

1018

1,2

1463

0

1463

652

2115

163

1018

1,3

1585

0

1585

622

2207

148

1018

1,4

1707

0

1707

591

2298

134

1018

1,5

1829

0

1829

561

2389

119

1018

1,6

1950

0

1950

530

2481

105

1018

1,7

2072

0

2072

500

2572

90

1018

1,8

2194

0

2194

469

2664

76

1018

1,9

2316

0

2316

439

2755

61

1018

2,0

2438

0

2438

409

2847

47

1018

2,1

2560

0

2560

378

2938

63

1018

2,2

2682

0

2682

348

3029

80

1018

2,3

2804

0

2804

317

3121

98

1018

2,4

2926

0

2926

287

3212

115

1018

2,5

3048

0

3048

256

3304

132

1018

2,6

3169

0

3169

226

3395

149

1018

2,7

3291

0

3291

195

3486

166

1018

2,8

3413

0

3413

0

3413

0

1018

2,9

3535

0

3535

0

3535

0

1018

3,0

3657

0

3657

0

3657

0

Le calcul du montant du revenu de base s’appuie sur une prise en compte de 25 % des revenus d’activité de l’individu. De ce fait, une augmentation de 1 euro des revenus d’activité entraîne une baisse de seulement 25 centimes sur le montant du revenu de base.

Données 2020.

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, sur la base des calculs présentés par l’IPP.

 

 

 


3.   Comparaison des gains avant et après réforme

Ressources totales du foyer avant et aprÈs l’instauration d’un revenu de base en 2020, avec prise en compte de 75 % des revenus d’activitÉ

Données 2020

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, sur la base des calculs présentés par l’IPP.

Gains issus de la rÉforme par part de smic

(en euros)

Données 2020.

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, sur la base des calculs présentés par l’IPP.

 


–  1  –

Annexe n° 3 :
Liste des personnes auditionnÉes par les rapporteurs

(Par ordre chronologique)

       Table ronde réunissant les acteurs de la jeunesse :

     Conseil économique, social et environnemental (CESE) – M. Antoine Dulin, vice-président, président de la commission « insertion des jeunes » au sein du conseil d’orientation des politiques de jeunesse

     M. Benjamin Vial, docteur en sciences politiques et chercheur en sociologie, membre du laboratoire PACTE/ODENORE, spécialiste des questions de non recours des jeunes aux dispositifs d’insertion

     Union nationale des étudiants de France (UNEF) (*)M. Adrien Liénard, membre du bureau national, chargé des questions sociales

       Table ronde réunissant des collectifs, thinks tanks et chercheurs spécialistes de la jeunesse et des inégalités :

     Mouvement français pour un revenu de base (*) – Mme Ly Katekondji, référente du pôle plaidoyer

     Collectif droit au revenu – M. Alexandre Laurent, co-fondateur du collectif

     M. Guillaume Mathelier, enseignant à la Haute école de gestion de Genève, maire d’Ambilly, et auteur de « L’Égalité des dotations initiales. Vers une nouvelle justice sociale »

     M. Martial Beyart – maire de Grande-Synthe

     Mme Nadia Okbani, maîtresse de conférences en science politique à l’Université de Toulouse-Jean Jaurès

     Mme Anne Eydoux, maîtresse de conférences d’économie au Cnam, chercheuse au Centre d’études de l’emploi et du travail (CEET) et au Laboratoire interdisciplinaire de sociologie économique (Lise), membre des Économistes atterrés

     Mouvement national des chômeurs précaires – M. Marc Desplats, ancien président et membre du bureau exécutif

     Mme Cécile Van de Velde, professeure agrégée de l’Université de Montréal, membre de l’équipe de recherche sur les inégalités sociales du Centre Maurice Halbwachs

       Table ronde réunissant les associations luttant contre la pauvreté :

     Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (UNIOPSS) – M. Jérôme Voiturier, directeur général

     Fondation Abbé Pierre – M. Manuel Domergue, directeur des études

     ATD Quart Monde (*) – Mme Marie Aleth Grard, présidente, et Mme Isabelle Doresse, représentante d’ATD Quart Monde à l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale

     Emmaüs France – M. Jean-François Maruszyczak, directeur général

     Secours catholique (*) – M. Jean Merckaert, directeur action plaidoyer France

       Table ronde réunissant les acteurs de l’insertion :

     Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) – M. Bruno Lucas, délégué général

     Assemblée des départements de France (ADF) – M. Anthony Arciero, conseiller départemental du Val-d’Oise et représentant des collectivités au conseil d’administration de Pôle emploi, M. Jean Michel Rapinat, directeur délégué aux affaires sociales, et Mme Ann-Gaëlle Werner-Bernard, conseillère relations avec le Parlement

     Union nationales des missions locales (UNML) – M. Jean-Raymond Lépinay, vice-président

     Pôle emploi – M. Paul Bazin, directeur général adjoint de la stratégie et des affaires institutionnelles

       Table ronde réunissant les experts de la consultation citoyenne :

     Parlement et Citoyens – M. Thibaut Dernoncourt, membre chargé de la réalisation de la synthèse suite à la consultation 

     M. Loïc Blondiaux, professeur de sciences politiques et auteur de La Fabrique de l’opinion

     Terra Nova – M. Thierry Pech, directeur général

       Table ronde réunissant les syndicats de salariés :

     Confédération française démocratique du travail (CFDT) – Mme Jocelyne Cabanal, secrétaire nationale

     Force ouvrière (FO) – M. Serge Legagnoa, secrétaire confédéral en charge de la protection sociale collective

     Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) – Mme Pascale Coton, vice-présidente

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 (*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité de transparence pour la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale

 

 

 


–  1  –

Annexe N° 4 :
LISTE DES TEXTES SUSCEPTIBLES D’ÊTRE ABROGÉS OU MODIFIÉS À L’OCCASION DE L’EXAMEN DE LA PROPOSITION DE LOI

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code de l’action sociale et des familles

L. 262‑1 à L. 262‑48

1er

Code de l’action sociale et des familles

L. 262‑49 à L. 262‑58 [abrogés]

1er

Code de la sécurité sociale

L. 441-1 à L. 441‑6, L. 442-4 à L. 442-8, L. 443-1, L. 443‑2, L. 444-1 et L. 821-1 à L. 821‑3 [abrogés]

1er

Code du travail

L. 5131‑5 et L. 5131‑6 [nouveaux]

2

Code du travail

L. 5151-2, L. 5151-5 et L. 5151-13 à L. 5151-17 [nouveaux]

3

Code civil

 

3

Code général des impôts

 

3

Code de la sécurité sociale

 

3

Code du service national

 

3

Livre des procédures fiscales

 

3

Code du travail

 

 


([1])  Insee première, n° 1813, paru le 9 septembre 2020, à retrouver ici : https://www.insee.fr/fr/statistiques/4659174#titre-bloc-12

([2]) Observatoire des inégalités, Rapport sur la pauvreté en France 2020-2021, novembre 2020

([3]) Observatoire des inégalités, Rapport sur la pauvreté en France 2020-2021, novembre 2020.

([4]) Minimas sociaux et prestations sociales, panorama de la Drees édition 2020, à retrouver ici : https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/drees_-_pano_-_minima_sociaux_-_assemblage_-_bat_-_210920.pdf

([5]) L’expérience de non-recours dans le parcours d’insertion des jeunes peu ou pas diplômés, Benjamin Vial, Université Grenoble Alpes, 2020, à retrouver ici : https://halshs.archives-ouvertes.fr/tel-03110601v1

([6]) Dispositif prévu à l’article L. 262-7-1 du code de l’action sociale et des familles et à l’article D. 262-25-1.

([7]) Article L. 5131-6 du code du travail.

([8]) Voir restitution de la consultation en annexe.

([9])Avis du CESE sur le revenu minimum social garanti, avril 2017, à retrouver ici :https://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Avis/2017/2017_12_revenu_minimum.pdf  Leur proposition se distingue de celle des rapporteurs sur le périmètre des prestations à fusionner mais la rejoint sur la nécessité d’ouvrir la prestation dès les dix-huit ans de l’individu ainsi que sur le caractère automatique du versement.

([10]) Le détachement de la condition de suivi d’un programme d’accompagnement vers l’emploi tel qu’il est défini aujourd’hui pour le RSA à l’article L. 262-28 du code de l’action sociale et des familles.

([11]) Proposition de loi n° 1541 d’expérimentation territoriale visant à instaurer un revenu de base.

([12]) Deuxième proposition de la consultation citoyenne au sujet du RUA, dont la restitution est à retrouver à la page 55 du document ci-joint :

https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/opinionway_pour_la_consultation_rua_-_rapport_final_complet_v2.pdf

([13]) Page 42 de la fiche n°1 « principe et objectifs », Ministère des solidarités et de la santé, à retrouver ici : https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/phase_3_presentation__perimetre_concertation_rua.pdf

([14]) Prise de parole du 28 novembre 2020 sur Europe 1, à retrouver ici : https://www.europe1.fr/economie/il-faudrait-reinventer-le-systeme-de-protection-sociale-dans-une-large-mesure-4008656

([15]) Esther Duflo mentionne notamment : Banerjee, Abhijit, Michael Faye, Alan Krueger, Paul Niehaus, and Tavneet Suri. "Effects of a Universal Basic Income during the Pandemic." Working paper, September 2020, à retrouver ici : https://www.povertyactionlab.org/fr/node/2375

([16]) Rapport d’analyse de l’expérimentation « Territoires zéro chômeur de longue durée », 2019, à retrouver ici : https://www.tzcld.fr/wp-content/uploads/2019/11/191122_RAPPORT_DANALYSE_CONJOINT_ETCLD_TZCLD.pdf

([17]) À l’exception de la Polynésie française, la Nouvelle Calédonie et Wallis-et-Futuna où il n’est pas applicable, et de Mayotte où il est entré en vigueur le 1er janvier 2012.

([18]) Instauré par la loi  88-1088 du 1 er décembre 1988.

([19])  Conjoncture RSA n° 31, DSER, octobre 2020, à retrouver ici : https://www.caf.fr/sites/default/files/cnaf/Documents/Dser/rsa%20conjoncture/Rsa%20Conjoncture%20n%C2%B031.pdf

([20]) Article R. 262-6 du code de l’action sociale et des familles.

([21])  Les prestations non incluses dans le calcul des ressources sont définies à l’article R. 262-11 du code de l’action sociale et des familles.

([22]) Les aides au logement sont prises en compte de façon forfaitaire : si l’individu perçoit une aide au logement ou ne supporte pas de coût lié à son logement, le montant forfaitaire de son RSA est diminué d’une certaine somme, appelée « forfait logement ».

([23]) Article L. 262-3 du code de l’action sociale et des familles.

([24]) Montant défini par le décret n° 2020-490 du 29 avril 2020 qui n’intègre pas le forfait logement, somme forfaitaire venant compléter les ressources prises en compte dans le calcul du montant de la prestation pour les foyers percevant des aides au logement ou étant logés à titre gratuit.

([25]) Article L. 262-4 du code de l’action sociale et des familles.

([26]) Dispositif prévu à l’article L. 262-7-1 du code de l’action sociale et des familles et à l’article D. 262-25-1.

([27]) « Minimas sociaux et prestations sociales », panorama de la Drees social, édition 2020, à retrouver ici ; https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/drees_-_pano_-_minima_sociaux_-_assemblage_-_bat_-_210920.pdf

([28]) ainsi que sans forfait logement.  

([29]) Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([30]) Ibid.

([31]) Loi n° 2013-1278 de finances pour 2014.

([32]) Article L. 334-16-3 du code général des collectivités territoriales.

([33]) Créé par l’article 77 de la loi n° 2013-1278 de finances pour 2014.

([34]) Créé par l’article 78 de la loi n° 2013-1278 de finances pour 2014.

([35]) Finances départementales, la lettre de l’ODAS, édition 2020, à retrouver ici : https://odas.net/sites/default/files/documents/odas/2020-12/lettre-finances-odas-2019_0.pdf.

Par ailleurs, ce chiffre peut être revu à la hausse si on y inclut les coûts induits par l’accompagnement des bénéficiaires vers le retour à l’emploi et la prime de Noël, auquel cas il est estimé à 11,1 milliards d’euros pour 2019.

([36]) Finances départementales, la lettre de l’ODAS, édition 2011, à retrouver ici : https://odas.net/sites/default/files/images/odas/observations-et-actus/odas_lettre_de_l_odas_des_finances_05_11_version_definitive.pdf

([37]) « Mission finances locales » Rapport sur le financement des allocations individuelles de solidarité, avril 2018, à retrouver ici : https://www.apmnews.com/documents/201805221539120.Rapport_MissionAIS_VF_040518.pdf

([38]) Article 81 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([39]) Loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([40]) Rapport annuel de performances pour le programme 304 portant sur l’inclusion sociale et la protection des personnes, annexe au projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes pour 2019, à retrouver ici :

https://www.performance-publique.budget.gouv.fr/sites/performance_publique/files/farandole/ressources/2019/rap/pdf/DRGPGMPGM304.pdf

([41]) Article 135 de la loi  2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.

([42]) Défini anciennement à l’article L. 262-24 du code de l’action sociale et des familles.

([43]) Avis n° 255 de la commission des affaires sociales pour le projet de loi de finances pour 2013.

([44]) Créée par la loi no 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi.

([45]) Ce montant est défini à l’article D. 262-65 du code de l’action sociale et des familles.

([46]) Article L. 262-28 du code de l’action sociale et des familles.

([47]) Dans le cadre d’un accompagnement avec Pôle emploi.

([48]) Articles L. 262-27, L. 262-29 et L. 262-30 du code de l’action sociale et des familles.

([49]) Article L. 842-2 du code de la sécurité sociale.

([50]) Conjoncture fin mars 2020 – prime d’activité, n°17, juillet 2020, Cnaf, à retrouver ici : https://www.caf.fr/sites/default/files/cnaf/Documents/Dser/Prime%20activite/Prime%20d%27activit%C3%A9%20Conjoncture%20n%C2%B017.pdf

([51]) Rapport annuel de performance sur la loi de finances pour 2019 pour la mission Solidarité, insertion et égalité des chances.

([52]) Article L. 842-2 du code de la sécurité sociale.

([53]) Article L. 842-7 du code de la sécurité sociale.

([54]) La garantie jeunes, Minima sociaux et prestations sociales, édition 2020, Drees. Le Gouvernement a fixé un objectif de bénéficiaires potentiels de 200 000 jeunes accompagnés en 2021, dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution ».

([55]) Article D. 5131-19.I du code de l’action sociale et des familles.

([56]) Sa composition est prévue par l’article R. 5131-17 du code du travail.

([57]) Articles R. 5131-23, R. 5131-24 et R. 5131-25 du code du travail.

([58]Rapport d’évaluation de la prime d’activité, direction générale de la cohésion sociale du ministère des solidarités et de la santé, 2017, à retrouver ici : https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_d_evaluation_prime_d_activite.pdf

([59]) Relations des usagères et des usagers avec les services publics : le risque du nonrecours, enquête sur l’accès aux droits, volume 2, défenseur des droits, décembre 2017, à retrouver ici : https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/enquete-relations-usagers-servpublics-v6-29.03.17.pdf

([60]) L’expérience du non-recours dans les parcours d’insertion des jeunes peu ou pas diplômés, Benjamin Vial, Science politique. Université Grenoble Alpes, 2020, à retrouver ici : https://halshs.archives-ouvertes.fr/tel-03110601

([61]) Loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d’insertion et créant un revenu minimum d’activité.

([62]) Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003.

([63]) Article entré en vigueur le 29 mars 2003.

([64]) Désormais taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) depuis 2011.

([65]) Les finances publiques locales, octobre 2015, Cour des comptes, à retrouver ici : https://actu.dalloz-etudiant.fr/fileadmin/actualites/pdfs/01_2016/20151013-rapport-finances-publiques-locales.pdf

([66]) « Évaluation de l’impact de la crise du covid-19 sur les finances locales », Jean-René Cazeneuve, 2020, à retrouver ici :

https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/document/document/2020/08/rapport_cazeneuve.pdf

([67]) Courrier du 23 octobre 2020, du Premier ministre Jean Castex aux élus de Seine-Saint-Denis.

([68]) Ainsi, certains départements ont exigé du « bénévolat obligatoire » en échange du versement du revenu de solidarité active.

([69]) Les minimas sociaux au sein de l’Union européenne, Caisse nationale d’allocations familiales, décembre 2020, à retrouver ici :

https://www.caf.fr/sites/default/files/cnaf/Documents/international/Doc%2012.2020/Minima%20sociaux%20et%20UE17.12.2020.pdf

([70]) Population totale par sexe et âge au 1er janvier 2020, France métropolitaine, Bilan démographique, Insee, à retrouver ici : https://www.insee.fr/fr/statistiques/fichier/1892088/pop-totale-france-metro.xls

([71]) Article 197 du code général des impôts.

([72])  Rapport remis au Premier Ministre, à retrouver ici : https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/document/document/2018/09/rapport_de_claire_pitollat_et_mathieu_klein_sur_laccompagnement_des_beneficiaires_du_rsa.pdf

([73]) La juste prestation, pour des prestations et un accompagnement ajustés, septembre 2018, à retrouver ici : https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/document/document/2018/09/rapport_de_christine_cloarec-le_nabour_et_julien_damon_sur_la_juste_prestation.pdf

([74]) Page 23 de The basic income experiment 2017-2018 – preliminary results, rapport du Ministère des affaires sociales et de la santé de Finlande, février 2019, à retrouver ici : https://julkaisut.valtioneuvosto.fi/bitstream/handle/10024/161361/Report_The%20Basic%20Income%20Experiment%2020172018%20in%20Finland.pdf?sequence=1&isAllowed=y

([75]) Providing personalised support to rough sleepers, Juliette Hough et Becky Rice, 2010, à retrouver ici : https://www.jrf.org.uk/report/providing-personalised-support-rough-sleepers

([76]) Revenu de base : simulation en vue d’une expérimentation, rapport IPP n°18, juin 2018, Institut des politiques publiques, à retrouver ici : https://www.ipp.eu/wp-content/uploads/2018/06/revenu-de-base-experimentation-rapport-IPP-juin2018.pdf

([77]) Voir annexe 2.

([78]) Actuellement, la prime d’activité prend en compte 61 % des revenus d’activité de l’individu pour le calcul du montant de la prestation, et donc a un taux de dégressivité implicite de 39 %.

([79]) Voir annexe présentant le simulateur de revenu de base actualisé.

([80]) La formule de la prime d’activité, du fait des majorations individuelles ciblées, n’est pas linéaire.

([81]) Les simulations de calcul pour un couple sont à retrouver en annexe.

([82]) Article L. 262-8 du code l’action sociale et des familles.

([83]) Voir en annexe.

([84]) Notamment dans l’accord national interprofessionnel du 14 décembre 2013.

([85]) Article L. 4163-1 du code du travail.

([86]) Article L. 5151-7 du code du travail.

([87]) Article L. 5151-2 du code du travail.

([88]) Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([89]) Article L. 6323-2 du code du travail.

([90]) Article L. 6323-18 du code du travail.

([91]) Article L. 6323-19 du code du travail.

([92]Formation et emploi, Insee références, édition 2018, à retrouver ici :

 https://www.insee.fr/fr/statistiques/fichier/3526060/Formemp18b_D1_formation-pro.pdf

([93]) Chômage au sens du BIT et indicateurs sur le marché du travail – troisième trimestre 2020, Insee, n° 2020‑287, 10 novembre 2020, à retrouver ici :

file:///C:/Users/lansaldi/AppData/Local/Temp/IR287_chomage2020-T3-v1837.pdf

([94]) Insee focus, n°176, paru le 19 décembre 2019, à retrouver ici :

https://www.insee.fr/fr/statistiques/4265758#onglet-1

([95]) Enquête Insee et traitement MENJ, MESRI, DEPP, à retrouver ici : https://publication.enseignementsup-recherche.gouv.fr/eesr/FR/T448/le_niveau_d_etudes_selon_le_milieu_social/#ILL_EESR13_ES_22_03

([96]) Personnes âgées de 18 à 64 ans sorties de formation initiale ayant suivi au moins une formation professionnelle continue au cours des 12 derniers mois. Source : « Formation et emploi », Insee – Données 2016 Observatoire des inégalités, paru le 10 avril 2018, à retrouver ici : https://www.insee.fr/fr/statistiques/3526086

([97]) L’état de l’école, MENJS, MESRI, DEPP, 2020, à retrouver ici : https://www.education.gouv.fr/l-etat-de-l-ecole-2020-307185

([98]) « Formation et emploi », Insee – Données 2016 Observatoire des inégalités, paru le 10 avril 2018, page 117, à retrouver ici : https://www.insee.fr/fr/statistiques/3526086

([99]) Montant estimé à 2,9 milliards d’euros, auquel s’ajoute le coût budgétaire de l’instauration du prélèvement forfaitaire unique, s’élevant à 1,4 milliard d’euros selon l’avis du comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital de 2019 (à retrouver ici :

https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/avis_du_comite_fiscalite_capital-01-10-2019.pdf)

([100]) Insee Première n° 1621, novembre 2016, à retrouver ici :

https://www.insee.fr/fr/statistiques/fichier/2496232/ip1621.pdf

([101]) Prévu à l’article L. 5151-15 du code du travail.

([102]) Bilan des examens du permis de conduire, année 2019, Ministère de l’intérieur, à retrouver ici : https://www.securite-routiere.gouv.fr/sites/default/files/2020-12/examens_du_permis_de_conduire_bilan_2019.pdf

([103]) Chiffres du ministère de l’intérieur, mai 2019, à retrouver ici : https://www.interieur.gouv.fr/fr/Archives/Archives-des-actualites/2019-Actualites/Le-permis-pour-tous

([104])Au cours de l’expérimentation réalisée par le fonds d’expérimentation pour la jeunesse, 27 % des jeunes étaient en emploi avant l’expérimentation, contre 49 % après. Note finale de l’expérimentation à retrouver ici : https://www.experimentation-fej.injep.fr/IMG/pdf/APPC_078_Note_finale.pdf

([105]) Enquête réalisée par https://le-jeune-conducteur.com en janvier 2016 auprès d’un panel de 2 800 jeunes conducteurs, propriétaires de leur véhicule et tous âgés entre 18 et 24 ans.

([106]) L’entrepreneuriat, faits et chiffres, direction générale des entreprises, novembre 2017, à retrouver ici : https://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/politique-et-enjeux/entrepreneuriat/entrepreneuriat-faits-et-chiffres.pdf

([107]) http://videos.assemblee-nationale.fr/video.10318467_6023d6b68e054.commission-des-affaires-sociales--renforcer-le-droit-a-l-avortement---creation-d-une-aide-individu-10-fevrier-2021