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N° 3877

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 février 2021.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi portant création d’un fonds d’indemnisation des victimes de la covid19,

 

 

 

Par M. Régis JUANICO,

 

 

Député.

 

——

 

 

 

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale :  3723.

 

 


 

 


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SOMMAIRE

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 Pages

Introduction

I. ParticuliÈrement violente et meurtriÈre, l’ÉpidÉmie de covid19 engendre chez de nombreux malades des sÉquelles lourdes et invalidantes

A. La France paye un lourd tribut à l’Épidémie de covid-19

B. Les formes longues et les Lourdes sÉquelles de la covid19 constituent un phÉnomÈne particuliÈrement prÉoccupant

1. Un phénomène multiforme et alarmant

a. De lourdes séquelles résultant d’une forme grave de la maladie ayant porté atteinte aux organes vitaux

b. Le « covid-long », une forme de la maladie caractérisée par des symptômes résurgents et persistants, dont l’issue demeure inconnue

c. Un risque accru de développer des troubles psychiatriques pour les patients ayant contracté la covid-19

2. Des séquelles largement répandues, aux conséquences désastreuses pour les victimes

II. Un dispositif d’indemnisation des victimes particuliÈrement insatisfaisant et contraire aux mesures annoncÉes

A. Une promesse non tenue

B. Un dispositif de réparation très restrictif et inadapté à la réalité de l’épidémie

1. Une reconnaissance en maladie professionnelle aux conditions très strictes et excluant un grand nombre de travailleurs

2. Un dispositif centré autour de la maladie professionnelle, inadapté à la réalité de l’épidémie

3. Une indemnisation qui n’est pas à la hauteur des enjeux

III. La création d’un fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19, un impératif au nom de la solidarité nationale

A. La responsabilité de l’État vis-à-vis des victimes est indéniable

B. Le dispositif proposé : la mise en place d’un fonds d’indemnisation offrant une réparation intégrale et rapide aux victimes les plus graves de l’épidémie

1. Fondé sur la solidarité nationale, le modèle des fonds d’indemnisation comporte de nombreux avantages

2. Un dispositif ambitieux et simple d’accès

a. Une réparation intégrale, ouverte à un large champ de bénéficiaires

b. Un dispositif simple et intervenant dans des délais raisonnables

c. Un mode de financement équilibré

commentaire dES articles

Article 1er Réparation des préjudices rencontrés par les victimes de la covid-19

Article 2 Création du fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19

Article 3 Instruction des demandes d’indemnisation

Article 4 Moyens d’action pour assurer la réparation

Article 5 Modalités de l’offre d’indemnisation

Article 6 Droits d’actions en justice contre le fonds

Article 7 Règles relatives aux délais de prescription des demandes d’indemnisation

Article 8 Modalités de financement et dépenses du fonds

Article 9 Application du dispositif en Nouvelle-Calédonie et Polynésie française

EXAMEN EN COMMISSION

I. Discussion générale

II. examen des articles

annexe : Liste des personnes auditionnées par le rapporteur


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   Introduction

 

« Je ne peux plus vivre une journée normalement. [...] On m’a diagnostiquée il y a quelques mois, une dysautonomie, une dérégulation du système nerveux. J’ai encore des problèmes pour digérer, des malaises post-effort, de la tachycardie au repos, ce qui est quand même préoccupant, à 27 ans. Ces symptômes durent depuis dix mois, car j’ai contracté la covid-19 fin mars, sans besoin d’hospitalisation. Je ne peux plus aujourd’hui vivre comme avant, où je travaille et fais des choses normales à la maison. C’est une autre vie. »

Comme tant d’autres, Pauline souffre d’une forme de covid-long, caractérisée par des symptômes persistants, fluctuants et particulièrement invalidants plusieurs semaines voire plusieurs mois après la contraction de la maladie. La jeune femme, chercheuse en comportements alimentaires, que nous avons entendue en audition, préside aujourd’hui l’association #AprèsJ20, réunissant un grand nombre de personnes atteintes de covid-long et visant à faire progresser la cause de cette pathologie.

Si par manque de recul, il est aujourd’hui difficile de recenser le nombre exact de personnes souffrant de ces formes de covid au long cours ou de séquelles importantes de la maladie, il est établi que ces phénomènes touchent en France plusieurs centaines de milliers de personnes, victimes de l’épidémie.

Ces victimes, ce sont d’abord nos soignants dont le dévouement durant la crise a fait l’admiration de tous. Mais ce sont aussi tous les autres travailleurs, aides à domicile, hôtesses de caisse, agents des forces de l’ordre et de sécurité, pompiers, enseignants, agents de propreté, commerçants, bénévoles venus prêter main forte pour les plus démunis et tant d’autres « premiers de tranchée » pleinement mobilisés, au péril de leur santé et parfois de leur vie. Il y a aussi toutes ces victimes, dites « collatérales » ou « environnementales », contaminées par leur famille ou leurs amis, mais aussi les résidents d’établissements pour personnes âgées (EHPA) qui ont payé le plus fort tribut à la crise et enfin, les proches de toutes les personnes malheureusement décédées des suites de la maladie.

Or, malgré l’espoir légitime qu’il avait pu susciter, le dispositif d’indemnisation des victimes de la covid-19 institué par le décret du 14 septembre 2020 est très loin d’être à la hauteur des enjeux. Il n’est satisfaisant, ni pour les soignants pour qui la reconnaissance en maladie professionnelle de la covid‑19 n’est, malgré les promesses faites en ce sens, ni systématique, ni automatique, ni pour les autres travailleurs pour qui cette procédure constitue un parcours du combattant, ni enfin, pour l’ensemble des autres victimes, dont les préjudices dépassent largement le champ de la maladie professionnelle.

Cette proposition de loi vise donc à créer, au nom de la solidarité nationale, un fonds dédié à l’indemnisation des victimes de la covid-19, qu’il s’agisse des personnes souffrant de séquelles temporaires ou définitives ou de symptômes persistants de la covid-19, mais aussi, des ayants droit des personnes décédées des suites de cette maladie. Ce fonds entend garantir selon une procédure simple, rapide et équitable, une réparation intégrale des préjudices dont souffrent ces victimes.

Le principe de la création d’un fonds d’indemnisation recueille le soutien des organisations syndicales salariées et des associations de victimes Covid19.

Il est de notre devoir d’agir vite pour toutes ces victimes et leurs proches, qui comptent sur notre soutien et en particulier pour ces nombreux malades au « long cours », victimes de symptômes durables, handicapants, invalidants et dont le retour à « une vie normale » est particulièrement erratique ou qui sont dans l’incapacité de reprendre leur travail et risquent une désinsertion professionnelle, un licenciement, voire une inaptitude.

 

 

 

 


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I.   ParticuliÈrement violente et meurtriÈre, l’ÉpidÉmie de covid‑19 engendre chez de nombreux malades des sÉquelles lourdes et invalidantes

A.   La France paye un lourd tribut à l’Épidémie de covid-19

Apparue en France au mois de janvier 2020, l’épidémie de covid-19 a entraîné une catastrophe sanitaire d’une ampleur et d’une brutalité inédites. À la première vague épidémique, qui a entraîné une quasi-saturation du système hospitalier et a nécessité le doublement des capacités d’accueil en réanimation, ont succédé la deuxième puis la troisième vague, que nous traversons aujourd’hui, marquée par son lot de nouvelles incertitudes.

● Si aucune région du monde n’a été épargnée par l’épidémie, son bilan est en France extrêmement lourd, qu’il s’agisse du nombre de personnes infectées, de celles ayant nécessité une prise en charge à l’hôpital et en service de réanimation, ainsi que malheureusement, de celles qui ont succombé à la maladie.

Selon les données de Santé publique France ([1]), à la date du 2 février 2021 :

– 3,2 millions de cas confirmés de covid-19 ont été rapportés depuis la mise en place de la surveillance en janvier 2020 ;

– 309 453 patients ont été hospitalisés pour covid-19 depuis le 1er mars 2020 ;

– plus de 77 238 personnes sont décédées des suites de la covid-19 depuis le 1er mars 2020.

● L’épidémie a été particulièrement violente et meurtrière dans les établissements pour personnes âgées (EHPA ([2])), l’âge étant un facteur propice au développement de formes graves de la maladie et l’hébergement collectif facilitant la contamination. Ces EHPA ont été frappés de plein fouet par l’épidémie, avec des proportions de résidents touchés et malheureusement décédés parfois considérables.

– À la date du 31 janvier, 153 219 cas confirmés avaient ainsi été recensés dans les établissements pour personnes âgées depuis le 1er mars 2020 ([3]).

– Sur l’ensemble des personnes décédées des suites de la covid-19 durant la première vague, la moitié étaient des résidents d’EHPA. Du 1er mars au 30 avril, le nombre de décès y a augmenté de 52 % par rapport à la même période en 2019 ([4]). Le bilan s’établit au 31 janvier 2021, à 31 795 décès parmi les résidents de ces établissements.

● S’il est impossible de recenser le nombre de personnes malades et de décès dus à la covid-19 parmi l’ensemble des travailleurs mobilisés durant la crise, les données relatives aux personnels soignants et assimilés font état d’un bilan particulièrement lourd pour ces professions. 64 541 professionnels d’établissements de santé (PES) et 87 171 personnels travaillant dans établissements sociaux et médico‑sociaux (ESMS) ont ainsi été infectés par le virus entre le 1er mars et le 25 janvier 2021 ([5]). Dans les établissements de santé, dix‑neuf décès liés à l’infection à SARS‑CoV-2 ont par ailleurs été enregistrés depuis le 1er mars 2020, survenus chez cinq médecins, cinq aides-soignants, un infirmier, deux professionnels de santé classés « autres » et six professionnels non soignants ([6]).

B.   Les formes longues et les Lourdes sÉquelles de la covid‑19 constituent un phÉnomÈne particuliÈrement prÉoccupant

Au départ peu connues, les séquelles de la covid-19 touchent aujourd’hui un grand nombre de patients infectés. Beaucoup d’entre eux voient en effet leur vie bouleversée par de lourdes séquelles ou des symptômes durables de la covid-19, pouvant prendre différentes formes et degrés de gravité. L’incertitude comme la difficulté à faire reconnaître leur pathologie constitue une source de souffrance supplémentaire pour les victimes.

1.   Un phénomène multiforme et alarmant

Les séquelles de la covid-19 se retrouvent principalement sous deux formes, dont font état un nombre croissant d’études scientifiques et dont témoignent les associations et les victimes qu’elles représentent. Les séquelles psychiatriques du virus SARS-CoV2 constituent par ailleurs un phénomène d’ampleur, particulièrement alarmant.

a.   De lourdes séquelles résultant d’une forme grave de la maladie ayant porté atteinte aux organes vitaux

● Une première forme de séquelles correspond à celles résultant d’une forme grave de la maladie, ayant nécessité une hospitalisation du patient, voire un apport en oxygène. Le virus s’attaque aux organes vitaux de ces patients, provoquant ainsi des séquelles peu ou non réversibles.

Dans un avis rendu en juillet 2020, l’Académie nationale de médecine ([7]) détaille ce type de séquelles, qui peuvent prendre la forme :

– d’atteintes respiratoires résiduelles, caractérisées par un déclin progressif de la fonction respiratoire et une sensibilité accrue aux infections respiratoires, pouvant augmenter la mortalité des patients les plus âgés ;

– d’atteintes cardiaques, pouvant conduire à des infarctus, des insuffisances et troubles du rythme cardiaque, même une fois sorti de la phase aiguë de la maladie ;

– d’atteintes rénales pouvant conduire à une insuffisance rénale chronique ;

– d’atteintes au système nerveux central, pouvant être liées directement au virus mais également à la diminution de l’oxygène distribué aux tissus lors d’une mise sous respiration artificielle, ou à des accidents vasculaires cérébraux déclenchés lors de la phase aiguë de la maladie ;

– de sarcopénies (diminution des capacités musculaires et détérioration des performances physiques), quasi constantes chez les malades immobilisés depuis plusieurs semaines en soins intensifs.

Auditionné par le rapporteur, le Pr François Rannou, chef du service de rééducation à l’hôpital Cochin, spécialisé dans la rééducation et la réadaptation des patients ayant été atteints de formes graves de la covid-19, a décrit des formes lourdes de déficience de l’appareil locomoteur, touchant plus particulièrement les membres supérieurs. Ces séquelles s’expliquent souvent par la méthode d’installation des patients pour lesquels le recours à une intubation s’est révélé nécessaire. Le Pr Rannou a par ailleurs évoqué la notion de « brouillard cérébral » et de dysfonctionnement– ou difficulté à réaliser plusieurs choses en même temps– chez ce type de patients. Le Pr Rannou a insisté sur la nécessité d’une prise en charge post-covid proposant une rééducation par l’activité physique, néanmoins adaptée et fractionnée pour réhabituer progressivement les patients à l’effort.

● Ces séquelles résultant d’une forme grave de la covid-19, notamment respiratoires et cardiaques, sont parfois définitives, comme le suggère l’Académie de médecine. De plus, elles peuvent rendre les anciens malades de la covid-19 plus vulnérables à d’autres pathologies, et il semblerait qu’elles soient susceptibles d’augmenter le risque de décès dans les mois suivants l’infection.

b.   Le « covid-long », une forme de la maladie caractérisée par des symptômes résurgents et persistants, dont l’issue demeure inconnue

● D’autres victimes souffrent quant à elles de symptômes résurgents et persistants depuis leur infection à la covid-19. Les médecins auditionnés par le rapporteur ont évoqué la multiplication de consultations de patients souffrant de symptômes polymorphes et particulièrement invalidants, plusieurs semaines après la contraction de la maladie.

Les témoignages des médecins et des associations de victimes, ainsi que les différentes études menées à ce sujet, indiquent que ces symptômes persistants touchent souvent des patients ayant été atteints de formes bénignes de la covid-19, souvent pris en charge par la médecine de ville. Ces symptômes concernent plus majoritairement les femmes et touchent de nombreuses personnes jeunes. D’après le Pr Dominique Salmon-Céron, infectiologue à l’Hôtel-Dieu et coordonnatrice d’une étude sur les symptômes persistants de la maladie, il est plus approprié de parler de « covid-long » ou de « maladies qui durent » lorsqu’il s’agit de qualifier ces patients. En effet, leurs symptômes sont plus proches d’une maladie chronique, agissant par poussées et par accalmies.

● S’agissant des symptômes les plus courants décrits pour ces formes longues de la covid-19, figurent souvent la fatigue prolongée, des troubles cognitifs, des signes cardio-thoraciques, l’anosmie et l’agueusie.

– Une étude menée par le Pr Salmon-Céron ([8]) auprès de soxiante‑dix patients infectés – dont 78 % étaient des femmes et dont la plupart n’ont pas été hospitalisés – et souffrant de symptômes persistants et prolongés, a montré que plusieurs symptômes étaient récurrents chez ces patients, notamment une fatigue et un épuisement (pour 72,9 % d’entre eux) des symptômes neurologiques (pour 77,1 % d’entre eux), cardiologiques (pour 71,4 % d’entre eux), ou encore une anosmie (pour 30 % d’entre eux). En outre, 90 % des patients souffraient de plus de trois catégories de symptômes en même temps.

– Un projet de recherche sur les formes longues de la covid-19 a par ailleurs été lancé par la communauté de recherche ComPaRe de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Une première phase, fondée sur l’analyse du vécu de 600 patients souffrant d’un covid-long et dont les résultats ont été publiés en décembre 2020, a permis d’identifier cinquante manifestations de ces formes longues (voir infra).

DESCRIPTION DES CINQUANTE MANIFESTATIONS DU COVID-LONG MISES EN LUMIÈRE PAR LES RÉSULTATS DE L’ÉTUDE COMPARE

Source : https://www.aphp.fr/contenu/compare-la-communaute-de-patients-pour-la-recherche-de-lap-hp-presente-les-premiers

c.   Un risque accru de développer des troubles psychiatriques pour les patients ayant contracté la covid-19

Les données sur les conséquences psychiatriques de la covid-19 sont encore rares. Les résultats des études les plus récentes à ce sujet et les témoignages des psychiatres auditionnés par le rapporteur semblent cependant confirmer l’hypothèse selon laquelle l’infection à la covid-19 pourrait engendrer des troubles psychiatriques importants.

● Le lien entre infection et troubles psychiatriques est avéré depuis longtemps, de nombreuses études faisant état d’une augmentation des troubles psychiatriques dans la population générale – observée par exemple lors des épidémies de SRAS de 2002 à 2004 – lors de l’infection mais également lors de la période post‑infection ([9]). Les psychiatres Marion Leboyer et Antoine Pelissolo, auditionnés par le rapporteur, ont en effet décrit le lien entre maladie infectieuse, inflammation et déclenchement de troubles psychiatriques. Il est donc à craindre que la pandémie de covid-19 ait des conséquences sur les patients en raison de l’action directe de l’infection sur le cerveau, mais également en raison de la réponse immuno-inflammatoire à l’infection, dont l’effet déclencheur de maladies mentales a déjà été prouvé. Le Pr Marion Leboyer indiquait ainsi, lors de son audition, que « les conséquences psychiatriques de la covid-19 sont devant nous ».

● De fait, un nombre croissant d’études montrent clairement et de manière similaire selon les différents pays que les personnes infectées par la covid-19 et qui ne présentaient pas de maladie psychiatrique avant leur infection développent ce type de pathologies, au même titre qu’il y a des séquelles pulmonaires et cardiologiques aujourd’hui mieux connues.

– Une récente étude italienne ([10]) réalisée en août 2020 sur 402 adultes infectés par la covid-19, évalués régulièrement par une batterie standardisée de tests, a ainsi montré la présence de troubles psychiatriques importants dans les mois suivant l’infection, comme l’anxiété (42 %), l’insomnie (40 %), la dépression (31 %), le stress post-traumatique (28 %) ou des symptômes obsessionnels (20 %).

– Une autre étude ([11]) a suivi 62 000 patients britanniques infectés par la covid-19 pendant quatorze à quatre‑vingt‑dix jours après l’infection, et a trouvé que 18 % d’entre eux avaient développé une maladie psychiatrique (dépression et troubles anxieux). Selon Marion Leboyer et Antoine Pelissolo, ces chiffres, beaucoup plus élevés que pour d’autres infections comme la grippe, laissent présager de répercussions psychiatriques importantes pour les victimes de la covid‑19.

2.   Des séquelles largement répandues, aux conséquences désastreuses pour les victimes

● S’il est aujourd’hui difficile d’établir, par manque de recul, la part de personnes ayant été infectées par la covid-19 souffrant de séquelles ou de formes longues de la maladie, un nombre significatif d’entre elles semblent concernées.

– Des études se sont d’abord intéressées au nombre de personnes souffrant de séquelles importantes de la maladie à la suite d’une hospitalisation. Une étude publiée dans la revue scientifique The Lancet ([12]) menée sur 1 733 patients hospitalisés à Wuhan et publiée en janvier 2021 a ainsi établi que six mois après l’apparition des symptômes, 76 % des patients sortis de l’hôpital déclaraient présenter au moins un symptôme (les plus fréquents étant la fatigue ou la faiblesse musculaire et les troubles du sommeil).

– S’agissant des formes de covid-long présentées supra, plusieurs études font état d’un nombre conséquent de personnes concernées. Selon le Pr Salmon‑Céron, entre 10 à 20 % des personnes qui ne sont pas allées en réanimation présentent des symptômes prolongés. Une étude réalisée par une équipe de l’université de Genève, publiée dans le journal Annals of Internal Medecine ([13]) et fondée sur 669 personnes positives à la covid-19 et n’ayant pas été hospitalisées, montre quant à elle que six semaines après le diagnostic, 33 % des personnes présentaient encore un ou plusieurs symptômes de la maladie.

● Au-delà de la souffrance physique évidemment associée, les séquelles et formes longues de la maladie peuvent s’avérer particulièrement difficiles à vivre pour les personnes concernées.

Parmi les principales difficultés rencontrées par les victimes, figure notamment le fait de devoir souvent dépendre de son conjoint ou de sa famille pour tous les gestes du quotidien.

L’incertitude autour des conséquences de cette maladie et la durée de persistance des symptômes constitue également une épreuve importante pour les victimes. La difficulté à faire reconnaître leur pathologie est aussi une souffrance supplémentaire. Les victimes se heurtent en effet souvent à l’incompréhension de leur hiérarchie et parfois même de leur médecin, étant donné que la majorité des symptômes sont peu visibles et inexplicables, même après un examen clinique.

Les nombreux préjudices associés au développement des symptômes décrits peuvent enfin être particulièrement importants. En effet parmi les symptômes les plus fréquents, figure souvent une fatigue très importante au moindre effort physique ou intellectuel, qui rend très difficile la poursuite ou la reprise d’activité professionnelle. Les représentants d’organisations syndicales auditionnés ont évoqué à ce titre des risques majeurs de désinsertion professionnelle et ont fait état de cas de plus en plus courants de licenciements pour inaptitude parmi les salariés souffrant de ces symptômes invalidants.

II.   Un dispositif d’indemnisation des victimes particuliÈrement insatisfaisant et contraire aux mesures annoncÉes

A.   Une promesse non tenue

Saluant l’engagement exemplaire des soignants et de l’ensemble des travailleurs de première ligne durant la crise, le Gouvernement s’est engagé à proposer un système de réparation généreux à ceux ayant été plus particulièrement meurtris par l’épidémie.

● S’agissant des soignants, une reconnaissance au titre de la maladie professionnelle automatique et systématique a plusieurs fois été annoncée.

Lors d’une conférence de presse en date du 23 mars, le ministre des solidarités et de la santé avait ainsi déclaré : « médecins, soignants, personnes portant assistance aux plus fragiles, contractent le virus chaque jour dans nos hôpitaux, dans leurs cabinets, parfois au domicile de leurs patients. Pour tous ces soignants qui tombent malades, je le dis, le coronavirus sera systématiquement et automatiquement reconnu comme une maladie professionnelle. C’est la moindre des choses et il n’y a aucun débat là-dessus, comme il n’y aura jamais aucun débat, dès lors que les mesures annoncées iront dans le sens de la plus grande protection possible de ceux qui sur le terrain aujourd’hui rappellent que notre société ne peut se passer d’eux. »

Le 21 avril, lors de la séance de questions au Gouvernement, le avait réitéré sa promesse en indiquant : « S’agissant des soignants, quels qu’ils soient, quel que soit leur lieu d’exercice, leur mode d’exercice (à l’hôpital, en EHPAD, en ville...), quelle que soit la discipline concernée, nous avons décidé une reconnaissance automatique comme maladie professionnelle ».

● Si le Gouvernement ne s’est pas engagé à reconnaître automatiquement et systématiquement la covid-19 au titre de la maladie professionnelle pour les autres travailleurs, il a plusieurs fois évoqué la mise en place d’une procédure allégée et simplifiée pour ces professionnels.

Lors d’une séance de questions au Gouvernement en date du 17 juin, le secrétaire d’État auprès de la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, chargé des retraites et de la santé au travail, M. Laurent Pietraszewski, avait ainsi déclaré que « pour les autres travailleurs, nous allons aussi faire en sorte qu’ils puissent obtenir une indemnisation au titre de la maladie professionnelle ». Dans un communiqué publié sur le site du ministère du travail en date du 30 juin, il est en outre évoqué une procédure « facilitée » pour les travailleurs non soignants.

● Attendu depuis plus de six mois, un décret relatif à la reconnaissance en maladies professionnelles des pathologies liées à une infection au SARS-CoV2 est publié le 14 septembre 2020 ([14]). Pour les victimes, ce texte et particulièrement décevant et bien en deçà des engagements qui avaient été pris à plusieurs reprises, pour les soignants et les autres travailleurs.

B.   Un dispositif de réparation très restrictif et inadapté à la réalité de l’épidémie

Le dispositif mis en place implique, pour la plupart des travailleurs concernés, un véritable parcours du combattant pour faire reconnaître la covid-19 au titre de la maladie professionnelle. Ce dispositif est par ailleurs inadapté à la spécificité de l’épidémie, dont le champ est bien plus large que celui de la seule maladie professionnelle.

1.   Une reconnaissance en maladie professionnelle aux conditions très strictes et excluant un grand nombre de travailleurs

Le décret du 14 septembre 2020 a créé, pour les assurés du régime général et des régimes agricoles, ainsi que pour les assurés auxquels ces tableaux sont applicables, deux nouveaux tableaux de maladies professionnelles « Affections respiratoires aiguës liées à une infection au SARS-CoV-2 ».

Ce décret ne prévoit en réalité ni la reconnaissance automatique pour les soignants, ni le bénéfice d’une procédure facilitée pour les autres travailleurs.

● Contrairement aux annonces à ce sujet, la promesse d’une reconnaissance « automatique et systématique » de la covid-19 pour les personnels soignants et assimilés n’a pas été tenue. Ne peuvent en effet être indemnisés que les personnels – ou leurs ayants droit, s’ils sont décédés – souffrant de séquelles respiratoires et pour lesquels il a été nécessaire de recourir à une oxygénothérapie ou toute autre assistance respiratoire. Particulièrement restrictif, ce critère apparaît par ailleurs peu pertinent. D’une part, il ne prend pas en compte les nombreuses autres séquelles – notamment cardiaques, neurologiques et cérébrales – de la maladie. D’autre part, il est aujourd’hui établi que les personnes souffrant de covid‑long ont souvent été atteintes de formes relativement bénignes de la maladie et n’ont pas fait l’objet d’une prise en charge à l’hôpital.

● Le dispositif retenu est par ailleurs particulièrement insatisfaisant pour les personnes ne remplissant pas les conditions du tableau, principalement, les travailleurs non soignants et les victimes – même soignantes – dont la pathologie n’est pas inscrite dans le tableau. Ces personnes doivent en effet se soumettre à la procédure complémentaire de reconnaissance d’une maladie professionnelle.

Or, cette procédure constitue un véritable « parcours du combattant » ajoutant inquiétudes et incertitudes à des personnes déjà très éprouvées par les séquelles de la maladie. Ces victimes sont notamment tenues de démontrer l’existence d’un lien direct et essentiel entre leur travail et la contamination au SARS-CoV-2. Dans le contexte d’une telle épidémie, où il est difficile de déterminer précisément les conditions de contamination, un tel lien est particulièrement compliqué à établir. Le système retenu risque dès lors d’engendrer pour ces victimes de longues années de procédures longues, complexes et éprouvantes pour tenter de faire reconnaître leurs préjudices dans le système de maladie professionnelle existant.

Les organisations syndicales que le rapporteur a auditionnées ont ainsi fait état de nombreux témoignages dans lesquels les employeurs refusent de reconnaître le lien entre l’exercice de l’activité professionnelle et la contraction de la maladie, la contamination étant souvent renvoyée à la sphère privée. Les chiffres communiqués par ces organisations révèlent par ailleurs le caractère particulièrement peu concluant des procédures de reconnaissance en maladie professionnelle. Fin janvier, cent reconnaissances en maladie professionnelle étaient ainsi comptabilisées au titre du tableau n° 100 ([15]) et seulement quinze s’agissant de la procédure complémentaire.

Pour les personnes dont la pathologie n’est pas désignée dans le tableau – ce qui est le cas de celles souffrant d’un covid-long et de toutes les personnes ayant contracté des séquelles autres que respiratoires et n’ayant pas eu recours à une assistance ventilatoire – le critère requis d’un taux d’incapacité minimum de 25 % est particulièrement peu pertinent, au vu de la spécificité des symptômes décrits et de leur caractère fluctuant et difficilement identifiable.

● Même si le système de reconnaissance en maladie professionnelle proposé aux soignants est très restrictif, les associations de victimes et les médecins ont néanmoins manifesté leur vive incompréhension face à l’existence d’un système « à deux vitesses ». En effet les personnes ayant continué leur activité et contracté la maladie souffrent de séquelles comparables à celles des soignants et devraient être placées sur un pied d’égalité. Le dispositif existant témoigne d’une forme de mépris face à de nombreux travailleurs et néglige l’engagement de ceux qui ont contribué en première ou deuxième ligne, à la continuité de la nation durant la crise.

2.   Un dispositif centré autour de la maladie professionnelle, inadapté à la réalité de l’épidémie

Peu satisfaisant pour les personnes ayant contracté la maladie dans le cadre de leur travail, le dispositif d’indemnisation des victimes de la covid-19 prévu par le décret du 14 septembre 2020 ne répond pas en outre, aux enjeux posés par une épidémie d’une telle ampleur, dont le champ dépasse largement celui de la maladie professionnelle.

● Le système actuel ne prévoit pas, en premier lieu, de réparation pour la plupart des travailleurs indépendants, qui ne sont pas assurés de façon obligatoire face au risque accidents du travail et maladies professionnelles (AT‑MP). Ainsi, seule une part très minoritaire d’entre eux (environ 20 000 personnes) est assurée contre le risque AT‑MP et pourrait donc bénéficier d’une reconnaissance de la covid-19 comme maladie professionnelle.

● Le dispositif de réparation actuel est par ailleurs inadapté à la réalité de cette épidémie qui touche de plein fouet les plus âgés. Lors de son audition, M. Michel Parigot, président de l’association Coronavictimes, évoquait ainsi un système particulièrement peu satisfaisant dans la mesure où 90 % des personnes qui décèdent de la covid-19 ont plus de 65 ans et ne relèvent donc pas du cadre de la maladie professionnelle.

Les résidents d’EHPA ont en particulier payé un très fort tribut à l’épidémie de covid-19. Il faut rappeler qu’un tiers – et même la moitié durant la première vague – des personnes décédées des suites de la covid-19 sont des résidents de ces établissements. Il est essentiel de prendre en considération les ayants droit de toutes ces victimes non prises en compte par le système existant.

● Le dispositif retenu ne prend enfin pas en compte la situation des victimes dites environnementales, si nombreuses et souvent contaminées au sein de leur famille par des soignants ou des travailleurs de première ligne, qui leur ont transmis la maladie sans le savoir.

3.   Une indemnisation qui n’est pas à la hauteur des enjeux

La réparation retenue dans le cadre de la reconnaissance en maladie professionnelle est une indemnisation forfaitaire. Dans la mesure où elle ne prend pas en compte l’ensemble des préjudices subis, cette réparation apparaît extrêmement modeste. Le fait de souffrir de séquelles de la covid-19 s’accompagne souvent, on l’a vu, de préjudices physiques, moraux et économiques importants et très invalidants. Au regard du nombre significatif de personnes qui ne parviennent plus à exercer leur profession, cette indemnisation est véritablement insuffisante.

III.   La création d’un fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19, un impératif au nom de la solidarité nationale

A.   La responsabilité de l’État vis-à-vis des victimes est indéniable

Par son ampleur et sa soudaineté, l’épidémie de covid-19 a constitué un véritable choc pour l’ensemble des pays du monde et nul ne conteste la difficulté pour les gouvernements d’y faire face, dans la mesure où de nombreuses inconnues demeurent au sujet de cette maladie.

La responsabilité de l’État vis-à-vis de ces victimes ne peut cependant être ignorée. Certains manquements doivent plus particulièrement être évoqués.

● La responsabilité de l’État dans la pénurie de matériels d’équipements de protection individuelle et en particulier de masques est en premier lieu incontestable. Il faut rappeler qu’à l’amorce de la crise, la France ne disposait d’aucun stock de masques FFP2 (masques essentiellement destinés aux soignants) et que le stock d’État de masques chirurgicaux disponibles au 31 décembre 2019 était composé de seulement 64 millions de masques chirurgicaux pour adultes et 33 millions de masques pédiatriques, soit 97 millions de masques. La mission d’information relative à l’impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l’épidémie de covid-19, dont le rapport a été publié le 8 décembre dernier, évoque ainsi la décision délibérée en 2018, de ne pas renouveler le stock de masques chirurgicaux arrivé pour la quasi-totalité à péremption. En effet, alors qu’une étude menée par le cabinet belge Centexbel faisait état de la péremption de la quasi-totalité des masques chirurgicaux du stock d’État (613 millions de masques, portant le stock utilisable à 99 millions), le directeur général de la santé n’a donné l’ordre que d’une commande de 50 millions de masques, éventuellement de 50 millions supplémentaires en fonction de marges dégagées sur la procédure d’acquisition de vaccins pandémiques.

Le manque d’équipements de protection individuelle, et en particulier de masques, a incontestablement représenté la principale difficulté rencontrée par les personnels soignants ainsi que par les personnes intervenant à domicile. Une enquête réalisée par la commission des affaires sociales du Sénat auprès des professionnels de ville et publiée le 14 avril révélait ainsi que seuls 24,5 % des médecins, 32,2 % des pharmaciens et 14 % des infirmiers s’estimaient, mi-avril, convenablement équipés.

Pour les personnels non soignants et l’ensemble des citoyens, le manque de protections et la communication erratique du Gouvernement sur le port du masque ont également constitué une importante difficulté et ont incontestablement participé de la propagation rapide de l’épidémie.

● La gestion de la stratégie de dépistage s’est elle aussi montrée laborieuse. Malgré le déploiement par l’Institut Pasteur d’un test de diagnostic pouvant être utilisé dès le 24 janvier, il s’est écoulé près de deux mois et demi ([16]) avant qu’une stratégie de dépistage généralisée de la population puisse être véritablement amorcée. Les errements et pesanteurs administratives sur cette question ont freiné la capacité à identifier les malades, et en particulier, les personnes asymptomatiques, empêchant un réel contrôle de l’épidémie. Le Président de la République a par ailleurs reconnu le retard important pris en matière de tests en indiquant le 28 octobre que la France « aurait pu aller plus vite, au début, sur les tests ».

● Le bilan particulièrement lourd de la crise sanitaire dans les EHPA révèle enfin une protection largement insuffisante des résidents de ces établissements face à l’épidémie. Alors que l’âge a été reconnu dès le début de la crise sanitaire comme le premier facteur de risque et que l’hébergement collectif est propice à la propagation de la maladie, les décisions relatives aux EHPA ont été particulièrement tardives, qu’il s’agisse des directives adressées, des équipements fournis ou de la stratégie de dépistage, suivant souvent la même temporalité que celles concernant la population générale. L’absence de prise en compte des EHPA dans les premières mesures gouvernementales a amené plusieurs représentants du secteur à interpeller directement le ministre de la santé dans une lettre en date du 20 mars, afin que ces établissements ne constituent pas un angle mort de la réponse à la crise sanitaire.

Le cadre sanitaire recommandé lors de la première vague épidémique a par ailleurs consisté à ne pas hospitaliser les résidents d’EHPA malades et atteints de formes non graves mais à les prendre en charge en établissement, au sein d’unités dédiées à la covid-19. Ces unités ont été particulièrement complexes à mettre en place, de nombreux établissements ne disposant ni de l’espace, ni du personnel nécessaire. La prise en charge des résidents s’est par ailleurs parfois apparentée à une prise en charge hospitalière alors que les établissements étaient très insuffisamment équipés. Le manque de matériel adapté pour les patients nécessitant une oxygénothérapie a en particulier constitué une véritable difficulté.

B.   Le dispositif proposé : la mise en place d’un fonds d’indemnisation offrant une réparation intégrale et rapide aux victimes les plus graves de l’épidémie

1.   Fondé sur la solidarité nationale, le modèle des fonds d’indemnisation comporte de nombreux avantages

● Au-delà de la question de la responsabilité de l’État, la création d’un mécanisme ambitieux d’indemnisation des victimes de la covid-19 constitue un devoir au nom de la solidarité nationale. Il s’agit de se montrer reconnaissants envers ces nombreux travailleurs mobilisés en première ligne durant la crise sanitaire mais aussi de compenser les préjudices insupportables que connaissent nombre de Français à la suite de leur maladie. Lors de son audition, M. François Desriaux, membre fondateur et dirigeant de l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante (Andeva), déclarait ainsi : « Au-delà de la responsabilité, il y a la question de la solidarité pour des gens qui se sont engagés au péril de leur vie [...]. La société entière doit contribuer. »

● La création d’un fonds d’indemnisation, modèle éprouvé et largement utilisé depuis plusieurs années (voir infra) comporte par ailleurs de nombreux avantages.

– Reposant sur la solidarité nationale, le dispositif du fonds d’indemnisation permet de dépasser la stricte notion de responsabilité. Dès lors que la victime fait état d’un dommage pris en compte par le fonds, elle peut obtenir une indemnisation sans qu’il soit nécessaire de prouver une faute.

– La mise en place d’un fonds permet par ailleurs de limiter considérablement le risque de contentieux. Les victimes peuvent en effet, grâce au fonds, faire valoir leur droit à réparation de façon simple et rapide, sans avoir à engager de procédures judiciaires.

– La procédure d’indemnisation se caractérise enfin par sa simplicité : les fonds assurent la fonction de dédommagement à titre principal, sans que la victime ait à faire valoir son droit d’indemnisation par une action en responsabilité individuelle.

La multiplication des fonds d’indemnisation depuis les années 1990

Le dispositif des fonds d’indemnisation est un modèle ancien mais largement utilisé depuis plusieurs années. La multiplication des fonds témoigne du rôle joué par ces organismes dans le traitement « curatif » des affaires sanitaires dont le nombre ne cesse de croître depuis le début des années 1990. Ces fonds sont aussi considérés par le législateur comme un outil efficace pour lutter contre la multiplication de procédures judiciaires. Parmi les principaux fonds existants, on peut notamment citer :

– le fonds d’indemnisation des transfusés et hémophiles, institué en 1991 à la suite de l’affaire dite du sang contaminé ;

– le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) créé en 2001 pour indemniser les victimes de l’exposition à cette fibre et leurs proches ;

– l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), créé en 2004 ;

– le comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN), créé en 2004 ;

– le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides (FIVP) créé le 1er janvier 2020.

2.   Un dispositif ambitieux et simple d’accès

S’inspirant du modèle du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA), la présente proposition de loi propose de créer un fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19, établissement public national à caractère national chargé d’indemniser les victimes de l’épidémie.

a.   Une réparation intégrale, ouverte à un large champ de bénéficiaires

● Bien plus ambitieux que le dispositif actuel d’indemnisation au titre de la maladie professionnelle, le fonds d’indemnisation prévu par la présente proposition de loi entend offrir une réparation à toutes les victimes graves de la covid-19.

Aux termes de l’article 1er de la proposition de loi, pourront en effet bénéficier d’une réparation les personnes connaissant des séquelles temporaires ou définitives, ou des symptômes persistants de la covid-19 du fait de leur infection au virus SARS-CoV-2 ainsi que les ayants droit des personnes décédées du fait de leur infection à ce virus sur le territoire de la République française.

En retenant un système de réparation au champ plus large que la seule maladie professionnelle, la présente proposition de loi entend ainsi offrir une réparation à l’ensemble des travailleurs du secteur public ou privé ayant contracté la covid-19, quels que soient leur profession ou leur régime d’affiliation, mais aussi aux bénévoles, aux victimes environnementales contaminées par leurs proches, aux résidents d’établissements sociaux et médico-sociaux et, plus généralement, à toutes les personnes souffrant de séquelles temporaires ou définitives ou de symptômes persistants. Le fonds d’indemnisation envisagé par cette proposition de loi offre également une réparation aux ayants droit des personnes décédées des suites de la maladie.

● La réparation prévue par la proposition de loi est une réparation intégrale, là où le dispositif actuel ne propose qu’une indemnisation forfaitaire, bien insuffisante pour compenser les préjudices subis par les victimes. Ces préjudices pourront dès lors être compensés, afin de permettre à la personne concernée de vivre dans des conditions aussi proches que possibles de la situation préalable à la contraction de la maladie.

b.   Un dispositif simple et intervenant dans des délais raisonnables

L’intérêt de la création du fonds d’indemnisation des victimes de la covid‑19 réside aussi dans la rapidité et la simplicité de la procédure d’indemnisation.

Le fonds fonctionne d’une part comme un guichet unique, en se tournant lui‑même vers les régimes AT-MP éventuellement compétents, plutôt que de demander aux victimes de suivre cette procédure au préalable.

La procédure de réparation est d’autre part particulièrement rapide, puisque le fonds est tenu de présenter une offre d’indemnisation dans les six mois à compter de la réception d’une demande d’indemnisation.

c.   Un mode de financement équilibré

Selon l’article 8 de la proposition de loi, le fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19 est principalement financé par une contribution de l’État et de la branche AT-MP. Le dispositif envisagé permet ainsi un financement équilibré, partagé entre les employeurs et l’État, agissant au nom de la solidarité nationale et assumant ses responsabilités vis-à-vis des victimes de l’épidémie.

 

 


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   commentaire dES articles

Article 1er
Réparation des préjudices rencontrés par les victimes de la covid-19

Supprimé par la commission

Cet article prévoit la réparation intégrale des préjudices rencontrés par les personnes connaissant des séquelles ou symptômes persistants de la covid-19 et par les ayants droit des personnes décédées des suites de cette maladie.

I.   Le dispositif d’indemnisation des victimes de la covid-19 prévu par le décret du 14 septembre 2020

1.   L’existence d’une indemnisation au titre de la maladie professionnelle

Depuis le décret du 14 septembre 2020 ([17]), la covid-19 fait l’objet d’une reconnaissance au titre de la maladie professionnelle. Le décret du 14 septembre a en effet créé deux nouveaux tableaux de maladies professionnelles « affections respiratoires aiguës liées à une infection au SARS-CoV2 » annexé au livre IV du code de la sécurité sociale (tableau n° 100) et inséré à l’annexe II du livre VII du code rural et de la pêche maritime (tableau n° 60). Il a également prévu une procédure aménagée pour la reconnaissance en maladie professionnelle des personnes ne remplissant pas les conditions du tableau.

La reconnaissance d’une maladie professionnelle

Selon l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, il existe aujourd’hui deux modalités de reconnaissance d’une maladie professionnelle :

– une procédure de droit commun : lorsqu’une pathologie est inscrite dans un tableau de maladies professionnelles, sa reconnaissance en maladie professionnelle est automatique, sous réserve du respect de certaines conditions énumérées par le tableau (par exemple le délai de prise en charge ou les symptômes de la maladie) ;

– une procédure dérogatoire : lorsqu’une maladie n’est pas inscrite dans un tableau de maladies professionnelles ou que la personne concernée ne remplit pas toutes les conditions énumérées par le tableau, la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie peut être soumise à l’examen des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP). La victime ou ses ayants droit doivent prouver que la maladie est essentiellement et directement causée par le travail et qu’elle a entraîné le décès ou une incapacité permanente d’au moins 25 %.

 

La reconnaissance de la covid-19 comme maladie professionnelle emprunte aujourd’hui deux voies :

● Les personnels de soins et assimilés bénéficient d’une présomption d’imputabilité pour la reconnaissance des pathologies liées à une infection au SARS-CoV2 en maladies professionnelles. Ces personnes n’ont pas à apporter la preuve d’un lien de causalité entre leur maladie et leur travail, la covid-19 étant automatiquement reconnue comme maladie professionnelle.

Pour que cette reconnaissance soit automatiquement établie, trois conditions doivent néanmoins être réunies :

– la personne concernée doit avoir été atteinte d’une affection respiratoire aiguë ayant nécessité le recours à une oxygénothérapie ou toute autre forme d’assistance ventilatoire, ou ayant entraîné le décès ;

– un délai de prise en charge de quatorze jours doit être respecté (il s’agit de la période au cours de laquelle, après cessation de l’exposition au risque, la maladie doit se révéler et être médicalement constatée) ;

– la personne concernée doit avoir travaillé en présentiel dans les lieux définis par le décret (voir infra).

 

 

 

 

Tableau n° 100
« AFFECTIONS RESPIRATOIRES AIGUËS LIÉES À UNE INFECTION AU SARS-COV2 »
annexé au livre IV (partie réglementaire) du code de la sécurité sociale

 

Désignation des maladies

Délai de prise en charge

Liste limitative de travaux susceptibles de provoquer ces maladies

Affections respiratoires aiguës causées par une infection au SARS-CoV2, confirmée par examen biologique ou scanner ou, à défaut, par une histoire clinique documentée (compte rendu d’hospitalisation, documents médicaux) et ayant nécessité une oxygénothérapie ou toute autre forme d’assistance ventilatoire, attestée par des comptes rendus médicaux, ou ayant entraîné le décès.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

14 jours

Tous travaux accomplis en présentiel par le personnel de soins et assimilé, de laboratoire, de service, d’entretien, administratif ou de services sociaux, en milieu d’hospitalisation à domicile ou au sein des établissements et services suivants : établissements hospitaliers, centres ambulatoires dédiés covid-19, centres de santé, maisons de santé pluriprofessionnelles, établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, services d’aide et d’accompagnement à domicile intervenant auprès de personnes vulnérables, services de soins infirmiers à domicile, services polyvalents d’aide et de soins à domicile, centres de lutte antituberculeuse, foyers d’accueil médicalisés, maisons d’accueil spécialisé, structures d’hébergement pour enfants handicapés, appartements de coordination thérapeutique, lits d’accueil médicalisé, lits halte soins santé, centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie avec hébergement, services de santé au travail, centres médicaux du service de santé des armées, unités sanitaires en milieu pénitentiaire, services médico-psychologiques régionaux, pharmacies d’officine, pharmacies mutualistes ou des sociétés de secours minières

Activités de soins et de prévention auprès des élèves et étudiants des établissements d’enseignement

Activités de transport et d’accompagnement des malades, dans des véhicules affectés à cet usage.

Source : article 1er du décret n° 2020-1131 du 14 septembre 2020 relatif à la reconnaissance en maladies professionnelles des pathologies liées à une infection au SARS-CoV2.

 

● Les personnes ne remplissant pas les conditions du tableau (celles pour lesquelles l’activité professionnelle ne correspond pas à une activité soignante désignée par le tableau et celles dont la maladie est survenue plus de quatorze jours après la fin de l’exposition professionnelle) ainsi que les personnes dont la pathologie n’est pas prise en compte par le tableau, doivent recourir au système complémentaire de reconnaissance des maladies professionnelles. Le décret du 14 septembre 2020 prévoit une procédure aménagée d’instruction des demandes de reconnaissance, confiée à un comité régionale unique (CRU) dédié à la covid-19 qui se prononce sur le lien de causalité entre cette maladie et la victime et dont la composition est allégée par rapport aux CRRMP prévus par le droit commun (voir infra).

Le comité régional unique dédié à la covid-19 (décret du 14 septembre 2020)

Lorsque l’affection n’est pas désignée par les tableaux ou que les conditions ne sont pas remplies, la reconnaissance d’une maladie professionnelle est soumise à l’examen des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP). Le décret du 14 septembre 2020 prévoit que les demandes de reconnaissances de maladies profesionnelles pourront être étudiées par un comité régional unique (CRU), dont la composition est allégée, afin de permettre une instruction plus rapide des dossiers, avec le maintien de garanties d’impartialité. Selon le décret, ce comité comprend :

-          un médecin-conseil relevant du service du contrôle médical de la Caisse nationale de l’assurance maladie ou de la direction du contrôle médical et de l’organisation des soins de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole ou d’une des caisses locales, ou un médecin-conseil retraité ;

-          un professeur des universités-praticien hospitalier ou un praticien hospitalier particulièrement qualifié en matière de pathologie professionnelle, réanimation ou infectiologie, en activité ou retraité, ou un médecin du travail, en activité ou retraité, remplissant les conditions prévues à l’article L. 4623-1 du code du travail, nommé pour quatre ans et inscrit sur une liste établie par arrêté du directeur général de l’agence régionale de santé.

2.   Un dispositif restrictif et limité

Le dispositif d’indemnisation des victimes de la covid-19 est à la fois restrictif et ouvert à une faible catégorie de bénéficiaires.

● Les conditions requises pour la reconnaissance de la covid-19 comme maladie professionnelle pour les personnels soignants et assimilés sont particulièrement restrictives. Pour bénéficier de cette reconnaissance, les professionnels concernés doivent en particulier souffrir d’affections respiratoires et avoir nécessairement eu recours à une oxygénothérapie ou une assistance ventilatoire.

● Les personnes ne remplissant pas les conditions du tableau : celles qui n’exercent pas une activité soignante au sens du tableau, celles pour lesquelles la maladie est apparue plus de quatorze jours après la fin de l’exposition professionnelle ainsi que celles dont la pathologie n’est pas prise en compte par le tableau, sont soumises à la procédure dérogatoire de reconnaissance de la maladie professionnelle. Les victimes ou leurs ayants droit sont tenues de saisir le comité régional unique (CRU) et doivent établir un lien direct et essentiel entre le travail et l’affliction ou le décès de la victime.

Pour les personnes dont la pathologie n’est pas désignée dans le tableau, ce qui est le cas de toutes les personnes ayant contracté des séquelles autres que respiratoires et n’ayant pas eu recours à une assistance ventilatoire, un taux d’incapacité minimum de 25 % est par ailleurs requis pour que la maladie soit reconnue d’origine professionnelle.

● Le dispositif d’indemnisation de la covid-19 existant est enfin uniquement centré autour de la reconnaissance au titre de la maladie professionnelle. Il ne s’applique donc qu’à un faible nombre de travailleurs, les dispositions du décret étant en effet destinées aux « assurés du régime général et des régimes agricoles de sécurité sociale, assurés des régimes spéciaux de sécurité sociale auxquels les tableaux de maladies professionnelles sont applicables, organismes de sécurité sociale, employeurs publics » ([18]). Sont dès lors exclus les travailleurs indépendants – à l’exception des médecins libéraux ([19]) – qui ne sont pas assurés de façon obligatoire contre le risque accidents du travail et maladies professionnelles, et ne peuvent donc pour la plupart, recevoir d’indemnité à ce titre.

Ce dispositif ne permet pas, enfin, de prendre en charge toutes les victimes dites « environnementales » ou « collatérales », contaminées souvent par leurs proches, même si ces derniers sont soignants ou travailleurs de première ligne, ayant eux-mêmes contracté le virus dans le cadre de leur activité professionnelle.

3.   Une indemnisation forfaitaire

Dans le cas d’une indemnisation pour maladie professionnelle, la réparation offerte est forfaitaire. Elle comprend :

– la prise en charge totale des soins à hauteur de 100 % des tarifs d’assurance maladie ;

– le versement d’indemnités journalières, en cas d’incapacité temporaire ou définitive ;

– une rente pouvant être versée à la victime, en cas d’incapacité permanente, calculée selon la gravité des séquelles et les revenus antérieurs à la contraction de la maladie. En cas de décès, une rente peut aussi être versée aux ayants droit (conjoint, enfant, ascendant) de la victime ;

– enfin, une indemnisation complémentaire pouvant versée en cas de faute inexcusable pour l’employeur.

La participation de l’employeur à la réparation en cas de faute inexcusable

La réparation obtenue dans le cadre d’une maladie professionnelle repose sur le principe d’une responsabilité présumée et sans faute de l’employeur. Elle n’exclut pas la possibilité d’intenter une action en responsabilité contre l’employeur pour faute inexcusable, lorsque celui-ci n’a pas respecté son obligation de moyens renforcée pour la protection de ses salariés ou agents en ne prenant pas les mesures générales de prévention nécessaires et suffisantes pour éviter le risque ([20]). Dans le cas d’une faute inexcusable de l’employeur, ce dernier peut être condamné à prendre en charge une réparation complémentaire ou intégrale des préjudices subis.

II.   Le dispositif proposé : une réparation intégrale des préjudices subis par les victimes les plus graves de l’épidémie

1.   Un champ de bénéficiaires étendu et une prise en charge qui dépasse le champ de la maladie professionnelle

L’article 1er de la présente proposition de loi prévoit une réparation intégrale des préjudices rencontrés par deux catégories de bénéficiaires :

● Les personnes connaissant des séquelles temporaires ou définitives ou des symptômes persistants du fait de leur infection au SARS-CoV2 sur le territoire de la République française. Les auditions menées auprès de médecins spécialisés du covid-long et d’associations de victimes ont amené votre rapporteur à déposer un amendement visant à inclure dans cette première catégorie, qui ne désignait au départ que les personnes souffrant de séquelles temporaires ou définitives de la covid-19, les personnes souffrant de symptômes persistants dus à cette maladie, afin que les malades du covid-long soient bien prises en compte.

La réparation envisagée dépasse ainsi le champ de la maladie professionnelle car elle est destinée à toutes les personnes rencontrant des séquelles ou symptômes persistants de la covid-19, que cette maladie soit reconnue d’origine professionnelle ou non. Sont ainsi incluses dans cette catégorie :

-         les victimes professionnelles, ayant été contaminées par le virus dans le cadre de leur travail et dont la maladie a été reconnue d’origine professionnelle par un organisme de sécurité sociale ;

-         les victimes exposées dans le cadre professionnel mais ne bénéficiant pas d’une couverture contre le risque professionnel ;

-         les victimes dites « environnementales », contaminées par leurs proches, par exemple dans le cadre familial.

S’agissant des séquelles prises en charge, il est aujourd’hui difficile de recenser l’ensemble des conséquences à long terme de la covid-19. Les auditions de médecins spécialisées dans l’étude du « covid-long » et les différentes études menées à ce sujet font principalement état :

-         de séquelles respiratoires et pulmonaires (notamment une insuffisance respiratoire et des fibroses pulmonaires) ;

-         de séquelles rénales ;

-         de troubles cardiaques et vasculaires, notamment des thromboses ;

-         de séquelles neurologiques et de troubles musculo‑squelettiques ;

-         de troubles psychiques ;

-         d’une fatigue chronique.

● Les ayants droit des personnes décédées du fait de leur infection au SARS‑CoV2 sur le territoire de la République française.

La qualification d’ayant droit renvoie à l’existence d’une relation de proximité affective avec la victime mais concerne principalement les membres de la famille de la victime. Dans le cadre du FIVA, les ayants droit de la personne décédée pouvant avoir droit à la réparation sont le conjoint, les enfants majeurs et mineurs, les petits‑enfants s’ils sont nés avant le décès de la victime, les frères et sœurs et les parents.

La réparation offerte aux ayants droit des personnes décédées du fait de leur contamination par le virus SARS-CoV2 dépasse également le champ professionnel et peut concerner les proches de toutes les personnes décédées des suites de la covid‑19 (telles que les résidents d’EHPA par exemple).

2.   Une réparation intégrale des préjudices subis

Contrairement à l’indemnisation forfaitaire prévue dans le cadre de la reconnaissance d’une maladie professionnelle, l’article 1er de la présente proposition de loi institue une réparation intégrale des préjudices subis. Le principe de la réparation intégrale consiste à indemniser la victime de manière à la replacer dans l’état où elle se serait trouvée si le dommage ne s’était pas produit.

L’article 1er de la proposition de loi ne définit ni le champ des préjudices qui pourront faire l’objet d’une réparation, ni aucun seuil de gravité des préjudices indemnisables. Il renvoie à un décret en Conseil d’État la définition des conditions de détermination des préjudices ouvrant droit à réparation. Les préjudices dont souffrent les victimes sont de nature diverse ; pourraient notamment faire l’objet d’une réparation les préjudices physiques et esthétiques, moraux, professionnels (tels qu’une incapacité de travail ou une impossibilité de se maintenir sur son poste de travail), ou encore patrimoniaux ou extrapatrimoniaux.

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Article 2
Création du fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19

Supprimé par la commission

Cet article crée un fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19, établissement public national à caractère administratif placé sous la tutelle des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget.

● L’article 2 crée un nouveau fonds, chargé d’opérer la réparation intégrale des préjudices subis par les bénéficiaires désignés à l’article 1er de la proposition de loi.

Ce fonds comporte les caractéristiques suivantes :

– il s’agit d’abord d’un établissement public de l’État, à caractère administratif, c’est-à-dire une personne morale de droit public disposant d’une personnalité juridique et d’une certaine autonomie administrative et financière et à qui est confiée une mission d’intérêt général autre qu’industrielle et commerciale ;

Les différentes formes juridiques des fonds d’indemnisation

Un fonds d’indemnisation doté de la personnalité juridique est souvent constitué sous la forme d’un établissement public administratif administré par un conseil d’administration, à l’instar du FIVA. Ce modèle s’oppose aux fonds ne disposant pas de personnalité juridique propre, souvent adossés à un établissement public et comprenant un conseil de gestion ou de surveillance tels que le fonds d’indemnisation des victimes des pesticides ou le fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante.

– ce fonds agit sous tutelle des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. Il est doté d’une mission unique : celle d’assurer la réparation intégrale des préjudices subis par les personnes désignées à l’article 1er ;

– le fonds est géré par un conseil d’administration dont la composition s’inspire de celle du conseil d’administration du FIVA. L’article 2 prévoit que le fonds d’indemnisation est présidé par un magistrat et comprenant des représentants de l’État, des organisations siégeant à la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles de la Caisse nationale de l’assurance maladie, des associations de victimes et des personnalités qualifiées. Cet article renvoie à un décret en Conseil d’État la définition des règles d’organisation et de fonctionnement du fonds, dont la composition précise et les compétences de son organisation.

Composition du conseil d’administration du FIVA

Aux termes de l’article 1er du décret du 23 octobre 2001 relatif au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) ([21]), le conseil d’administration du FIVA comprend, outre le président :

 

1° Cinq membres représentant l’État :

– le directeur de la sécurité sociale ou son représentant ;

– le directeur du budget ou son représentant ;

– le directeur du Trésor ou son représentant ;

– le directeur général de la santé ou son représentant ;

– le directeur général du travail ou son représentant ;

 

2° Huit représentants des organisations siégeant à la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles prévue à l’article L. 221-4 du code de la sécurité sociale, dont le président de celle-ci, proposés, à l’exception de ce dernier, par les dites organisations ;

 

3° Quatre membres proposés par les organisations nationales d’aide aux victimes de l’amiante ;

 

4° Quatre personnalités qualifiées dans les domaines de compétence du fonds :

– deux personnalités qualifiées possédant des connaissances particulières en matière d’amiante ;

– le directeur de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés ou son représentant ;

– un membre de l’Inspection générale des affaires sociales.

● Selon l’article 2 de la proposition de loi, les membres du conseil d’administration, le personnel du fonds ainsi que les personnes ayant à connaître des informations détenues par celui-ci sont tenus au respect du secret professionnel, dans les conditions et sous les peines prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.

Les peines prévues en cas de violation du secret professionnel

À l’exception des cas de figure décrits à l’article 226-14 du code pénal, l’article 226-13 de ce code prévoit une peine d’emprisonnement d’un an et de 15 000 euros d’amende en cas de « révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire ».

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Article 3
Instruction des demandes d’indemnisation

Supprimé par la commission

Cet article détaille la procédure d’instruction des demandes d’indemnisation et précise les démarches devant être réalisées par le demandeur et les modalités d’investigation du fonds.

1.   Une démarche à l’initiative des demandeurs

a.   Un fonds qui centralise les demandes des victimes

L’article 3 de la proposition de loi prévoit que le fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19 centralise et instruit les demandes d’indemnisation présentées par les personnes définies à l’article 1er. Il revient donc à la victime elle‑même de présenter sa demande d’indemnisation au fonds d’indemnisation.

S’inspirant du fonctionnement prévu pour le FIVA et le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 ([22]), le fonds fonctionne comme un « guichet unique », c’est-à-dire qu’il se retourne lui-même vers les régimes AT-MP éventuellement compétents, plutôt que de demander aux victimes de suivre cette procédure au préalable, avant de se retourner vers le fonds. Cette modalité devrait permettre de limiter les difficultés liées aux délais d’instruction et de garantir une homogénéité des décisions rendues sur l’ensemble du territoire.

L’article 3 renvoie la précision des détails de la collecte des demandes et de la procédure d’instruction à un décret en Conseil d’État.

b.   Une obligation de justification et d’information s’imposant aux demandeurs

Afin que leur demande d’indemnisation soit prise en compte, les victimes de la covid-19 sont soumises à plusieurs obligations définies par l’article 3 de la présente proposition de loi.

● Il revient d’abord au demandeur de justifier de l’atteinte temporaire ou définitive de son état de santé, consécutive à une infection au virus SARS-CoV2. Le demandeur devra dès lors être en mesure de démontrer les éventuels préjudices qu’il souhaite faire prendre en charge.

● De façon analogue aux dispositions régissant le fonctionnement d’autres fonds d’indemnisation comme le FIVA, l’article 3 prévoit également l’obligation pour le demandeur d’informer préalablement le fonds des autres procédures qu’il a engagées en vue d’obtenir réparation des mêmes préjudices. Si le demandeur a effectivement intenté une action en justice parallèlement à la saisine du fonds, il doit également informer le juge ou la commission en charge de son dossier de la saisine du fonds.

2.   D’importants pouvoirs d’instruction sont confiés au fonds

L’article 3 de la présente proposition de loi confère au fonds un important pouvoir d’investigation pour l’instruction des demandes d’indemnisation des victimes de la covid-19. Selon cet article, le fonds procède ou fait procéder le cas échéant, à toutes investigations ou expertises utiles. Il lui revient en particulier d’apprécier si les conditions d’indemnisation sont réunies en effectuant des recherches sur les circonstances d’exposition de la victime au virus SARS-CoV-2. Ces recherches visent notamment à établir le lien de causalité entre l’exposition au virus et l’état de santé de la personne concernée, pour vérifier que la pathologie est bien imputable à l’infection par la covid-19.

La clarification des circonstances de la contamination permet de déterminer le type de réparation envisageable, qui peut prendre la forme d’une contribution de la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) en cas de contamination sur le lieu de travail.

À l’instar du FIVA, le fonds d’indemnisation des victimes de la covid‑19 ne peut se voir opposer le secret professionnel ou le secret des affaires. Il peut ainsi accéder rapidement à toutes les informations nécessaires à la détermination du préjudice subi afin de proposer une réparation adéquate.

Les dérogations au secret professionnel définies par le code pénal

L’article L.226-14 du code pénal dispose que les dispositions de l’article L. 226-13 du code pénal sur le secret professionnel ne sont pas applicables « dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret », tel que le prévoit le présent article.

 

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Article 4
Moyens d’action pour assurer la réparation

Supprimé par la commission

L’article 4 explicite les moyens à disposition du fonds pour aider les demandeurs à obtenir réparation, notamment l’action subrogatoire dans les actions en indemnisation de la victime contre le responsable du dommage ou toutes les personnes tenues à réparation à un titre quelconque.

1.   Le fonds dispose d’un droit d’information et d’action vis-à-vis des organismes susceptibles de réparer le préjudice commis

Selon l’article 4, le fonds dispose du droit de requérir des informations auprès des organismes à même de réparer le préjudice, et peut ainsi exiger qu’on lui transmette les renseignements relatifs à l’exécution des obligations éventuelles de tout service de l’État, de toute collectivité publique, de tout organisme assurant la gestion des prestations sociales ou de tout organisme assureur susceptible de réparer tout ou partie du préjudice. En contrepartie, les personnes ayant eu accès aux documents et informations communiquées au fonds pour l’instruction des demandes sont soumises au respect du secret professionnel.

Si le fonds estime que le préjudice est la conséquence d’un accident du travail, d’une maladie professionnelle ou d’une maladie causée par le service, il peut par ailleurs selon l’article 4, transmettre le dossier du demandeur aux organismes chargés du versement des prestations et indemnités d’assurance AT-MP afin qu’ils procèdent à la liquidation de ces prestations et indemnités. Il s’agit des organismes suivants :

– la caisse primaire d’assurance maladie et les caisses générales de sécurité sociale mentionnées respectivement aux articles L. 211-1 et L. 752-4 du code de la sécurité sociale ;

– les caisses de mutualité agricole et les caisses d’assurance accidents agricoles mentionnées aux articles L. 723-2 et L. 761-20 du code rural et de la pêche maritime ;

– le service des ressources humaines de rattachement du fonctionnaire.

2.   La possibilité reconnue au fonds de se subroger dans les droits acquis par le demandeur contre la personne responsable du dommage

● Comme c’est le cas pour le FIVA ou le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, le présent article donne au fonds le droit d’intenter des actions en justice pour le demandeur et de se subroger dans les droits acquis par le demandeur contre les responsables du dommage et contre les organismes tenus d’en assurer la réparation.

À l’issue d’une procédure contentieuse, le fonds pourra donc, en sa qualité de créancier subrogé, récupérer à due concurrence des sommes qu’il aura versées à la victime, les indemnisations dues par les personnes jugées responsables du dommage et les organismes chargés d’en assurer la réparation, dans la limite du montant des indemnités à la charge de ces personnes.

● Le fonds peut exercer son action devant toute juridiction saisie par la victime et intervenir en soutien de cette dernière, qu’il s’agisse :

– des juridictions civiles, y compris celles du contentieux de la sécurité sociale ;

– des juridictions pénales, y compris pour la première fois en cause d’appel, en cas de constitution de partie civile du demandeur contre le ou les responsables des préjudices ;

– de la juridiction administrative.

● Le fonds peut intervenir à titre principal et user de toutes les voies de recours ouvertes à la loi y compris celles prévues aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale.

Recours prévus aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale

Le recours prévu à l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale détaille la possibilité pour les caisses de sécurité sociale, lorsque le préjudice subi par l’assuré n’est pas régi par les dispositions applicables aux accidents du travail et est imputable à un tiers, d’exercer un recours subrogatoire contre l’auteur du préjudice, portant sur les seules les indemnités de réparation des préjudices pris en charge par les caisses.

Le recours prévu à l’article L. 454-1 du code de la sécurité sociale détaille la possibilité pour les caisses primaires d’assurance maladie, lorsque le préjudice subi par l’assuré est imputable à une autre personne que l’employeur, d’intenter un recours contre l’auteur du préjudice, en fonction du degré de responsabilité du tiers auteur de l’accident.

● Enfin, si des poursuites pénales sont parallèlement engagées, le juge civil ne sera pas tenu de surseoir à statuer jusqu’à décision définitive de la juridiction répressive.

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Article 5
Modalités de l’offre d’indemnisation

Supprimé par la commission

L’article 5 fixe les modalités selon lesquelles le fonds est tenu de présenter une offre d’indemnisation au demandeur, ainsi que les conditions relatives à l’acceptation de l’offre par celui-ci.

1.   Une indemnisation rapide prenant en compte l’éventuelle aggravation de l’état de santé de la victime

a.   Un délai analogue à ceux prévus pour les fonds d’indemnisation existants

L’un des objectifs de la création du fonds est de proposer une instruction rapide des dossiers. Selon l’article 5 de la présente proposition de loi, le fonds s’engage à présenter une offre d’indemnisation au demandeur dans les six mois à compter de la réception de la demande d’indemnisation. Cette offre doit préciser l’évaluation retenue pour chaque type de préjudice.

Ce délai de six mois est similaire à celui prévu pour l’instruction des demandes du FIVA ou du fonds d’indemnisation des victimes des pesticides.

b.   Une offre au caractère provisionnel, dont le montant est calculé en fonction des indemnités déjà reçues

● Le fonds calcule le montant de l’offre en fonction des chefs de préjudice retenus, et en déduit les sommes déjà versées à la victime :

– soit au titre des prestations énumérées à l’article 29 de la loi n° 85‑677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation ([23]). Il s’agit des prestations versées par les organismes de sécurité sociale ; des prestations relatives aux actions en réparation civile de l’État et de certaines autres personnes publiques ; du remboursement des frais de traitement médical et de rééducation ; des salaires et accessoires du salarié maintenus par l’employeur pendant la période d’inactivité consécutive à l’événement ayant occasionné le dommage ; des indemnités journalières de maladie et des prestations d’invalidité versées par les groupements mutualistes ;

– soit au titre des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir du chef du même préjudice (par exemple une indemnité accordée à la suite d’une procédure contentieuse ou d’un contrat d’assurance), afin d’éviter une double indemnisation des postes de préjudices déjà pris en charge par d’autres organismes.

● Selon l’article 5, dans le cas où l’état de la victime ne serait pas consolidé, l’offre présentée par le fonds a un caractère provisionnel.

Le cas d’aggravation de la situation de la victime est prévu : une personne ayant déjà obtenu une indemnité du fonds pourra prétendre à une nouvelle réparation si son préjudice s’est aggravé. Le fonds devra présenter, le cas échéant, une offre dans les mêmes conditions, c’est-à-dire dans un délai de six mois à compter de la date du constat de l’aggravation.

2.   Une réparation intégrale dont l’acceptation vaut désistement de toute autre action en justice pour réparation du même préjudice.

a.   Des conditions d’acceptation encadrées

● Puisque le fonds prévoit une réparation intégrale du préjudice, valent désistement de toute autre action juridictionnelle en indemnisation en cours et rendent irrecevable toute nouvelle procédure pour la réparation du même préjudice :

– l’acceptation de l’offre du fonds par le demandeur ;

– la décision juridictionnelle définitive rendue à la suite d’une action en justice engagée par le demandeur contre le fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19 (voir infra) ;

– toute autre décision juridictionnelle définitive allouant une indemnisation intégrale du préjudice au demandeur.

Ce dispositif est également celui prévu par le FIVA, mais pas par le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, qui prévoit une réparation forfaitaire et non pas intégrale du préjudice, et doit donc maintenir la possibilité pour le demandeur de compléter l’indemnisation du fonds par d’autres actions en justice.

b.   Les droits des demandeurs garantis par la possibilité d’accès au dossier

● Le fonds garantit l’accès des demandeurs à leur dossier, dans le respect des dispositions de l’article L. 1111-7 du code de la santé publique ([24]) et sous réserve du secret des affaires.

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Article 6
Droits d’actions en justice contre le fonds

Supprimé par la commission

L’article 6 précise les conditions dans lesquelles le demandeur dispose d’un droit d’action en justice contre le fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19.

Selon l’article 6 de la présente proposition de loi, le demandeur dispose d’un droit d’action en justice contre le fonds d’indemnisation des victimes de la covid‑19.

À l’instar du dispositif prévu pour le FIVA, la possibilité pour le demandeur d’agir en justice contre le fonds est cependant encadrée et se limite aux cas suivants :

– lorsque la demande d’indemnisation de la victime a été rejetée ;

– lorsqu’aucune offre ne lui a été présentée dans les six mois à compter de la réception de sa demande ;

– lorsque le demandeur n’a pas accepté l’offre qui lui a été proposée par le fonds.

L’action en justice contre le fonds est intentée devant la cour d’appel de Paris. Le demandeur a la possibilité de se faire assister ou représenter par son conjoint, un ascendant ou un descendant en ligne directe, un avocat ou un délégué des associations de victimes.

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Article 7
Règles relatives aux délais de prescription des demandes d’indemnisation

Supprimé par la commission

L’article 7 précise les règles à la prescription de la demande d’indemnisation, c’est-à-dire les délais dans lesquels la demande d’indemnisation doit être adressée au fonds.

Par analogie au délai prévu pour le FIVA, l’article 7 de cette proposition de loi prévoit que la demande d’indemnisation des victimes de la covid-19 au fonds doit être formulée dans un délai de dix ans. Le délai de prescription court à compter de la date du premier certificat médical établissant l’infection au virus SARS‑CoV‑2.

Toutefois, le point de départ du délai de prescription diffère dans deux cas de figure.

– dans le cas de l’aggravation des effets chroniques de l’infection, le délai ne court qu’à la date du premier certificat médical constatant cette aggravation ;

– dans le cas de l’indemnisation des ayants droit d’une personne décédée des suites de la covid-19, le délai de prescription ne court qu’à la date du premier certificat établissant le lien entre le décès et l’exposition au virus.

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Article 8
Modalités de financement et dépenses du fonds

Supprimé par la commission

Cet article précise les modalités de financement du fonds, essentiellement assis sur une contribution de l’État et de la branche AT-MP et précise ses différents postes de dépense.

● L’article 8 de la présente proposition de loi définit les modalités de financement du fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19. Selon cet article, le fonds est ainsi financé par :

 une contribution de l’État, dans les conditions fixées par la loi de finances ;

– une contribution de chaque régime obligatoire de base assurant la couverture du risque accidents du travail et maladie professionnelles, dans les conditions fixées par la loi de financement de la sécurité sociale ;

– une contribution de l’État, en sa qualité d’employeur assurant la couverture du risque accidents du travail et maladies professionnelles, dans les conditions fixées par la loi de finances ;

– une contribution de régimes facultatifs assurant la couverture du risque accidents du travail et maladies professionnelles, dans les conditions fixées par la loi de finances ;

 les sommes perçues lorsque le fonds est subrogé dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes et organismes tenus d’en assurer la réparation totale ou partielle (voir supra) :

 des produits divers, tels que des dons ou legs dont le fonds pourrait bénéficier.

● L’article 8 prévoit par ailleurs que le fonds enregistre en dépenses :

– la prise en charge des indemnités visant à la réparation intégrale des personnes mentionnées à l’article 1er, qui souffrent de séquelles temporaires de la covid‑19 ou de symptômes persistants de la covid-19, ou sont ayants droit de personnes décédées des suites de cette maladie ;

– ses frais de fonctionnement et de gestion.

● Aux termes de l’article 8, un rapport d’activité du fonds, établi par son conseil d’administration et évaluant les recettes et les dépenses du fonds, doit être transmis chaque année au Parlement et au Gouvernement, avant le 1er juillet.

● Les II et III prévoient enfin de gager la charge pour l’État et les organismes de sécurité sociale due à la mise en place des dispositions de la proposition de loi par la création d’une taxe additionnelle à la taxe sur les transactions financières.

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Article 9
Application du dispositif en Nouvelle-Calédonie et Polynésie française

Supprimé par la commission

L’article 9 précise les modalités d’application du fonds en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, en proposant de gérer, pour le compte de ces collectivités, un dispositif d’indemnisation des victimes de la covid-19 similaire à celui prévu en métropole, défini par chaque collectivité en fonction de son statut propre.

L’État est compétent en matière de santé et d’assurance maladie dans les départements ou les collectivités d’outre-mer relevant de l’article 73 de la Constitution – c’est-à-dire, la Guadeloupe, la Martinique, Mayotte, la Guyane, La Réunion – et dans certaines collectivités territoriales – Saint-Barthélemy, Saint‑Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna. Ces départements sont rattachés au régime général de la sécurité sociale et aux autres régimes de base : leurs habitants bénéficient ainsi des prestations prévues par le code de la sécurité sociale.

En Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, la santé fait cependant partie des compétences de la collectivité, qui dispose de son propre régime de sécurité sociale. L’État n’est donc pas compétent dans ce domaine, excepté sur les aspects relatifs à la garantie des libertés publiques et au respect de la dignité des personnes, comme la bioéthique.

Le présent article prévoit d’étendre le dispositif d’indemnisation des victimes de la covid-19 à ces collectivités, dans le respect de leurs compétences. Il propose de mettre en place une convention entre le fonds et les collectivités de Nouvelle‑Calédonie et de Polynésie française, permettant au fonds de gérer, pour le compte de chacune des collectivités, des dispositifs d’indemnisation des victimes de la covid-19 définis par chaque collectivité dans le cadre de ses compétences. Une telle démarche permettrait aux habitants de ces territoires, également touchés par la pandémie de covid-19, de bénéficier eux aussi d’un dispositif de réparation face aux préjudices engendrés par la maladie.

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa seconde réunion du mercredi 10 février 2021, la commission a examiné la proposition de loi portant création d’un fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19 (n° 3723) ([25]).

I.   Discussion générale

M. Régis Juanico, rapporteur. Je souhaite vous faire part du témoignage de Pauline Oustric, jeune chercheuse en comportements alimentaires et présidente de l’association AprèsJ20 rassemblant de nombreuses personnes atteintes de formes longues de la covid-19, qui a accepté de nous parler de son expérience et des principaux symptômes de cette pathologie : « Je ne peux plus vivre une journée normalement. On m’a diagnostiqué il y a quelques mois une dysautonomie, une dérégulation du système nerveux. J’ai encore des problèmes pour digérer, des malaises post-efforts, de la tachycardie au repos, ce qui est quand même préoccupant à 27 ans. Ces symptômes durent depuis dix mois, car j’ai contracté la covid-19 fin mars, sans besoin d’hospitalisation. Je ne peux plus aujourd’hui vivre comme avant, où je travaille, et faire des choses normales à la maison. C’est une autre vie. »

La vie de Pauline, comme celle de tant d’autres, a ainsi été bouleversée depuis qu’elle souffre d’une forme de « covid long », pathologie reconnue en août par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui y consacrait hier un séminaire. Ce covid long se caractérise par des symptômes persistant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, après la contraction de la maladie.

Aux très nombreuses victimes de la covid-19 – celles qui ont été hospitalisées, celles pour qui il a été nécessaire de recourir à des soins de réanimation et celles qui sont malheureusement décédées des suites de la maladie – s’ajoutent d’autres victimes, moins connues et pas toujours identifiées, dont le quotidien a pourtant été bouleversé depuis leur infection par le virus de la covid-19.

Les séquelles de la covid-19, polymorphes et marquées par différents degrés de gravité, relèvent de trois catégories principales qu’il s’agit ici de rappeler.

De nombreux patients dont l’état a nécessité des soins à l’hôpital, souvent en service de réanimation, sont d’abord atteints de séquelles importantes résultant des formes graves de la maladie et du mode de prise en charge particulièrement lourd associé. Les personnes concernées souffrent le plus souvent de séquelles lourdes, notamment respiratoires et cardiaques – fibrose pulmonaire, insuffisance rénale aiguë –, de troubles musculo-squelettiques très invalidants et d’atteintes au système nerveux central.

Un deuxième type de séquelles de la covid-19 touche des personnes ayant contracté des formes relativement légères de la maladie, sans besoin d’hospitalisation. Ces personnes – le plus souvent des femmes et de nombreux jeunes – souffrent d’un covid long, évoqué à l’instant, caractérisé par des symptômes lancinants, persistants et particulièrement invalidants, au premier rang desquels figurent un épuisement terrassant, un essoufflement rapide, une fatigue chronique, une désadaptation à l’effort, des troubles cognitifs, une anosmie et une agueusie.

Un grand nombre de spécialistes évoquent enfin des séquelles psychiatriques de la covid-19 particulièrement alarmantes chez de nombreux patients : anxiété, insomnie, dépression, syndromes post-traumatiques, symptômes obsessionnels. Le lien entre maladie infectieuse, inflammation et déclenchement de troubles psychiatriques a été démontré de longue date. Selon la professeure Marion Leboyer, les conséquences psychiatriques de la covid-19 sont devant nous.

S’il est encore tôt pour dire avec précision combien de personnes souffrent de ces séquelles polymorphes de la covid-19, il est aujourd’hui établi qu’elles concernent plusieurs centaines de milliers de victimes. Ces victimes, ce sont d’abord nos soignants, qui ont fait et font toujours l’admiration de tous pour leur courage et leur mobilisation sans faille dans la lutte contre l’épidémie. Ce sont aussi tous ces travailleurs de première ligne qui, tout au long de la crise sanitaire, ont assuré la continuité de la nation au péril de leur santé et, parfois, de leur vie. Ce sont enfin toutes ces personnes que nous appelons « victimes environnementales » ou « collatérales », qui ont été contaminées par leurs proches, lesquels avaient eux-mêmes souvent contracté la maladie dans l’exercice de leur profession.

Ces personnes, nous les avons applaudies tous les soirs, pendant de longues semaines, pour leur témoigner notre reconnaissance. La nation tout entière a reconnu leur courage et leur dévouement. Nous leur avons promis notre gratitude et notre soutien. Et pourtant, le Gouvernement n’a pas tenu ses engagements. Le dispositif de réparation des préjudices subis par les victimes de la covid-19 prévu par le décret du 14 septembre 2020 est très loin d’être à la hauteur des enjeux. Particulièrement insuffisant, il fait l’objet d’un rejet unanime de la part des associations de victimes et de l’ensemble des organisations syndicales salariées.

Pour les soignants, d’abord, contrairement à ce qui avait été annoncé à de multiples reprises par le Gouvernement, y compris dans notre assemblée, la reconnaissance de la covid‑19 comme maladie professionnelle n’est ni automatique ni systématique. Pour recevoir une indemnisation, les soignants et assimilés doivent être atteints d’affections respiratoires aiguës et avoir eu recours à une oxygénothérapie. Ces critères sont particulièrement restrictifs et peu pertinents dans la mesure où, comme on l’a vu, les séquelles cardiaques, neurologiques ou cérébrales de la covid-19 touchent de nombreux patients atteints, au départ, de formes peu graves de la maladie.

Pour les autres travailleurs et les personnes dont la pathologie ne correspond pas aux critères très stricts que je viens d’énoncer, la reconnaissance de la covid-19 comme maladie professionnelle relève d’un véritable parcours du combattant. Fin janvier, les organisations syndicales faisaient ainsi état de seulement cent reconnaissances au titre du nouveau tableau MP100 des maladies professionnelles et de quinze reconnaissances au titre de la procédure complémentaire. Ces victimes sont tenues de prouver l’existence d’un « lien direct et essentiel » entre leur travail et la contamination par le virus ; or ce lien est particulièrement difficile à établir dans le cadre d’une épidémie comme celle que nous connaissons. L’existence d’un système à deux vitesses fait, par ailleurs, l’objet d’une vive incompréhension de la part des victimes. Il témoigne d’une forme de mépris face à l’engagement de nombreux travailleurs, ces aides à domicile, hôtesses de caisse, agents des forces de l’ordre et de sécurité, pompiers, enseignants, agents de propreté et commerçants montés au front en pleine crise sanitaire. Alors qu’ils souffrent souvent des mêmes séquelles, comment expliquer qu’ils ne soient pas placés sur un pied d’égalité avec les soignants et assimilés ?

Uniquement centré sur la reconnaissance comme maladie professionnelle, le dispositif d’indemnisation existant laisse, en outre, de nombreuses victimes de côté. Je pense aux travailleurs indépendants, dont une très faible minorité seulement est assurée contre le risque accidents du travail et maladies professionnelles (AT‑MP), aux très nombreuses victimes environnementales contaminées hors du cadre professionnel, aux bénévoles venus prêter main-forte aux associations de solidarité, aux retraités – les plus de 65 ans représentent 90 % des personnes décédées –, aux résidents en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), qui ont payé le plus fort tribut à la crise avec 30 000 décès sur les 80 000 recensés à ce jour, ou encore aux proches des personnes décédées.

L’indemnisation proposée est, enfin, largement insuffisante : uniquement forfaitaire, elle ne prend pas en compte les nombreux préjudices physiques, économiques et moraux dont souffrent les victimes.

Nous devons agir face à la détresse de ces nombreuses personnes qui nous appellent à passer aux actes. La réparation des nombreux préjudices subis par ces victimes est un devoir, à plusieurs titres.

La responsabilité de l’État dans la situation de ces victimes est indéniable. Qu’il s’agisse de la question des masques, des lourdeurs dans le déploiement d’une véritable stratégie de dépistage ou du retard important dans la prise de mesures protectrices à l’égard de nos aînés dans les EHPAD, la façon dont les pouvoirs publics ont répondu à la crise sanitaire s’est caractérisée par de nombreux errements et n’est pas étrangère à la propagation rapide et massive de l’épidémie. Notre but n’est pas ici d’établir une liste exhaustive des manquements constatés dans la gestion de la crise sanitaire – les commissions d’enquête parlementaires s’en sont chargées, et ce travail est loin d’être achevé. Au-delà de la recherche des responsabilités, la mise en place d’un système ambitieux d’indemnisation des victimes de la covid-19 relève avant tout de la solidarité nationale.

Il s’agit d’abord de reconnaître l’engagement de tous ceux qui ont pris de nombreux risques pour assurer la prise en charge des malades et la continuité de la vie de la nation.

Il s’agit aussi de prendre en compte la souffrance insupportable vécue par ces victimes, nombreuses à dépendre aujourd’hui de leurs proches pour l’ensemble des gestes du quotidien. À la douleur physique s’ajoute souvent, pour ces personnes, une difficulté à faire reconnaître leur pathologie, dont les formes demeurent encore peu connues. La fatigue physique et intellectuelle intense, caractéristique de cette pathologie, les empêche bien souvent de poursuivre leur travail et constitue pour un grand nombre d’entre elles un risque majeur de désinsertion professionnelle, voire de désocialisation.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons, avec Christian Hutin et les députés du groupe Socialistes et apparentés, la création d’un fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19, outil aux objectifs ambitieux et aux nombreux bénéfices.

S’adressant aux laissés-pour-compte du dispositif existant, ce fonds a pour vocation d’offrir une réparation des préjudices subis par toutes les victimes présentant des séquelles temporaires ou définitives de la covid-19, qu’il s’agisse de séquelles lourdes résultant de formes graves de la maladie ou de symptômes persistants caractéristiques du covid long. La réparation que nous envisageons s’adresse aussi aux ayants droit des personnes malheureusement décédées des suites de la maladie ; nous ne les avons pas oubliées. Nous proposons la mise en place d’une réparation intégrale, qui permette à la victime de vivre dans des conditions aussi proches que possible de la situation antérieure à la maladie.

Le fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19 s’inspire du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA), dont le modèle est aujourd’hui largement éprouvé. La création d’un tel fonds présente de nombreux avantages.

Elle permettrait, tout d’abord, de limiter considérablement le risque de contentieux, qui suscite inquiétudes et incertitudes pour des victimes déjà fortement éprouvées par leur maladie. Le dispositif du fonds est, par ailleurs, particulièrement protecteur : dès lors que la victime fait état d’un dommage pris en compte par le fonds, elle peut obtenir une indemnisation sans qu’il soit nécessaire pour elle de prouver une faute.

L’intérêt de la mise en place d’un fonds d’indemnisation réside aussi dans la rapidité et la simplicité de la procédure. Le fonds assure une indemnisation à titre principal, sans que la victime ait à faire valoir son droit d’indemnisation par une action en responsabilité individuelle. Le fonds est, par ailleurs, tenu de présenter une proposition de réparation dans les six mois suivant la réception de la demande.

Le mode de financement du fonds que nous proposons est particulièrement équilibré : principalement fondé sur une contribution de l’État et de la branche AT‑MP, il fait participer les employeurs et l’État, qui agissent au titre de leurs responsabilités respectives et de la solidarité nationale.

Telles sont les principales modalités de fonctionnement du fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19 que nous vous invitons à mettre en place. Le principe de la création de ce fonds recueille le soutien des organisations syndicales salariées et des associations de victimes que nous avons entendues et qui nous ont fait part de leur grande attente. Il est également soutenu par l’Académie nationale de médecine. Ne restons pas dans les incantations. Agissons vite pour ces victimes, qui comptent plus que jamais sur notre soutien et notre mobilisation !

M. Julien Borowczyk. Avec le covid, on a un antigène ; avec cette proposition de loi, on a juste une gêne. En lisant cette proposition de loi et en participant aux auditions, j’ai en effet ressenti beaucoup de gêne.

Tout d’abord, le périmètre du fonds d’indemnisation proposé est assez mal déterminé, de l’aveu même du rapporteur. Nous manquons de recul sur cette pathologie encore mal connue. Dans une première version, la proposition de loi devait s’appliquer aux seuls assurés de la branche AT-MP ; aujourd’hui, le texte concerne tous les Français.

Nous sommes également gênés par la financiarisation de la maladie, en dehors de toute préoccupation médicale, scientifique ou thérapeutique. L’attente principale des personnes auditionnées n’est pas l’argent, mais le soin et la guérison.

En outre, le mécanisme proposé se caractérise par la lenteur. Il est approprié pour les victimes de l’amiante, mais il n’est absolument pas adapté aux victimes du covid.

Comme nous l’avons entendu dans le propos liminaire du rapporteur, cette proposition de loi apparaît comme un outil polémique, politique, qui utilise la souffrance de nos concitoyens pour chercher à prouver la responsabilité de l’État, alors même que nos dirigeants ont œuvré pour le meilleur. Nous ne sommes pas ici à la hauteur de la situation.

On ressent également une certaine gêne chez le rapporteur. Le dispositif est manifestement mal adapté. Il ne comporte aucune mesure sur le volet AT-MP, auquel le rapporteur avait pourtant initialement voulu s’intéresser. Nous proposons, quant à nous, une procédure dérogatoire, rappelée hier par le ministre des solidarités et de la santé, pour la prise en charge globale de tous nos concitoyens touchés par le covid dans le cadre de leur travail. Dans son intervention liminaire, le rapporteur a, par ailleurs, très vite dévié vers la problématique du covid long, que nous traiterons dans le cadre d’une proposition de résolution déposée par les députés de la majorité présidentielle et très attendue par les associations.

« L’oubli est une gêne », écrivait Julien Green. On sent bien ce sentiment permanent de gêne qui flotte dans cette proposition de loi. Malheureusement, le texte oublie les préoccupations principales des victimes : la majorité ne peut l’envisager. Nous ne voterons donc pas cette proposition de loi.

M. Bernard Perrut. Comme vous, monsieur le rapporteur, et comme l’ensemble des députés ici présents, je considère évidemment qu’il est impératif d’accompagner les personnes atteintes des conséquences de la maladie. Il est urgent qu’un véritable programme sanitaire à la hauteur de l’épidémie de covid-19 soit mis en œuvre pour que les médecins et les scientifiques mènent une recherche sur les conséquences de cette dernière sur la santé physique et mentale des patients. Il convient d’établir une liste complète des symptômes, de la documenter et de la diffuser tant auprès des patients que des médecins. Cette première étape est essentielle car, même si ce syndrome a été reconnu par l’OMS, le nombre de malades reste encore difficile à évaluer, de même que la durée des symptômes à partir de laquelle la covid‑19 peut être qualifiée de longue.

Si je souscris au principe de la création de ce fonds d’indemnisation, elle me semble peut-être trop rapide. Vous mettez, en quelque sorte, la charrue avant les bœufs. Encore faut-il que la responsabilité de l’État vis-à-vis des victimes soit reconnue. Il est nécessaire de faire la différence entre la responsabilité politique d’un gouvernement et la responsabilité juridique d’un État. Pour que ce fonds ait véritablement du sens, il faudrait que les éventuelles fautes commises soient reconnues, dans le cadre d’une procédure judiciaire. Si la responsabilité de l’État, des employeurs ou d’autres personnes devait être établie, il pourrait alors être envisagé de créer ce fonds d’indemnisation des victimes.

Je souhaite, pour ma part, que le statut des malades soit d’ores et déjà reconnu, que la population et les professionnels de santé soient informés des symptômes de cette pathologie et que les patients souffrant de covid long fassent l’objet d’une prise en charge adaptée, avec un réel parcours de soins, en coordination avec toutes les associations de malades et l’assurance maladie. Je le répète, il est également nécessaire d’amplifier la recherche sur les formes persistantes de covid-19 : c’est, à mon sens, un prérequis indispensable, que nous devons garantir aux malades.

Il est donc beaucoup trop tôt pour discuter aujourd’hui de la création d’un fonds d’indemnisation, alors qu’aucune responsabilité n’a encore été établie.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Le groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et démocrates apparentés considère cette initiative comme inopportune, sur le fond comme sur la forme.

Sur la forme, d’abord, l’exposé des motifs de la proposition de loi indique que la création de ce fonds vise à « reconnaître les responsabilités de l’État dans la crise sanitaire actuelle ». Permettez-nous de nous insurger contre une telle intention. Comme tous les pays du monde, la France a dû faire face à la crise. Certes, notre réponse a souffert de certaines faiblesses, qui s’expliquent par la soudaineté de l’épidémie, mais elles ont été corrigées, si bien que notre pays est désormais l’un des mieux armés pour protéger sa population. Nous ne pouvons laisser dire et même concevoir que la responsabilité d’une pandémie et de ses conséquences incombe à l’État. La nature est belle, mais elle n’est pas toujours gentille ! Ce genre de déclaration est au mieux démagogique, au pire dangereuse.

Sur le fond, vous proposez de créer un fonds d’indemnisation pour une maladie dont les formes ne cessent d’évoluer et dont les connaissances ne sont pas encore consolidées scientifiquement. Vous me faites penser aux huissiers ou aux agents d’assurance surgissant au milieu d’un sinistre pour faire des promesses aux victimes. Si la réponse scientifique à la pandémie a été rapide et efficace – des vaccins ont déjà été approuvés –, il faut garder à l’esprit que la médecine a besoin de temps pour constater les possibles séquelles et conséquences du covid avant de formuler des conclusions définitives.

Nous sommes évidemment favorables à une réflexion sur la reconnaissance concrète de ce que l’on appelle communément les covid longs. La Haute Autorité de santé (HAS) devrait d’ailleurs publier prochainement des recommandations quant à la prise en charge des personnes souffrant de troubles persistants de la covid‑19. Par ailleurs, M. Borowczyk a rappelé que notre assemblée serait amenée à se prononcer, la semaine prochaine, sur une proposition de résolution visant à reconnaître et prendre en charge les complications à long terme de la covid-19, par laquelle nous inviterons le Gouvernement à renforcer la recherche sur ces complications de long terme et à reconnaître comme maladies professionnelles les infections causées par les formes graves de l’infection. Il s’agira d’une étape importante avant d’étendre, à terme, les dispositifs AT-MP à un panel plus large de la population. C’est, selon nous, l’option la plus appropriée.

Pour l’ensemble de ces raisons, notre groupe s’opposera à cette proposition de loi.

Mme Gisèle Biémouret. Cette proposition de loi est nécessaire à plusieurs égards.

D’abord, pour reconnaître la responsabilité indéniable de l’État vis-à-vis des victimes de la covid-19. Je pense, bien sûr, aux conséquences de la pénurie de masques ; je rappelle à ce sujet qu’il avait été délibérément décidé, en 2018, de ne pas renouveler le stock de masques chirurgicaux dont la quasi-totalité était arrivée à péremption.

Ensuite, pour concrétiser la promesse d’une indemnisation des victimes au nom de la solidarité nationale. Le dispositif de reconnaissance de la covid‑19 comme maladie professionnelle actuellement en vigueur est défaillant. Il ne s’adresse qu’à une partie infime de la population, excluant de fait la grande majorité des travailleurs ayant contribué, en première ou en deuxième ligne, à la continuité de la vie de la nation durant la crise. Il ne permet pas non plus de prendre en compte la diversité des formes graves de la maladie, notamment les covid longs, qui se caractérisent par des symptômes durables et parfois handicapants, voire invalidants, et qui peuvent empêcher une reprise d’activité ou, tout simplement, un retour à la vie normale.

Nous avons donc besoin de cette proposition de loi, qui prévoit la création d’un fonds d’indemnisation destiné à l’ensemble des victimes graves de la covid-19 et à leurs ayants droit. Notre rapporteur vous a déjà exposé les raisons pour lesquelles ce nouveau système serait plus simple et, surtout, plus juste. À travers ce texte, notre groupe propose un dispositif clefs en main, crédible et opérationnel, permettant de répondre à l’impératif de solidarité nationale.

Je vous invite à comparer notre démarche avec celle de la majorité, qui prévoit, pour la veille de l’examen de notre proposition de loi en séance publique, la discussion d’une proposition de résolution n’ayant aucune valeur contraignante, invitant simplement le Gouvernement à se pencher sur la question des symptômes durables et de la reconnaissance de la covid-19 comme maladie professionnelle. Il est bien trop tard pour ce type de démarche ! Nous devons désormais agir rapidement pour toutes les victimes et leurs proches, qui comptent sur le soutien des représentants de la nation. Passons donc enfin des paroles aux actes, des promesses aux avancées concrètes, en adoptant cette proposition de loi qui permettra la réparation de l’ensemble des préjudices subis par toutes les victimes graves de cette terrible maladie.

M. Paul Christophe. Le covid long, qui est une forme de la maladie caractérisée par des symptômes polymorphes, résurgents et persistants, affecte considérablement la vie des patients, qui en voient leur quotidien bouleversé. L’anxiété majeure que ressentent ceux qui ont vécu la maladie témoigne de la gravité de ses effets, nécessitant une prise en charge circonstanciée, à la hauteur du ressenti psychologique et physique de la pathologie.

À cela s’ajoute l’injustice liée au lieu de contamination. Nombre de nos concitoyens n’ont pas eu d’autre choix que de continuer leur activité professionnelle malgré la situation sanitaire. Ce sont les commerçants, les transporteurs et les agriculteurs, qui ont œuvré pour la continuité des besoins vitaux de notre pays. Le 21 avril 2020, lors des questions au Gouvernement, j’avais interpellé le ministre des solidarités et de la santé afin que soit établie, à l’avenir, une protection financière et juridique complète et adéquate pour ces professionnels qui ont participé à l’effort collectif et national.

L’exemple du FIVA a évidemment beaucoup de sens pour moi. Aux côtés de mon collègue et voisin dunkerquois Christian Hutin, je peux en mesurer toute l’utilité au contact des victimes de l’amiante, ou plutôt de leurs veuves.

Pour autant, à ce stade de la discussion, notre groupe estime qu’il est un peu prématuré de mettre en place ce dispositif d’indemnisation, tant l’ampleur de la maladie nous est encore inconnue. Comme vous l’avez mentionné dans votre rapport, les données sur les conséquences psychiatriques de la covid-19 sont encore rares ; or elles peuvent être déterminantes pour évaluer l’impact global de cette pathologie. Si nous souhaitons construire un dispositif efficace et réparateur pour ces malades, nous devons posséder des données complètes et suffisantes sur les symptômes au long cours, que seul le temps nous fournira. Il y va de l’efficacité du dispositif envisagé. En tant que rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour la branche AT-MP, vous comprenez aussi l’attention que je porte à ce sujet.

Le groupe Agir ensemble comprend l’ambition de votre proposition, mais il est réservé, à ce stade de nos débats, quant au calendrier choisi et au moyen utilisé.

Mme Caroline Fiat. Je remercie le rapporteur et son groupe d’avoir inscrit une proposition de loi sur ce sujet à l’ordre du jour de sa niche parlementaire – je sais que vous n’en avez pas choisi la date.

J’entends que certains collègues sont choqués par l’expression « responsabilité de l’État ». Au mois de mars, des employés des libres-services et des soignants ont été envoyés au travail sans masque, sans blouse et sans gants. À l’époque, on disait que les masques n’étaient pas utiles. Des personnes sont tombées malades, et certaines souffrent désormais d’un covid long. Pour être reconnu comme atteint d’une maladie professionnelle, il faut être passé par la case « réanimation » et avoir eu de gros problèmes respiratoires ; or certains patients atteints d’un covid long n’ont pas connu ces situations.

Je vous remercie, monsieur le rapporteur, d’avoir rappelé qu’un fonds d’indemnisation présentait l’avantage de la rapidité et de la simplicité. M. Borowczyk se dit gêné par la financiarisation de la maladie. Lorsque vous êtes atteint d’une pathologie longue et que vous ne percevez que 50 % de votre salaire normal, ce n’est pas simple ! Vous n’avez pas choisi d’être malade, et vous n’avez pas choisi non plus d’aller travailler sans les outils nécessaires pour vous protéger. Alors oui, j’assume cette financiarisation de la maladie, et je remercie le groupe Socialistes et apparentés de nous proposer ce dispositif utile, qui permettra aux victimes d’avoir au moins de quoi remplir leur frigo et de vivre dignement. Je suis désolée que cela vous gêne.

M. Pierre Dharréville. Je remercie Régis Juanico du travail qu’il a effectué. Je connais son attachement à la reconnaissance des maladies et à leur prise en charge pleine et entière.

Il s’agit là d’un sujet majeur. Nous voyons bien l’ampleur que prend cette maladie dans notre société. Nous nous rappelons aussi les difficultés que nous avons eues à l’appréhender. Des femmes et des hommes ont été mis à contribution pendant la période de confinement : ils ont dû faire face, sans tout connaître de cette maladie, et aller au travail pour répondre aux besoins fondamentaux de notre pays. C’est le cas des personnels soignants, mais ils ne sont pas les seuls.

Les dispositions prises par le Gouvernement pour que cette pathologie puisse être reconnue comme maladie professionnelle sont nettement insuffisantes. S’ajoutent à ces difficultés les symptômes de la maladie persistant dans la durée. Nous devons trouver des solutions. Celle qui nous est proposée ici permet de partager la responsabilité entre l’État et les entrepreneurs, qui financeront conjointement le fonds d’indemnisation. Compte tenu de la gestion de la crise, cela peut tout à fait se défendre. Nous regardons donc cette proposition de loi avec intérêt.

M. le rapporteur. Je remercie Caroline Fiat et Pierre Dharréville pour leurs commentaires constructifs. Je salue aussi Paul Christophe pour la modération de ses propos. J’ai entendu ses remarques sur le caractère prématuré du dispositif, mais nous y viendrons.

La majorité est peut-être gênée, monsieur Borowczyk, mais moi, je ne le suis pas du tout. Je n’ai jamais réécrit ma proposition de loi : l’appel à la solidarité nationale et au financement de l’État figurait déjà dans la première version du texte. En revanche, vous avez écrit trois fois votre proposition de résolution ! Vous en avez déposé une première le 1er décembre, puis une autre le 22 décembre ; dans la troisième, déposée en janvier, vous avez opportunément ajouté un volet relatif à l’indemnisation. L’argent n’est peut-être pas le problème, mais, même quand ils déposent une proposition de résolution, qui est une pure déclaration d’intention, les députés de la majorité commencent à penser qu’il faudra un jour indemniser les victimes. L’argent n’est pas le problème, sauf pour tous ceux qui ne sont plus capables de travailler ! Il faut bien mettre en place des mécanismes de compensation.

Certes, les malades bénéficient de la prise en charge à 100 % des soins, qui est très importante. Mais le caractère d’affection de longue durée n’est pas reconnu à tous les malades : c’est un problème. Le covid long se caractérise par de vrais handicaps, par des symptômes invalidants et persistants. Les personnes qui en sont atteintes ne peuvent pas retourner à une vie normale, ni reprendre leur vie professionnelle – quand elles retournent au travail après un premier arrêt, elles sont obligées de s’arrêter à nouveau. La recherche fait de vrais progrès ; elle pourra nous aider à comprendre.

Bernard Perrut, qui a tenu, comme à son habitude, des propos très modérés, a évoqué la nécessité de disposer de données chiffrées. Vous le savez, le bilan que nous pouvons dresser aujourd’hui n’est que provisoire. Malheureusement, nous venons de passer la barre des 80 000 décès dans notre pays. Plus de 30 000 de ces décès sont survenus en EHPAD. Nous en sommes à environ 3,3 millions de cas déclarés de covid-19 depuis le début de la pandémie. Quelque 300 000 personnes ont été hospitalisées. Lors de la première vague, beaucoup de patients hospitalisés ont dû être admis en réanimation, et parfois intubés, avec des séquelles graves qu’il est tout à fait possible de quantifier – je les ai décrites tout à l’heure. Lors de la deuxième vague, moins de personnes ont été intubées, du fait du recours croissant à l’oxygénothérapie et aux traitements à base de corticoïdes : il y a eu moins d’interventions invasives, ce qui explique peut-être le moins grand nombre de séquelles graves. Mais certains patients sont confrontés au covid long et à ses nombreux symptômes polymorphes. Cette situation concernerait environ 10 % des personnes ayant été touchées par la covid, même dans une forme moins grave. Dans certains pays, on parle plutôt d’une fourchette de 20 à 30 % – c’est en tout cas ce que laissent à penser des statistiques qui nous remontent d’Amérique du Nord. Quoi qu’il en soit, plusieurs centaines de milliers de malades pourraient être concernés par ces formes durables, longues, de la covid-19. Nous devons nous y préparer dès maintenant.

La question de la responsabilité de l’État n’est pas du tout l’objet de la proposition de loi. Des procédures pénales ont été engagées devant des tribunaux, notamment devant la Cour de justice de la République. Ces procédures, très complexes, mettront beaucoup de temps – de nombreuses années – à aboutir. Ce n’est pas notre affaire. Par ailleurs, les commissions d’enquête du Sénat et de l’Assemblée nationale ont effectué un travail politique remarquable. Dans l’exposé des motifs de notre proposition de loi, nous n’avons fait que citer quelques extraits des rapports de ces commissions ; il ne s’agissait pas de pointer la responsabilité de l’État. Nous voulons faire appel à la solidarité nationale : c’est pourquoi nous prévoyons un financement provenant très majoritairement de l’État et accessoirement de la branche AT-MP.

L’indemnisation ne s’oppose pas aux soins ; elle leur est complémentaire. Elle sera nécessaire – vous le verrez dans quelques mois, lorsque les victimes témoigneront de leur difficulté à reprendre une vie normale et qu’elles se mobiliseront pour obtenir une indemnisation. Il faudra bien, alors, que nous nous penchions sur le sujet.

II.   examen des articles

Article 1er : Réparation des préjudices rencontrés par les victimes de la covid-19

La commission examine l’amendement de suppression AS22 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. Le périmètre de l’indemnisation proposée pose problème, d’autant que nous ne sommes pas capables d’évaluer l’imputabilité du préjudice. En cela, l’adossement du fonds d’indemnisation au FIVA est assez surprenant. L’indemnisation globale des séquelles liées à un virus serait inédite, d’autant que nous avons affaire à un virus très contagieux disséminé sur toute la planète.

Il est parfois difficile de savoir précisément de quoi l’on parle. Dans le cadre de la branche AT-MP, les choses sont claires : la reconnaissance comme maladie professionnelle est systématique dès lors que le patient a subi une oxygénothérapie. Or, jusqu’à preuve du contraire, toute personne hospitalisée a bénéficié de ce traitement.

S’agissant de la question du covid long, je viens de relire notre proposition de résolution, car le rapporteur avait semé le doute dans mon esprit : à aucun moment il n’est question d’indemnisation. Au contraire, nous parlons de reconnaissance. Mais avant la reconnaissance, il faut la connaissance ; or de nombreux députés ont justement souligné que nous manquions d’informations à ce stade. C’est pourquoi nous privilégions le soin, une notion qui n’apparaît nulle part dans cette proposition de loi. Avant de nous engager dans la voie d’une quelconque financiarisation, nous préférons soigner les gens et les guérir.

M. le rapporteur. Il n’est pas question d’un adossement au FIVA : nous souhaitons créer un nouveau fonds d’indemnisation sur le modèle du FIVA. N’essayez pas d’embrouiller les choses !

Si nous avons un certain nombre de points de désaccord, nous avons aussi quelques points d’accord. Nous partageons la volonté de la majorité d’assurer aux malades, y compris aux patients atteints d’un covid long, une prise en charge et un accompagnement adaptés. Les connaissances progressent assez vite. Nous avons d’ailleurs reçu en exclusivité les résultats d’une étude « Constances » menée par des médecins spécialistes français sur une cohorte de quelque 43 000 personnes : cette étude montre notamment quels sont les symptômes qui réapparaissent de façon persistante chez les malades atteints d’un covid long. L’OMS s’est exprimée hier, et la HAS va prochainement formuler des recommandations sur ce sujet.

En revanche, la création d’un fonds d’indemnisation me paraît réellement utile et nécessaire. De nombreux patients sont incapables de reprendre leur activité professionnelle, parfois plusieurs mois après avoir contracté la maladie. Certains sont arrivés en fin de droits et risquent de voir s’ajouter à la souffrance psychique ou psychologique une grande difficulté financière. En outre, les symptômes persistants du covid long étaient encore difficiles à identifier il y a quelque temps : aussi un grand nombre de ces patients ne bénéficient-ils pas de la reconnaissance de leur maladie comme affection de longue durée. S’il faut évidemment approfondir nos connaissances sur cette pathologie, via la recherche, comme vous le suggérez, il faut également répondre à l’urgence de la situation dans laquelle se trouvent ces personnes qui éprouvent énormément de difficultés à reprendre une vie normale, sur le plan personnel, familial ou professionnel. Les organisations syndicales que nous avons auditionnées ont souligné le risque majeur de désinsertion professionnelle ; elles ont fait état de plusieurs cas de licenciement pour inaptitude parmi les salariés souffrant de ces symptômes invalidants.

La proposition de résolution qui sera discutée en séance publique le 17 février prochain nous paraît tout à fait insuffisante au regard des enjeux. Le fonds d’indemnisation que nous proposons pour l’ensemble des victimes de la covid va bien au-delà de la reconnaissance comme maladie professionnelle, qui ne suffit pas pour répondre à l’ensemble des situations, car elle ne permet pas de prendre en compte les innombrables victimes collatérales ou environnementales. Par ailleurs, je l’ai dit tout à l’heure, l’indemnisation au titre de la maladie professionnelle est forfaitaire, donc insuffisante. Pour notre part, nous proposons une réparation intégrale. Enfin, permettez-moi de souligner qu’une résolution adoptée au titre de l’article 34-1 de la Constitution est un acte par lequel l’Assemblée nationale émet un simple avis sur une question déterminée : il ne s’agit en rien d’un outil législatif contraignant. Il faut passer aux actes. Notre proposition de loi aura, si elle est adoptée, des conséquences immédiates.

Mme Caroline Fiat. Il serait dommage de supprimer l’article 1er.

Je suis d’accord avec M. Borowczyk – tout arrive –, il faut penser aux soins et trouver des solutions pour ces personnes, qui veulent guérir. Mais les médecins ici présents savent que, souvent, pour commencer à guérir, il faut être reconnu. C’est ce que propose l’article 1er. Reconnaissons que ces personnes sont victimes d’une maladie longue et accordons-leur tous les aménagements nécessaires. Certaines ne sont plus autonomes et doivent solliciter les services d’une aide à domicile sans bénéficier pour autant d’une aide financière. Pourquoi attendre que ces malades soient soignés, voire guéris, pour leur ouvrir ce droit à l’indemnisation ? Nous proposons de leur venir en aide immédiatement.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 1er est supprimé et l’amendement AS1 du rapporteur tombe.

Article 2 : Création du fonds d’indemnisation des victimes de la covid-19

La commission examine l’amendement de suppression AS23 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. Il faudrait apporter une réponse rapide, immédiate, instantanée. Précisément, de ce point de vue, cette proposition de loi m’inquiète : entre la création d’un établissement public, l’avis du Conseil d’État sur son fonctionnement, l’installation d’un conseil d’administration et la procédure de la navette parlementaire, il s’écoulera beaucoup de temps avant que la proposition de loi soit adoptée définitivement.

Une fois de plus, ce qui nous intéresse, c’est la connaissance de la maladie et la reconnaissance des malades – c’est déjà le cas pour certains d’entre eux, en particulier pour les soignants. Ces malades veulent guérir. Dans l’exposé des motifs de notre proposition de résolution, nous citons d’ailleurs Voltaire : « Lespérance de guérir est déjà la moitié de la guérison. » L’essentiel, aujourd’hui, est de prendre en charge les patients, en particulier s’ils sont atteints d’un covid long, en mettant l’accent sur la recherche, le soin et la reconnaissance. Allons-y, et vite ! D’ailleurs, comme l’a indiqué le rapporteur, différentes structures telles que la HAS proposeront, dans les prochains jours, des parcours de soins qui trouveront un écho dans notre proposition de résolution.

M. le rapporteur. Je suis tout à fait d’accord : il faut aller vite. C’est pourquoi je propose que notre proposition de loi soit adoptée en séance publique la semaine prochaine, afin que son parcours parlementaire soit le moins long possible.

Le dispositif du fonds d’indemnisation, en particulier celui du FIVA dont nous nous inspirons, est un modèle très utilisé depuis plusieurs années, qui a prouvé son efficacité. Il permet aussi de lutter contre la multiplication des procédures judiciaires, de proposer aux victimes un guichet unique, d’assurer un traitement homogène des demandes sur l’ensemble du territoire et de réduire les délais d’instruction. C’est peut-être la meilleure réponse que nous pouvons apporter aux victimes, même si ce n’est évidemment pas la seule – elle doit être complémentaire à la prise en charge médicale des patients.

Je suis évidemment défavorable à cet amendement de suppression.

Mme Gisèle Biémouret. En quoi l’adoption de cette proposition de loi retarderait‑elle les soins ou la recherche ? Cela n’a rien à voir !

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 2 est supprimé et l’amendement AS19 du rapporteur tombe.

Article 3 : Instruction des demandes d’indemnisation

La commission examine l’amendement de suppression AS24 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. Je souhaite évoquer le dispositif que le ministre des solidarités et de la santé a rappelé hier s’agissant de la reconnaissance des maladies professionnelles par la branche AT-MP. Le patient doit avoir subi une oxygénothérapie ; or, quand il a été hospitalisé, il a forcément reçu ce traitement. Cette procédure dérogatoire, instituée en septembre 2020, ne concerne pas seulement les soignants mais toutes les personnes qui travaillent dans le milieu des soins, que ce soit dans le secteur public, privé ou libéral. Le champ des bénéficiaires est très large : il s’étend notamment aux personnels administratifs et à ceux qui travaillent dans des structures pour personnes âgées ou handicapées.

Pour les personnes ne travaillant dans ce domaine, un comité régional unique a été mis en place – si cette instance est unique, c’est pour garantir un traitement équitable des demandes. Vingt-huit praticiens hospitaliers universitaires ont été chargés de ce dossier ; ils se réunissent huit fois par semaine et visent un traitement des demandes en trois mois.

M. le rapporteur nous disait tout à l’heure que, selon les syndicats, environ 100 reconnaissances comme maladie professionnelle avaient été prononcées courant janvier. Au dernier pointage, qui date d’il y a quelques jours, nous en sommes à 220 reconnaissances – 200 dans le cadre du tableau et 20 en dehors du tableau. Les bénéficiaires sont des pompiers, des chauffeurs routiers, des agents d’aéroport, des agents de sécurité. On voit bien que le système fonctionne et que nous tenons nos engagements : c’est pourquoi je demande la suppression de l’article 3.

M. le rapporteur. Je persiste à dire que le critère restrictif de l’oxygénothérapie exclut du dispositif un certain nombre de pathologies, notamment cardiaques et neurologiques, liées à la covid-19. La reconnaissance n’est pas automatique.

200 reconnaissances, c’est un chiffre relativement modeste, dix mois après le début de la pandémie. Seules quinze reconnaissances ont été prononcées au titre de la procédure complémentaire – une procédure que nous connaissons bien dans le cadre d’autres affections –, qui continue de relever du parcours du combattant. Il faudra mettre en place un système beaucoup plus fluide. Je ne sais pas si les comités régionaux uniques ont donné entière satisfaction en termes de simplification.

Mme Martine Wonner. Il est vrai que l’on constate de plus en plus souvent des tableaux de symptômes persistant bien après les premières infections – ce que l’on appelle des covid longs. Dans mon domaine de compétence, jusqu’à 18 % des personnes ayant été touchées par le covid, pas forcément très gravement sur le plan somatique, développent des tableaux psychiatriques qui posent de nombreux problèmes. Ces cas n’ont pas forcément de lien avec des problématiques de thrombose cérébrale, même si, dans certains cas, les IRM et les PET scan sont très perturbés. Il est absolument nécessaire de tenir compte de ces patients qui, pour la plupart, sont incapables de reprendre le travail. Je vous invite donc à prêter attention à toutes les formes de covid, quelles qu’elles soient, bien au-delà des formes classiques où les malades ont été hospitalisés en réanimation ou placés sous oxygénothérapie.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 3 est supprimé.

Article 4 : Moyens d’action pour assurer la réparation

La commission examine l’amendement de suppression AS25 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. La proposition de loi vise tout de même, à un moment ou un autre, à pointer la responsabilité de l’État. Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué le remarquable travail de la commission d’enquête que j’ai eu l’honneur de présider. Certaines de nos auditions ont été très éclairantes. J’ai entendu dénoncer, tout à l’heure, un problème de stock en équipements de protection individuelle : nous avons appris que ces stocks n’existaient pas vraiment à la fin de l’année 2018, puisqu’aucune commande n’avait été passée pendant de nombreuses années et que les masques existants avaient pourri dans un entrepôt laissé sans surveillance. Une doctrine énoncée en 2013 prévoyait d’imposer aux employeurs de pourvoir leurs salariés en équipements de protection. Ainsi, les aides à domicile auraient dû se voir dotées de tels équipements par les départements. Malheureusement, cette doctrine n’a pas été portée à la connaissance des employeurs et, pendant ce temps, l’État réduisait ses commandes de masques. La responsabilité est donc probablement partagée. Comme vous le disiez, c’est un temps long que celui des procédures judiciaires. C’est pourquoi il convient de supprimer l’article 4.

M. le rapporteur. Nous sommes ici en commission des affaires sociales : ne prolongeons pas les débats de la commission d’enquête ! Nous nous sommes contentés de reprendre, dans l’exposé des motifs, un certain nombre d’extraits de l’excellent rapport publié par cette commission.

Je rejoins les propos de Martine Wonner. Les professeurs Leboyer et Pelissolo nous ont alertés sur les liens entre les inflammations causées par les coronavirus et les troubles psychiatriques. La documentation scientifique sur ce sujet commence à s’étoffer depuis que sont étudiés les premiers coronavirus comme le SARS-CoV-1. Plusieurs mois après l’infection peuvent persister des symptômes d’anxiété et de dépression – les uns et les autres représentant 40 % des troubles psychiatriques observés –, des troubles post-traumatiques ou des syndromes obsessionnels. Comme nous l’a dit la professeure Leboyer, les conséquences psychiatriques de la covid-19 sont devant nous. Nous devons absolument anticiper ce problème.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 4 est supprimé et l’amendement AS18 du rapporteur tombe.

Article 5 : Modalités de l’offre d’indemnisation

La commission est saisie de l’amendement de suppression AS26 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. L’article traite de l’offre d’indemnisation. Lors des auditions, le chiffre de 16 milliards d’euros a été avancé, ce qui correspond à 35 000 ou 40 000 euros pour chacune des 300 000 ou 400 000 personnes concernées. Or il est impossible, comme l’indique le rapport, d’évaluer, faute de recul, l’impact d’une telle mesure. Certaines structures, notamment syndicales, ont, par ailleurs, fait part de leur crainte d’un saupoudrage.

Encore une fois, la question qui se pose, avant la financiarisation de la démarche, est celle de la reconnaissance AT-MP, mais aussi du soin, de la statistique et de la connaissance.

M. le rapporteur. Je me suis bien gardé de donner des chiffres, tant au cours des auditions que dans le rapport. Je n’ai donné que ceux du FIVA, pour avoir un ordre de grandeur – environ 20 000 victimes indemnisées chaque année par un fonds doté de 500 millions d’euros à 1 milliard d’euros –, même si l’amiante et la covid-19 ne sont pas comparables.

Je me bats depuis dix ans au sein de cette assemblée pour que nos propositions de loi puissent bénéficier d’études d’impact. J’ai même déposé un rapport avec Laure de La Raudière sur la fabrique de la loi. Pour l’instant, cet espoir n’est pas encore devenu réalité. Le jour où cela arrivera, je saurai m’en servir !

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 5 est supprimé.

Article 6 : Droits d’actions en justice contre le fonds

La commission est saisie de l’amendement de suppression AS27 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. L’article 6 traite du droit d’action à l’encontre du fonds, alors même que l’on manque de connaissances sur la pathologie.

Contre l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 6 est supprimé.

Article 7 : Règles relatives aux délais de prescription des demandes d’indemnisation

La commission est saisie de l’amendement de suppression AS28 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. Si la prescription de la demande d’indemnisation peut s’entendre dans le cadre du FIVA, puisque l’on parle de mésothéliomes et de cancers de la plèvre qui se déclarent à distance, elle paraît surprenante dans un contexte d’urgence.

Contre l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 7 est supprimé.

Article 8 : Modalités de financement et dépenses du fonds

La commission est saisie de l’amendement de suppression AS29 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. L’article 8 ne proposant pas beaucoup de modes de financement, je propose de le supprimer.

Contre l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 8 est supprimé.

Article 9 : Application du dispositif en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française

La commission est saisie de l’amendement de suppression AS30 de M. Julien Borowczyk.

M. Julien Borowczyk. L’article 9 prévoit l’application du dispositif en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie. En cette période de grand froid, notre proposition de résolution nous semble offrir beaucoup plus de réconfort en axant notre action sur la recherche, le parcours de soins et une reconnaissance élargie en AT-MP. J’espère, monsieur le rapporteur, que vous la voterez mercredi prochain.

M. le rapporteur. Je laisse planer le suspense sur le sens de notre vote jusqu’à mercredi après-midi... Quoi qu’il en soit, je ne crois pas qu’une proposition de résolution ait une valeur législative ou réglementaire supérieure à une proposition de loi, aussi vous invité‑je à voter celle-ci.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 9 est supprimé.

*

*     *

L’ensemble des articles de la proposition de loi ayant été supprimés, le texte est considéré comme rejeté par la commission.

En conséquence, aux termes de l’article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique aura lieu sur le texte initial de cette proposition de loi.

 


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   annexe :
Liste des personnes auditionnées par le rapporteur

(Par ordre chronologique)

        Audition commune de représentants syndicaux :

-    Force ouvrière (FO)  M. Serge Legagnoa, secrétaire confédéral, responsable du secteur Protection sociale collective, et M. Ronald Schouller, vice-président de la commission ATMP

-    Confédération française de l’encadrement  Confédération générale des cadres (CFE-CGC) M. Christian Expert et Mme Emérance de Baudoin

       Audition commune de représentants syndicaux :

-    Confédération française démocratique du travail (CFDT) Mme Catherine Pinchaut, secrétaire nationale, et M. Pierre-Gael Loreal, secrétaire confédéral

-    Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) M. Frédéric Fischbach, M. Pierre Yves Monteleon et M. Sébastien Garoutte

-    Confédération générale des travailleurs (CGT)  M. Olivier Perrot, membre de la Fédération des travailleurs de la métallurgie, et M. Serge Journoud, membre du collectif confédéral Santé au travail

       Audition commune de représentants d’organisations patronales :

  Mouvement des entreprises de France (MEDEF) (*)  M. Sébastien Velez, directeur de la protection sociale, Mme Nathalie Buet, directrice adjointe de la protection sociale, et M. Adrien Chouguiat, directeur de mission affaires publiques

 Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) (*) M. Florian Faure, directeur des affaires sociales et de la formation, M. Philippe Chognard, responsable du pôle conditions de travail, Dr Pierre Thillaud, représentant titulaire de la CPME au conseil d’orientation des conditions de travail, et M. Adrien Dufour, chargé de mission Affaires publiques et organisation

       Audition commune de médecins spécialistes du covid-long :

 Pr Dominique Salmon-Céron, infectiologue à l’hôpital de l’Hôtel-Dieu

 Dr Olivier Robineau, chef de clinique, infectiologue au service universitaire de maladies infectieuses et du voyageur du centre hospitalier de Tourcoing et coordinateur de la cohorte Cocolate

 Dr François Goehringer, infectiologue au centre hospitalier régional universitaire de Nancy et membre du comité de pilotage de la cohorte Cocolate

       Association nationale des victimes de l’amiante (ANDEVA)  M. Jacques Faugeron, président, M. François Desriaux, vice-président, et M. Alain Bobbio, secrétaire national

       Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH)  Mme Nadine Herrero, présidente, M. Alain Prunier, vice‑président, M. Philippe Karim Felissi, conseiller national, et Mme Sophie Crabette, chargée de l’action revendicative

       #AprèsJ20  Association Covid Long France  Mme Pauline Oustric, présidente

       Association Coronavictimes – M. Michel Parigot, président

       Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) – M. Dominique Corona, secrétaire général adjoint

       Union pour la gestion des crises sanitaires (UPGCS)  Mme Annie Notelet, présidente, et Mme Nathalie Renaud, membre du conseil d’administration et déléguée aux affaires covid-long

       Groupe Technologia – M. Jean-Claude Delgènes, président et fondateur

       Audition commune :

  Pr Marion Leboyer, psychiatre, directeur médical du DMU IMPACT, hôpital Albert-Chenevier (psychiatrie & addictologie du Grand-Paris-Sud), responsable du FHU ADAPT (Fédération hospitalo-universitaire de médecine de précision en psychiatrie et addictologie), directeur du laboratoire INSERM de psychiatrie translationnelle, directrice de la fondation FondaMental

  Pr Antoine Pelissolo, psychiatre, professeur des universités-praticien hospitalier (Université Paris-Est Créteil), chef du service de psychiatrie sectorisée (CHU Henri-Mondor, hôpital Albert-Chenevier), secrétaire général du collectif Initiative Psychiatrie

       Assistance publique  Hôpitaux de Paris (AP-HP)  Pr François Rannou, professeur des universités, chef du service de rééducation, spécialité : rééducation et réadaptation de l’appareil locomoteur et des pathologies du rachis

 

 

 

 

 

(*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


([1]) Point épidémiologique hebdomadaire de Santé publique France, 4 février 2020.

([2])  Établissements d’hébergement pour personnes âgées (EHPAD et autres établissements-EHPA, résidences autonomie, résidences seniors.

([3]) Idem.

([4]) Institut national de la statistique et des études économiques : nombre de décès quotidiens, France, régions et départements, 6 novembre 2020.

([5]) Point épidémiologique hebdomadaire de Santé publique France, 28 janvier 2020.

([6]) Idem.

([7]) Les séquelles de la covid-19, Avis de l’Académie nationale de médecine, 15 juillet 2020.

([8]) Journal of Infection, « Clinical, virological and imaging profile in patients with prolonged forms of COVID‑19 : A cross-sectional study », Dominique Salmon-Ceron et al., 4 décembre 2020.

([9]) Annales médico-psychologiques, « Les conséquences psychiatriques du covid-19 sont devant nous... », Marion Leboyer et Antoine Pelissolo, 17 septembre 2020.

([10]) « A Nationwide Survey of Psychological Distress among Italian People during the COVID-19 Pandemic : Immediate Psychological Responses and Associated Factors », Cristina Mazza, Eleonora Ricci, Silvia Biondi, Marco Colasanti, Stefano Ferracuti, Christian Napoli et Paolo Roma.

([11]) « Bidirectional associations between COVID-19 and psychiatric disorder : retrospective cohort studies of 62 354 COVID-19 cases in the USA », novembre 2020.

([12]) « 6-month consequences of COVID-19 in patients discharged from hospital : a cohort study », Chaolin Huang, MD, Lixue Huang, Yeming Wang, Xia Li, Lili Ren, Xiaoying Gu, PhD et al, 8 janvier 2021.

([13]) « COVID-19 Symptoms : Longitudinal Evolution and Persistence in Outpatient Settings », Mayssam Nehme, Olivia Braillard, Gabriel Alcoba,, Sigiriya Aebischer Perone, Delphine Courvoisier, François Chappuis, Idris Guessous for the COVICARE TEAM, 8 décembre 2020.

([14]) Décret n° 2020-1131 du 14 septembre 2020 relatif à la reconnaissance en maladies professionnelles des pathologies liées à une infection au SARS-CoV2.

([15]) Tableau destiné aux assurés du régime général et aux assurés des régimes spéciaux de sécurité sociale auxquels les tableaux de maladies professionnelles sont applicables, organismes de sécurité sociale, employeurs publics.

([16]) Un décret publié le 5 avril a en effet permis la réquisition des laboratoires autres que de biologie médicale et leurs capacités.

([17]) Décret n° 2020-1131 du 14 septembre 2020 relatif à la reconnaissance en maladies professionnelles des pathologies liées à une infection au SARS-CoV2.

([18]) Pour les fonctionnaires, conformément aux dispositions de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 et du titre VI bis du décret du 14 mars 1986, la reconnaissance en maladie professionnelle des pathologies liées à une infection au SARS-CoV2 doit se faire par référence au tableau n° 100 précité.

([19]) Dont la troisième loi de finances rectificative adoptée en 2020 prévoit qu’ils soient indemnisés selon les modalités de l’assurance volontaire accidents du travail-maladies professionnelles, y compris pour ceux n’ayant pas adhéré à l’assurance volontaire par le passé.

([20]) Cour de cassation, chambre sociale, 25 novembre 2015, arrêt n°14-24.444 Air France.

([21]) Décret n°2001-963 du 23 octobre 2001 relatif au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante institué par l’article 53 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001.

([22]) Article 70 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

([23]) Loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation.

([24]) L’article L. 1111-7 prévoit les modalités selon lesquelles une personne a accès aux informations concernant sa santé, lorsque celles-ci sont détenues par des professionnels et établissements de santé.

([25]) http://videos.assemblee-nationale.fr/video.10318467_6023d6b68e054.commission-des-affaires-sociales--renforcer-le-droit-a-l-avortement---creation-d-une-aide-individu-10-fevrier-2021